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Croissance

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ère

Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

Chapitre1 LA CROISSANCE EN ECONOMIE

La croissance économique est, à l'échelle historique, quelque chose de très récent : longtemps, les
sociétés ont été confrontées à des changements si lents, si peu perceptibles que les contemporains n'en
avaient pas ou peu conscience. Il n'en est plus ainsi : depuis près de deux siècles, dans les sociétés
occidentales, le rythme annuel moyen d'augmentation des quantités produites est de l'ordre de 1,5 %, ce
qui correspond à une multiplication par cinq en un siècle. Comment expliquer pareil changement ?

Le fait est que les économistes ont eu du mal à fournir une explication : les classiques (économistes
antérieurs à Marx), parce qu'ils pensaient que le mouvement n'était pas durable et qu'il déboucherait sur
un " état stationnaire " ; Marx, parce qu'il ne croyait pas que le capitalisme puisse survivre à ses
contradictions ; Keynes et Schumpeter, parce qu'ils craignaient que les tendances dépressives du
capitalisme finissent par prendre le dessus, faute de coordination pour le premier, par déclin de l'esprit
d'entreprise pour le second. Il est vrai que les grandes crises (celles de 1873 et de 1930) et les guerres ont
rendu le mouvement long de croissance économique chaotique et incertain. Aussi, n'est-il pas étonnant
que les économistes se soient penchés sérieusement sur l'analyse du phénomène de croissance
économique assez tardivement, dans la seconde moitié de ce siècle.

1. FONDEMENTS CONCEPTUELS :

 Croissance

Augmentation des quantités de marchandises (biens ou services) produites et vendues au cours d'un
intervalle de temps (en général l'année), se traduisant par une augmentation des revenus distribuables.
Lorsqu'il s'agit de mesurer l'augmentation d'une autre grandeur que celle de la production, on fait
toujours suivre le terme croissance d'un qualificatif précisant quelle est la grandeur mesurée (ex. :
croissance démographique).

Encadré 1 :

La croissance

La croissance économique ne doit pas être confondue avec le développement, notion qui s'intéresse aux
conséquences de l'activité économique sur la vie des hommes. La croissance n'implique pas forcément
une amélioration du bien-être, si l'activité économique sur laquelle elle se fonde privilégie des
marchandises qui dégradent la qualité de vie d'une partie de la population (l'exemple classique étant
celui de la production d'armes). La croissance, lorsqu'elle est génératrice de pollutions, de déchets ou
qu'elle gâche des ressources non renouvelables (dégradation des sols, épuisement de ressources

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minérales...), peut appauvrir tout ou partie de l'humanité en même temps qu'elle enrichit certains
(parfois les mêmes, d'ailleurs). C'est pourquoi certains ont lancé l'idée d'une décroissance.

Les économistes ont tellement marqué ce terme de leur empreinte qu'ils n'éprouvent même plus le
besoin de préciser " croissance... de quoi ? ". Car il s'agit pour eux de la croissance des quantités
produites de biens et de services, ou, plus brièvement, de la croissance économique. Tant qu'il s'agit de
produits qui ne changent pas d'une année sur l'autre, la mesure de la croissance est facile : tonnes
d'acier ou quintaux de blé, il est aisé de voir s'il y a ou non augmentation des quantités produites, donc
croissance. Mais à partir du moment où les produits changent - des aciers spéciaux au vanadium se
substituent à l'acier de base, le réfrigérateur avec congélateur se substitue au réfrigérateur sans
congélateur, etc. -, il n'en est plus de même. Il faut alors, pour additionner des choux et des carottes,
recourir aux prix pratiqués. Et si ces prix ont entre-temps augmenté, il faut faire la distinction entre ce
qui est la conséquence d'une amélioration de qualité, qui alimente la croissance, puisque les acheteurs
disposent de meilleurs produits, et ce qui relève d'un simple coup de pouce sur les étiquettes.

Une telle tâche est souvent impossible dans une économie où les services prennent une place
croissante : si le journaliste pigiste se fait payer davantage, est-ce parce que son papier est meilleur, plus
approfondi, mieux écrit, ou est-ce parce qu'il a majoré ses tarifs ? Et le médecin qui augmente sa
consultation à 20 euros, est-ce parce qu'il soigne mieux, consacre plus de temps à chacun de ses patients
ou est-ce pour arrondir ses fins de mois ? En d'autres termes, dans l'augmentation des ventes constatée
d'une année sur l'autre, qu'est-ce qui relève de l'inflation (qu'il faut retirer) et qu'est-ce qui relève du
reste, appelé " croissance en volume ", qui mesure les augmentations de quantité et de qualité ?

 Taux de croissance

Il mesure le rythme d'augmentation de l'activité : on agrège alors l'ensemble des productions (en termes
de valeur ajoutée) de toutes les entreprises et de toutes les administrations, et on mesure la variation
relative (en pourcentage).

 Croissance réelle et nominale

La mesure de la croissance peut être effectuée en valeur (dans ce cas, on s'appuie sur les prix de vente
observés, ce qui revient à incorporer dans la croissance la hausse éventuelle des prix des produits
agrégés), ou en volume (dans ce cas, on calcule un indice d'évolution des prix unitaires, et on défalque
de la hausse mesurée celle qui est due aux variations de prix). Dans le premier cas, la croissance est dite
« nominale », dans le second « réelle ». Lorsqu'on ne précise pas la nature du taux de croissance
mesurée, il s'agit habituellement du taux de croissance réelle.

 Croissance intensive et extensive

On parle de croissance intensive lorsque l'activité progresse plus vite que les éléments, notamment la
quantité de travail, qui lui ont donné naissance. Dans le cas contraire, ou lorsqu'on constate une stricte
proportionnalité entre activité économique et quantité de travail utilisé, on parle de croissance
extensive.

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 Croissance potentielle

Les économistes adorent ce genre de concept, faussement simple et délicieusement alambiqué.


Imaginons que je sois un fan de vélo : tous les dimanches, j'ai l'habitude de faire le même circuit et je sais
qu'il me faut 58 minutes en temps normal, 56 minutes en forçant un peu, pour le parcourir. Mais
aujourd'hui, j'ai mis une heure et quart : ma croissance potentielle (en fait, ici, ma vitesse potentielle) n'a
pas été atteinte, à la fois parce que je n'étais pas en forme (cause endogène) et parce qu'il y avait un
vent contraire (cause exogène).

La croissance potentielle, c'est donc celle qu'un pays devrait normalement obtenir sans surchauffe, c'est-
à-dire sans provoquer de hausse des prix, grâce à ses potentialités : la progression et la qualification de
sa population active, ses investissements, ses infrastructures, etc. S'il n'atteint pas ce rythme, ou s'il
l'atteint au prix d'une inflation croissante, c'est que des obstacles s'opposent à cette croissance
potentielle.

Première difficulté : comment chiffrer cette croissance " normale ", celle que l'on pourrait atteindre s'il
n'y avait pas les obstacles en question ? Habituellement, on additionne la croissance de la population
active (la quantité de travail en plus) et les gains de productivité envisageables (l'efficacité du travail).
Mais comme on connaît mal cette dernière grandeur, on se borne en général à mesurer ce qu'il en a été
dans le passé, par exemple sur les dix dernières années, et à supposer que ce qui a été sera. C'est un des
péchés mignons des économistes, qui ont toujours tendance à penser que demain sera comme hier (ce
qui est évidemment faux, mais cela leur permet d'extrapoler).

Deuxième difficulté : identifier les obstacles à la réalisation de cette croissance potentielle (tous les
nouveaux arrivés sur le marché du travail ne trouvent pas un emploi). Car, évidemment, le principal
intérêt de la notion de croissance potentielle est de savoir pourquoi j'ai pédalé moins vite que
d'habitude. Là, c'est la bouteille à l'encre : la flexibilité du marché du travail, explique l'OCDE ; les impôts,
affirment des hommes politiques libéraux, comme Alain Madelin et Jacques Chirac ; la mondialisation,
assure Attac (Association pour une taxation des transactions financières et pour l'aide aux citoyens) ; les
anticipations des employeurs, disent les keynésiens...

 Développement

Les économistes aiment se faire plaisir : la plupart assimilent croissance et développement. Plus, c'est
mieux. Mais il n'y a que les enfants pour croire que la force de leur père se mesure à son tour de taille,
ou les généraux de certaines armées pour croire que la vaillance se mesure au nombre des médailles.
Croissance et développement sont comme le passif et l'actif d'un bilan : le passif mesure les ressources
disponibles, l'actif ce qu'on en a fait. De même, la croissance mesure - plus ou moins bien - ce que l'on a
produit ; le développement s'intéresse à l'usage qui en est fait et se pose la question de savoir si ces
ressources supplémentaires, mais aussi les apports non quantifiables, comme les réformes politiques ou
sociales, ont amélioré ou non la vie de l'ensemble de la société.

Le développement ne s'intéresse pas aux grandeurs économiques, mais à la capacité des gens à mieux
maîtriser leur destin, à mieux utiliser leurs potentialités, à mieux faire face aux malheurs de l'existence et

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aux défis de la nature. Bref, à vivre en hommes, pas seulement en consommateurs. La croissance
n'implique pas le développement : si les ressources nouvelles se payent d'une mise à l'écart de certains,
si elles sont accaparées par d'autres sans que l'ensemble de la société en bénéficie, croissance et
développement divergent.

 Développement durable

Le concept de développement durable est apparu à la fin des années 80, lorsqu'il a fallu traduire le terme
anglais sustainable development, utilisé en 1987 dans le rapport de la Commission mondiale sur
l'environnement et le développement, dit Rapport Bruntland. A vrai dire, Ignacy Sachs, un des premiers
économistes à s'intéresser aux questions de développement, utilisait depuis longtemps le terme
d'écodéveloppement, qui n'a pas eu le même écho médiatique. Soutenable, durable ou écologique, dans
tous les cas, c'était la même idée qui était mise en avant : le modèle de développement des sociétés
industrielles n'est pas généralisable à l'ensemble de la planète. Il n'est même pas assuré d'un quelconque
avenir à long terme dans les sociétés riches, parce qu'il ne se soucie ni de ce qu'il prélève dans les
ressources non renouvelables ni de ce qu'il rejette comme déchets polluants.

Même si, sous la plume de certains, le fossé croissant entre le Nord et le Sud de la planète jette un doute
sur la capacité des nations riches à creuser indéfiniment l'écart sans risquer, un jour ou l'autre, une
déflagration sociale, le développement durable vise d'abord à rompre avec l'économie de prédation des
sociétés riches. Léguer une planète vivable aux générations futures concerne ces sociétés au premier
chef, puisqu'elles sont à l'origine des trois quarts des prélèvements et des rejets qui posent problème.
Mais les sociétés en question n'en sont pas encore totalement convaincues, comme le montrent la
prudence, les réticences voire les refus lorsqu'il faut prendre des engagements précis pour réduire le
rythme de certains rejets (les gaz à effet de serre, notamment). Les riches n'aiment pas se serrer la
ceinture ; ils préfèrent parier : " Les scientifiques trouveront bien comment nous sortir de là, à quoi bon
s'en faire. "

 Développement humain

Ce terme ne devrait pas exister. Il s'agit d'un pléonasme, puisque le développement désigne, par
définition, la capacité d'une société à utiliser les ressources - économiques ou non - dont elle dispose
pour permettre à l'ensemble des hommes qui la constituent de vivre plus dignement. Mais, dans trop de
pays, la croissance ne sert pas à cela, ou peu : elle enrichit les mieux placés, tandis que les autres
galèrent. Ou, pire, elle sert à préparer la guerre et un jour à la faire. D'où l'idée du Programme des
Nations unies pour le développement (Pnud) d'élaborer un indice du développement humain, mixant,
pour un pays donné, croissance économique, espérance de vie et taux de scolarisation des jeunes : l'IDH
a fait un malheur. Amartya Sen, prix Nobel 1998, y a ajouté l'idée que le régime politique joue un rôle
très important : la démocratie dans un pays, en permettant aux pauvres de faire entendre leur voix,
contraint les dirigeants à s'occuper de ces derniers davantage que lorsque règne l'autocratie, ce qui, à
croissance donnée, favorise le développement.

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 Productivité

C'est la potion magique qui donne aux travailleurs une force surhumaine : chaque heure de travail
utilisée en France produit, en moyenne, sept fois plus de richesses qu'il y a un siècle : il faut environ
cinquante fois moins de temps pour produire le même kilo de blé. Ce prodigieux accroissement de
l'efficacité trouve sa source dans plusieurs composantes. D'abord, le facteur capital, comme disent les
économistes orthodoxes : les machines et l'utilisation de certains inputs, comme l'énergie ou les produits
phytosanitaires. Ensuite, l'organisation du travail : spécialisation, mais aussi analyse des temps et des
informations pour réduire les déperditions. Enfin, les hommes eux-mêmes, grâce à leur formation et à
leur intelligence.

Si l'on sait à peu près mesurer le résultat de tout cela, c'est-à-dire la production réalisée par heure de
travail, appelée productivité apparente ou productivité horaire du travail, on ne sait pas comment
imputer ce résultat à chacun des facteurs susceptibles d'en être à l'origine. On en est donc réduit à
mesurer les accroissements de travail et de capital, et à mesurer la production supplémentaire qui ne
provient ni des uns ni des autres : c'est la productivité globale des facteurs. Certains la qualifient de
mesure du progrès, d'autres de mesure de notre ignorance. N'est-ce pas la même chose, au fond ?

2. SURVOL HISTORIQUE :

Historiquement, le processus de croissance économique est lié à la révolution industrielle, et, dans ce
cadre, à l'accès et l'exploitation de nouvelles ressources minérales et énergétiques, ainsi qu'au progrès
technique. Elle transforme la vie des populations en faisant reculer la misère matérielle: les définitions
contemporaines de la croissance économique incluent l'idée d'une augmentation du bien-être
économique.

Notons enfin que certaines conséquences de la croissance économique (pollution et atteinte à


l'environnement, accentuation des inégalités sociales ...) sont souvent considérées comme des effets
pervers qui obligent à distinguer croissance et progrès.

Les théories de la croissance économique se sont concentrées sur les trois facteurs de production
essentiels et leurs interactions : la croissance démographique, la formation du capital et le progrès
technologique.

L'analyse de la croissance économique et de ses déterminants est historiquement associée à l'œuvre des
économistes classiques, qui analysent l'effet de la division (technique, sociale et internationale) des
processus productifs sur la capacité à créer des richesses, et s'intéressent aux conditions de pérennité du
processus d'accumulation du capital et de croissance économique en termes de répartition de la richesse
ainsi créée sous forme des revenus des différentes classes contribuant ou non au processus productif.

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3. SOUBASSEMENTS THEORIQUES :

Les économistes classiques, qui étaient pourtant les témoins des bouleversements d'une révolution
industrielle en train de prendre forme, pensaient plutôt que la croissance ne durerait qu'un temps ; très
vite, le nombre des hommes (pour Malthus), la répartition des revenus (pour Ricardo) ou l'épuisement
du changement technique (pour Stuart Mill) l'empêcheraient de se poursuivre ; l'état stationnaire était
donc inéluctable. Même Marshall, qui avait pourtant mis le doigt sur l'existence des rendements
croissants pour certaines entreprises, n'imaginait pas une société en croissance continue. Finalement,
seul Marx, qui faisait de l'accumulation continue " la loi et les prophètes " du capitalisme, avait vu juste.
La croissance est peut-être une abstraction, mais c'est une abstraction dans laquelle le système tout
entier puise son dynamisme. Même s'il va dans le mur à force d'ignorer les problèmes
(environnementaux ou sociaux) que cette course incessante engendre.

3.1. Modèles ordinaires

 La vision classico-libérale :
Principes fondateurs : La demande de fonds prêtable, taux d’intérêt réel, l’importance de
l’épargne, l’Etat doit protéger et garantir les conditions de la concurrence pure et parfaite (Voir
Chapitre : Investissement en économie)
 C’est l’épargne ex-ante qui finance l’investissement, moteur de la croissance

 Le modèle keynésien de la croissance


Principes fondateurs : Principe de la demande effective, principe de double steps, l’effet
multiplicateur, effets d’entrainement, préférence pour l’épargne, préférence pour la liquidité,
taux d’intérêt nominal, le rôle important que peut jouer l’Etat à travers les composantes de la
demande agrégée. (Voir Chapitre : Investissement en économie)
 C’est l’épargne ex-post qui finance l’investissement, moteur de la croissance

 Le modèle de Domar

Le principal moteur de la croissance est l’investissement qui a deux effets :

 Un effet de capacité (les capacités productive augmentent)


 Un effet de revenu (l’investissement engendre une amélioration directe de revenu pour les
fournisseurs du capital et pour les salariés)

L’effet multiplicateur de l’investissement sur le revenu dans le modèle de Domar joue un rôle
déterminant.

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-- Domar distingue deux cas :

1. Le cas ou l’effet de revenu importe sur l’effet de capacité. Dans ce cas la demande progresse
plus que l’offre, l’inflation serait la résultante.

2. Le cas ou l’effet de capacité importe sur l’effet de revenu. On aura une surproduction
génératrice de chômage et baisse des prix. C’est le cas le plus probable selon Domar. Une
situation qui devrait limiter l’effet multiplicateur.

L’Etat a un rôle à jouer pour favoriser la compatibilité entre les deux effets.

 Le modèle de Harrod

Les hypothèses du modèle sont :

- L’investissement est en fonction de progression des débouchés


- L’épargne est en fonction du revenu
- Le coefficient du capital v est constant sur plusieurs périodes (v = K/Y) : c’est la part par laquelle
le facteur capital K contribue dans la production Y, donc v = K /Y = K1/Y1 = ΔK/ΔY

 Le modèle de Harrod vise à déterminer le taux de croissance pour lequel le plan des
épargnants et des investisseurs sont en adéquation (égalité entre S et I).

Ce taux serait donc :

V = ΔK/ΔY

Donc, ΔY = ΔK/v

Si les plan sont en adéquation on aura ΔK = S = sY

ΔY = sY/ v

Et donc, ΔY/Y = s/v

Selon Harrod est le ΔY/Y et donc s/v est le taux de croissance assurant l’adéquation entre
l’investissement et l’épargne. C’est ce qu’il appelle le taux de croissance nécessaire ou granite (c’est le
taux nécessaire à l’équilibre sur le marché des biens et services).

--Deux situations à mettre en lumière :

1. Le cas où la croissance effective importe sur la croissance nécessaire : cela est bien la résultante
d’une sous estimation de la progression des débouchés ; ce qui incite les acteurs à réviser leurs
plans d’investissement à la hausse;

2. Le cas où la croissance nécessaire importe sur la croissance effective : cela correspond à une sur
estimation de la progression des débouchés qui pousse les investisseurs à réviser leurs plans

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d’investissements à la baisse. C’est le cas le plus probable selon Harrod ; ce qui favoriserait
l’intervention de l’Etat pour nourrir l’optimisme des agents à travers des politiques de relance.

Donc l’Etat à un rôle à jouer pour assurer l’adéquation, en corrigeant de façon curative, voire préventive
les anticipations des agents, entre la croissance effective et la croissance garantie.

Mais la limite dans l’analyse de Harrod est que ce taux de croissance garantie ne prend pas en compte
l’accroissement de la population active. Un taux de croissance garantie en adéquation avec le taux de
croissance effectif peut ne pas absorber toute la population active, ce qui rendrait le chômage inévitable
même en situation d’équilibre sur le marché des biens et service, cela peut consister à un équilibre de
sous-emplois.

 Le modèle de Solow

Les Hypothèses

L’épargne est en fonction du revenu

Le v n’est pas constant sur plusieurs périodes

Les rendements d’échelle sont constants tandis que les rendements factoriels sont décroisant

Le facteur travail est considéré constatant car la population active est une donnée structurelle

Le premier constat

L’investissement est financé par l’épargne d’où s = i

La consommation par travailleur est croissante jusqu’à un niveau déterminé.

Donc toute augmentation de l’épargne engendre une amélioration du capital qui alimente
l’investissement, et par voie de conséquence la production globale Y (Y = f(K))

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Mais on se heurte à une difficulté considérable : le capital serait victime d’une dépréciation
(amortissement) de valeur.

Le deuxième constat

Donc la hausse du capital a un double effet : un effet positif sur la production, et cela passe par
l’amélioration de l’investissement, et un effet négatif sur le stock du capital, et cela passe par
l’amortissement. C’est une contrainte à gérer.

Tant que le premier effet importe sur le second, la croissance est confirmée, mais cela ne peut perdurer
ce qui rend l’état stationnaire inévitable (égalité entre les deux effets : K*), au delà de ce niveau
stationnaire du capital, le taux de croissance est négatif

Force est de rappeler que deux éléments accélèrent l’état stationnaire : l’amortissement du capital, et
les rendements factoriels décroissant (à partir du K1).

Toute la préoccupation est donc de chercher la façon dont on peut retarder ce niveau stationnaire.

Sur le long terme la croissance démographique pourrait être une réponse mais qui ne serait défendable
qu’au moment où on augmente le stock capital, et ce, pour deux raisons ; fournir du capital aux
nouveaux travailleurs, et remplacer le capital usé.

Mais cela ne peut garantir l’amélioration du niveau de vie. L’amélioration du revenu national ne dit rien
sur la qualité de vie. En effet, ce qui importe est l’allocation des revenus. Ce qui améliore le niveau de vie
est la qualité de l’offre, et le revenu n’est qu’un moyen pour y avoir accès.

Donc améliorer le niveau de vie passe par l’amélioration de l’offre, d’où le progrès technique qui fait
référence à tout ce qui peut améliorer la production sans agir quantitativement sur ses facteurs.

Ce facteur résiduel (progrès technique) est exogène au modèle de Solow, c'est-à-dire que l’auteur ne
cherche pas ses origines, il se contente d’expliquer ses effets sur la croissance.

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Encadré 2 :

Solow et la croissance économique

Qu'est-ce qui explique la croissance économique d'un pays sur le long terme ? Depuis Adam Smith et sa
Richesse des nations, les économistes en discutent abondamment. Aujourd'hui, deux analyses se
disputent le terrain. La plus ancienne a été élaborée initialement par Robert Solow, économiste
américain d'orientation néokeynésienne, qui a obtenu pour cela le Nobel d'économie en 1987. On la
qualifie souvent d'analyse néoclassique, car elle a été reprise par ce courant intellectuel. Elle a été
aménagée (ou enrichie, comme on dit souvent) dans les années 80 pour tenir compte des critiques dont
elle était l'objet.

L'analyse de Solow

D'où vient la croissance par tête ? Du montant de capital technique investi, répond dès 1956 Robert
Solow : machines, équipements, infrastructures, logiciels, etc. A partir du moment où l'investissement
par tête dépasse le montant de la dépréciation du capital par tête existant, chaque travailleur dispose
d'un équipement plus important, ou plus performant, et peut donc produire davantage. Mais, hélas !,
ajoutait-il, il faut se rendre à l'évidence : quand on augmente le capital par tête, la production
augmente, certes, mais pas de façon proportionnelle. Les rendements sont décroissants, tout
simplement parce que ceux qui se servent des machines n'ont que deux bras et une tête : ajouter un
deuxième ordinateur à celui que j'utilise déjà ne me permettra pas de multiplier par deux mon apport
productif. Si bien que, à force d'augmenter le capital par tête, va venir un moment où la production par
tête augmentera moins que cela ne coûte, car il faut bien rémunérer les détenteurs du capital. La
croissance par tête cesse alors : c'est ce que Solow appelle l'état régulier.

Une part d’économistes confirme qu’il ne s'agit pas de l'état stationnaire prédit par les classiques -
David Ricardo et John Stuart Mill - plus d'un siècle auparavant. Dans l'état stationnaire, en effet, plus
rien ne bouge : la société est allée jusqu'au bout de l'évolution envisageable. Au contraire, l'état régulier
dépend du coût relatif du capital. Si ce dernier diminue - par exemple parce que le coût relatif du travail
augmente et que, selon une problématique très néoclassique, cela incite les entreprises à substituer du
capital au travail -, alors l'investissement par tête va augmenter à nouveau... jusqu'à ce qu'un nouvel
état régulier soit atteint, parce que le coût du capital additionnel l'emporte sur ce qu'il permet de
produire en plus.

Le modèle de Solow est " élégant ", comme on dit. Certes, il repose sur des hypothèses de type
néoclassique que l'on peut discuter : toute l'épargne est investie, les rendements sont décroissants, on
peut substituer du capital au travail dans la façon de produire et cela dépend du coût relatif de l'un et
de l'autre, la concurrence empêche l'existence de rentes de monopole et impose des prix que les
producteurs ne peuvent manipuler. Mais il rend compte de deux faits importants. D'abord, le niveau de
production d'un pays est déterminé par l'investissement par tête qui y est effectué : tant que le niveau
d'état régulier n'est pas atteint, un investissement supplémentaire est générateur de croissance
économique et, par conséquent, entre deux pays, celui qui investit moins connaît aussi une croissance
économique moindre. Ensuite, il explique bien les phénomènes de rattrapage des pays qui ont
commencé leur croissance économique plus tardivement que les autres.

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Toutefois, sur un point au moins, le modèle de Solow est très éloigné de la réalité : il aboutit à la
conclusion que la croissance économique par tête diminue peu à peu, puis finit par cesser. Or, ce n'est
pas ce que l'on observe : même si c'est à un rythme ralenti, la croissance économique demeure un fait
majeur de toutes les économies développées, et l'existence d'un état régulier paraît plus que
problématique.

Le progrès technique, un facteur tombé du ciel

Pour se tirer d'affaire, Solow a donc dû imaginer l'intervention d'un troisième facteur, en plus du travail
et du capital, pour expliquer la croissance à long terme : le progrès technique. Un facteur un peu
particulier, puisqu'il accroît l'efficacité productive des deux autres, un peu comme le rhum accroît
l'arôme du gâteau. Mais un rhum particulier, qui tombe du ciel. Au moins, on sait d'où viennent le
travail et le capital : dans l'analyse néoclassique, apporteurs de travail et apporteurs de capital
accroissent ou diminuent leurs apports en regardant si cela vaut ou non la peine, c'est-à-dire si la
rémunération qui en résultera est ou non supérieure à ce que coûte l'apport, en coût ou en
" désutilité ".

Mais pour le progrès technique, rien de tel : c'est un facteur qui tombe du ciel, puisque, bien qu'il
permette de produire plus, il n'y a pas besoin de le rémunérer, il n'appartient à personne et l'on ne sait
au juste ce qui explique qu'il soit plus ou moins intense. Grâce à lui, la citrouille se transforme en
carrosse, sans que ce soit réversible lorsque sonnent les douze coups de minuit. D'où le nom de
" facteur exogène " donné à ce progrès technique miraculeux, qui engendre des externalités, c'est-à-
dire des effets positifs (ici en termes de production, donc de revenu), sans que personne n'ait à
débourser quoi que ce soit.

Dans un premier temps, les économistes se bornèrent à tenter d'enrichir le modèle de Solow, qui rend
si bien compte des différences de taux de croissance d'un pays à l'autre, notamment en y intégrant la
notion d'investissement en capital humain, sous l'impulsion de Gregory Mankiw, David Romer et David
Weil, assimilée à un investissement tout court. Si une formation - ne serait-ce qu'apprendre à lire et à
compter - permet de transformer du travail non qualifié en travail plus qualifié, donc d'utiliser des
équipements plus complexes et d'en tirer meilleur parti, le niveau technologique du pays tout entier
augmente et, du même coup, son état régulier et son rythme de croissance. Certes, ce modèle
complexifié continue de devoir faire appel au progrès technique tombé du ciel pour expliquer que la
croissance ne ralentit pas au fur et à mesure que l'on approche de ce nouvel état régulier.

Encadré 3:

Rendements d’échelle et rendements factoriels

La théorie économique nous permet d’y voir plus clair en distinguant rendements factoriels et d’échelle.
- Selon la loi des rendements factoriels décroissants, les productivités moyenne et marginale des
facteurs de production sont décroissantes. Mais cela ne veut pas dire qu’au cours du temps les
productivités marginales diminuent. La loi des rendements décroissants est une loi ceteris paribus (une
locution latine se traduisant par : « toutes choses étant égales par ailleurs ») : la productivité d’un

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facteur diminue lorsque sa quantité utilisée augmente, les quantités utilisées des autres facteurs étant
constantes. Au cours du temps cette loi n’empêche pas la productivité d’un facteur de croître. Par
exemple, la théorie impose que la productivité moyenne du travail (Y/L) décroît quand le travail
augmente, si les quantités utilisées des deux autres facteurs (capital et connaissances) restent
inchangées. Or les faits nous disent que le PIB par tête (Y/L) qui est la mesure de la productivité du
travail dans l'économie croît au cours du temps. Ces deux propositions ne sont pas contradictoires,
puisqu'au cours du temps, les quantités des autres facteurs de production ne restent pas inchangées.

- Selon la théorie, les rendements d'échelle peuvent être décroissants (dans la théorie de l'équilibre
général en concurrence pure et parfaite) constants (dans la théorie marshallienne et dans la théorie de
la répartition du revenu) croissants (dans la théorie du monopole). Si on augmente dans les mêmes
proportions "tous" les facteurs de production, comment varie la quantité produite ? Il y a en principe
trois possibilités :
La question de savoir ce qui se passerait si on augmentait "tous" les facteurs est très abstraite, et la
réponse dépend du problème qu'on analyse et de la façon dont on le pose.
Si le problème est par exemple de doubler les facteurs travail et capital d'une entreprise, d'ajouter à
coté d'une entreprise existante, une nouvelle entreprise parfaitement identique, avec les mêmes
quantités de facteurs, alors on est logiquement amené à conclure que l'on double la production, que les
rendements d'échelle sont constants.

Mais si le problème posé est de doubler la taille d'une économie : territoire, richesses et hommes, de
passer par exemple d'un pays France à un pays Europe, alors on est amené à conclure que les
rendements d'échelle sont croissants, car certaines économies d'échelle sont réalisées, par la
spécialisation, par la mise en commun de certain biens publics, des travaux de recherche (les idées
découvertes peuvent être partagées). Enfin, si l’on pose le problème de doubler la taille d'une usine
sans doubler les réseaux routiers d'accès, alors on est amené à conclure que les rendements d'échelle
sont décroissants, puisqu’il y a des goulets d'étranglements. On voit que tout dépend de ce que l'on
entend par "tous" les facteurs, et de l'existence de facteurs cachés, qu'admet ou non la théorie c’est à
dire la façon dont on pose le problème.

Sur le problème de la croissance, les hypothèses différentes sur les rendements d'échelle dépendent de
ce que la théorie entend par "tous" les facteurs.

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Pr : A.ADNANE
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

3.2. Modèles de la croissance endogène

Cela regroupe les théories attribuant la source de la croissance aux efforts de formation et de recherche
effectués dans un pays.

Dans la mesure où les effets de ces efforts sont collectifs, il est logique que la charge que représente le
financement de ces « investissements » soit également collective, sauf si un mécanisme de droits de
propriété (brevet par exemple) permet à celui qui a effectué l'investissement de recherche d'en récupérer
le montant grâce à une situation de monopole qui lui permet de faire payer plus cher le produit nouveau.
La théorie de la croissance endogène est ainsi appelée parce qu'elle fait reposer la croissance économique
non pas sur un « progrès technique » qui tomberait du ciel, mais sur des investissements financés par le
système lui-même. Elle explique en outre que la croissance est cumulative, car elle dépend du stock de
connaissances accumulé : si de nombreux chercheurs ont permis à un pays d'avoir un rythme de croissance
plus élevé, les chercheurs qui vont succéder à cette première vague vont pouvoir trouver davantage de
choses (« nous voyons loin parce que nous sommes assis sur les épaules de géants »), donc de réaliser un
rythme de croissance plus rapide que les autres pays. Les écarts de croissance sont donc cumulatifs, selon
cette théorie, ceux qui sont « bien partis » pouvant à la fois investir davantage et avec de meilleurs
rendements dans la recherche et la formation.

 Modèle de Paul Romer :

On doit à Paul Romer la formulation initiale de ce qui est devenu la théorie de la croissance endogène. Elle
repose sur l'analyse des conditions économiques qui favorisent le changement technique. Chaque
changement technique provient d'une idée mise en forme et testée. Si, souvent, cette idée germe dans le
cerveau d'un spécialiste, chercheur ou technicien, ce n'est pas forcément le cas (un scénario de roman, par
exemple).

Toutefois, entre l'émergence d'une idée nouvelle et sa mise en œuvre concrète, il peut y avoir un très long
chemin, fait de déboires, d'essais et d'erreurs, d'idées supplémentaires apportées par d'autres, de tests,
etc., chemin qui nécessite habituellement le concours de plusieurs, voire de nombreuses, personnes. Bref,
des coûts de mise au point qui peuvent être élevés. En revanche, une fois ces étapes franchies, si l'idée se
révèle positive, le produit qui en résulte peut être multiplié avec un coût bien moindre : la première fusée,
le premier satellite, le premier moteur Diesel, le premier transistor, le premier disque compact ou le
premier ordinateur personnel ont nécessité des efforts colossaux de la part de ceux qui les ont mis au
point ; mais leur reproduction à l'identique a été beaucoup plus facile.

Donc la R&D est responsable sur les processus d’innovation (grappes technologiques) qui, selon
J.Schumpeter, expliquent la croissance et les cycles long.

Encadré 4 :

Innovation

Terme popularisé par Joseph Schumpeter et désignant la transformation d'une invention ou d'une
découverte en processus aboutissant soit à de nouveaux produits (innovation de produits), soit à de
nouvelles façons de produire (innovations de procédés).

Pr : A.ADNANE 13
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

L'invention consiste en la découverte d'un principe, l'innovation est la traduction de ce principe dans des
produits destinés à la vente ou dans des procédés de production (matériels ou intellectuels). Le passage
de l'invention à l'innovation est le fait de l'entrepreneur, qui prend le risque de mettre sur le marché un
produit pour lequel il ne sait si la demande sera au rendez-vous ou d'utiliser un procédé de production
dont il ne sait s'il sera efficace. La même invention peut donner naissance à de nombreux produits
nouveaux : par exemple, les circuits intégrés ont engendré une nombreuse famille d'objets les plus divers.
C'est ce que Schumpeter appelait des grappes d'innovation, ajoutant que les inventions fondamentales
(on parlerait plutôt de découvertes fondamentales aujourd'hui) qui donnent naissance à de telles grappes
ne sont pas très nombreuses, et que leurs débouchés productifs finissent par s'épuiser progressivement,
donnant naissance aux cycles de longue durée.
Il convient de souligner que l'innovation implique une nouveauté qui ne soit pas seulement de pure
forme, ou marginale : le fait de passer d'un appareil photo à pellicule classique (à base d'argent) à un
appareil photo numérique est une innovation, mais l'intégration d'un zoom plus performant n'en est pas
une. De ce fait, de nombreux produits nouveaux ne sont pas des innovations, mais simplement des
perfectionnements, des changements mineurs ou des renouvellements de produits existants.

Le progrès technique dans ce modèle de Romer ne tombe pas du ciel, il est produit. Et son niveau de
production dépend de la rémunération attendue, sous forme de droits de propriété, donc de rente de
monopole, ce qui implique une concurrence imparfaite. Si, au travail et au capital utilisé pour produire on
ajoute des idées génératrices de changement technique, tout est modifié. Car, contrairement au capital,
dont le rendement est décroissant, ou au travail, dont le rendement n'est constant que si on effectue sans
cesse un investissement humain supplémentaire, les idées ont un rendement croissant : plus on s'appuie
sur un stock d'idées existantes important, plus on aura de nouvelles idées. Et plus la population augmente,
plus cet effet multiplicateur sera important, parce qu'elles donneront de nouvelles idées à davantage de
gens : contrairement aux produits économiques habituels, les idées sont " non rivales ", disent les
économistes ; ce n'est pas parce que d'autres les font leurs que j'en suis privé, c'est plutôt l'inverse qui est
vrai.

Spontanément, le marché tend donc à sous-rémunérer les producteurs d'idées nouvelles, ce qui freine
l'effort de recherche-développement par rapport à ce qu'il pourrait être. La responsabilité de l'Etat est donc
de veiller à une fiscalité compensatrice (moindre taxation des bénéfices issus des produits nouveaux), de ne
pas décourager les innovateurs sous prétexte de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et de
mettre en place des infrastructures (y compris juridiques comme la bonne définition et protection des
droits de propriétés) qui encouragent la recherche-développement et facilitent les externalités de
connaissance. C'est d'ailleurs exactement au nom d'un de ces arguments que la justice fédérale américaine
a abandonné une bonne partie des poursuites contre Microsoft...

Encadré 5 :

Paul Romer, ou la théorie de la croissance endogène

Les idées ont un rendement croissant

Le propre des idées qui provoquent des changements techniques est que, une fois les plâtres essuyés,
elles donnent naissance à des rendements croissants (les exemplaires suivants coûtent nettement moins
cher que le premier) et parfois fortement croissants : recopier un logiciel ne coûte rien. Si bien que, pour
celui (ou ceux, le plus souvent) qui s'est échiné à transformer l'idée en produit concret, le risque existe

Pr : A.ADNANE 14
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

que des petits malins en profitent et que lui ne récupère jamais son investissement initial, alors que les
petits malins s'enrichissent. Heureusement, les droits de propriété intellectuelle limitent ce risque :
brevets ou copyright protègent l'inventeur, qui dispose d'un monopole d'exploitation (limité dans le
temps) sur l'œuvre ou le produit tiré de son idée et de son travail.

D'un point de vue économique, c'est donc l'absence de concurrence qui rend possibles ces produits
nouveaux ou ces techniques nouvelles. A défaut, les idées nouvelles tombent dans le pot commun et
enrichissent l'ensemble de l'humanité, pas forcément leur inventeur. C'est d'ailleurs de cette façon que
s'est constitué l'essentiel des connaissances humaines, qu'il s'agisse de l'écriture, de la comptabilité en
partie double ou de la théorie de la relativité. Et c'est justement lorsqu'on souhaite que les idées
nouvelles bénéficient à tous (dans le jargon économique, on parlera d'externalités positives) qu'il devient
nécessaire d'en faire supporter le coût par la collectivité : ainsi, le financement de la recherche
fondamentale est public, afin que chacun puisse librement accéder à ses résultats et que les bénéfices
externes soient aussi grands que possible. C'est donc un bien collectif(1) : tout le monde paye (par
l'impôt), parce que tout le monde en bénéficie, immédiatement ou à long terme.

Pour Romer, l'affaire est entendue : le changement technique est d'autant plus intense que les
innovateurs en espèrent un profit élevé. L'histoire des techniques a en quelque sorte tendance à
s'accélérer, parce que chaque idée nouvelle apparaît d'autant plus facilement qu'elle s'appuie sur un
stock important d'idées antérieures grâce auxquelles elle fructifie, conformément à la célèbre phrase
d'Isaac Newton : " J'ai vu plus loin parce que j'étais assis sur les épaules de géants "(2). Chaque idée
ouvre le champ à d'autres idées potentielles, selon un cheminement arborescent. Par conséquent, en
l'absence de progrès technique, le modèle de Solow (enrichi par Mankiw) s'applique : en particulier, à
long terme, la croissance ne dépend pas du taux d'investissement. Mais le progrès technique existe, et il
est d'autant plus intense que le nombre de chercheurs est élevé et que le stock de connaissances est
important.

Quant au nombre de chercheurs, il dépend lui-même, on l'a vu, de la capacité du système économique à
leur offrir des rentes de monopole en cas de réussite, grâce à la protection dont eux-mêmes (ou leurs
institutions) jouissent sur l'exploitation de leurs idées. Si bien que, pour Romer, à long terme, le rythme
de croissance ne va pas en déclinant au fur et à mesure que l'on s'approche de l'état régulier, comme le
prétendait Solow. Il dépend du nombre, de la proportion et de la productivité des chercheurs, cà-dire de
la capacité des rendements croissants de la recherche à compenser les rendements décroissants de
l'investissement matériel.

Contrairement aux approches néoclassiques habituelles, Romer reconnaît volontiers que la main invisible
du marché ne suffit pas à assurer une croissance maximale à long terme. L'Etat a un rôle important à
jouer. Curieusement, ce n'est pas par le biais de la dépense publique en faveur de la recherche : Romer
ne croit pas que cela puisse accélérer durablement le progrès technique, contrairement à d'autres
modèles ultérieurs de croissance endogène, celui de Philippe Aghion et Peter Howitt, notamment (3).
C'est plutôt que le marché ne rémunère pas les " externalités de connaissance ", c'est-à-dire le fait que
chaque idée nouvelle accroît la probabilité d'idées nouvelles à venir et que, même s'il existe une rente de
monopole pour celui qui traduit une idée en produit nouveau ou en technique nouvelle, cette rente,
dans nombre de cas, est bien inférieure aux bénéfices sociaux que l'ensemble de la population en retire
(la découverte d'un nouveau vaccin, par exemple).

L'Etat au secours des innovateurs

On comprend que les théories de la croissance endogène aient déstabilisé pas mal de monde. Elles
reposent sur l'idée, déjà proposée par Schumpeter, que la concurrence parfaite est mortifère et que la
dynamique économique a besoin de concurrence imparfaite et d'intervention publique pour veiller au
grain. Et elles postulent que, sur le long terme, ni le taux d'investissement ni l'effort de formation ne
suffisent à assurer une réduction des écarts de développement entre pays (voir encadré). C'est, si l'on

Pr : A.ADNANE 15
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

ose dire, " économiquement incorrect ". Robert Barro (voir " Pour en savoir plus ") vient d'y rajouter un
" politiquement incorrect ", en soutenant, à partir d'une analyse empirique, que, dans les pays en
développement, un peu de démocratie peut améliorer les choses, trop de démocratie les aggraver.

Même si une telle conclusion repose sur des bases bien fragiles - l'examen d'une corrélation éventuelle
entre rythme de croissance et régime politique - et si, au surplus, comme l'a montré le prix Nobel
Amartya Sen, elle s'appuie sur une conception bien restrictive de la croissance, qui méconnaît les
analyses en termes de développement humain, elle révèle ce qui est, au fond, la principale faiblesse de
cette analyse : comme le disait déjà Claude Henri de Saint-Simon au début du XIXe siècle, ce sont les
savants qui font l'essentiel de la richesse d'un pays, l'Etat un peu et le peuple pas du tout. Est-ce si sûr ?

(1) On comprend que le risque d'une privatisation (par dépôt de brevets ou de droits de propriété) des résultats de la
recherche fondamentale (sur le vivant, par exemple) inquiète beaucoup la communauté scientifique : le bien collectif
correspondant disparaîtrait au profit de mécanismes de marché.

(2) La phrase est en fait de Bertrand de Chartres et a été reprise par Newton, à qui elle est souvent attribuée. Quel
qu'en soit l'auteur, cette idée que nous sommes héritiers de ceux qui nous ont précédés fonde la proposition
d'allocation universelle : notre efficacité d'aujourd'hui dépend d'un bien commun dont chacun de nous a hérité en
indivision, le stock de connaissances antérieures accumulé, et qui justifie qu'une partie du revenu issu de l'activité
productive soit redistribuée à chacun des indivisaires.

(3) Modèle exposé notamment dans un livre dont la traduction est parue chez Dunod en 2000, Théorie de la
croissance endogène, au contenu très mathématématisé.

Alternatives économiques, n° 198 (12/2001)


Page 79. Auteur : Denis CLERC.

 Modèle de Robert Lucas

Mais l'investissement éducatif permet en quelque sorte d'" endogénéiser " une partie de ce progrès
technique.

Dans cette problématique, la formation rend l'apport du facteur travail plus efficace, ce qui contribue à
stimuler la croissance économique, sans qu'il soit nécessaire de faire appel autant que dans le modèle de
Solow au progrès technique. Contrairement à l'investissement matériel, qui engendre des rendements
décroissants, l'investissement humain engendre des rendements constants (toute année de formation
supplémentaire augmente l'efficacité du travail dans la même proportion) qui empêchent que la croissance
ralentisse (ou qui permettent à la croissance de moins ralentir) : comme la ligne d'horizon, l'état régulier
est repoussé au fur et à mesure que l'on s'en approche... à condition que le niveau de formation s'élève.

Dans cette optique la croissance selon Lucas permet d’expliquer le caractère autoentretenu et continu de la
croissance d’une part, et la convergence du revenu par tête d’autre part (thèse de convergence
conditionnelle). Donc la divergence en développement entre les pays s’explique par le stock du capital
humain et le niveau de formation.

Si Solow considérait que le facteur travail est limité quantitativement, Robert Lucas et Gary Becker brisent
avec cette tradition en stipulant qu’il ne l’est plus qualitativement.

Il y a constitution de capital humain toutes les fois qu'un homme acquiert des connaissances ou un savoir-
faire qui améliorent son efficacité productive (par exemple en lui permettant de travailler sur des machines
plus complexes). Le capital humain s'acquiert de deux façons : soit par l'expérience (ce qui explique qu'une
personne ayant de l'expérience est mieux payée qu'un débutant), soit par la formation. Comme la

Pr : A.ADNANE 16
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

constitution de capital humain rend ceux qui l'acquièrent plus productifs, elle engendre une augmentation
de leurs revenus. Il s'agit donc d'un investissement exactement comme l'investissement en équipements
productifs : chacun calcule le coût de l'investissement (le temps passé en formation, par exemple, la
renonciation à un salaire que cette formation implique) et le rendement de cet investissement (le flux de
revenus supplémentaires que cela engendrera). Et chacun peut donc déterminer, en fonction de ses
facilités personnelles et du risque d'échec dans la formation, quelle durée et quel type de formation
rapporteront le plus, et jusqu'où il est intéressant de se former.

Mais le risque qui peut nourrir l’aléa moral chez l’entrepreneur est l’asymétrie de l’information quant au
comportement incertain du salarié après la formation : quitter l’entreprise, Ce qui peut expliquer les
réticences de certaines entreprises à financer la formation continue, puisqu'elles risquent de voir
l'investissement consenti (le coût de la formation) leur échapper au profit d'un concurrent qui ne l'aura pas
financée, et qui en tirera avantage. Et même si le salarié ne le peut par clause contractuelle, rien ne prouve
qu’il va assurer la bonne allocation des ressources cognitives acquises. Cela redonne raison aux fondateurs
de la nouvelle économie keynésienne surtout ceux de la théorie des contrats incomplets.

 Modèle de Robert Barro

Ce modèle se base sur le rôle de l’infrastructure. Au sens économique, c’est un ensemble des équipements
de base dont une société a besoin pour permettre la production et la consommation : réseaux d'eau,
d'électricité, de téléphone, d'évacuation des eaux, routes, ports, etc. l’importance de ce facteur tire sa
légitimité dans sa qualité génératrice d’externalités positives.

En effet, pour produire, il faut du travail (de la main-d’œuvre) et du capital. Le capital, ce n'est pas
seulement les machines, mais aussi les infrastructures qui rendent possible l'activité économique des
entreprises : routes, voies ferrées, aéroports, système de télécommunications, approvisionnement en
électricité, etc. Ces infrastructures sont une condition sine qua non du décollage économique d'un pays.
D'autant que la production en réseau se développe de plus en plus dans l'actuelle division internationale du
travail : le niveau des infrastructures est un critère déterminant pour les entreprises du Nord, dans le choix
de leurs implantations ou de leurs sous-traitants.

De ce point de vue, les infrastructures des pays du Sud s'avèrent aujourd'hui souvent inadaptées aux
exigences des économies modernes. La naissance de la nouvelle économie est venue creuser un peu plus le
fossé entre pays riches et pays pauvres. Si certains pays comme la Chine semblent connaître un
développement accéléré grâce aux technologies de l'information et de la communication, beaucoup - les
pays d'Afrique subsaharienne en particulier - restent à l'écart.

Dans l'analyse marxiste, on insiste sur la superstructure qui désigne toutes les caractéristiques
sociologiques, culturelles ou politiques qui sont le reflet ou la conséquence de phénomènes économiques
plus profonds.

L'exemple type est le droit : dans l'analyse marxiste, le contenu de ce dernier est directement inspiré par
les intérêts que les couches sociales dominantes cherchent à défendre. Il en est de même des coutumes et
des règles en vigueur dans une société, dont le contenu peut s'expliquer largement, sinon entièrement, par
des préoccupations de type économique.

Pr : A.ADNANE 17
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

 Les modèles fondés sur le rôle du commerce international et la spécialisation

C'est Adam Smith qui le premier théorise, au XVIIIe siècle, le problème de l'échange international. Pour lui,
seul un avantage absolu (quand un pays produit plus efficacement que tous les autres un bien donné) peut
inciter un pays à exporter. Cinquante ans plus tard, David Ricardo, à la fois économiste et élu à la Chambre
des Communes britannique, reprend et peaufine l'analyse. Alors que le protectionnisme est la règle, il
énonce la théorie des avantages comparatifs en démontrant le bien-fondé du libre-échange. Il explique
ainsi, au travers de l'exemple de l'Angleterre et du Portugal, que chaque pays a intérêt à se spécialiser dans
la production pour laquelle il possède un avantage relatif, c'est-à-dire qui lui coûtera proportionnellement
le moins cher.

Mais, force est de constater que ces vision classiques considèrent que l’avantage comparatif est donné, or,
aujourd’hui, il est construit. De plus ces auteurs croient au caractère statique de l’avantage dont le trait
dynamique est prouvé dans le contexte actuel.

Le théorème HOS, faisant de la ressource abondante un justificatif pertinent pour la spécialisation, néglige
le fait que le facteur abondant d’aujourd’hui peut être le facteur rare de demain. Les modèles de la
croissance endogène nous enseignent que le facteur dont la rareté qualitative ne peut exister si formation
et R&D est le capital humain.

Problématique : la croissance de l’économie domestique est-elle influencée par son degré d’intégration
dans le commerce international. ?

En effet: Il existe une certaine interdépendance entre l'évolution des termes de l’échange et la croissance
des économies ouvertes. Cependant, les résultats de l'analyse et les estimations empiriques que l'on peut
en tirer tendent à montrer que pour la plupart des pays, cette interdépendance n'a pas d'incidences
significatives sur leur croissance.

Termes de l’échange (Notion) : Rapport entre le prix unitaire à l'exportation et le prix unitaire à
l'importation, chacun de ces prix étant mesuré avec la même unité monétaire. Lorsque le premier
augmente davantage que le second, les termes de l'échange s'améliorent : les mêmes quantités exportées
permettent d'acheter une quantité accrue de marchandises importées. Lorsque, à l'inverse, les prix à
l'exportation augmentent moins que les prix à l'importation, il y a détérioration des termes de l'échange :
il faut vendre davantage de marchandises pour obtenir le même pouvoir d'achat en marchandises
importées.

Réponse : la croissance d’une économie intégrée peut être :

Neutre (ou non biaisée) : les deux productions augmentent d'un même pourcentage et la frontière se dilate
uniformément dans les deux directions.

Biaisée à l’importation : une croissance plus importante dans le secteur de l’importation de ce pays

Biaisé à l’exportation : une croissance plus importante dans le secteur de l’exportation de ce pays

Donc :

La croissance biaisée vers les exportations réduits les termes de l’échange d’un pays, réduit son bien-être
et augmente le bien-être du pays étranger.

Pr : A.ADNANE 18
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

Explication : La croissance biaisée vers les exportations consiste à soutenir le secteur d’exportation =>
augmentation des exportations => réduire le prix du produit exporté => baisse du rapport : Prix exportation
/ Prix importation (rapport qui représente les termes de l’échange).

La croissance biaisée vers les importations augmente les termes de l’échange d’un pays, augmente son
bien-être et diminue le bien-être du pays étranger

Remarque : La croissance peut être biaisée pour deux raisons: d'une part, le progrès technique peut être
plus important dans l'un des deux secteurs ; d'autre part, l'accroissement de certaines ressources
productives tend à développer davantage la production du secteur qui en est l'utilisateur le plus intensif.

Une croissance fortement biaisée à l’exportation peut générer une croissance appauvrissant.
Elle signifie qu’une croissance fortement baisée à l’exportation pourrait détériorer à ce point les termes de
l’échange d’une économie ouverte qu’elle verrait disparaitre tous les bénéfices de sa croissance et pourrait
même se retrouver dans une situation plus mauvaise qu’en l’absence de croissance.

La croissance appauvrissant est un cas extrême jamais observé. Mais toutes les autres situations
demeurent envisageables. Dans les faits, jusqu'à quel point une variation des termes de l'échange peut
affecter la croissance économique d'une nation ouverte ?

Ce qu’il faut noter pour y répondre : les variations des termes de l’échange ont été positives pour les pays
à revenu élevé et négatives pour les pays en développement.

Les variations des termes de l’échange sont fortement impactées par le tarif douanier (taxe prélevée sur
les importations) et les subventions à l’exportation (paiements accordée aux producteurs nationaux qui
exportent). Ces deux politiques creusent un fossé entre les prix sur les marchés mondiaux et les prix sur les
marchés intérieurs ; et ça pourrait changer significativement les positions de forces entre les pays.

Pr : A.ADNANE 19
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

4. LES CYCLES ECONOMIQUES

 Notion :

Désigne des fluctuations relativement régulières observables dans l'évolution des niveaux d'activité
économique à l'intérieur d'un pays, ou d'un ensemble de pays donnés. Généralement la théorie
économique distingue les cycles majeurs ou de grand ampleur des cycles mineurs (selon la période de
retour du même phénomène) :

 le cycle Kitchin (3 à 4 ans) ;


 le cycle Juglar (8 à 10 ans) ;
 le cycle Kuznets (15 à 25 ans) ;
 le cycle Kondratieff (40 à 60 ans).

Les cycles de grande ampleur (1873, 1929, 2009) se composent d'une phase de croissance relativement
plus forte (expansion), suivie d'une phase de ralentissement conduisant à un point de retournement (la
crise), inaugurant une phase de dépression, marquée par un recul de l'activité jusqu'à un point bas à partir
duquel on constate une reprise, donnant naissance à une nouvelle phase d'expansion. Mais les fluctuations
d'activité sont le plus souvent mineures, si bien que la dépression cède la place à un simple ralentissement,
sans qu'il y ait préalablement un point de retournement. Ce qui varie alors, c'est le rythme d'accroissement
de l'activité, non son niveau absolu.

 Remarque :

Dans le cycle des économies traditionnelles, le point de départ était généralement une mauvaise récolte,
ou une succession de mauvaises récoltes, provoquait une hausse forte des prix des denrées agricoles, donc
une réduction du niveau d'alimentation des plus mal lotis, donc une montée de la mortalité jusqu'à ce que
l'équilibre population/nourritures, un moment rompu, soit rétabli (soit par une diminution de la
population, soit par une hausse de la production). Dans ce cycle traditionnel, au rythme très fluctuant,
l'évolution des prix allait en sens inverse de celle de la production : en hausse quand cette dernière
diminuait, en baisse quand elle progressait.

C'est l'inverse dans les cycles contemporains : les prix baissent lorsque les affaires vont mal, ils tendent à
s'accélérer lorsqu'elles vont bien. Et, contrairement aux craintes de Malthus et de Ricardo, la démographie
ne joue plus de rôle régulateur, permettant d'adapter la population aux ressources. :

 Modèles :

On distingue habituellement trois types de cycles, correspondant à trois horizons de temps différents.

Le premier est l'horizon court : le temps qu'il faut pour qu'un investissement, décidé à l'instant t, devienne
opérationnel et se traduise par une augmentation de production. L'exemple le plus connu est le cycle du
porc : lorsque le prix du porc augmente faute de production suffisante par rapport à la demande, des
producteurs, constatant cette hausse, décident d'élever davantage de truies. Compte tenu des délais
nécessaires, quinze mois après, les arrivages de porcs sur le marché augmentent, d'autant plus que de
nombreux producteurs auront pris la même décision sans s'être concertés. A l'insuffisance de production
succède une surproduction : les prix s'effondrent. Des producteurs sont ruinés ; les autres réduisent leur
production, devenue insuffisamment rentable. La surproduction se réduit peu à peu, cédant à nouveau la

Pr : A.ADNANE 20
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

place à la pénurie, une quinzaine de mois après le déclenchement de la crise. Ce cycle est propre à une
profession, et il est lié à l'inévitable décalage existant entre décisions d'investissement et arrivée de la
production. En outre, il est d'autant plus accentué que la profession est peu concentrée et peu coordonnée
par les instances professionnelles. Il peut arriver que ces cycles propres à une activité déterminée
conjuguent leurs effets et produisent des fluctuations d'ensemble (on parle alors de cycles Kitchin, d'une
moyenne de trois ans).

Le deuxième type de cycle concerne, lui, l'économie dans son ensemble. On le dénomme cycle Juglar, du
nom de l'économiste statisticien français Clément Juglar, qui mit en évidence leur existence : tous les huit à
neuf ans environ, l'économie dans son ensemble semble parcourir les différentes étapes du cycle : crise,
dépression, reprise, expansion, les deux dernières étapes étant un peu plus longues que les deux
premières, ce qui, estimait Juglar, rend compatible l'existence du cycle avec une croissance de long terme :
chaque point haut est un peu plus haut que le précédent, situé huit à neuf ans plus tôt. Dans l'entre-deux-
guerres, il est paru une très abondante littérature sur l'origine de ces cycles, les uns y voyant le résultat de
causes extérieures à la sphère économique (les découvertes d'or, par exemple), les autres les attribuant au
fonctionnement même de l'économie. C'est généralement la thèse retenue aujourd'hui. Des taux de profit
en hausse incitent à l'investissement, lequel stimule les revenus, donc la consommation, jusqu'au point où
le surplus de production dû à l'investissement face son apparition sur les marchés et engendre une
contraction des prix, donc une réduction de la rentabilité et un arrêt, ou une moindre progression de
l'investissement.

Le cycle Kondratief (du nom de l'économiste russe du début du siècle qui a suggéré leur existence) est
d'une durée beaucoup plus longue : une cinquantaine d'années, avec une vingtaine d'années de stagnation
ou de recul, et une trentaine d'années de croissance forte. Les Trente Glorieuses (1950-1975)
constitueraient ainsi la phase d'essor d'un cycle long, suivie, jusque vers 1995, par une phase de fort
ralentissement du même cycle long. Schumpeter, l'économiste austro-américain mort en 1950, a proposé
une explication de ce type de cycle. Il résulterait de vagues ou grappes d'innovations liées à une percée plus
fondamentale. Dans cette veine, certains estiment que nous serions entrés depuis 1995 dans un nouveau
cycle d'investissements innovateurs, appuyé sur l'informatique, les télécommunications, les
biotechnologies et les investissements « verts » (recyclage, énergies renouvelables...). Nous sortirions ainsi
de la phase dépressive d'un Kondratief, pour entrer dans la vague porteuse d'une « nouvelle économie ».
Cette thèse a pris un coup de vieux avec l'explosion, début 2001, de la bulle boursière des actions des
entreprises spécialisées dans ces nouvelles technologies, dont on disait monts et merveilles, puis par la
crise financière de 2008.

 Remise en cause de l’analyse cyclique :

Comprendre et prévenir les crises économiques dont la proximité de leurs scénarios en justifie la
récurrence est l’objectif fondamental derrière l’étude des cycles. Cela permet bien évidemment d’agir par
des mesure préventives, voire curatives, d’où l’importance des politiques économiques.

En effet, le rôle de la politique économique que de gommer ces fluctuations, d'empêcher qu'elles ne se
propagent à l'ensemble de l'économie via les revenus et les prix. Sous cet angle, les politiques économiques
peuvent-elles prouver fin des cycles ?

Les cycles Juglar ont quasiment disparu au cours des années 1950-1970, à un moment où une régulation
publique relativement forte a permis d'anticiper sur l'évolution spontanée des marchés et de prendre des
décisions à plus long terme. Mais la réduction de l'intervention publique, la perte d'efficacité des politiques
économiques nationales due à la mondialisation, tout cela contribue aujourd'hui à redonner vie au

Pr : A.ADNANE 21
ère
Economie Générale CPGE –ECT (2 année)

problème du cycle Juglar, notamment sous l'influence de crises financières ou bancaires liés à des prises de
risque excessif durant la période d'expansion. C’est l’un des messages clé de la nouvelle économie classique
mis en lumière dans le cadre de la théorie des cycles réels.

 La théorie des cycles réels (RBC) :

Dans les années 1970, l'approche keynésienne a été remise en cause par les théories de la nouvelle
macroéconomie classique. S'inspirant du programme de recherche élaboré par Lucas à travers sa théorie
des anticipations rationnelles, des modèles mettent à nouveau les fluctuations économiques au cœur du
débat théorique.

Le socle théorique des RBC apparaît proche de la perspective néoclassique : il s'agit de construire des
modèles d'équilibre général dans une économie sans rigidités. Il se rapproche également du programme de
Lucas, les RBC reprennent l'idée qu'il est intéressant de disposer de petits modèles, aisément simulables.
Selon le projet initial, les modèles macroéconomiques doivent être capables de reproduire les principaux
faits stylisés, sans qu'il soit nécessaire d'introduire des défauts de coordination, une rigidité des prix (à
l'instar des néo-keynésiens) ou encore des chocs monétaires.

Deux articles sont considérés comme fondateurs du courant : Kydland et Prescott (1982) et De Long et
Plosser (1983). On peut également se référer à King, Plosser et Rebelo (1988) pour un exposé du modèle
"canonique" des RBC.

Encadré 6 :

Les anticipations rationnelles

Le courant des anticipations rationnelles (représenté notamment par Thomas Sargent et Robert Lucas, qui
a obtenu le prix de sciences économiques de la Banque de Suède en mémoire d'Alfred Nobel, dit « prix
Nobel d'économie », en 1995) ne prétend pas que l'on puisse éliminer l'incertitude, mais que les agents
utilisent toute l'information dont ils disposent pour anticiper. Et que, ce faisant, ils convergent vers une
même attente : si l'Etat, par exemple, s'efforce de leur faire croire qu'il est possible de dépenser plus tout
en réduisant les impôts, ils n'y croiront pas, car les expériences passées montrent que ce genre
d'affirmation s'est toujours soldé par une hausse des impôts, hausse à laquelle ils vont se préparer en
dépensant moins. Résultat : même si, effectivement, l'Etat s'apprêtait à réduire les impôts pour relancer
l'activité en gonflant la dépense privée, le comportement spontané des agents guidés par leurs
anticipations rationnelles, moins de dépense privée, va annuler l'effet engendré par l'action publique. Ce
qui revient à dire que la politique économique est impuissante, qu'elle est paralysée par les adaptations
des agents en raison de leurs anticipations rationnelles. Le courant des anticipations rationnelles
modernise la vieille analyse libérale du laisser-faire.

Mais alors, comment expliquer que les « bulles spéculatives » se répètent, que la politique économique
n'est pas aussi dépourvue d'efficacité que le prétendent les « nouveaux classiques », que le libre
fonctionnement des marchés débouche sur des fluctuations d'activité importantes et que des crises
puissent éclater ? La réponse des nouveaux classiques est double : soit c'est l'Etat qui, en réalité, par sa
politique irresponsable, a empêché que les mécanismes du marché fonctionnent correctement, soit ce sont
des phénomènes extérieurs à l'économie (« exogènes ») qui jouent.

Pr : A.ADNANE 22
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 L’explication des fluctuations cycliques (quelques principes théoriques):


- La trappe à liquidité ou préférence pour la liquidité (Keynes)
- L’aveuglement au désastre (Herring)
- La folie spéculative (Kindelberger)
- Le paradoxe de tranquillité et fragilité systémique (Minsky)
- La phase ascendance de cycle et la déflation par la dette (Fisher)
- La phase de surstockage et le cycle des stocks (Kitchin)

Pr : A.ADNANE 23

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