UFR Droit & Science politique
Le refus de rapatriement des ressortissants
européens mineurs détenus en Syrie et en Irak à
la lumière des obligations internationales des
États
Esther SEBILLOTTE
Master 2 Droits de l’Homme - Université Paris Nanterre
Année universitaire 2018-2019
Mémoire de stage réalisé pour l’obtention du master 2 Droits de l’Homme de l’Université Paris
Nanterre
Sous la direction de :
Monsieur SIZAIRE Vincent, magistrat et maître de conférences associé à l’Université Paris
Nanterre
Membres du jury :
Monsieur SIZAIRE Vincent, magistrat et maître de conférences associé à l’Université Paris
Nanterre
Madame GIRARD Charlotte, maître de conférences HDR en droit public à l’Université Paris
Nanterre
L’Université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux
opinions émises dans le mémoire ; ces opinions doivent être considérées
comme propres à leur auteur.
Remerciements
En tout premier lieu, je tiens à remercier Monsieur Vincent Sizaire pour avoir accepté de diriger ce
mémoire. Ses précieux conseils ont contribué à alimenter ma réflexion.
Mes remerciements vont également à Monsieur Matthieu Birker, Conseiller de la Commissaire aux
droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, qui m’a accueillie et intégrée pendant mon stage. Il m’a
fait découvrir ce sujet passionnant et par sa confiance et sa patience m’a permis d’approfondir mes
recherches avec bonheur.
Je souhaite remercier l’ensemble de l’équipe pédagogique du master Droits de l’Homme de
l’université Paris Nanterre, pour cette année riche en apprentissages.
Merci à mes amis stagiaires du Conseil de l’Europe qui m’ont accompagnée lors de cette expérience
enrichissante. Tout particulièrement je remercie Clara et Manon pour leur support inestimable.
Je suis également reconnaissante envers toutes les personnes, trop nombreuses pour les citer, que
j’ai rencontrées et qui ont pris le temps de discuter avec enthousiasme de mon sujet. Elles m’ont
aidé à ouvrir les yeux sur ses multiples facettes et à enrichir mes interrogations.
Enfin mes remerciements s’adressent à ma famille et à mes amis qui m’ont écoutée et conseillée
durant ces mois d’été, particulièrement à mes sœurs et ma mère pour leur soigneuse relecture.
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Sommaire
REMERCIEMENTS ........................................................................................................................ 1
SOMMAIRE ...................................................................................................................................... 2
TABLE DES ABRÉVIATIONS ....................................................................................................... 3
INTRODUCTION ............................................................................................................................. 4
TITRE I. LE DROIT D’ASSISTANCE DES ÉTATS, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE
RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL
DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 12
CHAPITRE 1. UNE
INGÉRENCE LÉGITIMÉE PAR LES RÉSOLUTIONS DE L’ORGANISATION DES
NATIONS-UNIES ............................................................................................................................. 12
CHAPITRE 2. LE
DEVOIR DE PROTECTION DES RESSORTISSANTS MINEURS LORS DE LA VIOLATION
DE LEURS DROITS FONDAMENTAUX
............................................................................................... 25
CONCLUSION TITRE 1 ............................................................................................................... 40
TITRE II LA COMPLÉMENTARITÉ DES DROITS DE L’HOMME ET DU DROIT
INTERNATIONAL HUMANITAIRE, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE
RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL
DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 41
CHAPITRE 1. L’INDIVIDU,
SUJET DE DROIT DE LA
CONVENTION
EUROPÉENNE DES DROITS DE
L’HOMME ....................................................................................................................................... 42
CHAPITRE 2. LE
DEVOIR DE PROTECTION DES ENFANTS VICTIMES DE CONFLIT ARMÉ,
L’APPLICATION DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE ET DU DROIT DES DROITS DE L’HOMME
.
60
CONCLUSION TITRE 2 ................................................................................................................ 81
CONCLUSION FINALE ............................................................................................................... 82
ANNEXE .......................................................................................................................................... 85
BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................................... 86
TABLE DES MATIÈRES ............................................................................................................. 109
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Table des abréviations
C.A.I. : Conflit armé international
C.A.N.I. : Conflit armé non international
C.C.T. : Convention contre la torture et autres traitements inhumains et dégradants
C.E.S.D.H. : Convention européenne des droits de l’Homme
C.E.D.H. : Cour européenne des droits de l’Homme
C.I.D.E. : Convention internationale relative aux droits de l’enfant
C.I.J. : Cour internationale de justice
C.I.C.R. : Comité international de la Croix-Rouge
C.P.J.I. : Cour permanente de justice internationale
D.A.E.S.H. : (acronyme arabe de l’« État islamique ») « Dawlat islamiya fi « iraq wa sham » »1 .
D.H. : Droits de l’Homme
D.U.D.H. : Déclaration universelle des droits de l’Homme
E.I. : « État islamique »
I.S.S.G. : Groupe de soutien international de la Syrie
O.N.G. : Organisation non gouvernementale
O.N.U. : Organisation des Nations-unies
O.I.T. : Organisation internationale du travail
O.T.A.N. : Organisation du traité de l'Atlantique nord
P.I.D.C.P. : Pacte international sur les droits civils et politiques
U.E. : Union européenne
Considérant la variation dans l’écriture de certaines expressions consacrées, j’ai décidé de suivre les
règles orthographiques utilisées par Mme Anne-Laure Chaumette dans son article « DAESH un «
État » islamique ? »2.
.
1
Traduction française : « L’« État islamique » en Irak et au Levant ».
Anne-Laure CHAUMETTE, « DAESH un « État » islamique ? », Annuaire Français de Droit international, CNRS,
2014.
2
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Introduction
Rien n’est plus important que de bâtir un monde dans lequel tous nos enfants auront la possibilité
de réaliser pleinement leur potentiel et de grandir en bonne santé, dans la paix et dans la dignité.
– Kofi A. Annan, secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies
Le 23 mars 2019, près de cinq ans après la proclamation du « califat »3, la chute de Baghouz,
village du sud-est de la Syrie, marque la fin de l’emprise territoriale de l’organisation « État
islamique » (EI).
L « État islamique » et les combattants terroristes étrangers mineurs
Cette organisation est née du groupe terroriste Al-Qaida, en Irak, en 2006. En juin 2014, après
sa rupture avec Al-Qaida, Abou Bakr Al-Baghdadi, à la tête de l'EI, s’est proclamé calife de l’« État
islamique » sur les territoires conquis en Irak et en Syrie. Cette organisation, qui possède une forte
capacité à atteindre une audience mondiale, principalement auprès des jeunes, a pour objectif
d’établir « the most important sovereign institution of the history of Islam »4. A la fin de l’année
2017, on estimait à 40 000 le nombre de combattants étrangers qui avaient rejoint l’« État
islamique »5 . Ils venaient alors de plus de 110 pays dont l’Allemagne, l’Azerbaïdjan, la Belgique, la
France, le Royaume-Uni, la Russie, la Turquie6 . Fin 2017, il était estimé que plus de 30% des
combattants étrangers étaient déjà revenu7 .
3
Selon le dictionnaire Larousse, le terme « califat » désigne le territoire soumis à l’autorité du calife, chef de la
communauté musulmane.
4
Traduction personnelle : « L’institution la plus souveraine de l’histoire de l’Islam ». Annyssa. BELLAL, « Beyond the
Pale ? Engaging the Islamic State on International Humanitarian Law », Yearbook of International Humanitarian Law,
Asser Press, 2015, p. 129.
5
ODIHR, « Guidelines for Addressing the Threats and Challenges of «Foreign Terrorist Fighters» », 2018, p.11. Voir le
tableau en annexe de ce mémoire pour des chiffres plus précis, p. 86.
6
Tanya MEHRA LL.M, Dr. Christophe PAULUSSEN, « The Repatriation of Foreign Fighters and Their Families :
Options, Obligations, Morality and Long-Term Thinking », Publications ICCT, 6 mars 2019, p. 1.
7
The Soufan Center, « Beyond the Caliphate: Foreign Fighters and the Threat of Returnees », October 2017, p. 10,
disponible sur : https://thesoufancenter.org/wp-content/uploads/2017/11/Beyond-the-Caliphate-Foreign-Fighters-andthe-Threat-of-Returnees-TSC-Report-October-2017-v3.pdf, consulté le 02 mai 2019.
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Parmi ces combattants sont comptés quelques milliers d’enfants ayant la nationalité d’un État
membre du Conseil de l’Europe ou nés au sein d’un des pays membres du Conseil de l’Europe et
vivant actuellement en Syrie et en Irak. Cela représente, par rapport aux générations précédentes de
combattants terroristes étrangers, une proportion importante de mineurs, même parmi les militants
actifs. Différentes catégories d’enfants sont affectées par les activités terroristes de l’EI. Ils sont des
victimes, des témoins et des présumés bourreaux. Les enfants sont recrutés stratégiquement à
l’intérieur ou à l’extérieur de leur pays. Enrôlés de force ou volontairement, certains sont attirés par
des promesses d’argent ou de vie meilleure, d’autres n’ont pas eu d’autre choix que d’accompagner
leur famille. Par ailleurs, la majorité des enfants ressortissants européens sont nés dans ces zones de
conflit, de père et/ou de mère de nationalité européenne. L’EI promeut une interprétation puriste de
l’islam en organisant un enseignement de la charia et prépare les prochaines générations à la vie au
sein de l’« État islamique » en leur donnant un entraînement militaire. L’organisation accorde une
place essentielle à ces enfants, surnommés les « Lionceaux du Califat ».
La définition de l’enfant en droit international
Définir l’enfant en droit international n’est pas simple du fait qu’il désigne une construction
sociale8. C’est le critère (« objectif ») de l’âge qui a été choisi par les conventions internationales.
Ainsi, selon l’article 1 de la Convention relative aux droits de l’enfant9, l’enfant est définit comme
« tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la
législation qui lui est applicable ». Cette définition n’est pas satisfaisante car la référence aux
législations nationales est un obstacle à l’élaboration d’une norme internationale coutumière.
Malgré ses limites, elle sera celle utilisée au sein de ce mémoire. Ainsi toute personne de moins de
18 ans doit être traitée d’une manière compatible avec ses droits, sa dignité et ses besoins,
conformément au droit international applicable, en particulier les obligations découlant de la
Convention relative aux droits de l’enfant.
8
Magali MAYSTRE, « Les enfants soldats en droit international », Perspectives internationales n°30, Pedone, 2010, p.
32.
9
Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989, entrée en vigueur le 2 septembre 1990,
RTNU., vol. 1577, p. 62.
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Les conditions de vie des enfants suite à la chute de l’EI
La grande majorité des enfants de l’« État islamique » vivent aujourd’hui enfermés dans des
camps au nord de la Syrie (Al-Hol et Al-Roj principalement), sous la tutelle d’une administration
autonome des Kurdes, alors que d’autres sont emprisonnés en Irak10. Le porte-parole des Forces
démocratiques syriennes, Kino Gabriel, a déclaré en mai 2015 qu’ils détenaient environ 1.500
combattants et plus de 3.000 membres de leurs familles11 . Selon l’organisation Human Rights Watch
il y avait environ 1.000 femmes et 2.000 enfants qui étaient détenus dans des camps en Irak, Syrie
et Libye en février 2019. Les conditions de vie déplorables dans les camps syriens mettent
gravement en danger la vie des enfants. Quant à ceux détenus dans les prisons irakiennes et
syriennes, ils courent le risque de graves violations de leurs droits fondamentaux, notamment un
risque de torture.
Au 1er mai 2019, la population du camp d’Al-Hol, prévu pour 10 000 habitants, était de
73,477 personnes12 . 90% des détenus sont des femmes et des enfants, dont la majorité n'a pas plus
de 6 ans. De décembre 2018 à février 2019, à la suite de la chute de Baghouz, plus de 37,000
personnes y ont trouvé refuge. Il est à supposer que les enfants ayant quitté le califat ont vécu un
traumatisme en vivant en état de guerre ou même en participant activement au combat. Ils arrivent
alors complètement épuisés physiquement et psychologiquement. Selon le CICR les conditions de
vie dans ces camps sont désastreuses. Les enfants n’ont rien, les installations sanitaires,
l’hébergement, la nourriture, l’aide médicale ou psychologique sont limités, il n’y a pas d’école.
Les enfants, détenus dans des conditions extrêmement précaires, se trouvent exposés directement au
risque de mort13. Au 14 mars 2019, 120 décès avaient été enregistrés, dont 80 % d'enfants de moins
de cinq ans. En un mois seulement, le nombre total de décès a doublé, atteignant 249 en date du 11
10
En octobre 2017 on comptait environ 1 400 femmes et enfants étrangers détenus en Irak, selon Human Right Watch:
https://www.hrw.org/news/2017/09/20/iraq/krg-1400-women-children-isis-areas-detained consulté le 31 juillet 2019.
11
S/2015/358 du 19 mai 2015, §28.
12
Rapport OCHA, « Syria : humanitarian response in Al Hol camp », Situation report n°3, as of 1 May 2019,
disponible sur : https://reliefweb.int/report/syrian-arab-republic/syria-humanitarian-response-al-hol-camp-situationreport-no-3-1-may-2019, consulté le 15 mai 2019.
13
Rapports World Health Organization, « Syria crisis, Al-Hol camp, Al-Hasakeh governorate », Issues 1 à 5, février avril 2019, disponibles sur :https://reliefweb.int/report/syrian-arab-republic/syria-crisis-al-hol-camp-al-hasakehgovernorate-issue-1-26-february-2019, consultés le 15 mai 2019.
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avril. La plupart des décès étaient dus à la malnutrition, à des blessures infectées, à des brûlures
graves et à la diarrhée aiguë14.
Outre les conditions sanitaires désastreuses, la situation sécuritaire est de plus en plus
critique , ; en effet, il existe une réelle crainte d’une re-radicalisation de la population due à l’arrivée
des anciens combattants de DAESH (acronyme arabe pour désigner l’« État islamique »15 .
En Irak, les enfants sont détenus avec les adultes dans des prisons/ Comme les combattants
étrangers terroristes, ils sont jugés selon la loi anti-terroriste n° 13 de 200516 qui offre une large et
vague définition du terrorisme. Parallèlement aux persistants et sérieux défauts touchant
l’administration du système de justice irakien, des allégations de torture ont été rapportées par
l’ONG Human Rights Watch qui a recueilli de nombreux témoignages d’enfants victimes de
traitements inhumains et dégradants de la part des autorités irakiennes17. De même, des institutions
telles que le Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme de l’ONU et la Mission d’assistance de
l’ONU pour l’Irak ont exprimé des inquiétudes à ce sujet18. La raison de ce traitement est leur
affiliation présumée à l’EI. D’autres enfants se trouvent également en détention, ceux en bas-âge
dont les mères n’ont pu ou voulu, se séparer.
Les rapports obtenus des organisations internationales démontrent la violation de principes
internationaux tels que définis dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme19 , le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques20, la Convention contre la torture et autres
14
Council of Europe Commissioner for Human Rights, Statement « Council of Europe member states should urgently
repatriate their under-age nationals stranded in Northern Syria », 28th of May 2019.
15
Luc MATHIEU, « On est en train de recréer l’EI à Al-Hol », Luc Mathieu , 04 avril 2019, Libération, disponible sur :
https://www.liberation.fr/planete/2019/04/04/on-est-en-train-de-recreer-l-ei-a-al-hol_1719481, consulté le 5 aout 2019.
16
Loi sur la lutte anti-terroriste n°13-2005 (J.O. 4009 du 11 nov. 2005, p. 1). L’article 1er de la loi définit le terrorisme
comme « tout acte criminel commis par un individu ou un groupe organisé contre un individu, un groupe, communauté,
institutions publiques ou privées portant préjudice aux biens publics ou privés, afin de troubler la sécurité, la stabilité,
l’unité nationale ou de répandre la peur, l’affolement et la terreur parmi les gens ou de susciter le chaos à des fins
terroristes ».
17
Human Rights Watch, « Everyone Must Confess » Abuses against Children suspeted of ISIS Affiliation in Iraq, 6
mars 2019, disponible sur : https://www.hrw.org/report/2019/03/06/everyone-must-confess/abuses-against-childrensuspected-isis-affiliation-iraq, consulté le 3 aout 2019.
18 AL IRQ
4/2018 du 28 Novembre 2018.
19
Assemblée générale des Nations unies. (1948), Déclaration universelle des droits de l’Homme, (217 [III] A). Paris,
(notamment les articles 3, 5, 7, 8, 9 et 10).
20
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre
1966, entré en vigueur le 23 mars 1976, RTNU., vol. 999, p. 171 et vol. 1057, p. 407 (notamment les articles 6, 7, 9, 10,
14 et 24).
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traitements inhumains et dégradants21 ainsi que la Convention internationale des droits de l’enfant.
Nombreux de ces droits dont les violations sont aujourd’hui reconnues ont une valeur coutumière,
de jus cogens, ne permettant aucune dérogation.
La lutte contre le terrorisme, seule réponse apportée par les États occidentaux
La réponse apportée par la communauté internationale à ces violations persistantes des droits
fondamentaux des enfants ne semble pas satisfaisante en ce qu’elle ne se base que sur l’argument de
la lutte contre le terrorisme. La gravité des actes terroristes perpétués par DAESH qui « violent les
lois de la guerre, mais aussi la dignité humaine » explique la position des États22 . En réponse aux
actions terroristes de cette organisation, le Conseil de sécurité a adopté la Résolution 2178 (2014)
selon laquelle les États membres de l’Organisation des Nations Unies sont invités à prendre des
mesures visant à prévenir et freiner l’afflux de combattants terroristes étrangers dans les zones de
conflit et à prévenir le recrutement des enfants23. Les États doivent veiller à ce que leurs lois
internes permettent la poursuite et la sanction des personnes voyageant à l’étranger aux fins de la
préparation, planification, perpétration ou participation à des actes terroristes. Cette résolution
n’apporte pas de définition du « terrorisme ». Ainsi les mesures adoptées par les juridictions
nationales reposent sur une définition vague du terrorisme24.
En outre, des efforts considérables ont été déployés pour prévenir les départs vers la Syrie et
l’Irak par des programmes de « dé-radicalisation » et de prévention de l’extrémisme violent25. La
stratégie du Conseil de l’Europe de lutte contre le terrorisme (2018-2022) réaffirme la nécessité de
s’attaquer à la radicalisation conduisant au terrorisme. Enfin, le Protocole additionnel à la
21
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée dans sa
résolution 39/26 du 10 décembre 1984, entrée en vigueur le 26 juin 1987, RTNU., vol. 1465, p. 85. (notamment les
articles 2, 5, 12 et 16).
22,
Peter MAURER, « Lutte antiterroriste : Le droit international humanitaire ne constitue pas un obstacle abusif à la
protection de la sécurité de l’État », Le Monde 15 décembre 2017, disponible sur : https://www.lemonde.fr/idees/article/
2017/12/15/lutte-antiterroriste-le-droit-international-humanitaire-ne-constitue-pas-un-obstacle-abusif-a-la-protectionde-la-securite-de-l-etat_5230424_3232.html#dIGqq9TSjJjZhDXY.99, consulté le 29 juillet 2019.
23
S/RES/2178 (2014) du 24 septembre 2014, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de
terrorisme, §4.
Le principe juridique selon lequel la responsabilité pénale repose sur des provisions claires et précises ne semble pas
respecté.
24
25
Notamment suite à l’adoption par le Conseil de sécurité le 23 décembre 2015 des 35 principes directeurs de Madrid,
outil pratique à la mise en œuvre de la résolution 2178, S/2015/939, Principes directeurs de Madrid, Guide pratique
pour les États membres dans leur lutte pour endiguer le flot de combattants terroristes étrangers, 23 décembre 2015.
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Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme adopté le 22 Octobre 201526 a
défini comme infractions pénales plusieurs actes commis à des fins de terrorisme tels que recevoir
un entraînement terroriste, voyager à l’étranger aux fins de terrorisme ainsi que le financement et
l’organisation de voyages à cette fin. Toute cette règlementation offre un panorama des actions
rapides que peuvent impulser les États pour lutter contre le départ des combattants étrangers.
L’affaiblissement de DAESH au cours de ces dernières années a conduit à l’adoption de
résolutions se concentrant, non plus sur le départ des combattants étrangers, mais sur leur retour
dans leur pays d’origine. Le 21 décembre 2017, le Conseil de Sécurité a adopté la résolution 2396
mettant l’accent sur le retour et la réinstallation des combattants étrangers ainsi que des membres de
la famille qui les accompagnent27 . La résolution 2396 souligne :
« Que les femmes et les enfants associés aux combattants terroristes étrangers revenant d’un
conflit ou se réinstallant peuvent avoir joué de nombreux rôles différents et notamment
avoir appuyé, facilité et commis des actes de terrorisme, et nécessitent une attention
particulière pour ce qui est d’élaborer des stratégies concernant les poursuites, la
réadaptation et la réinsertion, et qu’il importe d’aider les femmes et les enfants associés aux
combattants terroristes étrangers, qui peuvent être victimes de terrorisme, en tenant compte
des sensibilités propres à leur sexe et à leur âge »28 .
Cette résolution, à double tranchant (nécessité des poursuites et attention particulière envers
les enfants) illustre la complexité de la problématique des enfants (de) combattants étrangers.
Le nécessaire respect des droits de l’Homme face à la situation actuelle
Malgré les nombreux attentats terroristes perpétrés sur le sol européen, les sociétés
européennes doivent résister à la tentation de déshumaniser leurs ennemis, notamment les personnes
les plus vulnérables ou accompagnant les combattants. Tout d’abord, ceux-ci doivent voir leurs
droits respectés lorsqu’il s’agit de leur capture, leur détention et leur jugement. Ensuite, les
membres de leur famille ne doivent pas se voir stigmatisés et ne doivent être punis que pour les
26
Série des Traités du Conseil de l’Europe - n° 21, Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe pour
la prévention du terrorisme Riga, 22.X.2015.
27
S/RES/2396 (2017) du 21 décembre 2017, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de
terrorisme : « d’enquêter sur eux, d’élaborer et de mettre en œuvre des évaluations des risques exhaustives les
concernant, et de prendre des mesures appropriées, en envisageant notamment des poursuites, la réadaptation et la
réinsertion, selon qu’il convient » §29.
28
ibid., §31.
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actes qu’ils auraient commis en tant que combattants. La problématique des enfants n’est que plus
sensible du fait de leur statut incertain et de leur plus grande vulnérabilité. Plusieurs organisations
internationales ont établi des principes directeurs concernant la conduite des États face à ce
phénomène afin de souligner le respect des droits de l’homme dans cette approche anti-terroriste.
Pourtant, ces derniers agissent en contradiction avec les droits fondamentaux des individus.
La déclaration du ministre anglais de la sécurité, Ben Wallace, le 14 février 2019, illustre
l’attitude de nombreux dirigeants européens ; « I’m not putting at risk British people’s lives to go
looking for terrorist or former terrorist in a failed state »29 . Jusqu’à présent, les États membres du
Conseil de l’Europe ont été réticents à prendre des mesures actives pour rapatrier leurs
ressortissants mineurs détenus en Syrie et en Irak. Quelques-uns s’opposent même clairement à leur
retour. L’approche restrictive adoptée par plusieurs États membres, souvent justifiée par des
arguments sécuritaires, soulève de sérieux doutes quant à sa compatibilité avec les normes
internationales en matière de droits de l’homme et des obligations étatiques à l’égard de leurs
ressortissants.
Le rôle de la Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe
Ce qu’il faut est établir un standard que les États européens devront suivre et respecter selon
leurs engagements internationaux. Beaucoup de pays occidentaux ont affirmé que les difficultés sur
le terrain rendaient impossible le rapatriement des enfants, néanmoins les rapatriements des 67
femmes et 171 enfants kazakhs en juin 201930 ou des enfants français orphelins31 , ont montré qu’un
rapatriement était possible.
La Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe souhaite définir un tel
engagement et appeler les États membres à respecter les droits de l’Homme concernant la question
du retour des enfants (de) combattants étrangers européens. Le bureau de la Commissaire aux droits
29
BBC News, « Shamima Begum: IS runaway teen « could face prosecution in the UK » », 14 février 2019, traduction
personnelle : « Je ne vais pas risquer la vie des citoyens britanniques en allant chercher des terroristes ou anciens
terroristes dans un État failli ».
30
Fionnuala NI AOLAIN, « Time to Bring Women and Children Home from Iraq and Syria », 4 juin 2019, disponible
sur : https://www.justsecurity.org/64402/time-to-bring-women-and-children-home-from-iraq-and-syria/, consulté le 07
août 2019.
31
Sophie, PARMENTIER, « Douze enfants de djihadistes français rapatriés de Syrie, et choisis au « cas par cas » »,
FranceInter, 11 juin 2019, disponible sur : https://www.franceinter.fr/justice/la-france-rapatrie-12-enfants-dedjihadistes-francais-depuis-le-kurdistan-syrien-choisis-au-cas-par-cas, consulté le 07 août 2019.
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de l’Homme du Conseil de l’Europe est une instance non-judiciaire chargée de promouvoir
l’éducation et la sensibilisation aux droits de l’homme tels qu’ils ressortent des instruments du
Conseil de l’Europe, ainsi veiller à leur respect32.
Elle a ainsi émis, le 28 mai 2019 une déclaration exhortant les États membres du Conseil de
l’Europe à rapatrier d’urgence leurs ressortissants mineurs et à envisager le rapatriement de leurs
mères également. L’attitude des États européens privilégiant le court terme et leur inaction face aux
violations des droits fondamentaux des enfants a été condamnée.
La légalité du refus de rapatriement des ressortissants mineurs de la part des États européens
Ce qui nous interroge est le refus des États européens de rapatrier leurs ressortissants mineurs
présents actuellement en Syrie et en Irak. La légalité de cette décision peut être questionnée car ces
États sont partie prenante de conventions internationales leur enjoignant de protéger leurs
ressortissants, notamment lorsque des violations de leurs droits fondamentaux sont avérées. Enfin, il
convient de se demander si les États pourraient être considérés comme responsables des violations
des droits fondamentaux des enfants du fait de leur décision de non-rapatriement.
Les États européens ont le devoir de respecter la souveraineté de la Syrie et de l’Irak. Ainsi ils
ne peuvent s’immiscer dans les affaires de ces pays pour protéger leurs ressortissants mineurs. Or,
le droit international public consacre le devoir d’assurer la protection effective des droits et des
libertés des personnes faisant état de liens suffisants avec les États européens, particulièrement à
leurs nationaux bénéficiant du droit à la protection consulaire. Par conséquent, les États européens
ont des obligations en vertu du lien de nationalité dont sont titulaires les enfants (Titre I). D’autre
part, les États européens, par leur présence en tant que parties au conflit armé syrien, ont étendu leur
juridiction. De fait ils ont le devoir de respecter le droit international humanitaire et les droits de
l’homme, droits complémentaires découlant de conventions internationales. Le devoir d’assurer la
protection effective des droits et des libertés des enfants découle de leurs engagements
internationaux (Titre II).
32 Article
1 de la Résolution (99) 50 sur le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe (adoptée par le
Comité des Ministres le 7 mai 1999 lors de sa 104e Session).
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Titre I. Le droit d’assistance des États, fondement de l’obligation de
rapatriement des mineurs nationaux des États membres du Conseil de l’Europe
Selon les principes cardinaux du droit international, tout État est souverain sur son propre
territoire. Les États sont indépendants et égaux en droit. Ce principe, essentiel à la bonne conduite
des relations internationales, limite l’action des États européens dans l’assistance collective à leurs
nationaux résidants sur le territoire d’un État-tiers (Chapitre 1). Le droit international inter-étatique
s’est développé ces dernières années pour accorder une plus large place à l’individu. Ce dernier
pourrait bénéficier d’une protection personnelle du fait de sa nationalité, son intérêt serait alors
conservé et il pourrait se voir défendu par son État de nationalité. En effet, le lien de nationalité
implique un certain nombre de droits et d’obligations pour les États et leurs ressortissants ; la
protection consulaire en fait partie (Chapitre 2).
Chapitre 1. Une ingérence légitimée par les résolutions de l’Organisation des
Nations-Unies
Le droit international a pour principe cardinal le respect de la souveraineté des États. Les
ressortissants européens se trouvant à des milliers de kilomètres de leur État de nationalité ne
peuvent demander à leur État de s’y ingérer, ce dernier devant respecter le principe de souveraineté
des États (Section 1). Cependant, lors de situations exceptionnelles, les États ont la possibilité de
s’immiscer dans les affaires des États tiers. Aujourd’hui la présence des enfants européens dans les
prisons irakiennes et dans les camps de détention syriens est une situation exceptionnelle, les
résolutions de l’ONU le témoignent et légitiment l’action des États européens (Section 2).
Section 1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international
Le principe cardinal de souveraineté en droit international (§1) ne permet en rien une
intervention par un autre État à l'intérieur de ses frontières (§2).
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§1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international
Le droit international est l’ensemble des règles qui régissent les rapports entre les États33.
C’est un droit des relations inter-étatiques, contrairement au droit national qui gère les relations
intra-étatiques.
La souveraineté a été définie par Julien Laferrière comme « la qualité d’un pouvoir de droit,
suprême et originaire »34 . Un pouvoir de droit en ce qu’il se fonde sur une légitimité, suprême en ce
qu’il est au-dessus de toute norme, et enfin originaire en ce qu’il n’est pas délégué par une autre
autorité. Ainsi, la souveraineté est un attribut juridique gouvernemental de l’État. L’article 2 §1 du
Chapitre 1er de la Charte des Nations Unies énonce que « l’Organisation - des Nations-Unies - est
fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres »35 . Sur le plan international,
l’État n’a que des égaux qu’il doit respecter.
La résolution 2625 adoptée le 24 octobre 1970 par l’Assemblée générale de l’ONU réitère le
principe de l’égalité souveraine des États : « tous les États jouissent de l’égalité souveraine. Ils ont
des droits et des devoirs égaux et sont des membres égaux de la communauté internationale,
nonobstant les différences d’ordre économique, social, politique ou d’une autre nature »36.
Il convient de démontrer l’importance de ce principe par un simple exemple. Le Conseil de
Sécurité de l’ONU débute chaque résolution avec un rappel de la souveraineté de l’État :
« Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et l’intégrité
territoriale ».
L’État syrien est gouverné par le président Bachar-al Assad qui se présente comme le garant
de la souveraineté syrienne. Le statut controversé mais établi du Président n’est pas d’une
importance cruciale dans ce mémoire du fait qu’aujourd’hui les enfants (de) djihadistes européens
se trouvent pour la grande majorité dans des camps de réfugiés au nord-est de la Syrie, partie du
33
D’après la définition donnée par F. SUDRE dans Droit européen et international des droits de l’Homme, 14ème éd.,
PUF, 2004, p. 24 §9.
34
J. LAFERRIÈRE, Manuel de droit constitutionnel, Domat-Montchrestien, 1947, p. 359.
35
La Charte des Nations Unies, signée le 26 juin 1945, San Francisco et entrée en vigueur 24 octobre 1945.
36
Résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit international touchant les
relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies.
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territoire où règnent les forces démocratiques syriennes, majoritairement composées de forces
kurdes. Néanmoins, ces forces armées ne forment pas un État souverain internationalement
reconnu. Par ailleurs, l’organisation est considérée comme terroriste notamment par la Turquie, ce
qui rend d'autant plus irréaliste la reconnaissance d'un État. Malgré le contrôle effectif des forces
kurdes, les États européens se doivent de respecter la souveraineté de la Syrie, État reconnu en droit
international dont le gouvernement est le seul gouvernant légitime.
L’histoire de l’Irak est complexe. Sous occupation et sous sanctions de l’ONU pendant sept
ans, après l’invasion du Koweit en 1990, la fin de la mission américaine a permis la renaissance
d’un État souverain et indépendant. Le gouvernement actuel, dirigé par Adel Abdel-Mehdi, dispose
de toutes les compétences nécessaires à l’établissement de sa souveraineté.
L’État se comporte en souverain sur l’ensemble de son territoire ; l’ensemble de ses
compétences est désigné par la formule « souveraineté territoriale » ou « compétence territoriale
majeure »37 . La compétence est un « pouvoir juridique conféré ou reconnu par le droit
international », il permet « à un État (...) de connaître d’une affaire, de prendre une décision, de
régler un différend »38 .
La compétence territoriale, ou compétence ratione loci, lui permet de connaître les affaires
qui se déroulent sur son territoire. En droit, le territoire est défini par les frontières39 .
La sentence de la Cour permanente d’arbitrage de Max Huber de 1928 concernant un
différend entre les États-Unis et les Pays-Bas sur l’Ile des Palmes dans le Pacifique détermine cette
notion :
« La souveraineté des relations entre les États signifie l’indépendance. L’indépendance
relativement à une partie du globe est le droit d’y exercer, à l’exclusion de tout autre État,
les fonctions étatiques. Le développement de l’organisation nationale des États durant les
derniers siècles et, comme corollaire, le développement du droit international, ont établi le
principe de la compétence exclusive de l’État en ce qui concerne son propre territoire de
manière à en faire le point de départ du règlement de la plupart des questions qui touchent
aux rapports internationaux. »40
37
P. DAILLIER, A. PELLET, Droit international public, LGDJ, 7ème éd., 2002, p. 462 §296.
38
J.B. SIREY, Dictionnaire de la terminologie du droit international, 1960, p. 132.
39
Pour aller plus loin sur l’établissement des frontières, voir P. DAILLIER, A. PELLET, op. cit.
40
Sentence arbitrale rendue le 4 avril 1928, par M. Max Huber, entre les États-Unis et les Pays-Bas, dans le litige relatif
à la souveraineté sur l’ile de Palmas (ou Miangas) traduction de M. Ch. Rousseau dans « la Revue Générale de Droit
International Public », 1935, p. 163.
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§2. Une souveraineté exclusive dont découle le principe de non-ingérence
De ce principe de souveraineté découle le principe d’indépendance et de non-intervention. En
effet, ces principes ont été très fréquemment réaffirmés dans le cadre des relations internationales.
Corollaire de l’égalité de souveraineté, le principe de non-ingérence enjoint les États à ne pas
intervenir dans les affaires intérieures ou extérieures des autres États.
.La Cour internationale de justice, dans les affaires Détroit de Corfou (Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord c. Albanie), considère que les États exercent un contrôle
exclusif dans les limites de leurs frontières. Le principe primordial découlant de cet arrêt est la
constatation de la violation de la souveraineté de l’Albanie par le Royaume-Uni, l’intervention d’un
État sur le territoire d’un État tiers constituant une violation de la souveraineté de ce dernier41. La
prohibition de l’immixtion dans les affaires d’un autre État est devenue un principe coutumier.
Ainsi, la présence de ressortissants d’un État sur le territoire d’un autre État ne peut permettre
à l’État de nationalité de s'immiscer dans les affaires de l’État d’accueil. En effet, les principes de
souveraineté et de non-ingérence, principes reconnus par les Nations-Unies et par la Cour
internationale de justice, enjoignent les États à ne pas intervenir. L’État souverain territorial est
compétent pour exercer son pouvoir à l’égard de toutes personnes qui se trouvent sur son territoire
du seul fait de leur présence sur place.
Ainsi, les États européens ne peuvent s’introduire dans les affaires syriennes ou irakiennes en
ce que les gouvernements de ces États sont souverains dans les limites de leur territoire.
Certes l’État dispose d’une compétence ratione loci mais il possède également des
compétences externes, c’est-à-dire qui ne sont pas limitées par le territoire de l’État. Découlent de
ces compétences, par exemple, le droit d’entretenir des relations diplomatiques, de s’engager par la
voie de conventions internationales ou encore le recours à la force dans les limites établies par le
droit international. Les États communiquent et collaborent entre eux, notamment par la présence
d’agents diplomatiques et consulaires dans des territoires extérieurs. Mais là encore, leur
compétence est limitée par la souveraineté territoriale de l’État tiers et ils ne peuvent agir sans son
consentement.
41
Affaire du Détroit de Corfou, 9 avril 1949, CIJ., Recueil 1949, p. 4.
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Selon Vaclav Havel « il y a des valeurs plus élevées que la frontière d’un État »42. Concernant
les droits de l’homme, « toute l’ossature du droit international est conçue en dehors de la
perspective des droits de l’homme »43 . Le bien-être des individus n’est pas objet du droit
international mais seulement du droit national. Ainsi, les États ont une compétence exclusive quant
au respect des droits fondamentaux des personnes. C’est le rattachement de l’individu à un État qui
va permettre sa protection en droit international. Il existe alors des exceptions au principe de
souveraineté qui sont motivées par le souci d’assurer le respect des droits fondamentaux des
individus.
Avant d’étudier la protection individuelle des personnes, il est nécessaire de s’attacher à
l’action possible des États afin de faire respecter les droits de l’Homme dans des cas de violations
globales. Il ne s’agit pas d’un enfant dans le cas de l’espèce, mais de centaines d'enfants. Il convient
de se demander s’il existerait une exception au principe de souveraineté territoriale des États
lorsque nous sommes dans une situation générale de violation des droits fondamentaux d’une partie
d’une population ou d’une population entière.
Aujourd’hui dans le nord de la Syrie les personnes détenues dans des camps font clairement
face à des violations de leurs droits fondamentaux. Or, selon le respect du principe de souveraineté
et par conséquent de non-ingérence, il semblerait que les États tiers ne peuvent agir même pour
permettre la protection des individus et rétablir le respect de leurs droits.
Section 2. Des exceptions au principe de souveraineté, la légitimation de
l’intervention en Syrie
Le principe de souveraineté des États et de non-intervention les oblige à l’inaction en dehors
de leurs frontières. Malgré cela, pour un bon fonctionnement des relations internationales, le droit
international n’exclut pas l’exercice par un État d’une compétence extraterritoriale. Toutefois les
fondements suggérés de cette compétence doivent être définis et limités par les droits souverains
42
Vaclav Havel, Président de la République tchèque, Allocution du 16 février 2000, Strasbourg, disponible sur : http://
www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+CRE+20000216+ITEM-012+DOC+XML+V0//FR,
consulté le 03 août 2019
43
F. SUDRE op. cit. p. 21, §11.
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des autres États concernés44 . Si ces derniers ne respectent pas les droits de l’Homme et qu’ils ne
respectent plus la dignité de leur population, alors des États tiers pourraient intervenir afin de
permettre le respect de ces droits (§1). Cependant ce principe est délicat à mettre en œuvre du fait
de sa nature complexe, ainsi l’intervention des États tiers pourrait se faire selon un autre motif, en
l’espèce celui de la lutte contre le terrorisme, qui a pour objectif d’établir une meilleure sécurité
pour tous (§2).
§1. La théorie de l’intervention d’humanité à la « responsabilité de protéger » de l’ONU
Les États ont accepté l’intervention dans un objectif de faire respecter les droits de l’Homme
de manière universelle. Or cette théorie a permis une ingérence pour des objectifs autre
qu’humanistes (A). C’est pourquoi l’ONU, assemblée des États, a décidé de la transformer en
« responsabilité de protéger ». Les États peuvent intervenir afin de protéger les populations mais
agissent sous le contrôle de l’ONU (B).
A. La théorie de l’intervention d’humanité pour une protection de tout être humain
Afin de remplir l’objectif international de respect universel des droits fondamentaux, les États
ont pu agir contrairement au principe de non-ingérence. Dans son article relatif à la théorie de
l’intervention d’humanité, Antoine Rougier débute en affirmant que cette théorie semble peu
compatible avec les principes du droit international :
« D’après laquelle les actes de puissance publique interne, accomplis par un
gouvernement contrairement aux lois de l’humanité donneraient ouverture à un droit
d’intervention en faveur d’un ou de plusieurs États tiers et se trouveraient ainsi soumis à un
contrôle international a pris une place assez importante en doctrine depuis un demi-siècle,
encore qu’elle ait reçu peu d’applications politiques. Nous la croyons cependant peu
compatible avec certaines données traditionnelles du droit international, notamment avec
celles de l’indépendance et de l’égalité des États »45.
44
Affaire dite du Lotus, Arrêt du 7 septembre 1927, Cour permanente de Justice Internationale, selon laquelle le
principe d’exclusivité territoriale prohibe toute action visant à contraindre un État à prendre des mesures contre un
autre.
45
ROUGIER Antoine, « La théorie de l’intervention d’humanité", Revue générale de Droit international public
(RGDIP), A. Pedone, tome XVII, 1910, p. 468.
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L’acte d’intervention d’humanité, ou intervention unilatérale pour la défense d’un droit, est
une exception au principe souveraineté. Il correspond à une action ponctuelle entreprise par un État
en vue d’assurer la protection d’individus (ses ressortissants ou d’autres personnes) qui sont en
danger dans un autre État. Cette action se fait sans l’accord du gouvernement de l’État sur lequel
elle va se produire. En effet, si l’État sur lequel l’action se déroule accepte une telle intervention,
alors l’invitation permet de la légitimer. Dans le cas des interventions d’humanité, l’État souverain
sur lequel l’action se déroule ne consent pas à une telle intervention. L’État intervenant se substitue
à l’État défaillant.
Cette procédure a pour objectif de mettre un terme à une crise extrême dans l’urgence. On a
pu définir plusieurs actions de cette sorte ; de l’intervention de la France en Syrie en 186046 à
l’intervention des États-Unis sur le territoire iranien en avril 198047 . L’intervention est fréquemment
revendiquée pour servir en réalité de motif à une intervention politique portant atteinte à la
souveraineté de l’État (par exemple l’intervention des États-Unis en République dominicaine en
avril 196548).
En l’espèce, les situations en Syrie et en Irak sont de véritables crises. Les conditions de vie
dans les camps et dans les prisons sont désastreuses et plusieurs enfants sont décédés. Ainsi, l’action
des États dans le but de préserver les droits de leurs ressortissants pourrait être légitime.
L’intervention d’humanité entraîne de graves conséquences, elle permet aux États d’étendre
leur contrôle sur un domaine réservé en s’immisçant entre l’État et ses habitants. Toutefois,
l’existence des « droits de l’humanité »49 permet aux États d’intervenir afin de les faire respecter. Il
est clair que l’intervention devrait se faire de manière désintéressée avec pour seul objectif le
respect des droits humains universels. Ainsi, la peur du détournement de ce principe exigerait des
États un contrôle de leur action par un organe légitime tel que les Nations-Unies.
46
L’intervention militaire française en Syrie afin de mettre un terme aux massacres envers les chrétiens de la part
d’extrémistes Druzes à l’été 1860.
47
Suite à la crise des otages américains en Iran qui a duré de novembre 1979 à janvier 1981.
48
La guerre civile dominicaine éclata en avril 1965, quatre jours plus tard les forces militaires américaines
débarquèrent. Leur intervention mis fin à la guerre civile avec l’arrivée au pouvoir d’un régime non-communiste. Le
pays fut occupé d’avril 1965 à septembre 1966.
49 Terme
du Professeur ARNTZ dans la Revue de droit international. et de législation comparée, t. VIII (1876), p. 675
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B. La « responsabilité de protéger », une intervention sous contrôle de l’ONU
Le 20 septembre 1999 le Secrétaire Général des Nations-Unies a plaidé pour que l’ingérence
humanitaire, « nouveau concept » émergeant dans les relations internationales, s'applique de « façon
juste et cohérente à toutes les régions et à toutes les nations »50 . Selon Kofi Annan, « il est
aujourd’hui généralement admis que c’est l’État qui doit servir les citoyens et non l’inverse »51. Les
citoyens deviennent titulaires de droit, d’un droit de protection dont l’État est débiteur.
A l’ouverture de la cinquante-quatrième session de l’assemblée générale de l’ONU, Kofi
Annan a soulevé la problématique relative à cette intervention : « d’un côté on peut se poser la
question de la légitimité d’une action décidée par une organisation régionale sans un mandat
onusien », a-t-il affirmé en évoquant l’intervention militaire au Kosovo, « de l’autre, on s’interroge
sur la nécessité universellement reconnue de mettre fin aux violations des droits de l’Homme »52.
Thomas M. Franck, ancien Président de la société américaine de droit international, a admis
que « dans le cas du Kosovo, il est clairement apparu que, malgré l’usurpation illégale des
prérogatives du Conseil de sécurité par l’OTAN, l’inaction aurait conduit à de biens pires (et
illégales) conséquences »53.
Ainsi, lors du 60ème sommet mondial de l’ONU en septembre 2005, l’Assemblée générale a
adopté le principe de la responsabilité de protéger, « devoir de protéger des populations contre le
génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité »54. Cette
responsabilité a été précisée par la résolution 1674 du 28 avril 2006 adoptée par le Conseil de
Sécurité et concernant la protection des civils en situation de conflit en condamnant tous les actes
de violence commis sur la personne de civils55.
50
Présentation par le Secrétaire Général de son rapport annuel à l’Assemblée Générale, Communiqué de Presse SG/
SM/7136, 21 octobre 1999. Le discours est à retrouver sur le site https://www.un.org/press/fr/
1999/19991021.sgsm7136.html (consulté le 16 juillet 2019).
51
ROUSSELOT Fabrice, « Annan invite l'ONU à redéfinir son rôle », Libération, 21 septembre 1999, disponible sur :
https://www.liberation.fr/planete/1999/09/21/annan-invite-l-onu-a-redefinir-son-role-l_283416 consulté le 19 août 2019.
52
ibid.
53
T. M. FRANCK, « Lessons of Kosovo », The American Journal of International Law, Vol. 93, No. 4 (Oct., 1999),
Cambridge University Press, p. 859, disponible sur : https://www.jstor.org/stable/2555351, consulté le 16 juillet 2019.
54
Résolution A/RES/60/1 du 24 octobre 2005, Document final du Sommet mondial de 2005.
55
Résolution S/RES/1674 (2006) du 28 avril 2006, Protection des civils dans les conflits armés.
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Enfin, le 14 septembre 2009, l’Assemblée générale a adopté par consensus sa première
résolution sur la responsabilité de protéger56. Cette résolution s’articule sur trois piliers : la
responsabilité de l’État en matière de protection, l’assistance internationale et le renforcement des
capacités et enfin une réaction résolue en temps voulu. La responsabilité de protéger consiste en une
intervention collective légitimée par une résolution du Conseil de sécurité et se déroulant dans le
respect de la Charte de l’ONU afin de pallier l’absence de protection d’un État sur sa population. La
légitimité de l’action tiendrait donc de l’entremise du Conseil de Sécurité.
La première opération conduite au nom de ce principe est l’opération militaire qui eut lieu
entre le 19 mars et le 31 octobre 2011 en Libye57. A son point 4 cette résolution « autorise les États
Membres (…) à prendre toutes mesures nécessaires pour protéger les populations et zones civiles »
tout en excluant le déploiement d’une force d’occupation étrangère sur le territoire libyen. Or une
coalition internationale a déclenché une intervention militaire contre les forces libyennes et aurait
outrepassé ses objectifs de protection des civils. Il a été examiné que « pour faire en sorte que
l’intervention militaire aille au-delà de la simple « responsabilité de protéger » et aboutisse à un
changement de régime, les Occidentaux se sont livrés à une interprétation extensive, sinon abusive,
de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU »58. Toutefois la souveraineté de l’État libyen
a été considérée comme non-violée du fait de l’autorisation par le Conseil de sécurité. Cela marquet-il l’abandon de la notion traditionnelle de souveraineté et l’émergence du concept de
« responsabilité de protéger »?
La responsabilité de protéger a été un des premiers arguments pour intervenir en Syrie.
Aujourd’hui l’intervention d’humanité telle qu’elle fut conçue en 1910 ne peut plus exister. Cette
technique n’est aujourd’hui qu’un motif de déclenchement du recours à la force du Chapitre VII.
L’intervention d’un État sur le territoire d’un État tiers sans l’accord de l’ONU pourrait être
sanctionné du fait de la non-légitimité à être intervenu et serait d’une extrême gravité. La
responsabilité de protéger ne peut que découler du Conseil de Sécurité qui offre aux États la
possibilité d’agir dans le même but que celui qui était donné aux interventions d’humanité (en
56
Résolution A/RES/63/308 du 14 septembre 2009, Responsabilité de protéger.
57
Résolution S/RES/1973 du 17 mars 2011, La situation en Jamahiriya arabe libyenne.
58
Karim Emile BITAR, « Guerres par procuration en Syrie », Le Monde Diplomatique, Juin 2013, disponible sur :
https://www.monde-diplomatique.fr/2013/06/BITAR/49154, consulté le 06 août 2019.
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principe)59. Ainsi le respect de la souveraineté des États reste essentiel à la conduite des relations
internationales et même si des droits fondamentaux sont violés dans un autre pays, lors d’une
situation de crise, un État ne peut intervenir, en principe, si ce n’est avec l’aval du Conseil de
Sécurité.
La Russie et la Chine ont utilisé la pratique du droit de veto concernant tout projet de
résolution du Conseil de Sécurité condamnant la répression en Syrie60. Selon ces deux États, « la
protection de la souveraineté est un facteur essentiel de stabilité de l’ordre international et la
décision d’un recours à la force doit être étroitement encadré : il doit être mandaté et contrôlé tout
au long de l’opération par le Conseil de Sécurité »61.
Dans la même ligne d’idée, le philosophe Noam Chomsky a fortement critiqué cette théorie
en ce que cette notion pourrait clairement cacher des intérêts politiques et notamment les visées
interventionnistes des grandes puissances62. En effet, il semble quasiment impossible de séparer les
mobiles humanistes des mobiles politiques d’intervention. Le désintéressement des États ne peut
être absolu et le sujet de ce mémoire en est l’exemple parfait. Malgré l’inhumanité attestée de la
situation des mineurs présents dans les camps au nord de la Syrie, peu d’États agissent. Cette
inaction prouve que trop peu États ont intérêt à faire cesser cette situation. Une fois leur objectif
militaire atteint - entraîner la défaite de l’EI - ils ne semblent plus trouver d’intérêt à agir en Syrie et
en Irak, certainement pas pour la protection des enfants, victimes du conflit armé.
59 Aujourd’hui
et suite à la résolution 2118 (2013), les États peuvent agir en vertu du Chapitre VII de la Charte des NU
si le gouvernement syrien ne respecte pas ses obligations qui sont d’éliminer toutes les armes chimiques de son arsenal.
60
Pour la liste détaillée des vétos de 2011 à avril 2018 : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/12/20/qu-afait-le-conseil-de-securite-de-l-onu-depuis-le-debut-du-conflit-syrien_5052133_4355770.html (consulté le 16 juillet
2019).
61
Selon Anne de TINGUY dans « La Russie face aux révoltes libyenne et syrienne : Des enjeux jugés majeurs, une
politique défensive », Les ondes de choc des révolutions arabes, 2014, p. 85.
62
Idée de Jean BRICMONT qui a participé à une conférence de presse avec M. Noam CHOMSKY sur la responsabilité
de protéger en 2009 (disponible sur : https://news.un.org/fr/story/2009/07/162542-la-responsabilite-de-proteger-entreconcept-et-realite consultée le 16 juillet 2019).
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§2. La lutte contre le terrorisme, un enjeu sécuritaire permettant davantage d’action de la part
des États
La naissance de la notion d’hyper terrorisme63, qui renvoie au fait qu’un seuil inconcevable a
été franchi par les attaques du 11 septembre 2001, a permis l’ingérence sur le territoire d’États tiers
et a entrainé des politiques de lutte contre le terrorisme. Sur ce plan, les États occidentaux ont formé
une coalition qui leur a permis d’intervenir sur les territoires syrien et irakien (A). Il convient de se
demander si l’ingérence des États dont l’objectif est la lutte contre le terrorisme leur permet de
prendre soin de leurs ressortissants mineurs et victimes (B).
A. La naissance de l’hyper terrorisme et la légitimation d’une ingérence
La notion d'hyper terrorisme est apparue en réponse aux évènement du 11 septembre 2001.
Elle définit des actes de violence à très grande échelle. Dès le 12 septembre 2001, le Conseil de
Sécurité de l’ONU a adopté la résolution 1368 « une menace pour la paix et la sécurité
internationale »64 , d’où découle l’évidente nécessité de la protection des individus face à la menace
grandissante du terrorisme. La définition du terrorisme, toujours floue en droit international,
apparaît pourtant dans maintes résolutions et déclarations.
Suite à l’attaque terroriste contre l’ambassade américaine à Ankara de février 2013, les
membres du Conseil de Sécurité ont réaffirmé que :
« Le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, constitue l’une des menaces
les plus graves à la paix et à la sécurité internationales et que tous les actes de terrorisme,
quels qu’ils soient, sont criminels et injustifiables, quels qu’en soient les motifs où qu’ils
soient commis et quels qu’en soient les auteurs, (…) les membres du Conseil ont réaffirmé
la réelle nécessité de combattre par tous les moyens, dans le respect de la Charte des
Nations-Unies et de toutes les obligations prévues par le droit international, en particulier, le
droit international des droits de l’Homme, le droit international des réfugiés et le droit
Notion d’après François Heisbourg, Hyperterrorisme : la nouvelle guerre, Odile Jacob, Paris, 2001, explication de
Ignacio RAMONET dans « Les Etats-Unis entre hyperpuissance et hyperhégémonie. Le nouveau visage du monde »,
Le Monde diplomatique, décembre 2001.
63
64
S/RES/1368 du 12 septembre 2001, La menace à la paix et à la sécurité internationales résultant d'actes terroristes.
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international humanitaire, les menaces que les actes de terrorisme font peser sur la paix et la
sécurité internationales »65.
La lutte contre le terrorisme a légitimé l’ingérence d’États, principalement occidentaux, sur le
territoire d’autres États qui se trouveraient « en proie à des organisations terroristes », les États-Unis
ont ainsi mené une guerre en Irak ou en Afghanistan. Tout autant la France a conduit des opérations
militaires au Mali. Enfin, la création d’une coalition internationale afin de combattre l’« État
islamique » en est l’illustration la plus actuelle. Ces États ont, en partie, mené ces actions suite à des
résolutions de l’ONU leur enjoignant de combattre le terrorisme. La résolution 2249 de novembre
2015 demande aux « États Membres de redoubler d’efforts et de coordonner leur action en vue de
prévenir et de faire cesser les actes de terrorisme »66 . Il semble alors essentiel de mettre en place
« l’appareil de sécurité de la mondialisation »67 afin de lutter contre le terrorisme. Or cette lutte
mondiale semble permettre « de réduire les libertés et le périmètre de la démocratie »68.
C’est la résolution 2254 du 18 décembre 2015 qui va rappeler que toutes les parties doivent
prendre des mesures nécessaires pour protéger les civils69.
B. Une lutte ne permettant pas la protection effective des enfants
La lutte contre le terrorisme devrait enjoindre les États à protéger leurs ressortissants et les
victimes du terrorisme. Même si un acte terroriste pourrait être considéré comme s’établissant à
l’égard du pouvoir politique, les principales victimes de l’organisation terroriste DAESH sont les
enfants. La résolution 2396 note que « les enfants peuvent être particulièrement vulnérables à la
radicalisation qui conduit à la violence et avoir un besoin de soutien social particulier, tels que les
conseils post-traumatiques, tout en soulignant qu’ils doivent être traités dans le respect de leurs
droits et de leur dignité, conformément au droit international applicable »70 .
65
Déclaration à la presse du Conseil de sécurité sur l’attentat contre l’ambassade des États-Unis le 1er février 2013,
disponible sur https://www.un.org/press/fr/2013/SC10906.doc.htm (consulté le 16 juillet 2019).
66
Résolution S/RES/2249 du 20 novembre 2015, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes
de terrorisme, §5.
67
Ignacio RAMONET, op. cit.
68
ibid.
69
Résolution S/RES/2254 du 18 décembre 2015, La situation au Moyen-Orient (Syrie).
70
Résolution S/RES/2396 du 21 décembre 2017, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes
de terrorisme.
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!
Ainsi le Conseil de Sécurité reconnait le besoin d’accompagnement des enfants qui subissent
un stress post-traumatique. Afin de mettre en œuvre un soutien pour ces enfants, les États ont le
devoir de les rapatrier. Ce n’est pas dans un camp de détention tenu par les forces kurdes, dans l’état
actuel des choses, que les enfants vont bénéficier d’un soutien et qu’ils vont être traités dans le
respect de leurs droits et de leur dignité.
Du fait de leur interprétation des actions du Conseil de Sécurité, les États occidentaux ont
décidé d’intervenir sur ce territoire afin de lutter contre le terrorisme. Il est clair que les
gouvernements actuels n’ont pas véritablement le souhait d’apporter un soutien aux enfants (de)
combattants terroristes étrangers. La protection des enfants et leur rapatriement pourrait se faire
grâce au principe de collaboration et de coopération entre États, mais là encore, tandis que les
autorités présentes sur place souhaitent le rapatriement de ces enfants, les États européens le
refusent. Il semblerait que les principes de protection des enfants sont bafoués sous couvert de la
lutte contre le terrorisme. Les enfants, associés aux derniers attentats ayant eu lieu sur le territoire
européen, sont aujourd’hui considérés comme des « bombes à retardement »71 par les
gouvernements européens. Il est alors inconcevable de les rapatrier du fait de leur impact sur la
sécurité des résidents européens. L’adage « la sécurité est la première des libertés », repris maintes
fois par les dirigeants européens, témoigne explicitement de leur attitude. En effet, la peur du
terrorisme et ainsi de l’insécurité renforce l’inaction des États occidentaux.
Face à cette attitude il convient de se pencher sur l’obligation que les États pourraient avoir
d’assister leurs nationaux, individuellement. Ces enfants sont nés d’un père et d’une mère dont au
moins l’un des deux dispose de la nationalité européenne. De ce fait peuvent-ils se prévaloir d’un
droit d’assistance ? La souveraineté est un principe essentiel en droit international mais le lien de
nationalité l’est aussi et, de ce lien découle une compétence de l’État leur octroyant un champ
d’action. Le droit à obtenir une nationalité est un droit fondamental. Ainsi, en tant que ressortissants
d’un État, les individus sont titulaires d’un droit dont leur État de nationalité est débiteur.
Notion du Procureur français François MOLINS, à retrouver dans l’enquête de France Info « De l’aéroport à l’école,
l’épineux retour en France des enfants de jihadistes », disponible sur https://www.francetvinfo.fr/monde/proche-orient/
offensive-jihadiste-en-irak/enquete-franceinfo-de-l-aeroport-a-l-ecole-lepineux-retour-en-france-des-enfants-dejihadistes_2602956.html, consulté le 23 août 2019.
71
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!
Chapitre 2. Le devoir de protection des ressortissants mineurs lors de la violation
de leurs droits fondamentaux
Les États européens semblent avoir un droit de s’immiscer dans les affaires d’un État tiers
lorsque leurs nationaux sont en danger. Les États ne veulent pas mettre en œuvre ce droit dont ils
sont garants. (Section 1). Les individus, dont la place devient essentielle en droit international, sont
déterminés à demander la mise en œuvre de ce droit (Section 2).
Section 1. Un droit discrétionnaire de l’État souverain
A l’origine, l’État est seul titulaire d’une personnalité juridique internationale. De ce fait, il
dispose de droits et obligations en vertu du droit international. La protection de ses ressortissants en
droit international ne se fait que dans le cadre de ses propres droits et/ou obligations. Ainsi, les États
disposent d’un droit de protéger leurs ressortissants même si ces derniers se trouvent sur le territoire
d’un État tiers (B). Ce droit de protection découle de la compétence personnelle qu’ils possèdent en
vertu du droit international (A).
§1. Une compétence personnelle établie envers ses ressortissants
Les États se doivent de faire respecter le droit international envers leurs ressortissants (A).
Leur qualité particulière de nationaux leur permet de bénéficier d’une protection spécifique (B).
A. La naissance de l’obligation de respect du droit international en ses ressortissants
Les États ont l’obligation de respecter et de faire respecter les droits de l’Homme envers les
individus et les autres États72 . Or cette obligation été très mal reçue par les États eux-mêmes. Il
semblerait que :
72
E. DECAUX, « Protection consulaire et droits de l’Homme » dans La protection consulaire: Journée d’études de
Lyon [actes de la Journée d’études de la Société organisée par l’Université Jean Moulin Lyon 3 le 2 décembre 2005],
Société française pour le droit international, Paris éd. Pedone, 2006.
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« La protection internationale des individus est ressentie par les États comme une grave
atteinte à leur souveraineté. En raison de sa compétence personnelle et de sa compétence
territoriale, c’est à l’État que revient le pouvoir exclusif d’agir à l’égard des individus
nationaux ou étrangers qui vivent sur son territoire. Par ailleurs, les États admettent
difficilement l’idée d’une protection internationale qui jouerait en définitive contre euxmêmes »73.
La compétence personnelle d’un État est le fait que ce dernier peut invoquer un lien
d’allégeance particulier à son profit lorsqu’il ne peut se fonder sur un titre territorial74 . De la
compétence ratione materiae des États découle la présence de fonctionnaires diplomatiques et
consulaires sur le territoire d’un État tiers. De la compétence ratione personae des États découle
une fonction d’assistance consulaire envers leurs ressortissants nationaux présents sur le territoire
d’un État tiers. En principe les ressortissants dans un État étranger sont soumis à la souveraineté
territoriale de ce dernier et la compétence personnelle de l’État d’origine est limitée par la
souveraineté territoriale de l’État hôte. Il existe une hiérarchie des compétences en droit
international, la priorité est donnée à la souveraineté territoriale sur la compétence personnelle.
Malgré cette hiérarchie, l’État d’origine peut toujours s’appuyer sur son titre personnel pour
objecter auprès de l’État hôte les comportements inamicaux de celui-ci. L’affaire Concessions
Mavrommatis en Palestine exprime une formule selon laquelle l’État doit faire respecter en ses
ressortissants le droit international :
« C'est un principe élémentaire du droit international que celui qui autorise l'État à protéger
ses nationaux lésés par des actes contraires au droit international commis par un autre État,
dont ils n'ont pu obtenir satisfaction par les voies ordinaires. En prenant fait et cause pour
l'un des siens, en mettant en mouvement, en sa faveur, l'action diplomatique ou l'action
judiciaire internationale, cet État fait, à vrai dire, valoir son droit propre, le droit qu'il a de
faire respecter en la personne de ses ressortissants, le droit international »75 .
73
P. DAILLIER, M. FORTEAU, A. PELLET, Q.D. NGUYEN, Droit international public, Paris, LGDJ, 2010, 8ème ed.
p. 726.
74
Ibid., p 493.
75 Affaire
des concessions Mavrommatis en Palestine, Cour internationale de justice, 30 Aout 1924, série A, n°2, p. 14.
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B. Des protections spécifiques envers les individus par les États du fait de leur lien de
rattachement
Le droit international, droit inter-étatique, octroie une place aux individus. Cette place ne leur
confère pas encore une personnalité juridique, l’État agit en faisant « valoir son droit propre ».
Ainsi, la protection diplomatique est «gracieuse», elle consiste en démarches politiques et
administratives des autorités de l’État de nationalité envers le pays hôte en faveur de la personne de
son ressortissant. Cette protection, rarement mise en oeuvre, découle d’un droit discrétionnaire de
l’État.
La protection consulaire quant à elle peut être définie comme la protection des intérêts
individuels. Un individu victime d’une violation d’un droit fondamental pourrait alors demander à
son État de nationalité une assistance spécifique. La Convention de Vienne sur les relations
consulaires de 1963, énumère les fonctions consulaires dans son article 576,. Elles permettent de :
« Prêter secours et assistance aux ressortissants, personnes physiques et morales, de l’État
d’envoi; (…)
Sauvegarder, dans les limites fixées par les lois et règlements de l’État de résidence, les
intérêts des mineurs et des incapables, ressortissants de l’État d’envoi, particulièrement
lorsque l’institution d’une tutelle ou d’une curatelle à leur égard est requise;
Sous réserve des pratiques et procédures en vigueur dans l’État de résidence, représenter les
ressortissants de l’État d’envoi ou prendre des dispositions afin d’assurer leur représentation
appropriée devant les tribunaux ou les autres autorités de l’État de résidence pour demander,
conformément aux lois et règlements de l’État de résidence, l’adoption de mesures
provisoires en vue de la sauvegarde des droits et intérêts de ces ressortissants lorsque, en
raison de leur absence ou pour toute autre cause, ils ne peuvent défendre en temps utile leurs
droits et intérêts ».
Pour être éligible à la protection consulaire, l’individu doit être ressortissant de l’État, c’est-àdire avoir un lien effectif avec ce dernier. Ce lien effectif découle de la nationalité de l’individu et
c’est l’État qui décide de l’attribution de sa nationalité. Ce principe est consacré dans l’affaire
Nottebohm - Liechtenstein c. Guatemala « le droit international laisse à chaque État le soin de
76
Convention de Vienne sur les relations consulaires, Vienne le 24 avril 1963. Entrée en vigueur le 19 mars 1967.
Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 596, p. 261.
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régler l'attribution de sa propre nationalité »77. Le lien de nationalité est le lien juridique entre l’État
et la personne ayant à la base un fait social de rattachement, une « solidarité effective d’existence,
d’intérêts, de sentiments joints à une réciprocité de droits et de devoirs ». Les règles d’attribution de
la nationalité sont du ressort de la souveraineté des États qui peuvent les modifier
discrétionnairement. Or le droit international public pose certaines conditions à respecter.
La nationalité est reconnue comme un droit de l’Homme par la Déclaration universelle des
droits de l’Homme en 194878 , le Pacte international des droits civils et politiques de 1966 ou encore
la Convention internationale des droits de l’enfant. De ce droit découlent des droits et obligations
reconnus aux nationaux.
La protection consulaire et le droit de pénétrer sur le territoire de son État de nationalité en
font partie79 . En effet, le droit d’accès à son pays de nationalité est un droit absolu des ressortissants
d’un État. En l’espèce, les États européens ne ferment pas à proprement parler leurs frontières, mais
par la non-délivrance de titres d’identités aux enfants, notamment ceux nés sur le territoire syrien de
parents européens, ils ne permettent pas à ces derniers de bénéficier de leur droit absolu d’entrer sur
le territoire de l’État dont ils sont ressortissants. Les pays d’origine doivent avoir à l’esprit les
obligations leur incombant, en particulier l’obligation de respecter « le droit qu’ont l’enfant et ses
parents de quitter tout pays, y compris le leur, et de revenir dans leur propre pays ». Plusieurs États
tels que la Norvège ou les Pays-Bas reconnaissent le droit de retour dans leur propre pays en
indiquant qu’ils n’ont pas une obligation de rapatrier activement mais que si leurs citoyens
approchent des représentations diplomatiques, alors un rapatriement pourra prendre place. A l’aune
de ce qui a été démontré précédemment, il est clair que le rapatriement des ressortissants européens
ne peut se faire de manière individuelle et spontanée. Aujourd’hui détenus dans des campements ou
en prison, ils ne peuvent se déplacer dans un consulat.
La Cour européenne des droits de l’Homme dans son arrêt Drozd et Janousek80 a rappelé que
la protection consulaire devait se faire pour tous les nationaux, innocents ou coupables.
77 Affaire
Nottebohm (deuxièrne phase), Arrêt du 6 avril 1955 : C. I. J. Recueil 1955, p. 23. En l’espèce le Liechtenstein
demandait réparation pour des mesures contraires au droit international que le gouvernement guatemalquais avait prise
à l’encontre de son ressortissant. Le Liechtenstein ne pouvait demander réparation du fait que l’individu était un
ressortissant allemand.
78
Assemblée générale des Nations unies. (1948), Déclaration universelle des droits de l’Homme, (217 [III] A). Paris
(Article 15).
79
Selon l’article 12-4 du Pacte de 1966 sur les droits civils et politiques ainsi que l’article 2 du Protocole 4 à la CEDH,
les nationaux bénéficient d’un droit « général et absolu » à entrer, séjourner et demeurer dans leur État de nationalité.
80
CEDH, Cour (Plénière), Drozd et Janousek c. France et Espagne, 26 juin 1992, n°12747/87, en l’espèce les
requérants se plaignaient de ne pas avoir bénéficié d’un procès équitable.
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Cette compétence de l’État est soumise à une coopération avec l’État hôte, il convient donc,
dans notre cas d’espèce, de se demander si l’État de nationalité a le devoir de commencer un
dialogue avec l’État hôte lorsque les intérêts de ses ressortissants sont violés sur ce territoire.
Les ressortissants européens mineurs actuellement détenus en Syrie, victimes de violation de
leurs droits fondamentaux (droit à la vie, interdiction de la torture, détention illégale, droit à une
éducation, à un accès aux soins etc.) se trouvent sous le contrôle des forces kurdes, et plus
largement des forces démocratiques syriennes qui ne sont pas reconnues comme ayant une autorité
gouvernementale.
§2. Un droit dont les sujets sont les États
Les États européens se permettent de refuser d’assister leurs citoyens présents à l’étranger
malgré la reconnaissance de ce droit par le droit communautaire (A), ce droit discrétionnaire ne
prend en aucun cas en compte la qualité de sujet de droit des individus (B).
A. Le retrait du droit à la protection consulaire face au droit européen
« Rien sans doute ne témoigne mieux de la répugnance du droit international classique à
l’égard d’une quelconque reconnaissance de la personnalité juridique internationale aux personnes
privées que l’institution juridique de la protection diplomatique »81.
Comme inscrit sur le site diplomatique de la Belgique, une assistance peut être fournie par un
centre de crise belge à tout citoyen résidant à l’étranger. Or le rapatriement, organisé dans les cas les
plus dramatiques, « n’est pas un droit du citoyen »82. Il est clairement établi sur ce site que
l’individu ne peut agir à l’encontre de la Belgique afin d’obtenir une protection consulaire. L’État a
le choix d’agir ou non.
81 A.
PELLET, Le droit international entre souveraineté et communauté, éd. Pedone, coll. Doctrine(s), 2014, p. 82.
82
Site des Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement du Royaume de Belgique :
https://diplomatie.belgium.be/fr/Services/voyager_a_letranger/belges_en_detresse/assistance_en_cas_de_crise (consulté
le 17 juillet 2019).
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L’arbitraire de ce droit et la non-obligation de l’État à l’appliquer est visible dans les actions
de certains États européens. L’Autriche, par exemple, envisageait en mars 2019 de retirer la
protection consulaire à tous les ressortissants européens qui ont combattu pour le groupe EI83.
Il est important de préciser qu’aujourd’hui les États font partie de communautés
internationales et régionales. L’Autriche rappelle bien que la protection consulaire sera retirée à tous
les ressortissants européens. En effet, un consulat d’un État membre de l’Union européenne peut
rapatrier ou assister un citoyen de la nationalité d’un autre État de l’Union européenne (suite à un
accord avec le ministre des affaires étrangères du pays d’origine). Selon la Commission
européenne:
« Tout citoyen de l'Union européenne (UE) se trouvant à l’extérieur de l’UE, dans un pays
où l'État membre auquel il appartient n'est pas représenté, peut bénéficier d'une protection
de la part des autorités diplomatiques ou consulaires de tout autre État membre de l'UE. Il a
le droit de bénéficier de cette protection au même titre que les ressortissants de cet autre État
membre84 ».
Les articles 20.2 et 23 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne consolident le
droit des citoyens de l’UE à bénéficier de la protection des autorités consulaires ou
diplomatiques85 .
Enfin, l’article 46 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne garantit une
protection diplomatique et consulaire à tout citoyen de l’Union : « Tout citoyen de l’Union
bénéficie, sur le territoire d’un pays tiers où l’État membre dont il est ressortissant n’est pas
représenté, de la protection des autorités diplomatiques et consulaires de tout État membre dans les
mêmes conditions que les nationaux de cet État »86 .
83
« IS-Kämpfer: Regierung streicht konsularischen Schutz für Rückkehrer », Die Presse, 06 mars 2019, disponible
sur : https://diepresse.com/home/ausland/aussenpolitik/5590601/ISKaempfer_Regierung-streicht-konsularischenSchutz-fuer-Rueckkehrer consulté le 17 juillet 2019.
84
Site de la Commission européenne sur le droit à la protection consulaire : https://ec.europa.eu/consularprotection/
content/about-consular_fr (consulté le 17 juillet 2019).
85 Traité
86
sur le fonctionnement de l’Union européenne, Journal officiel de l’UE, 26 octobre 2012, C 326/47.
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 18 décembre 2000, (2000/C 364/01).
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Le ressortissant mineur de l’Union européenne pourrait donc demander à un autre consulat de
bénéficier d’un rapatriement. Or, actuellement, il n’existe plus de consulats de pays de l’UE en
Syrie. Les ressortissants pourraient se rendre dans un pays limitrophe (Irak, Turquie) afin de
demander une assistance. Bien entendu, cela est réellement problématique pour les mineurs
actuellement détenus en Syrie. Cette situation exceptionnelle pourrait permettre aux autorités
nationales ou européennes de venir en aide aux citoyens malgré l’absence de consulat sur le
territoire, plusieurs rapatriements ont d’ailleurs été organisés par les autorités des États européens.
Ainsi les difficultés pratiques sont surmontables. De plus le Conseil de l’UE a adopté une
Directive le 20 avril 2015 relative à la protection consulaire des citoyens de l’Union. Cette directive
renforce le principe même d’assistance consulaire.
L’article 9 de cette directive prévoit les cas d’assistance consulaire :
« La protection consulaire visée à l’article 2 peut notamment comprendre des mesures
d’assistance dans les situations suivants: a) arrestation ou détention; b) fait d’être victime
d’un crime ou d’un délit; c) accident ou maladie grave; d) décès; e) besoin d’aide et de
rapatriement en situation d’urgence; f) besoin de titre de voyages provisoires comme prévu
dans la décision 96/409/PESC »87.
Or « comme la protection nécessaire dépend toujours de la situation concrète, la protection
consulaire ne devrait pas se limiter aux cas spécifiquement mentionnés dans la présente
directive »88 .
B. Le caractère discrétionnaire de l’utilisation de ce droit par les États
Malgré tous ces textes, la protection consulaire ne semble pas être une obligation juridique
pour l’État et ses services consulaires.
La position de la doctrine semble relativement claire concernant l’assistance consulaire dans
son application de protection des individus qui se trouvent en situation de crise. Jean-Paul Pancracio
affirme que la protection de l’État d’origine ne peut être acquise automatiquement89. Tout autant, M.
87
Directive (UE) 2015/637 du Conseil du 20 avril 2015 établissant les mesures de coordination et de coopération
nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l’Union non représentés dans des pays tiers et
abrogeant la décision 95/553/CE., article 9.
88
Considérant 14 de la-dite Directive.
89
Communication suite à la table ronde « La protection consulaire et diplomatique : concurrence ou
complémentarité? », lors de la journée d’étude de Lyon sur la protection consulaire en 2005 (ouvrage éd. Pedone, 2006).
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Kdhir écrit que « the superiority of the State over individuals means that Leviathan has no
obligation towards its citizens, not even to protect them towards other States »90. En utilisant le
terme « Leviathan », l’auteur se réfère à l’oeuvre de Thomas Hobbes et à sa conception de l’État91 .
Selon ce dernier, l’État est une autorité absolue et souveraine à laquelle les membres doivent
obéissance absolue.
L’intervention judiciaire pour non-assistance aux ressortissants de l’État de nationalité
n’existait que lorsque l’État d’accueil violait son obligation à l’article 36 de permettre à l’État et à
ses ressortissants de communiquer. Ainsi l’État violait une obligation en ne permettant pas à l’autre
État d’agir. En effet, le droit international, inter-étatique, ne prenait pas en compte les intérêts
individuels. Les individus étaient exclusivement objets et non sujets du droit international92 .
« Les auteurs, qui continuent de considérer que l’État est un sujet de droit détaché du
peuple qui peut faire ce qu’il veut parce qu’il est un sujet de droit alors que le peuple n’a
pas cette qualité, développent ou encouragent une vision, des conceptions et des pratiques
qui non seulement ne rendent pas compte de la réalité des luttes sociales mais conduisent
les États et les peuples vers des conflits et des impasses »93.
Section 2. Un droit remis en cause par l’intervention de l'autorité judiciaire
Les individus ont acquis une personnalité juridique en droit international (§1) qui leur a
permis de contester la violation de leur droit et de requérir une protection par leur État de
nationalité. L’affirmation de la responsabilité de l’État reste cependant incertaine (§2).
90
Traduction personnelle : « La supériorité de l'État sur les individus signifie que le Léviathan n'a aucune obligation
envers ses citoyens, pas même de les protéger envers les autres États », ibid., M. KDHIR, Les bénéficiaires de la
protection consulaire.
91
Thomas Hobbes, Le Leviathan 1651, éd. Flammarion, paru le 22 mars 2017
92 A.
PELLET, op. cit. p.84.
93
Madjid BENCHIKH, Réciprocité et universalité : Sources et régimes du droit international des droits de l’homme,
Mélanges en l'honneur du Professeur Emmanuel Decaux, Collectif, p. 105.
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§1. Vers une obligation de rapatriement à la demande des individus, nouveaux sujets de droit
international
Les individus ont acquis une qualité de sujet de droit international (A) et peuvent demander
une réparation face à la violation d’un droit international par leur État de nationalité (B).
A. Un droit dont les individus sont les sujets
« Le droit international et européen reconnaît des droits aux individus et corrélativement fait
naître à la charge de l’État des obligations correspondantes, il porte ainsi atteinte aux principes
classiques de la compétence nationale exclusive et de la non-ingérence dans les affaires
intérieures »94 .
Historiquement seuls les États souverains ont la capacité de contracter des obligations
internationales. Ils sont les seuls sujets originaires du droit international et l’individu est un
« objet » du droit95 . La Convention de Vienne sur les relations consulaires établit la conduite des
relations consulaires entre États par des explications techniques. Son objet principal est la mise en
place et le bon fonctionnement des postes consulaires dans les pays. Elle illustre l’application du
soutien à l’individu par le système interne de l’État qui réalisera une application effective du droit
international.
En 1928, la Cour permanente de justice internationale, dans son avis consultatif n° 15 dans
l’affaire de la compétence des tribunaux de Dantzig96, reconnaît la création de droits et obligations
à l’égard des individus, susceptibles d’être appliquées par les tribunaux nationaux, découlant d’un
accord international.
94
F. SUDRE, Droit international et européen des droits de l’Homme, Paris, PUF, 1995, 2ème ed., p. 73.
95
Selon la formule d’A. PELLET, Le droit international entre souveraineté et communauté, éd. Pedone, coll.
Doctrine(s), 2014, p.84.
96
Compétence des tribunaux de Dantzig (Réclamations pécuniaires des fonctionnaires ferroviaires dantzikois passés au
service polonais contre l’administration polonaise des chemins de fer), Série B., n°15, 3 mars 1928, Recueil des avis
consultatifs. En l’espèce la Cour avait à interpréter un accord passé entre la Pologne et Danzig en 1921 relatif aux droits
et obligations des cheminots danzigois passés au service de l’administration polonaise.
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Dans le cadre européen, à travers l’affaire Van Gend en Loos97, la Cour de justice de l’UE a
établi que les individus étaient des sujets de droit international et non plus seulement des
bénéficiaires de la règle de droit international.
Les individus peuvent alors se prévaloir directement de leurs droits au plan international.
Pourraient-ils donc faire valoir un droit à l’assistance consulaire du fait de leur nationalité ?
Il est légitime de se demander si les arrêts LaGrand du 27 juin 200198 et Avena du 31 mars
200499 prononcés par la Cour internationale de justice confèrent un droit individuel à recevoir
l’assistance consulaire. Dans ces affaires, des individus détenus aux États-Unis et condamnés à une
peine de mort n’avaient pu bénéficier de l’assistance consulaire (au sens de l’article 36 de la
Convention). En effet, la CIJ déclare que l’article 36 créer des droits individuels. Cet article
ordonne aux États de permettre la communication entre les ressortissants de l’État d’envoi et les
fonctionnaires consulaires (notamment lorsqu’ils sont en état de détention). La violation de cet
article est établie lorsque l’État omet ou refuse la communication entre les ressortissants et
fonctionnaires consulaires de l’État d’envoi. Cependant aucune jurisprudence ne concerne l’article
5 de la Convention de Vienne octroyant un devoir ou un droit à la protection consulaire tel que le
rapatriement. Aujourd’hui, l’individu véritable sujet de droit pourrait agir en responsabilité de l’État
face à une juridiction nationale ou internationale et relativement à son « droit » à la protection
consulaire.
Vu le refus des autorités d’agir, les grands-parents, lorsqu’ils le peuvent, agissent afin de
dénoncer les conditions de vie de leurs petits-enfants, mettre à jour leur statut de victime et
responsabiliser les États. Plusieurs plaintes ont été déposées à l’encontre des États européens pour
refus de rapatriement. Les grands-parents demandent à la Cour de déterminer la violation du droit
d’assistance consulaire des enfants ressortissants européens.
97 Arrêt
de la Cour de justice des communautés européennes, Van Gend & Loos (NV Algemene Transport- en Expeditie
Onderneming van Gend & Loos contre Administration fiscale néerlandaise), demande de décision préjudicielle par
Tariefcommissie - Pays-Bas. affaire 26-62 (5 février 1963), En l’espèce l’administration fiscale néerlandaise a appliqué
un droit de douane à une importation allemande, cette action semble contraire au traité de Rome. Ainsi il contient de se
demander si cette disposition communautaire peut s’appliquer valablement dans les relations entre les États membres et
leurs ressortissants.
98
LaGrand (Allemagne c. États-Unis d'Amérique), arrêt, C. I. J. Recueil 2001, p. 466.
99
Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. États- Unis d'Amérique), arrêt, CIJ. Recueil 2004, p. 12.
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B. Des décisions judiciaires nationales enjoignant les États à protéger leurs ressortissants
mineurs
La cour administrative de Berlin a jugé le 10 juillet 2019, suite à sa saisie par des familles
d’enfants présents en Syrie, que l’Allemagne devait rapatrier trois enfants allemands et leur mère
d’un camp de réfugiés en Syrie. Les trois enfants âgés de 2, 7 et 8 ans ont le droit de bénéficier de la
protection consulaire et d’être rapatriés du camp dans lequel les conditions de vie sont inhumaines
et dégradantes. En effet, l’inaction du gouvernement menace la vie des enfants100. Le 11 juillet 2019
l’avocat des familles a affirmé que le Ministre des affaires étrangères ne pouvait suspendre la
protection consulaire de manière discrétionnaire : « This is a fundamental decision in which the
Federal Foreign Ministry was clearly shown that one cannot avoid political responsibility and legal
responsibility »101.
Après un échec face à la justice néerlandophone de Belgique en 2018102, le 11 juin 2019 le
tribunal de première instance francophone de Bruxelles a condamné l’État belge a mettre en oeuvre
« toutes les mesures nécessaires et possibles en vue de rapatrier la demanderesse vers la
Belgique »103. En l’espèce la demanderesse, de nationalité belge, est majeure depuis le 1er février
2019. Victime d’un enlèvement parental elle a été emmenée mineure en Syrie au sein de DAESH
et elle est aujourd’hui détenue au camp de détention Al-Hol. Au regard de son droit à l’assistance
consulaire le tribunal admet « qu’aucun droit subjectif à l’assistance consulaire ne peut être reconnu
à la demanderesse, il n’en demeure pas moins que l’État belge peut décider de lui octroyer une
assistance et qu’il dispose de moyens pour ce faire »104 . Toutefois, compte tenu de la situation de la
100
La décision n’étant pas traduite en ligne, l’information découle donc des médias tel que DW : « Find and return
German children of IS adherents, rules Berlin court », 12 juillet 2019, disponible sur : https://www.dw.com/en/find-andreturn-german-children-of-is-adherents-rules-berlin-court/a-49561831?maca=en-rss-en-all-1573-rdf, consulté le 17
juillet 2019.
101
Traduction personnelle : « il s'agit d'une décision fondamentale dans laquelle le Ministère fédéral des affaires
étrangères a clairement démontré qu'on ne peut se soustraire à sa responsabilité politique et à sa responsabilité
juridique », d’après une interview de D. SCHOENIAN dans le journal NDR le 11 juillet 2019 (d’après le site
d’informations tagesschau.de https://www.tagesschau.de/investigativ/ndr-wdr/is-kinder-133.html).
102
Informations données par le site justice en ligne (http://www.justice-en-ligne.be/article1189.html consulté le 04
juillet 2019).
103 Tribunal
104
de première instance francophone de Bruxelles, Section civile, ordonnance n°19/37/C, 11 juin 2019.
Ibid., §46.
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!
requérante, il est jugé qu’en « décidant de ne pas mettre en oeuvre l’assistance consulaire avec tous
les moyens dont il dispose, alors même qu’un enfant se trouve dans un état de détresse aiguë, l’État
belge porte prima facie atteinte au droit reconnu par l'article 22bis de notre Constitution »105 .
L’article 22bis de la Constitution consacre le droit des enfants au respect de leur intégrité morale,
physique, psychique et sexuelle et la prise en compte de leur intérêt supérieur106 .
En prenant en compte ces deux éléments, le juge des référés constate qu’il dépasserait la
limite de ses compétences :
« En imposant à l’État belge les moyens qu’il doit utiliser pour y parvenir. Il lui appartient à
lui seul, dans le cadre de sa compétence discrétionnaire, de décider de la mesure qu’il
s’avérera la plus adéquate et pertinente. (...) il convient, dès lors, de faire droit aux
demandes tendant à la délivrance d’un laissez-passer ou de tout autre document
administratif approprié et à faciliter le retour de la demanderesse dans la mesure indiquée ciaprès ».
Ainsi, la compétence discrétionnaire de l’État est consacrée. Toutefois, compte tenu du
caractère exceptionnel de la situation, le juge des référés ordonne à l’État d’agir au minimum, en
fournissant un document administratif permettant à la requérante de revenir en Belgique. En effet, le
juge belge rappelle son pouvoir et son droit de « faire une injonction appropriée à l'administration,
lorsque celle-ci semble manifestement porter fautivement atteinte à un droit subjectif. Il peut
également, à condition de rester dans la sphère précitée, imposer ou interdire certains actes lorsqu’il
conclut raisonnablement que l’administration n’a pas agi dans le cadre des limites dans lesquelles
elle doit intervenir »107 .
Ce droit de la justice de juger des actes rattachés aux actes de gouvernement n’a pas été
considéré de la même manière en France.
105
Ibid., §49.
106
Constitution de la Belgique fédérale coordonnée le 17 février 1994.
107
Ibid., §38.
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!
§2. Une incompétence de l’autorité judiciaire dont le fondement pourrait être remis en cause
par la Cour européenne des droits de l’Homme
Contrairement à l’Allemagne ou à la Belgique, les juges français se sont déclarés
incompétents pour juger une affaire similaire (A) or cela pourrait constituer une violation du droit à
un procès équitable (B).
A. Une décision d’incompétence des juges administratifs français
Le 23 avril 2019, le juge des référés du Conseil d’État français a statué sur une affaire
concernant le rapatriement d’enfants mineurs et de leur mère, actuellement détenus dans le camp de
Roj en Syrie. La requérante a demandé au tribunal d’enjoindre au ministre de l’Europe et des
Affaires étrangères d’organiser le rapatriement en France d’elle-même et de ses enfants.
Selon le considérant 3 de la décision,
« La requête de Mme C...et de Mme D...a pour objet soit que l'État intervienne auprès
d'autorités étrangères sur un territoire étranger afin d'organiser le rapatriement en France de
ressortissants, soit qu'il s'efforce de prendre lui-même des mesures pour assurer leur retour à
partir d'un territoire hors sa souveraineté. Les mesures ainsi demandées en vue d'un
rapatriement, qui ne peut être rendu possible par la seule délivrance d'un titre leur
permettant de franchir les frontières françaises, ainsi que cela a été demandé à l'audience,
nécessiteraient l'engagement de négociations avec des autorités étrangères ou une
intervention sur un territoire étranger. Elles ne sont pas détachables de la conduite des
relations internationales de la France. En conséquence, une juridiction n'est pas compétente
pour en connaître »108.
De par la théorie des actes de gouvernement, le juge ne peut statuer sur cette affaire. L’acte de
gouvernement peut être défini comme « la dénomination appliquée à un certain nombre d’actes
émanant des autorités exécutives et dont la caractéristique commune est de bénéficier d’une
immunité juridictionnelle absolue »109. La séparation des pouvoirs entre le législatif, l’exécutif et le
judiciaire légitime cette notion.
108
Conseil d'État, Juge des référés, 23 avril 2019, 429668, Inédit au recueil Lebon, considérant 3
109
Gérard CORNU, Vocabulaire Juridique, éd. Bertrams, 2012.
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!
La représentante du ministère a expliqué à l’audience du 8 avril 2019 que « le tribunal n'est
aucunement le lieu d'un débat politique ou moral, mais juridique. Votre tribunal doit se déclarer
incompétent, en ce que la décision [de non-rapatriement] est un acte de gouvernement, non
détachable de la conduite des relations internationales »110 . Le droit se montre impuissant et sans
possibilité de recours effectif de la part des personnes directement concernées.
Toutefois, selon les avocats de la requérante, il est impensable que cette théorie s’applique au
cas de l’espèce dans lequel des droits fondamentaux des ressortissants sont violés et du fait que
l’acte de rapatriement ne s’effectue pas avec un État considéré comme souverain. En effet, les
rebelles kurdes qui contrôlent les camps de détention avec l’aide des puissances occidentales ne
sont pas formellement des autorités gouvernementales.
Cette décision suit la lignée jurisprudentielle du Conseil d’État. Déjà, en 1962, le Conseil
d’État avait estimé que le refus de rapatriement des harkis à la fin de la guerre d’indépendance
algérienne n’était pas détachable de la conduite des relations entre la France et l’Algérie (même si
l’Algérie n’était pas encore constituée en État mais était contrôlée par le Front de Libération
Nationale)111 .
Ce refus de juger entraine alors la question de l’absence de recours effectif. Les requérants se
trouvent dans une impasse sous le droit français et pourrait saisir la CEDH afin de faire valoir leur
droit à un recours effectif énoncé dans l’article 6 de la CESDH112.
110 Tribunal
administratif de Paris, ordonnance du 9 avril 2019, req. N°1906076/9.
111
Chantal MORELLE. « Les pouvoirs publics français et le rapatriement des harkis en 1961-1962 », Vingtième Siècle.
Revue d'histoire, vol. no 83, no. 3, 2004, pp. 119.
112
Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, adoptée le 04 novembre 1950,
entrée en vigueur le 03 septembre 1953, STE n°005.
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B. La Cour européenne des droits de l’Homme en faveur d’un rapatriement des ressortissants
européens mineurs ?
La Cour européenne des droits de l’Homme a consacré le devoir de protection diplomatique
dans la décision Boumediene et autres c. Bosnie Herzégovine113 . Quatre requêtes ont été introduites
fin 2006 par des activistes islamistes détenus à Guantanamo suite à leur remise, en octobre 2001,
par la Bosnie-Herzégovine aux États-Unis. Les requérants étaient de nationalités bosniaque et
algérienne. Les juridictions nationales enjoignaient les autorités bosniaques à agir
diplomatiquement auprès des autorités américaines. La Cour considère que l’État bosniaque avait
pris toutes les mesures nécessaires à assurer la protection des droits fondamentaux des requérants.
Dans sa décision d’irrecevabilité la Cour se livre à une lecture « réaliste » des obligations à
agir de l’État membre114 . Elle énumère les moyens mis en oeuvre par la Bosnie-Herzégovine pour
obtenir des assurances diplomatiques de la part des États-Unis :
« Les autorités de la Bosnie-Herzégovine sont intervenues à plusieurs reprises auprès
des États-Unis et ce dès la semaine suivant la première décision de la Chambre des droits de
l’homme dans cette affaire. Elles ont ainsi clairement manifesté leur engagement dépourvu
de toute équivoque en faveur du rapatriement des requérants et elles ont également levé tous
les obstacles internes au retour de ces derniers en Bosnie-Herzégovine. De plus, les autorités
de la Bosnie-Herzégovine ont envoyé un représentant qui a rencontré les requérants dans le
centre de détention de la Baie de Guantanamo ».
On peut se demander si la Cour ne pourrait juger de la bonne mise en oeuvre de la protection
diplomatique par les États membres de la Convention lorsque la violation d’un droit de la
Convention est établie. Elle pourrait ordonner aux autorités exécutives d’un État partie d’exercer la
protection diplomatique en faveur d’un ressortissant victime d’une violation de ses droits garantis
par la CESDH du fait de la nécessité de bénéficier d’un recours effectif.
113
CEDH, Boumediene c. Bosnie-Herzégovine (No 38703/06) et 5 autres affaires (40123/06, 43301/06, 43302/06,
2131/07 et 2141/07) du 18 novembre 2008.
114
G. COHEN-JONATHAN, J.F. FLAUSS, « La Cour européenne des droits de l’homme et le droit international »,
In: Annuaire français de droit international, volume 54, 2008. p. 545.
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Conclusion Titre 1
Aux Pays-Bas, l’ancien ministre des affaires étrangères Bert Koenders a affirmé :
« We keep referring to these people as foreign terrorist fighters. The uncomfortable
truth is that they are not foreign at all. They may be foreigners in the countries where they
are going to. But in reality they are our compatriots, our acquaintances, the classmates of
our kids, the guys and girls we see in our supermarkets They are part of our societies.
Perhaps the only thing that’s foreign to us is their mentality »115.
La protection consulaire, protection découlant directement du lien de nationalité entre l’État et
l’individu et permettant aux agents consulaires de l’État de venir en aide aux nationaux, reste un
droit discrétionnaire des États. Les droits attachés à la nationalité se sont raréfiés et désormais la
jouissance de nombreux droits repose sur la notion de résidence. La territorialisation du droit
suppose que les États ont pour obligation de faire respecter les droits fondamentaux des individus
présents sur le territoire uniquement dans un respect strict des principes de souveraineté et
d’indépendance.
Cependant les principes d’universalité et d’internationalisation des droits de l’Homme pèsent
désormais dans la balance pour empêcher l’État d’agir à sa guise même hors de son territoire.
Certes, la Charte des Nations-Unies consacre le respect de la souveraineté des États, toutefois ces
derniers ont l’obligation de respecter des droits de l’Homme universellement, les enjoignant à agir
dans le respect des droits fondamentaux dont sont titulaires les individus.
115 Traduction
personnelle : « Nous continuons de qualifier ces gens de combattants terroristes étrangers. La vérité, c'est
qu'ils ne sont pas du tout étrangers. Il se peut qu'il s'agisse d'étrangers dans les pays où ils se rendent. Mais en réalité, ce
sont nos compatriotes, nos connaissances, les camarades de classe de nos enfants, les garçons et les filles que nous
voyons dans nos supermarchés Ils font partie de nos sociétés. Peut-être la seule chose qui nous soit étrangère chez eux
est leur mentalité. », MEHRA LL.M Tanya, Dr PAULUSSEN Christophe, op. cit., p. 5.
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Titre II La complémentarité des droits de l’Homme et du droit
international humanitaire, fondement de l’obligation de rapatriement des
mineurs nationaux des États membres du Conseil de l’Europe
« Returning these children is a humanitarian and Human Rights imperative »116.
Aujourd’hui, la territorialisation des droits fondamentaux entraîne un abaissement des droits
et devoirs découlant du lien de nationalité. Ainsi il convient de se pencher sur les obligations
conventionnelles des droits de l’Homme des États. Il existe en Syrie et en Irak de réelles violations
des droits humains. Les enfants présents dans les camps ou en prisons se retrouvent face à des
traitements inhumains et dégradants, leur vie est en danger, le respect de leur vie familiale est violé,
ainsi que leur droit à une éducation. Tous ces droits sont des droits énumérés dans la Convention
européenne des droits de l’Homme dont les États européens sont tous parties. La question de
l’applicabilité de cette Convention est majeure en ce qu’elle permettrait de responsabiliser les États
européens qui ne permettent pas la bonne application de cette Convention (Chapitre 1).
L’obligation des États de faire respecter la Convention européenne des droits de l’Homme
découle de leur présence en Syrie et en Irak, laquelle provient elle-même de l’existence du conflit
armé syrien. Ainsi, les États européens, parties au conflit suite à la formation de la coalition doivent
respecter le droit international humanitaire qui régit les pratiques de la guerre. Le droit international
humanitaire, jus in bello, s’applique lorsqu’il existe un conflit armé tandis que le droit international
des droits de l’Homme s’applique en toute circonstances. La question de leur complémentarité a été
soulevée par la doctrine et la jurisprudence qui acceptent l’application des deux corps de règles en
temps de conflit armé. De ce fait, le devoir de protection des enfants européens n’en est que
renforcé (Chapitre 2).
116
Traduction personnelle : « rapatrier ces enfants répond à un impératif du droit international humanitaire et du droit
international des droits de l’homme » , Fionnuala NI AOLAIN, op. cit.
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Chapitre 1. L’individu, sujet de droit de la Convention européenne des droits de
l’Homme
La volonté de l’État reste un élément central du droit international, son fondement même. Il
suffit de se concentrer sur les traités et actes juridiques, conclus par les États, qui sont les
manifestations directes de leur volonté. Ces actes ordonnent aux États d’agir dans le respect de leurs
règles. Selon la Convention européenne des droits de l’Homme, les États ont des obligations envers
les individus résidants sous leur juridiction. Cette notion évolutive est sujette à interprétation
(Section 1). Par ailleurs, le respect des droits énoncés dans la Convention peut être renforcé par des
techniques d’interprétation de la Convention qui élargissent alors la notion de juridiction
(Section 2).
Section 1. Une protection des individus placés sous la juridiction de l’État
En droit international, les États sont souverains sur leur propre territoire, ils possèdent la
compétence de régir les affaires internes. De ce fait, ils se doivent de respecter les normes établies
dans les Conventions dont ils sont parties sur leur propre territoire. Ils seront alors responsables en
cas de violation d’un droit d’un individu garanti par la Convention au sein de leurs frontières (§1).
Toutefois, la globalisation du monde actuel a permis aux États d’agir au-delà de leurs frontières,
dans le territoire d’États tiers. Les actions commises à l’étranger ne pourraient permettre à l’État de
s’exonérer de ses obligations découlant de la CESDH. Ainsi, la Cour européenne des droits de
l’Homme a offert une interprétation permettant un élargissement de la notion de juridiction (§2).
§1. La notion de juridiction, notion purement territoriale
Selon le texte de la Convention la notion de juridiction est purement territoriale (A). Ainsi la
Cour a opéré à une interprétation en ce sens : la Convention ne s’applique que sur l’espace juridique
européen (B).
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A. La territorialité du droit de la Convention européenne des droits de l’Homme
Lors de la signature de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des
libertés fondamentales, les États européens ont reconnu la création de droits envers les individus.
De ce fait, ils se trouvent responsables de la bonne application de la Convention envers ces derniers.
Leur responsabilité découle de leur contrôle qui découle lui-même de leur juridiction. En effet,
l’article 1 de la CEDH « Obligation de respecter les droits de l’Homme » dispose assez largement
que « Les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction
les droits et libertés définis au titre I de la présente Convention »117 .
Dans les travaux préparatoires de la Convention, le comité intergouvernemental des experts a
choisi de remplacer les mots « personnes résidant sur le territoire » par une référence aux personnes
« sous la juridiction ». L’objectif recherché semble être celui d’étendre l’application de la
Convention à des individus ne résidant pas sur le territoire mais qui s’y trouvent à un moment
donné118.
Dans la décision Soering, la Cour européenne des droits de l’Homme a statué que :
« L’article 1, fixe une limite, notamment territoriale, au domaine de la Convention. En
particulier, l’engagement des États contractants se borne à « reconnaître » aux personnes
relevant de leurs « juridictions » les droits et libertés énumérés. En outre, la Convention ne
régit pas les actes d’un État tiers, ni ne prétend exiger des Parties contractantes qu’elles
imposent ses normes à pareil État »119.
La notion de juridiction peut être définie par les éléments la fondant: nationalité, pavillon,
relations diplomatiques et consulaires, effet, protection, personnalité passive et universalité120 . Elle
est le contrôle sur l’individu par l’entremise d’organes ou instances étatiques. L’interprétation de
117
Contrairement à plusieurs traités internationaux qui peuvent avoir une application stricte de la notion de juridiction
territoriale, par exemple selon l’article 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politique « Les États parties au
présent Pacte s'engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur
compétence les droits reconnus dans le présent Pacte. ». Ainsi seules les personnes se trouvant sur le territoire des États
sont considérées comme sous la juridiction de l’État en question.
118
H.J. STEINER, P. ALSTON, R. GOODMAN, International human rights in context, law politics morals, Oxford
3ème ed., 2007, p. 951.
119
op. cit., §86.
120
CEDH, (Gr. Ch.), Bankovic et autres c. Belgique et 16 autres États contractants, 19 décembre 2001, n° 52207/99.
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cette notion de juridiction a donné lieu à de nombreuses jurisprudences. Ce qui nous importe ici est
le fait que, si les enfants présents en Syrie se trouvent sous la juridiction des États européens, alors
ces derniers peuvent revendiquer l’application de la Convention et enjoindre les États à appliquer
les droits présents dans cette dernière. L’étude de la notion de juridiction va nous permettre de
distinguer si l’État a une obligation strictement territoriale ou bien s’il a une obligation de faire
respecter les droits de l’Homme pour ses ressortissants mineurs nationaux présents en Syrie.
B. Une interprétation relativement stricte de la notion de juridiction, la naissance de l’espace
juridique de la Convention
La Cour a souvent affirmé l’importance d’une interprétation dynamique et évolutive du fait de
l'importance des droits qu’elle protège. Or concernant la territorialité de la juridiction elle a semblé
réticente à adopter une telle approche121 .
La Commission européenne des droits de l’Homme avait déjà estimé que la Convention
pouvait s’appliquer extra-territorialement dans l’affaire Hess c. RU le 18 mai 1975122 . Dans cette
affaire des personnes étaient détenues par un État partie à la Convention sur le territoire d’un État
tiers. Ces individus relevaient alors de la juridiction de l’État les détenant.
C’est la décision Bankovic et autres du 12 décembre 2001 qui s’est inscrite dans une logique
de territorialisation de la juridiction de la Cour européenne des droits de l’Homme dans un sens où
l’extra-territorialité pouvait être admise mais seulement dans des territoires situés dans l’espace
juridique de la Convention.
En l’espèce, des ressortissants de la République fédérale de Yougoslavie ont saisi la CEDH
pendant la crise du Kosovo en 1999. Leur requête concernait le bombardement d’un immeuble de
télévision par les forces de l’OTAN. La Cour a déclaré la requête comme irrecevable du fait que
l’acte incriminé ne relevait pas de la juridiction des États défendeurs. L’espace juridique de la
Convention est limité aux territoires des États parties contractantes :
121
H.J. STEINER, P. ALSTON, R. GOODMAN, op. cit., §4.
122
CEDH, Hess c. Royaume-Uni, 1975, n°6231/73.
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« La Convention est un traité multilatéral opérant, sous réserve de son article 56 (application
territoriale), dans un contexte essentiellement régional, et plus particulièrement dans
l'espace juridique des États contractants, dont il est clair que la RFY ne relève pas. Elle n’a
donc pas vocation à s’appliquer partout dans le monde, même à l’égard du comportement
des États contractants ».
Il n’existe pas de lien juridictionnel entre les personnes victimes de l’acte incriminé et les
États défendeurs. Ainsi l’action incriminée des États défendeurs n’engage pas la responsabilité de
ceux-ci au regard de la Convention. La doctrine Bankovic « conduit à une interprétation
neutralisante de la juridiction extra-territoriale de l’État partie contractante alors même que celui-ci
exerçait un contrôle effectif sur une partie d’un territoire d’un pays tiers à la Convention »123 .
L’obligation de la Cour est de tenir compte du caractère particulier de la Convention en tant
qu’instrument constitutionnel d’ordre public européen pour la protection des Hommes. La
Convention a une vocation essentiellement régionale, elle n’a pas été conçue pour être appliquée
dans le monde entier, même en ce qui concerne le comportement des États contractants124.
Afin de contrôler le respect des droits et obligations étatiques, il importe d’identifier le
comportement réalisé par l’État et le comportement exigé par la règle de droit (in abstracto et in
concreto)125 . Le comportement des États européens s’apparente à un refus de rapatriement des
enfants européens présents en Syrie et en Irak, alors qu'ils voient leurs droits fondamentaux violés.
Cela pourrait être légitime puisque les enfants ne se trouvent pas sur le territoire des États
européens. Ces derniers ne pourraient alors pas s’immiscer dans les affaires syriennes ou irakiennes
pour leur venir en aide et seraient, tout simplement, non responsables des violations des droits
fondamentaux des mineurs européens présents au Levant.
C’est à la Syrie et à l’Irak de faire respecter les droits fondamentaux des enfants et non pas
aux États européens dont les gouvernements se trouvent à des milliers de kilomètres.
123
Pr. G. COHEN JONATHAN, Pr. J.F. FLAUSS, « La Cour européenne des droits de l’homme et le droit
international », Annuaire français de droit international, 2009. p. 776.
124
H.J. STEINER, P. ALSTON, R. GOODMAN, op. cit., §74.
125
G. DANNENBERG, « La prise en compte d’éléments subjectifs dans le contrôle du respect des droits de l’Homme:
l’exemple de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme », dans Réciprocité et universalité :
Sources et régimes du droit international des droits de l’homme Mélanges en l'honneur du Professeur Emmanuel
Decaux, éd. Pédone, 2017, p. 793.
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Or, les États européens semblent avoir un certain contrôle sur le territoire syrien, cela ne
permettrait-il pas aux représentants des enfants de demander à ces États d’agir afin de faire
respecter leurs droits ?
La Cour européenne des droits de l’Homme a établie que :
« Si le lien de nationalité ne peut à lui seul suffire à justifier une application
extraterritoriale de la CESDH des actions des États parties à la convention accomplies ou
produisant des effets en dehors de leur territoire peuvent s'analyser, dans des circonstances
exceptionnelles, comme l'exercice par eux de leur « juridiction » au sens de l'article 1er de la
convention. Pour cela il est nécessaire que l'État en cause exerce sur un territoire son
autorité ou un contrôle effectif, directement, par le biais de ses forces armées, ou,
indirectement, par le biais d'agents ou d'affidés sur place, ou encore par une administration
locale subordonnée »126 .
§2. La notion étendue de juridiction de la CEDH
Il est possible qu’un État exerce un contrôle sur un autre État et se voie ainsi obligé de faire
respecter les droits de la Convention sur cet autre territoire. Cela est accepté et acceptable si « l’État
d’accueil » invite un État à agir (A), ou bien si un État contrôle un autre territoire, même extraeuropéen, par l’influence ou la force militaire (B).
A. Une juridiction extra-territoriale d’après une coopération entre États
L’article 1er de la Convention limitant l’application de cette même Convention ne peut être
interprété comme permettant à un État partie de commettre des violations de la Convention sur le
territoire d’autres États. Ainsi, exceptionnellement, un État contractant peut se livrer à un exercice
extra-territorial de sa compétence. Lorsque l’État défendeur, au travers du contrôle effectif exercé
par lui sur un territoire extérieur à ses frontières et sur ses habitants par suite d’une occupation
militaire ou en vertu du consentement, de l’invitation ou de l’acquiescement du gouvernement local,
assume l’ensemble ou certains des pouvoirs publics relevant normalement des prérogatives de
celui-ci, alors sa juridiction est établie et il a pour obligation de faire respecter la Convention. En
l’espèce, les autorités syrienne et irakienne coopèrent avec les États européens. De cette coopération
126
Al-Skeini et autres c. Royaume-Uni, CEDH Gr. Ch., 2011, n°55721/07, §319, en l’espèce les requérants sont les
proches de personnes décédés à Bossorah au sud de l’Irak lorsque le Royaume-Uni y avait le statut de puissance
occupante.
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!
pourrait découler un contrôle effectif des autorités étrangères sur leur territoire et ainsi
l’établissement de leur juridiction.
Il est largement admis qu’un État a le devoir d’appliquer la Convention hors de ses frontières
lorsqu’il y est invité par un autre État souverain. La coopération est encore et principalement ce qui
permet le respect des droits. La décision Rantsev c. Chypre et Russie du 7 janvier 2010 consacre ce
principe127. La Cour rappelle que la compétence juridictionnelle d’un État est principalement
territoriale du point de vue du droit international public, de ce fait « la possibilité pour un État
d’exercer sa juridiction sur ses propres ressortissants à l’étranger est subordonnée à la compétence
territoriale de l’autre État et un État ne peut généralement exercer sa juridiction sur le territoire d’un
autre État sans le consentement, l’invitation ou l’acquiescement de ce dernier »128.
La Cour examine si la Russie aurait pu, dans les limites de sa propre souveraineté territoriale,
prendre des mesures pour protéger la fille du requérant. Elle conclut que les griefs ne peuvent être
écartés à l’égard de la Russie pour incompatibilité ratione loci ou ratione materiae avec les
dispositions de la Convention129 . Ainsi exercer sa juridiction sur ses nationaux à l’étranger est
subordonné à la compétence territoriale de l’État. En l’espèce, Chypre a consenti à l’exercice de la
juridiction russe dans cette affaire et la Russie a étendu sa juridiction au cas de l’affaire.
Les autorités de Syrie et d’Irak pourraient demander aux États européens d’agir en faveur des
enfants afin de faire respecter leurs droits fondamentaux. Les enfants pourraient alors être rapatriés
du fait que les États européens exerceraient leur juridiction sur eux. Or les États européens ne
semblent pas vouloir coopérer avec les autorités locales pour permettre un rapatriement des enfants
suite à l’établissement de leur juridiction. Cependant, sans coopérer dans un but premier de rapatrier
les enfants, les États européens offrent un contrôle sur les zones du nord de la Syrie et sont engagés
dans des discussions avec les autorités irakiennes. Cette collaboration, qui n’a pas pour but le
respect des droits des enfants mais la lutte contre le terrorisme, pourrait au moins permettre
d’établir un certain contrôle des États européens sur le territoire du nord de la Syrie.
127
Rantsev c. Chypre et Russie, CEDH, 2010, n°25965/04. Le requérant, ressortissant russe, dénonce l’absence
d’enquête suffisante des services de police russe et le manquement des autorités chypriotes à prendre des mesures pour
protéger sa fille et sanctionner les responsables de mauvais traitements à son encontre et de son décès à Chypre.
128
ibid., §206.
129
ibid., §212.
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La Cour a admis le contrôle effectif comme critère d’extra-territorialité dans plusieurs
affaires.
Dans l’affaire Loizidou c. Turquie la Cour souligne que :
« La notion de "juridiction" au sens de l’article 1 de la Convention ne se circonscrit pas au
territoire national des Hautes Parties contractantes. La responsabilité de ces dernières peut
donc entrer en jeu à raison d’actes ou d’omissions émanant de leurs organes et déployant
leurs effets en dehors de leur territoire. Conformément aux principes pertinents de droit
international régissant la responsabilité de l’État, la Cour a dit - ce qui revêt un intérêt
particulier en l’occurrence - qu’une Partie contractante peut également voir engager sa
responsabilité lorsque, par suite d’une action militaire - légale ou non - elle exerce en
pratique le contrôle sur une zone située en dehors de son territoire national. L’obligation
d’assurer, dans une telle région, le respect des droits et libertés garantis par la Convention
découle du fait de ce contrôle, qu’il s’exerce directement, par l’intermédiaire des forces
armées de l’État concerné ou par le biais d’une administration locale subordonnée »130 .
Ainsi, le critère du contrôle effectif du territoire est à prendre en compte afin de déterminer la
juridiction de l’État et par la suite sa responsabilité. Dans la décision Chypre c. Turquie du 10 mai
2001 la Cour suit le même raisonnement131 . Elle considère que l’argument des requérants équivaut à
soutenir que tout individu lésé par un acte imputable à un État contractant sans considération de
territoire est soumise à la compétence de l’État. Ainsi, l’extra-territorialité de la Convention est
strictement admise lors d’opérations militaires aériennes ou par l’invitation ou l’accord du
Gouvernement souverain sur le territoire tiers132.
B. Une juridiction extra-territoriale admise par un contrôle effectif d’un État même hors du
territoire européen
En 2004, la Cour a rendu deux arrêts selon lesquels la notion de « contrôle effectif » a été
élargie.
130
CEDH, Loizidou c. Turquie, 1995, n°15318/89, §52.
131
CEDH Gr. Ch., Chypre c. Turquie, 2001, n°25781/94.
132
Pr. G. COHEN JONATHAN, Pr. J.F. FLAUSS, « La Cour européenne des droits de l’homme et le droit
international », Annuaire français de droit international, 2004. p. 782.
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!
Dans sa décision Ilascu et autres c. République de Moldova et Russie du 8 juillet 2004, la
Cour retient « l’influence décisive » dont disposent les États parties sur un territoire133. Elle
détermine que la juridiction russe aux fins de l’article 1 est établie, du fait que :
« La RMT, dotée d’organes de pouvoir et d’une administration propres, continue à se
trouver sous l’autorité effective, ou tout au moins sous l’influence décisive de la Fédération
de Russie et, en tout état de cause, qu’elle survit grâce au soutien militaire, économique,
financier et politique que lui fournit la Fédération de Russie. Dans ces circonstances, la
Cour estime qu’il existe un lien continu et ininterrompu de responsabilité de la part de la
Fédération de Russie quant au sort des requérants »134 .
Le contrôle effectif nécessaire à l’établissement du lien de juridiction ne nécessite pas une
action militaire directe.
Dans l’affaire Issa et autres c. Turquie du 16 novembre 2004 la Cour confirme que la théorie
du contrôle global s’applique même lorsque ce contrôle est effectué sur le territoire d’un État tiers
non européen135. L’obligation de garantir les droits et libertés énoncés dans la CESDH découle de
ce contrôle, qu’il soit exercé par les forces armées de l’État concerné ou par une administration
locale subordonnée.
Dans l’affaire Al-Skeini et autres c. Royaume-Uni, le Royaume-Uni était une puissance
occupante dans la région et devait prendre toutes les mesures pour assurer l’ordre public et la
sécurité, en respectant les lois du pays (article 43 des régulations de la Haye). Le Royaume-Uni
avait assumé en Irak des prérogatives de puissance publique. Les requêtes concernait le décès de
personnes civiles qui se trouvaient en Irak, sous la juridiction du Royaume-Uni Les requérants
reprochaient aux autorités britanniques d’avoir violé l’article 2 de la Convention. Dans ces
circonstances exceptionnelles, le lien juridictionnel entre le Royaume-Uni et les personnes décédées
existait.
Selon le Président de la République fédérale d’Allemagne, Frank-Walter Steinmeier, « la
terreur de DAESH vise la société libre et tous ceux qui veulent vivre en liberté… », « ....tout ce que
133
CEDH Gr. Ch., Ilascu et autres c. Moldova et Russie, 2004, n°48787/99.
134
ibid., §§392-393
135
CEDH, Issa et autres c. Turquie, 2004, n°31821/96. Six ressortissants iraquiens ont été agressés par des soldats turcs
présent du fait d’une opération militaire conduite par l’armée turque au nord de l’Irak en avril 1995.
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nous faisons n'est pas limité à une logique militaire mais s'inscrit dans un processus politique »136 .
Cette citation illustre la portée des engagements des États européens en Syrie et en Irak. Tout autant,
la Belgique rappelle régulièrement que son gouvernement vise à trouver des solutions politiques
durables au conflit en Syrie et à améliorer les conditions de vie des civils en Syrie et en Irak137.
La France est un acteur clé dans la coalition contre DAESH. Elle fait partie de tous les
groupes de travail internationaux sur le sujet et a contribué par des milliards d’euros à résoudre
cette crise138. Dans sa décision du 22 mai 2019, le Défenseur des droits français affirme que la
France opère un contrôle effectif sur le territoire du nord de la Syrie : « de l’influence militaire et
politique exercée par la France dans cette zone concernant le contrôle de la situation des enfants
français et leurs mères retenus par les forces démocratiques syriennes, résultent des obligations
conventionnelles liant la France »139.
De plus, selon Hicham Al-Hachemi, expert des questions terroristes, proche des
renseignements irakiens, Adel Abdel Mahdi, Premier ministre irakien et la rapporteuse spéciale sur
les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires au Haut-Commissariat de l’ONU, les
djihadistes français aujourd’hui condamnés à mort en Irak aurait été transférés de Syrie avec l’aide
des autorités françaises et de la coalition internationale plus globalement140 . En effet, les djihadistes
français transférés étaient libérables par les autorités kurdes qui ne peuvent contenir la population
actuelle dans les camps. Cette information a été relayée mais reste aujourd’hui démentie par les
autorités françaises. Plusieurs informations concernant l’implication de la France en Syrie et en Irak
ont été transmises aux institutions des droits de l’Homme.
Enfin, les groupes de travaux sur la détention arbitraire, la discrimination envers les femmes
et le rapporteur spécial sur la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants ont
affirmé que la France, membre de la coalition internationale, coopère avec les forces démocratiques
136
Rapport national allemand (2018) élaboré dans le cadre du projet de l’OIJJ « Renforcer les systèmes de justice
juvénile dans le contexte de la lutte contre le terrorisme : Renforcement des capacités et enseignement mutuel entre les
acteurs ».
137
Pour plus d’informations sur l’engagement militaire des États européens, voir Chapitre 2 Section 1, A), de ce
mémoire.
138
100 millions pour la crise syrienne en 2018, 45 millions dans le nord-est de la Syrie depuis 2017 sur des projets
humanitaires et de stabilisation, 15 millions en 2017, 30 millions en 2018 sur un programme spécifique d’urgence.
139
Défenseur des droits, décision n°2019-129 du 22 mai 2019, §17.
140
LeMonde, « L’ONU interpelle la France sur le transfert « illégal » de djihadistes français en Irak », disponible sur :
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/12/l-onu-interpelle-la-france-sur-le-transfert-illegal-de-djihadistesfrancais-en-irak_5498726_3210.html consulté le 12 août 2019.
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syriennes et supporte de facto les autorités kurdes militairement et politiquement ; à cet égard, la
France est présente dans la région où des "forces spéciales" ont été déployées141.
Concernant l’Irak, il est plus compliqué de déterminer un contrôle effectif de la part des États
européens.
Les États ont l’obligation de faire respecter les droits de la Convention. Les obligations
découlant de la Convention ne pourraient-elles pas enjoindre l’État à agir afin que les ressortissants
ne subissent pas les violations de la Convention ?
Section 2. L’émergence de nouvelles pratiques jurisprudentielles pour une meilleure
protection des individus
La CEDH a élaboré plusieurs techniques permettant une meilleure protection des individus.
Ces techniques permettent de contourner la notion stricte de juridiction. La pratique des obligations
positives enjoint les États à agir afin de permettre le respect des droits de la Convention (§1) tandis
que la technique de la protection par ricochet ordonne aux États d’agir afin de permettre le respect
des droits de la Convention même si leur violation se déroule sur le territoire d’un État tiers. Cette
dernière technique, par son anticipation à une éventuelle violation des droits garantis dans la
CESDH par un État tiers, pose la question de l’universalité de la Convention. Un État se voit agir en
protection d’un individu qui pourrait faire face à une violation de ses droits sur le territoire d’un
État tiers (§2).
§1. La pratique des obligations positives
La pratique des obligations positives, née dans un objectif de meilleure protection des êtres
humains (A), rend plus effective l’application des droits de la Convention (B).
A. La naissance des obligations positives
Parallèlement à l’obligation des États de respecter passivement les droits énoncés dans la
Convention, ces derniers disposent d’une obligation d’agir afin de permettre la bonne application de
141
UA SYR 1/2018, 13 juillet 2018.
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!
la Convention sous leur juridiction. Cette obligation semble avoir la capacité d’étendre la notion de
juridiction.
La Convention, traité de garantie collective des droits de l’Homme et des libertés
fondamentales, a pour objectif la protection des êtres humains142. C’est pourquoi la Cour se permet
d’interpréter la Convention en ce sens et que plusieurs techniques ont été élaborées pour permettre
l’extension de la notion de juridiction, c’est-à-dire l’extension de la protection des individus.
Afin de rendre l’application de la CESDH effective, il existe une exigence d’intervention
positive de l’État. Parallèlement au devoir de respecter les droits et libertés fondamentales énoncé
dans la Convention, l’État doit prendre des mesures permettant le respect de ces droits et libertés.
C’est avec l’arrêt Affaire linguistique belge du 23 juillet 1968143 que la Cour consacre la
technique des obligations positives en reconnaissant les « obligations de faire ». Toutefois, dans
cette affaire, la disposition invoquée était l’article 2 du Protocole n°1, article qui appelait une
règlementation par l’État.
Dans la décision Airey c. Irlande de 1979, la Cour considère que :
« La Convention a pour but de protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais
concrets et effectifs » et, ainsi, « l’exécution d’un engagement assumé en vertu de la
Convention appelle parfois des mesures positives de l’État; en pareil cas, celui-ci ne saurait
se borner à demeurer passif et « il n’y a (...) pas lieu de distinguer entre actes et
omissions »144.
L’État a donc l’obligation d’agir positivement afin de faire respecter les droits concrets
énumérés dans la Convention. En l’espèce, la requérante souhaitait obtenir une séparation de corps,
elle n’a pas exercé de recours juridique au motif que ses revenus étaient trop faibles. Selon elle,
l’État irlandais avait violé l’obligation énoncée dans l’article 6 en ne mettant pas à disposition de
recours effectif.
142
L.-E. PETTITI, E. DECAUX, P-H. IMBERT, La Convention européenne des droits de l’homme, commentaire
article par article, Economica, 2ème éd., 1999, p.138.
143
CEDH, Cour (Plénière), Affaire « relative à certains aspects du régime linguistique de l’enseignement en
Belgique », 23 juillet 1968, n° 1474/62, 1677/62, 1691/62, 1769/63, 1994/63, 2126/64.
144
CEDH, Cour (Ch.), Airey c. Irlande, 9 octobre 1979, 6289/73, §§24-25.
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La pratique des obligations positives semble, non pas inhérente à un droit spécifique (par
exemple article 6 de la CEDH dans l’arrêt Airey c. Irlande), mais valable pour tous les droits de la
Convention.
L’arrêt Ilascu et al. c. Moldavie et Russie consacre le lien entre obligations positives et
juridiction. En effet, selon la Cour, « les engagements pris par une Partie contractante en vertu de
l’article 1 de la Convention comportent, outre le devoir de s’abstenir de toute ingérence dans la
jouissance des droits et libertés garantis, des obligations positives de prendre les mesures
appropriées pour assurer le respect de ces droits et libertés sur son territoire »145. Le fait que la
République de Moldavie n’exerce pas de contrôle effectif sur la région en question, contrôle
essentiel à l’application de la Convention (par l’interprétation de la notion de juridiction vue cidessus), ne l’exonère pas de son devoir de prendre des mesures afin d’assurer le respect des droits et
libertés garantis par la Convention via la pratique des obligations positives. Ainsi, l’article 1 de la
Convention enjoint à tout État de faire respecter les droits de la CESDH sur son territoire formel
même s’il n’y exerce pas un contrôle effectif. L’abstention des autorités nationales pourra les rendre
responsables d’une violation d’un droit de la Convention.
Cette décision illustre l’importance de la place des obligations positives dans le droit de la
Convention. La Cour accepte que, même sans contrôle effectif, un État peut avoir des obligations en
vertu de la CESDH sur son territoire mais seulement relativement aux obligations positives.
B. Une technique permettant une meilleure protection des droits de la CESDH
Il convient d’étudier la part de responsabilité des États européens dans la violation des droits
fondamentaux des enfants.
Selon le Professeur Frédéric Sudre, la Convention impose à l’État partie une triple obligation:
obligation de respecter (de ne pas porter atteinte au droit), obligation de mettre en oeuvre (prendre
des mesures législatives, règlementaires, autres, afin d’assurer la jouissance concrète du droit),
obligation de protéger (prendre des mesures afin que des tiers ne portent pas atteinte au droit)146.
Ces obligations sont tout autant de nature substantielle que procédurale. Elles sont
substantielles en ce qu’elles commandent les mesures de fond nécessaires tandis qu’elles sont
145
CEDH Gr. Ch., Ilascu et autres c. Moldova et Russie, 2004, n°48787/99, §313.
146
F. SUDRE, op. cit., 14ème éd. §161.
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procédurales en ce qu’elles appellent l’organisation de procédures internes (par exemple le droit des
personnes à bénéficier d’une enquête effective).
Ainsi l’inaction des États européens face aux violations des droits fondamentaux des
ressortissants mineurs en Syrie pourrait être jugée sous l’angle des obligations positives. Lorsque
ces violations ne se déroulent ni sur leur territoire formel, ni sous leur juridiction, il paraît
impossible de les responsabiliser. Or il a été convenu que certains États exerçaient un contrôle
effectif sur le territoire duquel les violations sont avérées, ainsi ils ont l’obligation positive d’agir
afin de faire cesser de telles violations. Ces obligations découlent du devoir de protection des
personnes placées sous la juridiction de l’État. En l’espèce, celui-ci ne fait rien pour permettre le
respect de leurs droits. Le seul moyen de faire cesser les violations de la CESDH est de rapatrier les
enfants qui, selon la Convention, sont titulaires d’un droit à la vie, droit de ne pas être soumis à des
traitements inhumains et dégradants, droit à la liberté et à la sureté, droit à un procès équitable et
droit au respect de leur vie privée et familiale147. Ces droits sont clairement violés en l’espèce et
l’État a l’obligation d’agir afin de permettre aux enfants de jouir pleinement de ces derniers.
Toutefois le caractère indérogeable des articles 2 et 3 de la Convention renforce ce besoin de
respect. L’arrêt A. c. Royaume-Uni du 23 septembre 1998 rappelle que :
« Combinée avec l’article 3, l’obligation que l’article 1 de la Convention impose aux
Hautes Parties contractantes de garantir à toute personne relevant de leur juridiction les
droits et libertés consacrés par la Convention leur commande de prendre des mesures
propres à empêcher que lesdites personnes ne soient soumises à des tortures ou à des peines
ou traitements inhumains ou dégradants, même administrés par des particuliers »148.
En l’espèce, malgré l’évidence des traitements inhumains et dégradants dont sont victimes les
enfants en Syrie et en Irak, les États européens n’agissent pas. C’est la question de leur inaction qui
est cruciale et qui peut être considérée comme illégale.
147 Article
148
2, Article 3, Article 5, Article 6, Article 9 de la CESDH.
CEDH, A. c. Royaume-Uni,19 février 2009, n°3455/05, §22.
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§2. La protection par ricochet, vers une universalité des DH ?
La pratique de la protection par ricochet, qui permet aux États européens d’agir en protection
de la CESDH face à une potentielle violation de cette Convention sur le territoire d’un État tiers,
renforce la protection des individus sous la juridiction des États membres de la CESDH (A). Un
État agissant dans cette optique signifie qu’il protège un individu dont les droits pourraient être
violés s’il quittait la juridiction de l’État européen. Ainsi, il permet une application quasi-universelle
de la CESDH et semble tendre vers son application universelle (B).
A. La protection par ricochet, une application quasi-universelle de la CESDH
La technique de la protection par ricochet est définie par le Professeur Sudre comme un
mécanisme qui « permet aux organes de la CEDH d’étendre la protection de certains droits garantis
par la Convention à des droits non expressément protégés par elle »149.
Principalement, il s’agit de la situation dans laquelle une décision d’éloignement est la cause
de la violation d’un droit garanti par la Convention. La décision Soering c. Royaume-Uni du
7 juillet 1989 consacre ce mécanisme. Le requérant, un ressortissant allemand, était détenu en
Angleterre et attendait son extradition vers les États-Unis, où il devait répondre d’accusations
d’assassinat. Il alléguait que, s’il était extradé, il serait condamné à mort et subirait un traitement
inhumain et dégradant compte tenu du « syndrome du couloir de la mort ». La Cour a jugé que si la
mesure d’éloignement est susceptible de violer l’un de ses droits protégés par la Convention, alors il
peut bénéficier d’une protection indirecte de la part de la CEDH qui enjoindrait l’État à ne pas
mettre en oeuvre une telle mesure. L’État se rendrait coupable d’une violation de la Convention s’il
prenait consciemment une mesure d’éloignement malgré le fait que la violation se déroulerait hors
de la juridiction de l’État. En l’espèce la Cour a confirmé qu’une extradition entrainerait une
violation de l’article 3 de la CESDH en ce que le requérant subirait un tel traitement sur le territoire
des États-Unis suite à la décision d’éloignement.
149
F. SUDRE, op. cit., p. 910, §612.
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« C’est ici la confirmation du caractère « objectif » de la Convention et de sa spécificité « de
traité de garantie collective des droits de l’Homme »150. Cette protection trouve son origine dans
l’article 1 de la Convention et découle du caractère « absolu » de l’article 3, interdiction des
traitements inhumains et dégradants. Cet article est un droit intangible, il ne peut faire l’objet
d’aucune limitation ou dérogation.
Ainsi la Cour a affirmé que :
« L’article 1 (art. 1) ne saurait s’interpréter comme consacrant un principe général selon
lequel un État contractant, nonobstant ses obligations en matière d’extradition, ne peut livrer
un individu sans se convaincre que les conditions escomptées dans le pays de destination
cadrent pleinement avec chacune des garanties de la Convention. En réalité, le
gouvernement britannique le souligne avec raison, en déterminant le champ d’application de
la Convention, et spécialement de l’article 3 (art. 3), on ne saurait oublier l’objectif
bénéfique de l’extradition: empêcher des délinquants en fuite de se soustraire à la
justice »151.
Cette obligation est une obligation de prévention: l’individu va subir des traitements
inhumains et dégradants donc l’État a une obligation de ne pas l’expulser afin qu’il ne subisse pas
de tels traitements.
Cette obligation a été entérinée par le Comité des droits de l’Homme dans son observation
générale n°6 sur l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, concernant le
droit à la vie. Il détermine que « l’obligation de respecter et de garantir le doit à la vie exige des
États parties qu’ils s’abstiennent d’expulser, d’extrader ou de transférer par d’autres moyens des
personnes vers des pays où il existe des motifs sérieux de penser qu’elles seront exposées à un
risque réel d’être privées de la vie en violation de l’article 6 du Pacte »152.
150
F. SUDRE, ibid., p. 913 §614.
151
CEDH, Soering c. Royaume-Uni, §86.
152
Comité des droits de l’Homme, Observation générale n°6, seizième session, 30 avril 1982, HRI/GEN/Rev.9 (Vol. I),
pt. 34.
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!
Par ailleurs, dans son obligation générale n°31, le Comité des droits de l’Homme établi que :
« De surcroît, l’obligation faite à l’article 2 aux États parties de respecter et garantir à toutes
les personnes se trouvant sur leur territoire et à toutes les personnes soumises à leur contrôle
les droits énoncés dans le Pacte entraîne l’obligation de ne pas extrader, déplacer, expulser
quelqu’un ou le transférer par d’autres moyens de leur territoire s’il existe des motifs
sérieux de croire qu’il y a un risque réel de préjudice irréparable dans le pays vers lequel
doit être effectué le renvoi ou dans tout pays vers lequel la personne concernée peut être
renvoyée par la suite, tel le préjudice envisagé aux articles 6 et 7 du Pacte »153 .
Selon l’avocate Marie Dosé, « ces Français détenus au Kurdistan syrien demeurent sous la
juridiction de l’État, puisque la décision de ne pas les rapatrier est un choix politique qui a des
répercussions juridiques sur leur situation en dehors du territoire national »154.
C’est ainsi que prendre la décision de laisser les enfants en Syrie, endroit où ils subissent et
vont subir des traitements inhumains et dégradants, ne répond pas à l’obligation de respect de
l’article 3 de la Convention ou de l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques.
B. Un objectif de protection des êtres humains vers une application universelle des droits
fondamentaux ?
Etendre la Convention à des droits non garantis par cette dernière en ce qu’une action
conforme à la Convention aurait un impact non conforme aux droits prévus dans celle-ci permet de
se demander si la Convention, qui a pour objectif la protection des droits fondamentaux, ne pourrait
s’appliquer universellement. L’objet et le but de cet instrument de protection des êtres humains
appellent à comprendre et appliquer ses dispositions d’une manière qui en rende les exigences
concrètes et effectives155. En outre, toute interprétation des droits et libertés énumérés doit se
concilier avec « l’esprit général [de la Convention], destinée à sauvegarder et promouvoir les idéaux
153
Comité des droits de l’Homme, Observation générale No 31, La nature de l’obligation juridique générale imposée
aux États parties au Pacte (Quatre-vingtième session), U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.7 (2004). §12.
154,
Marc DAOU, « Rapatriement d’enfants de jihadistes français : « On est au-delà de l’injustice » », 07 mai
2019,France 24,
disponible sur : https://www.france24.com/fr/20190506-syrie-rapatriement-enfants-jihadistesfrancais-france-saisine-cedh-justice, consulté le 20 juillet 2019.
155
CEDH, Arrêt Artico du 13 mai 1980, série A no 37, p. 16, § 33.
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!
et valeurs d’une société démocratique »156. C’est ainsi que la question de l’application universelle
des droits énumérés dans la Convention, au-delà de toute notion de juridiction, se pose.
L’objectif des droits de l’Homme est l’abolition des injustices, qu’importe l’endroit où elles
existent. Il s’agit de respecter, protéger et remplir les intérêts fondamentaux des individus sans
considération de l’endroit où la violation a été commise. Le principe d’universalité des droits de
l’Homme est consacré par l’article 55 (c) de la Charte des Nations-Unies selon lequel :
« En vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les
nations des relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité des
droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, les Nations Unies favoriseront le
respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous,
sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion »157.
De plus, l’article 9 des principes de Maastricht relatifs aux obligations extraterritoriales des
États dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels158 , délimite le champ de
compétence de l’État :
« L’État est tenu de respecter, de protéger et de mettre en œuvre les droits économiques,
sociaux et culturels dans les situations suivantes : b) situations dans lesquelles les actes ou
les omissions de l’État entrainent des effets prévisibles sur la jouissance des droits
économiques, sociaux et culturels, que ce soit sur ou en dehors de son territoire ; c)
situations dans lesquelles les États, agissant séparément ou conjointement, que ce soit par le
biais de leur pouvoir exécutif, législatif ou judiciaire, sont en position d’exercer une
influence décisive ou de prendre des mesures afin de réaliser les droits économiques,
sociaux ou culturels au-delà de leur territoire, et ce dans le respect du droit
international »159 .
Il est clairement établi que l’applicabilité des droits humains doit se faire au-delà des
frontières du territoire des États. Découle de ce principe la responsabilité de l’État en cas d’une
156
CEDH, Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen, 7 décembre 1976, série A no 23, p. 27, § 53.
157 Article
55, Chapitre IX: coopération économique et sociale internationale, Charte des Nations-Unies, 1945.
158
Principes établis le 28 septembre 2011 lors d’un réunion organisée par l’Université de Maastricht et la Commission
internationale de Juristes (experts en droit international et droits de l’homme).
159
ibid., point 11.
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!
violation de ses obligations internationales en matière de droits de l’Homme, que ce soit en dehors
ou sur son territoire.
Ces principes, tout comme l’article 55 de la Charte des Nations-Unies, concernent les droits
économiques, sociaux et culturels. Toutefois, la distinction entre les droits civils et politiques et les
droits économiques, culturels et sociaux a été progressivement remise en cause, notamment par la
CEDH160 .
Enfin, comme le précisent les professeurs Decaux et Imbert, « l’emploi à l’article 1 du mot
reconnaissent de préférence à des termes tels que protègent ou respectent, suggèrent d’ailleurs que
les droits reconnus ont une valeur erga omnes, expression de l’universalité des droits garantis par la
Convention »161.
Le refus de rapatrier leurs ressortissants présents en Syrie et en Irak est une décision illégale
du fait des engagements internationaux des États européens. Aujourd’hui certains États européens
disposent d’une réelle mainmise sur la politique et la mise en place de camps de détention. Ainsi,
leur rôle devra être d’assurer un respect de la CESDH dans cette zone qui se trouve sous leur
contrôle, donc envers les individus y résidant.
Concernant l’Irak, et lorsque l’État européen n’exerce pas de contrôle effectif selon la
Convention, il conviendra de se pencher sur les normes des droits de l’Homme découlant de
conventions internationales ne disposant pas de l'obligation de juridiction162 ou bien les normes
impératives jus cogens. De plus, l’action de la coalition internationale en Syrie a une incidence sur
la situation des mineurs européens présents dans les camps. Les États européens, parties au conflit,
se doivent de respecter le droit international humanitaire, complémentaire au droit international des
droits de l’Homme163 .
160
Les droits civils et politiques, initialement droits garantis par la Convention, proscrivait une abstention de l’État.
161
Emmanuel DECAUX et Pierre-Henri IMBERT, loc. cit., p.141.
162
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté et ouvert à la signature, à la
ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, Entrée en
vigueur: le 3 janvier 1976, conformément aux dispositions de l'article 27.
163
Un des motifs de l’opposition à l’extraterritorialité des conventions des droits de l’Homme ressemble à celui
défendant la nature exclusive du droit international humanitaire en application de la loi spéciale. L’extra-territorialité
des conventions des droits de l’Homme va permettre un accroissement de la responsabilisation en ce qui concerne les
opérations militaires. De ce fait les États seront découragés à participer aux opérations de maintien de la paix.
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Chapitre 2. Le devoir de protection des enfants victimes de conflit armé,
l’application du droit international humanitaire et du droit des droits de l’Homme
Le droit international humanitaire est le droit inter-étatique des conflits armés, il régit les
règles à suivre par les parties à un conflit. Il est complémentaire avec les droits de l’Homme :
chacun répond à une philosophie différente mais tous deux sont concernés par le respect de la vie,
la santé et la dignité des individus.
Ces droits ont pour objectifs de protéger les civils et de limiter la violence, ils portent un
accent particulier à la protection des enfants par l’interdiction de leur utilisation par les forces
armées des conflits (Section 1). Ces enfants, combattants ou non, se doivent de recevoir une
protection en tant que victimes de violation du droit international (Section 2).
Section 1. Un droit de protection des enfants applicable au conflit armé syrien
Les enfants présents dans des camps en Syrie et en prison en Irak comptent parmi les
premières victimes du conflit armé dont sont parties leurs pays de nationalité (§1). Ces enfants
bénéficient d’un statut multiple, ils sont à la fois victimes, témoins et suspects des exactions
commises par l’État islamique. De cette affirmation découle un principe de protection spécifique du
fait de leur âge et donc de leur vulnérabilité. En effet, le droit international humanitaire s’attache à
la protection spécifique des enfants. (§2)
§1. Des enfants, victimes d’un conflit armé caractérisé
« Ces dernières années, les représentants des structures de protection de l’enfant des Nations
Unies ont noté avec préoccupation que la nature changeante des conflits armés et des tactiques
employées dans ce cadre créaient des menaces sans précédent pour les enfants »164 .
Le conflit armé syrien est très délicat à caractériser du fait de sa complexité, notamment du
fait de l’arrivée de l’EI en 2014. Afin de déterminer le droit humanitaire applicable, il convient de
définir ce conflit en tant que conflit armé international, (CAI) ou en tant que conflit armé non
164
Junior MUMBALA ABELUNGU, « Le droit international humanitaire et la protection des enfants en situation de
conflits armés » (Etude de cas de la République Démocratique du Congo) Thèse de doctorat en Droit Junior, 2016-2017,
p.1.
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international, (CANI), (A). Les Conventions de Genève de 1949165 et les protocoles additionnels de
1977166 se réfèrent à un certain type de conflit. La définition du conflit armé est cruciale car les
règles de droit changent en fonction de sa typologie (B).
A. Un conflit armé internationalisé
Le 15 mars 2011, des manifestants pacifiques commencent à protester contre le pouvoir en
place en Syrie. Quelques mois plus tard, est créée l’Armée syrienne libre, principale force armée
opposée au régime en réaction à la répression sanglante de la part des forces gouvernementales.Au
printemps 2013, profitant de la situation, l’« État islamique »apparait sur le terrain et prend le
contrôle de plusieurs villes et villages. Les pays occidentaux, soutenant initialement les rebelles,
renforcent leur intervention face à l’arrivée de l’EI. Ils commencent leurs premières frappes en
Syrie en 2014 sans l’accord de Bachar al-Assad, après les avoir débuté en Irak avec l’accord du
gouvernement. Par la suite, les États européens ont interprété la résolution 2249 comme leur offrant
un cadre légal et politique pour les actes de l’action internationale combattant l’EI. Il ne sera pas
opportun de discuter de la légitimité de l’intervention des États européens. Il semble toutefois, il
semble important de rappeler que la résolution 2249 ne donne pas d’autorisation à agir
militairement en Syrie et en Irak, en ce qu’elle n’est pas placée sous le Chapitre VII.
En Syrie nous pouvons donc distinguer plusieurs conflits imbriqués avec plusieurs parties,
l’armée régulière et ses alliés, les rebelles, les groupes djihadistes, les kurdes et leurs alliés et la
coalition internationale.
165
Convention (I) de Genève pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en
campagne, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 32, Convention (II) de
Genève pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer, adoptée le 12
août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 86, Convention (III) de Genève relative au
traitement des prisonniers de guerre, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p.
136, Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, adoptée le 12 août
1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 288.
166
Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits
armés internationaux (Protocole I), adopté le 8 juin 1977, entré en vigueur le 7 décembre 1978, RTNU., vol. 1125, p.
271, Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits
armés non internationaux (Protocole II), adopté le 8 juin 1977, entré en vigueur le 7 décembre 1978, RTNU., vol. 1125,
p. 649.
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Les États européens présents en Syrie forment une coalition menée par les États-Unis depuis
septembre 2014. La France, le Royaume-Uni et l’Allemagne étaient des partenaires majeurs,
considérant une réponse politique, humanitaire et, si nécessaire, militaire, comme cruciale167.
La Déclaration de Vienne adoptée le 14 novembre 2015 suite aux pourparlers de Vienne,
rappelle que « tous les membres de l’ISSG se sont également engagés en tant que pays individuels
et soutiens des divers belligérants »168 et par la résolution 2254 la coalition avalise la Déclaration de
Vienne en adoptant une « feuille de route » pour la paix169. La coalition vise à coordonner et
promouvoir les efforts de stabilisation en Syrie dans le but de renforcer une gouvernance crédible,
inclusive et non sectaire.
Un conflit armé international est limité aux relations conflictuelles armées soit entre Hautes
Parties contractantes du droit international, soit entre États ou organisations internationales.
Selon l’article 2 commun aux Conventions de Genève « en dehors des dispositions qui
doivent entrer en vigueur dès le temps de paix, la présente Convention s'appliquera en cas de guerre
déclarée ou de tout autre conflit armé surgissant entre deux ou plusieurs des Hautes Parties
contractantes, même si l'état de guerre n'est pas reconnu par l'une d’elles »170 .
Afin de qualifier les conflits actuels, souvent très complexes, le CICR utilise la technique du
fractionnement. Ainsi, dans un conflit général nous pouvons distinguer plusieurs conflits entre
certaines parties. Chacun de ces conflits dispose d’une qualification propre et doit respecter un
ensemble de règles spécifiques. Le conflit qui nous intéresse particulièrement est celui dans lequel
les pays européens sont engagés afin de lutter contre DAESH. Or l’EI, malgré son nom d’ « État
167
L’Allemagne a livré des équipements militaires, a fourni un soutien à la formation des combattants kurdes, a
contribué au soutien aérien des forces irakiennes au sol et a déployé des soldats allemands. La France a apporté un
soutien militaire aux forces locales contre DAESH : 1000 soldats ont été déployés. Elle offre également un support
aérien. La Belgique quant à elle est convaincue qu’il est essentiel de soutenir l’ensemble des initiatives politiques et
diplomatiques pour faire face à la crise, et non seulement répondre d’une manière exclusivement militaire.
Conjointement à son engagement politique, la Belgique participe à la formation de soldats, a envoyé des F-16s et a
augmenté son aide humanitaire et son aide à la stabilisation de l’Irak. Les Pays-Bas et le Royaume-Uni sont d’autres
acteurs essentiels dans la coalition. Le Royaume-Uni soutient le processus politique pour parvenir à un règlement
durable du conflit, il a versé des milliards de dollars d’aide humanitaire et des militons pour la stabilité et sécurité en
opposition au régime d’Assad. De plus, près de 1 400 militaires de ses militaires sont engagés dans la région.
168
Déclaration du groupe de soutien international à la Syrie (Vienne, 14 novembre 2015), disponible sur : https://
www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/evenements/actualites-2015/article/declaration-du-groupe-de-soutieninternational-a-la-syrie-vienne-14-11-15, consulté le 25 juillet 2019.
169
CS/12171 du 18 décembre 2015, disponible sur : https://www.un.org/press/fr/2015/cs12171.doc.htm consulté le 05
aout 2019.
Article 2 des Conventions de Genève adoptées le 12 août 1949, entrée sen vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol.
75.
170
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islamique », n’est pas considéré comme tel en droit international. En théorie, l’État se définit
classiquement comme « une collectivité qui se compose d’un territoire et d’une population soumis à
un pouvoir politique organisé »171 . L’« État islamique » semble doté d’un pouvoir politique organisé
et d’une population, il pourrait alors être considéré comme un État. Or il doit être reconnu par la
communauté internationale en tant qu’État et un droit ne saurait naître de l’illicéité : « le refus de
reconnaître l’« État islamique » résulte de sa violation du droit international non seulement dans sa
phase initiale de formation mais aussi dans sa phase actuelle de réalisation »172.
De ce fait, le conflit avec l’EI ne peut être considéré comme un CAI, il est obligatoirement
non international du fait de la qualification de cette partie au conflit, qui ne peut être considérée
comme Haute Partie contractante. De plus, rappelons que l’« État islamique »est qualifié de groupe
terroriste par le Conseil de Sécurité173 .
Or il n’est pas possible d’ignorer l’élément d’extranéité qui est l’intervention des puissances
étrangères174. Cette intervention, qu’elle soit sous la forme d’État à titre individuel ou de coalition
d’États pose la question du possible changement de nature du conflit. Un ou plusieurs États peuvent
intervenir dans un CANI de différentes manières, trois hypothèses peuvent alors se présenter175 .
171
Anne-Laure CHAUMETTE, « Daech, un «État islamique» ? ». Annuaire Français de Droit International, CNRS,
2014, p. 74.
172
Ibid, p. 82, l’auteure poursuit « L’« « État islamique »» est donc en totale violation des règles cardinales du droit
international: la souveraineté, l’intégrité territoriale, l’inviolabilité des frontières et ce, sans compter toutes les atteintes
massives aux droits de l’homme qui peuvent lui être imputées. C’est cette illicéité globale de l’« « État islamique »» qui
a poussé la communauté internationale à ne pas le reconnaître » p. 84.
173
S/RES/2249 (2015) « Considérant que, par son idéologie extrémiste violente, ses actes de terrorisme (…) l’« État
islamique »d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech) constitue une menace mondiale d’une
gravité sans précédent contre la paix et la sécurité internationales ».
174
Pour aller plus loin, lire l’article de Karim Emile BITAR, op. cit.
175
Lorsque l’État étranger intervient militairement à la demande du gouvernement de l’État hôte le conflit reste non
international car il n’y a pas d’opposition entre plusieurs États.
Lorsque l’État étranger intervient militairement pour soutenir le(s) groupe(s) armés non étatiques contre le
gouvernement de l’État territorial, la majorité applique la théorie de la double classification des relations conflictuelles :
les actes d’hostilités entre les forces gouvernementales de l’État territorial et le groupe d’opposition armé constituent un
CANI tandis que les actes d’hostilité entre les forces gouvernementales de l’État territorial et celles de l’État étranger
constituent un CAI.
Lorsque l’État étranger intervient indirectement (support économique, financier, stratégique) pour soutenir le(s)
groupe(s) armés non étatiques contre le gouvernement de l’État territorial il peut s’agir d’un CAI dès lors que le groupe
armé au bénéfice de ce soutien peut être assimilé à un organe de facto de l’État étranger. Il faut donc déterminer le
niveau de contrôle que l’État exerce, car une simple influence, par exemple, ne suffit pas à internationaliser le conflit.
La jurisprudence a permis de déterminer les critères permettant de considérer un groupe comme un organe de facto de
l’État. En effet dans l’arrêt de la CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua c’est le critère de contrôle
effectif qui a été retenu. Ce critère a été réaffirmé par la décision de la CIJ sur l’affaire relative à l’application de la
Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide qui va plus loin en exigeant une « totale
dépendance ».
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L’intervention occidentale, au début du conflit, n’était pas réalisée afin de se battre contre un
autre État mais contre un groupe non étatique et en soutien à un groupe rebelle. A cet égard, le
contrôle des États européens sur les forces rebelles, si qualifié de contrôle effectif, peut qualifier le
conflit de CAI.
B. Un droit applicable flou face à la complexité du conflit
Nous faisons face à un véritable flou juridique quant à l’identification du conflit et, a fortiori,
à l’application du droit international humanitaire par les parties au conflit. Ces lacunes dans la
réglementation ont une conséquence directe sur la protection des civils, dont on ne sait plus de quel
corpus juridique elle relève. Cela se répercute également sur l’effectivité de la condamnation des
parties auteures de crimes; puisque le flou juridique nourrit les débats sur les degrés et la nature des
responsabilités.
Le droit de la guerre se détermine par une raison d’humanité et non plus par une raison
d’État176. Les considérations humanitaires ont pris une place considérable dans ce droit, de ce fait la
dignité humaine dans les situations de conflit armé est aujourd’hui inhérente au droit de la guerre.
Du fait de leur vulnérabilité, les enfants requièrent un traitement privilégié par rapport au reste de la
population civile177 . Face à l’interdiction de l’utilisation d’enfants lors de conflit armé, les États
doivent répondre à leur besoin de protection.
La protection accordée à l’enfant dans un conflit armé se déclinera en fonction du statut de
l’enfant, en tant que civil ne participant pas aux hostilités, civil particulièrement vulnérable du fait
de son jeune âge ou combattant. Du fait de l’interdiction de l’enrôlement des enfants de moins de
quinze ans, ils sont considérés comme des victimes civiles en premier lieu. Par ailleurs, les enfants
âgés de plus de quinze ans sont considérés comme combattants adultes, même s’ils sont toujours
des enfants selon la CIDE. En l’espèce, les enfants de nationalité européenne détenus en Syrie ou en
Irak font partie de plusieurs catégories juridiques : ce sont des enfants-civils, vulnérables
(particulièrement ceux de moins de quinze ans), ou des enfants combattants, à même titre que les
176
Gerd OBERLTEINER, op. cit., p. 349.
177
Commentaire des Protocoles additionnels du 9 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 aout 1949, CICR,
Martinus Nijhoff Publishers, Genève 1986, p. 1401.
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adultes (particulièrement ceux de plus de quinze ans). Le DIH catégorise les enfants, ce qui modifie
la protection qui peut leur être accordée. Si l’importance de la distinction entre CAI et CANI est
moindre lors de la protection des enfants de moins de quinze ans car ils sont alors systématiquement
considérés comme civils vulnérables, même si enfants-soldats, cette distinction est primordiale
concernant le sort des enfants de plus de quinze ans.
Les enfants de moins de quinze ans ou ceux de plus de quinze ans non-combattants
bénéficient de la protection générale accordée par le droit humanitaire aux personnes civiles :
« dans le conflit armé international ou non international, les enfants comme personnes civiles seront
protégés contre des atteintes à la vie, à la santé, au bien-être physique ou psychique et à la dignité
humaine – par l’interdiction de l’assassinat, de la torture, de la mutilation des personnes ou encore
de tout acte de brutalité ou traitement humiliant ou dégradant et par l’assurance de diverses
garanties pénales »178 .Ainsi, la qualification du conflit ne sera pas d’une grande importance
concernant la situation des enfants civils.
Or ces derniers peuvent aussi disposer d’un statut différent qui est celui de combattant. Un
enfant-soldat ne bénéficie pas de la même protection selon qu’il combatte dans un CAI ou dans un
CANI. Dans un CAI il bénéficie du statut de prisonnier de guerre au sens de la III ème Convention
de Genève relative aux prisonniers de guerre, c’est-à-dire qu’il doit être libéré et rapatrié à la fin du
conflit179. Dans un CANI, l’enfant qui participe aux hostilités se trouve sous le régime applicable
aux combattants selon la loi locale. Or en Irak, la responsabilité criminelle est de 9 ans et le
territoire kurde syrien ne dispose pas de système de justice reconnu par les États européens. Ainsi
ces enfants sont jugés coupables par les gouvernements actuels locaux ou étrangers alors qu’ils sont
considérés comme victimes par le droit international.
§2. Des enfants victimes de violation du droit international humanitaire et des normes du droit
international des droits de l’homme
Les « lionceaux du Califat » représentent pour l’EI un pilier de son « État ». Les garçons sont
utilisés en tant que soldats, prêcheurs, espions, kamikazes ou bourreaux. Conjointement, même s’il
semblerait qu’elles apprennent aussi à utiliser des armes, l’éducation des filles se concentre sur une
mission : savoir tenir une maison, être une bonne épouse et mère. Etant donné la vulnérabilité des
178
179
Junior MUMBALA ABELUNGU, op. cit., p. 172.
Article 109 et s., Titre IV, III ème Convention de Genève.
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enfants ils se trouvent également sous la protection des instruments du droit international des droits
de l’Homme (A). La violation de ces normes s’illustre par le fait que l’enrôlement d’enfants de
moins de quinze ans constitue un crime international, de ce fait il convient de rappeler que le statut
de victime de ces enfants doit leur permettre de bénéficier d’une protection accrue de la part des
États (B).
A. L’interdiction de l’enrôlement des enfants de moins de quinze ans
La première mention des enfants-soldats au sein du DIH se trouvent dans les Protocoles de
1977. Ces derniers interdisent le recrutement des enfants de moins de quinze ans ainsi que leur
participation aux hostilités. Dans les conflits armés internationaux, le Protocole additionnel I exige
également que lors du recrutement militaire de jeunes gens âgés de 15 à 18 ans, priorité soit donnée
aux plus âgés. Enfin, l’article 4 paragraphe 3 du Protocole II dispose qu’il est essentiel « d'évacuer
temporairement les enfants du secteur où des hostilités ont lieu vers un secteur plus sûr du pays, et
les faire accompagner par des personnes responsables de leur sécurité et de leur bien-être »180 .
Dans la Convention n°182 sur les pires formes de travail des enfants, l’OIT défini comme une
pratique illégale « le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des
conflits armés »181. Cette Convention comporte la limite, à nos yeux, de ne pas interdire
l’enrôlement volontaire. Elle est donc en deçà d’une interdiction absolue de la participation des
enfants aux hostilités.
Enfin, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant
l’implication d’enfants dans les conflits armés, prohibe formellement le recrutement d’enfants dans
des forces armées. Selon ce Protocole, un enfant soldat est autant un combattant qu’un cuisinier,
esclave sexuel ou un domestique. Ce protocole est renforcé par les Accords de Paris182 qui
Article 4, §3, Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes
des conflits armés non internationaux (Protocole II), adopté le 8 juin 1977, entré en vigueur le 7 décembre 1978,
RTNU., vol. 1125, p. 649.
180
181
Article 3 de la C182, Convention (n°182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, Convention concernant
l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination (Entrée en vigueur:
19 nov. 2000), adoptée à Genève en 87ème session CIT, 17 juin 1999).
182 Accords
de Paris de l’UNICEF, 2007.
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rappellent la nécessité de permettre aux enfants de quitter sans condition les groupes armés et
l’interdiction de recruter des enfants lors de conflits armés.
Plus globalement, les enfants-soldats sont des enfants victimes de traite des êtres humains.
Ainsi, l’obligation de protéger les enfants est renforcée pour les États membres du Conseil de
l’Europe qui ont ratifié la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres
humains183 . La « traite des êtres humains » est défini en sont article 4, a). Elle désigne le
recrutement, le transport, le transfert ou l’accueil de personnes par tromperie, abus d’autorité ou
d’une situation de vulnérabilité aux fins d’exploitation (c’est-à-dire de travail forcé, esclavage,
servitude, exploitation sexuelle entre autres). L’article 16 de cette même Convention enjoint les
États signataires à rapatrier les victimes :
« 1. La Partie dont une victime est ressortissante ou dans laquelle elle avait le droit de
résider à titre permanent au moment de son entrée sur le territoire de la Partie d’accueil
facilite et accepte, en tenant dûment compte des droits, de la sécurité et de la dignité de cette
personne, le retour de celle-ci sans retard injustifié ou déraisonnable.
(…)
5. Chaque Partie prend les mesures législatives ou autres nécessaires pour mettre en place
des programmes de rapatriement avec la participation des institutions nationales ou
internationales et des organisations non gouvernementales concernées. Ces programmes
visent à éviter la re-victimisation. Chaque Partie devrait déployer tous les efforts pour
favoriser la réinsertion des victimes dans la société de l’État de retour, y compris la
réinsertion dans le système éducatif et le marché du travail, notamment par l’acquisition et
l’amélioration de compétences professionnelles. En ce qui concerne les enfants, ces
programmes devraient inclure la jouissance du droit à l’éducation, ainsi que des mesures
visant à leur assurer le bénéfice d’une prise en charge ou d’un accueil adéquats par leur
famille ou des structures d’accueil appropriées ».
Découle du statut des enfants victimes de traite un besoin de protection spécifique et
notamment un besoin de rapatriement selon la Convention européenne sur la lutte contre le trafic
d’êtres humains.
183
Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, Varsovie, 16 mai 2005, Série des
Traités du Conseil de l’Europe n°197.
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Les enfants sont victimes de crimes internationaux. Le Statut de Rome énonce dans son
Article 8 les différents crimes de guerre. Parmi ces deniers figure au point xxvi, « le fait de procéder
à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales
ou (le fait) de les faire participer activement à des hostilités »184 . Le 15 mars 2012, la CPI a rendu
son tout premier jugement en reconnaissant coupable de crimes de guerre l’ancien chef de milice de
République Démocratique du Congo, Thomas Lubanga, pour avoir enrôlé des enfants soldats en
2002 et 2003 et les avoir fait participer à un conflit armé. Le 10 juillet 2012 il a été condamné à 14
ans de prison185.
B. Le besoin de protection des enfants-soldats, victimes de crime international
Le statut de victime de crime international des enfants soldats enjoint les États parties au
conflit à prendre toutes les mesures de protection afin de permettre une reconnaissance de leurs
droits.
En l’espèce, l’Organisation internationale du travail, dans son Observation, enjoint le
gouvernement syrien à prendre des mesures pour assurer la démobilisation des enfants :
« Selon l’UNICEF, la participation des enfants au combat était monnaie courante, et certains
groupes armés de l’opposition ont fait commettre à des enfants de graves violations des
droits de l’Homme, notamment des exécutions et des actes de torture, tandis que les forces
gouvernementales auraient soumis des enfants au travail forcé ou les auraient utilisés
comme boucliers humains. Le Secrétaire général se réfère également à des rapports du
Haut-Commissariat aux droits de l’Homme, selon lesquels l’EIIL a annoncé publiquement,
le 11 décembre 2015, l’existence, déjà connue, d’une section composée d’enfants parmi ses
rangs, appelée «Les lionceaux du califat». Le Haut-Commissariat a également reçu des
informations selon lesquelles l’EIIL encourageait les enfants de 10 à 14 ans à rejoindre ses
rangs, et qu’il formait les enfants au combat. (…) Le Secrétaire général indique par ailleurs
que l’enrôlement en masse et l’utilisation d’enfants par l’EIIL se sont poursuivis, et que des
centres d’entraînement militaire où se trouvaient au moins 124 garçons de 10 à 15 ans
existaient à Alep, Dayr az Zawr et Raqqah. Le recours à des enfants soldats étrangers âgés
de 7 ans à peine dans 18 cas a considérablement augmenté, selon des informations
vérifiées »186.
184
Article 8, point xxvi , Statut de Rome de la Cour pénale internationale, A/CONF.183/9, 17 juillet 1998, et amendé
par les procès-verbaux en date des 10 novembre 1998, 12 juillet 1999, 30 novembre 1999, 8 mai 2000, 17 janvier 2001
et 16 janvier 2002. Le Statut est entré en vigueur le 1er juillet 2002.
185 Affaire
Lubanga, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, ICC-01/04-01/06.
186
Observation (CEACR) - adoptée 201, publiée 107ème session CIT 2018, Convention (n°182) sur les pires formes de
travail des enfants, 1999, République arabe Syrienne.
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La recommandation se fait à l’égard de la Syrie car les pays détenant les enfants capturés dans
le cadre du conflit doivent les traiter avec humanité, comme prévu par le droit international
humanitaire. Or, en l’espèce, les enfants font face à des conditions de vie inhumaines, à la torture et
à des traitements inhumains et dégradants. C’est pourquoi les États européens doivent agir pour la
protection de ces enfants. Le Comité des droits de l’enfant recommande à la Belgique de protéger
les enfants belges de moins de 10 ans qui sont des victimes de traite dans le contexte de
l’exploitation dans un conflit armé à des fins criminelles, conformément à la résolution 2331 (2016)
du Conseil de sécurité187.
Cette liste de normes internationales illustre le développement du régime juridique
international relatif à l’interdiction de recruter et d’utiliser des enfants-soldats. Leur statut de
victime enjoint les États parties à les protéger, donc à les rapatrier car les laisser dans ces prisons ne
répond pas aux obligations des États parties à les secourir. En définitive,
« Etant donné que le recrutement de mineurs et leur participation à des hostilités comportent
un risque élevé de dommage irréparable attentatoire à leurs droits fondamentaux, en
particulier le droit à la vie, les obligations des États découlant de l’article 38 de la
Convention, lu en conjonction avec les articles 3 et 4 du Protocole facultatif à la Convention
relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés,
revêtent une dimension extraterritoriale »188 .
Section 2. Un rapatriement à effectuer dans l’intérêt supérieur des enfants
Le rapatriement doit se faire dans le respect des droits des enfants, soit dans leur intérêt
supérieur et sans discrimination (§1). A la suite du rapatriement, le processus de réintégration de ces
enfants dans les sociétés européennes peut être complexe. L’accent devra être mis sur la
réadaptation et la réinsertion sociale lorsqu’il s’agit d’enfants, bien que des poursuites pénales
puissent demeurer une option dans certains cas appropriés. Il est important de veiller à ce que les
garanties de la justice pour mineurs s’appliquent et non pas les mesures antiterroristes qui ne
tiennent compte ni de leur âge, ni de leur statut de victime et qui n’ont pas pour but de les
187
Comité des droits de l’enfant, NU. Doc. CRC/C/BEL/CO/5-6, 28 février 2019, §50.
188
CIDE, Observation générale n°6, Traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur
pays d’origine, UN; Doc. CRC/GC/2005/6 (1er septembre 2005), §28.
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réhabiliter. Il convient d’assurer une protection et une réadaptation adéquate aux enfants-soldats ou
à ceux victimes de la traite d’êtres humains (§2).
§1. Un rapatriement dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant
En droit, toute décision concernant un enfant doit être prise dans son intérêt supérieur. Ainsi,
il convient de mettre les intérêts en balance afin de déterminer quel serait son intérêt supérieur. En
l’espèce, il convient de se demander si rapatrier un enfant européen dans son pays d’origine (dans
lequel il n'a possiblement jamais vécu) relève de son intérêt supérieur (A). Cela est d’autant plus
problématique lorsque l’enfant se trouve enfermé en Syrie ou en Irak avec sa mère. Il semblerait
que sa séparation d’avec sa mère soit contraire à son intérêt supérieur (B).
A. La notion d’intérêt supérieur de l’enfant relatif à son rapatriement
Le rapatriement des enfants doit se faire dans le respect de leur intérêt supérieur, notion
ouverte à toute interprétation, qui enjoint les États à rapatrier les enfants avec leur mère et sans
discrimination en fonction de leur âge ou de leur degré d’implication dans le conflit armé.
Le comité des droits de l’enfant a rendu ses observations finales concernant le rapport de la
Belgique189. Il recommande :
« b) de faciliter le rapatriement rapide de tous les enfants belges et, lorsque cela est
possible, de leur famille, quel que soit leur âge ou leur degré d’implication supposée dans le
conflit armé, compte tenu du paragraphe 26 de la résolution 2427 (2018) du Conseil de
sécurité et conformément à l’article 9 de la Convention »190 .
La CIJ l’a consacré : « la protection offerte par les conventions régissant les droits de
l'Homme ne cesse pas en cas de conflit armé »191. Ainsi le Pacte international relatif aux droits
189
Les observations finales sont des actes adoptés à la suite de l’examen des rapports périodiques soumis par les État.
Le comité des droits de l’enfant de l’ONU n’est pas une juridiction, l’observation finale rendue n’a pas de force
obligatoire mais elle a pour rôle d’évaluer le respect des droits protégés par la Convention des droits de l’enfant.
190
Comité des droits de l’enfant, Observations finales concernant le rapport de la Belgique valant cinquième et
sixième rapports périodiques, 1er février 2019. (CRC/C/BEL/CO/5-6) §150.
191
Conséquences juridiques de 1'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif; C. 1. J.
Recueil 2004, § 106.
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!
politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels ainsi que la Convention relative aux droits
de l’enfant s’appliquent.
Les principaux traités internationaux de protection des droits fondamentaux ont été signés par
les États européens et consacrent l’interdiction de traitements inhumains et dégradants.
L’application de ces traités internationaux se fait selon la juridiction des États. Or, au vu de la
situation spécifique des enfants présents en Syrie et en Irak et relativement à l’application des
Conventions des droits de l’Homme, il convient d’examiner leur application en fonction « de l’objet
réel et direct de la contestation et non en fonction de son objet formel ou apparent »192.
La Convention internationale des droits de l’enfant, adopté à l’unanimité par les Nations
Unies reconnait le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant en son article 3 :
« 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des
institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités
administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une
considération primordiale.
2. Les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son
bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres
personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures
législatives et administratives appropriées »193 .
Ainsi, le tribunal de première instance francophone de Bruxelles constate que le droit énoncé
à l’article 3 de la CIDE est un droit subjectif et, de ce fait, le tribunal a « le pouvoir de juridiction de
connaitre la demande »194. L’intérêt supérieur de l’enfant découlant de la Convention internationale
des droits de l’enfant doit primer et sa protection doit permettre le rapatriement des enfants, quelle
que soit la juridiction sous laquelle ils se trouvent.
Le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant était à l'origine une référence pour la prise de
décision en l'absence de droits codifiés. La Déclaration des droits de l'enfant de l'ONU en 1959 l’a
mentionné en premier lieu. Par la suite, en 1989, le principe a été codifié dans la CIDE. De ce fait, il
a été étendu à toutes les décisions concernant les enfants. Selon le Comité des droits de l’enfant, ce
192 Tribunal
193 Article
194
de première instance francophone de Bruxelles, section civile - 19/37/C, p. 16 §26.
3 de la Convention internationale des droits de l’enfant, 1989
ibid., p. 17 §30.
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!
concept dispose de trois dimensions : c’est un droit de fond, un principe juridique interprétatif
fondamental et une règle de procédure195 . En premier lieu ce droit de l’enfant doit être mis en
oeuvre dans toute prise de décisions le concernant. Il « crée une obligation intrinsèque pour les
États, est directement applicable et peut être invoqué devant un tribunal »196. Ensuite, il conviendra,
lors de l’interprétation d’une disposition juridique, de l’interpréter à la lumière de l’intérêt supérieur
de l’enfant. Enfin, les États ont le devoir d’expliquer les critères sur lesquels il se sont basés dans
une prise de décision ayant des incidences sur un enfant. Les intérêts des enfants doivent être mis en
balance et la décision doit permettre à l’enfant de voir son intérêt supérieur respecté. Un enfant est
souvent incapable de défendre ses propres droits ou son intérêt, c’est pourquoi il est important
d’inclure le concept d’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les décisions prises à son encontre.
Ce principe est quelque peu complexe à mettre en oeuvre. Il semble devoir l’être au cas par
cas ; « ll devrait être ajusté et défini au cas par cas, en fonction de la situation particulière de
l’enfant ou des enfants concernés, selon les circonstances, le contexte et les besoins des
intéressés »197 . Dans la mise en oeuvre de l’intérêt supérieur de l’enfant, il convient de prendre en
compte l’opinion de l’enfant, l’identité de l’enfant, la préservation du milieu familial et maintien
des relations, la prise en charge, la protection et la sécurité de l’enfant en situation de vulnérabilité,
le droit de l’enfant à la santé et le droit de l’enfant à l’éducation.
La décision de non-rapatriement des enfants présents en Syrie et en Irak doit démontrer que
leur intérêt supérieur a été évalué mais que, dans leur intérêt supérieur, il convient de les laisser
survivre dans ces pays. Les États européens, pour justifier cette décision, s’appuient sur le respect
de la souveraineté des États tiers et sur le risque sécuritaire.
195
Comité des droits de l’enfant, Observation générale no 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt
supérieur soit une considération primordiale (art. 3, par. 1), CRC/C/GC/14, 29 mai 2013, §6.
196
Ibid., §6, a).
197
Ibid., §32.
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B. Le rapatriement des enfants avec leur mère
« Qu’on rapatrie les orphelins, c’est très bien. Mais il reste 200 enfants qui ont la malchance
d’avoir une mère, puisque visiblement, c’est devenu une malchance », rappelle Marie Dosé198.
La question du rapatriement des enfants avec leurs parents (plus particulièrement avec la
mère, le père étant souvent décédé ou disparu) a suscité des débats controversés entre les autorités
des États membres. La mère peut avoir été impliquée dans des activités terroristes ou autres
activités criminelles et son retour peut présenter un risque pour la sécurité du pays. Toutefois,
l’intérêt supérieur de l’enfant et son droit à ne pas être séparé de sa famille ne doivent-il pas
l’emporter sur les préoccupations relatives à la sécurité ?
La séparation, contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant, pourrait être considérée comme
illégale au vu de la CIDE. Les article 5 et 9199, ainsi que l’article 8 de la CEDH (dont découle une
obligation positive de l’État de réunir les parents avec leur enfant) enjoignent les États à ne séparer
les familles que dans des situations exceptionnelles. La situation actuelle peut être considérée
comme telle, mais la séparation ne peut se faire juridiquement que par un service compétent et des
professionnels de l’enfance. Ce n’est pas le gouvernement qui peut juger de l’opportunité d’une
telle séparation et, selon de nombreux rapports de professionnels de la santé, l’impact de la
séparation se fera sur le plan neurologique et physiologique des enfants.
Ainsi les enfants qui ont la chance de vivre avec leur mère dans ces camps se retrouvent
discriminés et se voient refuser une protection et un accès aux soins et à la réhabilitation, du fait de
la présence de leur mère.
Le Président du tribunal de première instance de Bruxelles, action néerlandophone, a estimé
que l’État belge devait procéder au rapatriement de six enfants belges ainsi que des deux mères qui
les accompagnaient200 . Le Président du Tribunal de première instance « reconnait, que l’intérêt
supérieur de l’enfant l’emporte au-delà de toute considération politique, diplomatique ou
L. MATHIEU, F. AUTRAN, « Le Quai d’Orsay rapatrie les orphelins de jihadistes à dicrétion », 10 juin 2019,
Libération, disponible sur : https://www.liberation.fr/planete/2019/06/10/le-quai-d-orsay-rapatrie-les-orphelins-dejihadistes-a-discretion_1732889, consulté le 04 juillet 2019.
198
Ces articles consacrent le devoir des parents d’aider leurs enfants et le droit de ces derniers d’être éduqués par eux
(plus généralement le droit de ne pas être séparés de leurs parents).
199
200
Ordonnance du 26 décembre 2018, Tribunal de première instance de Bruxelles, section néerlandophone.
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!
sécuritaire »201. Le rapatriement avec les mères est audacieux étant donné que la pratique
européenne était le rapatriement sans ces dernières. Afin de motiver sa décision, le juge s’est basé
sur les article 5 et 9 de la CIDE.
De plus, la pratique de certains États membres consistant à ne rapatrier que les enfants d’un
certain âge (10 ou 12 ans) est également préoccupante car elle pourrait priver les enfants les plus
âgés de toute forme de protection au motif qu’ils pourraient avoir été impliqués dans les activités
liées au terrorisme. La compatibilité d’une telle pratique avec la CIDE, en vertu de laquelle un
enfant est un « être humain âgé de moins de 18 ans » semble discutable. Tout autant, cette mesure
est incohérente avec le droit international qui enjoint les État à traiter les enfants sans
discrimination. Le Comité des droits de l’enfant rappelle que :
« Le respect du droit à la non-discrimination va au-delà de l’obligation passive d’interdire
toutes les formes de discrimination dans l’exercice des droits énoncés dans la Convention et
requiert aussi, de la part des États, l’adoption de mesures proactives propres à garantir
effectivement à tous les enfants des chances égales d’exercer les droits énoncés dans la
Convention. Il peut être nécessaire à cette fin d’appliquer des mesures positives visant à
remédier à une situation de réelle inégalité »202 .
Enfin, l’intérêt supérieur de l’enfant est un principe essentiel à toute décision le concernant.
Ainsi, lors de son retour, il convient d’étudier son intérêt supérieur afin d’opérer une judiciarisation
ou non de ce dernier. En effet, malgré la vulnérabilité intellectuelle des enfants, ces derniers peuvent
être tenus responsables selon le droit. Toutefois, en ce qui concerne l’enfant, « l'étendue de sa
responsabilité doit être appréciée en prenant en considération sa capacité restreinte de discernement,
inhérente à son jeune âge. De plus, des mesures éducatives devraient être imposées et non de
véritables peines »203.
201
Le Délégué général des droits de l’enfant de la Communauté française, le Kinderrechtencommisaris de la
Communauté flamande, Retour de zone des enfants belges de Syrie, une seule option envisageable dans l’intérêt
supérieur des enfants concernés, Janvier 2019.
202
Comité des droits de l’enfant, op. cit., §41.
203
Maria Teresa DUTLI, « Enfants-Combattants prisonniers », Article, revue internationale de la Croix-Rouge, 785, 31
octobre 1990 , disponible sur : https://www.icrc.org/fr/doc/resources/documents/misc/5fzh5y.htm, consulté le 27 juillet
2019.
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!
§2. Un rapatriement dans une optique de judiciarisation, la non prise en compte du statut de
victime des enfants
Les enfants, victimes de violation de leurs droits fondamentaux doivent être réhabilités et
réintégrés en premier lieu (A). Enfin, si leur responsabilité est prouvée, il convient de prendre en
compte leur jeune âge et de respecter les principes de justice juvénile (B).
A. La nécessaire prise en compte du statut de victime des enfants
Les États ont le devoir de rapatrier les enfants qui le demandent du fait de leur nationalité et
de leur qualité de victimes de violation de leurs droits fondamentaux lors d’un conflit armé.
Toutefois, une fois sur le territoire de leur État de nationalité, il convient de rappeler que leur statut
de victime enjoint les États à avoir pour objectif de les réhabiliter et de les réintégrer. Les États
européens qui surnomment les enfants des « bombes à retardements » ne peuvent avoir en tête le
seul enjeu sécuritaire. Depuis les attentats en France, en Espagne ou encore au Royaume-Uni, les
États semblent ne distinguer que la lutte contre le terrorisme et la sécurité des citoyens (les lois
nationales anti-terroristes l’illustrent particulièrement). Toutefois les mineurs sont des enfants,
victimes de conflit armé, victimes de violations de leurs droits fondamentaux, dans des états de
stress post-traumatique et de vulnérabilité extrême. Souvent présents en Syrie et en Irak nonobstant
leur volonté (ils sont nés, pour la majorité, sur place ou ont suivi leur famille) ils ne peuvent être
considérés comme simples « terroristes » ou « victimes collatérales » .
Toutefois l’expérience de guerre directement éprouvée par une partie de ces enfants nécessite
une prise en charge spécifique. La participation aux combats constitue est un élément à prendre en
compte lors du retour des enfants-soldats notamment. Leur responsabilité ne peut-être effacée. De
ce fait, les États européens doivent respecter les principes internationaux de justice juvénile.
Les enfants soldats doivent bénéficier de tous les services d’appui nécessaire pour leur
permettre de retourner à la vie normale. Leur internement à titre exceptionnel est inévitable s’il font
peser une grave menace sur la sécurité mais « pareille mesure est compatible avec le droit
international des droits de l’Homme et le droit international humanitaire si les conditions de leur
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!
internement sont conformes aux normes internationales, dont l’article 37 de la Convention et les
dispositions relatives à la justice pour mineurs »204.
Le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'Homme rappelle dans ses
orientations relatives aux combattants terroristes étrangers qu’il est essentiel de traiter les enfants
engagés dans des actes terroristes au sein de l’« État islamique »en accord avec les approches à
l’égard des enfants-soldats (les considérer comme victimes principalement) et qu’il est également
essentiel de leur fournir un soutien nécessaire pour une réadaptation physique et mentale ainsi
qu’une réintégration effective205. L’approche de ce rapport reprend l’article 39 de la Convention
internationale des droits de l’enfant206. Les mesures anti-terroristes contenues dans les législations
nationales sont bien trop attentatoires aux droits des enfants207 . En Europe, face au terrorisme et à la
montée du sentiment d’insécurité, les autorités agissent avec moins de paternalisme et plus de
pénalisation et de détention. Le système de justice juvénile devient de plus en plus punitif dans de
nombreux États. Selon un rapport des Nations-Unies :
« At a time when public opinion expresses concern at the perceived threat posed to society
by juvenile delinquency, and States around the world contemplate reductions in the
minimum age of criminal responsibility and longer sentences of imprisonment, the
importance of building on the potential of restorative justice is all the greater »208.
204
Comité des droits de l’enfant, Observation générale n°6 (2005), « Traitement des enfants non accompagnés et des
enfants séparés en dehors de leur pays d’origine », CRC/GC/2005/6 §57.
205
ODIHR, op. cit., p.68.
206
CIDE, Article 39 : « Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour faciliter la réadaptation physique
et psychologique et la réinsertion sociale de tout enfant victime de toute forme de négligence, d’exploitation ou de
sévices, de torture ou de toute autre forme de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou de conflit armé.
Cette réadaptation et cette réinsertion se déroulent dans des conditions qui favorisent la santé, le respect de soi et la
dignité de l’enfant ».
207
Les mesures établies à l’encontre des combattants étrangers sont susceptibles d’entraîner des interférences invasives
avec la vie privée des enfants et d’autres de leur droits. En étant dirigés contre eux-mêmes ces mesures peuvent affecter
directement ou indirectement les droits des enfants à la liberté d’expression, de religion, à la vie familiale, l’éducation,
l’égalité et à la non-discrimination. Enfin, ces initiatives peuvent avoir des implications à long terme de grande portée
pour l’ensemble des droits civils, politiques économiques, sociaux et culturels des enfants.
208
Traduction personnelle : « Au moment où l'opinion publique s'inquiète de la menace que la délinquance juvénile
fait peser sur la société et où les États du monde entier envisagent de réduire l'âge minimum de la responsabilité pénale
et d'allonger les peines d'emprisonnement, il est d'autant plus important de valoriser la justice restaurative ». Office of
the Special Representative of the UN Secretary General on Violence against Children, « Promoting Restorative Justice
for Children », NY, 2013, p. 39.
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Tout en reconnaissant la nécessité d’une assistance post-traumatique pour les enfants, la
résolution 2396 demande expressément aux États d’enquêter au sujet des combattants terroristes
étrangers et de leurs familles, y compris les enfants. En France, une consigne a été donnée d’émettre
des mandats de recherche concernant les mineurs de 13 ans présents en Syrie et en Irak. Ces
derniers devront être placés en garde à vue à leur retour. Ceux âgés de 10 à 13 ans pourront aussi
être entendus sous le régime de la retenue209.
Sans nier que ces enfants aient commis des crimes dont les conséquences sont
particulièrement graves, la relation complexe entre la victimisation et la perpétration doit être
reconnue et les réponses doivent être adaptées. Les enfants présents en Syrie et en Irak ont un statut
multiple, ils sont victimes, témoins et suspects des exactions de l’ « État islamique ».
En tant que victimes, les enfants doivent avoir accès aux tribunaux, à un procès équitable qui
leur permettrait une réhabilitation et une compensation nécessaire à leur réintégration dans la
société et permettrait le respect de leur droit à un accès à un tribunal impartial.
En tant que témoins, il convient de recueillir leur témoignage afin de préciser leur rôle au sein
de cet État, et les exactions commises par les combattants ne peuvent être méconnue.
En tant que suspects, il convient de déterminer leur responsabilité. Au sein de l’EI, dans un
but d’apprentissage du fonctionnement de l’organisation terroriste, ils participaient activement aux
exactions commises. Recrutés et utilisés, en violation du droit international par ce groupe armé non
étatique, les enfants soldats subissent un endoctrinement afin d’être facilement manipulables210 .
Suite à cet endoctrinement les enfants sont souvent acteurs d’atrocités, voire de crimes
internationaux.
209
Déclaration de Mme Nicole Belloubet, Ministre de la justice, sur le retour des djihadistes en France, au Sénat le 13
décembre 2017, disponible sur : http://discours.vie-publique.fr/notices/173002489.html, consulté le 05 août 2019 : « 12
heures renouvelable une fois ».
210
OIJJ, « Children, the justice system, violent extremism and terrorism annex national reports », 2018, p. 98 : « L’«
État islamique »disposait d’un « Ministère de l’éducation » qui décidait que l’éducation était obligatoire pour les
garçons de 6 à 18 ans et pour les filles de 6 à 15 ans. L’éducation se concentrait sur l’étude du Coran, l’histoire de
l’Islam et la langue arabe pour les enfants étrangers. Une fois les études complétées, ils se concentraient sur l’éducation
physique (un camp d’entrainement incluant l’apprentissage de l’utilisation d’armes à feu, la lutte et la natation mais
aussi de la Charia) ».
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B. La nécessité de non-criminalisation des enfants
Il ne convient pas de faire de l’angélisme et il est vrai que les enfants revenants dans leur pays
de nationalité peuvent constituer un risque pour eux-mêmes ainsi que pour les autres. C’est
pourquoi il convient d’apporter des soins aux enfants victimes de DAESH.
« Les enfants diffèrent des adultes par leur degré de développement physique et
psychologique, ainsi que par leurs besoins affectifs et éducatifs. Ces différences constituent
le fondement de la responsabilité atténuée des enfants en conflit avec la loi. Ces différences,
et d’autres, justifient l’existence d’un système distinct de justice pour mineurs et requièrent
un traitement différencié pour les enfants. La protection de l’intérêt supérieur de l’enfant
signifie, par exemple, que les objectifs traditionnels de la justice pénale, comme la
répression/rétribution, doivent céder la place à des objectifs de réadaptation et de justice
réparatrice dans le traitement des enfants délinquants. Cela est conciliable avec le souci
d’efficacité dans le domaine de la sécurité publique »211 .
En France et en Allemagne, des enfants ont été condamnés à des peines de détention pour
faits de terrorisme. En France, les infractions terroristes commises par des enfants et par des adultes
relèvent toutes deux de la section antiterroriste du Tribunal de grande instance de Paris. Même si les
enfants sont pris en charge par une entité spéciale, la DPJJ212, qui peut proposer des alternatives aux
poursuites judiciaires (par exemple des mesures éducatives), ceux poursuivis pour participation à
une groupement en vue de la préparation d’un acte de terrorisme étaient presque systématiquement
placés en détention durant l’enquête, et, une fois jugés coupables, certain ont été condamnés à des
peines de détention. En Allemagne, en 2015, cinq enfants ont été condamnés à une peine de prison
et onze en 2016 (pour préparation d’une infraction grave portant atteinte à la sécurité de l’État,
discours haineux, dissémination de propagande et utilisation d’insignes interdits) : « …de manière
générale, dans les discussions publiques comme politiques, c’est le discours de la sécurité qui
211
Comité des Droits de l’Enfant, Observation Générale N. 10 (2007) concernant les Droits de l’enfant dans le système
de justice pour mineurs, §10.
212
Direction de la Protection Judiciaire de la Jeunesse.
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!
domine, en se concentrant principalement sur les extrémistes violents. Par conséquent, le contexte
spécifique de chaque jeune, de chaque mineur, est bien souvent négligé »213.
« C'est de la folie, et une folie très inhumaine, violant les droits, que de criminaliser et
d'enfermer ces enfants. Nous devons cesser complètement de criminaliser les enfants »214 . Selon
Paulo Sergio Pinheiro et Peter Newell, l’intérêt supérieur des enfants doit d’être une considération
primordiale, tout comme le droit de l’enfant au développement maximal possible215 . Selon le droit
international, notamment la CIDE, les États doivent fixer un âge de responsabilité pénale aussi
élevé que possible. Il est de 12 ans en Belgique et aux Pays-Bas, de 14 ans en Allemagne, et en
France il n’en existe pas, même si toutefois le concept de « discernement » fait qu’en pratique les
enfants de plus de treize ans seulement peuvent être reconnus comme pénalement responsables216 .
Les enfants de moins de treize ans ne peuvent être poursuivis en justice et font l’objet de mesures
de protection telles que le placement dans une institution spécialisée217. Pour les enfants qui doivent
faire face à la justice juvénile, les articles 37 et 40 de la CIDE s’appliquent. Le Mémorandum de
Neuchâtel sur les bonnes pratiques en matière de justice pour mineurs dans un contexte de lutte
contre le terrorisme, établi lors du Forum mondial contre le terrorisme, donne des orientations sur
l'élaboration et la mise en œuvre de politiques concernant les enfants dans les affaires de terrorisme
afin de renforcer le système de justice pour mineurs dans le contexte de la lutte antiterroriste. D’une
part, une attention particulière doit être donnée aux alternatives à la judiciarisation et, d’autre part,
toute décision à l’égard des enfants doit avoir pour objectif sa réintégration dans la société. Un
enfant en détention souffrira d’une stigmatisation et d’une rupture dans son éducation. Le fait de le
séparer davantage de sa communauté entraînera une plus grande difficulté lors d’une éventuelle
réinsertion et réadaptation futures.
213
Rapport national allemand (2018) élaboré dans le cadre du projet de l’OIJJ « Renforcer les systèmes de justice
juvénile dans le contexte de la lutte contre le terrorisme: Renforcement des capacités et enseignement mutuel entre les
acteurs ».
214
Paulo Sergio PINHEIRO, op. cit., p. 29.
215
Peter NEWELL « It is not child-friendly to make children criminals », Child friendly Justice, A quarter of a Century
of the UN Convention on the Rights of the Child, edited by Said Mahmoudi, Stockholm Studies in Child Law and
Children’s Right, Brill, Vol. 1, 2015 p. 137.
216 Article
217 Voir
122-8 du Code Pénal français.
le tableau 1 du rapport de l’OIJJ, op. cit., p. 32.
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En effet, selon le Défenseur des droits des enfants européen : « We believe that current trends
to reduce the age of criminal responsibility and to lock up more children at younger ages must be
reversed. The treatment of young people placed in penal institutions in many of our countries is a
scandal – breaching their fundamental human rights »218 . Les États devraient avoir pour objectif de
définir l’âge de la responsabilité pénale à 18 ans en développant des systèmes innovants de réponse
se concentrant sur l’éducation, la réinsertion et la réadaptation pour les mineurs. En effet, il ne sert
pas de réduire les capacités intellectuelles des enfants, ce qui leur desservirait, mais affirmer leur
responsabilité ne veut pas obligatoirement dire qu’il faille les criminaliser.
En Belgique le nombre d’enfants suspectés d’avoir commis des infractions terroristes a
augmenté219 . Toutefois, « une fois arrêtés et considérés comme « suspects », ces jeunes ne peuvent
être traités comme des terroristes adultes normaux. Plus encore, ils devraient être considérés comme
des enfants à risque. Par-dessus tout, il s’agit d’enfants, et ils doivent bénéficier de traitements
spéciaux en raison de leur vulnérabilité, avec des procédures et des mesures adaptées à leurs
besoins »220 . Aux Pays-Bas, seulement quatre affaires relatives à des enfants reconnus coupables
pour terrorisme ont été révélées entre janvier 2001 et juillet 2017. Lorsqu’un enfant rentre aux
Pays-Bas depuis le territoire de l’« État islamique », « il fait l’objet d’une évaluation individuelle
afin de déterminer la prise en charge adéquate, les mesures de sécurité, et les interventions
nécessaires avant d’établir un plan de traitement dans le cadre d’une consultation
multidisciplinaire »221 .
Thomas Hemmarberg, ancien Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe
convient qu’il est dans notre intérêt à tous d’arrêter de criminaliser les enfants. Il est essentiel de les
traiter en tant qu’enfants et de laisser le système de justice pénale aux adultes222.
218
Traduction personnelle : « nous estimons qu'il faut renverser la tendance actuelle qui consiste à abaisser l'âge de la
responsabilité pénale et à enfermer davantage d'enfants à un plus jeune âge. Le traitement des jeunes placés dans des
établissements pénitentiaires dans bon nombre de nos pays est un scandale - une violation de leurs droits humains
fondamentaux. », European Network of Ombudspersons for Children (ENOC) Statement on Juvenile Justice: Europe’s
children’s champions challenge governments to respect young offenders’ rights, Stockholm, 17 Octobre 2003 p. 1.
219
Il était de 22 en 2014, 35 en 2015 et 66 en 2016.
220
Rapport national belge (2018) élaboré dans le cadre du projet de l’OIJJ « Renforcer les systèmes de justice juvénile
dans le contexte de la lutte contre le terrorisme : Renforcement des capacités et enseignement mutuel entre les acteurs ».
221
Regional Overview Report, « Children, the Justice System, Violent Extremism and Terrorism: An Overview of Law,
Policy and Practice in Six European Countries », International Juvenile Justice Observatory, 2018, 62 p.
222
Peter NEWELL, op. cit., p. 143.
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Conclusion Titre 2
Les États ont l’obligation de répondre favorablement aux demandes de rapatriement de leurs
ressortissants mineurs. Ils ont l’obligation de respecter le droit humanitaire et les droits de l’Homme
même si les violations de ces droits se déroulent à des milliers de kilomètres de leurs frontières.
D’une part, l’établissement de leur contrôle effectif sur le territoire du nord de la Syrie est
démontré. De ce fait les enfants se trouvent sous leur juridiction et doivent voir leurs droits
énumérés dans la CESDH respectés.
D’autre part, les États européens, parties au conflit armé, ont le devoir de respecter les règles
de droit international humanitaire et de droit international des droits de l’Homme. Ce droit interdit
l’utilisation d’enfants-soldats lors de conflit. Bien entendu, ce ne sont pas les États européens qui
enrôlent les enfants dans leurs rangs mais l’État islamique, groupe armé non étatique (la question du
respect du droit international humanitaire par les groupes armés non étatiques devra faire l’objet
d’une autre étude). Reconnus comme enfants-soldats, ils sont victimes de violations de droit
international humanitaire ainsi que du droit international pénal et du droit international des droits de
l’Homme. Aujourd’hui détenus dans des camps ou en prisons et faisant face à des violations avérées
de leurs droits fondamentaux, les États ont l’obligation d’accepter la demande de leur rapatriement.
Leur intérêt supérieur enjoint les États à accepter leur retour dans leur pays d’origine, eux qui sont
victimes de violations de leurs droits fondamentaux. Leur besoin impérieux est de bénéficier d’une
aide psychosociale de réhabilitation et de réintégration dans une société aux côtés de leur famille.
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!
Conclusion finale
« La question du retour de ces enfants n’est donc pas qu’un problème politique. Ce
sont les valeurs de la République et celles portées par notre droit qui sont ici en jeu. Ces
enfants ne sont ni instigateurs ni acteurs de ces conflits, mais des victimes. Les djihadistes
renient ce qui fait nos sociétés démocratiques, il nous incombe de ne pas répondre à la
terreur par le reniement de nos valeurs, mais par le respect du droit »223.
Les États européens, en refusant le rapatriement des enfants, ne respectent pas leurs
obligations internationales, que ce soit celles découlant de traités de droit international public ou
celles découlant des principes du droit international humanitaire et du droit international des droits
de l’Homme.
Les enfants, constituant une catégorie de la population particulièrement vulnérable,
nécessitent une protection en toute circonstance. Aujourd’hui, la violation de leurs droits
fondamentaux dans des États non respectueux des droits de l’Homme enjoint les États occidentaux,
États de nationalité et parties au conflit, à rapatrier ces mineurs. Certes, les États ont pour obligation
le respect de la souveraineté exclusive de leurs pareils et n’auraient, en théorie, pas de légitimité
pour secourir leurs ressortissants mineurs présents en Syrie et en Irak. Or d’une part la violation des
droits est telle qu’il semble inconcevable de ne pas agir face à une telle situation, d’autre part leurs
obligations conventionnelles les enjoignent à agir. En effet, en contrôlant une partie du territoire par
leur influence militaire, politique et financière, ils ne peuvent se dédouaner de leurs obligations. Les
États agissent sur le terrain afin de lutter contre l’EI mais lorsque la décision n’est plus politique et
concerne le retour d’enfants victimes, ils décident de se retirer. Pourtant la situation actuelle n’est
pas si « exceptionnelle », des constructions juridiques existent et peuvent être mises en oeuvre afin
d’enjoindre les États européens à agir sur le territoire syrien et en coopération avec les autorités
irakiennes. Ajouté au principe fondamental de coopération entre les États, l’intervention
d’humanité, la lutte contre le terrorisme ou le lien de nationalité permettent de légitimer les
interventions étatiques. Les États ont la possibilité d’agir, les autorités locales le demandent. Ce qui
pose problème c’est leur refus face à ce devoir d’agir. Les autorités judiciaires sont devenues les
223Hassani
Mohamed RAFSANDJAN, « Enfants de djihadiste mais enfants de la République », 20 juin 2019, Le
Monde,, https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/06/20/hassani-mohamed-rafsandjani-enfants-de-djihadiste-maisenfants-de-la-republique_5478788_3232.html
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dernières garantes du respect des droits fondamentaux. La requête devant la CEDH du 9 mai 2019
n’a pas encore été jugée mais si la Cour tranche en faveur d’un rapatriement, elle renforcera
considérablement sa place dans le système international de protection des droits fondamentaux.
La responsabilité des États pour leur inaction est évidente. Les États européens ne peuvent se
décharger de la question des combattants terroristes européens. Citoyens européens, leurs États de
nationalité ne peuvent les laisser face à des traitements inhumains et dégradants. Conjointement à sa
responsabilité du fait de politiques de stigmatisation, les États peuvent être reconnus comme
responsables du fait de négligence face au départ des combattants étrangers224. La situation actuelle
est similaire à une externationalisation de la prise en charge des combattants et de leurs familles.
Les États se détachent de leurs obligations envers leurs nationaux et laissent les forces kurdes ainsi
que le gouvernement irakien les prendre en charge. Cela devient habituel chez les États occidentaux
qui utilisent leur souveraineté pour se détacher de leurs obligations internationales225. Il apparaît
que seuls les intérêts propres guident les Etats et que les droits de l’Homme ne peuvent que s’en
accommoder.
Les États européens ne veulent pas véritablement rapatrier les combattants étrangers, ils ont
pour projet de mettre en place un tribunal pénal international. Le 03 juin 2019 à Stockholm a été
organisée une réunion d’experts, représentant une quinzaine de pays dont la France et l’Allemagne,
pour discuter d’un mécanisme légal permettant de juger les terroristes de l’EI. Le but de la création
d’un tribunal international est d’empêcher le retour des combattants en Europe. Il serait hybride,
composé de juges irakiens et internationaux, toutefois son financement et sa composition restent des
zones d’ombres. Quelle sera la place pour les enfants dans un tel tribunal ? La CPI fixe dans son
article 26 l’âge à partir duquel la Cour peut être compétente pour juger à 18 ans226. Il convient de
rappeler que les tribunaux pénaux internationaux ont principalement pour objectif de juger les
« hauts responsables » et qu’il semble peu probable qu’un enfant ait une telle fonction. Le tribunal
spécial pour la Sierra Leone a spécifiquement posé la question de la responsabilité des mineurs du
224
Le 26 avril 2017 l’État français a été reconnu comme responsable du fait du départ d’une mineure en Syrie. Arrêt
rendu par Conseil d’État, 2e et 7e chambres réunies, 26-04-2017, n° 394651. Une jeune fille de 17 ans a quitté la France
le 11 novembre 2013 par avion alors qu’elle était inscrite sur le fichier des personnes recherchées après avoir fui son
domicile familial en juin 2013. La négligence commise par les services de contrôle aux frontières constitue une faute
dont l’État est responsable.
225
Accord UE-Turquie du 18 mars 2016 (voir la déclaration sur le site du Conseil européen et du Conseil de l’UE :
https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2016/03/18/eu-turkey-statement/, consulté le 19 aout 2019) ou
encore le financement des gardes côtés libyens (voir le rapport de l’UE : https://ec.europa.eu/neighbourhoodenlargement/sites/near/files/eutf-noa-libya.pdf, consulté le 19 août 2019).
226
Anne-Laure CHAUMETTE, « Les personnes pénalement responsables », Ascensio, Hervé and Decaux, Emmanuel
and Pellet, Alain. Droit international pénal, Pedone, p 487 : « les criminels de moins de 18 ans sont présumés ne pas
être dotés de suffisamment de lucidité ».
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fait de la forte présence d’enfants-soldats. Malgré la possibilité théorique de juger les enfants âgés
de 15 à 18 ans, cela ne s’est jamais produit en pratique. Il convient de se demander ce qu’il en sera
concernant la possible création d’un tribunal spécial international. La mise en place d’un tel
tribunal, qui prendra plusieurs mois, ne pourra qu’être préjudiciel pour les enfants présents dans ces
camps et dans ces prisons, vivant dans des conditions désastreuses et dont la vie est clairement en
danger. De plus, s’ils ne sont pas jugés par un tel tribunal, que deviendront-ils sur place ? Le
rapatriement des enfants européens est la seule décision susceptible d’assurer le respect de nos
valeurs. Leur retour ne doit pas être une question politique mais une question de droit.
Je crois que l’on peut désormais opposer à la raison d’État la seule souveraineté pour
laquelle cela vaut la peine de risquer sa vie, celle qui mérite en toutes circonstances d’être
défendue, respectée et sauvegardée – la souveraineté de la justice et du droit.
– Pierre-Henri Teitgen
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Annexe
Combattants étrangers et enfants dans l’« État islamique »en 2017227
227
Pays
Total
Enfants
Allemagne
~900
56
Autriche
<300
40
Belgique
~528
~118
Bosnie-Herzégovine
148
81
France
1,910
460
Kazakhstan
~500
>200 (with women)
Kosovo
~300
27
Pays-Bas
280
>90
Royaume-Uni
~850
50
Russie
3,417
>350
Suède
267
45
Source : The Soufan Center, op. cit., p.24.
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Bibliographie
Section 1 – Documents officiels
I. Conventions internationales et européennes
Convention (III) de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre, adoptée le 12 août
1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 136.
Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre,
adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 288.
Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, adoptée le 04
novembre 1950, entrée en vigueur le 03 septembre 1953, STE n°005.
Convention de Vienne sur les relations consulaires, adoptée le 24 avril 1963, entrée en vigueur le 19
mars 1967, RTNU., vol. 596, p. 261.
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté dans sa résolution 2200 A (XXI) du
16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976, RTNU., vol. 999, p. 171 et vol. 1057, p. 407.
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté dans sa résolution
2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, entré en vigueur le 3 janvier 1976, RTNU, vol. 933, p. 3.
Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des
victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II), adopté le 8 juin 1977, entré en
vigueur le 7 décembre 1978, RTNU, vol. 1125, p. 649.
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
adoptée dans sa résolution 39/26 du 10 décembre 1984, entrée en vigueur le 26 juin 1987, RTNU.,
vol. 1465, p. 85.
Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989, entrée en vigueur le 2
septembre 1990, RTNU., vol. 1577, p. 62.
Protocole n°4 à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés
fondamentales, reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la
Convention et dans le premier Protocole additionnel à la Convention, adopté le 16 septembre 1963,
entré en vigueur le 1er novembre 1998, STE n°046.
Convention (n°182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, Convention concernant
l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur
élimination, adoptée à Genève en 87ème session CIT le 17 juin 1999, entrée en vigueur le 19
novembre 2000.
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!
Statut de Rome de la Cour pénale internationale, adopté le 17 juillet 1998, entré en vigueur le 1er
juillet 2002, RTNU., vol. 2187, p. 3.
Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant l'implication
d'enfants dans les conflits armés, adopté le 25 mai 2000, entré en vigueur le 12 février 2002,
RTNU., vol. 2173, p. 222.
Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale
organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et
des enfants, adopté le 15 novembre 2000, entré en vigueur le 25 décembre 2003, RTNU., vol. 2237,
p.319.
Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, Série des Traités
du Conseil de l’Europe n°197, Varsovie, 16. V. 2005.
Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme,
Série des Traités du Conseil de l’Europe - n° 21, Riga, 22.X.2015
II. Documents institutionnels
A.
Organes des Nations Unies
Assemblée générale des Nations Unies
La Charte des Nations-Unies, San Francisco, adoptée le 26 juin 1945, entrée en vigueur le 24
octobre 1945.
Résolution 217/A (III) du 10 décembre 1948, Déclaration universelle des Droits de l’Homme.
Résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit
international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la
Charte des Nations Unies.
Résolution 3318(XXIX) du 14 décembre 1974, Déclaration sur la protection des femmes et des
enfants en période d’urgence et de conflit armé.
Résolution 40/33 du 29 novembre 1985, Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant
l'administration de la justice pour mineurs- (Règles de Beijing).
Résolution 43/173 le 9 décembre 1988, Ensemble de principes pour la protection de toutes les
personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement.
Résolution A/RES/45/113 du 14 décembre 1990, Règles des Nations Unies pour la protection des
mineurs privés de liberté.
Résolution A/RES/45/110 du 14 décembre 1990, Règles minima des Nations Unies pour
l'élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo).
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Résolution A/RES/60/1 du 24 octobre 2005, Document final du Sommet mondial de 2005
Résolution A/RES/63/308 du 14 septembre 2009, Responsabilité de protéger.
Résolution A/RES/69/194 du 26 janvier 2015, Stratégies et mesures concrètes types des Nations
Unies relatives à l'élimination de la violence à l'encontre des enfants dans le contexte de la
prévention du crime et de la justice pénale.
Communiqué de Presse SG/SM/7136, 21 octobre 1999, présentation par le Secrétaire Général de
son rapport annuel à l’Assemblée Générale, disponible sur : https://www.un.org/press/fr/
1999/19991021.sgsm7136.html, consulté le 16 juillet 2019.
Conférence de presse sur la responsabilité de protéger, disponible sur : https://news.un.org/fr/story/
2009/07/162542-la-responsabilite-de-proteger-entre-concept-et-realite consultée le 16 juillet 2019.
Haut-Commissaire aux droits de l’Homme des Nations Unies
Communication AL IRQ 4/2018, 28 Novembre 2018, disponible sur : https://
spcommreports.ohchr.org/TMResultsBase/DownLoadPublicCommunicationFile?gId=24211
consultée le 29 mai 2019.
Communication UA SYR 1/2018, 13 Juillet 2018, disponible sur : https://spcommreports.ohchr.org/
Tmsearch/TMDocuments consultée le 29 mai 2019.
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Counter-Terrorism Implementation Task Force, 2018, disponible sur: https://www.un.org/sc/ctc/wpcontent/uploads/2018/08/Human-Rights-Responses-to-Foreign-Fighters-web-final.pdf, consulté le
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A/HCR/40/52/Add.5, Report of the Special Rapporteur on the promotion and protection of human
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Conseil de Sécurité des Nations Unies
1.
Rapports
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la création d’un Tribunal spécial pour la Sierra Leone, 8 mars 2002.
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A/72/865-S/2018/465, Rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en tant de conflit armé,
16 mai 2018.
S/2015/358, Lettre adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Comité du
Conseil de sécurité faisant suite aux résolutions 1267 (1999) et 1989 (2011) concernant Al-Qaida et
les personnes et entités qui lui sont associées, 19 mai 2015.
S/2015/939, Principes directeurs de Madrid, Guide pratique pour les États membres dans leur lutte
pour endiguer le flot de combattants terroristes étrangers, 23 décembre 2015.
S/2018/80, Sixième rapport du Secrétaire général sur la menace que représente l’ « État islamique
»d’Iraq et du Levant (Daech) pour la paix et la sécurité internationales et sur l’action menée par
l’Organisation des Nations Unies pour aider les États Membres à contrer cette menace, 31 janvier
2018.
Déclaration à la presse du Conseil de sécurité sur l’attentat contre l’ambassade des États-Unis le 1er
février 2013, disponible sur https://www.un.org/press/fr/2013/SC10906.doc.htm, consulté le 16
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CS/12171, Couverture de réunion, Syrie : pour la première fois depuis le début du conflit, le
Conseil de sécurité fait preuve d’unité en adoptant une « feuille de route » pour la paix, 18
décembre 2015, disponible sur : https://www.un.org/press/fr/2015/cs12171.doc.htm consulté le 05
aout 2019.
2.
Résolutions
S/RES/1368 (2001) du 12 septembre 2001, La menace à la paix et à la sécurité internationales
résultant d'actes terroristes.
S/RES/1674 (2006) du 28 avril 2006, Protection des civils dans les conflits armés.
S/RES/1973 (2011) du 17 mars 2011, La situation en Jamahiriya arabe libyenne.
S/RES/2118 (2013) du 2013, La situation au Moyen-Orient.
S/RES/2178 (2014) du 24 septembre 2014, Menaces contre la paix et la sécurité internationales
résultant d’actes de terrorisme.
S/RES/2191 (2014) du 17 décembre 2014, La situation au Moyen-Orient.
S/RES/2249 (2015) du 20 novembre 2015, Menaces contre la paix et la sécurité internationales
résultant d’actes de terrorisme.
S/RES/2254 (2015) du 18 décembre 2015, La situation au Moyen-Orient (Syrie).
S/RES/2268 (2016) du 28 février 2016, La situation au Moyen-Orient (Syrie).
S/RES/2331 (2016) du 20 décembre 2016, Maintien de la paix et de la sécurité internationales.
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S/RES/2396 (2017) du 21 décembre 2017, Menaces contre la paix et la sécurité internationales
résultant d’actes de terrorisme.
S/RES/2401 (2018) du 24 février 2018, La situation au Moyen-Orient.
S/RES/2427 (2018) du 9 juillet 2018, Le sort des enfants en temps de conflit armé.
Comité des droits de l’Homme
Comité des droits de l’Homme, seizième session, Observation générale n°6, Article 6 (Droit à la
vie), 30 avril 1982, U.N. Doc. HRI/GEN/Rev.9 (Vol. I).
Comité des droits de l’Homme, Observation générale n°27 : Article 12 (Liberté de circulation), 2
novembre 1999, CCPR/C/21/Rev.1/Add.9.
Comité des droits de l’Homme, quatre-vingtième session, Observation générale n°31, La nature de
l’obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, 29 mars 2004, U.N. Doc. HRI/
GEN/1/Rev.7 (2004).
Comité des droits de l’Homme, Examen des rapports présentés par les États parties en vertu de
l’article 40 du Pacte, Commentaire du gouvernement allemand sur les observations finales du
Comité des droits de l’homme, 11 avril 2005, CCPR/CO/80/DEU/Add.1.
Comité des droits de l’enfant
Comité des droits de l’enfant, Observation générale n°6, traitement des enfants non accompagnés
et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, 1er septembre 2005, CRC/GC/2005/6.
Comité des droits de l’enfant, Observation Générale N. 10 concernant les droits de l’enfant dans le
système de justice pour mineurs, 25 avril 2007, CRC/C/GC/10.
Comité des droits de l’enfant, Observation générale no 14 sur le droit de l’enfant à ce que son
intérêt supérieur soit une considération primordiale (art. 3, par. 1), 29 mai 2013, CRC/C/GC/14.
Comité des droits de l’enfant, Observations finales concernant le rapport de la Belgique valant
cinquièmes et sixièmes rapports périodiques, 1er février 2019, CRC/C/BEL/CO/5-6.
Comité des droits de l’enfant, Observations périodiques sur la Belgique, 28 février 2019, CRC/C/
BEL/CO/5-6.
Autres organes reliés aux Nations-Unies
UN Children's Fund (UNICEF), Les Principes de Paris. Principes et lignes directrices sur les
enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés, Mars 2007, disponible sur : https://
www.refworld.org/docid/49997af21a.html, consulté le 2 avril 2019.
Office of the Special Representative of the UN Secretary General on Violence against Children,
« Promoting Restorative Justice for Children », New-York, 2013, 60 p. , disponible sur : https://
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le 02 août 2019.
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pp 128, disponible sur : http://christusliberat.org/journal/wp-content/uploads/2019/01/
Handbook_on_Children_Recruited_and_Exploited_by_Terrorist_and_Violent_Extremist_Groups_t
he_Role_of_the_Justice_System.E.pdf, consulté le 19 mars 2019.
OIT, Observation (CEACR), adoptée en 2017, publiée lors de la 107ème session CIT (2018), disponible
sur : h t t p s : / / w w w. i l o . o rg / d y n / n o r m l e x / f r / f ? p = N O R M L E X P U B :
13100:0::NO::P13100_COMMENT_ID:3341872, consulté le 03 août 2019.
Conseil des droits de l’Homme, Rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante
sur la République arabe syrienne du 1er février 2018, A/HRC/37/72.
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governorate », Issues 1 à 5, février - avril 2019, disponibles sur :https://reliefweb.int/report/syrianarab-republic/syria-crisis-al-hol-camp-al-hasakeh-governorate-issue-1-26-february-2019, consultés
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le 15 mai 2019.
B.
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Commissaire aux Droits de l’Homme
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Comité des experts sur le terrorisme CODEXTER
Comité des experts sur le terrorisme (CODEXTER), The roles of women in DAESH, Discussion
paper, 31th plenary meeting, Strasbourg 16-17 November 2016, CODEXTER (2016) 19.
Comité des Ministres
Résolution (99) 50 sur le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, adoptée par
le Comité des Ministres le 7 mai 1999 lors de sa 104e Session.
Monographie, Justice internationale pour les enfants, Construire une Europe pour et avec les
enfants, 160 p., 2009.
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Conseil de l’Europe sur une justice adaptée aux enfants, adopté le 17 novembre 2010 lors de la
1098ème réunion des Délégués des Ministres.
C. Cour européenne des droits de l’Homme
Guide sur l’article 1 de la Convention – Obligation de respecter les droits de l’homme – Notions de
« juridiction » et d’imputabilité, mise à jour 31.12.2018, disponible sur : https://www.echr.coe.int/
Documents/Guide_Art_1_FRA.pdf, consulté le 29 avril 2019.
D. Organes de l’Union européenne
Parlement européen
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 18 décembre 2000, (2000/C 364/01).
Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, Journal officiel de l’UE, 26 octobre 2012, C
326/47.
1. Directives
Directive (UE) 2015/637 du Conseil du 20 avril 2015 établissant les mesures de coordination et de
coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l’Union non
représentés dans des pays tiers et abrogeant la décision 95/553/CE.
Directive (UE) 2016/800 du 11 mai 2016, Mise en place de garanties procédurales en faveur des
enfants qui sont des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre des procédures pénales.
Directive (UE) 2017/541 du 15 mars 2017, Lutte contre le terrorisme.
2. Rapport
European Parliament, The return of foreign fighters to EU soil, ex-post evaluation, Study European
Parliamentary Research Service, Mai 2018, 108 p., disponible sur : http://www.europarl.europa.eu/
RegData/etudes/STUD/2018/621811/EPRS_STU(2018)621811_EN.pdf, consulté le 20 mars 2019.
Radicalisation Awareness Network (RAN)
RAN Manuel, Responses to returnees: foreign terrorist fighters and their families, Juillet 2017, pp.
67 -80, disponible sur : https://ec.europa.eu/home-affairs/sites/homeaffairs/files/
ran_br_a4_m10_en.pdf, consulté le 15 mars 2019.
RAN issue paper, Child returnees from conflict zones, novembre 2016, 23 p., disponible sur :
h t t p s : / / e c . e u r o p a . e u / h o m e - a ff a i r s / s i t e s / h o m e a ff a i r s / f i l e s / w h a t - w e - d o / n e t w o r k s /
r a d i c a l i s a t i o n _ a w a r e n e s s _ n e t w o r k / r a n - p a p e r s / d o c s /
issue_paper_child_returnees_from_conflict_zones_112016_en.pdf consulté le 26 mars 2019.
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!
European Union Agency for Law Enforcement Cooperation (EUROPOL)
Report on European Union Terrorism situation and trend, 2018, disponible sur : https://
www.europol.europa.eu/activities-services/main-reports/european-union-terrorism-situation-andtrend-report-2018-tesat-2018, consulté le 19 mars 2019.
E. Groupe de soutien international à la Syrie
Déclaration du groupe de soutien international à la Syrie à Vienne le14 novembre 2015, disponible
sur : https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/evenements/actualites-2015/article/
declaration-du-groupe-de-soutien-international-a-la-syrie-vienne-14-11-15, consulté le 25 juillet
2019.
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!
III.
Textes officiels internes
A.
France
1. Droit national
Code pénal, version consolidée au 3 août 2019.
2. Rapports internes
Déclaration de Mme Nicole Belloubet, Ministre de la justice, au Sénat le 13 décembre 2017,
disponible sur : http://discours.vie-publique.fr/notices/173002489.html, consulté le 05 août 2019.
Défenseur des droits, décision n°2019-129, 22 mai 2019.
CNCDH, « Lettre au Premier ministre concernant le cas des enfants mineurs de nationalité française
détenus dans les camps en Syrie », 27 mai 2019.
B.
Belgique
1.
Droit national
Constitution de la Belgique fédérale coordonnée, 17 février 1994.
2.
Rapports internes
Délégué générale aux droits de l’enfant, Recommandations du Délégué général aux droits de
l’enfant de la Communauté française de Belgique sur la question des mineurs belges présents dans
les zones de conflit djihadistes et sur leur retour en Belgique, DGDE et Kinderrechtencommissaris.
DGDE et Kinderrechtencommissaris ,Retour de zones des enfants belges de Syrie, Une seule option
envisageable dans l’intérêt supérieur des enfants concernés, janvier 2019.
C. Irak
Loi sur la lutte anti-terroriste n°13-2005, J.O. 4009 du 11 nov. 2005, p. 1.
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SECTION II – Jurisprudence
I. Cour européenne des droits de l’Homme
Affaire « relative à certains aspects du régime linguistique de l’enseignement en Belgique », CEDH
Plénière, 23 juillet 1968, n° 1474/62, 1677/62, 1691/62, 1769/63, 1994/63, 2126/64.
Hess c. Royaume-Uni, CEDH, 1975, n°6231/73.
Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark, CEDH, 7 décembre 1976, n°5095/71 et autres.
Irlande c.Royaume-Uni, CEDH, 18 janvier 1978, n°5310/71.
Airey c. Irlande, CEDH (Ch.), 9 octobre 1979, 6289/73.
Artico c. Italie, CEDH, 13 mai 1980, série A no 37, p. 16.
Soering c. Royaume-Uni, CEDH (Pleinière), 7 juillet 1989, n°14038/88.
Drozd et Janousek c. France et Espagne, 26 juin 1992, n°12747/87.
Loizidou c. Turquie, CEDH, 1995, n°15318/89.
Bankovic et autres c. Belgique et 16 autres États contractants, CEDH Gr. Ch., 19 décembre 2001,
n°52207/99.
Al Adsani c. Royaume-Uni, CEDH, 2001, n°35763/97.
Chypre c. Turquie, CEDH Gr. Ch., 2001, n°25781/94.
Ilascu et autres c. Moldova et Russie, CEDH Gr. Ch., 2004, n°48787/99.
Issa et autres c. Turquie, CEDH., 2004, n°31821/96.
Öcalan c. Turquie, CEDH Gr. Ch., 2005, n°46221/99.
Ben El Mahi c. Danemark, CEDH, 2006, n°5853/06.
Behrami et Behrami c. France et Saramati c. France, Allemagne et Norvège, CEDH, 2007,
n°71412/01.
Boumediene c. Bosnie-Herzégovine, CEDH, 18 novembre 2008, n° 38703/06, et 5 autres affaires
n°40123/06, 43301/06, 43302/06, 2131/07 et 2141/07.
A. c. Royaume-Uni, CEDH, Gr. Ch., 19 février 2009, n°3455/05.
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Rantsev c. Chypre et Russie, CEDH, 2010, n°25965/04.
Al-Skeini et autres c. Royaume-Uni, CEDH Gr. Ch., 2011, n°55721/07.
Gray c. Allemagne, CEDH, 2014, n°49278/09.
X. c. Allemagne, CEDH, 2017, n°54646/17.
II.
Cour internationale de justice (anciennement Cour permanente de justice
internationale)
Affaire des concessions Mavrommatis en Palestine, CIJ., Arrêt du 30 Aout 1924, série A, n°2.
Affaire dit du Lotus, CPJI, 7 septembre 1927, série A, n°10. Recueil n.
Compétence des tribunaux de Dantzig (Réclamations pécuniaires des fonctionnaires ferroviaires
dantzikois passés au service polonais contre l’administration polonaise des chemins de fer), CPJI, 3
mars 1928, Série B., n°15, Recueil CPJI, p. 17.
Affaire du Détroit de Corfou, CIJ, Arrêt du 9 avril 1949, Recueil CIJ., 1949, p. 4.
Affaire Nottebohm (deuxièrne phase), CIJ, Arrêt du 6 avril 1955, Recueil CIJ 1955.
Licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires, CIJ, Avis consultatif, Recueil CIJ 1996, p.
226.
LaGrand (Allemagne c. États-Unis d'Amérique), CIJ, Arrêt du 27 juin 2001, Recueil CIJ 2001, p.
466.
Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. États- Unis d'Amérique), CIJ, Arrêt du 31
mars 2004, Recueil CIJ 2004, p. 12.
Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, CIJ, Avis
consultatif ; Recueil CIJ 2004, p. 136.
III. Sentence arbitrale
Sentence arbitrale (Max Huber) entre les États-Unis et les Pays-Bas, dans le litige relatif à la
souveraineté sur l’ile de Palmas (ou Miangas), 4 avril 1928, traduction de M. Ch. Rousseau dans «
la Revue Générale de Droit International Public », 1935, p. 163.
IV. Cour pénale international et tribunaux pénaux internationaux
Affaire Lubanga, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, ICC-01/04-01/06.
V.
Cour de justice de l’Union européenne (anciennement Cour de justice des
communautés européennes)
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Arrêt de la Cour de justice des communautés européennes, Van Gend & Loos (NV Algemene
Transport- en Expeditie Onderneming van Gend & Loos contre Administration fiscale
néerlandaise), demande de décision préjudicielle par Tariefcommissie - Pays-Bas. Affaire 26-62 (5
février 1963).
VI. Cours nationales
A. France
Arrêt rendu par Conseil d’État, 2e et 7e chambres réunies, 26-04-2017, n° 394651.
Tribunal administratif de Paris, ordonnance du 9 avril 2019, req. N°1906076/9.
Conseil d'État, Juge des référés, 23 avril 2019, 429668, Inédit au recueil Lebon.
B. Belgique
Ordonnance du 26 décembre 2018, Tribunal de première instance de Bruxelles, section
néerlandophone.
Tribunal de première instance francophone de Bruxelles, Section civile, ordonnance n°19/37/C, 11
juin 2019.
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SECTION III - Doctrine
I. Dictionnaires juridiques
CORNU G., Vocabulaire Juridique, Bertrams, 2012, 1116 p..
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II. Ouvrages
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DAILLIER P., PELLET A., Droit international public, LGDJ, 7ème éd., 2002, 1510 p.
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HENNEBEL L., TIGROUDJA H., Traité de droit international des Droits de l’homme, Pedone,
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SUDRE Fréderic, Droit européen et international des droits de l’Homme, PUF, 14ème éd., 2004,
1024 p.
SUDRE Frédéric, Droit européen et international des droits de l’homme, PUF, 10ème éd. 2011, 926
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ZARKA JC, Relations internationales, Ellipses, 6eme éd. 2016, 192 p.
III. Thèses et Mémoires
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MUMBALA ABELUNGU, « Le droit international humanitaire et la protection des enfants en
situation de conflits armés » (Étude de cas de la République Démocratique du Congo) Thèse de
doctorat en Droit Junior, Université de Gand, Belgique, 2016-2017
TOUZE Sébastien, La protection des droits des nationaux à l’étranger, recherches sur la protection
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Human Rights Watch, « Irak/KRG: 1,400 Women, Children from ISIS Areas Detained, Investigate
Killings, Abductions of Foreign Men », 20 septembre 2017, article disponible sur : https://
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Human Rights Watch, « Iraq: ISIS Child Suspects Arbitrarily Arrested, Tortured Children Should
Be Rehabilitated, Reintegrated », 03 juin 2019, Rapport disponible sur : https://www.hrw.org/
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36 universitaires et avocats, « Tribune du 02 juillet 2019 » disponible sur : http://www.syndicatmagistrature.org/Enfants-et-adultes-retenus-en-Irak-et-en-Syrie-la-France-doit-changer-de.html
(consulté le 05 juillet 2019).
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Barrett, October 2017, disopnible sur : http://thesoufancenter.org/wp-content/uploads/2017/11/
Beyond-the-Caliphate-Foreign-Fighters-and-the-Threat-of-Returnees-TSC-Report-October-2017v3.pdf, consulté le 21 mars 2019.
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disponible sur : https://www.monde-diplomatique.fr/2013/06/BITAR/49154, consulté le 06 août
2019.
DAOU Marc, Rapatriement d’enfants de jihadistes français : « On est au-delà de l’injustice »,
France 24, 07 mai 2019, disponible sur : https://www.france24.com/fr/20190506-syrierapatriement-enfants-jihadistes-francais-france-saisine-cedh-justice, consulté le 20 juillet 2019.
Enquête « De l’aéroport à l’école, l’épineux retour en France des enfants de jihadistes », France
Info, disponible sur https://www.francetvinfo.fr/monde/proche-orient/offensive-jihadiste-en-irak/
enquete-franceinfo-de-l-aeroport-a-l-ecole-lepineux-retour-en-france-des-enfants-dejihadistes_2602956.html , consulté le 23 août 2019.
MATHIEU Luc, « On est en train de recréer l’EI à Al-Hol », Libération,, 04 avril 2019, disponible
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consulté le 5 aout 2019.
MATHIEU L., AUTRAN F., « Le Quai d’Orsay rapatrie les orphelins de jihadistes à dicrétion »,
Libération, 10 juin 2019, disponible sur : https://www.liberation.fr/planete/2019/06/10/le-quai-dorsay-rapatrie-les-orphelins-de-jihadistes-a-discretion_1732889, consulté le 04 juillet 2019.
MAURER Peter, « Lutte antiterroriste : Le droit international humanitaire ne constitue pas un
obstacle abusif à la protection de la sécurité de l’État », Tribune du journal Le Monde, 15 décembre
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IV. Allemagne
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VIII. Europe et International
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SECTION V. Ressources électroniques
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sur : https://www.arte.tv/fr/videos/081098-000-A/irak-les-djihadistes-face-a-la-justice/, consulté le
10 avril 2019.
KRONLUND Sonia, « Ma fille sous influence », France culture, Les pieds sur terre, 30 mai 2018
au 26 juillet 2019, disponible sur : https://www.franceculture.fr/emissions/series/ma-fille-sousinfluence consulté le 03 août 2019.
NUNZE Laurent, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, audition du 13 mars 2019,
Commission des affaires européennes : disponible sur : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.
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VRANCKX R., Documentaire, « Pour les péchés des pères » https://www.youtube.com/watch?
v=0ZtDdt_vFlo consulté le 21 mars 2019.
II.
Sites internet
European Council, Council of the European Union : https://www.consilium.europa.eu/en/policies/
fight-against-terrorism/foreign-fighters/.
Global Counterterrorism forum : https://www.thegctf.org/.
Europol : https://www.europol.europa.eu/.
International Centre for Counter-terrorism – The Hague : https://icct.nl/.
Commissioner for Human Rights, Council of Europe : https://www.coe.int/en/web/commissioner/
thematic-work/counter-terrorism.
Counter-terrorism, Council of Europe : https://www.coe.int/en/web/counter-terrorism/home.
Le Larousse : https://www.larousse.fr/portail/.
Office of the High Commissioner, UNHR : https://www.ohchr.org/EN/Issues/Terrorism/Pages/
SRTerrorismIndex.aspx.
United Nations, Office of Counter-Terrorism: https://www.un.org/counterterrorism/ctitf/en.
Site de la Commission européenne sur le droit à la protection consulaire : https://ec.europa.eu/
consularprotection/content/about-consular_fr.
Site justice en ligne (http://www.justice-en-ligne.be/article1189.html.
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Site des Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement du Royaume de
Belgique :
https://diplomatie.belgium.be/fr/Services/voyager_a_letranger/belges_en_detresse/
assistance_en_cas_de_crise.
Site France Diplomatie https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/evenements/
actualites-2015/article/declaration-du-groupe-de-soutien-international-a-la-syrie-vienne-14-11-15.
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Table des matières
REMERCIEMENTS ........................................................................................................................ 1
SOMMAIRE ...................................................................................................................................... 2
TABLE DES ABRÉVIATIONS ....................................................................................................... 3
INTRODUCTION ............................................................................................................................. 4
TITRE I. LE DROIT D’ASSISTANCE DES ÉTATS, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE
RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL
DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 12
CHAPITRE 1. UNE INGÉRENCE LÉGITIMÉE PAR LES RÉSOLUTIONS DE L’ORGANISATION DES
NATIONS-UNIES ............................................................................................................................. 12
Section 1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international ................................... 12
§1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international ........................................... 13
§2. Une souveraineté exclusive dont découle le principe de non-ingérence ........................ 15
Section 2. Des exceptions au principe de souveraineté, la légitimation de l’intervention en
Syrie ........................................................................................................................................... 16
§1. La théorie de l’intervention d’humanité à la « responsabilité de protéger » de l’ONU . 17
A. La théorie de l’intervention d’humanité pour une protection de tout être humain ...... 17
B. La « responsabilité de protéger », une intervention sous contrôle de l’ONU .............. 19
§2. La lutte contre le terrorisme, un enjeu sécuritaire permettant davantage d’action de la
part des États ......................................................................................................................... 22
A. La naissance de l’hyper terrorisme et la légitimation d’une ingérence .......................22
B. Une lutte ne permettant pas la protection effective des enfants ................................... 23
CHAPITRE 2. LE DEVOIR DE PROTECTION DES RESSORTISSANTS MINEURS LORS DE LA VIOLATION
DE LEURS DROITS FONDAMENTAUX ............................................................................................... 25
Section 1. Un droit discrétionnaire de l’État souverain ........................................................... 25
§1. Une compétence personnelle établie envers ses ressortissants ....................................... 25
A. La naissance de l’obligation de respect du droit international en ses
ressortissants .......................................................................................................25
B. Des protections spécifiques envers les individus par les États du fait de leur lien de
rattachement ...................................................................................................................... 27
§2. Un droit dont les sujets sont les États .............................................................................. 29
A. Le retrait du droit à la protection consulaire face au droit européen ............................ 29
B. Le caractère discrétionnaire de l’utilisation de ce droit par les États ........................... 31
Section 2. Un droit remis en cause par l’intervention de l'autorité judiciaire .......................... 32
§1. Vers une obligation de rapatriement à la demande des individus, nouveaux sujets de droit
international ........................................................................................................................... 33
A. Un droit dont les individus sont les sujets .................................................................... 33
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B. Des décisions judiciaires nationales enjoignant les États à protéger leurs ressortissants
mineurs .............................................................................................................................. 35
§2. Une incompétence de l’autorité judiciaire dont le fondement pourrait être remis en cause
par la Cour européenne des droits de l’Homme..................................................................... 37
A. Une décision d’incompétence des juges administratifs français ................................. 37
B. La Cour européenne des droits de l’Homme en faveur d’un rapatriement des
ressortissants européens mineurs ? .................................................................................... 39
CONCLUSION TITRE 1 ............................................................................................................... 40
TITRE II LA COMPLÉMENTARITÉ DES DROITS DE L’HOMME ET DU DROIT
INTERNATIONAL HUMANITAIRE, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE
RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL
DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 41
CHAPITRE 1. L’INDIVIDU, SUJET DE DROIT DE LA CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE
L’HOMME ....................................................................................................................................... 42
Section 1. Une protection des individus placés sous la juridiction de l’État............................. 42
§1. La notion de juridiction, notion purement territoriale ..................................................... 42
A. La territorialité du droit de la Convention européenne des droits de l’Homme............ 43
B. Une interprétation relativement stricte de la notion de juridiction, la naissance de
l’espace juridique de la Convention .................................................................................. 44
§2. La notion étendue de juridiction de la CEDH .................................................................. 46
A. Une juridiction extra-territoriale d’après une coopération entre États ........................ 46
B. Une juridiction extra-territoriale admise par un contrôle effectif d’un État même hors
du territoire européen ........................................................................................................ 48
Section 2. L’émergence de nouvelles pratiques jurisprudentielles pour une meilleure protection
des individus .............................................................................................................................. 51
§1. La pratique des obligations positives ............................................................................... 51
A. La naissance des obligations positives ......................................................................... 51
B. Une technique permettant une meilleure protection des droits de la CESDH .............. 53
§2. La protection par ricochet, vers une universalité des DH ? ............................................. 55
A. La protection par ricochet, une application quasi-universelle de la CESDH .............. 55
B. Un objectif de protection des êtres humains vers une application universelle des droits
fondamentaux ? ................................................................................................................. 57
CHAPITRE 2. LE DEVOIR DE PROTECTION DES ENFANTS VICTIMES DE CONFLIT ARMÉ,
L’APPLICATION DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE ET DU DROIT DES DROITS DE L’HOMME .
60
Section 1. Un droit de protection des enfants applicable au conflit armé syrien ..................... 60
§1. Des enfants, victimes d’un conflit armé caractérisé......................................................... 60
A. Un conflit armé internationalisé .................................................................................. 61
B. Un droit applicable flou face à la complexité du conflit .............................................. 64
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§2. Des enfants victimes de violation du droit international humanitaire et des normes du
droit international des droits de l’homme ............................................................................. 65
A. L’interdiction de l’enrôlement des enfants de moins de quinze ans ............................ 66
B. Le besoin de protection des enfants-soldats, victimes de crime international ............. 68
Section 2. Un rapatriement à effectuer dans l’intérêt supérieur des enfants ........................... 69
§1. Un rapatriement dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant .................................. 70
A. La notion d’intérêt supérieur de l’enfant relatif à son rapatriement ............................ 70
B. Le rapatriement des enfants avec leur mère ................................................................. 73
§2. Un rapatriement dans une optique de judiciarisation, la non prise en compte du statut de
victime des enfants ................................................................................................................ 75
A. La nécessaire prise en compte du statut de victime des enfants .................................. 75
B. La nécessité de non-criminalisation des enfants .......................................................... 78
CONCLUSION TITRE 2 ................................................................................................................ 81
CONCLUSION FINALE ............................................................................................................... 82
ANNEXE .......................................................................................................................................... 85
BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................................... 86
TABLE DES MATIÈRES ............................................................................................................. 109
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