Chapitre 21 - Insuffisance Rénale Aiguë - Anurie
Chapitre 21 - Insuffisance Rénale Aiguë - Anurie
Chapitre 21 - Insuffisance Rénale Aiguë - Anurie
Item 343 - UE 11
Résumé
Diagnostic positif :
préciser le caractère aigu de l'élévation de la créatininémie ;
préciser si la diurèse est conservée ;
déterminer la clairance à la créatinine (estimée ou mesurée sur les urines des 24 h +++).
Diagnostic étiologique :
rechercher une cause obstructive avant tout : échographie vésico-rénale +++ ;
rechercher une cause fonctionnelle : ionogramme sanguin et urinaire ;
rechercher une cause organique selon la clinique : ECBU, analyse du sédiment urinaire, protéinurie des 24 h, électrophorèse des
protéines urinaires.
Prise en charge :
hospitalisation en milieu spécialisé ;
arrêt des médicaments néphrotoxiques ou adaptation des doses si nécessaire ;
éliminer une situation d'urgence :
OAP, surcharge hydrosodée,
hyperkaliémie,
acidose métabolique, HTA ;
épuration extra-rénale selon critères ;
éliminer une cause obstructive (échographie vésico-rénale +++) ;
prise en charge symptomatique ;
prise en charge étiologique :
IRA obstructive (post-rénale) : dérivation des urines en urgence ++ (sonde vésicale ou cathéter sus-pubien, montée de sonde
JJ ou néphrostomie per cutanée selon nature de l'obstacle). Attention au syndrome de levée d'obstacle,
IRA fonctionnelle (pré-rénale) : remplissage, ± amines pour rétablir une volémie efficace,
IRA organique (rénale) : traitement de la cause si possible.
I - Pour comprendre
L’insuffisance rénale aiguë (IRA) est une diminution du débit de filtration glomérulaire d’apparition rapide entraînant une urémie et des
troubles hydro-électrolytiques mettant en jeu le pronostic vital à court terme. L’IRA est liée à une altération brusque des capacités
d’excrétion du rein entraînant une rétention azotée et de nombreux troubles hydro-électrolytiques. Elle peut être anurique ou à diurèse
conservée (diurèse > 500 mL/24 h). Les signes révélateurs d’IRA sont d’apparition plus tardive : nausées, vomissements, céphalées,
diarrhées et troubles visuels.
II - Diagnostic
L’insuffisance rénale aiguë (IRA) est une diminution du débit de filtration glomérulaire d’apparition rapide entraînant une urémie et des
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troubles hydro-électrolytiques mettant en jeu le pronostic vital à court terme.
Contrairement à l’insuffisance rénale chronique (IRC), l’IRA se caractérise par une élévation de la créatininémie récente, avec notion de
fonction rénale normale auparavant, des reins de taille normale, l’absence d’anémie et l’absence d’hypocalcémie.
Il faut toujours faire préciser si cette IRA est à diurèse conservée (> 500 mL/24 h) ou oligo-anurique (100–500 mL/24 h) ou anurique (<
100 mL/24 h).
Il est important de déterminer la clairance à la créatinine (Cl-Cr), soit estimée par la formule MDRD, soit mesurée sur le recueil des urines
des 24 h (Cl-Cr = créatininurie [U] × volume des urines des 24 h [V]/créatininémie [P]).
Une cause fonctionnelle est impliquée dans l’IRA dans 25 % des cas et sera détectée par le biais du ionogramme urinaire.
Une cause obstructive doit être évoquée systématiquement en première intention. Elle est à l’origine de l’IRA dans 10 % des cas, et une
échographie systématique de l’arbre urinaire permet de la détecter.
Une cause organique est enfin responsable de l’IRA dans 65 % des cas environ. Certains examens permettent d’orienter vers une origine
néphrologique : un ECBU, une protéinurie des 24 h, une électrophorèse des protéines urinaires (fig. 21.1).
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A - Étiologies
B - Diagnostic
Lors de l’examen clinique, il existe des signes de déshydratation extracellulaire tels qu’une tachycardie, une hypotension artérielle ou un pli
cutané. Il faut également rechercher un état de choc et une oligurie.
Une élévation de l’urée plus importante que la créatinine est en faveur d’une IRA fonctionnelle.
Ces critères sont moins fiables en cas de prise de diurétiques ou d’insuffisance rénale chronique.
A - Étiologies
Enfin un obstacle urétéral bilatéral ou unilatéral sur rein unique, intraluminal (calcul, nécrose papillaire aiguë), pariétal (tumeur urothéliale,
tuberculose urogénitale, sténose radique, endométriose) ou extra-pariétal est plus rare (fibrose rétropéritonéale, tumeur pelvienne localement
avancée, adénopathies lombo-aortiques compressives).
B - Diagnostic
Il est important de rechercher à l’anamnèse des antécédents urologiques, notamment une HBP, ainsi que des signes fonctionnels urinaires
évocateurs (hématurie, douleurs lombaires, pollakiurie et brûlures mictionnelles [prostatite/HBP], fièvre [prostatite]).
L’examen clinique sera particulièrement vigilant sur l’existence d’un globe vésical. Les touchers pelviens sont indispensables notamment à la
recherche de : une HBP, une prostatite, un blindage pelvien, et d’une sensibilité des fosses lombaires.
Examens radiologiques :
l’échographie des voies urinaires recherche une dilatation des cavités pyélocalicielles.
N.B : l’échographie peut être normale :
en cas d’obstacle d’installation brutale ou récente,
si le patient est déshydraté oligo-anurique,
ou en présence d’une fibrose rétropéritonéale ;
l’ASP ou TDM peuvent aider au diagnostic mais ne sont pas recommandés en première intention ;
l’UIV ou l’uro-TDM sont contre-indiquées car l’injection de produit de contraste iodé est à proscrire dans ce contexte.
A - Étiologies
* SHU : syndrome hémolytique et urémique ; ** PTT : purpura thrombotique thrombopénique ; *** PAN : périartérite noueuse ; **** GNRP :
glomérulonéphrite rapidement progressive.
B - Diagnostic
Pour le diagnostic, la réalisation d’un ECBU et d’une analyse du sédiment urinaire est indispensable.
La suspicion d’une IRA organique doit faire réaliser une protéinurie des 24 h et une électrophorèse des protéines urinaires (tableau 21.2).
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Tableau 21.2 Diagnostic étiologique des insuffisances rénales organiques.
Nécrose Cause la plus fréquente d’IRA organique, Ischémie tubulaire : état de choc et toutes les causes d’IR
tubulaire contexte évocateur fonctionnelles
aiguë (NTA) Protéinurie : Ø Toxique : iode++, aminosides, cisplatine
Hématurie : Ø Rhabdomyolyse : élévation des CPK, BU++ (fausse hématurie),
Leucocyturie : Ø ECBU : myoglobinurie
Obstruction intratubulaire : myélome, médicaments formant des
cristaux (aciclovir, méthotrexate, ciclosporine, sulfamides,
indinavir…), syndrome de lyse tumorale (cristaux uratiques et
phospho-calciques)
Néphropathies Souvent œdèmes des membres Glomérulonéphrite aiguë (GNA) post-infectieuse (syndrome
glomérulaires inférieurs et HTA associés (sauf GNRP) néphritique aigu) : post-streptococcique ou infection bactérienne
aiguës Protéinurie : > 1,5 g/24 h, sélective (80 % Glomérulonéphrites rapidement progressives (GNRP) : vascularite à
albumine) ANCA (maladie de Wegener ou Churg Strauss), syndrome de
Hématurie micro- ou macroscopique avec Goodpasture (Ac antimembrane basale), lupus, purpura rhumatoïde
cylindres hématiques ou globules rouges
déformés en contraste de phase
Leucocyturie : Ø
La PBR nécessite des précautions particulières et notamment un bon contrôle de l’hypertension artérielle, une absence de trouble de
l’hémostase, un repérage échographique des reins et idéalement un opérateur entraîné.
A - Mortalité
La mortalité au cours de l’IRA en réanimation ou nécessitant la prise en charge en dialyse est en moyenne de 50 % toutes causes
confondues.
Elle est liée à la maladie causale (choc septique ou hémorragique, convulsions, insuffisance respiratoire, grand traumatisme, pancréatite),
au terrain et aux comorbidités du patient (âge, coronaropathie, insuffisance respiratoire, diabète, cancers), aux complications
secondaires de la réanimation et en particulier aux infections nosocomiales.
B - Principales complications
Infections nosocomiales.
Hémorragies digestives (ulcère de stress).
Complications cardio-vasculaires : phlébite, embolie pulmonaire, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, sont favorisés par
les complications de décubitus, les variations tensionnelles, l’hypoxémie.
Complications métaboliques propres à l’IRA :
acidose métabolique et hyperkaliémie ;
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surcharge hydrosodée/OAP ;
risque de dénutrition car souvent hypercatabolisme azoté.
C - Facteurs pronostiques
Les facteurs du pronostic rénal sont la fonction rénale antérieure et le type d’IRA. Les NTA guérissent sans séquelles, contrairement aux
autres atteintes.
Les facteurs du pronostic vital sont l’intensité du choc septique initial, le nombre de défaillances viscérales associées à l’IRA, les
complications métaboliques et le terrain sous-jacent.
Une hospitalisation en milieu spécialisé est requise. Il faut arrêter les médicaments néphrotoxiques et non indispensables, notamment ceux à
élimination rénale dont les posologies doivent être adaptées. Il est nécessaire de mesurer les pics sériques et résiduels des médicaments
néphrotoxiques. Il faut savoir éliminer et traiter une situation d’urgence (fig. 21.5) :
OAP, surcharge hydrosodée : diurétiques de l’anse ± dérivés nitrés si OAP ;
hyperkaliémie ;
correction d’une HTA, acidose métabolique.
Les apports caloriques et azotés doivent être suffisants à savoir 40 kcal/kg/j et 1 g de protéines/kg/j (ou 0,2 à 0,3 g/kg/j d’azote) car l’IRA
génère un hypercatabolisme. Enfin, il faut assurer la prévention de l’ulcère de stress par la prescription d’un inhibiteur de la pompe à protons.
1 - IRA obstructive
En cas d’obstacle, le drainage en urgence est essentiel car il existe un risque d’infection des urines sus-jacentes ainsi qu’un risque
d’hyperkaliémie et d’acidose.
En cas de globe vésical , la pose d’une sonde vésicale ou d’un cathéter sus-pubien avec vidange progressive du globe pour éviter
l’hémorragie a vacuo est nécessaire.
En cas d’atteinte du haut appareil urinaire , il faut envisager la pose d’une sonde endo-urétérale de type double J, d’une sonde urétérale ou
d’une néphrostomie par ponction directe en transcutané des cavités rénales.
Il faut réaliser un ECBU sur les urines prélevées, car elles peuvent être faussement stériles en dessous de l’obstacle, alors que les urines au-
dessus sont infectées.
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Il faut savoir reconnaître et prendre en charge un syndrome de levée d’obstacle, secondaire à l’incapacité transitoire des reins à concentrer
les urines et caractérisé par une polyurie osmotique, une hypokaliémie et une déshydratation extracellulaire.
2 - IRA fonctionnelle
En cas d’IRA fonctionnelle, il faut évidemment arrêter toute substance pharmacologique potentiellement néphrotoxique comme les AINS, les
diurétiques, les IEC et les sartans.
Il faut veiller à normaliser la volémie et à relancer la diurèse, en assurant un remplissage vasculaire par NaCl ou par macromolécules. Il peut
s’agir d’un bon test diagnostique mais qui peut s’avérer dangereux en cas d’insuffisance cardiaque préexistante.
En l’absence de traitement, une véritable IRA organique par nécrose tubulaire aiguë peut s’installer.
3 - IRA organique
La prévention de la NTA s’impose dans les cas suivants : infection grave, état de choc, suites de chirurgie lourde notamment cardiaque
ou aortique avec clampage de l’aorte sus-rénale.
La prévention est d’autant plus indispensable chez les sujets âgés, diabétiques, athéromateux, et tous ceux ayant déjà une insuffisance
rénale préalable.
Les apports hydrosodés seront adaptés en fonction de la courbe de poids, de l’apparition d’œdèmes et du bilan des entrées et des sorties
(diurèse et natriurèse, pertes digestives…).
Les solutés de remplissage utilisés sont principalement les cristalloïdes et les colloïdes. Si le patient demeure oligurique alors que la volémie
est satisfaisante, l’utilisation de diurétiques de l’anse permet parfois de restaurer une diurèse efficace.
Les sujets à risque sont les patients diabétiques, insuffisants rénaux, insuffisants cardiaques, ou ceux ayant un myélome.
Lorsque l’administration de produits de contraste iodés (PCI) est absolument nécessaire , il faudra veiller à arrêter au préalable les
AINS et les diurétiques, à arrêter les médicaments néphrotoxiques, assurer une hydratation correcte soit per os (eau de Vichy), soit de
recourir si nécessaire à une perfusion de soluté salé isotonique à 9 g/L (1 mL/kg/h pendant les 12 heures précédant l’examen et les 12
heures suivantes), à utiliser des PCI de faible osmolarité ou iso-osmolaires, et à limiter le volume de PCI administrés.
La N-acétyl cystéine per os le jour précédent et le jour de l’injection d’iode est utilisée par certaines équipes mais n’a pas fait la preuve
formelle de son efficacité.
La posologie journalière des aminosides doit être adaptée à la fonction rénale. En cas de prescription prolongée (plus de 48 h), la dose
journalière doit être adaptée aux taux résiduels. La déshydratation et la prise de diurétiques aggravent le risque de néphrotoxicité. Les
mêmes précautions d’hydratation, éventuellement associée à une diurèse forcée (avec un apport de soluté salé iso- ou hypotonique), doivent
être prises pour tous les médicaments néphrotoxiques (amphotéricine B, cisplatine).
Les IEC et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II doivent être prescrits avec prudence chez le sujet âgé et chez les patients
à risque vasculaire. Leur prescription est toujours précédée de la recherche d’un souffle abdominal et au moindre doute d’une sténose des
artères rénales (écho-Doppler) qui contre-indiquerait ces traitements.
Au cours des rhabdomyolyses ou des lyses tumorales importantes (spontanées ou après chimiothérapie des leucémies aiguës, des
lymphomes, des cancers anaplasiques à petites cellules), la NTA doit être prévenue par une hydratation massive avec diurèse forcée.
L’alcalinisation des urines est recommandée au cours des rhabdomyolyses. Elle sera évitée au cours des syndromes de lyse tumorale car
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cela augmente le risque de précipitation de cristaux de phosphate de calcium. L’injection précoce d’uricase IV (Fasturtec®) permet d’éviter
l’hyperuricémie des syndromes de lyse tumorale.
L’IRA survenant au cours du myélome peut être d’origine multiple. C’est pourquoi l’ensemble des types d’IRA doit être envisagé avant
de poser un diagnostic (tableau 21.3).
Déshydratation (hypercalcémie)
Fonctionnelle
Vasoconstriction
Infiltrat plasmocytaire
Interstitielle
Néphrocalcinose
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