Peeling Au Phénol PDF
Peeling Au Phénol PDF
Peeling Au Phénol PDF
50-310-D-10
Peeling au phnol
P Andr
P Evenou
Rsum. Le peeling au phnol est connu depuis longtemps. Cest un peeling profond qui ncessite une
bonne connaissance de la peau, de la cicatrisation et qui ne doit tre utilis que par des mdecins entrans.
Il est indiqu pour le traitement de lhliodermie svre, surtout chez des patients de phototype I, II ou III.
Ses rsultats sont spectaculaires et durables, au prix de suites opratoires lourdes.
Certains incidents et accidents doivent tre connus pour tre traits au mieux.
2001 Editions Scientifiques et Mdicales Elsevier SAS. Tous droits rservs.
Introduction
Les peelings profonds ncessitent lutilisation de formulations
chimiques dont laction atteint le derme rticulaire.
Leur efficacit clinique est trs spectaculaire, au prix de suites
opratoires plus imposantes que celles des autres peelings.
Historique
Ds 1882, le dermatologue allemand Unna tudie les proprits du
phnol sur la peau. Ds 1903, Mackee, dermatologue anglais,
sintresse au phnol dans les cicatrices dacn et publie ses rsultats
en 1952 [25].
En France, pendant la grande guerre , le chirurgien Lagass
lutilise pour faire disparatre les traces de poudre sur le visage et
remarque leffet rajeunissant.
Sa fille Antoinette, infirmire, part pour les tats-Unis, Los
Angeles, avec sa formule secrte de phnol. Elle va y exercer comme
lay peeler de 1920 1930 sous le pseudonyme de Sarah Shaw. Elle
rencontre beaucoup de gens qui veulent connatre son secret quelle
confie Venner-Kellson et Arthur Grad. Quelques salons de lay
peeler sont clbres, dont The House of Renaissance [34, 35].
Pharmacope
Le phnol contient environ 99 % de C6H5OH (acide carbolique ou
acide phnique).
En 1834, il est obtenu par distillation du goudron de houille et il est
depuis synthtis partir du benzne.
Grad, lui aussi lay peeler, va exercer pendant 55 ans Los Angeles.
Il modifie la formule de Venner-Kellson pour la rendre encore plus
active.
Pierre Andr : Ancien chef de clinique-assistant, attach lhpital Henri-Mondor, 51, avenue du Marchalde-Lattre-de-Tassigny, 94000 Crteil, France.
Philippe Evenou : Ancien interne des hpitaux de Paris, attach lhpital Saint-Louis, 1, avenue ClaudeVellefaux, 75475 Paris cedex 10, France.
Toute rfrence cet article doit porter la mention : Andr P et Evenou P. Peeling au phnol. Encycl Md Chir (Editions Scientifiques et Mdicales Elsevier SAS, Paris, tous droits rservs), Cosmtologie et Dermatologie esthtique,
50-310-D-10, 2001, 6 p.
50-310-D-10
Peeling au phnol
Toxicit du phnol
Le phnol est un poison.
Aprs une prise orale de petite quantit, les premires
manifestations sont des nauses et des vomissements, puis apparat
un collapsus avec des troubles respiratoires et des manifestations
pileptiques. Le diagnostic peut tre fait devant des lsions buccales
ulcres et surtout une odeur caractristique des urines qui sont de
couleur gristre.
Si la dose est gale ou suprieure 15 g, la mort survient dans les
premires minutes par collapsus immdiat.
Le phnol est absorb rapidement travers la peau et peut donc
devenir toxique : larythmie cardiaque est la plus svre des
complications dues labsorption systmique. Elle est bien connue
depuis les travaux de Litton en 1973 [23] et de Truppman en 1979 [36].
Il peut survenir un bigminisme, des tachycardies auriculaires ou
ventriculaires, mme chez des patients sans antcdents cardiaques
et llectrocardiogramme de base normal.
Dermatologie esthtique
Les mcanismes exacts daction dun peeling sur la peau ne sont pas
connus ; ils dpendent de la solution utilise et des altrations
causes lpiderme et au derme et passent par les phases de la
rparation des plaies, cest--dire par la cicatrisation. Les altrations
pidermiques entranent la libration de facteurs chmotactiques qui
recrutent les neutrophiles et les monocytes [14]. Les monocytes se
transforment en macrophages et scrtent des facteurs de croissance
pour initier le tissu de granulation. Une nouvelle substance
extracellulaire est produite par les fibroblastes avec une
noangiogense associe une reconstruction pidermique.
Diffrentes formulations
La plus connue est celle de Gordon et Baker (1961). Sa concentration
en phnol est de 48,5 %. Cest une formule qui doit tre prpare
chaque fois.
Celle de Litton (1962) a t beaucoup utilise. Sa concentration est
autour de 50 %. Elle est dlicate prparer mais elle reste stable de
longs mois.
Celle de Venner-Kellson, la concentration de 67 %, est moins
active ; celle de Truppman-Maschek est 53 % ; celle de Grad est
49,5 % ; celle de Soria est 44 % et semble dune grande efficacit.
Plus rcemment, Fintsi (Exoderm) a propos sa formule mais dont
la concentration des constituants reste secrte.
Dermatologie esthtique
Peeling au phnol
Baker-Gordon
3 mL USP de phnol liquide
2 mL deau distille
3 gouttes dhuile de croton
8 gouttes de Septisolt
Litton
cristaux de phnol : 1 livre
eau distille : 8 mL
glycrine : 8 mL
liqufier puis
phnol liqufi : 4 onces
huile de croton : 1 mL
eau distille : 4 onces
stabilit de plusieurs mois
Venner-Kellson
Lysolt : 1 once
huile dolive : 0,5 once
eau distille : 1,5 once
huile de croton : 10 gouttes
complter avec des cristaux de phnol pour remplir 8 onces
la stabilit de la prparation est trs longue
Truppman-Maschek
mlanger 500 g de cristaux de phnol
ajouter 15 mL de glycrine anhydre
prendre 60 mL et ajouter
60 mL deau distille
7 gouttes dhuile de croton pour obtenir 120 mL
garder au rfrigrateur, stabilit trs longue
Grad
12 gouttes dhuile de croton
3 gouttes dhuile dolive
4 onces de cristaux de phnol fusionn (98 %)
4 onces deau distille
mlanger le tout dans un flacon de verre
garder la suspension 6 semaines avant de sen servir
stable pour plusieurs mois
Soria
phnol : 44 %
glycrine : une cuillre soupe
huile de croton : 14 gouttes
dimtylsulfoxide (DMSO) : 5 10 gouttes
eau distille : qsp 100 %
Hetter
formule medium light
16 gouttes de Septisolt
1 goutte dhuile de croton
4 mL de phnol 88 %
6 mL d eau
de ce mlange, on peut prendre 3 mL et y ajouter 6 mL
deau, 2 mL de phnol 88 % pour obtenir la formule
very light
formule heaviest
8 gouttes de Septisolt
3 gouttes dhuile de croton
3 ml de phnol 88 %
2 mL deau
cette formule est particulirement indique pour le
pourtour de la bouche
Une once correspond 28,35 g.
Une livre correspond 453,59 g.
Le Septisolt (hexachlorophne dans de lalcool) permet une
meilleure homognit ; lhuile de croton augmente labsorption
du phnol et augmente la raction inflammatoire.
USP : US pharmacope.
50-310-D-10
Indications
Il sagit dun peeling profond : il faut donc lutiliser pour des rides
profondes.
Le phototype est important prendre en compte ; les phototypes IV,
V et VI sont risque dhyperpigmentation ractionnelle et ne sont
pas a priori de bonnes indications.
Il peut tre utilis de faon localise : rides pribuccales [5, 8], rides
prioculaires ou sur un visage entier.
Les fines cicatrices sont elles aussi amliores [25].
Linterrogatoire doit senqurir dventuels troubles de la
cicatrisation, dantcdents dherps labial, de lexistence dun
diabte, de maladies cardiovasculaires, de la prise concomitante de
mdicaments (photosensibilisants, anticoagulants, isotrtinone).
Comme avant tout acte de dermatologie esthtique, le mdecin se
doit dinformer compltement et clairement le patient du
droulement de lintervention, des suites opratoires et des risques
ventuels (obligation de remettre aux patients un devis).
Prparation au peeling
Classiquement, les auteurs ne prparaient pas la peau des patients.
Cependant, il semble prfrable de le faire dans les cas de phototype
mat, pour viter au maximum les risques dhyperpigmentation
ractionnelle.
Elle peut se faire de 2 4 semaines avant, en appliquant des produits
contenant de la vitamine A acide, des acides de fruits, de
lhydroquinone ou de lacide phytique et en demandant aux patients
dutiliser des protections solaires.
Technique du peeling
Lintervention est faite de prfrence le matin, ce qui vite aux
patients de souffrir la nuit, priode toujours plus angoissante. La
sensation de brlure dure en moyenne 6 heures.
La peau doit tre rase si ncessaire, libre de tout produit, puis
nettoye avec une solution antiseptique et dgraisse par de
lactone ou de lther.
Le patient est plac dans une salle bien ventile (pour liminer les
vapeurs de phnol), quipe dun ventilateur et lon aura eu soin de
dessiner sous le bord infrieur de la mandibule, en position semiassise, une ligne qui guide lapplication du phnol pour viter une
ventuelle ligne de dyschromie trop visible.
Une bonne hydratation du patient par du Ringer lactatet et la pose
dune perfusion de srum glucos pendant lintervention permettent
de prvenir lventuelle toxicit hpatornale de la formule de
phnol utilise.
La mise en place dun cardiomonitoring et dun oxymtre de pouls
est rassurante. Certains posent un patch de trinitrine et une sonde
nasale doxygne.
Cest un peeling douloureux qui ncessite une anesthsie.
Elle peut tre gnrale ou locale.
En cas danesthsie locale, il est prfrable de prparer le patient
avec des anxiolytiques (diazpam, bromazpam...) et/ou des
antalgiques (paractamol, buprnorphine...). Lanesthsie de la face
se fait par blocages tronculaires (supraorbitaire, sous-orbitaire,
mentonnier) et anesthsie locale des rgions jugales. La lignocane
ou la marcane peuvent tre utilises ; ladrnaline doit tre vite
pour rduire au maximum les troubles du rythme cardiaque.
Lapplication du produit pour un visage entier doit suivre certaines
rgles. Le visage est divis en six zones : front, joues, rgion
pribuccale, rgion prioculaire, nez. Chaque zone est traite
sparment et lon attend de 10 15 minutes avant de traiter la
suivante (pour permettre au phnol de sliminer). Lintervention
dure environ 90 minutes.
3
50-310-D-10
Peeling au phnol
1 Phnol pribuccal (solution de Litton) : aspect caractristique du blanchiment.
Dermatologie esthtique
Aspect au troisime
jour aprs un peeling au
phnol full face .
Aspect au cinquime
jour.
Complications
Dans notre exprience, elles sont rares si les soins postopratoires
sont bien conduits ; nanmoins, elles sont possibles et il faut pouvoir
les reconnatre ds le dbut et les traiter le plus efficacement possible
[4, 26]
.
Peeling au phnol
Dermatologie esthtique
50-310-D-10
*
A
*
B
6 Phnol full face (solution de Finzi) (clichs du Dr Vigneron).
A. Avant.
B. Aprs.
*
A
TROUBLES PIGMENTAIRES
*
B
7
Squelles achromiques
tardives (solution de Baker).
TROUBLES DE LA CICATRISATION
Peeling au phnol
50-310-D-10
INFECTIONS
Elles sont en relation avec les produits utiliss comme soins locaux.
Elles peuvent se traduire par un rythme prurigineux et un petit
Dermatologie esthtique
Conclusion
Le peeling au phnol est pratiqu depuis plusieurs dcennies par des
chirurgiens et des dermatologues. Il sagit du peeling le plus profond ;
ses rsultats cliniques sont actuellement reconnus.
En France, il est rest longtemps confidentiel parmi les dermatologues.
Utilis comme il se doit par des mains entranes, il offre cependant des
possibilits de rsultats particulirement spectaculaires.
Son application sur un visage entier nest pas souvent ncessaire et il
peut tre associ dautres peelings (surtout lacide trichloractique)
qui rclament moins de prcautions.
Son utilisation pour la zone pribuccale est trs intressante et sans
aucune toxicit.
Rfrences
[1] Alster T. Improvement of erythematous and hypertrophic
scars by the 585 nm flashlamp pumped dye laser. Ann Plast
Surg 1994 ; 32 : 186-190
[2] Alster T, Williams C. Improvement of hypertrophic and
keloidal median sternotomy scars following treatment with
the 585 nm flashlamp dye laser: a controlled study. Plast
Surg Forum 1994 ; 1-3
[3] Alt TH. Occluded Baker Gordon chemical peel: review and
update. J Dermatol Surg Oncol 1989 ; 15 : 980-993
[4] Alt TH. Avoiding complications in dermabrasion and
chemical peel. Skin AllergyNews (n2)1990 ;
[5] Andr P. Peeling au phnol de la rgion pri-buccale. J Md
Estht Chir Dermatol 1995 ; 87 : 161-167
[6] Ayres S. Dermal changes following application of chemical
cauterants to aging skin. Arch Dermatol 1960 ; 82 : 578-585
[7] Baker T. Chemical face peeling and rhythydectomy. Plast
Reconstr Surg 1962 ; 29 : 199-207
[8] Baker T, Gordon H. Chemical peeling as a practical method
for removing rhytides of the upper lip. Ann Plast Surg 1979 ;
2 : 209-212
[9] Baker T, Gordon H, Mosienko P, Sekinger D. Long-term histological study of skin after chemical face peeling. Plast
Reconstr Surg 1974 ; 53 : 522-525
[10] Beeson WH, McCollough EG. Chemical face peeling
without taping. J Dermatol Surg Oncol 1985 ; 11 : 985-990
[11] Bell E, Sher S, Hull B. The reconstitution of living skin. J Invest
Dermatol 1983 ; 81 : 2-10
[12] Brody H. Update on chemical peel. Adv Dermatol 1992 ; 7 :
275-289
[13] Brown A, Kaplan N, Brown M. Phenol induced histological
skin changes: hazards, techniques and uses. Br J Plast Surg
1960 ; 13 : 158-159
[14] Clark R. Cutaneous tissue repair: basic biologic considerations. J Am Acad Dermatol 1985 ; 13 : 701-725
[15] Dmytryshyn JR, Gribble MJ, Kassen BO. Chemical face peel
complicated by toxic shock syndrome. Arch Otolaryngol
1983 ; 109 : 170-171
[16] Edison RB. Phenol peeling: new standards of excellence.
Aesthet Plast Surg 1996 ; 20 : 81-82
[17] Giese SY, McKinney P, Roth SI, Zukowski M. The effect of
chemosurgical peels and dermabrasion on dermal elastic
tissue. Plast Reconstr Surg 1997 ; 100 : 489-498
[18] Glogau GR, Matarasso SL. Chemical peels. Dermatol Clin
1995 ; 13 : 263-276
[19] Kligman A, Baker T, Gordon H. Long-term follow-up of
phenol face peels. Plast Reconstr Surg 1985 ; 75 : 652-659
[20] Koopman C. Phenol toxicity during face peels. Otolaryngol
Head Neck Surg 1982 ; 90 : 383-384
[21] Litton C. Chemical face peeling. Plast Reconstr Surg 1962 ;
29 : 371-380
[22] Litton C. Observations after chemosurgery of the face. Plast
Reconstr Surg 1963 ; 32 : 554-556
[23] Litton C, Fournier P, Capinpin A. A survey of chemical
peeling of the face. Plast Reconstr Surg 1973 ; 51 : 645-649
[24] Loverme W. Toxic shock syndrome after chemical face
peel. Plast Reconstr Surg 1987 ; 80 : 115-118
[25] Mac Kee G, Kap F. The treatment of post acne scars with
phenol. Br J Dermatol 1952 ; 64 : 456-459
[26] Maloney BP, Millman B, Monheit G, McCollough EG. The
etiology of erythema after chemical peel. Dermatol Surg
1998 ; 24 : 337-341
[27] Nelson B, Fader D, Gillard M. Pilot histologic and ultrastructural study of the effects of medium-depth chemical facial
peels on dermal collagen in patients with actinically
damaged skin. J Am Acad Dermatol 1995 ; 32 : 472-478
[28] Osol A, Pratt R, Altschule M. The United States Dispensatory and physicianspharmacology. Philadelphia : JB Lippincott, 1997 : 887-889
[29] Prekins SW, Sklarew EC. Prevention of facial herpetic infections after chemical peel and dermabrasion: new treatment strategies in the prophylaxis of patients undergoing
procedures in the perioral area. Plast Reconstr Surg 1996 ;
98 : 427-433
[30] Rapaport M, Kamer F. Exacerbation of facial herpes simplex
after phenolic face peels. J Dermatol Surg Oncol 1984 ; 10 :
57-58
[31] Stegman S. A comparative histologic study of the effects of
three peeling agents and dermabrasion on normal and sun
damaged skin. Aesthet Plast Surg 1982 ; 6 : 123-135
[32] Stegman S. A study of dermabrasion and chemical peels in
an animal model. J Dermatol Surg Oncol 1980 ; 6 : 490-497
[33] Stegman S, Tromovitch T, Glogau R. Chemical peeling. In :
Cosmetic dermatologic surgery. St Louis : Mosby Year
Book, 1990 : 35-58
[34] Stone PA. The use of modified phenol for chemical face
peeling. Clin Plast Surg 1998 ; 25 : 21-44
[35] Stuzin JM. Phenol peeling and the history of phenol
peeling. Clin Plast Surg 1998 ; 25 : 1-19
[36] Truppman E, Ellenby J. Major electrocardiographic
changes during chemical face peeling. Plast Reconstr Surg
1979 ; 63 : 44-48
[37] Urkov J. Surface defects of skin. Treatment by controlled
exfoliation. Ill MedJ 1946 ; 89 : 75