Droit Pénal Général - Ulk - Wane Bameme
Droit Pénal Général - Ulk - Wane Bameme
Droit Pénal Général - Ulk - Wane Bameme
FACULTé DE DROIT
INTRODUCTION
Une idée sur le droit pénal. Assassinat, viol, avortement, vol… ; tentative de meurtre,
participation criminelle, légitime défense etc. ; et dans un autre registre : amende, peine de mort,
détention préventive, parquet, tribunal sont autant de termes connus par lesquels chacun se fait
une petite idée de ce qu’est le droit pénal.
Le contraire ne manquerait pas de surprendre tant il est vrai qu’au travers des romans
policiers, des émissions sur la justice et l’actualité, le droit pénal imprègne toujours davantage le
quotidien. C’est à ce point d’ailleurs que l’étudiant qui s’inscrit à l’université, comme le
congolais lambda au village, réduit souvent, et on ne saurait lui en vouloir, le droit au seul droit
pénal.
Mais une telle idée, intuitive, partielle, parfois partiale, déforme le plus souvent la
réalité. Puisque, le droit n’est pas constitué uniquement du droit pénal. Plusieurs autres branches
du droit existent ; nonobstant l’importance de la matière en étude.
Différentes expressions pour une même réalité. Trois expressions sont régulièrement,
et indifféremment, utilisées pour désigner la matière en étude : le droit répressif, le droit criminel
et le droit pénal.
Les deux autres vocables, droit criminel et droit pénal ne semblent guère plus pertinents.
L’expression « droit criminel » renvoie au « droit des crimes » appréhendant ainsi la matière sous
sa dimension « normative » (la norme) ou « incriminatrice » (l’incrimination), alors que « droit
pénal »évoquant le « droit des peines » met l’accent sur la fonction « sanctionnatrice » de cette
branche du droit.
En somme, du strict point de vue des mots et de leur étymologie, il serait tentant, à
l’instar de certains auteurs étrangers, de réunir les deux termes pour retenir l’expression de droit
criminel et pénal qui, seule, fait pleinement apparaître la double dimension de la matière.
Sans doute, est-ce alors plus par commodité de langage que par véritable choix que
chacun utilise l’une ou l’autre de ces expressions.
Autrement, le droit pénal est l’ensemble des règles juridiques, qui organisent la réaction
de l’Etat, vis à vis des infractions et des délinquants. Le droit pénal est la même chose que le droit
criminel. Les deux expressions sont synonymes, nonobstant le fait que la première mette plus
l’accent sur la sanction pénale et que la seconde insiste sur le délinquant.
Cela étant dans le droit pénal, il y a en réalité différentes branches (droit pénal
substantiel : général, spécial ; et droit pénal formel : procédure pénale et organisation des
institutions juridictionnelles compétentes), mais ce qui nous intéresse à ce niveau, c'est le droit
pénal général.
Le droit pénal est la branche du droit qui répond au phénomène criminel. Puisqu'il faut
bien l'avouer, s’il n'y avait pas de phénomène criminel (Section 1), il n'y aurait pas de droit pénal
(Section 2).
On s'aperçoit vite que le phénomène criminel est inhérent à la société. C’est que toute
société s'accompagne d'un phénomène criminel.
Durkheim a choisi d'étudier comme phénomène social, le phénomène criminel. Pour lui
le phénomène le plus humain, c'est le crime. C'est quelque chose d'humain, d'important, qui
menace l'équilibre de la société.
Ces trois personnages interviennent. On est donc en présence de 3 intérêts, qui ne sont
pas conciliables. Parfois ce jeu, prend une tournure originale.
Le phénomène criminel (§1) est au centre de tout cela et suscite une réaction de la part
de la société (§2).
Pour qu'il y ait crime, il faut une violation d'un interdit, et même d'un interdit majeur. Et
pour qu'il soit interdit, il faut avoir conscience de l’interdit. Il en est ainsi lorsqu'un chat, ramène à
la maison la tête de souris. Nul ne retiendra un tel acte comme constituant un crime puisqu’il n’y
a pas violation d’un interdit. Il faut qu'il y ait une règle sociale, qui soit connue, et violée en
connaissance de cause.
Le viol est commis par la violence. Le vol d'un stylo est commis généralement par la
ruse. Le phénomène est la transgression d'interdit absolument essentiel, inhérent à la vie en
société. Le phénomène criminel est donc la violation de ces interdits.
La norme pénale est la norme qui interdit un comportement en prévoyant une peine.
Dans cette conception, le législateur fixe à l'avance les comportements interdits, et détermine à
l'avance la peine encourue. Il en est ainsi du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal qui
prévoit à l’article 79 l’infraction de vol, et son régime répressif à l'article 80 qui punit le coupable
d’une peine d’emprisonnement et d’une peine d’amende. Ce qui constitue la prévision du
législateur. Ainsi, du point de vue du droit, le phénomène criminel consiste en la violation d’un
texte d'incrimination.
Le droit pénal est caractérisé par un langage clair. Certaines législations (française,
belge…etc.) procèdent par la tripartition des infractions : le crime, le délit et la contravention. La
législation congolaise quant à elle emploi indistinctement les trois termes pour une même réalité :
l’infraction.
Le phénomène criminel étant proscrit, ne peut être que difficilement mesurable de façon
précise. La raison majeure est l’existence du « chiffre noir » dans toute société occidentale ou
d’Afrique.
Mais, il ne faut pas se méprendre, une telle idée paraît pour le moins inexacte dans
certaines sociétés et pour quelques infractions. On peut mesurer la criminalité. Le chiffre noir
n’est pas si important pour toutes les infractions. Il y a sans doute des infractions où le chiffre
noir peut être égal à 0.
Il en est ainsi des homicides volontaires commis dans certaines sociétés. En effet, un
cadavre humain est, dans certaines sociétés, difficilement dissimulable. Et, même lorsqu’on ne
parvient pas à le retrouver, les enquêtes peuvent relever l’absence, voire la disparition de
l’individu.
Il est certes vrai qu’en matière des atteintes à la liberté sexuelle, perpétrées contre les
mineurs de dix-huit ans, dans le cadre restreint de la famille, le taux du « chiffre noir » soit
important.
Néanmoins, en dépit du « chiffre noir », il est possible de se faire une idée sur
l’évolution de la criminalité, en se fiant aux données des statistiques criminelles.
Deux mesures peuvent être retenues à cet effet, à savoir : « les enquêtes de
victimisation » et « d'auto-confession ».
Mais, quel peut être le volume du phénomène criminel dans une société.
2. Le volume de la criminalité
C'est LOMBROSO qui apporte la 1ière explication avec un ouvrage : l'homme criminel.
C’était donc pour la 1ière fois qu’on s'est intéressé au criminel. Et donc Lombroso y avait décrit
les criminels, comme cela se faisait en 1960, (dessin). Il fit des statistiques et les a rangés par
catégories : le criminel-né, le criminel d’occasion et le criminel passionnel,... Il a ajouté des
facteurs physiologiques, pour pouvoir déterminer à l'avance la catégorie dans laquelle une
personne se trouvait. Si l’on avait affaire à un criminel né, il ne fallait pas que l’autorité attende la
commission de l’infraction, donc elle pouvait agir directement. Il soutint à cet effet le principe de
« mesure de sûreté ».
On est donc passé du crime au criminel. C’est que pour Lombroso, il y avait une
explication biologique à retenir. Il y avait donc une prédestination.
Autre explication : l’école socialiste de Marx et Engel. Il s’agit ici d’une autre analyse
des années 1880. Cette analyse vise à démontrer que le crime est un sous produit du capitalisme.
Ce qui voudrait dire en conséquence que dans un pays socialiste, il n’y aurait pas de crime. On
serait dans une société sans crime. C’est ainsi que la Russie (à l’époque de l’URSS) avait des
statistiques de criminalité égale à 0. Cependant, il y a lieu de reconnaître que cette analyse est
utopique. Néanmoins, elle est intéressante, pour sa vision sociologique.
a. Facteurs prédisposant
Plusieurs facteurs y sont retenus pour expliquer en partie le fait criminel, à savoir :
b. Facteurs déclenchant
Il en sera le cas de l’occasion. En effet, cette situation fait que l'on réfléchisse en termes
de risques et d’opportunités. C’est ce qui explique la baisse de la criminalité. L’agent s’interroge
pour savoir s’il peut prendre le risque de se faire attraper. Puisque plus on sent le risque, moins
on agit.
La criminologie s’en intéresse depuis fort longtemps. C’est difficile de lutter contre les
facteurs prédisposant, mais on peut agir sur les facteurs déclenchant. Les auteurs ont soutenu
l’illumination des rues, qui étaient des coupe-gorge. On agit de plus en plus sur les moments du
passage à l’acte. Mais cela ne marche que sur des personnes sensées, puisqu’une personne fragile,
ne s’interroge que peu sur les risques qu’elle encourt ; le cas des mineurs d’âge.
Une infraction donnera lieu à une peine lourde, même si le préjudice est minime ou
dérisoire. Il en est ainsi de la tentative de vol. Du point de vue civil, la victime n’aura pas subi un
grave dommage. Mais du point de vue pénal, la peine doit être lourde. Le critère de la peine est la
gravité de la faute ou de l’infraction, mais pas du dommage effectivement subi. Si la faute est
grave, la peine est grave. On parle alors de la « rétribution » ou de « l’expiation ».
La réaction peut avoir une fonction tirée de l’idée d’utilité. La société doit réagir
parce que c’est utile. Dans cette conception, la réaction sociale s’attarde sur l’avenir, pour que
cela serve à quelque chose.
La dissuasion collective. Il s’agit de faire peur à la société, afin d’empêcher le passage à l'acte.
C'est pour cela que dans la plupart des pays, la justice est rendue au nom du peuple et qu’en
principe, les procès sont publics de sorte à ce que quiconque puisse assister au procès devant
toute juridiction.
La dissuasion individuelle. Elle est ciblée et s’adresse à celui qui a déjà été condamné pour
qu’il ne récidive pas. C’est l'objet par exemple du sursis.
La réinsertion du suspect. l’action publique doit tendre vers la réinsertion. Le législateur
s’efforce de limiter la désocialisation. C’est ainsi par exemple que le législateur prévoit des
modalités d’aménagement de la peine, en organisant entre autres : pour la France la semi-
liberté qui permet de travailler la journée, et aussi pour la RDC, la liberté conditionnelle. Tous
ces éléments limitent la désocialisation. Puisque lorsqu’une personne désocialisée sort de la
prison, elle court le risque de n’avoir pour amis, que ceux qu’elle connu en prison.
La fonction de neutralisation. La réaction a aussi pour but ou pour effet, la neutralisation ou
l’élimination de la personne suspectée d’avoir commis une infraction. Il en est ainsi par
exemple de la servitude pénale à perpétuité et la peine de mort.
Il y a lieu d’en retenir deux, à savoir : le modèle pénal classique et celui criminologique.
C’est un modèle très ancien qui a été théorisé par un italien « Beccaria Cesare » né à
Milan en Italie le 15 mars 1738 et décédé le 28 novembre 1794. Ce jeune marquis milanais,
publia à l’âge de 26 ans le « Traité des délits et des peines », de façon anonyme, en 1764 et très
rapidement, il eu du succès.
Cet ouvrage est aujourd’hui connu dans tous les pays de la famille romano germanique,
à cause de l’importance du principe qu’il a formalisé à son temps, à savoir : « la légalité des délits
et des peines ».
On y trouve toute la philosophie pénale actuelle. C'était donc pour la première fois que
l’on réfléchissait au droit de punir, que l’auteur reconnaissait à la société. Le traité fut fondé à
partir du contrat social de Jean-Jacques Rousseau. L’auteur est parti du Contrat social pour
expliquer le droit de punir. Pour lui donc, certaines peines comme la peine de mort ne sont pas
vraiment utiles ni dissuasives. Qu’en fait ce qui compte le plus, c’est la rapidité de la peine,
modérément exécutée, plutôt qu’une intervention tardive.
Mais sa grande idée est la légalité criminelle : que l’on punisse seulement avec une loi. Il
faut qu’une loi pré-existe. La loi doit dire avant ce qui est permis ou non. Ceci s’oppose donc à
l’arbitraire du droit.
Avec ce livre, Beccaria va révolutionner le droit pénal. Le tout premier Code Pénal né en
France, portait d’ailleurs hommage à Beccaria, appelé code des délits et des peines. Même la
Russie stalinienne faisait semblant de respecter cette légalité criminelle.
Le point de départ de son raisonnement était le libre arbitre de chacun. L’homme est
donc libre d’agir ou de ne pas agir. La loi pénale prévoit à l’avance ce qui est interdit. Du coup
celui qui commet une infraction, en connaissance de cause, doit avoir choisi de violer la loi
pénale. Donc le délinquant doit être puni ou se voir infliger une peine, parce qu’il est responsable,
c'est-à-dire qu'il aura choisi aussi bien l’acte que sa conséquence. Globalement c'est à peu près le
système actuel dans la plupart des législations des Etats.
2. Le modèle criminologique
Ce sont trois positivistes italiens qui l’ont conçu : Lombroso, Ferri et Garofalo. Le
positivisme est conçu par un français Auguste Comte. Ses idées sont reprises par les trois italiens.
Le point de départ est l’anti-Beccaria. C’est à dire que l’homme n’est pas libre mais
déterminé, soit biologiquement pour Lombroso (nez, œil,...) soit socialement ou
sociologiquement, conception de Ferri (immigré ou non). Du coup, il n’est pas nécessaire
d’attendre la commission d’une infraction pour punir. On peut aussi régulièrement agir
préventivement. Le critère d’intervention n’est donc pas la commission d’une infraction, mais
l’état dangereux.
Ici, il n’y a pas d’idée de peine, mais l’application d’une mesure de sûreté tournée vers
l’avenir, donc la durée sera indéterminée. Elle durera le temps de l’Etat dangereux. En revanche,
il convient d’avouer qu’on ne peut pas diagnostiquer un état dangereux à 100% ; la psychiatrie
n’étant pas la mathématique.
Par ailleurs, on estime que ce système est dangereux puisque la mesure de sureté à
retenir est indéterminée dans le temps. Ce système fut transposé dans le régime de Staline, avec
le Goulag (organisme central gérant les camps des travaux forcés dans l’Union soviétique). Le
système n’a jamais été transposé à l’état pur : Il est construit sur la base du système pénal. Sur la
base d'un modèle juridique, donc sur la base de Beccaria.
Le Code Pénal, est finalement composé des incriminations, des comportements interdits.
Si un acte n’est pas prévu par le texte pénal, on devra relaxer la personne.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 10 | P a g e
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Il y a aujourd'hui dans certains pays comme la France, une deuxième vague d’influence
du positivisme. Elle est liée aux faits d’actualités médiatisées, aux lacunes du droit pénal
classique. Exemple : la rétention de sûreté et la surveillance de sûreté du 25 février 2008, ainsi
que la loi française du 12/12/ 2005, relative à la lutte contre la récidive, qui créait la surveillance
judiciaire.
En droit français, où elle est organisée, elle n'est possible que pour un certains nombres
d’infractions, limitativement énumérées dans leur code pénal. Et il faut qu’à la fin de la peine, des
experts diagnostiquent la dangerosité de l’intéressé et qu’une juridiction spécialisée prononce par
la suite cette rétention de sûreté. Elle est d’une durée d’un an. Mais qui est reconductible tant que
le besoin s’en fera sentir.
Elle suppose la commission de l'infraction. C'est une condition nécessaire, suivie d'un
certain nombre d'étapes.
Il y a l’étape policière : elle a pour but de rechercher les preuves, les suspects et les
infractions éventuelles. Il exigé que pendant cette étape, les personnes poursuivies soient
protégées.
Les droits de la défense sont renforcés. L’avocat aura droit d’assister son client sans
restriction. En effet, aux termes de l’article 19 alinéas 3 à 5 de la Constitution, on peut lire ce qui
suit en matière des droits de la défense : Le droit de la défense est organisé et garanti. Toute
personne a le droit de se défendre elle-même ou de se faire assister d’un défenseur de son choix
et ce, à tous les niveaux de la procédure pénale, y compris l’enquête policière et l’instruction
pré-juridictionnelle. Elle peut se faire assister également devant les services de sécurité.
Du côté de l’organe compétent, les pouvoirs sont plus étendus. Il peut poser différents
actes pouvant restreindre les droits des personnes pourtant présumées innocentes. Il en est ainsi
du placement de l’inculpé sous mandat d’arrêt provisoire d’une durée de cinq jours, sans
possibilité pour lui, sauf en droit pénal militaire, de le placer en détention préventive de quinze
jours. Le magistrat congolais du parquet est tenu, contrairement à son collègue militaire, de se
référer au juge pour la solliciter. Tandis que le magistrat instructeur militaire congolais peut
décider de détenir une personne avant que l’affaire ne soit portée devant une institution
juridictionnelle.
La troisième phase est celle de jugement : lorsque le dossier est suffisamment prêt, qu'il
a eu des interrogatoires, des débats, l’affaire sera renvoyée devant une juridiction de jugement (de
droit commun : tribunal de paix ou de grande instance, cour d’appel ou de cassation mais parfois
aussi cour constitutionnelle ; ou spécialisée : tribunal de commerce, juridictions militaires,
tribunaux pour enfants en République Démocratique du Congo).
Enfin, dans certains droits (le cas du droit français), il existe la phase d’application des
peines que nous souhaitons voir intégrée en droit congolais de procédure pénale.
Cette dernière, pourra constituer un autre procès qui devra commencer. Ici, l’enjeu ne
sera pas la culpabilité mais les modalités de l’exécution de la sanction pénale, déjà retenue et
prononcée contre le coupable définitivement condamné.
C'est la branche du droit dont l’objet est la réaction sociale au fait criminel. C’est la plus
ancienne branche du droit, la plus rigoureuse, dont les enjeux sont les plus importants, à savoir :
la vie, l’honneur, la propriété…etc.
Le droit pénal a connu une évolution considérable car il est l’une des plus anciennes
branches du droit.
Puisque l’on impose des règles, l’idée de justice apparaît. Néanmoins, elle reste privée
car la réaction à la criminalité conserve sa nature privée. La victime continue à dominer le
système privé.
Sous l'antiquité, le droit pénal n'était pas très développé. Le droit qui était bien construit
était le droit civil. Le droit pénal était oublié. En effet, le droit pénal suppose un État fort. Hors
sous l'Antiquité, les Etats étaient rarement forts et donc les législations pénales étaient assez peu
construites.
Ce qui est vrai c’est que les grandes infractions existaient. Le cas de l’infraction de vol,
d’escroquerie... etc. La procédure était plutôt accusatoire et la tendance était d’abandonner peu à
peu le caractère privé de la réaction à l’infraction.
En effet, c’est sous l'ancienne période que le droit pénal s’est construit. Car, c’est en ce
moment que l’Etat va progressivement apparaître. On est donc parti du Moyen-âge, avec
plusieurs fiefs, dans lesquels chaque « seigneur » créait son droit pénal. Et par la suite il y a eu un
droit pénal influencé par l’Église, qui avait un volet répressif et donc ce n’est pas innocent, si
c’est l’Église qui a inventé une réelle procédure. L’Église était une institution centralisée et bien
construite. C’est ainsi que l'Église fit application de certaines peines. Et de ce fait, elle influença
les juridictions seigneuriales et féodales.
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Ce droit pénal ancien qui s’est maintenu, présentait trois (3) caractéristiques non
négligeables :
Un droit pénal très cruel. Il s’est agi d’un droit pénal qui appliquait des châtiments corporels,
les actes de torture, les supplices du collier, les noyades...etc. ce droit pénal procédait ainsi
afin d’obtenir les aveux ou tous autres renseignements.
Un droit pénal sévère. Le droit ancien fut un droit dont l’échelle des peines, paraît
disproportionnée et donc extrêmement sévères. Il en est ainsi de la peine de mort qui devait
s’appliquer en cas de déplacement d’une clôture. La peine d'emprisonnement était presque
rare.
Un droit pénal irrationnel. Ce droit, comme dans certaines pratiques dans notre pays, était
véritablement irrationnel. Il en est ainsi de la sanction applicable à un cadavre humain et
même à une bête. Ce droit pénal était symbolique, ce qui faisait, qu'on organisait des procès à
des mannequins en paille, à des animaux, pour apaiser les tensions au sein de la population. Le
roi Néron a pu faire fouetter la mer. Encore aujourd’hui, il existe ça et là les infractions de
blasphème, de sorcellerie… etc. ; extrêmement difficiles à prouver au-delà de tout doute
raisonnable.
Ce code qui a inspiré au moins pour un demi-siècle plusieurs codes pénaux européens,
dont le code pénal belge de 1867 d’où est issu le décret congolais de 1940 ; pose et respecte le
principe de la légalité criminelle. C’est à dire qu’il souligne la nécessité de la prévision préalable
de l’incrimination avant sa commission. On doit donc écrire à l’avance ce qui est interdit et le
juge n’ayant que peu de pouvoir, ne statuera que sur ce qui est prévu1.
Du code pénal congolais. Le code pénal, sur lequel est fondé l’objet de notre
enseignement de droit pénal général, a été introduit en République Démocratique du Congo par la
colonisation.
En effet, lorsque vers la fin du XIXième siècle, le territoire du bassin du fleuve Congo fut
placé sous la responsabilité de Léopold II, roi des belges et roi souverain de « l’Etat Indépendant
du Congo » (1884-1908), puis au XXième siècle sous l’administration de la Belgique dans le cadre
du « Congo belge » (1908-1960) ; les autorités coloniales belges y ont naturellement transposé le
modèle pénal européen, avec quelques adaptations mineures.
1
. Ce code français qui aura de l’influence sur celui belge d’où viendra le code congolais reste néanmoins un code sévère,
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D’après « des récits légendaires, des textes sacrés et des œuvres littéraires », à ses
origines, l’infraction est une atteinte à l’ordre privé et la justice pénale est une justice privée2. En
effet, cette période autrement appelée temps de la guerre privée se caractérisait par une justice
rendue par le chef de famille ou du clan.
Celui-ci était doté du pouvoir omnipotent, c’est-à-dire, qu’il avait toute compétence et
pouvait connaître de toutes les infractions et prononcer toutes les sanctions jusqu’à la peine
capitale, voire l’expulsion du membre indiscipliné. Lorsque l’infraction était commise par un
individu qui n’appartenait pas à la famille, elle était vengée par un membre de la famille et cette
vengeance n’avait pas de limites car, elle pouvait aller jusqu’à l’anéantissement de l’agresseur.
Bref, ce n’était qu’une surexcitation de la famille.
Pendant cette période, la responsabilité pénale était collective en ce sens que tout
membre de la famille du délinquant répondait pénalement à l’infraction de leur membre.
Mais, il arrivait que cette vengeance aboutisse au versement d’une composition, c’est-à-
dire, une indemnité versée par la famille du délinquant à la famille de la victime afin d’empêcher
la vengeance. Cette procédure était en vigueur dans les deux petits moments ci-après : le temps
de la justice privée ; et le temps du pouvoir public sanctionnateur ou de la justice publique.
Par conséquent, on considère certains actes contre les personnes comme des atteintes
portées à l’intérêt de la collectivité. La société a commencé à organiser la répression de telle
manière que la réparation du préjudice social causé par l’infraction devenait de plus en plus
l’objet principal et la victime directe de l’infraction était renvoyée au second plan. Le meurtre
devenait une atteinte publique, car la société préférait ne pas vivre avec ceux qui ôtent la vie aux
autres. C’est ainsi que le procès pénal né de l’infraction pouvait se dérouler entre la société
représentée et le délinquant et ce, même en l’absence de la victime.
Le pouvoir du chef était limité et la vengeance devenait proportionnée à l’attaque. La
responsabilité naguère collective devenait individuelle dans l’institution d’abandon noxal. Cette
dernière mesure consiste dans le fait d’abandonner l’auteur de l’infraction dans les mains de la
famille de la victime qui est libre d’en faire ce qu’elle veut (le vendre, en faire un esclave, le
mettre à mort, etc.).
Cette institution était en vigueur à Rome, en Grèce, chez les hébreux, dans les lois
franques, dans les coutumes anglo-saxonnes et scandinaves. D’autres mécanismes ont vu le jour
pour limiter la vengeance privée : l’Etat s’est donné le pouvoir de fixer le montant de la
composition et de l’imposer aux parties. Il s’est donné, en outre, le pouvoir de partager cette
composition entre lui et la victime ; mesure préfigurant les origines de l’amende et des
dommages-intérêts.
1. Le fondement religieux
A un stade de son évolution, la répression a pris un fondement religieux. Les sociétés
primitives voyaient que l’infraction provoquait la colère des dieux. La peine aura pour rôle de
rétablir l’équilibre entre les dieux et les hommes. Le christianisme apporte les notions d’expiation
(pénitence) et l’amendement. Cependant, cela ne suffit pas à réduire les rigueurs du droit pénal
ancien.
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Cette période veut aussi dire que l’autorité sociale est constituée et repose dans les mains
d’un seul dépositaire qu’on appelle chef, roi, empereur, seigneur ou même grand vassal. Cette
autorité laïque va se considérer comme le bras séculier de la religion et va punir de manière
rigoureuse. Dans certaines sociétés, l’auteur d’un crime, loin d’être protégé par son groupe, est
abandonné, livré au groupe victime qui demeure libre d’en faire ce que bon lui semble.
Pour les crimes de l’ordre public, le moyen répressif comprenait notamment à Rome : la
mort par décapitation, par pendaison, par saut de la roche tarpéienne, par crucifixion, par combat
entre gladiateur et fauve, par noyade dans un sac avec un coq, singe ou vipère pour le parricide ;
travaux dans les mines ; exil ou déportation.
En conclusion à cette période, les auteurs ont noté qu’il n’y avait pas d’hygiène dans les
prisons ; qu’il y avait incertitude des lois (pas de principe de légalité) qui étaient nombreuses et
incomprises ; qu’il y avait incertitude des peines (le juge avait la latitude de les appliquer), la
sévérité et la cruauté des peines par leur disproportion avec la gravité des délits, la rigueur
excessive pour les crimes contre la religion et la monarchie, l’inégalité des peines selon les
conditions sociales des délinquants (les nobles avaient certains privilèges).
Cette période est caractérisée par une participation de l’Eglise et des penseurs à
l’administration de la justice pénale. Pendant cette période, il y a l’amélioration de la vie
carcérale, le droit pénal est codifié, les supplices ont disparu, la peine de mort est abolie pour des
nombreux crimes ; mais les cellules ont fait leur apparition et il y a la création des pénitenciers.
Le droit canon est pénétré par la philosophie pénale qui était orientée vers la
réhabilitation du criminel et le christianisme fort des grands thèmes de la charité et de la
rédemption favorisant le sentiment de pitié et de modération dans l’applicabilité de la peine.
En 817, le consul d’Aix La Chapelle pose les bases de l’emprisonnement cellulaire dans
les monastères.
3.
Georges VIDAL, Cours de droit criminel et science pénitentiaire, 9ième éd, Rousseau, Paris, 1949, p. 1.
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En 1764, l’italien Beccaria publia à 26 ans son traité des délits et des peines qui précipita
une révolution dans la législation criminelle. Pour cet auteur, le droit de punir de la société est la
somme des droits de chaque individu. Lorsque l’individu entre dans la société, il cède à celle-ci
son droit de défense et renonce à céder à l’instinct de conservation ou l’esprit de vengeance.
Le droit de punir est limité par la justice et l’utilité sociale et les peines ne peuvent pas
dépasser les limites de la stricte nécessité de défense sociale. BECCARIA exclut comme injuste
la torture, la peine de mort, l’atrocité des peines et des supplices et réclame premièrement la
nécessité de certitudes des peines, leur personnalisation, leur humanité et leur proportion aux
infractions.
En 1775, l’Anglais John HOWARD qui visita des prisons fit ce constat :
- la nécessité de l’hygiène et d’un régime alimentaire sain ;
- une discipline différente pour les prévenus et les condamnés ;
- la nécessité d’une éducation morale et religieuse des prisonniers ;
- la nécessité de l’éducation professionnelle et l’obligation au travail.
En 1810, le premier code pénal français voit le jour, il est appelé code napoléon et est
influencé par les idées de l’anglais Jérémie BENTHAM, mais l’autoritarisme de l’époque permet
la réapparition de quelques peines abolies en 1791. Ce code fixe la fourchette de la peine, c’est-à-
dire détermine le minimum et le maximum. Il influence le droit belge et aura des répercussions en
droit congolais.
D. La période pénitentiaire
Depuis 1830, l’épine dorsale du système pénal est représentée par les pénitenciers
cellulaires tels qu’ils existent encore aujourd’hui.
La doctrine positiviste animée par Cesare Lombroso et Enrico Ferri considère que la
priorité doit être accordée à la défense de la société au besoin par l’élimination du délinquant
pour le maintien de l’ordre social. Il faut l’éliminer parce qu’il est un danger pour cet ordre
social. Le libre arbitre est rejeté au profit du déterminisme.
En effet, pour cette doctrine, la criminalité est déterminée par certains facteurs (hérédité,
milieu, profession) positifs, déterminables. Pour les positivistes, le délinquant qui commet une
infraction est tenu d’en répondre non pas tellement parce qu’il est en faute, mais simplement
parce que la société doit se défendre. Lorsque la peine ne suffit pas, il faut assurer au délinquant
les mesures de sûreté.
C’est ainsi que pour LOMBROSO Cesare, FERRI Enrico et GAROFALO Raphaël, pour
commettre une infraction, il y a des facteurs endogènes, organiques et biologiques rattachés à la
constitution psycho-psychique du délinquant, comme il y a des facteurs exogènes naturels ou
sociaux inhérents en milieux physique et social dans lesquels a vécu ou vit le délinquant. Pour les
causes endogènes, on rencontre : le criminel né et le criminel passionnel. Pour les causes
exogènes, on trouve : le criminel d’occasion, le criminel d’habitude et le criminel aliéné.
Les criminels nés : Il existe trois catégories de criminels nés qui sont : D’abord, il y a
des grands criminels nés : ceux qui ont des signes anatomiques et morphologiques. Exemple :
Oreilles écartelées en forme d’anse, yeux enfoncés et obliques, pommettes saillantes, fronts
étroits, cheveux abondants, etc. Il y a ensuite des criminels qui ont des stigmates biologiques et
fonctionnels ; dans ce sens, il y a anomalie de la sensibilité tactique. Il y a enfin, ceux qui ont des
stigmates philosophiques : ce sont les criminels qui ont une insensibilité morale, l’imprévoyance
dans l’exécution et ils sont vaniteux.
Ces criminels sont caractérisés par leur précocité et leur incorrigibilité, leur
prédisposition innée restent et demeurent une menace pour la société.
Et d’après FERRI, il n’est pas un danger social futur. Loin de présenter une physionomie
de criminel né, il a généralement des beaux traits et présente une physionomie anti-criminelle.
Le criminel aliéné : les criminalistes italiens confondirent les fous moraux et les
criminels nés. Les fous moraux sont atteints d’une folie morale, maladie mentale causée par une
maladie congénitale et d’une façon acquise de l’absence du sens moral souvent couplé avec les
apparences d’un raisonnement normal. En fait, les vrais aliénés sont une exagération du criminel
né et leur seule différence et constituée par des signes pathologiques de leurs maladies.
Les criminels d’occasion : ce sont les circonstances qui les conduisent par suite de la
faiblesse du sens moral à commettre une infraction. La sanction à retenir contre ces criminels doit
éviter d’en faire des professionnels en évitant la promiscuité avec des prisonniers endurés. Pour
les mineurs de dix-huit ans, il conviendra d’appliquer la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l'enfant qui traite des mécanismes à préconiser à leur égard, lorsqu’ils sont
présumés auteurs d’une infraction.
Le système classique fondé sur le libre arbitre ayant échoué lamentablement, les italiens
en concluent que la société ne doit pas se laisser hypnotiser par le délit et le passé du délinquant,
mais doit plutôt se préoccuper du délinquant et de son présent. Il faut rappeler que dans le
système classique c’est la pénitence qui prévalait.
Le châtiment est remplacé par les sanctions et il convient de traiter les délinquants
comme des malades sociaux et même de leur assurer l’hygiène sociale en visant les causes de la
criminalité avec un système préventif généralisé. En effet, la politique criminelle d’un Etat doit
être la prévention de la commission des infractions parce que la prise en charge des délinquants
par l’Etat coûte très chère (le logement, la nourriture, l’hygiène, …). D’où la nécessité des
mesures préventives par rapport à la répression.
Le décret du 30 janvier 1940 proclame le code pénal congolais. Il reprend les décrets du
26 mai 1888 et du 27 avril 1889, lesquels avaient été coordonnés par arrêté du Secrétaire d’Etat
belge le 19 décembre 1896. Et monsieur WALEFFE qui était chargé du rapport sur le projet du
décret du 30 janvier 1940 décriait déjà à l’époque que le code pénal congolais est la partie la
moins bonne de toute la législation congolaise, alors que tant de lois du Congo se distinguaient
par leur originalité, leur caractère pratique que certains avaient devancé et de beaucoup, le
progrès de la science juridique contemporaine.
Sauf que ce code pénal est une œuvre sommaire accomplit hâtivement au début de
l’installation de l’Etat Indépendant du Congo et qui n’a reçu depuis que peu de modification
substantielles.
Depuis la deuxième guerre mondiale, apparaissent des idées nouvelles qui humanisent le
sort du délinquant, envisagent son traitement et les possibilités de sa réinsertion dans la société.
La peine de mort recule, les châtiments cruels tendent à disparaître parce qu’ils sont inhumains et
dégradants.
Toutefois, ce mouvement subit de plus en plus des critiques suite à l’échec de la prison
qui est unanimement admis. Un délinquant a commis une infraction, il doit être puni. Bref, il
s’agit d’un retour de plus en plus prononcé vers la dimension répressive et rétributive de la
sanction.
Néanmoins, en attendant de voir quelle ampleur prendre cette orientation, nous pouvons
affirmer que la resocialisation du délinquant demeure l’objectif le plus affirmé du droit pénal
contemporain.
En conclusion, on peut dire que l’histoire du droit pénal nous montre les progrès
accomplis dans ses aspects fondamentaux :
au niveau de la norme pénale : il y a l’avènement du principe de « légalité » des délits et des
peines ;
au niveau de l’infraction : elle cesse d’être une lésion privée pour devenir une atteinte à
l’ordre public intéressant toute la société ;
au niveau du délinquant : il doit être une personne responsable et donc amendable. La
responsabilité collective devient individuelle ;
au niveau de la sanction : elle ne peut plus se limiter à la simple vengeance ou à l’élimination,
mais doit permettre l’amélioration et la réinsertion sociale du délinquant. C’est pourquoi, elle
doit être individualisée.
Le droit pénal est différemment caractérisé. Mais, on retient en général qu’une division
classique permet de distinguer le droit pénal de fond du droit pénal de forme. Le premier est le
droit substantiel qui fixe le champ des interdits, détermine les conditions de la responsabilité
pénale et en précise les conséquences en termes de sanctions encourues.
Le second met en forme, en ce qu’il dicte l’application de la loi pénale au travers d’un
ensemble de règles qui identifient les suspects et témoins, définissent la manière de procéder (la
procédure à mettre en œuvre) pour la constatation des infractions, le jugement de leurs auteurs, et
l’indemnisation des victimes. Renvoyant ainsi aux règles applicables lors du procès, le droit pénal
de forme correspond à la procédure pénale, et englobe l’organisation et la compétence judiciaires.
Pour aussi habituelle et pédagogique qu’elle soit, cette distinction doit cependant être
nuancée. Il ne faudrait pas en effet se méprendre et considérer que le fond et la forme puissent
ainsi être rangés dans des tiroirs hermétiques. Bien au contraire. Car, et c’est bien là une des
particularités de cette matière par rapport aux autres disciplines de droit privé, le droit pénal, pour
s’appliquer, suppose, sinon la tenue d’un procès, du moins une intervention judiciaire. La
procédure pénale est, en d’autres termes, le trait d’union entre l’infraction et la peine.
Mais ce lien, étroit, transparaît également, de manière manifeste, dans le droit pénal
spécial qui, bien qu’habituellement présenté, aux côtés du droit pénal général, comme relevant du
droit substantiel, mêle les règles de fond et de forme.
Pour comprendre le droit pénal, le plus simple est de dire ce qu'il n'est pas avant de
traiter de ce qu’il comporte : l’environnement et le contenu du droit pénal.
Si, pour certains auteurs, l’expression « droit criminel » s’entend comme synonyme de
« droit pénal » ; pour d’autres, en revanche, elle a une portée plus large que celui-ci. Ainsi, est-il
soutenu que le « droit criminel » offre une « vision juridique du phénomène criminel » dont le
droit pénal n’est qu’une composante. La parenté des termes nous invite alors à associer le droit
criminel, les sciences criminelles et la politique criminelle. Si la filiation n’est pas parfaite,
chacun de ces termes tend vers un même objet d’étude : le phénomène criminel.
Cette dernière (la criminologie) se nourrit d’autres sciences, puisant ses sources dans la
biologie (biologie ou anthropologie criminelle), dans la sociologie (sociologie criminelle), dans la
psychologie (psychologie criminelle)4.
Le Droit pénal défend globalement les valeurs de la société, puisqu’il assorti ses
violations de sanctions pénales. Le Droit pénal entend assurer la protection de l’ordre public. Il se
situe donc au cœur des préoccupations politiques essentielles. La difficulté en la matière est celle
de toujours rechercher l’équilibre à établir entre deux valeurs qui sont la sécurité et la liberté ; les
deux étant nécessaires. Alors cet équilibre n’est pas assuré de la même façon selon le système
politique dans lequel on vit.
Dans un Régime totalitaire : c’est la société qui prime sur l’individu, dès lors l’interdit
pénal est la règle et la liberté l’exception. Ces régimes reposent sur l’idée que tout ce qui n’est
pas permis est interdit.
Dans un Régime libéral et ou démocratique : la société est régie par la notion d’Etat de
Droit. Ces sociétés sont dominées par le plus grand principe en matière pénale : la légalité. On
parle alors de la légalité des délits et des peines. Ce qui suppose qu’un individu ne peut être
condamné pour un fait qui ne constituait pas une infraction au moment de sa commission ; ni
subir une peine qui n’était pas prévue préalablement.
Elle est, en effet, une réflexion qui recherche à partir du phénomène criminel, une
identification des moyens qui doivent être mis en œuvre pour lutter contre la criminalité.
4.
Voir Raymond GASSIN, Criminologie, Dalloz, 6e éd., 2007.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 24 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Elle est l’action organisée par l’Etat dans le domaine de la lutte contre la criminalité. Il
faut noter que cette action ne se limite pas seulement à la répression. En plus des moyens
répressifs, cette action comprend les mesures préventives exercées soit sur le milieu social, soit
sur les individus dans le but de la lutte contre la criminalité.
Par moments, l’on préfère, assez justement d’ailleurs, l’expression politique anti-
criminelle au terme politique criminelle. La politique anti-criminelle correspond en effet, à
l’ensemble des procédés par lesquels le corps social organise la réponse au phénomène criminel.
Elle cherche en somme des remèdes qui contribuent à la protection de l’ordre social et
participent, comme tels, aux côtés de l’outil répressif, à la lutte contre la criminalité. À cet égard,
Enrico Ferri (professeur de droit pénal et sociologue, appartenant à l’école positiviste italienne)
avait par exemple suggéré de mettre en place des mesures de prévention, appelées substituts
pénaux, propres à faire régresser la criminalité. Ainsi, il affirmait qu’un bon éclairage des rues la
nuit était de nature à faire diminuer la criminalité.
Le droit pénal est donc l’un des instruments essentiels de la politique anti-criminelle,
mais il n’est pas toute la politique criminelle, c’est-à-dire, celle-ci englobe celui-là. A côté de la
politique criminelle, le droit pénal entretient des rapports avec d’autres disciplines et même celles
philosophiques.
Ces deux disciplines ont des rapports avec le droit pénal : la métaphysique et la morale.
Dans le cadre de la morale, la sanction est aussi morale. Une autre différence, et non la
moindre, est la source de la sanction : l’une vient de l’Etat et l'autre non.
Disons que le point commun est assez évident et repose sur la notion de jugement de
valeur. En effet, la morale et le Droit pénal sont amenés à poser un jugement sur le comportement
d’une personne par rapport à des valeurs.
Néanmoins, elles ne se confondent pas et Maurice Garçon l’avait très bien exprimé en
comparant la morale et le Droit à deux cercles concentriques qui se chevauchaient partiellement.
Cela signifie que sur un certain nombre de points, le droit rejoint la morale.
Concrètement, le champ d’action de la morale est à la fois plus grand et plus petit que le
champ d’action du droit pénal parce qu’il existe des faits qui sont moralement punissables, mais
qui ne sont pas pris en charge par le droit pénal et réciproquement. Il en est ainsi de la chasse des
gibiers pendant une période interdite, la conduite sans permis de conduire ou le fait pour un
conducteur qui voit le feu rouge de continuer à rouler. Ces faits sont punissables par le droit pénal
et non par la morale.
Les autres branches criminelles qui entretiennent des rapports avec le droit pénal sont :
la criminologie, la criminalistique et la sociologie du droit pénal.
- La criminologie
Elle se compose de :
Cela étant, les études de criminologie sont utiles par ce qu’elles permettent au droit
pénal de s’appliquer. Puisque la criminologie est essentiellement descriptive. Car, elle cherche à
comprendre comment lutter contre le phénomène criminel. Mais elle n'est pas là pour dire si c'est
bien ou mal, tâche qui revient au droit pénal.
- La criminalistique
Elle est une discipline composée parce qu’elle renferme plusieurs branches ayant pour
objet l’étude scientifique des faits qui ont entouré la commission de l’infraction et s’intéressant à
tout ce qui est trouvé sur le lieu du crime c’est-à-dire à toutes les traces de l’infraction (les
Cheveux, cartes,…etc.).
Il en est ainsi :
de la police technique et de la police scientifique qui se chargent de découvrir l’origine de tout
objet trouvé sur le lieu du crime notamment : d’un cheveu, d’une tâche de sang, de la
poussière ou de déterminer l’arme du crime et utilisent la balistique pour étudier le
mouvement des projectiles ;
de l’anthropométrie qui permet l’identification des délinquants par la description du corps
humain (photographies, mesures des parties ou organes humains) ;
de la dactyloscopie facilitant l’identification des malfaiteurs par l’examen des empreintes
digitales ;
de la cryptographie qui étudie l’écriture secrète utilisant les abréviations ou les signes
convenus ;
de la médecine légale qui permet de déterminer les causes ou l’heure de la mort, les
circonstances d’un viol, d’un avortement ou d’une blessure ;
de la balistique qui est entendue comme la science ayant pour objet l’étude du mouvement des
projectiles ;
de la toxicologie qui renseigne et détermine la nature et la quantité, c’est-à-dire la toxicité des
produits toxiques ayant entraîné la mort.
C’est une discipline qui s’intéresse à la détermination des causes et des conséquences de
l’élaboration de la norme pénale. On parle aussi de la sociologie criminelle. Elle étudie donc les
facteurs criminogènes dans la société. La sociologie du droit pénal explique les conditions dans
lesquelles est né un texte pénal. Elle apporte un appui important au droit pénal notamment dans le
domaine de l’interprétation d’un texte pénal.
Ce rapport entre le droit pénal et les autres disciplines juridiques (droit constitutionnel,
droit civil, droit administratif,…etc) se régularise par la spécificité de la fonction exercée par le
droit pénal qui consiste dans la défense de l’ordre social.
Cette fonction de défense de l’ordre social confère au droit pénal deux caractéristiques
significatives (caractéristiques répressive et protectionniste) et de ces caractéristiques se dégage
l’autonomie du droit pénal.
Le droit pénal se présente comme une mosaïque constituée des pièces et ces pièces sont
à la fois diverses et unies. On parle alors de la diversité et de l’unité du droit pénal.
Les diverses branches qui forment le droit pénal. Tout au long de son histoire,
certaines branches se sont détachées du droit pénal pour déclarer une certaine autonomie. Ces
branches qui se sont détachées peuvent être regroupées en deux catégories : les branches
traditionnelles et celles nouvelles.
On retrouve le droit pénal substantiel et formel. Le premier est composé du droit pénal
général et du droit pénal spécial. Le second n’a que la procédure pénale ainsi que dans une
moindre mesure des règles de l’organisation et de la compétence des organes de justice en
matière pénale.
Le droit pénal substantiel. Il est principalement porté par le décret du 30 Janvier 1940
portant Code Pénal, tel que modifié et complété à ces jours. Il est aussi retrouvé dans des textes
pénaux techniques. Le droit pénal substantiel se rapporte à l’étude des composantes et régime de
la répression de toutes les infractions. Il est constitué du droit pénal général et du droit pénal
spécial. Il va falloir les présenter séparément.
Droit pénal général. Il étudie les règles communes à toutes les infractions ou à tout
groupe d’infractions ; règles définissant de manière générale les grands principes de la
responsabilité pénale : la notion et les composantes de l’infraction, la personne punissable, les
causes d’exonération, les règles qui organisent la fixation et l’exécution des peines.
Le droit pénal général est constitué de deux grandes articulations : l’étude de l’infraction
et de la peine. Certains auteurs détachent de ces deux grandes composantes l’analyse de la
responsabilité pénale et d’autres ajoutent même l’analyse de la preuve, constituant en réalité une
étude à part entière et intéressant le droit pénal formel.
Le droit pénal général, traite donc des conditions générales de la répression. Procédant
d’une démarche synthétique, il regroupe l’ensemble des règles qui constituent le fond commun de
toutes les infractions ou de tout groupe d’infractions.
Part invariable du droit pénal, encore que des exceptions ne manqueront pas d’être
ultérieurement soulignées, ces règles, nombreuses, relatives, pour l’essentiel, à la « légalité », la
complicité, la tentative, la culpabilité, l’imputabilité ou encore à la nature et au régime des peines,
trouvent place, en toute logique, dans le livre 1ier, de différents Code pénaux des Etats.
De ce qui précède, il ressort que le droit pénal s’articule autour de deux notions clefs,
l’incrimination et la sanction. Comme il a été écrit avec ironie, le droit pénal tourne en rond :
« La peine est un mal, que le Pouvoir, au nom de l’intérêt public, inflige à la personne coupable
d’une infraction. Mais qu’est-ce qu’une infraction ? Un comportement interdit par la loi, sous la
menace… d’une peine ». Entendu strictement, le droit pénal gouverne en effet « l’ensemble des
règles ayant pour objet de déterminer les actes antisociaux, de désigner les personnes pouvant
être déclarées responsables et de fixer les peines qui leur sont applicables ». À la lecture d’une
telle définition, il est tentant d’admettre le droit pénal dans la cohorte des matières formant le
droit public. Mais, on y reviendra.
Le droit pénal spécial apparaît ainsi comme une discipline analytique qui procède par
inventaire, par énumération, à l’image, souvent évoquée, d’un catalogue. C'est donc la
description au cas par cas des comportements interdits par la norme pénale : le vol, l’escroquerie,
l'assassinat...etc. L’on convient à soutenir que le droit pénal spécial précède historiquement le
droit pénal général parce que dès que les humains ont convenu de vivre ensemble, le premier
devoir pour cette société a consisté à définir les comportements qui violent les règles vitales de la
société.
Ces règles vont de l’enquête sur l’infraction, l’instruction, le jugement, l’exercice des
voix de recours mais aussi les règles de l’application de la peine. L’ensemble de ces règles forme
la procédure pénale. de manière générale, elle est organisée par le décret du 06 Aout 1959 portant
Code de Procédure Pénale.
Par ailleurs, pour des matières bien précises, d’autres textes prévoient différentes
organisations et attributions de certains organes, mais aussi les procédures à suivre quant à ce :
- La loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code Judiciaire Militaire ;
- La loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant ;
- La loi-organique n°13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la
Cour de Cassation ;
- La loi-organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et
fonctionnement de la Cour Constitutionnelle ;
- La loi n°002/2001 du 03 juillet 2002 portant organisation, fonctionnement et
compétence des tribunaux de commerce.
Au niveau international et communautaire africain, on peut citer :
- Le traité conclu dans la ville de Rome le 17 juillet 1998, ratifié par la République
démocratique du Congo le 30 mars 2002, portant Statut de la Cour pénale Internationale.
- Le règlement de procédure et de preuve devant la cour pénale ; ainsi que
- Le traité de Port Louis en Ile-Maurice du 17 octobre 1993, ratifié par la République
démocratique du Congo le 27 juin 2012, modifié le 17 Octobre 2008 créant
l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, lequel crée en
même temps la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ayant notamment la
compétence de connaitre des affaires se rapportant aux Actes Uniformes comportant des
incriminations.
Ce sont des disciplines nées du développement du droit pénal général, car elles faisaient
d’abord partie de ce droit. Elles se structurent en deux articulations : le droit pénitentiaire et la
science pénitentiaire ou la pénologie.
Droit pénitentiaire. C’est l’ensemble des règles qui régissent la vie carcérale des
détenus ; c’est-à-dire des règles qui fixent, au niveau de l’établissement pénitentiaire, le régime
juridique et administratif des sanctions prévues par le droit pénal. C’est l’aspect institutionnel du
traitement.
C’est ainsi que sont nés : le droit pénal du travail, le droit pénal des affaires, le droit
pénal de l’économie réglementant le prix, le droit pénal financier, le droit pénal de
l’environnement régissant le domaine de l’urbanisme, le droit pénal de la construction, le droit
pénal électoral…etc.
Parmi les disciplines nées du développement de l’idée commune à toutes les branches
traditionnelles, on peut citer : le droit pénal des mineurs, le droit pénal militaire, le droit pénal
international et le droit pénal comparé.
Il s’agit du droit pénal applicable aux mineurs de dix-huit ans. Ce droit est né de la
nécessité d’adapter aussi bien sur le plan de fond que sur le plan de la forme, la réaction sociale
contre les infractions, à la situation particulière des mineurs délinquants. En droit congolais, nous
relevons que le décret du 06 décembre 1950 sur l’enfance délinquante, modifié par l’ordonnance-
loi n°78-016 du 04 juillet 1978, a déjà été abrogé et la matière se trouve désormais organisée par
la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant, qui a été promulguée et publiée
au Journal officiel de la République et est entrée en vigueur à la même date.
A notre avis, ce texte consacre les principes généraux applicables particulièrement dans
le cadre répressif impliquant les mineurs de dix-huit ans. On y trouve notamment les règles de
protection des mineurs victimes et celles applicables aux mineurs délinquants. Ce qui nous
permet d'évoquer déjà, en attendant les conclusions plus élaborées d’une analyse en cours,
l’avènement d’un droit pénal congolais autonome, propre aux mineurs5.
Le droit pénal militaire est une branche spéciale du droit criminel ayant pour objet de
prévenir par la menace et au besoin de réprimer par l’application de différentes sanctions (peines
ou mesures de sûreté), les actions ou inactions susceptibles de troubler l’ordre public dans les
rangs des forces armées de la République. Il présente cette particularité d’avoir une organisation,
une compétence et une procédure propres et variables selon les contingences (période du temps
de paix ou période troublée)6.
Défini comme « la branche du droit criminel qui règle l'ensemble des problèmes pénaux
dépassant les limites des compétences nationales », le droit pénal international est aujourd'hui
une matière prêtant à confusion avec le droit international pénal, laquelle lui est à la fois proche
et distincte.
Il est né de l’idée qu’il convient d’organiser une sorte de coopération entre les Etats pour
lutter avec efficacité contre le phénomène criminel, lequel phénomène ne fait que
s’internationaliser.
Ce premier élément complique en fait la répression parce qu'il met en présence plus d’un
État. Abordant dans un premier temps la compétence de la loi pénale nationale de façon à
déterminer précisément les actes et les personnes susceptibles d'être jugés par les juridictions
pénales nationales, cet ensemble traite ensuite de l'entraide pénale internationale (ensemble des
actes et procédures par lesquels un État apporte son concours aux poursuites pénales engagées
par un autre État). Il aborde enfin l'effet des jugements répressifs étrangers pour déterminer dans
quelle mesure ceux-ci peuvent être positivement ou négativement pris en compte par un autre
État.
5. Nous espérons que la thèse de Ghislain-David KASONGO LUKOJI Ghislain-David, sur l’essai de construction d’un droit
pénal des mineurs congolais, en préparation à Aix-Marseille Université en France, clarifiera la question en droit congolais.
6. Norbert LIKULIA BOLONGO, Droit Pénal militaire Zaïrois, T1, l’organisation et la compétence des juridictions des Forces
Armées, Paris, LGDJ, 1977, p. 1
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 33 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Le droit international pénal est une matière plus récente. Il se concentre exclusivement
sur la répression des crimes internationaux et sur les moyens nécessaires à la répression de ces
crimes. Il relève davantage du droit international public et sa conception est liée à la justice
rendue par les juridictions internationales (tribunaux militaires de Nuremberg et Tokyo, tribunaux
pénaux internationaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, la Cour Pénale
Internationale), mais aussi purement nationales voire celles internationalisées (tribunaux pénaux
spéciaux de sierra-Léone, du Liban, du Timor leste, du Cambodge, de l’Irak… etc.) sur les crimes
internationaux (le génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre...etc.).
Il y a pour objet la confrontation de divers droits répressifs dans le but d’en tirer les
enseignements ou des emprunts à des fins législatives ou scientifiques. Il est considéré comme
source d’un droit pénal universel.
L’unité de ces différentes branches est réalisée par deux facteurs qui sont communs à
toutes ces branches. Ces facteurs sont l’objet et la politique législative qui sont les mêmes pour
toutes ces branches.
L’objet de toutes ces branches est, en effet, d’une part le crime (l’infraction) et d’autre
part la sanction pénale ou plus généralement la lutte contre la criminalité. La politique législative
est la conception générale que le législateur se fait du phénomène criminel et de la réaction
sociale.
1. DROIT SANCTIONNATEUR
Le droit pénal s’applique pour punir. Et c'est sa spécificité, c'est ce qui fait sa force,
c'est aussi ce qui explique qu'il y a du droit pénal partout. On va faire appel au droit pénal, car il
est sanctionnateur. C’est ce qui fait qu’il y a aujourd'hui explosion des droits pénaux techniques.
Exemple : droit pénal des affaires, du travail, de la consommation, de l'environnement,
commerce... etc.
Il est de ce fait un Droit interventionniste. L’on constate ainsi que le droit pénal
intervient dans les domaines des autres branches du droit afin de protéger les valeurs
fondamentales de la société.
Gendarme du droit, le droit pénal qualifié par certains auteurs de droit répressif vient au
secours de certaines règles de fond d’une grande importance sociale que les simples prescriptions
civiles sont, en l’état actuel des mœurs, impuissantes à faire respecter. Dès lors, cette position
d’interventionniste du droit pénal dans les domaines prioritairement réservés aux autres branches
de droit en fait le droit des droits.
Lorsque les règles édictées en vue d’une vie équilibrée en société ne suffisent pas pour
leur respect, le droit pénal intervient avec sa gamme de sanctions contraignantes : la peine de
mort (comme c’est le cas dans les pénaux de certains Etats), les travaux forcés, l’emprisonnement
à perpétuité ou à temps, l’amende, etc.
2. DROIT MIXTE
Par certains aspects, le droit pénal évoque le droit public, parce que la peine est infligée
par la société au nom de l'Etat. Ceci est vrai puisque d’une part c'est l'Etat qui met en prison un
condamné. Le parquet représente la société et par conséquent, l'Etat.
D'un autre côté, la plupart du temps l'infraction intervient entre deux personnes privées :
le cas de monsieur A qui tue sa femme B. Au départ, le contentieux est privé. Ensuite et surtout,
le droit pénal, relève des juridictions judiciaires, non pas celles administratives.
Il est pourtant une lapalissade connue de tous que d’une part, le droit pénal ressemble au
droit public dans l’autorité sanctionnatrice, mais que d’autre part, il se rapporte au droit privé
dans les préjudices causés. A cet effet, quelles peuvent être les conséquences de ces
caractéristiques du droit pénal ?
Il existe encore un débat autour de cette autonomie du droit pénal. Une partie de la
doctrine soutient la thèse du classement du droit pénal dans le droit public en avançant quatre
arguments :
le droit pénal traite des rapports entre l’Etat et les individus ;
la répression des infractions est une fonction de la souveraineté de l’Etat ;
lorsqu’une infraction est commise, ce sont les organes de l’Etat qui sont chargés de poursuites
et de la répression ;
l’auteur de l’infraction est poursuivi et jugé au nom de la société (l’Etat) et la sanction
intervient essentiellement pour rétablir l’ordre social troublé.
Une autre partie de la doctrine classe le droit pénal dans le droit privé et avance
également quatre arguments :
le droit pénal poursuit essentiellement comme objectif la défense des droits subjectifs des
individus (par exemple droit au patrimoine) ;
une des préoccupations majeures du droit pénal est le souci de la protection de la victime de
l’infraction ;
ce sont les mêmes magistrats qui composent les juridictions civiles et répressives en vertu du
principe de l’unité des juridictions civiles et pénales ;
dans nombreuses hypothèses, le droit pénal met en œuvre les concepts du droit privé, et pour
la définition de ces concepts, le droit pénal se réfère souvent au droit civil.
La troisième thèse est intermédiaire : c’est la thèse que nous soutenons, laquelle affirme
avec justesse, que le droit pénal ne peut être classé ni dans le droit public ni dans le droit privé et
ceci pour deux raisons :
d’abord, il faut remarquer que chacune de deux premières thèses avance des arguments qui,
pour la plupart, sont défendables. Les deux premières thèses s’annulent ;
ensuite, précisément à cause du rôle sanctionnateur qu’il joue vis-à-vis des autres branches
juridiques, il apporte son soutien tant au droit public qu’au droit privé.
Par conséquent, aucune de ces deux disciplines ne peut s’accaparer du droit pénal à titre
exclusif.
3. DROIT AUTONOME
L'autonomie du droit pénal est importante. Bien sur, le droit pénal a ses notions, ses
règles, mais chaque droit a ses notions et ses concepts...
L'autonomie du droit pénal signifie que le droit pénal est libre d'adopter ses propres
définitions pour d'autres notions empruntées à d'autres droits (public ou privé). Le droit pénal a
plusieurs occasions d’exprimer cette autonomie notamment en matière d’interprétation de la loi
pénale.
Il arrive souvent que le droit pénal utilise des termes empruntés soit au droit public, soit
au droit privé sans pour autant leur accorder la même signification qu’ils ont dans leurs
disciplines respectives. D’abord, il en est ainsi du terme Fonctionnaire. En effet, en droit
administratif, c’est tout agent qui entre dans le personnel de carrière du service public de l’Etat.
C’est ainsi qu’en droit administratif, le ministre n’est pas fonctionnaire. En revanche, en droit
pénal, est fonctionnaire tout agent public (y compris le ministre). Ensuite, l'on peut invoquer la
définition du domicile.
Cette dernière vient du droit civil. Mais par la suite, on a dû créer l'infraction de
violation de domicile. En droit pénal donc, le domicile, c'est tout endroit ou l'on se sent chez soi.
Cela veut dire que les 3 maisons sont des domiciles au sens du droit pénal. Une tente aussi est un
domicile. Donc sa définition est autonome en droit pénal.
Le droit pénal est cependant limité. L'autonomie du droit pénal est quand même en
recul, notamment sur le point de l'action civile : l'action civile est l'action en réparation du
dommage causé par une infraction pénale. Exemple : je donne un coup de point, j'aurais commis
une infraction et aussi une faute civile, pour avoir cassé les lunettes de la victime. L'action civile,
répare le préjudice subi par la victime. On peut l'exercer devant les juridictions civiles
principalement et pénales accessoirement.
Le Droit Pénal est l’une des branches du droit qui assurent la protection des valeurs
fondamentales au sein de toute société. En fait, la vie, l’intégrité physique, la liberté, l’honneur, le
patrimoine, la vie professionnelle, le crédit dans les affaires, la gloire dans la cité, la foi publique,
la paix et la sécurité de l’humanité…etc, sont efficacement protégés par le droit pénal.
Autant dire que le droit pénal constitue une arme de gros calibre destinée à maintenir le
déroulement des activités et des entreprises des membres de la collectivité dans un cadre régulé et
ordonnancé. Il est le dispensateur de certitude et de sûreté. C’est donc une discipline qui assure
essentiellement le fondement de tout système dans un Etat. On ne peut concevoir une certaine
garantie des droits de l’homme sans le droit pénal. On ne peut concevoir un Etat démocratique
sans le droit pénal.
On ne peut concevoir un Etat de droit sans le droit pénal. C’est le soubassement de tout
système juridique et étatique. Le droit pénal congolais est dès lors appelé à établir la protection,
l’égalité et l’affermissement des droits des pauvres et faibles face aux riches et aux puissants.
Au sein de l’Etat, le droit pénal a pour rôle et mission de base, non seulement de
concourir à la protection des personnes et de leurs biens, en garantissant ce que la société retient
et considère comme valeurs fondamentales ; mais aussi de favoriser et de promouvoir par la
certitude de sa sanction, le développement harmonieux de la société dans un traitement égalitaire.
Puisqu’en effet : Que l’on soit puissant ou misérable, le traitement que réserve le
système pénal aux justiciables est le même, il n’y a rien de plus égalitaire, dans les prétoires que
le banc de l’infamie7.
Il faudra donc que ce droit international pénal devienne beaucoup plus autoritaire,
contraignant et surtout applicable à tous de manière égalitaire avec célérité mais sans la moindre
sélectivité de tous ses justiciables : personnes à poursuivre et même victimes à indemniser.
Comme on peut le constater, le droit pénal diffère nettement des autres branches du
droit. Il ne faut donc pas le considérer au même titre que toutes les autres branches du droit. Il est
la branche fondamentale du droit :
Il tient à la protection de la vie de l’homme en réprimant sévèrement le meurtre,
l’assassinat, l’empoisonnement, etc ;
il tient à la sauvegarde du (foyer) mariage en réprimant la bigamie, la polyandrie,
l’adultère, etc ; et ceci tant pour l’intérêt du couple que pour celui de la société ;
le droit pénal protège l’ordre de famille en sanctionnant l’avortement, la propagande
antinataliste, mais peut-être aussi la grossesse forcée ;
il tient à la sauvegarde de la liberté sexuelle en punissant l’attentat à la pudeur, le viol
commis sur une personne, les outrages publics aux bonnes mœurs, etc ;
il assure la protection de la liberté de mouvement en sanctionnant l’arrestation arbitraire,
la détention illégale, etc ;
il protège la propriété d’autrui en réprimant le vol, l’escroquerie, l’abus de confiance, le
cel frauduleux, le recel frauduleux, etc ;
Le but du droit pénal est de faire respecter les devoirs naturels de base, ceux qui nous
interdisent de nuire aux autres dans leur vie et leur être, ou de les priver de leur liberté et de leur
propriété ; et les peines doivent servir à cette fin.
Les peines ne sont pas simplement un système de taxes et de charges qui donnent un
prix à certaines formes de conduite et qui, ainsi, guident le comportement des hommes pour leur
avantage mutuel. Il vaudrait infiniment mieux que les actes interdits par le code pénal ne fussent
jamais commis.
Mais, la tendance à commettre de tels actes est la marque d’un caractère mauvais et,
dans une société juste, les peines ne seront infligées qu’à ceux qui montrent de tels défauts. La
société doit donc se défendre et l’une de ses armes favorites, c’est le droit pénal.
Et comme développé ci-dessus, tantôt le droit pénal agit de manière autonome en son
sein en définissant les infractions et les peines qui lui sont applicables ; mais, tantôt ce droit pénal
agit comme sanctionnateur des règles relevant des autres disciplines juridiques. Il va falloir
développer ces différentes caractéristiques du droit pénal dans cet enseignement.
Le droit pénal est parfois appelé droit criminel en raison de la division tripartite que
connaissent d’autres pays. Ces deux expressions s’utilisent indifféremment et sont donc
synonymes. Elles signifient donc la même chose à la seule différence que la première met en
évidence la peine, et la seconde, le crime.
Le droit pénal a reçu plusieurs définitions à travers l’histoire. D’où, la définition du droit
pénal est à la fois difficile et multiple. Ceci s’explique par le fait que le droit pénal comporte
divers aspects qu’il n’est pas toujours facile à ramasser dans une définition étant donné qu’on y
trouve des aspects relatifs à l’infraction, à la peine et au délinquant.
Henri DONNEDIEU DE VABRES définit le droit criminel comme l’ensemble des lois
qui réglementent dans un pays l’exercice de la répression par l’Etat8.
En d’autres termes, cette définition ne rend pas compte des lois de défense sociale dont
le rôle n’est pas essentiellement de réprimer les infractions, mais plutôt d’isoler les délinquants
dangereux ou de les soigner lorsqu’ils présentent quelque anormalité.
Roger MERLE et André VITU soutiennent quant à eux que : le droit pénal est constitué
de l’ensemble des règles juridiques qui organisent la réaction de l’Etat vis-à-vis des infractions
et des délinquants, et qui traduisent en normes obligatoires les solutions positives appliquées par
chaque nation au problème criminel9.
Ces auteurs ne parlent donc pas de la répression. A la place de la répression, ils utilisent
le concept de réaction. Dans la réaction sociale, on rencontre tant la répression que la prévention.
Ces auteurs ont ainsi estimé que la meilleure façon de définir le droit pénal était d’en
décrire le contenu de manière détaillée.
Georges MINEUR considère que : Le droit pénal est la seule base possible d’une bonne
justice répressive. Celle-ci ne peut se satisfaire ni des vagues notions personnelles de l’équité ni
surtout des recherches des fins administratives d’un bon rendement économique ou d’un ordre
basé sur une crainte aveugle de répression10.
Nous estimons avec LIKULIA BOLONGO Norbert que le droit pénal, est la branche
spéciale des sciences pénales et criminologiques ayant pour objet de prévenir par la menace et
au besoin, de réprimer par l’application des différentes sanctions : peines ou mesures de sûretés
; des actions ou inactions susceptibles de troubler l’ordre public au sein d’une société12.
8.
Henri DONNEDIEU de VABRES, Traité élémentaire de droit criminel et de la législation pénale comparée, 3e éd., Paris, n°1.
9.
Roger MERLE et André VITU, Traité de droit criminel, Cujas, Paris, 1967, n°85.
10.
Georges MINEUR, Commentaire du droit pénal congolais, 2e éd., Larciers, Bruxelles, 1953.
11.
NYABIRUNGU-mwene-.SONGA, Traité de droit pénal général congolais, D.E.S. éd., Kinshasa, RDC, p. 15.
12.
Norbert LIKULIA BOLONGO, Droit Pénal militaire Zaïrois, T1, l’organisation et la compétence des Forces Armées, Paris,
LGDJ, 1977, p. 1
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Il apparaît de cette dernière définition que l’étude du droit pénal doit se faire autour de
deux éléments essentiels ci-après : l’infraction et la sanction pénales.
D’où :
PREMIERE PARTIE
L’INFRACTION
Trois questions seront posées :
- Quelles sont les sources de l’infraction en droit pénal ;
- Comment se présente l’infraction ;
- Qui peut être auteur d’une infraction en droit pénal congolais.
Titre Premier
LA SOURCE DE L’INFRACTION :
La norme pénale
Le droit pénal est la discipline normative par excellence. Seule la « loi » en détermine
l’étendue et les limites, et les autres sources du droit, à savoir : la jurisprudence, la coutume,
l’équité, même les principes généraux du droit, si utiles dans l’interprétation des textes, n’ont
aucun rôle créateur dans la détermination des infractions et des sanctions.
C’est pourquoi, il est impérieux de connaître cette norme pénale (loi pénale) comme elle
est formulée dans les textes pertinents, d’en dégager le sens et la portée véritable ainsi que les
conditions de sa régularité afin d’éviter des extensions abusives ou des restrictions qui
conduiraient à l’impunité, et enfin, d’en déterminer le champ d’application aussi bien dans le
temps que dans l’espace.
Il existe d’une part les normes du droit pénal commun (sous-section 1) et de l’autre
celles du droit pénal particulier (sous-section 2).
Ce code, avec des lois additionnelles et modificatives, constitue l’essentiel du droit pénal
commun congolais. Il comporte deux livres :
Contenu du livre premier. En ce jour, le code pénal actuellement en vigueur dans notre
pays comporte, dans ce livre premier relatif aux infractions et à la répression en général,
différentes règles générales présentées sous les dix sections suivantes :
Section I : Dispositions générales ;
Section II : Des peines : la peine de mort, les travaux forcés, la servitude pénale, la
confiscation spéciale, l'obligation de s'éloigner de certains lieux ou d'une
certaine région ou d'habiter dans un lieu déterminé et la mise à la disposition
du Gouvernement
Section III : Des restitutions et des dommages-intérêts
Section IV : Des circonstances atténuantes ;
Section V : Du concours de plusieurs infractions ;
13.
Il s’agit du décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal tel que modifié et complété à ce jour. Les 42 articles du livre premier
sont compris dans dix sections présentés à la page .
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Cette structure pose deux sérieux problèmes, à savoir : l’incohérence et des lacunes. Les
règles relatives aux peines sont en partie traitées avant celles se rapportant à la participation
criminelle. Les principes d’irresponsabilité et les circonstances aggravantes ne sont pas repris
dans ce livre.
Nous aurions souhaité que ce premier livre comporte en effet plutôt deux grands axes, à
savoir :
- d’un côté la norme pénale (traitant ainsi des principes et application de ladite
norme) et la responsabilité pénale (se rapportant aux principes et causes
d’exonération) ; et
- de l’autre, la sanction pénale (nature des peines, le régime des peines,
l’extinction et l’effacement de la condamnation).
Le second livre contenant 178 articles, traite des infractions et de leur répression en
particulier et se rapporte au droit pénal spécial14. Ce livre comporte 8 titres à ces jours et qui
correspondent chacun à des valeurs sociales fondamentales que la société congolaise entend, à sa
manière, protéger particulièrement, même à l’aide de l’application de la peine.
Elles ne sont pas incorporées matériellement au code pénal ; elles en font, cependant,
partie intégrante soit parce qu’elles formulent des principes généraux sur les infractions et leur
répression, soit parce qu’elles définissent les infractions fortuitement omises, auxquelles le
législateur ne pouvait penser lors de l’élaboration du code.
Le droit commun est la partie la plus permanente et la plus stable du droit pénal. Il
détermine les valeurs essentielles qui appellent une protection particulière. Il s’applique de
manière générale quant aux personnes et aux biens qu’il régit.
14.
Il est important de se référer aux développements faits dans le cours de droit pénal spécial.
15.
Loi n°04/016 du 19 Juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
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Il convient de présenter les normes du droit pénal particulier (paragraphe 1) avant de les
rapprocher (paragraphe 2) de celles du droit pénal commun.
Il faut noter que certaines d’entre ces normes sont exclusivement pénales et ont pour
objet la répression d’infractions non prévues par le code pénal ordinaire. D’autres contiennent des
dispositions pénales à côté des dispositions ressortissant à d’autres disciplines, civile,
commerciale, fiscale, etc.
C’est dans ce sens que l’article 2 de l’avant-projet du code pénal16, affirme l’existence
des règles pénales, et incidemment du droit pénal dans les textes particuliers, comme suit : « Les
lois pénales particulières se constituent autour des ensembles suivants en fonction de l’unité
spécifique de leurs matières :
- droit pénal de la famille ;
- droit judiciaire et pénal militaires ;
- droit pénal économique et des affaires ;
- droit pénal social : travail et sécurité sociale ;
- droit pénal de l’information, de la presse et des Nouvelles techniques de
l’information et de la communication ;
- droit pénal écologique et forestier : environnement et conservation de la nature ;
- droit pénal de la circulation et des transports : route, chemin de fer, voies ferrées,
aériennes et navigables ;
- droit pénal administratif : police administrative et territoriale.
L’on peut ajouter à cette liste de matières : le droit pénal médical, le droit pénal des
mineurs, le droit pénal électoral, …etc.
Dès lors, certaines règles du droit pénal général se trouvent également portées par ces
différentes normes pénales particulières ou techniques.
16.
Article 2 de l’avant-projet du Code Pénal Congolais du 19 mai 2009.
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Il faut néanmoins souligner que ces dernières normes techniques sont tenues par les
limites fixées par la norme de base. Elles ne peuvent pas s’écarter des prescriptions édictées par
le Code Pénal. Puisqu’en principe, les dispositions de ce Code Pénal fixent les règles et les
principes qui déterminent le cadre, les conditions et les principes référentiels de l’intervention
pénale en République Démocratique du Congo. Elles s’appliquent à toutes les infractions ou tout
groupe d’infractions et à toutes les sanctions pénales ou tout groupe de sanctions pénales, à moins
qu’elles ne disposent autrement. Elles forment les principes fondamentaux communs et les
garanties essentielles du droit pénal auxquels les normes pénales particulières, quelle qu’elles
soient, ne peuvent, en aucun cas, déroger17.
Certains textes (tels que ceux cités ci-dessus) sont nationaux et d’autres internationaux
ou régionaux.
Le droit pénal général énoncé dans les normes de droit pénal commun est applicable aux
textes de droit particulier. Mais dans quelle mesure ?
Le décret du 22 décembre 1888 sur les peines et les fautes militaires graves disposait en
son article 19 que « les conseils de guerre appliquent aux infractions de droit commun les peines
édictées par les lois pénales ordinaires ».
17.
Article 1 alinéa 4 de l’avant-projet du Code Pénal Congolais du 19 mai 2009.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 46 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
De même, le code de justice militaire de 197218, en son article 389, disposait que,
moyennant certaines réserves prévues au même code, les juridictions militaires prononcent les
mêmes peines que les juridictions de droit commun, et ces peines sont appliquées selon les
principes généraux et les règles de droit commun. Il a été jugé enfin que « les dispositions du
code pénal ordinaire s’appliquent aux infractions prévues par les lois militaires »19.
Et à la suite de cette jurisprudence qui a fait long feu, la législation pénale militaire a été
er
modifiée. C’est ainsi que l’article 1 de la loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code
pénal militaire prévoit ce qui suit : « Sous réserve du présent Code, les dispositions du Livre
Premier du Code Pénal ordinaire sont applicables devant les juridictions militaires ».
Le principe de « légalité des délits et des peines » signifie, que la loi doit à l'avance dire
ce qui est interdit et ce que l’on risque. C'est Beccaria qui a formalisé ce principe comme suit :
« les lois seules peuvent fixer les peines de chaque délit et le droit de faire des lois pénales ne
peut résider que dans la personne du législateur qui représente toute la société unie par un
contrat ». On remarquera à la fin, l’influence de Jean-Jacques Rousseau.
Ce principe distingue le droit pénal des autres branches du droit. Il est encore appelé «
légalité des délits et des peines ». Cependant, étant donné que l’infraction mais aussi la sanction
pénale ne sont plus portées uniquement que par la loi et qu’il existe actuellement une diversité de
règles pénales, nous pensons qu’il serait plus exact, à la place, de parler du principe de
« normativité » ou de « textualité » des infractions et des sanctions pénales20. Mais, il faut
retenir que ce principe au contenu et justification particuliers (sous-section 1), a connu une
évolution considérable (sous-sect. 2).
18
Ordonnance-loi numéro 72/060 du 25 septembre 1972 portant code de justice militaire (déjà abrogé par les lois n°023/2002 et
024/2002 du 18 novembre 2002 portant respectivement codes judiciaire et pénal militaires)
19
C.G., 14 octobre 1901, Jur. Etat, I, 163.
20
Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, op cit.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 47 | P a g e
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Ce principe signifie que les règles du droit pénal sont exprimées dans la « loi » : seuls
peuvent faire l’objet d’une condamnation pénale les faits déjà définis et sanctionnés par le
législateur au moment où l’accusé a commis son acte, et seules peuvent leur être appliquées les
peines édictées à ce moment déjà par le législateur. L’infraction doit donc être portée par une
norme pénale qui peut être une loi, une convention, et même pour d’autres pays, un arrêté.
Ensuite, Beccaria21 poursuivait dans le même sens en avançant que « les lois seules
peuvent déterminer les peines et les délits et ce pouvoir ne peut résider qu’en la personne du
législateur ». Ce principe impose qu’une norme préexiste à l’acte et à sa sanction. Toute personne
est donc dans ce cas préalablement informée des comportements interdits. Ce qui constitue un
facteur de sécurité juridique. De sorte que tout ce qui n’est pas interdit expressément est permis.
Puisque, comme l’affirmait à ce sujet Portalis « le législateur ne doit point frapper sans avertir ».
D’autres auteurs ont également soutenu ce principe. C’est ainsi que le criminaliste
FEUERBACH l’a résumé par la formule « Nullum crimen, nulla poena sine lege » ; ce qui veut
dire : « Nul crime, nulle peine sans la loi »22.
21
. Il s’appelait Marquis Cesare BONESANA BECCARIA. Cet italien fut juriste et économiste, né en 1738 et décédé en 1794. Il
publia en 1764 son retentissant et importantissime ouvrage : Des délits et des peines.
22
Gérard STEFANI, Georges LEVASSEUR et Bernard BOULOC, Droit pénal général, Précis Dalloz, 13e éd., Paris, 1987,
n°116.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 48 | P a g e
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Roger MERLE et André VITU considèrent que, quoique savante, cette formule est
néanmoins incomplète parce qu’elle ne vise que le droit pénal de substantiel (de fond) ; alors que
ce principe doit s’appliquer également au droit pénal de forme. Pour ce faire, ces deux auteurs
complètent la formule : Nullum crimen, nulla poena, nullum judicium sine lege 23.
Sur le plan international on retrouve ce principe dans les textes à vocation universelle et
ceux à vocation régionale. Les textes à vocation universelle intéressant cette étude sont :
- La déclaration des Droits de l’Homme dans son article 11 alinéa 2. Elle a été adoptée à Paris
le 10 décembre 194824, mais elle n’a pas de portée normative ;
- Et, le pacte de New-York du 16 décembre 1966, pacte international relatif aux droits civils et
politiques dans ces articles 9, 10, 14 et 15.
Au niveau du continent africain, bien qu’il existe d’autres textes non africains consacrant
ce principe en étude25, on le retrouve néanmoins dans la Charte africaine des droits de l'homme et
des peuples26 en ces termes : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit
comprend : le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant les droits
fondamentaux qui lui sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, règlements et
coutumes en vigueur ; le droit à la présomption d'innocence, jusqu'à ce que sa culpabilité soit
établie par une juridiction compétente ; le droit à la défense, y compris celui de se faire assister
par un défenseur de son choix ; le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction
impartiale. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui ne constituait pas, au
moment où elle a eu lieu, une infraction légalement punissable. Aucune peine ne peut être
infligée si elle n'a pas été prévue au moment où l'infraction a été commise27».
23
Charles Louis de Secondat MONTESQUIEU, De l’Esprit des lois, Liv XI, Chap. VI, Genève, 1748 ; BECCARIA, Traité des
délits et des peines, Chap. III, 1764.
24
. Cette Déclaration des Droits de l'Homme et des Citoyens du 10 décembre 1948 n’a pas de portée normative.
25
Il en est ainsi de l’article 7, § 1, de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme (CEDH) du 04 novembre
1950 ; et de l’article 49 de la Charte européenne des droits fondamentaux (12/2000 à Nice). Lire avec intérêt Bienvenu WANE
BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits français et congolais. Thèse de doctorat en
Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, op cit. , pp. 85-89.
26
. La Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples, adoptée le 27 juin 1981 à Nairobi, Kenya, lors de la 18e Conférence
de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA). Elle est entrée en vigueur le 21 octobre 1986, après avoir été ratifiée par 25 Etats.
Cette Charte a été ratifiée par les 53 Etats membres de l’ex-OUA, soit tous les pays d’Afrique, à l’exception du Maroc. Ce dernier
pays s’est retiré de l’organisation africaine en 1984 pour protester contre l’admission en son sein de la République arabe
Sahraouie, qui lui dispute la souveraineté sur le Sahara occidental, ancienne colonie espagnole sous contrôle marocain
depuis 1975. Précisons que l'Organisation de l'Unité Africaine a fonctionné de 1963 à 2002, année au cours de laquelle elle a été
dissoute et remplacée par l’Union Africaine (UA).
27
. Article 7 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples
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Aussi, en ce qui concerne le droit pénal formel : « tout individu a droit à la liberté et à la
sécurité de sa personne. Nul ne peut être privé de sa liberté sauf pour des motifs et dans des
conditions préalablement déterminés par la loi ; en particulier nul ne peut être arrêté ou détenu
arbitrairement28 ».
Sur le plan interne, le principe en étude consacré d'abord par la constitution avant d’être
affirmé dans la loi :
Le constituant congolais, n’a pas organisé une répartition des tâches entre le pouvoir
législatif et exécutif ; comme c’est le cas en droit français où les crimes et délits sont créés par la
loi à l’exception des contraventions qui sont portées par les actes réglementaires.
- Argument psychologique : il faut que la loi avertisse avant de frapper, afin que le
citoyen sache avant d’agir ce qui est interdit et puni.
Et qui peut limiter ? Seule la loi ou la norme ? Elle est l’expression de la volonté
générale. Conception de Rousseau dans son esprit des lois. Chacun abandonne un
peu sa liberté.
Ici, le principe en étude permet d’assurer l’équilibre entre les droits de l’accusation et les
droits de l’accusé. Cet équilibre ne peut être assuré que par la norme, car cette dernière intervient
de façon impersonnelle avant le procès et par conséquent neutre.
29
. Articles 5, 7 et 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et des Citoyens de 1789.
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La limitation du droit de punir. La société ne peut punir sans borne et sans mesure. Le
pouvoir de la société de maintenir l’ordre doit être contenu dans certaines limites, qui garantissent
et respectent la liberté, la sécurité et l’indépendance individuelles. Cette opposition d’intérêts du
pouvoir et des individus ne trouve sa solution que dans la loi : seule, celle-ci écarte les inégalités
et l’arbitraire.
La norme pénale exerce ainsi une certaine influence sur la psychologie de l’agent qu’elle
informe de l’interdit, et de la menace qui pèse sur lui en cas de transgression. Elle joue un rôle à
la fois éducatif et préventif (intimidant). En effet, la norme se présente comme un code de valeurs
essentielles pour la survie de la société. Elle joue donc ici un rôle de l’instituteur de la société. En
plus de ce rôle, la elle exerce également une pression sur tous les membres de la société. C’est
cette pression qu’on qualifie de fonction préventive ou intimidante qui réalise la prévention
individuelle et/ou collective.
Il assure la protection de la liberté et des droits fondamentaux des citoyens. Parce que
tout ce qui n'est pas textuellement interdit est permis, en tout cas ne saurait être pénalement
sanctionné. Il permet de noter aussi que le « vide juridique » est une expression qui ne doit pas
être systématiquement connotée comme négative, ni être comblé par l’autorité de justice. Le «
vide », en droit pénal, ce n'est ni plus ni moins que l’expression d’un choix en toute liberté.
Dès lors, les institutions juridictionnelles31 assurent la garantie des libertés individuelles
et des droits fondamentaux de tous les citoyens au Congo.
Le principe en étude a bien évidement un contenu, mais fait en même temps quelques
obligations au juge dans l’application de la norme pénale.
En effet, d’une part, les incriminations sont établies par la norme. Seuls tombent sous la
norme les faits qui, au moment où ils sont commis, sont déjà définis comme constituant une
infraction par le législateur. Ce principe de l’antériorité obligatoire des définitions des infractions
est une garantie de la liberté et de sa sécurité juridique, car on peut valablement supposer que,
dans ce cas, ces définitions ont été élaborées sans parti pris, dans l’ignorance des personnes qui
tomberont éventuellement sous leur application.
D’autre part, les sanctions pénales doivent, comme les incriminations, préexister aux
faits. Nul ne peut subir une sanction qui n’existant au moment des faits.
30
L’article 149 de la Constitution de la République démocratique du Congo, modifiée par l’article premier de la Loi n°11/002 du
20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février
2006 dispose ce qui suit : Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Il est dévolu aux
cours et tribunaux qui sont : la Cour constitutionnelle, la Cour de cassation, le Conseil d’Etat, la Haute Cour militaire ainsi que
les Cours et Tribunaux civils et militaires.
31
En droit congolais, ces institutions juridictionnelles sont :
- Les juridictions de l’ordre judiciaire, constituées :
- Juridictions ordinaires de l’ordre judiciaire, à savoir : les tribunaux de paix, les tribunaux de grande instance, les cours
d’appel et la cour de cassation ;
- Juridictions spécialisées de l’ordre judiciaire. Elles sont classées en fonction de certains critères :
- lorsqu’on tient compte de la qualité des justiciables on distingue :
- les juridictions militaires ci-après : les tribunaux militaires de police, les tribunaux militaires de garnison, les
cours militaires et la haute cour militaire ;
- les tribunaux pour enfants.
- lorsqu’on tient compte de la matière à traiter, on retient : les tribunaux de commerce mais aussi les tribunaux du travail.
- Les juridictions de l’ordre administratif sont constituées :
- Juridictions ordinaires de l’ordre administratif, à savoir : les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel et
le Conseil d’Etat ;
- Juridictions spécialisées de l’ordre administratif qui sont : la Cour des Comptes, les juridictions des ordres professionnels
…etc.
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Cours de Droit Pénal Général 2015
Le législateur a le monopole d’établir les normes pénales. Il doit établir avec précision la
liste des incriminations, c’est-à-dire le catalogue des comportements qu’il qualifie infractionnels
de manière précise en fixant les éléments constitutifs de chaque infraction en évitant que le juge
puisse les étendre au-delà de l’esprit du législateur. Le législateur ne doit pas édicter des
dispositions rétroactives. En d’autres termes, les dispositions qu’il prend en matière
d’incrimination ne peuvent concerner que les agissements du présent et de l’avenir.
Techniquement, l’interdiction faite au juge, est déclinée sous deux autres principes qui
sont des corolaires de la « légalité » des infractions et des sanctions pénales ; il s’agit de
l’interprétation stricte et de la non rétroactivité que nous verrons plus loin.
Ces deux modalités d'application des textes d’incrimination sont des conséquences
directes du principe de textualité. Ils dictent au juge la conduite à tenir lorsqu’il existe un texte,
mais qui n'est pas clair, ou lorsque celui-ci est apparu ou a changé après la commission d’une
infraction.
Le texte pénal est d’interprétation stricte. Les juges doivent l’avoir constamment à
l’esprit lorsqu'ils sont tentés, c’est assez naturel, de jouer avec les textes de manière à ne pas
laisser impunies les personnes comparaissant devant eux, serait-ce pour donner satisfaction aux «
victimes ». Encore faut-il être victime d'une « infraction ». Et cela, c’est le texte qui le dit... ou ne
le dit pas.
L’incrimination n’est pas une voie ouverte, une simple indication susceptible de
variations judiciaires. Si c’était le cas, cela reviendrait à donner au juge le pouvoir de façonner
lui-même les infractions, donc à nier même le principe de « légalité ».
Portalis écrivait à cet effet « qu’en matière criminelle, il faut des lois précises et point de
jurisprudence ». C’est excessif car la quasi totalité de textes, d’une manière ou d’une autre,
nécessite une interprétation. Mais, il est vrai que le rôle du juge pénal se distingue de celui des
autres. On pourrait même dire qu’il s’y oppose (Claude Lombois, Droit pénal général, Hachette
Sup. 1994).
Lorsque, à première vue, un texte n’est pas clair, comme c’est malheureusement souvent
le cas au Congo, il faut bien en donner le sens. On se sert alors du dictionnaire, des travaux
préparatoires ou du « bon » sens. Le juriste, ici le juge, c’est son savoir-faire, doit seulement
raisonner rigoureusement et ne pas trahir l’auteur, lui rester loyal autant que possible. Mais, il
n'est jamais tenu par le mot à mot (interprétation littérale), jamais condamné à n'être que « la
bouche qui prononce la parole de la loi » ainsi que l’aurait voulu Montesquieu et, avec lui, les
philosophes du XVIIIe siècle. Il faut bien que cette parole soit audible, qu’elle ait un sens. Que le
juge qui prononce cette parole soit à mesure de déchiffrer le contenu du texte.
Plus encore, si une contradiction apparaît entre la lettre du texte et l’esprit de son auteur
(lorsque l’on peut savoir, avec certitude, ce qu’il a voulu dire), c’est l’esprit qui doit l’emporter. Il
en est ainsi en droit pénal comme en matière.
Cependant, même un texte clair, n'est constitué que des mots inertes sur un papier. Et, il
ne peut produire des effets sans une certaine interprétation que l’on appelle l’interprétation
« rendement ».
B. L’interprétation « rendement » : le droit pénal en opposition aux autres matières
L’interprétation est ici prise au sens où l'on interprète une partition musicale ou une
pièce de théâtre. Car, c’est alors que l'on voit, que l'on entend, que l'on ressent, dans la vie, ce qui
a été voulu par l'auteur.
Il faut bien passer des textes écrits à des effets produits dans une situation donnée. C'est
une opération subtile, sinon complexe.
Les juristes ont deux mots pour la décrire, qu'il faut considérer comme les deux faces
d’une même médaille :
- La qualification des faits : elle se dit lorsqu’on part des faits pour vérifier s’ils
correspondent à la prévision des textes (on dit couramment s’ils « tombent sous le coup
de... »). L’autorité se met ainsi à rechercher l’appellation normative qui convient au
comportement incriminé ;
- L’application du texte : se dit lorsqu’on part du texte pour vérifier s’il vise les faits dont
on a connaissance. En réalité, l’opération se réalise intellectuellement dans des allers-
retours plus ou moins explicités.
Mais on comprend bien qu’appliquer le texte, consiste à lui faire produire ses effets,
donc l’interpréter au sens qui convienne. C'est alors que le pénaliste, à la différence des autres
juristes, doit interpréter « strictement » mais pas de manière restrictive.
Dans les autres branches du droit, il est imposé par les normes civiles, qu’une règle tirée
du texte soit appliquée aux faits litigieux, le juge devrait-il inventer, voire suppléer l'absence de
texte.
Il doit ainsi se comporter aussi bien en ce qui concerne les infractions que les sanctions
pénales.
L’attitude du juge face à la « légalité » des incriminations. Le juge n’est pas libre
dans les qualifications à retenir. Sa tâche est donc limitée ou plus précisément encadrée, comme
suit :
- Il ne doit pas appliquer la « loi » de manière rétroactive.
- Lorsqu’il est saisi des faits, il doit rechercher leur qualification exacte en droit. Autrement
dit, il doit rechercher le texte incriminateur qui est violé par le fait qui lui est présenté, s’il
ne trouve aucun texte, il devra considérer qu’il n’y a pas d’infraction.
- Le principe « légaliste » impose au juge l’obligation d’appliquer la « loi » de manière
stricte sans rien ajouter, sans rien retrancher. C’est pour cette raison que l’analogie est
écartée en droit pénal.
En effet, le juge ne peut considérer comme infraction un fait que la « loi » ne définit pas
comme tel, quelle que soit son appréciation personnelle sur la valeur morale de l’acte. Il en est
ainsi du suicide et de la dette. En effet, quel que soit le dégoût qu’ils puissent inspirer à cause de
leur caractère immoral, ils ne sont pas à ces jours des actes infractionnels en droit congolais.
L’attitude du juge face à la « légalité » des sanctions pénales. Le juge ne doit pas
condamner un prévenu alors que la « loi » n’a pas prévu de sanction pénale pour le comportement
adopté par ce dernier. C’est-à-dire que le juge ne peut prononcer des sanctions pénales (même
pas une peine complémentaire) si le texte n’en prévoit pas. Il n’appartient pas, en effet, au juge en
raisonnant, par voie d’analogie, de suppléer au silence de la loi et de prononcer des sanctions
pénales en dehors des cas limitativement prévus par la « loi ».
Lorsque le législateur a prévu une sanction pénale pour un comportement, le juge est
tenu de respecter la fourchette fixée. C’est qu’il doit nager entre le maximum et le minimum
prévus par le législateur sauf en cas de circonstances atténuantes et des excuses légales. Il ne peut
refuser de prononcer une peine prévue par la « norme », sauf s’il y a cause d’exonération.
D'après la conception classique, seule la loi au sens stricte du terme a compétence pour
prévoir de façon précise, l’incrimination et la sanction pénale. Mais, cette conception classique se
trouve affectée par un double déclin : politique et juridique.
Le déclin politique réside en ce qu’en droit pénal, sont apparues d’autres sources que la
loi. Sont donc apparues :
- Des sources infra-légales. En effet, en dépit de l’affirmation faite à l’article 122 de la
Constitution de la République Démocratique du Congo32 ; il convient de signaler que
le constituant congolais a admis qu’une assemblée provinciale (qui est déjà
compétente en ce qui concerne l’établissement des peines d’amende ou de prison
pour assurer le respect des édits en conformité avec la législation nationale, comme
le consacre l’article 204 pt 14 de la même Constitution. Voir page 72), lorsque
l’assemblée nationale et le sénat l’auront habilité, puisse légiférer sur une matière
relevant de la compétence exclusive du pouvoir centrale de l’article 205 de la
Constitution en vigueur.
Mais, à côté de ces sources infra-légales, sont aussi apparues des sources supra-légales,
notamment des sources internationales et régionales.
- Des sources supra-législatives. Il en est ainsi par exemple du Traité de Rome 17
juillet 1998 portant statut de la Cour Pénale Internationale entré en vigueur le 1er
juillet 2002 et de différents actes uniformes de l’Organisation en vue de
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA).
32
L’article 122 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 dispose ce qui
suit : Sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, la loi fixe les règles concernant : La détermination des
infractions et des peines qui leur sont applicables, la procédure pénale, l’organisation et le fonctionnement du pouvoir judiciaire,
la création de nouveaux ordres de juridictions, le statut des magistrats, le régime juridique du Conseil supérieur de la magistrature.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 57 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Le déclin juridique affecte quant à lui, l’édiction de la norme pénale et frappe aussi
bien l’incrimination que la sanction pénale. Si l’on s’en tient à l’infraction, l’atteinte portée au
principe de légalité est d’ordre qualitatif mais aussi quantitatif.
L’atteinte quantitative est évidente, elle résulte de l’inflation législative. On peut parler
d'une sorte d'overdose qui remet en cause l’exigence de prévisibilité du Droit pénal. Cette atteinte
quantitative est accentuée par un phénomène récent qui consiste à créer de nouvelles
incriminations dont on aurait pu se passer, certaines dispositions ne sont pas appliquées et
risquent encore de ne pas l'être de si tôt.
C’est justement ici une atteinte qualitative. L’illustration la plus forte est celle de la
création en dédoublement des incriminations par la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 sur la
protection de l'enfant. L’on peut aussi citer la loi n°04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre
le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, et la loi n°06/018 du 20 juin 2006
sur les violences sexuelles…etc. Pour certains auteurs, ce qui prévaut dans ces incriminations en
doublon c’est une fonction déclarative, constituant pratiquement un nouveau facteur d’inflation et
une dévalorisation de la « loi ».
Ces incriminations sont aussi souvent mal rédigées. La mauvaise rédaction caractérise
aussi une atteinte qualitative au principe de légalité. Si les incriminations sont mal rédigées,
l’exigence de clarté ou de précision de la norme pénale est méconnue et donc l’accessibilité,
l’intelligibilité de la norme pénale ne sont pas non plus assurées.
Cette atteinte qualitative s’est traduite par plusieurs manifestations. On se retrouve face à
plusieurs techniques de rédaction :
- le recours à une incrimination trop générale : l’article 80 du code pénal congolais punit
tout acte arbitraire et attentatoire aux libertés et aux droits garantis aux particuliers par
les lois, décrets, ordonnances...etc. Une autre illustration est celle de l’article 190 du code
pénal qui punit quiconque aura, par des actes hostiles non approuvés par le
Gouvernement...etc.
- la technique de l'incrimination balais. À la fin d’un chapitre d’un texte de loi, on trouve
de plus en plus un article qui prévoit à peu près ceci : toute infraction aux dispositions du
présent chapitre, de la présente loi sera punie de la peine de...etc. Il n’y a donc pas de
définition précise.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 58 | P a g e
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Mais, en dépit de ce déclin, l’on ne doit pas être consterné puisqu’on passe en effet
plutôt à une conception rénovée du principe.
L’idée est qu’aujourd’hui on est face à une conception rénovée de principe dont il
ressortirait paradoxalement renforcé. C’est au XXième siècle que le principe de normativité que
l’on a toujours qualifié de légalité des délits et des peines a été affirmé solennellement par tous
les textes.
Dans cette conception rénovée du principe en étude, le juge concourt au rôle au service
des objectifs du principe de clarté et de précision dans la détermination des incriminations et des
sanctions pénales en vue de permettre l’accessibilité et l’intelligibilité de la norme pénale.
Seule la loi au sens formelle pouvait être source du Droit pénal. Mais, parce que la loi
est l’expression de la volonté populaire exprimée par l’intermédiaire de ses élus (députés et
sénateurs), cette conception classique fut affectée du déclin, notamment en raison d’une
diversification des sources du Droit pénal : source interne et source internationale.
Il convient donc de reconnaitre que l’on est passé d’une légalité formelle (source au sens
stricte) à une légalité matérielle.
De ce fait, le Droit pénal congolais a pour source la norme qui n’est pas forcément une
loi au sens formel mais qui doit être un texte matériellement équivalent.
Seule la loi a compétence en matière pénale, cette loi peut être stricto sensu, au sens
strict, la loi formelle : c’est-à-dire le texte voté par le parlement, promulguée par le président de
la république et publiée au Journal Officiel de la République.
Cette compétence de la loi a été édictée parce que la Droit pénal porte atteinte non
seulement à la vie (le cas actuel du droit congolais), mais également aux libertés individuelles, à
l’honneur et à la propriété d’autrui. Et ces atteintes ne peuvent être organisées que par les
représentants du peuple.
Ces lois pénales sont de deux sortes, celles qui sont codifiées dans un texte pénal, puis
celles codifiées ailleurs que dans le code pénal, mais il y a aussi les lois pénales qui demeurent
extérieures à tout code par exemple la loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de
l’exercice de la liberté de la presse.
Mais à cela sont assimilés d’autres textes équivalents à la loi. Historiquement cela
correspond à la pratique de la délégation de pouvoir faite par le pouvoir législatif à l’exécutif.
Cela a toujours été fréquemment utilisé sous toutes les trois républiques qu’a connues la
République démocratique du Congo jusqu'aujourd'hui. On constate en effet, que le gouvernement
intervient dans les attributions du pouvoir législatif, en prenant, selon les époques et les systèmes
politiques en place, tantôt des ordonnances et ordonnances-lois, tantôt des décrets et décrets-lois.
La constitution de la République démocratique du Congo du 18 février 2006 telle que
modifiée le 20 janvier 2011 a diversifié cette pratique, puisqu’elle prévoit différentes catégories
de textes à valeur équivalente à la loi. On peut invoquer successivement les ordonnances-lois, les
ordonnances et les édits.
A. Des ordonnances-lois
Elles entrent en vigueur dès leur publication et deviennent caduques si le projet de loi de
ratification n’est pas déposé devant le Parlement au plus tard à la date limite fixée par la loi
d’habilitation. A l’expiration du délai visé à l’alinéa premier du présent article, si le Parlement
ne ratifie pas ces ordonnances-lois, celles-ci cessent de plein droit de produire leurs effets. Les
ordonnances-lois délibérées en Conseil des ministres et ratifiées ne peuvent être modifiées dans
leurs dispositions que par la loi. Les ordonnances-lois cessent de plein droit de produire leurs
effets en cas de rejet du projet de loi de ratification.
Dès lors, cette délégation peut bel et bien porter sur la législation concernant le code
pénal, étant donné qu’elle rentre dans les matières du domaine de la loi.
Mais, elle doit respecter la procédure d’habilitation et avant l’expiration du délai fixé, le
parlement doit ratifier les ordonnances-lois, puisque cette ratification confère valeur législative à
ces ordonnances-lois. Tant que les ordonnances-lois ne sont pas ratifiées, elles n’ont pas valeur
législative.
33
Il s’agit de l’article 145 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, modifiée par la Loi n°11/002 du 20
janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 61 | P a g e
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Aujourd’hui cette exclusion porte encore sur la coutume et les usages d’un côté, et sur
les principes généraux de droit de l'autre.
La coutume et les usages ont un certain rôle en matière pénale, mais il n’est que
marginal. Ils n’ont pas de rôle direct, en tant que source au rôle créateur du droit pénal. Ils ne
peuvent créer ni une incrimination ni une sanction pénale.
Ce qui veut dire que la coutume ne peut palier l’absence d’un texte en incriminant un
comportement en dehors de toute prévision normative.
La coutume et les usages ne peuvent pas non plus abroger une incrimination ou une
sanction pénale portée par un texte en vigueur. Ce rôle ne pourra exister que lorsque la loi elle-
même renvoie à la coutume ou aux usages dans la détermination d’une incrimination34 .
L’on peut constater que le législateur congolais doit s’être référé aux usages récurrents
dans sa société, en ce qui concerne certaines atteintes à l’intégrité corporelle, susceptibles d’être
portées aux enfants, soit au nom de l’éducation, soit de la religion. Cela renvoie aussi aux
pratiques rituelles dans certaines religions ou cultures. C’est ainsi qu'il considère par exemple que
la circoncision n’est pas une mutilation sexuelle ni une atteinte à l’intégrité physique35.
34
L’exemple d’un tel renvoi sera trouvé dans le code pénal français au sujet de la répression des sévices graves et actes de
cruautés contre les animaux. En effet, ces faits sont réprimés par l’article R 521-1, R 654-1 et R 655-1 du code pénal. Toute fois,
l’article 521-1 prévoit une exception, en faveur des combats de Taureau et de coq lorsqu’il existe une tradition locale
ininterrompue en ce sens. La conséquence à tirer en est qu'une corrida (combat des coqs) se conçoit dans la ville d'Arles, dans la
ville de Nice…et dans certaines villes de France. En revanche, dans d'autres villes françaises, elle n'est pas régulièrement admise.
35
L’article 153 alinéa 4 de la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant prévoit ce qui suit : La circoncision
n'est pas une mutilation sexuelle ni une atteinte à l'intégrité physique.
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Pris en son sens le plus large, le principe de légalité des délits et des peines admet
matériellement que des textes infra-légaux ou supra-légaux deviennent source du droit pénal avec
pouvoir de créer des infractions et des sanctions pénales.
Dans la conception initiale, seule la loi était compétente pour déterminer les
incriminations et les sanctions.
Or, avec l’évolution actuelle du droit pénal, certaines législations dotent le pouvoir
exécutif de la compétence en matière contraventionnelle. Il ne faut pas en déduire pour autant que
dans ces pays, tous les actes du pouvoir exécutif constituent des sources du droit pénal.
C’est le cas d’une circulaire ministérielle ou de l’avis d’un conseil d’administration qui
ne constituent pas une source du droit pénal. Il en est ainsi en France où, la constitution a ajouté
au pouvoir subordonné, un pouvoir exécutif autonome, précisément en matière
contraventionnelle. Ce qui signifie que le pouvoir exécutif peut intervenir par voie
règlementaire : ordonnances, décrets ou arrêtés en la matière.
Il est néanmoins possible que dans le cadre de la réforme du code pénal, le droit
congolais puisse opter pour la tripartition des infractions. A cet effet, il pourra être organisé, les
deux types de règlements ; aux côtés des édits provinciaux qui, selon la constitution du 18 février
2006 telle que modifiée le 20 janvier 2011, n’ont en principe qu’un pouvoir limité en matière
pénale (article 204 pt 14).
En pratique, le texte législatif prévoit expressément dans une disposition qu’un décret
ultérieur préciserait telle ou telle question. Il en résulte deux conséquences :
- Tant que le décret n’a pas été adopté, la portée de la norme pénale n’est pas entière, et il
faudra donc patienter. C’est le cas lorsqu’une loi prévoit par exemple qu’on ne peut
exercer une activité ou une profession sans faire de déclaration. Mais la loi renvoie au
décret pour savoir quelle autorité délivrera l’autorisation et la procédure à suivre…etc.
Aussi longtemps que ce décret n’est pas encore pris, il va falloir tout simplement
patienter.
- Lorsqu’une loi est abrogée dans le cadre d’une codification à droit constant (c’est une loi
abrogée qu’on aura pratiquement reprise ou recopiée), la jurisprudence française
considère que les arrêtés et règlements d’application de la première loi ne sont pas
affectés par une telle abrogation. Ces textes survivent. C’est ainsi qu’on les considère
comme des textes permanents.
Puisque ces textes d’application sont des textes subordonnés, ils doivent donc respecter
scrupuleusement la loi à peine d’illégalité.
36
Le cas de l’Ordonnance du Président de la République tant attendue en vue de l’application de la peine de travaux forcés
(L’article 6 bis alinéa 2 du Décret du 30 janvier 194 portant Code Pénal prévoit ce qui suit : Les condamnés aux travaux forcés
subissent leur peine conformément au règlement fixé par l’ordonnance du Président de la République).
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 64 | P a g e
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Contrairement aux règlements subordonnés, les règlements autonomes sont des actes du
pouvoir exécutif qui ne sont nullement pris en vue d’une quelconque précision d’une
incrimination ou d’une peine. Ils sont donc véritablement autonomes.
La République démocratique du Congo ne les organise pas encore, mais pourra les
intégrer dans le cadre de la réforme de son Code Pénal. En France, c’est depuis 1958 qu’est mis
en œuvre le pouvoir réglementaire autonome en matière contraventionnelle37.
37
En France, le pouvoir réglementaire autonome en matière contraventionnelle est consacré et connait une mise en œuvre :
a. l’affirmation d’une compétence réglementaire autonome en matière contraventionnelle : En droit français, le principe de la
compétence réglementaire fut posé depuis longtemps. C’est ainsi que le droit français l’aura consacré dans sa constitution de
1958. Mais, il connaitra beaucoup plus tard une limite avec l’adoption du nouveau code pénal français qui conduisit à l’exclusion
de l’emprisonnement contraventionnel.
1. Le principe : Le principe de la compétence réglementaire en matière contraventionnelle a été adopté par étape en France : La
répartition des compétences entre la loi et le règlement que l’on trouve dans les articles 34 et 37 de la constitution
française. L’Article 34 de cette constitution énumère limitativement les matières qui sont du domaine de la loi, et donc de la
compétence du législateur. On y trouve l’amnistie, la procédure pénale la détermination des crimes et des délits et des peines qui
leur sont applicables. De son côté l’article 37 affirme que les matières autres que celle qui sont du domaine de la loi ont un
caractère réglementaire. Que faut-il déduire de cette répartition des compétences ? Qu’en droit français, la compétence
réglementaire en matière contraventionnelle valait non seulement pour la détermination du comportement proscrit, mais aussi
pour l’édiction des sanctions pénales y afférentes (sachant que jusqu’alors sous l’empire de l’ancien code pénal il y avait des
peines d’amende mais aussi d’emprisonnement de 1 jours à 2 mois). La jurisprudence française s’est donc prononcée sur cette
question au début des années 1960. Sont ainsi intervenus successivement : le Conseil d’Etat et le Conseil Constitutionnel.
D’abord, le Conseil d’Etat s’est prononcé dans l’arrêt société EKY du 12 février 1960 en affirmant qu’il résulte des articles de la
constitution que les auteurs de la constitution avaient voulu exclure la détermination des contraventions et des peines dont-elles
sont assorties du domaine de la loi. Ensuite, le Conseil Constitutionnel a emboîté le pas dans une décision du 19 février 1963.
Néanmoins, l’atteinte au principe de légalité mais aussi à la séparation des pouvoirs étaient également sensible sur la question de
l’emprisonnement contraventionnel. C’est sur ce point que plus tard, on trouvera la limite.
2. La limite : Elle a porté sur la question de l’emprisonnement contraventionnelle en droit français. Cette difficulté a mis 20 ans
pour aboutir. En effet dès 1973, dans une décision du 28 novembre, le Conseil Constitutionnel français avait tenté de limiter la
compétence réglementaire aux seules contraventions; et cela, sans prévoir de peine privative de liberté. Le Conseil Constitutionnel
s’était donc emparé des dispositions du préambule de la constitution de l’article 34 et aussi 66 pour affirmer que selon lui, la
détermination des contraventions et des peines qui leurs sont applicables n’est du domaine réglementaire que lorsqu’il n’y a pas
prévision de mesure privative de liberté. Donc le conseil constitutionnel voulait exclure les catégories de la 4ième et 5ième classes.
Mais cette tentative n’a pas aboutie parce que la chambre criminelle dans l'arrêt SCHIAVON du 26/02/1974 s’est rangée à la
position initiale du Conseil d’Etat; position que le Conseil d’Etat avait réaffirmée dans un avis du 17 janvier 1974.
Il a donc fallu attendre les années 1990 pour que l’emprisonnement contraventionnel disparaisse de l’échelle des peines du
nouveau code pénal et cette disparition se trouve consacrée dans une loi du 19/07/1993 qui abroge les dispositions de l’ancien
code pénal prévoyant l’emprisonnement contraventionnel. Cette double innovation est reprise dans l’article 111-2 al 2 du code
pénal puisque ce texte dit que le règlement détermine les contraventions et fixe dans les limites et selon les distinctions établies
par la loi les peines applicables aux contraventions.
b. la mise en œuvre de la compétence réglementaire autonome en matière contraventionnelle : Restant toujours en droit français,
on constate que c’est la loi qui établi la catégorie des contraventions. Elle en distingue 5 classes et énumère pour chacune d'elles,
les peines applicables. C’est alors au sein de ce cadre définit par la loi que la compétence réglementaire intervient en prenant deux
formes : les décrets en Conseil d’Etat et les arrêtés. Premièrement, on trouve les décrets autonomes c’est-à-dire les décrets pris en
Conseil d’Etat. En effet, l’article R 610-1 du code pénal affirme que les contraventions ainsi que les classes dont elles relèvent,
sont déterminées par décret en conseil d’Etat. Le gouvernement est donc tenu de solliciter l’avis du Conseil d’Etat sur le projet de
texte. Sauf qu'il ne s'agit pas d'un avis conforme, puisqu'il n'y a pas d’obligation à suivre ledit avis. C'est dans ces décrets pris en
Conseil de ministres que réside la principale source réglementaire du Droit pénal. La compétence réglementaire joue ici pour la
définition de la contravention, mais aussi pour le choix des peines dont sera assortie cette contravention en respectant le cadre
légal de l’échelle des peines. Deuxièmement, il y a les décrets simples c'est-à-dire les arrêtés. Dans ce cas là, la compétence
réglementaire n’existe que pour la définition de l’incrimination. En revanche, la compétence réglementaire ne vaut pas pour le
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 65 | P a g e
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C. L'édit provincial
En République Démocratique du Congo, l'édit est l'acte par voie duquel légifère
l'Assemblée Provinciale, organe délibérant de la province (voir la Constitution de la RDC du 18
février 2006, article 197 al 1 et 2 telle que modifié par l’article 1ier de la Loi n° 11/002 du 20
janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République
Démocratique du Congo).
Depuis 2006, l’édit provincial constitue une source interne infra légale en droit pénal
congolais.
- D’autre part, bien qu'il soit interdit aux Assemblées Provinciales de légiférer sur les
matières de la compétence exclusive du pouvoir central et vice-versa ; il est toutefois
constitutionnellement affirmé que l’Assemblée nationale et le Sénat peuvent, par une loi,
habiliter une Assemblée provinciale à prendre des édits sur des matières de la compétence
exclusive du pouvoir central.
choix de la peine car la violation de ces décrets simples ou arrêtés est d’ores et déjà pénalement sanctionnée par un article du code
pénal R 610-5 qui prévoit que La violation des interdictions ou le manquement aux obligations édictées par les décrets et arrêtés
de police sont punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 1ière classe. En définitive, il y a lieu de mentionner que la
répartition de compétences entre le règlement et la loi n’est pas totalement étanche. Puisqu'elle ne marche que dans un sens. Il est
certain qu’un règlement ne peut intervenir en matière criminelle ou délictuelle. Mais dans l’autre sens, la loi peut intervenir en
matière contraventionnelle, en terme d’un raisonnement a fortiori, qui peut le plus, peut le moins. C'est ce qu'avait admis le
Conseil Constitutionnel dans sa décision du 30 juillet 1982 en considérant que n’était pas inconstitutionnel, une disposition légale
par laquelle le parlement(le législateur) avait assorti le manquement à une loi d'une peine simplement contraventionnelle. Ce
phénomène a pu être observé mais est quand même très exceptionnel. On peut en prendre pour preuve le contenu du livre 6 de la
partie législative du code pénal français actuel « des contraventions » crée par l'ordonnance de mars 1996, on doit y trouver les
ordonnances de contraventions législatives. Néanmoins, la méconnaissance du partage des compétences entre pouvoir législatif et
réglementaire s’est accentuée ces dernières années. À tel point que cela a entraîné une réaction du président de l’Assemblée
nationale, qui fin 2004 a déposé une proposition de loi constitutionnelle pour que cette séparation soit mieux respectée et cela à
provoqué une réaction du premier ministre, puisqu’une circulaire du 19 janvier 06 relative aux articles 34 et 37 de la constitution a
été diffusé. Le Conseil constitutionnel entend lui aussi que cette répartition de compétence soit respectée, et a censuré dans une
décision du 26 avril 2005 un article de la loi Fillon qui était dépourvu de portée normative et le conseil constitutionnel dans une
autre décision du 31 janvier 2006 a déclaré le caractère réglementaire des dispositions d’une loi. Disposition de la loi du 23 février
2005.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 66 | P a g e
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A ces jours, la place des sources supra-légales, en droit interne est très considérable. En
effet, ces sources affectent la conception traditionnelle du principe de légalité des délits et des
peines ; non pas tellement au regard de la détermination des peines, car dans la plus part des cas,
elles restent de la compétence de la souveraineté nationale, mais elles affectent ce principe au
regard de la définition des incriminations.
On peut opérer des classifications dans la mesure où il y a d’un côté des sources
internationales ordinaires, car soumises à l’article 215 de la Constitution de la République
démocratique du Congo, modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de
certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006
et de l’autre côté des sources privilégiées dans le cadre du Droit de l'union africaine à la lumière
du droit communautaire.
Elles relèvent de l’article 215 de la Constitution du 18 février 2006 qui dispose : « Les
traités et accords internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publication, une autorité
supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque traité ou accord, de son application par
l’autre partie ».
Dès lors, on comprend que trois conditions majeures sont posées pour que les traités et
accords internationaux puissent avoir une autorité supérieure à la loi. Il s'agit de la régularité de la
conclusion, la publication au Journal Officiel de la République et enfin, de la réciprocité de son
application par l'autre partie.
Quelque soit la méthode utilisée, le résultat est le même en théorie. La source est interne
mais en réalité, l’origine de la norme est bien la convention internationale.
Il est de l’office du juge d’interpréter les traités internationaux invoqués dans la cause
soumise à son examen, sans qu’il soit nécessaire de solliciter l’avis d’une autorité non
juridictionnelle.
Le juge interne est compétent pour l’interprétation des traités. C’est ce que l’on peut
comprendre de l’article 116 de la loi judiciaire de 201339 qui prévoit que la Cour de cassation
connaît des pourvois en cassation pour violation des traités internationaux dûment ratifiés, des
lois et de la coutume contre les arrêts et jugements rendus en dernier ressort par les juridictions de
l’ordre judiciaire en matières civile, commerciale et sociale. Nous y reviendrons avec détails dans
l’analyse sur la régularité de la norme pénale.
Les sources régionales qui nous intéressent sont de deux ordres : les sources organisées
au niveau de l’union africaine et celles de certaines organisations africaines.
- L’article 6 consacre la légalité en droit pénal formel. Il es formulé comme suit : « Tout
individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne.
Nul ne peut être privé de sa liberté sauf pour des motifs et dans des conditions
préalablement déterminées par la loi; en particulier nul ne peut être arrêté ou détenu
arbitrairement ».
41
La Convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption, Adoptée par la 2ème session ordinaire de
la Conférence de l’Union à Maputo, le 11 juillet 2003 fut signée par la République démocratique du Congo le 05 décembre 2003.
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Quant aux sources de certaines organisations africaines, on peut citer entre autres :
- Le Traité de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires
(OHADA), conclu à Port-Louis en Ile-Maurice le 17 Octobre 199342, et six de ses neuf
actes uniformes incriminant certains comportements dans les affaires. En ce qui concerne
le traité dit de Port-Louis, il convient de retenir les articles 5 et 14.
- L’article 5 alinéa 2 organise la possibilité pour les actes uniformes de
l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires
(OHADA), de constituer des sources des infractions en disposant ce qui suit :
Les actes uniformes peuvent inclure des dispositions d’incrimination pénale.
Les Etats-Parties s’engagent à déterminer les sanctions pénales encourues.
Enfin, il ne sert à rien de proclamer dans différents instruments juridiques la garantie des
droits s’il n’existe pas un mécanisme de contrôle du respect de ces principes par les Etats. Ce
mécanisme du contrôle de la régularité de la norme pénale existe.
42
Le Traité de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), conclu à Port-Louis en Ile-
Maurice le 17 Octobre 1993 fut ratifié par la République démocratique du Congo le 27 juin 2012.
43
Le Protocole contre la corruption signé le 14 août 2001 par la Communauté de développement de l’Afrique australe fut signé
par la RDC le 14 août 2001 mais ratifié le19 mai 2008.
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L’existence du texte en droit pénal ne suffit pas, il faut encore que la norme pénale
prévue puisse être une norme régulièrement applicable. Ceci implique de prendre en compte la
hiérarchie des normes, la règle pénale édictée par un texte doit être conforme aux normes qui lui
sont supérieures.
Il faut prendre ici en compte la notion de légalité matérielle. Cette légalité matérielle a
débouché sur une multiplication de sources du droit pénal.
En effet, la question qui se formule à ce niveau est celle de savoir le mécanisme à suivre,
si l’édit provincial qui établit une peine d’amende ou de prison pour assurer son respect, va au-
delà des prévisions légales, alors que, la constitution reconnait aux provinces cette matière en la
soumettant à la conformité avec la législation nationale44.
44
Article 204 pt. 14 de la Constitution de la République démocratique du Congo, modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
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C’est qu’il peut se poser le problème de contrôle de conformité tant au niveau provincial
que national.
Au niveau national, tout édit provincial non conforme aux lois nationales est nul et
abrogé de plein droit. Et dans ce sens, c’est la Cour administrative d'appel qui connaît en premier
ressort des recours en annulation pour violation de la loi, des édits et des règlements nationaux
formés contre les actes ou décisions des autorités provinciales ou locales et les organismes
décentralisés placés sous la tutelle de ces autorités45.
Par ailleurs, lorsqu’un acte administratif interfère avec le droit pénal, le contrôle de
conformité à la loi relèvera du juge administratif, mais il convient de mentionner que la loi
judiciaire militaire admet également la compétence de ces juridictions.
Les deux voies sont possibles sur la question en droit pénal, mais pas selon la même
forme. Devant le juge administratif, se pose la question du contrôle de l’acte par voie d’action,
fondée sur l’illégalité de l’acte administratif. Cet acte prend la forme de « Recours pour excès de
pouvoir ».
45
Lire les articles 34 alinéa 2 et 74 de la loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre
administration des provinces.
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L’action en contrôle exercée devant le juge administratif devra être enfermée dans un
délai limité qui devra courir à compter de la publication de l’acte s’il est réglementaire, ou à
compter de sa notification à l’administré concerné s’il est individuel.
Cette nullité vaudra bien sur pour l’avenir mais aussi pour le passé.
- Pour l’avenir : aucune poursuite pénale ne pourra être intentée sur la base de cet acte
administratif frappé par la nullité.
- Pour le passé : la nullité sera rétroactive, et donc elle est sensée n’avoir jamais existé. Les
effets qu’un tel acte avait produits par le passé doivent être supprimés. En effet, le juge
pénal devra tenir compte de cette annulation. De ce fait, une infraction qui aurait été
commise avant l’annulation, mais jugée ensuite nulle, ne pourrait pas être réprimée.
46
Il s’agit des articles 149 et 151 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
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Il faut alors préciser l’étendu du contrôle que le juge pénal pourra exercer (A) et les
effets (B), avant de relever que les juridictions militaires bénéficient d’une compétence à titre
particulier47 (C).
A. L’étendu du contrôle
Cet étendu peut être envisagé d’abord par rapport aux actes qui peuvent être soumis au
juge pénal et par rapport au moyen d’illégalité.
La question consiste à savoir si le juge de fond, saisi au pénal peut apprécier la légalité
et interpréter les actes administratifs.
Cette exception d’illégalité d’un acte réglementaire doit être soulevée, soit par une partie
(in limine litis, c'est-à-dire avant tout débat au fond), soit d’office par le juge. En droit français,
on parle dans ce cas (lorsqu’elle est soulevée par le juge) d’une question préjudicielle.
Cette exception d’illégalité d’un acte réglementaire n’entraîne pas un sursis à statuer : le
juge doit y répondre lui-même avant de statuer sur le dossier au pénal dont il est saisi. S’il estime
que l’acte administratif contesté est « illégal », il devra l’écarter du procès en cours, se prononcer
sur l’accusation comme si ce texte n’existait pas.
On peut soulever devant le juge de l’ordre judiciaire saisi au fond en matière pénale,
tous les cas d’illégalité de l’acte administratif, c’est-à-dire tous les moyens d’illégalité soulevés
dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir.
47
C’est ce que prévoit l’article 76 de la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire Militaire.
48
Voir l’article 67 de la Loi-Organique n°13/011-B du 11 Avril 2013 portant Organisation, fonctionnement et compétence des
Juridictions de l’ordre judiciaires.
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Dès lors, le contrôle du juge de l’ordre judiciaire n’est pas un contrôle d’opportunité de
l’acte. C’est ainsi qu’il ne peut en principe retenir un moyen d’illégalité tiré de l’erreur manifeste
d’appréciation de l’auteur de l’acte.
Lorsque le juge pénal retient l’exception d’illégalité, il s’en suit plusieurs effets par
rapport à la personne l’ayant soulevé puis par rapport à l’acte lui même.
Par rapport à la personne, l’issu du procès pénal dépend de la légalité de l’acte attaqué.
Si le juge pénal le déclare illégal, le prévenu devra être acquitté.
Par rapport à l’acte, à la différence du recours pour excès de pouvoir, la décision obtenue
par ce seul prévenu produit, dès lors ici, l’effet d’une nullité simplement relative. Il n’y a pas
d’annulation erga omnes. Dès lors on pourrait concevoir que cet acte soit à nouveau utilisé dans
d’autres poursuites pénales, ces nouveaux prévenus pourraient eux aussi procéder de la même
façon.
Mais, puisque une telle reprise paraît longue, lourde et inutilement onéreuse, il y a lieu
d’éviter ce genre de répétition en admettant au sein de l’Etat49 que le parquet soit chargé d’aviser
cette autorité administrative, c’est-à-dire l’auteur de l’acte annulé, à mettre son acte annulé en
conformité avec la loi.
Aux termes de l’article 76 du Code judiciaire Militaire, on peut lire ce qui suit : Les
juridictions militaires connaissent, sur le territoire de la République, des infractions d’ordre
militaire punies en application des dispositions du Code Pénal Militaire. Elles connaissent
également des infractions de toute nature commises par des militaires et punies conformément
aux dispositions du Code Pénal ordinaire. Elles sont compétentes pour interpréter les actes
administratifs réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité lorsque, de cet
examen, dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis50.
C’est que le juge militaire peut apprécier la légalité et interpréter les actes administratifs
réglementaires, c’est-à-dire ayant une portée générale et impersonnelle, mais aussi les actes
administratifs individuels (avec une portée limitée), lorsque la solution du procès pénal dépend de
cette appréciation. Ce juge pénal peut donc apprécier la légalité et interpréter les deux catégories
d’actes administratifs (réglementaire et individuel).
49
En France, la charge d’aviser revient au parquet sur base d’une circulaire ministérielle du 04 févier 1994.
50
C’est ce que prévoit l’article 76 de la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant Code pénal Militaire.
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Donc, selon le code pénal militaire de 2002, la compétence de ce juge à interpréter tous
les actes administratifs est organisée par la loi. La seule limite essentielle est que la compétence
de ce juge suppose que l’issu du procès dépende de la régularité de l’acte administratif en
question. Il en est ainsi de l’autorisation de bâtir établie par l’autorité administrative
incompétente, alors que la personne s’en justifie face aux accusations d’occupation illégale.
Mais, ce juge ne sera pas compétent pour statuer sur des mesures qui n’ont aucune
incidence sur le procès pénal. En droit pénal du travail par exemple, le juge pénal n’est pas
compétent pour apprécier une décision d’un inspecteur du travail qui dresserait un procès-verbal
de non conciliation. Car de cet examen, ne dépend nullement l’issu du procès pénal.
L’article 76 de la loi judiciaire militaire, qui n’a pas d’équivalent dans le code pénal
ordinaire aborde des questions jusqu’ici connues en jurisprudence de manière assez complexe et
non sans contradictions au niveau des juridictions congolaises siégeant tant en matière
administrative que judiciaire.
Elle traite in fine des actes administratifs et en aborde deux questions distinctes :
l’interprétation et le contrôle de la hiérarchie des normes.
C’est la seule disposition de la législation militaire (et même ordinaire) congolaise qui se
rapporte au contrôle de la hiérarchie des normes en la matière en donnant au juge pénal militaire
une compétence assez étendue à examiner.
Il ne s’agit nullement des commissions militaires mais, le législateur vise en effet plutôt
les institutions juridictionnelles militaires. Toutes sont visées. Il en est ainsi :
- de la Haute Cour Militaire ;
- des Cours Militaires et Cours Militaires Opérationnelles ;
- des Tribunaux Militaires de Garnison ; et
- des Tribunaux Militaires de Police.
Le destinataire de l’acte dont la légalité est contestée importe peu. Il peut s’agir de toute
une catégorie de personnes voire tout le monde, lorsque c’est une norme (par définition générale
et impersonnelle) édictée par le pouvoir réglementaire ; une seule personne lorsque c'est une
décision administrative imposant des obligations ou accordant des « permis » (de conduire,
construire...etc) à une personne dénommée.
Cette formulation englobe deux cas de figure, à savoir : le texte critiqué pouvant être
incriminateur ou exonératoire.
C’est le cas lorsque l’infraction est portée par un acte réglementaire dont on peut
contester la légalité. Ce peut être également le cas lorsque la loi définit l’élément
matériel de l’infraction comme le non-respect d’une réglementation ou d’une
décision administrative.
Il en sera ainsi lorsqu’un militaire est poursuivi sur base de la violation d’un arrêté
du ministre de la défense incriminant les tapages nocturnes au camp militaire et les
punissant de la servitude pénale de 5 ans.
Un autre exemple peut se présenter lorsque le militaire poursuivi prétend avoir agi
sur base d’un bulletin de service (BS) dûment signé par la hiérarchie. Le parquet
militaire pourra alors contester la légalité d’un tel bulletin dont le militaire mis en
cause prétend qu’il vient contrarier l’accusation.
Au-delà du contrôle de légalité, il existe un autre contrôle que le droit congolais confie à
la Cour Constitutionnelle.
ier
51
Article 1 du Décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal, tel que modifié à ce jour.
ième
52
Article 2 du Décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal, tel que modifié à ce jour.
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Ce contrôle de constitutionnalité concerne aussi des lois pénales. Il n’est pas général ;
étant donné la possibilité pour la Cour Constitutionnelle de s’estimer incompétente face à
certaines normes et de les exclure du contrôle.
Chaque texte, selon sa place, doit être en conformité avec les normes qui lui sont
supérieures.
53
Il s’agit de l’article 160 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la Loi n°11/002 du
20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février
2006.
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Certes, toutes ces normes ne sont pas forcément pénales. Il est néanmoins possible de
retrouver celles qui le sont, et de ce fait soumises au contrôle devant la Cour Constitutionnelle par
voie d’exception en rapport avec une affaire pénale.
54
Article 43 de la Loi-organique n°13/026 du 15 Octobre 2013 portant Organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle.
55
Voir l’article 160 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la Loi n°11/002 du 20
janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006
et les articles 44-51 de la Loi-Organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle.
56
Voir l’article voir l'article 162 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la Loi
n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du
18 février 2006 et les articles 52-53 de la Loi-Organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de
la Cour Constitutionnelle.
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Le contrôle par voie d’action consiste dans une procédure engagée contre un texte ; une
action en justice intentée dont l’objet est précisément de faire juger qu’une norme supérieure
n’avait pas été respectée par une norme qui lui est inférieure. Si le juge saisi estime que le texte
entier est non conforme à la Constitution, ce texte attaqué sera annulé. Il disparaîtra pour tous et
pour toujours (erga omnes). La personne poursuivie pour une infraction portée par un tel texte
(déclaré inconstitutionnel) devra de ce fait être renvoyée des fins de poursuites étant donné la
nullité prononcée par la cour constitutionnelle.
La différence insérée entre les lois et ces autres normes répond à la particularité des
règlements intérieurs qui, pour produire leurs effets, n’ont pas besoin d'une promulgation
du Président de la République mais de la procédure de mise en application.
Seules quelques organes peuvent, selon la Constitution, déférer les lois à la Cour
constitutionnelle, avant leur promulgation, aux fins de cet examen de la constitutionnalité. Ces
organes compétents sont :
- le Président de la République ou le Premier ministre ;
- le Président de l’Assemblée Nationale, le Président du Sénat ou le dixième des députés ou
des sénateurs.
Par ailleurs, toute personne peut saisir la Cour pour inconstitutionnalité des Lois, des
actes ayant force de Loi, des édits, des Règlements Intérieurs des Chambres parlementaires, du
Congrès et des Institutions d’Appui à la Démocratie ainsi que des actes règlementaires des
autorités administratives58.
57
Articles 44-51 de la Loi-Organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle.
58
Art 48 de la Loi-Organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle.
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2. Délais fixés
Différents délais sont fixés à cet effet, selon qu’il s’agisse de la saisine ou du traitement.
59
Article 49 de la Loi-Organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle.
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La contrariété entre une norme pénale inférieure et une disposition constitutionnelle peut
porter sur différents aspects :
- Soit sur les composantes de l’infraction, à savoir les conditions préalables et les éléments
constitutifs ;
- Soit sur les mesures applicables aux justiciables qui seraient condamnés : la peine de
mort, les travaux forcés etc ;
- Soit sur un certain nombre de principe fondamentaux de droit pénal :
- L’irrespect du principe de « légalité » ;
- La violation du principe de non rétroactivité de la norme pénale de fond plus
sévère, et la rétroactivité in mitius ;
En dehors de ce procédé le plus classique, certains droits en développent un autre 60. Par
ailleurs, un autre type de contrôle consistant à l’examen de la conformité des normes aux
conventions internationales.
En tenant compte de la hiérarchie des normes et en se fondant ainsi sur l’article 215 de la
Constitution en vigueur61 qui dispose que les traités et accords internationaux régulièrement
conclus ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour
chaque traité ou accord, de son application par l’autre partie ; on se rend compte de la primauté
des traités ou accords internationaux par rapport aux lois internes.
60
Cet autre procédé consiste à valider la disposition de la loi déférée mais pas de façon pure et simple. Il en est ainsi du droit
français où la Conseil Constitutionnel peut valider une disposition en l’assortissant d’une réserve d’interprétation. Mais, un tel
procédé pose plus de difficultés. Puisque concrètement, la décision du Conseil Constitutionnel, c’est-à-dire la réserve
d’interprétation qu’il aura émise s’imposera au juge pénal, même si elle ne figure pas dans le texte de la loi publiée.
61
Article 215 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier
2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
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Il en résulte que toute norme pénale doit être conforme aux traités ou accords
internationaux dûment ratifiés.
La Cour Constitutionnelle congolaise devra écarter toute disposition interne qui serait
non-conforme à un traité ou un accord international dûment conclu par la République
Démocratique du Congo.
62
Article 216 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier
2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
63
Article 114 de la Loi-Organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle.
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Et pourtant, la question est d’un grand intérêt en matière pénale. C’est le cas par
exemple lorsqu’une loi interne, porte une sanction pénale proscrite par une Convention
internationale, dûment ratifiée par la République Démocratique du Congo. Les parties au procès
auraient été plus habiles à saisir la juridiction compétente pour contrôler la conformité de la
norme pénale interne ; peu importe qu’elle soit constitutionnelle, légale ou réglementaire.
D’emblée on aurait pensé qu’il s’agit d’un contrôle de Constitutionnalité. Alors que dans
ce cas ci, la Cour Constitutionnelle, bien qu’étant la juridiction indiquée pour assurer le contrôle
de constitutionnalité, procède en effet plutôt à un autre contrôle : le contrôle de conventionalité ;
nonobstant l’infériorité de la Convention internationale dûment ratifiée à la Constitution.
La prudence du constituant se conçoit par la consécration d’un tel contrôle a priori, bien
avant la ratification. L’idée doit donc être celle de se conformer avant que le traité ou accord
international ne devienne inférieur à la Constitution ; en évitant justement de procéder au contrôle
de conformité d’un texte supérieur à un texte qui, par une gymnastique juridique d’interprétation
de l’article 215 de la Constitution, lui devienne officiellement et régulièrement inférieur.
64
Article 216 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier
2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
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Lorsqu’un traité ou accord international est conclu, ratifié par le Congo et publié au
journal officiel de la république, il me semble tout à fait logique qu’il prime sur les normes
antérieures qui lui étaient contraires. Mais que décider lorsqu’après conclusion, approbation,
ratification et publication, une norme adoptée s’avère contraire à la norme pénale interne (norme
constitutionnelle, légale ou réglementaire). Deux hypothèses sont à distinguer :
- Lorsqu’il est contraire à la Constitution, il me semble que la solution devra être tirée de
l’article 114 de la loi organisant la Cour Constitutionnelle. De ce fait, il va falloir réviser
la Constitution en la conformant à la Convention internationale.
- Lorsqu’il est contraire aux lois qui lui sont inférieures, selon toute vraisemblance, et en
vertu de l’article 215 de la Constitution de la République Démocratique du Congo en
vigueur, on devra faire prévaloir le traité66.
65
Article 114 de la loi n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle.
66
Article 215 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier
2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 87 | P a g e
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Au sein de l’Union Africaine, il est tout à fait possible de se prévaloir des droits garantis
par des instruments juridiques internationaux ou plus précisément régionaux afin de faire échec
aux dispositions pénales ou plus généralement aux normes pénales internes que l’on considère
être contraires aux instruments juridiques de cette union, dûment ratifiées par la République
Démocratique du Congo.
C’est ainsi qu’à plusieurs occasions, cette commission a toujours pris position contre les
législations de certains Etats africains.
- Aussi, doit-on remarquer que sur le fondement de l’article 4 de la Charte africaine des
droits de l’Homme et des peuples70, prévoyant ce qui suit : La personne humaine est
inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et à l'intégrité physique et morale
de sa personne : Nul ne peut être privé arbitrairement de ce droit ; la commission
africaine avait déclaré que la République Démocratique du Congo avait violé l’article 4 et
les dispositions des articles 1ier, 7(1) (a) et 7(1) (c) de la Charte africaine.
67
Communication 259/02, Groupe de Travail sur les Dossiers Judiciaires Stratégiques c/République Démocratique du Congo,
Adoptée lors de la 14ième Session extra-ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, tenue à
Nairobi, au Kenya, du 20 au 24 juillet 2011.
68
Article 5 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, Adoptée le 27 juin 1981 et entrée en vigueur le 21
octobre 1986.
69
Communication n°236/2000, Affaire Curtis Francis Doebbler c/Le Soudan, Adoptée lors de la 33ième Session ordinaire de la
Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, tenue à Niamey, au Niger, du 15 au 29 mai 2003.
70
Article 4 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, Adoptée le 27 juin 1981 et entrée en vigueur le 21
octobre 1986.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 88 | P a g e
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En conséquence, étant donné les condamnations des mineurs à la peine de mort par les
juridictions militaires congolaises, elle avait dans une communication du 24 juillet 201171,
entre autres : recommandé vivement à la République Démocratique du Congo
d’harmoniser sa législation nationale avec ses obligations internationales en matière des
droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne les droits de l’enfant.
Il est vrai que ce mécanisme ne suscite pas l’engouement dans la société congolaise,
alors qu’il est organisé. On constatera que d’une part, il est moins connu et d’autre part ses
décisions-communications sont assez souvent non exécutées et de ce fait inefficaces.
A l’état actuel de ce droit, six de neuf actes uniformes comportent des dispositions
d’incrimination pénale.
71
Communication 259/02, Groupe de Travail sur les Dossiers Judiciaires Stratégiques c/République Démocratique du Congo,
Adoptée lors de la 14ième Session extra-ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, tenue du 20
au 24 juillet 2011, Nairobi, Kenya. Dans cette affaire, la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, avait :
- Recommandé vivement à la République Démocratique du Congo d’harmoniser sa législation nationale avec ses obligations
internationales en matière des droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne les droits de l’enfant.
- Recommandé particulièrement à la République Démocratique du Congo de veiller à l’application du Code de Procédure
Pénale ordinaire et de tous autres textes législatifs et réglementaires, en conformité avec la Charte africaine et les autres
instruments des droits de l’homme auxquels elle est Partie.
- Recommandé instamment à la République Démocratique du Congo de verser aux victimes une indemnisation dont le
montant sera calculé selon la législation congolaise en prenant en compte la situation des victimes à l’époque des faits, le
préjudice souffert, la durée de la procédure et les impenses.
- Demandé enfin à la République Démocratique du Congo de lui rapporter par écrit, dans les cent quatre vingt jours (180)
jours de la notification de la présente décision, quant aux mesures entreprises à l’effet de la mise en oeuvre de ces
recommandations.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 89 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
En effet, si le contentieux relatif à l’application des actes uniformes est réglé en première
instance et en instance d’appel par les juridictions des Etats parties, en revanche, ce contentieux
en cassation et celui de l’interprétation de ces instruments reviennent à la Cour Commune de
Justice et d’Arbitrage.
Saisine pour avis consultatif. Le Traité de Port-Louis admet que la Cour puisse être
saisie en sollicitation de son avis consultatif :
- Par tout Etat Partie ou par le Conseil des ministres sur toute question relative au Traité
aux règlements pris pour son application, aux actes uniformes et aux décisions.
- Par les juridictions nationales.
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Article 10 du Traité de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), conclu à Port-Louis
(Ile Maurice) le 17 octobre 1993, modifié à Québec (Canada) le 17 octobre 2008.
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Article 14 du Traité de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), conclu à Port-Louis
(Ile Maurice) le 17 octobre 1993, modifié à Québec (Canada) le 17 octobre 2008.
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Cours de Droit Pénal Général 2015
Saisine sur recours en cassation. Saisie par la voie du recours en cassation, la Cour
Commune de Justice et d’Arbitrage se prononce sur les décisions rendues par les juridictions
d’Appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application
des actes uniformes et des règlements prévus au Traité à l’exception des décisions appliquant des
sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel
rendues par toute juridiction des Etats Parties dans les mêmes contentieux. En cas de cassation,
elle évoque et statue sur le fond.
C’est seulement après avoir été soumise au contrôle et lorsqu’elle sera déclarée
conforme qu’une telle norme pénale sera régulièrement admise à l’application.
L’étude du principe de normativité des délits et des peines nous a permis de comprendre
que seuls les faits préalablement définis comme infractionnels par la norme peuvent être punis. Il
est donc essentiel que le juge sache quelle loi il devra appliquer. C’est pourquoi il doit pouvoir
l’interpréter.
L’interprétation d’une norme pénale est une opération intellectuelle qui consiste à
rechercher la portée réelle de ladite norme dans le but d’en assurer une correcte application.
Si la norme est claire et précise, le problème ne se pose pas. Mais toute norme doit être
interprétée, car il faut assurer le passage de la règle abstraite, qui définit l’infraction et établit la
sanction, au cas concret à résoudre. L’interprétation donne donc naissance à la jurisprudence.
Alors que les autres disciplines juridiques admettent l’interprétation extensive, voire l’analogie,
l’interprétation pénale est stricte. Elle connaît ses sources et méthodes propres.
A. Interprétation authentique
Elle émane du législateur lui-même. Elle revêt une force obligatoire pour le juge, car elle
est l’œuvre de l’autorité même qui a rédigé la loi. En effet, le législateur intervient pour donner la
signification, la portée de la norme.
Elle prend ce nom lorsqu’elle est faite dans le texte même à interpréter. C’est le cas de
l’article 174 C.P. qui définit le souteneur. Pour fixer l’opinion sur le terme souteneur, il le définit
lui-même dans cet article. Cette explication c’est donc l’interprétation authentique contextuelle ;
l’article 212 C.P. définit l’attentat ; art. 213 C.P. définit le complot, …
Il en était ainsi des dispositions finales de l’ancien accord global et inclusif qui précisait
ce qui suit au point A : « La constitution de transition est élaborée sur base de présent accord
inclusif sur la transition en R.D.C. et en fait partie intégrante ».
B. Interprétation judiciaire
Est celle qui émane du juge, des cours et tribunaux. Elle s’appelle aussi jurisprudence.
Quand le législateur ne donne pas la signification d’un concept, le juge peut combler ce vide.
Cette interprétation n’a pas autorité de droit, mais de fait. Pour l’autorité des arrêts de la
Cour de cassation, deux hypothèses sont envisageables :
- en cas de renvoi après cassation, les cours et tribunaux inférieurs sont tenus de se
conformer à l’arrêt de la Cour de cassation sur le point de droit jugé par celle-ci ;
- dans les autres cas, les arrêts de la Cour de cassation ne s’imposent pas aux juridictions
inférieures. Ils jouissent tout de même d’une autorité morale et la pratique judiciaire
démontre qu’ils ont une autorité de fait.
C. Interprétation doctrinale
Elle émane des savants juristes qui se prononcent dans leurs écrits sur le sens à donner à
telle disposition normative. Elle n’a aucune autorité de droit, mais une réelle autorité morale.
A. L’interprétation littérale
C’est une méthode qui a régné comme corollaire du principe de la « légalité » à la suite
des idées développées par les auteurs classiques. Elle consiste, en effet, à rechercher la portée de
la norme en s’attachant à la lettre de la norme, c’est-à-dire, en se limitant aux termes même
utilisés par le législateur dans le texte. Il s’agit donc d’une interprétation très étroite, restrictive,
judaïque, traditionnelle qui fait du juge une simple bouche qui prononce les paroles de la norme.
Cette méthode est écartée parce qu’elle minimise le rôle que doit jouer le juge (procéder
aux adaptions nécessaires).
B. L’interprétation téléologique
Elle est celle qui consiste à dégager le but de la norme, la volonté du législateur. Elle fait
prédominer l’esprit sur la lettre de la norme. Elle est aussi appelée méthode déclarative de la
volonté du législateur. Lorsqu’il y a contradiction entre la lettre et l’esprit de la norme, celui-ci
l’emporte.
1. Les principes
a. La norme pénale doit être appliquée à tous les cas rentrant dans ses termes
Le juge ne doit rien ajouter aux conditions d’existence de l’infraction ni créer une cause
justificative ou d’exonération de responsabilité non prévue par la norme. Il en est ainsi de l’article
79 C.P. : « Quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est couple
de vol ».
b. La norme pénale ne peut être appliquée qu’aux seuls cas rentrant dans ses termes
Dans cette recherche, le juge tient compte, certes, de la lettre et de l’esprit de la norme,
mais aussi de la ratio legis, des travaux préparatoires, de l’évolution sociale, scientifique et
technique.
Donc, tout en étant stricte, l’interprétation pénale ne saurait être restrictive. Elle doit
sauvegarder le bon sens, la logique et permettre des adaptations justifiées par l’ordre social
actuel.
Il en existe plusieurs :
a. L’étude grammaticale
C’est une technique qui consiste pour le juge à commencer à dégager le sens de la norme
à partir de l’analyse grammaticale du texte, c’est-à-dire, à partir du texte lui-même. Dans cette
analyse grammaticale, les termes utilisés par le législateur sont entendus dans leur sens ordinaire,
c’est-à-dire, leur sens usuel et normal, sauf si le législateur leur accorde un sens technique. S’il le
fait, il le dit. Lorsque l’étude grammaticale ne permet pas à découvrir le sens et la portée de la loi,
il faudra utiliser d’autres techniques.
Le juge se référera avec intérêt à l’exposé des motifs aux rapports des commissions et
aux interventions des rapporteurs et d’autres orateurs qui proposent des amendements.
Toutefois, il faudrait plutôt se méfier des interventions improvisées faites au cours des
débats. Elles ne sont pas toujours œuvre de spécialiste. Et même lorsqu’il s’agit des spécialistes,
le cadre est tel qu’on ne peut toujours attendre l’expression la plus adéquate.
C’est une technique qui permet au juge de sanctionner certains faits qui se sont produits
après la mise en vigueur d’un texte, mais qui rentrent dans son champ d’application normal, sans
pour autant que le législateur ait visé expressément ledit comportement dans ledit texte ; tout
simplement parce qu’à l’époque de l’élaboration du texte, le législateur ne pouvait pas se les
représenter. C’est le cas de l’article 79 du Code Pénal qui sanctionne le vol et le définit comme
une soustraction frauduleuse d’une chose appartenant à autrui.
En le définissant ainsi, le législateur n’a visé que les biens matériels, car, à l’époque,
seuls les biens matériels pouvaient être volés et étaient susceptibles d’appréhension et de
soustraction. Avec l’évolution, il est arrivé qu’il y ait d’autres biens immatériels susceptibles
d’être soustrait. Conformément à cette définition, celui qui vole ce bien immatériel (l’électricité)
ne sera pas sanctionné, car, il n’y a pas de texte qui sanctionne ce comportement.
C’est une technique qui permet au juge d’établir la vraie signification d’une norme ou
d’une disposition légale en prenant en compte la place qu’elle occupe dans l’ensemble du texte.
Généralement, le texte normatif se présente par des rubriques, c’est-à-dire, que la norme
est élaborée suivant un plan. Pour interpréter donc une disposition de cette norme, il faut la placer
dans son contexte, dans le texte en général.
Lorsque le juge épuise tous les moyens et n’arrive pas à déterminer la vraie portée de la
norme ou même pour vérifier l’exactitude de sa compréhension de la norme, le juge peut recourir
au droit comparé pour savoir quelles sont les sanctions qui sont proposées dans d’autres lois pour
ce problème-là. Toutefois, cette référence au droit étranger doit se faire avec prudence. En effet,
le droit étranger permet au juge de s’inspirer et non de copier, car les textes ne sont pas toujours
les mêmes et même s’ils étaient identiques ou proches, ils régissent des pays différents, des
peuples, des situations et des mentalités qui diffèrent. Il doit donc adopter la résolution puisée en
droit comparé aux réalités locales.
Elles sont de nature à fournir des renseignements précieux sur le sens et la portée de la
norme.
Il en est ainsi de la notion d’ordre social qui n’a pas le même contenu dans un pays
démocratique que dans un pays au régime totalitaire.
C. L’analogie
Elle consiste pour le juge à résoudre un cas non prévu par la norme en se fondant sur
l’esprit général du droit pénal, c’est-à-dire, en recourant aux fondements de l’ordre juridique pris
dans leur ensemble75.
Dans l’un comme dans l’autre cas (légale et juridique), le juge se transforme en
législateur, il crée le droit alors que tel n’est pas son rôle. Son rôle est d’appliquer la norme.
Compte tenu du principe de la « normativité », l’analogie est écartée en droit pénal ; elle n’est pas
une méthode d’interprétation en droit pénal. Toutefois, l’analogie intra-legem, peut être admise si
elle va dans le sens de l’intérêt du prévenu.
En définitive, en droit pénal, l’analogie, qui consiste à partir de la situation visée par le
texte pour appliquer ce même texte à des situations différentes (non visées par le texte) mais
ressemblantes, est interdite : le juge pénal doit au contraire se méfier des ressemblances.
Dès lors, étendre le texte pénal de fond (droit pénal général ou droit pénal spécial) est
considéré comme défavorable à la personne poursuivie. Mais, on n’admet que l’analogie in
favorem en soutenant dans ce cas que l’interprétation stricte ne s’impose pas. Ce qui s'explique
par l’application du principe dont l'énoncé latin commence ainsi : « Ratio legis cessante »,
voulant dire lorsque cesse la raison d'être de la règle, doit cesser l’application de la règle.
74
Pierre BOUZAT et Jean PINATEL, Traité de droit pénal et de criminologie, Tome I, Droit pénal général, Dalloz, Paris, 1963,
n°88
75
JIMENEZ DE ASUA, « L’analogie en droit pénal », in RSC, 1949, 189.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 98 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
C’est aussi lorsqu’une norme reste douteuse que le législateur peut intervenir en
promulguant une norme interprétative ou une nouvelle norme réglementant toute la matière de
manière à résoudre le maximum de difficultés d’interprétation jusque-là rencontrées.
La norme pénale peut s’appliquer tantôt en tenant compte du temps, tantôt de l’espace.
En République démocratique du Congo, la matière est traitée dans les dispositions ci-
après :
- l’article 17 alinéas 2 à 5 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée le 20
janvier 2011 dispose ce qui suit : « Nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou
condamné qu’en vertu de la loi et dans les formes qu’elle prescrit. Nul ne peut être
poursuivi pour une action ou une omission qui ne constitue pas une infraction au
moment où elle est commise et au moment des poursuites. Nul ne peut être condamné
pour une action ou une omission qui ne constitue pas une infraction à la fois au moment
où elle est commise et au moment de la condamnation. Il ne peut être infligé de peine
plus forte que celle applicable au moment où l’infraction est commise ».
- l’article 1er du décret du 30 Janvier 1940 portant Code Pénal prévoit ce qui suit : « Nulle
infraction ne peut être punie de peines qui n’étaient pas portées par la loi avant que
l’infraction fut commise ».
Ajoutons que, en-deçà et au-delà de ces limites, la question ne se pose pas. Si l'évolution
législative est intervenue avant l'infraction, elle s’y applique naturellement. Si elle intervient
après que le jugement soit devenu définitif et que la peine ait été entièrement exécutée, il n'y a
pas de remise en cause de la justice rendue. C'est entre les deux (infraction et décision) qu’un «
conflit » de lois apparaît : Faut-il appliquer la loi (ancienne) qui existait au jour de l'infraction ou
celle (nouvelle) qui existe au jour du jugement ?
- Soit la nouvelle loi s’efface, au motif qu'elle remettrait en cause des droits «
acquis » et intouchables sauf à porter gravement atteinte à la liberté des
personnes ou à la sécurité juridique nécessaire à toute vie collective.
Pour les premières, définition des infractions et des sanctions, s’appliquer c’est rétroagir
sur des faits antérieurs. Sinon, elles ne servent à rien : c’est la loi ancienne qui s’applique.
En droit pénal, le principe mis en avant est celui de la non rétroactivité de la loi
nouvelle, qui serait, pour le juge, avec l'interprétation stricte, l'expression même de la « légalité »
des délits et des peines. C'est exact, mais ce n'est pas suffisant de le dire. La matière, à bien y
regarder, est beaucoup plus subtile.
Déjà, il est curieux que le principe, qui est dans tous les discours, ne soit pas nommé de
manière expresse dans les textes, ni dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, ni
dans le Pacte international (ONU) relatif aux droits civils et politiques ; ni dans la constitution en
vigueur, ni dans le code pénal. Nulle part en effet, il n’est écrit que la norme pénale n’est pas
rétroactive. Même si, il faut le relever, cela est dit autrement.
Ensuite, il est certain que les règles ont été initialement pensées pour les seuls textes
d'incrimination et uniquement lorsqu'ils aggravaient la situation des personnes poursuivies.
Enfin, il est vite apparu que l'intérêt bien compris des personnes poursuivies, raison
d'être du principe de « légalité » et de ses déclinaisons, impose de nombreuses exceptions ou
limites. C’est au point qu'on peut finalement douter, Mme Rassat le montre bien dans son cours
(éditions Ellipses) : est-ce la non rétroactivité ou l’application immédiate qui l’emporte ?
Différentes doctrines enseignent en général que c'est la non rétroactivité pour les lois de fond et
l’application immédiate pour les lois de forme. Ce sera le plan du paragraphe suivant.
La norme pénale de fond est celle qui définit les infractions et détermine les sanctions
pénales. Dans ce cas, on l’appellera norme pénale parfaite. Si elle ne porte que soit
l’incrimination soit la sanction, elle sera qualifiée de norme pénale imparfaite.
Lorsque deux lois pénales de fond sont en conflit, le principe de solution est celui de la
non rétroactivité de la norme pénale de fond. Cette norme ne rétroagit pas ; elle dispose pour
l’avenir, c’est-à-dire, elle ne régit que l’avenir et non le passé. On parle alors de la non
rétroactivité des normes d’incrimination et de sanction pénale. En principe, une norme pénale ne
doit s’appliquer qu’aux seuls faits constitutifs d’une infraction à la date à laquelle ils ont été
commis. Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à cette date.
Le deuxième principe est considéré par la doctrine comme une exception au principe de
la non rétroactivité. En effet, la norme pénale de fond (nouvelle) rétroagit si elle est plus douce
pour le prévenu : c’est la « rétroactivité in mitius » ou « rétroactivité de la lex mitia ». C’est que
l’on admet que les dispositions nouvelles puissent s'appliquer aux infractions commises avant
leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose
jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes.
A. La norme applicable
Pour savoir s’il faut appliquer le principe de la non rétroactivité ou plutôt l’exception de
rétroactivité in mitius, il faut comparer le texte en vigueur au moment des faits et le texte
nouveau, et déterminer celui qui est doux, moins sévère. Et si les faits sont soumis au juge, il
faudra savoir si le texte nouveau peut être applicable en cours de procédure.
Il faut comparer d’abord l’incrimination prévu par chaque norme, avant d’en arriver aux
pénalités.
a. Incriminations
Une norme est plus douce lorsqu’elle abroge une incrimination, supprime une
circonstance aggravante, admet au bénéfice du prévenu un fait justificatif ou encore lorsqu’elle
augmente le nombre des éléments constitutifs de l’infraction. Une norme est plus sévère dans les
hypothèses inverses.
Lorsque deux normes sont égales au point de vue des incriminations et qu’ainsi on
n’arrive pas à déceler la norme la plus douce, il convient de comparer les pénalités.
b. Les pénalités
Il faut tout de même signaler une difficulté : si le texte établit une hiérarchie des peines
principales, il n’en est pas de même des autres.
En sorte que si de part et d’autre (dans les deux lois) il y a des peines complémentaires
ou accessoires, il n’y aura pas toujours facilité d’apprécier leur gravité. Le juge est alors contraint
de recourir à la comparaison in concreto (dans le concret).
Lorsqu’un nouveau texte supprime l’infraction ou en réduit les peines alors que les faits
ne sont pas encore définitivement jugés, il doit être appliqué, à l’exclusion du texte qui existait au
moment des faits.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 102 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Il est entendu que lorsqu’un jugement définitif est déjà intervenu, la norme nouvelle, fut-
elle la plus douce, ne peut être qu’inopérante.
Elle laisse subsister les condamnations qui sont passées en force de chose jugée, « si elle
ne les abolit pas ou ne les modifie pas par une disposition expresse et formelle »76.
Cependant, on peut se demander si cette solution demeure valable dans le cas d’une
norme nouvelle qui enlève au fait son caractère infractionnel. Il n’est ni juste, ni opportun que
l’agent continu à exécuter une peine relative à des actes que la société considère désormais
comme licites.
Une autre question est de savoir si la norme nouvelle qui supprime ou réduit la peine
peut être appliquée aux personnes irrévocablement condamnées. La réponse doit être positive, car
un châtiment que le pouvoir social lui-même a déclaré inutile, ne peut plus, sans injustice,
continuer de recevoir son exécution78.
Qu’il s’agisse d’une norme nouvelle qui supprime le caractère infractionnel des faits ou
de celle qui supprime ou réduit la peine, il revient au législateur, dans les deux cas, d’appliquer
aux personnes définitivement condamnées, par une disposition spéciale, le bénéfice de la norme
nouvelle. A défaut, le Chef de l’Etat y suppliera par la grâce. Sans cette disposition ou cette
grâce, la peine continue à être appliquée.
Il y a des cas où la norme n'est pas « réellement nouvelle » et d’autres où elle n'est pas «
réellement pénale ». Ce sont autant de difficultés en matière de non rétroactivité de la norme
pénale.
76
Jacques Joseph HAUS, Principes généraux du droit pénal belge, 3e éd., 2 T., Gand, 1869, réimprimé à Bruxelles, 1979, n°186.
77
Article 112 – 4 Nouveau code pénal français.
78
Jacques Joseph HAUS, Op. cit.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 103 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
- Les lois introduisant non pas de nouvelles peines, mais des « mesures de sûreté».
Il n'est pas toujours aisé de déterminer si une loi est ou non moins sévère. Il y a des lois
pénales « entièrement plus douces » et d'autres « partiellement plus douces ».
Que les normes interprétatives soient sévères ou douces au prévenu, elles s’appliquent
toujours parce qu’elles sont considérées comme faisant partie intégrante de la loi interprétée. Car,
celle-ci est supposée avoir eu dès le départ le sens que le législateur vient de fixer à la loi
interprétative.
Les mesures de sûreté sont des mesures restrictives de liberté destinées à prévenir la
délinquance des personnes trouvées en état dangereux pour l’ordre public et l’ordre social. Dans
ces mesures rentrent les mesures éducatives et thérapeutiques.
La doctrine dominante est que, les mesures de sûreté étant prises dans l’intérêt des
délinquants (elles n’infligent pas une souffrance), elles doivent toujours rétroagir, c’est-à-dire,
elles doivent recevoir application même s’il s’agit des faits connus antérieurement à la
promulgation de la loi nouvelle.
Pour certains auteurs, il faut faire un distinguo entre les mesures favorables et
défavorables. Sont ainsi défavorables au délinquant, les mesures de sûreté qui infligent une
souffrance : la Castration, la stérilisation… ; mais, pareilles pratiques, étant attentatoires à la
dignité humaine, ne peuvent pas en principe occuper de place dans une législation pénale
moderne.
Les normes temporaires assignent un terme à leur application dans le temps. Les normes
de circonstances sont proches des normes temporaires en ce sens qu’elles sont aussi prises pour
réglementer une situation provisoire. Cependant, lorsqu’une norme est pour un temps déterminé
et qu’elle vient d’être abrogée, la question est de savoir si un prévenu peut être condamné pour
des faits commis au temps où la norme était encore en vigueur.
Les dispositions de l’article 17 al. 3-4 de la Constitution du 18 février 2006 telle que
modifiée le 20 janvier 2011 déclarent que Nul ne peut être poursuivi pour une action ou une
omission qui ne constitue pas une infraction au moment où elle est commise et au moment des
poursuites. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui ne constitue pas une
infraction à la fois au moment où elle est commise et au moment de la condamnation. Ainsi, le
prévenu ne peut être condamné pour des faits commis sous l’empire d’une norme temporaire ou
de circonstance qui vient d’être abrogée. Le législateur ne saurait y déroger, s’agissant là d’un
principe constitutionnellement consacré.
Bien que la norme nouvelle soit plus sévère que celle ancienne, le législateur peut-il
disposer expressément qu’elle rétroagira ou à l’inverse qu’elle ne régira que l’avenir. En R.D.C.,
le principe de la non rétroactivité de la norme pénale, ainsi que son exception d’application des
normes plus douces sont constitutionnels. En plus, la R.D.C. a adhéré à la Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme qui consacre ce principe et qui a une force supérieure à la loi.
Celle-ci ne saurait donc déroger aux principes du droit pénal transitoire sans violer les
dispositions constitutionnelles (art. 17 de la Constitution) et les engagements internationaux du
pays. Cependant, le juge pénal n’est pas juge de la constitutionnalité de sorte que l’on peut bien
imaginer que le législateur promulgue une loi disposant expressément qu’elle rétroagit alors
qu’elle est plus sévère, ou qu’elle ne dispose que pour l’avenir alors qu’elle est plus douce. Dans
pareille hypothèse, certains auteurs pensent que le juge pénal sera tenu d’appliquer la loi
nouvelle, même si elle viole la constitution79.
Le problème de conflit des normes de forme se pose lorsqu’une norme nouvelle est
promulguée alors que la procédure visée par cette norme était déjà engagée sous l’empire de
l’ancienne, mais n’est pas encore terminée, quelle attitude doit adopter le juge pour donner de
suite à ladite procédure ? Prendre l’ancienne ou la nouvelle norme ?
L’application immédiate ne veut pas dire rétroactivité parce que la nouvelle norme qui
entre en vigueur n’annule pas ce qui a été élaboré avant sa mise en vigueur.
79
Gérard STEFANI, Georges LEVASSEUR et Bernard BOULOC, op. cit., p. 167.
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C’est que, l'application immédiate de la norme nouvelle est sans effet sur la validité des
actes accomplis conformément à la norme ancienne. Toutefois, la peine cesse de recevoir
exécution quand elle a été prononcée pour un fait qui, en vertu d'une loi postérieure au jugement,
n'a plus le caractère d'une infraction pénale.
Pour mieux comprendre cette différence, considérons les trois solutions suivantes :
Cette solution indique que la norme ancienne continue à régir les procédures qui ont
commencé sous son empire et la nouvelle ne devant s’appliquer qu’à celles engagées après sa
promulgation.
Cette solution doit être écartée, car les lois de procédure sont censées être faites pour une
meilleure administration de la justice et il serait contraire à cet intérêt de maintenir en vigueur des
normes dont, par la promulgation des nouvelles, on reconnaît les lacunes et les faiblesses.
Cette solution a comme conséquence d’abolir même pour le passé les effets de la norme
ancienne et de régir les procédures en cours depuis qu’elles ont commencé. Seules lui échappent
les procédures qui ont conduit à un jugement définitif. Elle est également écartée si l’on
considère le tort qu’elle causerait aussi bien au délinquant qu’à la société. Elle crée, en effet, une
insécurité juridique pour le justiciable et entraîne des coûts injustifiés pour la justice.
Cette solution conduit à ce que jusqu’à sa promulgation, les instances sont régies par la
norme ancienne, et aucun effet de celle-ci n’est mis en cause. Dès sa promulgation, la norme
nouvelle s’applique alors aux procédures en cours et à toutes celles qui naîtront.
80
. Article 112-2 du Code Pénal Français de 1992.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 106 | P a g e
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B. Quelques dérogations
2. En ce qui concerne les voies de recours : elles doivent être régies, non par un
nouveau, mais plutôt par le texte en vigueur lors du jugement. Notons aussi
qu’un texte nouveau qui supprime une voie de recours ne peut pas s’appliquer
immédiatement, car elle remet en cause les droits acquis des parties au procès81.
3. Les textes relatifs à la prescription donnent lieu à controverse. Selon que l’on
considère la prescription comme relevant du fond ou de la forme, on estime qu’il
faut appliquer le texte nouveau si il est favorable au prévenu, ou alors qu’il faut
immédiatement appliquer le texte nouveau, qu’il soit favorable ou non.
1. Quelle loi doit-on appliquer lorsque l’auteur d’une infraction est appréhendé au
moment des poursuites dans un pays autre que celui dans lequel l’infraction a été
commise ? Doit-on appliquer la norme du pays de la commission de l’infraction
ou celle du pays où l’infracteur a été appréhendé ?
81
. Article 112-3 du Code Pénal Français prévoit ce qui suit : Les lois relatives à la nature et aux cas d'ouverture des voies de
recours ainsi qu'aux délais dans lesquels elles doivent être exercées et à la qualité des personnes admises à se pourvoir sont
applicables aux recours formés contre les décisions prononcées après leur entrée en vigueur. Les recours sont soumis aux règles
de forme en vigueur au jour où ils sont exercés.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 107 | P a g e
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2. Quelle attitude doit avoir le juge (quelle norme doit-il appliquer) lorsqu’une
infraction a été perpétrée dans plusieurs pays différents et successivement ?
En fonction du critère utilisé, chaque titre de compétence reçoit une appellation. Ce sont
des qualifications le plus souvent doctrinales, mais qui sont toutefois très classiques et connues
dans la plupart des Etats.
C’est donc un principe qui veut que la norme pénale d’un pays déterminé s’applique à
toutes les infractions commises sur tout le territoire de ce pays quelle que soit la nationalité des
membres du couple pénal.
A l’inverse, la norme de ce pays ne peut pas s’appliquer aux infractions commises hors
de son territoire même par ses nationaux. La doctrine a soumis à l’analyse ce principe et en est
arrivé à la conclusion qu’il comporte des avantages et inconvénients.
a. L’intérêt social
Ce système permet une meilleure sauvegarde de l’intérêt social parce que l’infraction est
jugée et sanctionnée le plus près possible de l’endroit où elle a été commise. De cette manière là,
les témoins de l’infraction sont également les témoins de la sanction et ainsi se réalise non
seulement la prévention individuelle, mais aussi la prévention collective par l’intimidation.
On estime, en effet, que l’agent (l’auteur de l’infraction) connaît mieux la norme du pays
où il a délinqué alors qu’il peut ignorer sa propre loi nationale.
Une des fonctions essentielles de l’Etat c’est le maintien de l’ordre à l’intérieur de ses
frontières. Lorsque la loi du pays est violée, l’autorité de l’Etat l’est également. C’est pourquoi
l’Etat doit sanctionner ces infractions.
Ce dernier ne pourra en aucun cas le punir, car le crime n’a pas été commis sur son
territoire. Le pays du lieu de l’infraction ne pourra pas non plus le punir, car cela supposerait que
le pays d’origine extrade le criminel. Or, il y a des pays qui n’extradent pas leurs propres
nationaux. Pour corriger cette imperfection de l’impunité, on a imaginé d’autres systèmes.
Ce système veut que la norme d’un pays s’applique à tous ses nationaux même en
dehors de son territoire et ne s’applique qu’à ses nationaux à l’intérieur de son territoire.
C’est un principe qui veut que la norme d’un Etat déterminé s’applique à toutes les
infractions commises par ses nationaux soit à l’intérieur soit à l’extérieur du territoire. Le
délinquant est jugé d’après sa norme d’origine et relève des tribunaux de son pays.
C’est ce principe qui veut que la norme pénale d’un Etat déterminé s’applique à toutes
les infractions qui victimisent ses nationaux, où qu’ils se trouvent. Il est justifié par l’idée que la
norme pénale de la victime est la plus à même d’assurer sa protection.
Deux types de critiques sont formulés : D’abord, on estime que le juge de la même
nationalité que la victime peut être partial ; ensuite, la justice saisie peut être inefficace et trop
coûteuse.
Enfin, il peut arriver qu'aucun des critères précédemment étudiés n'entre en compte et
qu'un État se déclare compétent du seul fait de la présence et de l’arrestation des suspects sur son
territoire. La compétence « universelle » applicable à certaines infractions seulement (génocide,
crime contre l’humanité, crime de guerre, torture, piraterie, trafic de matières nucléaires...etc.) qui
portent atteinte à des valeurs considérées comme essentielles par un nombre grandissant d'État,
constitue le système cherchant à ce que les auteurs de tels crimes ne trouvent aucun État au
monde où ils puissent être à l’abri des poursuites.
Le droit positif congolais consacre comme principe celui de territorialité. C’est que la
norme congolaise sera d’application chaque fois qu’il sera établi que l’infraction a été commise
sur le territoire congolais.
Mais, ce principe de territorialité est corrigé par des emprunts réalisés à la fois auprès du
système de l’universalité et de celui de personnalité.
A. Principe de territorialité
Le terme « territoire » doit être entendu dans son acception large (l’espace terrestre,
espace aérien et la mer territoriale). De même, sont compris dans le territoire de la République :
les navires et aéroports battant pavillon congolais, les ambassades congolaises,… Relèvent
cependant de la compétence des tribunaux congolais, toute infraction dont l’un des éléments
constitutifs a été réalisé au Congo à condition qu’aucun jugement définitif n’ait été rendu à
l’étranger pour les mêmes faits et à l’endroit du même infracteur parce que le Congo admet le
principe Non bis in idem. On vise là les infractions continues qui s’opposent des infractions
instantanées.
B. Emprunts de correction
- dans l’autre hypothèse est appliqué le système de la personnalité passive retenu dans
les alinéas 4 et 5 de l’article 3 C.P. Ces dispositions rendent compétent le juge
congolais pour connaître les infractions commises à l’étranger mais portant atteinte
à la sûreté de l’Etat, même si elles ont déjà été jugées à l’étranger. Compte tenu de
la valeur des intérêts qui sont en jeu, les juges congolais doivent les juger en
excluant le principe « non bis in idem ».
Le principe de l’universalité est mis en œuvre dans l’article 3 alinéa 1er du code pénal.
Cet article donne le pouvoir au juge congolais de poursuivre toute personne arrêtée sur le
territoire national pour avoir commis une infraction d’une certaine gravité même si cette
infraction a été commise à l’étranger.
Pour que cette disposition s’applique, l’infraction doit être punie d’une peine de
servitude pénale de plus de deux mois et les poursuites ne peuvent être intentées qu’à la requête
du ministère public.
Il faut souligner que l’inculpé ne doit pas avoir été jugé définitivement à l’étranger et, en
cas de condamnation, n’ait pas subi ou prescrit sa peine ou obtenu sa grâce (sauf en cas d’atteinte
à la sûreté de l’Etat et à la foi publique).
A. L’extradition
1. Définition de l’extradition
L’extradition est une procédure internationale par laquelle un Etat appelé « Etat requis »
accepte de livrer un individu réfugié sur son territoire à un autre Etat appelé « Etat requérant »
qui en a fait la demande et qui se propose soit de juger cet individu, soit l’ayant déjà jugé, le
soumettre à l’exécution de la peine prononcée contre lui.
Lorsque l’extradition est faite en faveur du pays où l’infraction fut commise, elle permet
une justice plus efficace, car le délinquant est jugé par le pays qui dispose de plus d’atouts pour la
recherche et la découverte de la vérité. L’extradition se base juridiquement sur les traités que les
Etats concluent afin de se livrer mutuellement les délinquants les plus dangereux.
2. Conditions d’extradition
Ce mécanisme pour être déployé exige la réunion d’un certain nombre des conditions,
lesquelles conditions se rapportent à l’Etat requérant, à l’Etat requis, à la nature de l’infraction
commise et à l’individu recherché.
a. L’Etat requérant
L’extradition est accordée sur demande de l’Etat requérant. Qui peut être Etat
requérant ?
On admet les trois Etats suivants :
- l’Etat sur le territoire duquel l’infraction a été commise (principe de territorialité) ;
- l’Etat dont la personne mise en cause est ressortissante (principe de personnalité active) ; et
- l’Etat dont les intérêts vitaux ont été mis en cause par l’infraction (principe de réalité).
L’un ou l’autre de ces trois Etats ne peut requérir l’extradition que si ses tribunaux ont
déjà engagé des poursuites contre la personne sollicitée (délinquant) ou encore si ses tribunaux
ont déjà condamné l’agent sollicité.
b. L’Etat requis
La demande d’extradition est adressée à un Etat : l’Etat requis qui est le pays où
séjourne actuellement l’individu recherché.
c. L’individu recherché
S’agissant de l’individu recherché, il doit être soit l’auteur, soit le coauteur, soit encore
le complice d’une infraction consommée ou tentée que l’Etat requérant a compétence de
réprimer.
C’est ici qu’intervient le principe qu’un Etat ne peut extrader ses propres nationaux.
Mais, il y a des Etats qui acceptent d’extrader leurs nationaux, sous réserve de réciprocité. Le cas
de l’Angleterre, les Etats-Unis et l’Italie acceptent de livrer leurs propres nationaux, à condition
d’une réciprocité qu’ils ne trouvent presque nulle part.
Les infractions extraditionnelles doivent présenter une certaine gravité. Pour déterminer
cette gravité, deux techniques sont possibles : soit l’énumération des faits pouvant donner lieu à
extradition dans le corps même du traité, soit la référence à la gravité de la peine encourue ou
effectivement prononcée pour l’infraction dont il s’agit. En d’autres termes, les conventions
d’extradition signées, précisent les abstractions, la gravité de l’infraction dont les auteurs peuvent
faire l’objet d’extradition.
Les infractions non extraditionnelles : Il est des infractions d’une certaine nature qui ne
sont pas en principe extradables. Ce sont les infractions purement militaires et les infractions
politiques.
Ce sont des infractions qui ne peuvent être commises que par des hommes en uniforme
ou plus précisément par les membres des forces armées et ceux de la police nationale ; parce que
ces infractions consistent en réalité en un manquement aux devoirs militaires.
Les infractions politiques pures : ce sont des infractions qui ne portent atteinte qu’à
l’ordre politique sans préjudicier d’autres individus. Exemple : Infraction de haute trahison ou de
complot.
Les infractions politiques complexes ou mixtes : ce sont celles qui portent atteinte aussi
bien à l’ordre commun qu’à l’ordre politique. Ces infractions sont également appelées infractions
politiques par mobile. Il en est ainsi de l’infraction de pillage qui porte atteinte aux intérêts des
particuliers et qui poursuit comme objectif la déstabilisation du régime politique.
Les infractions connexes à des délits politiques : ce sont des infractions de droit commun
inhérentes à une action politique. Elles se commettent à l’occasion d’une guerre civile ou d’une
insurrection.
Elles sont voisines des infractions politiques mixtes. C’est le cas lors d’une insurrection,
on détruit les monuments de l’adversaire : il y a là destruction méchante qui se réalise dans un
mouvement, dans une insurrection.
3. La procédure d’extradition
S’il estime qu’il y des raisons de craindre le pire par l’application d’une peine
inutilement douloureuse ou inhumaine, il peut souverainement s’opposer à l’extradition de ladite
personne. Le cas du Général Munene Faustin qui n’a toujours pas été extradé par la République
du Congo nonobstant les demandes lui adressées par le gouvernement de la République
Démocratique du Congo.
Il faut noter que le traité de la Cour Pénale Internationale a été signé à Rome le 17 juillet
1998. La République Démocratique du Congo était le 60e Etat qui ratifiait ce traité par le Décret
n°0013/2002 du 30 mars 2002. Dans le système moniste (qui admet les conventions comme des
lois internes) de la République Démocratique du Congo, la Cour Pénale Internationale devient
pratiquement une juridiction qui participe à l’ordonnancement judiciaire national congolais.
La Cour Pénale Internationale a la compétence de connaître les crimes les plus graves
qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. On peut citer, à cet effet, le crime de
génocide, le crime contre l’humanité, le crime de guerre et le crime d’agression.
Pour saisir la Cour Pénale Internationale, on doit observer les conditions suivantes :
- l’une des parties doit être un Etat ;
- l’accusé doit être ressortissant d’un Etat partie aux statuts ;
- le crime doit être commis dans un Etat partie.
Ces conditions sont alternatives et non cumulatives. L’Etat non partie peut accepter la
Cour Pénale Internationale pour un crime spécifique commis sur son territoire ou par son
ressortissant. Si le conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies renvoie une affaire au
Procureur en vertu du chapitre VII de la charte, on n’applique pas ces conditions.
A titre d’illustration : A ce jour, sur les personnes qui étaient détenues au centre
pénitentiaire de la Cour Pénale Internationale aux Pays-Bas, on peut noter ce qui suit :
- Monsieur Bosco NTAGANDA qui s’était rendu motu proprio à l’ambassade des États-
Unis au Rwanda puis transféré par les américains à la Cour Pénale Internationale, ya été
reçu dans le cadre d’une reddition volontaire depuis le 22/03/2013 ; l’audience de
confirmation des charges a été tenue du 10 au 14/02/2014, et les charges lui ont été
confirmées le 9/06/2014 pour l’ouverture du procès en date du 02/06/2015 ;
- Le centrafricain Narcisse ARIDO, témoin cité par la défense dans l’affaire opposant le
procureur de la cour à Jean-Pierre BEMBA NGOMBO, a été interpellé par la France puis
transféré à la Cour Pénale Internationale en date du 18/03/2014, et a comparu pour la
première fois le 20/03/2014, à qui les charges ont été confirmées le 11/11/2014, mais qui
a bénéficié de la liberté provisoire le 21/10/2014 (le 22/10/2014, la chambre d’appel a
refusé de donner effet suspensif à l’appel du bureau du procureur) ;
- L’ivoirien Charles BLE GOUDE interpellé puis remis par le gouvernement de son propre
pays la Côte d’Ivoire à la Cour Pénale Internationale le 22/03/2014 ; l’audience de
confirmation des charges a été tenue du 29/09/2014 au 02/10/2014, et les charges lui ont
été confirmées le 11/12/2014.
Le constat à faire dans le cadre de cette coopération internationale contre le crime, c’est
que les Etats africains (en l’occurrence deux : la République Démocratique du Congo et la COTE
D’IVOIRE) semblent être, jusque là, des bons élèves en la remise de leurs propres nationaux. Et
en cette matière précisément, la République Démocratique du Congo en est championne avec un
total de 4 ressortissants en si peu de temps depuis l’existence de la Cour Pénale Internationale ;
record à ce jour non encore battu par un autre Etat hébergeant les personnes suspectées d’avoir
commis les crimes les plus graves au monde.
Notons d’ailleurs qu’à l’instar de la Lybie qui s’est refusée de transférer à la Cour Pénale
Internationale Saif Al-Islam GADDAFI, le fils de Muammar Mohammed Abu Minyar
GADDAFI (Muammar Gaddafi) ; la Côte d’Ivoire a, jusqu’à présent, opposé une fin de non
recevoir à la Cour Pénale Internationale quant à la question de juger madame Simone Gbagbo,
épouse de l’ancien président ivoirien, remis par son pays à cette Cour, bien avant la remise de son
deuxième ressortissant Charles Blé Goudé.
Les polices nationales, surtout celles des pays qui partagent les frontières, collaborent
entre elles et s’échangent des informations et même des délinquants. La forme la plus élaborée de
collaboration policière contre les criminels internationaux se réalise sans nul doute au niveau de
l’Organisation Internationale de Police Criminelle (O.I.P.C.), couramment appelé
« INTERPOL », d’après son adresse télégraphique. Celle-ci comprend plus d’une centaine de
pays et a son siège à Paris depuis 1946.
Les Bureaux Centraux Nationaux (B.C.N.) qui peuvent communiquer entre eux (1
bureau dans chaque pays membre) assurent la liaison entre l’Organisation et les polices
nationales. L’organisation assure à ses membres une diffusion rapide des renseignements qu’elle
détient
Deuxième Titre
LA COMMISSION DE L’INFRACTION
L’infraction est la source de la responsabilité pénale. Elle doit se réaliser pour l’établir.
C’est que, sans cette commission, nul ne pourra engager sa responsabilité pénale. Mais à quoi
ressemble une infraction et comment se réalise-t-elle ? C’est à ces préoccupations qu’il va falloir
répondre.
Il convient de présenter :
- Les notions de l’infraction ; et
- La classification des infractions.
En droit pénal, l’infraction est un comportement interdit par la norme pénale sous la
menace d’une peine. La peine est, parmi toutes les sanctions du droit, la seule qui soit
régulièrement contraignante, afflictive : puisqu’elle fait mal, et infamante : car, elle entraine la
honte.
Le code pénal congolais ne définit pas l’infraction. Il ne définit pas non plus le crime.
Dans le cadre de la réforme congolaise du Code pénal, l’article 45 de l’avant-projet du code pénal
dans sa version du 19 mai 2009 définit l’infraction comme tout fait, action ou omission, qui
viole l’une quelconque des valeurs fondamentales de la société, et en conséquence trouble ou est
susceptible de troubler la paix ou l’ordre publics en portant atteinte aux droits légitimes des
particuliers, des collectivités privées ou publiques, et auquel la loi attache des sanctions prévues
par le présent code ou par toute autre disposition pénale particulière.85
Afin de mieux définir l’infraction, il convient de faire allusion à la peine. C’est ainsi
qu’en recourant à la notion des peines et à l’article 1382 du code civil belge, on pourra définir
l’infraction comme suit : « est une infraction, tout fait quelconque de l’homme, préjudiciable à
autrui, auquel la loi a attaché une sanction pénale ».
85
Cette définition reprend en réalité l’article 2 de l’ancien avant-projet du livre 1er du Code pénal de 1974.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 120 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
A. Un fait
Le fait suppose tant l’action que l’inaction. C’est ainsi que l’avant-projet fait allusion
tant au fait, à l’action qu’à l’omission. Bref, il s’agit de toute attitude, tout geste, tout
comportement affiché mais qui soit préjudiciable à autrui.
En principe, la simple pensée criminelle n’est pas punie en droit pénal mais
l’extériorisation ou la matérialisation de l’intention criminelle est exigée. Dès que la pensée
criminelle est extériorisée même en parole, ou en simple attitude elle devient un fait qui peut être
de commission ou même d’omission.
Alors que le droit pénal ancien sanctionnait non seulement l’être humain vivant et
décédé mais aussi, les animaux ainsi que les choses inanimées et inconscientes ; le droit pénal
moderne, quant à lui, nécessite une certaine responsabilité morale ou une certaine volonté de la
part de l’auteur de (l’infraction) l’acte incriminé.
En effet, l’on admet que ne peut être auteur d’une infraction qu’une personne humaine.
Ce qui sous-entend son imputabilité. Toute infraction doit donc être imputable à une personne
humaine.
En revanche, il convient d’ajouter que tout homme n’est pas imputable. C’est ainsi que
le dément, le mineur de 14 ans, la personne placée sous une contrainte irrésistible excluant ainsi
sa propre volonté dans l’appréciation de l’attitude à adopter, ne peuvent se voir imputer un fait si
préjudiciable qu’il soit lorsqu’il est commis dans ces conditions ci-haut évoquées.
C. Préjudiciable à autrui
Il doit s’agir d’un fait qui préjudicie une autre personne que l’auteur de l’acte lui-même.
C’est ainsi que l’avant-projet souligne que le fait doit avoir violé l’une quelconque des valeurs
fondamentales de la société, et en conséquence troublé ou, être susceptible de troubler la paix ou
l’ordre publics en portant atteinte aux droits légitimes des particuliers, des collectivités privées
ou publiques.
En droit pénal, toute infraction est sanctionnée par la loi. La sanction pénale n’est pas à
confondre à celle morale ni à celle disciplinaire. Mais, un même fait peut engendrer une double
ou une triple sanction. Les sanctions dont question doivent être prévues soit par le code pénal soit
encore par toute autre texte pénal particulier. Ainsi, tenant compte de tout ce qui précède, HAUS
a défini l’infraction comme : « la violation d’une loi pénale, l’action ou l’inaction que la loi
frappe d’une peine ».
En droit pénal, différentes expressions sont utilisées. Il en est ainsi des termes :
infraction, incrimination ou qualification pénale.
Toutes ces expressions sont utilisées indistinctement, mais il est préférable de les utiliser
distinctement selon le point de vue d’où on se place et en tenant compte de leur étymologie.
- Incriminer, c’est déclarer qu’un comportement est un crime (au sens large) et c’est ce que
fait le législateur. Par extension, le mot incrimination désigne aussi le résultat de cette
démarche, c’est-à-dire le texte.
- Qualifier en droit, c’est nommer, étiqueter. Les qualifications pénales sont ainsi les noms
donnés aux infractions (comportements proscrits), soit pour les soumettre à un régime
particulier de répression, soit pour les distinguer les unes des autres (par exemple :
assassinat, meurtre, viol ou vol, escroquerie, abus de confiance).
- La qualification judiciaire, elle, est une opération par laquelle l’autorité saisie
fait correspondre les faits qui paraissent antisociaux à la qualification légale ou
textuelle de sorte que l’intervention de la sanction pénale suppose l’existence
préalable d’un texte créateur.
86.
Lire avec intérêt les enseignements de Norbert LIKULIA BOLONGO dans son droit pénal spécial zaïrois, Paris, LGDJ, 1985,
600 p.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 122 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Mais, il convient de signaler que lorsque le droit pénal d'un pays opte pour la
classification tripartite des infractions, l'opération de qualification permettra de
savoir si le comportement reprouvé socialement parce qu'il serait immoral et
même préjudiciable à autrui, constitue une infraction en général. On parle alors
de la qualification des faits, avant de la classifier dans la catégorie de crime, délit
ou contravention ; ce que l’on appelle qualification des infractions. Cette
dernière constitue pour cela une activité intellectuelle consistant à rattacher un
fait à un groupe ou famille déjà existant87.
Il s’avère impérieux de présenter tous ces différents points de vue avant d’émettre notre
position.
Certaines analyses affirment que l’infraction a trois éléments constitutifs ; tandis que
d’autres en retiennent quatre. Il y en a même qui n’en trouvent que deux.
Dans la constitution d’une infraction, il arrive que l’on retienne88 quatre éléments, ci-
après :
87.
Jean PRADEL, Manuel de droit pénal général, Paris, éditions CUJAS, 16è éd., 2006/2007, p. 245
88.
Lire avec intérêt le professeur Jean LARGUIER, Droit pénal général, Dalloz, Paris, 2005.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 123 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Exemple : alors qu’il est interdit par le code pénal de tuer ou de causer des
blessures à autrui (élément légal), un fonctionnaire de police fait usage de son
arme à feu et atteint le malfaiteur visé (élément matériel) en toute lucidité et avec
l’intention de le toucher à la jambe (élément moral).
Une autre analyse soutient que l’infraction est une méconnaissance, matérialisée et
consciente, de l’interdit pénal. Elle prend en considération l’élément matériel c’est-à-dire la
composante matérielle (actus reus) et la conscience c’est-à-dire la composante psychologique
(mens rea) de l’infraction.
Selon cette analyse faite notamment par Claude Lombois : l’infraction n’est constituée
que de deux éléments : matériel et moral.
- L’élément dit légal n’en est pas un à proprement parler. On ne peut pas
vraiment dire que la loi est dans l’infraction, avec tout ce que cela supposerait de
négatif. Elle précède l’infraction. Elle en est une condition. Il est donc préférable
de parler de « préalable légal ».
Et l’élément injuste n’est rien d’autre que l’absence d’un fait justificatif. On
pourrait aussi dire que, dans ces contextes très particuliers, seul le caractère
infractionnel de l’acte s’efface. Ou encore que l’existence d’un fait justificatif
escamote le préalable légal.
Une troisième analyse considère qu’il n’y a qu’un seul élément constitutif : l’élément
matériel. Selon cette analyse, le comportement et le résultat, relèvent l’un et l’autre de cette
dimension matérielle de l’infraction.
Quant à ce qui nous concerne, nous pensons que l’infraction n’est pas caractérisée
simplement par ses éléments constitutifs. En réalité, elle se compose de plusieurs autres
particules, toutes aussi portées par le texte d’incrimination.
C’est ainsi que nous estimons que l’infraction est caractérisée des composantes ci-après :
les conditions préalables, ainsi que les éléments strictement constitutifs.
Il convient de présenter son fondement (1) avant de présenter les moyens de justification
de cette notion de condition préalable (2).
Il faut observer que tous les éléments ne sont pas sur le même plan, les uns devant
apparaitre en bonne analyse comme la définition du domaine dans lequel l’infraction peut se
commettre ; alors que d’autres matérialisent à proprement parler ou plus précisément concrétisent
l’infraction. Notons que déjà à l’époque, le professeur Likulia avait appliqué cette présentation
dans l’analyse qu’il avait faite notamment en matière d’abus de confiance, en relevant d’une part
les conditions préalables de cette infraction et d’autre part ses éléments constitutifs ; analyse qui
lui avait valu des éloges intarissables de son maitre le professeur Raymond GASSIN dans sa
préface faite à la première édition de 197689.
89.
Le professeur Raymond GASSIN a enseigné à la Faculté de Droit et de Science politique d’Aix-Marseille où il a été Directeur
de l’U.E.R. de Sciences Pénales et de Criminologie d’Aix-Marseille III en France. Dans la préface qu’il a faite à la première
édition de l’ouvrage de droit pénal spécial zaïrois écrit par le professeur Norbert LIKULIA BOLONGO, il affirmait déjà ce qui
suit : Non moins saisissante en second lieu est la maîtrise avec laquelle l’auteur utilise les grandes catégories techniques du droit
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 125 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
L’analyse du professeur Likulia et bien avant lui, celle du professeur Robert VOUIN90,
ont pu montrer que l’infraction d’abus de confiance qui se réalise par l’acte matériel illicite et
l’intention frauduleuse proscrite par la l’acte d’incrimination, ne peut être établie que parce que
l’avait précédé préalablement à titre de condition, un élément de nature non délictuelle : le
contrat.
De ce qui précède, il y a lieu de relever que cet élément de nature non délictuel peut
revêtir quatre expressions possibles pour rendre presqu’une même réalité : la condition préalable,
la condition d’existence, la condition d’application ou le préalable légal, textuel ou normatif.
En effet, l’acte d’incrimination organise des circonstances qui, en elles-mêmes n’ont pas
forcément de caractère illicite (sauf cas particuliers pouvant constituer des infractions à part
entière) ; mais, que la structure de l’infraction exige que ces circonstances soient préalablement
établies, pour qu’ensuite, tel comportement adopté par l’agent, soit constitutif d’une telle
infraction à la norme pénale.
Dans ce cas, une disposition qui incrimine un comportement donné, ne sera violée et par
conséquent susceptible d’être appliquée, que dans la mesure où l’organe d’accusation parviendra
à établir que la condition prévue par la norme d’incrimination est effectivement remplie dans le
cas d’espèce.
Il faut avouer que dans une infraction, les conditions d’existence, ou conditions
préalables font partie des composantes textuels de la responsabilité pénale. Elles constituent
l’élément intrinsèque de cette responsabilité et doivent pour cela être recherchées dans chaque
infraction. De ce qui précède, la condition préalable consiste en toute composante normative de
l’infraction, ayant une caractéristique neutre, mais conditionnant la réalisation de l’infraction ou
l’application du texte d’incrimination.
pénal spécial ; j’ai été en particulier frappé par le fait qu’il recourt chaque fois que cela lui paraît nécessaire à la distinction
entre les conditions préalables de l’infraction et ses éléments proprement constitutifs, distinction qui commence à peine à être
systématisée dans la théorie générale du droit pénal spécial et qui est encore souvent ignorée par les auteurs qui traitent de
questions de droit pénal spécial.
90.
Lire avec intérêt les développements faits par Madame la professeur Michèle-Laure RASSAT, Droit pénal spécial. Infractions
du code pénal, 6ième éd., Dalloz, 2011, pp. 25-27.
91.
L’on peut relever ainsi le meurtre et l’assassinat qui nécessitent la personnalité humaine de la victime ; le détournement
d’objets saisis qui est conditionnée à la qualité de l’auteur, au type d’objets à détourner ainsi qu’à l’existence d’une saisie
pratiquée sur lesdits objets.
En effet, comme les éléments constitutifs, elles sont portées par le texte d’incrimination ;
mais ne sont pas des circonstances très éloignées des éléments constitutifs. Celles-là créent le
cadre de la réalisation de ceux-ci.
Ils doivent tous être liés, sans être confondus, pour que l’infraction soit possiblement
constituée. En réalité, pour certaines infractions il s’impose à la fois l’existence des conditions
préalables et celle de ces éléments constitutifs. Dans l’examen des faits de l’infraction, il est
important de détacher les conditions préalables des éléments strictement constitutifs, lesquels
sont des éléments illicites, proscrits, et donc fautifs.
Et pourtant, cette affirmation ne semble pas justifiée étant entendu qu’une telle décision,
si tant est qu’elle existe, devra être considérée comme circonstanciée. Elle peut avoir été prise
dans le but de rattacher à l’Etat, par le biais d’un pseudo élément constitutif, une infraction, en
réalité commise ailleurs. Aussi, doit-on souligner qu’il ne semble pas exclu que la condition
préalable, entant que composante normative d’une infraction, permette le rattachement d’une
infraction à un pays afin de lui permettre de se déclarer compétent territorialement.
Alors que la distinction des conditions préalables des éléments strictement constitutifs ne
sous-entend pas la séparation. S’ils sont proches sans être confondus, il faut souligner en même
temps qu’ils sont différents sans être séparés. C’est ainsi que l’infraction ne pourra être établie
que dans la mesure où l’accusation apportera la preuve que les éléments de l’infraction se sont
réalisés dans le contexte prévu par l’acte d’incrimination. Et de cette façon, aucune contradiction
n’est envisageable.
Il ne parait pas faire sérieusement de doute que le contrat dans l’infraction d’abus de
confiance, tel que retenu à l’époque par le professeur Norbert Likulia, (mais encore
aujourd’hui avec les différentes conditions préalables que nous dégageons de toutes les autres
infractions), ne sont pas illicites. Il en est ainsi de conditions suivantes :
- Le rapport entre l’acte et le conflit armé dans le crime de guerre ;
- L’existence de l’un des groupes protégés par l’acte d’incrimination dans le crime
de génocide ;
- Le caractère systématique ou généralisé dans le crime contre l’humanité ;
- L’existence d’un acte d’agression et la qualité de l’agent dans le crime
d’agression devant la Cour Pénale Internationale ;
- La personnalité humaine de la victime dans les atteintes à la vie et à l’intégrité
corporelle des individus ;
- l’appartenance de la chose à autrui dans l’infraction de vol ;
- l’existence d’un différend et l’absence d’un règlement amiable dans l’infraction
de duel…etc.
Il n’est pas logique d’affirmer que le fait d’être une personne humaine vivante constitue
l’élément intrinsèque de l’infraction de meurtre ; que la simple existence de l’un des groupes
protégés par l’acte incriminateur constitue l’élément matériel du crime de génocide ; que
l’appartenance de la chose à autrui constitue l’élément matériel de l’infraction de vol…etc.
L’infraction étant un interdit, il semble tout à fait logique que les éléments (matériel et
moral) qui la constituent soient également interdits. Alors même que la condition préalable (un
contrat ou un titre, une personne, un groupe…etc.) n’est qu’une circonstance neutre (en principe
non interdit dans le cadre de l’infraction précise, sauf si elle constitue un cas particulier de
violation de la loi).
Les législations des Etats qui ont opté pour la tripartition des infractions (crimes, délits
et contraventions), renseignent également sur la possibilité de punir la tentative. Elles affirment
notamment que la tentative est toujours punissable en matière de crime, jamais en matière de
contravention, et admissible en matière délictuelle que si et seulement si, cela avait été précisé
par l’acte d’incrimination. Aussi, que la complicité punissable en matière de crime et délit ne l’est
en matière contraventionnelle que si elle a été expressément prévue.
De l’élément moral. En droit pénal, nous allons le relever un peu plu tard, l’élément
moral peut revêtir des formes multiples : la préméditation, la faute pénale intentionnelle, la faute
pénale non intentionnelle (l’imprudence, l’inattention, la maladresse, l’imprévoyance, la violation
des règlements de police). Dans tous les cas, le seuil minimum de l’élément moral est la faculté
de comprendre et de vouloir. Celle-ci fait défaut au malade mental inconscient et au trop jeune
enfant (âgé de moins de 14 ans).
Il convient ainsi de retenir six (6) critères pour gouverner ces catégorisations. Ces
critères sont les suivants :
Cependant, sous d’autres cieux, l’on rencontre certaines législations qui consacrent cette
division tripartite des infractions en crimes, délits et contraventions. C’est le cas en droit français
où l’on affirme que : « L’infraction que les lois punissent de peines de police est une
contravention. L’infraction que les lois punissent de peines correctionnelles est un délit.
L’infraction que les lois punissent d’une peine afflictive ou infamante est un crime ».
En ce qui concerne la contravention : selon l’article 131-12 du Code Pénal français, les
peines contraventionnelles encourues par les personnes physiques sont : l'amende, les peines
privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-14 du Code Pénal français, et la peine
de sanction-réparation prévue par l'article 131-15-1 du Code Pénal français.
Il y a lieu de souligner qu’en droit pénal français constituent des contraventions les
infractions que la loi punit d'une amende n'excédant pas 3 000 euros, les contraventions dont le
montant de l'amende est le suivant :
1° 38 euros au plus pour les contraventions de la 1re classe ;
2° 150 euros au plus pour les contraventions de la 2e classe ;
3° 450 euros au plus pour les contraventions de la 3e classe ;
4° 750 euros au plus pour les contraventions de la 4e classe ;
5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5e classe, montant qui peut être
porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas
où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit.
L’article 131-14 du Code Pénal français prévoit que pour toutes les contraventions de la
ième
5 classe, une ou plusieurs des peines privatives ou restrictives de droits suivantes peuvent être
prononcées :
- La suspension, pour une durée d'un an au plus, du permis de conduire, cette
suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
cette limitation n'est toutefois pas possible en cas de contravention pour laquelle la
suspension du permis de conduire, encourue à titre de peine complémentaire, ne peut
pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
- L'immobilisation, pour une durée de six mois au plus, d'un ou de plusieurs véhicules
appartenant au condamné ;
- L'interdiction, pour une durée d'un an au plus, d'émettre des chèques autres que ceux
qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés
et l'utiliser des cartes de paiement ;
Lorsque la loi le prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou un délit peut
être sanctionné d'une ou de plusieurs des peines suivantes :
1. La dissolution, lorsque la personne morale a été créée ou, lorsqu'il s'agit d'un crime
ou d'un délit puni en ce qui concerne les personnes physiques d'une peine
d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, détournée de son objet pour
commettre les faits incriminés ;
2. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer
directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ;
3. Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;
4. La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou
de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les
faits incriminés ;
5. L'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au
plus ;
6. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de procéder à
une offre au public de titres financiers ou de faire admettre ses titres financiers aux
négociations sur un marché réglementé ;
7. L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que
ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont
certifiés ou d'utiliser des cartes de paiement ;
8. La peine de confiscation, dans les conditions et selon les modalités prévues à l'article
131-21 ;
9. L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse
écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique ;
10. La confiscation de l'animal ayant été utilisé pour commettre l'infraction ou à
l'encontre duquel l'infraction a été commise ;
11. L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de détenir
un animal.
La peine complémentaire de confiscation est également encourue de plein droit pour les
crimes et les délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à un an, à
l'exception des délits de presse.
Cependant, les peines prévues aux 1° et 3° ci-haut ne sont pas applicables aux personnes
morales de droit public dont la responsabilité pénale est susceptible d'être engagée. Elles ne sont
pas non plus applicables aux partis ou groupements politiques ni aux syndicats professionnels. La
peine définie au 1° n'est pas applicable aux institutions représentatives du personnel.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 132 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Les peines contraventionnelles encourues par les personnes morales sont prévues à
l’article 131-40 du Code Pénal français. Il s’agit de :
1° L'amende ;
2° Les peines privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-42 ;
3° La peine de sanction-réparation prévue par l'article 131-44-1.
Le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple
de celui prévu pour les personnes physiques par le règlement qui réprime l'infraction.
Pour toutes les contraventions de la cinquième classe, l’article 131-42 du Code Pénal
français affirme que le juge a la possibilité de remplacer la peine d'amende par une ou plusieurs
des peines privatives ou restrictives de droits suivantes :
- L'interdiction, pour une durée d'un an au plus, d'émettre des chèques autres que
ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui
sont certifiés ou d'utiliser des cartes de paiement ;
- La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction
ou de la chose qui en est le produit.
La réclusion criminelle est une peine afflictive et infamante de droit commun consistant
à la privation de la liberté soit à titre perpétuel soit à titre temporaire. La détention criminelle, par
contre, est une peine politique privative de liberté consistant à l’incarcération du condamné en
principe dans un quartier spécial.
L’on peut ainsi reconnaître que le critère de gravité n’est pas pris en considération par la
législation congolaise pour procéder à la classification des infractions. Mais, cela n’est
certainement pas le cas en ce qui concerne d’autres critères, en l’occurrence celui de la nature de
l’infraction.
Les infractions de droit commun sont celles qui peuvent être perpétrées par toute
personne.
Au XIXe et surtout en 1830, un droit pénal spécial s’est développé en Europe à l’égard
des infractions de droit commun, lesquelles demeurent encore en droit pénal anglo-américain. En
matière criminelle, les peines du code pénal belge sont moins sévères pour les criminels
politiques que pour ceux de droit commun. Ce qui a fait que même la peine de mort était déjà
abolie pour ces infractions (en 1848 c’était le cas en France). En plus, la contrainte par corps
n’était pas applicable aux criminels politiques. Les condamnations politiques ne faisaient plus
obstacles à l’octroi du sursis et ne pouvaient constituer le condamné en état de récidive.
Il était admis que les incapacités qui frappaient certains criminels de droit commun ne
pouvaient pas s’appliquer aux criminels politiques. L’amnistie était plus fréquente pour les
crimes politiques que pour ceux de droit commun.
L’extradition ne pouvait pas jouer contre le criminel politique et le droit d’asile est une
institution quasi indéracinable dans le droit international moderne.
Par infractions politiques pures, il faut entendre les crimes portant atteinte uniquement à
l’ordre politique93.
Il en est ainsi par exemple du complot et de la haute trahison. Cette doctrine, défendue
notamment par HAUS, est qualifiée d’objective. car le caractère politique de l’infraction est
déterminé par la nature de l’intérêt auquel cette infraction porte atteinte.
Par infractions politiques complexes ou mixtes, il faut entendre celles qui portent atteinte
aussi bien au droit commun qu’au droit politique94. Ce sont des infractions qui portent atteinte à
l’ordre politique par le moyen d’une infraction de droit commun.
93
HAUSS (Jacques Joseph), Op. cit., n°345.
94
Idem, n°346.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 134 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Elles sont appelées « infractions politiques par mobile ». En effet, le mobile politique
qu’a l’auteur d’une infraction peut également caractériser les infractions politiques. On peut
prendre à titre illustratif les actes de terrorisme contre les particuliers en vue d’attirer l’attention
de l’opinion politique ou de délivrer un message politique de mécontentement. L’exemple le plus
classique d’une infraction politique par mobile ou infraction politique complexe ou mixte est
celui de l’assassinat d’un Chef d’Etat avec un mobile politique dans le but d’obtenir un
changement de régime95.
Les infractions connexes à des délits politiques sont des infractions inhérentes à une
action politique. Elles se commettent souvent à l’occasion des insurrections ou des guerres
civiles.
Il en est ainsi par exemple des destructions des propriétés publiques et privées,
massacres des adversaires, enlèvement des armes d’un arsenal… bref, tous les actes de lutte,
autorisés par les usagers de la guerre, doivent être considérés comme des crimes politiques ou
pour mieux dire, ils ne forment qu’un seul et même crime de cette espèce ; car ils sont les
éléments constitutifs de l’insurrection qui a un caractère essentiellement politique.
En tenant compte de leur objet, les infractions qui peuvent constituer celles politiques,
réalisent les atteintes graves aux intérêts fondamentaux de la nation, la participation délictueuse à
un attroupement, en particulier armé, les délits électoraux, les infractions à la loi sur la liberté de
la presse, les infractions de complot, de haute trahison d’attentat à la sûreté de l’Etat.
De ce qui précède, il convient de retenir que l’infraction politique est celle qui, dans
l’intention de son auteur comme par ses effets, porte directement et immédiatement atteinte aux
institutions politiques ou à l’ordre politique.
On entend par infractions militaires, celles qui sont prévues et réprimées par le code
pénal militaire du 18 novembre 2002 et qui ne peuvent être commises que par des militaires ou
assimilés96.
Alors qu’on entend par « militaire » au sens du code pénal militaire congolais, tout celui
qui fait partie des forces armées nationales, c’est-à-dire : les officiers, sous-officiers et hommes
du rang ; les réformés, les réservistes ; les militaires en congé… (article 107 du code pénal
militaire).
95
Pierre AKELE ADAU, Analyse et commentaire du nouveau code pénal militaire congolais, (loi n°024/2002 du 18/11/2002)
livre 1er les infractions et de la répression en général, inédit.
96
Voir loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant code pénal militaire.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 135 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Les assimilés sont, en effet, plutôt les membres de la police nationale et les bâtisseurs de
la Nation pour les faits commis pendant la formation ou à l’occasion de l’exercice de leurs
fonctions au sein du Service National (article 106 al. 2 du code pénal militaire).
Les infractions tendant à soustraire leur auteur de ses obligations militaires comme la
désertion (art. 44 du code pénal militaire), l’insoumission (art. 41 du code pénal militaire)…
Les infractions aux consignes. On peut citer : l’abandon de poste (art. 116 du code pénal
militaire) ; la violation de consigne (art. 113 du code pénal militaire).
Ces infractions participent au régime de faveur accordé aux infractions politiques par
suite de la tolérance et du respect des idées d’autrui que respecte et reconnaît la constitution de la
République.
Une certaine immunité, un régime procédural favorable, ainsi que d’autres dispositions
favorables caractérisent les infractions de presse qui forment un tout autre point intéressant du
Droit pénal particulier ou extraordinaire.
A titre d’illustration, l’on peut prendre le cas d’une personne X qui impute un fait à
Monsieur Y à travers un journal. En matière de presse, (et c’est ce que prévoit en République
Démocratique du Congo la loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la
liberté de la presse); Y peut demander seulement son droit de réponse pour ainsi écourter la
procédure. Alors que, ceci constitue déjà une infraction en droit commun.
En bref, il conviendra de considérer que les infractions de presse sont des infractions de
droit commun portant atteinte aux personnes, mais se perpétrant par voie de presse et pouvant
bénéficier d’un régime de sanction spécial et particulier.
Tenant compte de ce critère, deux sortes d’infraction peuvent être retenues. Il s’agit donc
des : infractions intentionnelles et celles non intentionnelles.
L’auteur d’une infraction intentionnelle doit donc l’avoir commis avec dessein d’attenter
à la personne d’autrui, tout en sachant que cela est prohibé par la loi.
L’infraction est qualifiée d’intentionnel lorsque dans le chef de son auteur il est retrouvé
et la conscience et la volonté de l’accomplir en dépit de son illicéité. C’est ainsi par exemple que
l’article 46 du code pénal livre II prévoit et sanctionne l’infraction de coups et blessures
volontaires.
Ces infractions sont perpétrées sans que l’auteur ne les ait prévu ni voulu. L’auteur
d’une infraction non intentionnelle doit avoir violé la loi et ainsi préjudicié autrui par défaut de
prévoyance ou de précaution. Il ne doit donc pas avoir l’intention ni de violer la loi ni d’attenter à
la personne d’autrui.
Par infractions de commission, il faut entendre toute infraction d’action qui s’exécute
par un acte matériel et positif qui contrevient à l’ordre de la loi. Ces infractions subordonnent
leurs consommations à l’exécution matérielle et positive d’un acte violant la loi.
Il est fait un constat selon lequel ces infractions qui sont pourtant les plus graves sont
cependant les plus fréquemment perpétrées. C’est le cas de l’infraction de vol (art. 79 C.P.LII) et
de l’escroquerie (art. 98 du C.P.LII).
En ce qui concerne les infractions d’abstention, l’on doit dire qu’elles sont aussi
appelées infractions d’omission ou d’inaction. Ce sont des infractions qui, selon leur définition
légale, sont des commissions ou se commettent, mais qui, concrètement, se réalisent par
omission. L’omission dont question ici est celle d’accomplir l’acte ordonné par la loi.
A titre d’exemple, il convient de faire allusion à l’article 66 bis et ter du code pénal
congolais livre II qui prévoient et sanctionnent l’infraction de non-assistance à personne en
danger.
En plus de ces infractions, on peut citer ces infractions de la loi n°09/001 du 10 Janvier
2009 portant protection de l’enfant :
- le délaissement d'un enfant en un lieu quelconque (article 190 de la LPE)97 ;
- l’abstention à secourir un enfant menacé d'atteinte imminente (article 191 de la
LPE) ;
- la non dénonciation des violences contre un enfant (article 192 de la LPE) ;
- l’abstention d’un fonctionnaire ou officier public d’accomplir un acte de sa
fonction ou de son emploi (article 193 de la LPE) ;
- l’abstention de tout responsable d’un établissement sanitaire public ou privé, de
donner les soins requis à l’enfant (article 195 de la LPE) ;
- le refus délibéré pour tout parent, tuteur ou responsable légal, d’assurer à son
enfant les soins médicaux préventifs (Article 196 LPE) ;
- le non envoi délibéré d’enfant à l’école (article 198 de la LPE).
97
Par délaissement d'enfant, il faut entendre le fait pour le père ou la mère, le parâtre ou la marâtre, ou le tuteur, d'abandonner et
ou de rejeter un enfant sans s'être assuré qu'il sera en sécurité et protégé dans ses droits.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 138 | P a g e
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Les infractions instantanées sont celles qui se réalisent par une action qui s’exécute en
un instant ou en un trait de temps.
On entend par infraction continue, celle qui est consommée par une action ou une
omission qui se prolonge dans le temps de par la volonté réitérée et constante de l’auteur. Elle est
donc caractérisée par la volonté réitérée et persistante de l’agent de commettre un acte prohibé
par le texte incriminateur et de se maintenir dans une situation contraire à ce texte. Ce dernier
texte incriminateur vise en effet l’activité de l’agent et non simplement un acte.
Le principal problème soulevé par ce type d’infractions est celui de leur localisation
dans le temps. Mais, les auteurs étant susceptibles de se déplacer, le problème se pose aussi dans
l’espace.
Par infraction d’habitude, il faut entendre l’infraction consommée par des actes
répétés ou d’habitude. L’auteur doit donc avoir l’habitude d’accomplir ces genres d’actes
prohibés par la loi. Le comportement incriminé comprend ici plusieurs actes identiques
d’exécution.
Chaque élément isolé ne sera pas considéré comme infraction consommée. Il doit y
avoir donc une réitération. C’est le cas de l’auteur de l’exploitation habituelle de la débauche ou
de la prostitution d’autrui de l’article 174 bis al. 4 du code pénal livre II.
Ces types d’infraction se réalisent par la réitération d'un acte semblable. Une fois ne
suffit donc pas pour qu'il y ait infraction. Le même acte doit se réaliser à maintes reprises.
L’infraction complexe est celle qui se réalise par des actes différents. Le comportement
incriminé comprend ici plusieurs actes différents d’exécution.
L'escroquerie (article 98 CPC) en est un exemple. Si le voleur est celui qui prend,
l'escroc, plus malin, est celui qui se fait remettre l'objet convoité par la victime qui ne se rend pas
compte, à ce moment-là, qu'elle est victime d'une infraction. Car, préalablement, l'auteur a «
préparé son coup » par différentes manoeuvres ou mises en scène qui sont des premiers actes
d'exécution. Se faire remettre la chose ou l'argent par ladite victime elle-même, c'est un nouvel
acte qui achève l'infraction.
- Dans le temps, le régime des infractions complexes est le suivant : il n'y a pas de
consommation, donc pas de poursuites possibles, tant que le dernier acte n'a pas
été accompli. Ce dernier, qui consomme, instantanément, l'infraction, est le point
de départ de la prescription de l'action publique.
- Dans l'espace, l'infraction est localisée, après coup, dans chaque endroit où l’un
des actes avait été accompli.
Il en est ainsi des manoeuvres de l'escroc (gabonais) qui ont commencé par des courriers
envoyés du Gabon ; puis l’agent se déplace lui-même pour rencontrer sa (future) victime en RDC
; enfin, c'est au Sénégal que la victime elle-même est allée déposer l'argent sur un compte
(aussitôt vidé et immédiatement fermé). Les poursuites seront possibles dans les trois Etats.
Lorsque des (faits) infractions distinctes sont unies par un lien assez étroit les faisant
dépendre ou expliquer les unes par rapport aux autres, on parle alors des infractions connexes. Il
en est ainsi d’un abuseur de confiance qui frappe sa victime qui lui a exigé son dû (article 95 du
code pénal livre II). Il sera considéré comme auteur d’infractions connexes.
L’infraction flagrante est celle qui se commet actuellement ou qui vient de commettre.
C’est le cas d’un monsieur X qui tue ou vient de tuer Y pendant que Z était présent ou venait
d’arriver. Ce dernier aura dans ce cas le pouvoir de mettre la main sur X et le déférer devant
l’autorité judiciaire compétente la plus proche.
L’infraction est réputée flagrante lorsqu’une personne est poursuivie par la clameur
publique, ou lorsqu’elle est trouvée porteuse d’effets, d’armes, d’instruments ou papiers faisant
présumer qu’elle est l’auteur ou complice, pourvu que ce soit dans un temps voisin de celui de la
commission de l’infraction98.
Ce sont les infractions qui ont été commises depuis un certain temps et dont les preuves
sont moins certaines.
C’est l’infraction qui nécessite la réalisation du résultat nuisible pour être consommée.
Le comportement de l’agent doit donc produire un résultat actuellement et effectivement
dommageable. Il en est ainsi d’une perte, d’une souffrance, d’un déshonneur, d’un manque à
gagner... ressenti par une victime. On parle alors d’infraction matérielle, mieux, de résultat.
98
Article 7 du Décret du 06 Août 1959 portant Code de Procédure Pénale.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 141 | P a g e
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Ce qui signifie que dans une infraction matérielle, le résultat est une composante de
l’infraction. Elle constitue la condition d’existence de l’infraction, laquelle ne peut se consommer
que si et seulement si elle se réalisait. C’est le cas de la mort d’homme dans l’infraction de
meurtre, d’assassinat, d’empoisonnement… prévus dans le livre II du code pénal.
Elle est celle qui existe indépendamment du résultat. Le législateur incrimine ici le
procédé, peu importe que le résultat voulu par l’agent ne soit pas réalisé. En effet, il peut arriver
que le législateur n'attende pas qu'un tel résultat se manifeste pour poser une incrimination ; qu'il
décide qu’une infraction sera consommée avant un dommage, possible, peut-être même probable
mais pas encore survenu.
Un auteur a parlé d'anticipation répressive. Par opposition aux infractions de résultat, ces
infractions sont de prévention. Le curseur de l'incrimination peut d'ailleurs se déplacer sur la
ligne formée par l'enchaînement des événements. On parle d'infraction formelle lorsque
l'incrimination est proche du résultat redouté.
On peut évoquer :
- l’administration des substances nuisibles (art. 50 du code pénal livre II) ;
- l’incendie volontaire (article 103 et 104 du code pénal livre II) ;
- l’empoisonnement des eaux et denrées (article 170 du code pénal militaire).
On parle d'infraction obstacle, lorsque, simple différence de degré avec les précédentes,
le législateur intervient plus en amont. C’est que le législateur incrimine un comportement en
prévision d’une infraction possible.
Il en est ainsi de :
- La conduite d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par la
présence dans le sang d’un taux d’alcool pur égal ou supérieur à 1,00 gramme
pour mille sans que ce taux atteigne 1,50 gramme pour mille (sera punie d’une
amende de 20 francs à 100 francs. C’est ce que prévoit l’article 104.1 de la Loi
n°78/022 du 30 août 1978 portant Nouveau Code de la route).
- La conduite d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par la
présence dans le sang d’un taux d’alcool pur égal ou supérieur à 1,50 gramme
pour mille (sera punie d’une amende de 50 francs à 200 francs. C’est ce que
prévoit l’article 104.2 de la Loi n°78/022 du 30 août 1978 portant Nouveau Code
de la route).
- La conduite d’un véhicule en état d’ivresse manifeste (sera punie d’une amende
de 100 francs à 500 francs. C’est ce que prévoit l’article 104.6 de la Loi n°78/022
du 30 août 1978 portant Nouveau Code de la route).
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 142 | P a g e
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L’excès de vitesse et de la conduite d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique ou
en état d’ivresse ne laissent que possibilité, sans certitude, que le conducteur cause un accident au
préjudicie plus important.
Alors que la morale peut scruter les consciences et sanctionner les mauvaises pensées et
les mauvaises intentions, le droit pénal ne réprime pas les simples idées ou intentions criminelles.
Ce qui se dit en latin : « NEMO COGITATIONIS POENAM PATITUR » (nul ne peut être
puni de peine pour des pensées).
L’infraction peut être le produit de l’activité intellectuelle de l’homme. Il est vrai que les
infractions non intentionnelles existent du seul fait qu’un résultat dommageable ait été obtenu. Il
va s’en dire que les infractions intentionnelles exigent une certaine durée, ce qui fait envisager
tout naturellement l’ITER CRIMINIS. C’est-à-dire le processus de formation du crime qui
trouvera son aboutissement dans la réalisation criminelle que l’on qualifie ainsi d’élément
matériel requis.
L’élément matériel de l’infraction constitue l’acte par lequel, l’auteur extériorise ou fait
extérioriser sa pensée criminelle.
En effet, le cheminement par lequel devra passer l’infracteur s’appelle ITER CRIMINIS.
Celui-ci comprend non seulement la conception et la résolution criminelles mais aussi la
manifestation de la cogitation criminelle. Il existe par ailleurs, des préalables à l’existence d’une
infraction ou à l’application du texte d’incrimination.
Malgré que le législateur congolais réprime les faits criminels accomplis tels le meurtre,
le vol, le viol… Il est naturel que son intervention répressive ne puisse pas se cantonner au seul
niveau du fait ainsi accompli.
Le droit pénal se doit de protéger la société le plus tôt possible dès que l’indice ou le
signe extérieur pourra annoncer le résultat interdit par la loi. L’infraction peut être immédiate,
provoquée et même la conséquence d’un acte soudain. Elle peut en revanche être préméditée,
préparée et même organisée.
La tentative est ainsi moins sévèrement punie dans la pratique et son auteur peut éviter
toute sanction s’il se désiste volontairement.
C’est ainsi que la femme qui, après avoir administré la nourriture empoisonnée à son
mari, l’amènera à l’hôpital pour y être soigné et se fera arrêter elle-même, pourra bénéficier des
circonstances atténuantes si le poison administré ne cause pas de préjudice à son mari suite à son
repentir actif et à temps qui a consisté à amener ce dernier à l’hôpital.
Il faut dire que l’élément matériel naît en principe des actes préparatoires. Ces actes
préparatoires sont des actes extérieurs par lesquels l’agent se procure, apprête et dispose les
moyens dont il attend se servir pour mener à bon port son plan criminel. En pratique, ces actes
criminels sont parfois difficiles à distinguer. C’est ainsi qu’il convient de les catégoriser
soit parmi les actes consommant l’infraction, soit encore dans la catégorie des actes de
l’infraction manquée soit enfin dans la classification des infractions tentées.
La question fondamentale qui se pose dès lors est celle de savoir à partir de quel instant
l’activité infractionnelle tombe sous le coup de la loi pénale.
L’on cherche ainsi à savoir si la sanction pénale ne doit être prononcée qu’à l’encontre
de l’agent qui serait allé jusqu’au bout de son projet ou si l’accomplissement de certains actes
suffit pour justifier l’application de la sanction pénale. Ce qui conduit à l’analyse de l’infraction
consommée, tentée et manquée dont l’explication s’inscrit dans le cadre de l’examen d’une
question plus globale : celle de la tentative.
L’infraction n’est pas caractérisée que par ses éléments constitutifs. En réalité, elle se
compose de plusieurs autres particules, toutes aussi portées par la norme d’incrimination.
En effet, dans certains cas précis, l’acte d’incrimination organise des circonstances qui,
en elles-mêmes n’ont pas de caractère illicite. Sauf que la structure de l’infraction exige que ces
circonstances soient préalablement établies, pour qu’ensuite, tel comportement adopté par
l’agent, soit constitutif d’une telle infraction à la norme pénale. Dans ces cas, une disposition qui
incrimine un comportement donné, ne sera susceptible d’être violée, que dans la mesure où
l’organe d’accusation parviendra à établir que la condition prévue par la norme d’incrimination
est remplie dans le cas d’espèce.
Ils doivent tous être liés, sans être confondus, pour que l’infraction soit possiblement
constituée. En réalité, pour certaines infractions il s’impose à la fois l’existence des conditions
préalables et celle de ces éléments constitutifs.
99. L’on peut relever ainsi le meurtre et l’assassinat qui nécessitent la personnalité humaine de la victime ; le détournement
d’objets saisis qui est conditionnée à la qualité de l’auteur, au type d’objets à détourner ainsi qu’à l’existence d’une saisie
pratiquée sur lesdits objets.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 146 | P a g e
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Dans l’examen des faits de l’infraction, il est important de détacher les conditions
préalables des éléments constitutifs et plus précisément des éléments fautifs ou interdits de
l’infraction.
L’article 4 du code pénal ordinaire livre 1er prévoit ce qui suit : « Il y a tentative
punissable lorsque la résolution de commettre l’infraction a été manifestée par des actes
extérieurs qui forment un commencement d’exécution de cette infraction et qui n’ont été
suspendus ou qui n’ont manqué leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté
de l’auteur. La tentative est punie de la même peine que l’infraction consommée ».
C’est également la même définition qu’a adoptée le législateur congolais dans le code
pénal militaire à l’article 4 de la loi n°024/2002 du 18 novembre 2002.
L’analyse de cette disposition légale, laisse entrevoir les deux formes de la tentative
punissable, à savoir : d’une part, celle dont l’exécution a été suspendue ou interrompue par une
cause extérieure à l’agent : c’est l’infraction tentée ; d’autre part, celle qui a manqué son effet
alors que tous les actes d’exécution ont été accomplis : c’est l’infraction manquée.
Par ailleurs, la doctrine a ajouté une autre variante qu’il importera également
d’examiner : celle de l’infraction impossible.
L’illustration à faire est celle de l’affaire François Berchem, dont arrêt de la cour
d’appel paris en France rendu le 3 janvier 1973100. En espèce, monsieur François Berchem
avait pris un chariot dans un magasin, pris ensuite un carton plein de produits peu chers avec le
prix dessus, ouvert le carton, l’a vidé de son contenu et l’a rempli de produits plus chers et s’est
dirigé vers les caisses, mais a hésité et d'un seul coup a rencontré son cousin, et lui proposa de
passer avec lui à la caisse pour faire diversion ; mais, le cousin refusa de l'aider et s'en alla.
François abandonna son chariot dans un coin et sorti sans achat. Poursuivi pour tentative de vol
(commencement d'exécution et l'interruption doit être involontaire), François Berchem qui
croyait être déjà devenu propriétaire des produits choisis, a vu la Cour retenir la tentative de vol.
Elle a considéré que dans ce cas, on est propriétaire qu'après complet paiement du prix à la
caisse. Avant de passer et payer le prix à la caisse, on est seulement détenteur précaire (on détient
donc le corpus mais pas encore l’animus).
C’est ainsi que l’usage de l’échelle pendant la nuit peut constituer l’indice d’une
résolution de commettre soit un vol, soit un attentat à la pudeur, soit encore un viol. Si on ne
parvient pas à prouver l’une ou l’autre, on ne pourra pas établir la tentative et punir cet
agissement sauf si cet agissement en lui-même est érigé en infraction.
100.
Affaire « François Berchem », arrêt de la cour d’appel de paris le 3 janvier 1973.
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En d’autres termes, tant que la résolution criminelle reste dans la tête de l’agent, il n’y a
en principe aucune possibilité de mettre en branle le mécanisme de la tentative punissable. C’est
donc la révélation de cette intention par des actes extérieurs qui va, en quelque sorte, mettre la
puce à l’oreille de l’autorité pénale. Mais, il faut dire que ceci ne règle pas totalement la difficulté
de l’entreprise. Il faut encore déterminer la nature de ces actes extérieurs.
Il s’ensuit donc que la tentative punissable exclut les actes préparatoires. Elle n’est pas
non plus possible en matière d’omission. C’est ainsi qu’il n’y a par exemple pas de tentative de
refus d’obéissance.
Car, en effet, celle-ci s’appuie sur une intention délibérée de manquer à un devoir
déterminé. L’acte extérieur qui manifeste cette intention, c’est précisément cette abstention
d’obéir qui est en soi coupable, donc constitutive d’une infraction parfaitement consommée.
(Articles 93 et 94 du code pénal militaire).
En ce qui concerne le critère de l’univocité, il faut dire que ne sera pas considéré comme
un acte d’exécution l’acte équivoque qui peut encore faire l’objet de diverses interprétations.
Quant à celui de la proximité : l’acte trop éloigné de la fin proposée laisse place à un
abandon du projet criminel.
Face aux limites de ces différents critères de distinction, on peut prendre en compte à la
fois l’activité matérielle et la résolution criminelle. Le commencement d’exécution doit être
déterminé à la fois par la distance matérielle et morale très courte.
En définitive, l’on doit dire que dans les faits, la frontière est difficile à tracer. C’est
ainsi que le législateur en a laissé le soin aux tribunaux, dans chaque cas d’espèce. Les principes
directeurs issus de la jurisprudence, devant guider le juge sont ceux-ci :
- le juge recherchera le but poursuivi par le criminel ;
- il devra comparer le but poursuivi à l’acte posé et l’intention de l’auteur ;
- il décidera si l’acte est nécessaire pour atteindre le but ;
- il décidera aussi si l’acte était moralement si près du point de réussite que l’agent
en parcouru le reste de la distance seul ;
- il interprétera favorablement pour l’accusé lorsque l’acte n’indique pas
clairement l’intention de cet accusé ;
- il se montrera favorable si l’acte est susceptible de deux interprétations, l’une
favorable et l’autre défavorable à l’accusé.
Pour que l’on retienne la tentative, il faut que l’exécution soit interrompue. Car,
autrement l’exécution serait complète, consommée de même un échec. L’arrêt d’exécution par
des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur de l’acte, forme commencement
d’exécution. Il y a pour cela tentative et elle est punissable.
Le désistement volontaire, quant à lui, n’est opérant que lorsque les actes d’exécution
déjà accomplis ne constituent pas en eux-mêmes une infraction. Si la renonciation de l’agent est
spontanée, c’est-à-dire qu’elle ne résulte pas d’un événement extérieur comme par exemple, la
réaction de la victime, l’interruption des forces de l’ordre.
L’infraction manquée est celle dans laquelle l’échec de l’entreprise criminelle n’est pas
imputable à l’agent : les actes extérieurs qu’il a accomplis et qui manifestent sa résolution
criminelle n’ont manqué leur effet qu’en raison de circonstances indépendantes de sa volonté.
C’est que tous les actes extérieurs réclamés pour l’exécution de l’infraction doivent avoir été
accomplis, mais ne manquer d’effets que suite aux circonstances extérieures à bonne volonté de
l’auteur. A la différence de la tentative où l’exécution est incomplète, l’infraction manquée
suppose l’exécution complète. L’action doit donc se dérouler dans sa totalité.
Pour parler de l’infraction manquée, deux conditions sont requises : il faut que l’agent
ait accompli tous les actes d’exécution de l’infraction ; ces actes doivent avoir manqué leur effet
à la suite d’une circonstance indépendante de la volonté de l’agent.
Il convient de noter que le désistement volontaire ne peut entraîner l’impunité que s’il
intervient avant que l’infraction n’ait été consommée, c’est-à-dire avant d’atteindre le résultat
recherché. Une fois l’infraction consommée, si l’auteur s’emploie à en réparer les effets et
conséquences, il y a repentir actif et non désistement. Le repentir actif, à la différence du
désistement, est postérieur à l’accomplissement de l’infraction et n’en efface pas le caractère
délictueux.
L’infraction subsiste donc et l’agent sera poursuivi et condamné. Le repentir actif, mais
tardif, est, quant à lui, inopérant. Le juge peut cependant le retenir comme circonstance
atténuante au bénéfice de l’agent.
On se rend ainsi compte, que le législateur vise principalement deux types d’erreur :
D’une part, l’erreur intellectuelle ou psychologique qui consiste pour l’agent à se méprendre sur
l’identité de la victime. C’est le cas d’un agent qui tue un monsieur X qu’il prend par erreur, pour
son ennemi Y. D’autre part, l’erreur matérielle ou l’ABERRATIO ICTUS qui consiste dans une
maladresse physique, une déviation malencontreuse du coup qui atteint mortellement une autre
personne que celle visée par l’agent.
La prise en compte du résultat manqué peut donner ainsi lieu à une autre forme
d’infraction manquée appelée « infraction impossible ».
L’infraction est impossible lorsque le résultat recherché par l’agent ne peut pas être
atteint soit par manque d’objet, soit par inefficacité de moyens utilisés.
C’est que l’infraction ne peut se réaliser soit à défaut d’objet (le cas d’une tentative
d’avortement sur une femme qui en réalité n’est pas enceinte, le fait pour un agent de mettre sa
main dans une poche vide pour réaliser le vol) soit du fait de l’inefficacité des moyens employés,
c’est-à-dire, par défaut de moyens nécessaires ou de moyens requis par la loi (par exemple une
tentative de meurtre avec une arme non chargée ou chargée à blanc).
101
LIKULIA BOLONGO Norbert, Droit pénal spécial zaïrois, LGDJ, Paris, T1, 2ère éd., T.2., L.G.D.J., 1985, pp.58-59.
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Ainsi, l’infraction impossible réunit toutes les conditions de la tentative punissable que
sont : l’intention coupable, les actes matériels d’exécution et l’absence de désistement volontaire.
Rejetant ces deux théories pour leur caractère radical, certains auteurs avancent des
solutions de compromis dont les plus célèbres distinguent d’une part entre l’impossibilité absolue
et l’impossibilité relative, d’autre part, entre l’impossibilité de fait et l’impossibilité de droit.
D’après les auteurs qui soutiennent cette distinction, seule l’impossibilité de droit
entraîne l’impunité de l’infraction impossible. L’impossibilité de fait n’influe nullement sur la
répression.
Quand l’impossibilité n’est pas de droit, elle est de fait. Elle est liée à des circonstances
qui ne sont pas un élément de l’infraction. Ainsi, peut-on parler d’impossibilité de fait lorsqu’un
assassin, muni de son arme bien chargée pour éliminer son ennemi, fait le guet dans un coin de
rue où celui-ci passe habituellement, mais en vain, car la victime potentielle a emprunté une autre
voie.
Il faut dire que dans la pratique, il est souvent difficile d’opérer toutes ces distinctions
entre impossibilité absolue et impossibilité relative, ou impossibilité de droit et impossibilité de
fait. La jurisprudence apprécie restrictivement les cas d’exonération pour ne retenir l’impunité
qu’en cas de délit absurde et de délit putatif.
Délit absurde. Il y a délit absurde, autrement appelé délit surnaturel, lorsque le moyen
mis en œuvre est chimérique et ne présente… aucun rapport de convenance, d’après l’expérience
de vie avec le résultat recherché.
Est absurde par exemple, le fait pour un agriculteur de faire un pèlerinage pour tuer son
ennemi, ou encore le fait pour une femme d’utiliser une formule magique ou une prière pour
obtenir la mort de sa rivale.
Il n’y a donc pas de tentative punissable lorsque l’acte est sans lien avec le résultat
recherché, comme le fait de vouloir tuer quelqu’un par envoûtement, ou avec un jouet d’enfant.
Délit putatif. Il y a délit putatif, lorsque l’illégalité des faits tels que l’agent les a
accomplis n’existe que dans son imagination.
C’est le cas d’un agent qui croît commettre une infraction en vendant du diamant, tout
simplement parce qu’il ignore les dispositions qui en libéralisent l’exploitation, la détention, le
transport et la vente (Ordonnance-loi n°82-039 du 05 novembre 1982, modifiant et complétant
l’ordonnance-loi n°81-013 du 02 avril 1981, portant législation générale sur les mines et
hydrocarbures).
Il n’y a ni recel d’évadé, ni tentative de recel d’évadé de la part d’une personne qui croit
avoir pris à son service un militaire recherché pour évasion (infraction prévue à l’article 186 du
code pénal militaire), alors que celui-ci avait été libéré régulièrement.
Pour que l’infraction existe juridiquement et que son auteur en réponde pénalement, il ne
suffit pas que celui-ci ait accompli un acte matériel (élément matériel), préalablement défini et
sanctionné par le législateur (préalable légal). Encore faut-il que cet acte matériel ait été l’œuvre
de la volonté ou de l’imprudence de son auteur. C’est ce lien entre l’acte matériel et l’auteur qui
constitue l’élément moral ou intellectuel de l’infraction que l’on appelle MENS REA (volonté
criminelle) par opposition à l’ACTA REUS (acte criminel).
Il faut dire que toute infraction n’est constituée et n’est punissable que si son auteur a eu
la volonté ou la conscience de violer la loi pénale. Néanmoins, cette volonté ne joue pas le même
rôle ou n’a pas la même étendue dans toutes les infractions. Dans certaines infractions, la volonté
ne porte que sur l’acte lui-même. Dans d’autres, elle porte à la fois sur l’acte et sur ses
conséquences.
En tenant ainsi compte de l’élément moral, les infractions peuvent se regrouper en deux
catégories :
- les infractions intentionnelles ; et
- les infractions non intentionnelles.
L’infraction est intentionnelle lorsqu’elle est commise avec le dol qui est la résolution
criminelle ou la détermination de commettre une action dont on connaît le caractère délictuel.
Le dol criminel ou pénal est donc la volonté qui anime l’agent d’accomplir un acte
défendu par la norme ou de s’abstenir d’un acte ordonné par elle.
Le dol pénal, qui est la caractéristique des infractions intentionnelles, comporte plusieurs
formes. On distingue : le dol général, le dol spécial, le dol simple et le dol aggravé, le dol
déterminé et le dol indéterminé, le dol direct et le dol indirect.
Il convient de traiter de :
- la connaissance et de la volonté ;
- divers degrés du dol ;
- dol simple et dol aggravé ;
- dol déterminé et dol indéterminé ;
- dol direct et dol indirect.
Pour qu’une infraction soit qualifiée d’intentionnelle, il faut que l’agent ait su que
l’action qu’il commettait était contraire à la loi et qu’il ait eu la volonté de la réaliser tout de
même.
A. La nécessité de la connaissance
L’auteur doit avoir su ce qu’il faisait et il devait être à mesure de contrôler son activité.
Il doit être conscient de ce qu’il fait. Il doit jouir de toutes ses capacités mentales. L’acte lui
imputé ne doit pas être le résultat du hasard ou d’autres circonstances mais bien le résultat réel ou
prévisible provenant d’un homme raisonnable, qui ne doit pas s’abandonner à l’imprévoyance ni
au défaut de précaution.
B. La nécessité de la volonté
L’agent doit non seulement avoir connaissance du caractère délictuel de l’acte mais
aussi vouloir le commettre. Ce qui signifie qu’il ne doit pas être amené à l’infraction par des
circonstances extérieurs. C’est le cas de monsieur X qui désire tuer Y à 18 h 30 minutes, et qui le
tue vers ces heures par des moyens voulus et mis en place par lui. Mais lorsqu’en voulant tuer Y,
X atteint Z, il y a bien sûr connaissance et conscience du caractère délictuel de l’acte ; seulement
que le résultat voulu n’est pas celui obtenu. L’infraction existe tout de même (art. 43CP).
A. Le dol général
Il consiste dans la volonté d’accomplir un acte que l’on sait défendu ou interdit par la
loi. Le dol général est une condition souvent tacite de toutes les infractions. C’est ainsi qu’il a été
jugé que le « dol est un élément essentiel pour l’existence de toute infraction prévue par les
différentes dispositions qui forment le code congolais, sauf dans le cas où le texte lui-même
prévoit expressément la simple faute, la simple négligence »102.
102
Boma, 15 juillet 1902, Jur. Et. I., p.202.
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Pour préciser ce dol général, il arrive par moments que le législateur vise expressément
le dol en ayant recours à certains termes comme : à dessein, volontairement, sciemment, sachant,
connaissant, avec connaissance103…etc.
B. Le dol spécial
Il consiste en la volonté spécifique de l’agent à commettre une infraction précise.
Lorsqu’on prend le cas des infractions de meurtre et de vol, on se rend ainsi compte que : Dans le
meurtre, la volonté consciente de violer la loi ne suffit pas ; il faut en autre que l’agent ait eu la
volonté de donner la mort. C’est donc l’animus necandi. Cet animus necandi constitue l’élément
intellectuel spécial appelé aussi dol spécifique de l’infraction de meurtre (art 44-45 CPL II).
En ce qui concerne l’infraction de vol (article 79 CPL II) et généralement dans toutes les
infractions contre les propriétés (abus de confiance, escroquerie…), la volonté consciente de
violer la loi ne suffit pas. Elle ne constitue donc que le dol général.
Mais, le vol ne pourra être consommé que lorsqu’en plus de ce dol général il est prouvé
que l’agent a eu l’intention de s’approprier injustement la chose d’autrui.
Il faut noter que la loi ne mentionne pas toujours expressis verbis le dol spécial. Le
juriste dégagera souvent l’existence de celui-ci à partir de la nature même de l’infraction. C’est
ainsi par exemple que l’outrage à un fonctionnaire (article 136 du CPL II) ne peut pas se réaliser
sans animus injuriandi. L’auteur de l’acte est animé de l’intention de suivre, d’injurier, de faire
souffrir le fonctionnaire. Ce qui ne doit pas se confondre au mobile de l’infraction.
C. Le mobile de l’infraction
Le dol spécial n’est pas à confondre avec le mobile. En effet, le mobile c’est l’intérêt
ou le sentiment personnel qui a déterminé l’agent à perpétrer l’infraction. Il peut s’agir d’un
sentiment de haine, de vengeance, de jalousie, d’amour, de pitié, de cupidité, de convoitise,
etc…Le mobile est donc le but ou même le motif qui se trouve à la base de toute infraction. En ce
sens, Laure Rassat104 affirme ce qui suit : « on peut voler par convoitise, par manie, pour s’auto-
indemniser d’un préjudice qu’on vous aura causé, par idéologie anti-propriété, etc. L’infraction
reste toujours un vol légalement égal à lui-même et toujours punissable de la même façon». Dès
lors, le mobile ne fait aucunement partie du crime et n’est juridiquement pertinent à la
responsabilité criminelle. Il ne constitue pas un élément juridiquement essentiel de l’accusation
portée par le ministère public105.
103
Articles 45 du code pénal congolais livre II et 54 du code pénal militaire congolais.
104
Michelle-Laure RASSAT, Droit Pénal Général, Ed. Ellipses, Paris, 2004, p. 329.
105
LEWIS C., REINE L. (1979) RCS 821, 861, cité par COTE HARPER G., D. MANGANAS A., TURGOON J., Droit Pénal
Canadien, Ed. Yvon Blais Inc., 3ième éd, Owonswille (Que.) 1989, p. 257.
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En droit pénal, le mobile est inopérant. Autrement dit, celui-ci ne tient pas compte du
mobile en ce qui concerne l’existence de l’infraction. Ainsi, sera puni conformément aux articles
44 et 45 du CPL II, tout assassin quel qu’ait été le sentiment ou le mobile qui a commandé son
crime, qu’il ait tué par pitié (comme c’est le cas dans l’euthanasie), qu’il ait tué par amour (crime
passionnel) ou par vengeance. De même, tout auteur de vol simple se verra appliquer les peines
de l’article 80 du CPL II, peu importe qu’il ait violé par convoitise, par cupidité ou par manie (le
cas des kleptomanes).
Il pourra le retenir ainsi comme circonstance atténuante. C’est le cas de l’agent qui
exerce illégalement l’art de guérir. Il est animé de l’intention criminelle peu importe le mobile
qui l’anime.
Comme soutenu ci-haut, le droit pénal ne prend pas en compte le mobile dans
l’établissement de la responsabilité pénale. Cependant, il arrive par moments que le législateur
érige parmi les différents buts poursuivis par l’auteur, un but précis et particulier en composante
de certaines infractions. Un tel but fixé par l’acte incriminateur constitue le résultat requis par le
dol spécial.
Il en est ainsi de l’article 68 du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal qui dispose
ce qui suit : « Est puni de … celui qui a enlevé ou fait enlever, arrêté ou fait arrêter, détenu ou
fait détenir des personnes quelconques pour les vendre comme esclaves ». En effet, pour les
vendre comme esclaves constitue donc un intérêt tout à fait particulier, un mobile érigé en
composante de l’infraction, un dol plus spécial.
C’est aussi le cas de l’article 200 du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal qui
précise que : « L’attentat dont le but aura été de porter le massacre, la dévastation ou le pillage
sera puni de mort ». Dès lors, porter le massacre, la dévastation ou le pillage, constitue le but
poursuivi par l’agent en commettant cette infraction. Ce but constitue un intérêt personnel mais
érigé en composante de l’infraction par le législateur lui-même.
L’article 164 de la loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code Pénal Militaire
prévoit le crime de Génocide en ces termes : « Par génocide, il faut entendre l’un des actes ci-
après commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, politique,
racial, ethnique, ou religieux…». Pour cette infraction de génocide, le dol spécial consiste en
cette « intention » de l’agent, de détruire partiellement ou totalement un groupe.
106
LIKULIA BOLONGO, Op. cit., pp.54-58.
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Le dol est susceptible de degrés dont la prise en compte peut influer sur la qualification
et la sanction. On oppose ainsi le dol simple qui entraîne la peine ordinaire, au dol aggravé,
réfléchi ou prémédité qui entraîne une peine plus sévère. Le législateur distingue donc ici le
mouvement spontané du dessein réfléchi (ou prémédité).
Cette distinction tient compte non plus du degré ou de l’intensité de la volonté (comme
dans les distinctions précédentes) mais plutôt des résultats de cette volonté.
On parle du dol déterminé lorsque l’agent a voulu d’une façon précise, commettre telle
infraction (meurtre, vol ou viol…) et cela à l’encontre d’une telle personne déterminée.
En revanche, il est indéterminé lorsque l’agent n’a pas voulu commettre telle infraction
de façon précise ou lorsqu’il n’a pas visé telle personne particulière. Dans ce cas, l’agent veut
simplement tuer quelle que soit la victime ou encore, il veut simplement voler quelle que soit la
personne qui sera prise dans le filet. En règle générale, la sanction à infliger au délinquant sera
proportionnée au résultat obtenu, c’est-à-dire à la gravité du dommage éprouvé par la victime. Le
législateur congolais décide à l’article 43 du code pénal que l’identité de la victime est
indifférente dès lors que l’intention de tuer est établie.
Mais ce principe ne joue pas lorsque la qualité de la victime est un élément constitutif de
l’infraction. L’article 136 du code pénal est illustratif à ce sujet. Car l’incrimination ne peut être
retenue que si la victime est revêtue de la qualité de fonctionnaire. Si la victime n’a pas cette
qualité, l’agent ne pourra être condamné que pour des coups ou des injures simples.
Le dol est direct lorsque l’agent recherche le résultat prohibé par la loi et pénalement
sanctionné. Dans le cas contraire, il est indirect.
Comme dol direct, on peut prendre à titre illustratif le cas d’un monsieur X qui désire
tuer Y et qui le tue effectivement. La mort de Y, dans ce cas, est le résultat voulu par X et obtenu
précisément et exactement. Par ailleurs, le dol direct peut être déterminé ou indéterminé. C’est le
cas d’un agent qui veut tuer mais pas une personne précise. Lorsqu’il tire dans la foule, et qu’il
réussit à tuer une personne quelconque sans se préoccuper de l’identité de la personne victime, il
s’agit là d’un dol direct mais indéterminé.
A. Le dol nécessaire
A titre d’illustration, l’on peut prendre le cas d’un délinquant X, qui décide l’élimination
physique d’un homme politique Y, lors de son passage à 10 heures au Pont Matete (un endroit
déterminé), à bord de sa voiture rouge.
A cet effet, l’agent prépare des explosifs et se poste à l’endroit choisi. Il faut noter que le
délinquant sait très bien que sa victime visée est toujours conduit par son chauffeur et qu’avec
l’arme qu’il a décidé d’utiliser il ne peut pas atteindre Y sans tuer le chauffeur Z. Il s’obstine,
néanmoins, à réaliser son forfait et tue non seulement Y mais aussi Z.
A l’encontre de l’homme politique Y, le délinquant aura commis un homicide avec le
dol direct. Tandis que vis-à-vis du chauffeur Z, il aura réalisé un homicide avec le dol
nécessaire107.
B. Le dol éventuel
Il y a dol éventuel lorsque l’agent, sans vouloir en aucune façon le résultat dommageable
qui s’est produit, ou même aucun résultat, l’a simplement prévu comme possible. Dans ce cas,
l’agent accepte ou résigne à la réalisation éventuelle du résultat prohibé.
C’est le cas d’un Administrateur directeur général (A.D.G.) d’une compagnie de
transport tant maritime, terrestre qu’aérien qui, poussé par le souci du gain, fait voyager un engin
qu’il sait ne pas être en parfait état de navigabilité ou de toute autre utilisation. Si un accident
survient et que les passagers sont tués, ce Président directeur général devra répondre de ces
homicides volontaires.
107
JIMENEZ de ASUA, « La faute consciente et le dolus eventualis », in R.D.P.C., 1959-1960, pp.603 et s.
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De même, « l’employeur qui remet à son chauffeur un véhicule dont il connaît l’état
défectueux de marche pourra répondre d’un homicide ou des lésions volontaires (dot éventuel) si,
par exemple, mû par l’intérêt, il se résignait à l’éventualité d’un accident que, par ailleurs, son
chauffeur lui avait préalablement rappelée.
C’est cela qui le rapproche au délit intentionnel, où le résultat qui s’est produit a été
voulu. Il s’en distingue cependant en ce que l’intention n’a porté que sur un résultat moins grave
que le résultat réalisé108.
L’élément moral dans les infractions non intentionnelles consiste dans une simple faute :
« la faute pénale » que l’on qualifie de faute d’imprudence.
Le législateur congolais n’a pas définit la faute d’imprudence dans le code pénal
congolais. Cependant, toutes les fois qu’il en fait un élément constitutif de l’infraction, il utilise
les concepts ci-après : involontairement (art. 52, 53, 55 du C.P.L II) ; défaut de prévoyance ou de
précaution (art. 52, 109 C.P.L. II) ; imprudemment (art. 56 C.P.L. II).
108
STEFANI Gérard, LEVASSEUR Georges et BOULOC Bernard, Droit pénal zaïrois, 13e éd., Dalloz, Paris, 1987, p. 277.
109
HAUS Jacques Joseph, cité par NYABIRUNGU-mwene-SONGA, Op. cit., p. 233.
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La faute est donc cette erreur de conduite qui permet d’imputer à un agent une
conséquence dommageable d’un fait qu’il n’a pas voulu provoquer. Autrement dit, le fait de
l’agent n’est pas le résultat d’une volonté positive mais plutôt d’une faute psychologique,
intellectuelle ou, mieux encore, d’une inertie de la volonté.
La loi n’a pas énuméré les faits constitutifs de défaut de prévoyance ou de précaution.
Mais, à la suite de la jurisprudence, Likulia a proposé quelques définitions que nous reprenons :
- Par défaut de prévoyance ou de précaution, il faut entendre toute faute non intentionnelle
commise par un agent qui a omis d’accomplir un acte qui lui incombait ou plus
généralement celle qui consiste en un manque de soins pour éviter un mal110. Il s’agit donc
de toute faute, quelque légère qu’elle soit, qui cause un homicide ou des blessures111 ;
fautes que l’agent aurait pu éviter avec plus de prévoyance, d’attention, de soins, d'habileté
et de diligence. A cet égard, la jurisprudence désigne indifféremment cette faute par les
termes : inattention, négligence, imprudence112.
110
. Trib. Sous-région de Mbuji-Mayi, 25 janvier 1974, in R.J.Z. 1977, p.83.
111
. Elis. 21 mai 1914 et 10 décembre 1940, Jur. Col. 1925, p.91 ; R.J.C.B. 1941, p.22.
112
. Elis. 7 avril 1936 et 12 octobre 1937, R.J.C.B. 1938, pp.39 et 44.
113
. Distr. Congo-Ubangi 10 novembre 1953, R.J.C.B. 1954, p.113.
114
. C.S.J. 23 juin 1972 ; R.J.Z. 1973, p.43.
115
. Elis. 19 avril 1949, R.J.C.B., p.131.
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116
. 1ère Inst. Kas. 10 avril 1954, R.J.C.B. 1955, p.128.
117
. Trib. Distr. Mbuji-Mayi 11 mai 1971, in R.J.Z., p.90.
118
. 1ère Inst. Coq. (App.) 19 janvier 1956, R.J.C.B. 1956, p.379.
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- L’inobservation des règlements de police constitue aussi une faute, même si elle n’est pas
pénalement réprimée en elle-même si elle ne résulte pas de l’inattention, maladresse ou
imprudence. Par règlement il faut entendre toute loi, toute ordonnance-loi, toute
ordonnance, tout décret, ou tout arrêté réglementaire. Et même le règlement qui n’oblige
que certaines personnes déterminées telles que le médecin. C’est la violation des
prescriptions du code de la route qui constitue le cas le plus fréquent de l’inobservation des
règlements. Il en est ainsi de celui qui tue ou blesse une personne par excès de vitesse 119 ou
de celui qui stationne dans un endroit interdit, défaut de prévoyance ayant provoqué un
accident dommageable. Le défaut de prévoyance ou de précaution est généralement retenu
à charge du conducteur qui se rend compte d’une défectuosité de son véhicule et qui
poursuit néanmoins sa route.
Entre les articles 52 et suivants du code pénal ordinaire et l’article 258 du code civil
livre III qui rend responsable toute personne qui causerait à autrui un dommage par son
imprudence ou sa négligence ; il existe des similitudes dont voici les principales :
- Dans les deux cas, pour que la responsabilité de l’agent soit engagée il est
nécessaire qu’il existe un dommage ;
- Dans les deux cas, le dommage doit être la conséquence de la faute de l’agent. Il
faut donc qu’il y ait un lien de causalité entre la faute commise et le préjudice
subi par la victime ;
- Dans les deux cas, la sanction est fixée en fonction de l’étendue du préjudice
causé à la victime.
En effet, en cas de quasi-délit de l’article 259 du CCL III, la réparation est fixée en
considération du dommage causé. De même, en matière du délit d’imprudence, la répression est
organisée en considération de la gravité du préjudice subi par la victime (lorsque la victime a
rendu la faute plus préjudiciable par ses agissements, la faute du prévenu demeure tout de même
sauf si le dommage est le résultat exclusif des agissements de la victime).
119.
Trib. Distr. Mbuji-Mayi 20 avril 1971, in R.J.Z. 1977, p.89 ; Trib. Distr. Mbuji-Mayi, 11 mai 1971, in R.J.Z. 1977, p.90.
120
. Distr. Mbuji-Mayi 1er septembre 1971, in R.J.Z. 1977, p.93.
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L’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil vient en quelque sorte confirmer ce
principe d’identité. En effet, la condamnation pénale pour délit d’imprudence implique
nécessairement que l’agent est aussi responsable d’une faute civile et doit donc aussi être
condamné à des dommages et intérêts au profit de la victime.
Sauf que l’inverse n’est forcément pas possible. En effet, il résulte des articles 258, 259
et suivants de notre code civil que chacun est responsable du dommage qu’il a causé, non
seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
Nous constatons que cette théorie de l’unité des fautes civile et pénale, qui est également
admise en droit belge sans discussion (Legros, n°201), a été pendant longtemps controversée en
France, et la jurisprudence s’était prononcée d’abord en faveur de la différence de nature de ces
deux fautes, de sorte que le juge pénal et le juge civil avaient chacun ses critères et pouvaient
statuer différemment sur la même faute, appréciée successivement sous l’aspect criminaliste et
sous l’optique civiliste121.
Alors que depuis le 18 décembre 1912, la Cour de cassation française, dans un arrêt
célèbre et historique, avait proclamé l’identité absolue de la faute pénale et de la faute civile 122, il
est arrivé par la suite que ce choix soit changé par le législateur. En effet, le système de l’identité
absolue de la faute pénale et de la faute civile a été très critiqué en France. Dans la mesure où,
selon les certains auteurs, il aboutissait à dénaturer le procès pénal car le juge, pour accorder une
indemnité, retenait une « poussière de faute » : le procès pénal devenait donc un instrument au
service des intérêts de la victime, ce qui n'est pas dans son essence.
121
. Roger MERLE et André VITU, « Traité de droit criminel », p.453.
122. S. 1914. I.249, note Morel.
123. Jean Pradel et Michel Danti-Juan, Droit pénal spécial. Droit commun-droit des affaires, op.cit., p.102
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Troisième Titre
L’AUTEUR DE L’INFRACTION :
Le Délinquant
Ce ne sont pas les faits qui violent le droit qui sont punissables, ce sont les personnes 124.
L’étude sur la source et celle relative à la commission de l’infraction ont fait comprendre qu’il est
impossible d’analyser sans faire recours à celui qui viole la norme, à celui qui pose des actes
réprimés par la norme, c’est-à-dire, le délinquant.
Le délinquant est, en effet, l’auteur de l’infraction. Considéré comme tel, c’est à lui
qu’incombe donc la responsabilité pénale. Ordinairement, l’infraction n’est commise que par une
personne. Mais, il arrive que l’auteur de l’infraction soit aidé dans son activité criminelle par
d’autres acteurs.
124
ORTOLAN, Eléments de droit pénal, I, 4e éd., Paris, 1886, n°219.
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La personne responsable peut agir individuellement, mais par moments, l’on peut avoir à
faire à un groupe de personne.
Mais, la question se pose pour savoir si, on peut néanmoins concevoir la responsabilité
pénale à retenir à l’endroit des êtres moraux. Est-ce qu’ils peuvent commettre des infractions ?
Que le code pénal s'applique aux personnes physiques, est une évidence. Cela va
tellement de soi que le code ne le dit expressément qu’assez rarement.
Paragraphe 1. Principe
Le principe posé est que seuls les êtres physiques sont capables de délinquer. Ni les
choses ni les animaux ne peuvent être sujet de l’infraction. Seuls des êtres faites de chair, dotés
de volonté et d’intelligence peuvent commettre une infraction et, de ce fait, encourir une peine.
Parmi ces mécanismes, il y a les immunités en matière pénale. Ce sont des exemptions
temporaires absolues d’action pénale organisées au profit de certaines personnes (tenant compte
de leur statut : haut responsable ou membre de famille) en vue de protéger les fonctions qu’elles
assument ou leurs qualités.
On comprend dès lors que ce mot « immunité » est chargé de sens. Souvent, ce terme est
invoqué sans que l'on soit certain de son contenu. La confusion avec l'impunité ou l'inviolabilité
est assez souvent entretenue. Pour certains, elles sont de plusieurs ordres et selon les cas, elles ont
pour effet soit de suspendre provisoirement, soit d'empêcher définitivement toute action publique
contre les individus qui en bénéficient, selon qu'elles sont d'un côté temporaires ou relatives et
qualifiées d’inviolabilités ; et de l'autre, définitives ou absolues que l’on qualifie d’immunités au
sens strict. Seules les immunités au sens strict entrainent l’irresponsabilité puisqu’elles enlèvent
le caractère infractionnel de l’acte couvert.
Mais, nous retenons qu’en droit pénal l’immunité (telle que présentée par le Vocabulaire
juridique (PUF)), est une cause d'impunité qui, tenant à la situation particulière de l'auteur d'une
infraction au moment où il commet celle-ci, s'oppose définitivement à toute poursuite, alors que
la situation créant ce privilège a pris fin. Elle constitue donc, au profit de son bénéficiaire, une
entrave à la qualification même de l’infraction. Elle lui enlève son caractère infractionnel et l’acte
accompli dans le cadre d’une fonction immunisée n’entrainera plus de poursuites pénales.
L’immunité des personnels diplomatiques et consulaires est régie par les conventions de
Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques et du 24 avril 1963 sur les relations
consulaires. Les gouvernants quant à eux, bénéficient des inviolabilités organisées par des
normes internes.
Dès lors, le principe d’égalité de tous les délinquants devant l’action publique n’a pas
une portée absolue. De toutes les sortes d’immunités qui existent, on peut succinctement analyser
à titre illustratif :
- l’immunité de la fonction parlementaire ; et
- l’immunité des fonctions judiciaires.
125
Article 107 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée le 20 janvier 2011 : « Aucun parlementaire ne peut être
poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en raison des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Aucun
parlementaire ne peut, en cours de sessions, être poursuivi ou arrêté, sauf en cas de flagrant délit, qu’avec l’autorisation de
l’Assemblée nationale ou du Sénat, selon le cas. En dehors de sessions, aucun parlementaire ne peut être arrêté qu’avec
l’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale ou du Bureau du Sénat, sauf en cas de flagrant délit, de poursuites autorisées
ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un parlementaire est suspendue si la Chambre dont il est membre
le requiert. La suspension ne peut excéder la durée de la session en cours ».
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A première vue, cette disposition organiserait une simple entrave aux poursuites, aux
recherches, aux arrestations, aux détentions ou aux jugements ; entrave faisant échapper à toute
poursuite pénale les discours prononcés, les opinions ou les votes émis au sein du parlement ainsi
que les comptes rendus des débats parlementaires.
Et pourtant, la réalité c’est que sur le plan pénal, l’immunité, lorsqu’elle est
fonctionnelle, constitue en effet plutôt un obstacle à la qualification pénale des faits de ladite
fonction. Les faits réalisés dans ce contexte professionnel sont donc réguliers et ne seront ni pour
l’instant qualifiés d’infraction, ni dans le futur.
Mais, il arrive assez souvent que l’on confonde l’immunité proprement dite de
l’inviolabilité.
126.
L’article 107 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier
2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006
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Puisqu'il s'agit d'une immunité fonctionnelle couvrant les travaux parlementaires et non
la personne même du sénateur ou du député, il en résulte qu'elle s'applique aux non-
parlementaires dès qu'ils sont associés ou impliqués aux travaux de la fonction couverte par
l'immunité.
127.
Articles 107, al. 3, de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 portant
révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo.
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L'on peut donc évoquer les témoins qui peuvent être entendus par une commission
d'enquête parlementaire. Il en sera aussi le cas pour les assistants parlementaires, secrétaires et
tous autres informateurs. Mais, il faut souligner qu'elle ne couvre pas les propos tenus en dehors
des travaux de la fonction parlementaire128.
Par ailleurs, étant donné que l'article 197 alinéa 5 de la Constitution en vigueur confirme
l'application des articles 100, 101, 102, 103, 108 et 109, mutatis mutandis, aux Assemblées
provinciales ; il me semble tout à fait logique que cette immunité parlementaire qui est
constitutionnellement garantie puisse leur être appliquée, dans les limites ci-haut définies.
Si l’immunité parlementaire est consacrée par la loi, il n’en est pas de même pour
l’immunité judiciaire que nous allons voir.
B. Immunités judiciaires
Les immunités judiciaires ne sont pas expressément prévues par des textes de lois mais
simplement consacrées par la pratique. En effet, et comme le disaient les professeurs Merle et
Vitu, « si l’on veut que les cours et tribunaux rendent une justice éclairée, comment ne pas
permettre que tout puisse être dit ou écrit devant eux, si la vérité judiciaire doit par-là s’en trouver
renforcée ? ».
La pratique judiciaire écarte à cet effet la menace d’une action pénale ou civile pour
outrage, injure ou diffamation, ne laissant subsister que les limites indispensables pour éviter des
abus.
Les magistrats et les experts qui sont mis par leurs fonctions à l’abri des poursuites ne
sont pas concernés et protégés mais exclusivement les parties au procès : inculpé ou prévenu,
partie civile, partie civilement responsable, tiers intervenant et leurs défenseurs qui peuvent être
leurs conseils ou mandataires en justice.
Elles bénéficient ainsi de l’immunité judiciaire pour les propos, les interventions ou les
plaidoiries qu’elles tiennent ou font au cours de l’audience, ainsi que pour tous les documents,
notes, mémoires ou conclusions qu’elles soumettent à l’appréciation des juges.
Il est évident que si tous les intervenants dans la fonction judiciaire couverte par cette
immunité « judiciaire » dépassent les limites d’une défense raisonnable, l’immunité disparaît
étant entendu que tout dépassement ne servira pas l’intérêt de la fonction mais des intérêts
propres. Il n’est pas concevable qu’un plaideur ou son conseil use de la liberté de la défense pour
diffamer à son aise son adversaire ou les tiers129.
128.
Bienvenu WANE BAMEME, Cours de Droit Pénal Général, Kinshasa, 2014.
129.
MERLE (Roger), op.cit., p.666
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L’immunité ne peut pas non plus jouer à l’égard des écrits et discours outrageants,
diffamatoires ou injurieux même se rapportant à la cause débattue lorsque l’abus paraît manifeste
et que les formes d’une défense raisonnable ont été outrepassées.
Dans les deux cas, les auteurs peuvent être menacés soit de la suppression de ces
discours ou écrits, soit de la poursuite pénale pour délits d’audience, soit des sanctions
disciplinaires à l’égard des avocats ou défenseurs judiciaires telles que la suspension, la
réprimande, l’avertissement, l’interdiction ou la radiation130.
Le problème se pose en ces termes : est-ce que l’on peut parler de la responsabilité
pénale des personnes morales ? Lorsque les dirigeants d’une société qui sont des personnes
physiques ont commis une infraction au nom et pour le compte de la société, ces organes ou ces
dirigeants (personnes physiques) doivent-ils engager leur propre responsabilité ou faut-il
pénalement sanctionner la personne morale ou encore qu’il faut sanctionner les dirigeants et la
personne morale en même temps ? Bref, la personne morale peut-elle délinquer ? Peut-on le
sanctionner ?
Paragraphe 1. Thèse de rejet de la responsabilité pénale des personnes
morales
Cette thèse de rejet a été défendue pendant tout le 19e siècle. Pendant cette période de
l’évolution du droit pénal, le principe qui était consacré en cette matière de responsabilité pénale
des personnes morales était : « Societas delinquere non potest ». La société ne peut pas délinquer.
Cette thèse a été construise sur base de l’interprétation rigoureuse du principe de la légalité. Les
auteurs qui la développent avancent quatre arguments :
1. La personne morale ne peut pas délinquer parce qu’elle est une fiction dénuée de toute
volonté personnelle. Or, la volonté personnelle est une condition de la responsabilité
pénale. Celui qui la manque ne peut être imputé131 ;
2. La personne morale n’acquiert la personnalité juridique que pour réaliser un objet social
déterminé. Lequel objet ne peut naturellement pas consister en la commission des
infractions. C’est pour cette raison que l’on parle de la spécialité de la personne morale ;
3. Il y a incompatibilité entre la sanction pénale et la nature spécifique de la personne morale.
En effet, l’idée d’une peine ne correspond qu’à la nature d’une personne physique.
Comment concevoir par exemple la peine de servitude pénale d’une personne morale ? Et
la peine de mort ?
4. Lorsqu’on sanctionne pénalement une personne morale, on en arrive à commettre des
injustices à l’égard de certains individus qui n’ont eu aucune part à la réalisation de
l’infraction.
130.
Articles 23 et 29 de l’ordonnance-loi n°68-247 du 10 juillet 1968 portant organisation du barreau (M.C., p. 1334).
131
. MERLE (Roger) et VITU (André), Traité de droit criminel, Cujas, Paris, 1967, pp.489 et ss.
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Cette thèse est née vers la fin du 19e siècle et début 20ème siècle. Elle est basée sur un
constat : le développement accéléré des affaires commerciales et la multiplication des textes
régissant le monde des affaires (les textes sur le prix, sur la consommation, sur la protection de
l’environnement, sur les relations du travail, …).
2. Même si l’être moral n’a pas été créé pour commettre des infractions, il peut néanmoins
commettre des infractions dans la réalisation de son objet spécial. Une entreprise créée pour
fabriquer la bière peut commettre une infraction contre l’environnement social.
3. La loi pénale prévoit aussi des peines qui sont compatibles avec des êtres moraux. Le cas de
la peine d’amende, de confiscation, de dissolution d’une entreprise (équivalent de la peine de
mort), d’interdiction d’émettre les chèques. Les autres membres sont protégés par le code du
travail.
4. Le quatrième argument est tiré de la pratique en ce que lorsque pour une infraction commise
dans le cadre professionnel, un chef d’entreprise est pénalement sanctionné, en l’occurrence,
lorsque le patron est condamné à payer une amende pour une infraction commise dans
l’exercice de ses fonctions, assez souvent, en République Démocratique du Congo, la
pratique est que c’est la personne morale qui paie l’amende.
Dans les pays qui ne consacrent pas le principe de la responsabilité pénale des personnes
morales, c’est la personne physique par laquelle la personne morale a agi, qui est pénalement
responsable de l’infraction commise. Dans les pays anglo-saxons, la responsabilité pénale des
personnes morales est largement admise. C’est le cas de l’Angleterre, du Canada et des USA.
Dans les pays européens, c’est en droit pénal des affaires qu’on a vu les premiers textes
qui consacrent la responsabilité pénale des groupements. Depuis plusieurs années, se dessine une
évolution favorable à la responsabilité pénale des personnes morales.
En droit congolais, il est vaguement affirmé que la personne morale ne peut engager sa
responsabilité pénale. On estime donc que la personne morale ne peut pas commettre une
infraction132 et ne peut par conséquent subir la sanction pénale. S'il y a des infractions qui sont
commises par les représentants des personnes morales, seuls leurs dirigeants, personnes
physiques, pourront pénalement répondre. C'est ainsi par exemple en matière de banqueroute
prévue aux articles 226 à 246 de l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures
Collectives d’Apurement du Passif133, actuellement en vigueur en RDC. L'on considère que ce
sont les administrateurs, directeurs ou gérants qui commettent les faits délictueux et qui doivent
en répondre.
Une affirmation de la responsabilité pénale des êtres moraux au cas par cas.
Néanmoins, sans affirmer la responsabilité pénale des personnes morales dans un système de
généralité, l'on constate que certaines lois particulières prévoient la possibilité d'imputer un fait à
une personne morale. C'est que dans certaines normes, la responsabilité pénale des personnes
morales est affirmée quelque peu sous le système de spécialité, et pour d'autres il est précisé
aussitôt lesquels des organes devront subir la peine que prévoit la loi134.
L’illustration est celle de la loi n°04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le
blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, laquelle organise des sanctions pénales
applicables aux êtres moraux.
Ce texte prévoit que : « Les personnes morales autres que l’Etat, pour le compte ou au
bénéfice desquelles une infraction subséquente a été commise par l’un de leurs organes ou
représentants, seront punies d’une amende d’un taux égal au quintuple des amendes spécifiées
pour les personnes physiques, sans préjudice de la condamnation de ces dernières comme co-
auteurs ou complices de l’infraction135.
132
. Ce qui s'exprime bien en latin par le brocard : societas delinquere non potest.
133
. La banqueroute qui se trouve organisée aux articles 226 à 246 de l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures
Collectives d’Apurement du Passif, adopté le 10 avril 1998, paru au Journal Officiel OHADA n°7 du 1 er juillet 1998 et entré en
vigueur en RDC depuis le 12 septembre 2012.
134
. Donnons à titre d'exemple quelques textes ci-après :
L’Ordonnance-loi n°68/71 du 1er mai 1968, portant réquisition des médecins congolais punit toute personne qui aura engagé un
médecin requis ou l’autre maintenu dans son emploi (article 8, alinéa 1 er). Mais, l’alinéa 2 du même article dispose aussitôt que si
le coupable est une personne morale, les peines seront appliquées aux personnes chargées de la direction ou de l’administration de
l’établissement.
En matière fiscale, les articles 147 et 148 de l'ordonnance-loi n°69/009 du 10 février 1969 relative aux contributions cédulaires sur
les revenus telle que modifiée par le décret-loi 098 du 3 juillet 2000 portant réforme des pénalités fiscales, stipule qu’une
personne morale peut subir les sanctions pécuniaires.
La loi n°04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme prévoit les
sanctions applicables aux personnes physiques et aux personnes morales.
135
. Article 36 de la loi n°04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du
terrorisme.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 175 | P a g e
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136
. Article 42 de la loi n°04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du
terrorisme.
137
. Article 87 de l’avant-projet du Code pénal congolais du 19 mai 2009.
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Affirmation d’une double culpabilité pour un fait. Il est par ailleurs proposé une
double culpabilité. Ce qui veut dire que la responsabilité retenue contre une personne morale
n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits 140. Cependant,
un devoir particulier dont la violation fonde ou aggrave la répression et qui incombe uniquement
à la personne morale, à la société ou à l’entreprise individuelle est imputé à une personne
physique lorsque celle-ci agit : en qualité d’organe d’une personne morale ou de membre d’un tel
organe ; en qualité d’associé ; en qualité de collaborateur d’une personne morale, d’une société
ou d’une entreprise individuelle disposant d’un pouvoir de décision indépendant dans le secteur
d’activité dont il est chargé ; en qualité de dirigeant effectif qui n’est ni un organe ou un membre
d’un organe, ni un associé ou un collaborateur.
En droit pénal, il est possible de retenir l’implication de plus d’une personne dans la
commission d’une infraction ; ce qui permettra de retenir leur responsabilité pénale.
La participation criminelle est, prévue dans le droit congolais par les articles 21 à 23 du
code pénal.
138
. On peut citer par exemple des législations pénales de la Belgique, l’Angleterre, les Pays-Bas où le législateur pose en effet le
principe de la responsabilité pénale des personnes morales sans pour autant indiquer les infractions auxquelles il s’applique et
même sans fournir au juge de critère. Mais, ce système est en réalité ouvert et englobe toutes les infractions, à deux exceptions
près, à savoir : lorsque la nature des choses c’est-à-dire le type d’infraction l’impose, et lorsque la loi prévoit une peine
inapplicable à une personne morale (emprisonnement).
139
. Article 90 de l’avant-projet du Code pénal congolais du 19 mai 2009.
140
. Article 88 de l’avant-projet du Code pénal congolais du 19 mai 2009.
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Quoi qu'il en soit, le principe reste clairement énoncé : la responsabilité pénale est
personnelle. Ce principe exige la preuve, lorsque l'infraction a été commise en groupe, que tout
individu poursuivi a personnellement et effectivement participé aux faits incriminés et il interdit
de poursuivre les proches ou les héritiers d'un délinquant décédé. C’est ainsi qu’en procédure
pénale, le décès d’une personne mise en cause dans une affaire constitue une cause d'extinction
de l'action publique.
Cette forme de responsabilité existe en droit civil. On sait en effet que les parents sont
responsables des dommages commis par leur enfant mineur et que les commettants (employeurs)
le sont des dommages causés par leurs préposés (salariés).
Mais rien de tel n’est admis en droit pénal. Si c'est l’enfant qui commet une infraction,
les parents ne seront pas condamnés à une peine, ni à sa place ni avec lui. Sauf si l’organe
d’accusation parvient à démontrer qu’ils ont concouru à la réalisation de l’infraction en qualité de
participants criminels.
Dans ce cas, toutes les conditions de la participation criminelle devront être remplies.
141 e
. STEFANI Gérard, LEVASSEUR Georges et BOULOC Bernard, Droit pénal général, 11 éd., Dalloz, Paris, 1980
e
et 13 éd., 1987.
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L’abstention peut faire l’objet d’une participation particulière et être punie comme
infraction sui generis. C’est les de l’article 66 ter qui incrimine la non-assistance à personne en
péril.
Pour être punissable, l’acte de participation doit être consommé. Si l’on peut être
poursuivi comme complice d’une infraction tentée par un tiers, on ne peut pas l’être pour avoir
tenté d’être complice. S’il y a une complicité de tentative, il n’y a pas de tentative de complicité
faute de fait principal punissable.
Pour que l’acte soit constitutif de participation, il doit être antérieur ou concomitant à la
commission de l’infraction et non postérieur.
Lorsqu’il accomplit son acte, le participant ou le complice doit être animé d’une
intention criminelle. Autrement dit, il doit savoir qu’en accomplissant son acte, il participe à la
réalisation d’une telle infraction et il pose cet acte sciemment, librement pour réaliser cette
infraction. L’élément moral réside précisément dans le concours des volontés de l’auteur
principal et de l’auteur participant.
L’exigence de l’élément moral résulte même des termes légaux : pour le commettre,
sachant qu’ils devaient y servir, avec connaissance, … La connaissance où il apporte son
concours, son aide ou son assistance. Elles doivent être concomitantes à l’acte de participation.
Nul ne peut engager sa responsabilité pénale si l'on ne parvient à prouver qu'il avait
effectivement la qualité d'autorité143. Il en est ainsi de l'autorité de fait comme de celle de droit,
mais aussi de celle militaire ou civile144. C'est ainsi que presque tous les textes qui l'organisent
font allusion aussi bien au commandant militaire qu'au supérieur hiérarchique qui peut être un
homme politique ou un simple civil.
142
. LAMY Emile, Cours de droit pénal spécial, UNAZA, 1971-1972, p.353.
143
. TPIY, affaire n° IT-95-14/1-T, le procureur c/Zlatko Aleksovski dont jugement rendu le 25 juin 1999. Il s’agit des faits
commis à partir du 1ier janvier jusqu’au 31 mai 1993, dans la région de la vallée de la Lašva, en Bosnie-Herzégovine, où étaient
détenus des prisonniers bosniaques musulmans, sur lesquels étaient exercées beaucoup d'exactions. L'accusé et les autres geôliers
affirment avoir donné l'accord uniquement sur l'accueil de ces détenus mais les exactions qui s'en sont suivies ont permis de
retenir sa responsabilité pénale comme supérieur hiérarchique. Ayant constaté que Zlatko Aleksovski avait parfaitement
connaissance des traumatismes infligés aux détenus, il a été condamné.
144
. TPIR, affaire n° ICTR-95-1, le procureur c/Clément Kayishema et Obed Ruzindana, Jugement du 21 mai 1999 ; Voir aussi
l’affaire n° ICTR-96-13-T-95-1, le procureur c/ Musema, Jugement du 27 janvier 2000.
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La responsabilité pénale du supérieur hiérarchique peut être causée directement par une
action ou indirectement par une inaction du supérieur.
La connaissance des faits par l’accusé. Ensuite, l'on devra rapporter la preuve
que le chef hiérarchique savait ou avait des raisons de savoir que le crime se préparait ou se
commettait. De toute façon, compte tenu de la situation qu'il occupe au moment des faits, on
estime qu'il ne peut pas ne pas savoir. Le devoir de son statut consiste aussi à cette connaissance.
Ce qui démontre à suffisance qu'il avait autorité ou pouvoir de contrôle sur les autres
personnes. L'ignorance des faits n'est pas une excuse dans la mesure où sa position d'autorité
détermine en contrepartie une obligation de connaissance. Dans le jugement de Tokyo, on lit : If
such a person had, or should, but for negligence or spineless, have had such knowledge he is not
excused for inaction for his office required or permitted him to take any action to prevent such
crimes145.
La loi détermine limitativement les actes, les modes par lesquels la coactivité ou la
corréité se réalise. Ils sont énumérés à l’article 21 C.P. : l’exécution matérielle et la coopération
directe ; l’aide indispensable ; la provocation privée et publique.
Ce mode renferme deux aspects : D’abord, l’exécution matérielle qui consiste pour le
participant à poser les actes qui constituent l’infraction ou une partie de sa réalisation. L’agent
principal administre les coups, le participant vient en administrer d’autres.
145
. Procès des grands criminels de guerre, p. 30
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B. L’aide indispensable
Sont également considérés comme coauteurs, toutes les personnes qui prêtent à l’auteur
principal de l’infraction une aide telle sans elle (aide) ou sans leur assistance, l’infraction ne
pouvait pas se réaliser. Si le crime pourrait être commis sans leur assistance, peut –être avec un
peu de difficultés, mais cela importe peu, ceux qui auront concouru à l’infraction seront des
complices. Est considéré comme coauteur pour aide indispensable le délinquant qui attend
l’auteur principal devant l’entrée d’une parcelle se trouvant dans une voiture, moteur en marche
attendant que l’auteur principal après avoir commis une infraction se jette dans la voiture et qu’ils
prennent la fuite.
La corréité par provocation ne peut être sanctionnée pénalement que si elle a été suivie
d’effets, c’est-à-dire, si l’agent provoqué a, soit consommé l’infraction, soit au moins tenté celle-
ci.
146
. LAMY (Emile), op. cit., p. 364.
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Lorsque l’ordre est précis, mais l’agent commet une infraction toute différente, il est
évident qu’il ne saurait être admissible de déclarer punissable le provocateur. Car, le concours
des volontés fait défaut dans le délit auquel l’auteur intellectuel n’a pas pu songer.
b. Le désistement du provocateur
Le provocateur, après avoir incité au crime, peut changer d’avis. Pour que ce
changement d’avis soit considéré comme ayant rompu la solidarité entre lui et l’auteur matériel, il
faut qu’il ait été révélé à ce dernier de manière expresse et à temps. L’agent qui, ayant connu ce
désistement, poursuit, néanmoins, la réalisation de l’infraction, agit exclusivement pour son
propre compte.
Ces moyens doivent avoir déterminé l’auteur matériel à agir pour être retenus.
Un individu qui incite autrui à commettre l’infraction en lui faisant des dons, promesses
ou offres agit par provocation privée, même s’il ne tient pas à sa parole, c’est-à-dire même s’il ne
réalise pas sa promesse. L’essentiel est que ce soient ces promesses qui aient déterminé l’agent à
commettre l’infraction.
Ce type de provocation est qualifié en droit pénal de mandat criminel. Mais, les deux
individus agissent d’égal à égal.
Celui qui, par menace, détermine autrui à commettre une infraction agit par provocation
privée. Lorsqu’un amant incite sa maîtresse à commettre l’avortement sous menace de
l’abandonner.
Il y a abus d’autorité, lorsqu’un agent exerçant une certaine puissance sur un individu
incite ce dernier à commettre une infraction. Cette autorité peut être légale ou des faits (exemple :
les instituteurs sur les élèves).
Par ces termes, il faut entendre les intrigues, les montages, les cabales, les tromperies,
les ruses qui sont réalisées par le provocateur pour déterminer l’agent matériel à commettre
l’infraction. Autrement dit, par des histoires montées de toute pièce, le provocateur arrive à
exciter l’agent et à le déterminer à commettre l’infraction. Ce sont donc les manipulations.
b. La provocation publique
Le lieu peut devenir public par destination, c’est-à-dire que le public y est admis
temporairement, à certaines époques, certains jours et certaines heures. Dans ce cas, même un
lieu privé peut devenir public si le public y est admis.
Par instruction, il faut entendre les indications précises, des renseignements précis
donnés à l’auteur matériel dans le but de lui faciliter la tâche de commettre telle infraction
déterminée. Il ne s’agit pas des simples informations. L’agent qui donne ces instructions sait qu’il
les donne dans le but de faciliter la commission de l’infraction.
Sera considéré comme complice par fourniture d’instructions, un individu qui donne les
renseignements précis sur le plan d’une maison choisie comme champ de vol, sur les voies
d’accès facile de cette maison, voies de sorties, heures d’absence des occupants afin de permettre
à l’auteur matériel de volet avec aisance.
Son également considérés comme complices, les individus qui auront fourni à l’auteur
matériel les instruments ou tout autre moyen ayant servi à la commission de l’infraction en
sachant très bien que ce moyen allait servir à l’accomplissement d’une infraction.
Le législateur énumère comme moyens : armes, instruments ou tout autre moyen. Par
tout autre moyen, le législateur veut signifier que l’énumération faite n’est pas exhaustive. Celui
qui fournit à un agent une fausse clé pour commettre un vol est complice de cette infraction.
Cette disposition considère comme complices, les personnes qui, avec connaissance ont
aidé ou assisté l’auteur principal dans les faits qui ont préparé, facilité ou consommé l’infraction.
Il s’agit ici d’une aide accessoire qui est utile mais non indispensable.
Il importe de souligner que le législateur n’a pas fixé des critères qui distinguent l’aide
utile non indispensable et l’aide nécessaire et indispensable (de la coactivité). Cela est laissé à
l’appréciation souveraine du juge. Toutefois, cette appréciation a une incidence sur la sanction à
infliger au délinquant.
La loi pénale considère comme complices, les personnes qui connaissant la conduite
criminelle des malfaiteurs exerçant le brigandage ou des violences contre la sûreté de l’Etat, la
paix publique, les personnes ou les biens, leur auront fourni habituellement logement, lieu de
réunion ou de retraite.
La spécificité de ce mode réside dans le fait que ce mode ne concerne que certaines
formes de criminalité qui sont précisément décrites dans cet article 22, 4ème tiret.
Les coauteurs sont des auteurs. Il est donc justice qu’ils encourent les mêmes peines.
Quant aux complices, ils sont passibles d’une peine qui ne peut excéder la moitié de la peine
prévue pour l’auteur qui a exécuté l’infraction.
S’agissant des complices, lorsque la peine prévue pour les auteurs est la peine de mort
ou la servitude pénale à perpétuité, ils encourent la servitude pénale de 10 à 20 ans (art. 23 al. 4
C.P.). Les prévisions légales n’excluent pas qu’en fait le complice puisse être condamné à une
peine plus rigoureuse que l’auteur principal, compte tenu de sa culpabilité propre et des
circonstances qui lui sont personnelles147.
- le complot est une infraction plurale, et ce caractère voulu par la loi écarte
l’application des règles de participation prévues à l’article 21 C.P.148.
147
. STEFANI (Gérard) et LEVASSEUR (Georges), op. cit., n°272 et s..
148
. C.S.J., 11 février 1972, bull., 1973, 18 ; R.J.Z., 129.
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Paragraphe 1. Définition
Les mots « plusieurs infractions, utilisés dans cette définition sont susceptibles de
plusieurs interprétations :
Lorsqu’on parle du concours matériel ou réel, on sous-entend les faits spéciaux. C’est
ainsi que le juge additionnera toutes les peines de chaque infraction.
Celui-ci se rencontre lorsqu’un individu par un seul acte se rend coupable de plusieurs
infractions. C’est ainsi qu’en roulant très vite, et de mauvais côté de la route, l’individu qui
parvient à tamponner un piéton qui mieux est responsable et auteur de 3 infractions réalisées par
un fait : excès de vitesse ; violation du code de la route et homicide involontaire.
Le concours idéal nécessite qu’il y ait d’abord un acte unique. Il s’agit ici d’un seul acte
externe ce qui n’implique pas que cet acte soit subi. Il faut une activité unique. C’est ainsi que
plusieurs actes externes devront être réunis par une seule activité criminelle. Ce qui fait penser à
un fait pénal unique.
Si un délinquant commet plusieurs infractions constituées par des faits pénaux distincts
sans avoir été jugé définitivement pour un seul fait pénal, il y a alors concours des faits pénaux ou
concours réel, matériel de l’infraction. On parle de concours idéal, lorsqu’un fait pénal unique
suffit à réunir les conditions d’incrimination d’infraction.
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En définitive, le juge qui, se retrouve en face d’un cas de concours matériel, devra faire
la sommation des peines de toutes les infractions qui rentrent dans ledit concours. Quant au
concours idéal d’infraction, le juge est tenu d’établir chaque circonstance tant atténuante
qu’aggravante, les causes d’excuse et donc toutes les peines pour enfin ne retenir que la peine la
plus sévère.
Section 7. LA RECIDIVE
Pour ce qui est de la délinquance des mineurs de dix huit ans, le souci du législateur est
de mettre sur pied un système de protection susceptible d’empêcher le jeune coupable de devenir
un véritable criminel, c’est-à-dire un récidiviste.
Il faut dire que cette délinquance des mineurs de dix huit ans n’est pas à confondre avec
la délinquance primaire. Alors que la première sous-entend une (déviance) attitude déviante
d’une catégorie de personnes mineurs de dix huit ans, la seconde suppose l’état criminel d’une
personne, qui peut être à son premier forfait tout en étant jeune ou adulte.
Lorsque l’agent ne cesse de perpétrer de manière habituelle l’infraction et qu’il est pour
cela condamné définitivement, cette répétition sera caractérisée de récidive.
Le code pénal (congolais) ordinaire ignore la récidive. Ce qui est une lacune grave étant
donné qu’on ne saurait difficilement laisser au seul juge le traitement approprié du récidiviste.
A. Analyse de la définition
La définition de la récidive met en exergue quelques éléments qui sont, en effet, des
préalables non moins importants.
Elle doit être pénale et même disciplinaire. C’est ainsi le cas de la mise à la disposition
du gouvernement pour vagabondage, et la mise en garde ou toute autre mesure de sûreté.
C’est que tant que la condamnation n’a pas la force des choses jugées, elle ne peut servir
de base à la récidive. Tant qu’il y a recours, c’est-à-dire une opposition, un appel un pourvoir en
cassation, la condamnation n’est pas encore définitive.
En principe, toute infraction peut constituer ce deuxième terme. Mais, elle doit être
commise après la première condamnation qui a acquis la force de choses jugées.
La récidive est dite perpétuelle lorsque la loi ne tient pas compte de temps qui a séparé la
commission de l’infraction. Elle peut être temporaire si l’antécédent judiciaire n’est valable
comme terme que pendant un temps. Il ne se pose pas de problème de prescription.
Elle peut être spéciale et spécifique lorsque la loi demande une identité ou une similitude
entre les deux termes. On parlera alors dans ce cas de la rechute dans la même infraction
(récidive spéciale).
Par ailleurs, les condamnations prononcées pour infraction militaire ne peuvent pas
constituer le condamné en état de récidive (Art. 23 du code pénal militaire).
Mais, il faut aussi éviter une trop grande sévérité parce que la pénologie ne le permet
pas. La loi prévoit pour cela différentes modalités d’aggravation de la peine. Elle peut être
obligatoire ou facultative selon qu’on veut laisser plus de discrétion au juge pour individualiser la
peine. Si dans certains textes de lois (code) elle est facultative, dans certaines lois spéciales, elle
est obligatoire. La récidive peut être sanctionnée de la servitude pénale ou même à la mise à la
disposition du gouvernement. C’est le cas de la relégation ou de la mise à la disposition du
gouvernement.
La récidive se distingue des circonstances aggravantes. Leur résultat seul semble les
rapprocher.
Il ne résulte pas de cette comparaison que les 2 notions sont inconciliables, car elles
peuvent se combiner facilement. C’est le cas d’un voleur (qui aurait été condamné
précédemment), qui commet une infraction de vol (avec effraction qui constitue une circonstance
aggravante). Il y aura dans ce cas et la récidive et la circonstance aggravante à la fois.
Deuxième chapitre
La culpabilité consiste dans la faute commise par l’agent, la faute entendue dans son
acception large incluant la faute intentionnelle, la faute d’imprudence ou de négligence et qui,
constitue l’élément de l’infraction.
Les causes de non imputabilité sont donc des circonstances qui suppriment la volonté
libre, l’intelligence lucide, la capacité de comprendre et de vouloir, rendant ainsi impossible
l’imputabilité et donc aussi la responsabilité pénale.
L’on reconnaît comme causes de non imputabilité d’abord la minorité qui est une cause
présumée irréfragable de non imputabilité, laquelle est légalement consacrée (voir la loi n°09/001
du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant), ensuite les autres causes non présumées de non
imputabilité qui ne sont pas consacrées par aucune disposition légale écrite mais qui sont
appliquées en droit congolais en qualité de principes généraux du droit.
149
. TSHILENGI-wa-KABAMBA, Cours de Droit Pénal Général, IIième graduat droit, Unikin, 2006/2007.
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Il convient de les analyser en regroupant d’un côté les causes pathologiques et celles
physiologiques de non imputabilité et de l’autre, les causes psychologiques de non imputabilité.
Toutes ces causes ont en commun le fait que l’auteur est privé donc de conscience et de
volonté. Il ne peut pas pour cela être légalement tenu de répondre pénalement de l’acte délictuel
par lui commis.
Il est ici tenu compte tant de l’âge que dans une certaine mesure, du sexe de l’agent pour
ainsi individualiser la responsabilité.
Lorsque les mineurs d’au moins quatorze ans commettent des actes prohibés par la loi, le
juge devra ordonner un traitement spécial pour l’intérêt supérieur de l’enfant. A ce sujet, la loi de
protection de l’enfant (loi n°09/001 du 10 janvier 2009), prévoit les mécanismes judiciaires
applicables lorsqu’une infraction implique une personne âgée de moins de 18 ans.
Si en droit pénal congolais l’âge de l’agent a une certaine incidence, il importe de noter
par ailleurs que seulement le mineur de quatorze ans est ici pris en considération. La vieillesse,
quant à elle, ne constitue pas en soi une excuse en dépit du fait qu’elle affecte par la sénilité les
facultés mentales de certains individus.
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En ce qui concerne le sexe, il n’y a aucune différence qui est faite entre l’homme et la
femme dans la commission de l’infraction et dans l’étendue de la responsabilité pénale. Mais, au
niveau de l’exécution de la peine de mort, la femme se voit accorder un certain avantage. Ce qui
fait qu’une femme enceinte condamnée à la peine de mort ne pourra être exécutée qu’après
délivrance. Car, la peine étant individuelle, il convient de ne l’appliquer qu’à la personne
« auteur » de l’infraction qu’est la mère enceinte. L’enfant devra être protégé jusqu’à son
accouchement même si on s’est rendu compte qu’il naîtra mort.
Elles altèrent les facultés mentales par des troubles psychiques ou physiques et elles ont
des effets variés que l’on peut distinguer en :
- troubles permanents des facultés mentales ; et
- troubles momentanés des facultés mentales.
En ce qui concerne les troubles permanents, le code pénal belge contient une seule cause
que l’on qualifie de « démence ». Depuis la loi du 09 avril 1930, on a retenu l’anormalité.
La démence désigne au sens général et normal du terme toutes les causes de perturbation
intellectuelle qui ne laissent à l’homme une volonté presqu’anormale.
- Le déséquilibre mental :
- La débilité mentale :
La débilité mentale est la pauvreté ou la faiblesse native de facultés mentales mettant les
sujets qui en sont atteints en état d’infériorité sociale. Elle est due à un arrêt ou à une insuffisance
du développement des facultés intellectuelles. Elle (comme l’anormalité) peut être grave lorsque
le sujet devient incapable du contrôle de ses actions.
Ils sont pathologiques et attaquent l’intégrité des facultés mentales. Mais, ils sont
passagers et temporaires. Souvent, ils n’ont pas de formes cliniques. C’est le cas de l’ivresse,
l’intoxication par des stupéfiants, le somnambulisme mais aussi l’hypnose.
Il faut toujours distinguer les troubles permanents des troubles momentanés. Alors que
l’ivresse est temporaire et donc momentané ; la toxicomanie est par contre permanente.
Lorsqu’un somnambule qui se reconnaît tel, ne prend aucune disposition pour éviter de
violer la loi, et retombe dans le même fait infractionnel ; il sera tenu responsable à cause de sa
négligence.
Lorsque l’ivresse est totale, elle exclue la responsabilité. Lorsque par contre, elle a été
voulue, l’agent sera responsable de la négligence. Toute ivresse recherchée constitue un dol et
rend l’auteur responsable. L’homicide commis dans un état d’ivresse totale, ne sera pas considéré
comme assassinat, mais plutôt comme l’homicide involontaire. Ce qui est sanctionné ici, c’est, en
effet, plutôt le résultat dommageable mais pas l’activité criminelle.
Paragraphe 1. La contrainte
L’article 71 du code pénal belge prévoit qu’il n’y a pas d’infraction lorsque l’accusé ou
le prévenu a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister. La contrainte peut être définie
comme une cause psychologique de non imputabilité de portée générale. Elle consiste dans un
événement qui détruit la volonté de l’agent au moment de son acte et se substitue à elle dans la
causalité de l’infraction. C’est que l’individu mû par cet événement a été poussé irrésistiblement
à l’acte interdit par la loi pénale ou a été absolument empêché d’accomplir ce que la loi lui
commandait. Mais, au point de vue de l’applicabilité, la contrainte est une exception légitime à
toutes les lois, car elle comprend la force majeure et le cas fortuit. Elle est un principe présent
dans tous les systèmes juridiques et à toute époque et concerne aussi bien le droit commun que
les infractions prévues par les lois particulières.
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Pour que l’on retienne la contrainte, elle doit être totale, étrangère à l’accusé ou au
prévenu, et antérieure à l’infraction.
Une simple difficulté se conformer à la loi ne suffit pas. Il faut que la contrainte ait
déterminé l’acte et que le libre arbitre de l’auteur ait été supprimé. C’est-à-dire que l’auteur ne
doit avoir eu le choix en aucun moment.
Dans le cas où l’agent a pu avant ou pendant l’action modifier sa conduite et qu’il ne l’a
pas fait, la contrainte cesse d’être une cause de non imputabilité mais peut se muer en
circonstances atténuantes ou même en excuse en cas de provocation.
Elle doit être imposée à l’individu et la loi ne reconnaît pas l’état de contrainte à un
individu lorsqu’il s’est mis lui-même dans une situation de subir cette contrainte pour ainsi
réussir à éviter la condamnation.
Il ne suffit pas que la contrainte soit totale et étrangère à l’accusé pour qu’elle soit
retenue. En effet, la contrainte doit également être soit antérieure, soit encore concomitante à
l’infraction. Ce qui sous-entend qu’aucune contrainte postérieure à l’infraction ne pourra être
admise comme justifiant celle-ci.
1. La contrainte physique
Cette espèce de contrainte est rare et ne présente aucune difficulté au point de vue de sa
détermination. Il y a contrainte physique lorsque l’agent se trouve matériellement forcé
d’accomplir ou matériellement incapable d’arrêter un acte illicite. Ces autres formes de contrainte
sont rencontrées souvent dans les infractions d’omission.
C’est le cas d’un témoin qui ne peut pas remplir son devoir à cause d’une inondation ou
d’une maladie grave.
2. La contrainte morale
Celle-ci présente de nombreuses difficultés et controverses qui existent à son propos. Par
moments, la contrainte morale est confondue au trouble des facultés mentales. Néanmoins, on
peut la définir comme étant celle qui résulte de l’imminence (actuelle) d’un mal mettant une
personne dans l’alternative soit de subir ce mal soit de commettre tel acte illicite qu’on lui
impose.
La doctrine classique limite la contrainte morale à la seule crainte qui a été assez forte
pour pousser l’agent d’une façon irrésistible. Cette crainte peut évidemment être provoquée par
des causes naturelles et pour cela les exemples sont légions où l’on constate que naufrages ou
autres catastrophes poussent les individus à commettre les crimes dont on ne saurait les accuser.
Mais, l’épineux problème est, en effet, plutôt celui de la crainte causée par le fait de
l’homme qui par des actes ou des paroles, parviendrait à menacer un agent et le conduirait
irrésistiblement par la crainte à la commission d’un acte illicite.
a. La passion
Certains auteurs estiment que la passion exerce un tel effet sur la volonté qu’elle cause
une contrainte morale. La doctrine reconnaît par fait, la passion comme étant une cause de non
imputabilité.
Et pour cela, le meurtre causé par l’adultère d’une femme provoquant la colère du mari
ou l’infanticide par la femme enceinte abandonnée, seraient justifiés ou excusés, car les
circonstances dans lesquelles ces infractions sont perpétrées ont occasionné des répercussions
psychologiques telles qu’il y a eu absence de liberté pour la volonté et par conséquent l’élément
moral ou l’intention criminelle de l’infraction ne pourra pas être retenu.
b. La suggestion criminelle
La question que l’on se pose est celle de savoir si l’on peut dire que la volonté forte peut
contraindre moralement la volonté faible pour ainsi pousser l’agent à poser un acte illégal.
En principe une telle suggestion n’entraîne pas cause de non imputabilité par contrainte.
Cependant, on pourra la retenir comme une circonstance aggravante pour le provocateur
et comme circonstance atténuante pour le provoqué. C’est ainsi que les conseils d’une tierce
personne ou l’ordre d’un supérieur ne pourront pas constituer des excuses. Le fait pour un
chauffeur de dépasser la limite de vitesse permise sur l’ordre de son patron ne pourra pas non
plus constituer une excuse.
2°. La suggestion physique :
Elle est aussi appelée HYPNOSE. Il s’agit donc d’une action sur le cerveau ou sur le
système nerveux qui contraint irrésistiblement l’agent et ne constitue une cause de non
imputabilité pour l’hypnotisé qu’à la condition qu’il n’y ait pas été volontairement ou par
négligence.
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A ce niveau, ce n’est plus la volonté mais la connaissance de la loi ou des faits qui est
défectueuse.
En effet, l’ignorance est considérée comme l’absence de toute notion sur un point
donné ; tandis que l’erreur est la présence d’une notion inexacte sur une notion donnée.
L’erreur ou l’ignorance peuvent porter sur la loi pénale. C’est le cas d’un Congolais qui,
une fois arrivée en R.D.C., ne connaît pas les règles de la circulation routière congolaises.
L’erreur ou l’ignorance peuvent également porter sur les circonstances qui rendent l’acte
punissable. C’est dans ce cas soit une erreur, soit une ignorance de fait. C’est ainsi qu’une
personne peut par erreur prendre le manteau de son voisin au vestiaire.
Mais, il faut dire que l’erreur ou l’ignorance peuvent porter successivement sur : les
éléments constitutifs de l’infraction ou sur une circonstance aggravante de l’infraction ; et même
sur une circonstance accessoire de l’infraction.
Lorsqu’on considère le cas du vol de manteau ci-haut évoqué, on se rend ainsi compte
que l’erreur porte sur un élément constitutif de l’infraction, car l’agent n’a pas pris le manteau en
sachant qu’il appartenait à autrui mais parce qu’il pensait que cela lui appartenait.
Dans le meurtre d’un père par son enfant par erreur sur la personne, alors qu’il voulait,
en effet, plutôt tuer une autre personne ; il y a difficulté pour que l’on retienne le parricide qui
constitue la circonstance aggravante du meurtre (meurtre aggravé). Etant donné l’erreur sur la
circonstance aggravante, on ne retiendra que le meurtre ordinaire, sans pour autant retenir le
parricide.
En droit pénal congolais, il n’y a pas de dispositions légales qui traitent de cette
question. Il faut donc pour cela recourir aux principes généraux de droit et traiter ainsi cette
question comme élément moral de l’infraction. L’erreur et l’ignorance ont lieu dans l’esprit qui
est insondable et la preuve de ces états est difficile à faire ou à défaire.
Des difficultés spéciales doivent être résolues lorsque l’erreur ou l’ignorance porte sur le
droit. Car le législateur doit présumer pour le bien même de la société que le droit pénal est
connu.
En effet, s’il y avait erreur de fait, la cause de non imputabilité était reconnue ; s’il y
avait erreur de droit, l’accusé serait condamné, car la présomption de connaître la loi existe. Or,
depuis la deuxième guerre mondiale, un mouvement s’est dessiné et a affaibli cette présomption
de connaissance de la loi et un nouveau critère a été adopté : INVINCIBILITE.
1. L’invincibilité
a. Notions
Lorsque l’erreur ou l’ignorance n’était pas invincible, le fait qu’un accusé aura par sa
faute fait erreur ou ignorance sur un élément de l’infraction, ne pourra pas être accepté comme
une excuse ou une cause de non imputabilité même si elles peuvent valoir une circonstance
atténuante.
Exemple : Le fait pour la personne poursuivie pour bigamie de ne pas s’être renseigné
sur la mort de sa femme et de s’être marié pour la seconde fois suite aux rumeurs, ne pourra pas
constituer une cause de non imputabilité. Il convient de distinguer, cependant, les infractions
intentionnelles de celles non intentionnelles. Dans les infractions intentionnelles où le dol est
exigé, l’erreur et l’ignorance non invincibles peuvent suffire à faire disparaître le dol.
Le fait pour A de voler un manteau sans vérifier et ainsi vaincre cette erreur, suffit à
disparaître l’intention frauduleuse et le dol. Dans les infractions non intentionnelles l’erreur et
l’ignorance constituent précisément la faute. Est constitutif d’une faute, la négligence de
l’infirmière qui administre du poison à un patient en lieu et place du produit pharmaceutique.
Cette mort constitue bel et bien une infraction, car son erreur est une faute sanctionnable.
2. La bonne foi
a. Notions
Le législateur congolais ne définit pas la bonne foi. On peut dire que c’est l’absence de
la mauvaise foi. Etre de bonne foi, c’est agir ou bien dans l’erreur ou bien sans mauvaise
intention.
La bonne foi et le mobile honorable sont souvent invoqués comme causes
psychologiques de non imputabilité. C’est le cas d’une personne qui agissant avec une intention
droite, commet une infraction qu’il n’a pourtant pas voulu. Pour savoir si c’est un dol, il faut
analyser son résultat ?
b. Résultat de la bonne foi
Dans le cas où l’intention délictueuse n’est pas requise comme en matière d’accident de
circulation routière, la bonne foi demeurera sans effet. Le fait pour un médecin qui, après des
examens médicaux se décide de couper la main à un malade qui selon ses analyses était atteint du
cancer ; mais qu’après imputation, on se rend compte que cela n’était pas le cas ; rentre dans la
bonne foi dudit médecin.
Dans le cas où la notion de bonne foi est inconciliable avec l’intention requise, elle
demeure sans effet. Un agent qui détruit la sépulture d’une autre personne ne le fait en tout cas
pas de bonne foi. La dénonciation calomnieuse auprès des autorités croyant que ces faits sont
exacts (auprès des autorités). C’est de bonne foi.
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3. Le mobile honorable
Le mobile a été défini comme la raison personnelle d’agir, laquelle par sa complexité
échappe à l’analyse du droit avec l’individualisation de la peine et l’intérêt du droit pénal
moderne pour l’homme réel.
Quant à savoir, si le mobile honorable peut être valable comme excuse, il convient de
dire que le droit décide pour des considérations de politique criminelle de n’accorder aucun effet
justificatif ou exclusif d’infraction lorsque celle-ci est commise avec un mobile honorable. C’est
ainsi que sera puni, un parent qui frappe un enfant désobéissant même s’il bénéficiera des
circonstances atténuantes.
En ce qui concerne l’Euthanasie, le mobile peut être celui d’écourter la souffrance d’un
patient mais le droit congolais ne l’admet pas, car seul le juge peut condamner quelqu’un à mort
en tenant compte des exigences de la loi.
Il faut dire que la culpabilité suppose la commission d’une faute au sens général, soit
intentionnelle, soit d’imprudence ou de négligence qui constitue l’élément moral de l’infraction.
S’il n’y a pas de faute, il n’y a pas d’infraction parce qu’il n’y a pas de culpabilité, et par
conséquent, il n’y a pas de responsabilité pénale. Or, précisément, le caractère fautif de l’acte
incriminé peut dans certains cas se trouver effacé par l’effet d’une justification spéciale ou
générale de la loi. Ce qui fera que l’acte incriminé devienne licite, conforme au droit, parce que
légitimé par un fait justificatif (ou une cause justificative).
Les faits justificatifs (ou causes justificatives) font ainsi obstacles à l’établissement de la
qualification. On dit qu’ils opèrent in rem et agissent comme des causes objectives
d’irresponsabilité pénale.
La justification par injonction peut résulter soit de l’ordre d’une norme (loi ou
règlement), soit du commandement d’une autorité légitime.
L’ordre d’une norme est d’autant plus un fait justificatif exonératoire de responsabilité
pénale que la non-exécution de ce que l’autorité de législation ordonne est constitutive
d’infraction. Ainsi, l’ordre d’une norme justifie à lui seul ceux qui n’ont d’ordre à recevoir de
quiconque et qui ne doivent obéissance qu’à la norme elle-même.
Lorsqu’on lit les articles 70, 152 et 260 du code pénal belge, on se rend compte qu’il n’y
a pas d’infraction si le fait était ordonné par la loi et commandé par l’autorité.
L’immunité est ici accordée pour le fait lui-même incriminé. Le fait tire sa justification
de l’ordre qui doit être légal. L’article 107 alinéa 2 du code pénal militaire congolais prescrit qu’il
n’y a pas infraction de voies de fait et outrage à subordonné en ces termes : « Toutefois, il n’y a
pas d’infraction si les violences ont été commises à l’effet de rallier des fuyards en présence de
l’ennemi ou de bande armée ou d’arrêter soit les pillages, dévastation ou destruction, soit le
désordre grave ».
En ce qui concerne l’ordre, il faut dire que l’agent ne doit pas prendre une initiative
privée. Il doit s’agir donc d’un ordre reçu au cas contraire, il n’y aura pas de justification.
Par rapport à cet ordre reçu, l’agent devra rester dans les limites de l’injonction. C’est ce
qui fait que l’exécution d’un ordre ne vaudra plus fait justificatif lorsque l’agent a dépassé ce qui
était nécessaire pour satisfaire aux impératifs de l’ordre.
L’ordre dont question ici doit être légal ou normatif. Ainsi, un ordre illégal ne constitue
pas un fait justificatif.
Il convient de relever que cette légalité est en réalité prise dans le sens de la normativité,
ce qui suppose également le règlement. D’où, l’ordre tant légal que réglementaire devra être
respecté. C’est ainsi que le commandant d’unité qui, régulièrement saisi d’une réquisition légale
de l’autorité civile, fait agir les forces de l’ordre qu’il fait intervenir en déployant des moyens
disproportionnés par rapport à la situation de terrain et cela contre l’avis de ses supérieurs
hiérarchiques ne pourra voir son agissement justifié.
L’autorité qui donne un commandement doit être légitime. C’est ainsi que la justification
ne sera pas accordée si l’autorité était usurpée.
C’est ainsi qu’un général ne peut intimer directement l’ordre à un adjudant même s’il est
médecin de formation, de pratiquer la chirurgie (par une opération) sur un patient. L’ordre ne doit
pas être manifestement illégal. Il faut une époque où l’obéissance passive était encouragée chez
les subalternes. Aujourd’hui, l’évolution est dans le sens contraire et il est exigé aux inférieurs
d’apprécier la légalité des ordres qu’ils reçoivent. Et en cas de doute sur la légalité, l’obéissance
n’est pas recommandable. Pour ce qui est de l’armée, alors que le refus d’obéissance constitue
une infraction à titre particulier, le militaire subalterne a donc du mal à apprécier la légalité de
l’ordre reçu.
L’article 93 alinéa 1er du code pénal militaire dispose ce qui suit : « Quiconque, militaire
ou civil, embarqué ou employé par le ministère de la défense, refuse d’obéir aux ordres de son
supérieur ou s’abstient à dessein de les exécuter ou, hors le cas de force majeure, n’exécute pas
l’ordre reçu, est puni de dix ans au maximum de servitude pénale ».
L’agent qui aura exécuté l’ordre reçu se verra protéger, car les formalités accomplies
créent une présomption de légalité dont il profitera sous forme d’impunité pour l’acte illicite qu’il
aurait commis conformément à l’ordre formel reçu. L’ordre de commettre les crimes contre
l’humanité n’exonère aucunement de la responsabilité pénale. Il n’y a aucune justification à ce
sujet. Ceci suppose tant les crimes de guerres, que les crimes contre l’humanité et même le crime
de génocide. C’est ainsi que EICHMAN ne pouvait pas alléguer l’ordre reçu de HITTLER pour
justifier les crimes qu’on lui imputait lorsque ceux-ci ont été prouvés.
Sylvie Cimamonti enseigne qu'un acte infractionnel cesse de l’être lorsqu’il a été
commis dans des circonstances particulières qui font que ce comportement ne porte plus atteinte
à l’ordre public et social. Dans un tel cas, la société n’est pas menacée, l'État n’a pas à
maintenir à l’ordre le texte d’incrimination150.
Ils justifient l’infraction qu’une personne peut commettre en ceci qu’ils suppriment le
caractère infractionnel d’un acte. Ils consacrent l’absence de l’élément injuste de l’infraction et
rendent en conséquence l’acte licite, légitime et conforme au droit. Ils ne supposent pas la
suppression de la volonté de l’agent. En effet, dans la légitime défense, l’agent choisit de riposter
à une attaque pour se défendre ; de même, dans l’état de nécessité, il choisit de commettre une
infraction plutôt que de subir un dommage.
150
. CIMAMONTI Sylvie, Cours de droit pénal général, Université d'Aix-Marseille III, 2008-2009, cité par Bienvenu WANE
BAMEME dans La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits français et congolais. Thèse de
doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, pp. 183 et ss.
151
. Articles 122-5 à 122-6 du code pénal français de 1992.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 204 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
N'est pas pénalement responsable la personne qui, pour interrompre l'exécution d'un
crime ou d'un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu'un homicide
volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens
employés sont proportionnés à la gravité de l'infraction. Est présumé avoir agi en état de
légitime défense celui qui accomplit l'acte : 1° Pour repousser, de nuit, l'entrée par effraction,
violence ou ruse dans un lieu habité ; 2° Pour se défendre contre les auteurs de vols ou de
pillages exécutés avec violence ».
Elle est basée sur le droit naturel qui accorde à chaque individu le droit de conservation
que la société est impuissante dans certaines circonstances à les assurer. Dans les états où elle est
légalement consacrée, la légitime défense se rapporte aussi bien aux atteintes à la personne
humaine qu’aux biens dont dépend sa survie.
Pour qu’il y ait légitime défense, il faut que : le droit de la défense puisse exister dans les
conditions particulières de l’attaque et que celles de la riposte soient également établies.
La légitime défense doit être le seul moyen de repousser l’attaque. Il n’y aurait pas
légitime défense dans le cas où on peut appeler au secours ou arrêter l’agresseur. Mais, est-ce que
la fuite doit être considérée comme cet autre moyen en cas d’une agression qui nécessite la
riposte. Une controverse existe à ce sujet. Il convient brièvement de dire que toute personne a le
droit de ne pas s’incliner et ainsi de résister à l’injustice.
Il importe que la défense soit simultanée. C’est ainsi que lorsqu’un agresseur s’enfuit
toute riposte ne pourrait être justifiée à titre de légitime défense.
Le caractère imminent exigé voudrait que celui qui réagit soit rassuré aussi bien de la
certitude de cette attaque que de son exécution dans un temps proche. Il faut donc que l’attaque et
la réaction soient contemporaines.
Un grand auteur a soutenu à juste titre que la légitime défense est un plat qui se mange
152
chaud . Si l’attaque est déjà passée, il n’y a plus légitime défense, mais vengeance. Et dans ce
cas, l’auteur de ces actes ne pourra invoquer avec succès la légitime défense. Ni même celui qui,
refusant délibérément l’aide de tiers lui offrant de le protéger, a cédé à un sentiment de
vengeance ; on parlerait donc de l’abus de légitime défense.
On ne peut pas se défendre contre un acte d’agression juste, autorisé par la loi. Ce serait
de la rébellion. Si l’attaque est objectivement juste et légale, le droit de légitime défense n’existe
pas et dans ce cas, l’agent sera tenu de le subir. Lorsque l’attaque a été menée par un agent de
l’autorité ayant agi illégalement, la jurisprudence estime qu’il n’y a jamais de légitime défense
contre un acte de l’autorité, même si cet acte est illégal153.
Il est pour cela admis de résister aux actes manifestement illégaux de l’autorité, d’autant
que l’acte posé en exécution d’un ordre manifestement illégal est considéré comme injuste.
L’agresseur ne peut invoquer à son tour le bénéfice de la légitime défense.
Légitime défense sur légitime défense ne vaut : il n’y a pas de légitime défense contre
une légitime défense, puisque celle-ci est un droit. Celui qui, par une agression injuste, place un
autre dans la nécessité de se défendre, ne peut pas lui-même prétendre repousser la force par la
force.
L’attaque demeure injuste quand bien même qu’elle émane d’une personne pénalement
non imputable. En effet, la non-imputabilité n’efface pas le caractère délictueux de l’acte. C’est
ainsi que sera retenu au titre de défense légitime régulière, la riposte à l’attaque injuste dirigée par
une personne âgée de moins de dix-huit ans ou d’une personne dont le discernement a été
complètement aboli ou simplement altéré au moment d’attaque.
152
. Jean Pradel, Droit pénal général, Paris, éditions CUJAS, 18ième édition, 10 juillet 2010, n°330, p. 276
153
. Crim., 5 janvier 1821, S. chron. 538 ; justifier la rébellion « serait subversif de tout ordre public » ; Crim. 9 février 1972, B.C.,
n°54 ; Crim. 28 janvier 1998, Dr. pénal, 1998, comm. 80, obs. M. Véron, pas de légitime défense au profit d’un individu sans
billet et intercepté par deux agents de contrôle, refoulé de manière illégale et qui revient un couteau à la main. Cité par Jean
Pradel, dans Droit pénal général, op.cit., p. 276.
154
. Voir plaidoirie d’Odilon BARROT, défenseur d’Armand CARREL, S., 1832. II.178.
155
. Jean Pradel, Droit pénal général, n°327, p. 276.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 206 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
La légitime défense est fondée lorsque l’agression est dirigée contre sa propre personne
ou contre la personne d’autrui. La légitime défense en faveur d’un tiers est consacrée par l’article
66 bis du code pénal ordinaire qui rend obligatoire la défense d’autrui lorsque cette défense ne
comporte aucun risque pour soi-même ou pour les tiers.
En ce qui concerne la légitime défense contre les biens ou les propriétés. Il s’avère
important de relever la position de la Cour d’Appel d’Elisabethville qui a jugé que se trouvent
justifiés par la légitime défense, les individus qui, pouvant prendre la fuite pour éviter le combat,
ne l’ont pas fait pour ne pas laisser à la merci des assaillants leurs cases, leurs biens et leurs
plantations.
L’acte de la défense doit réunir deux conditions pour être légitime. Une condition de
proportionnalité et une autre de nécessité.
Pour être justifiée, la riposte doit être proportionnée à l’attaque subie ou dont on est
menacé. La défense doit être mesurée, c’est-à-dire proportionnée à l’attaque. C’est ainsi qu’il n’y
aura pas légitime défense lorsqu’on répond à un gifle par un coup de revolver. Il appartient au
juge d’apprécier ce caractère mesuré ou démesuré de la riposte.
La qualification de l’infraction ne sera écartée que dans la mesure où, il est établi que
l’acte du ripostant était proportionnel à celui d’attaquant.
La riposte par le recours à la force doit être le seul moyen de se protéger ou de protéger
autrui.
D. La défense illégitime
Il peut se faire qu’une autre cause de justification soit présente. C’est le cas de
l’agression qui n’est pas assez grave. Ce qui peut avoir occasionné une contrainte irrésistible.
Le défaut de la légitime défense et celui qui aura été attaqué peut alléguer la
provocation. S’il n’y a ni légitime défense ni provocation, l’attaque peut être finalement
considérée comme une circonstance atténuante. C’est ainsi qu’on assimile certains cas dans la
légitime défense. Si toutes les conditions sont réunies, il y aura justification de la légitime défense
peu importe le dessein véritable de l’agresseur.
Le cas de vol et de pillage exécuté avec violence si le fait infractionnel (ou l’acte
délictuel) est commis dans le cadre de la défense contre les auteurs de l’infraction de vol ou de
pillage exécutés avec violence envers les personnes, on retiendra la légitime défense. C’est-à-dire
que le droit de légitime défense sera présumé et cette présomption est irréfragable. On ne pourra
pas la renverser et le juge sera obligé de l’accorder dès que les faits sont établis. Cependant, si la
légitime défense n’est pas établie, le juge retiendra soit la provocation soit les circonstances
atténuantes.
156
PRADEL (Jean), Droit pénal général, n°306, p.335.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 208 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Le législateur congolais n’a pas défini l’état de nécessité. Il revient ainsi à la doctrine et
à la jurisprudence de la définir.
L’état de nécessité apparaît lorsqu’un danger ne peut être écarté ou qu’un bien ou même
un droit ne peut être sauvegardé que par l’accomplissement d’une infraction. C’est donc la
situation dans laquelle se trouve une personne qui ne peut raisonnablement sauver un bien, un
intérêt ou un droit que par la commission d’un acte qui, s’il était détaché des circonstances qui
l’entourent, serait délictueux157.
C’est la situation de crise dans laquelle se trouve une personne qui, pour échapper à un
danger qui la menace, ou pour sauver un tiers ou un bien d’un péril actuel et imminent, n’a
d’autre ressource que de commettre une infraction.
Il faut ajouter que cela doit se faire sans démesure, c’est-à-dire sans disproportion entre
les moyens employés et la gravité de la menace.
L’état de nécessité naît d’un conflit entre différents droits ou valeurs alors que dans la
légitime défense le danger naît d’une agression injuste. L’état de nécessité constitue une cause de
justification pour toutes les infractions ce qui n’est pas le cas en ce qui concerne la légitime
défense qui ne concerne que les crimes de sang. L’état de nécessité est également différent de la
contrainte morale où l’agent n’a pas la liberté de choix alors que dans l’état de nécessité il est
poussé à agir mais en (faisant) opérant un choix entre les droits en conflit. Il lui appartient donc
ici d’opter pour une alternative et de négliger l’autre.
157
FORIERS Paul, De l’état de nécessité en droit pénal, 1951, n°9. Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La
responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits français et congolais. Thèse de doctorat en Droit.
Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, pp. 198-205.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 209 | P a g e
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Ce qui paraît si facile à faire sur le plan théorique ne peut pourtant être le cas dans la
pratique. C’est ainsi que le fait pour une femme qui allaite un enfant de voler du pain pour
manger devra être apprécié par le juge pour chercher à savoir si elle a agi suite à l’irrésistibilité
ou à l’état de nécessité.
Dans une grande controverse, on doit être amené à choisir. L’état de nécessité est un fait
objectif, car l’intérêt de la société exige que le droit ou la valeur supérieure triomphe. S’il y a
égalité entre différends droits en conflit, la société ne peut prendre parti et doit permettre que le
juge apprécie.
L’état de nécessité crée un état subjectif. Les partisans de cette théorie soutiennent que le
conflit entre différends droits crée un tel état d’esprit que la liberté de choix se trouve même
atteinte et que le droit ne peut pas imposer dans ces circonstances inhumaines un choix plutôt
qu’un autre. Cette interprétation fait passer le pouvoir de contrôle du juge au second plan.
Pour que l’on retienne l’état de nécessité, il faut : En premier lieu, la présence d’un droit
ou d’un intérêt à sauvegarder. Il doit être de valeur supérieur ou égale au droit ou à l’intérêt à
sacrifier. S’il y a un danger à accomplir un devoir, on ne peut sacrifier le devoir au simple danger
sous prétexte que la vie l’emporte. C’est le cas d’un militaire qui a le devoir de défendre la patrie
même jusqu’au sacrifice suprême. Il ne peut suite au danger de la mort, se soustraire du devoir
qui pèse ainsi sur lui.
Le droit supérieur à sauvegarder doit être en péril imminent et grave. C’est-à-dire que la
certitude du mal est une condition absolument essentielle de l’existence de l’état de nécessité (on
ne tient pas compte des vagues craintes). Etablir l’impossibilité d’éviter le mal autrement que par
l’infraction.
Il appartient au juge de mieux apprécier. Enfin, l’agent ne doit pas créer par sa faute la
situation qui la met en état de nécessité.
Si cet état est prouvé, il constitue une cause de justification et par conséquent il n’y aura
plus d’infraction.
En revanche, la responsabilité civile ne disparaît pas sous l’effet de cet état de nécessité.
Il est juste équitable que le dommage causé soit réparé et que la victime soit restaurée dans son
droit. C’est ainsi que l’affamé qui vole devrait indemniser sa victime, s’il revient à meilleure
fortune.
Le code pénal congolais ne définit pas ce qu’on entend par consentement de la victime.
Mais, la doctrine et la jurisprudence évoque souvent cette notion. Ceci implique que le problème
ne peut se poser que pour les infractions contre les particuliers parce que l’Etat ou la société ne
saurait consentir à être lésé.
A. L’application en pratique
B. Conditions d’existence
1° Il doit être valable : libre et non contraire à la loi. Si la prévoit une présomption
irréfragable de non consentement, le consentement de la victime ne changera pas le caractère
infractionnel de l’acte posé.
Il convient d’évoquer à ce niveau les cas particuliers des blessures causées lors des
interventions médicales, des coups portés dans la pratique de sport, des coups portés dans le cadre
du duel et des blessures accidentelles causées dans les rapports sexuels.
Dans l’exercice de leur profession, les personnels soignants causent des blessures ou des
lésions corporelles et même la mort aux patients. Mais tout cela reste impuni.
L’impunité est due à plusieurs raisons. En ce qui concerne l’élément moral, il faut dire
que le médecin qui blesse ou cause des lésions et même la mort n’a pas à première vue l’intention
criminelle à moins que soit prouvé le contraire.
Il faut dire en suite que les interventions médicales ont une valeur sociale non
négligeable. Il est aussi question de conflit entre différentes valeurs. C’est ainsi que la guérison
même éventuelle du patient doit l’emporter les blessures ou lésions et même la mort. La
profession médicale est réglementée par la loi. Il y a donc une certaine permission de la loi,
accordée aux médecins dans leur profession. Il leur revient de ne rester que dans le strict
nécessaire sans pour autant extrapoler. C’est pour cela qu’il procède à des chirurgies, greffes
curatives mutilations des personnes en coupant soit la main, soit la jambe pour lui éviter un risque
plus grave.
Sur le plan civil, le médecin n’est lié que par l’obligation de moyen. C’est ainsi qu’il
doit mettre en jeux tous les moyens à sa disposition sans pour autant être tenu par l’obligation de
résultat.
2. La pratique des sports
Lors des rencontres sportives, il arrive que les adversaires se donnent des coups ou se
blessent sans pour autant être sanctionnés.
Il faut dire que la pratique du sport est justifiée tant par la permission d’un texte (loi ou
règlement) que par la valeur sociale du sport. La pratique de sport apporte un bien tant sur le plan
individuel que celui collectif, supérieur au risque que l’on court.
Le texte (loi ou règlement), en réglementant le sport oblige les pratiquants à rester dans
les limites légales. C’est ainsi que les coups portés contre son adversaire lors d’une rencontre de
Boxe ne seront pas sanctionnés si et seulement si les coups sont donnés dans les limites des
prévisions réglementaires légales.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 212 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
158
. L’article 65 du décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal prévoit ce qui suit : Celui qui se sera battu en duel sera puni
d'une servitude pénale d'un mois à trois ans et d'une amende de cinquante à mille francs, ou d'une de ces peines seulement.
159
. L’article 66 du décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal prévoit ce qui suit : Celui qui, dans un duel, aura donné la mort
à son adversaire sera puni d'une servitude pénale de trois mois à cinq ans et d'une amende de mille à deux mille zaïres, ou d'une
de ces peines seulement.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 213 | P a g e
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DEUXIEME PARTIE
LA SANCTION PENALE
En règle générale, le droit de la sanction pénale que nous étudions dans le cadre de ce
cours de droit pénal général, devait constituer une matière à part entière. Puisque la modeste
place lui réservée à ce niveau ne parvient plus à cerner tous ses contours.
- L’exécution des peines est aujourd’hui, dans plusieurs pays, entrée pleinement dans la
sphère du droit grâce à la juridictionnalisation de l’exécution des peines160.
En effet, alors que par le passé, et même aujourd’hui dans certaines législations (le cas
de la RDC), l’exécution des peines était aux mains du parquet et de l’administration
pénitentiaire ; aujourd’hui, elle revient, dans la plupart des législations, dans la sphère
juridictionnelle avec le juge ou la juridiction de l’application des peines (JAP).
Cette sphère du droit est encadrée par de grands principes. Il en est ainsi du principe
d’aménagement de la peine comme les libérations conditionnelles.
Dès lors, l’exécution des peines devient une branche à part du droit pénal161.
160
. Il en est ainsi de la loi française du 15 juin 2000, complétée par la loi du 9 mars 2004
161
. Il y a de plus en plus d’ouvrages s’y rapportant :
- HERZOG-EVANS (Martine), Droit de l'exécution des peines 2012/2013, 4e éd. Dalloz, 14 décembre 2011, 1440
pages.
- BOULOC (Bernard), Droit de l'exécution des peines, 4e éd, Précis broché le 9 février 2011, 550 pages.
- GARCON (Evelyne), Droit de la peine, Editeur : Lexis Nexis, 22 janvier 2015.
- GRIFFON-YARZA (Laurent), Guide de l'exécution des peines en 2015, Editeur : Lexis Nexis, relié le 30 octobre
2014, 418 pages.
- GARCON (Evelyne) et PELTIER (Virginie), Droit de la peine, Litec, 28 octobre 2010, 633 pages.
- FABIENNE (Ghelfi) (sous la direction de), Le droit de l'exécution des peines, l’Harmattan, 2 juillet 2014, 200 pages.
- KOLB (Patrick), Questions à Choix Multiples, Droit pénal : les peines, Gualino éditeur, Paris, 31 octobre 2000, 128
pages.
- PONCELA (Pierrette), Droit de la peine, 2ième édition, PUF, 1 mai 2001, 480 pages.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 215 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Il convient de souligner en effet que toutes les sanctions que l’on prend en matières
répressives ne sont pas forcement des sanctions pénales. Cette distinction pose des difficultés
d’autant plus que ce pouvoir répressif entretient avec le droit pénal des liens étroits. En toutes
hypothèses, la sanction pénale est l’archétype de la sanction répressive. Elle peut donc être
définie comme la mesure coercitive prononcée sur la base d’une infraction par le juge pénal. La
sanction pénale est une réponse à la commission d’une infraction infligée par le juge pénal.
Cette sanction pénale n’est pas toujours assimilée à une peine, il peut s’agir également d’une
mesure de sûreté.
La peine est donc un mal infligé par la société en réponse et en adéquation au mal causé
par le délinquant ayant commis une faute.
Ensuite, la mesure de sûreté est un concept relativement récent inventé par les
positivistes italiens à la fin du XIXième siècle et qui substitue au libre arbitre l’idée de
déterminisme, qui peut être idéologique, biologique voir climatique.
Dès lors qu’il est constaté que l’auteur avéré n’avait pas le choix, la réponse de la société
n’est plus la peine mais la mesure de sûreté. On considère dans ce cas, que ce n’est ni la
commission d’une infraction, ni « la responsabilité qui commandent la réaction sociale mais la
dangerosité ou l’état dangereux de l’individu, aussi connu sous l’appellation de « terribilité ».
Au XIXième siècle, ces mesures de sûreté pouvaient être assez drastiques : par
exemple : l’élimination physique, l’internement à vie des « délinquants d’habitude » (catégorie
considérée comme la plus dangereuse), la castration des délinquants sexuels. On en trouve une
trace à l’article 27 de la loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code Pénal Militaire qui
prévoit la neutralisation de l’individu à travers la période de sûreté incompressible, lorsque la
peine à subir est celle de mort.
Cet article 27 du code pénal militaire est libellé comme suit : « Dans tous les cas
punissables de mort, la juridiction militaire pourra prononcer la peine de servitude pénale à
perpétuité ou une peine de servitude pénale principale, en précisant une durée minimale de
sûreté incompressible, c'est-à-dire la période de temps pendant laquelle le condamné ne peut
prétendre à aucune remise de peine ».
L’histoire de la peine est celle de son adoucissement constant. En effet, au fil du temps,
la sévérité de la peine qui caractérisait le droit pénal s’effrite peu à peu.
Cette affirmation se révèle exacte à travers l’usage de la peine. Aujourd’hui, les peines
corporelles ne font que céder la place aux autres peines moins cruelles et plus humaines ; le cas
des coups de fouets et même du projet d’intégration de l’abolition de la peine de mort en droit
congolais.
Une place importante était accordée à la sanction pénale ; les peines étaient donc
diversifiées. Pendant cette période, la caractéristique du droit pénal en général et de la peine en
particulier était la sévérité. Il y avait la peine de mort, la mutilation, les supplices. On peut citer à
titre d’exemple : le cas en France du châtiment corporel qu’avait subi monsieur Damien pour
avoir tenté d’assassiner Louis XV. Il a été tout simplement écartelé.
C’est aussi le cas de l’adultère qui fut un crime puni du bannissement jusqu'à la mort. Le
Blasphème public, selon la gravité, pouvait être puni du bûché ou de la langue coupée. Il y avait
manifestement une volonté d’intimidation.
Au XVIIIième siècle. Deux auteurs ont marqué cette période, à savoir : Cesare Beccaria
et John Howard. En effet, à travers son Traité des délits et des peines, l’italien Cesare Beccaria
développa l’idée originale qui voit la peine comme une garantie de la loi et non une mise hors la
loi. En ce sens, il dénonce la peine de mort et demande la suppression des châtiments corporels. Il
est même parvenu à proposer le principe de légalité criminelle, proportionné à la gravité de
l’infraction et à l’importance de la célérité de la sanction plutôt que sa sévérité.
Quant à l’anglais John Howard, on constatera que sa pensée penchée à l’étude des
prisons, sera moins diffusée que celle de Beccaria. En 1777, il publia le résultat de ses recherches
en matière pénitentiaire. Il va alors se consacrer à la réforme des prisons en Europe et proposer
d’améliorer l’hygiène, la salubrité et l’alimentation des prisons ainsi que de développer le travail
pénitentiaire.
Il faut noter que les peines retenues à cette époque étaient multiples : la peine de mort, la
guillotine, la peine de galères, la peine privative de liberté, la mutilation, la trace au fer rouge.
C’est seulement au XIXième siècle qu’arriveront les circonstances atténuantes, le mouvement de la
suppression de la peine de mort dans certains pays pour les motifs politiques (en 1848 en
France) ; en Europe, il y a eu : l’amélioration du régime pénitentiaire notamment en posant la
règle de l’encadrement individuel, le développement des peines coloniales (le bagne), la
Relégation (éloignement géographique proposé comme traitement des récidivistes en 1855),
création de la liberté conditionnelle (en 1885).
162
. Lire avec intérêt Bienvenu Wane Bameme, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en droit, Aix-Marseille Université, 2010-2012, pp. 377-780.
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En effet, dans les Etats véritablement démocratiques tout régime d’exécution de la peine
de privation de liberté est tenu de concilier la protection de la société, la sanction du condamné
et les intérêts de la victime avec la nécessité de préparer l’insertion ou la réinsertion de la
personne détenue afin de lui permettre de mener une vie responsable et de prévenir la
commission de nouvelles infractions163. Pour y parvenir, il s’impose d’organiser des structures
susceptibles de réaliser une telle noble et délicate mission. Les juridictions d’application des
sanctions pénales rajouteraient à la matière la garantie du procès équitable au niveau de
l’exécution des peines.
163
. Article 1ier de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 portant loi pénitentiaire française.
164
. Voir Association Internationale de Droit Pénal, Résolutions des congrès de l'Association Internationale de Droit Pénal (1926-
2004), Xième Congrès international de droit Pénal, Rome, 29/09-5/10/1969, Editions Erès, numéro 20, 2009, p. 82
165
. Gilles Mathieu, op.cit., p. 369.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 219 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
En effet, cet organe judiciaire interviendrait non seulement à l'intérieur des lieux de
privation de liberté (milieux ouvert et fermé) mais également en dehors de ces lieux pour les
exécutions des mesures de traitement en liberté notamment le suivi d'un libéré conditionnel,
l'épreuve du bénéficiaire du sursis, le contrôle de la mesure d'éloignement de certains lieux,
l'exécution du stage à la citoyenneté, ...etc.
La peine est donc un mal infligé à titre de punition par le juge à celui qui est reconnu
coupable d’une infraction.
Il convient ainsi de dire que cette notion est inséparable de l’idée de souffrance. La peine
constitue une sanction qui se distingue des autres sanctions. En effet, la notion de la peine (en tant
que sanction pénale) diffère de celle de la mesure administrative de la police qui intervient avant
la commission de l’infraction en vue de la prévenir. Car, l’on reconnaît à la police deux missions.
Alors que la première est administrative (ou d’ordre administratif) et se rattache à la prévention ;
la seconde est, cependant, judiciaire. Celle-ci est relative aux enquêtes et à toutes les
investigations menées par la police.
La peine est également différente de la sanction civile étant donné que celle-ci résulte de
la condamnation aux dommages civils liés aux préjudices causés à autrui.
Dans son existence, la sanction pénale doit remplir diverses fonctions et comporter des
caractères indispensables au rétablissement de l’ordre au sein de la société.
Les sanctions pénales ne sont pas identiques. Guidées principalement par le principe de
la légalité « normativité » criminelle, les sanctions pénales sont diversement classifiées dans leurs
nomenclatures.
L’article cinq du décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal Ordinaire prévoit dans
son livre 1 que : « les peines applicables aux infractions sont :
- la mort ;
- les travaux forcés ;
- la servitude pénale ;
- l’amende ;
- la confiscation spéciale ;
- l’obligation de s’éloigner de certains lieux ou d’une certaine région ;
- la résidence imposée dans un lieu déterminée ;
- la mise à la disposition du gouvernement ».
En ce qui concerne le code pénal militaire (la loi n°024/2002 du 18 novembre 2002),
l’article 26 prévoit ce qui suit : « les peines applicables par les juridictions militaires et les
mesures de sûreté sont :
- la mort par les armes ;
- les travaux forcés ;
- la servitude pénale ;
- l’amende ;
- la confiscation spéciale ;
- la dégradation ;
- la destitution ;
- la privation de grade ou la rétrogradation ;
- l’interdiction temporaire de l’exercice des droits politiques et civiques ».
A. Notion.
La peine de mort doit être entendue comme la mesure de privation de la vie, (de
l’élimination physique) d’un être humain, prévue par une norme, prononcée par une institution
juridictionnelle compétente et exécutée ou à exécuter selon les prévisions du texte qui
l’organise166.
166
WANE BAMEME Bienvenu, Cours de Droit Pénal Général, inédit.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 222 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
B. Domaines d’application.
La peine de mort est prévue par le législateur tant dans le code pénal ordinaire que dans
celui militaire. C’est ainsi que l’on retrouve plusieurs cas, entre autres :
- les articles 44 et 45 du code pénal ordinaire livre 2 qui prévoit le meurtre et
l’assassinat les réprime par la peine de mort ;
- l’article 49 du code pénal ordinaire livre 2 prévoit l’empoisonnement et le punit de
mort ;
- le vol à mains armées prévu par l’article 81 bis est puni de mort (art. 2 de
l’ordonnance-loi n°68/193 du 03 mai 1968, M.C., p.1324) ;
- l’article 182 du code pénal ordinaire livre 2 qui punit de mort tout auteur de
l’infraction de trahison ;
- l’article 185 du code pénal ordinaire livre 2, puni l’espionnage de la peine de mort ;
- l’article 193 du code pénal livre 2 prévoit la peine de mort contre l’auteur de
l’attentat contre la vie ou la personne du chef de l’Etat ;
- l’article 200 du code pénal livre 2, puni de mort l’attentat dont le but était de porter
le massacre, la dévastation ou le pillage.
En ce qui concerne le code pénal militaire, il convient de noter que plusieurs infractions
sont punies de la peine de mort en tout temps. Il existe aussi certaines infractions qui sont punies
de la peine (d’emprisonnement) de servitude pénale en temps de paix alors qu’en temps de
guerre, elles sont punies de mort.
- L’auteur de la mise à mort par représailles est puni de mort comme celui de
l’assassinat (article 171 du C.P.M.).
- L’article 172 du C.P.M. puni de mort l’emploi des prisonniers de guerre à des fins de
protection contre l’ennemi en temps de guerre ou des circonstances exceptionnelles.
La peine de mort est exécutée soit par pendaison, soit par les armes. En effet, le militaire
condamné à mort devra passer par les armes. Tandis que le civil ne passera par les armes que
lorsqu’il commet lui-même ou participe à la perpétration d’une infraction prévue et punie de mort
par le code pénal militaire (Article 28 du C.P.M.).
Quant aux autres préalables, il est admis ce qui suit : on ne peut exécuter une femme
enceinte, jusqu’à la délivrance ; l’exécution se fait en présence de l’organe de la loi, le médecin,
le prêtre… tel que le décidera le ministère public.
Pour éviter des exécutions hâtives, l’OMP compétent est tenu d’interjeter appel chaque
fois qu’il y a une condamnation à mort et de surseoir à l’exécution en attendant qu’il soit statué le
recours en grâce qu’il doit introduire.
Il peut se faire que la peine de mort ne puisse pas être appliquée à la suite de la remise
dont bénéficiera la personne condamnée. C’est le cas de l’article 27 du code pénal militaire du
18/11/2002 qui dispose ce qui suit : « Dans tous les cas punissables de mort, la juridiction
militaire pourra prononcer la peine de servitude pénale à perpétuité ou une peine de servitude
pénale principale, en précisant une durée minimale de sûreté incompressible, c’est-à-dire la
période de temps pendant laquelle le condamné ne peut prétendre à aucune remise ».
L’attitude du législateur congolais dans le code pénal militaire constitue une avancée
significative vers la tendance abolitionniste de la peine de mort.
Par ailleurs, des considérations de la défense sociale suggèrent que la peine à retenir ne
soit pas d’une durée telle que le condamné perde tout espoir de rejoindre la société des hommes
libres du moment que son comportement a cessé d’être un danger pour cette société. Mais, on
estime que la libération conditionnelle, l’amnistie mais aussi la grâce pourront permettre
d’atteindre un tel objectif.
L’article 61 de cette même constitution dispose ce qui suit : « En aucun cas, et même
lorsque l’état de siège ou l’état d’urgence aura été proclamé conformément aux articles 85 et 86
de la présente Constitution, il ne peut être dérogé aux droits et principes fondamentaux énumérés
ci-après : le droit à la vie ; l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants ; l’interdiction de l’esclavage et de la servitude ; le principe de la
légalité des infractions et des peines ; les droits de la défense et le droit de recours ;
l’interdiction de l’emprisonnement pour dettes ; la liberté de pensée, de conscience et de
religion ».
Sans abolir la peine de mort, ces dispositions consacrent dans la constitution la nécessité
de la protection de la personne humaine : victime et auteur d’infraction, en évitant que l’une ou
l’autre ne soit privée arbitrairement de sa vie. Les organes compétents doivent être mis à
condition d’assurer cette protection tant avant l’infraction et même les poursuites, qu’après la
condamnation d’une personne.
En dehors des prévisions légales de cette peine de mort (telles que présentées ci-dessus),
il y a lieu de relever par ailleurs que la constitution mais aussi les enseignements de droit pénal
nous organisent plusieurs cas dans lesquels peut être dérogé le droit à la vie en RDC,
contrairement à l’article 61 de la Constitution qui semble exclure tous les cas.
Il en est ainsi de :
- L’hypothèse de la légitime défense : lorsque l’attaque injuste était portée contre la vie
humaine et qu’il y a eu une riposte concomitante, proportionnelle, et nécessaire.
- L’article 86 de la constitution organise le droit de la guerre en ces termes : « Le Président de
la République déclare la guerre par ordonnance délibérée en Conseil des ministres après
avis du Conseil supérieur de la défense et autorisation de l’Assemblée nationale et du Sénat,
conformément à l’article 143 de la présente Constitution ». le contenu à donner à la
déclaration de la guerre faite par le président de la République pour les forces armées est
celui de combattre l’ennemi, et au besoin, lui donner la mort.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 225 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Il s’impose de retenir que de telles formulations mais surtout des affirmations allant dans
le sens d’apporter trop de précisions dans un texte fondamental, tuent la précision et entraîne par
voie de conséquence l’imprécision mais aussi la confusion dans l’interprétation de ces
dispositions constitutionnelles.
En plus de ces considérations techniques dans l’interprétation de nos textes de loi, il est
important de savoir que d’un côté, la RDC n’a jusqu’à présent, pas encore ratifié le Deuxième
protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
visant à abolir la peine de mort, adopté et proclamé par l'Assemblée générale dans sa résolution
44/128 du 15 décembre 1989 ; et que de l’autre côté, la Cour Suprême de Justice toutes sections
réunies, siégeant en matière de constitutionnalité a rendu un arrêt 167 important sur la question en
affirmant clairement que l’article 61 point 1 de la constitution n’abolit pas la peine de mort en
République démocratique du Congo.
En l’espèce, dans une affaire inscrite sous R. CONST. 128/TSR, dans laquelle ont été
soulevées les exceptions d’inconstitutionnalité en audience publique du 26 mai 2010 par les
prévenus sieurs Martin MUKONKOLE, député national et Norbert MUTEBA dans la cause qui
les opposait au Ministère public sous le RP. 003/CR devant la même Cour suprême de justice,
section judiciaire, siégeant toutes chambres réunies, et qui a fini par sursoir à statuer au fond en
attendant que la Cour se prononce sur cet incident dans sa section de constitutionnalité.
En effet, l’exception des prévenus suggérait que les articles 157 et 158 du Code pénal
livre II qui servaient notamment de base à l’action du ministère public et qui punissent
l’association de malfaiteurs, dont ils sont entre autres poursuivis, de la seule peine de mort, sont
inconstitutionnels puisque celle-ci a été abolie par l’article 61 point 1 de la Constitution ».
Pour la Cour : « (…), l’exception n’est pas fondée. Car contrairement à ce qui y est
affirmé, le point 1 de l’article 61 de la Constitution n’abroge pas la peine de mort, l’interdiction
de déroger au droit à la vie signifiant simplement qu’en dehors des cas prévus par la loi, le droit
à la vie est protégé en toutes circonstances et qu’il ne peut être mis fin à la vie d’autrui de
manière arbitraire ».
Etant donné que la loi de mise en application n’a pas encore été prise, la peine des
travaux forcés se voit, dans la pratique des cours et tribunaux, remplacée par celle de la servitude
pénale en droit congolais, alors même que le troisième alinéa de l’article 6 bis du code pénal
congolais affirme que l'exécution de la peine de travaux forcés ne peut être assimilée, ni
confondue avec la peine de servitude pénale.
Notons enfin que l’article 16 al 5 de la Constitution de la RDC affirme que « Nul ne peut
être astreint à un travail forcé ou obligatoire ». Ce qu’à ce jour, cette peine semble contraire à la
constitution et mériterait d’’être supprimée du Code. Par ailleurs, la loi de 2009 relative à la
protection de l’enfant crée la sanction de travaux d’intérêt général.
C’est une peine qui consiste à priver quelqu’un de sa liberté de mouvements. Il s’agit
donc d’un enfermement infligé à une personne pour toute la durée de son exécution.
Elle est réglementée par les articles 7, 8 et 9 du code pénal livre I. Le droit pénal
congolais connaît deux sortes de servitude pénale : la servitude pénale à perpétuité et la servitude
pénale à temps.
La servitude pénale à temps peut varier d’un jour à 20 ans et ne peut jamais dépasser ce
seuil même en cas de concours matériel d’infraction.
L’amende est une peine qui consiste à imposer à un délinquant, à titre de châtiment,
l’obligation de payer une certaine somme d’argent au profit du Trésor Public.
Elle peut constituer une peine principale ou accessoire. Elle ne peut être prononcée
qu’en cas de commission d’une infraction par une juridiction répressive.
Elle est prononcée individuellement contre chacun des condamnés à raison d'une même
infraction et ne doit pas être applicable aux infractions d'ordre militaire168. Car en effet, hors mis
l'épineuse question de la bourse militaire, la nature de ces infractions les soustrait du régime
général applicable à toutes les autres infractions. Elles sont donc soumises à un régime spécial lié
à l'exercice de la profession. Il s'agit ici des infractions ne pouvant être commises qu'à l'occasion
de l'exercice de la profession et par des membres du corps, c'est-à-dire dans ce cadre, des
personnes ayant la qualité de militaire ou assimilé.
L’amende peut être également proposée à la personne suspectée d’avoir commis une
infraction par l’autorité judiciaire soit au niveau de l’enquête préliminaire soit au niveau de
l’instruction préparatoire. Dans ce cas elle est dite « amende transactionnelle ».
La question divise puisqu’on considère tantôt qu’elle est une peine, tantôt une simple
mesure écourtant la procédure. En ce qui nous concerne, nous pensons qu’elle n’est pas une peine
mais simple mesure permettant d’écourter la procédure pénale.
168
Réforme du Code pénal congolais, op.cit, p.204
169
Voir article 37 de la loi n°024/2002 du 18 Novembre 2002 portant Code Pénal Militaire.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 228 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
L’article 14 du code pénal ordinaire livre 1 prévoit deux cas auxquels s’applique cette
peine de confiscation spéciale ; à savoir :
- D’un côté, elle s’applique aux choses formant l’objet de l’infraction et à celles qui
ont servi ou qui ont été destinées à la commettre quand la propriété en appartient au
condamné ; et
- de l’autre côté, elle s’applique aux choses qui ont été produites par l’infraction.
Cette peine est donc prononcée pour toute infraction dont l’existence est subordonnée à
l’intention délictueuse. Elle n’est prononcée, pour les autres infractions, que dans les cas
déterminés par le législateur.
Cette sanction revêt un double caractère. En effet tout en étant considérée comme une
véritable peine complémentaire soumise au principe de légalité et de personnalité, elle poursuit
aussi le but de sûreté qui la caractérise à bien des égards. Sur le plan pénologique et de prévention
générale, cette peine joue un rôle important car elle permet d’écarter de la circulation un objet
dangereux pour la sécurité publique neutralisant ainsi le délinquant. Considérée comme une
mesure de sûreté ou de police à caractère réel, on estime généralement qu’elle peut être prise
même en cas de relaxe, d’amnistie ou contre tout détenteur de l’objet criminel170.
Par ailleurs, il convient de préciser que la confiscation générale qui était prévue en vertu
de l’article 2 de la loi n°73-017 du 05 janvier 1973 contre les auteurs de concussion,
détournement et corruption, n’existe plus en droit congolais. Car la loi sus évoquée a été abrogée.
Le législateur congolais prévoit tant dans le code pénal ordinaire que dans le code pénal
militaire, les peines au sens strict et les mesures de sûreté sans pour autant distinguer ces deux
notions ni même laisser une place à part aux mesures de sûreté.
170
Aux termes de l’article 114 du nouveau code de la route, le tribunal peut prononcer la confiscation du véhicule en cas d’usage
d’un véhicule portant de fausses indications.
171
Réforme du Code pénal congolais, op.cit., p. 208
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 229 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Alors que la peine est une sanction infligée à titre de punition, les mesures de sûreté
constituent des mesures individuelles coercitives sans coloration morale imposées à un individu
dangereux pour l’ordre social afin de prévenir les infractions que son état rend probable.
Il faut dire que l’article 5 du C.P.L.II ne parle que des peines alors que l’on y trouve
aussi les mesures de sûreté. Elles sont invoquées à l’article 27 du Code Pénal Militaire.
Les peines peuvent être classifiées soit par catégorie soit encore en tenant compte du mal
infligé à la personne qui l’aura subi.
Lorsqu’on envisage les rapports qui existent entre elles, les peines prévues par la loi
peuvent être catégorisées comme suit : les peines principales, les peines complémentaires et les
peines accessoires.
Ce sont les peines qui sont imposées par le législateur et que le juge ne peut pas se
dispenser de prononcer lorsqu’il déclare le prévenu coupable à moins qu’il ne retienne en sa
faveur une excuse légale absolutoire.
Il s’agit des peines ci-après : la peine de mort, la peine des travaux forcés, la peine de
servitude pénale et la peine d’amende.
Comme l’indique leur appellation, ces peines sont prononcées en sus des peines
principales. Elles s’ajoutent ainsi à ces dernières. Elles peuvent revêtir deux caractères :
obligatoire ou facultatif.
Les peines complémentaires sont obligatoires lorsque la loi impose au juge de les
prononcer. Quoiqu’elles soient obligatoires, si le juge pour une raison ou une autre a oublié ou
omis de prononcer les peines complémentaires, elles ne pourront être appliquées car on exécute
que la peine prononcée par un juge dans un jugement.
Il faut noter, par ailleurs, qu’une même mesure peut être à la fois une peine principale ou
une mesure de sûreté ou même une mesure complémentaire ou accessoire si tel est la volonté du
législateur.
En tenant compte du mal infligé au délinquant condamné, l’on se rend compte qu’il
existe : les peines corporelles, les peines privatives de liberté, les peines restrictives de liberté, les
peines privatives du patrimoine et les peines privatives ou restrictives des droits.
En droit pénal congolais, les peines corporelles sont celles qui atteignent le condamné au
corps. Le législateur n’a pour cela prévu aujourd’hui que la peine de mort.
Ce sont les peines qui frappent le condamné à partir de son patrimoine. Ceci suppose
que l’agent possède de l’argent ou des biens. Il s’agit donc de : la peine d’amende et la peine de
confiscation spéciale.
Le législateur congolais prévoit dans l’arsenal juridique certaines peines qui, soit
réduisent la possibilité et la capacité de pouvoir exercer ses droits, soit alors les anéantissent tout
simplement.
C’est ainsi que l’on retrouve : l’interdiction de droit de vote ou d’élection, l’interdiction
d’accès aux fonctions publiques et para-étatiques, l’expulsion définitive du territoire de la
République et la privation du droit à la condamnation ou à la libération conditionnelle.
On considère que la peine ne doit pas seulement être juste, elle doit être aussi utile c'est-
à-dire tournée vers l’avenir. Elle remplit diverses fonctions fondamentales et doit afficher un
certain nombre de caractère.
Il existe :
- La fonction morale ;
- la fonction de prévention spéciale ;
- la fonction de prévention générale ; ainsi que
- la fonction d’élimination.
Lorsque le délinquant commet une infraction, il contracte une dette envers la société et il
doit la payer. Le crime constitue donc pour cela une faute que l’agent doit expier (réparer le tort
commis par la peine). Cela répond valablement à l’exigence de l’idée selon laquelle les bons
actes doivent être récompensés et les mauvais punis.
La fonction rétributive de la sanction mérite d’être affirmée ici car elle constitue un
rappel des valeurs essentielles de la société auxquelles aucun individu ne peut porter atteinte sans
que des comptes ne lui soient demandés. Cela signifie que les valeurs fondamentales de la société
ne peuvent être mises en cause.
La sanction pénale donne en même temps à toute personne le sentiment de sécurité car
chacun peut ainsi, se rendre compte de l’effectivité de la justice ainsi que de son efficacité dans la
pratique.
La sanction pénale a aussi pour fonction d’empêcher celui à qui elle est appliquée de
recommencer. Elle atteint ce but soit par l’intimidation pure, soit par l’amendement.
1° De l’intimidation : on espère que le délinquant qui a déjà subi une peine, en a pris la
mesure car il connaît bien le désagrément qu’elle comporte. Un tel délinquant a plus intérêt à
respecter la loi qu’à la violer. Il est donc pour cela intimidé par la peine subie.
2° De l’amendement : la peine peut retenir l’ancien délinquant dans la bonne voie en lui
inspirant des sentiments honnêtes vis-à-vis de la société. Et lorsqu’il s’est amendé, il pourra ainsi
être utilement reclassé dans la société.
Cette fonction est donc appelée « intimidation collective ». Pour réaliser cette mission et
atteindre ainsi le but de l’intimidation collective, les Cours et Tribunaux rendent leurs jugements
(ou prononcent leurs jugements) en public.
B. De la Fonction éliminatrice
Elle consiste en ce que par l'exécution de la sanction pénale, le délinquant est mis hors
d’état de nuire. Il est admis que la peine de servitude pénale à perpétuité remplit cette fonction
éliminatrice. Par ailleurs, la peine de mort constitue celle qui remplit par excellence la fonction
éliminatrice car le juge n’a plus besoin de voir le délinquant condamné amendé.
La sanction pénale est régie par quelques principes qui en déterminent les caractères. Il
s’agit de : la légalité, l’égalité, la personnalité et la dignité humaine
Comme c’est le cas pour les infractions, aucune sanction pénale ne peut être créée par
une toute autre source que la norme pénale. Aussi, selon les catégories, les sanctions pénales sont
et doivent être d’application égale.
Il a pour corolaire : la nécessité d’un texte pour une incrimination pénale, la non
rétroactivité de la loi pénale plus sévère, l’exigence d’un texte clair et précis, et enfin
l’interprétation stricte des normes.
La sanction pénale, entant qu’un mal ou une souffrance infligée au délinquant, doit avoir
sa source dans un texte ou une norme. En effet, le juge ne pourra retenir qu’une sanction pénale
prévue par la norme avant que l’infraction fût commise. Le principe de la normativité ou de
textualité des délits est complété en droit pénal par la normativité ou textualité des sanctions
pénales. C’est ainsi qu’il est exprimé comme suit : « Nulla poena sine lege », ce qui signifie :
« pas de peine sans loi ».
B. L’égalité de la peine
Ce principe exclu les privilèges, car on admet que toute personne est égale devant la loi.
Il s’agit d’un principe à valeur constitutionnelle. Pour le juge, il ne saurait être question
d’appliquer aux délinquants des peines différentes non pas en tenant compte de l’étendue de la
responsabilité pénale de chacun par rapport à l’acte commis, mais en se basant plutôt à la
différence des classes sociales auxquelles ils appartiennent, de race, de religion ou tout autre
critère arbitraire de discrimination.
La sanction pénale ne doit frapper que l’auteur même de l’infraction. Mais il faut noter
que dans l’histoire, la responsabilité pénale était collective. On pouvait à cette époque répondre
pénalement de l’acte commis par l’un des membres de famille (ou la personne se trouvant à sa
charge). Quelques temps plus tard, la responsabilité pénale est devenue personnelle. C’est ainsi
que le temps de la vengeance privée a laissé place au temps de la justice privée par des pratiques
comme l’abandon noxal qui consistait en un abandon de l’auteur de l’infraction auprès de la
famille de la victime qui pouvait en faire ce qu’elle voulait (en se rendant justice pour soi-même
sur la personne de l’auteur de l’infraction).
C’est d’ailleurs ce caractère personnel qui fait que le droit pénal se distingue du droit
civil, étant donné que le droit civil admet très largement la responsabilité du fait d’autrui, alors
que le droit pénal reste très attaché au principe de la responsabilité pénale du fait personnel.
Il considère dans cet ouvrage que la loi écrite comprend des dispositions rigides et
que la souplesse du droit doit relever de l'interprétation du juge judiciaire. Il défend, en
précurseur, l'idée d'une « peine adaptée à la nature de celui qu'elle va frapper »172.
Ces idées sont diffusées par l’école juridique de Marc ANCEL qui fut l’élève de
Saleilles. L’individualisation suppose une plus grande liberté du juge dans le choix de la sanction
pénale. Cette liberté, par le biais de ce principe, n’est pas illimitée.
172
. Oeuvres : L'individualisation de la peine. Étude de criminalité sociale, Paris, 1898. De la déclaration de volonté. Contribution
à l'étude de l'acte juridique dans le Code civil allemand, 1901. Bibliographie L'individualisation de la peine. De Saleilles à
aujourd'hui. Réédition de la troisième édition de l'ouvrage de Raymond Saleilles, suivie de : L'individualisation de la peine : cent
ans après Saleilles, Ed. Eres, coll. Criminologie et sciences de l'homme, 2001.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 236 | P a g e
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Disons, comme en droit français (Le législateur du 12 déc. 2005) que « La nature, le
quantum et le régime des peines prononcées sont fixées de manière à concilier la protection
effective de la société, la sanction du condamnée et les intérêts de la victime avec la nécessité de
favoriser l’insertion et la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles
infractions ».
Nul ne peut être tenu en esclavage ni dans une condition analogue. Nul ne peut être
soumis à un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Nul ne peut être astreint à un travail forcé
ou obligatoire ».
Ce sont les exigences de la dignité humaine qui ont milité pour l’abolition des
châtiments corporels tels que les coups de fouet, dans la plupart de législations modernes mais
aussi différents procédés de la peine de mort. Ils sont donc considérés comme avilissants et
constitutifs d’un retour inadmissible à la barbarie ancienne.
En outre, la loi ne doit établir que des sanctions strictement et évidemment nécessaires.
Elle ne doit pas être inutile ni disproportionnée à la gravité portée par l’infraction dans l’ordre
social. C’est ainsi que la mesure de sûreté appliquée devra être levée dès qu’elle n’est plus
nécessaire.
Les sanctions pénales portées par le texte d’incrimination s’appliquent en tenant compte
de chaque cas, selon l’évaluation qu’aura fait le juge.
En effet, le juge devra évaluer la peine à prononcer. Cette évaluation tient ainsi compte
de tout aspect ayant entouré la commission de l’infraction.
Lorsque le juge considère qu’il y a des raisons évidentes pouvant avaliser l’atténuation
de la peine, il lui est accordé le pouvoir de le faire, ainsi qu’il a été analysé précédemment. C’est
ainsi qu’il retiendra dans ce cas les circonstances atténuantes.
Paragraphe 1. Notions
Elles consistent en certains aspects qui caractérisent l’infraction et dont le juge prend
compte en vue d’atténuer la peine prévue par la loi dans le cas et la mesure fixée par la loi.
A la différence des autres causes de variation de la peine telles que la récidive, les
excuses, le concours des infractions, les circonstances aggravantes…, les circonstances
atténuantes sont l’occasion d’une étroite collaboration entre le législateur et le juge pénal. Dans le
but de munir le juge d’un instrument répressif plus souple, le législateur détermine le maximum
de la peine ainsi que même le minimum. Cependant, le juge peut aller au-dessus du minimum
légal, mais il ne peut condamner à la servitude pénale de moins d’un jour, c’est-à-dire, qu’il
prononcera aux moins la servitude pénale d’un jour lorsqu’il condamne en dessous du minimum
légal (les articles 18 et 19 du code pénal livre 1).
Il faut dire par contre que le juge ne peut aller au-delà du maximum, car il aura cette
fois-là aggravé la peine, ce qui rentre dans le domaine des attributions du législateur seul.
L’article 18 du code pénal ordinaire livre 1er dispose : « s’il existe des circonstances
atténuantes, la peine de mort pourra être remplacée par la servitude pénale à perpétuité ou par
une servitude pénale dont le juge déterminera la durée. Les peines de servitude pénale et
d’amende pourront être réduite dans la mesure déterminée par le juge ». Le juge apprécie donc
les éléments de fait d’une façon absolue. La loi ne définit donc pas et n’énumère pas ce qu’elle
entend par « circonstances atténuantes » en vertu de l’inimaginable variété des faits criminels. Le
juge est mandaté par le législateur pour effectivement apprécier et évaluer les circonstances
atténuantes.
Il peut se faire qu’elles puissent exister dans le fait lui-même. C’est le cas d’un agent qui
vole mais qui, quelque temps après revient remettre l’objet volé. Il y a déjà eu vol (par principe
de la cristallisation de la qualification). Lorsqu’on nous attrape, le juge pourra évoquer cette
remise comme une circonstance atténuante. Les moyens employés pour commettre une infraction
lorsqu’un monsieur A veut tuer B mais qu’il lui administre la quantité du poison assez moindre et
inefficace.
Les circonstances atténuantes constituent donc l’un des instruments les plus souples dont
dispose le système répressif pour individualiser la peine. Elles permettent aussi à la conscience
collective de faire évoluer la justice pénale selon les exigences changeantes.
Les circonstances atténuantes sont facultatives, c’est-à-dire que le juge est libre à les
trouver (retenir) là où il estime qu’elles sont. Les circonstances atténuantes sont personnelles,
c’est-à-dire que même si elles sont tirées des faits, le juge peut les appliquer à certains agents et
pas aux autres. Les circonstances atténuantes sont judiciaires, c’est-à-dire que la loi ne les
énumère pas. Il appartient au juge seule autorité compétente, de les évaluer avant de les retenir.
Ce sont des faits définis par la loi, affectant accidentellement une infraction et que le
législateur prévoit en vue d’aggraver la peine prévue pour l’infraction à l’état simple, parce
qu’elles font preuve de perversité ou en raison de la gravité qu’elles confèrent à l’acte.
Lorsque le juge se rend compte de leur existence au cours du traitement d’un dossier, il
doit s’y conformer en les retenant et en prononçant la sanction pénale ainsi aggravée. Ceci justifie
le fait selon lequel, les circonstances aggravantes étant la volonté expresse du législateur, ne
peuvent être modifiées par le juge. Elles s’imposent, car non seulement qu’elles sont légales mais
aussi et surtout parce qu’elles sont obligatoires.
Elles ont donc des caractéristiques différentes et peuvent ainsi faire l’objet d’une
classification ou d’une catégorisation spécifique pour enfin produire des effets particuliers.
C’est le cas du vol avec l’effraction ou escalade, le vol d’un fonctionnaire (appelé
détournement), vol avec violences ou menaces.
Les circonstances aggravantes sont toujours prévues par la norme. Elles doivent donc
être préétablies (dans la norme) par le législateur pour que le juge puisse les appliquer. Il ne
revient pas au juge de les ériger. Il n’a donc pas ce pouvoir. Puisqu’elles sont légales, la
conséquence de cette caractéristique est que le juge n’a pas la faculté de les appliquer mais une
obligation. C’est que, le juge sera tenu de les appliquer de manière obligatoire.
C. Du renforcement de la répression
C’est le cas des violences et menaces qui accompagnent le vol qui sont des causes
d’aggravation de la peine dans l’infraction de vol. Alors que les violences seules constituent déjà
une autre forme d’infraction (coups et blessures).
Une circonstance aggravante dont le rapprochement laisse subsister dans les faits qu’elle
définit, le caractère infractionnel, n’est pas nécessairement le cas. C’est ainsi que la simple injure
ne devient pas l’infraction de calomnie, car la simple injure, de par la volonté du législateur est
une infraction moindre que celle de la diffamation, laquelle n’est pas une injure simple, mais
aggravée par des circonstances.
L’esprit du lucre est une circonstance aggravante de presque toute infraction contre la
sûreté extérieure d’un Etat et la qualité de fonctionnaire ou d’officier public pour une série
d’infractions constitue une circonstance aggravante. C’est le cas de détournement.
Les circonstances réelles sont des faits extérieurs qui ont accompagné la commission de
l’infraction. C’est le cas de l’escalade et l’effraction qui sont des circonstances extérieures à la
commission de l’infraction. Elles se rattachent donc à l’activité criminelle ou à la modalité de la
perpétration (de l’opération) de l’infraction.
L’article 78 du code pénal belge dispose : Ni le crime ou délit ne peut être excusé si ce
n’est que dans le cas déterminé par la loi ».
L’index alphabétique du code pénal belge ne contient aucune mention sur l’excuse ni
dans l’ouvrage de MINEUR.
Paragraphe 1. Définition
Selon la doctrine, l’excuse est un fait d’une circonstance définie par la loi qui laisse
subsister l’infraction, mais qui a pour conséquence soit une diminution soit une exemption de la
peine. Ce qui suppose que l’infraction reste établie.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 243 | P a g e
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Les excuses peuvent être donc absolutoires ou péremptoires. Elles entraînent de ce fait
l’exemption de la peine. Dans certaines législations, on les appelle exemptions spéciales de
répression.
Il y a aussi des excuses atténuantes qui sont traitées sous le vocable « causes d’excuse »
par d’autres auteurs.
Paragraphe 2. Caractéristiques
La criminalité des actes poursuivis demeure mais la répression sera atténuée pour des
raisons de politique criminelle, d’utilité sociale ou d’opportunité.
A. Excuses absolutoires
Elle est une excuse absolutoire. Ici, l’infraction consiste dans l’aide apportée au criminel
pour empêcher l’œuvre de la justice. Il faut dire que, les parents ou alliés peuvent cacher leur fils
mais pas une bande criminelle dont fait partie leur fils.
Aussi, lorsque les parents sont chargés de la garde d’un détenu, ils ne seront pas excusés
s’ils le font évader. Le vol ou le détournement opéré par un fonctionnaire dans l’exercice de ses
fonctions ne sera impuni du fait que la victime est sa femme.
Elle est une cause d’excuse pour plusieurs infractions. La dénonciation est donc un fait
postérieur à l’infraction, mais qui peut valoir excuse lorsqu’elle est faite à temps et dans les
conditions requises par la loi.
La dénonciation doit être faite avant toute poursuite si elle est faite pendant l’instruction
préjuridictionnelle, elle ne devient qu’un AVEU. La dénonciation doit être faite à l’autorité
administrative ou judiciaire. Elle doit être sincère et complète.
B. Excuses atténuantes
Alors que les circonstances atténuantes sont facultatives et judiciaires ; les excuses
atténuantes par contre sont légales et obligatoires, mais produisent les mêmes effets sur la
sanction pénale que les premières.
C. La provocation
C’est un fait qui a suscité chez un individu un sentiment de colère ou de crainte et qui l’a
poussé à commettre une infraction par réaction spontanée contre les faits. Le législateur reconnaît
à l’auteur de l’infraction, une faiblesse humaine pourtant justifiée par le code.
Elle est spéciale au crime de sang. L’excuse de provocation est personnelle parce qu’elle
est collée sur un état psychologique particulier de l’agent et ne saurait servir d’excuse aux autres
participants. Elle doit être constituée de violences.
Les violences doivent être graves. C’est ainsi que la colère et même la crainte doivent
être sérieusement fondées et l’intensité de la violence devra être appréciée objectivement et
raisonnablement par le juge.
Les violences doivent être illégitimes. Elles doivent avoir été exercées contre les
personnes, car il serait illégal d’être provoqué par les animaux ou autres objets.
1. La violation de domicile
Ici, le législateur permet de réprimer l’infidélité d’un conjoint par celui qui n’a plus de
libertés d’esprit et sans froid nécessaire, afin que le mari (conjoint) offensé puisse résister à
l’impétuosité de ressentiment ou de l’indignation. Dans ce cas, cette excuse est accordée à la
femme ou un mari même quand ils sont séparés de corps. L’excuse est même possible quand
l’époux qui est lui-même infidèle, vient d’être provoqué par le flagrant délit d’adultère de son
conjoint.
Il faut, par ailleurs, ajouter que pour cause d’inconduite ou d’infraction aux conditions
énoncées dans l’acte de libération (Art. 36 C.P.L. 1), il peut s’ensuivre la révocation de la mise en
liberté. L’article 16 du code pénal militaire considère que la révocation de la libération
conditionnelle peut être prononcée en cas de punition grave, d’inconduite notoire, de nouvelles
condamnations encourues avant la libération définitive ou en cas d’inexécution des obligations
imposées au bénéficiaire de ladite libération conditionnelle.
Lorsque la révocation n’est pas intervenue avant l’expiration d’un délai égal au double
du terme d’incarcération que celui-ci avait encore à subir à la date à laquelle la mise en liberté a
été ordonnée en sa faveur, la libération définitive sera acquise.
173
. Articles 35-41 du décret du 30/01/1940 portant Code pénal congolais tel que modifié et complété à ce jour.
174
. Articles 12-19 de la loi n°024/2002 du 18/11/ 2002 portant Code pénal militaire congolais.
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Pour bénéficier du sursis à exécuter la peine, il faut remplir les conditions suivantes :
- il ne doit pas être prononcé contre le condamné une peine de servitude pénale
principale supérieure à un an ;
- le condamné ne doit pas avoir antérieurement encouru de condamnation à la
servitude pénale principale, du chef d’infraction commise dans la République,
punissable, indépendamment de l’amende, d’une servitude pénale de plus de
deux mois (Art 42 CP).
En droit pénal congolais, les peines peuvent disparaître soit parce qu’elles ont été
exécutées, soit parce que le condamné est décédé, soit encore parce qu’il y a des raisons légales
qui s’opposent à son exécution telles que la prescription et la grâce.
Elle constitue le mode normal d’extinction de la peine. Mais, il convient d’ajouter que le
décès du condamné éteint également la peine.
Section 2. LA PRESCRIPTION
Le droit pénal congolais connaît deux sortes de prescription : celle de l’action publique
et celle de la peine.
Notions. La prescription désigne une durée au-delà de laquelle des poursuites pénales
pour une infraction ne sont plus possibles. Elle est entendue comme un mode d’extinction de
l’action publique résultant du non-exercice de celle-ci avant l’expiration du délai fixé par la loi,
dont la survenance résulte du seul écoulement du temps. On considère qu’il s’agit d’une
irrecevabilité à agir pour le titulaire d’un droit s’il est resté trop longtemps inactif. En effet,
lorsque l’organe chargé d’assurer des poursuites au sein d’une société omet de le faire dans les
délais fixés par la loi (viole ainsi son obligation professionnelle), l’action publique est prescrite
de sorte que l’infraction restera impunie et donc son auteur non poursuivi175.
Si ce premier type de prescription rend caduque toute poursuite, il existe un autre type
qui entraîne l’impossibilité de faire subir sa peine à un individu ayant été condamné mais pour
lequel la sanction n’a pas été mise à exécution. En effet, l’écoulement d’un certain délai depuis la
commission d’une infraction constitue un obstacle majeur à l’exercice de l’action publique et à
l’exécution de la sanction pénale.
175
. Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, pp 486-489.
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Cette pratique varie selon les systèmes juridiques des Etats. Il faut noter que les pays de
Common law ne connaissent généralement pas la prescription, alors qu’elle est une pratique assez
courante dans les pays du système Romano-germanique qu’on appelle droit civil176.
Incidence en matière des crimes internationaux. Alors que non admis dans certains
droits, il arrive en tout cas que d’autres la prévoient dans leurs droits internes. La décriant en
matière de crimes internationaux, Pierre Mertens écrivait :
« On ne conçoit pas d’application de la ‘‘loi de l’oubli’’ pour des crimes qui ont été
perpétrés contre la communauté des Nations et l’humanité en tant que telle. Ces crimes
sont imprescriptibles par nature. Si, pour des raisons techniques, ces crimes ne peuvent,
dans l’état actuel de l’évolution du droit positif, n’être réprimés que sur le plan interne,
ce doit être en conformité avec le droit international et en reconnaissant à celui-ci la
primauté qui lui est due »177.
Non seulement qu’il sera moins aisé d’appréhender le suspect et de rassembler les
éléments de preuve ; mais aussi, la personne sur laquelle pèsent des charges infractionnelles peut
bien s’en prévaloir devant les organes de justice, une fois interpellée, bien qu’avec peu de chance
d’être entendue. Ceci est différent du statut des specials Panels timorais qui offre un soutien sans
faille au régime international en prévoyant expressément l’imprescriptibilité de tous les crimes
internationaux entrant dans sa compétence, tout en écartant les crimes de droit commun178.
176
. « Répression nationale des violations du droit international humanitaire : prescription », in Document de la Croix Rouge,
1999, http://www.circ.org.
177
. Pierre Mertens, L’imprescriptibilité des crimes de guerre et contre l’humanité, éd. de l’Université de Bruxelles, 1974, p. 226.
178
. David Boyle, « L’apport des tribunaux pénaux internationalisés quant au régime du crime », pp. 95-143, in Ascensio (Hervé),
Lambert-Abdelgawad (Elisabeth), Sorel (Jean-Marc) (sous la direction de), Les juridictions pénales internationalisées
(Cambodge, Kosovo, Sierra Leone, Timor Leste), Paris : Société de législation comparée, 2006, 383 p., collection Unité mixte de
recherche de droit comparé de Paris (Université de Paris I/CNRS UMR 8103), vol. 11, p. 131
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Ensuite, la crainte et les remords qui ont accompagné le coupable durant toute la longue
période d’évitement des poursuites suffisent à titre de sanction. Enfin, des poursuites trop tardives
démontreraient la négligence mais aussi l’impuissance de l’appareil judiciaire à agir en temps
normal et inquiéteraient en conséquence le public180.
179
. A. Mihman, Comment réformer la prescription de l’action publique, R.P.D.P., 2007, p. 527, cité par Jean-Pradel dans
Procédure pénale, Paris, édition Cujas, 15ième éd., 31 juillet 2010, p. 183.
180
. Contrairement à ces arguments en faveur de la prescription, il est aussi soutenu d’une part, que l’idée d’une expiation résultant
de l’angoisse imposé au délinquant par l’écoulement du temps ressort d’un romantisme juridique infirmé par les données de la
psychologie judiciaire, chaque délinquant réagissant à sa manière, le temps n’étant pas le même pour tous. Aussi, l’idée de
négligence est-elle dangereuse pour le coupable plaidant la prescription puisqu’il lui sera très malaisé de prouver la date à laquelle
le Ministère public a eu connaissance de l’infraction. D’autre part, la prescription est pernicieuse à différents égards : elle nuit à la
protection de la société en profitant aussi bien aux grands malfaiteurs qu’aux petits délinquants, alors que le temps ne saurait
atténuer les dangers des premiers. Elle exclut toute mesures de traitement pour certains coupables qui en auraient pourtant besoin ;
il n’est pas moins nécessaire de les traiter parce que leur faute n’a été révélée que tardivement. C’est pourquoi, l’application de la
prescription dépend de chaque société (les droits de la common law l’ignorent, sauf pour les très petites infractions). Pradel
affirme, et c’est vrai, que c’est pour cette raison que le droit français confère à la prescription un régime empreint d’une certaine
défaveur à l’égard du délinquant (Voir Procédure pénale, op. cit., p. 184). Mais, nous constatons de nos jours, que le régime de la
prescription dont bénéficie le criminel de guerre en droit français parait de loin favorable que celui de l’imprescriptibilité organisé
par le droit congolais mais également dans le statut de la CPI. A cet effet, une fois poursuivi pour crime de guerre, il y a
possibilité de plaider la prescription après un temps. Ainsi, tout délinquant poursuivi en France pour crime de guerre a la
possibilité de plaider la prescription et de choisir la loi la plus favorable entre le statut de la CPI et la législation pénale française.
La CPI se saisira-t-elle des faits déclarés prescrits par la justice française ?
181
. Serge Guinchard et Jacques Buisson, op.cit., p. 666, cité par Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour
crime de guerre. Etude comparée des droits français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-
Marseille Université, France, 2012, op cit.
182
. Crim., 6 mai 2003, B.C., n° 52.
183
. Crim., 20 mai 1980, B.C., n° 156, R.S.C., 1980.459, obs. J.-M. Robert.
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Enfin, il peut être invoqué à toute hauteur de la procédure, en appel et même pour la
première fois devant la Cour de cassation ou devant la juridiction de renvoi184.
En matière d’amende, il convient de retenir qu’il y a deux termes qui sont prévus : la
peine de moins de cinq cents francs se prescrira par deux ans révolus ; tandis que la peine de
cinq cents francs et plus se prescrira par quatre ans révolus.
184
. Crim., 5 novembre 1970, B.C., n° 291, R.S.C., 1971.90, obs. J.-M. Robert.
185
. Frédéric Desportes et Francis Le Gunehec, Droit pénal général, 12 ième éd., Economica, Paris, 15 septembre 2005, p. 1024.
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En matière de servitude pénale, deux termes sont également prévus : la peine de dix ans
ou moins se prescrit par un délai double de la peine prononcée, sans que ce délai puisse être
inférieur à deux années. Lorsqu’elle est de plus de dix ans, elle se prescrit par vingt ans et en cas
de perpétuité, le délai de prescription sera fixé à vingt-cinq ans.
Il y a lieu de relever que le législateur congolais n’a prévu aucun délai de prescription en
matière de peine de mort. Dès lors, cette peine ne se prescrit pas et seule l'exécution du condamné
à mort interrompra sa prescription, pensons-nous.
Section 3. LA GRACE186
Paragraphe 1. Notion
La grâce est une mesure de clémence que le président de la République prend en faveur
d’un délinquant définitivement condamné et qui a pour effet de le soustraire à l’application d’une
partie ou de la totalité de la peine.
186
. Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, op cit.
187
. En France, on peut évoquer un certain nombre de cas, notamment : la grâce présidentielle accordée à Alfred Dreyfus, par le
président Émile Loubet le 19 septembre 1899. Paul Touvier fut condamné à mort et a bénéficié de la grâce du président Georges
Pompidou le 23 novembre 1971. Omar Raddad était condamné en 1994 pour meurtre, mais, depuis 1998, il a obtenu la grâce
présidentielle. Maxime Gremetz, député communiste de la Somme, a bénéficié d'une grâce individuelle en 2002, lui permettant de
retrouver son siège de parlementaire. Jean-Charles Marchiani, ancien préfet du Var condamné en 2007 à trois ans de prison pour
corruption et incarcéré en 2008, a bénéficié d'une grâce partielle la même année ; quant bien même que cette décision fut
contestée, car à l'inverse des 26 autres grâces décidées le même jour, la sienne n'a pas été formulée sur proposition des services du
ministère de la Justice pour comportement méritant.
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La grâce est une faveur accordée de manière discrétionnaire par laquelle, le président
de la République peut dispenser un condamné d’exécuter tout ou partie de sa peine ou substituer
une peine moins forte à la peine qui lui a été infligée. En principe, dans tous les pays, elle
procède du pouvoir régalien exercé par le chef suprême du pouvoir exécutif.
Sous l’ancien régime français, cette prérogative relevait de l’ordre des choses, car le roi
était alors : « source de justice ».
Dans un régime républicain, fondé sur la séparation des pouvoirs, elle est plus
surprenante. C’est ce qui entraina sa suppression en 1791. Compte tenu du système des peines
fixes alors en vigueur, le droit de grâce du souverain apparaissait d’ailleurs moins comme un
empiétement sur le pouvoir judiciaire que comme une atteinte à l’autorité des lois, certainement
beaucoup moins tolérable aux yeux des hommes de la Révolution. Elle fut tout de même rétablie
sous le consulat par un sénatus-consulte du 16 thermidor an X et n’a pas connu d’éclipse depuis
lors. Ainsi, l’article 17 de la Constitution française du 4 octobre 1958 dispose que « Le Président
de la République a le droit de faire grâce ». On a finalement estimé qu’il est difficile de se passer
d’une institution qui permet d’assurer à l’ensemble du système pénal une indispensable
souplesse188.
Nous espérons qu’un jour certaines des attributions lui reconnues aujourd’hui, seront
renvoyées au Conseil supérieur de la magistrature (nomination et révocation des magistrats), et le
droit d’accorder sa grâce sera subordonné à une requête sollicitant l’autorisation de la cour de
cassation voire la cour constitutionnelle. On envisage dans ce cas, une sorte de recours
extraordinaire particulièrement ouvert en faveur du président de la République en cette matière de
grâce, commutation, ou réduction de peine.
188
. Frédéric Desportes et Francis Le Gunehec, Droit pénal général, 12ième éd., Economica, Paris, 15/09/2005, pp. 1027-1028.
189
. Article 87 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la Loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de
certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo.
190
. Le 16 mai 2004, un décret n° 04/40 portant mesure collective de grâce a été pris par le président congolais ; un autre décret fut
signé au n° 10/080 en date du 31 décembre 2010.
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La sanction n’est pas supprimée dans son principe, mais la peine n’est pas exécutée (le
bénéficiaire demeurant toutefois tenu -dans certaines législations- d’indemniser la victime. On
considère la grâce comme une mesure qui procède à l’extinction de la peine sans effacement de la
condamnation. Il faut dire que la grâce accordée corrobore l’existence du crime (lequel est
mentionné dans le casier judiciaire du délinquant) mais atteint, tout en l’éteignant, uniquement la
peine.
L’incidence de la grâce en matière de crimes internationaux191. La question qui se
pose est celle de savoir si les autorités des Etats peuvent, de manière discrétionnaire et
souveraine, prendre des mesures de grâce, en faveur des personnes convaincues et condamnées
définitivement pour crime international.
Assez souvent, les réponses qui sont données se reportent en effet plutôt,
inconsciemment ou non, vers l’imprescriptibilité des crimes internationaux. Et pourtant, comme
on peut bien s’en rendre compte, l’imprescriptibilité vise soit l’action publique non exercée, soit
la peine non exécutée frauduleusement. La grâce quant à elle ne produit d’effets que sur
l’exécution totale ou partielle de la peine. On peut donc noter qu’une telle mesure peut
régulièrement être accordée. Car en effet, le condamné n’exécutera pas la sanction lui infligée,
non pas parce qu’il aurait organisé sa fuite de la vigilance des autorités de justice ou
pénitentiaires, mais parce que une institution de l’état, habilité par des normes en vigueur, l’aura
discrétionnairement décidé. Aussi constate-t-on, que ni un texte international (traité ou accord
international) ni une législation interne (constitution ou loi) ne lui interdit de le faire.
191
. Lire avec intérêt Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits
français et congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, pp 507-510.
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Dans les statuts de certaines juridictions pénales internationales192, il est prévu aussi bien
la grâce que la commutation de peine, à la seule condition d’aviser la juridiction qui aura rendu la
décision.
C’est que l’Etat sur le territoire duquel s’exécute la peine accordera la grâce tout en
ayant tenu informé la juridiction internationale de décision, pour l’intérêt de la justice et dans le
respect des principes généraux de droit.
De ce qui précède, on retiendra qu’en dehors des cas où l’Etat se trouve lié par son
engagement avec une juridiction internationale ou une autre juridiction étrangère, tout Etat peut
souverainement décider d’accorder ou non à certaines personnes la grâce, peu importe la nature
du crime pour lequel elles auraient été condamnées193.
Il s’avère difficilement acceptable, sauf en cas d’un accord de volonté entre parties
(accord international), qu’une juridiction étrangère se constitue juge des décisions réglementaires
(ou judiciaires) d’un autre Etat souverain.
192
. Article 27 du statut du TPIR énonce ce qui suit : « Si le condamné peut bénéficier d’une grâce ou d’une commutation de peine
en vertu des lois de l’État dans lequel il est emprisonné, cet État en avise le Tribunal international pour le Rwanda. Une grâce ou
une commutation de peine n’est accordée que si le Président du Tribunal international pour le Rwanda, en consultation avec les
juges, en décide ainsi dans l’intérêt de la justice et sur la base des principes généraux du droit ». Voir aussi l’alinéa 1 de l’article
29 du statut du TMIN ; Article 28 du statut du TPIY.
193
. On se souviendra de la grâce présidentielle accordée souverainement en France par le président Georges Pompidou à Paul
Touvier le 23 novembre 1971 ; alors qu’il était condamné (par contumace) à la peine de mort, pour avoir commis le crime contre
l’humanité en ayant d’un côté, organisé l’assassinat du président de la ligue des droits de l’homme Victor Basch et son épouse
Hélène ; et de l’autre, après avoir infiltré la Résistance et interrogé des prisonniers, dirigé des rafles, pillé des biens et vengé
l'assassinat de Philippe Henriot en faisant fusiller sept juifs à Rillieux-la-Pape, le 29 juin 1944.
194
. Accusé de Crimes contre l’humanité pour des faits commis pendant la seconde guerre mondiale, Paul Touvier né en 1915, a
finalement été jugé par la Cour d'assises des Yvelines qui le condamne à la réclusion criminelle à perpétuité le 19 avril 1994. Il
meurt à la prison de Fresnes le 17 juillet 1996, à l'âge de 81 ans. Après avoir fuit la justice, le 10 septembre 1946, Paul Touvier est
condamné à mort par contumace par la cour de justice de Lyon, et le 4 mars 1947 à la même peine par la cour de justice de
Chambéry. Après 1967, Touvier, qui bénéficie de la prescription des crimes de guerre, vit à Chambéry dans la maison de famille.
Il obtint la grâce le 23 novembre 1971. Les associations de résistants portent plainte en novembre 1973 contre Touvier pour
complicité de crime contre l'humanité, étant donné que l’action publique pour crime de guerre était prescrite. Le 13 août 1992 la
chambre d'accusation conclue par un non-lieu qui suscite une vive émotion. Le procureur général de Paris, Pierre Truche, forme
un pourvoi devant la Cour de cassation qui casse cet arrêt de non-lieu le 27 novembre 1992. La Cour d'assises des Yvelines juge
Touvier et le condamne à la réclusion criminelle à perpétuité. Il mourut en prison.
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La sanction pénale peut s’éteindre par l’effacement de la condamnation qui lui servait de
support. Le droit positif congolais connaît les institutions suivantes :
- l’amnistie ;
- la réhabilitation ; et
- la révision.
Ces institutions font disparaître la condamnation tout en éteignant, ipso facto, les
sanctions pénales qu’elle portait.
Section 1. L’AMNISTIE195
Paragraphe 1. Notion
L’amnistie constitue une mesure de clémence ou de pardon, ayant pour effet d’enlever
rétroactivement à certains faits leur caractère délictueux. C’est que les faits ont bel et bien en lieu
et ne sont pas effacés. Cependant, leur caractère infractionnel est effacé et leur dimension pénale
est enlevée.
Les bénéficiaires sont donc pénalement lavés des infractions qui leur étaient reprochées.
Ces infractions ne pourront plus être invoquées à leur encontre, même en cas de rechute dans la
criminalité.
Autorité compétente. Dans les pays démocratiques, l’amnistie197 relève le plus souvent
de la loi c'est-à-dire d’un texte voté par le Parlement. Elle efface non seulement les poursuites et
la peine, mais également la condamnation.
195
. Voir Bienvenu WANE BAMEME, La responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des droits français et
congolais. Thèse de doctorat en Droit. Présentée et soutenue à Aix-Marseille Université, France, 2012, op cit.
196
. PRADEL Jean, Droit pénal général, 16è édition, 2006/2007, Editions CUJAS, p. 723
197
. Parmi les mesures destinées, périodiquement à aplanir les reliefs de la vie politique des Etats et surtout à apaiser, voire à
pacifier le climat de tension qui a prévalu dans les rapports entre Etats, entre Etats et individus ou entre individus eux-mêmes,
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Mais, il y a lieu de mentionner que l’application de ces mesures de clémence est souvent
caractérisée par une sélectivité inexpliquée. Le traitement discriminatoire et même arbitraire des
personnes qui devraient en bénéficier, fait souvent preuve d’un marchandage politique.
L’amnistie devient donc l’expression d’une volonté politique et par ses caractéristiques, elle se
présente comme une « institution à géométrie variable ».
En tant que « décision politique qui fait disparaître ou réduit la dimension pénale de
conduites sanctionnées par la loi », l’amnistie s’analyse comme une monnaie d’échange, comme
le seul compromis acceptable pour parvenir à une transition politique apaisée. C’est le cas des
lois d’amnistie prises dans un certain nombre de pays199.
En revanche, il nous semble que les raisons pour lesquelles elles sont prises ne soient
généralement pas atteintes. Les conflits armés se poursuivent sans les moindres répits.
Il arrive aussi qu’ils reprennent avec une plus grande intensité, après seulement quelques
temps d’accalmie. On constate enfin, que de nouveaux conflits jaillissent peu importe l’amnistie
préalablement prononcée.
figure également l’amnistie. Historiquement, on signale que la première amnistie, celle de Thrasybule, remonte à l’an 403 avant
Jésus-Christ. En effet, rentré d’exil pour chasser les trente tyrans d’Athènes et rétablir la démocratie dans sa cité, cet homme
proposa à l’assemblée des citoyens de voter une loi pour consacrer l’oubli des divisions antérieures. La loi de Thrasybule donna
ainsi à la notion d’amnistie son caractère d’oubli volontaire puisqu’institué.
198
. Il en est également ainsi de la grâce. En effet, ce fut le cas avec le décret n° 04/40 du 16 mai 2004 portant mesure collective de
grâce qui a été pris par le président congolais en vue de marquer, selon ses propres termes, par un acte de clémence et de cohésion
nationale le 7ième anniversaire (…).
199
. On peut citer : la loi d’amnistie générale prise au Congo-Brazzaville par la Conférence nationale de février 1991, en faveur de
tous les responsables de crimes politiques ou des violations des droits de l’homme afin de favoriser la réconciliation nationale ;
l’Ordonnance-Présidentielle du 26 septembre 1975 accordant amnistie aux officiers responsables dans l’assassinat du Président
Rahman au Bengladesh du 15 août 1975 ; du décret-loi du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerre et insurrection commis
dans le nord et sud-Kivu.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 258 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
C’est que les effets de l’amnistie sont très avantageux pour le délinquant que ceux de la
grâce. Car, alors que la grâce ne fait que remettre, commuer ou réduire la peine sans effacer la
condamnation pénale qui reste acquise, continue à figurer au casier judiciaire du condamné et fait
obstacle à l’octroi du sursis ; l’amnistie, elle, supprime rétroactivement le caractère infractionnel
du fait commis par le délinquant, et éteint aussi bien l’action publique que la peine qui était en
cours d’exécution.
Elle efface donc, même la condamnation prononcée qui n’empêchera plus l’octroi d’un
sursis ultérieur et ne sera plus prise en considération pour la récidive. Elle interdit même de
rappeler ou de laisser subsister dans un document quelconque les condamnations ainsi
complètement effacées. Les infractions amnistiées ne pourront plus faire encore l’objet des
poursuites. Si elles n’ont pas été effectuées, elles ne pourront plus être engagées.
Il convient de dire en définitive que la grande loi de l’amnistie c’est l’oubli. Mais, celui-
ci n’est pas absolu. Car il y a des limitations qui existent.
L’amnistie ne s’applique pas aux : mesures de sûreté, droits des tiers, nominations des
personnes aux postes publics.
200
. Louis Joinet, Lutter contre l’impunité - Dix question pour comprendre et agir, Paris, La Découverte, 2002, p. 9.
201
. El Hadji Guisse, « Le procès équitable », in Rencontres internationales sur l’impunité des auteurs de violations graves des
droits de l’homme, organisées par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) et la Commission
internationale des juristes (CIJ) sous les auspices des Nations Unies (du 2 au 5 novembre 1992), Palais des Nations, Genève, p.
172.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 259 | P a g e
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Amnistie, une mesure pouvant entrainer une irresponsabilité civile. Il peut arriver
que dans certains cas, l’amnistie irresponsabilise non seulement pénalement mais aussi
civilement. Dans ce contexte donc, elle empêchera le dédommagement pour tout le préjudice
moral mais aussi matériel occasionné par les faits infractionnels à l’origine de cette mesure. Cette
irresponsabilité civile, s’étend sur toute autre forme de responsabilité que pénale. Elle sous-
entend donc l’irresponsabilité disciplinaire et celle administrative. Cependant, dans d’autres
circonstances, ces mêmes actes ou mesures de clémence excluent de leurs champs, la
responsabilité civile globale. Il en a été le cas en RDC avec le décret de 2009 202 qui énonce
que : « la présente loi ne porte pas atteinte aux réparations civiles, aux restitutions des biens
meubles et immeubles ainsi qu’aux autres droits dus aux victimes des faits infractionnels
amnistiés ». De telles dispositions d’exclusion, laissent théoriquement la possibilité aux
personnes qui s’estiment victimes de saisir la justice ; afin de postuler d’indemnisations ou toutes
autres réparations des préjudices subis par les actes infractionnels, couverts pénalement par
l’amnistie.
Ce qui, en tout cas en RDC, n’est pas du tout une chose facile dans la société congolaise,
étant donné d’une part, la conception de ces mesures par la population, et d’autre part, les
influences des bénéficiaires de ces mesures après leur application, et vu pour certains, les postes
de responsabilité qu’ils occupent en « récompense » de leur « offre » de paix.
202
. Article 4 du décret-loi du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerre et insurrection commis dans le Nord et Sud-Kivu.
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203
. L’article 2 du décret-loi du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerre et insurrection commis dans le nord et sud-Kivu
définit d’abord les faits de guerre comme des actes inhérents aux opérations militaires autorisées par les lois et coutumes de
guerres qui, à l’occasion de la guerre, ont causé un dommage à autrui ; ensuite, les faits insurrectionnels comme des actes de
violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l’intégrité du territoire
national.
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Cours de Droit Pénal Général 2015
Section 2. LA REHABILITATION
Elle est prévue par le décret du 21 juin 1937, modifié par le décret du 22 août 1959 et
l’ordonnance législative du 28 août 1959.
Elle est une procédure par laquelle, moyennant les éléments nouveaux légalement
définis, peuvent être annulées des condamnations passées en force des choses jugées pour toute
infraction punissable de plus de deux mois d’emprisonnement.
Paragraphe 1. Notions
En droit congolais, la révision est une voie de recours extraordinaire introduite à la cour
de cassation, en faveur de toute personne reconnue auteur d’une infraction, en vue d’obtenir la
correction des erreurs de fait contenues dans les décisions revêtues de l’autorité de la chose jugée
rendues par toutes les juridictions.
Cette voie de recours ne tient à aucun délai. Il convient et il suffit que la décision soit
coulée en force de chose jugée et même si la peine est prescrite.
204
. Les articles 67 à 72 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 262 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Devant la cour de cassation, la demande de révision est possible qu’à cause de la gravité
de l’infraction pour laquelle la condamnation a été prononcée (punissable d’une servitude pénale
supérieure à deux mois).
- lorsqu’après une condamnation, un nouvel Arrêt ou jugement condamne, pour les mêmes
faits, un autre prévenu, et que, les deux condamnations ne pouvant se concilier, leur
contradiction est la preuve de l’innocence de l’un ou de l’autre condamné ; on parle alors
de la contrariété de jugements ;
- lorsque postérieurement à la condamnation, un des témoins entendus a été poursuivi et
condamné pour faux témoignage contre le prévenu ;
Le témoin ainsi condamné ne peut plus être entendu lors de nouveaux débats ;
- lorsqu’après une condamnation pour homicide, il existe des indices suffisants propres à
faire croire à l’existence de la prétendue victime de l’homicide.
- lorsqu’après une condamnation, un fait vient à se révéler ou des pièces inconnues lors des
débats sont présentées et que ce fait ou ces pièces sont de nature à établir l’innocence du
condamné.
205
. Article 68 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 263 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
Cela signifie que, même lorsque l’initiative vient du ministre ou des parties, c’est le
procureur général qui est seul habilité à saisir cette haute juridiction. Autrement dit, le ministre
comme le condamné ou ses représentants doivent adresser leur injonction ou leur requête à
procureur général afin que celui-ci saisisse la cour de cassation.
La Cour rejette la demande si elle l’estime non fondée. Si, au contraire, elle la juge
fondée, elle annule la condamnation prononcée. Elle apprécie, dans ce cas, s’il est possible de
procéder à des nouveaux débats contradictoires.
Dans l’affirmative, elle renvoie le prévenu devant une autre juridiction de même ordre et
de même degré que celle dont émane l’Arrêt ou le jugement annulé, ou devant la même
juridiction autrement composée.
206
. PRADEL (Jean), Procédure pénale, Ed. Cujas, Paris 1976, n°647 à 649.
207
. Voir l’article 70 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 264 | P a g e
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C’est le cas lorsqu’il y a décès, absence, démence, défaut d’un ou plusieurs condamnés,
irresponsabilité pénale, prescription de l’action publique ou de la peine.
Lorsqu’elle statue au fond. La Cour n’annule que les condamnations qui ont été
injustement prononcées. Elle décharge, s’il y a lieu, la mémoire des morts.
L’annulation prononcée par la cour de cassation sur requête en révision produit les
conséquences ci-après :
- Tous les effets de la condamnation sont anéantis rétroactivement ;
- Toute condamnation à des dommages-intérêts est effacée de plein droit ;
- En cas de renvoi, la juridiction désignée dans l’arrêt doit, en ce qui concerne l’objet de
l’inculpation, se limiter aux questions indiquées dans l’arrêt. Néanmoins le président de la
juridiction de renvoi peut, avant l’audience, procéder à un supplément d’instruction ;
- Si l’annulation de la décision entreprise ne laisse subsister aucune infraction à charge du
condamné en vie, aucun renvoi n’est prononcé.
Mais, lorsqu’après renvoi l’annulation laisse subsister quelque chose qui puisse être
qualifié d’infraction, le demandeur en révision peut être condamné par la juridiction de renvoi et
les frais de cette instance de renvoi seront à sa charge.
A cet effet justement, l’article 71 de cette loi organique n° 13/010 du 19 février 2013
relative à la procédure devant la Cour de Cassation, prévoit ce qui suit : « l’arrêt d’où résulte
l’innocence d’un condamné peut, sur sa demande, lui allouer des dommages-intérêts en raison
du préjudice que lui a causé sa condamnation. Si la victime de l’erreur judiciaire est décédée, le
droit de demander des dommages-intérêts appartient, dans les mêmes conditions, à son conjoint,
ses descendants ainsi qu’à ses ascendants, et ses ayants-droit. Il appartient aux autres personnes
pour autant qu’elles justifient d’un préjudice matériel résultant pour elles de la condamnation.
La demande en dommage-intérêt est recevable en tout état de cause de la procédure en révision.
Les dommages-Intérêts sont à la charge de l’Etat, sauf son recours contre la partie
civile, les dénonciateurs ou les faux témoins par la faute desquels la condamnation a été
prononcée ».
Des frais de justice en matière de révision. Aussi, à la fin de la procédure, les frais de
l’instance en révision qui étaient avancés par le Trésor à partir du dépôt de la demande à la Cour
de Cassation ; devront être supportés par le demandeur en révision qui succombe en son instance.
En outre, ils sont, à la requête du demandeur en révision, publiés par extrait au Journal
Officiel et dans deux journaux. Les frais de publicité sont à charge du Trésor.
BIBLIOGRAPHIE
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crime de Génocide.
2. Les Conventions de Genève I – IV du 12 août 1949.
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4. Les Protocoles additionnels I et II du 8 juin 1977 et le Protocole additionnel III (2005) aux Conventions de
Genève.
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la 18e Conférence de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) et entrée en vigueur le 21 octobre 1986.
6. Convention de Rome du 17 juillet 1998 se rapportant au statut de la Cour Pénale Internationale entré en
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7. Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradant, New york, 10
décembre 1984, in JORDC 40ème année n° spécial du 09 avril 1999 portant instruments internationaux
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8. Convention relative aux droits de l'enfant, New york, 20 novembre, 1989, in JORDC, 40ème année n°
spécial du 09 avril 1999 portant instruments internationaux relatifs aux droits de l'Homme ratifiés par la
RDC.
9. Pacte international relatif aux droits civils et politiques, New york, 19 décembre 1996 in JORDC, 40ème
année n° spécial du 09 avril 1999 portant instruments internationaux relatifs aux droits de l'Homme ratifiés
par la RDC.
1. Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision
de certains articles de la constitution de la République démocratique du Congo, in JORDC, 52ième année, n°
spécial, du 20 janvier 2011.
2. Décret n° 11/O1 du 05 janvier 2011 portant création des tribunaux pour Enfants in JORDC, 52ième année,
n°8, du 15 avril 2011.
3. Décret du 30 janvier 1940 tel que modifié, complété et mis à jour au 05 octobre 2006, portant code pénal
Congolais, in JORDC, 47 ème année, n° spécial du 05 octobre 2006.
4. Décret du 06 août 1959 portant code de procédure pénale, BO 1959, in les Codes Larcier, République
démocratique du Congo, Tome I, Droit civil et judiciaire, éd. De Boeck & Larcier S.A., 2003, Rue des
Minimes 39, 1000 Bruxelles, 2003, pp. 288-299.
5. Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 relative à l'organisation, fonctionnement et compétence des
juridictions d'ordre judiciaire, in JORDC.
6. Loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle, in JORDC.
7. Loi organique n°13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de Cassation
8. Loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire in JORDC 43 ème année n° spécial
du 20 mars 2002, in les Codes Larcier, République démocratique du Congo, Tome I, Droit civil et
judiciaire, éd. De Boeck & Larcier S.A., 2003, Rue des Minimes 39, 1000 Bruxelles, 2003, pp. 393-421.
9. Loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant code pénal militaire, in les Codes Larcier, République
démocratique du Congo, Tome II, Droit pénal, éd. De Boeck & Larcier S.A., 2003, Rue des Minimes 39,
1000 Bruxelles, 2003, pp. 42-60.
10. Loi n°87-010 du 1ier Août 1987 portant Code de la Famille, in J.O.Z., n° spécial, 1ier août 1987, in les Codes
Larcier, République démocratique du Congo, Tome I, Droit civil et judiciaire, éd. De Boeck & Larcier S.A.,
2003, Rue des Minimes 39, 1000 Bruxelles, 2003, pp. 3-67.
11. Loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant, in JORDC de la RDC N° Spécial 25 Mai
2009.
12. Ordonnance n°78-289 du 03 juillet 1978 relatif à l'exercice des attributions d'officiers et agents de police
judiciaire près les juridictions de droit commun, in les Codes Larcier, République démocratique du Congo,
Tome I, Droit civil et judiciaire, éd. De Boeck & Larcier S.A., 2003, Rue des Minimes 39, 1000 Bruxelles,
2003, pp. 434-445.
13. Ordonnance n° 344 du 17/09/1965 relative au régime pénitentiaire, in les Codes Larcier, République
démocratique du Congo, Tome I, Droit civil et judiciaire, éd. De Boeck & Larcier S.A., 2003, Rue des
Minimes 39, 1000 Bruxelles, 2003, pp. 453-464.
14. Avant-projet du livre premier du Code Pénal du 25 mai 2009, approuvé par la CPRDC.
II. DOCTRINE
A. OUVRAGES
1. AKELE ADAU (Pierre), Analyse et commentaire du nouveau code pénal militaire congolais, inédit.
2. AKELE ADAU (Pierre) et SITA MUILA AKELE (Angélique), Crimes contre l’humanité en droit congolais,
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7. BOULOC (Bernard), Droit pénal général, Dalloz, 19ième édition, 2005, 702 pages.
8. BOULOC (Bernard) et MATSOPOULOU (Haritini), Droit pénal général et procédure pénale, Paris, Dalloz,
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9. BOUZAT (Pierre) et PINATEL (Jean), Traité de droit pénal et de criminologie, T. I, Droit pénal général,
Dalloz, Paris, 1963.
10. BURDEAU (Georges), Les libertés publiques et les droits sociaux, Librairie de droit et de jurisprudence, Paris,
1948.
Docteur Bienvenu WANE BAMEME, Professeur Associé 268 | P a g e
Cours de Droit Pénal Général 2015
11. CASSESE (Antonio), International Criminal Law, Oxford, OUP, 2è éd., 2008.
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13. DAVID (Eric), Eléments de droit pénal international et européen, Bruylant/Bruxelles, 2009, 1566 pages.
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40. VERGES (Etienne), Procédure pénale, 2ème éd. Litec, Paris, 2007.
B. COURS ET THESE
INTRODUCTION ......................................................................................................................................................... 2
Section I. LE PHÉNOMÈNE CRIMINEL ..................................................................................................................... 3
Paragraphe I. L’EXISTENCE DU PHENOMENE CRIMINEL .................................................................................... 4
A. La définition du phénomène criminel ....................................................................................................................... 4
B. L’ampleur du phénomène criminel ............................................................................................................................ 5
1. Les méthodes des mesures du phénomène criminel ................................................................................................... 5
2. Le volume de la criminalité ........................................................................................................................................ 6
3. Les facteurs du phénomène criminel .......................................................................................................................... 7
a. Facteurs prédisposant ................................................................................................................................................. 7
b. Facteurs déclenchant .................................................................................................................................................. 8
Paragraphe II. LA REACTION SOCIALE AU PHENOMENE CRIMINEL ............................................................... 8
A. Les fonctions de la réaction sociale ........................................................................................................................... 8
B. Les modèles de réactions sociales ............................................................................................................................. 9
1. Le modèle pénal classique ......................................................................................................................................... 9
2. Le modèle criminologique ....................................................................................................................................... 10
C. Le processus de réaction sociale .............................................................................................................................. 11
Section II. LE DROIT PÉNAL .................................................................................................................................... 12
Paragraphe I. L’ÉVOLUTION DU DROIT PÉNAL ................................................................................................... 13
A. La vengeance privée ................................................................................................................................................ 15
B. La période théologico-politique fondée sur la vengeance divine et publique .......................................................... 16
C. La période humanitaire : siècle de lumière .............................................................................................................. 17
D. La période pénitentiaire ........................................................................................................................................... 19
Paragraphe II. LES CARACTÉRISTIQUES DU DROIT PÉNAL ............................................................................. 22
A. L’ENVIRONNEMENT ET CONTENU DU DROIT PÉNAL ............................................................................... 23
1. L’ENVIRONNEMENT DU DROIT PENAL .......................................................................................................... 23
a. Le rapport entre le droit pénal et la politique ........................................................................................................... 23
b. Le droit pénal et les disciplines philosophiques ....................................................................................................... 25
c. Le droit pénal et les sciences criminelles ................................................................................................................. 27
d. Le droit pénal et les autres disciplines juridiques ..................................................................................................... 28
2. LE CONTENU DU DROIT PENAL ....................................................................................................................... 29
a. Diversité du droit pénal ............................................................................................................................................ 29
b. L’unité du droit pénal ............................................................................................................................................... 34
B. LA NATURE DU DROIT PÉNAL ......................................................................................................................... 34
1. DROIT SANCTIONNATEUR ................................................................................................................................ 34
2. DROIT MIXTE ........................................................................................................................................................ 35
3. DROIT AUTONOME .............................................................................................................................................. 37
C. L’IMPORTANCE DU DROIT PÉNAL .................................................................................................................. 37
D. LA DÉFINITION DU DROIT PÉNAL .................................................................................................................. 39
PREMIERE PARTIE : L’INFRACTION ................................................................................................................... 42
Titre Premier : LA SOURCE DE L’INFRACTION : La norme pénale ..................................................................... 42
Chapitre 1. L’EXISTENCE DE LA NORME PENALE ............................................................................................. 43
Section 1. INVENTAIRE DES SOURCES DE L’INFRACTION .............................................................................. 43
Sous-section 1. LES NORMES DU DROIT PENAL COMMUN ............................................................................... 43
Paragraphe 1. Le Décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal ................................................................................. 43
C. Analyse de l’article 76 de la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire Militaire ................... 75
1. « Les juridictions militaires » ................................................................................................................................... 76
2. « sont compétentes pour interpréter (…) et pour en apprécier la légalité» .............................................................. 76
3. « des actes administratifs réglementaires ou individuels »....................................................................................... 77
4. « lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès » ........................................................................................ 77
Section 2. LE CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITÉ DE LA NORME PÉNALE ........................................... 78
Paragraphe 1. L’ORGANE DU CONTROLE ............................................................................................................. 78
A. Les normes légales soumises au contrôle ................................................................................................................ 79
B. Les autres normes soumises au contrôle .................................................................................................................. 80
Paragraphe 2. LES TYPES DE CONTROLE .............................................................................................................. 80
A. Le contrôle par voie d’action : les limitations du contrôle de la Cour..................................................................... 80
1. L’initiative pour déférer en inconstitutionnalité par voie d’action ........................................................................... 81
2. Délais fixés ............................................................................................................................................................... 82
B. Le contrôle de constitutionnalité par voie d’exception ............................................................................................ 82
Section 3. LE CONTROLE DE CONVENTIONALITÉ DE LA NORME PÉNALE ................................................. 84
Paragraphe 1. LE CONTROLE INTERNE .................................................................................................................. 84
Paragraphe 2. LE CONTROLE EXTERNE DE LA NORME PÉNALE .................................................................... 87
A. Le contrôle de conventionalité dans le cadre du Droit de l’Union Africaine .......................................................... 88
B. Le contrôle de conventionalité dans le cadre du Droit de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit
des Affaires .................................................................................................................................................................. 89
Chapitre III. L’APPLICATION DE LA NORME PENALE ....................................................................................... 92
Section 1. L’INTERPRETATION DE LA NORME PENALE ................................................................................... 92
Paragraphe 1. Les sources d’interprétation .................................................................................................................. 92
A. Interprétation authentique ....................................................................................................................................... 92
1. Interprétation authentique contextuelle .................................................................................................................... 93
2. Interprétation authentique postérieure ...................................................................................................................... 93
B. Interprétation judiciaire ........................................................................................................................................... 93
C. Interprétation doctrinale .......................................................................................................................................... 93
Paragraphe 2. Les méthodes d’interprétation ............................................................................................................... 94
A. L’interprétation littérale .......................................................................................................................................... 94
B. L’interprétation téléologique ................................................................................................................................... 95
1. Les principes ............................................................................................................................................................ 95
a. La norme pénale doit être appliquée à tous les cas rentrant dans ses termes ............................................................ 95
b. La norme pénale ne peut être appliquée qu’aux seuls cas rentrant dans ses termes ................................................. 95
2. Les techniques d’interprétation téléologique ........................................................................................................... 96
a. L’étude grammaticale ............................................................................................................................................... 96
b. La recherche de la ratio legis.................................................................................................................................... 96
c. La consultation des travaux préparatoires ................................................................................................................ 96
d. La prise en compte de l’évolution historique ou interprétation évolutive ................................................................ 96
e. La prise en compte du contexte général du texte : Argument a rubrica ................................................................... 97
f. Le recours au droit comparé ..................................................................................................................................... 97
g. Les données historiques, politiques et sociales ........................................................................................................ 97
C. L’analogie ................................................................................................................................................................ 98
1. Analogie légale ou intra-legem ................................................................................................................................ 98
2. Analogie juridique ou extra-legem ........................................................................................................................... 98
Paragraphe 3. In dubio pro reo ..................................................................................................................................... 99