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UFR Droit & Science politique Le refus de rapatriement des ressortissants européens mineurs détenus en Syrie et en Irak à la lumière des obligations internationales des États Esther SEBILLOTTE Master 2 Droits de l’Homme - Université Paris Nanterre Année universitaire 2018-2019 Mémoire de stage réalisé pour l’obtention du master 2 Droits de l’Homme de l’Université Paris Nanterre Sous la direction de : Monsieur SIZAIRE Vincent, magistrat et maître de conférences associé à l’Université Paris Nanterre Membres du jury : Monsieur SIZAIRE Vincent, magistrat et maître de conférences associé à l’Université Paris Nanterre Madame GIRARD Charlotte, maître de conférences HDR en droit public à l’Université Paris Nanterre L’Université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans le mémoire ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur. Remerciements En tout premier lieu, je tiens à remercier Monsieur Vincent Sizaire pour avoir accepté de diriger ce mémoire. Ses précieux conseils ont contribué à alimenter ma réflexion. Mes remerciements vont également à Monsieur Matthieu Birker, Conseiller de la Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, qui m’a accueillie et intégrée pendant mon stage. Il m’a fait découvrir ce sujet passionnant et par sa confiance et sa patience m’a permis d’approfondir mes recherches avec bonheur. Je souhaite remercier l’ensemble de l’équipe pédagogique du master Droits de l’Homme de l’université Paris Nanterre, pour cette année riche en apprentissages. Merci à mes amis stagiaires du Conseil de l’Europe qui m’ont accompagnée lors de cette expérience enrichissante. Tout particulièrement je remercie Clara et Manon pour leur support inestimable. Je suis également reconnaissante envers toutes les personnes, trop nombreuses pour les citer, que j’ai rencontrées et qui ont pris le temps de discuter avec enthousiasme de mon sujet. Elles m’ont aidé à ouvrir les yeux sur ses multiples facettes et à enrichir mes interrogations. Enfin mes remerciements s’adressent à ma famille et à mes amis qui m’ont écoutée et conseillée durant ces mois d’été, particulièrement à mes sœurs et ma mère pour leur soigneuse relecture. Page 1! sur 111 ! Sommaire REMERCIEMENTS ........................................................................................................................ 1 SOMMAIRE ...................................................................................................................................... 2 TABLE DES ABRÉVIATIONS ....................................................................................................... 3 INTRODUCTION ............................................................................................................................. 4 TITRE I. LE DROIT D’ASSISTANCE DES ÉTATS, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 12 CHAPITRE 1. UNE INGÉRENCE LÉGITIMÉE PAR LES RÉSOLUTIONS DE L’ORGANISATION DES NATIONS-UNIES ............................................................................................................................. 12 CHAPITRE 2. LE DEVOIR DE PROTECTION DES RESSORTISSANTS MINEURS LORS DE LA VIOLATION DE LEURS DROITS FONDAMENTAUX ............................................................................................... 25 CONCLUSION TITRE 1 ............................................................................................................... 40 TITRE II LA COMPLÉMENTARITÉ DES DROITS DE L’HOMME ET DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 41 CHAPITRE 1. L’INDIVIDU, SUJET DE DROIT DE LA CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME ....................................................................................................................................... 42 CHAPITRE 2. LE DEVOIR DE PROTECTION DES ENFANTS VICTIMES DE CONFLIT ARMÉ, L’APPLICATION DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE ET DU DROIT DES DROITS DE L’HOMME . 60 CONCLUSION TITRE 2 ................................................................................................................ 81 CONCLUSION FINALE ............................................................................................................... 82 ANNEXE .......................................................................................................................................... 85 BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................................... 86 TABLE DES MATIÈRES ............................................................................................................. 109 Page 2! sur 111 ! Table des abréviations C.A.I. : Conflit armé international C.A.N.I. : Conflit armé non international C.C.T. : Convention contre la torture et autres traitements inhumains et dégradants C.E.S.D.H. : Convention européenne des droits de l’Homme C.E.D.H. : Cour européenne des droits de l’Homme C.I.D.E. : Convention internationale relative aux droits de l’enfant C.I.J. : Cour internationale de justice C.I.C.R. : Comité international de la Croix-Rouge C.P.J.I. : Cour permanente de justice internationale D.A.E.S.H. : (acronyme arabe de l’« État islamique ») « Dawlat islamiya fi « iraq wa sham » »1 . D.H. : Droits de l’Homme D.U.D.H. : Déclaration universelle des droits de l’Homme E.I. : « État islamique » I.S.S.G. : Groupe de soutien international de la Syrie O.N.G. : Organisation non gouvernementale O.N.U. : Organisation des Nations-unies O.I.T. : Organisation internationale du travail O.T.A.N. : Organisation du traité de l'Atlantique nord P.I.D.C.P. : Pacte international sur les droits civils et politiques U.E. : Union européenne Considérant la variation dans l’écriture de certaines expressions consacrées, j’ai décidé de suivre les règles orthographiques utilisées par Mme Anne-Laure Chaumette dans son article « DAESH un « État » islamique ? »2. . 1 Traduction française : « L’« État islamique » en Irak et au Levant ». Anne-Laure CHAUMETTE, « DAESH un « État » islamique ? », Annuaire Français de Droit international, CNRS, 2014. 2 Page 3! sur 111 ! Introduction Rien n’est plus important que de bâtir un monde dans lequel tous nos enfants auront la possibilité de réaliser pleinement leur potentiel et de grandir en bonne santé, dans la paix et dans la dignité. – Kofi A. Annan, secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies Le 23 mars 2019, près de cinq ans après la proclamation du « califat »3, la chute de Baghouz, village du sud-est de la Syrie, marque la fin de l’emprise territoriale de l’organisation « État islamique » (EI). L « État islamique » et les combattants terroristes étrangers mineurs Cette organisation est née du groupe terroriste Al-Qaida, en Irak, en 2006. En juin 2014, après sa rupture avec Al-Qaida, Abou Bakr Al-Baghdadi, à la tête de l'EI, s’est proclamé calife de l’« État islamique » sur les territoires conquis en Irak et en Syrie. Cette organisation, qui possède une forte capacité à atteindre une audience mondiale, principalement auprès des jeunes, a pour objectif d’établir « the most important sovereign institution of the history of Islam »4. A la fin de l’année 2017, on estimait à 40 000 le nombre de combattants étrangers qui avaient rejoint l’« État islamique »5 . Ils venaient alors de plus de 110 pays dont l’Allemagne, l’Azerbaïdjan, la Belgique, la France, le Royaume-Uni, la Russie, la Turquie6 . Fin 2017, il était estimé que plus de 30% des combattants étrangers étaient déjà revenu7 . 3 Selon le dictionnaire Larousse, le terme « califat » désigne le territoire soumis à l’autorité du calife, chef de la communauté musulmane. 4 Traduction personnelle : « L’institution la plus souveraine de l’histoire de l’Islam ». Annyssa. BELLAL, « Beyond the Pale ? Engaging the Islamic State on International Humanitarian Law », Yearbook of International Humanitarian Law, Asser Press, 2015, p. 129. 5 ODIHR, « Guidelines for Addressing the Threats and Challenges of «Foreign Terrorist Fighters» », 2018, p.11. Voir le tableau en annexe de ce mémoire pour des chiffres plus précis, p. 86. 6 Tanya MEHRA LL.M, Dr. Christophe PAULUSSEN, « The Repatriation of Foreign Fighters and Their Families : Options, Obligations, Morality and Long-Term Thinking », Publications ICCT, 6 mars 2019, p. 1. 7 The Soufan Center, « Beyond the Caliphate: Foreign Fighters and the Threat of Returnees », October 2017, p. 10, disponible sur : https://thesoufancenter.org/wp-content/uploads/2017/11/Beyond-the-Caliphate-Foreign-Fighters-andthe-Threat-of-Returnees-TSC-Report-October-2017-v3.pdf, consulté le 02 mai 2019. Page 4! sur 111 ! Parmi ces combattants sont comptés quelques milliers d’enfants ayant la nationalité d’un État membre du Conseil de l’Europe ou nés au sein d’un des pays membres du Conseil de l’Europe et vivant actuellement en Syrie et en Irak. Cela représente, par rapport aux générations précédentes de combattants terroristes étrangers, une proportion importante de mineurs, même parmi les militants actifs. Différentes catégories d’enfants sont affectées par les activités terroristes de l’EI. Ils sont des victimes, des témoins et des présumés bourreaux. Les enfants sont recrutés stratégiquement à l’intérieur ou à l’extérieur de leur pays. Enrôlés de force ou volontairement, certains sont attirés par des promesses d’argent ou de vie meilleure, d’autres n’ont pas eu d’autre choix que d’accompagner leur famille. Par ailleurs, la majorité des enfants ressortissants européens sont nés dans ces zones de conflit, de père et/ou de mère de nationalité européenne. L’EI promeut une interprétation puriste de l’islam en organisant un enseignement de la charia et prépare les prochaines générations à la vie au sein de l’« État islamique » en leur donnant un entraînement militaire. L’organisation accorde une place essentielle à ces enfants, surnommés les « Lionceaux du Califat ». La définition de l’enfant en droit international Définir l’enfant en droit international n’est pas simple du fait qu’il désigne une construction sociale8. C’est le critère (« objectif ») de l’âge qui a été choisi par les conventions internationales. Ainsi, selon l’article 1 de la Convention relative aux droits de l’enfant9, l’enfant est définit comme « tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable ». Cette définition n’est pas satisfaisante car la référence aux législations nationales est un obstacle à l’élaboration d’une norme internationale coutumière. Malgré ses limites, elle sera celle utilisée au sein de ce mémoire. Ainsi toute personne de moins de 18 ans doit être traitée d’une manière compatible avec ses droits, sa dignité et ses besoins, conformément au droit international applicable, en particulier les obligations découlant de la Convention relative aux droits de l’enfant. 8 Magali MAYSTRE, « Les enfants soldats en droit international », Perspectives internationales n°30, Pedone, 2010, p. 32. 9 Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989, entrée en vigueur le 2 septembre 1990, RTNU., vol. 1577, p. 62. Page 5! sur 111 ! Les conditions de vie des enfants suite à la chute de l’EI La grande majorité des enfants de l’« État islamique » vivent aujourd’hui enfermés dans des camps au nord de la Syrie (Al-Hol et Al-Roj principalement), sous la tutelle d’une administration autonome des Kurdes, alors que d’autres sont emprisonnés en Irak10. Le porte-parole des Forces démocratiques syriennes, Kino Gabriel, a déclaré en mai 2015 qu’ils détenaient environ 1.500 combattants et plus de 3.000 membres de leurs familles11 . Selon l’organisation Human Rights Watch il y avait environ 1.000 femmes et 2.000 enfants qui étaient détenus dans des camps en Irak, Syrie et Libye en février 2019. Les conditions de vie déplorables dans les camps syriens mettent gravement en danger la vie des enfants. Quant à ceux détenus dans les prisons irakiennes et syriennes, ils courent le risque de graves violations de leurs droits fondamentaux, notamment un risque de torture. Au 1er mai 2019, la population du camp d’Al-Hol, prévu pour 10 000 habitants, était de 73,477 personnes12 . 90% des détenus sont des femmes et des enfants, dont la majorité n'a pas plus de 6 ans. De décembre 2018 à février 2019, à la suite de la chute de Baghouz, plus de 37,000 personnes y ont trouvé refuge. Il est à supposer que les enfants ayant quitté le califat ont vécu un traumatisme en vivant en état de guerre ou même en participant activement au combat. Ils arrivent alors complètement épuisés physiquement et psychologiquement. Selon le CICR les conditions de vie dans ces camps sont désastreuses. Les enfants n’ont rien, les installations sanitaires, l’hébergement, la nourriture, l’aide médicale ou psychologique sont limités, il n’y a pas d’école. Les enfants, détenus dans des conditions extrêmement précaires, se trouvent exposés directement au risque de mort13. Au 14 mars 2019, 120 décès avaient été enregistrés, dont 80 % d'enfants de moins de cinq ans. En un mois seulement, le nombre total de décès a doublé, atteignant 249 en date du 11 10 En octobre 2017 on comptait environ 1 400 femmes et enfants étrangers détenus en Irak, selon Human Right Watch: https://www.hrw.org/news/2017/09/20/iraq/krg-1400-women-children-isis-areas-detained consulté le 31 juillet 2019. 11 S/2015/358 du 19 mai 2015, §28. 12 Rapport OCHA, « Syria : humanitarian response in Al Hol camp », Situation report n°3, as of 1 May 2019, disponible sur : https://reliefweb.int/report/syrian-arab-republic/syria-humanitarian-response-al-hol-camp-situationreport-no-3-1-may-2019, consulté le 15 mai 2019. 13 Rapports World Health Organization, « Syria crisis, Al-Hol camp, Al-Hasakeh governorate », Issues 1 à 5, février avril 2019, disponibles sur :https://reliefweb.int/report/syrian-arab-republic/syria-crisis-al-hol-camp-al-hasakehgovernorate-issue-1-26-february-2019, consultés le 15 mai 2019. Page 6! sur 111 ! avril. La plupart des décès étaient dus à la malnutrition, à des blessures infectées, à des brûlures graves et à la diarrhée aiguë14. Outre les conditions sanitaires désastreuses, la situation sécuritaire est de plus en plus critique , ; en effet, il existe une réelle crainte d’une re-radicalisation de la population due à l’arrivée des anciens combattants de DAESH (acronyme arabe pour désigner l’« État islamique »15 . En Irak, les enfants sont détenus avec les adultes dans des prisons/ Comme les combattants étrangers terroristes, ils sont jugés selon la loi anti-terroriste n° 13 de 200516 qui offre une large et vague définition du terrorisme. Parallèlement aux persistants et sérieux défauts touchant l’administration du système de justice irakien, des allégations de torture ont été rapportées par l’ONG Human Rights Watch qui a recueilli de nombreux témoignages d’enfants victimes de traitements inhumains et dégradants de la part des autorités irakiennes17. De même, des institutions telles que le Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme de l’ONU et la Mission d’assistance de l’ONU pour l’Irak ont exprimé des inquiétudes à ce sujet18. La raison de ce traitement est leur affiliation présumée à l’EI. D’autres enfants se trouvent également en détention, ceux en bas-âge dont les mères n’ont pu ou voulu, se séparer. Les rapports obtenus des organisations internationales démontrent la violation de principes internationaux tels que définis dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme19 , le Pacte international relatif aux droits civils et politiques20, la Convention contre la torture et autres 14 Council of Europe Commissioner for Human Rights, Statement « Council of Europe member states should urgently repatriate their under-age nationals stranded in Northern Syria », 28th of May 2019. 15 Luc MATHIEU, « On est en train de recréer l’EI à Al-Hol », Luc Mathieu , 04 avril 2019, Libération, disponible sur : https://www.liberation.fr/planete/2019/04/04/on-est-en-train-de-recreer-l-ei-a-al-hol_1719481, consulté le 5 aout 2019. 16 Loi sur la lutte anti-terroriste n°13-2005 (J.O. 4009 du 11 nov. 2005, p. 1). L’article 1er de la loi définit le terrorisme comme « tout acte criminel commis par un individu ou un groupe organisé contre un individu, un groupe, communauté, institutions publiques ou privées portant préjudice aux biens publics ou privés, afin de troubler la sécurité, la stabilité, l’unité nationale ou de répandre la peur, l’affolement et la terreur parmi les gens ou de susciter le chaos à des fins terroristes ». 17 Human Rights Watch, « Everyone Must Confess » Abuses against Children suspeted of ISIS Affiliation in Iraq, 6 mars 2019, disponible sur : https://www.hrw.org/report/2019/03/06/everyone-must-confess/abuses-against-childrensuspected-isis-affiliation-iraq, consulté le 3 aout 2019. 18 AL IRQ 4/2018 du 28 Novembre 2018. 19 Assemblée générale des Nations unies. (1948), Déclaration universelle des droits de l’Homme, (217 [III] A). Paris, (notamment les articles 3, 5, 7, 8, 9 et 10). 20 Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976, RTNU., vol. 999, p. 171 et vol. 1057, p. 407 (notamment les articles 6, 7, 9, 10, 14 et 24). Page 7! sur 111 ! traitements inhumains et dégradants21 ainsi que la Convention internationale des droits de l’enfant. Nombreux de ces droits dont les violations sont aujourd’hui reconnues ont une valeur coutumière, de jus cogens, ne permettant aucune dérogation. La lutte contre le terrorisme, seule réponse apportée par les États occidentaux La réponse apportée par la communauté internationale à ces violations persistantes des droits fondamentaux des enfants ne semble pas satisfaisante en ce qu’elle ne se base que sur l’argument de la lutte contre le terrorisme. La gravité des actes terroristes perpétués par DAESH qui « violent les lois de la guerre, mais aussi la dignité humaine » explique la position des États22 . En réponse aux actions terroristes de cette organisation, le Conseil de sécurité a adopté la Résolution 2178 (2014) selon laquelle les États membres de l’Organisation des Nations Unies sont invités à prendre des mesures visant à prévenir et freiner l’afflux de combattants terroristes étrangers dans les zones de conflit et à prévenir le recrutement des enfants23. Les États doivent veiller à ce que leurs lois internes permettent la poursuite et la sanction des personnes voyageant à l’étranger aux fins de la préparation, planification, perpétration ou participation à des actes terroristes. Cette résolution n’apporte pas de définition du « terrorisme ». Ainsi les mesures adoptées par les juridictions nationales reposent sur une définition vague du terrorisme24. En outre, des efforts considérables ont été déployés pour prévenir les départs vers la Syrie et l’Irak par des programmes de « dé-radicalisation » et de prévention de l’extrémisme violent25. La stratégie du Conseil de l’Europe de lutte contre le terrorisme (2018-2022) réaffirme la nécessité de s’attaquer à la radicalisation conduisant au terrorisme. Enfin, le Protocole additionnel à la 21 Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée dans sa résolution 39/26 du 10 décembre 1984, entrée en vigueur le 26 juin 1987, RTNU., vol. 1465, p. 85. (notamment les articles 2, 5, 12 et 16). 22, Peter MAURER, « Lutte antiterroriste : Le droit international humanitaire ne constitue pas un obstacle abusif à la protection de la sécurité de l’État », Le Monde 15 décembre 2017, disponible sur : https://www.lemonde.fr/idees/article/ 2017/12/15/lutte-antiterroriste-le-droit-international-humanitaire-ne-constitue-pas-un-obstacle-abusif-a-la-protectionde-la-securite-de-l-etat_5230424_3232.html#dIGqq9TSjJjZhDXY.99, consulté le 29 juillet 2019. 23 S/RES/2178 (2014) du 24 septembre 2014, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de terrorisme, §4. Le principe juridique selon lequel la responsabilité pénale repose sur des provisions claires et précises ne semble pas respecté. 24 25 Notamment suite à l’adoption par le Conseil de sécurité le 23 décembre 2015 des 35 principes directeurs de Madrid, outil pratique à la mise en œuvre de la résolution 2178, S/2015/939, Principes directeurs de Madrid, Guide pratique pour les États membres dans leur lutte pour endiguer le flot de combattants terroristes étrangers, 23 décembre 2015. Page 8! sur 111 ! Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme adopté le 22 Octobre 201526 a défini comme infractions pénales plusieurs actes commis à des fins de terrorisme tels que recevoir un entraînement terroriste, voyager à l’étranger aux fins de terrorisme ainsi que le financement et l’organisation de voyages à cette fin. Toute cette règlementation offre un panorama des actions rapides que peuvent impulser les États pour lutter contre le départ des combattants étrangers. L’affaiblissement de DAESH au cours de ces dernières années a conduit à l’adoption de résolutions se concentrant, non plus sur le départ des combattants étrangers, mais sur leur retour dans leur pays d’origine. Le 21 décembre 2017, le Conseil de Sécurité a adopté la résolution 2396 mettant l’accent sur le retour et la réinstallation des combattants étrangers ainsi que des membres de la famille qui les accompagnent27 . La résolution 2396 souligne : « Que les femmes et les enfants associés aux combattants terroristes étrangers revenant d’un conflit ou se réinstallant peuvent avoir joué de nombreux rôles différents et notamment avoir appuyé, facilité et commis des actes de terrorisme, et nécessitent une attention particulière pour ce qui est d’élaborer des stratégies concernant les poursuites, la réadaptation et la réinsertion, et qu’il importe d’aider les femmes et les enfants associés aux combattants terroristes étrangers, qui peuvent être victimes de terrorisme, en tenant compte des sensibilités propres à leur sexe et à leur âge »28 . Cette résolution, à double tranchant (nécessité des poursuites et attention particulière envers les enfants) illustre la complexité de la problématique des enfants (de) combattants étrangers. Le nécessaire respect des droits de l’Homme face à la situation actuelle Malgré les nombreux attentats terroristes perpétrés sur le sol européen, les sociétés européennes doivent résister à la tentation de déshumaniser leurs ennemis, notamment les personnes les plus vulnérables ou accompagnant les combattants. Tout d’abord, ceux-ci doivent voir leurs droits respectés lorsqu’il s’agit de leur capture, leur détention et leur jugement. Ensuite, les membres de leur famille ne doivent pas se voir stigmatisés et ne doivent être punis que pour les 26 Série des Traités du Conseil de l’Europe - n° 21, Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme Riga, 22.X.2015. 27 S/RES/2396 (2017) du 21 décembre 2017, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de terrorisme : « d’enquêter sur eux, d’élaborer et de mettre en œuvre des évaluations des risques exhaustives les concernant, et de prendre des mesures appropriées, en envisageant notamment des poursuites, la réadaptation et la réinsertion, selon qu’il convient » §29. 28 ibid., §31. Page 9! sur 111 ! actes qu’ils auraient commis en tant que combattants. La problématique des enfants n’est que plus sensible du fait de leur statut incertain et de leur plus grande vulnérabilité. Plusieurs organisations internationales ont établi des principes directeurs concernant la conduite des États face à ce phénomène afin de souligner le respect des droits de l’homme dans cette approche anti-terroriste. Pourtant, ces derniers agissent en contradiction avec les droits fondamentaux des individus. La déclaration du ministre anglais de la sécurité, Ben Wallace, le 14 février 2019, illustre l’attitude de nombreux dirigeants européens ; « I’m not putting at risk British people’s lives to go looking for terrorist or former terrorist in a failed state »29 . Jusqu’à présent, les États membres du Conseil de l’Europe ont été réticents à prendre des mesures actives pour rapatrier leurs ressortissants mineurs détenus en Syrie et en Irak. Quelques-uns s’opposent même clairement à leur retour. L’approche restrictive adoptée par plusieurs États membres, souvent justifiée par des arguments sécuritaires, soulève de sérieux doutes quant à sa compatibilité avec les normes internationales en matière de droits de l’homme et des obligations étatiques à l’égard de leurs ressortissants. Le rôle de la Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe Ce qu’il faut est établir un standard que les États européens devront suivre et respecter selon leurs engagements internationaux. Beaucoup de pays occidentaux ont affirmé que les difficultés sur le terrain rendaient impossible le rapatriement des enfants, néanmoins les rapatriements des 67 femmes et 171 enfants kazakhs en juin 201930 ou des enfants français orphelins31 , ont montré qu’un rapatriement était possible. La Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe souhaite définir un tel engagement et appeler les États membres à respecter les droits de l’Homme concernant la question du retour des enfants (de) combattants étrangers européens. Le bureau de la Commissaire aux droits 29 BBC News, « Shamima Begum: IS runaway teen « could face prosecution in the UK » », 14 février 2019, traduction personnelle : « Je ne vais pas risquer la vie des citoyens britanniques en allant chercher des terroristes ou anciens terroristes dans un État failli ». 30 Fionnuala NI AOLAIN, « Time to Bring Women and Children Home from Iraq and Syria », 4 juin 2019, disponible sur : https://www.justsecurity.org/64402/time-to-bring-women-and-children-home-from-iraq-and-syria/, consulté le 07 août 2019. 31 Sophie, PARMENTIER, « Douze enfants de djihadistes français rapatriés de Syrie, et choisis au « cas par cas » », FranceInter, 11 juin 2019, disponible sur : https://www.franceinter.fr/justice/la-france-rapatrie-12-enfants-dedjihadistes-francais-depuis-le-kurdistan-syrien-choisis-au-cas-par-cas, consulté le 07 août 2019. Page 10 ! sur 111 ! de l’Homme du Conseil de l’Europe est une instance non-judiciaire chargée de promouvoir l’éducation et la sensibilisation aux droits de l’homme tels qu’ils ressortent des instruments du Conseil de l’Europe, ainsi veiller à leur respect32. Elle a ainsi émis, le 28 mai 2019 une déclaration exhortant les États membres du Conseil de l’Europe à rapatrier d’urgence leurs ressortissants mineurs et à envisager le rapatriement de leurs mères également. L’attitude des États européens privilégiant le court terme et leur inaction face aux violations des droits fondamentaux des enfants a été condamnée. La légalité du refus de rapatriement des ressortissants mineurs de la part des États européens Ce qui nous interroge est le refus des États européens de rapatrier leurs ressortissants mineurs présents actuellement en Syrie et en Irak. La légalité de cette décision peut être questionnée car ces États sont partie prenante de conventions internationales leur enjoignant de protéger leurs ressortissants, notamment lorsque des violations de leurs droits fondamentaux sont avérées. Enfin, il convient de se demander si les États pourraient être considérés comme responsables des violations des droits fondamentaux des enfants du fait de leur décision de non-rapatriement. Les États européens ont le devoir de respecter la souveraineté de la Syrie et de l’Irak. Ainsi ils ne peuvent s’immiscer dans les affaires de ces pays pour protéger leurs ressortissants mineurs. Or, le droit international public consacre le devoir d’assurer la protection effective des droits et des libertés des personnes faisant état de liens suffisants avec les États européens, particulièrement à leurs nationaux bénéficiant du droit à la protection consulaire. Par conséquent, les États européens ont des obligations en vertu du lien de nationalité dont sont titulaires les enfants (Titre I). D’autre part, les États européens, par leur présence en tant que parties au conflit armé syrien, ont étendu leur juridiction. De fait ils ont le devoir de respecter le droit international humanitaire et les droits de l’homme, droits complémentaires découlant de conventions internationales. Le devoir d’assurer la protection effective des droits et des libertés des enfants découle de leurs engagements internationaux (Titre II). 32 Article 1 de la Résolution (99) 50 sur le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe (adoptée par le Comité des Ministres le 7 mai 1999 lors de sa 104e Session). Page 11 ! sur !111 Titre I. Le droit d’assistance des États, fondement de l’obligation de rapatriement des mineurs nationaux des États membres du Conseil de l’Europe Selon les principes cardinaux du droit international, tout État est souverain sur son propre territoire. Les États sont indépendants et égaux en droit. Ce principe, essentiel à la bonne conduite des relations internationales, limite l’action des États européens dans l’assistance collective à leurs nationaux résidants sur le territoire d’un État-tiers (Chapitre 1). Le droit international inter-étatique s’est développé ces dernières années pour accorder une plus large place à l’individu. Ce dernier pourrait bénéficier d’une protection personnelle du fait de sa nationalité, son intérêt serait alors conservé et il pourrait se voir défendu par son État de nationalité. En effet, le lien de nationalité implique un certain nombre de droits et d’obligations pour les États et leurs ressortissants ; la protection consulaire en fait partie (Chapitre 2). Chapitre 1. Une ingérence légitimée par les résolutions de l’Organisation des Nations-Unies Le droit international a pour principe cardinal le respect de la souveraineté des États. Les ressortissants européens se trouvant à des milliers de kilomètres de leur État de nationalité ne peuvent demander à leur État de s’y ingérer, ce dernier devant respecter le principe de souveraineté des États (Section 1). Cependant, lors de situations exceptionnelles, les États ont la possibilité de s’immiscer dans les affaires des États tiers. Aujourd’hui la présence des enfants européens dans les prisons irakiennes et dans les camps de détention syriens est une situation exceptionnelle, les résolutions de l’ONU le témoignent et légitiment l’action des États européens (Section 2). Section 1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international Le principe cardinal de souveraineté en droit international (§1) ne permet en rien une intervention par un autre État à l'intérieur de ses frontières (§2). Page 12 ! sur 111 ! §1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international Le droit international est l’ensemble des règles qui régissent les rapports entre les États33. C’est un droit des relations inter-étatiques, contrairement au droit national qui gère les relations intra-étatiques. La souveraineté a été définie par Julien Laferrière comme « la qualité d’un pouvoir de droit, suprême et originaire »34 . Un pouvoir de droit en ce qu’il se fonde sur une légitimité, suprême en ce qu’il est au-dessus de toute norme, et enfin originaire en ce qu’il n’est pas délégué par une autre autorité. Ainsi, la souveraineté est un attribut juridique gouvernemental de l’État. L’article 2 §1 du Chapitre 1er de la Charte des Nations Unies énonce que « l’Organisation - des Nations-Unies - est fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres »35 . Sur le plan international, l’État n’a que des égaux qu’il doit respecter. La résolution 2625 adoptée le 24 octobre 1970 par l’Assemblée générale de l’ONU réitère le principe de l’égalité souveraine des États : « tous les États jouissent de l’égalité souveraine. Ils ont des droits et des devoirs égaux et sont des membres égaux de la communauté internationale, nonobstant les différences d’ordre économique, social, politique ou d’une autre nature »36. Il convient de démontrer l’importance de ce principe par un simple exemple. Le Conseil de Sécurité de l’ONU débute chaque résolution avec un rappel de la souveraineté de l’État : « Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et l’intégrité territoriale ». L’État syrien est gouverné par le président Bachar-al Assad qui se présente comme le garant de la souveraineté syrienne. Le statut controversé mais établi du Président n’est pas d’une importance cruciale dans ce mémoire du fait qu’aujourd’hui les enfants (de) djihadistes européens se trouvent pour la grande majorité dans des camps de réfugiés au nord-est de la Syrie, partie du 33 D’après la définition donnée par F. SUDRE dans Droit européen et international des droits de l’Homme, 14ème éd., PUF, 2004, p. 24 §9. 34 J. LAFERRIÈRE, Manuel de droit constitutionnel, Domat-Montchrestien, 1947, p. 359. 35 La Charte des Nations Unies, signée le 26 juin 1945, San Francisco et entrée en vigueur 24 octobre 1945. 36 Résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies. Page 13 ! sur 111 ! territoire où règnent les forces démocratiques syriennes, majoritairement composées de forces kurdes. Néanmoins, ces forces armées ne forment pas un État souverain internationalement reconnu. Par ailleurs, l’organisation est considérée comme terroriste notamment par la Turquie, ce qui rend d'autant plus irréaliste la reconnaissance d'un État. Malgré le contrôle effectif des forces kurdes, les États européens se doivent de respecter la souveraineté de la Syrie, État reconnu en droit international dont le gouvernement est le seul gouvernant légitime. L’histoire de l’Irak est complexe. Sous occupation et sous sanctions de l’ONU pendant sept ans, après l’invasion du Koweit en 1990, la fin de la mission américaine a permis la renaissance d’un État souverain et indépendant. Le gouvernement actuel, dirigé par Adel Abdel-Mehdi, dispose de toutes les compétences nécessaires à l’établissement de sa souveraineté. L’État se comporte en souverain sur l’ensemble de son territoire ; l’ensemble de ses compétences est désigné par la formule « souveraineté territoriale » ou « compétence territoriale majeure »37 . La compétence est un « pouvoir juridique conféré ou reconnu par le droit international », il permet « à un État (...) de connaître d’une affaire, de prendre une décision, de régler un différend »38 . La compétence territoriale, ou compétence ratione loci, lui permet de connaître les affaires qui se déroulent sur son territoire. En droit, le territoire est défini par les frontières39 . La sentence de la Cour permanente d’arbitrage de Max Huber de 1928 concernant un différend entre les États-Unis et les Pays-Bas sur l’Ile des Palmes dans le Pacifique détermine cette notion : « La souveraineté des relations entre les États signifie l’indépendance. L’indépendance relativement à une partie du globe est le droit d’y exercer, à l’exclusion de tout autre État, les fonctions étatiques. Le développement de l’organisation nationale des États durant les derniers siècles et, comme corollaire, le développement du droit international, ont établi le principe de la compétence exclusive de l’État en ce qui concerne son propre territoire de manière à en faire le point de départ du règlement de la plupart des questions qui touchent aux rapports internationaux. »40 37 P. DAILLIER, A. PELLET, Droit international public, LGDJ, 7ème éd., 2002, p. 462 §296. 38 J.B. SIREY, Dictionnaire de la terminologie du droit international, 1960, p. 132. 39 Pour aller plus loin sur l’établissement des frontières, voir P. DAILLIER, A. PELLET, op. cit. 40 Sentence arbitrale rendue le 4 avril 1928, par M. Max Huber, entre les États-Unis et les Pays-Bas, dans le litige relatif à la souveraineté sur l’ile de Palmas (ou Miangas) traduction de M. Ch. Rousseau dans « la Revue Générale de Droit International Public », 1935, p. 163. Page 14 ! sur 111 ! §2. Une souveraineté exclusive dont découle le principe de non-ingérence De ce principe de souveraineté découle le principe d’indépendance et de non-intervention. En effet, ces principes ont été très fréquemment réaffirmés dans le cadre des relations internationales. Corollaire de l’égalité de souveraineté, le principe de non-ingérence enjoint les États à ne pas intervenir dans les affaires intérieures ou extérieures des autres États. .La Cour internationale de justice, dans les affaires Détroit de Corfou (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord c. Albanie), considère que les États exercent un contrôle exclusif dans les limites de leurs frontières. Le principe primordial découlant de cet arrêt est la constatation de la violation de la souveraineté de l’Albanie par le Royaume-Uni, l’intervention d’un État sur le territoire d’un État tiers constituant une violation de la souveraineté de ce dernier41. La prohibition de l’immixtion dans les affaires d’un autre État est devenue un principe coutumier. Ainsi, la présence de ressortissants d’un État sur le territoire d’un autre État ne peut permettre à l’État de nationalité de s'immiscer dans les affaires de l’État d’accueil. En effet, les principes de souveraineté et de non-ingérence, principes reconnus par les Nations-Unies et par la Cour internationale de justice, enjoignent les États à ne pas intervenir. L’État souverain territorial est compétent pour exercer son pouvoir à l’égard de toutes personnes qui se trouvent sur son territoire du seul fait de leur présence sur place. Ainsi, les États européens ne peuvent s’introduire dans les affaires syriennes ou irakiennes en ce que les gouvernements de ces États sont souverains dans les limites de leur territoire. Certes l’État dispose d’une compétence ratione loci mais il possède également des compétences externes, c’est-à-dire qui ne sont pas limitées par le territoire de l’État. Découlent de ces compétences, par exemple, le droit d’entretenir des relations diplomatiques, de s’engager par la voie de conventions internationales ou encore le recours à la force dans les limites établies par le droit international. Les États communiquent et collaborent entre eux, notamment par la présence d’agents diplomatiques et consulaires dans des territoires extérieurs. Mais là encore, leur compétence est limitée par la souveraineté territoriale de l’État tiers et ils ne peuvent agir sans son consentement. 41 Affaire du Détroit de Corfou, 9 avril 1949, CIJ., Recueil 1949, p. 4. Page 15 ! sur 111 ! Selon Vaclav Havel « il y a des valeurs plus élevées que la frontière d’un État »42. Concernant les droits de l’homme, « toute l’ossature du droit international est conçue en dehors de la perspective des droits de l’homme »43 . Le bien-être des individus n’est pas objet du droit international mais seulement du droit national. Ainsi, les États ont une compétence exclusive quant au respect des droits fondamentaux des personnes. C’est le rattachement de l’individu à un État qui va permettre sa protection en droit international. Il existe alors des exceptions au principe de souveraineté qui sont motivées par le souci d’assurer le respect des droits fondamentaux des individus. Avant d’étudier la protection individuelle des personnes, il est nécessaire de s’attacher à l’action possible des États afin de faire respecter les droits de l’Homme dans des cas de violations globales. Il ne s’agit pas d’un enfant dans le cas de l’espèce, mais de centaines d'enfants. Il convient de se demander s’il existerait une exception au principe de souveraineté territoriale des États lorsque nous sommes dans une situation générale de violation des droits fondamentaux d’une partie d’une population ou d’une population entière. Aujourd’hui dans le nord de la Syrie les personnes détenues dans des camps font clairement face à des violations de leurs droits fondamentaux. Or, selon le respect du principe de souveraineté et par conséquent de non-ingérence, il semblerait que les États tiers ne peuvent agir même pour permettre la protection des individus et rétablir le respect de leurs droits. Section 2. Des exceptions au principe de souveraineté, la légitimation de l’intervention en Syrie Le principe de souveraineté des États et de non-intervention les oblige à l’inaction en dehors de leurs frontières. Malgré cela, pour un bon fonctionnement des relations internationales, le droit international n’exclut pas l’exercice par un État d’une compétence extraterritoriale. Toutefois les fondements suggérés de cette compétence doivent être définis et limités par les droits souverains 42 Vaclav Havel, Président de la République tchèque, Allocution du 16 février 2000, Strasbourg, disponible sur : http:// www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+CRE+20000216+ITEM-012+DOC+XML+V0//FR, consulté le 03 août 2019 43 F. SUDRE op. cit. p. 21, §11. Page 16 ! sur 111 ! des autres États concernés44 . Si ces derniers ne respectent pas les droits de l’Homme et qu’ils ne respectent plus la dignité de leur population, alors des États tiers pourraient intervenir afin de permettre le respect de ces droits (§1). Cependant ce principe est délicat à mettre en œuvre du fait de sa nature complexe, ainsi l’intervention des États tiers pourrait se faire selon un autre motif, en l’espèce celui de la lutte contre le terrorisme, qui a pour objectif d’établir une meilleure sécurité pour tous (§2). §1. La théorie de l’intervention d’humanité à la « responsabilité de protéger » de l’ONU Les États ont accepté l’intervention dans un objectif de faire respecter les droits de l’Homme de manière universelle. Or cette théorie a permis une ingérence pour des objectifs autre qu’humanistes (A). C’est pourquoi l’ONU, assemblée des États, a décidé de la transformer en « responsabilité de protéger ». Les États peuvent intervenir afin de protéger les populations mais agissent sous le contrôle de l’ONU (B). A. La théorie de l’intervention d’humanité pour une protection de tout être humain Afin de remplir l’objectif international de respect universel des droits fondamentaux, les États ont pu agir contrairement au principe de non-ingérence. Dans son article relatif à la théorie de l’intervention d’humanité, Antoine Rougier débute en affirmant que cette théorie semble peu compatible avec les principes du droit international : « D’après laquelle les actes de puissance publique interne, accomplis par un gouvernement contrairement aux lois de l’humanité donneraient ouverture à un droit d’intervention en faveur d’un ou de plusieurs États tiers et se trouveraient ainsi soumis à un contrôle international a pris une place assez importante en doctrine depuis un demi-siècle, encore qu’elle ait reçu peu d’applications politiques. Nous la croyons cependant peu compatible avec certaines données traditionnelles du droit international, notamment avec celles de l’indépendance et de l’égalité des États »45. 44 Affaire dite du Lotus, Arrêt du 7 septembre 1927, Cour permanente de Justice Internationale, selon laquelle le principe d’exclusivité territoriale prohibe toute action visant à contraindre un État à prendre des mesures contre un autre. 45 ROUGIER Antoine, « La théorie de l’intervention d’humanité", Revue générale de Droit international public (RGDIP), A. Pedone, tome XVII, 1910, p. 468. Page 17 ! sur 111 ! L’acte d’intervention d’humanité, ou intervention unilatérale pour la défense d’un droit, est une exception au principe souveraineté. Il correspond à une action ponctuelle entreprise par un État en vue d’assurer la protection d’individus (ses ressortissants ou d’autres personnes) qui sont en danger dans un autre État. Cette action se fait sans l’accord du gouvernement de l’État sur lequel elle va se produire. En effet, si l’État sur lequel l’action se déroule accepte une telle intervention, alors l’invitation permet de la légitimer. Dans le cas des interventions d’humanité, l’État souverain sur lequel l’action se déroule ne consent pas à une telle intervention. L’État intervenant se substitue à l’État défaillant. Cette procédure a pour objectif de mettre un terme à une crise extrême dans l’urgence. On a pu définir plusieurs actions de cette sorte ; de l’intervention de la France en Syrie en 186046 à l’intervention des États-Unis sur le territoire iranien en avril 198047 . L’intervention est fréquemment revendiquée pour servir en réalité de motif à une intervention politique portant atteinte à la souveraineté de l’État (par exemple l’intervention des États-Unis en République dominicaine en avril 196548). En l’espèce, les situations en Syrie et en Irak sont de véritables crises. Les conditions de vie dans les camps et dans les prisons sont désastreuses et plusieurs enfants sont décédés. Ainsi, l’action des États dans le but de préserver les droits de leurs ressortissants pourrait être légitime. L’intervention d’humanité entraîne de graves conséquences, elle permet aux États d’étendre leur contrôle sur un domaine réservé en s’immisçant entre l’État et ses habitants. Toutefois, l’existence des « droits de l’humanité »49 permet aux États d’intervenir afin de les faire respecter. Il est clair que l’intervention devrait se faire de manière désintéressée avec pour seul objectif le respect des droits humains universels. Ainsi, la peur du détournement de ce principe exigerait des États un contrôle de leur action par un organe légitime tel que les Nations-Unies. 46 L’intervention militaire française en Syrie afin de mettre un terme aux massacres envers les chrétiens de la part d’extrémistes Druzes à l’été 1860. 47 Suite à la crise des otages américains en Iran qui a duré de novembre 1979 à janvier 1981. 48 La guerre civile dominicaine éclata en avril 1965, quatre jours plus tard les forces militaires américaines débarquèrent. Leur intervention mis fin à la guerre civile avec l’arrivée au pouvoir d’un régime non-communiste. Le pays fut occupé d’avril 1965 à septembre 1966. 49 Terme du Professeur ARNTZ dans la Revue de droit international. et de législation comparée, t. VIII (1876), p. 675 Page 18 ! sur 111 ! B. La « responsabilité de protéger », une intervention sous contrôle de l’ONU Le 20 septembre 1999 le Secrétaire Général des Nations-Unies a plaidé pour que l’ingérence humanitaire, « nouveau concept » émergeant dans les relations internationales, s'applique de « façon juste et cohérente à toutes les régions et à toutes les nations »50 . Selon Kofi Annan, « il est aujourd’hui généralement admis que c’est l’État qui doit servir les citoyens et non l’inverse »51. Les citoyens deviennent titulaires de droit, d’un droit de protection dont l’État est débiteur. A l’ouverture de la cinquante-quatrième session de l’assemblée générale de l’ONU, Kofi Annan a soulevé la problématique relative à cette intervention : « d’un côté on peut se poser la question de la légitimité d’une action décidée par une organisation régionale sans un mandat onusien », a-t-il affirmé en évoquant l’intervention militaire au Kosovo, « de l’autre, on s’interroge sur la nécessité universellement reconnue de mettre fin aux violations des droits de l’Homme »52. Thomas M. Franck, ancien Président de la société américaine de droit international, a admis que « dans le cas du Kosovo, il est clairement apparu que, malgré l’usurpation illégale des prérogatives du Conseil de sécurité par l’OTAN, l’inaction aurait conduit à de biens pires (et illégales) conséquences »53. Ainsi, lors du 60ème sommet mondial de l’ONU en septembre 2005, l’Assemblée générale a adopté le principe de la responsabilité de protéger, « devoir de protéger des populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité »54. Cette responsabilité a été précisée par la résolution 1674 du 28 avril 2006 adoptée par le Conseil de Sécurité et concernant la protection des civils en situation de conflit en condamnant tous les actes de violence commis sur la personne de civils55. 50 Présentation par le Secrétaire Général de son rapport annuel à l’Assemblée Générale, Communiqué de Presse SG/ SM/7136, 21 octobre 1999. Le discours est à retrouver sur le site https://www.un.org/press/fr/ 1999/19991021.sgsm7136.html (consulté le 16 juillet 2019). 51 ROUSSELOT Fabrice, « Annan invite l'ONU à redéfinir son rôle », Libération, 21 septembre 1999, disponible sur : https://www.liberation.fr/planete/1999/09/21/annan-invite-l-onu-a-redefinir-son-role-l_283416 consulté le 19 août 2019. 52 ibid. 53 T. M. FRANCK, « Lessons of Kosovo », The American Journal of International Law, Vol. 93, No. 4 (Oct., 1999), Cambridge University Press, p. 859, disponible sur : https://www.jstor.org/stable/2555351, consulté le 16 juillet 2019. 54 Résolution A/RES/60/1 du 24 octobre 2005, Document final du Sommet mondial de 2005. 55 Résolution S/RES/1674 (2006) du 28 avril 2006, Protection des civils dans les conflits armés. Page 19 ! sur 111 ! Enfin, le 14 septembre 2009, l’Assemblée générale a adopté par consensus sa première résolution sur la responsabilité de protéger56. Cette résolution s’articule sur trois piliers : la responsabilité de l’État en matière de protection, l’assistance internationale et le renforcement des capacités et enfin une réaction résolue en temps voulu. La responsabilité de protéger consiste en une intervention collective légitimée par une résolution du Conseil de sécurité et se déroulant dans le respect de la Charte de l’ONU afin de pallier l’absence de protection d’un État sur sa population. La légitimité de l’action tiendrait donc de l’entremise du Conseil de Sécurité. La première opération conduite au nom de ce principe est l’opération militaire qui eut lieu entre le 19 mars et le 31 octobre 2011 en Libye57. A son point 4 cette résolution « autorise les États Membres (…) à prendre toutes mesures nécessaires pour protéger les populations et zones civiles » tout en excluant le déploiement d’une force d’occupation étrangère sur le territoire libyen. Or une coalition internationale a déclenché une intervention militaire contre les forces libyennes et aurait outrepassé ses objectifs de protection des civils. Il a été examiné que « pour faire en sorte que l’intervention militaire aille au-delà de la simple « responsabilité de protéger » et aboutisse à un changement de régime, les Occidentaux se sont livrés à une interprétation extensive, sinon abusive, de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU »58. Toutefois la souveraineté de l’État libyen a été considérée comme non-violée du fait de l’autorisation par le Conseil de sécurité. Cela marquet-il l’abandon de la notion traditionnelle de souveraineté et l’émergence du concept de « responsabilité de protéger »? La responsabilité de protéger a été un des premiers arguments pour intervenir en Syrie. Aujourd’hui l’intervention d’humanité telle qu’elle fut conçue en 1910 ne peut plus exister. Cette technique n’est aujourd’hui qu’un motif de déclenchement du recours à la force du Chapitre VII. L’intervention d’un État sur le territoire d’un État tiers sans l’accord de l’ONU pourrait être sanctionné du fait de la non-légitimité à être intervenu et serait d’une extrême gravité. La responsabilité de protéger ne peut que découler du Conseil de Sécurité qui offre aux États la possibilité d’agir dans le même but que celui qui était donné aux interventions d’humanité (en 56 Résolution A/RES/63/308 du 14 septembre 2009, Responsabilité de protéger. 57 Résolution S/RES/1973 du 17 mars 2011, La situation en Jamahiriya arabe libyenne. 58 Karim Emile BITAR, « Guerres par procuration en Syrie », Le Monde Diplomatique, Juin 2013, disponible sur : https://www.monde-diplomatique.fr/2013/06/BITAR/49154, consulté le 06 août 2019. Page 20 ! sur 111 ! principe)59. Ainsi le respect de la souveraineté des États reste essentiel à la conduite des relations internationales et même si des droits fondamentaux sont violés dans un autre pays, lors d’une situation de crise, un État ne peut intervenir, en principe, si ce n’est avec l’aval du Conseil de Sécurité. La Russie et la Chine ont utilisé la pratique du droit de veto concernant tout projet de résolution du Conseil de Sécurité condamnant la répression en Syrie60. Selon ces deux États, « la protection de la souveraineté est un facteur essentiel de stabilité de l’ordre international et la décision d’un recours à la force doit être étroitement encadré : il doit être mandaté et contrôlé tout au long de l’opération par le Conseil de Sécurité »61. Dans la même ligne d’idée, le philosophe Noam Chomsky a fortement critiqué cette théorie en ce que cette notion pourrait clairement cacher des intérêts politiques et notamment les visées interventionnistes des grandes puissances62. En effet, il semble quasiment impossible de séparer les mobiles humanistes des mobiles politiques d’intervention. Le désintéressement des États ne peut être absolu et le sujet de ce mémoire en est l’exemple parfait. Malgré l’inhumanité attestée de la situation des mineurs présents dans les camps au nord de la Syrie, peu d’États agissent. Cette inaction prouve que trop peu États ont intérêt à faire cesser cette situation. Une fois leur objectif militaire atteint - entraîner la défaite de l’EI - ils ne semblent plus trouver d’intérêt à agir en Syrie et en Irak, certainement pas pour la protection des enfants, victimes du conflit armé. 59 Aujourd’hui et suite à la résolution 2118 (2013), les États peuvent agir en vertu du Chapitre VII de la Charte des NU si le gouvernement syrien ne respecte pas ses obligations qui sont d’éliminer toutes les armes chimiques de son arsenal. 60 Pour la liste détaillée des vétos de 2011 à avril 2018 : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/12/20/qu-afait-le-conseil-de-securite-de-l-onu-depuis-le-debut-du-conflit-syrien_5052133_4355770.html (consulté le 16 juillet 2019). 61 Selon Anne de TINGUY dans « La Russie face aux révoltes libyenne et syrienne : Des enjeux jugés majeurs, une politique défensive », Les ondes de choc des révolutions arabes, 2014, p. 85. 62 Idée de Jean BRICMONT qui a participé à une conférence de presse avec M. Noam CHOMSKY sur la responsabilité de protéger en 2009 (disponible sur : https://news.un.org/fr/story/2009/07/162542-la-responsabilite-de-proteger-entreconcept-et-realite consultée le 16 juillet 2019). Page 21 ! sur 111 ! §2. La lutte contre le terrorisme, un enjeu sécuritaire permettant davantage d’action de la part des États La naissance de la notion d’hyper terrorisme63, qui renvoie au fait qu’un seuil inconcevable a été franchi par les attaques du 11 septembre 2001, a permis l’ingérence sur le territoire d’États tiers et a entrainé des politiques de lutte contre le terrorisme. Sur ce plan, les États occidentaux ont formé une coalition qui leur a permis d’intervenir sur les territoires syrien et irakien (A). Il convient de se demander si l’ingérence des États dont l’objectif est la lutte contre le terrorisme leur permet de prendre soin de leurs ressortissants mineurs et victimes (B). A. La naissance de l’hyper terrorisme et la légitimation d’une ingérence La notion d'hyper terrorisme est apparue en réponse aux évènement du 11 septembre 2001. Elle définit des actes de violence à très grande échelle. Dès le 12 septembre 2001, le Conseil de Sécurité de l’ONU a adopté la résolution 1368 « une menace pour la paix et la sécurité internationale »64 , d’où découle l’évidente nécessité de la protection des individus face à la menace grandissante du terrorisme. La définition du terrorisme, toujours floue en droit international, apparaît pourtant dans maintes résolutions et déclarations. Suite à l’attaque terroriste contre l’ambassade américaine à Ankara de février 2013, les membres du Conseil de Sécurité ont réaffirmé que : « Le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, constitue l’une des menaces les plus graves à la paix et à la sécurité internationales et que tous les actes de terrorisme, quels qu’ils soient, sont criminels et injustifiables, quels qu’en soient les motifs où qu’ils soient commis et quels qu’en soient les auteurs, (…) les membres du Conseil ont réaffirmé la réelle nécessité de combattre par tous les moyens, dans le respect de la Charte des Nations-Unies et de toutes les obligations prévues par le droit international, en particulier, le droit international des droits de l’Homme, le droit international des réfugiés et le droit Notion d’après François Heisbourg, Hyperterrorisme : la nouvelle guerre, Odile Jacob, Paris, 2001, explication de Ignacio RAMONET dans « Les Etats-Unis entre hyperpuissance et hyperhégémonie. Le nouveau visage du monde », Le Monde diplomatique, décembre 2001. 63 64 S/RES/1368 du 12 septembre 2001, La menace à la paix et à la sécurité internationales résultant d'actes terroristes. Page 22 ! sur 111 ! international humanitaire, les menaces que les actes de terrorisme font peser sur la paix et la sécurité internationales »65. La lutte contre le terrorisme a légitimé l’ingérence d’États, principalement occidentaux, sur le territoire d’autres États qui se trouveraient « en proie à des organisations terroristes », les États-Unis ont ainsi mené une guerre en Irak ou en Afghanistan. Tout autant la France a conduit des opérations militaires au Mali. Enfin, la création d’une coalition internationale afin de combattre l’« État islamique » en est l’illustration la plus actuelle. Ces États ont, en partie, mené ces actions suite à des résolutions de l’ONU leur enjoignant de combattre le terrorisme. La résolution 2249 de novembre 2015 demande aux « États Membres de redoubler d’efforts et de coordonner leur action en vue de prévenir et de faire cesser les actes de terrorisme »66 . Il semble alors essentiel de mettre en place « l’appareil de sécurité de la mondialisation »67 afin de lutter contre le terrorisme. Or cette lutte mondiale semble permettre « de réduire les libertés et le périmètre de la démocratie »68. C’est la résolution 2254 du 18 décembre 2015 qui va rappeler que toutes les parties doivent prendre des mesures nécessaires pour protéger les civils69. B. Une lutte ne permettant pas la protection effective des enfants La lutte contre le terrorisme devrait enjoindre les États à protéger leurs ressortissants et les victimes du terrorisme. Même si un acte terroriste pourrait être considéré comme s’établissant à l’égard du pouvoir politique, les principales victimes de l’organisation terroriste DAESH sont les enfants. La résolution 2396 note que « les enfants peuvent être particulièrement vulnérables à la radicalisation qui conduit à la violence et avoir un besoin de soutien social particulier, tels que les conseils post-traumatiques, tout en soulignant qu’ils doivent être traités dans le respect de leurs droits et de leur dignité, conformément au droit international applicable »70 . 65 Déclaration à la presse du Conseil de sécurité sur l’attentat contre l’ambassade des États-Unis le 1er février 2013, disponible sur https://www.un.org/press/fr/2013/SC10906.doc.htm (consulté le 16 juillet 2019). 66 Résolution S/RES/2249 du 20 novembre 2015, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de terrorisme, §5. 67 Ignacio RAMONET, op. cit. 68 ibid. 69 Résolution S/RES/2254 du 18 décembre 2015, La situation au Moyen-Orient (Syrie). 70 Résolution S/RES/2396 du 21 décembre 2017, Menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de terrorisme. Page 23 ! sur 111 ! Ainsi le Conseil de Sécurité reconnait le besoin d’accompagnement des enfants qui subissent un stress post-traumatique. Afin de mettre en œuvre un soutien pour ces enfants, les États ont le devoir de les rapatrier. Ce n’est pas dans un camp de détention tenu par les forces kurdes, dans l’état actuel des choses, que les enfants vont bénéficier d’un soutien et qu’ils vont être traités dans le respect de leurs droits et de leur dignité. Du fait de leur interprétation des actions du Conseil de Sécurité, les États occidentaux ont décidé d’intervenir sur ce territoire afin de lutter contre le terrorisme. Il est clair que les gouvernements actuels n’ont pas véritablement le souhait d’apporter un soutien aux enfants (de) combattants terroristes étrangers. La protection des enfants et leur rapatriement pourrait se faire grâce au principe de collaboration et de coopération entre États, mais là encore, tandis que les autorités présentes sur place souhaitent le rapatriement de ces enfants, les États européens le refusent. Il semblerait que les principes de protection des enfants sont bafoués sous couvert de la lutte contre le terrorisme. Les enfants, associés aux derniers attentats ayant eu lieu sur le territoire européen, sont aujourd’hui considérés comme des « bombes à retardement »71 par les gouvernements européens. Il est alors inconcevable de les rapatrier du fait de leur impact sur la sécurité des résidents européens. L’adage « la sécurité est la première des libertés », repris maintes fois par les dirigeants européens, témoigne explicitement de leur attitude. En effet, la peur du terrorisme et ainsi de l’insécurité renforce l’inaction des États occidentaux. Face à cette attitude il convient de se pencher sur l’obligation que les États pourraient avoir d’assister leurs nationaux, individuellement. Ces enfants sont nés d’un père et d’une mère dont au moins l’un des deux dispose de la nationalité européenne. De ce fait peuvent-ils se prévaloir d’un droit d’assistance ? La souveraineté est un principe essentiel en droit international mais le lien de nationalité l’est aussi et, de ce lien découle une compétence de l’État leur octroyant un champ d’action. Le droit à obtenir une nationalité est un droit fondamental. Ainsi, en tant que ressortissants d’un État, les individus sont titulaires d’un droit dont leur État de nationalité est débiteur. Notion du Procureur français François MOLINS, à retrouver dans l’enquête de France Info « De l’aéroport à l’école, l’épineux retour en France des enfants de jihadistes », disponible sur https://www.francetvinfo.fr/monde/proche-orient/ offensive-jihadiste-en-irak/enquete-franceinfo-de-l-aeroport-a-l-ecole-lepineux-retour-en-france-des-enfants-dejihadistes_2602956.html, consulté le 23 août 2019. 71 Page 24 ! sur 111 ! Chapitre 2. Le devoir de protection des ressortissants mineurs lors de la violation de leurs droits fondamentaux Les États européens semblent avoir un droit de s’immiscer dans les affaires d’un État tiers lorsque leurs nationaux sont en danger. Les États ne veulent pas mettre en œuvre ce droit dont ils sont garants. (Section 1). Les individus, dont la place devient essentielle en droit international, sont déterminés à demander la mise en œuvre de ce droit (Section 2). Section 1. Un droit discrétionnaire de l’État souverain A l’origine, l’État est seul titulaire d’une personnalité juridique internationale. De ce fait, il dispose de droits et obligations en vertu du droit international. La protection de ses ressortissants en droit international ne se fait que dans le cadre de ses propres droits et/ou obligations. Ainsi, les États disposent d’un droit de protéger leurs ressortissants même si ces derniers se trouvent sur le territoire d’un État tiers (B). Ce droit de protection découle de la compétence personnelle qu’ils possèdent en vertu du droit international (A). §1. Une compétence personnelle établie envers ses ressortissants Les États se doivent de faire respecter le droit international envers leurs ressortissants (A). Leur qualité particulière de nationaux leur permet de bénéficier d’une protection spécifique (B). A. La naissance de l’obligation de respect du droit international en ses ressortissants Les États ont l’obligation de respecter et de faire respecter les droits de l’Homme envers les individus et les autres États72 . Or cette obligation été très mal reçue par les États eux-mêmes. Il semblerait que : 72 E. DECAUX, « Protection consulaire et droits de l’Homme » dans La protection consulaire: Journée d’études de Lyon [actes de la Journée d’études de la Société organisée par l’Université Jean Moulin Lyon 3 le 2 décembre 2005], Société française pour le droit international, Paris éd. Pedone, 2006. Page 25 ! sur 111 ! « La protection internationale des individus est ressentie par les États comme une grave atteinte à leur souveraineté. En raison de sa compétence personnelle et de sa compétence territoriale, c’est à l’État que revient le pouvoir exclusif d’agir à l’égard des individus nationaux ou étrangers qui vivent sur son territoire. Par ailleurs, les États admettent difficilement l’idée d’une protection internationale qui jouerait en définitive contre euxmêmes »73. La compétence personnelle d’un État est le fait que ce dernier peut invoquer un lien d’allégeance particulier à son profit lorsqu’il ne peut se fonder sur un titre territorial74 . De la compétence ratione materiae des États découle la présence de fonctionnaires diplomatiques et consulaires sur le territoire d’un État tiers. De la compétence ratione personae des États découle une fonction d’assistance consulaire envers leurs ressortissants nationaux présents sur le territoire d’un État tiers. En principe les ressortissants dans un État étranger sont soumis à la souveraineté territoriale de ce dernier et la compétence personnelle de l’État d’origine est limitée par la souveraineté territoriale de l’État hôte. Il existe une hiérarchie des compétences en droit international, la priorité est donnée à la souveraineté territoriale sur la compétence personnelle. Malgré cette hiérarchie, l’État d’origine peut toujours s’appuyer sur son titre personnel pour objecter auprès de l’État hôte les comportements inamicaux de celui-ci. L’affaire Concessions Mavrommatis en Palestine exprime une formule selon laquelle l’État doit faire respecter en ses ressortissants le droit international : « C'est un principe élémentaire du droit international que celui qui autorise l'État à protéger ses nationaux lésés par des actes contraires au droit international commis par un autre État, dont ils n'ont pu obtenir satisfaction par les voies ordinaires. En prenant fait et cause pour l'un des siens, en mettant en mouvement, en sa faveur, l'action diplomatique ou l'action judiciaire internationale, cet État fait, à vrai dire, valoir son droit propre, le droit qu'il a de faire respecter en la personne de ses ressortissants, le droit international »75 . 73 P. DAILLIER, M. FORTEAU, A. PELLET, Q.D. NGUYEN, Droit international public, Paris, LGDJ, 2010, 8ème ed. p. 726. 74 Ibid., p 493. 75 Affaire des concessions Mavrommatis en Palestine, Cour internationale de justice, 30 Aout 1924, série A, n°2, p. 14. Page 26 ! sur 111 ! B. Des protections spécifiques envers les individus par les États du fait de leur lien de rattachement Le droit international, droit inter-étatique, octroie une place aux individus. Cette place ne leur confère pas encore une personnalité juridique, l’État agit en faisant « valoir son droit propre ». Ainsi, la protection diplomatique est «gracieuse», elle consiste en démarches politiques et administratives des autorités de l’État de nationalité envers le pays hôte en faveur de la personne de son ressortissant. Cette protection, rarement mise en oeuvre, découle d’un droit discrétionnaire de l’État. La protection consulaire quant à elle peut être définie comme la protection des intérêts individuels. Un individu victime d’une violation d’un droit fondamental pourrait alors demander à son État de nationalité une assistance spécifique. La Convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963, énumère les fonctions consulaires dans son article 576,. Elles permettent de : « Prêter secours et assistance aux ressortissants, personnes physiques et morales, de l’État d’envoi; (…) Sauvegarder, dans les limites fixées par les lois et règlements de l’État de résidence, les intérêts des mineurs et des incapables, ressortissants de l’État d’envoi, particulièrement lorsque l’institution d’une tutelle ou d’une curatelle à leur égard est requise; Sous réserve des pratiques et procédures en vigueur dans l’État de résidence, représenter les ressortissants de l’État d’envoi ou prendre des dispositions afin d’assurer leur représentation appropriée devant les tribunaux ou les autres autorités de l’État de résidence pour demander, conformément aux lois et règlements de l’État de résidence, l’adoption de mesures provisoires en vue de la sauvegarde des droits et intérêts de ces ressortissants lorsque, en raison de leur absence ou pour toute autre cause, ils ne peuvent défendre en temps utile leurs droits et intérêts ». Pour être éligible à la protection consulaire, l’individu doit être ressortissant de l’État, c’est-àdire avoir un lien effectif avec ce dernier. Ce lien effectif découle de la nationalité de l’individu et c’est l’État qui décide de l’attribution de sa nationalité. Ce principe est consacré dans l’affaire Nottebohm - Liechtenstein c. Guatemala « le droit international laisse à chaque État le soin de 76 Convention de Vienne sur les relations consulaires, Vienne le 24 avril 1963. Entrée en vigueur le 19 mars 1967. Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 596, p. 261. Page 27 ! sur 111 ! régler l'attribution de sa propre nationalité »77. Le lien de nationalité est le lien juridique entre l’État et la personne ayant à la base un fait social de rattachement, une « solidarité effective d’existence, d’intérêts, de sentiments joints à une réciprocité de droits et de devoirs ». Les règles d’attribution de la nationalité sont du ressort de la souveraineté des États qui peuvent les modifier discrétionnairement. Or le droit international public pose certaines conditions à respecter. La nationalité est reconnue comme un droit de l’Homme par la Déclaration universelle des droits de l’Homme en 194878 , le Pacte international des droits civils et politiques de 1966 ou encore la Convention internationale des droits de l’enfant. De ce droit découlent des droits et obligations reconnus aux nationaux. La protection consulaire et le droit de pénétrer sur le territoire de son État de nationalité en font partie79 . En effet, le droit d’accès à son pays de nationalité est un droit absolu des ressortissants d’un État. En l’espèce, les États européens ne ferment pas à proprement parler leurs frontières, mais par la non-délivrance de titres d’identités aux enfants, notamment ceux nés sur le territoire syrien de parents européens, ils ne permettent pas à ces derniers de bénéficier de leur droit absolu d’entrer sur le territoire de l’État dont ils sont ressortissants. Les pays d’origine doivent avoir à l’esprit les obligations leur incombant, en particulier l’obligation de respecter « le droit qu’ont l’enfant et ses parents de quitter tout pays, y compris le leur, et de revenir dans leur propre pays ». Plusieurs États tels que la Norvège ou les Pays-Bas reconnaissent le droit de retour dans leur propre pays en indiquant qu’ils n’ont pas une obligation de rapatrier activement mais que si leurs citoyens approchent des représentations diplomatiques, alors un rapatriement pourra prendre place. A l’aune de ce qui a été démontré précédemment, il est clair que le rapatriement des ressortissants européens ne peut se faire de manière individuelle et spontanée. Aujourd’hui détenus dans des campements ou en prison, ils ne peuvent se déplacer dans un consulat. La Cour européenne des droits de l’Homme dans son arrêt Drozd et Janousek80 a rappelé que la protection consulaire devait se faire pour tous les nationaux, innocents ou coupables. 77 Affaire Nottebohm (deuxièrne phase), Arrêt du 6 avril 1955 : C. I. J. Recueil 1955, p. 23. En l’espèce le Liechtenstein demandait réparation pour des mesures contraires au droit international que le gouvernement guatemalquais avait prise à l’encontre de son ressortissant. Le Liechtenstein ne pouvait demander réparation du fait que l’individu était un ressortissant allemand. 78 Assemblée générale des Nations unies. (1948), Déclaration universelle des droits de l’Homme, (217 [III] A). Paris (Article 15). 79 Selon l’article 12-4 du Pacte de 1966 sur les droits civils et politiques ainsi que l’article 2 du Protocole 4 à la CEDH, les nationaux bénéficient d’un droit « général et absolu » à entrer, séjourner et demeurer dans leur État de nationalité. 80 CEDH, Cour (Plénière), Drozd et Janousek c. France et Espagne, 26 juin 1992, n°12747/87, en l’espèce les requérants se plaignaient de ne pas avoir bénéficié d’un procès équitable. Page 28 ! sur 111 ! Cette compétence de l’État est soumise à une coopération avec l’État hôte, il convient donc, dans notre cas d’espèce, de se demander si l’État de nationalité a le devoir de commencer un dialogue avec l’État hôte lorsque les intérêts de ses ressortissants sont violés sur ce territoire. Les ressortissants européens mineurs actuellement détenus en Syrie, victimes de violation de leurs droits fondamentaux (droit à la vie, interdiction de la torture, détention illégale, droit à une éducation, à un accès aux soins etc.) se trouvent sous le contrôle des forces kurdes, et plus largement des forces démocratiques syriennes qui ne sont pas reconnues comme ayant une autorité gouvernementale. §2. Un droit dont les sujets sont les États Les États européens se permettent de refuser d’assister leurs citoyens présents à l’étranger malgré la reconnaissance de ce droit par le droit communautaire (A), ce droit discrétionnaire ne prend en aucun cas en compte la qualité de sujet de droit des individus (B). A. Le retrait du droit à la protection consulaire face au droit européen « Rien sans doute ne témoigne mieux de la répugnance du droit international classique à l’égard d’une quelconque reconnaissance de la personnalité juridique internationale aux personnes privées que l’institution juridique de la protection diplomatique »81. Comme inscrit sur le site diplomatique de la Belgique, une assistance peut être fournie par un centre de crise belge à tout citoyen résidant à l’étranger. Or le rapatriement, organisé dans les cas les plus dramatiques, « n’est pas un droit du citoyen »82. Il est clairement établi sur ce site que l’individu ne peut agir à l’encontre de la Belgique afin d’obtenir une protection consulaire. L’État a le choix d’agir ou non. 81 A. PELLET, Le droit international entre souveraineté et communauté, éd. Pedone, coll. Doctrine(s), 2014, p. 82. 82 Site des Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement du Royaume de Belgique : https://diplomatie.belgium.be/fr/Services/voyager_a_letranger/belges_en_detresse/assistance_en_cas_de_crise (consulté le 17 juillet 2019). Page 29 ! sur 111 ! L’arbitraire de ce droit et la non-obligation de l’État à l’appliquer est visible dans les actions de certains États européens. L’Autriche, par exemple, envisageait en mars 2019 de retirer la protection consulaire à tous les ressortissants européens qui ont combattu pour le groupe EI83. Il est important de préciser qu’aujourd’hui les États font partie de communautés internationales et régionales. L’Autriche rappelle bien que la protection consulaire sera retirée à tous les ressortissants européens. En effet, un consulat d’un État membre de l’Union européenne peut rapatrier ou assister un citoyen de la nationalité d’un autre État de l’Union européenne (suite à un accord avec le ministre des affaires étrangères du pays d’origine). Selon la Commission européenne: « Tout citoyen de l'Union européenne (UE) se trouvant à l’extérieur de l’UE, dans un pays où l'État membre auquel il appartient n'est pas représenté, peut bénéficier d'une protection de la part des autorités diplomatiques ou consulaires de tout autre État membre de l'UE. Il a le droit de bénéficier de cette protection au même titre que les ressortissants de cet autre État membre84 ». Les articles 20.2 et 23 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne consolident le droit des citoyens de l’UE à bénéficier de la protection des autorités consulaires ou diplomatiques85 . Enfin, l’article 46 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne garantit une protection diplomatique et consulaire à tout citoyen de l’Union : « Tout citoyen de l’Union bénéficie, sur le territoire d’un pays tiers où l’État membre dont il est ressortissant n’est pas représenté, de la protection des autorités diplomatiques et consulaires de tout État membre dans les mêmes conditions que les nationaux de cet État »86 . 83 « IS-Kämpfer: Regierung streicht konsularischen Schutz für Rückkehrer », Die Presse, 06 mars 2019, disponible sur : https://diepresse.com/home/ausland/aussenpolitik/5590601/ISKaempfer_Regierung-streicht-konsularischenSchutz-fuer-Rueckkehrer consulté le 17 juillet 2019. 84 Site de la Commission européenne sur le droit à la protection consulaire : https://ec.europa.eu/consularprotection/ content/about-consular_fr (consulté le 17 juillet 2019). 85 Traité 86 sur le fonctionnement de l’Union européenne, Journal officiel de l’UE, 26 octobre 2012, C 326/47. Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 18 décembre 2000, (2000/C 364/01). Page 30 ! sur 111 ! Le ressortissant mineur de l’Union européenne pourrait donc demander à un autre consulat de bénéficier d’un rapatriement. Or, actuellement, il n’existe plus de consulats de pays de l’UE en Syrie. Les ressortissants pourraient se rendre dans un pays limitrophe (Irak, Turquie) afin de demander une assistance. Bien entendu, cela est réellement problématique pour les mineurs actuellement détenus en Syrie. Cette situation exceptionnelle pourrait permettre aux autorités nationales ou européennes de venir en aide aux citoyens malgré l’absence de consulat sur le territoire, plusieurs rapatriements ont d’ailleurs été organisés par les autorités des États européens. Ainsi les difficultés pratiques sont surmontables. De plus le Conseil de l’UE a adopté une Directive le 20 avril 2015 relative à la protection consulaire des citoyens de l’Union. Cette directive renforce le principe même d’assistance consulaire. L’article 9 de cette directive prévoit les cas d’assistance consulaire : « La protection consulaire visée à l’article 2 peut notamment comprendre des mesures d’assistance dans les situations suivants: a) arrestation ou détention; b) fait d’être victime d’un crime ou d’un délit; c) accident ou maladie grave; d) décès; e) besoin d’aide et de rapatriement en situation d’urgence; f) besoin de titre de voyages provisoires comme prévu dans la décision 96/409/PESC »87. Or « comme la protection nécessaire dépend toujours de la situation concrète, la protection consulaire ne devrait pas se limiter aux cas spécifiquement mentionnés dans la présente directive »88 . B. Le caractère discrétionnaire de l’utilisation de ce droit par les États Malgré tous ces textes, la protection consulaire ne semble pas être une obligation juridique pour l’État et ses services consulaires. La position de la doctrine semble relativement claire concernant l’assistance consulaire dans son application de protection des individus qui se trouvent en situation de crise. Jean-Paul Pancracio affirme que la protection de l’État d’origine ne peut être acquise automatiquement89. Tout autant, M. 87 Directive (UE) 2015/637 du Conseil du 20 avril 2015 établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l’Union non représentés dans des pays tiers et abrogeant la décision 95/553/CE., article 9. 88 Considérant 14 de la-dite Directive. 89 Communication suite à la table ronde « La protection consulaire et diplomatique : concurrence ou complémentarité? », lors de la journée d’étude de Lyon sur la protection consulaire en 2005 (ouvrage éd. Pedone, 2006). Page 31 ! sur 111 ! Kdhir écrit que « the superiority of the State over individuals means that Leviathan has no obligation towards its citizens, not even to protect them towards other States »90. En utilisant le terme « Leviathan », l’auteur se réfère à l’oeuvre de Thomas Hobbes et à sa conception de l’État91 . Selon ce dernier, l’État est une autorité absolue et souveraine à laquelle les membres doivent obéissance absolue. L’intervention judiciaire pour non-assistance aux ressortissants de l’État de nationalité n’existait que lorsque l’État d’accueil violait son obligation à l’article 36 de permettre à l’État et à ses ressortissants de communiquer. Ainsi l’État violait une obligation en ne permettant pas à l’autre État d’agir. En effet, le droit international, inter-étatique, ne prenait pas en compte les intérêts individuels. Les individus étaient exclusivement objets et non sujets du droit international92 . « Les auteurs, qui continuent de considérer que l’État est un sujet de droit détaché du peuple qui peut faire ce qu’il veut parce qu’il est un sujet de droit alors que le peuple n’a pas cette qualité, développent ou encouragent une vision, des conceptions et des pratiques qui non seulement ne rendent pas compte de la réalité des luttes sociales mais conduisent les États et les peuples vers des conflits et des impasses »93. Section 2. Un droit remis en cause par l’intervention de l'autorité judiciaire Les individus ont acquis une personnalité juridique en droit international (§1) qui leur a permis de contester la violation de leur droit et de requérir une protection par leur État de nationalité. L’affirmation de la responsabilité de l’État reste cependant incertaine (§2). 90 Traduction personnelle : « La supériorité de l'État sur les individus signifie que le Léviathan n'a aucune obligation envers ses citoyens, pas même de les protéger envers les autres États », ibid., M. KDHIR, Les bénéficiaires de la protection consulaire. 91 Thomas Hobbes, Le Leviathan 1651, éd. Flammarion, paru le 22 mars 2017 92 A. PELLET, op. cit. p.84. 93 Madjid BENCHIKH, Réciprocité et universalité : Sources et régimes du droit international des droits de l’homme, Mélanges en l'honneur du Professeur Emmanuel Decaux, Collectif, p. 105. Page 32 ! sur 111 ! §1. Vers une obligation de rapatriement à la demande des individus, nouveaux sujets de droit international Les individus ont acquis une qualité de sujet de droit international (A) et peuvent demander une réparation face à la violation d’un droit international par leur État de nationalité (B). A. Un droit dont les individus sont les sujets « Le droit international et européen reconnaît des droits aux individus et corrélativement fait naître à la charge de l’État des obligations correspondantes, il porte ainsi atteinte aux principes classiques de la compétence nationale exclusive et de la non-ingérence dans les affaires intérieures »94 . Historiquement seuls les États souverains ont la capacité de contracter des obligations internationales. Ils sont les seuls sujets originaires du droit international et l’individu est un « objet » du droit95 . La Convention de Vienne sur les relations consulaires établit la conduite des relations consulaires entre États par des explications techniques. Son objet principal est la mise en place et le bon fonctionnement des postes consulaires dans les pays. Elle illustre l’application du soutien à l’individu par le système interne de l’État qui réalisera une application effective du droit international. En 1928, la Cour permanente de justice internationale, dans son avis consultatif n° 15 dans l’affaire de la compétence des tribunaux de Dantzig96, reconnaît la création de droits et obligations à l’égard des individus, susceptibles d’être appliquées par les tribunaux nationaux, découlant d’un accord international. 94 F. SUDRE, Droit international et européen des droits de l’Homme, Paris, PUF, 1995, 2ème ed., p. 73. 95 Selon la formule d’A. PELLET, Le droit international entre souveraineté et communauté, éd. Pedone, coll. Doctrine(s), 2014, p.84. 96 Compétence des tribunaux de Dantzig (Réclamations pécuniaires des fonctionnaires ferroviaires dantzikois passés au service polonais contre l’administration polonaise des chemins de fer), Série B., n°15, 3 mars 1928, Recueil des avis consultatifs. En l’espèce la Cour avait à interpréter un accord passé entre la Pologne et Danzig en 1921 relatif aux droits et obligations des cheminots danzigois passés au service de l’administration polonaise. Page 33 ! sur 111 ! Dans le cadre européen, à travers l’affaire Van Gend en Loos97, la Cour de justice de l’UE a établi que les individus étaient des sujets de droit international et non plus seulement des bénéficiaires de la règle de droit international. Les individus peuvent alors se prévaloir directement de leurs droits au plan international. Pourraient-ils donc faire valoir un droit à l’assistance consulaire du fait de leur nationalité ? Il est légitime de se demander si les arrêts LaGrand du 27 juin 200198 et Avena du 31 mars 200499 prononcés par la Cour internationale de justice confèrent un droit individuel à recevoir l’assistance consulaire. Dans ces affaires, des individus détenus aux États-Unis et condamnés à une peine de mort n’avaient pu bénéficier de l’assistance consulaire (au sens de l’article 36 de la Convention). En effet, la CIJ déclare que l’article 36 créer des droits individuels. Cet article ordonne aux États de permettre la communication entre les ressortissants de l’État d’envoi et les fonctionnaires consulaires (notamment lorsqu’ils sont en état de détention). La violation de cet article est établie lorsque l’État omet ou refuse la communication entre les ressortissants et fonctionnaires consulaires de l’État d’envoi. Cependant aucune jurisprudence ne concerne l’article 5 de la Convention de Vienne octroyant un devoir ou un droit à la protection consulaire tel que le rapatriement. Aujourd’hui, l’individu véritable sujet de droit pourrait agir en responsabilité de l’État face à une juridiction nationale ou internationale et relativement à son « droit » à la protection consulaire. Vu le refus des autorités d’agir, les grands-parents, lorsqu’ils le peuvent, agissent afin de dénoncer les conditions de vie de leurs petits-enfants, mettre à jour leur statut de victime et responsabiliser les États. Plusieurs plaintes ont été déposées à l’encontre des États européens pour refus de rapatriement. Les grands-parents demandent à la Cour de déterminer la violation du droit d’assistance consulaire des enfants ressortissants européens. 97 Arrêt de la Cour de justice des communautés européennes, Van Gend & Loos (NV Algemene Transport- en Expeditie Onderneming van Gend & Loos contre Administration fiscale néerlandaise), demande de décision préjudicielle par Tariefcommissie - Pays-Bas. affaire 26-62 (5 février 1963), En l’espèce l’administration fiscale néerlandaise a appliqué un droit de douane à une importation allemande, cette action semble contraire au traité de Rome. Ainsi il contient de se demander si cette disposition communautaire peut s’appliquer valablement dans les relations entre les États membres et leurs ressortissants. 98 LaGrand (Allemagne c. États-Unis d'Amérique), arrêt, C. I. J. Recueil 2001, p. 466. 99 Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. États- Unis d'Amérique), arrêt, CIJ. Recueil 2004, p. 12. Page 34 ! sur 111 ! B. Des décisions judiciaires nationales enjoignant les États à protéger leurs ressortissants mineurs La cour administrative de Berlin a jugé le 10 juillet 2019, suite à sa saisie par des familles d’enfants présents en Syrie, que l’Allemagne devait rapatrier trois enfants allemands et leur mère d’un camp de réfugiés en Syrie. Les trois enfants âgés de 2, 7 et 8 ans ont le droit de bénéficier de la protection consulaire et d’être rapatriés du camp dans lequel les conditions de vie sont inhumaines et dégradantes. En effet, l’inaction du gouvernement menace la vie des enfants100. Le 11 juillet 2019 l’avocat des familles a affirmé que le Ministre des affaires étrangères ne pouvait suspendre la protection consulaire de manière discrétionnaire : « This is a fundamental decision in which the Federal Foreign Ministry was clearly shown that one cannot avoid political responsibility and legal responsibility »101. Après un échec face à la justice néerlandophone de Belgique en 2018102, le 11 juin 2019 le tribunal de première instance francophone de Bruxelles a condamné l’État belge a mettre en oeuvre « toutes les mesures nécessaires et possibles en vue de rapatrier la demanderesse vers la Belgique »103. En l’espèce la demanderesse, de nationalité belge, est majeure depuis le 1er février 2019. Victime d’un enlèvement parental elle a été emmenée mineure en Syrie au sein de DAESH et elle est aujourd’hui détenue au camp de détention Al-Hol. Au regard de son droit à l’assistance consulaire le tribunal admet « qu’aucun droit subjectif à l’assistance consulaire ne peut être reconnu à la demanderesse, il n’en demeure pas moins que l’État belge peut décider de lui octroyer une assistance et qu’il dispose de moyens pour ce faire »104 . Toutefois, compte tenu de la situation de la 100 La décision n’étant pas traduite en ligne, l’information découle donc des médias tel que DW : « Find and return German children of IS adherents, rules Berlin court », 12 juillet 2019, disponible sur : https://www.dw.com/en/find-andreturn-german-children-of-is-adherents-rules-berlin-court/a-49561831?maca=en-rss-en-all-1573-rdf, consulté le 17 juillet 2019. 101 Traduction personnelle : « il s'agit d'une décision fondamentale dans laquelle le Ministère fédéral des affaires étrangères a clairement démontré qu'on ne peut se soustraire à sa responsabilité politique et à sa responsabilité juridique », d’après une interview de D. SCHOENIAN dans le journal NDR le 11 juillet 2019 (d’après le site d’informations tagesschau.de https://www.tagesschau.de/investigativ/ndr-wdr/is-kinder-133.html). 102 Informations données par le site justice en ligne (http://www.justice-en-ligne.be/article1189.html consulté le 04 juillet 2019). 103 Tribunal 104 de première instance francophone de Bruxelles, Section civile, ordonnance n°19/37/C, 11 juin 2019. Ibid., §46. Page 35 ! sur 111 ! requérante, il est jugé qu’en « décidant de ne pas mettre en oeuvre l’assistance consulaire avec tous les moyens dont il dispose, alors même qu’un enfant se trouve dans un état de détresse aiguë, l’État belge porte prima facie atteinte au droit reconnu par l'article 22bis de notre Constitution »105 . L’article 22bis de la Constitution consacre le droit des enfants au respect de leur intégrité morale, physique, psychique et sexuelle et la prise en compte de leur intérêt supérieur106 . En prenant en compte ces deux éléments, le juge des référés constate qu’il dépasserait la limite de ses compétences : « En imposant à l’État belge les moyens qu’il doit utiliser pour y parvenir. Il lui appartient à lui seul, dans le cadre de sa compétence discrétionnaire, de décider de la mesure qu’il s’avérera la plus adéquate et pertinente. (...) il convient, dès lors, de faire droit aux demandes tendant à la délivrance d’un laissez-passer ou de tout autre document administratif approprié et à faciliter le retour de la demanderesse dans la mesure indiquée ciaprès ». Ainsi, la compétence discrétionnaire de l’État est consacrée. Toutefois, compte tenu du caractère exceptionnel de la situation, le juge des référés ordonne à l’État d’agir au minimum, en fournissant un document administratif permettant à la requérante de revenir en Belgique. En effet, le juge belge rappelle son pouvoir et son droit de « faire une injonction appropriée à l'administration, lorsque celle-ci semble manifestement porter fautivement atteinte à un droit subjectif. Il peut également, à condition de rester dans la sphère précitée, imposer ou interdire certains actes lorsqu’il conclut raisonnablement que l’administration n’a pas agi dans le cadre des limites dans lesquelles elle doit intervenir »107 . Ce droit de la justice de juger des actes rattachés aux actes de gouvernement n’a pas été considéré de la même manière en France. 105 Ibid., §49. 106 Constitution de la Belgique fédérale coordonnée le 17 février 1994. 107 Ibid., §38. Page 36 ! sur 111 ! §2. Une incompétence de l’autorité judiciaire dont le fondement pourrait être remis en cause par la Cour européenne des droits de l’Homme Contrairement à l’Allemagne ou à la Belgique, les juges français se sont déclarés incompétents pour juger une affaire similaire (A) or cela pourrait constituer une violation du droit à un procès équitable (B). A. Une décision d’incompétence des juges administratifs français Le 23 avril 2019, le juge des référés du Conseil d’État français a statué sur une affaire concernant le rapatriement d’enfants mineurs et de leur mère, actuellement détenus dans le camp de Roj en Syrie. La requérante a demandé au tribunal d’enjoindre au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères d’organiser le rapatriement en France d’elle-même et de ses enfants. Selon le considérant 3 de la décision, « La requête de Mme C...et de Mme D...a pour objet soit que l'État intervienne auprès d'autorités étrangères sur un territoire étranger afin d'organiser le rapatriement en France de ressortissants, soit qu'il s'efforce de prendre lui-même des mesures pour assurer leur retour à partir d'un territoire hors sa souveraineté. Les mesures ainsi demandées en vue d'un rapatriement, qui ne peut être rendu possible par la seule délivrance d'un titre leur permettant de franchir les frontières françaises, ainsi que cela a été demandé à l'audience, nécessiteraient l'engagement de négociations avec des autorités étrangères ou une intervention sur un territoire étranger. Elles ne sont pas détachables de la conduite des relations internationales de la France. En conséquence, une juridiction n'est pas compétente pour en connaître »108. De par la théorie des actes de gouvernement, le juge ne peut statuer sur cette affaire. L’acte de gouvernement peut être défini comme « la dénomination appliquée à un certain nombre d’actes émanant des autorités exécutives et dont la caractéristique commune est de bénéficier d’une immunité juridictionnelle absolue »109. La séparation des pouvoirs entre le législatif, l’exécutif et le judiciaire légitime cette notion. 108 Conseil d'État, Juge des référés, 23 avril 2019, 429668, Inédit au recueil Lebon, considérant 3 109 Gérard CORNU, Vocabulaire Juridique, éd. Bertrams, 2012. Page 37 ! sur 111 ! La représentante du ministère a expliqué à l’audience du 8 avril 2019 que « le tribunal n'est aucunement le lieu d'un débat politique ou moral, mais juridique. Votre tribunal doit se déclarer incompétent, en ce que la décision [de non-rapatriement] est un acte de gouvernement, non détachable de la conduite des relations internationales »110 . Le droit se montre impuissant et sans possibilité de recours effectif de la part des personnes directement concernées. Toutefois, selon les avocats de la requérante, il est impensable que cette théorie s’applique au cas de l’espèce dans lequel des droits fondamentaux des ressortissants sont violés et du fait que l’acte de rapatriement ne s’effectue pas avec un État considéré comme souverain. En effet, les rebelles kurdes qui contrôlent les camps de détention avec l’aide des puissances occidentales ne sont pas formellement des autorités gouvernementales. Cette décision suit la lignée jurisprudentielle du Conseil d’État. Déjà, en 1962, le Conseil d’État avait estimé que le refus de rapatriement des harkis à la fin de la guerre d’indépendance algérienne n’était pas détachable de la conduite des relations entre la France et l’Algérie (même si l’Algérie n’était pas encore constituée en État mais était contrôlée par le Front de Libération Nationale)111 . Ce refus de juger entraine alors la question de l’absence de recours effectif. Les requérants se trouvent dans une impasse sous le droit français et pourrait saisir la CEDH afin de faire valoir leur droit à un recours effectif énoncé dans l’article 6 de la CESDH112. 110 Tribunal administratif de Paris, ordonnance du 9 avril 2019, req. N°1906076/9. 111 Chantal MORELLE. « Les pouvoirs publics français et le rapatriement des harkis en 1961-1962 », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, vol. no 83, no. 3, 2004, pp. 119. 112 Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, adoptée le 04 novembre 1950, entrée en vigueur le 03 septembre 1953, STE n°005. Page 38 ! sur 111 ! B. La Cour européenne des droits de l’Homme en faveur d’un rapatriement des ressortissants européens mineurs ? La Cour européenne des droits de l’Homme a consacré le devoir de protection diplomatique dans la décision Boumediene et autres c. Bosnie Herzégovine113 . Quatre requêtes ont été introduites fin 2006 par des activistes islamistes détenus à Guantanamo suite à leur remise, en octobre 2001, par la Bosnie-Herzégovine aux États-Unis. Les requérants étaient de nationalités bosniaque et algérienne. Les juridictions nationales enjoignaient les autorités bosniaques à agir diplomatiquement auprès des autorités américaines. La Cour considère que l’État bosniaque avait pris toutes les mesures nécessaires à assurer la protection des droits fondamentaux des requérants. Dans sa décision d’irrecevabilité la Cour se livre à une lecture « réaliste » des obligations à agir de l’État membre114 . Elle énumère les moyens mis en oeuvre par la Bosnie-Herzégovine pour obtenir des assurances diplomatiques de la part des États-Unis : « Les autorités de la Bosnie-Herzégovine sont intervenues à plusieurs reprises auprès des États-Unis et ce dès la semaine suivant la première décision de la Chambre des droits de l’homme dans cette affaire. Elles ont ainsi clairement manifesté leur engagement dépourvu de toute équivoque en faveur du rapatriement des requérants et elles ont également levé tous les obstacles internes au retour de ces derniers en Bosnie-Herzégovine. De plus, les autorités de la Bosnie-Herzégovine ont envoyé un représentant qui a rencontré les requérants dans le centre de détention de la Baie de Guantanamo ». On peut se demander si la Cour ne pourrait juger de la bonne mise en oeuvre de la protection diplomatique par les États membres de la Convention lorsque la violation d’un droit de la Convention est établie. Elle pourrait ordonner aux autorités exécutives d’un État partie d’exercer la protection diplomatique en faveur d’un ressortissant victime d’une violation de ses droits garantis par la CESDH du fait de la nécessité de bénéficier d’un recours effectif. 113 CEDH, Boumediene c. Bosnie-Herzégovine (No 38703/06) et 5 autres affaires (40123/06, 43301/06, 43302/06, 2131/07 et 2141/07) du 18 novembre 2008. 114 G. COHEN-JONATHAN, J.F. FLAUSS, « La Cour européenne des droits de l’homme et le droit international », In: Annuaire français de droit international, volume 54, 2008. p. 545. Page 39 ! sur 111 ! Conclusion Titre 1 Aux Pays-Bas, l’ancien ministre des affaires étrangères Bert Koenders a affirmé : « We keep referring to these people as foreign terrorist fighters. The uncomfortable truth is that they are not foreign at all. They may be foreigners in the countries where they are going to. But in reality they are our compatriots, our acquaintances, the classmates of our kids, the guys and girls we see in our supermarkets They are part of our societies. Perhaps the only thing that’s foreign to us is their mentality »115. La protection consulaire, protection découlant directement du lien de nationalité entre l’État et l’individu et permettant aux agents consulaires de l’État de venir en aide aux nationaux, reste un droit discrétionnaire des États. Les droits attachés à la nationalité se sont raréfiés et désormais la jouissance de nombreux droits repose sur la notion de résidence. La territorialisation du droit suppose que les États ont pour obligation de faire respecter les droits fondamentaux des individus présents sur le territoire uniquement dans un respect strict des principes de souveraineté et d’indépendance. Cependant les principes d’universalité et d’internationalisation des droits de l’Homme pèsent désormais dans la balance pour empêcher l’État d’agir à sa guise même hors de son territoire. Certes, la Charte des Nations-Unies consacre le respect de la souveraineté des États, toutefois ces derniers ont l’obligation de respecter des droits de l’Homme universellement, les enjoignant à agir dans le respect des droits fondamentaux dont sont titulaires les individus. 115 Traduction personnelle : « Nous continuons de qualifier ces gens de combattants terroristes étrangers. La vérité, c'est qu'ils ne sont pas du tout étrangers. Il se peut qu'il s'agisse d'étrangers dans les pays où ils se rendent. Mais en réalité, ce sont nos compatriotes, nos connaissances, les camarades de classe de nos enfants, les garçons et les filles que nous voyons dans nos supermarchés Ils font partie de nos sociétés. Peut-être la seule chose qui nous soit étrangère chez eux est leur mentalité. », MEHRA LL.M Tanya, Dr PAULUSSEN Christophe, op. cit., p. 5. Page 40 ! sur 111 ! Titre II La complémentarité des droits de l’Homme et du droit international humanitaire, fondement de l’obligation de rapatriement des mineurs nationaux des États membres du Conseil de l’Europe « Returning these children is a humanitarian and Human Rights imperative »116. Aujourd’hui, la territorialisation des droits fondamentaux entraîne un abaissement des droits et devoirs découlant du lien de nationalité. Ainsi il convient de se pencher sur les obligations conventionnelles des droits de l’Homme des États. Il existe en Syrie et en Irak de réelles violations des droits humains. Les enfants présents dans les camps ou en prisons se retrouvent face à des traitements inhumains et dégradants, leur vie est en danger, le respect de leur vie familiale est violé, ainsi que leur droit à une éducation. Tous ces droits sont des droits énumérés dans la Convention européenne des droits de l’Homme dont les États européens sont tous parties. La question de l’applicabilité de cette Convention est majeure en ce qu’elle permettrait de responsabiliser les États européens qui ne permettent pas la bonne application de cette Convention (Chapitre 1). L’obligation des États de faire respecter la Convention européenne des droits de l’Homme découle de leur présence en Syrie et en Irak, laquelle provient elle-même de l’existence du conflit armé syrien. Ainsi, les États européens, parties au conflit suite à la formation de la coalition doivent respecter le droit international humanitaire qui régit les pratiques de la guerre. Le droit international humanitaire, jus in bello, s’applique lorsqu’il existe un conflit armé tandis que le droit international des droits de l’Homme s’applique en toute circonstances. La question de leur complémentarité a été soulevée par la doctrine et la jurisprudence qui acceptent l’application des deux corps de règles en temps de conflit armé. De ce fait, le devoir de protection des enfants européens n’en est que renforcé (Chapitre 2). 116 Traduction personnelle : « rapatrier ces enfants répond à un impératif du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme » , Fionnuala NI AOLAIN, op. cit. Page 41 ! sur 111 ! Chapitre 1. L’individu, sujet de droit de la Convention européenne des droits de l’Homme La volonté de l’État reste un élément central du droit international, son fondement même. Il suffit de se concentrer sur les traités et actes juridiques, conclus par les États, qui sont les manifestations directes de leur volonté. Ces actes ordonnent aux États d’agir dans le respect de leurs règles. Selon la Convention européenne des droits de l’Homme, les États ont des obligations envers les individus résidants sous leur juridiction. Cette notion évolutive est sujette à interprétation (Section 1). Par ailleurs, le respect des droits énoncés dans la Convention peut être renforcé par des techniques d’interprétation de la Convention qui élargissent alors la notion de juridiction (Section 2). Section 1. Une protection des individus placés sous la juridiction de l’État En droit international, les États sont souverains sur leur propre territoire, ils possèdent la compétence de régir les affaires internes. De ce fait, ils se doivent de respecter les normes établies dans les Conventions dont ils sont parties sur leur propre territoire. Ils seront alors responsables en cas de violation d’un droit d’un individu garanti par la Convention au sein de leurs frontières (§1). Toutefois, la globalisation du monde actuel a permis aux États d’agir au-delà de leurs frontières, dans le territoire d’États tiers. Les actions commises à l’étranger ne pourraient permettre à l’État de s’exonérer de ses obligations découlant de la CESDH. Ainsi, la Cour européenne des droits de l’Homme a offert une interprétation permettant un élargissement de la notion de juridiction (§2). §1. La notion de juridiction, notion purement territoriale Selon le texte de la Convention la notion de juridiction est purement territoriale (A). Ainsi la Cour a opéré à une interprétation en ce sens : la Convention ne s’applique que sur l’espace juridique européen (B). Page 42 ! sur 111 ! A. La territorialité du droit de la Convention européenne des droits de l’Homme Lors de la signature de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, les États européens ont reconnu la création de droits envers les individus. De ce fait, ils se trouvent responsables de la bonne application de la Convention envers ces derniers. Leur responsabilité découle de leur contrôle qui découle lui-même de leur juridiction. En effet, l’article 1 de la CEDH « Obligation de respecter les droits de l’Homme » dispose assez largement que « Les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente Convention »117 . Dans les travaux préparatoires de la Convention, le comité intergouvernemental des experts a choisi de remplacer les mots « personnes résidant sur le territoire » par une référence aux personnes « sous la juridiction ». L’objectif recherché semble être celui d’étendre l’application de la Convention à des individus ne résidant pas sur le territoire mais qui s’y trouvent à un moment donné118. Dans la décision Soering, la Cour européenne des droits de l’Homme a statué que : « L’article 1, fixe une limite, notamment territoriale, au domaine de la Convention. En particulier, l’engagement des États contractants se borne à « reconnaître » aux personnes relevant de leurs « juridictions » les droits et libertés énumérés. En outre, la Convention ne régit pas les actes d’un État tiers, ni ne prétend exiger des Parties contractantes qu’elles imposent ses normes à pareil État »119. La notion de juridiction peut être définie par les éléments la fondant: nationalité, pavillon, relations diplomatiques et consulaires, effet, protection, personnalité passive et universalité120 . Elle est le contrôle sur l’individu par l’entremise d’organes ou instances étatiques. L’interprétation de 117 Contrairement à plusieurs traités internationaux qui peuvent avoir une application stricte de la notion de juridiction territoriale, par exemple selon l’article 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politique « Les États parties au présent Pacte s'engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte. ». Ainsi seules les personnes se trouvant sur le territoire des États sont considérées comme sous la juridiction de l’État en question. 118 H.J. STEINER, P. ALSTON, R. GOODMAN, International human rights in context, law politics morals, Oxford 3ème ed., 2007, p. 951. 119 op. cit., §86. 120 CEDH, (Gr. Ch.), Bankovic et autres c. Belgique et 16 autres États contractants, 19 décembre 2001, n° 52207/99. Page 43 ! sur 111 ! cette notion de juridiction a donné lieu à de nombreuses jurisprudences. Ce qui nous importe ici est le fait que, si les enfants présents en Syrie se trouvent sous la juridiction des États européens, alors ces derniers peuvent revendiquer l’application de la Convention et enjoindre les États à appliquer les droits présents dans cette dernière. L’étude de la notion de juridiction va nous permettre de distinguer si l’État a une obligation strictement territoriale ou bien s’il a une obligation de faire respecter les droits de l’Homme pour ses ressortissants mineurs nationaux présents en Syrie. B. Une interprétation relativement stricte de la notion de juridiction, la naissance de l’espace juridique de la Convention La Cour a souvent affirmé l’importance d’une interprétation dynamique et évolutive du fait de l'importance des droits qu’elle protège. Or concernant la territorialité de la juridiction elle a semblé réticente à adopter une telle approche121 . La Commission européenne des droits de l’Homme avait déjà estimé que la Convention pouvait s’appliquer extra-territorialement dans l’affaire Hess c. RU le 18 mai 1975122 . Dans cette affaire des personnes étaient détenues par un État partie à la Convention sur le territoire d’un État tiers. Ces individus relevaient alors de la juridiction de l’État les détenant. C’est la décision Bankovic et autres du 12 décembre 2001 qui s’est inscrite dans une logique de territorialisation de la juridiction de la Cour européenne des droits de l’Homme dans un sens où l’extra-territorialité pouvait être admise mais seulement dans des territoires situés dans l’espace juridique de la Convention. En l’espèce, des ressortissants de la République fédérale de Yougoslavie ont saisi la CEDH pendant la crise du Kosovo en 1999. Leur requête concernait le bombardement d’un immeuble de télévision par les forces de l’OTAN. La Cour a déclaré la requête comme irrecevable du fait que l’acte incriminé ne relevait pas de la juridiction des États défendeurs. L’espace juridique de la Convention est limité aux territoires des États parties contractantes : 121 H.J. STEINER, P. ALSTON, R. GOODMAN, op. cit., §4. 122 CEDH, Hess c. Royaume-Uni, 1975, n°6231/73. Page 44 ! sur 111 ! « La Convention est un traité multilatéral opérant, sous réserve de son article 56 (application territoriale), dans un contexte essentiellement régional, et plus particulièrement dans l'espace juridique des États contractants, dont il est clair que la RFY ne relève pas. Elle n’a donc pas vocation à s’appliquer partout dans le monde, même à l’égard du comportement des États contractants ». Il n’existe pas de lien juridictionnel entre les personnes victimes de l’acte incriminé et les États défendeurs. Ainsi l’action incriminée des États défendeurs n’engage pas la responsabilité de ceux-ci au regard de la Convention. La doctrine Bankovic « conduit à une interprétation neutralisante de la juridiction extra-territoriale de l’État partie contractante alors même que celui-ci exerçait un contrôle effectif sur une partie d’un territoire d’un pays tiers à la Convention »123 . L’obligation de la Cour est de tenir compte du caractère particulier de la Convention en tant qu’instrument constitutionnel d’ordre public européen pour la protection des Hommes. La Convention a une vocation essentiellement régionale, elle n’a pas été conçue pour être appliquée dans le monde entier, même en ce qui concerne le comportement des États contractants124. Afin de contrôler le respect des droits et obligations étatiques, il importe d’identifier le comportement réalisé par l’État et le comportement exigé par la règle de droit (in abstracto et in concreto)125 . Le comportement des États européens s’apparente à un refus de rapatriement des enfants européens présents en Syrie et en Irak, alors qu'ils voient leurs droits fondamentaux violés. Cela pourrait être légitime puisque les enfants ne se trouvent pas sur le territoire des États européens. Ces derniers ne pourraient alors pas s’immiscer dans les affaires syriennes ou irakiennes pour leur venir en aide et seraient, tout simplement, non responsables des violations des droits fondamentaux des mineurs européens présents au Levant. C’est à la Syrie et à l’Irak de faire respecter les droits fondamentaux des enfants et non pas aux États européens dont les gouvernements se trouvent à des milliers de kilomètres. 123 Pr. G. COHEN JONATHAN, Pr. J.F. FLAUSS, « La Cour européenne des droits de l’homme et le droit international », Annuaire français de droit international, 2009. p. 776. 124 H.J. STEINER, P. ALSTON, R. GOODMAN, op. cit., §74. 125 G. DANNENBERG, « La prise en compte d’éléments subjectifs dans le contrôle du respect des droits de l’Homme: l’exemple de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme », dans Réciprocité et universalité : Sources et régimes du droit international des droits de l’homme Mélanges en l'honneur du Professeur Emmanuel Decaux, éd. Pédone, 2017, p. 793. Page 45 ! sur 111 ! Or, les États européens semblent avoir un certain contrôle sur le territoire syrien, cela ne permettrait-il pas aux représentants des enfants de demander à ces États d’agir afin de faire respecter leurs droits ? La Cour européenne des droits de l’Homme a établie que : « Si le lien de nationalité ne peut à lui seul suffire à justifier une application extraterritoriale de la CESDH des actions des États parties à la convention accomplies ou produisant des effets en dehors de leur territoire peuvent s'analyser, dans des circonstances exceptionnelles, comme l'exercice par eux de leur « juridiction » au sens de l'article 1er de la convention. Pour cela il est nécessaire que l'État en cause exerce sur un territoire son autorité ou un contrôle effectif, directement, par le biais de ses forces armées, ou, indirectement, par le biais d'agents ou d'affidés sur place, ou encore par une administration locale subordonnée »126 . §2. La notion étendue de juridiction de la CEDH Il est possible qu’un État exerce un contrôle sur un autre État et se voie ainsi obligé de faire respecter les droits de la Convention sur cet autre territoire. Cela est accepté et acceptable si « l’État d’accueil » invite un État à agir (A), ou bien si un État contrôle un autre territoire, même extraeuropéen, par l’influence ou la force militaire (B). A. Une juridiction extra-territoriale d’après une coopération entre États L’article 1er de la Convention limitant l’application de cette même Convention ne peut être interprété comme permettant à un État partie de commettre des violations de la Convention sur le territoire d’autres États. Ainsi, exceptionnellement, un État contractant peut se livrer à un exercice extra-territorial de sa compétence. Lorsque l’État défendeur, au travers du contrôle effectif exercé par lui sur un territoire extérieur à ses frontières et sur ses habitants par suite d’une occupation militaire ou en vertu du consentement, de l’invitation ou de l’acquiescement du gouvernement local, assume l’ensemble ou certains des pouvoirs publics relevant normalement des prérogatives de celui-ci, alors sa juridiction est établie et il a pour obligation de faire respecter la Convention. En l’espèce, les autorités syrienne et irakienne coopèrent avec les États européens. De cette coopération 126 Al-Skeini et autres c. Royaume-Uni, CEDH Gr. Ch., 2011, n°55721/07, §319, en l’espèce les requérants sont les proches de personnes décédés à Bossorah au sud de l’Irak lorsque le Royaume-Uni y avait le statut de puissance occupante. Page 46 ! sur 111 ! pourrait découler un contrôle effectif des autorités étrangères sur leur territoire et ainsi l’établissement de leur juridiction. Il est largement admis qu’un État a le devoir d’appliquer la Convention hors de ses frontières lorsqu’il y est invité par un autre État souverain. La coopération est encore et principalement ce qui permet le respect des droits. La décision Rantsev c. Chypre et Russie du 7 janvier 2010 consacre ce principe127. La Cour rappelle que la compétence juridictionnelle d’un État est principalement territoriale du point de vue du droit international public, de ce fait « la possibilité pour un État d’exercer sa juridiction sur ses propres ressortissants à l’étranger est subordonnée à la compétence territoriale de l’autre État et un État ne peut généralement exercer sa juridiction sur le territoire d’un autre État sans le consentement, l’invitation ou l’acquiescement de ce dernier »128. La Cour examine si la Russie aurait pu, dans les limites de sa propre souveraineté territoriale, prendre des mesures pour protéger la fille du requérant. Elle conclut que les griefs ne peuvent être écartés à l’égard de la Russie pour incompatibilité ratione loci ou ratione materiae avec les dispositions de la Convention129 . Ainsi exercer sa juridiction sur ses nationaux à l’étranger est subordonné à la compétence territoriale de l’État. En l’espèce, Chypre a consenti à l’exercice de la juridiction russe dans cette affaire et la Russie a étendu sa juridiction au cas de l’affaire. Les autorités de Syrie et d’Irak pourraient demander aux États européens d’agir en faveur des enfants afin de faire respecter leurs droits fondamentaux. Les enfants pourraient alors être rapatriés du fait que les États européens exerceraient leur juridiction sur eux. Or les États européens ne semblent pas vouloir coopérer avec les autorités locales pour permettre un rapatriement des enfants suite à l’établissement de leur juridiction. Cependant, sans coopérer dans un but premier de rapatrier les enfants, les États européens offrent un contrôle sur les zones du nord de la Syrie et sont engagés dans des discussions avec les autorités irakiennes. Cette collaboration, qui n’a pas pour but le respect des droits des enfants mais la lutte contre le terrorisme, pourrait au moins permettre d’établir un certain contrôle des États européens sur le territoire du nord de la Syrie. 127 Rantsev c. Chypre et Russie, CEDH, 2010, n°25965/04. Le requérant, ressortissant russe, dénonce l’absence d’enquête suffisante des services de police russe et le manquement des autorités chypriotes à prendre des mesures pour protéger sa fille et sanctionner les responsables de mauvais traitements à son encontre et de son décès à Chypre. 128 ibid., §206. 129 ibid., §212. Page 47 ! sur 111 ! La Cour a admis le contrôle effectif comme critère d’extra-territorialité dans plusieurs affaires. Dans l’affaire Loizidou c. Turquie la Cour souligne que : « La notion de "juridiction" au sens de l’article 1 de la Convention ne se circonscrit pas au territoire national des Hautes Parties contractantes. La responsabilité de ces dernières peut donc entrer en jeu à raison d’actes ou d’omissions émanant de leurs organes et déployant leurs effets en dehors de leur territoire. Conformément aux principes pertinents de droit international régissant la responsabilité de l’État, la Cour a dit - ce qui revêt un intérêt particulier en l’occurrence - qu’une Partie contractante peut également voir engager sa responsabilité lorsque, par suite d’une action militaire - légale ou non - elle exerce en pratique le contrôle sur une zone située en dehors de son territoire national. L’obligation d’assurer, dans une telle région, le respect des droits et libertés garantis par la Convention découle du fait de ce contrôle, qu’il s’exerce directement, par l’intermédiaire des forces armées de l’État concerné ou par le biais d’une administration locale subordonnée »130 . Ainsi, le critère du contrôle effectif du territoire est à prendre en compte afin de déterminer la juridiction de l’État et par la suite sa responsabilité. Dans la décision Chypre c. Turquie du 10 mai 2001 la Cour suit le même raisonnement131 . Elle considère que l’argument des requérants équivaut à soutenir que tout individu lésé par un acte imputable à un État contractant sans considération de territoire est soumise à la compétence de l’État. Ainsi, l’extra-territorialité de la Convention est strictement admise lors d’opérations militaires aériennes ou par l’invitation ou l’accord du Gouvernement souverain sur le territoire tiers132. B. Une juridiction extra-territoriale admise par un contrôle effectif d’un État même hors du territoire européen En 2004, la Cour a rendu deux arrêts selon lesquels la notion de « contrôle effectif » a été élargie. 130 CEDH, Loizidou c. Turquie, 1995, n°15318/89, §52. 131 CEDH Gr. Ch., Chypre c. Turquie, 2001, n°25781/94. 132 Pr. G. COHEN JONATHAN, Pr. J.F. FLAUSS, « La Cour européenne des droits de l’homme et le droit international », Annuaire français de droit international, 2004. p. 782. Page 48 ! sur 111 ! Dans sa décision Ilascu et autres c. République de Moldova et Russie du 8 juillet 2004, la Cour retient « l’influence décisive » dont disposent les États parties sur un territoire133. Elle détermine que la juridiction russe aux fins de l’article 1 est établie, du fait que : « La RMT, dotée d’organes de pouvoir et d’une administration propres, continue à se trouver sous l’autorité effective, ou tout au moins sous l’influence décisive de la Fédération de Russie et, en tout état de cause, qu’elle survit grâce au soutien militaire, économique, financier et politique que lui fournit la Fédération de Russie. Dans ces circonstances, la Cour estime qu’il existe un lien continu et ininterrompu de responsabilité de la part de la Fédération de Russie quant au sort des requérants »134 . Le contrôle effectif nécessaire à l’établissement du lien de juridiction ne nécessite pas une action militaire directe. Dans l’affaire Issa et autres c. Turquie du 16 novembre 2004 la Cour confirme que la théorie du contrôle global s’applique même lorsque ce contrôle est effectué sur le territoire d’un État tiers non européen135. L’obligation de garantir les droits et libertés énoncés dans la CESDH découle de ce contrôle, qu’il soit exercé par les forces armées de l’État concerné ou par une administration locale subordonnée. Dans l’affaire Al-Skeini et autres c. Royaume-Uni, le Royaume-Uni était une puissance occupante dans la région et devait prendre toutes les mesures pour assurer l’ordre public et la sécurité, en respectant les lois du pays (article 43 des régulations de la Haye). Le Royaume-Uni avait assumé en Irak des prérogatives de puissance publique. Les requêtes concernait le décès de personnes civiles qui se trouvaient en Irak, sous la juridiction du Royaume-Uni Les requérants reprochaient aux autorités britanniques d’avoir violé l’article 2 de la Convention. Dans ces circonstances exceptionnelles, le lien juridictionnel entre le Royaume-Uni et les personnes décédées existait. Selon le Président de la République fédérale d’Allemagne, Frank-Walter Steinmeier, « la terreur de DAESH vise la société libre et tous ceux qui veulent vivre en liberté… », « ....tout ce que 133 CEDH Gr. Ch., Ilascu et autres c. Moldova et Russie, 2004, n°48787/99. 134 ibid., §§392-393 135 CEDH, Issa et autres c. Turquie, 2004, n°31821/96. Six ressortissants iraquiens ont été agressés par des soldats turcs présent du fait d’une opération militaire conduite par l’armée turque au nord de l’Irak en avril 1995. Page 49 ! sur 111 ! nous faisons n'est pas limité à une logique militaire mais s'inscrit dans un processus politique »136 . Cette citation illustre la portée des engagements des États européens en Syrie et en Irak. Tout autant, la Belgique rappelle régulièrement que son gouvernement vise à trouver des solutions politiques durables au conflit en Syrie et à améliorer les conditions de vie des civils en Syrie et en Irak137. La France est un acteur clé dans la coalition contre DAESH. Elle fait partie de tous les groupes de travail internationaux sur le sujet et a contribué par des milliards d’euros à résoudre cette crise138. Dans sa décision du 22 mai 2019, le Défenseur des droits français affirme que la France opère un contrôle effectif sur le territoire du nord de la Syrie : « de l’influence militaire et politique exercée par la France dans cette zone concernant le contrôle de la situation des enfants français et leurs mères retenus par les forces démocratiques syriennes, résultent des obligations conventionnelles liant la France »139. De plus, selon Hicham Al-Hachemi, expert des questions terroristes, proche des renseignements irakiens, Adel Abdel Mahdi, Premier ministre irakien et la rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires au Haut-Commissariat de l’ONU, les djihadistes français aujourd’hui condamnés à mort en Irak aurait été transférés de Syrie avec l’aide des autorités françaises et de la coalition internationale plus globalement140 . En effet, les djihadistes français transférés étaient libérables par les autorités kurdes qui ne peuvent contenir la population actuelle dans les camps. Cette information a été relayée mais reste aujourd’hui démentie par les autorités françaises. Plusieurs informations concernant l’implication de la France en Syrie et en Irak ont été transmises aux institutions des droits de l’Homme. Enfin, les groupes de travaux sur la détention arbitraire, la discrimination envers les femmes et le rapporteur spécial sur la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants ont affirmé que la France, membre de la coalition internationale, coopère avec les forces démocratiques 136 Rapport national allemand (2018) élaboré dans le cadre du projet de l’OIJJ « Renforcer les systèmes de justice juvénile dans le contexte de la lutte contre le terrorisme : Renforcement des capacités et enseignement mutuel entre les acteurs ». 137 Pour plus d’informations sur l’engagement militaire des États européens, voir Chapitre 2 Section 1, A), de ce mémoire. 138 100 millions pour la crise syrienne en 2018, 45 millions dans le nord-est de la Syrie depuis 2017 sur des projets humanitaires et de stabilisation, 15 millions en 2017, 30 millions en 2018 sur un programme spécifique d’urgence. 139 Défenseur des droits, décision n°2019-129 du 22 mai 2019, §17. 140 LeMonde, « L’ONU interpelle la France sur le transfert « illégal » de djihadistes français en Irak », disponible sur : https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/12/l-onu-interpelle-la-france-sur-le-transfert-illegal-de-djihadistesfrancais-en-irak_5498726_3210.html consulté le 12 août 2019. Page 50 ! sur 111 ! syriennes et supporte de facto les autorités kurdes militairement et politiquement ; à cet égard, la France est présente dans la région où des "forces spéciales" ont été déployées141. Concernant l’Irak, il est plus compliqué de déterminer un contrôle effectif de la part des États européens. Les États ont l’obligation de faire respecter les droits de la Convention. Les obligations découlant de la Convention ne pourraient-elles pas enjoindre l’État à agir afin que les ressortissants ne subissent pas les violations de la Convention ? Section 2. L’émergence de nouvelles pratiques jurisprudentielles pour une meilleure protection des individus La CEDH a élaboré plusieurs techniques permettant une meilleure protection des individus. Ces techniques permettent de contourner la notion stricte de juridiction. La pratique des obligations positives enjoint les États à agir afin de permettre le respect des droits de la Convention (§1) tandis que la technique de la protection par ricochet ordonne aux États d’agir afin de permettre le respect des droits de la Convention même si leur violation se déroule sur le territoire d’un État tiers. Cette dernière technique, par son anticipation à une éventuelle violation des droits garantis dans la CESDH par un État tiers, pose la question de l’universalité de la Convention. Un État se voit agir en protection d’un individu qui pourrait faire face à une violation de ses droits sur le territoire d’un État tiers (§2). §1. La pratique des obligations positives La pratique des obligations positives, née dans un objectif de meilleure protection des êtres humains (A), rend plus effective l’application des droits de la Convention (B). A. La naissance des obligations positives Parallèlement à l’obligation des États de respecter passivement les droits énoncés dans la Convention, ces derniers disposent d’une obligation d’agir afin de permettre la bonne application de 141 UA SYR 1/2018, 13 juillet 2018. Page 51 ! sur 111 ! la Convention sous leur juridiction. Cette obligation semble avoir la capacité d’étendre la notion de juridiction. La Convention, traité de garantie collective des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, a pour objectif la protection des êtres humains142. C’est pourquoi la Cour se permet d’interpréter la Convention en ce sens et que plusieurs techniques ont été élaborées pour permettre l’extension de la notion de juridiction, c’est-à-dire l’extension de la protection des individus. Afin de rendre l’application de la CESDH effective, il existe une exigence d’intervention positive de l’État. Parallèlement au devoir de respecter les droits et libertés fondamentales énoncé dans la Convention, l’État doit prendre des mesures permettant le respect de ces droits et libertés. C’est avec l’arrêt Affaire linguistique belge du 23 juillet 1968143 que la Cour consacre la technique des obligations positives en reconnaissant les « obligations de faire ». Toutefois, dans cette affaire, la disposition invoquée était l’article 2 du Protocole n°1, article qui appelait une règlementation par l’État. Dans la décision Airey c. Irlande de 1979, la Cour considère que : « La Convention a pour but de protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs » et, ainsi, « l’exécution d’un engagement assumé en vertu de la Convention appelle parfois des mesures positives de l’État; en pareil cas, celui-ci ne saurait se borner à demeurer passif et « il n’y a (...) pas lieu de distinguer entre actes et omissions »144. L’État a donc l’obligation d’agir positivement afin de faire respecter les droits concrets énumérés dans la Convention. En l’espèce, la requérante souhaitait obtenir une séparation de corps, elle n’a pas exercé de recours juridique au motif que ses revenus étaient trop faibles. Selon elle, l’État irlandais avait violé l’obligation énoncée dans l’article 6 en ne mettant pas à disposition de recours effectif. 142 L.-E. PETTITI, E. DECAUX, P-H. IMBERT, La Convention européenne des droits de l’homme, commentaire article par article, Economica, 2ème éd., 1999, p.138. 143 CEDH, Cour (Plénière), Affaire « relative à certains aspects du régime linguistique de l’enseignement en Belgique », 23 juillet 1968, n° 1474/62, 1677/62, 1691/62, 1769/63, 1994/63, 2126/64. 144 CEDH, Cour (Ch.), Airey c. Irlande, 9 octobre 1979, 6289/73, §§24-25. Page 52 ! sur 111 ! La pratique des obligations positives semble, non pas inhérente à un droit spécifique (par exemple article 6 de la CEDH dans l’arrêt Airey c. Irlande), mais valable pour tous les droits de la Convention. L’arrêt Ilascu et al. c. Moldavie et Russie consacre le lien entre obligations positives et juridiction. En effet, selon la Cour, « les engagements pris par une Partie contractante en vertu de l’article 1 de la Convention comportent, outre le devoir de s’abstenir de toute ingérence dans la jouissance des droits et libertés garantis, des obligations positives de prendre les mesures appropriées pour assurer le respect de ces droits et libertés sur son territoire »145. Le fait que la République de Moldavie n’exerce pas de contrôle effectif sur la région en question, contrôle essentiel à l’application de la Convention (par l’interprétation de la notion de juridiction vue cidessus), ne l’exonère pas de son devoir de prendre des mesures afin d’assurer le respect des droits et libertés garantis par la Convention via la pratique des obligations positives. Ainsi, l’article 1 de la Convention enjoint à tout État de faire respecter les droits de la CESDH sur son territoire formel même s’il n’y exerce pas un contrôle effectif. L’abstention des autorités nationales pourra les rendre responsables d’une violation d’un droit de la Convention. Cette décision illustre l’importance de la place des obligations positives dans le droit de la Convention. La Cour accepte que, même sans contrôle effectif, un État peut avoir des obligations en vertu de la CESDH sur son territoire mais seulement relativement aux obligations positives. B. Une technique permettant une meilleure protection des droits de la CESDH Il convient d’étudier la part de responsabilité des États européens dans la violation des droits fondamentaux des enfants. Selon le Professeur Frédéric Sudre, la Convention impose à l’État partie une triple obligation: obligation de respecter (de ne pas porter atteinte au droit), obligation de mettre en oeuvre (prendre des mesures législatives, règlementaires, autres, afin d’assurer la jouissance concrète du droit), obligation de protéger (prendre des mesures afin que des tiers ne portent pas atteinte au droit)146. Ces obligations sont tout autant de nature substantielle que procédurale. Elles sont substantielles en ce qu’elles commandent les mesures de fond nécessaires tandis qu’elles sont 145 CEDH Gr. Ch., Ilascu et autres c. Moldova et Russie, 2004, n°48787/99, §313. 146 F. SUDRE, op. cit., 14ème éd. §161. Page 53 ! sur 111 ! procédurales en ce qu’elles appellent l’organisation de procédures internes (par exemple le droit des personnes à bénéficier d’une enquête effective). Ainsi l’inaction des États européens face aux violations des droits fondamentaux des ressortissants mineurs en Syrie pourrait être jugée sous l’angle des obligations positives. Lorsque ces violations ne se déroulent ni sur leur territoire formel, ni sous leur juridiction, il paraît impossible de les responsabiliser. Or il a été convenu que certains États exerçaient un contrôle effectif sur le territoire duquel les violations sont avérées, ainsi ils ont l’obligation positive d’agir afin de faire cesser de telles violations. Ces obligations découlent du devoir de protection des personnes placées sous la juridiction de l’État. En l’espèce, celui-ci ne fait rien pour permettre le respect de leurs droits. Le seul moyen de faire cesser les violations de la CESDH est de rapatrier les enfants qui, selon la Convention, sont titulaires d’un droit à la vie, droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants, droit à la liberté et à la sureté, droit à un procès équitable et droit au respect de leur vie privée et familiale147. Ces droits sont clairement violés en l’espèce et l’État a l’obligation d’agir afin de permettre aux enfants de jouir pleinement de ces derniers. Toutefois le caractère indérogeable des articles 2 et 3 de la Convention renforce ce besoin de respect. L’arrêt A. c. Royaume-Uni du 23 septembre 1998 rappelle que : « Combinée avec l’article 3, l’obligation que l’article 1 de la Convention impose aux Hautes Parties contractantes de garantir à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés consacrés par la Convention leur commande de prendre des mesures propres à empêcher que lesdites personnes ne soient soumises à des tortures ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, même administrés par des particuliers »148. En l’espèce, malgré l’évidence des traitements inhumains et dégradants dont sont victimes les enfants en Syrie et en Irak, les États européens n’agissent pas. C’est la question de leur inaction qui est cruciale et qui peut être considérée comme illégale. 147 Article 148 2, Article 3, Article 5, Article 6, Article 9 de la CESDH. CEDH, A. c. Royaume-Uni,19 février 2009, n°3455/05, §22. Page 54 ! sur 111 ! §2. La protection par ricochet, vers une universalité des DH ? La pratique de la protection par ricochet, qui permet aux États européens d’agir en protection de la CESDH face à une potentielle violation de cette Convention sur le territoire d’un État tiers, renforce la protection des individus sous la juridiction des États membres de la CESDH (A). Un État agissant dans cette optique signifie qu’il protège un individu dont les droits pourraient être violés s’il quittait la juridiction de l’État européen. Ainsi, il permet une application quasi-universelle de la CESDH et semble tendre vers son application universelle (B). A. La protection par ricochet, une application quasi-universelle de la CESDH La technique de la protection par ricochet est définie par le Professeur Sudre comme un mécanisme qui « permet aux organes de la CEDH d’étendre la protection de certains droits garantis par la Convention à des droits non expressément protégés par elle »149. Principalement, il s’agit de la situation dans laquelle une décision d’éloignement est la cause de la violation d’un droit garanti par la Convention. La décision Soering c. Royaume-Uni du 7 juillet 1989 consacre ce mécanisme. Le requérant, un ressortissant allemand, était détenu en Angleterre et attendait son extradition vers les États-Unis, où il devait répondre d’accusations d’assassinat. Il alléguait que, s’il était extradé, il serait condamné à mort et subirait un traitement inhumain et dégradant compte tenu du « syndrome du couloir de la mort ». La Cour a jugé que si la mesure d’éloignement est susceptible de violer l’un de ses droits protégés par la Convention, alors il peut bénéficier d’une protection indirecte de la part de la CEDH qui enjoindrait l’État à ne pas mettre en oeuvre une telle mesure. L’État se rendrait coupable d’une violation de la Convention s’il prenait consciemment une mesure d’éloignement malgré le fait que la violation se déroulerait hors de la juridiction de l’État. En l’espèce la Cour a confirmé qu’une extradition entrainerait une violation de l’article 3 de la CESDH en ce que le requérant subirait un tel traitement sur le territoire des États-Unis suite à la décision d’éloignement. 149 F. SUDRE, op. cit., p. 910, §612. Page 55 ! sur 111 ! « C’est ici la confirmation du caractère « objectif » de la Convention et de sa spécificité « de traité de garantie collective des droits de l’Homme »150. Cette protection trouve son origine dans l’article 1 de la Convention et découle du caractère « absolu » de l’article 3, interdiction des traitements inhumains et dégradants. Cet article est un droit intangible, il ne peut faire l’objet d’aucune limitation ou dérogation. Ainsi la Cour a affirmé que : « L’article 1 (art. 1) ne saurait s’interpréter comme consacrant un principe général selon lequel un État contractant, nonobstant ses obligations en matière d’extradition, ne peut livrer un individu sans se convaincre que les conditions escomptées dans le pays de destination cadrent pleinement avec chacune des garanties de la Convention. En réalité, le gouvernement britannique le souligne avec raison, en déterminant le champ d’application de la Convention, et spécialement de l’article 3 (art. 3), on ne saurait oublier l’objectif bénéfique de l’extradition: empêcher des délinquants en fuite de se soustraire à la justice »151. Cette obligation est une obligation de prévention: l’individu va subir des traitements inhumains et dégradants donc l’État a une obligation de ne pas l’expulser afin qu’il ne subisse pas de tels traitements. Cette obligation a été entérinée par le Comité des droits de l’Homme dans son observation générale n°6 sur l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, concernant le droit à la vie. Il détermine que « l’obligation de respecter et de garantir le doit à la vie exige des États parties qu’ils s’abstiennent d’expulser, d’extrader ou de transférer par d’autres moyens des personnes vers des pays où il existe des motifs sérieux de penser qu’elles seront exposées à un risque réel d’être privées de la vie en violation de l’article 6 du Pacte »152. 150 F. SUDRE, ibid., p. 913 §614. 151 CEDH, Soering c. Royaume-Uni, §86. 152 Comité des droits de l’Homme, Observation générale n°6, seizième session, 30 avril 1982, HRI/GEN/Rev.9 (Vol. I), pt. 34. Page 56 ! sur 111 ! Par ailleurs, dans son obligation générale n°31, le Comité des droits de l’Homme établi que : « De surcroît, l’obligation faite à l’article 2 aux États parties de respecter et garantir à toutes les personnes se trouvant sur leur territoire et à toutes les personnes soumises à leur contrôle les droits énoncés dans le Pacte entraîne l’obligation de ne pas extrader, déplacer, expulser quelqu’un ou le transférer par d’autres moyens de leur territoire s’il existe des motifs sérieux de croire qu’il y a un risque réel de préjudice irréparable dans le pays vers lequel doit être effectué le renvoi ou dans tout pays vers lequel la personne concernée peut être renvoyée par la suite, tel le préjudice envisagé aux articles 6 et 7 du Pacte »153 . Selon l’avocate Marie Dosé, « ces Français détenus au Kurdistan syrien demeurent sous la juridiction de l’État, puisque la décision de ne pas les rapatrier est un choix politique qui a des répercussions juridiques sur leur situation en dehors du territoire national »154. C’est ainsi que prendre la décision de laisser les enfants en Syrie, endroit où ils subissent et vont subir des traitements inhumains et dégradants, ne répond pas à l’obligation de respect de l’article 3 de la Convention ou de l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. B. Un objectif de protection des êtres humains vers une application universelle des droits fondamentaux ? Etendre la Convention à des droits non garantis par cette dernière en ce qu’une action conforme à la Convention aurait un impact non conforme aux droits prévus dans celle-ci permet de se demander si la Convention, qui a pour objectif la protection des droits fondamentaux, ne pourrait s’appliquer universellement. L’objet et le but de cet instrument de protection des êtres humains appellent à comprendre et appliquer ses dispositions d’une manière qui en rende les exigences concrètes et effectives155. En outre, toute interprétation des droits et libertés énumérés doit se concilier avec « l’esprit général [de la Convention], destinée à sauvegarder et promouvoir les idéaux 153 Comité des droits de l’Homme, Observation générale No 31, La nature de l’obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte (Quatre-vingtième session), U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.7 (2004). §12. 154, Marc DAOU, « Rapatriement d’enfants de jihadistes français : « On est au-delà de l’injustice » », 07 mai 2019,France 24, disponible sur : https://www.france24.com/fr/20190506-syrie-rapatriement-enfants-jihadistesfrancais-france-saisine-cedh-justice, consulté le 20 juillet 2019. 155 CEDH, Arrêt Artico du 13 mai 1980, série A no 37, p. 16, § 33. Page 57 ! sur 111 ! et valeurs d’une société démocratique »156. C’est ainsi que la question de l’application universelle des droits énumérés dans la Convention, au-delà de toute notion de juridiction, se pose. L’objectif des droits de l’Homme est l’abolition des injustices, qu’importe l’endroit où elles existent. Il s’agit de respecter, protéger et remplir les intérêts fondamentaux des individus sans considération de l’endroit où la violation a été commise. Le principe d’universalité des droits de l’Homme est consacré par l’article 55 (c) de la Charte des Nations-Unies selon lequel : « En vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les nations des relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité des droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, les Nations Unies favoriseront le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion »157. De plus, l’article 9 des principes de Maastricht relatifs aux obligations extraterritoriales des États dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels158 , délimite le champ de compétence de l’État : « L’État est tenu de respecter, de protéger et de mettre en œuvre les droits économiques, sociaux et culturels dans les situations suivantes : b) situations dans lesquelles les actes ou les omissions de l’État entrainent des effets prévisibles sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, que ce soit sur ou en dehors de son territoire ; c) situations dans lesquelles les États, agissant séparément ou conjointement, que ce soit par le biais de leur pouvoir exécutif, législatif ou judiciaire, sont en position d’exercer une influence décisive ou de prendre des mesures afin de réaliser les droits économiques, sociaux ou culturels au-delà de leur territoire, et ce dans le respect du droit international »159 . Il est clairement établi que l’applicabilité des droits humains doit se faire au-delà des frontières du territoire des États. Découle de ce principe la responsabilité de l’État en cas d’une 156 CEDH, Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen, 7 décembre 1976, série A no 23, p. 27, § 53. 157 Article 55, Chapitre IX: coopération économique et sociale internationale, Charte des Nations-Unies, 1945. 158 Principes établis le 28 septembre 2011 lors d’un réunion organisée par l’Université de Maastricht et la Commission internationale de Juristes (experts en droit international et droits de l’homme). 159 ibid., point 11. Page 58 ! sur 111 ! violation de ses obligations internationales en matière de droits de l’Homme, que ce soit en dehors ou sur son territoire. Ces principes, tout comme l’article 55 de la Charte des Nations-Unies, concernent les droits économiques, sociaux et culturels. Toutefois, la distinction entre les droits civils et politiques et les droits économiques, culturels et sociaux a été progressivement remise en cause, notamment par la CEDH160 . Enfin, comme le précisent les professeurs Decaux et Imbert, « l’emploi à l’article 1 du mot reconnaissent de préférence à des termes tels que protègent ou respectent, suggèrent d’ailleurs que les droits reconnus ont une valeur erga omnes, expression de l’universalité des droits garantis par la Convention »161. Le refus de rapatrier leurs ressortissants présents en Syrie et en Irak est une décision illégale du fait des engagements internationaux des États européens. Aujourd’hui certains États européens disposent d’une réelle mainmise sur la politique et la mise en place de camps de détention. Ainsi, leur rôle devra être d’assurer un respect de la CESDH dans cette zone qui se trouve sous leur contrôle, donc envers les individus y résidant. Concernant l’Irak, et lorsque l’État européen n’exerce pas de contrôle effectif selon la Convention, il conviendra de se pencher sur les normes des droits de l’Homme découlant de conventions internationales ne disposant pas de l'obligation de juridiction162 ou bien les normes impératives jus cogens. De plus, l’action de la coalition internationale en Syrie a une incidence sur la situation des mineurs européens présents dans les camps. Les États européens, parties au conflit, se doivent de respecter le droit international humanitaire, complémentaire au droit international des droits de l’Homme163 . 160 Les droits civils et politiques, initialement droits garantis par la Convention, proscrivait une abstention de l’État. 161 Emmanuel DECAUX et Pierre-Henri IMBERT, loc. cit., p.141. 162 Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, Entrée en vigueur: le 3 janvier 1976, conformément aux dispositions de l'article 27. 163 Un des motifs de l’opposition à l’extraterritorialité des conventions des droits de l’Homme ressemble à celui défendant la nature exclusive du droit international humanitaire en application de la loi spéciale. L’extra-territorialité des conventions des droits de l’Homme va permettre un accroissement de la responsabilisation en ce qui concerne les opérations militaires. De ce fait les États seront découragés à participer aux opérations de maintien de la paix. Page 59 ! sur 111 ! Chapitre 2. Le devoir de protection des enfants victimes de conflit armé, l’application du droit international humanitaire et du droit des droits de l’Homme Le droit international humanitaire est le droit inter-étatique des conflits armés, il régit les règles à suivre par les parties à un conflit. Il est complémentaire avec les droits de l’Homme : chacun répond à une philosophie différente mais tous deux sont concernés par le respect de la vie, la santé et la dignité des individus. Ces droits ont pour objectifs de protéger les civils et de limiter la violence, ils portent un accent particulier à la protection des enfants par l’interdiction de leur utilisation par les forces armées des conflits (Section 1). Ces enfants, combattants ou non, se doivent de recevoir une protection en tant que victimes de violation du droit international (Section 2). Section 1. Un droit de protection des enfants applicable au conflit armé syrien Les enfants présents dans des camps en Syrie et en prison en Irak comptent parmi les premières victimes du conflit armé dont sont parties leurs pays de nationalité (§1). Ces enfants bénéficient d’un statut multiple, ils sont à la fois victimes, témoins et suspects des exactions commises par l’État islamique. De cette affirmation découle un principe de protection spécifique du fait de leur âge et donc de leur vulnérabilité. En effet, le droit international humanitaire s’attache à la protection spécifique des enfants. (§2) §1. Des enfants, victimes d’un conflit armé caractérisé « Ces dernières années, les représentants des structures de protection de l’enfant des Nations Unies ont noté avec préoccupation que la nature changeante des conflits armés et des tactiques employées dans ce cadre créaient des menaces sans précédent pour les enfants »164 . Le conflit armé syrien est très délicat à caractériser du fait de sa complexité, notamment du fait de l’arrivée de l’EI en 2014. Afin de déterminer le droit humanitaire applicable, il convient de définir ce conflit en tant que conflit armé international, (CAI) ou en tant que conflit armé non 164 Junior MUMBALA ABELUNGU, « Le droit international humanitaire et la protection des enfants en situation de conflits armés » (Etude de cas de la République Démocratique du Congo) Thèse de doctorat en Droit Junior, 2016-2017, p.1. Page 60 ! sur 111 ! international, (CANI), (A). Les Conventions de Genève de 1949165 et les protocoles additionnels de 1977166 se réfèrent à un certain type de conflit. La définition du conflit armé est cruciale car les règles de droit changent en fonction de sa typologie (B). A. Un conflit armé internationalisé Le 15 mars 2011, des manifestants pacifiques commencent à protester contre le pouvoir en place en Syrie. Quelques mois plus tard, est créée l’Armée syrienne libre, principale force armée opposée au régime en réaction à la répression sanglante de la part des forces gouvernementales.Au printemps 2013, profitant de la situation, l’« État islamique »apparait sur le terrain et prend le contrôle de plusieurs villes et villages. Les pays occidentaux, soutenant initialement les rebelles, renforcent leur intervention face à l’arrivée de l’EI. Ils commencent leurs premières frappes en Syrie en 2014 sans l’accord de Bachar al-Assad, après les avoir débuté en Irak avec l’accord du gouvernement. Par la suite, les États européens ont interprété la résolution 2249 comme leur offrant un cadre légal et politique pour les actes de l’action internationale combattant l’EI. Il ne sera pas opportun de discuter de la légitimité de l’intervention des États européens. Il semble toutefois, il semble important de rappeler que la résolution 2249 ne donne pas d’autorisation à agir militairement en Syrie et en Irak, en ce qu’elle n’est pas placée sous le Chapitre VII. En Syrie nous pouvons donc distinguer plusieurs conflits imbriqués avec plusieurs parties, l’armée régulière et ses alliés, les rebelles, les groupes djihadistes, les kurdes et leurs alliés et la coalition internationale. 165 Convention (I) de Genève pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 32, Convention (II) de Genève pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 86, Convention (III) de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 136, Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 288. 166 Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I), adopté le 8 juin 1977, entré en vigueur le 7 décembre 1978, RTNU., vol. 1125, p. 271, Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II), adopté le 8 juin 1977, entré en vigueur le 7 décembre 1978, RTNU., vol. 1125, p. 649. Page 61 ! sur 111 ! Les États européens présents en Syrie forment une coalition menée par les États-Unis depuis septembre 2014. La France, le Royaume-Uni et l’Allemagne étaient des partenaires majeurs, considérant une réponse politique, humanitaire et, si nécessaire, militaire, comme cruciale167. La Déclaration de Vienne adoptée le 14 novembre 2015 suite aux pourparlers de Vienne, rappelle que « tous les membres de l’ISSG se sont également engagés en tant que pays individuels et soutiens des divers belligérants »168 et par la résolution 2254 la coalition avalise la Déclaration de Vienne en adoptant une « feuille de route » pour la paix169. La coalition vise à coordonner et promouvoir les efforts de stabilisation en Syrie dans le but de renforcer une gouvernance crédible, inclusive et non sectaire. Un conflit armé international est limité aux relations conflictuelles armées soit entre Hautes Parties contractantes du droit international, soit entre États ou organisations internationales. Selon l’article 2 commun aux Conventions de Genève « en dehors des dispositions qui doivent entrer en vigueur dès le temps de paix, la présente Convention s'appliquera en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé surgissant entre deux ou plusieurs des Hautes Parties contractantes, même si l'état de guerre n'est pas reconnu par l'une d’elles »170 . Afin de qualifier les conflits actuels, souvent très complexes, le CICR utilise la technique du fractionnement. Ainsi, dans un conflit général nous pouvons distinguer plusieurs conflits entre certaines parties. Chacun de ces conflits dispose d’une qualification propre et doit respecter un ensemble de règles spécifiques. Le conflit qui nous intéresse particulièrement est celui dans lequel les pays européens sont engagés afin de lutter contre DAESH. Or l’EI, malgré son nom d’ « État 167 L’Allemagne a livré des équipements militaires, a fourni un soutien à la formation des combattants kurdes, a contribué au soutien aérien des forces irakiennes au sol et a déployé des soldats allemands. La France a apporté un soutien militaire aux forces locales contre DAESH : 1000 soldats ont été déployés. Elle offre également un support aérien. La Belgique quant à elle est convaincue qu’il est essentiel de soutenir l’ensemble des initiatives politiques et diplomatiques pour faire face à la crise, et non seulement répondre d’une manière exclusivement militaire. Conjointement à son engagement politique, la Belgique participe à la formation de soldats, a envoyé des F-16s et a augmenté son aide humanitaire et son aide à la stabilisation de l’Irak. Les Pays-Bas et le Royaume-Uni sont d’autres acteurs essentiels dans la coalition. Le Royaume-Uni soutient le processus politique pour parvenir à un règlement durable du conflit, il a versé des milliards de dollars d’aide humanitaire et des militons pour la stabilité et sécurité en opposition au régime d’Assad. De plus, près de 1 400 militaires de ses militaires sont engagés dans la région. 168 Déclaration du groupe de soutien international à la Syrie (Vienne, 14 novembre 2015), disponible sur : https:// www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/evenements/actualites-2015/article/declaration-du-groupe-de-soutieninternational-a-la-syrie-vienne-14-11-15, consulté le 25 juillet 2019. 169 CS/12171 du 18 décembre 2015, disponible sur : https://www.un.org/press/fr/2015/cs12171.doc.htm consulté le 05 aout 2019. Article 2 des Conventions de Genève adoptées le 12 août 1949, entrée sen vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75. 170 Page 62 ! sur 111 ! islamique », n’est pas considéré comme tel en droit international. En théorie, l’État se définit classiquement comme « une collectivité qui se compose d’un territoire et d’une population soumis à un pouvoir politique organisé »171 . L’« État islamique » semble doté d’un pouvoir politique organisé et d’une population, il pourrait alors être considéré comme un État. Or il doit être reconnu par la communauté internationale en tant qu’État et un droit ne saurait naître de l’illicéité : « le refus de reconnaître l’« État islamique » résulte de sa violation du droit international non seulement dans sa phase initiale de formation mais aussi dans sa phase actuelle de réalisation »172. De ce fait, le conflit avec l’EI ne peut être considéré comme un CAI, il est obligatoirement non international du fait de la qualification de cette partie au conflit, qui ne peut être considérée comme Haute Partie contractante. De plus, rappelons que l’« État islamique »est qualifié de groupe terroriste par le Conseil de Sécurité173 . Or il n’est pas possible d’ignorer l’élément d’extranéité qui est l’intervention des puissances étrangères174. Cette intervention, qu’elle soit sous la forme d’État à titre individuel ou de coalition d’États pose la question du possible changement de nature du conflit. Un ou plusieurs États peuvent intervenir dans un CANI de différentes manières, trois hypothèses peuvent alors se présenter175 . 171 Anne-Laure CHAUMETTE, « Daech, un «État islamique» ? ». Annuaire Français de Droit International, CNRS, 2014, p. 74. 172 Ibid, p. 82, l’auteure poursuit « L’« « État islamique »» est donc en totale violation des règles cardinales du droit international: la souveraineté, l’intégrité territoriale, l’inviolabilité des frontières et ce, sans compter toutes les atteintes massives aux droits de l’homme qui peuvent lui être imputées. C’est cette illicéité globale de l’« « État islamique »» qui a poussé la communauté internationale à ne pas le reconnaître » p. 84. 173 S/RES/2249 (2015) « Considérant que, par son idéologie extrémiste violente, ses actes de terrorisme (…) l’« État islamique »d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech) constitue une menace mondiale d’une gravité sans précédent contre la paix et la sécurité internationales ». 174 Pour aller plus loin, lire l’article de Karim Emile BITAR, op. cit. 175 Lorsque l’État étranger intervient militairement à la demande du gouvernement de l’État hôte le conflit reste non international car il n’y a pas d’opposition entre plusieurs États. Lorsque l’État étranger intervient militairement pour soutenir le(s) groupe(s) armés non étatiques contre le gouvernement de l’État territorial, la majorité applique la théorie de la double classification des relations conflictuelles : les actes d’hostilités entre les forces gouvernementales de l’État territorial et le groupe d’opposition armé constituent un CANI tandis que les actes d’hostilité entre les forces gouvernementales de l’État territorial et celles de l’État étranger constituent un CAI. Lorsque l’État étranger intervient indirectement (support économique, financier, stratégique) pour soutenir le(s) groupe(s) armés non étatiques contre le gouvernement de l’État territorial il peut s’agir d’un CAI dès lors que le groupe armé au bénéfice de ce soutien peut être assimilé à un organe de facto de l’État étranger. Il faut donc déterminer le niveau de contrôle que l’État exerce, car une simple influence, par exemple, ne suffit pas à internationaliser le conflit. La jurisprudence a permis de déterminer les critères permettant de considérer un groupe comme un organe de facto de l’État. En effet dans l’arrêt de la CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua c’est le critère de contrôle effectif qui a été retenu. Ce critère a été réaffirmé par la décision de la CIJ sur l’affaire relative à l’application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide qui va plus loin en exigeant une « totale dépendance ». Page 63 ! sur 111 ! L’intervention occidentale, au début du conflit, n’était pas réalisée afin de se battre contre un autre État mais contre un groupe non étatique et en soutien à un groupe rebelle. A cet égard, le contrôle des États européens sur les forces rebelles, si qualifié de contrôle effectif, peut qualifier le conflit de CAI. B. Un droit applicable flou face à la complexité du conflit Nous faisons face à un véritable flou juridique quant à l’identification du conflit et, a fortiori, à l’application du droit international humanitaire par les parties au conflit. Ces lacunes dans la réglementation ont une conséquence directe sur la protection des civils, dont on ne sait plus de quel corpus juridique elle relève. Cela se répercute également sur l’effectivité de la condamnation des parties auteures de crimes; puisque le flou juridique nourrit les débats sur les degrés et la nature des responsabilités. Le droit de la guerre se détermine par une raison d’humanité et non plus par une raison d’État176. Les considérations humanitaires ont pris une place considérable dans ce droit, de ce fait la dignité humaine dans les situations de conflit armé est aujourd’hui inhérente au droit de la guerre. Du fait de leur vulnérabilité, les enfants requièrent un traitement privilégié par rapport au reste de la population civile177 . Face à l’interdiction de l’utilisation d’enfants lors de conflit armé, les États doivent répondre à leur besoin de protection. La protection accordée à l’enfant dans un conflit armé se déclinera en fonction du statut de l’enfant, en tant que civil ne participant pas aux hostilités, civil particulièrement vulnérable du fait de son jeune âge ou combattant. Du fait de l’interdiction de l’enrôlement des enfants de moins de quinze ans, ils sont considérés comme des victimes civiles en premier lieu. Par ailleurs, les enfants âgés de plus de quinze ans sont considérés comme combattants adultes, même s’ils sont toujours des enfants selon la CIDE. En l’espèce, les enfants de nationalité européenne détenus en Syrie ou en Irak font partie de plusieurs catégories juridiques : ce sont des enfants-civils, vulnérables (particulièrement ceux de moins de quinze ans), ou des enfants combattants, à même titre que les 176 Gerd OBERLTEINER, op. cit., p. 349. 177 Commentaire des Protocoles additionnels du 9 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 aout 1949, CICR, Martinus Nijhoff Publishers, Genève 1986, p. 1401. Page 64 ! sur 111 ! adultes (particulièrement ceux de plus de quinze ans). Le DIH catégorise les enfants, ce qui modifie la protection qui peut leur être accordée. Si l’importance de la distinction entre CAI et CANI est moindre lors de la protection des enfants de moins de quinze ans car ils sont alors systématiquement considérés comme civils vulnérables, même si enfants-soldats, cette distinction est primordiale concernant le sort des enfants de plus de quinze ans. Les enfants de moins de quinze ans ou ceux de plus de quinze ans non-combattants bénéficient de la protection générale accordée par le droit humanitaire aux personnes civiles : « dans le conflit armé international ou non international, les enfants comme personnes civiles seront protégés contre des atteintes à la vie, à la santé, au bien-être physique ou psychique et à la dignité humaine – par l’interdiction de l’assassinat, de la torture, de la mutilation des personnes ou encore de tout acte de brutalité ou traitement humiliant ou dégradant et par l’assurance de diverses garanties pénales »178 .Ainsi, la qualification du conflit ne sera pas d’une grande importance concernant la situation des enfants civils. Or ces derniers peuvent aussi disposer d’un statut différent qui est celui de combattant. Un enfant-soldat ne bénéficie pas de la même protection selon qu’il combatte dans un CAI ou dans un CANI. Dans un CAI il bénéficie du statut de prisonnier de guerre au sens de la III ème Convention de Genève relative aux prisonniers de guerre, c’est-à-dire qu’il doit être libéré et rapatrié à la fin du conflit179. Dans un CANI, l’enfant qui participe aux hostilités se trouve sous le régime applicable aux combattants selon la loi locale. Or en Irak, la responsabilité criminelle est de 9 ans et le territoire kurde syrien ne dispose pas de système de justice reconnu par les États européens. Ainsi ces enfants sont jugés coupables par les gouvernements actuels locaux ou étrangers alors qu’ils sont considérés comme victimes par le droit international. §2. Des enfants victimes de violation du droit international humanitaire et des normes du droit international des droits de l’homme Les « lionceaux du Califat » représentent pour l’EI un pilier de son « État ». Les garçons sont utilisés en tant que soldats, prêcheurs, espions, kamikazes ou bourreaux. Conjointement, même s’il semblerait qu’elles apprennent aussi à utiliser des armes, l’éducation des filles se concentre sur une mission : savoir tenir une maison, être une bonne épouse et mère. Etant donné la vulnérabilité des 178 179 Junior MUMBALA ABELUNGU, op. cit., p. 172. Article 109 et s., Titre IV, III ème Convention de Genève. Page 65 ! sur 111 ! enfants ils se trouvent également sous la protection des instruments du droit international des droits de l’Homme (A). La violation de ces normes s’illustre par le fait que l’enrôlement d’enfants de moins de quinze ans constitue un crime international, de ce fait il convient de rappeler que le statut de victime de ces enfants doit leur permettre de bénéficier d’une protection accrue de la part des États (B). A. L’interdiction de l’enrôlement des enfants de moins de quinze ans La première mention des enfants-soldats au sein du DIH se trouvent dans les Protocoles de 1977. Ces derniers interdisent le recrutement des enfants de moins de quinze ans ainsi que leur participation aux hostilités. Dans les conflits armés internationaux, le Protocole additionnel I exige également que lors du recrutement militaire de jeunes gens âgés de 15 à 18 ans, priorité soit donnée aux plus âgés. Enfin, l’article 4 paragraphe 3 du Protocole II dispose qu’il est essentiel « d'évacuer temporairement les enfants du secteur où des hostilités ont lieu vers un secteur plus sûr du pays, et les faire accompagner par des personnes responsables de leur sécurité et de leur bien-être »180 . Dans la Convention n°182 sur les pires formes de travail des enfants, l’OIT défini comme une pratique illégale « le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés »181. Cette Convention comporte la limite, à nos yeux, de ne pas interdire l’enrôlement volontaire. Elle est donc en deçà d’une interdiction absolue de la participation des enfants aux hostilités. Enfin, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, prohibe formellement le recrutement d’enfants dans des forces armées. Selon ce Protocole, un enfant soldat est autant un combattant qu’un cuisinier, esclave sexuel ou un domestique. Ce protocole est renforcé par les Accords de Paris182 qui Article 4, §3, Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II), adopté le 8 juin 1977, entré en vigueur le 7 décembre 1978, RTNU., vol. 1125, p. 649. 180 181 Article 3 de la C182, Convention (n°182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, Convention concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination (Entrée en vigueur: 19 nov. 2000), adoptée à Genève en 87ème session CIT, 17 juin 1999). 182 Accords de Paris de l’UNICEF, 2007. Page 66 ! sur 111 ! rappellent la nécessité de permettre aux enfants de quitter sans condition les groupes armés et l’interdiction de recruter des enfants lors de conflits armés. Plus globalement, les enfants-soldats sont des enfants victimes de traite des êtres humains. Ainsi, l’obligation de protéger les enfants est renforcée pour les États membres du Conseil de l’Europe qui ont ratifié la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains183 . La « traite des êtres humains » est défini en sont article 4, a). Elle désigne le recrutement, le transport, le transfert ou l’accueil de personnes par tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité aux fins d’exploitation (c’est-à-dire de travail forcé, esclavage, servitude, exploitation sexuelle entre autres). L’article 16 de cette même Convention enjoint les États signataires à rapatrier les victimes : « 1. La Partie dont une victime est ressortissante ou dans laquelle elle avait le droit de résider à titre permanent au moment de son entrée sur le territoire de la Partie d’accueil facilite et accepte, en tenant dûment compte des droits, de la sécurité et de la dignité de cette personne, le retour de celle-ci sans retard injustifié ou déraisonnable. (…) 5. Chaque Partie prend les mesures législatives ou autres nécessaires pour mettre en place des programmes de rapatriement avec la participation des institutions nationales ou internationales et des organisations non gouvernementales concernées. Ces programmes visent à éviter la re-victimisation. Chaque Partie devrait déployer tous les efforts pour favoriser la réinsertion des victimes dans la société de l’État de retour, y compris la réinsertion dans le système éducatif et le marché du travail, notamment par l’acquisition et l’amélioration de compétences professionnelles. En ce qui concerne les enfants, ces programmes devraient inclure la jouissance du droit à l’éducation, ainsi que des mesures visant à leur assurer le bénéfice d’une prise en charge ou d’un accueil adéquats par leur famille ou des structures d’accueil appropriées ». Découle du statut des enfants victimes de traite un besoin de protection spécifique et notamment un besoin de rapatriement selon la Convention européenne sur la lutte contre le trafic d’êtres humains. 183 Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, Varsovie, 16 mai 2005, Série des Traités du Conseil de l’Europe n°197. Page 67 ! sur 111 ! Les enfants sont victimes de crimes internationaux. Le Statut de Rome énonce dans son Article 8 les différents crimes de guerre. Parmi ces deniers figure au point xxvi, « le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales ou (le fait) de les faire participer activement à des hostilités »184 . Le 15 mars 2012, la CPI a rendu son tout premier jugement en reconnaissant coupable de crimes de guerre l’ancien chef de milice de République Démocratique du Congo, Thomas Lubanga, pour avoir enrôlé des enfants soldats en 2002 et 2003 et les avoir fait participer à un conflit armé. Le 10 juillet 2012 il a été condamné à 14 ans de prison185. B. Le besoin de protection des enfants-soldats, victimes de crime international Le statut de victime de crime international des enfants soldats enjoint les États parties au conflit à prendre toutes les mesures de protection afin de permettre une reconnaissance de leurs droits. En l’espèce, l’Organisation internationale du travail, dans son Observation, enjoint le gouvernement syrien à prendre des mesures pour assurer la démobilisation des enfants : « Selon l’UNICEF, la participation des enfants au combat était monnaie courante, et certains groupes armés de l’opposition ont fait commettre à des enfants de graves violations des droits de l’Homme, notamment des exécutions et des actes de torture, tandis que les forces gouvernementales auraient soumis des enfants au travail forcé ou les auraient utilisés comme boucliers humains. Le Secrétaire général se réfère également à des rapports du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme, selon lesquels l’EIIL a annoncé publiquement, le 11 décembre 2015, l’existence, déjà connue, d’une section composée d’enfants parmi ses rangs, appelée «Les lionceaux du califat». Le Haut-Commissariat a également reçu des informations selon lesquelles l’EIIL encourageait les enfants de 10 à 14 ans à rejoindre ses rangs, et qu’il formait les enfants au combat. (…) Le Secrétaire général indique par ailleurs que l’enrôlement en masse et l’utilisation d’enfants par l’EIIL se sont poursuivis, et que des centres d’entraînement militaire où se trouvaient au moins 124 garçons de 10 à 15 ans existaient à Alep, Dayr az Zawr et Raqqah. Le recours à des enfants soldats étrangers âgés de 7 ans à peine dans 18 cas a considérablement augmenté, selon des informations vérifiées »186. 184 Article 8, point xxvi , Statut de Rome de la Cour pénale internationale, A/CONF.183/9, 17 juillet 1998, et amendé par les procès-verbaux en date des 10 novembre 1998, 12 juillet 1999, 30 novembre 1999, 8 mai 2000, 17 janvier 2001 et 16 janvier 2002. Le Statut est entré en vigueur le 1er juillet 2002. 185 Affaire Lubanga, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, ICC-01/04-01/06. 186 Observation (CEACR) - adoptée 201, publiée 107ème session CIT 2018, Convention (n°182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, République arabe Syrienne. Page 68 ! sur 111 ! La recommandation se fait à l’égard de la Syrie car les pays détenant les enfants capturés dans le cadre du conflit doivent les traiter avec humanité, comme prévu par le droit international humanitaire. Or, en l’espèce, les enfants font face à des conditions de vie inhumaines, à la torture et à des traitements inhumains et dégradants. C’est pourquoi les États européens doivent agir pour la protection de ces enfants. Le Comité des droits de l’enfant recommande à la Belgique de protéger les enfants belges de moins de 10 ans qui sont des victimes de traite dans le contexte de l’exploitation dans un conflit armé à des fins criminelles, conformément à la résolution 2331 (2016) du Conseil de sécurité187. Cette liste de normes internationales illustre le développement du régime juridique international relatif à l’interdiction de recruter et d’utiliser des enfants-soldats. Leur statut de victime enjoint les États parties à les protéger, donc à les rapatrier car les laisser dans ces prisons ne répond pas aux obligations des États parties à les secourir. En définitive, « Etant donné que le recrutement de mineurs et leur participation à des hostilités comportent un risque élevé de dommage irréparable attentatoire à leurs droits fondamentaux, en particulier le droit à la vie, les obligations des États découlant de l’article 38 de la Convention, lu en conjonction avec les articles 3 et 4 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, revêtent une dimension extraterritoriale »188 . Section 2. Un rapatriement à effectuer dans l’intérêt supérieur des enfants Le rapatriement doit se faire dans le respect des droits des enfants, soit dans leur intérêt supérieur et sans discrimination (§1). A la suite du rapatriement, le processus de réintégration de ces enfants dans les sociétés européennes peut être complexe. L’accent devra être mis sur la réadaptation et la réinsertion sociale lorsqu’il s’agit d’enfants, bien que des poursuites pénales puissent demeurer une option dans certains cas appropriés. Il est important de veiller à ce que les garanties de la justice pour mineurs s’appliquent et non pas les mesures antiterroristes qui ne tiennent compte ni de leur âge, ni de leur statut de victime et qui n’ont pas pour but de les 187 Comité des droits de l’enfant, NU. Doc. CRC/C/BEL/CO/5-6, 28 février 2019, §50. 188 CIDE, Observation générale n°6, Traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, UN; Doc. CRC/GC/2005/6 (1er septembre 2005), §28. Page 69 ! sur 111 ! réhabiliter. Il convient d’assurer une protection et une réadaptation adéquate aux enfants-soldats ou à ceux victimes de la traite d’êtres humains (§2). §1. Un rapatriement dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant En droit, toute décision concernant un enfant doit être prise dans son intérêt supérieur. Ainsi, il convient de mettre les intérêts en balance afin de déterminer quel serait son intérêt supérieur. En l’espèce, il convient de se demander si rapatrier un enfant européen dans son pays d’origine (dans lequel il n'a possiblement jamais vécu) relève de son intérêt supérieur (A). Cela est d’autant plus problématique lorsque l’enfant se trouve enfermé en Syrie ou en Irak avec sa mère. Il semblerait que sa séparation d’avec sa mère soit contraire à son intérêt supérieur (B). A. La notion d’intérêt supérieur de l’enfant relatif à son rapatriement Le rapatriement des enfants doit se faire dans le respect de leur intérêt supérieur, notion ouverte à toute interprétation, qui enjoint les États à rapatrier les enfants avec leur mère et sans discrimination en fonction de leur âge ou de leur degré d’implication dans le conflit armé. Le comité des droits de l’enfant a rendu ses observations finales concernant le rapport de la Belgique189. Il recommande : « b) de faciliter le rapatriement rapide de tous les enfants belges et, lorsque cela est possible, de leur famille, quel que soit leur âge ou leur degré d’implication supposée dans le conflit armé, compte tenu du paragraphe 26 de la résolution 2427 (2018) du Conseil de sécurité et conformément à l’article 9 de la Convention »190 . La CIJ l’a consacré : « la protection offerte par les conventions régissant les droits de l'Homme ne cesse pas en cas de conflit armé »191. Ainsi le Pacte international relatif aux droits 189 Les observations finales sont des actes adoptés à la suite de l’examen des rapports périodiques soumis par les État. Le comité des droits de l’enfant de l’ONU n’est pas une juridiction, l’observation finale rendue n’a pas de force obligatoire mais elle a pour rôle d’évaluer le respect des droits protégés par la Convention des droits de l’enfant. 190 Comité des droits de l’enfant, Observations finales concernant le rapport de la Belgique valant cinquième et sixième rapports périodiques, 1er février 2019. (CRC/C/BEL/CO/5-6) §150. 191 Conséquences juridiques de 1'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif; C. 1. J. Recueil 2004, § 106. Page 70 ! sur 111 ! politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels ainsi que la Convention relative aux droits de l’enfant s’appliquent. Les principaux traités internationaux de protection des droits fondamentaux ont été signés par les États européens et consacrent l’interdiction de traitements inhumains et dégradants. L’application de ces traités internationaux se fait selon la juridiction des États. Or, au vu de la situation spécifique des enfants présents en Syrie et en Irak et relativement à l’application des Conventions des droits de l’Homme, il convient d’examiner leur application en fonction « de l’objet réel et direct de la contestation et non en fonction de son objet formel ou apparent »192. La Convention internationale des droits de l’enfant, adopté à l’unanimité par les Nations Unies reconnait le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant en son article 3 : « 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. 2. Les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées »193 . Ainsi, le tribunal de première instance francophone de Bruxelles constate que le droit énoncé à l’article 3 de la CIDE est un droit subjectif et, de ce fait, le tribunal a « le pouvoir de juridiction de connaitre la demande »194. L’intérêt supérieur de l’enfant découlant de la Convention internationale des droits de l’enfant doit primer et sa protection doit permettre le rapatriement des enfants, quelle que soit la juridiction sous laquelle ils se trouvent. Le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant était à l'origine une référence pour la prise de décision en l'absence de droits codifiés. La Déclaration des droits de l'enfant de l'ONU en 1959 l’a mentionné en premier lieu. Par la suite, en 1989, le principe a été codifié dans la CIDE. De ce fait, il a été étendu à toutes les décisions concernant les enfants. Selon le Comité des droits de l’enfant, ce 192 Tribunal 193 Article 194 de première instance francophone de Bruxelles, section civile - 19/37/C, p. 16 §26. 3 de la Convention internationale des droits de l’enfant, 1989 ibid., p. 17 §30. Page 71 ! sur 111 ! concept dispose de trois dimensions : c’est un droit de fond, un principe juridique interprétatif fondamental et une règle de procédure195 . En premier lieu ce droit de l’enfant doit être mis en oeuvre dans toute prise de décisions le concernant. Il « crée une obligation intrinsèque pour les États, est directement applicable et peut être invoqué devant un tribunal »196. Ensuite, il conviendra, lors de l’interprétation d’une disposition juridique, de l’interpréter à la lumière de l’intérêt supérieur de l’enfant. Enfin, les États ont le devoir d’expliquer les critères sur lesquels il se sont basés dans une prise de décision ayant des incidences sur un enfant. Les intérêts des enfants doivent être mis en balance et la décision doit permettre à l’enfant de voir son intérêt supérieur respecté. Un enfant est souvent incapable de défendre ses propres droits ou son intérêt, c’est pourquoi il est important d’inclure le concept d’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les décisions prises à son encontre. Ce principe est quelque peu complexe à mettre en oeuvre. Il semble devoir l’être au cas par cas ; « ll devrait être ajusté et défini au cas par cas, en fonction de la situation particulière de l’enfant ou des enfants concernés, selon les circonstances, le contexte et les besoins des intéressés »197 . Dans la mise en oeuvre de l’intérêt supérieur de l’enfant, il convient de prendre en compte l’opinion de l’enfant, l’identité de l’enfant, la préservation du milieu familial et maintien des relations, la prise en charge, la protection et la sécurité de l’enfant en situation de vulnérabilité, le droit de l’enfant à la santé et le droit de l’enfant à l’éducation. La décision de non-rapatriement des enfants présents en Syrie et en Irak doit démontrer que leur intérêt supérieur a été évalué mais que, dans leur intérêt supérieur, il convient de les laisser survivre dans ces pays. Les États européens, pour justifier cette décision, s’appuient sur le respect de la souveraineté des États tiers et sur le risque sécuritaire. 195 Comité des droits de l’enfant, Observation générale no 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale (art. 3, par. 1), CRC/C/GC/14, 29 mai 2013, §6. 196 Ibid., §6, a). 197 Ibid., §32. Page 72 ! sur 111 ! B. Le rapatriement des enfants avec leur mère « Qu’on rapatrie les orphelins, c’est très bien. Mais il reste 200 enfants qui ont la malchance d’avoir une mère, puisque visiblement, c’est devenu une malchance », rappelle Marie Dosé198. La question du rapatriement des enfants avec leurs parents (plus particulièrement avec la mère, le père étant souvent décédé ou disparu) a suscité des débats controversés entre les autorités des États membres. La mère peut avoir été impliquée dans des activités terroristes ou autres activités criminelles et son retour peut présenter un risque pour la sécurité du pays. Toutefois, l’intérêt supérieur de l’enfant et son droit à ne pas être séparé de sa famille ne doivent-il pas l’emporter sur les préoccupations relatives à la sécurité ? La séparation, contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant, pourrait être considérée comme illégale au vu de la CIDE. Les article 5 et 9199, ainsi que l’article 8 de la CEDH (dont découle une obligation positive de l’État de réunir les parents avec leur enfant) enjoignent les États à ne séparer les familles que dans des situations exceptionnelles. La situation actuelle peut être considérée comme telle, mais la séparation ne peut se faire juridiquement que par un service compétent et des professionnels de l’enfance. Ce n’est pas le gouvernement qui peut juger de l’opportunité d’une telle séparation et, selon de nombreux rapports de professionnels de la santé, l’impact de la séparation se fera sur le plan neurologique et physiologique des enfants. Ainsi les enfants qui ont la chance de vivre avec leur mère dans ces camps se retrouvent discriminés et se voient refuser une protection et un accès aux soins et à la réhabilitation, du fait de la présence de leur mère. Le Président du tribunal de première instance de Bruxelles, action néerlandophone, a estimé que l’État belge devait procéder au rapatriement de six enfants belges ainsi que des deux mères qui les accompagnaient200 . Le Président du Tribunal de première instance « reconnait, que l’intérêt supérieur de l’enfant l’emporte au-delà de toute considération politique, diplomatique ou L. MATHIEU, F. AUTRAN, « Le Quai d’Orsay rapatrie les orphelins de jihadistes à dicrétion », 10 juin 2019, Libération, disponible sur : https://www.liberation.fr/planete/2019/06/10/le-quai-d-orsay-rapatrie-les-orphelins-dejihadistes-a-discretion_1732889, consulté le 04 juillet 2019. 198 Ces articles consacrent le devoir des parents d’aider leurs enfants et le droit de ces derniers d’être éduqués par eux (plus généralement le droit de ne pas être séparés de leurs parents). 199 200 Ordonnance du 26 décembre 2018, Tribunal de première instance de Bruxelles, section néerlandophone. Page 73 ! sur 111 ! sécuritaire »201. Le rapatriement avec les mères est audacieux étant donné que la pratique européenne était le rapatriement sans ces dernières. Afin de motiver sa décision, le juge s’est basé sur les article 5 et 9 de la CIDE. De plus, la pratique de certains États membres consistant à ne rapatrier que les enfants d’un certain âge (10 ou 12 ans) est également préoccupante car elle pourrait priver les enfants les plus âgés de toute forme de protection au motif qu’ils pourraient avoir été impliqués dans les activités liées au terrorisme. La compatibilité d’une telle pratique avec la CIDE, en vertu de laquelle un enfant est un « être humain âgé de moins de 18 ans » semble discutable. Tout autant, cette mesure est incohérente avec le droit international qui enjoint les État à traiter les enfants sans discrimination. Le Comité des droits de l’enfant rappelle que : « Le respect du droit à la non-discrimination va au-delà de l’obligation passive d’interdire toutes les formes de discrimination dans l’exercice des droits énoncés dans la Convention et requiert aussi, de la part des États, l’adoption de mesures proactives propres à garantir effectivement à tous les enfants des chances égales d’exercer les droits énoncés dans la Convention. Il peut être nécessaire à cette fin d’appliquer des mesures positives visant à remédier à une situation de réelle inégalité »202 . Enfin, l’intérêt supérieur de l’enfant est un principe essentiel à toute décision le concernant. Ainsi, lors de son retour, il convient d’étudier son intérêt supérieur afin d’opérer une judiciarisation ou non de ce dernier. En effet, malgré la vulnérabilité intellectuelle des enfants, ces derniers peuvent être tenus responsables selon le droit. Toutefois, en ce qui concerne l’enfant, « l'étendue de sa responsabilité doit être appréciée en prenant en considération sa capacité restreinte de discernement, inhérente à son jeune âge. De plus, des mesures éducatives devraient être imposées et non de véritables peines »203. 201 Le Délégué général des droits de l’enfant de la Communauté française, le Kinderrechtencommisaris de la Communauté flamande, Retour de zone des enfants belges de Syrie, une seule option envisageable dans l’intérêt supérieur des enfants concernés, Janvier 2019. 202 Comité des droits de l’enfant, op. cit., §41. 203 Maria Teresa DUTLI, « Enfants-Combattants prisonniers », Article, revue internationale de la Croix-Rouge, 785, 31 octobre 1990 , disponible sur : https://www.icrc.org/fr/doc/resources/documents/misc/5fzh5y.htm, consulté le 27 juillet 2019. Page 74 ! sur 111 ! §2. Un rapatriement dans une optique de judiciarisation, la non prise en compte du statut de victime des enfants Les enfants, victimes de violation de leurs droits fondamentaux doivent être réhabilités et réintégrés en premier lieu (A). Enfin, si leur responsabilité est prouvée, il convient de prendre en compte leur jeune âge et de respecter les principes de justice juvénile (B). A. La nécessaire prise en compte du statut de victime des enfants Les États ont le devoir de rapatrier les enfants qui le demandent du fait de leur nationalité et de leur qualité de victimes de violation de leurs droits fondamentaux lors d’un conflit armé. Toutefois, une fois sur le territoire de leur État de nationalité, il convient de rappeler que leur statut de victime enjoint les États à avoir pour objectif de les réhabiliter et de les réintégrer. Les États européens qui surnomment les enfants des « bombes à retardements » ne peuvent avoir en tête le seul enjeu sécuritaire. Depuis les attentats en France, en Espagne ou encore au Royaume-Uni, les États semblent ne distinguer que la lutte contre le terrorisme et la sécurité des citoyens (les lois nationales anti-terroristes l’illustrent particulièrement). Toutefois les mineurs sont des enfants, victimes de conflit armé, victimes de violations de leurs droits fondamentaux, dans des états de stress post-traumatique et de vulnérabilité extrême. Souvent présents en Syrie et en Irak nonobstant leur volonté (ils sont nés, pour la majorité, sur place ou ont suivi leur famille) ils ne peuvent être considérés comme simples « terroristes » ou « victimes collatérales » . Toutefois l’expérience de guerre directement éprouvée par une partie de ces enfants nécessite une prise en charge spécifique. La participation aux combats constitue est un élément à prendre en compte lors du retour des enfants-soldats notamment. Leur responsabilité ne peut-être effacée. De ce fait, les États européens doivent respecter les principes internationaux de justice juvénile. Les enfants soldats doivent bénéficier de tous les services d’appui nécessaire pour leur permettre de retourner à la vie normale. Leur internement à titre exceptionnel est inévitable s’il font peser une grave menace sur la sécurité mais « pareille mesure est compatible avec le droit international des droits de l’Homme et le droit international humanitaire si les conditions de leur Page 75 ! sur 111 ! internement sont conformes aux normes internationales, dont l’article 37 de la Convention et les dispositions relatives à la justice pour mineurs »204. Le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'Homme rappelle dans ses orientations relatives aux combattants terroristes étrangers qu’il est essentiel de traiter les enfants engagés dans des actes terroristes au sein de l’« État islamique »en accord avec les approches à l’égard des enfants-soldats (les considérer comme victimes principalement) et qu’il est également essentiel de leur fournir un soutien nécessaire pour une réadaptation physique et mentale ainsi qu’une réintégration effective205. L’approche de ce rapport reprend l’article 39 de la Convention internationale des droits de l’enfant206. Les mesures anti-terroristes contenues dans les législations nationales sont bien trop attentatoires aux droits des enfants207 . En Europe, face au terrorisme et à la montée du sentiment d’insécurité, les autorités agissent avec moins de paternalisme et plus de pénalisation et de détention. Le système de justice juvénile devient de plus en plus punitif dans de nombreux États. Selon un rapport des Nations-Unies : « At a time when public opinion expresses concern at the perceived threat posed to society by juvenile delinquency, and States around the world contemplate reductions in the minimum age of criminal responsibility and longer sentences of imprisonment, the importance of building on the potential of restorative justice is all the greater »208. 204 Comité des droits de l’enfant, Observation générale n°6 (2005), « Traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine », CRC/GC/2005/6 §57. 205 ODIHR, op. cit., p.68. 206 CIDE, Article 39 : « Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour faciliter la réadaptation physique et psychologique et la réinsertion sociale de tout enfant victime de toute forme de négligence, d’exploitation ou de sévices, de torture ou de toute autre forme de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou de conflit armé. Cette réadaptation et cette réinsertion se déroulent dans des conditions qui favorisent la santé, le respect de soi et la dignité de l’enfant ». 207 Les mesures établies à l’encontre des combattants étrangers sont susceptibles d’entraîner des interférences invasives avec la vie privée des enfants et d’autres de leur droits. En étant dirigés contre eux-mêmes ces mesures peuvent affecter directement ou indirectement les droits des enfants à la liberté d’expression, de religion, à la vie familiale, l’éducation, l’égalité et à la non-discrimination. Enfin, ces initiatives peuvent avoir des implications à long terme de grande portée pour l’ensemble des droits civils, politiques économiques, sociaux et culturels des enfants. 208 Traduction personnelle : « Au moment où l'opinion publique s'inquiète de la menace que la délinquance juvénile fait peser sur la société et où les États du monde entier envisagent de réduire l'âge minimum de la responsabilité pénale et d'allonger les peines d'emprisonnement, il est d'autant plus important de valoriser la justice restaurative ». Office of the Special Representative of the UN Secretary General on Violence against Children, « Promoting Restorative Justice for Children », NY, 2013, p. 39. Page 76 ! sur 111 ! Tout en reconnaissant la nécessité d’une assistance post-traumatique pour les enfants, la résolution 2396 demande expressément aux États d’enquêter au sujet des combattants terroristes étrangers et de leurs familles, y compris les enfants. En France, une consigne a été donnée d’émettre des mandats de recherche concernant les mineurs de 13 ans présents en Syrie et en Irak. Ces derniers devront être placés en garde à vue à leur retour. Ceux âgés de 10 à 13 ans pourront aussi être entendus sous le régime de la retenue209. Sans nier que ces enfants aient commis des crimes dont les conséquences sont particulièrement graves, la relation complexe entre la victimisation et la perpétration doit être reconnue et les réponses doivent être adaptées. Les enfants présents en Syrie et en Irak ont un statut multiple, ils sont victimes, témoins et suspects des exactions de l’ « État islamique ». En tant que victimes, les enfants doivent avoir accès aux tribunaux, à un procès équitable qui leur permettrait une réhabilitation et une compensation nécessaire à leur réintégration dans la société et permettrait le respect de leur droit à un accès à un tribunal impartial. En tant que témoins, il convient de recueillir leur témoignage afin de préciser leur rôle au sein de cet État, et les exactions commises par les combattants ne peuvent être méconnue. En tant que suspects, il convient de déterminer leur responsabilité. Au sein de l’EI, dans un but d’apprentissage du fonctionnement de l’organisation terroriste, ils participaient activement aux exactions commises. Recrutés et utilisés, en violation du droit international par ce groupe armé non étatique, les enfants soldats subissent un endoctrinement afin d’être facilement manipulables210 . Suite à cet endoctrinement les enfants sont souvent acteurs d’atrocités, voire de crimes internationaux. 209 Déclaration de Mme Nicole Belloubet, Ministre de la justice, sur le retour des djihadistes en France, au Sénat le 13 décembre 2017, disponible sur : http://discours.vie-publique.fr/notices/173002489.html, consulté le 05 août 2019 : « 12 heures renouvelable une fois ». 210 OIJJ, « Children, the justice system, violent extremism and terrorism annex national reports », 2018, p. 98 : « L’« État islamique »disposait d’un « Ministère de l’éducation » qui décidait que l’éducation était obligatoire pour les garçons de 6 à 18 ans et pour les filles de 6 à 15 ans. L’éducation se concentrait sur l’étude du Coran, l’histoire de l’Islam et la langue arabe pour les enfants étrangers. Une fois les études complétées, ils se concentraient sur l’éducation physique (un camp d’entrainement incluant l’apprentissage de l’utilisation d’armes à feu, la lutte et la natation mais aussi de la Charia) ». Page 77 ! sur 111 ! B. La nécessité de non-criminalisation des enfants Il ne convient pas de faire de l’angélisme et il est vrai que les enfants revenants dans leur pays de nationalité peuvent constituer un risque pour eux-mêmes ainsi que pour les autres. C’est pourquoi il convient d’apporter des soins aux enfants victimes de DAESH. « Les enfants diffèrent des adultes par leur degré de développement physique et psychologique, ainsi que par leurs besoins affectifs et éducatifs. Ces différences constituent le fondement de la responsabilité atténuée des enfants en conflit avec la loi. Ces différences, et d’autres, justifient l’existence d’un système distinct de justice pour mineurs et requièrent un traitement différencié pour les enfants. La protection de l’intérêt supérieur de l’enfant signifie, par exemple, que les objectifs traditionnels de la justice pénale, comme la répression/rétribution, doivent céder la place à des objectifs de réadaptation et de justice réparatrice dans le traitement des enfants délinquants. Cela est conciliable avec le souci d’efficacité dans le domaine de la sécurité publique »211 . En France et en Allemagne, des enfants ont été condamnés à des peines de détention pour faits de terrorisme. En France, les infractions terroristes commises par des enfants et par des adultes relèvent toutes deux de la section antiterroriste du Tribunal de grande instance de Paris. Même si les enfants sont pris en charge par une entité spéciale, la DPJJ212, qui peut proposer des alternatives aux poursuites judiciaires (par exemple des mesures éducatives), ceux poursuivis pour participation à une groupement en vue de la préparation d’un acte de terrorisme étaient presque systématiquement placés en détention durant l’enquête, et, une fois jugés coupables, certain ont été condamnés à des peines de détention. En Allemagne, en 2015, cinq enfants ont été condamnés à une peine de prison et onze en 2016 (pour préparation d’une infraction grave portant atteinte à la sécurité de l’État, discours haineux, dissémination de propagande et utilisation d’insignes interdits) : « …de manière générale, dans les discussions publiques comme politiques, c’est le discours de la sécurité qui 211 Comité des Droits de l’Enfant, Observation Générale N. 10 (2007) concernant les Droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs, §10. 212 Direction de la Protection Judiciaire de la Jeunesse. Page 78 ! sur 111 ! domine, en se concentrant principalement sur les extrémistes violents. Par conséquent, le contexte spécifique de chaque jeune, de chaque mineur, est bien souvent négligé »213. « C'est de la folie, et une folie très inhumaine, violant les droits, que de criminaliser et d'enfermer ces enfants. Nous devons cesser complètement de criminaliser les enfants »214 . Selon Paulo Sergio Pinheiro et Peter Newell, l’intérêt supérieur des enfants doit d’être une considération primordiale, tout comme le droit de l’enfant au développement maximal possible215 . Selon le droit international, notamment la CIDE, les États doivent fixer un âge de responsabilité pénale aussi élevé que possible. Il est de 12 ans en Belgique et aux Pays-Bas, de 14 ans en Allemagne, et en France il n’en existe pas, même si toutefois le concept de « discernement » fait qu’en pratique les enfants de plus de treize ans seulement peuvent être reconnus comme pénalement responsables216 . Les enfants de moins de treize ans ne peuvent être poursuivis en justice et font l’objet de mesures de protection telles que le placement dans une institution spécialisée217. Pour les enfants qui doivent faire face à la justice juvénile, les articles 37 et 40 de la CIDE s’appliquent. Le Mémorandum de Neuchâtel sur les bonnes pratiques en matière de justice pour mineurs dans un contexte de lutte contre le terrorisme, établi lors du Forum mondial contre le terrorisme, donne des orientations sur l'élaboration et la mise en œuvre de politiques concernant les enfants dans les affaires de terrorisme afin de renforcer le système de justice pour mineurs dans le contexte de la lutte antiterroriste. D’une part, une attention particulière doit être donnée aux alternatives à la judiciarisation et, d’autre part, toute décision à l’égard des enfants doit avoir pour objectif sa réintégration dans la société. Un enfant en détention souffrira d’une stigmatisation et d’une rupture dans son éducation. Le fait de le séparer davantage de sa communauté entraînera une plus grande difficulté lors d’une éventuelle réinsertion et réadaptation futures. 213 Rapport national allemand (2018) élaboré dans le cadre du projet de l’OIJJ « Renforcer les systèmes de justice juvénile dans le contexte de la lutte contre le terrorisme: Renforcement des capacités et enseignement mutuel entre les acteurs ». 214 Paulo Sergio PINHEIRO, op. cit., p. 29. 215 Peter NEWELL « It is not child-friendly to make children criminals », Child friendly Justice, A quarter of a Century of the UN Convention on the Rights of the Child, edited by Said Mahmoudi, Stockholm Studies in Child Law and Children’s Right, Brill, Vol. 1, 2015 p. 137. 216 Article 217 Voir 122-8 du Code Pénal français. le tableau 1 du rapport de l’OIJJ, op. cit., p. 32. Page 79 ! sur 111 ! En effet, selon le Défenseur des droits des enfants européen : « We believe that current trends to reduce the age of criminal responsibility and to lock up more children at younger ages must be reversed. The treatment of young people placed in penal institutions in many of our countries is a scandal – breaching their fundamental human rights »218 . Les États devraient avoir pour objectif de définir l’âge de la responsabilité pénale à 18 ans en développant des systèmes innovants de réponse se concentrant sur l’éducation, la réinsertion et la réadaptation pour les mineurs. En effet, il ne sert pas de réduire les capacités intellectuelles des enfants, ce qui leur desservirait, mais affirmer leur responsabilité ne veut pas obligatoirement dire qu’il faille les criminaliser. En Belgique le nombre d’enfants suspectés d’avoir commis des infractions terroristes a augmenté219 . Toutefois, « une fois arrêtés et considérés comme « suspects », ces jeunes ne peuvent être traités comme des terroristes adultes normaux. Plus encore, ils devraient être considérés comme des enfants à risque. Par-dessus tout, il s’agit d’enfants, et ils doivent bénéficier de traitements spéciaux en raison de leur vulnérabilité, avec des procédures et des mesures adaptées à leurs besoins »220 . Aux Pays-Bas, seulement quatre affaires relatives à des enfants reconnus coupables pour terrorisme ont été révélées entre janvier 2001 et juillet 2017. Lorsqu’un enfant rentre aux Pays-Bas depuis le territoire de l’« État islamique », « il fait l’objet d’une évaluation individuelle afin de déterminer la prise en charge adéquate, les mesures de sécurité, et les interventions nécessaires avant d’établir un plan de traitement dans le cadre d’une consultation multidisciplinaire »221 . Thomas Hemmarberg, ancien Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe convient qu’il est dans notre intérêt à tous d’arrêter de criminaliser les enfants. Il est essentiel de les traiter en tant qu’enfants et de laisser le système de justice pénale aux adultes222. 218 Traduction personnelle : « nous estimons qu'il faut renverser la tendance actuelle qui consiste à abaisser l'âge de la responsabilité pénale et à enfermer davantage d'enfants à un plus jeune âge. Le traitement des jeunes placés dans des établissements pénitentiaires dans bon nombre de nos pays est un scandale - une violation de leurs droits humains fondamentaux. », European Network of Ombudspersons for Children (ENOC) Statement on Juvenile Justice: Europe’s children’s champions challenge governments to respect young offenders’ rights, Stockholm, 17 Octobre 2003 p. 1. 219 Il était de 22 en 2014, 35 en 2015 et 66 en 2016. 220 Rapport national belge (2018) élaboré dans le cadre du projet de l’OIJJ « Renforcer les systèmes de justice juvénile dans le contexte de la lutte contre le terrorisme : Renforcement des capacités et enseignement mutuel entre les acteurs ». 221 Regional Overview Report, « Children, the Justice System, Violent Extremism and Terrorism: An Overview of Law, Policy and Practice in Six European Countries », International Juvenile Justice Observatory, 2018, 62 p. 222 Peter NEWELL, op. cit., p. 143. Page 80 ! sur 111 ! Conclusion Titre 2 Les États ont l’obligation de répondre favorablement aux demandes de rapatriement de leurs ressortissants mineurs. Ils ont l’obligation de respecter le droit humanitaire et les droits de l’Homme même si les violations de ces droits se déroulent à des milliers de kilomètres de leurs frontières. D’une part, l’établissement de leur contrôle effectif sur le territoire du nord de la Syrie est démontré. De ce fait les enfants se trouvent sous leur juridiction et doivent voir leurs droits énumérés dans la CESDH respectés. D’autre part, les États européens, parties au conflit armé, ont le devoir de respecter les règles de droit international humanitaire et de droit international des droits de l’Homme. Ce droit interdit l’utilisation d’enfants-soldats lors de conflit. Bien entendu, ce ne sont pas les États européens qui enrôlent les enfants dans leurs rangs mais l’État islamique, groupe armé non étatique (la question du respect du droit international humanitaire par les groupes armés non étatiques devra faire l’objet d’une autre étude). Reconnus comme enfants-soldats, ils sont victimes de violations de droit international humanitaire ainsi que du droit international pénal et du droit international des droits de l’Homme. Aujourd’hui détenus dans des camps ou en prisons et faisant face à des violations avérées de leurs droits fondamentaux, les États ont l’obligation d’accepter la demande de leur rapatriement. Leur intérêt supérieur enjoint les États à accepter leur retour dans leur pays d’origine, eux qui sont victimes de violations de leurs droits fondamentaux. Leur besoin impérieux est de bénéficier d’une aide psychosociale de réhabilitation et de réintégration dans une société aux côtés de leur famille. Page 81 ! sur 111 ! Conclusion finale « La question du retour de ces enfants n’est donc pas qu’un problème politique. Ce sont les valeurs de la République et celles portées par notre droit qui sont ici en jeu. Ces enfants ne sont ni instigateurs ni acteurs de ces conflits, mais des victimes. Les djihadistes renient ce qui fait nos sociétés démocratiques, il nous incombe de ne pas répondre à la terreur par le reniement de nos valeurs, mais par le respect du droit »223. Les États européens, en refusant le rapatriement des enfants, ne respectent pas leurs obligations internationales, que ce soit celles découlant de traités de droit international public ou celles découlant des principes du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’Homme. Les enfants, constituant une catégorie de la population particulièrement vulnérable, nécessitent une protection en toute circonstance. Aujourd’hui, la violation de leurs droits fondamentaux dans des États non respectueux des droits de l’Homme enjoint les États occidentaux, États de nationalité et parties au conflit, à rapatrier ces mineurs. Certes, les États ont pour obligation le respect de la souveraineté exclusive de leurs pareils et n’auraient, en théorie, pas de légitimité pour secourir leurs ressortissants mineurs présents en Syrie et en Irak. Or d’une part la violation des droits est telle qu’il semble inconcevable de ne pas agir face à une telle situation, d’autre part leurs obligations conventionnelles les enjoignent à agir. En effet, en contrôlant une partie du territoire par leur influence militaire, politique et financière, ils ne peuvent se dédouaner de leurs obligations. Les États agissent sur le terrain afin de lutter contre l’EI mais lorsque la décision n’est plus politique et concerne le retour d’enfants victimes, ils décident de se retirer. Pourtant la situation actuelle n’est pas si « exceptionnelle », des constructions juridiques existent et peuvent être mises en oeuvre afin d’enjoindre les États européens à agir sur le territoire syrien et en coopération avec les autorités irakiennes. Ajouté au principe fondamental de coopération entre les États, l’intervention d’humanité, la lutte contre le terrorisme ou le lien de nationalité permettent de légitimer les interventions étatiques. Les États ont la possibilité d’agir, les autorités locales le demandent. Ce qui pose problème c’est leur refus face à ce devoir d’agir. Les autorités judiciaires sont devenues les 223Hassani Mohamed RAFSANDJAN, « Enfants de djihadiste mais enfants de la République », 20 juin 2019, Le Monde,, https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/06/20/hassani-mohamed-rafsandjani-enfants-de-djihadiste-maisenfants-de-la-republique_5478788_3232.html Page 82 ! sur 111 ! dernières garantes du respect des droits fondamentaux. La requête devant la CEDH du 9 mai 2019 n’a pas encore été jugée mais si la Cour tranche en faveur d’un rapatriement, elle renforcera considérablement sa place dans le système international de protection des droits fondamentaux. La responsabilité des États pour leur inaction est évidente. Les États européens ne peuvent se décharger de la question des combattants terroristes européens. Citoyens européens, leurs États de nationalité ne peuvent les laisser face à des traitements inhumains et dégradants. Conjointement à sa responsabilité du fait de politiques de stigmatisation, les États peuvent être reconnus comme responsables du fait de négligence face au départ des combattants étrangers224. La situation actuelle est similaire à une externationalisation de la prise en charge des combattants et de leurs familles. Les États se détachent de leurs obligations envers leurs nationaux et laissent les forces kurdes ainsi que le gouvernement irakien les prendre en charge. Cela devient habituel chez les États occidentaux qui utilisent leur souveraineté pour se détacher de leurs obligations internationales225. Il apparaît que seuls les intérêts propres guident les Etats et que les droits de l’Homme ne peuvent que s’en accommoder. Les États européens ne veulent pas véritablement rapatrier les combattants étrangers, ils ont pour projet de mettre en place un tribunal pénal international. Le 03 juin 2019 à Stockholm a été organisée une réunion d’experts, représentant une quinzaine de pays dont la France et l’Allemagne, pour discuter d’un mécanisme légal permettant de juger les terroristes de l’EI. Le but de la création d’un tribunal international est d’empêcher le retour des combattants en Europe. Il serait hybride, composé de juges irakiens et internationaux, toutefois son financement et sa composition restent des zones d’ombres. Quelle sera la place pour les enfants dans un tel tribunal ? La CPI fixe dans son article 26 l’âge à partir duquel la Cour peut être compétente pour juger à 18 ans226. Il convient de rappeler que les tribunaux pénaux internationaux ont principalement pour objectif de juger les « hauts responsables » et qu’il semble peu probable qu’un enfant ait une telle fonction. Le tribunal spécial pour la Sierra Leone a spécifiquement posé la question de la responsabilité des mineurs du 224 Le 26 avril 2017 l’État français a été reconnu comme responsable du fait du départ d’une mineure en Syrie. Arrêt rendu par Conseil d’État, 2e et 7e chambres réunies, 26-04-2017, n° 394651. Une jeune fille de 17 ans a quitté la France le 11 novembre 2013 par avion alors qu’elle était inscrite sur le fichier des personnes recherchées après avoir fui son domicile familial en juin 2013. La négligence commise par les services de contrôle aux frontières constitue une faute dont l’État est responsable. 225 Accord UE-Turquie du 18 mars 2016 (voir la déclaration sur le site du Conseil européen et du Conseil de l’UE : https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2016/03/18/eu-turkey-statement/, consulté le 19 aout 2019) ou encore le financement des gardes côtés libyens (voir le rapport de l’UE : https://ec.europa.eu/neighbourhoodenlargement/sites/near/files/eutf-noa-libya.pdf, consulté le 19 août 2019). 226 Anne-Laure CHAUMETTE, « Les personnes pénalement responsables », Ascensio, Hervé and Decaux, Emmanuel and Pellet, Alain. Droit international pénal, Pedone, p 487 : « les criminels de moins de 18 ans sont présumés ne pas être dotés de suffisamment de lucidité ». Page 83 ! sur 111 ! fait de la forte présence d’enfants-soldats. Malgré la possibilité théorique de juger les enfants âgés de 15 à 18 ans, cela ne s’est jamais produit en pratique. Il convient de se demander ce qu’il en sera concernant la possible création d’un tribunal spécial international. La mise en place d’un tel tribunal, qui prendra plusieurs mois, ne pourra qu’être préjudiciel pour les enfants présents dans ces camps et dans ces prisons, vivant dans des conditions désastreuses et dont la vie est clairement en danger. De plus, s’ils ne sont pas jugés par un tel tribunal, que deviendront-ils sur place ? Le rapatriement des enfants européens est la seule décision susceptible d’assurer le respect de nos valeurs. Leur retour ne doit pas être une question politique mais une question de droit. Je crois que l’on peut désormais opposer à la raison d’État la seule souveraineté pour laquelle cela vaut la peine de risquer sa vie, celle qui mérite en toutes circonstances d’être défendue, respectée et sauvegardée – la souveraineté de la justice et du droit. – Pierre-Henri Teitgen Page 84 ! sur 111 ! Annexe Combattants étrangers et enfants dans l’« État islamique »en 2017227 227 Pays Total Enfants Allemagne ~900 56 Autriche <300 40 Belgique ~528 ~118 Bosnie-Herzégovine 148 81 France 1,910 460 Kazakhstan ~500 >200 (with women) Kosovo ~300 27 Pays-Bas 280 >90 Royaume-Uni ~850 50 Russie 3,417 >350 Suède 267 45 Source : The Soufan Center, op. cit., p.24. Page 85 ! sur 111 ! Bibliographie Section 1 – Documents officiels I. Conventions internationales et européennes Convention (III) de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 136. Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, adoptée le 12 août 1949, entrée en vigueur le 21 octobre 1950, RTNU., vol. 75, p. 288. Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, adoptée le 04 novembre 1950, entrée en vigueur le 03 septembre 1953, STE n°005. Convention de Vienne sur les relations consulaires, adoptée le 24 avril 1963, entrée en vigueur le 19 mars 1967, RTNU., vol. 596, p. 261. Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976, RTNU., vol. 999, p. 171 et vol. 1057, p. 407. Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, entré en vigueur le 3 janvier 1976, RTNU, vol. 933, p. 3. Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II), adopté le 8 juin 1977, entré en vigueur le 7 décembre 1978, RTNU, vol. 1125, p. 649. Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée dans sa résolution 39/26 du 10 décembre 1984, entrée en vigueur le 26 juin 1987, RTNU., vol. 1465, p. 85. Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989, entrée en vigueur le 2 septembre 1990, RTNU., vol. 1577, p. 62. Protocole n°4 à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention et dans le premier Protocole additionnel à la Convention, adopté le 16 septembre 1963, entré en vigueur le 1er novembre 1998, STE n°046. Convention (n°182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, Convention concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination, adoptée à Genève en 87ème session CIT le 17 juin 1999, entrée en vigueur le 19 novembre 2000. Page 86 ! sur 111 ! Statut de Rome de la Cour pénale internationale, adopté le 17 juillet 1998, entré en vigueur le 1er juillet 2002, RTNU., vol. 2187, p. 3. 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Sentence arbitrale Sentence arbitrale (Max Huber) entre les États-Unis et les Pays-Bas, dans le litige relatif à la souveraineté sur l’ile de Palmas (ou Miangas), 4 avril 1928, traduction de M. Ch. Rousseau dans « la Revue Générale de Droit International Public », 1935, p. 163. IV. Cour pénale international et tribunaux pénaux internationaux Affaire Lubanga, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, ICC-01/04-01/06. V. Cour de justice de l’Union européenne (anciennement Cour de justice des communautés européennes) Page 96 ! sur 111 ! Arrêt de la Cour de justice des communautés européennes, Van Gend & Loos (NV Algemene Transport- en Expeditie Onderneming van Gend & Loos contre Administration fiscale néerlandaise), demande de décision préjudicielle par Tariefcommissie - Pays-Bas. Affaire 26-62 (5 février 1963). VI. Cours nationales A. France Arrêt rendu par Conseil d’État, 2e et 7e chambres réunies, 26-04-2017, n° 394651. Tribunal administratif de Paris, ordonnance du 9 avril 2019, req. 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Page 108 ! sur 111 ! Table des matières REMERCIEMENTS ........................................................................................................................ 1 SOMMAIRE ...................................................................................................................................... 2 TABLE DES ABRÉVIATIONS ....................................................................................................... 3 INTRODUCTION ............................................................................................................................. 4 TITRE I. LE DROIT D’ASSISTANCE DES ÉTATS, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 12 CHAPITRE 1. UNE INGÉRENCE LÉGITIMÉE PAR LES RÉSOLUTIONS DE L’ORGANISATION DES NATIONS-UNIES ............................................................................................................................. 12 Section 1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international ................................... 12 §1. Le principe essentiel de souveraineté en droit international ........................................... 13 §2. Une souveraineté exclusive dont découle le principe de non-ingérence ........................ 15 Section 2. Des exceptions au principe de souveraineté, la légitimation de l’intervention en Syrie ........................................................................................................................................... 16 §1. La théorie de l’intervention d’humanité à la « responsabilité de protéger » de l’ONU . 17 A. La théorie de l’intervention d’humanité pour une protection de tout être humain ...... 17 B. La « responsabilité de protéger », une intervention sous contrôle de l’ONU .............. 19 §2. La lutte contre le terrorisme, un enjeu sécuritaire permettant davantage d’action de la part des États ......................................................................................................................... 22 A. La naissance de l’hyper terrorisme et la légitimation d’une ingérence .......................22 B. Une lutte ne permettant pas la protection effective des enfants ................................... 23 CHAPITRE 2. LE DEVOIR DE PROTECTION DES RESSORTISSANTS MINEURS LORS DE LA VIOLATION DE LEURS DROITS FONDAMENTAUX ............................................................................................... 25 Section 1. Un droit discrétionnaire de l’État souverain ........................................................... 25 §1. Une compétence personnelle établie envers ses ressortissants ....................................... 25 A. La naissance de l’obligation de respect du droit international en ses ressortissants .......................................................................................................25 B. Des protections spécifiques envers les individus par les États du fait de leur lien de rattachement ...................................................................................................................... 27 §2. Un droit dont les sujets sont les États .............................................................................. 29 A. Le retrait du droit à la protection consulaire face au droit européen ............................ 29 B. Le caractère discrétionnaire de l’utilisation de ce droit par les États ........................... 31 Section 2. Un droit remis en cause par l’intervention de l'autorité judiciaire .......................... 32 §1. Vers une obligation de rapatriement à la demande des individus, nouveaux sujets de droit international ........................................................................................................................... 33 A. Un droit dont les individus sont les sujets .................................................................... 33 Page 109 ! sur 111 ! B. Des décisions judiciaires nationales enjoignant les États à protéger leurs ressortissants mineurs .............................................................................................................................. 35 §2. Une incompétence de l’autorité judiciaire dont le fondement pourrait être remis en cause par la Cour européenne des droits de l’Homme..................................................................... 37 A. Une décision d’incompétence des juges administratifs français ................................. 37 B. La Cour européenne des droits de l’Homme en faveur d’un rapatriement des ressortissants européens mineurs ? .................................................................................... 39 CONCLUSION TITRE 1 ............................................................................................................... 40 TITRE II LA COMPLÉMENTARITÉ DES DROITS DE L’HOMME ET DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE, FONDEMENT DE L’OBLIGATION DE RAPATRIEMENT DES MINEURS NATIONAUX DES ÉTATS MEMBRES DU CONSEIL DE L’EUROPE ................................................................................................................................ 41 CHAPITRE 1. L’INDIVIDU, SUJET DE DROIT DE LA CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME ....................................................................................................................................... 42 Section 1. Une protection des individus placés sous la juridiction de l’État............................. 42 §1. La notion de juridiction, notion purement territoriale ..................................................... 42 A. La territorialité du droit de la Convention européenne des droits de l’Homme............ 43 B. Une interprétation relativement stricte de la notion de juridiction, la naissance de l’espace juridique de la Convention .................................................................................. 44 §2. La notion étendue de juridiction de la CEDH .................................................................. 46 A. Une juridiction extra-territoriale d’après une coopération entre États ........................ 46 B. Une juridiction extra-territoriale admise par un contrôle effectif d’un État même hors du territoire européen ........................................................................................................ 48 Section 2. L’émergence de nouvelles pratiques jurisprudentielles pour une meilleure protection des individus .............................................................................................................................. 51 §1. La pratique des obligations positives ............................................................................... 51 A. La naissance des obligations positives ......................................................................... 51 B. Une technique permettant une meilleure protection des droits de la CESDH .............. 53 §2. La protection par ricochet, vers une universalité des DH ? ............................................. 55 A. La protection par ricochet, une application quasi-universelle de la CESDH .............. 55 B. Un objectif de protection des êtres humains vers une application universelle des droits fondamentaux ? ................................................................................................................. 57 CHAPITRE 2. LE DEVOIR DE PROTECTION DES ENFANTS VICTIMES DE CONFLIT ARMÉ, L’APPLICATION DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE ET DU DROIT DES DROITS DE L’HOMME . 60 Section 1. Un droit de protection des enfants applicable au conflit armé syrien ..................... 60 §1. Des enfants, victimes d’un conflit armé caractérisé......................................................... 60 A. Un conflit armé internationalisé .................................................................................. 61 B. Un droit applicable flou face à la complexité du conflit .............................................. 64 Page 110 ! sur 111 ! §2. Des enfants victimes de violation du droit international humanitaire et des normes du droit international des droits de l’homme ............................................................................. 65 A. L’interdiction de l’enrôlement des enfants de moins de quinze ans ............................ 66 B. Le besoin de protection des enfants-soldats, victimes de crime international ............. 68 Section 2. Un rapatriement à effectuer dans l’intérêt supérieur des enfants ........................... 69 §1. Un rapatriement dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant .................................. 70 A. La notion d’intérêt supérieur de l’enfant relatif à son rapatriement ............................ 70 B. Le rapatriement des enfants avec leur mère ................................................................. 73 §2. Un rapatriement dans une optique de judiciarisation, la non prise en compte du statut de victime des enfants ................................................................................................................ 75 A. La nécessaire prise en compte du statut de victime des enfants .................................. 75 B. La nécessité de non-criminalisation des enfants .......................................................... 78 CONCLUSION TITRE 2 ................................................................................................................ 81 CONCLUSION FINALE ............................................................................................................... 82 ANNEXE .......................................................................................................................................... 85 BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................................... 86 TABLE DES MATIÈRES ............................................................................................................. 109 Page 111 ! sur 111 !