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Analyse Urbanistique de La Cité Jardin de La Roue
Analyse Urbanistique de La Cité Jardin de La Roue
Analyse Urbanistique de La Cité Jardin de La Roue
[18/09/2022]
SUJET : ANALYSE URBANISTIQUE, ENVIRONNEMENTALE ET
SOCIOLOGIQUE DE LA CITÉ JARDIN DE LA ROUE EN VUE DE LA
RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE GROUPÉE
1
Résumé executif
L’objectif de l’étude est de fournir une analyse de l’identité de la cité jardin de La Roue et
d’en tirer des conclusions pour la rénovation énergétique de celle-ci.
Pour trouver une solution adéquate de rénovation énergétique dans le bâti, il est nécessaire
de concilier les exigences urbanistiques avec l’urgence climatique, en tenant compte des
priorités des habitants rénovateurs, tous des propriétaires privés, et des autres priorités
stratégiques de la Région Bruxelles Capitale: économie circulaire, protection de la
biodiversité, réduction de l’impact environnemental global, cohésion sociale… La rénovation
doit être alignée et cohérente avec l’identité du quartier, abordable pour les voisins
rénovateurs et permettre d’atteindre l’objectif bruxellois de réduire la consommation
nominale spécifique d’énergie primaire des maisons en dessous de 100 kWh/(m²*an).
Les solutions proposées par le projet Rénov-Roue-Rad sont basées sur les principes suivants :
isolation par l’extérieur – les maisons sont exigües ; les propriétaires vivent dans les
maisons, et l’isolation par l’extérieur permet une certaine standardisation, donc
l’accélération des travaux et la réduction des coûts
Régénérer l’identité du quartier en assurant une harmonie avec le bâti existant, avec
les rénovations entreprises par le Foyer Anderlechtois et avec les idées initiales du
concept de la cité jardin de La Roue
Comment se définit l’identité de la cité jardin de La Roue, quelle est son évolution et
vers quoi se dirige-t-elle?
2
Quelle est la place du patrimoine architectural dans cette identité. quel est l’état
actuel de ce patrimoine, qu’est-ce qui est perdu, qu’est-ce qui est préservé ?
Quels éléments du patrimoine sont absolument à conserver dans l’état initial, quels
éléments peuvent être modifiés, et quels éléments doivent être adaptés aux
conditions d’aujourd’hui ?
La cité jardin de La Roue est centenaire, créée dans la vague de cités jardins ouvrières et
coopératives de l’entre-deux-guerres du 20ème siècle. Elle consiste en 670 maisons
unifamiliales dotées de jardins et de jardinets, dont 230 demeurent encore dans la propriété
du Foyer Anderlechtois, le reste fut vendu à des particuliers.
Les maisons sont construites en groupe, suivant 20 modèles principaux, de sorte qu’il règne
une harmonie sans monotonie dans la conception initiale. La cité jardin est structurée en
plusieurs blocs, le long de deux rues principales et autour de deux grandes et trois petites
places. La verdure est un élément constitutif de la cité jardin: les parcelles sont entourées de
haies, la plupart des maisons sont séparées de la voirie par des jardinets, et les arbres
d’alignement constituent un élément marquant dans la majorité des rues, ruelles et places.
Avec l’arrangement des jardins, la basse hauteur des haies, les venelles et îlots entre les
jardins ainsi que les infrastructures d’accueil, la cité jardin était conçue en vue de
promouvoir le vivre ensemble et le bon voisinage.
Malgré les changements sociaux significatifs – prise en main du quartier par des propriétaires
privés, forte augmentation de la mixité culturelle, diminution du nombre d’habitants par
maison -, les facteurs constitutifs de l’identité sociale de la cité jardin restent intacts. Ceci
comprend tant les facteurs négatifs (criminalité, niveau d’éducation en dessous de la
moyenne bruxelloise, précarité…) que positifs (bonne cohésion sociale, beaucoup de solidarité
et bonne entente dans le voisinage, forte identification avec le quartier…). Les formes de
cette solidarité ont évolué à travers du siècle d’existence de la cité jardin ; les habitants
s’étaient organisés en différents comités de quartier, dans des associations sportives,
éducatives et culturelles, ainsi que le Collectif de La Roue.
3
Il en est fort différent en ce qui concerne l’identité verte et l’identité architecturale. La
vente de deux tiers des maisons aux particuliers sans encadrement urbanistique eut pour
résultat une modification continue des maisons, afin d’en augmenter le confort et les adapter
aux goûts divers de leurs propriétaires. S’y ajoute la forte motorisation de la cité jardin, qui
est plus intense que pour la moyenne bruxelloise, et qui a mené à une adaptation de l’espace
public et semi-public à l’automobilité au détriment de la biodiversité.
Des expertises indépendantes précédentes menées au même sujet viennent à des conclusions
similaires. Pour le bâti, l’étude du Foyer Anderlechtois, menée dans le contexte de la
rénovation complète de plusieurs maisons dans les cités jardin de La Roue et de Bon Air,
conclut :
« La cité a perdu tout ce qui faisait son unité. La modification des règles d’urbanisme et
le non-respect du règlement de base a créé une situation qui paraît presqu’irréversible
sinon à long terme en imposant une réglementation draconienne. »
Le bureau parisien APUR constate dans une étude réalisée pour Urban.Brussels:
„Si ce patrimoine a beaucoup évolué, il n’en demeure pas moins l’emblème de la cité-jardin
(...). La polychromie des enduits est aujourd’hui partie intégrante de l’image de La Roue
même si elle n’était pas prévue par son concepteur. Les solutions de réhabilitation devront
4
prendre en compte cette dimension sociale qui relève de l’appropriation du site par ses
habitants.“,
et l’ancien Bouwmeester de Bruxelles, M. Léo de Broeck se réfère dans une note technique
aussi à la philosophie initiale de la cité jardin de La Roue, qui était conçue dans un esprit
d’expérimentation: « l’identité est quelque chose qui change tout le temps. Et si ce
changement est inévitable, la seule chose que nous pouvons et nous devons donc faire, c’est
d’ accompagner ce changement vers un nouveau niveau de qualité.
Appliqué sur un quartier comme La Roue, ceci implique d’accepter que ce site ait perdu ses
qualités historiques. Toute forme d’unité et de consistance stylistique sont perdus à
travers un collage de couleurs et matériaux divers. La proposition d’origine tient la
route : faire peau neuve, renouer et homogénéiser ce site avec une nouvelle couche de
matérialité consistante. La proposition de couvrir les façades avec du bois tient la route. Il
est inutile de vouloir ‘garder’ des aspects futiles du passé. »
Les conclusions et les recommandations du projet Rénov-Roue-Rad sont basées sur cette
analyse:
1. L’identité d’un quartier ne dépend pas seulement de sa conception initiale, mais aussi de la
manière dont ses habitants actuels la perçoivent, la vivent et l’expriment. Il n’est pas
possible de dicter une identité à un quartier contre la volonté de ses habitants. Il est, par
contre, possible de la développer et faire évoluer ensemble avec eux.
2. L’identification des habitants avec leur quartier est un élément clé pour constituer et
conserver l’identité du quartier. Pour assurer la durabilité des interventions, une décision
participative sur leur nature et envergure, tenant compte des besoins et priorités des
voisins rénovateurs est indispensable. Une approche trop rigide découragera l’initiative, de
sorte que le quartier ne bénéficierait ni d’une meilleure performance énergétique et
environnementale, ni d’une régénération du patrimoine vert et architectural.
3. Il faut éviter de mettre en péril les défis sociétaux régionaux pour préserver à tout prix la
totalité un patrimoine architectural, qui n’est pas l’élément majeur de l’identité de la cité
jardin de La Roue
4. Beaucoup de modifications réalisées par les habitants (annexes, jardinets transformés en
parking…) sont considérés comme des acquis. Les ôter par une politique répressive
résulterait probablement en des conflits importants. Une solution plus acceptable et sûre
pourrait être de lier la restitution des jardinets et des jardins à une vente ou une
succession de la propriété.
5. L’identité architecturale a trop changé pour qu’on puisse la reconstituer comme avant. Le
„vrai vieux“ ayant disparu, nous serions limités à produire du „faux vieux“.
5
6. Avec ses projets de rénovation, le Foyer Anderlechtois a montré un modèle de
modernisation du quartier en harmonie avec l’architecture ancienne; nous proposons de
suivre ce modèle aussi pour les constructions originales.
7. Les maisons toujours gérés par le Foyer Anderlechtois se concentrent dans quelques
endroits spécifiques de la cité jardin, c’est là où la conservation du bâti original est encore
possible et devrait être visée par les autorités.
8. Différemment au patrimoine architectural, le patrimoine vert pourra être reconstitué et
renforcé. Les solutions architecturales devraient prendre en compte aussi des éléments
d’intégration de la biodiversité.
9. Pour remettre en valeur l’identité de la cité jardin de La Roue, mais aussi pour faciliter
l’adaptation au changement climatique, il est indispensable de désimperméabiliser les sols
– jardins, jardinets, espaces publics -, de promouvoir la verdurisation des façades et des
toits et de replanter les arbres abattus.
Nous proposons donc d’admettre la perte irrévisible d’une certaine partie du „petit
patrimoine“, d’accepter des solutions plus modernes, mais en harmonie et respect avec
l’esprit de la cité jardin, de bâtir les initiatives sur l’esprit de solidarité et de participation
des habitants de La Roue et de concentrer les efforts de conservation et de reconstitution sur
l’identité verte du quartier. La végétalisation des bâtiments pourra être partiellement
adressée dans le cadre du projet Rénov-Roue-Rad avec les interventions sur les maisons.
D’autres initiatives doivent être menées par les autorités publiques pour cette régénération
verte.
6
Table de matières
1 Introduction..............................................................................................................8
1.1 Le projet Rénov-Roue-Rad dans le contexte de la RÉNOLUTION..........................................8
1.2 Méthodologie.......................................................................................................9
1.3 Le patrimoine des cités jardin à Bruxelles..................................................................11
2 Le défi: concilier la protection du patrimoine avec les transformations requises pour la décarbonation
...............................................................................................................................16
2.1 Cadre législatif...................................................................................................16
2.1.1 Législation concernant l’urbanisme et la protection du patrimoine..............................16
2.1.1.1 Niveau régional.......................................................................................16
2.1.1.2 Niveau communal....................................................................................18
2.1.2 Politiques, stratégies et législation concernant le changement climatique et la
décarbonation......................................................................................................19
2.1.2.1 Le niveau Européen: Le Pacte Vert et la Loi Climat...........................................19
2.1.2.2 Le niveau fédéral....................................................................................21
2.1.2.3 Le niveau régional...................................................................................21
2.1.2.4 Le niveau communal: Le Plan Climat de la Commune d’Anderlecht........................22
2.1.3 Aspects horizontaux: Durabilité, circularité, biodiversité..........................................22
2.1.3.1 Niveau européen.....................................................................................22
2.1.3.2 Niveau fédéral........................................................................................23
2.1.3.3 Niveau régional.......................................................................................23
2.2 Comment réaliser une rénovation énergétique ambitieuse dans un habitat protégé................24
2.2.1 L’ambition du projet Rénov-Roue-Rad.................................................................24
2.2.2 Les options techniques et architecturales.............................................................28
2.2.3 Les questions critiques....................................................................................31
3 L’identité de la Cité Jardin de La Roue............................................................................31
3.1 Urbanisme et architecture.....................................................................................31
3.1.1 La conception initiale.....................................................................................31
3.1.1.1 Une zone expérimentale à l’intérieur du quartier.............................................31
3.1.1.2 La conception des maisons (détails des plans initiaux et des cahiers de charges +
photos)...........................................................................................................32
3.2 La biodiversité....................................................................................................35
3.2.1 Les arbres dans les rues et sur les places..............................................................36
3.2.2 Les venelles.................................................................................................39
3.2.3 Les espaces verts communs..............................................................................46
3.2.4 Les jardins et jardinets...................................................................................46
4 L’évolution de la Cité Jardin à travers des années...............................................................47
4.1 La rénovation de l’espace urbain.............................................................................48
4.2 L’impact des grandes constructions en la périphérie du quartier (RER, CityDev…)..................52
4.3 Trafic et mobilité................................................................................................54
4.4 La transition des “villas ouvrières” vers des “taudis”, et la réhabilitation du bâti public..........56
4.5 Rénovations privées et infractions............................................................................56
4.5.1 Les façades..................................................................................................58
4.5.2 Les annexes.................................................................................................65
7
4.6 Coexistence de la voiture et de la verdure?.................................................................69
4.7 Menaces pour la biodiversité: le changement climatique et la minéralisation........................72
4.7.1 La conservation de la biodiversité dans l’aménagement et l’entretien des lieux publics.....72
4.7.2 Transformation des jardins et jardinets................................................................75
4.7.3 La préservation précaire des îlots et les « jardins secrets »........................................84
4.7.4 La disparition lente des haies et arbres structurants................................................86
4.7.5 La désaffectation des venelles...........................................................................91
4.7.6 Le lien entre la biodiversité et le changement climatique.........................................95
5 Caractéristiques socio-économiques...............................................................................96
5.1 La situation socio-économique de la Cité Jardin de La Roue.............................................96
5.2 La mixité sociale et culturelle.................................................................................99
5.3 Le tissu social et les initiatives citoyennes.................................................................101
5.4 Criminalité et drogue..........................................................................................102
5.5 La migration des infrastructures commerciales et de loisir vers la périphérie du quartier........104
6 Le quartier vu avec les yeux des habitants......................................................................105
7 Conclusions et recommandations..................................................................................107
7.1 Constats..........................................................................................................107
7.2 Réponses aux questions clés..................................................................................110
7.3 Analyse des constats, des opportunités et des risques...................................................114
7.4 Recommandations..............................................................................................118
8
1 Introduction
Le projet a l’objectif de
mieux déclencher les décisions de rénover
partager les apprentissages entre voisins
réduire les coûts de rénovation grâce à des économies d’échelle
simplifier les procédures urbanistiques et d’autres procédures administratives pour les
participants
structurer une approche inclusive.
L’initiative vise à formuler et tester un processus de rénovation à l’échelle de la cité jardin
pour démontrer le potentiel de travailler à cette échelle.
Le projet est réalisé par le Collectif de La Roue, une association citoyenne, qui s’est formée
dans le cadre d’un contrat de quartier durable en 2012, et qui a pour but de promouvoir la
protection de l’environnement, la transition énergétique, la protection de la biodiversité et
la cohésion sociale dans le quartier.
Dans le cadre du projet RENOLAB.ID, les solutions proposées par le projet Rénov-Roue-Rad
sont discutées et affinées dans des sessions de travail avec la Commune d’Anderlecht,
Bruxelles Environnement et Urban.Brussels. Des coopérations ponctuelles avec des groupes de
travail RÉNOLUTION sont réalisées pour des sujets spécifiques (exemple : financement
inclusif).
9
Étant donné que le projet est mis en œuvre dans la cité jardin de La Roue, qui est répertoriée
dans l’inventaire des monuments bruxellois, et que l’isolation par l’extérieur, visée entre
autres par le projet, touche au patrimoine architectural, Urban.Brussels nous a demandé une
étude sur l’identité du quartier.
La présente étude se consacre à analyser les différentes facettes de l’identité du quartier,
son évolution lors du siècle passé depuis la fondation de la cité jardin de La Roue, et à
évaluer le rôle du patrimoine architectural, paysager et naturel pour définir cette identité.
1.2 Méthodologie
Pour l’élaboration de cette étude, nous nous sommes basés sur quatre ressources principales :
Lors de l’étude, il s’est avéré qu’il y a deux facteurs déterminants pour le développement de
la cité jardin : le trafic et la propriété. Nous avons donc réalisé l’analyse basée sur ces deux
facteurs ; une fois selon des catégories de trafic : artères principales (Chaussée de Mons),
rues de première importance (les avenues ainsi que les rues le plus affectées par le trafic),
rues secondaires, places et rues en voisinage du chemin de fer ; l’autre fois selon le titre de
propriété : privé ou Foyer Anderlechtois.
10
Type de voirie Rues correspondantes No. de maisons de la ...dont du Foyer Anderlechtois
cité jardin de La
unités %
Roue
316 maisons Avenue Melckmans 77 9 11,69%
Le concept de la cité jardin date de la fin du 19ème siècle. Le mouvement des cités-jardins
était un mouvement d'urbanisme du 20e siècle promouvant des communautés satellites
entourant la ville centrale et séparées par des ceintures vertes. Ces cités-jardins devaient
contenir des zones proportionnelles de résidences, d'industries et d'agriculture. Ebenezer
11
Howard a lancé l'idée en 1898 comme un moyen de tirer parti des principaux avantages de la
campagne et de la ville tout en évitant les inconvénients des deux 1.
l’objectif de bâtir des nouvelles cités aussi attractives pour s’y promener et passer ses
loisirs que les centre-villes anciens
Les cités jardins bruxelloises se distinguent des logiques traditionnelles de lotissement par la
volonté affichée des concepteurs de penser dans le même temps l’habitat et l’espace
public3.
L’idée des cités jardin est fortement basée sur la solidarité et le collectif. La propriété
privée n’est pas prévue ; afin d’éviter des abus dans la relation propriétaire/ locataire, mais
aussi pour prévenir des altérations du concept de la cité jardin par les goûts variés des
propriétaires privés individuels, les fondateurs du mouvement des cités jardin en Belgique
prônaient surtout le modèle se sociétés coopératives du logement 4.
Les cités jardins belges n’étaient cependant pas conçues comme des nouvelles villes-jardin
initialement imaginées par le mouvement anglais, mais plutôt comme des cités satellites
autour de Bruxelles. Il s’agissait de « quartiers résidentiels pourvus d’équipements collectifs
de première nécessité (écoles, dispensaires, magasins), ainsi que d’installations culturelles
destinées à renforcer la cohérence et la solidarité sociale des nouveaux ensembles »5.Elles
1
Source: Traduit de: https://en.wikipedia.org/wiki/Garden_city_movement
2
Source: De tuinwijkexperimenten in het kader van de Belgische wederopbouw na 1918,Jan Maes, 1997
3
Source: Amélioration des performances énergétiques du bâti ancien de la Région Bruxelles-Capitale, APUR, 2013
4
Source: De tuinwijkideologie ter verwezenlijking van een nieux gemeenschapsbeeld (Chapitre 12 d’un livre (copie
transmise non complète et non datée)
5
Citation de: Livret de l’exposition Cités-jardins 1920 – 1940, Archives d’Architecture Moderne, 1994, La cité-jardin dans
l’entre-deux-guerres, Eric Hennaut,
12
suivent un modèle d’expansion urbaine en étoile, et les cités jardin d’une même commune
ont souvent été planifiées avec des liens entre elles.
Dans leur conception, les cités jardin bruxelloises suivent de très proche les principes établis
par l’urbaniste anglais R. Unwin, qui était un des précurseurs du concept en Angleterre 6.
L’arrangement général était réalisé par l’urbaniste Louis van der Swaelmen, qui avait
transposé les idées d’Unwin dans le contexte belge ; les architectes principaux pour la cité
jardin de La Roue étaient : A. de Koninck, Antoine Pompe, Jean-Jules Eggerickx, et Fernand
Bodson, ces derniers étaient surtout impliqués dans les travaux dans la zone expérimentale.
Le tableau suivant compare les recommandations d’Unwin avec la réalisation de la Cité
Jardin de La Roue.
6
Source: De hoogwaardige aanleg van de naoorlogse tuinwijken, chapitre 13 d’un livre (copie transmise non complète et
non datée)
13
Tableau 2: Comparaison de la réalisation de la Cité Jardin de La Roue avec les principes urbanistiques de R.Unwin 7
7
Source: Town Planning in Practice. An introduction to the Art of Designing Cities and Suburbs, Raymond Unwin, 1909
Sujet Recommandation Réalisation dans la cité jardin de La Roue
Planification simple des espaces verts : préférer un nombre limité d’espèces et de √ Choix initial d’une seule espèce d’arbres pr
formes afin d’éviter une surcharge visuelle ; plantation d’espèces florissant dans de rue ; plantation cohérente de haies de
différentes saisons dans des différentes zones, plantation de grands arbres dans les troène, plantation de grands arbres sur les
espaces qui le permettent, plantation de haies comme frontière entre les jardins et deux grandes places
les trottoirs, choix des plantations en fonction de l’utilisation de l’espace public,
prévoir des haies ou d’autres clôtures pour les espaces prévus au repos
Harmonisation de la plantation des jardinets, utilisation d’éléments structurants √ Plantation d’arbres dans les haies avec des
tels que des grands arbres à des distances régulières, plantes grimpantes espaces réguliers ; obligation de mettre une
plante grimpante pour les occupants des
maisons de la Place s’Jonghers
La planification du site Considérer les priorités et préférences des occupants futurs, proposer des petits √ Plaines de jeux et crèche communale
et des rues espaces ouverts, des plaines de jeux pour les enfants (et les adultes) et des places intégrées dès le début ; places centrales et
résidentielles pour se reposer placettes équipées de bancs, douches et
(Of Site Planning and lavoirs communs
Residential Roads)
Conception en vue d’augmenter la mixité sociale et éviter la formation de ghettos x Non prévu
Permettre un ensoleillement optimum des maisons par une orientation est-ouest (√) Partiellement prévu ; l’orientation est
plutôt que nord-sud souvent sud-sud-ouest/ nord-nord-est ou
ouest-nord-ouest/ est-sud-est
L’emplacement des Limiter la densité de construction afin de permettre des jardins individuels, ne pas √ Jardinets et jardins arrière généreux, îlots
bâtiments couvrir plus d’1/6 de l’espace avec des bâtiments verts intérieurs additionnels, places
(Of Plots and Placing verdurisées
of Buildings)
Inclure les parties arrière des maisons dans la planification afin d’assurer une √ Toutes les maisons avaient initialement un
harmonie esthétique pour la totalité de l’espace, éviter une prolifération d’annexes abri de jardin ; les jardins arrière et les
anarchiques à l’arrière des maisons (sic!) venelles entre les jardins faisaient partie de
la conception initiale
Assurer une belle vue pour la totalité des maisons √ Toutes les maisons avaient la vue soit sur les
jardins verts avec des haies en troène,
Construire des blocs de deux ou plusieurs maisons au lieu de maisons détachées, √ Conception en blocs variables, avec 20
pour une meilleure utilisation de l’espace et pour obtenir un aspect plus généreux façades modulaires
des bâtiments ; utiliser des arrangements variés
Ouverture visuelle des jardinets, éviter des clôtures individuelles rigides, préférer √ Règlement initial de hauteur des haies : 1,20
des haies avec une hauteur maximum d’environ 1,2 m voire 0,80 m. Clôtures rigides non admises
L’harmonie de l’en- Harmonisation des matériaux et des couleurs des bâtiments, sans pour autant trop √ Construction en brique et en crépis, tons
semble des bâtiments standardiser et devenir monotone, préférence de matériaux locaux sableux.
Sujet Recommandation Réalisation dans la cité jardin de La Roue
(Of Buildings, and How Jeu très varié de détails (fenêtres, bords des
the Variety of Each fenêtres, ligne de séparation entre le crépis
must be Dominated by et la brique, cheminées, auvents...)
the Harmony of the
Whole)
La coopération dans la Approche coopérative dans la planification, opposée à l’approche domaniale/ (√) Planification et construction par le Foyer
planification des sites gouvernementale et à l’approche individualiste Anderlechtois, avec appui par la Société
(Of Cooperation in Site Nationale des Habitations et Logements à Bon
Planning) Marché
Prévision de jardins et lieux de loisir communautaires √ Plaines de jeux et crèche communale
intégrées dès le début ; places centrales et
placettes équipées de bancs
L’approche de l’architecte Jean Eggerickx, qui était un des fondateurs de la cité jardin de La
Roue, s’insère dans cette logique mais se distingue par quelques points, surtout liés à la
simplicité :
« Gebreuk geen marmer, gekleurde glasramen of hout. Kies niet voor tegels en extravagant
aardewerk. Blijf weg van hoge plafonds, laat de moulures achterwege. Een laag plafond
verhoogt de intimiteit en is dan niet net wat een huis moet zijn : intiem ? Kies dus voor 2m80
voor het gelijkvloers en 2m60 op de eerste verdieping. Het zijn per slot van rekening geen
paleizen, maar arbeidershuizen.
Probeer geen villa te bouwen. Probeer geen herenhuis na te bootsen. Probeer niet aan elk
huis een eigen karakter te geven, laat dat over aan de inwoners. Voeg een tuintje toe, voeg
een haag toe, maar verlies jezelf niet in de details. Hou de pleintjes simpel, hou de daken
simpel, hou de gevels simpel. De kracht en de charme zitten in de eenvoud. En weet, ook
bakstenen kunnen luxe uitstralen.
Gebruik goedkope materialen. Bestel de materialen in grote aantallen. Werk op grote schaal.
Druk de prijs. Maak tot slot van elk huizenblok een orgaan en van elk huis een cel. Laat de
cellen samenwerken en de organen op elkaar inspelen. »8
Dans la conception de la cité jardin de La Roue, on peut observer que quasiment tous ces
principes ont été pris en considération.
8
Citation de la brochure “U woont in een tuinwijk” (2), créée par la Commune d’Anderlecht dans le contexte du
centenaire de la Cité Jardin de La Roue.
17
La protection du patrimoine immobilier (classement, inscription sur la liste de
sauvegarde, inventaire et registre du patrimoine immobilier, fouilles …)
B) L’arrêté dit « de minime importance »9 détermine les actes et travaux dispensés de permis
d’urbanisme, des avis des autorités mandatées, des mesures de publicité et de l’intervention
d’un architecte.
En ce qui concerne la rénovation énergétique des bâtiments, cet arrêté stipule dans les
articles 21/1 et 21/2:
« Art. 21/1. Pour autant qu'ils n'impliquent aucune dérogation à un plan d'affectation du sol,
à un règlement d'urbanisme ou à un permis de lotir, les actes et travaux suivants sont
dispensés de permis d'urbanisme pour autant qu'ils n'impliquent pas de travaux de stabilité :
1° la pose, en toiture inclinée, d'une isolation et ses couvertures de finition ainsi que ses
raccords nécessaires pour autant que :
* les actes et travaux ne portent pas sur un bien sis à moins de 20 mètres d'un bien protégé ;
2° la modification du revêtement d'une toiture plate, ainsi que sa rehausse éventuelle, pour
permettre l'installation d'un isolant, d'une toiture stockant temporairement l'eau pluviale, ou
d'une toiture verte extensive non accessible;
3° la pose d'une isolation et ses parements de finition ainsi que ses raccords nécessaires sur
un mur mitoyen ou une façade non visible depuis l'espace public, pour autant que les actes et
travaux ne portent pas sur un bien sis à moins de 20 mètres d'un bien protégé. »
9
Arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale modifiant l’arrêté du Gouvernement de la Région de
Bruxelles Capitale du 13 novembre 2008 déterminant les actes et travaux dispensés de permis d’urbanisme, de l’avis du
fonctionnaire délégué, de la commune, de la commission royale des Monuments et des Sites, de la commission de concertation
ainsi que des mesures particulières de publicité ou de l’intervention d’un architecte (17 mars 2022)
18
Art. 21/2. Même s'ils impliquent une dérogation à un plan d'affectation du sol, à un
règlement d'urbanisme ou à un permis de lotir, la pose d'une isolation et ses parements de
finition ainsi que ses raccords nécessaires, sur un mur mitoyen ou une façade visible depuis
l'espace public, sont dispensés de l'avis de la Commission Royale des Monuments et Sites
requis par l'article 237 du CoBAT, des mesures particulières de publicité, de l'avis du
fonctionnaire délégué ou de la commune et de l'avis de Bruxelles Environnement, pour autant
que :
* les actes et travaux ne portent pas sur un bien sis à moins de 20 mètres d'un bien protégé. »
C) Le règlement régional d’urbanisme (RRU) donne les balises pour les constructions neuves et les
rénovations, les implantations et gabarits permis, les zones bâtissables et leur profondeur
maximale, les hauteurs et configurations de façades, toitures, l’aménagement et l’entretien des
zones de recul etc.
Ce règlement indique que la zone de recul doit être aménagée en jardinet, que les cours et
jardins doivent comporter une surface perméable égale à 50 % de leur surface, et que les toitures
plates non accessibles > 100 m² doivent être aménagées en toitures verdurisées.
Ce règlement ainsi que l’arrêté de minime importance sont actuellement en cours de révision.
La Section 6 du Règlement Communal d’Urbanisme donne des indications spécifiques pour les
cités-jardin :
Seules les clôtures végétales sont autorisées (espèce admise : troène), à planter avec un
recul de 0,5 m/ sur les limites mitoyennes
Hauteur des clôtures des zones de recul 0,8 – 1,2 m, en retrait latéral, < 2 m.
Les venelles sont accessibles au public, mais leur usage est limité à la circulation piétonne
et cycliste.
Le règlement communal indique aussi les espèces admissibles à planter aux abords des bâtiments
en milieu urbain et suburbain. Il s’agit ici d’espèces indigènes ou adaptables, non envahissantes.
Elles sont choisies pour leur apport à la biodiversité locale, à l’amélioration du sol et du paysage.
19
B) Le statut de la Cité jardin de La Roue : En 2000, la Commune d’Anderlecht avait fait une
première initiative d’élaborer un règlement zoné pour les trois cités jardin de Bon Air,
Moortebeek et La Roue. Bien qu’un brouillon de ce règlement fût préparé et partagé avec les
différents acteurs intervenants, le projet fut abandonné en faveur de l’élaboration de trois
règlements individuels, un par cité jardin10.
Le Pacte Vert de l’Union Européenne vise une transition holistique vers la durabilité
environnementale et climatique, est basée sur les piliers suivants 11:
10
Source: Lettre du Comité de La Roue au collège de la Commune d’Anderlecht, 26 juin 2000
11
Source: Communication dela Commission au Parlement Européen, au Conseil Européen, au Comité Économique et Social
Européen et au Comité des Régions: Le pacte vertpour l’Europe, COM(2019) 640
20
Graphique 1: Illustration des principes du pacte vert
L’Union Européenne vise la neutralité climatique jusqu’à 2050 et annonce le plan de réduire
les émissions de gaz à effet de serre pour 2030 par 55 % par rapport à 1990. Le pacte vert
stipule la transition vers une économie circulaire et neutre, le rétablissement des fonctions
naturelles des eaux souterraines et de surface, la protection de la biodiversité, la réduction
des émissions du transport de 90 % moyennant une impulsion vigoureuse du transport
multimodal et indique la nécessité de doubler le taux annuel de rénovation des bâtiments en
Europe.
La Loi Climat12 de 2021 fixe l’objectif de neutralité climatique en 2050 ainsi que la réduction
des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030 ; sa transposition jusqu’à
septembre 2023 est contraignante pour les états membres de l’UE.
L’Union Européenne n’a pas (encore) élaboré sa propre législation concernant la rénovation
énergétique des bâtiments, mais oblige les états membres à remettre des stratégies
nationales à long terme13.
Des documents connexes, qui ne sont pas directement liés à la rénovation énergétique, mais
à la protection de l’environnement et la conservation de la cité jardin de La Roue dans un
sens plus large, sont :
12
Règlement (UE) 2021/1119 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique
13
Dans la Directive 2010/31/UE (refonte de 2021)
21
La stratégie sol14, qui vise l’artificialisation nette zéro des sols pour 2050. Les états
membres doivent définir d’ici à 2023 des objectifs ambitieux en vue de réduire
l’artificialisation nette des sols d’ici à 2030.
La stratégie en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 15, qui oblige les villes >
20.000 habitants de se doter d’un plan d’écologisation de l’espace urbain d’ici 2030
La Directive Cadre sur les déchets 16, qui oblige les états membres d’assurer le
réemploi, le recyclage ou une autre forme de valorisation de > 70 % déchets de
construction en 2020 (avec primauté de la prévention)
Il n’existe pas d’objectif fédéral concernant la rénovation énergétique ; les trois régions ont
développé des plans au niveau régional.
La Région de Bruxelles Capitale s’est dotée d’un Plan Climat-Énergie en 2019. Les objectifs
pour 2030 sont de :
Produire 1170 GWh d’énergie à partir de sources renouvelables : 470 GWh seront produit sur le
territoire même de la Région et 700 GWh via une stratégie d’investissement extra muros ;
Réduire de plus de 40% ses émissions directes de gaz à effet de serre par rapport à 2005, de
manière à approcher la neutralité carbone en 2050.
La stratégie de rénovation est principalement une stratégie à l’horizon 2050 avec plusieurs
objectifs énergétiques dont notamment un niveau de consommation d’énergie primaire basé
sur les exigences du pacte énergétique, c’est-à-dire une consommation d’énergie moyenne
14
COM(2021) 699: Stratégie de l’UE pour la protection des sols à l’horizon 2030
15
CO(2020) 380: Stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030
16
Directive 2008/98/CE, refonte de 2018
22
de 100kWh/(m²* an) pour le secteur résidentiel et un parc neutre en énergie pour le secteur
tertiaire.
Dans le cadre du pacte vert, l’Union Européenne s’est dotée d’un plan d’économie circulaire,
qui prévoit d’instaurer des exigences concernant la teneur en matières recyclées de certains
produits de construction, d’appliquer les principes de l’économie circulaire à la conception
des bâtiments, d’intégrer l’analyse du cycle de vie dans les marchés publics, de fixer des
objectifs de valorisation des matériaux et de réduire l’imperméabilisation des sols 18. Des
textes contraignants sont planifiés pour 2021/2022. A la date de rédaction de cette étude, la
stratégie pour l’environnement bâti durable n’est pas encore sortie. Il est prévu que cette
stratégie incluse aussi des mesures pour minimiser l’imperméabilisation des sols.
17
Résumé de la stratégie de rénovation: cité littéralement du Projet de Plan Natonal Intégré Energie-Climat belge 2021 -
2030
18
Résumé de: Un nouveau plan d’action pour une économie circulaire, COM (2020) 98
19
https://op.europa.eu/o/opportal-service/download-handler?identifier=31e4609f-b91e-11eb-8aca-
01aa75ed71a1&format=pdf&language=en&productionSystem=cellar&part=
23
période 2021 – 2023. Une plateforme de verdissement urbain est mise en ligne pour la
coordination de ces efforts20.
En 2016, le gouvernement belge a, ensemble avec les régions, développé une stratégie
d’économie circulaire21, qui prévoit, entre autres, de définir des critères de recyclabilité, de
soutenir le développement de modèles économiques innovants via une conception
intelligente des produits, et de renforcer l’exemplarité de l’État. Bien que tous ces principes
soient aussi applicables à la rénovation du bâti, elle ne prévoit pas de mesures spécifiques
ciblant le secteur du bâtiment.
20
Www.platformurbangreening.eu
21
Ensemble, faisons tourner l’économie en développant l’économie circulaire en Belgique, ministère fédéral de
l’énergie, de l’environnement et du développement durable, 2016
22
Source: Biodiversité 2020, Actualisation de la stratégie nationale de la Belgique
23
TOTEM: www.totem-building.be (Tool to optimise the total environmental impact of materials)
24
https://environnement.brussels/news/batiments-et-biodiversite-des-fiches-pour-agir-concretement-dans-vos-
batiments
24
2.2 Comment réaliser une rénovation énergétique ambitieuse dans un
habitat protégé
Bien que n’étant pas les maisons avec la pire performance thermique dans le parc de
bâtiments bruxellois, les maisons de la cité jardin de La Roue ont des valeurs PEB assez
alarmantes. Le graphique ci-dessous 25 résume la conductivité thermique des parois pour
plusieurs types de bâtiments. La cité jardin de La Roue figure comme type G (cottage), avec
une conductivité d’environ 1,8 W/(m²*K).
La classe PEB typique d’une maison de la cité jardin de La Roue est F ou G. L’étude de
chauffage réalisée dans le cadre du projet Rénov-Roue-Rad calcule une consommation
standardisée entre 471 – 579 kWh/(m²*an) pour les différentes typologies de maisons, en
fonction de leur configuration (mitoyenne/ trois façades). Il s’agit ici de la performance du
bâtiment, qui est exprimé en gammes de consommation théorique. En effet, la
consommation réelle moyenne des participations de la Vague 1 du projet de rénovation
énergétique groupée est bien en dessous de ces valeurs théoriques ; elle est de 12.000
kWh/an, ce qui correspond environ à une consommation de 100 kWh/(m²*an).
25
Source: Amélioration des performances énergétiques du bâti ancien de la Région Bruxelles-Capitale, APUR, 2013
25
objectifs visés dans la stratégie de rénovation bruxelloise. La cité jardin de La Roue est
construite en approximativement 80 blocs de bâtiments, avec une variation d’une vingtaine
de façades type. Nous avons donc opté pour une approche modulaire, qui permet d’élaborer
des projets type pour chaque module et de les combiner selon les besoins et priorités des
propriétaires occupants.
L’objectif est de créer des chantiers de démonstration, où les autres habitants peuvent
s’informer sur les modalités, les démarches, les difficultés et les avantages de la rénovation
énergétique, et de baliser le chemin pour d’autres vagues de rénovation qui suivront.
Il est donc nécessaire d’harmoniser les rénovations proposées dans le cadre du projet Rénov-
Roue-Rad pour les maisons des propriétaires privés avec celles entreprises par le Foyer
Anderlechtois, d’autant plus parce que la distribution entre les logements sociaux et les
maisons privées n’est pas homogène ; les maisons du Foyer Anderlechtois sont éparpillées
parmi les maisons privées dans la plupart des zones du quartier.
Le projet est piloté parle Collectif de La Roue, une association d’habitants du quartier. Il est
donc porté par les habitants eux-mêmes, ce qui facilite l’accès aux informations,
l’organisation et la prise de confiance entre les différentes parties participantes. Une autre
26
ambition du projet, qui vient de ces origines, est de rendre le projet le plus participatif et
transparent possible, et d’assurer un maximum d’appropriation par les voisins.
Dans ce contexte, le projet est confronté à des multiples défis, liés aux procédures de permis
d’urbanisme, à la conciliation de la conservation du patrimoine avec l’urgence climatique,
aux goûts, préférences et capacités techniques et financières des participants...et non la
moindre ambition du projet est de trouver des réponses et des solutions à ces défis, qui
rendent possible de simplifier, accélérer et rendre accessible aux habitants la rénovation
énergétique.
Le graphique suivant résume les défis du projet et les opportunités que le projet propose de
saisir.
27
Climat et énergie
Ponts thermiques ubiquitaires
Performance énergétique basse
Systèmes de chauffage fossils
Les défis => Passoires thermiques
Volonté politique:
Consommation < 100 kWh/(m²*an)
Accélération du rythme de la
rénovation énergétique à Bruxelles
Climat et biodiversité
Perte importante de la biodiversité
Tendance croissante à la Contraintes légales
minéralisation des sols => îlots de Manque de balises pour le permis
chaleur, perte de la capacité d’urbanisme
d’infiltration du sol Requis environnementaux (circularité,
décarbonation) non harmonisés avec
les requis urbanistiques
Patrimoine architectural Régularisation des infractions liée aux
Ensemble bâti historique permis pour la rénovation énergétique
important et menacé par des => frein pour la rénovation
interventions peu contrôlées
Infractions multiples
Perte d’homogénéité Socio-économique
Perte du petit patrimoine Cohabitation de propriétaires
privés et logements sociaux
Pouvoir d’investissement limité
Conceptions et priorités très
divergentes concernant la
modernisation <=> la préservation
du patrimoine bâti
Patrimoine architectural
Cité expérimentale il y a 100 ans
– renouvellement de l’approche Socio-économique
expérimentale Habitants engagés et volontaires
Approche zonée – adaptation de s’investir dans la rénovation
des interventions aux conditions énergétique
des différentes zones Forte identification des habitants
Opportunité pour établir une avec leur quartier
nouvelle homogénéité du bâti
moyennant la rénovation
énergétique groupée
Alliance RENOLUTION
Climat et biodiversité Co-construction de la rénovation
Plan mobilité de la Région: Transition énergétique dans le cadre de l’Alliance
vers la multimodalité => réduction du Rénolution
recours à la voiture individuelle à Ouverture et échange fréquent entre les
Bruxelles, réduction de la pression pour autorités mandatées pour intégrer les
le stationnement des véhicules dans les exigences climatiques dans le cadre
jardinets légal
Climat et énergie
Accélération de la rénovation Les opportunités
énergétique par l’approche groupée,
appuyée par la Région
Mise à disposition d’experts
multidisciplinaires pour accompagner le
processus
Performance ciblée attignable en isolant
par l’extérieur et avec du matériel
biobasé
Graphique 3: Résumé des défis et des opportunités de la rénovation énergétique groupée à La Roue
28
2.2.2 Les options techniques et architecturales
Système de
Ancienne porte: Ponts thermiques: ventilation
Chaleur, € Chaleur, €
Courant d’air,
froid Portes étanches
Réseau de chaleur/
Pompe à chaleur
Barrière contre
l’humidité
Apport d’énergie
central ou individuel
Sol non/ mal isolé: Murs mal protégés:
Chaleur, € Humidité ascensionnelle
isolation par l’extérieur – les maisons sont exigües ; une isolation par l’intérieur
réduirait le volume habitable de manière trop significative. De plus, les propriétaires
vivent dans les maisons ; les dérangements causés par l’isolation par l’intérieur
décourageraient la plupart d’entre eux d’entreprendre une rénovation énergétique.
l’isolation par l’extérieur permet une certaine standardisation, donc l’accélération
des travaux et la réduction des coûts. Ceci est important aussi en vue de l’objectif de
la Région Bruxelles-Capitale, qui vise la rénovation de la totalité du bâti bruxellois
d’ici 2050.
Régénérer l’identité du quartier en assurant une harmonie avec le bâti existant, avec
les rénovations entreprises par le Foyer Anderlechtois (ces rénovations sont la
référence pour la régularisation des infractions dans les commissions de concertation
29
pour les permis d’urbanisme) et avec les idées initiales du concept de la cité jardin de
La Roue
Graphique 1: Proposition 1: Isolation avec du matériel biobasé, finition avec un bardage en bois
Cette solution s’oriente au projet du Foyer Anderlechtois, qui utilise ce type de bardages
pour ses annexes.
L’autre alternative est d’utiliser des finitions qui imitent la brique originale utilisée en
général pour les rez-de-chaussée, parfois aussi pour l’étage. Il existe des enduits colorés et
arrangés comme des briques, formés par des moules qui permettent des arrangement
identiques aux appareillages originaux.
30
Graphique 6: Simulation d'une rue avec 70 % de maisons rénovées en brique imitée
L’isolation serait composée comme suit, d’une plaque isolante en fibre de bois (16 – 18 mm),
des couches pare-vapeur et stabilisantes, et finalement l’enduit en brique imitée (rez-de-
chaussée) ou crépis (étage) :
31
le cadre de l’étude présente, les questions clés à traiter sont :
Comment se définit l’identité de la cité jardin de La Roue, quelle est son évolution et
vers quoi se dirige-t-elle?
Quelle est la place du patrimoine architectural dans cette identité. quel est l’état
actuel de ce patrimoine, qu’est-ce qui est perdu, qu’est-ce qui est préservé ?
Quels éléments du patrimoine sont absolument à conserver dans l’état initial, quels
éléments peuvent être modifiés, et quels éléments doivent être adaptés aux
conditions d’aujourd’hui ?
Dans la zone expérimentale, une soixantaine de maisons fut construite avec des technologies
alternatives sans briques classiques : construction préfabriquée, blocs en béton, « système
Moyse » (dalles de sol avec des briques vides), système Ospla (ossatures et plaques). Le but
de l’expérimentation était de baisser les coûts du logement social, sans pour autant
compromettre l’approche de la cité jardin 26. La zone expérimentale de la Cité Jardin de La
Roue est unique en Belgique et est donc un témoin important de l’histoire architecturale
belge27.
26
Source: De Standaard Magazine, 19/09/1997
27
Source: U woont in een tuinwijk/ Vous habitez une cité-jradin, brochure du Comité de La Roue et du BRAL, non daté
32
3.1.1.2 La conception des maisons (détails des plans initiaux et des cahiers de charges +
photos)
Bien que classifiée « sans confort » vers la fin du siècle passé, l’idée initiale de la Cité Jardin
de La Roue était d’assurer un confort maximal aux habitants futurs . Contrairement aux
anciens taudis anderlechtois, et aux logements surpeuplés dans la ceinture intérieure de
Bruxelles, les maisons de La Roue étaient, dès le début, dotées de :
Canalisation
Gaz
Eau courante
Des salles de bain privées n’étaient, par contre, pas prévues. Pour satisfaire les besoins
hygiéniques de la population, l’école de La Roue offrait des bains-douches public, qui étaient
très bien fréquentés jusqu’aux années 60 du siècle passé 28, mais qui furent fermés dans les
années 8029, bien au détriment des locataires des maisons restées dans le portefeuille du
Foyer Anderlechtois.
La conception architecturale des maisons de La Roue est illustrée à l’exemple des maisons de
l’Avenue de la Persévérance, pour lesquelles les plans originaux et les cahiers de charges
existent encore, et où nous trouvons actuellement le plus grand groupement de voisins
motivés à se lancer dans la rénovation énergétique.
L’image sur la page suivante montre la conception originale des types A (maison de coin), B
(maison mitoyenne) et B’ (maison mitoyenne avec pignon) dans l’avenue de la Persévérance.
La description des détails pour les façades et les autres éléments visibles de la rue est donnée
dans le tableau suivant.
Élément Description30
Brique mécanisée, à trous, à poser intérieurement et extérieurement dans les façades, pour
servir de ventilation
Enduit au ciment, composé d’une partie de ciment Portland, deux plombs, pour une partie de
28
Source: De Standaard Magazine, 19/09/1997
29
Source: Tuinwijk “Het Rad”, Een onderzoek naar de woonsituatie van de sociale huurders uit de tuinwijk “Het Rad” te
Anderlecht, 1985, Maison du Quartier La Roue
30
Source: Société Anonyme “Le Foyer Anderlechtois”, Construction d’habitations à bon marché, Lot 14 (III), Groupe D(4
maisons), 3 groupes E (6 maisons chacun), groupe G (2 maisons), Etat descriptif des ouvrages, 1928
33
Élément Description
sable graveleux ou de laitier pulvérisé. La dernière couche sera projetée à la brosse. L’enduit
sera semblable à celui existant. Les angles des portes seront arrondis.
Fenêtres Linteaux en béton armé, y compris la pose et la fourniture des bois nécessaires au coffrage. Le
dosage du béton sera composé de 0,350 m³ de sable rude et 0,850 m³ de plaquettes 5/15 de
porphyre, lesquels, avec 350 kg de ciment Portland, 2 plombs, devront former 1 m³ à 1 m³ 100
de béton comprimé.
Il devra être confectionné sur place. Le coffrage devra épouser exactement les formes
respectives de chacun des éléments.
Pierre bleue dite « petit granit, sans défaut, posée en lit de carrière pour seuils de fenêtre de
0m08 d’épaisseur et marches de 0m06 d’épaisseur
Châssis en sapin rouge du Nord, 2^choix avec bourrelet et jet d’eau en chêne du pays, 1 er choix,
assemblages à embrèvement de 36 mm d’épaisseur, dormants, charnières solides, fers à châssis,
crémones en fer solide, vitrerie en verre 4° demi-double, premier choix.
Les châssis seront contournés par un quart de rond. Les châssis basculants seront pourvus d’un
verrou à ressort avec chaîne en cuivre et piton d’arrêt.
Chambranles en sapin rouge du Nord, de 0m06 de largeur sur 0mß1 d’épaisseur, à placer à toutes
les fenêtres (…) et aux portes vers rue et vers cour
Portes Porte vers la rue, en sapin rouge du Nord, assemblages en 6/4, planchettes 3/4 languettes et
moulurées, ou panneaux dormants, fers à châssis, vitrerie en verre 4° demi-double, rapplique,
charnières solides, serrure à gorges (2 clefs), béquilles et crosse en fonte émaillée noir,
semblables à celles existantes et boîte de lettres avec targette.
Peinture Peinture en quatre couches de couleur à l’huile en tons, à base de blanc de zinc pur, type État
Belge, sur toutes les boiseries extérieures, corniches, tuyaux de descente...
Faîtières de Potelberg pour recouvrir le loup et les murs séparatifs, posés au mortier de ciment
Corniche moulurée 4/4 de 0m25 de saillie, de 0m25 de hauteur, blocs à 7/9 espacés d’environ
0m50, volige de fond 3/4, dessous apparent en plancher raboté 3/4 à rainure et languette, une
chouche de minimum de plomb avant la pose.
Chaînages en volige 4/4 x 0m13 en sapin rouge du Nord, convenablement serrés et cloués, entre
les gîtes
34
Figure 8: La conception initiale
3.2 La biodiversité
Comme il est typique pour une cité jardin, les espaces verts sont abondants et variés à La
Roue. S’y ajoute la proximité d’autres espaces verts, de plus grande étendue, comme le parc
des Résédas, le parc des Colombophiles avec les jardins potagers, tous les deux dans une
distance de moins d’un kilomètre de la cité jardin. Le grand ensemble de parcs à Neerpede,
la promenade verte et les rives du canal sont également faciles à atteindre à pied pour les
habitants de La Roue. Le Plan Vert pour La Roue, élaboré par le Collectif Ipé en 2012,
indique les espaces verts publics sur la carte suivante :
36
3.2.1 Les arbres dans les rues et sur les places
L’intégration de la nature dans la ville est un de principes fondamentaux de la cité jardin.
Les arbres ont d’ailleurs un rôle important dans la structuration de l’espace et peuvent,
selon le choix d’espèces aussi rajouter des éléments de saisonnalité successifs.
Dans l’aménagement de la Cité Jardin de La Roue, les espèces ont été choisis avec soin, et
en ligne avec l’approche zonée. Le tableau ci-dessous résume les plantations initales et leur
renouvellement dans les années 1950 – 1980. Après, les replantations furent rares, avec
l’exception de quelques plantations à la Place du Confort et dans la Rue des Colombophiles,
ainsi que la plantation de nouveaux arbres lors de la rénovation de la Place ministre Wauters
et de ses alentours par Beliris en 2014.
14 1977
37
Type d’arbre Lieu de plantation Nombre Année de Image
plantation
38
Type d’arbre Lieu de plantation Nombre Année de Image
plantation
39
Type d’arbre Lieu de plantation Nombre Année de Image
plantation
40
Tableau 4: Aperçu des venelles dans la Cité Jardin de La Roue
41
Entrées de la Maisons Image satellitaire
venelle connectées
42
Entrées de la Maisons Image satellitaire
venelle connectées
43
Entrées de la Maisons Image satellitaire
venelle connectées
44
Entrées de la Maisons Image satellitaire
venelle connectées
Avenue de la Avenue de la
Société Société Nationale
Nationale 46 – 66
Plaine des Plaine des Loisirs
Loisirs 13 – 35
Rue des Huit
Heures 21 - 29
45
Entrées de la Maisons Image satellitaire
venelle connectées
Avenue de la Avenue de la
Société Société Nationale
Nationale 17 – 26
Avenue de la
Persévérance 22,
26
Avenue Melckmans
37, 43, 45
Rue de l’Énergie 4
- 14
46
3.2.3 Les espaces verts communs
Les cinq places de la Cité Jardin de La Roue sont conçues et conservées comme espaces verts
et lieux de détente, avec des bancs et beaucoup de verdure. Les Places de La Roue et
ministre Wauters ainsi que la Plaine des Loisirs sont dotées de plaines de jeux. La Place
ministre Wauters dispose aussi de trois grandes tables et d’une piste de pétanque.
De plus, la cité jardin offre des îlots verts et des « jardins secrets » : sur la rue du Savoir, un
grand îlot vert se trouve en face des maisons, et un jardin communal actuellement géré par
le Collectif de La Roue, sur le coin de la rue du Savoir avec l’avenue de la Société Nationale.
Un autre jardin communal actuellement non alloué se trouve à l’adresse rue des Citoyens 48.
Ces enclos étaient autrefois des des espaces de jeu pour les enfants ou encore des lieux de
partage d’activités ou de culture entre voisins 31.
31
Dernière phrase: citation de l’”étude historique et typologique de la cité “La Roue” à Anderlecht”, Cabinet p. HD
scprl, octobre 2015 (pour le Foyer Anderlechtois)
32
Carnet de locataire, M. André Demol, rue de la Volonté no. 10, Foyer Anderlechtois (Mod.C.I. 1313-1954)
47
c) d’enlever, de trouer ou de modifier d’aucune manière les clôtures existantes
e) de tracer dans la zone de recul des sentiers, allées ou passages autres que la venelle
d’accès, ou les couloirs établis par l’auteur du projet (…)
g) d’enlever ou de transplanter des arbres ou arbustes dans les jardins et jardinets. »33
Concernant les servitudes, le cahier stipule :
Article 11 : Les acquéreurs s’engagent dès à présent et pour lors, tant pour eux-mêmes que
pour leurs ayants-droit éventuels : (…)
d) à laisser effectuer, exclusivement par les soins et selon les décisions de la société
venderesse, la taille et l’entretien périodique des haies de clôture entourant le bien ainsi
que les arbres, arbrisseaux, buissons et pelouses dans les zones de recul à front de rue ou
dans leurs retours latéraux, le tout au frais de l’acquéreur. »
Cependant, d’autres actes de vente spécifient que l’entretien des haies incombe aux
propriétaires privés : « Les acquéreurs devront entretenir convenablement les plantations
existantes (arbres, plantes grimpantes et autres) … Les acquéreurs devront tailler
régulièrement les haies qui entourent le bien vendu. Il leur est interdit de remplacer ou de
clôturer leur bien par des murs ou clôtures d’une autre espèce. La hauteur des haies sera de
quatre-vingt centimètres maximum. »34
Dans les années 80, le quartier florissant commençait cependant à faner. Les raisons furent
multiples :
33
Source: Cahier S.N./V.82, Société Nationale du Logement, Prescriptions, charges, clauses et conditions générales
applicables pour toute aliénation, soit par vente ou par échange (…) de tous biens immobiliers bâtis appartenant soit à
la Société Nationale du Logement ellemême, soit aux sociétés immoblières de servce public agréées par elle (...)
34
Source: Compte rendu de l’atelier de travail urbain pour La Roue, 01 juillet 2010
48
depuis la Deuxième Guerre Mondiale, le Foyer Anderlechtois se voyait face à des
problèmes financiers. Cela l’empêchait, d’une part, d’assurer le bon entretien des
maisons, et le poussait, de l’autre côté, à vendre au fur et à mesure les maisons
unifamiliales. En 1985, seulement 320 des 684 logements de la Cité Jardin de La Roue
étaient encore mis en location par le Foyer Anderlechtois. Selon le témoignage de ses
locataires, le Foyer Anderlechtois avait quasiment arrêté l’entretien régulier de ces
maisons au milieu des années 60 35.
Si, pendant les premières décennies de la Cité Jardin de La Roue, le Foyer Anderlechtois
contrôlait strictement les rénovations – et obligeait les locataires à repeindre leurs boiseries,
en mettant à leur disposition des peinture en deux variantes de couleur (blanc/vert ou
blanc/brun) -, avec la prise en main par des acheteurs privés, les annexes commençaient à
proliférer, les couleurs de crépis se multipliaient, les haies et jardinets furent transformés au
fur et à mesure36.
Le résultat était un désalignement avec le fil conducteur de la cité jardin. Déjà vers l’an
2000, les habitants préoccupés de conserver cité jardin, se plaignent de la perte du « petit
patrimoine »37, victime des rénovations individuelles, peu soucieuses de maintenir l’esprit des
architectes initiaux.
4.1 La rénovation de l’espace urbain
Les places, placettes et rues de la Cité Jardin de la Roue ont été réaménagés plusieurs fois
pendant les plus de cent ans de son existence. Le tableau ci-dessous donne un aperçu des
rénovations sur lesquelles des informations sont disponibles.
Place de La Roue 2002/ 2003 Plantation d’arbres et renouvellement des espaces verts, dans le
cadre d’un projet de réhabilitation initié par le Comité de quartier
de La Roue, avec un subside de la Fondation Roi Baudouin
35
Source: ibidem
36
Résumé de: De Standaard Magazine, 19/09/1997
37
Source: U woont in een tuinwijk/ Vous habitez une cité-jradin, brochure du Comité de La Roue et du BRAL, non daté
49
Lieu Année Rénovation
Place ministre Wauters inconnue Asphaltage et mise en place d’un terrain de basket
École Communale P21 2014- 2020 Rénovation complète et restauration de l’école P21. Cette école
fut classé en 2008 comme monument sur demande de la Commune
d’Anderlecht. Une initiative du BRAL39 et du Comité de La Roue
avait demandé ce classement déjà en 2002.
Les voiries ont aussi été objet de plusieurs rénovations. La construction du métro, des arrêts
de métro et l’enlèvement des rails de tram ainsi que le réaménagement des carrefours ont
transformé la voirie initiale de manière significative.
Les rénovations récentes furent l’objet d’une planification participative sur deux ans
(2009/2010), pendant laquelle les priorités des habitants étaient identifiées et prises en
considération. Un diagnostic participatif permit d’identifier les points névralgiques du
quartier ainsi que de déterminer des solutions possibles.
38
Source: La Gazette de Quartier, 3ème année, édition no. 3
39
BRAL: Brusselse Raad voor het Leefmilieu
40
Source: Comptes rendus des ateliers de travail urbain La Roue, 2009/2010.
50
A droite : La Place ministre
Wauters avant rénovation.
Un terrain asphalté mal entretenu
était cependant souvent utilisé par
les jeunes du quartier pour jouer
au basket et au foot. L’espace non
minéralisé n’était pas planté et
pas non plus entretenu.
Le panneau publicitaire (devant)
était peu utilisé.
Pourtant, la perception de ces aménagements par les experts urbanistes est nettement moins
positive. Concernant la Place ministre Wauters, l’étude historique et typologique réalisée
pour le Foyer Anderlechtois constate que :
« Aujourd’hui, cet espace, s’imposant encore comme un lieu d’importance majeure sur le
plan urbanistique et du point de vue de la hiérarchie des espaces verts disponibles, a été
51
l’objet d’une relecture spatiale et d’usage qui en modifie complètement le rôle, le potentiel
et les nuances végétales.
Si au départ la place constituait le parterre d’un milieu unitaire, que nous pourrions
comparer à celui d’un jardin, aujourd’hui l’abolition des haies et des clôtures de limite en
intériorise les usages en bouleversant totalement le sens des usages et des ambiances qui
s’en dégagent.
Le parterre végétal est ainsi réduit en un plan libre minéral qui accueille différentes
fonctions minérales. La végétation, en bac est utilisée de la même manière, comme un objet
posé sur un plateau (des arbres en bac).
Si à cette transformation d’usage nous ajoutons l’augmentation des flux de circulation des
voitures et des bus, nous pouvons facilement comprendre que les pressions fonctionnelles ont
effacé les intentions paysagères qui étaient poursuivies à travers les anciens aménagements,
où le privé et le public étaient volontairement pensés comme des espaces complémentaires
collaborant à la valeur de l’ensemble. »41
Nous constatons que cette étude compare la « nouvelle » Place ministre Wauters avec la
situation initiale, mais pas avec la situation directement précédente, où la place était
convertie en un terrain de sport complètement asphalté, et oú aucune ceinture verte n’était
présente autour de la place. La plaine de jeux, qui est un des éléments spécifiquement
souhaités par les habitants, est considérée comme un élément de rupture.
41
Citation de: étude historique et typologique de la cité “La Roue” à Anderlecht”, Cabinet p. HD scprl, octobre 2015
(pour le Foyer Anderlechtois)
52
L’étude juge le réaménagement du carrefour entre l’avenue des Droits de l’Homme, la rue
de l’Émancipation et l’avenue de la Persévérance avec une sévérité similaire :
« Cet espace n’est pas une place, mais un élargissement de voirie, dont les limites sont bien
dessinées par les haies des jardins privés. L’espace a été récemment rénové et se présente
aujourd’hui comme un lieu carrossable quadrangulaire, caractérisé par un pavage bicolore en
échiquier et par des insertions de quelques emplacements de terre à destination de nouvelles
plantations arborées. Ni la structure paysagère, ni la forme urbaine actuelle ne confèrent au
nœud routier une réelle identité d’espace urbain. »42
Il est vrai que ce carrefour aurait pu être aménagé d’une forme plus naturelle (voir aussi
chapitre 4.7.1.), et les aires vertes sont mal entretenues.
Le projet a récemment été présenté aux Aménagement de la Place Ernest s’Jonghers : Végétalisation
habitants pour une consultation. des coins, réduction des parkings, placement de bancs...et
abattage de deux arbres dans l‘îlot central
42
ibidem
53
4.2 L’impact des grandes constructions en la périphérie du quartier (RER,
CityDev…)
Avec la mise à quatre voies de la ligne 50 A, cette situation s’est aggravée. Les talus du
chemin de fer, qui étaient pendant des décennies une zone verte importante dans le
quartier, ont été complètement désherbés. Lors des ateliers de travail urbain en 2009/ 2010,
le groupe de travail avait proposé que « Les talus pourraient être réaménagés en « friche
sauvage » avec des arbres et arbustes variés, d'entretien facile, donnant des fleurs et des
fruits pendant toute l'année et favorisant la présence d'oiseaux et papillons. », ce qui ne
s’est jamais réalisé.
Il n’est pas exagéré de constater que l’élargissement de la trame du chemin de fer a l’effet
d’une plaie mal cicatrisée sur la cité jardin de La Roue. Surtout le tronçon le long de la rue
Hoorickx présente un mur vertical en béton aux riverains ; il y avait plus d’espace le long de
la rue des Plébéïens, où le réaménagement du talus a un effet moins brutal. Très
probablement, le voisinage direct du chemin de fer et du mur ont aussi négativement affecté
le prix des biens. Les photos ci-dessous donnent une idée du changement effectué.
54
Talus du chemin de fer et nouveaux arbres – rue des
Plébéiens
Les murs superposés aux talus font effet de barrières anti-bruit ; la cité-jardin de La Roue
ayant été identifiée comme un des points névralgiques concernant l’augmentation du bruit 43.
La nouvelle gare d’Anderlecht élargit le choix multimodal pour les habitants de la cité jardin.
Il faut cependant constater qu’elle sert majoritairement les étudiants et le personnel du
CERIA.
D’autres grandes infrastructures nouvellement construites par CityDev sont les complexes de
kots d’étudiants et de commerces dans la rue des Grives, en vicinité du CERIA et aux abords
de la cité jardin. La construction de ces blocs clôture maintenant l’avenue Melckmans, dont
la prolongation donnait autrefois directement au ciel, car aucun bâtiment n’obstruait la vue.
On peut l’interpréter comme le « monument à la fin d’une longue rue droite », comme
stipulé dans les principes d’Unwin (voir Chapitre 1, Tableau 2).
43
Source: Points noirs acoustiques et “Article 10”, Constats, Plan Bruit 2000 – 2005.
55
Ces nouveaux bâtiments ne sont pas encore prêts à l’utilisation. On peut attendre qu’ils
rajoutent une charge additionnelle de trafic (et justifieront la ligne de bus 75, qui passe
actuellement souvent vide); de l’autre côté, la présence de nouveaux commerces et ateliers,
peut-être plus diversifiés que ceux sur la Chaussée de Mons, aura certainement un effet
revitalisant sur le quartier.
Étant donné la proximité de la Chaussée de Mons et du Ring, s’y ajoute une pression
considérable par des voitures venant d’extérieur – les navetteurs qui se rendent le matin au
travail ou rentrent chez eux le soir. Bien qu’une grande partie des ruelles secondaires soit
très calme, les jonctions directes entre la Chaussée de Mons et le canal sont exposées à une
charge de trafic importante.
Une enquête menée par l’ancien Comité de Quartier montre la charge suivante pendant les
heures du matin et du soir :
Utilisateur Chaussée de Mons => Canal (07.50 – Canal => Chaussée de Mons (17.00 – 18.00)
08.15)
Rue de la Rue des Pont du Pont du Rue des Rue des Rue de la
Solidarité Colombophiles canal canal Colombophiles Grives Solidarité
Piétons 29 14 15 3 15 9 19
Vélos 0 2 7 2 3 0 0
Motos 0 2 6 5 0 3 0
Bus/ minibus 0 2 7 3 2 0 0
Camion 4 14 13 7 12 9 4
Camionnette 8 26 48 9 5 9 3
Cette étude montre aussi que les trottoirs à La Roue sont souvent trop étroits pour un
passage aisé des piétons, et que, par contre, les rues sont souvent trop larges et invitent
ainsi les navetteurs à faire des raccourcis. Elle propose aussi l’aménagement de plusieurs
44
Source: Zone 30 – Verkeersstudie van Het Rad met bijzondere aandacht voor de Tuinwijk, 1997
56
zones en « Woonerf », où les trottoirs, les parkings et la rue forment une unité intégrale, à la
même hauteur.
« Mon fils avait 12 ans. Il se trouvait avec
Un autre problème dans la cité de La Roue était la des copains près de la plaine de jeux
Place Wauters lorsqu’une voiture a roulé
longue ligne droite notamment de l’avenue Melckmans, sur son pied. Le chauffard est parti. Un
qui temptait quelques conducteurs à accélérer à un voisin a relevé la plaque mais celui-ci n’a
pas été retrouvé. Bien que le pied de
maximum pour après freiner et glisser brusquement à Romain ait été sectionné au-dessus de la
l’entrée de la Place ministre Wauters. Plusieurs cheville, l’opération s’est bien passée et
il n’a que de légères séquelles. »
accidents se sont produits de cette manière. Dina
Une étude de trafic réalisée par la Commune en 2019 47, dans le cadre de l’élaboration du
plan de mobilité communal, constate que la charge de trafic à La Roue est toujours très
élevée, même si le nombre de véhicules s’est considérablement réduit depuis l’étude du
Comité de Quartier.. Dans les heures de pointe, 250 – 300 véhicules par heure sont comptés,
tandis qu’une valeur indicative pour une rue résidentielle est de 50 – 100 véhicules par
heure. La même étude spécifie aussi qu’il s’agit ici surtout de trafic de destination, donc de
voitures appartenant aux habitants de La Roue. Environs 1/3 du trafic est du trafic de
transit.
45
Source: Mémorandum “mobilité” du comité de quartier La Roue pour la législature 2007-2012
46
Observation des habitants lors de l’atelier communal sur l’enquête “Mégafon” pour les quartiers La Roue/ Trèfles, 17
février 2022
47
Diagnostic de la Mobilité à Anderlecht, 1 octobre 2019, Tridée
57
A moyen terme, il est prévu de fermer le passage de véhicules à l’écluse, ce qui réduira le
trafic de transit en ligne avec la stratégie régionale bruxelloise pour la mobilité.
4.4 La transition des “villas ouvrières” vers des “taudis”, et la réhabilitation du
bâti public
Avec le quasi arrêt de l’entretien des maisons du Foyer Anderlechtois dans les années 60, qui
allait ensemble avec la stagnation démographique et le vieillissement de la population des
locataires, les maisons de la Cité Jardin prirent de plus en plus un aspect abandonné et
délaissé.
Une étude des années 80 montre des dégâts considérables dans les logements sociaux :
Une difficulté additionnelle aux contraintes financières était la non disponibilité des
matériaux initiaux. Les toits, par exemple, étaient initialement couverts avec des tuiles
rondes, qui n’étaient, 60 ans après la construction, plus trouvables sur le marché. Au lieu
d’échanger des tuiles individuelles cassées, il fallait donc refaire un toit entier.
Malgré les efforts considérables du Foyer Anderlechtois, qui se montre dans la rénovation
exemplaire de 18 maisons à La Roue, il faut dire qu’il existe toujours des arriérées
importantes de rénovation, dont témoignent les maisons murées, fermées car déclarées
insalubres, qui attendent leur tour pour être réhabilitées.
Déjà pendant les années 1990, l’ancien Comité de La Roue était préoccupé d’une perte lente
du « petit patrimoine » par les rénovations individuelles, souvent peu soucieuses de la
58
préservation des structures originales. Pour donner une autre dynamique à la rénovation, le
comité obtint un financement de la Fondation Roi Baudouin, qui rendait possible la
réhabilitation de six façades dans le quartier48.
Cette initiative demeura malheureusement sans suite.
Actuellement, quasiment aucune maison ne reste inaltérée. Nous avons évalué la totalité des
maisons de la Cité Jardin de La Roue selon les critères suivants :
Classification Critères
Maison inaltérée Façade préservée (briques originales, enduit original ou nouvellement peint avec les
mêmes couleurs sablées)
Seuils des fenêtres originaux (pierre bleue, parfois brique ou tuile), non peints AJ+ AK
Linteau original (non peint)
Châssis originaux
Volets originaux ou pas de volets
Porte originale
Auvent original
Toiture originale ou tuiles plates couleur tuile
Corniche originale ou renouvelée en bois selon le modèle original BT
Lucarne originale ou pas de lucarne
Cheminée conservée
Pas d’annexe
Maison Toutes les autres maisons, ayant subi une ou plusieurs des modifications suivantes :
moyennement ou Façade isolée par l’extérieur, briques peintes ou utilisation d’un autre matériau
fortement altérée Remplacement des seuils des fenêtres par un autre matériau
Linteaux disparus
Fenêtres en PVC, aluminium, avec ou sans des faux petits bois
Volets en plastique à l’intérieur du châssis ou apposé sur le linteau
Portes en PVC/ verre/ métal
48
Source: Lettre de la Commission Royale des Monuments et Sites au Comité de La Roue
59
Classification Critères
49
Note au pied: Un enfant de La Roue raconte sa perception de la rénovation individuelle faite par sa famille;
citation de la brochure “U woont in een tuinwijk” (2) réalisée par la Commune d’Anderlecht lors de la fête du
centenaire de La Roue
50
Ceci est une des conclusions de l’étude “Amélioration des performances énergétiques du bâti ancien de la Région
Bruxelles-Capitale”, APUR, 2013
60
Graphique 10: Etat des façades dans la cité jardin de La Roue
On observe une différence considérable entre les maisons du Foyer Anderlechtois et celles
des propriétaires privés. La graphique suivante illustre la situation :
61
Graphique 11: Altération des façades - logements sociaux et maisons privées
La plupart des façades du Foyer Anderlechtois sont soit préservées dans la même matérialité
et avec les mêmes teintes que les façades originales. Parfois les locataires ont entrepris
l’initiative de peindre l’enduit ou même les briques, mais cela est plutôt une exception.
Par contre, les châssis originaux ont presque complètement disparu, ce qui est dû à
l’incompatibilité de ce type de châssis aux petits bois avec le double vitrage. Le bois était le
matériel standard pour les maisons de la cité jardin, avec l’exception de la zone
expérimentale, dans laquelle le métal était aussi utilisé.
Le Foyer Anderlechtois a opté pour un modèle qui reprend l’agencement des châssis
originaux, avec une vitre horizontale au dessus, et trois battants (1 er étage) ou deux battants
(rez de chaussée) en dessous. Les photos suivants montrent ce modèle en comparaison avec
l’original.
62
A gauche :
Nouvelle fenêtre et
nouvelle porte, type
standard utilisé par le
Foyer Anderlechtois
La graphique suivante montre les modèles de châssis prévalents dans la cité jardin de La
Roue.
63
Graphique 13: Châssis des logements sociaux et des maisons en propriété privée
Le choix des portes est souvent identique avec celui des châssis de fenêtre.
Les linteaux et les seuils des fenêtres sont aussi des éléments importants qui influencent
l’aspect de la cité jardin. En général, les linteaux des fenêtres sont en béton, souvent peint
en blanc ou dans des tons sablés. Dans les maisons construites entièrement en brique, ils sont
parfois aussi en brique, comme dans les plus anciennes maisons dans la rue des
Colombophiles ou la rue des Citoyens. Les seuils des fenêtres sont généralement en pierre
bleue, et dans quelques ensembles (Plaine des Loisirs, rue des Huit Heures), en brique ou en
tuile. On observe peu de changements dans les seuils et des linteaux, sauf la peinture, qui
est parfois aussi appliquée aux briques ou aux pierres bleues. Les photos ci-dessous montrent
quelques exemples de seuils de fenêtre et de linteaux laissés dans l’état original ou modifiés.
64
A gauche : Linteau et seuil de
fenêtre peints en bleu lavande, volet
en plastique apposé sur le linteau.
Le choix de la pierre bleue pour les seuils de fenêtre cause un dilemme environnemental, qui est
exprimé comme suit dans l’étude de l’APUR 51: « La pierre bleue est mise en évidence car c’est
elle qui donne à la façade sa valeur ornementale. C’est notamment grâce à elle que chaque façade
se singularise et se différencie des façades mitoyennes. La pierre bleue qui est valorisée à la
conception est aussi le matériau de plus forte conductivité thermique employée, elle sera la cause
des ponts thermiques. »
51
Source: Amélioration des performances énergétiques du bâti ancien de la Région Bruxelles-Capitale, APUR, 2013
65
D’autres éléments principaux sont les portes, les volets et les auvents. La plupart des
maisons était initialement dotée d’auvents au dessus de la porte d’entrée, et les fenêtres
avaient des volets en bois à deux battants. Les portes étaient en bois, avec des ouvertures
pour les lettres et des petites fenêtres, comme on peut voir sur la photo ci-dessus. Ceci a
beaucoup changé. Le Foyer Anderlechtois a replacé beaucoup de portes avec des modèles
plus simples (voir photo ci-dessus) ; les propriétaires privés ont opté pour des portes en bois
de toute forme et couleur, très souvent des portes en PVC/ verre et parfois en aluminium.
Les auvents initiaux reposaient sur des poutrelles en bois, qui, elles, étaient posés dans des
ouvertures dans le mur de la maison. L’auvent était construit, lui aussi, en bois. Avec
l’exposition aux intempéries, la plupart de ces auvents a pourri, les propriétaires privés et
aussi le Foyer Anderlechtois les ont enlevés, sans les remplacer avec des structures
similaires. Les maisons du Foyer Anderlechtois ne comptent souvent plus avec un auvent,
tandis que les maisons privées ont parfois des nouveaux auvents, de matérialité, forme et
couleur bien différents de l’original.
Quant aux volets,beaucoup d’entre eux ont été enlevés sans remplacement ou remplacés
avec des volets en plastique, apposés sur le linteau ou intégrés dans le châssis, tant pour les
maisons du Foyer Anderlechtois, tant pour les propriétaires privés. Le graphique ci-dessous
illustre la situation.
Graphique 16: Importance des volumes rajoutés par la construction d'annexes dans
le jardin arrière
52
Source: Amélioration des performances énergétiques du bâti ancien de la Région Bruxelles-Capitale, APUR, 2013
67
L’analyse détaillée de la Cité Jardin de La Roue montre clairement la prolifération
d’annexes. Seulement 1/4 des maisons n’ont pas d’annexe ; un autre quart a des annexes
régularisables < 3 m avec ou sans véranda. L’autre moitié compte avec des grandes annexes,
parfois aussi deux ou plusieurs annexes.
68
Graphique 18: Annexes - Foyer Anderlechtois et propriétaires privés
Beaucoup de propriétaires ont dernièrement fait des démarches auprès de la Commune pour
mettre en conformité ces annexes. Les modifications réalisées avant 2000 sont plus
facilement régularisables ; pour les autres modifications, les avis de sont donnés sous
condition de rétablir certains aspects initiaux. Nous citons ici comme exemple la demande
des propriétaire de la Rue Hoorickx, 7, de mettre en conformité le bâti suivant :
69
le garage (respectivement un volume précédent, avec la même utilisation) peut déjà
être identifié sur l’orthophotoplan de 1961 ; le garage doit donc être considéré en
situation de droit
le volume du garage fut successivement agrandi, et ceci, après le 01/01/2000. Il en
est de même pour la véranda et la terrasse.
la construction de l’annexe latérale et l’agrandissement du volume annexe à l’arrière
sont des travaux réalisés avant le 01/01/2000 et doivent donc être régularisés
(acceptés),
Les conditions suivantes sont énoncées pour la régularisation de la situation du bien:
L’exemple montre qu’il est quasiment impossible de restaurer l’état initial d’un bien altéré
pendant des décennies, étant donné que les modifications réalisées avant 2000 sont
régularisables sans conditions. Dans un bloc de maisons, l’annexe régularisée la plus grande
est prise comme balise pour déterminer le maximum de ce qui peut être accepté.
Le cumul des infractions anciennes et régularisables mène donc à l’irréversibilité des
altérations du patrimoine bâti et de la perte de biodiversité, sauf si un propriétaire décide
de son propre gré de rétablir l’état initial de son bien.
Il faut dire que le besoin de régularisation chez les habitants est limité ; entre mars 2020 et
juillet 2022, 6 demandes de mise en conformité furent remises, et la totalité fut approuvée,
généralement, sous conditions.
53
Citation/ résumé du procès-verbal de la Commission de Concertation de l’administration communale d’Anderlecht, 10
mars 2022
70
4.6 Coexistence de la voiture et de la verdure?
La cité jardin de La Roue s’est automobilisée bien plus rapidement que la moyenne de la Ville de
Bruxelles. En 1991, quand plus de 40 % des ménages bruxellois vivaient encore sans voiture, 3/4
des ménages de La Roue étaient déjà équipés d’un véhicule. Ce pourcentage est resté constant
pendant les 30 dernières années.
La cité jardin n’était pas conçue en vue d’une automobilisation complète des habitants ; les plans
initiaux ne prévoyaient ni des garages ni des parkings. Les habitants se mirent donc à résoudre le
problème avec leurs propres moyens, en convertissant les jardinets devant les maisons en parking
et/ou en construisant des garages sur les îlots carrossables et dans les jardins plus amples. Les
photos ci-dessous montrent quelques exemples de cette pratique.
Îlot intérieur de l’avenue de la Persévérance : Cet îlot Îlot sur la rue du Savoir : Cet îlot est également utilisé
est utilisé comme parking ; les jardins avoisinants sont comme parking, et la Commune d’Anderlecht l’utilise
tous pourvus de garage qui donne sur cet îlot. comme recypark mobile et a construit un hangar
d’outils
71
Rangée de jardinets transformés en parking sur l’avenue de la Persévérance : Malgré la disponibilité de parkings
balisés sur la rue, les habitants préfèrent utiliser leurs jardinets comme emplacement pour leurs voitures.
Dans ses travaux de rénovation de la Place ministre Wauters et de ses environs, la commune
d’Anderlecht a pris soin de construire et baliser des parkings sur la voirie publique, et de
placer des poteaux afin de rendre difficile voire impossible l’accès aux jardins.
Cette mesure a aidé à protéger les jardinets devant lesquels elle était appliquée avec
conséquence, mais comme on peut observer sur la photo ci-dessous, la moitié de la place
n’est pas équipée de poteaux séparateurs, et l’utilisation des jardinets comme parking
continue comme avant.
72
Figure 20: Séparation physique des jardinets de la voirie publique
quartier.
« On le sait, cela a déjà été détaillé lors de débats au Conseil communal, les place de parking
créées dans les jardinets de façade font à la fois l’objet de procédures en infractions et d’un
73
refus systématique de régularisation. Comme il n’existe pas de prescription pour ces
démarches urbanistiques, certaines de ces transformations très anciennes font l’objet de
tracas administratifs pour toute une série de propriétaires. Pire, quand la Région fait preuve
d’une certaine ouverture, le Collège communal ne parvient pas à parler d’une même voix sur
cette problématique. Devons-nous oublier que la Commune durant des années (jusqu’à la fin
des années nonante) a accepté et même encouragé ces modifications d’usage. Les
particuliers recevaient ainsi une facture communale en vue d’abaisser leur trottoir pour
accéder à une place de stationnement créée dans leur jardin… N’oublions pas non plus que
nombre des personnes aujourd’hui en butte à des procédures d’infraction ont agi de bonne foi
et de longue date. Elles sont qui plus est souvent âgées et financièrement en difficulté pour
faire face à des procédures longues ou d’éventuelles sanctions.
« Le Collège travaille actuellement à̀ trouver une solution qui permettrait de régler, une fois
pour toute et dans l'intérêt des citoyens concernés, la problématique qui nous occupe. Entre
temps, je vous informe que nous avons pris la décision qu'aucune amende ne serait infligée
aux personnes se trouvant en infraction ni qu’aucun procès-verbal ne serait dressé, le but
premier n'était d'ailleurs pas celui-là̀ .
Lors de la séance du Collège de mardi dernier, nous avons déjà pu ébaucher des pistes de
solution. Des que celles-ci seront finalisées, notre nous adresserons un courrier officiel à tous
les habitants de nos cités-jardin avec nos propositions et chacun sera bien évidemment libre
et en droit de s'exprimer… ». »54
Le choix des mots (en italique) permet de conclure qu’il y a un certain penchant vers la
régularisation de ces infractions afin de satisfaire la demande des citoyens, ce qui manque,
c’est seulement l’unanimité des différents pouvoirs décideurs. Il faut noter ici qu’une mise
en conformité de ces infractions, qui concernent actuellement plus de 30 % des jardinets,
aurait pour conséquence la pérennisation de cette situation 55 et une perte définitive d’une
des composantes fondamentales de l’identité d’une cité jardin.
Comme indiqué dans l’étude typologique et historique réalisée pour le Foyer Anderlechtois
(voir chapitre 4.1.), il est vrai que les rénovations réalisées pour l’espace public ont souvent
peu de regard pour la biodiversité ; l’entretien pratique, la facilité de circulation ainsi que
les aspects esthétiques semblent prendre le dessus sur la préservation et la promotion de la
biodiversité.
Bien que le Foyer Anderlechtois décore les fenêtres des logements sociaux avec des bacs de
fleurs, et la Commune place également des bacs de fleurs sur les places et carrefours, ceci
est souvent fait avec peu de soin pour le détail, peu d’entretien et aussi peu de soin dans le
choix des espèces. Les photos ci-dessous donnent quelques exemples des plantations.
56
Contrat de quartier durable Bizet 2020, Lab705/ Idea Consult/ Aries/ Faciliyo, janvier 2021; Projet d’Aménagement du
Parc des Colombophiles, Commune d’Anderlecht, Note d’intention, 2022
75
Les grands bacs à fleurs sont souvent plantés avec des espèces qui contribuent peu à
l’enrichissement de la biodiversité, comme le laurier cerise, et ils sont mal entretenus. Il en
est de même pour les pieds d’arbres. Le programme d ‘ »adopter un arbre « de la Commune
d’Anderlecht permet cependant aux habitants d’y remédier dans la mesure de leurs
connaissances et capacités. Les photos suivants illustrent la situation.
Pied d’arbre non planté, non entretenu, rue des Bac à fleurs décoratif, planté avec du laurier cerise, peu
Citoyens entretenu, place ministre Wauters
Carrefour des avenues de la Persévérance, des Droits de l’Homme et de la rue de l’Émancipation : deux pieds
d’arbres sans arbres, non plantés, non entretenus, un morceau de gazon sans vocation spéciale, un bac à fleurs en
plastique, forme pyramidale. L’ensemble fait l’impression d’avoir été mis en place de forme aléatoire, sans
réflexion spécifique.
Ceci est aussi visible dans le cas de l’école P21, qui fut rénovée avec beaucoup de soin pour
le patrimoine architectural ; la cour, par contre, est conçue avec peu d’égard pour la
préservation du milieu naturel. Il en est de même pour l’école maternelle de la Plaine des
76
Loisirs. Les photos ci-dessous montrent ces deux cours, en comparaison avec une cour
d’école (maternelle) beaucoup plus naturelle.
Cour de l’école maternelle , Plaine des Loisirs Cour de l’école P21, rue des Citoyens
77
Tableau 10: Exemples de jardinets minéralisés
Actuellement, seulement 35 % des jardinets sont encore complètement préservés. Le reste est soit
transformé en parking, soit minéralisé pour des fins décoratives personnelles. Le graphique suivant
illustre la situation.
78
Graphique 21: Etat des jardinets dans la cité jardin de La Roue
La situation est assez différente entre les propriétaires privés et les locataires du Foyer
Anderlechtois. Une grande partie des maisons du Foyer n’est pas dotée de jardinets ; ceci concerne
surtout les maisons autour de la Plaine des Loisirs et le long de la rue des Huit Heures. Entre celles
qui jouissent d’un jardinet, presque la moitié l’a conservé entièrement, tandis que seulement 1/3
des propriétaires privés l’ont conservé ; un autre tiers l’a minéralisé complètement. Le graphique
ci-dessous montre la différence.
79
Graphique 22: Conservation des jardinets - propriétaires privés et logements sociaux
De manière similaire, beaucoup de haies sont partiellement ou complètement disparues. Ceci va souvent
ensemble avec la transformation d’un jardinet en aire de stationnement; parfois avec le besoin d’un
propriétaire d’assurer plus de privacité ou simplement avec un goût diffétent. Le graphique suivant
montre la situation actuelle.
80
Graphique 23: Etat des haies dans la cité jardin de La Roue
On peut observer une différence significative entre les propriétés privées et les logements
sociaux. Presque 3/4 des haies sont complètement préservées chez les locataires du Foyer
Anderlechtois, et la proportion de haies enlevées, remplacées par des murs, des grillages ou
d’autres éléments constructifs est autour de 10 %. Par contre, chez les propriétaires privés,
on compte avec 1/3 de haies enlevées ou remplacées par d’autres clôtures.
81
Graphique 24: État des haies dans les propriétés privées et les logements sociaux
Une situation similaire peut être observée pour les jardins en arrière des maisons. La quasi
totalité des maisons en propriété privées compte avec une ou plusieurs annexes construites
dans les jardins. S’y rajoutent des vérandas, des terrasses minéralisées, des cabanes...Même
si ce phénomène est plus restreint que pour les jardinets côté rue existe donc une certaine
quantité de jardins qui sont entièrement minéralisés. D’autres jardins sont convertis en
dépôts d’ordures. Les images ci-dessous montrent quelques exemples.
82
Tableau 11: Exemples d’utilisation des jardins dans la cité jardin de La Roue
Deux jardins convertis en dépôts d’ordures (avenue Jardins arrière entièrement minéralisés ; combinaison
Melckmans + avenue des droits de l’Homme) d’annexes et de cours bétonnées/ gazon en plastique
(rue Hoorickx)
Seulement 15,3 % des jardins arrière sont actuellement encore préservés 57, et 21,6 % des jardins
sont préservés à plus de 70 %. . Par contre, ¼ des jardins sont soit complètement minéralisés (22,8
%) soit transformés en dépôt d’ordures, de sorte que le sol n’est plus identifiable.
Le graphique suivant montre l’état des jardins arrière de la cité jardin de La Roue.
57
Pour les maisons de coin, nous avons compté le côté entré comme jardinet, et le côté latéral/ arrière comme jardin. Un jardin
avec une annexe, terrasse ou véranda < 3 m de profondeur ou avec une des cabanes de jardin initialement construites par le
FoyerAnderlechtois est compté comme un jardin entièrement préservé. Les jardins dans lesquels la couverture végétale est
ôtée, mais aucune imperméabilisation n’a eu lieu, sont aussi considérés comme préservés.
83
Graphique 25: Etat des jardins arrière/ latéraux dans la cité jardin de La Roue
La différence entre les propriétaires et les locataires est moins prononcée que pour les autres
critères. Le graphique suivant montre que 25 % des jardins du Foyer Anderlechtois sont
(presque complètement) minéralisés et/ou transformés en dépôt d’ordures, en comparaison
avec presque 40 % pour les jardins privés.
84
Graphique 26: Etat des jardins - privé et locatif
85
Figure 27: Limite entre la cité jardin (en bas, à droite) et les maisons rivéraines de la Chaussée de Mons
(en haut, à gauche)
L’entretien des îlots dépend beaucoup de l’engagement et de la bonne volonté des habitants
riverains ; la Commune s’en occupe sur demande et à fréquence irrégulière. Beaucoup
d’habitants de La Roue ignorent l’existence des « jardins secrets » ; ils sont connus surtout
par les riverains et par quelques amateurs des venelles, du patrimoine et de la biodiversité
locale.
87
4.7.4 La disparition lente des haies et arbres structurants
L’évolution de la biodiversité est peut être évaluée grâce aux orthophotoplans mis à
disposition dans Brugis. Le tableau suivant compare les orthophotoplans pour 1944 – 2019.
Orthophotoplan Explications
88
Orthophotoplan Explications
89
Orthophotoplan Explications
90
Dans les dernières 30 années, à peu près la moitié des
arbres du quartier a disparu. Des arbres malades furent “Vous venez de la commune?
J’aimerais demander quand ces
coupés, mais pas remplacés ; des arbres en bonne santé arbres seront enlevés. Ils sont déjà
furent parfois enlevés car ils gênaient les habitants centenaires, ils vont nous tomber sur
la tête si ça continue comme cela!”
autour. Les arbres sont parfois vus comme des éléments
perturbateurs – ils font de l’ombre, les feuilles tombent, Remarque d’une habitante rue
Waxweiler lors de l’enquête porte à
ils empêchent l’utilisation des jardinets pour le porte dans le contexte du projet
stationnement des voitures. Rénov-Roue-Rad, février 2022
La mise à quatre voies de la ligne 50A de la SNCB avait un rôle important dans la diminution des
grands arbres du quartier. Les images ci-dessous donnent une impression des lieux où des arbres
furent coupés, mais pas remplacés.
91
Arbre en bonne
santé récemment
coupé (rue de la
Solidarité)
Le graphique suivant compare la situation en 1998 avec celle d’été 2022. Des données couvrant
l’époque de construction de la cité jardin ne sont malheureusement pas disponibles. Les arbres
coupés après le recensement fait pour l’étude présente en juin 2022 ne sont pas pris en compte.
Graphique 28: Nombre d'arbres dans la cité jardin de La Roue - 1998 et 2022
92
4.7.5 La désaffectation des venelles
A l’heure actuelle, beaucoup de venelles sont tombées dans l’oubli et ne sont que rarement
utilisées par les habitants. Bien que le Collectif de la Roue et d’autres associations comme
l’AMO Sésame ou autrefois la Maison des Enfants fassent des efforts pour maintenir les
venelles propres et accessibles, ces initiatives sont généralement limitées aux venelles
principales. Les ramifications des venelles, qui connectent quasiment toutes les maisons d’un
îlot, sont souvent ignorées ; les haies et arbustes ne sont plus taillées, et l’accès est difficile,
voire impossible.
Les entrées de quelques unes sont barrées afin d’empêcher le dépôt clandestin d’ordures ou
pour décourager les cambrioleurs. Beaucoup de jardins arrière n’ont plus la haie initiale
comme séparation entre les terrains ; les propriétaires ont construit des murs et souvent aussi
des annexes arrière, limitrophes avec les venelles. Comme résultat, l’accès aux venelles par
les jardins est souvent empêché, et la fonction des venelles comme voie de communication et
de logistique additionnelle, plus privée et familiale, est largement perdue.
Les photos ci-dessous montrent quelques exemples de l’état actuel des venelles et des accès.
93
Ci-dessus :
Venelle entre l’Avenue de la Société Nationale et la
Plaine des Loisirs : Venelle pavée et entretenue par le
Collectif de La Roue. Les haies initiales sont remplacées
par des murs.
A droite:
Venelle entre la rue de la Tranquilité et la rue des
Grives. Les haies initiales existent toujours mais sont
mal entretenus, la venelle est difficilement passable et
peu entretenue
94
Graphique 29: Etat des venelles
Un peu plus de 50 % des jardins ont toujours un accès aux venelles, même si celui-ci n’est souvent
plus utilisé. La graphique suivante montre l’accessibilité des venelles.
L’abandon des venelles n’est pas un phénomène récent. Le Plan Vert pour La Roue de 2012 a
déjà consacré un fascicule à ce sujet et constate : « Aujourd’hui, les venelles sont moins
utilisées. L'évolution des modes de vie explique cela. En particulier les changements dans les
modes de déplacement, faisant la part belle à l'automobile. Il en résulte un relatif désintérêt
de la part des habitants du quartier pour leurs venelles. Concrètement, certaines venelles ne
95
sont plus praticables à cause des plantations et des constructions qui encombrent le chemin.
Dans d'autres cas, ce sont des dépôts sauvages d'immondices qui obstruent le passage.
Les habitants de La Roue admettent que les venelles présentent un haut potentiel à
réactiver, mais ils évoquent également un sentiment d'insécurité qu'elles provoquent. La
peur d'une intrusion par l'arrière de leurs maisons ou le dérangement causé par le
rassemblement de jeunes aux endroits les plus cachés, par exemple, sont évoqués comme
des inconvénients des venelles. Ces ressentis sont créés par le manque de contrôle social sur
les venelles.
Le sentiment d'insécurité est également nourri par le manque d'entretien de ces espaces,
alimentant ainsi un cercle vicieux. »58
L’étude du Foyer Anderlechtois va encore plus loin dans son évaluation de la situation des
venelles : « On peut évoquer les mêmes raisons de fermeture, voire opposition et contraste,
qui s’est créée au fil du temps entre le contexte des jardins à l’arrière des maisons et les
venelles. Ici, la perte de confiance dans le potentiel, voire même l’attitude défensive
installée à la limite arrière des jardins ne permet actuellement pas de voir beaucoup de
voies de sorties pour le devenir des venelles. Le rapport étant annulé, voire nié,
aujourd’hui leur dégradation plaide ou pour une fonctionnalisation au service de la
voiture ou pour son anéantissement, au profit de la propriété privée à partager entre
riverains. »59
Vu les maintes initiatives des associations du quartier, de la Commune et aussi des habitants
individuels pour réanimer les venelles, nous aimerions souligner notre désaccord complet
avec cette conclusion. Même si une venelle, entre la Place du Confort et l’avenue
Melckmans, a déjà subi ce sort et a été absorbée par les jardins avoisinants 60, nous pensons
que la plupart des venelles peut encore être rétablie avec un effort concerté des habitants,
du Foyer Anderlechtois, des associations locales et de la Commune.
Une autre raison pour l’abandon des venelles est l’incertitude concernant la propriété et la
responsabilité pour ces espaces demi-privés, demi-publics. Initialement, toute la cité jardin
appartenait à la Société Nationale de Logement, maintenant devenue le Foyer Anderlechtois.
Les rues et les places publiques ont été très tôt rétrocédées à la Commune. Lors de la vente
de maisons à des propriétaires privés, il paraît que les moitiés des venelles jouxtant le jardin
de la propriété en question ont également été vendues, ceci avec l’obligation d’une
servitude de passage61.
58
Citation du Plan Vert La Roue, Fascicule 2, Collectf Ipé, mai 2012
59
Citation de: Étude historique et typologique de la cité “La Roue” à Anderlecht, cabinet p. HD scprl, 2015, pour le
Foyer Anderlechtois
60
Source: Plan Vert La Roue, Fascicule 2, Collectf Ipé, mai 2012
61
Source: ibidem
96
Les actes de vente ne sont cependant pas clairs au sujet de la servitude :
Dans l’Article 10 du cahier de vente de la Société Nationale du Logement – qui est annexé à
chaque acte de vente ultérieur, les droits et obligations concernant les venelles sont
indiquées comme suit :
« Il est en outre interdit aux acquéreurs, sans autorisation expresse du vendeur :
(…)
f) de modifier d’aucune façon le tracé, les dispositions ainsi que la largeur des venelles ou
couloirs d’accès (...) »62
Bien que l’Article 11 oblige les acquéreurs à déléguer l’entretien de toutes les haies – donc
aussi des venelles au Foyer Anderlechtois et de payer ce service (voir aussi chapitre 3.2.4.),
ce mode de coopération n’est apparemment plus d’usage.
Aujourd’hui, la responsabilité d’entretien et de nettoyage incombe donc à une multitude de
co-propriétaires, tant le Foyer Anderlechtois que des propriétaires privés individuels, bien
que les venelles soient des sentiers publics. Par conséquence, aucun entretien régulier ne se
réalise plus.
Il faut cependant souligner que les venelles ont une importance considérable aussi pour la
biodiversité ; elles fonctionnent comme des couloirs de passage et d’échange entre biotopes.
Ceci est surtout important pour la petite faune, qui,ayant des difficultés de traverser des
murs,des espaces bétonnés ou des routes, reste souvent cloisonnée. Dans cette fonction, les
venelles font partie du maillage vert bruxellois, qui vise l’établissement d’un réseau de
couloirs verts ininterrompu. Chaque venelle oblitérée rétrécit donc aussi l’espace vital des
animaux qui peuplent l’habitat urbain.
62
Source: Cahier S.N./V.82, Société Nationale du Logement, Prescriptions, charges, clauses et conditions générales
applicables pour toute aliénation, soit par vente ou par échange (…) de tous biens immobiliers bâtis appartenant soit à
la Société Nationale du Logement ellemême, soit aux sociétés immoblières de servce public agréées par elle (...)
63
Toutes photos prises lors d’une balade thématique “biodiversité La Roue/ Petite Île” avec une guide nature (Claudia
Wulz), 18 septembre 2022
97
Fougère ruta muralis, Mousses (Briome et tortule
observée sur un mur de de mur)
clôture, rue de l’Énergie
La conservation de la petite biodiversité est lié à un certain manque d’entretien ; elle peut
se développer si les habitants renoncent de nettoyer ou désherber trop souvent les bords de
chemin, les crevasses et espaces entre les pierres et les dalles.
98
L’adaptation de la végétation de la cité jardin aux températures en montée : Dans nos
contrées, les arbres citadins, qui poussent déjà dans un environnement difficile, entourés de
terrains imperméabilisés, exposés à des températures plus élevées, sont les espèces les plus
affectées par le changement climatique, et il est fort probable que quelques uns entre les
arbres et arbustes de La Roue devraient être remplacés par des espèces plus robustes. Il
semble cependant que le troène, les platanes, les robiniers et les tilleuls sont bien adaptés
aussi à des températures plus élevées. La diversité d’espèces dans la cité de La Roue est un
atout, car elle permettra une adaptation douce, s’il s’avère que l’une ou autre espèce ne
résiste plus aux températures et/ ou aux sécheresses.
Les connaissances des habitants concernant l’utilité de la biodiversité sont parfois limitées.
Par exemple, le lien entre la minéralisation d’une terrasse et le réchauffement du micro-
climat n’est souvent pas connu. L’habitant remplace sa pelouse par du carrelage dans un
souci de propreté, d’entretien facile, d’hygiène, mais sans savoir que cela affectera aussi son
bien-être pendant des canicules et augmente le danger d’inondations.
Il est vrai que la Région de Bruxelles jouit d’une grande biodiversité et abrite plus que la
moitié des espèces indigènes belges. De l’autre côté, cette biodiversité est menacée par la
réduction continue des espaces verts, par l’imperméabilisation et par la pression foncière.
Actuellement, 32 % des espèces verts de Bruxelles sont constitués par des jardins privés. De
l’autre côté, la superficie non bâtie a diminué de 17 % entre 1980 et 200364, et la tendance à
la densification continue. Les cités jardin comme La Roue jouent donc un rôle important dans
leur préservation – ou dans leur perdition.
64
Source: https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/Biodiversite%202010%20FR
99
5 Caractéristiques socio-économiques
5.1 La situation socio-économique de la Cité Jardin de La Roue
Bien que considérée comme « quartier défavorisé » dans beaucoup de publications
bruxelloises, la cité jardin de La Roue a un profil socio-économique assez divers et parfois
contradictoire. Étant une ancienne cité ouvrière, la population ouvrière est toujours
majoritaire, le niveau d’éducation est plutôt bas, et beaucoup de maisons sont considérées
être « avec petit confort » voire « sans aucun confort ». De l’autre côté, le quartier jouit
d’une stabilité sociale considérable, le taux de chômage est bas, et les revenus sont aux
environs de la moyenne bruxelloise.
Une étude de la KU Leuven sur la pauvreté à Bruxelles détaille 23 indicateurs de pauvreté 65.
Ces indicateurs datent de 1991 et sont, dans le tableau suivant, comparés avec des
indicateurs plus actuels dans la mesure où ces indicateurs sont accessibles.
Tableau 13: Indicateurs sociaux pour la Cité Jardin de La Roue, en comparaison avec Bruxelles
Indicateur Cité de La Roue Moyenne Cité de La Roue Moyenne
1991 bruxelloise 1991 2006 bruxelloise 2006
Indicateurs liés à l’enseignement
Dernier diplôme en dessous du CESS > 65 % 39,1 % > 25 % 14,04 %
Détenteurs de diplôme universitaire <4% 14,4 % < 15 % 34,13 %
ou assimilé
Élèves du secondaire en technique ou 45 – 59 % 34,8 % > 20 % 13,22 %
professionnel
Étudiants en enseignement supérieur 5–9% 19,8 % 16,9 – 23,0 24,6
(15-24 ans)
L’emploi
Chercheurs d’emploi, en % de la 13 – 16 % 15,1 %
population active totale
Ouvriers, en pourcentage de la 31 – 50 % 23,9 %
population active occupée
Population active dans les banques, 40 – 49 % 56,1 %
assurances et secteur de services
A précarité
Revenu moyen par habitant 6625 – 8000 €/an 8533€/an 14.000 – 16.000
€/an
65
Pauvreté et quartiers défavorisés dans la Région de Bruxelles Capitale, Les dossiers de l’Observatoire de la Santé et du
Social de Bruxelles Capitale, 2002/01, Christian Kesteloot, Truus Roesems et Heidi Vandenbroecke, Instituut voor
Sociale en Economische Geografie, KU Leuven
100
Indicateur Cité de La Roue Moyenne Cité de La Roue Moyenne
1991 bruxelloise 1991 2006 bruxelloise 2006
66
Présence de turcs et de marocains 0,1 – 2,4 % 10,3 %
66
Dans l’étude, la présence de turcs et de marocains est considérée comme un facteur de pauvreté, étant donné que
dans les années 1990, ces populations étaient les plus vulnérables sur le marché de l’emploi. La Collectif de La Roue
aimerait remarquer que nous considérons plutôt erronée l’approche d’interpréter la mixité éthnique (ou autre) comme
un facteur de précarité.
67
Chiffre de 2004, Statistiques sanitaires et sociales, Édition 2006/1, Commune d’Anderlecht
68
Le logement “sans confort” n’a pas accès à un ou plusieurs des trois éléments: eau courante, toilette privée, salle de
bains/ douche
69
Dans l’Atlas de la Santé et du Social de Bruxelles Capitale (2006), la Cité Jardin de La Roue est classifiée comme “sans
confort”, sans pour autant donner des chiffres.
70
Il n’est pas clair comment cette surface est calculée; la totalité des maisons de la cité jardin de La Roue a une surface
> 100 m².
101
Il nous semble que l’indicateur « sans confort », qui caractérise la Cité Jardin de La Roue
tant en 1991 qu’en 2006 est basé sur la conception initiale des maisons sans salle de bain et
ne tient pas compte des rénovations entreprises par l’entièreté des propriétaires privés. En
1985, même la moitié des locataires du Foyer Anderlechtois avait installé des salles de bain à
leurs propres frais, étant donné que les bains-douches n’étaient plus fonctionnels, et le
Foyer tardait à s’y investir71.
La stabilité résidentielle semble caractériser la Cité Jardin de La Roue pendant toute son
existence. Le vieillissement du quartier dans les années 60 – 80 du siècle passé était dû
surtout à la réticence des locataires de déménager ailleurs ; une publication du début du
nouveau millénium cite un habitant : « Je vis depuis de 47 ans dans ce quartier, et c’est ici
que je vais mourir ». Il n’est pas rare que des logements en location sont passés de
génération en génération ; la maison dans la Rue de la Tranquilité 3, récemment rénovée par
le Foyer Anderlechtois, était occupée par la même famille de 1927 – 2007 72.
On observe qu’il y a une hausse importante dans le niveau d’éducation, tant à Bruxelles en
général qu’à La Roue. Le niveau d’éducation reste cependant en dessous de la moyenne
bruxelloise. Les revenus, qui étaient en 1991 encore en dessous de la moyenne bruxelloise,
sont maintenant légèrement au-dessus, tandis que le médian de La Roue est légèrement en
dessous du bruxellois. Ceci est un indice pour une plus grande inégalité à La Roue, ce qui
peut être expliqué par le fait que plus d’un tiers des ménages sont des logements sociaux, et
le reste consiste, dans sa grande majorité, de propriétaires.
En comparaison avec son voisinage et avec les autres cités jardin anderlechtoises, la Cité
Jardin de La Roue est actuellement dans une situation légèrement plus aisée 73 :
71
Source: Source: Tuinwijk “Het Rad”, Een onderzoek naar de woonsituatie van de sociale huurders uit de tuinwijk “Het
Rad” te Anderlecht, 1985, Maison du Quartier La Roue
72
Témoignage de deux dames ayant grandi dans cette maison, lors de la fête du centenaire de la Cité Jardin, 22/05/2022
73
Source: Secteurs Statistiques et Quartiers 2019, ULB-IGEAT et Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles
102
Tableau 14: Indicateurs socio-économiques: environs de La Roue et cités jardin anderlechtoises
L’homogénéité éthnique, qui avait été nommée “Eigenlijk is Het Rad de laatste wijkplaats
comme un des indices de stabilité dans l’étude van de oude Brusselaers”, zegt
buurtwerker Matthias Jacquart van het
de la KU Leuven de 2002, s’est considérablement plaatselijke Maison du Quartier. “Ik
vergelijk het wel eens met het Gallische
diversifiée dans les dernières 30 années. Il
dorpje van Asterix. Een gevoel van: hier
n’existe pas de statistiques détaillées sur ce zijn we nog onder ons, maar de vijand
loert overal.”
sujet pour la Cité Jardin de La Roue, mais une
analyse de 95 voisins enregistrés pendant la (citation: De Standaard Magazine,
campagne porte à porte montre les origines 19/09/1997
suivantes :
74
Source: De Standaard Magazine, 19/09/1997
103
Graphique 31: Origines des habitants de La Roue (participants du projet Rénov-Roue-Rad)
Italienne Belge
Hongroise Bangladech
Polonaise Grecque
Anglaise Turque
Marocaine Espagnole
Française Libanaise
Allemande Rwandaise
Congolaise Vietnamienne
Tunisienne Roumaine
Bien que les Belges constituent, avec 57 % des habitants, toujours la majorité, le
pourcentage d’habitants avec des origines étrangères est assez important. La plupart des
habitants venant des pays non-UE sont naturalisés, tandis que les ressortissants de l’UE
demeurent, dans leur majorité, des « étrangers ».
L’augmentation de la mixité dans le quartier se montre aussi dans les lieux de culte : très
nouvellement, le quartier de La Roue s’est doté d’une mosquée, tandis que l’église St.
Josèphe fête ses messes de plus en plus pour un public africain et asiatique ; il n’existe plus
de service en flamand pour les habitants néerlandophones du quartier.
Peu sont les habitants de La Roue qui ne parlent qu’une seule langue ; le bilinguisme, voire
multilinguisme est le standard dans le quartier. Beaucoup d’habitants anciens parlent
néerlandais et français, les plus jeunes souvent, de plus, l’anglais. Entre les habitants
d’origine étrangère, se rajoutent les différentes langues maternelles. De plus, on observe
surtout dans la population arabe, plutôt francophone, une tendance à inscrire les enfants
dans les écoles néerlandophones, de sorte que l’enfant grandisse déjà trilingue (arabe-
français-néerlandais). De l’autre côté, le multilinguisme qui enrichit le quartier, l’appauvrit
dans un certain sens aussi – le dialecte bruxellois semble disparaître de la cité jardin de La
Roue75.
5.3 Le tissu social et les initiatives citoyennes
75
Observation faite par une voisine lors de la récolte de témoignages
104
La Cité Jardin de La Roue est traditionnellement riche en associations et initiatives solidaires,
mais aussi en structures communales que assurent un appui et un encadrement de celles-ci.
Nous citons :
asbl AMO Sésame Service d'aide aux jeunes en milieu ouvert. ? - présent
Accueil, Aide individuelle, Actions
collectives de prévention, Aides aux devoirs
et soutien scolaire, Cours d'alpha et de
français pour les parents, Projets citoyens,
Intervention dans les écoles, Travail en
réseau, Interpellation politique
La Maison des Enfants Accueil d’enfants entre 6 – 12 ans, activités 2006 - 2021
de loisirs, appui scolaire
Les Graines du Savoir 2021 - présent
Communale Maison de Quartier La Roue Actions sociales, des services de proximité ? - 2006
et des activités socioculturelles, aide
sociale
76
Compté le 04/07/2022
105
Dans le passé, la cité de La Roue comptait avec une multitude d’activité sportives et
culturelles de voisinage : « Il y avait les processions, les kermesses et une course cycliste.
Les kermesses avaient de l’importance dans les années 60. Dans la rue des Colombophiles,
beaucoup de maisons avaient des pigeonniers. Ils faisaient des concours avec les pigeons,
c’était une activité assez commune. Dans la radio, on annonçait les résultats des concours, et
dans le café de la rue Waxweiler, il y avait plein de paniers avec les pigeons. C’était une
activité assez importante du quartier. Sur la chaussée de Mons, il y avait le cinéma Rio (là où
il y a maintenant Paribas) et une baraque à frites. C’est là où allaient les jeunes. Les enfants
jouaient à la Plaine des Loisirs. »77
Ces activités ont laissé la place à des initiatives encadrées par des clubs sportifs, des
associations sociales visant les jeunes, ou des activités organisées par la Commune.
On observe cependant une tendance vers une meilleure ambiance dans le quartier dans les
dernière années. Il n’existe pas de statistiques concernant la criminalité à l’échelle des
77
Témoignage d’une habitante qui a passé toute sa vie dans le quartier de La Roue
78
Source: De Standaard Magazine, 19/09/1997
79
Voir: https://www.dhnet.be/actu/faits/ex-legionnaire-aux-assises-51b7d26be4b0de6db99032e4
80
Témoignage d’un habitant de la Plaine des Loisirs, lors de la visite du quartier par le partenaires du projet Rénov-
Roue-Rad, 20 janvier 2022
106
secteurs statistiques ; elles sont disponibles à niveau des communes. Les délits les plus
importants sont listés ci-dessous.
Anderlecht : 374/10.000 Anderlecht : 32,7/ 10.000 Anderlecht : 118,35/ Anderlecht : 94,25/ 10.000
autos autos 10.000 logements logements
Lors de la première cinquantaine de la Cité Jardin de La Roue, elle comptait de nombreux cafés,
magasins et d’autres infrastructures sociales et économiques. Avec le changement de la mobilité
des habitants (moins de trajets à pied, plus d’utilisation de voiture), mais aussi avec l’apparition
des grandes surfaces les épiciers, bars et restaurants disparurent successivement du quartier.
„En fait, dans la cité jardin, il y avait tous les coins prévus pour les Le seul magasin actuellement
magazins. L’autre coin de la Plaine des Loisirs était aussi un magazin. Mais encore actif dans la cité jardin est
il n’y avait pas beaucoup d’autres magasins à l’intérieur de la cité.
Aux alentours de la cité jardin c’était plein de petites épiceries, des cafés. l’épicerie sur le coin de l’avenue
Il y avait beaucoup de boucheries dans la rue des Loups. Dans l’avenue de
la Société Nationale (entre Jacques Boon et Colombophiles), il y avait un Melckmans et la rue des Loups. En
poissonnier, une épicerie et un boulanger. Quand on partait de la rue des
2002, même la fermeture de celle-
Loups au canal, il y avait un café au coin, une épicerie, un boucher, un café
plus loin vers la cité jardin. Il y avait aussi un boucher au square Hector ci fut brièvement considérée, dû à
Genard, et une épicerie. Un quincaillier/ droguerie dans la petite rue des
Loups. Waxweiler: cordonnier + marchand de chapeaux (bérets pour les des différends entre le Foyer
hommes). Je parle des années 70.
Quand les grandes surfaces sont arrivées, tout cela est parti. Il y avait aussi Anderlechtois et les exploitants82.
deux photpgraphes, pour les fêtes, pour les mariages. Un sur la Place de La
Roue, l’autre sur la Chaussée de Mons. Mes parents fréquentaient toujours
lesD’autres commerces,
mêmes. Maintenant, telscentré
tout est que sur
le laTonton Ergé
Chaussée (coin„ de la rue
de Mons. des citoyens/ rue de l’énergie) ont
Cécile
fermé après 2005, la boucherie Geert & Jenny (rue des loups, 71), l’épicerie « Chez Franske «
(avenue Melckmans, 2) ont fermé dans les années 90. Le frit-kot sur la Place ministre Wauters a
disparu après un incendie en 2010. Le marché hebdomadaire de la Place de La Roue est aussi
disparu ; le dernier marchand a arrêté son activité en 2020.
Actuellement multi-communautaire, les
magasins belges ont quasi disparu, Il reste 1
On ne peut cependant pas constater que les coiffeur, 2 ou 3 coiffeuses, 1 libraire,1
habitants de La Roue sont dépourvus de commerces volailler, l marchand d'outils, 1 boucher dans
une rue voisine, 1 pressing, Les restaurants de
de voisinage. Sur la Chaussée de Mons, mais aussi qualité ont disparu (un restaurant portugais
dans la périphérie du quartier, on trouve beaucoup populaire s'est installé), plus d'agence de
voyage à cause du covid, Les magasins de fruits
de petits commerces, des bars et cafés ainsi que des légumes étrangers sont légion ainsi que les
82 coiffeurs pour hommes qui se multiplient
Source: Verslag vergadering Anderlechtse Haard/ Wijkcomité, 22 januari 2022
curieusement. La librairie ch, de Mons a fermé
108 ses portes mais heureusement est partiellement
remplacée pour certains journaux et
magazines.
Jeannine
snacks. Ce qui a changé beaucoup pourtant est la
diversité de ces commerces ; là où on trouvait
autrefois des magasins de laine, de tissus, de vélos,
des spécialités culinaires, de livres et aussi la poste,
le tissu s’est beaucoup appauvri.
La perception des habitants de La Roue diffère fortement des analyses faites dans les
rapports urbanistiques. Les priorités et les ressentis sont différents. Lors des enquêtes porte
à porte dans le cadre du projet Rénov-Roue-Rad, les habitants exprimèrent les idées
suivantes concernant l’identité du quartier :
Bon voisinage
Authenticité
Social Simplicité
Sociabilité
Le bonheur
Les oiseaux
Nature et
La campagne dans la ville
biodiversité
Les venelles et les espaces verts à l’intérieur des îlots
Peu de voisins ont des inquiétudes concernant la perte du patrimoine architectural. Dans
leurs yeux, le quartier est harmonieux. Malgré la réduction importante du nombre d’arbres,
du tissu de haies et venelles et de la qualité des espaces verts, ils ont toujours l’impression
d’avoir « la campagne dans la ville ». Lors des ateliers « Mégafon » organisés par la Commune
en 2021/2022, les préoccupations principales étaient la présence insuffisante d’agents de
quartier, l’omniprésence d’ordures et le mauvais état des trottoirs 83.
La perception n’a pas considérablement changé dans les dix dernières années. Lors des
ateliers de travail urbain organisés par la Commune d’Anderlecht en 2009/ 2010, les soucis
principaux étaient :
la criminalité/ la sécurité
le trafic et le stationnement
Malgré les problèmes de propreté, de trafic et de criminalité souvent évoqués, les habitants
de La Roue sont contents de leur quartier, apprécient la qualité de vie que le quartier
permet à des prix toujours assez abordables, et très peu d’entre eux pensent à le quitter. Il
existe aussi une certaine conscience, voire une fierté du patrimoine de la cité jardin, que le
Collectif de La Roue appuie et promeut avec l’organisation de balades dans le quartier, qui
mettent en valeur les trois patrimoines de La Roue : la nature, l’eau et l’architecture.
Ce qui ressort dans tous les entretiens, c’est un sentiment fort de convivialité, de solidarité
et de bon voisinage. Malgré cela, il est une réalité que la structure initiale de la cité jardin,
avec des haies basses et des jardins communicants, est de plus en plus remplacée par une
structure privative, avec des haies hautes, des murs et clôtures opaques, et la
communication entre les jardins arrière est devenue quasiment inexistante. Parfois, le
ressenti et la réalité résultent contradictoires...
110
7 Conclusions et recommandations
7.1 Constats
Nous observons une dégradation lente, mais continue du patrimoine architectural et naturel
de la cité jardin de La Roue, tandis que le degré de satisfaction des habitants avec leur
quartier, la cohésion sociale et le sentiment d’appartenance sont très forts, sans changement
à travers des décennies.
Le graphique suivant donne un résumé quantitatif de l’état du patrimoine dans la cité jardin
de La Roue.
Graphique 33: Perte du patrimoine architectural et naturel dans la cité jardin de La Roue
On constate que la perte de patrimoine est beaucoup plus grave pour la biodiversité que pour
le bâti. Des altérations graves sont observées pour environ, voire plus de 50 % de la quasi
totalité des critères : la perte d’arbres, la minéralisation de jardins et jardinets,
l’inaccessibilité des venelles...Ceci concerne tant le patrimoine public (les arbres, les
jardins/ jardinets/haies du Foyer Anderlechtois) que privé.
111
Les altérations graves84 du bâti sont beaucoup plus prononcées pour les maisons des
propriétaires privés que pour le Foyer Anderlechtois, qui fait un effort continu pour garder
l’aspect initial des maisons et faire des modernisations en harmonie avec le concept original.
Le graphique suivant montre la différence.
la vente de plus de deux tiers des maisons du Foyer Anderlechtois à des privés, sans
accompagnement pour assurer la continuité dans l’application des règles de la cité
jardin, et sans contrôle des initiatives individuelles
l’augmentation du besoin ressenti d’espace personnel résulte en une pression sur les
superficies non bâties et explique la prolifération des annexes; déjà en 2001, la
superficie par habitant bruxellois était de 35,6 m²85, ce qui a certainement encore
augmenté dans les 20 ans passés.
84
Nous avons considéré une altération grave si au moins la moitié des modifications suivantes est faite pour une maison:
construction d’annexe(s) > 3 m, changement du matériel/ de l’épaisseur de la façade ou peınture des bıiques, remplacement
des fenêtres en bois par du PVC/ du métal, remplacement des portes en bois par du PVC/ du métal, remplacement des
corniches en bois par du PVC ou autre, rehaussement de la toiture ou utilisation d’un autre matériel, remplacement de l’auvent
par une autre forme/ autre matériel.
85
Source: https://monitoringdesquartiers.brussels/indicators/analysis/superficie-moyenne-par-habitant/
112
le manque de connaissances et le manque de clarté concernant les responsabilités et
les règles (à qui appartiennent les venelles ? La Commune permet/ encourage/
interdit les stationnements de voiture dans les jardinets? etc).
Des études précédentes menées au même sujet viennent à des conclusions similaires. Pour le
bâti, l’étude du Foyer Anderlechtois conclut :
« La cité a perdu tout ce qui faisait son unité. La modification des règles d’urbanisme et
le non-respect du règlement de base a créé une situation qui paraît presqu’irréversible
sinon à long terme en imposant une réglementation draconienne. »
En 2013, l’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR) a réalisé pour Urban.Brussels une étude sur la
rénovation énergétique dans l’habitat historique. La cité jardin de La Roue était représentée
comme exemple du style « Cottage ». L’étude arrive aux conclusions suivantes :
« Au delà de ces considérations, dans nombre de cas, des analyses plus poussées seront
nécessaires afin de mesurer la portée de l’interventionnisme sur les façades. La cité jardin
de La Roue en est un exemple flagrant. Certains ensembles datant de la construction de la
cité en 1907 sont très bien conservés (rue des citoyens, rue des colombophiles). Ici l’isolation
extérieure est proscrite.
A l’envers les maisons „expérimentales“ de 1921, qui ont été édifiées à des fins prospectives
afin de mesurer la portée de la préfabrication, ont aujourd’hui un intérêt patrimonial mineur
et pourraient retrouver leur vocation expérimentale par la mise en œuvre de dispositifs
innovants d’économie d’énergie, avec des solutions expérimentales dépassant le simple
cadre de l’isolation extérieure.
Par contre d’autres secteurs comme la Plaine des Loisirs nécessitent une approche plus
nuancée. La Plaine des Loisirs a fait l’objet de nombreuses évolutions, les vitrages d’origine
ont presque tous disparu, les volets aussi, les enduits des façades sont désormais
polychromatiques du fait des ravalements successifs non contestés. Si ce patrimoine a
beaucoup évolué, il n’en demeure pas moins l’emblème de la cité-jardin, comme peut en
témoigner le dessin figurant à la station de métro de La Roue. La polychromie des enduits est
aujourd’hui partie intégrante de l’image de La Roue même si elle n’était pas prévue par son
113
concepteur. Les solutions de réhabilitation devront prendre en compte cette dimension
sociale qui relève de l’appropriation du site par ses habitants. «
L’analyse du patrimoine de la cité jardin de La Roue permet de fournir quelques réponses aux
questions clés formulées au début de cette étude (chapitre 2.2.3.) :
Comment se définit l’identité de la cité jardin de La Roue, quelle est son évolution et
vers quoi se dirige-t-elle?
Le projet Rénov-Roue-Rad n’aura pas d’effets majeurs sur la biodiversité, mais permettra
d’intégrer ou améliorer quelques éléments : augmenter les surfaces verdurisées moyennant
des toitures vertes, intégrer des refuges/ nichoirs pour la petite faune dans la conception
des façades, verduriser les façades avec des plantes grimpantes…Ceci dépend évidemment
du type de parement utilisé ; la possibilité d’intégrer des éléments de biodiversité est plus
facile sur certains types de façades :
Le petit patrimoine :
Avec l’isolation par l’extérieur, le « petit patrimoine » lié à la conception des façades, les
appareillages de briques, de linteaux, de soubassements etc. sera partiellement perdue.Bien
qu’on ait un produit qui permet de ne pas dépasser 20 cm de débord, d'imiter très fortement
l'existant avec un choix de colori, dimensions et appareillage sur mesure, certains éléments
disparaîtront sous la couche d’isolant. Peu importe la finition extérieure ; les briques imités
créeront peut-être un semblable des façades originales, mais d’un regard proche, il sera
toujours évident qu’il s’agira d’un semblable, pas d’un original. L’approche déconstructible
permettra cependant de préserver la façade originale sous l’isolant, et offrira la possibilité
de la redécouvrir dans un avenir lointain où des moyens de chauffage non carbonisé seront
peut-être trouvés.
115
D’autres éléments du petit patrimoine, tels que les corniches, les parures des fenêtres, les
auvents etc. pourront être conservés. Là, où il existe déjà une forte altération, la rénovation
permet une réharmonisation avec l’état original.
Quel est l’état actuel de ce patrimoine, qu’est-ce qui est perdu, qu’est-ce qui est
préservé ?
Biodiversité :
Les pertes de biodiversité sont considérables ; la cité jardin a perdu 50 % de ses arbres, et
environs 50 % des jardins et jardinets sont partiellement ou complètement minéralisés ; les
venelles sont négligées et désaffectées.
Patrimoine architectural :
La presque totalité des maisons privées est moyennement ou fortement altérée, par la
construction d’annexes, par le remplacement de fenêtres et portes en bois par du PVC, par
la peinture des briques, des linteaux ou des seuils de fenêtres, par l’altération de la
corniche etc. La situation est nettement meilleure pour les maisons du Foyer Anderlechtois.
Les places et rues où la majorité des maisons appartient au Foyer Anderlechtois sont dans
un état nettement mieux préservé (la Plaine des Loisirs, les maisons de 1907/ 1908 dans les
rues des Citoyens et des Colombophiles, la rue des Huit Heures, la rue de la Solidarité, la
rue des Plébeiens…).
Les fenêtres, portes et volets originaux ont presque complètement disparus ; les nouveaux
modèles en bois s’en rapprochent partiellement mais sont beaucoup plus sobres.
116
Ceci implique l’abstention de solutions radicales, soit trop chères (objectif maison passive,
par exemple), soit techniquement trop difficiles, soit incompatibles avec les goûts des
participants. Par contre, nous espérons que la solution/ les solutions proposée(s) sera
suffisamment attractive pour inciter les voisins à la répliquer. A moyen terme, nous pensons
que la réplication du modèle proposé mènera à une (re-) harmonisation du bâti et à une
plus grande cohérence avec l’esprit initial de la cité jardin.
Biodiversité :
Un changement indispensable sera l’adaptation graduelle des espèces choisis aux conditions
altérées : plus de résistance contre les températures et les sécheresses sera nécessaire à
moyen terme.
Patrimoine architectural :
Nous suivons l’analyse de l’APUR 86 et pensons que l’approche zonée est la plus appropriée.
Ceci implique une conservation plus rigoureuse des zones peu altérées, où la plupart du
patrimoine initial est toujours intact. Ceci correspond aux zones majoritairement occupées
par le Foyer Anderlechtois.
Par contre, dans les zones fortement altérées, la restitution du patrimoine à l’état original
nous semble peu réaliste. Dans ces zones, nous pensons qu’une approche plus souple, qui
permet d’oblitérer quelques éléments du petit patrimoine, tout en conservant l’esprit
général de la cité jardin et en apportant des nouveaux éléments plus modernes, mais
harmonieux, serait plus appropriée.
86
Source: Amélioration des performances énergétiques du bâti ancien de la Région Bruxelles-Capitale, APUR, 2013
117
Dans ce contexte, nous citons l’ancien bouwmeester, Léo de Broeck : « l’identité est
quelque chose qui change tout le temps. Et si ce changement est inévitable, la seule chose
que nous pouvons et nous devons donc faire, c’est d’ accompagner ce changement vers un
nouveau niveau de qualité.
Appliqué sur un quartier comme La Roue, ceci implique d’accepter que ce site ait perdu ses
qualités historiques. Toute forme d’unité et de consistance stylistique sont perdus à travers
un collage de couleurs et matériaux divers. La proposition d’origine tient la route : faire
peau neuve, renouer et homogénéiser ce site avec une nouvelle couche de matérialité
consistante. La proposition de couvrir les façades avec dus bois tient la route. Il est inutile
de vouloir ‘garder’ des aspects futiles du passé. »87
Pour la zone expérimentale, nous pensons que le critère principal est le caractère
expérimental, et que, pour cette raison, une approche expérimentale plus audacieuse serait
tout à fait cohérente avec les intentions des fondateurs de la cité jardin.
87
Note technique “Réflexions sur la rénovation énergétique duquartier La Roue – Het Rad, 09 septembre 2022
118
Tabelle 18: Analyse des constats
Biodiversité Perte générale de la Les projets communaux pour le Parc des Colombophiles Sans communication adéquate, les habitants ne feront
biodiversité par la et pour le parc des Résédas peuvent susciter plus peut-être pas le lien entre la préservation de la
minéralisation de l’espa- d’intérêt et améliorer les connaissances concernant la biodiversité « publique » et celle de leur parcelle
ce public et privé biodiversité
Primes de la Région Bruxelloise pour la déminéralisation Continuation de la mauvaise pratique par manque de
des jardins et jardinets (des applications pour cela connaissance, de conscience et par imitation du mauvais
pourraient être intégrées dans le projet Rénov-Roue- exemple des voisins
Rad, qui inclut aussi les éco-rénovations)
Compter sur l’effet d’imitation – la remise en état Cette démarche sera peu convaincante pour des habitants
naturel des jardins, jardinets ou haies pourrait aussi qui viennent de minéraliser leur jardin(et).
inspirer des voisin à répéter l’expérience
Utiliser les initiatives de certains habitants pour la mise La bienveillance de la Commune concernant les
en conformité pour rénaturer les jardin(et)s et les haies stationnements dans les jardinets et les acquis du passé
peuvent mener à une pérennisation du statu quo
Intégration de la biodiversité, y inclus les haies, les
moyennant la régularisation inconditionnelle des parkings
jardins et les jardinets, dans le nouveau règlement zoné
dans les jardinets.
Les jardins et haies arrière sont considérés comme privés
et ne sont pas dans le collimateur. Les règles (20 m de
profondeur du bâtiment, minéralisation jusqu’à 3/4 du
jardin) ouvrent la porte à une imperméabilisation continue
des jardins.
Le plan de mobilité de la Région de Bruxelles devrait, à Les habitants optent pour l’électromobilité, installent des
moyen/ long terme, réduire la dépendance de la voiture bornes de rechargement mais ne renoncent pas de la
individuelle voiture privée ; la pression sur les jardinets restera la
même.
Sujet Constats Opportunités Risques
Perte d’arbres significati- Replantation systématique par la Commune Manque de budget communal, manque de volonté politique
ve Intégration de la biodiversité, y inclus les arbres, dans le pour la remise en état naturel des allées arborées
nouveau règlement zoné Manque de suivi et de moyens de coercition pour les
abattages d’arbres par les habitants
Manque de clarté Revitalisation du réseau des venelles et des îlots Manque de considération pour l’utilité des venelles, peur
concernant les responsa- intérieurs par un effort commun de la criminalité ; la désaffectation est peut-être trop
bilités et les servitudes avancée pour que certaines venelles puissent être
(venelles, haies) renaturées.
Intégration faible de la Conception des nouvelles façades et toitures en Les exigences de reconstruire les nouvelles façades « à
biodiversité dans le bâti prévoyant des plantes grimpantes, des nichoirs, des l’ancienne »limitent les options pour intégrer la
toitures plates vertes etc., rajouter une nouvelle biodiversité (structure molle, ne permet pas de verduriser
richesse en biodiversité au concept de la cité jardin la façade, les nichoirs peuvent constituer des ponts de
chaleur...)
Patrimoine Perte de l’harmonie et de Le règlement zoné à venir pourra donner des balises Règlement trop strict pour que les habitants s’en
bâti la cohérence de l’ensem- pour rétablir un standard pour les façades, les châssis, approprient
ble du bâti les portes, le code couleur etc. Manque de suivi et de pouvoir coercitif au sein de la
Commune
Le règlement n’a pas pris en compte les goûts et les
préférences des habitants, qui tiennent à leur liberté de
modifier leur bien selon leur volonté
Moyennant le permis d’urbanisme groupé, le projet La première vague du projet met les balises vers une
Rénov-Roue-Rad amènera un nouveau modèle, attractif option qui exclut le bardage en bois et les matériaux 100 %
et cohérent avec la conception initiale de la cité jardin. biosourcés. Cette option pourrait être moins apte pour
Le même effet peut être attendu des rénovations prévoir des mesures de biodiversité dans la conception des
effectuées par le Foyer Anderlechtois façades.
Des balises architecturales trop strictes peuvent
Sujet Constats Opportunités Risques
Rétablissement d’une partie du statu quo ante Suivi insuffisant des mesures demandées dans les permis
moyennant les mises en conformité demandées par les conditionnels
habitants Manque de volonté des habitants à appliquer toutes les
mesures
Lenteur du processus
Manque d’initiative du côté des habitants d’introduire ce
type de demandes
Approche zonée : Conservation rigoureuse du patrimoine Manque de volonté du côté des administrations de « lâcher
dans les zones encore bien protégées (rue des prise », combinée avec un manque de suivi
Colombophiles, Plaine des Loisirs, rue des Huit Définition insuffisante des balises pour les zones plus libres
Heures…), liberté guidée pour les autres zones
7.4 Recommandations
Nous pensons que la conservation et la restauration du patrimoine naturel de la cité jardin
est plus facilement réalisable que celle du patrimoine architectural, et qu’elle requiert
moins de moyens, moins de temps et répondrait à un grand besoin, étant donné l’étendue
des pertes actuelles.
Tableau 19: Recommandations pour la conservation et la protection de la biodiversité dans la cité jardin de La
Roue
Objectif Recommandation
Rétablissement des Position claire concernant l’obligation ou non de rétablir les jardinets
jardins et jardinets Alignement de la politique de stationnement avec la stratégie bruxelloise de
en forme naturelle mobilité (réduire la dépendance de la voiture privée)
Pour les stationnements régularisés : Obligation de remplacer des revêtements
minéralisés par des revêtements perméables
Pour les anciennes zones de stationnement : Au lieu de lier des permis d’urbanisme
au rétablissement du jardinet (ce qui pousse les habitants vers la construction
clandestine), lier l’obligation de rétablir le jardinet à la vente d’un bien
Pour les anciennes annexes, vérandas et terrasses : Possibilité de lier l’obligation de
rétablir le jardin à la vente d’un bien (même logique pour les permis d’urbanisme)
Organisation d’ateliers de travaux urbains par la maison de la participation afin de
discuter les objectifs et les options avec les voisins
Plus de communication concernant les problèmes causés par la minéralisation et sur
la possibilité d’obtenir des primes pour la désimperméabilisation
Permettre des annexes à 2 étages similaires à ceux réalisés par le Foyer
Anderlechtois pour assurer un gain maximum d’espace habitable avec un minimum
d’imperméabilisation
Rétablissement des Offre aux habitants de replanter des haies en troène dans des endroits où celles-ci
haies ont été enlevés (accompagnée par une communication qui en explique le besoin)
Offre aux habitants d’inclure leurs haies dans le programme du Foyer Anderlechtois
de taille (contre paiement)
Taille tardive pour permettre la floraison et, par conséquence, la prolifération des
insectes et oiseaux
Organisation d’ateliers de travaux urbains par la maison de la participation afin de
discuter les objectifs et les options avec les voisins
Plus de souplesse concernant la hauteur des haies, afin de permettre la privacité
122
Objectif Recommandation
Plantation d’arbres Replanter rigoureusement la totalité des arbres perdus, surtout les arbres
d’alignement
Continuité de l’« accord tacite »89 et élagage régulier des arbres de rue et des
arbres d’alignement (dans les haies) par la Commune.
Expérimentation avec des nouvelles espèces, plus résistantes contre la sécheresse et
les canicules, afin de réduire les perte d’arbres par le réchauffement climatique
Bacs à fleurs en Élargir le programme « adopter le pied d’un arbre » aux bacs à fleurs
béton et pieds Systématiquement semer des fleurs/ planter des arbustes qui attirent les insectes
d’arbres dans les bacs/ pieds d’arbres non adoptés
Échanger des espèces « stériles » comme le laurier cerisier avec d’autres, plus
mellifères
Plus de communication concernant les possibilités des habitants de contribuer
activement
Façades et toits Promouvoir l’installation de nichoirs, d’hôtels d’insectes et d’autres facilités pour la
isolés et/ ou petite faune
rénovés Revenir aux plans initiaux de prévoir des plantes grimpantes (ex.:Place Ernest
s’Jonghers) ; promouvoir les plantes grimpantes pour les autres maisons
Promouvoir des toitures vertes pour les annexes à toit plat ; communiquer les
primes régionales disponibles à ce sujet
Pelouses et petits Systématiquement semer des fleurs/ planter des arbustes qui attirent les insectes,
espaces verts privilégier les prés fleuris sur les pelouses
publics Fauchage tardif pour faciliter la vie de la petite faune
Plus de communication concernant cette approche pour assurer l’acceptation par les
habitants
88
Le Plan Vert propose une hauteur entre 0,8 et 1,2 m, avec une auteur de 1,8 m pour les haies des parcelles d’angles,
dont la totalité est exposée à la rue. Pour la séparation entre jardin et venelle ou jardins voisins, il propose 1,5 m, et pour les
permiers 4 m derrière la maison, 2 m. Ceci est aligné avec les dispositions du Réglement Communal d’Urbanisme.
89
Citation du Plan Vert – le Service des Espaces Verts s’occupe des arbres plantés dans les haies bien que leur entretien
soit à la charge des occupants des maisons.
123
Objectif Recommandation
Éclairage et faune Limiter l’éclairage public au minimum afin de réduire les dérangements pour la
nocturne faune90 (éviter l’effet rebond lors du passage aux LED, limiter la hauteur et éviter
l’éclairage horizontal voire de la voûte céleste) ; espacer les lampadaires, éteindre
chaque deuxième lampadaire après une certaine heure...
Éclairer les venelles utilisées par les habitants, mais réduire l’éclairage au minimum
conciliable avec le besoin de sécurité (ex. moyennant des détecteurs de
mouvement) ; veiller à garder une bonne distance entre les lampes
En ce qui concerne la conservation du patrimoine bâti, nous pensons qu’il est indispensable
de regarder celle-ci en harmonie avec les politiques bruxelloises en matière de lutte contre
le changement climatique et d’économie circulaire. Les ateliers et groupes de travail
RÉNOLUTION ont déjà commencé leur travail dans cette matière. Étant donné que le projet
Rénov-Roue-Rad est un pilote de la rénovation énergétique groupée, et ceci dans une cité
jardin inventoriée comme monument, nous voyons pourtant la nécessité de formuler des
propositions plus détaillées, basées sur les recommandations d’autres études et sur les
expériences dans le quartier.
Objectif Recommandation
Approche holistique Stratégie holistique au niveau communal tant que régional, qui rejoint les principes
d’urbanisme, de lutte contre/ adaptation au changement climatique, d’économie
circulaire, de protection de la biodiversité…
Conservation et Position claire concernant les procédures de permis d’urbanisme (groupé, quelle
rétablissement des institution...)
façades Pour les infractions : Au lieu de lier des permis d’urbanisme au rétablissement du
statut quo ante (ce qui pousse les habitants vers la construction clandestine), lier
l’obligation de rétablir la situation originale à la vente du bien (ex. : démolition
d’une annexe), au remplacement d’un élément (ex. : portes ou fenêtres en PVC)
Comme proposé dans l’étude APUR, accepter la polychromie comme une
90
Cette recommandation se trouve aussi dans la publication “Toolbox cités-jardins, Brat/ Ecores/ Service facilitateur
quartiers durables”
124
Objectif Recommandation
composante d’une nouvelle identité du quartier, créée par les habitants, au lieu de
la combattre. Permettre un choix libre de couleur pour la peinture des enduits.
Considérer les choix et les préférences des habitants, qui sont les premiers
responsables de la rénovation, et qui doivent en assumer les charges financières ;
Détermination participative des balises pour trouver un équilibre entre la
conservation du patrimoine, la conservation et la promotion de la biodiversité,
l’économie circulaire et les interventions nécessaires pour la transition énergétique
Isolation Dans les règlements régionaux/ communaux d’urbanisme, déterminer les épaisseurs
énergétique maximum pour l’isolation par l’extérieur en considérant les solutions biobasées et
déconstructibles comme standard
Garder une ouverture pour des solutions novatrices ; ne pas fermer la porte pour des
nouveaux modèles de façade qui sont en harmonie avec des éléments qui existent
déjà (bardages en bois du Foyer Anderlechtois)
Ne pas privilégier le « faux vieux » sur des solutions plus modernes, mais intégrées
dans le concept architectural de la cité jardin
Éviter que la solution actuellement préférée pour la Vague 1 de la rénovation
groupée dans le cadre du projet Rénov-Roue-Rad balise la voie pour les rénovations
suivantes et exclue d’autres solutions
Permettre le remplacement des seuils de fenêtre en pierre bleue, qui constitue des
ponts de chaleur importants, par d’autres matériaux plus performants
Bénéficier de la zone expérimentale pour tester de nouvelles approches, plus
inhabituelles et novatrices, comme aussi proposé par l’étude APUR.
Expérimenter des modèles de fabrication industrielle/ préfabrication pour accélérer
le rythme des rénovations
Empreinte carbone Inclure systématiquement l’énergie grise dans le bilan carbone dès maintenant
(comme prévu dans la stratégie bruxelloise pour la rénovation)
Privilégier les matériaux biobasés et à basse empreinte carbone
Réseaux de chaleur Prévoir systématiquement des réseaux de chaleur comme complément/ appoint,
tant pour les maisons qui ne peuvent pas être isolées (contraintes
organisationnelles, comme pour le Foyer Anderlechtois, manque de ressources
financières ou d’initiative pour certains propriétaires privés, patrimoine
architectural trop important comme la zone de protection autour de l’école
classée…), tant pour les maisons isolées voulant faire le dernier pas vers la
neutralité carbone
Placer des petites centrales de chaufferie (ex. biomasse) décentralisées, utilisation
des venelles pour le placement des conduites
125