Travail Mémoire Master Droit Pénal Fin
Travail Mémoire Master Droit Pénal Fin
Travail Mémoire Master Droit Pénal Fin
UNIVERSITE DE GOMA
Professeur
Assistant.
0. INTRODUCTION
1. CONTEXTE DE L’ETUDE
Les garanties procédurales devant les juridictions tant civiles que militaires
n’intéressent pas mal des chercheurs du fait qu’il est observable que ces dernières soient
violées ou pas respectées par les autorités judiciaires congolaises. Il est impérieux alors qu’un
ton soit levé afin de rappeler à l’ordre ces autorités pour qu’elles accomplissent leurs missions
en strict respect des dispositions légales du pays et que justiciables soient bénéficiaires de ces
droits.
Le droit à la justice est un droit particulièrement important : C'est pourquoi, il
serait inutile d'affirmer la prééminence de ce droit considéré comme l'une des valeurs de la
démocratie, si la justice n'est pas correctement rendue 1. C'est la nécessité de l'impérative
protection de justiciables. Le droit à la justice, et qui plus est à une bonne justice, est un
impératif majeur.
La réalisation de ce droit, passe par certaines exigences procédurales se
traduisant par un procès équitable. En matière pénale, le principe de la légalité, qui est un
principe cardinal constitue l'épicentre des garanties procédurales et il est un principe fondateur
de tout Etat de droit.
Par définition, les garanties procédurales sont l'ensemble des normes
applicables pour assurer l'équité du processus judicaire. Elles s'intéressent, particulièrement en
matière pénale, au respect des droits de l'accusé et l'exercice du pouvoir judiciaire par un
tribunal compétent, indépendant et impartial afin d'assurer l'équité du procès. Ces garanties
englobent également les droits des victimes du fait infractionnel car en réalité, ce sont elles les
plus touchées.
D'ailleurs, le procès serait vidé de sens si les victimes de l'infraction n'étaient
indemnisées pour couvrir les dommages subis.
Pour remplir ces exigences, les victimes doivent disposer de voie de mettre en
mouvement l'action publique en vue d'obtenir réparation, voie considérée comme contrepoids
à l'inertie du ministère public dans le système judiciaire ou il détient un quasi-monopole dans
l'exercice des poursuites.
1
RENUCCI J.F, Traité de droit européen des droits de l'homme, LGDJ, Montchrestien, Paris, 2007.
3
2. PROBLEMATIQUE
Un adage latin dit : « justicia omnibus », c’est-à-dire une même justice pour
tous. Pour les êtres humains, l’égalité est le principe qui fait que les hommes doivent être
traités de la même façon, avec la même dignité, qu’ils disposent des mêmes droits et sont
soumis aux mêmes devoirs. Même si les hommes sont to 2us différents (différence physique,
socio-économique, culturelles…), ils doivent être égaux devant la loi.
La justice élève une nation, dit-on, les militaires quand bien même ayant un statut
particulier, sont soumis au respect de la loi. Et la violation de cette même loi par le militaire,
quel que soit son grade ou sa fonction, l'infraction ne reste pas impunie. Voilà pourquoi le
législateur congolais a prévu des instances judiciaires propres aux militaires et leurs assimilés,
agissant dans une procédure propre à elle, ainsi, les juridictions militaires connaissent des
infractions commises par les membres des forces armées et de la police nationale. » de même,
à son dernier alinéa « la constitution consacre à la loi organique de fixer les règles de
compétences d’organisation et de fonctionnement des juridictions militaires 3.
Aujourd’hui l’égalité devant la loi ou l’égalité de droit trouve son origine dans
l’isonomie ou égalité citoyenne, mise en place à Athènes aux environs du 5 eme siècle avant
jésus christ, c’est la première pierre de la démocratie5.
Le droit à un procès équitable est fondamental, inhérent à la personne, inscrit
dans les instruments internationaux de la protection des droits de l’homme et dans la
constitution. Il requiert la mise en œuvre effective, par les instances judiciaires, de nombre
de principes notamment, l’accès à un tribunal indépendant et impartial, la comparution des
2
Article 12 de la constitution du 18 février 2006
3
Article 156 al 1 de la constitution du 18 février 2006 telle que modifié et complété par la loi n°11/002 du 20
janvier 2011. J.O.RDC, n° spécial du 20 janvier 2011
4
Article 19 de la constitution du 18 février 2006
5
« Egalité de tous devant la loi, réussite scolaire pour tous, », disponible sur www.google.com , consulté le 6
juillet, 2024.
4
parties dans la langue de leur choix, la publicité du débat, la facilité d’être jugé dans un délai
raisonnable, l’égalité des armes et la présomption d’innocence6.
C’est ce qui explique, que dans les Etats modernes l’institution des juridictions
et forte, afin de donner à chacune des parties la possibilité de faire valoir ses droits et de
proposer ses moyens de défenses. La mission des organes juridictionnels est plus exigeante en
ce qu’elle comporte notamment l’arbitrage entre intérêts divergents des justiciables, et c’est ce
qui est à la base du procès en tant qu’instance en justice.
Les parties au procès jouissent des moyens égaux en ce qui concerne la
production des preuves et moyens procéduraux pour soutenir leurs propos et mettre en doute
les allégations des autres, la norme, et ensuite de la vengeance privée longtemps animée, dans
l’esprit des sociétés primitives.
Dans le droit pénal ancien, c’est la loi du plus fort qui régnait dans la mesure
où ceux qui étaient plus forts que d’autres s’accaparaient de terres, des trônes, et des femmes
de leurs adversaires, comme butin de guerre.
Face à cette manifestation d’atteinte aux droits patrimoniaux, à savoir la justice
privée qui anime la société primitive et qui crée l’anarchie au sein de la société. En sus doit-
on retenir avec Bernard bouloc qui si rudimentaire et si brutale qu’elle soit la vengeance
privée constitue une garantie sommaire du maintien de l’ordre social dans les relations entre
clans7.
En effet, le droit pénal militaire comme toute autre branche du droit est
composé de deux types de règles : d’une part les règles de forme et d’autre part, les règles de
fond. Les règles de forme en droit sont également appelées les règles de procédure.
Elles contiennent un ensemble de dispositions qui permettent à une personne
lésée dans ses droits de saisir la juridiction compétente afin d’être rétablie dans ses droits.
Parmi les différentes dispositions qui composent le droit de la forme, figurent les règles de la
prescription de délai, la signification, la saisine, etc. Par contre les règles de fond comportent
l’organisation des juridictions militaires, les compétences des instances militaires de justice.
Ce qui explique la mission de l’Etat qui est d’accomplir avec plus d’efficacité
cette tâche de rechercher, d’instruire et de punir les coupables.
Pour un équilibre dans l’établissement des règles de droit, tout comme le soleil
brille sur les méchants comme sur le bon, la constitution de la RDC du 18 février 2006 telle
que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 dans son article 12 qui dispose : « tous
6
BIENFAIT UWIMANA, Le droit à l’égalité des armes dans les procès pénaux au nord Kivu ; regard sur les
pratiques judiciaires et perspectives, disponible sur https ;//pugoma,com consulté le 7 Avril, 2024.
7
KATAMBWE USENI, Op .cit, p.5.
5
les congolais sont égaux devant la loi et ont droit à une égale protection des lois »8. Le
militaire étant de citoyen congolais devrais en profiter de ses règles fondamentales établir par
loi suprême du pays.
Le droit à un procès équitable est protégé par plusieurs instrument
internationaux, en effet, Tous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice, tout
congolais a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un
tribunal compétant indépendant et impartial établit par la loi… 9 Au niveau interne, l’article
12 de la constitution dispose « tous les congolais sont égaux devant la loi et ont droit à une
égale protection des lois. »10
Ainsi l’article 19 alinéa 4 de la constitution garantis le droit à la défense, d’où
toute personne a le droit de se défendre elle-même ou de se faire assister d’un défenseur de
son choix et ce, à tous les niveaux de la procédure pénale, y compris l’enquête policière et
l’instruction pré juridictionnelle.
En outre dans le code judiciaire militaire à son article 61 alinéa 2 garantit aussi
le droit à la défense dans sa manière « …Les avocats, défenseurs judiciaires ou militaires
agrées visés à l’alinéa premier ci-dessus doivent être de nationalité congolaise ». Ce qui reste
une contradiction avec la constitution congolaise qui donne le droit à un individu de se faire
assister par un avocats, défenseurs judiciaires de choix, sans tenir compte de la nationalité
congolaise. D’où une contradiction totale avec la loi suprême.11
C’est ici le lieu de signaler que les garanties du procès équitable sont multiples, à titre
illustratif : le droit d’accès à la justice, le droit à un tribunal indépendant et impartial, le droit à
l’assistance d’un avocat, à comparaitre dans la langue de son choix, à être jugé dans un délai
raisonnable, à la publicité des débats ou des audiences, au respect des droits de la défense,
l’égalité des armes, au contradictoire, à la présomption d’innocence et à la motivation de
jugement12.
Notre réflexion sera plus basée sur trois de ces garanties qui causent problème
actuellement pendant l’Etat de siège au nord Kivu et plus précisément à Goma. Dont : le
droit au juge naturel, au droit de la défense et le droit d’être jugé dans le délai raisonnable.
Voulant analyser l’effectivité de ces trois garanties tels que prévues par les textes nationaux
qu’internationaux.
8
Article12 de la Constitution de la République démocratique du Congo 18 février 2006
9
Article 14 al. 1 du pacte international relatif aux droit civil et politique, 16 décembre 1966
10
Article 12 de la constitution congolaise
11
Article 61 al 2 du code judiciaire Militaire
12
Article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 7 et 26 de la Charte africaine des droits
de l’homme et des peuples.
6
L'état de siège étant une circonstance exceptionnelle, il est admis à son sein une
législation exceptionnelle. Mais comme on peut le remarquer, la tendance est pour les
juridictions militaires de juger à tout prix les civils. Et pourtant, cela ne semble pas être le
vœu du constituant car l’article 156 de la constitution du 18 février dit :
Les juridictions militaires connaissent des infractions commises par les membres des forces
armées et de la police nationale.
Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable constitue un aspect important du principe de «
l’égalité des armes ». La défense et l’accusation doivent être traitées de manière à ce que les
deux parties puissent préparer le dossier et présenter leurs arguments en toute égalité 13
Nous pensons que ce droit doit être associé à la question du temps et des facilités
nécessaires pour préparer la défense : Concernant le temps nécessaire pour préparer sa
défense, il sied de noter que le temps nécessaire à la préparation de la défense dépend de la
nature de la procédure en cours (par exemple, s’il s’agit de l’instruction, du procès ou du
recours en appel), ainsi que des éléments de fait de chaque affaire.
En général, si le droit de la défense est violé, cela peut avoir un impact significatif sur
l'équité du procès et la protection des droits de l'accusé 15 Les recommandations pour remédier
à une violation du droit de la défense peuvent varier en fonction des circonstances spécifiques
de chaque affaire. Cependant, certaines mesures courantes pourraient inclure la révision du
procès16, la réparation des préjudices subis par l'accusé, la sanction des responsables de la
violation et l'amélioration des procédures judiciaires pour éviter de telles violations à l'avenir
3. HYPOTHESES DE TRAVAIL
En guise des hypothèses :
Le transfert des dossiers civils aux juridictions militaires, serait à la base de la
violation des garanties procédurales telles que le droit au juge naturel, le droit de la
défense et le droit d’être jugé dans un délai raisonnable.
Le droit de la défense et le droit d’être jugé dans un délai raisonnable comme garanties
procédurales ne s’appliqueraient que très faiblement au sein de la justice militaire
congolaise.
4. ETAT DE LA QUESTION
A l’heure actuelle, il n’est pas évident de mener une étude sans pour autant faire allusion
aux recherches des auteurs précédents qui ont abordé la question sous examen d’une manière
ou d’une autre. Ainsi, il est question de recours aux quelques travaux antérieurs pour
permettre de bien focaliser cette dissertation.
Nous ne sommes pas le premier à pouvoir aborder pareille étude, plusieurs autres
travaux ont été élaborés dans ce cadre.
Dans son article, KATEMBO ZAWADI axe son attention sur « le droit à l’usage
d’une langue de son choix dans un procès équitable : effectivité dans le ressort de la cour
d’appel de Goma / Nord-Kivu ». Il est arrivé à la conclusion selon laquelle le droit à un
procès équitable, qui incarne les droits et les garanties procédurales, soit, lors de la détention
préventive ou lors du déroulement du procès devant l’instance judiciaire, joue un rôle
prééminent dans une société démocratique ; c’est le noyau dur de tout système judiciaire qui
se veut fiable, et d’un état dont personne n’est au-dessus de la loi, y compris l’Etat lui-
même.17
17
KATEMBO ZAWADI, « le droit à l’usage d’une langue de son choix dans un procès équitable : effectivité
dans le ressort de la cour d’appel de Goma/Nord-Kivu » in Revue de la faculté de Droit de LUNIGOM, n°1,
8
pourtant dans le cours de droit pénal et procédure pénale militaire 18, KAMBALA
MUKENDI J.I Conclu qu’une bonne justice ou un bon procès n'est pas obligatoirement celui
où le coupable a été condamné, où l'innocent acquitté, mais celui aux cours duquel les règles
procédurales ont été respectées depuis la manifestation du fait répréhensible jusqu'à
l'exécution de la décision juridictionnelle ou jugement devenu irrévocable. Le droit
procédural reflète la beauté du droit.
2016, pp.101-116,
18
KAMBALA MUKENDI J.I et MUKENDI, Droit pénal et procédure pénale militaire, cours ronéotype, FB,
DPJ, 2009-2010.
19
KISEMBO DJOZA J.P, Droit pénal militaire et procédure pénale militaire, cours, G3, F.D, DPJ, UNIKIS,
2016-2017, p.2.
20
KISEMBO DJOZA J.P, op.cit.
9
Alors, KATAMBWE USENI, 21 note que l’interdiction des voies de recours devant
la cour militaire opérationnelle serait une violation de la constitution qui consacre le double
degré de juridiction pour un procès équitable.
MBUSA BINDU 22 soutient que le code pénal militaire de la RDC prévoit parmi
les modalités de saisine du juge militaire, la décision de renvoi émanant de l’auditeur militaire
près la juridiction compétente, la décision de traduction directe, la comparution volontaire
ainsi que la saisine d’office ; le code n’ignore cependant pas la saisine en procédure de
flagrance. Cependant, il ignore complètement pour les justiciables des juridictions militaires
le droit de saisir ces dernières par voies de citation directe.
En fin de son côté le professeur KAVUNDJA MANENO23 plaide plutôt pour la
suppression des juridictions militaires en temps de paix. Il note à ce propos une panoplie de
critiques relatives à l’organisation et la compétence judiciaires des juridictions militaires au
regard des normes universelles du procès équitable. À la suppression des juridictions
militaires en temps de paix ainsi que leur maintien en temps de guerre.
Ainsi, pour ce chercheur, le procès étant toujours une situation dangereuse, des
Garanties procédurales doivent être respectées sur base des quelles sera examinée la valeur de
conclusion du résultat final. En effet, que chaque individu a droit à ce que sa cause soit
entendue équitablement.
Par contre, l’analyse faite au travers ce travail démontre les raisons de l’instauration
des garanties procédurales par le législateur, en droit pénal militaire congolais et en faire un
état de lieu et des perspective d’avenirs suite à son applicabilité dans les juridictions
militaires congolaise.
Notre travail se converge de ceux cités ci haut par le faite que nous
développons tous sur les garanties procédurales, et notre point de démarcation se situe au sens
que nous développerons sur trois de ces garanties développées supra dans la période de l’Etat
de siège dont : le droit de la défense, le droit au juge naturel et le délai raisonnable ; et des
perspectives d’avenirs suite à son applicabilité dans les juridictions militaires congolaise.
21
KATAMBWE USENI, L’interdiction de voies de recours contre les arrêts de la cour militaire opérationnelle
face au principe de double degré de juridiction ; cas de la cour militaire opérationnelle dans l’affaire minova
Nord Kivu, mémoire, DPJ, FD, UNIKIS, 2018, p.52.
22
MBUSA BINDU, De la saisine de juridiction militaires au regard de l’absence de la procédure de la citation
directe en procédure pénale militaire de la RDC, Mémoire, DPJ, FD, UNILU, 2010, p.7.
23
KAVUNDJA MANENO, Droit judiciaire congolais, Tome I : organisation et compétence judiciaires, 6
édition, faculté de droit, Université catholique de Bukavu, janvier 2008, p.230.
10
B. Intérêts du sujet
L’intérêt de cette dissertation se veut ainsi théorique et pratique.
Sur le plan théorique, cette dissertation sert de base de données pour tout
chercheur ou toute personne pensive d’un bon fonctionnement de la justice en république
démocratique du Congo, pour commenter les normes de droit pénal militaire au regard des
garanties procédurales.
Sur le plan pratique, cette dissertation consiste à apporter des informations
aux praticiens de droit. Par contre, pour les victimes, cette dissertation leur permettra de bien
saisir leurs droits et d’en réclamer l’applicabilité des garanties procédurales.
24
ILUME MOKE M., Droit constitutionnel, cou ronéotypé, 1er graduat, F.D, Unikis, 2015, p.45.
11
Enfin, pour le législateur, elle lui permettra d’avoir une lumière pour amener le
code pénal militaire au respect, de la constitution, des droits de l’homme et des garanties
procédurales à travers la modification dudit code.
6. OBJECTIFS DU TRAVAIL
En abordant cette réflexion, les objectifs suivants sont visés :
Analyser les raisons de l’instauration de garantie procédurale dans la justice militaire
congolaise.
Démontrer comment les garanties procédurales sont-elles appliquées dans la justice
pénale militaire.
25
NDAMA et MASILA, Rédaction et présentation d’un travail scientifique, Ed. Enfance et paix, Kinshasa 1993,
p.18.
12
Par contre celle d’interview libre permet d’avoir une vue directe sur les réalités
en rapport avec le sujet, à travers l’entretien avec les avocats, les magistrats militaires et les
militaires, les justiciables de cette juridiction pour vérifier nos hypothèses.
la police nationale. Tel est le prescrit de l'article 106 du code judiciaire militaire 26, qui rejoint
sur ce point l'article 156 alinéa 1er de la constitution.
La notion de militaire est définie et détaillée à l'article 107 du code judiciaire militaire qui
détermine les personnes revêtues de la qualité de militaire et justiciables des tribunaux
militaires. Il s’agit des personnes suivantes :
26
Article 106 code judiciaire militaire :"
27
Article 156 alinéa 1ier de la constitution : « les juridictions militaires connaissent des infractions commises par
les membres des forces armées et de la police nationales »
28
Article 156 alinéa 2 de la constitution
14
Selon l'article 2 de cette loi, "est policier de carrière toute personne recrutée,
formée et nommée à l'un des grades de la hiérarchie du corps des policiers de carrière de la
police nationale". L'article 3 de la loi précitée précise les différentes catégories composant le
corps de policiers de carrière.30Il s'ensuit que c'est avant tout aux policiers de carrière que la
compétence personnelle de principe des juridictions militaires s'applique.
En fait, ce débat n’est pas nouveau en RDC. Il a été engagé également par le passé
au sujet des éléments de la gendarmerie nationale et ceux de la garde civile 31. En l’absence
d’une position claire du législateur en la matière, c’est plutôt à la jurisprudence éclairée par la
doctrine qu’on s’est tourné pour savoir les principes de solution.
29
Article 107 du code judiciaire militaire.
30
Cet article 3 dispose en effet que : "le corps des policiers de carrière comprend les catégories suivantes :(1) la
catégorie A1 : les commissaires divisionnaires de police ;(2) la catégorie A2 : les commissaires supérieurs de
police;(3) la catégorie B : les commissaires de police ;(4) les sous-commissaires de police ;(5) la catégorie D : les
Brigades de police;(6) la catégorie E: les Agents de police. La recrue est appelée élève policier".
31
Institute of international legal studies, l’Etat de droit et la justice militaire dans une force militaire
professionnelle. Un séminaire de justice militaire avec les forces armées de la RDC, Kinshasa, 2009, P96.
15
Les organisations des sociétés civiles ont critiqué l’intégration des militaires
dans les forces de police nationale et les conséquences qui en ont découlé, à savoir
l’assimilation aux militaires des éléments de la PNC et la soumission des mêmes éléments à
la justice militaire33.
Pour notre part, dans le contexte actuel de notre pays la question de l'assimilation
des membres de la police nationale à l'armée ne pose pas problème aussi longtemps que nous
avons un effectif faible dans l'armée ce qui justifierait la présence de la police pour combler le
vide. Dans ce cas, il est admis que ces membres soient justiciables auprès des juridictions
militaires car cela relève de la volonté du constituant.
C'est d'ailleurs dans le même ordre d'idée que le tribunal militaire de garnison
avait écarté l'argument du conseil de la défense. En effet, invoquant l'exposé de motifs de la
loi n°023 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire tel que modifié à ce jour au
point V qui dispose qu'il est entendu que les agents de la police nationale congolaise ne sont
pas justiciables devant les juridictions militaires que pour des infractions prévues par le code
pénal militaire et cela conformément à l'article 55 du décret-loi 002/2002 du 26 janvier 2002
portant institution , organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise, le
conseil de la défense a dans l'affaire auditeur militaire de garnison Goma contre lieutenant
BLAISE et commissaire lumoo, demandé au tribunal militaire de céans de se déclarer
incompétent à l'égard de ce dernier, policier de sa qualité, parce que les infractions mises à sa
charge à savoir la destruction méchante et l'occupation illégale ne sont pas prévues par le
code judiciaire militaire.
Notons que l'exposé des motifs d'une loi, n'a pas une nature juridique consistante
pour lier le juge, il ne s'agit que d'un commentaire explicatif qui accompagne un texte soumis
32
P. AKELE, Audace a cour d’ordre militaire…, Art, op.cit., pp.567-568.
33
IDASA, le renforcement de la participation de la société civile à la réforme de la police en RDC, rapport
d’atelier décembre 2006-février 2007, P16, disponible en ligne à l’adresse littp://www.idasa.orgza. Consulté le 7
Avril, 2024.
34
TMG Goma, RP, 06/10/2003, Affaire Aud.Mil.Gson. Contre Lt Blaïse et commissaire lumoo, n°397, p3
16
à l'examen de l'autorité législative et ne faisant pas partie intégrante de la loi, ne peut être
évoqué pour fonder une prétention légale. La doctrine n'est pas constante à cette question
raison pour laquelle une autre doctrine soutient que l'exposé de motif est essentiel et par voie
des conséquences il est partie intégrante du corps du texte cela en s'appuyant sur le fait que
c'est dans cette partie qu'on trouve les objectifs même du texte voire la finalité et philosophie.
Observation : Cette dernière hypothèse :"en cas d'infraction continue s'étendant d'une part sur
une période où le justiciable révélait de la juridiction de droit commun et d'autre part sur une
35
Lorsqu’une personne, qu’elle soit civile ou militaire, se rend coupable d’une infraction à l’occasion d’une
audience d’une juridiction civile, par exemple une injure publique ou d’un outrage à magistrat, elle sera jugée
par cette juridiction. Article 118 du code judiciaire militaire.
36
Lorsque plusieurs personnes, les unes civiles et les autres militaires concourent à la commission d’une ou
plusieurs infractions, elles sont toutes jugées par les juridictions du droit commun. Article 115 du code judiciaire
militaire et 115 du code de l’organisation de la compétence judiciaires.
37
Article 93 code judiciaire militaire. Selon le professeur LIKULIA, « on estime que… » LIKULIA Bolongo,
Droit pénal spécial zaïrois, paris, LGDJ, 1977, PP.144-145.
38
Selon le professeur LIKULIA, « la doctrine… ». LIKULIA Bolongo, op.cit, p145.
39
Article 119 code judiciaire militaire.
17
Cet article vient d'être récemment modifié et complété par la loi organique
n°17/003 du 10 mars 2017 modifiant et complétant la loi n°023-2002 du 18 novembre 2002
portant code judiciaire militaire. Avant cette date, le principe affirmé par le code judiciaire
militaire était que "en cas d'infraction continue s'étendant d'une part, sur une période pendant
où le justiciable relevait de la juridiction de droit commun, d'autre part, sur une période
pendant laquelle il relève de la juridiction militaire ou vice versa, la juridiction militaire est
compétente.
§3. Compétence des juridictions militaires de juger les civils en période de l'état de siège
Le principe selon lequel juridictions militaires exercent leur compétence sur les
militaires et les policiers connaît toutefois plusieurs cas d'extension de la compétence
personnelle et qui peuvent faire que les juridictions militaires soient amenées à juger des
personnes étrangères à l'armée c'est-à-dire celles qui n'ont pas la qualité de militaire ni celle
de la police nationale comme tel.
Par« état de siège », il faut entendre « un régime restrictif des libertés publiques
pouvant être appliqué sur tout ou partie du territoire en cas de menace étrangère ou
d’insurrection, et caractérisé par l’accroissement du contenu des pouvoirs ordinaires de
police, par la possibilité d’un dessaisissement des autorités civiles par les autorités militaires,
et par l’élargissement de la compétence des tribunaux militaires ». 40 Ce régime peut
également être invoqué pour justifier certaines dérogations à des engagements internationaux
de protection des droits de l’homme, sous réserve toutefois des droits désignés comme
indélogeables par ces instruments.41
40
Raymond GUILLIEN et Jean VINCENT, Lexique des termes juridiques, 12ième éd., Paris, 1999, pp 233-234.
41
Jean SALMON, Dictionnaire du droit international public, Bruxelles, 2001, p. 468.
42
Jean de Dieu KAKULE KAUSA : "État de siège et les droits inderrogeables" dans les annales de la faculté de
droit de l'ulpg-goma (AFD-ULPGL), revue annuelle n°4, 2020-2021, p8.
18
L'état de siège étant une circonstance exceptionnelle, il est admis à son sein une
législation exceptionnelle. Mais comme on peut le remarquer, la tendance est pour les
juridictions militaires de juger à tout prix les civils. Et pourtant, cela ne semble pas être le
vœu du constituant car l’article 156 de la constitution du 18 février dit :
Les juridictions militaires connaissent des infractions commises par les membres des forces
armées et de la police nationale.
Premièrement, les juridictions militaires et les policiers, elles ne sont pas donc
compétentes pour juger les civils. La constitution du 18 février 2006 n’a pas envisagé
l’hypothèse où les juridictions militaires devraient juger les civils si non, elle allait le prévoir
ou ajoutant à la fin du 1ier alinéa de l’article 156 sauf dérogation prévue par la loi sous réserve
des dispositions du code judicaire militaire.
Deuxièmement, les seuls cas où les civils peuvent être jugés par les militaires se
trouve à l’article 156 alinéas 2 de la constitution.
43
Telesphore KAVUNJA MANENO, droit judiciaire congolais, Tome I organisation et compétence judiciaire,
éd. Médias Saint Paul, Kinshasa 2014, p 497
19
Les prévenus qui étaient en détention préventive avant l’état de siège restent dans cet
état jusqu’à la fin de l’état de siège.
Les juridictions militaires ne pourront donc pas s’occuper de ces détenus étant donné,
d’une part, il n’existe pas de chambre du conseil aux juridictions militaires pour régulariser
ou non la détention préventive44 et d’autre part, les anciens dossiers en instruction préparatoire
ou à l’audience des juridictions de droit commun restent de la compétence de ces dernières
après l’état de siège.
Lorsque les justiciables civils ont commis des infractions au droit commun (exemple :
vol simple ou coups et blessures volontaires, les juridictions militaires appliqueront le
code pénal ordinaire mais la procédure pourrait être celle de droit commun et celle
prévue par le code judiciaire militaire).
Les compétences des tribunaux pour enfants ne pourront en aucun cas être transférées
devant les juridictions militaires ; les tribunaux attendront la fin de l’état de siège pour
fonctionner ;
La cour militaire opérationnelle du Nord-Kivu ou celle de l’Ituri garde leurs
compétences de juger les militaires qui ont commis les infractions pendant la guerre
avec les rebelles. Rappelons que les arrêts rendus par la CMO ne sont susceptibles
d’aucun recours c’est-à-dire de voies de recours 45 ordinaires (appel et opposition) ni
les voies de recours extra ordinaires (tierce opposition, révision et pourvoi en
cassation).
Mais il sied de se poser la question ici, cette substitution était-elle faite dans les formes
prescrites par la loi et/ou les instruments internationaux ?
La compétence pénale des juridictions civiles a été transférée aux juridictions militaires
sans que la nécessité et le bien-fondé de cette mesure ne soient précisés. L'article 156 de la
Constitution dispose que les infractions spécifiques qui seraient transférées aux juridictions
militaires dans le cadre de l'état de siège soient déterminées, ce qui n’est pas le cas. Comme
l’a souligné le Comité des droits de l'homme des Nations unies : « Lorsqu’ils proclament un
état d’urgence susceptible d’entraîner une dérogation à l’une quelconque des dispositions du
44
C’est l’Auditeur militaire de garnison qui fait office de la chambre du conseil (article 209 de la loi n°023-202
du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire, JORDC, n° spécial, 20 mars 2003, P1).
45
Article 87, 276 et 279 de la loi n°023-202 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire, JORDC,
spécial, 20 mars 2003, P1.
21
Pacte, les États doivent agir dans le cadre de leur constitution et des dispositions législatives
qui régissent l’exercice des pouvoirs exceptionnels »46.
Notons que cet aspect posait plus le problème en 2021 mais suite à des critiques il y'a eu
quand même des réformes d'autant que le 18 mars 2022, le président Félix TSHISEKEDI a
signé une nouvelle ordonnance qui modifie et complète l’ordonnance 21/016 du 3 mai 2021.
Il y est énuméré dix infractions pour lesquelles les juridictions militaires resteraient
compétentes à l'égard des civils, notamment pour :
Meurtre;
Assassinat;
Enlèvement d'une personne ou arrestation et détention arbitraire ;
Vol commis à l’aide de l’effraction, escalade ou fausses clés ;
Vol commis de nuit dans une maison habitée ou ses dépendances ;
Vol à main armée;
Association de malfaiteurs;
Evasion des détenus;
Atteinte à la sécurité de l’État ;
Torture et extortion47.
En vertu de l’ordonnance, toutes les autres infractions commises par des civils
relèveraient à nouveau de la compétence des juridictions civiles. Cette nouvelle ordonnance
visait à se conformer aux mesures relatives à l'état de siège sur l’obligation de la Constitution
prévue à l’article 156 (2) qui dispose qu’il faut définir les infractions pour lesquelles la justice
militaire serait compétente à l’égard des civils dans le cadre de l’état de siège.
Toutefois, force est de constater qu’elle n'est toujours pas conforme aux normes
internationales en matière de droits humains. Les pouvoirs accordés à la justice militaire sur
les civils sont encore restés trop étendus. Avant que cette précision n'intervienne même si
évidemment l'acte qui en a fait une, fait toujours défaut conformément à l'article 122 de la
constitution du 18 février 2006 telle que modifiée et complétée à ce jour.48
46
Voir Comité des droits de l’homme des Nations unies, Observations générales sur l’article 4 du PIDCP, § 2.
47
Article 6 de l'ordonnance n°21/016 du 03 mai 2021 portant mesure d'application de l'état de siège telle que
modifiée et complétée à ce jour par l'ordonnance n°22/024 du 18 mars 2022.
48
Article 122 alinéa 6 de la constitution du 18 février 2006 : " la détermination des infractions et des peines qui
leurs sont applicables, la procédure pénale, l'organisation judiciaire, la création de nouveaux ordres des
juridictions, le statut des magistrats, le régime juridique du conseil supérieur de la magistrature (...)"
22
L’article 19 alinéa 1 et 2 de la constitution du 18 février 2006 dit : " Nul ne peut être ni
soustrait ni distrait contre son gré que la loi lui assidue." Toute personne a droit que sa cause
soit entendue dans un délai raisonnable par un juge compètent. La constitution a confié aux
juridictions militaires la mission de juger les militaires et les policiers, si ces juridictions
continuant à juger les civils, elles violeraient les articles 19 alinéa 1 et 2 et 156 de la
constitution du 18février 2006.
En droit italien, ce principe a, au départ, justifié l'interdiction d'instituer des tribunaux
extraordinaires, et de transférer une procédure a posteriori, du juge compétent vers un juge
initialement incompétent. Au fil du temps, cette dernière interdiction fut abandonnée. 49
Notons à ce point qu'il y'a des divergences au niveau international s'agissant de la
conciliation du droit au juge naturel et les circonstances exceptionnelles.
D'une part par la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples, les juridictions
militaires ne peuvent en aucune circonstance, juger les civils 50. D'autre part, par contre la
Comité des droits de l'homme de l'Organisation des Nations-Unies (ONU) n'émettent pas
d'avis contraire à la compétence des juridictions militaires à juger les civils. Ce pendant, il ne
l'admet qu'à condition de:
Respecter les prescrits du droit à un procès équitable tel que proclamé par l'article 14
du PIDCP ;
Ne pas limiter les garanties de ce droit, suite au caractère militaire ou exceptionnel du
tribunal en question ;
Recourir aux juridictions militaires pour juger les civils à titre d'exception, c'est-à-dire
dans le seul cas où l'État partie peut démontrer que les recours à de tels tribunaux est
nécessaire et justifié par des raisons objectives et sérieuses et ou, relativement à la
catégorie spécifique des personnes et infractions en question, les tribunaux civils
ordinaires ne sont pas en mesure d'entreprendre ces procès.51
En dehors des cas précis ci-dessus, la justice, les justiciables civils qui se verraient
poursuivi par les juridictions militaires ont le droit de saisir la cour constitutionnelle pour
contester la compétence de ces juridictions des lors que la constitution à prévu qu’ils seront
jugés par les juridictions du droit commun sur la base des articles 19 alinéa 1 et 2 et 156 de la
49
S. GUINCHARD et alii, Droit processus, droit commun et droit comparé du procès équitable, 5ē éd. Dalloz,
2009, Paris , n°314, pp. 679 et 680 cité par J.KAKULE KAUSA, op.cit pp.11.
50
Directives et principes sur le droit à un procès équitable et l'assistance judiciaire en Afrique, disponible sur
http://www.achpr.org/public/Document.file/French.pdf, consulté le 6 juillet 2024.
51
Observation générale n° 32 du comité de droits de l'homme de l'ONU, disponible sur
http://www.conernedhistorians.org/content_files/file/to/193.pdf, consulté le 6 juillet 2024.
23
constitution du 18 février 2006. C’est pourquoi, il est urgent d’adapter le code judiciaire
militaire du 18 novembre 2002 à la constitution du 18 février 2006.
Cette même position est soutenue par le professeur Nyabirungu dans son étude sur la
compétence judiciaire partagée entre les juridictions militaires et les juridictions civiles en
matière de crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité. On a entendu des réflexions à
haute voix, selon lesquelles, les juridictions militaires pouvaient juger les civils car la
Constitution ne l’interdisait pas.
C’est perdre de vue qu’en matière judiciaire, la compétence est d’attribution ; elle ne
se présume pas. Elle doit être prévue par un texte pertinent. Si la compétence des juridictions
militaires sur les membres des FARDC et de la PNC peut et doit être affirmée, c’est parce que
la Constitution l’a ainsi décidé. Et si le Constituant voulait que cette compétence s’exerce sur
les civils, il l’aurait certainement et expressément dit. S’il a pu le dire pour les militaires et les
policiers, rien ne l’empêchait de le dire pour les civils. S’il ne l’a pas dit, c’est parce que telle
n’était pas sa volonté de voir les juridictions militaires juger les civils.
Une telle règle de valeur constitutionnelle ne saurait être contredite, contournée ou
déviée par une disposition légale ou réglementaire. Depuis la Constitution du 18 février 2006
telle que modifiée à ce jour, les juridictions militaires n’ont aucune compétence sur les civils,
et tous les jugements des civils par les juges militaires sont autant des violations de la
Constitution, et toutes les arrestations, détentions et condamnations opérées dans le cadre de
telles procédures, sont autant d’arrestations, de détentions et de condamnations arbitraires,
susceptibles à donner lieu à réparation.
Toutes ces critères que nous avons relevées dit Telesphore Kavundja contribuent sans
doute à la suppression des juridictions militaires en temps de paix selon le professeur allant
même par les enseignements du droit comparé, la loi N°023-2002 du 18 novembre 2002
portant code judiciaire militaire en République Démocratique du Congo tout comme
l’ordonnance loi N°72-060 du 25 septembre 1972 portant institution du code de justice
militaire s’est largement inspirée de l’ancien code de justice militaire français or, la France a
supprimé les juridictions militaires en temps de paix, il en est de même en Belgique où les
prédictions militaires sont également supprimées en temps de paix.
Etats démocratiques de la famille romano-germanique à laquelle appartient
République Démocratique du Congo, les juridictions militaires ont été supprimées en temps
de paix.
24
Cela étant une précision importante doit être apportée à la compétence personnelle de
principe des juridictions militaires : " les juridictions militaires sont incompétentes à l'égard
des personnes âgées de moins de dix-huit ans"52.
En excluant de la compétence des juridictions militaires les personnes âgées de moins
de 18 ans, le législateur congolais a introduit une innovation majeure et, il a pour ce faire,
voulu ainsi se conformer aux divers instruments internationaux visant la protection des droits
de l'enfant. Constatons que cet article 114 code judiciaire militaire accorde avec le principe n°
7 des principes sur l'administration de la justice par les tribunaux militaires. Ce principe
consacré à "l'incompétence des tribunaux militaires pour juger les mineurs de 18 ans", dispose
en effet que "les mineurs, relevant de la catégorie des personnes vulnérables, ne doivent pas
être poursuivis et jugés que dans le strict respect des garanties prévues par la convention
relative aux droits de l'enfant et l'ensemble de règles minima des Nations Unies concernant
l'administration de la justice pour mineurs ( règles de Beijing)"; et qu'"en aucun cas, ils ne
devraient, par conséquent, être soumis à la compétence des juridictions militaires.
Il faudra toutefois relever que l'intitulé de ce principe est ambigu lorsqu'il parle des
"mineurs de 18 ans", alors qu'à 18 ans on n'est plus mineur. C'est en effet l'article 1er de la
convention relative aux droits de l'enfant qui dispose que " (...) un enfant s'entend de tout être
humain âgé de moins de 18 ans.53
Ainsi, c'est à juste titre que le tribunal militaire de garnison de Goma s'était déclaré
incompétent à l'égard des faits mis à charge du soldat DUNIA Donatien prévenu poursuivie
pour tentative d'extorsion au motif qu'au moment des faits le prévenu avait 17 ans 54.
Au-delà de la solution trouvée au problème de la compétence du tribunal militaire de
garnison, ce jugement a le mérite d'avoir énoncé le principe de l'applicabilité des lois de
compétence dans le temps par le juge militaire. En effet, les lois de compétence comme toutes
les lois se succèdent les unes aux autres et cela donne lieu à un doute sur la loi applicable
quand une situation se prolonge sous l'empire des 2 ou plusieurs mois contenant des
dispositions contraires. C'est-à-dire les faits sont commis sous l'empire d'une loi mais ne sont
jugés que sous l'empire d'une nouvelle loi.
In specie casus, les faits pour lesquels le prévenu DUNIA a été déféré devant le
tribunal militaire de garnison de Goma ont été perpétrés sous l'ordonnance-loi n°72/060 du 25
septembre 1972 portant code de justice militaire qui, spécialement à son article 129 rendait
52
Article 14 du code judiciaire militaire.
53
Jacques MBOKANI, notes de cours de droit pénal et procédure pénale militaires, inédit, UNIGOM, 2021-
2022, p26.
54
TMG GOMA, RP, le 11/10/2007, Affaire Aud. Mill. Garnison contre soldat DUNIA, n°978, p6.
25
compétence aux juridictions militaires de juger les militaires mineurs. Mais l'instruction de la
cause l'a été sous la loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire qui
exclut les mineurs de moins de 18 ans à la compétence des juridictions militaires.
Cependant, rappelons qu’il est admis que les lois d'organisation judiciaire, de
compétence et des procédures sont des lois de forme et comme telles, elles visent à assurer
une meilleure administration de la justice et cours normal de tout procès surtout elles profitent
finalement au prévenu55.
Il découle de cette règle que le code judiciaire militaire étant favorable au prévenu que
l'ordonnance-loi de 1972, le tribunal militaire de garnison Goma en renvoyant le prévenu
devant son juge naturel avait fait une bonne application de la loi.
55
Gaston STEFANI, Georges LEVASSEUR, et Bernard BOULOC, procédure pénale DALLOZ, 1996, p6.
26
56
J.F RENNUCCI, traite de droit européen des droits de l’homme, LGDJ, Montchrétien, Paris 2007, p282.
57
Idem,
27
58
Art 14 du PIDCP, cité par M. CIFENDE KACIKO et S. SMIS, Code de droit international Africain, Edition Larcier, du 1èr
Juillet 2011, p. 212
59
L’article 67 du Statut de Rome qui énumère les garanties dont doit bénéficier l'accusé.
28
60
L’article 19 de la constitution du 18 février 2006
61
Article 28, idem
62
. I KAMBALA MUKENDI, op.cit., p.11
29
Il ne s’agit pas non plus de faire une revue des violations des droits de la défense mais plutôt
de démontrer les difficultés auxquelles se heurtent les accusés dans la jouissance ou l’exercice
de leurs droits. Dans ce cadre, ce paragraphe traite des questions des droits de la défense qui,
bien qu’elles existent dans tout procès, prennent une dimension particulière dans le procès
pénal., nous nous intéresserons essentiellement à la procédure pénale devant les tribunaux
militaires.
Le Code congolais de procédure pénale ne définit pas les droits de la défense. Ces derniers
dont la définition est donnée par la doctrine, sont cependant consacrés dans la Constitution
congolaise et dans les traités internationaux des droits de l’homme auxquels la RD Congo est
partie.
Pour Pradel, au sens large, les droits de la défense « incluent toutes les règles qui
tendent à protéger le suspect, la personne mise en examen, l’accusé ou le prévenu contre
l’arbitraire ou l’excès de zèle des autorités (règles régissant la garde à vue ou interdisant
l’obtention des preuves ou imposant au juge l’obligation de motiver sa décision). Dans un sens
plus étroit, qui intéresse la seule phase de l’instruction, les droits de la défense comprennent
deux prérogatives : le droit à l’assistance d’un avocat et le droit de participer à l’instruction
».65
Ces premières définitions semblent limiter les droits de la défense à la phase
préparatoire du procès pénal. Même s’il concède qu’au sens large, ils s’exercent sur
l’ensemble du procès pénal, a contrario, il laisse penser qu’en dehors de cette période
privilégiée, les droits de la défense ne sont plus garantis.
Démocratique du Congo. Les objectifs poursuivis étaient de poser un diagnostic complet sur le fonctionnement
du secteur de la justice en évaluant les réformes entreprises ; de créer un consensus autour des réformes et
actions prioritaires ; de définir les modalités de mise en œuvre des réformes ; de déterminer le mécanisme du
suivi, et enfin, de porter une attention particulière au niveau de l’ordre prioritaire des recommandations. Voir :
République Démocratique du Congo, Ministère de la Justice et droits humains, Rapport général des Etats
généraux de la justice en République Démocratique du Congo. Kinshasa, du 27 avril au 02 mai 2015, Kinshasa,
Ministère de la justice, 2015
65
Jean PRADEL, Procédure pénale, 9ième éd ; Paris, 1997, p. 537.
31
Les droits de la défense ne sont pas à circonscrire aux seules phases préparatoires au
procès, mais à l’ensemble du procès pénal. 66 En effet, le législateur congolais a institué toute
une série de mesures destinées à assurer le respect des droits de la défense aussi bien en phase
préliminaire que pendant la phase de l’instruction ainsi que pendant la phase jugement.
Dès lors, on peut définir les droits de la défense comme étant « l’ensemble des
prérogatives qui garantissent à l’inculpé la possibilité d’assurer effectivement sa défense dans
le procès pénal et dont la violation constitue une cause de nullité de la procédure même si
cette sanction n’est pas expressément attachée à la violation d’une règle légale ». 67
Connoté pénalement, les droits de la défense sont en réalité une notion de droit
processuel. Ils transcendent horizontalement toutes les branches du droit. En effet, le
développement des autres branches du droit, la fausse idée selon laquelle les droits de la
défense appartiennent exclusivement à la procédure pénale dépérit progressivement au profit
d’une évidence, aujourd’hui incontestée et reconnue de tous, les droits de la défense
transcendent les branches du droit. Ils constituent un élément intangible du procès.
66
Bernard BOULOC, Georges LEVASSEUR, Gaston STEFANI, Procédure pénale, 19ième éd., Paris, 2004, p. 30.
67
Gerard CORNU, Vocabulaire juridique, Coll. Quadrige, 7ième éd, Paris 2005.
68
Georges WIEDERKEHR, Droits de la défense et procédure civile, D. 1978, chron. n°8, p.36; Georges
BOLARD, Les principes directeurs du procès civil : Le droit positif depuis Henri Motulsky. JCP 1993, I, 3693;
Jean VINCENT, Serge GUINCHARD, Procédure civile, 27ième éd, Paris, 2003, pp. 543 et 544;
Jacques NORMAND, Le rapprochement des procédures civiles à l’intérieur de l’Union européenne.
Mélanges Roger Perrot, Paris, 1995, p. 337.
69
Jean-Marie BRETON, Le Conseil d’Etat et le principe du contradictoire : Réflexions sur les méthodes du juge
administratif et les exigences procédurales, PA du 12 février 1997, p. 11.
70
Asteris PLIAKOS, Les droits de la défense et le droit communautaire de la concurrence, Bruxelles, 1987, p.
295 ; Bernard BOULOC, Les droits de la défense dans la procédure pénale applicable en matière de concurrence,
Rev. sc. crim. 1982, p. 513.
71
William BARANES, Marie-Anne FRISON-ROCHE, Jacques-Henri ROBERT, Pour le droit processuel.
72
Serge GUINCHARD, Xavier LAGARDE, et alii, Droit processuel. Droit commun et droit comparé du procès
équitable, 4ième éd., 2007, p. 782.
32
Toutefois, en raison de leur trop forte connotation pénale, certains auteurs 73 préfèrent
le vocable du principe du contradictoire aux droits de la défense lorsqu’il s’agit de traiter de la
procédure civile. En effet, l’exercice des droits de la défense au pénal renvoie l’image d’un
procès déséquilibré entre l’accusation et la défense.
Or, tel n’est pas l’esprit du Code de procédure civile. Au surplus, de nombreuses
manifestations des droits de la défense peuvent être considérées comme des applications du
principe du contradictoire. Enfin, certains droits de la défense sont spécifiques à la matière
pénale et ignorés de la procédure civile, du fait de l’équilibre initial entre les parties au procès.
Leur supériorité est d’évidence. Et, il est acquis que les droits de la défense
appartiennent à ces derniers principes ». 74 Ils sont donc une valeur fondamentale issue du droit
naturel.
73
MUKADI MBONYI et KATUALA KABA KASHALA, Procédure civile, Kinshasa, 1999, pp. 68 et 81.
74
Rémy CABRILLAC, Marie-Anne FRISON-ROCHE et Thierry REVET, (dir.) Libertés et droits fondamentaux,
9ième éd., Paris, 2003, p. 470.
75
Giorgio Del VECCHIO, La justice-la vérité. Essai de philosophie et morale, Paris, 1955, p. 129.
76
Jacques LEAUTE, Les principes généraux relatifs aux droits de la défense, Rev. sc. crim. 1953, pp. 449.
33
Les droits de la défense ne sont pas consacrés dans les seuls textes nationaux. En tant
que principe général de droit universellement admis issu du droit naturel, ils sont également
consacrés dans les instruments juridiques internationaux.
Au plan international, la Déclaration universelle des droits de l’homme est le tout premier
instrument juridique à avoir traité des droits de la défense et des principes de l’équité des
procédures en général à travers ses articles 8, 10 et 11 alinéa premier.
Par la suite, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ci-après
PIDCP) dont l’article 14 contient des règles élémentaires de droits de la Défense qui doivent
être appliqués en tout Etat, devant toute juridiction et en toute circonstance, est venu affirmer
ces droits. En effet dispose-t-il notamment, « toute personne accusée d’une infraction pénale a
droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes :
a) A être informée, dans le plus court délai, dans une langue qu’elle comprend et de
façon détaillée, de la nature et des motifs de l’accusation portée contre elle ;
b) A disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à
communiquer avec le conseil de son choix ;
c) A être jugée sans retard excessif ;
d) A être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoir l’assistance d’un
défenseur de son choix ; si elle n’a pas de défenseur, à être informée de son droit d’en avoir
un, et, chaque fois que l’intérêt de la justice l’exige, à se voir attribuer d’office un défenseur,
sans frais, si elle n’a pas les moyens de le rémunérer ;
e) A interroger ou faire interroger les témoins à charge et à obtenir la comparution et
l’interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;
f) A se faire assister gratuitement d’un interprète si elle ne comprend pas ou ne parle
pas la langue employée à l’audience ;
77
Jacques LEAUTE, Les principes généraux relatifs aux droits de la défense, Rev. sc. crim. 1953, pp. 449.
78
Gérard CORNU, Jean FOYER, Procédure civile, Coll. Thémis, Paris, 1958, p. 373.
79
Henri VIZIOZ, Etudes de procédure, Bière, 1956, n°240, p. 449.
34
En droit interne congolais, les droits de la défense sont une notion à valeur
constitutionnelle. En effet, ils sont consacrés par la Constitution qui dispose à son article 19
que le droit de la défense est organisé et garanti. Toute personne a le droit de se défendre elle-
même ou de se faire assister d’un défenseur de son choix et ce, à tous les niveaux de la
procédure pénale, y compris l’enquête policière et l’instruction pré juridictionnelle. Elle peut
se faire assister également devant les services de sécurité.81
80
Article 14 para.3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, in JORDC,
numéro spécial, avril 1999.
81
Articles 19 al.3, 4 et 5 de la Constitution de la RD Congo du 18 février 2006.
82
Article 17 de la Constitution de la RD Congo du 18 février 2006 ; articles 1 er et 1er bis du Décret du 30 janvier
1940 portant code pénal congolais tel que modifié et complété par la loi n°15/022 du 31 décembre 2015, in
JORDC, numéro spécial, Kinshasa, 29 février 2016.
83
Article 19 al. 2 et 21 de la Constitution de la RD Congo du 18 février 2006.
84
T.P.I.Y., Ch. II du 25 septembre 1996, Aff. Z. Deadic et al., IT-96-21-T. Décision tendant à obtenir les
documents dans la langue de l’accusé ; T.P.I.Y., du 29 mai 1996, Aff. Erdemovic, IT-96-22-I. A propos de la
désignation d’un avocat commis d’office qui ne parlait ni l’anglais ni le français, il lui était difficile d’assurer la
défense de l’accusé.
35
tribunaux des droits de l’homme comme la Commission africaine des droits de l’homme 86 et
de la Cour européenne des droits de l’homme 87 ou la Cour suprême de justice de la RD
Congo,31 sanctionnent les violations des droits de la défense.
Cependant, le Code de procédure pénale ne contient pas des règles élaborées des droits
de la défense. En effet, son article 73 du CPP dispose seulement que chacune des parties peut
se faire assister d’une personne agréée spécialement dans chaque cas par le tribunal pour
prendre la parole en son nom.88 Cela étant, les dispositions constitutionnelles nous semblent
larges et à même d’assurer les garanties relatives aux droits de la défense.
De plus, les autorités judiciaires congolaises, et plus particulièrement les juges, peuvent
appliquer les dispositions de l’article 14 du PIDCP pour garantir les droits de la défense, et ce
conformément à l’article 153 de la Constitution89 qui fait des traités internationaux dûment
ratifiés, une des sources du droit applicable.
Les droits de la défense sont donc un principe de droit naturel reconnu par l’ensemble
des institutions judiciaires nationales et internationales, quoique les pratiques prétoriennes en
RD Congo attestent leur violation.
85
CPI, Situation en République Démocratique du Congo, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Arrêt relatif à
l’appel interjeté par Thomas Lubanga Dyilo contre la décision du 3 octobre 2006 relative à l’exception
d’incompétence de la Cour soulevée par la Défense en vertu de l’article 192‐a du Statut, le 14 décembre 2006,
ICC‐01/04‐01/06‐772‐tFRA para. 36-39. Voir aussi à ce sujet : Jean-Marie BIJU-DUVAL, La défense devant la
Cour pénale international, AJ pénal 2007, p. 257.
86
Commission Africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication n° 393/10, Institute for Human
Rights and Development in Africa et autres C. République Démocratique du Congo, juin 2016.
87
Cour européenne des droits de l’homme (ci-après CEDH) 08 février 1996, Aff. Murray c/RoyaumeUni, req.
N°18731/91 ; JCP 1997, I, 4000, obs. F. Sudre ; CEDH 23 novembre 1993, Aff. Poitrimol c/France, Série A,
n°277-A ; Rev. sc. crim. 1994, obs. R. Koering-Joulin, pp. 362-363. Voir aussi Fréderic SUDRE, Jean-Pierre
MARGUENAUD, Jean-Pierre., Joël ANDRIANTSIMBAZOVINA et alii, Les grands arrêts de la Cour européenne
des droits de l’homme, Coll. Thémis, 4ième éd., Paris, 2007, pp. 360-362.
88
Article 73 al.1er du Décret du 6 août 1959 portant Code de procédure pénale, tel que modifié par la loi
n°15/024 du 31 décembre 2015 modifiant et complétant le Décret du 6 août 1959 portant Code de procédure
pénale, in JORDC, 57ième année, numéro spécial, Kinshasa, 29 février 2016.
89
Article 153 al. 4 de la Constitution de la RD Congo du 18 février 2006. Il dispose notamment que les Cours et
Tribunaux congolais, civils et militaires appliquent les traités internationaux dûment ratifiés, les lois, la coutume .
36
ou de se faire défendre par un défenseur de son choix et ce, à tous les niveaux de la procédure
pénale, y compris dans l'enquête policière et l'instruction pré juridictionnelle " 90
Par contre, le code judicaire militaire à son article 61 al 2 vient restreindre ce droit de
la défense consacré par la constitution congolaise à deux niveaux :
1°. D’une part, ces avocats, défenseur militaires doivent être de la nationalité congolaise. A ce
sujet selon Freddy MUKENDI, cette exigence de la nationalité congolaise n’est pas
suffisamment justifiée dès lors que les étrangers peuvent, sous réserve de réciprocité exercer
leur ministère devant les juridictions ordinaires congolaises. Il soutient sa thèse en avançant
le principe en droit international selon lequel un prévenu peut être assisté par un conseil qui
n’a pas la nationalité de la juridiction devant laquelle il plaide92.
90
Article 19 al 3 de la constitution du 18 février 2006
91
Loi n°15/024 du 31 décembre 2015 modifiant et complétant le décret du 06 août 1959 portant code de
procédure pénale.
92
F. MUKENDI, procédure pénale militaire congolais, Kinshasa ,2013, pp. 138-141.
37
Si nous transposons ces arguments avancés par cet auteur, la RDC étant signataire de
plusieurs entre elles, l’article 61 du code judiciaire militaire est donc contraire à ces
conventions. Ainsi pour concilier cet article à ces normes et l’adapter au contexte actuel de
l’état de siège au nord Kivu, il est impérieux pour les juridictions militaires, de prendre des
dispositions pouvant permettre à un accusé de se faire assister par un conseil de son choix
quel que soit la nationalité de ce dernier.
2° D’autre part, les défenseurs judiciaires ne peuvent exercer leur ministère devant les
tribunaux militaires de garnison et de police du ressort du tribunal de grande ou ils sont
inscrits93. Cette limitation est concevable aussi longtemps que la loi sur le barreau l’admet.
La question qui subsiste est celle de savoir si au sein des juridictions militaires il y a
une limitation quant à l’exercice des fonctions des défenseurs militaires agrées. Ceux-ci
peuvent en effet, assister les prévenus devant toutes les juridictions militaires y compris les
cours militaires et la haute cours militaire, alors même que leur désignation n’est pas faite en
fonction de leur grade par rapport aux prévenus qu’ils assistent 94 (celui-ci peut être supérieur
en grade que le défenseur militaire).
C’est donc à juste titre que le colonel MUKENDI critique le recours à des militaires
dont la maitrise du droit n’est pas toujours évidente pour défendre les prévenus qui
comparaissent devant les cours militaires alors que les défenseurs judiciaires n’y sont pas
admis.95
Notons que cette exigence mérite d’être éclairée. En effet, il y a une controverse
doctrinale quant à ce qui concerne la conception de ces défenseurs militaires agrées. Les uns
estiment que le législateur avait envisagé cette hypothèse d’autant plus qu’il avait estimé que
ces défenseurs étant policier maitrisent mieux les règlements militaires, les effets militaires, la
discipline militaire, la manipulation des armes, les incriminations purement militaires etc…
D’autres estiment que le législateur avait voulu lutter contre les abus des avocats
notamment dans l’excès de fixation des honoraires. Aujourd’hui, cette controverse est désuète
par plusieurs hypothèses : la première est qu’en période de l’état de siège il n’y a pas que les
militaires qui sont justiciables des juridictions militaires. Les civils n’ayant pas commis les
93
Article 62 du code judiciaire militaire
94
Article 63 du code judiciaire militaire
95
F. MUKENDI op. Cit p.130.
38
infractions militaires devront-ils bénéficier de l’assistance d'un défenseur militaire agréé pour
les infractions du droit commun peut être que ce dernier n'est ni juriste ou n'a même pas fait
aucune formation en droit ?
Concernant le droit moderne qui fait valoir sur tout le droit à un procès équitable.
Comme nous l'avons souligné avant le prévenu a droit de se faire assister par un défenseur de
son choix et cela à tous les niveaux de la procédure pénale. Cependant, si le prévenu est
indigent il lui est nommé un avocat pro deo et devant les juridictions militaires un défenseur
militaire agréé.
Néanmoins, l'expression tous les niveaux de la procédure pénale attire notre attention.
Les défenseurs militaires agréés sont désignés par le président du tribunal militaire qu'en est-il
de l'assistance de ce prévenu pendant l'enquête policière ?
Pendant l'état de siège en cours ces questions n'ont pas eu de succès il en découle de
l'affaire Omari ramazani Jean et consorts contre l'auditeur militaire de garnison de Goma
ainsi que les parties civiles représentées que nous pouvons illustrer ces défis 96. Alors que les
prévenus étaient accusés de l'enlèvement d'enfant et association des malfaiteurs lesquelles
infractions encourent la peine de mort (peine capitale privative des libertés et de la vie) surtout
en période de l'état de siège où les peines sont aggravées au sein des juridictions militaires.
Soulignons que le pasteur Omari ramazani a été acquitté.
Mais cet aspect mérite d'être éclairé parce que les prévenus Tumusifu Magloire,
Mapatano birimweragi Dieu Merci et Rodrigue Dieu Merci Safari même à l'audience publique
96
TMG GOMA, RP n° 5002/021 le 17 novembre 2022, Affaire, Aud Mil Garnison contre OMARI RAMAZANI
et consorts.
97
Article 12 de la constitution du 18 février 2006
39
ils étaient assistés par les défenseurs militaires agréés (Commissaire Ilulu kalanga, Lieutenant-
colonel Amurabi bangwa et Capitaine Katsunga Blaise) tous désignés par le président du
tribunal militaire de garnison Goma conformément à l'article 63 code judiciaire militaire. Ça
parait clair que les prévenus n'avaient pas assez des moyens pour se constituer un conseil98.
C'est ici qu'il y'a le problème d'autant plus que ces prévenus n'avaient pas bénéficiés de
l'assistance pendant l'enquête policière. Faut-il envisager alors l'assistance des civils par des
défenseurs militaires agréés devant les juridictions militaires pour les infractions du droit
commun aussi longtemps que ces derniers ne sont pas nécessairement juristes ? Ou faudrait-il
qu'on envisage la désignation des avocats pro deo (sont présumés avoir la maîtrise du droit) en
faveur d'un civil au lieu et place d'un défenseur militaire agréé (la maîtrise du droit est à
craindre et son indépendance vis-à-vis du juge qui les a agréés) pour les infractions du droit
commun ?
Le juge aurait pu désigner un avocat pro deo qui a des compétences juridiques pour
que ces prévenus puissent se rattraper du vide ou du fait qu'ils n'étaient pas assistés au cours
des enquêtes policières. L'avocat pourrait faire mieux que le défenseur militaire agréé qui n'est
pas nécessaire investi de la qualité de juriste.
Faisant un coup d'œil à la doctrine le colonel MUKENDI un peu loin, écrit encore qu'"
il observe souvent à l'audience un déséquilibre manifeste entre ces militaires, réduits parfois à
faire de la simple figuration et le représentant du ministère public (...)99.
C'est dans ce sens même que le relève le professeur Jacques MBOKANI comme il est
apparu dans l'affaire cheka et consorts que la différence de grade entre défenseur militaire (de
grade inférieur) agréé par le tribunal par un magistrat militaire de grade supérieur au
défenseur précité peut impacter négativement sur la qualité de la défense100.
Cet aspect se fait remarquer premièrement toujours dans l'affaire Omari ramazani et
consorts le défenseur militaire agréé à l'occurrence le commissaire Ilulu kalanga Jacques en
faveur de ces trois prévenus, la parole lui était accordée que rarement et cela parce que le juge
voulait faire respecter l'ordre de préséance qui, selon lui est d'ordre public. Deuxièmement
l’indépendance des défenseurs militaires agrées n'est pas totalement garantie aussitôt qu'ils
sont rémunérés par le tribunal qui les a agréés.
Toutefois, relevons que dans cette affaire ayant opposé l'auditeur militaire de Garnison
Goma à Omari ramazani et consorts nous rappeler l'incompatibilité de fonctions des membres
de la police et l'article 52 du décret-loi 002/2002 du 26 janvier 2002 portant institution,
organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise.102
Le droit de toute personne « à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable » est
garanti par la constitution103 et par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.104
Bien que ce qui constitue un « délai raisonnable » ne soit pas défini avec
précision,105 il est indéniable que ce droit est régulièrement violé devant les tribunaux
militaires.106Il est donc difficile d'en dégager une définition universelle néanmoins cette
notion peut-être illustrée à partir de la gravité des faits et au nombre des dossiers enrôlés par
jour.
Les procédures devant les tribunaux militaires oscillent en effet entre deux
extrêmes : soit elles sont sommaires et expéditives, soit elles traînent indéfiniment. C'est face
101
Idem.
102
L’article 52 du décret-loi 002/2002 du 26 janvier 2002 portant institution, organisation et fonctionnement de
la police nationale congolaise.
103
Article 19 de la constitution du 18 février 2006.
104
Article 7 (1) (d) de la charte africaine des droits et des peuples.
105
La jurisprudence de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples contient néanmoins des
indications plus ou moins précises. Voir par exemple Lubuto c. Zambie RADH 2001 38 (CDH 1995) ; Mazou c.
Cameroun RADH 2001 8 (CDH 2001) ; M’Boissona (au nom Bozize) c. République Centrafricaine RADH 2001
25 ;(CDH 1994) ; Mouvement Burkinabé des Droits de l’Homme.
L’Homme et des Peuples c. Burkina Faso RADH 2001 53 (CADHP 2001).
106
Marcel WETSH'OKONDA KOSO, République Démocratique du Congo : la justice militaire et le respect des
de l'homme...p.80.
41
à cette première hypothèse que fait face l'administration de la justice en période de l'état de
siège.
Avant de parler ce qui serait à la base de ce défi notons d'entrée de jeu que le
tribunal de grande instance est constitué de 4 chambres. Alors que le tribunal militaire de
garnison est constitué de 2 chambres. Il se pose déjà ici un problème qui est dû à des charges
des dossiers devant le TMG en cette période où il doit connaître plusieurs affaires qui
traînent.
Compte tenu de la gravité de ces genres des infractions certains dossiers restent
sans être traités indéfiniment et il y'a des remises excessives. Cela se fait constater également
pendant l'affaire Jean Omari ramazani et consorts contre l'auditeur militaire de garnison il
s'est observé que certaines affaires ayant été inscrites au rôle n'étaient pourtant pas traitées
suite à l'insuffisance du temps, ce qui faisait à ce que les conseils qui s'occupaient de ces
autres dossiers se trouvent dans une situation où leurs clients ne jouissent plus de la
présomption d'innocence.
107
Marcel WETSH'OKONDA KOSO, République Démocratique du Congo : la justice militaire et le respect des
droits de l'homme...op. cit., p.80.
42
procédure suivie devant ces juridictions est, pour une grande partie, celle qui est d'application
devant les juridictions de droit commun.
La célérité dans la procédure militaire que l'on peut qualifier de spectaculaire trouve
une illustration dans plusieurs indicateurs. Le délai d'appel est de 5 jours 109 en procédure
pénale militaire alors qu'il est de dix jours en procédure pénale ordinaire 110. Le délai de
citation à prévenu est, en temps de paix de deux jours francs et en temps de guerre, de trois
heures et ce, à l'exclusion des délais de distance devant la justice militaire 111 alors qu'il est de
huit jours francs augmentés des délais de distance pour la procédure pénale ordinaire112.
C'est ici que le professeur Jacques intervient, en effet, qu'il s'agisse du délai de
citation ( y compris en temps de guerre), du délai de remise pour pouvoir s'imprégner du
dossier afin de mieux organiser sa défense, le droit congolais (législation et jurisprudence) est
difficile à concilier avec les exigences du droit à un procès équitable pour l'accusé. L'on peut
se demander dans quelle mesure un accusé peut véritablement et efficacement préparer sa
défense dans des délais aussi courts que ceux que prévoit le code judiciaire militaire.
108
Freddy MUKENDI, procédure pénale militaire congolaise, Kinshasa, édition on s'en sortira, 2013, p.2.
109
Article 258 alinéa 2 du code judiciaire militaire.
110
Article 97 du code de procédure pénale.
111
Article 320 du code judiciaire militaire.
112
Article 62 alinéa 2 du décret du 06/08/1959 portant code de procédure pénale in. B.O, 1959, p 1934 tel que
modifié par la loi n°06/019 du 20 juillet 2006, in JO RDC, et par la loi n°15/022 du 31 décembre 2015 in JO
RDC n° spécial, 29 février 2016.
43
Pour répondre à cette question par rapport au contexte actuel de l'état de siège,
notons d'une part que pour certaines infractions militaires comme l'abandon de poste cela
pourrait peut-être concevable. Ce n'est que dans les cas où il y'a des cas graves que cela
poserait problème. Le professeur Jacques écrit encore, il convient de rappeler que l'article 14
(3) (b)du pacte de 1966 prévoit que " toute personne accusée d'une infraction pénale a droit,
(...) à disposer de temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense (...)".
La RDC ayant ratifié le pacte sans aucune réserve, il s'ensuit que cette disposition
s'applique en droit congolais, y compris dans les procès devant les juridictions militaires. Les
directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire en Afrique
précisent que: " pour déterminer si le délai accordé à un accusé pour préparer sa défense est
suffisant, il faut notamment tenir compte de la complexité de l'affaire, de l'accusé aux
éléments de preuve, du délai prévu par les règles régissant telle ou telle procédure ou toute
atteinte éventuelle aux droits de la défense"113. C'est également dans ce même sens que le
comité des droits de l'homme a déclaré, dans l'observation générale n°32, que "le temps
nécessaire dépend de ces d'espèces"114
Quid du « délais raisonnable » En quoi est-ce que la procédure de flagrance ne s’aligne pas
derrière ce principe ?
Toute personne accusée d’une infraction pénale doit pouvoir disposer du temps nécessaire
pour préparer sa défense116.
Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable constitue un aspect important du principe de «
l’égalité des armes ». La défense et l’accusation doivent être traitées de manière à ce que les
deux parties puissent préparer le dossier et présenter leurs arguments en toute égalité 117.
Nous pensons que ce droit doit être associé à la question du temps et des facilités nécessaires
pour préparer la défense.
Concernant le temps nécessaire pour préparer sa défense, il sied de noter que le temps
nécessaire à la préparation de la défense dépend de la nature de la procédure en cours (par
exemple, s’il s’agit de l’instruction, du procès ou du recours en appel), ainsi que des éléments
de fait de chaque affaire. Il est notamment fonction de la complexité de l’affaire, des
conditions d’accès pour l’accusé aux informations et aux éléments de preuve (ainsi que de la
taille même du dossier) et des possibilités dont il dispose pour communiquer avec son avocat,
ou encore des délais fixés par le droit national, bien que ceux-ci ne puissent à eux seuls être
considérés comme déterminants118.
Il convient de trouver le juste équilibre entre le droit d’être jugé dans un délai raisonnable et le
droit de disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense119.
Comme nous l’avons évoqué dans les lignes précédentes nous pensons que comme la
procédure de flagrance est une procédure caractérisée par la célérité du procès, le juge prends
sa décision tout en s’alignant derrière l’idée de la vitesse de traitement des dossiers, en droit
positif congolais par exemple, il est prévu que le tribunal siège le même jour ou le prévenu
commet l’infraction flagrante et qu’il prenne une décision sur dispositif.
Avec une telle démarche, aucune chose ne pourrait provoquer l’acquittement du prévenu ;
nous considérons que le législateur en instituant la procédure de flagrance dans
Selon nous il est inconcevable d’organiser ses moyens de défense dans une telle procédure
compte tenu de la célérité que nécessite la flagrance d’un côté. Il est aussi dur de parler du
droit d’être jugé dans un délai raisonnable alors que selon nous, la procédure de flagrance est
organisée de telle manière que le verdict soit celui d’une éventuelle condamnation.
116
Amnesty international, pour des procès équitables, in Amnesty international Publication, Easton Street
Londres Royaume-Uni, 2014. p73
117
Idem.
118
Amnesty international, pour des procès équitables, op.cit. p75
119
Amnesty international, pour des procès équitables, op.cit. p74
45
Dans le cas des juridictions militaires, la détention préventive ou mieux provisoire est presque
entièrement soustraites au contrôle juridictionnel au profit du contrôle hiérarchique.
Rappelons tout d'abord que le mandat d'arrêt provisoire de ces juridictions est d'une durée de
validité de 15 jours. C'est l'auditeur militaire qui statue sur la détention provisoire et la
prorogation à l'expiration de ce délai, cela pour une durée d'un mois renouvelable plusieurs
fois mais sans la possibilité de dépasser douze mois de prorogation.
Le détenu peut être privé dans un premier de son droit à faire un recours devant un juge pour
examiner la légalité de sa détention. Et dans un second temps, l'auditeur militaire chargé de la
légalité de cette détention cumule les fonctions d'organe d'instruction et d'organe de
poursuites.
Concernant le droit de détenu d'être jugé dans un délai raisonnable à défaut d'être
relaxé, il est évident que dans le contexte actuel de l'état de siège, le droit à la célérité de la
procédure ne restera qu'une pure illusion couchée dans la littérature. L'engorgement des
juridictions militaires par une flambée des dossiers, pour ne tenir compte que de ce facteur
pour justifier ce pronostic chaotique 121 .
Conclusion
La défense pénale connaît plusieurs temps forts dans notre circuit judiciaire, depuis
l’arrestation, en passant par la garde à vue, l’instruction par le parquet, l’appel et l’instruction
de la cause par la juridiction de jugement et le prononcé de la décision. A chacune de ces
étapes, elle est, ou peut-être, présente tel que cela est stipulé par la Constitution de la RD
120
Jean de Dieu KAKULE KAUSA op.cit p.22
121
Jean de Dieu KAKULE KAUSA op.cit p.21
46
Congo et les traités des droits de l’homme dûment ratifiés par la RD Congo qui consacrent
nombre des garanties procédurales nécessaires à la jouissance et à l’exercice de leurs droits
par les accusés.
Toutefois, la justice pénale congolaise soumet l’effectivité de l’Etat de droit à une rude
épreuve, car elle connait plusieurs dysfonctionnements caractérisés par la lenteur des
procédures, le non-respect des droits de la défense, le déséquilibre entre l’accusation et la
défense entrainant la mauvaise qualité des décisions judiciaires. S’il est vrai que les différents
conflits qui ont sévi en RD Congo et qui ont pris fin depuis plus de 10 ans, ont affaibli son
administration et détruit les services publics, affectant substantiellement le service public de la
justice, avec des conséquences comme la destruction de l’appareil judiciaire, la montée
parallèle et la métamorphose de la criminalité de masse et l’impunité quasi généralisée.
En outre, Il a été constaté que jusqu'aujourd'hui l'état de siège n'a eu qu'un seul
succès celui de la substitution de la compétence des juridictions pénales ordinaires au profit
de celles militaires (des autorités politiques et administratives au profit de celles militaires),
ainsi que des restrictions des libertés de la population, ce qui semble être sans rapport avec
l’objectif déclaré de l’état de siège qui est de combattre les groupes armés et de protéger la
population civile.
122
Comme l’ont montré les recherches d’Amnesty International
47
Les recherches ont démontrées que toutes ces violations proviennent du fait de la
substitution des juridictions militaires à juger les civils laquelle substitution n'a
malheureusement pas produit ce qu'on attendait d'elle. Nombreux des accusés ont été mis en
péril sous l'utilisation abusive du principe de la célérité qui caractérise ces dernières
juridictions.
Dans la même perspective ceux qui tentaient de critiquer ce régime ont été amené
en détention sans motif notamment les manifestants ou les militants de la lucha, les
journalistes et autres personnes.123 Il en est de même d'au moins 4 députés provinciaux et un
national qui auraient été poursuivi abusivement du fait d'avoir critiqué les effets que
produisent l'état de siège ou le renforcement du pouvoir des autorités militaires au détriment
de ce des autorités civiles et administratives. Il en est de même nombreux droits pourtant
inderrogeables ont été sacrifiés au nom de l'état de siège.
trouvent dans la même situation ont déjà supprimés ces juridictions en temps de paix. Mais
aussi que le code judiciaire militaire étant inspiré par celui de la France et ses réalités, il serait
aberrant voir aujourd'hui la République Démocratique du Congo continuer à garder les
juridictions militaires en temps de paix alors que la France elle-même les a déjà supprimés.
Pas seulement cela mais aussi la rigueur excessive qui caractérise ces juridictions
ne permet pas ces dernières de garantir la sérénité et le respect des exigences d'un procès
équitable qui l'a caractéristique importante pour la formation d'un Etat de droit.
Il en est de même que le professeur nyabirungu qui soutient cette position et que
faisant partie à plusieurs instruments internationaux qui n'envisagent plus l'hypothèse selon
laquelle les juridictions militaires puissent juger les civils, il serait important que la
République Démocratique du Congo emprunter le même chemin que les autres donc retirer et
laisser aux celles juridictions de droit commun la compétence à juger les faits commis par les
civils.
L’état de siège tel que proclamé par le président de la République est une
circonstance exceptionnelle qui a opéré substitue la compétence personnelle des juridictions
de droit commun à celle des militaires par une ordonnance du président de la République
(acte réglementaire). Cette proclamation a fait asseoir des restrictions abusives des certains
droits et libertés fondamentaux des individus. Il a été constaté cependant que malgré
l'instauration de ce régime il n'arrive pas à produire un résultat positif à ce qui concerne la
protection de la société civile et combattre les groupes armés. Force est de constater que la
province du Nord-Kivu est en proie du groupe des terroristes M23 qui veulent occuper une
partie du territoire national et qui déjà en occupe certains milieux il y'a plusieurs mois.
En fin, l’Etat de siège ne pouvant procéder que du respect des libertés des
citoyens, une ordonnance (acte règlementaire) ne peut pas suspendre ou s’ingérer dans une
matière qui relevé de la loi et que donc en ce qui concerne les privilèges de juridiction
pendant l’Etat de siège toutes les règles en cette matière non prévues par la constitution sont
suspendues.
Recommandations
Nous recommandons, pour une bonne administration de la justice devant les
juridictions militaires en temps de paix et des circonstances exceptionnelles et l'efficacité de
l'instauration d'un État de droit en République Démocratique du Congo :
124
NYABIRUNGU MWENE SONGA, étude sur la compétence judiciaire partagée entre les juridictions
militaires et les juridictions civiles en matière des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, Kinshasa,
2017.
125
L'article 4(1) du pacte international des droits civils et politiques.
50
Bibliographie
126
Telesphore KAVUNJA MANENO, incidence de l'état de siège sur l'administration de la justice dans le Nord-
Kivu et l'ituri.
51