Annales Concours Sesame
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ie
Sér
concours
SESAME
Annales 2007
Sujets et corrigés officiels
SES AM E
Série « Annales »
Annales S E SAM E
Concours 2007
Introduction ............................................................................................ 5
3
CALENDRIER 2008
Épreuves écrites :
22 et 23 avril 2008
Résultats d’admissibilité :
22 mai 2008
Résultats d’admission :
2 juillet 2008
Lorsque les écoles fondatrices de SESAME ont créé cette banque d’épreuves il y a
seize ans, elles n’imaginaient pas que SESAME s’imposerait aussi rapidement dans le
monde de la formation commerciale internationale comme le point de repère
incontournable qu’il est devenu.
L’ambition des rédacteurs de cet ouvrage est qu’il soit informatif, facile à consulter
et utile à ses lecteurs. Les écoles membres de SESAME espèrent qu’il remplira cette
mission.
5
CONCOURS SESAM E
LE CONCOURS EN PRATIQUE
SESAME a adopté une politique « zéro papier ». Toutes les formalités administratives
se passent par l’intermédiaire du site web de SESAME www.concours-sesame.net. Les
accusés de réception d’inscription, convocations, notifications de résultats, etc., sont affi-
chés sur écran. Ils ne sont pas envoyés par courr i e r, sauf sur demande expresse du candidat.
CANDIDATS
Sont admis à se présenter les bacheliers et les candidats au baccalauréat des séries
littéraires, économiques, scientif iques et technologiques (ou équivalent étranger).
L’admission définitive des élèves de classe de terminale est prononcée sous réserve
d’obtention du baccalauréat.
6
Le calendrier définitif sera publié sur le site www.concours-sesame.net à partir de
fin octobre.
DATES DU CONCOURS
• Épreuves écrites : 22 et 23 avril 2008 ;
• Épreuves orales, à passer dans les écoles entre fin mai et fin juin, selon les écoles.
RÉSULTATS
Ils sont affichés sur le site Internet de SESAME.
• Résultats d’admissibilité : 22 mai 2008 ;
• Résultats d’admission : 2 juillet 2008.
RENSEIGNEMENTS
SESAME – BP 49 – 33024 Bordeaux
Tél. : 05 56 79 44 88 – Fax : 05 56 79 44 90
E-mail : info@concours-sesame.net ; Site Web : www.concours-sesame.net
Une seule adresse pour :
• Effectuer toutes les formalités administratives relatives au concours ;
• Consulter les statistiques d’admission ;
• Découvrir les parcours professionnels des diplômés des écoles de SESAME.
www.concours-sesame.net
7
SUJETS ET CORRIGÉS
des ép r e uves
ÉPRE UVES DE LANGUES
Les épreuves de langues étrangères jouent un rôle primordial dans le concours. Les can-
didats doivent démontrer qu’ils peuvent penser ou écrire directement dans la langue
étrangère, sans traduction préalable de leurs propos dans la langue française. Ceci est un
élément précieux de maîtrise des langues étrangères et représente l’un des « sésames »
du travail à l’échelle internationale. Toutes les écoles membres leur accordent une
grande importance, soulignée par l’ampleur des coefficients attribués. Quelle que soit la
langue étrangère, une épreuve composée de trois exercices est proposée aux candidats.
11
Consignes générales
12
Commentaire général
pour l’ensemble des langues
COMPOSITION
Les sujets proposés s’inscrivent dans un souci, valable pour l’ensemble de l’épreuve de
langue, de traiter les réalités d’aujourd’hui. Des propos se référant au mode de vie et/ou
à la culture permettent aux candidats de montrer leur intérêt pour le pays étranger dans
son ensemble. Ils peuvent ainsi s’appuyer sur leurs notions d’histoire, d’art, de politique
et de religion, de sport et d’éducation, des médias existants. Cette touche personnelle,
seule possibilité de se différencier des autres candidats, viendra ajouter un « plus » à
l’expression de leurs idées. Outre la correction de la langue, le candidat devra s’attacher
à structurer sa composition en évitant de juxtaposer une suite de phrases sans lien
logique et sans transition. Un plan, même simple, facilite la compréhension et sera tou-
jours apprécié.
Pour la notation, une partie des points est toujours consacrée à la structuration et à l’or-
ganisation des idées. Il est indispensable d’y prêter toute l’attention que cela mérite. On
demande au candidat d’élaborer une réflexion structurée et argumentée, et non pas de
s’arrêter à des jugements hâtifs et à des appels moraux qui ne se fondent que sur leurs
sentiments personnels.
Bien évidemment, le commentaire doit être rédigé dans une langue convenable, faisant
preuve de richesse et de variété dans le vocabulaire et de correction grammaticale.
Il est souhaitable que les élèves disposent des outils linguistiques nécessaires pour écrire
des phrases complexes, pour relier les idées qu’on trouve dans l’essai (conjonctions,
adverbes) et surtout en renforcer l’emploi. Il est primordial de rappeler aux élèves que
chaque langue possède sa propre logique.
LE QCM
13
s’adresse à un public qui utilisera la langue dans un contexte de communication courante
et professionnelle.
COMPRÉHENSION DU TEXTE
Le but de l’exercice de compréhension de texte est de confronter les élèves à des textes
d’un certain degré de difficulté pour savoir s’ils sont capables d’en dégager rapidement
le sens et d’y trouver des informations détaillées, exigences probables dans leur future
vie professionnelle. Bref, il s’agit de savoir s’ils ont acquis les techniques de lecture
nécessaires à ces fins. Vu la nature des études ultérieures, le texte proposé est un texte
d’actualité et non littéraire. La difficulté de cette épreuve résulte du contenu et de la for-
mulation des questions.
Il est donc important d’insister non seulement sur l’apprentissage d’un vocabulaire riche
et varié à l’aide de textes d’actualité, mais il paraît essentiel de donner aux élèves les
moyens stratégiques et psychologiques pour aborder un texte difficile.
Les élèves ont tendance à vouloir comprendre chaque mot, à chercher les mots inconnus
lors du premier contact avec un texte et à abandonner facilement devant les difficultés
rencontrées. En induisant des méthodes de lecture différentes et en positivant la lecture,
c’est-à-dire en incitant les élèves à procéder à l’inverse de la méthode habituelle et à
chercher d’abord les éléments qui leur sont familiers, la barrière psychologique serait
diminuée et ils seraient davantage préparés à cette épreuve.
14
Anglais
PARTIE 1
S
Traitez en 200 à 250 mots l’un des deux sujets suivants.
Indiquez le numéro du sujet choisi et le nombre de mots à l’endroit prévu sur la copie.
Tout essai hors sujet sera sanctionné par la note zéro.
Sujet n°1
In your opinion, is it a good thing for the state to forbid smoking in public places ?
Will it lead to fewer young people being tempted to start smoking cigarettes ?
Discuss.
Sujet n°2
How responsible are the cinema industry, the music industry and the video games industry
for the increase in violent crime, given the level of violence in films, video clips and video
games today ?
Discuss.
PARTIE 2
15
S 5.
6.
The FTSE .... a record high.
A. has hit
C. has gone
B. has increased
D. has touched
14. Julia is very good at languages, she .... five very well.
A. speaks B. is speaking
C. does speaks D. is spoken
15. She .... to the States last week, but now she .... .
A. went / returned B. has gone / has returned
C. went / has returned D. has gone / returned
16. My boss is responsible .... the Agency and I report .... him.
A. of / to B. of / at
C. for / at D. for / to
16
17. He felt so angry that if he .... alone, he .... something.
A. would be / would broke
C. had been / would have broken
C. Ø D. it
S
19. He stopped .... a long time ago.
A. to smoke B. smoking
C. having smoked D. smoked
20. The “road map” seeks to lay down rules for .... in the Middle East.
A. the peace B. peace
C. a peace D. of the peace
25. It is said that Chinese is perhaps the world’s .... language to learn.
A. most hard B. harder
C. more hard D. hardest
27. Some people try to improve their English by .... the BBC.
A. listening B. listening to
C. hearing D. hearing to
17
S 29. Some people think it’s time we.... a single international language.
A. should be introducing
C. introduce
B. interesting by
C. interested by D. interested in
PARTIE 3
Juan will be up before dawn tomorrow to gather grapes in the fields of California’s
central valley. Eve ry morning, he begins his 10-hour day before the sun comes up over the
vines. Even for an adult, it would be an inhumanly cruel ordeal. But Juan is nine years old.
Ten years ago, agriculture was classified as the most dangerous occupation in the
United States and continues to compete with mining and construction for the dubious
honour of being one of the top three most dangerous industries, but despite this fa c t ,
children are a significant part of the agricultural workforce.
In California, Arizona, Washington state and Texas, an estimated 800,000 children as
young as Juan are employed as cheap labour in the billion-dollar agriculture industry.
Juan works illega l ly ; he is an “undocumented” immigrant from Mexico. But an
American child of twelve could work lega l ly on a farm. In all other industries, except
a griculture, a child must be fourteen before they can work. A recent study reported that, on
average, children start fa rm work in California at between thirteen and fifteen years of age.
Many work alongside their parents, walking behind them to collect the bunches of grapes
cut from the vine, laying them on trays in the sun, and then flipping them over to dry them
through. Flipping a thousand bunches will earn Juan as little as $30.
Children who work in the fields often work during school hours, which deprives them
of their right to an education. Long hours and strenuous work take their toll, causing
excessive absenteeism. This often results in their being held back in school, getting
discouraged with school, and usually, dropping out. Fa rm worker children have a difficult
time keeping up with their classmates, suffering from extreme fatigue and poor nutrition.
Due to a disrupted education, fa rm worker children are usually forced to remain in fa rm
work, enduring the same substandard working conditions as their parents and grandparents.
The rate of school enrolment for fa rm worker children is lower than for any other group in
the country.
Workers have attributed skin rashes, dizziness, muscle cramps and sickness to the
chemicals they are exposed to. Fruit trees in the Colombia basin are harvested increasingly
by boys aged between fifteen and seventeen, who must stand on dangerously high ladders
to reach the crop. Thousands of accidents are documented eve ry year.
Democratic congressman Tom Lantos has lobbied for the minimum working age to be
18
universalised. “Fa rms are now agr o - business, far distant from their 1930s equivalents,” he
said. “We need greater funding so that new laws can be introduced and enforced.” Mr
Lantos also wants new pesticide safety limits for children: the current exposure limits are
set for a man of 70 kg in weight.
But as Juan returns tonight to the viaduct beneath which he sleeps, the distinction
between man and boy has never been so slight.
S
Adapted from Guardian Weekly
D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
3. A. Juan will earn $30 for a day’s work, collecting bunches of grapes cut from the
vine.
B. Juan will earn $30 for turning 1,000 bunches of grapes over to dry.
C. Juan will earn $30 for collecting 1,000 bunches of grapes from the vine.
4. A. Children who work on fa rms are held back in school because they are so often
absent.
B. Children who work on fa rms are held back in school because of the long hours and
strenuous work at school.
C. Children who work on fa rms are held back in school because they remain in fa rm
work, like their parents and grandparents.
19
C 7. A. Farms and agro-business should be allocated more money so that a minimum
working age could be introduced.
B. Workers should be allocated more money so that a minimum working age could be
introduced.
C. Congress should be allocated more money so that a minimum working age could
be introduced.
8. A. The article says that children are employed as part of the agricultural workforce
in much the same way as in the 1930s.
B. The article says that more and more children are a significant part of the
a gricultural workforce.
C. The article says that less and less children are employed as part of the agricultural
workforce thanks to lobbies.
CORRIGÉ – PARTIE 1
Essai 1 – Suggestion de plan
Introduction
• Le rôle de l’État ; Interventionniste ou « laissez faire » ? La question de la libert é
individuelle.
• Est-ce une bonne chose que l’État interdise certains comportements dans l’intérêt de
la santé publique ?
Développement
• La question du tabagisme passif.
• La tendance actuelle parmi les jeunes concernant la cigarette.
• La jeunesse voudra toujours essayer ce qui est interdit.
• L’éducation se fait par l’exemple ; si les jeunes voient les adultes qui fument, ils les
copieront. S’ils voient moins d’adultes qui fument, il y aura moins de tentation.
Conclusion
• Des exemples des pays où la cigarette est interdite depuis longtemps.
• Un avis personnel.
20
Développement
Deux arguments :
1. Les cinéastes, musiciens et fabricants de jeux vidéo sont des artistes, et en tant que
tels, sont totalement libres d’expression.
2. Les cinéastes, musiciens et fabricants de jeux vidéo devraient savoir que les gens
impressionnables pourraient être influencés par leur travail et ils ne devraient pas
C
encourager la violence.
Conclusion
• Exemples de films, clips vidéo et jeux vidéo violents.
• Exemples de cas où la loi est intervenue pour interdire la vente de certains produits.
• Un avis personnel sur les deux arguments. Lequel est juste et pourquoi ?
21
S Allemand
PARTIE 1
Traitez en 200 à 250 mots l’un des deux sujets suivants.
Indiquez le numéro du sujet choisi et le nombre de mots à l’endroit prévu sur la copie.
Tout essai hors sujet sera sanctionné par la note zéro.
Sujet n°1
Sujet n°2
In einigen deutschen Bundesländern sind im Jahr 2006 Studiengebühren eingeführt
worden. So müssen manche Studenten 1000 Euro pro Jahr für ihr Studium an die
Universität bezahlen (vorher waren es 150 Euro). Geben Sie Argumente für und geg e n
Studiengebühren an staatlichen Universitäten.
PARTIE 2
22
5.
6.
Schon immer wollte er sich einen Geländewagen kaufen, .... durch die Sahara zu
fahren.
A. für
A. musst
B. um
B. willst
C. mit
C. darfst
D. zu
Du .... nicht über die Straße gehen, wenn die Ampel auf Rot geschaltet ist.
D. magst
S
7. Die Arbeitgeber teilten mit, dass sie .... finanziellen Gründen das Unternehmen
nach China verlagern müssten.
A. mit B. für C. aus D. zu
10. Dieses Jahr habe ich zwei Monate Ferien, .... ich gut einen Monat jobben kann.
A. um B. dass
C. sodass D. deswegen
11. Wenn ich dieser Institution vertrauen ...., .... ich ihr mein gesamtes Vermögen.
A. könnte / hinterlässe B. könnte / hinterließe
C. könnte / hinterlasse D. konnte / hinterlässt
12. Das @-Zeichen ist für E-Mail-Adressen ...., weil man dieses Zeichen in keiner
Sprache der Welt benutzt.
A. geschaffen sein B. geschaffen werden
C. geschaffen worden D. geschaffen hat
13. Die .... Kinder ließen sich nicht durch die Eltern stören.
A. gespielten B. spielenden
C. gespielenen D. spielenen
14. Wegen .... langen Wartezeit waren wir mit einem Umtausch einverstanden.
A. die B. der C. dem D. des
15. Die Loreley sitzt am Rhein und kämmt sich .... Haare.
A. ihre lange blonde B. ihren langen blonden
C. ihre lange blonden D. ihre langen blonden
16. Ich warte schon über eine halbe Stunde .... ihn.
A. mit B. zu C. auf D. für
23
S 17. .... du schwimmen oder .... du es noch lernen ?
A. Kannst / musst
C. Weißt / kannst
B. Weißt / musst
D. Musst / weißt
18. Die Konjunkturlage war so schlecht, dass Maßnahmen .... werden mussten, die
niemanden befriedigen konnten.
A. genommen B. getan
C. getroffen D. gemacht
19. Die Mitarbeiter erhielten nach dem .... Verkauf des Unternehmens eine große Prämie
von ihrem Chef.
A. gelungenen B. gelingenen
C. gelingenden D. gelungenden
20. Über den Börsengang dieses Unternehmens waren .... die Politiker .... die
Firmenmitarbeiter glücklich.
A. entweder nicht / nur auch B. nicht nur / sondern auch
C. nicht auch / nur sondern D. auch nicht / sondern nur
21. Als wir die Fenster ...., bemerkten wir, dass ein Haken fehlte.
A. schließen wollten B. wollten schließen
C. schließen haben D. haben schließen
22. Nachdem er seine Familie an die Bahn ...., .... er mit der Taxe zur Arbeit.
A. gebracht hat / fuhr B. gebracht hatte / fuhr
C. gebracht hatte / fährt D. gebracht hatte / fährt
24. Die neueste Version .... vom Vertreiber kurz vor Weihnachten auf den Markt
gebracht worden.
A. ist B. wird C. wurde D. soll
25. Um nach Italien zu kommen, kann ich .... das Flugzeug nehmen .... mit dem Zug
fahren.
A. entweder / oder B. oder / entweder
C. entweder / und D. und / entweder
26. Für Ihre geplante Reise würden wir Ihnen gern ein Fahrzeug zur Verfügung .... .
A. geben B. stellen C. stehen D. machen
27. Auch während .... Sommermonate kann man billige Flüge nach Mallorca finden.
A. den B. die C. der D. denen
24
28. Die Kinder wollten zu .... durch den .... laufen.
A. Fuss / Fluss
29. Die Sekretärin war davon überzeugt, dass ihr Direktor an diesem Tag ins Büro .... .
A. hätte müssen kommen
S
30. .... Lehrer war nicht aufgefallen, dass die Hälfte der Schüler ihre Hausaufgaben
nicht gemacht hatte.
A. der B. dem C. den D. die
PARTIE 3
Prima Klima
Es gab Tage, da stieg Peter Meyer die fünf Stufen zum Eingang seiner Schule
hinauf, und mit jeder Stufe sank sein Mut, denn hinter den grünen Flügeltüren erwartete
den Lehrer der typische Schulalltag : Schüler, die fluchen, schlagen, treten und spucken.
Schüler aus 24 verschiedenen Ländern. Schüler mit Drogenproblemen.
Peter Meyer ist gern Lehrer. Er möchte Kindern etwas beibringen. Er möchte, dass
sie eine Chance bekommen im Leben, auch die Schwachen. Aber ein paar Störer
machten ihn zum Dompteur, und statt zu unterrichten, schimpfte, stritt und strafte er.
Das ging ihm an die Nieren. Mit 62 Jahren ist er der älteste Lehrer an der Ernst-
Henning-Straße. Er könnte sich pensionieren lassen. Viele machen das so. Aber seinen
jüngeren Kollegen ging es ja nicht besser. Und auch die Schüler litten unter dem rauen
Klima.
Dorit Ehler ist eine Direktorin ohne Angst, die Schüler auch einmal an sich drückt
und Probleme offen ausspricht. „Wir waren alle ziemlich fertig“, sagt sie. „Von der
Sprache, vom Lärm, von der Respektlosigkeit. Das sich das inzwischen geändert hat,
hat mit dem Karton zu tun, der in ihrem Büro auf dem Schrank steht. Er ist mit rotem
Papier beklebt. Alle Schüler kennen ihn. Sie nennen ihn unsere Schatzkiste.“
Im Frühjahr rief Dorit Ehler alle zusammen, die mit der Schule zu tun haben:
Lehrer, Eltern, die Sekretärinnen, den Hausmeister und einige Schüler. Gemeinsam
wollten sie beraten, wie sie in der Schule ein Klima schaffen könnten, in dem sich alle
wohler fühlten. In kleinen Gruppen schrieben sie auf große Blätter, was man braucht,
um gut miteinander auszukommen. Dann verglichen sie die Listen und stellten fest, dass
sich Lehrer, Eltern, die Schüler und der Hausmeister im Grunde dasselbe wünschten:
Achtung und einen respektvollen Umgang miteinander. Dazu gehört, dass man sich
nicht beleidigt oder schlägt, dass man pünktlich ist und ehrlich und dass man die Schule
sauber hält.
Seit gut einem halben Jahr hängen auf allen Fluren der Schule sieben goldene
Regeln, gerahmt und hinter Glas. Sie sind das Extrakt aus dem Treffen im Fr ü h l i n g .
„Prima Klima“ steht darüber. Eigentlich sind es Regeln, die an jeder Schule gelten :
„Ich bin im Schulgebäude leise“, oder : „Ich komme pünktlich zum Unterricht“. Aber
25
S sie sind keine Schulordnung aus dem Rektorat. Alle Beteiligten haben sich die Regeln
selbst gegeben, und sie richten sich auch an alle. „Ich verhalte mich Kindern und
Erwachsenen gegenüber respektvoll“ lautet die erste Regel, und weiter : „Ich unterstütze
meine KollegInnen/ MitschülerInnen“.
Zum Start von Prima Klima haben Schüler und Mitarbeiter der Schule die Regeln
unterschrieben. Nicht alle 640 Schüler wollten ihren Namen unter das Dokument setzen,
aber die allermeisten. In einer Zeremonie haben sie die Unterschriften in die rote
Schatzkiste gelegt. Es ist eine Art Gesellschaftsvertrag der Schule.
Auf dem Pausenhof sind Schüler in orangefarbenen Wa rn westen, die im
S o z i a l verhalten geschult sind, die Drog e n p r ä vention unterstützen und auch mal einen
Streit schlichten. Wer gegen die Regeln verstößt, muss mit Konsequenzen rechnen. Aber
nicht die Person wird bestraft, sondern das Verhalten. Nur mit einem guten
Sozialverhalten haben auch die Schwachen eine Chance auf dem Arbeitsmarkt.
Einfache Regeln und klare Sanktionen geben auch den Kindern Sicherheit, weil sie
wissen, welche Konsequenzen ihr Handeln hat. Und die Lehrer sind froh, nicht jedes
Mal über die Strafe diskutieren zu müssen. Seit Prima Klima gestartet ist, hat sich die
Atmosphäre an der Schule stark gebessert. Der Umgangston ist freundlicher, das
Gebäude sauberer, Lehrer und Schüler grüßen sich. Und Lob für gutes Verhalten gehört
natürlich auch dazu. „Die Lehrer sind viel netter geworden“, sagt ein Junge aus der
siebten Klasse.
Die Zeit, 11/12/2006.
D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
26
5.
6.
Die sieben goldenen Regeln hängen in der Schule in den Fluren, ….
A. weil das Rektorat es so gewünscht hat.
B. damit die Schüler und Lehrer ihre Regeln immer vor Augen haben.
C. um die Schüler an die gemeinsame Schulzeit zu erinnern .
CORRIGÉ – PARTIE 1
27
C Argumente dagegen
• Andere Untersuchungen haben gezeigt, dass Jungen schneller als Mädchen,
Mädchen aber gründlicher arbeiten. Bleiben sie in einem Klassenverband, können sie
sich unterstützen und ergänzen.
• B eginnt man Jungen und Mädchen wieder getrennt zu unterrichten, könnte die
Gefahr einer erneuten Geschlechtertrennung bestehen ? Jungen und Mädchen
würden eventuell einen qualitativ unterschiedlichen Unterricht erteilt bekommen. Es
bestände die Gefahr eines Zweiklassensystems (Mädchenklassen / Jungenklassen)
• Da Mädchen eine andere A rt haben mit den Naturwissenschaften umzugehen als
Jungen, sollte man dieses weibliche Herangehen an die Naturwissenschaften in den
gemeinsamen Unterricht integrieren und nicht ausschließen.
Argumente dafür
• Durch erhöhte Studiengebühren werden sich die Studienzeiten verkürzen, da viele
Studenten und deren Familien es sich nicht leisten können, diese hohen Summen
über mehrere Jahre zu bezahlen.
• Hinzu kommt, dass das Studium konzentrierter verlaufen wird, die Studenten "am
Ball bleiben" müssen und sich weder durch Jobs noch durch politische Aktivitäten
ablenken lassen werden
• Durch mehr Gebühreneinnahmen werden die Universitäten über mehr finanzielle
Mittel verfügen. Das bedeutet, dass sie wieder in die Lehre und die Lehrenden
investieren können. Somit wird sich die Qualität des Studienangebots verbessern.
• Viele so genannte Parkstudenten, d.h. Studenten, die von dem Status Student
profitieren (billigere Krankenkasse, günstigere Preise für Kultur, Nahverkehrsmittel
usw.) werden bei höheren Studiengebühren auf diesen Status verzichten und sich
nicht mehr an den Universitäten einschreiben. Das wiederum wird Platz für wahre
Studenten schaffen.
Argumente dagegen
• Kinder aus einkommensschwachen Familien haben weniger Chancen studieren zu
können, da sie nicht in der Lage sind die Studiengebühren zu bezahlen.
• Viele Studenten müssen neben dem Studium arbeiten, um es finanzieren zu können.
Sie werden von daher länger studieren müssen und neuen Studenten die Plätze
wegnehmen.
• Hohe Studiengebühren schaffen ein Zweiklassensystem, d.h. Studenten aus
e i n ko m m e n s s t a r ken Familien, deren Eltern diese Gebühren problemlos zahlen
können und Kinder aus einkommensschwachen Familien, die diese Gebühren nicht
bezahlen können
• Trotz höherer Studiengebühren ist keine bessere Studienqualität gewährleistet, da das
Geld nicht ausschließlich in die Lehre inve s t i e rt wird, sondern auch in
Verwaltungskosten.
28
TABLEAU DES BONNES RÉPONSES – PARTIE 2
1
C
11
B
2
A
12
C
3
D
13
B
D
4
14
B
B
5
15
D
C
6
16
C
C
7
17
A
B
8
18
C
C
9
19
A
10
C
20
B
C
21 22 23 24 25 26 27 28 29 30
A B D A A B C B B B
29
S Espagnol
PARTIE 1
Sujet n°1
La mayoría de las veces se afi rma que un joven no nace violento, sino que se hace violento.
S egún usted : ¿ Quién tiene la culpa ? ¿ los padres ? ¿ la escuela ? ¿ los medios de
comunicación ?
Sujet n°2
El culto al cuerpo.
Según usted : ¿ una necesidad ? ¿ una obligación ? ¿ simple orgullo personal ?
PARTIE 2
30
6.
7.
Ese hombre .... siendo un asesino.
A. logrará B. seguirá
C. era
D. será
D. fue
S
8. Ya me darás alguna explicación cuando lo .... conveniente.
A. creerás B. creerías C. crees D. creas
10. Los bandidos abandonaron su guardia en el mismo momento en que .... la policía.
A. llegaba B. llegaría
C. lleg u e D. llegara
13. Siempre los toreros .... vestidos antes que .... hora de empezar.
A. son / está B. son / es
C. están / esté D. están / sea
14. Las cartas .... bien escritas y sin embargo Pepita .... mala alumna.
A. son / era B. están / es
C. están / está D. son / estaba
16. Era una cosa rara .... ver, pero no es breve .... contar y es difícil .... explicar.
A. a / a / a B. en / de / en
C. de / de / de D. de / a / a
17. Fue la mujer de Felipe .... que se adelantó .... dar las gracias.
A. la / a B. lo / por
C. / para D. / con
31
S 18. Se dirigía .... su casa y lloraba .... felicidad.
A. de / a
C. a / de
B. por / de
D. en / de
27. Me .... tanto poder correr a su encuentro y contarle todo lo que .... durante su
ausencia.
A. había gustado / ocurra B. gustará / hubiera ocurrido
C. gustaría / ocurrió D. gustara / ocurriera
32
29. Si tiene apoyos el muchacho .... sin duda el título.
A. consiguió
C. conseguirá
B. consiguiese
D. conseguiría
PARTIE 3
La mayor parte de las ciudades españolas, sobre todo las grandes urbes, sufren una
saturación acústica que ha aumentado considerablemente en los últimos años. Sólo en
Madrid, la Concejalía de Medio Ambiente tramita cada año cerca de 4000 expedientes
por ruido con más de 7 000 denuncias en total. A pesar de que el nivel sonoro máximo
perm i s i ble como ruido ambiental es, según la Comunidad europea, de 65 decibelios,
más del 70% de los madrileños viven sometidos a sonidos muy superiores. El gran
problema en España es que la legislación en materia de medio ambiente es competencia
de las comunidades autónomas y cada una emplea sus propias normativas, muchas de
las cuales a veces ni se cumplen. « No hay una ley básica que establezca los mínimos a
los que se tienen que someter las distintas normas autonómicas.
33
S Las fuentes del ruido son diversas aunque, claro está, según la ciudad y la zona
urbanística, unas afectan más que otras. Las principales son el tráfico (coches, trenes,
aviones…), el ruido del ocio y el ruido industrial. Este último es al parecer el que mejor
regulado está.
Ese problema es casi insignificante porque, a excepción de algunos talleres que hay
dentro de la ciudad, las grandes fábricas están en polígonos industriales » comenta Jorge
Piñedo, abogado, especialista en temas medioambientales…
Leyes, ya.
Además de la salud, el ruido también afecta al bolsillo. En la actualidad se calcula que
las pérdidas económicas anuales en la UE por el ruido medioambiental se sitúan entre los
13 000 y los 38 000 millones de euros (entre dos y seis billones de pesetas) A esas cifras
contribuyen por ejemplo, la reducción del precio de la vivienda, los costes sanitarios, la
reducción de las posibilidades de explotación del suelo y el coste de los días de abstención
al trabajo.
En España, los ciudadanos han decidido pelear por su calidad de vida y hoy por hoy,
hay acciones y colectivos contra el ruido en casi todas las ciudades…
En Europa, y a más largo plazo, los ministros de medio ambiente de la UE alcanzaron
el pasado mes de diciembre un acuerdo para actuar también contra el ruido en las ciudades
grandes, los ejes de comunicaciones y los aeropuertos importantes…
Marisa Casado, Cambio 16, 15/01/2003.
D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
1. En España se vive :
A. Con mucho ruido.
B. Con demasiado ruido.
C. Con bastante ruido.
34
5.
6.
A. Todos los ruidos del centro de Madrid son iguales y muy dañinos para el oído.
B. Proceden de varios sectores de actividad.
C. Deben ser evitados, sobre todo los del centro y en relación con el ocio.
8. A. Todos los españoles están acostumbrados a los problemas acústicos y por lo tanto
no se movilizan.
B. Los más afectados son los que viven cerca de las industrias, entonces son los que
protestan más.
C. Todos se ven afectados, tanto las ciudades como las zonas urbanísticas, pero unos
más que otros.
CORRIGÉ – PARTIE 1
Essai 1 – Suggestion de plan
Les parents
• Le premier contact humain ou première communication.
• Conscients ou inconscients de l’importance de l’affection et de l’attention de la
famille.
L’école
• Institution qui inculque le savoir et enseigne l’éthique.
• Institution qui complète et corrige les idées erronées, les attitudes irrespectueuses.
Conclusion
• Relations, oppositions entre les trois phénomènes.
• L’importance que vous accordez aux trois phénomènes.
• Les solutions d’après vous-même, d’après vos expériences ou vos propres
o b s e rvations.
35
C • Les solutions proposées par les experts de l’éducation.
• Faut-il sanctionner ? De quelle fa ç o n ? Sanctionner qui : les parents ? les enfants ?
Sa nécessité
• Dans le monde du travail.
• Pa rmi les relations personnelles : comme vecteur d’estime, d’affection.
La fierté personnelle
• Lorsque l’on a recourt aux potions diététiques, à la chiru rgie esthétique, aux produits
pharmaceutiques.
Conclusion
• Déduction personnelle après analyse : quelles seraient les meilleures attitudes à
adopter ?
ITALIEN
PARTIE 1 • RÉDIGER SUR LA COPIE
TRAITEZ EN 200 À 250 MOTS L’UN DES DEUX SUJETS SUIVANTS.
36
Italien
PARTIE 1
S
Sujet n°1
Secondo voi, il concetto di sviluppo sostenibile è una moda o un'ipocrisia? È un'utopia o
una vera volontà ?
Sujet n°2
Seguire la moda è un fattore indispensabile per la compiutezza dell'individuo ?
Secondo voi, a quali bisogni imperiosi risponde la moda ?
PARTIE 2
7. Per preparare la cena di stasera .... una busta di latte e tre uova.
A. mi tocca B. bisogna C. ci vogliono D. occorr e .
37
S 9. A Stefania piace l’arte del 500 ? Si .... piace molto.
A. le B. la C. gli
D. piacero’
21. Gianna e Carla .... andare in discoteca, ma i loro genitori non vogliono.
A. vorreste B. vorremmo
C. voglierebbero D. vorrebbero
38
22. Non ti sopporto piu’! .... !
A. va ne te
C. vattene
B. dammila
S
C. dammene D. darmi
30. Se mio fratello .... a trovarmi a Roma .... a visitare la basilica di San Pietro insieme.
A. venisse / andremmo B. veniva / andremmo
C. verrebbe / andremo D. venissi / andremo
PARTIE 3
Il made in Italy è rinato ed è anche molto intelligente
Nel sistema Italia stanno accadendo cose importanti e molto vitali. In alcune zone del
Nord, ad esempio, siamo già tornati alla piena occupazione. E questa è una cosa che non si
vedeva da tempo. Ma quello che ci interessa sottolineare adesso è la ripresa del « made in
Italy ».
Il « made in Italy » non è solo un marchio da appiccicare ai prodotti, ma un vero e
proprio stile di vita. Uno stile dove si incrociano tutte le bellezze e le eccellenze. La moda e
il design. L’innovazione e la tradizione. La qualità e lo star bene.
39
S La storia di questo settore dell’economia italiana (ma potremmo anche dire della
società italiana) è abbastanza singolare. Dal grandissimo boom degli anni Settanta e degli
Ottanta c’è stata poi una discesa che sembrava quasi inarrestabile.
Negli anni 2000, gli anni della crisi, delle difficoltà crescenti, molte fi rme del nostro
miglior “made in Italy” sembravano sul punto di saltare.
Ci sono stati vari passaggi di mano, qualche quotazione in Borsa rinviata. Ma soprattutto ci
sono stati molti (saggi) ridimensionamenti.
Chi doveva liberarsi di marchi (incautamente acquistati negli anni del boom) lo ha fatto.
Qualche sigla minore è addirittura scomparsa dal mercato. E qualche mese fa,
quasi di colpo, si è scoperto che il « made in Italy » sta di nuovo bene. I fatturati sono
tornati a crescere, le esportazioni anche.
« Se i cinesi fanno le scarpe o i jeans, bene. Sicuramente è un loro diritto e
probabilmente è anche giusto che sia cosi. Io intanto vado a New York a presentare la nuova
linea completa di Malo, un marchio che nel mondo del cachemire non teme concorrenti.
Prima che i cinesi arr ivino a Malo ci vorrà molto tempo », spiega il cavaliere Tonino Perna,
un altro che ha fatto i suoi sacrifici, ma che adesso torna a respirare e a crescere.
E su un altro fronte gli fa eco quel genio assoluto di Claudio Castiglioni
(moto.Mv.Agusta) il quale spiega in due parole quella che dovrebbe essere la linea dell’
Italia : « Dobbiamo fare delle cose bellissime, cose che sappiamo fare noi. Ai mercati di
massa penserà, sta già pensando, l’Asia. A noi restano i mercati super, quelli di fascia alta.
E non è mica poco. Bisogna fare non “cose”, ma cose che sembrano sogni. »
Insoma, il « made in Italy » è risorto da quelle che erano sembrate essere le sue ceneri non
solo perchè i numeri (di vendite e di ex p o rt) tornano a dargli ragione, ma anche perchè i
suoi protagonisti sembrano aver capito quasi tutto della crisi passata e del possibile futuro
che hanno davanti. Hanno capito che, in un certo senso, va bene chi è in grado di stupire il
mondo, di fare quello che nessun altro ha la pazienza, la follia e la fantasia di fare. Come le
moto da 100 mila euro l’una di Castiglioni (ma anche quelle da 40 mila della Ducati, subito
esaurite) e gli abitini in cachemire di Malo (meglio non pensare al costo). Insomma, il made
in Italy non solo è rinato sembra anche molto intelligente.
Affari & Finanza, La Repubblica, 25/09/2006.
D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
40
3. A. Per l’autore il made in Italy ha conosciuto molte difficoltà negli anni Settanta ed
Ottanta e un grande boom negli anni 2000.
B. Per l’autore il made in Italy ha conosciuto un successo inarrestabile dagli anni
Settanta fino ai giorni nostri
C. Per l’autore il made in Italy ha conosciuto un grandissimo boom negli anni Settanta
ed Ottanta e un declino preoccupante negli anni 2000.
S
4. A. Secondo l’autore il made in Italy è la storia non solo di un comparto dell’economia
ma della società italiana.
B. Secondo l’autore il made in Italy è il fallimento dell’ economia italiana.
C. Secondo l’autore il made in Italy è l’esempio del grigiore dell’ economia italiana.
5. A. Secondo l’autore negli anni difficili, le imprese del miglior made in Italy non
hanno mai fatto dei ridimensionamenti.
B. Secondo l’autore negli anni difficili, le imprese del miglior made in Italy hanno
fatto molti saggi ridimensionamenti.
C. Secondo l’autore negli anni difficili, le imprese del miglior made in Italy erano
floride.
8. A. Il made in Italy è risorto perchè costruisce prodotti che non sono cose ma sogni.
B. Il made in Italy è risorto perchè ha copiato il modello asiatico.
C. Il made in Italy è risorto perchè costruisce prodotti molto economici.
41
C CORRIGÉ – PARTIE 1
Utopie ?
• Tant que les États-Unis ignoreront le problème, la bataille sera difficile. Le protocole
de Kyoto, a été ratifié à ce jour par 156 pays à l'exception notable des États-Unis.
Mode ?
• Le concept « écolo » est très bien perçu par la grande majorité des jeunes générations.
Hypocrisie ?
• Le concept est complètement récupéré par les partis politiques européens, afin de
séduire l’électorat jeune.
Véritable volonté ?
• La prise de conscience est lente, mais elle est en marche.
42
TABLEAU DES BONNES RÉPONSES – PARTIE 2
1
B
11
A
2
C
12
B
3
C
13
B
A
4
14
B
D
5
15
C
B
6
16
A
C
7
17
A
A
8
18
B
A
9
19
A
10
B
20
C
C
21 22 23 24 25 26 27 28 29 30
D C C B D A C A D A
43
S Portugais
PARTIE 1
Sujet n°1
Viver na era da globalização : vantagem ou inconveniente ?
Sujet n°2
A proibição do tabaco em todos os lugares públicos fechados : liberdade ou opressão ?
PARTIE 2
44
8.
9.
Senhores passageiros, apresentamos .... as .... desculpas por este ligeiro atraso.
A. a lhes / vossas
C. a vós / vossas
B. a vocês / essas
D. lhes / nossas
14. Queria vender o meu carro. Vou tentar .... por anúncio.
A. vendê-lo B. vendere-o
C. vende-lo D. vendere-lo
15. O Pedro estaciona sempre o carro no parque de estacionamento. .... lá logo de manhã.
A. Põe-lo B. Põe-no C. Põe-o D. Pões-o
45
S 20. Nem todas as crianças .... cedo.
A. se deitam
C. deitaram-se
B. deitam-se
D. deitava-se
25. Gostava muito de comprar uma quinta que .... perto do mar.
A. fica B. ficasse C. ficar D. seja
27. Embora não .... grande coisa de italiano, dá para seguir uma conversa.
A. saiba B. tivesse sabido
C. tenha sabido D. tiver sabido
29. Vamos enviar estes recibos aos nossos clientes. Vamos .... já hoje.
A. enviá-lhos B. enviar-lhos
C. enviar-lhe D. enviar-lhes
30. Daria tudo o que tenho aos meus sobrinhos se tomassem conta de mim. .... tudo
com imenso prazer.
A. Daria-lhes B. Daria-lhos
C. Dar-lhes-ia D. Dá-lhes-ia
46
PARTIE 3
Os vírus modernos
É raro o dia em que não somos bombardeados, pela rádio, televisão ou jornais, com
n ovos vírus ou doenças estranhas, todos eles prontos a destru i r-nos, todos mais
S
perigosos do que os anteriores, com capacidades infecciosas, contagiosas e com
possibilidade de rápida reprodução à escala mundial, organizados como exércitos
longamente treinados prontos a matar-nos. Tivemos e temos o flagelo da Sida, sobretudo
nos países africanos onde não chegam os tratamentos gratuitos que as multinacionais
farmacêuticas não deixam fabricar em grande escala e que poderiam salvar milhares de
vidas humanas, tivemos a doença das vacas loucas, a da Síndroma Respiratória Aguda, a
gripe das aves. E isto para não falarmos do rol quase infinito de outras doenças para a
qual se fazem campanhas de prevenção a fim de nos prepararmos atempadamente para a
sua chegada como o enfarte, o colesterol, a cirrose, os acidentes vasculares cerebrais, o
cancro, na sua perversidade multitentacular e monstruosa capaz de atacar qualquer
parte, mesmo ínfima, do nosso pobre corpo indefeso perante tanta forma de agressão e
violência. E não esqueçamos o tabaco, o álcool e os acidentes de viação. Tudo se
organiza à nossa volta para nos exterminar da face da terra, como se já não bastasse a
bomba atómica e as guerras de armas químicas ou outras que a inteligência humana a
seu tempo inventará.
Temos também outros vírus modernos, com as mesmas capacidades dos
anteriores : os vírus informáticos. Chegam-nos utilizando simplesmente, como quem
respira, o computador como instrumento de trabalho ou de comunicação. Comandados
por espíritos perversos, ou alimentando sonhos de comando e controle de toda a
humanidade, provavelmente fabricados em secretos laboratórios de poderosas
multinacionais que a seguir nos tentam vender os sistemas protectores e anti-vírus,
instalam-se nos nossos computadores e têm a capacidade de se espalharem em poucas
horas a nível mundial, destruindo-nos o trabalho de longos dias ou anos em escassos
s egundos, deixando a pobre máquina indefesa com comportamentos tristes, como as
terr í veis imagens que a televisão nos mostrou das vacas loucas, incapazes do menor
movimento coordenado. De máquina inteligente e vigorosa, o computador infectado
passa rapidamente a um pobre objecto em estado vegetal que se verga perante essa força
desconhecida.
Mas há também outra classe de vírus modernos, tão perniciosos e perversos como
os anteriores, inoculados em grandes doses : chegam-nos pela televisão, a qualquer hora
do dia, instalam-se nas nossas casas e nas nossas mentes que também vão ficando
amolecidas, deterioradas e enfraquecidas perante tanto ataque : são os programas
televisivos em que se exibem, como espectáculo, as vidas íntimas, onde se expõem com
crueza e muita falta de pudor os sentimentos, um verdadeiro insulto à inteligência. Há
reportagens, entrevistas, documentários, depoimentos com vítimas, concursos, onde
podemos seguir vinte e quatro horas por dia as vidas de pessoas na falsa casa
especialmente construída para o efeito, e neles passa toda a miséria humana, perdendo-
se completamente a noção entre a esfera do domínio público e do domínio privado.
Nesta lista não é de excluir um certo tipo de informação televisiva, onde o verdadeiro
47
S jornalismo se confunde com o espectáculo com imagens degradantes, mostrando as
feridas sangrentas, físicas ou morais, os discursos de baixo nível, repetidos até à
exaustão e à náusea, arrastando os espectadores indefesos em torrentes de lama e
também mortais à sua maneira.
crónica apresentada na Rádio Alfa, JME, 06/02/2004 (adaptada).
D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
48
8. O cronista apresenta no seu texto ....
A. uma visão crítica do mundo modern o .
B. um ponto de vista optimista no futuro.
C. altern a t ivas para os vírus modern o s .
C
CORRIGÉ – PARTIE 1
Le candidat doit faire preuve de capacités de réflexion sur le monde qui l’entoure, et
ne sera en aucun cas pénalisé par ses positions ou points de vue personnels. Les capacités
d’expression, d’argumentation et de clarté seront valorisées.
Le candidat doit faire preuve de capacités de réflexion sur le monde qui l’entoure, et
ne sera en aucun cas pénalisé par ses positions ou points de vue personnels. Les capacités
d’expression, d’argumentation et de clarté seront valorisées.
49
C TABLEAU DES BONNES RÉPONSES – PARTIE 2
1
B
11
C
2
C
12
B
3
A
13
D
A
4
14
A
B
5
15
B
C
6
16
C
D
7
17
D
D
8
18
B
A
9
19
B
10
A
20
A
21 22 23 24 25 26 27 28 29 30
A C D D B C A B B C
50
Arabe
PARTIE 1
S
Traitez en 200 à 250 mots l’un des deux sujets suivants.
Indiquez le numéro du sujet choisi et le nombre de mots à l’endroit prévu sur la copie.
Tout essai hors sujet sera sanctionné par la note zéro.
Sujet n°1
Sujet n°2
PARTIE 2
51
S
52
S
53
S
PARTIE 3
54
S
D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
.1
55
S .2
.3
.4
.5
.6
.7
.8
56
CORRIGÉ – PARTIE 1
Introduction
Essai 1 – Suggestion de plan
Introduction
Généralisation et augmentation du nombre d’utilisateurs
Développement
• Effet positif
• Effet négatif
• Propositions de changement de comportement
Conclusion
• Impact sur le futur
• Possibilités de changement dans l’opinion publique
57
S Chinois
PARTIE 1
Traitez en 200 à 250 mots l’un des deux sujets suivants.
Indiquez le numéro du sujet choisi et le nombre de mots à l’endroit prévu sur la copie.
Tout essai hors sujet sera sanctionné par la note zéro.
Sujet n°1
Sujet n°2
PARTIE 2
58
S
59
S
60
S
PARTIE 3
61
S D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
1.
A.
B.
C.
2.
A.
B.
C.
3.
A.
B.
C.
4.
A.
B.
C.
5.
A.
B.
C.
6.
A.
B.
C.
7.
A.
B.
C.
8.
A.
B.
C.
62
CORRIGÉ – PARTIE 1
Pour les élèves qui sont d’origine chinoise, ils peuvent exprimer leurs sentiments pour
les deux pays, la France et la Chine.
Pour ce sujet, ils faut bien traiter la partie « notre ». « Notre » école n’est pas n’import e
quelle école, il faut bien exprimer les sentiments particuliers vis-à-vis de celle-ci.
63
S Russe
PARTIE 1
Traitez en 200 à 250 mots l’un des deux sujets suivants.
Indiquez le numéro du sujet choisi et le nombre de mots à l’endroit prévu sur la copie.
Tout essai hors sujet sera sanctionné par la note zéro.
Sujet n°1
Gjntgktybt rkbvfnf=
Sujet n°2
PARTIE 2
64
6. Jntw ghbtltn ==== .
A. gj gznybwfv
C. d gznybwe
B. gznybwf
D. gj ce,,jnfv
65
S 17. "nf ltdeirf dsikf pfve; pf ==== .
A. vjtuj pyfrjvjuj
C. vjq pyfrjvsq
B. z
C. vyt D. j,j vyt
66
28. Ujl yfpfl Vbif ==== d Gfhb;t.
A. tplbk
C. ,skf
B. c rjnjhsv
S
C. c rjnjhsvb D. rjnjhst
PARTIE 3
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www.rost.fr
D’après le texte, pour chaque question, une seule proposition est correcte.
67
C 2. Ult ,sk gjlgbcfy ghjtrn *
A – d Ghfut
B – d Gfhb;t
C – d Gtrbyt
CORRIGÉ – PARTIE 1
68
Pendant des milliers d’années la consommation et la production du gaz carbonique sont
restées identiques.
La concentration des gaz a brutalement augmenté depuis un siècle. Avec la
révolution industrielle l’homme s’est mis à produire un surplus de dioxyde de carbone
(CO2) dans l’atmosphère. Chaque année il y a plus de CO2 que la nature ne peut en
consommer.
C
Les responsables
Les principaux responsables sont des pays riches. Ils émettent 60 % de gaz à effet de
serre pour produire de l’énergie, pour le transport, pour chauffer et climatiser les maisons.
Les conséquences
À cause du réchauffement il faut s’attendre à une montée des eaux à quelques
dizaines de centimètres d’ici 2100. C’est en partie à cause de la fonte des glaces, mais
surtout à cause de la dilatation des océans : plus la mer est chaude moins elle est dense,
et prend donc plus de place.
69
C Le russe n’est pas difficile
Comme en français, en anglais, en allemand, beaucoup de mots viennent du latin et du
grec, c’est une langue indo-européenne. Le russe actuel fait constamment des emprunts à
l’anglais ainsi qu’aux autres langues européennes. La prononciation est plus facile qu’en
anglais. L’alphabet est différent, mais on l’apprend en quelques heures.
Connaître le russe est un atout pour l’avenir.
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
B C A C B C D D B A
11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
D A C A B D A C D A
21 22 23 24 25 26 27 28 29 30
B C D B B A C D C B
1 2 3 4 5 6 7 8
C B C A B A C C
70
ANALYSE ET SYNTHÈSE DE DOSSIERS
PRÉSENTATION DE L’ÉPREUVE
Objectif
Cette épreuve a pour objectif de vérifier si les candidats :
• peuvent mener une tâche d’ampleur dans une durée limitée ;
• sont capables de traiter une information de façon objective et complète ;
• ont l’aptitude à dégager les idées utiles ;
• savent être concis, efficaces et aller à l’essentiel ;
• témoignent d’une capacité de rédaction et de présentation.
Supports
Le support d’épreuve d’Analyse – Synthèse se présente en deux parties :
• La première partie, le cahier des questions, propose les questions suivies des
espaces adaptés aux réponses. S’y trouvent également des conseils pour travailler
et un barème de notation détaillé en fin de cahier ;
• Une deuxième partie, le dossier de textes, est constituée de documents divers
(extraits d’ouvrages, de revues, tableaux, illustrations, citations…). Ce dossier est
précédé d’un sommaire bibliographique.
Niveau de connaissances
Le travail demandé ne nécessite pas de connaissances particulières. Le support
d’épreuve d’Analyse – Synthèse, le cahier des questions et son dossier de textes,
permet de traiter entièrement le travail proposé.
Durée
La durée de l’épreuve d’Analyse – Synthèse est de quatre heures après lecture du
cahier des questions et distribution du dossier de textes.
Questions d’analyse
Pour les questions d’analyse, la réponse doit être rédigée à partir d’un ou plusieurs
documents. La réponse doit articuler les différents éléments de réponse de manière
rédigée et synthétique sans se contenter de les lister.
71
Questions de titre et de plan
Il vous est demandé de proposer un plan de classement du dossier de textes.
Intitulez chaque partie le plus clairement et le plus précisément possible. Pour le titre à
donner au dossier de textes, soyez également clair, précis et synthétique. Soyez égale-
ment attentif à la cohérence entre le titre et le contenu du dossier.
Question de synthèse
À la lecture des différents textes, vous vous apercevrez que ceux-ci constituent un
e n s e m ble cohérent. La plupart des textes présentés apportent donc des éléments de
réponse à cette question qui requiert un véritable travail de synthèse. Les apports
personnels ne sont pas à exclure mais ce sont avant tout les informations du dossier de
textes que vous devez traiter. Tout autant que pour le contenu, il vous faut être particu-
lièrement attentif à la forme. Construisez votre réponse, prenez le temps de rédiger une
courte introduction et concluez par ce qui vous est apparu comme essentiel.
Pour la question de synthèse, tenez compte des réponses aux autres questions
Les différentes questions qui précédent celle-ci doivent vous permettre d’identifier
les éléments essentiels du dossier de textes.
72
Questions
Question 1 :
Questions de repérage
En quelle année l’utilisation de la cigogne est-elle mentionnée pour la
dernière fois par un livre de cuisine ? (0,25 point)
S
Question 2 : Par personne et pour une semaine, le rapport entre la dépense de nourriture
d’une famille allemande et d’une famille bhoutanaise est d’environ.
(0,25 point)
Question 3 : Le « régime crétois », c’est bon pour la santé ! Mais comment cela a-t-il
été établi ? (0,5 point)
Question 4 : Quel pourrait être le rapport entre la soupe et le sandwich ? (0,5 point)
Questions d’analyse
Question 7 : D’où provient le succès du hamburger ? (2 points)
Question de synthèse
Question 12 : Alors que certains évoquent un « goût mondial », cette phrase écrite à
Paris en 1865 par J. et E. de Goncourt : « Le peuple déjeune, la
bourgeoisie dîne, la noblesse soupe. L’estomac se lève plus ou moins
tard chez l’homme selon sa distinction », est-elle, selon vous, toujours
d’actualité ?
Après avoir affirmé votre position, vous montrerez en vous appuyant
sur les textes en quoi l’aliment n’est pas un produit comme les autres.
(8 points)
73
S Dossier de textes
Document 1 :
Document 2 :
Illustration 1 ……………………………………………………………………… 75
74
Document 1
75
S Document 2
Avant-propos
Sur d’immenses affiches recouvrant il y a quelques années les murs de Paris,
s’ exhibait un appétissant tournedos surmonté d’une noix de beurre pers i l l é ,
entouré de pommes allumettes dorées à point. On y lisait en lettres énormes :
« Le dernier bon repas avant la frontière ». Et, au-dessous du plat, l’identité des
commanditaires de la publicité : restaurants des Aéroports de Paris. La cause
était entendue : quelle que soit leur destination, ceux qui prenaient l’avion d’Orly
ou de Roissy n’avaient aucune chance de bien manger une fois sortis du terri-
toire français. Ils s’envolaient vers un au-delà culinaire indifférencié mais unifié,
tous pays confondus, par une tragique absence de gastronomie.
Ce tournedos bien français aurait pu être taillé pourtant dans une bête venue du
Botswana, exporta teur de viande ve rs la Communauté européenne. Le beurre
pouvait être aussi bien danois que charentais. Quant à la pomme de te r re, ce
tubercule sans lequel il n’existerait guère de cuisine européenne, elle ne figure
que depuis trois siècles à peine – depuis hier seulement, à l’échelle de l’histoire
– dans les assiettes du vieux continent.
Nous aurions en fait beaucoup de mal à nous nourrir comme nos ancêtres qui
connaissaient peu de chose de ce qui fait aujourd’hui notre ordinaire. Imagine-t-on
la cuisine méditerranéenne sans poivrons ni tomates, qui n’arrivèrent pourtant
des Amériques qu’à une époque relativement récente ? Ou un breakfast anglais
sans thé, cette boisson qui fait l’âme des tables britanniques ? Ou une pâtisserie
viennoise sans choco l a t ? Les échanges alimentaires sont aussi vieux que le
co m m e rce, aussi anciens que l’activité humaine. De nos jours enco re, le
commerce des produits agricoles ne cesse de croître en volume. Il représente
1 2 % de la va leur to ta le des échanges mondiaux. Les boissons tro p i ca le s
comme le thé ou le café, les fruits comme la banane et les cé réales figurent
parmi les productions les plus échangées dans le monde. Depuis que le s
moyens de locomotion existent, il n’est pas une recette qui n’incorpore quelque
produit venu d’un ailleurs plus ou moins lointain. Tel plat qui semble sortir du
fond des âges et a acquis un statut totémique peut être le fruit d’assemblages
ta rdifs. Mais la mémoire des peuples est séle c t i ve et a tôt fait de « n a t i o n a-
liser », parfois jusqu’à ses origines, un ingrédient qu’elle a fait sien.
Tel est le para d oxe. Aucun bra ssage n’a jamais empêché la cuisine de « fa i re
frontière ». La fa çon de se nourrir, quotidienne ou fe st i ve, est à elle seule un
code d’apparte n a n ce qu’aucun emprunt ne parvient vraiment à enta m e r. Les
76
grandes aires culturelles se sont d’abord définies parce qu’on y mangeait. Il y a
les civilisations du riz, du blé ou du maïs, les peuples de mangeurs de poisson
et ceux qui se nourrissent de viande. Manger avec ses doigts, avec des
baguettes ou à l’aide de couverts dit qui l’on est, avec souvent plus d’évidence
que d’autres signes de culture. Et les religions ne s’y sont pas trompées, qui ont
S
séparé le licite de l’illicite en matière de nourriture pour tracer la frontière entre
les croyants et ceux qui restaient sourds à la Parole.
Dis-moi donc ce que tu manges, et je saurai quel Dieu tu adores, sous quelle lati-
tude tu vis, de quelle culture tu es l’enfant, de quel groupe social tu te réclames.
La le c t u re de la cuisine est un fa b u leux voyage dans la co n s c i e n ce que les
sociétés ont d’elles-mêmes, dans la vision qu’elles ont de leur identité. (…)
77
S Document 3
La soupe fait un retour remarqué sur nos tables, célèbres ou anonymes, ména-
gères ou branchées. À vrai dire, ce plat n’avait jamais véritablement disparu de
la table familiale et figurait nécessairement dans les restaurants fréquentés par
les étra n g e rs. Car la soupe est un mets unive rsel et probablement l’une des
pre m i è res nourritures un peu élaborées. Parmi une quarantaine de re ce t te s
mésopotamiennes retrouvées sur des tablettes d’argile, Jean Bottéro, un histo-
rien français spécialiste de la Bible et du Moyen-Orient antique, a remarqué une
t rès moderne soupe de cre sson, abondant à l’époque entre le Tigre et
l’Euphrate. Chaque région, chaque pays, selon les goûts partagés de ses habi-
tants, défend sa soupe comme un étendard : les Russes le bortsch, les Andalous
le gaspacho, les Vietnamiens le phô. Chaque famille prove n ça le possède sa
recette de soupe au pistou, et si la soupe à l’oignon n’est plus guère en vogue à
Paris, elle fait le bonheur des habitués de La Bonne Soupe, le doyen des restau-
rants français de New York créé par Jean-Paul Picot en 1973. Au Moyen Âge, la
soupe est la tranche de pain posée dans l’écuelle sur laquelle on ve rsait le
bouillon (d’où l’expression « trempé comme une soupe »). Par métonymie, le mot
a ensuite désigné la préparation, et est resté lorsqu’on a abandonné la tranche
de pain. Le potage, lui, est la version huppée de la soupe, lorsque les cuisiniers
donnaient les noms de le u rs maîtres, aristo c ra tes bien en cour, à le u rs cré a-
tions : Condé (purée de haricots rouges), du Barry (chou fleur et pommes de
terre), Saint-Germain (petits pois). Saint-Simon témoigne du goût du Roi Soleil
pour les potages, comme Molière, qui fait dire à l’un des personnages des
Femmes savantes : « je vis de bonne soupe, et non de beau langage ».
Plus près de nous, l’ancien ministre gaulliste Olivier Guichard (1920-2004), qui
déclinait un jour l’invitation à reprendre de la soupe lors d’un repas officiel, s’est
vu rappelé à l’ordre par le général de Gaulle : « Vous avez tort, Guichard, la soupe
est un plat national ». Alors, soupe ou potage ? La soupe est élaborée avec des
légumes, tandis que les potages sont généra lement composés à partir de
bouillons (viandes, crustacés ou légumes). Ils sont soit liés (crème, beurre), soit
l a i ssés à l’état de bouillon ou de consommé (non liés). Mais il ne faut pas s’y
tromper : sur la ca r te d’une grande ta b le, « soupe » peut aussi désigner une
pré p a ration très sophistiquée, comme la soupe d’artichaut à la truffe noire,
brioche feuilletée aux champignons et beurre de truffes, du cuisinier Guy Savoy,
dont l’équilibre aromatique est merveille. Pour l’ordinaire, la soupe est chaude-
ment recommandée le soir au dîner. Liée aux fibres vé g é ta les des légumes,
l’eau qu’elle contient en grande proportion permet au corps de se réhydrater au
fil de la nuit. Et pour peu qu’elle contienne des légumes connus pour leur effet
diurétique comme l’oignon, le poireau, le fenouil, les co u rg e t tes, le potiron ou
78
encore le chou, elle participe au nettoyage de l’organisme. Source de minéraux
et de l’indispensable potassium, son action sera d’autant plus bénéfique si les
légumes sont laissés en petits dés, comme dans le minestrone à l’italienne.
Les bars à soupe apparus il y a quelques années ont connu un réel succès, mais
n’ont guère fait école. En revanche, ils ont donné des idées à quelques malins
S
qui ont re n o u velé le répertoire en s’ i n s p i rant de soupes étrangères (soupe
harira du Maroc, soupes thaïes) ou en innovant, comme le chef des Papilles, à
Paris, avec une superbe soupe à laquelle il a donné le nom provençal « aïgo ». Il
co m m e n ce par fa i re revenir avec un peu d’huile d’olive, sans co lo rer, des
pommes de terre émincées, des zestes d’orange, de l’ail, puis il ajoute un peu
de safran, un litre de lait et un tiers de fond blanc. Il confectionne ensuite des
cro û tons à peine rissolés, des petites quenelles de tapenade d’olives noires
auxquelles il ajoute, disposés dans l’ a ss i e t te, un peu de ciboule t te, de piment
doux, et quelques suprêmes d’orange en dés. Un délice.
79
S Le Monde, 19 janvier 2006
Document 4
80
Document 5
À dépouiller les livres de cuisine parus entre le XIVe et le XVIIIe s i è c le, une
évidence se fait jour : les innovations alimenta i res ne se sont pas imposées
d’un seul coup ni à tous de la même façon. L’art culinaire connaît des lenteurs,
de brusques accé l é rations, des piétinements en rapport avec les vale u rs en
cours.
81
S eu lieu pendant la période révolutionnaire, avec la Cuisinière républicaine (an III),
qui lui est entièrement consacrée. La tomate aurait conquis Paris vers la même
époque, apportée (dit-on) par les Marseillais. Quant au poivron et au piment,
leur adoption sera plus tardive encore.
Des plantes américaines, nos livres n’ont mentionné que le topinambour, les
haricots écossés et les haricots verts, le potiron et le maïs. Mais leur intégration
s’ e st fa i te sans aucun bouleve rsement. Le topinambour, méprisé aujourd’hui,
l’était déjà autrefois. Pour le D i c t i o n n a i re de Fu ret i è re (1690), les « taupinam-
b o u rs » sont des « Racines rondes, qui vo nt par nœuds, que les pauvres gens
m a n g e nt cuites avec du sel, du beurre et du vinaigre ». On l’appelle autrement
« pomme de te r re ». Et la Cuisinière bourgeoise confirme un demi-siècle plus
tard : « Ils sont fort peu estimés. Ceux qui en veulent manger doivent les faire cuire
dans de l’eau, après les peler et les met t re dans une sauce blanche avec de la
moutarde » (p. 259). Réputé nourriture de pauvres gens, il n’en a pas moins été
mentionné par cinq livres des XVIIe et XVIIIe siècles sur les six de notre échantillon.
Cela s’explique peut-être par son goût analogue à celui de l’artichaut qui, nous
allons le voir, était furieusement à la mode.
Ou encore parce que les livres de cette époque faisaient feu de tout bois pour
varier les plats de légumes en période de Carême.
Les haricots écossés n’ont rien bouleversé parce qu’ils ont pris silencieusement
la place du dolique2 africain utilisé pendant tout le Moyen Âge sous le nom de
phaséol. En italien et dans beaucoup d’autres langues européennes, il en a
aussi repris le nom, tandis qu’en France, Dieu sait pourquoi, il est connu sous le
nom d’un ragoût – dans lequel aucune légumineuse n’est d’aille u rs jamais
entrée avant le XXe s i è c le. Quant aux haricots verts, qui appara i ssent aussi en
1691, ils co n stituent une véritable nouveauté, mais ne tiennent enco re qu’une
place très modeste.
Le potiron, mentionné dans deux de nos livres, y est totalement confondu avec
la citrouille, tandis que les autres ne connaissent que celle-ci. Enfin le maïs qui
dans l’ a l i m e n tation populaire gasconne s’est très rapidement substitué au
millet n’apparaît que dans la Cuisinière bourgeoise, encore est-ce sous la forme
d’un pickle, le cornichon de blé de Turquie. Lui non plus ne révolutionne donc
pas le régime alimentaire des élites sociales.
82
chons le sont dès 1555. Un peu moins employés, les olives, les céleris, le s
choux-fleurs et les brocolis.
L’origine de ce r taines de ces espèces est discuta b le tandis que les voies et la
chronologie de leur pénétration en France seraient à préciser. Mais ce n’est pas
sans raisons que plusieurs sont supposées venir d’Italie. Les pois chiches, les
S
oranges et les citrons sont en effet mentionnés par quatre de nos cinq livres de
cuisine italiens du Moyen Âge ; les câpres et les brocolis par trois d’entre eux,
tandis que les artichauts, les olives, les concombres, les melons et les asperges
ne le sont que dans les plus récents. Ces trois derniers aliments l’étaient aussi,
d ’ a i l le u rs, dans un ouvrage latin d’enracinement géographique ince r tain, le
Tractatus de modo preparandi et condiendi omnia cibaria, qui mentionne plusieurs
espèces médite r ranéennes, mais pratique une cuisine au beurre d’apparence
fort peu italienne. Il serait néanmoins tout à fait compréhensible que l’Italie de
la Renaissance ait joué dans le domaine gastronomique un rôle analogue à celui
qu’elle a joué dans la rénovation des idées de la littérature, de la peinture, de
l’architecture, des modes vestimentaires, de la coiffure et des soins de beauté,
etc. Pour adopter un aliment étranger, il ne suffit pas qu’il soit disponible ; il y
faut d’autres conditions, par exe m p le qu’on le sache apprécié par un groupe
social supérieur ou par un peuple prestigieux comme les Italiens l’étaient à la
Renaissance.
83
S En l’état présent des recherches, on se contentera donc de souligner le fait lui-
même : nombre d’aliments co n s i d é rés jusque-là comme indignes des ta b le s
a r i sto c ratiques y ont accédé entre 1500 et 1750, et certains d’entre eux sont
même devenus caractéristiques de l’alimentation des élites sociales.
Le témoignage exceptionnel du Ménagier de Paris me paraît de nature à étayer
cette conclusion. En effet, ce livre, écrit non pas par un cuisinier princier mais
par un bourgeois parisien, indique toute une série de plats plus vulgaires que
ceux que l’on trouve dans les autres traités culinaires. Il les présente en particu-
lier dans son chapitre des « potages communs », au titre significatif, ou lorsqu’il
fait des re m a rques sur les pratiques culinaires régionales. C’est dans ces
re ce t tes généralement qu’appara i ssent des aliments – s u r tout des légumes –
qui n’apparaîtront dans les ouvrages des cuisiniers aristocratiques qu’aux XVIIe et
e
XVIII s i è c les. Ainsi les ca ro t tes, l’ache ou cé leri sauvage, les champignons, le
chervis, la courge, les épinards, la laitue, les navets, les racines de persil, etc.
D’une manière généra le, on peut dire que les légumes étaient co n s i d é ré s
comme vulgaires au Moyen Âge. Les livres de cuisine italiens ont, au Moyen
Âge, mentionné beaucoup plus de légumes que les livres français. Mais, d’une
part, ils semblent avoir été moins spécifiquement aristo c ratiques. On sait
d’autre part, que les légumes, et particulièrement les racines, étaient réputés
v u l g a i res en Italie comme en Fra n ce, et sans doute dans l’ e n s e m b le de la
culture occidentale. (...). Aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, cependant, ils se sont intro-
duits en nombre croissant dans le régime aristo c ratique fra n çais et plusieurs
d’entre eux comme les truffes, les morilles, les mousserons, etc., en sont même
devenus caractéristiques.
84
plus employés qu’exceptionnellement tandis que le carvi, le cumin, le galanga,
la graine de Paradis ou maniguette, le poivre long, etc., ont totalement disparu.
Leur disparition est d’autant plus importante que l’usage des épices avait été,
au Moyen Âge, l’un des moyens les plus évidents de distinction culinaire. Or elle
ne s’explique certainement pas par une difficulté d’approvisionnement, puisque
S
les Européens, au contraire, ont totalement mis la main sur le trafic des épices
au début du XVIe siècle.
La disparition d’herbes aromatiques est moins significa t i ve, puisque leur rôle, au
Moyen Âge, était beaucoup moins éminent. Néanmoins le coq, l’hysope, la marjo-
laine, la menthe, l’orvale ou tout-bonne, la rue, la sanemonde, la sauge et la
tanaisie disparaissent plus ou moins complètement des livres de cuisine aux XVIIe et
e
X V I I I s i è c les cédant la place à d’autres herbes indigènes comme le basilic, la
baume, la bonne-dame et surtout le cerfeuil, la civette, la ciboulette, l’estragon, le
romarin, la sarriette et le thym. À une pale t te d’aromates médiévaux s’est donc
substituée en très peu de temps la palette aromatique moderne pour des raisons
qui nous échappent encore et semblent s’appare n ter aux caprices de la mode.
Plus significa t i ves sont les disparitions d’espèces animales : des mammifères
marins comme la baleine ou le marsouin, et de grands oiseaux comme le
cormoran, mentionnés pour la dernière fois en 1490, le cygne, la cigogne et la
grue, mentionnés jusqu’en 1555, le héron et le paon évoqués pour la dernière
fois en 1651 et 1654. Or ces espèces n’ont pas disparu de nos pays, mais elles
ont été refoulées dans la catégorie des choses immangeables où nous les
tenons encore aujourd’hui. C’est une preuve ultime et particulièrement claire de
ce que l’ h i stoire de l’ i n n ovation alimenta i re ne renvoie pas seulement à une
histoire des espèces animales et végétales, ni à une histoire des contacts entre
les peuples, mais aussi et surtout aux transformations des structures du goût
alimentaire, autrement dit du système de valeurs gastronomique.
85
S L’histo i re de l’alimentation ne peut donc se borner à étudier les re ss o u rces
naturelles, le pro g rès économique et la répartition des richesses. Elle doit
analyser les systèmes de valeurs gastronomiques – c’est-à-dire les catégories
du comestible et du non-comestible, du bon et du mauvais, du distingué et du
vulgaire, etc . –, fa i re appara î t re les relations que ces systèmes entretiennent
a vec les idées « scientifiques » et religieuses, l’esthétique et les rapports
sociaux.
1. L’auteur a dépouillé 19 livres de cuisine dont 14 français répartis entre les cinq siècles consi-
dérés, et 5 italiens des XIVe et XVe siècles (NdC).
2. Dolique : nom commun à diverses espèces de pois cultivés des pays chauds, très voisin du
haricot » (Larousse), NdC.
3. mondés : « Orge mondé, débarrassé de sa pellicule ; eau dans laquelle on a fait bouillir de
l’orge mondé » (Larousse), NdC.
86
Document 6
87
S du savoir-vivre interdisent de flairer ouvertement son assiette alors que, contra-
diction intéressante, la dégustation du vin prône justement ce type de comporte-
ment. Quand on n’utilise que ses doigts, on décrit un arc de cercle qui place la
nourriture sous le nez et offre un prélude riche en sensations olfactives, sorte
de pro logue aromatique. Ce puissant stimulus, combiné avec une importa n te
mobilisation du toucher et de la vue, semble indiquer une régression vers (ou un
rappel de) ce r taines habitudes plus enfantines, moins sophistiquées, où le
co n tact avec la nourriture s’ o p è re d’une manière plus dire c te et plus senso-
rielle. En cela, le fast-food vise à combler les sens, loin de toute excitation intel-
lectuelle ou esthétique, et il ne s’en cache pas.
Le fait que l’on se serve de ses doigts implique une autre particularité : l’aliment
pré s e n te ra une surfa ce sèche, souvent re co u ve r te d’une cro û te. À l’évidence,
des consistances plus liquides, comme les soupes, les plats mijotés ou en
sauce, ne conviendraient pas, puisque, dans la mesure du possible, il faut éviter
de se salir les mains. Pour cela, on pro cède de deux fa çons. La pre m i è re
consiste à étaler la nourriture sur un pain ou une pâte ou à l’en enrober. C’est là
une technique ex t rêmement répandue de par le monde, qui est apparue en
Europe dès le Moyen Âge sous la forme d’une tranche de gros pain rassis que
l’on trempait dans les plats : en absorbant la sauce et la graisse des prépara-
tions, il devenait lui-même un aliment à part entière. L’usage a survécu à
travers une quantité de variantes, tel le très populaire sandwich – quasiment un
repas complet –, où dive rs éléments se conjuguent à l’intérieur de plusieurs
tranches de pain pour donner une multiplicité de textures et de saveurs super-
posées. Le sandwich peut aussi être ouvert : une unique couche de pâte cuite
sur laquelle on étend le reste. Ainsi la pizza, triangle que l’on replie en partie
avant de le porter à sa bouche4. La pâte peut également tenir lieu d’enveloppe :
par exemple, le taco où une tortilla arrondie se referme sur toutes sortes d’ali-
ments. Dans sa forme la plus banale, le sandwich se compose de deux tranches
de pain, ou encore d’un roll, ou d’un bun, coupé en deux5 : le pain se trouve à la
base et au sommet. Tel est, bien sûr, l’aspect du hamburger.
La seconde méthode veut que l’on enrobe la nourriture dans une pâte à frire.
Plus récente que le sandwich, cette technique n’en est pas moins répandue et
a p p réciée. Brillat-Savarin re co n n a i ssait les mérites des aliments frits,
« toujours bienvenus dans les ré ce pt i o n s ; ils int ro d u i s e nt une dive r s i té plaisante,
ils sont agré a b les à re g a rder, ils co n s e rve nt leur saveur d’origine et on peut le s
manger avec les mains, ce qui enchante toujours les femmes ». Quand on le s
prépare dans les règles de l’art, leur surfa ce croust i l l a n te et sèche ne laisse
filtrer ni la graisse ni le jus ; en même temps, ils offrent un goût d’une qualité
exceptionnelle ainsi qu’une consistance des plus séduisantes. Des mets relati-
vement maigres, comme la volaille, le poisson, les fruits de mer, les légumes,
gagnent beaucoup en saveur grâce à la croûte dorée et croquante qui caracté-
rise cette variété de fast-food.
88
Gras à souhait
Sans doute le succès unive rsel de la friture vient-il surtout de l’attirance que
nous épro u vons pour le gras. La friture répond ici à un besoin. La mythologie
contemporaine peut raconter ce qu’elle voudra à notre génération suralimentée
et sédentaire, elle peut nous parler de ses conséquences désastreuses, le gras
S
a toujours excité notre convoitise : il s’agit à la fois d’un nutriment essentiel et
d’un additif qui enrichit et rehausse le goût. De tout temps, nous lui avo n s
a cco rdé une grande va le u r. Pa r tout, le gras re l ève les aliments à base de
céréales, de fécule ou d’hydrates de carbone, partout il améliore des légumes
fades ou farineux, sous forme d’huiles, de produits laitiers ou de gra i sses
animales. Non seulement la friture nous fournit une abondante quantité de gras
mais elle le fait d’une manière attrayante : une texture croustillante, une grande
diversité de saveurs et une couleur dorée qui, depuis des siècles, est reconnue
comme un signe de richesse culinaire. La frite est la réalisation quasi parfaite
d’une tendance universelle. Cette technique, ajoutée à une consistance idéale –
celle d’un féculent, la pomme de terre –, donne un minuscule aliment en forme
de doigt, qui renverse la plupart des barrières ethniques et culture l les parce
qu’il est aussi amusant que délicieux.
Or le fast-food nous apporte ce gras ; c’est l’un de ses buts, sans ambiguïté.
Si le fast-food satisfait notre besoin de gras sous différents aspects la saveur du
jus de viande, le croquant des féculents frits, l’onctuosité du fromage fondu ; il
nous offre également, à profusion, les deux agents d’assaisonnement les plus
communs, le sucre et le sel. Le sodium est un minéral nécessaire à l’alimentation
de l’homme mais l’usage que l’on en fait aujourd’hui dépasse de beaucoup sa fo n c-
tion diététique. Pa r tout dans le monde, on l’a to u j o u rs employé de préférence à
d’autres produits, souvent au détriment d’ingrédients plus raffinés ou plus luxueux,
parce qu’il comble la bouche d’une manière to ta le et qu’il est peu co û teux et facile-
ment accessible. En fait, l’association du gras et du sel suffit à rendre presque tous
les aliments agréables au palais et c’est leur omniprésence dans le fast-food qui
explique ce succès auprès d’un éventail quasi infini de consommateurs.
La question du sucre apparaît un peu plus co m p lexe car sa pré s e n ce est
fréquemment déguisée. En général, le sucre sert à relever le goût, comme dans
la pâte à frire ou la sauce to m a te des pizzas. Il se dissimule moins dans les
sauces, les pickles6 et les divers condiments qui sont souvent l’un des charmes
du fast-food. Et, bien sûr, le sucre est le premier constituant des sodas qui l’ac-
compagnent inév i ta b lement. Masqué ou flagrant, le sucre est un élément
e ssentiel du fa st - food. Là enco re, comme pour le sel, il s’agit d’une save u r
universellement appréciée qui submerge le palais, le flatte et l’envahit jusqu’à le
rendre indifférent à des arômes plus subtils.
Stratégie du fast-food
Tout se passe comme si le triomphe du fast-food venait de ce qu’il offre d’une
fa çon dire c te et effica ce des stimuli fo n d a m e n taux et séduisants, des
89
S substances, des goûts, des textures et des arômes qui s’adressent à un dénomi-
nateur commun. En examinant quelques-unes de ses ré u ss i tes, on pourra
co m p re n d re sa stratégie. Voici le cheeseburger, un mince beefsteak haché,
braisé ou grillé, surmonté d’une tranche de fromage « américain » pasteurisé,
le tout arrosé de ketchup, garni d’oignons et de pickles, et introduit dans un bun
coupé en deux. Un bun blanc, à la farine de froment. On le sert avec une portion
de frites et un soda glacé, le plus souvent un Coca. Chacun de ces éléments
indique qu’il sollicite au niveau le plus sommaire une clientèle large et indiffé-
renciée.
Le steak haché a beau être chétif et de médiocre qualité, il joue néanmoins un
rôle central. Il rappelle que la viande, la viande rouge, a toujours été au centre
des préoccupations humaines. Ce morceau de viande présente tous les attributs
positifs – il est rissolé, tendre, juteux, gras, savoureux – sous une forme acces-
sible et économique. Or le bœuf, avec sa fo r te teneur en gra i sse et son goût
puissant, spécifique mais sans co n n o tation ethnique, est la viande la mieux
acceptée et la plus appréciée à travers l’histoire, toutes cultures confondues.
Le bun, quant à lui, marque l’apogée de plusieurs siècles de savoir-faire, puis-
qu’il est le pain le plus raffiné que l’on ait jamais fabriqué, le plus blanc, le plus
tendre, purifié de tout arrière-goût de levure et doté d’une texture moelleuse à
souhait. Il est l’indispensable complément du steak et de sa garniture mais, en
dehors de sa teinte dorée, il n’évoque guère les pains traditionnels. C’est cette
absence de caractéristiques trop précises qui lui permet de remporter l’adhé-
sion d’un vaste public.
Autant le steak et le bun sont ronds, autant le fromage est ca r ré. Ainsi, lors-
qu’on le place sur la viande chaude, il fond légèrement et ses quatre pointe s
débordent, amollies, en s’affaissant d’une manière appétissante. On n’aperçoit
que ces quatre triangles de fromage doré mais cela suffit à signaler la présence
d’une autre strate, d’une opulence supplémentaire. Homogénéisé et pasteurisé,
il ne comporte pratiquement aucune des saveurs typiques du « vrai » fromage ;
un critique américain le traite d’« encaustique solidifiée ». On lui a retiré ce qui
séduit les pays accoutumés aux produits laitiers mais rebute ceux qui n’y voient
qu’un aliment d’origine animale, fermenté et plus ou moins avarié. En revanche,
il garde deux attributs grâce auxquels on peut l’admettre partout : cette onctuo-
sité du gras qui fond peu à peu dans la bouche et cette nuance d’or, héritage des
fabricants de cheddar anglais, qui coloraient leur fromage artificiellement pour
qu’il paraisse contenir plus de matières grasses riches en carotène.
Le cheeseburger est agrémenté de légumes et de sauce. Ces légumes, des
pickles en lamelles et des oignons frits ou grillés, comptent depuis longtemps
parmi les garnitures les plus habituelles. On les rencontre sous des fo r m e s
s i m i l a i res à tra ve rs le monde : les oignons, ro b u stes, ca ramélisés, et le s
pickles, avec leur goût aigrelet, rehaussent les plats tout en les décorant. Ces
pickles co r respondent plutôt à la tradition anglo - a m é r i caine, avec une saveur
plus suave, une acidité moins pro n o n cée, bref un côté aigre-doux. D’un goût
90
co m p a ra b le, le ketchup – authentique innovation américaine – s’inspire au
départ de condiments épicés et aigre-doux, de chutney s 7 et de dive rs
a ssaisonnements en prove n a n ce de l’Orient. (Le mot « ke tc h u p » vient d’un
terme indonésien, ke ca p, qui désigne une sauce de soja piquante.) Né du
modèle asiatique ; le ke tchup utilise la to m a te, un fruit d’un rouge éclata n t ,
S
originaire du nouveau Monde, qui donne à la sauce un bon « co r p s » et un
aspect plaisant. Cependant, ce qui domine, dans le ketchup, est plus affaire de
sucre que d’arôme. Sa popularité semble donc indiquer qu’il s’adre sse à des
consommateurs très jeunes.
Nous avons déjà parlé des frite s ; ne reste plus que le soda, le Coca, boisson
chargée de ca r b o n a te, sucrée, glacée et de co u leur sombre. Des siècles de
t radition enseignent que l’on préfère boire froid ou brûlant, et non chaud ou
tiède ; le froid donne une impre ssion de pureté et de fraîcheur. Le ca r b o n a te
accroît cette sensation et la double d’un stimulus fort agréable : ce pétillement,
ces pico tements qui réveillent la bouche et co n f è rent une impression particu-
lière à l’acte de boire. Le sucré convient à tout le monde, notamment aux jeunes,
dont la culture acquiert aujourd’hui une place pré p o n d é ra n te. Par ailleurs, il
semble que l’on attende de la boisson certaines qualités pharmacologiques : on
peut songer à des excitants comme le café, Ie thé ou le chocolat, aux propriétés
narcotiques du vin, de la bière et des alcools distillés, ou enco re aux ve r t u s
médicinales des tisanes et des infusions. Quand on a inventé le Coca, à la fin du
siècle dernier, on n’a pas mis l’accent sur ses mérites gustatifs : ce n’était qu’un
remède facile à avaler, contre la migraine et la dyspepsie. Il a un arrière-goût de
médicament, une couleur qui évoque des plantes infusées et, grâce à la caféine,
un effet légèrement excitant. En raison de sa richesse en carbonate et de son
arôme à la fois sucré et piquant, il nettoie le palais et le rafraîchit à la manière
d’un sorbet.
91
S italienne par son aspect – une galette ouve r te et garnie de différents ingré-
dients –, sa sauce tomate relevée d’une pointe d’origan et sa mozzarella fondue,
mais elle contient rarement des éléments traditionnels comme l’ail frais, l’huile
d’olive fruitée ou le puissant basilic. De la même façon, le taco n’est mexicain
que par un lointain rapport avec sa forme originelle. C’est une tortilla de maïs
plutôt quelconque, enveloppant des composantes dont l’arôme de cumin et de
chili n’est plus guère qu’un souve n i r ; comme la pizza, la tortilla est nappée
d’une sauce to m a te anonyme et d’un fromage douceâtre. D’une co n s i sta n ce
agréable, ces variantes « ethniques », elles aussi, donnent tout d’un seul tenant,
en une seule bouchée, avec leur habituelle quantité de gras, et les save u rs
ca ra c t é r i stiques d’ingrédients authentiques se retrouvent balayées par le raz-
de-marée du sel et du sucre.
Les gastronomes ont tendance à voir dans le fast-food un exemple de la mode
« crade ». Seulement, il convient à la majeure partie d’entre nous. Sans équi-
voque, sans détour, il nous propose des aliments et des sensations que le genre
humain recherche depuis toujours sans avoir pu les obtenir jusqu’à présent,
sauf exception. En ce sens, le fa st-food repré s e n te l’une des innovations culi-
naires les plus spectaculaires de l’ h i sto i re – un type d’alimentation destiné à
tous, sans considération d’âge, de sexe ou de culture. C’est par excellence un
produit du melting pot et sans doute ne pouvait-il naître qu’en Amérique, terre
d’accueil du plus gigantesque déferlement d’immigrants jamais rassemblés en
un seul endroit : une cuisine de l’abondance, conçue dans un foyer pluriethnique
mais dépouillée de tout particularisme culturel et élaborée jusqu’à atteindre le
dénominateur commun de l’humanité.
4. Il s’agit ici de la pizza qu’on tro u ve aux Éta t s - U n i s : de forme ronde mais en général plus
g rande qu’en Fra n ce, elle est découpée en portions triangulaires. Rectangulaire en Ita l i e ,
elle est aussi vendue en portions.
5. Petits pains ronds à la farine de froment. Le bun n’est autre que le pain du hamburger.
6. P i c k le s : légumes co n s e r vés dans du vinaigre (cornichons, ca ro t tes, etc.) et souve n t
découpés en tranches fines (NdT).
7. D’origine anglo-indienne, le chutney est typique du « sucré-salé ». Plus ou moins acidulé selon
ses variantes, il possède une consistance et parfois un goût proches de la confiture (NdT).
92
Document 7
Dans chaque pays, les aliments consommés racontent le lien différent que les
hommes entretiennent avec leur environnement.
Il y a quelque chose d’émouvant à entrer dans l’intimité domestique des familles
du monde. À contempler, à la manière de natures mortes, le détail des aliments
qu’elles consomment en une semaine. Alors que les hommes ne se sont jamais
a u tant nourris hors de leur domicile et que les femmes n’ont jamais si peu
cuisiné, en tout cas dans les pays riches. Mais, malgré l’ évolution des modes
alimentaires, ces nourritures terrestres, to u tes denrées co n fondues, re stent
l’un des liens les plus forts entre les êtres humains. Les repas en commun ont
toujours été rares et recherchés parce que l’homme est souvent contraint de se
nourrir de ce qu’il emporte avec lui, consomme sur le pouce, ou pioche au gré
de ses envies et de sa faim.
En Amérique du Nord, mais aussi en Chine, les repas pris à la maison sont
s o u vent réservés au soir ou au dimanche. En Europe, ils re stent de petites
mises en scène dont la forme superlative est le banquet. Là, y coule le vin qui
a ccompagne la bonne chère, les bons mots, les chansons, les disco u rs. Plus
intimement, dans le monde entier, les fa m i l les aiment organiser ces agapes
pour marquer un événement important, se soustraire à l’obligation de manger
rapidement, n’importe où, dans la rue, le train ou sur le lieu de tra vail. Les
Français ont consommé l’an dernier plus de six cents millions de sandwiches, la
plupart mangés en marchant ! Avec la généralisation du « manger rapide », on
est au cœur du plus grand bouleve rsement alimenta i re depuis l’ i n vention des
conserves et de la réfrigération : l’alimentation jusque-là affaire presque exclu-
sivement familiale, est devenue une marchandise d’origine industrielle. Jadis, le
jardin, le champ et le verger fournissaient la table. Les traces de ce lien direct
entre un produit naturel et ses co n s o m m a te u rs sont enco re visibles sur le s
photos de Peter Menzel. Au Bhoutan, la famille pose devant ses sacs de grains.
En Équateur, elle fait ce rcle devant poireaux et bananes sortis de son champ.
Mais les marques sont entrées progressivement dans les cuisines : les embal-
lages co lo rés offrent une gamme de plus en plus fournie de prêt-à-manger.
Finies, les longues heures derrière les fourneaux, tout peut être prêt en un tour
de main. On passe alors d’un travail de cuisine qui transformait des produits par
la cuisson à un assemblage de plats préparés.
C e t te nourriture - m a rchandise ne date pas d’hier. Depuis le Moyen Âge, le s
commerçants recherchent des produits fiables et rares pour faire des affaires.
Fiables pour voyager à bord des navires au long cours, où les denrées s’abîment
93
S facilement : les « biscuits », gâteaux cuits deux fois pour éviter la dégradation
en mer, ont été mis au point dans les villes portuaires comme Gênes, Venise,
Nantes ou Londres, là où arrivait le sucre des tropiques et d’où partaient les
marins. Fiables pour le commerce : les Hollandais, spécialistes des épices avec
leur pre stigieuse Compagnie des Indes orienta les, ont fabriqué, pour le
commerce au long co u rs, des fromages à pâte cuite d’un st y le nouveau, sans
goût très prononcé, afin d’éviter les réticences des mangeurs, mais vantant les
valeurs sûres de villes comme Gouda ou Edam. Partout, la publicité va devenir
un puissant levier pour la diffusion des marques. Le Suisse Julius Maggi
invente, pour vendre des saveurs de viande, le célèbre bouillon Kub en 1907, au
moment où Braque et Picasso révolutionnent la peinture avec le cubisme. Tout
comme Banania fe ra l’ é loge du chocolat avec un tira i l leur sénégalais qui
devient, pour les Français, l’ami Y’a bon. Aujourd’hui, ce sont des firmes indus-
trielles américaines qui approvisionnent par avion durant l’hiver les familles du
Groenland en conserves, produits lyophilisés, condiments, céréales, café. Seuls
les produits de la chasse et de la pêche peuvent donner au repas inuit une
« couleur locale », encore que les pollutions marines compromettent ces acti-
vités traditionnelles.
Plus vaste encore est le mouvement de brassage des boissons. Car les hommes
ont to u j o u rs recherché des boissons sûres, qui ne tra n s m e t tent pas de mala-
dies. Eau bouillie ou breuvage issu de la fermentation, les deux solutions ont eu
le u rs amate u rs, avant le boom des eaux minéra les dans les pays riches. Les
Anglais ont adopté le thé au moment où ils ont colonisé l’Inde, puis en ont fait
une boisson mondiale. Depuis l’Antiquité, la plante caucasienne qu’est la vigne a
gagné la Méditerranée, puis l’Europe au Moyen Âge et le Nouveau Monde à la
faveur du christianisme et de la colonisation. Aujourd’hui, la Chine consomme et
produit à son tour de plus en plus de vin, tout comme le Japon.
La bière est enco re plus inte r n a t i o n a le : elle est devenue la première boisson
alcoolisée au monde, grâce aux ast u ces des chimistes, des industriels et des
marchands qui multiplient ses conditionnements (verre, aluminium, plastique) et
innovent dans les save u rs. Après le houblon, introduit par l’abbesse allemande
Hildegarde de Bingen au XIe siècle, c’est la tequila, le rhum, la framboise, l’ a b-
sinthe, le gingembre qu’on marie à la bière pour étonner les amate u rs. Les
Tchèques, premiers consommate u rs avec 160 litres par habitant et par an, tien-
nent autant à la qualité de leur pils qu’à la convivialité qu’elle procure, comme les
Anglais qui ne l’aiment pas pendant les repas mais l’apprécient pour ses vertus
socialisantes dans les pubs et pendant les matches de rugby.
Plus discrète est la viande dans l’alimentation des familles du monde. Au Tchad
comme sur tous les marchés des pays pauvres où les systèmes de conservation
sont rustiques, les animaux sont vendus vivants. Comme au Moyen Âge, on les
tue chez soi. Chez nous, la viande est « désanimalisée ». Le problème que pose
la mise à mort d’un animal était jadis réglé par des rites comme les sacrifices
religieux ou la chasse. Aujourd’hui, les liens avec les animaux ont changé : élevés
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loin des hommes, ils sont abattus loin des hommes et la pré p a ration bouchère
masque tout ce qui pourrait évoquer l’animal. Cette question ta raude le s
Scandinaves sensibles au bien-être des bêtes, mais pas les Anglais qui réfléchis-
sent plutôt au végétarisme, alors que dans les pays latins d’Europe, on se soucie
surtout de chercher de la bonne viande. Les interdits alimentaires sont très puis-
S
sants vis-à-vis de la viande. Le porc est exclu du monde islamique et juif, ce qui a
indirectement favorisé la consommation de volailles au Moyen-Orient et la diffu-
sion de l’oie et du foie gras, qui était déjà connu des anciens Egyptiens.
Il y a donc beaucoup de géographie dans ce qu’on mange. La nourriture est l’un
des liens les plus intimes à l’environnement, au monde. Sur sa table ou entre
ses mains, le mangeur fait la synthèse du proche et du lointain. Les anthropo-
logues ont mis en év i d e n ce ce para d oxe chez l’ h o m m e : omnivo re, il est
confronté sans cesse à des choix. « Qu’est-ce que je peux manger ? Qu’est-ce qui
va me faire du bien ou du mal ? » Pour se guider, l’homme s’appuie sur ses
saveurs préférées, issues de son enfance, mais il est piqué par la curiosité de
co n n a î t re d’autres plats. To u j o u rs avec la peur inconsciente d’être intoxiqué.
D’où le besoin d’être guidé, notamment par l’origine géographique, l’estampille
de lieux qui bénéficient d’une réputation. Car « manger, c’est incorporer un terri-
to i re », selon le géographe Jean Brunhes. Lorsque la fa m i l le Madsens, du
Groenland, boit du Coca-Cola et mange des céréales, elle adhère aux valeurs de
l’Amérique et fait confiance à ses industriels. Mais ce n’est pas tout. Elle se
« dépayse », elle voyage. La famille Mustapha, du Tchad, plus démunie, n’a pas
de quoi satisfa i re ce désir du nouveau. Elle re ste prisonnière d’une éco n o m i e
autarcique et, en cas de difficulté, de l’aide alimentaire internationale.
La géographie est au cœur du débat mondial sur l’alimentation. Faut-il laisser
faire l’industrie agroalimentaire qui veut prendre en charge l’alimentation des
hommes, en mettant sur le marché des produits standardisés, au goût atténué
et sans autre référence qu’une marque ? Ou faut-il s’attacher à développer les
liens avec les territoires de production, afin de limiter les crises sanita i res et
pour que les mangeurs sachent ce qu’ils ont dans leur assiette ? C’est l’enjeu
du match qui aura lieu lo rs de la réunion de l’ O rganisation mondiale du
commerce, en décembre 2005 à Hong-Kong. Les pays anglo-saxons, où l’indus-
trie est très puissante, s’opposeront aux pays latins – Italie, Espagne, France et
Grèce – qui défendent des te r ro i rs où se co n struit une identité alimenta i re
fondée sur des paysages et une attention à l’ e n v i ronnement. Aujourd’hui, la
question est de savoir si l’on est en train de construire un goût « mondial ». La
hausse du niveau de vie, on le voit dans les ex-pays du bloc communiste, modifie
la composition des paniers. Elle accompagne l’abandon pro g re ssif par le s
femmes de la cuisine. Il re ste bien l’abondance des fruits sous les tropiques, mais
ne risque-t-on pas de les voir dispara î t re dans les laitages et les sodas et de
perdre le lien avec ceux qui les produisent ? Heureusement, demeure la passion
de découvrir, de tenter sa chance avec de nouvelles saveurs, de créer toujours
plus de liens grâce à cet irrépressible besoin : le goût des autres.
95
S Document 8
LE MONDE À TABLE
Tous les aliments que les familles du monde consomment
en une semaine.
96
l’an, pour la cérémonie de la puja, un boucher est autorisé à tuer un cochon que
tous les habitants dégustent alors en commun.
97
S Orlando Ayme, 35 ans, et sa femme Ermelinda, 37 ans, vivent dans le village de
Tingo, à 3 000 mètres d’altitude, dans les Andes. Pour nourrir leurs huit enfants,
ils disposent de quelques arpents d’une terre pauvre et exposée aux vents. Elle
fournit l’essentiel de leur alimenta t i o n : pommes de te r re, haricots, lentilles,
oignons, maïs, blé et bananes plantains. « Plus bas, la terre est fe rtile, ass u re
Orlando, mais beaucoup plus chère ! » Quand les finances le permettent, des
carottes et des tomates s’ajoutent au menu. La viande est rare. Les Ayme n’en
consomment que lorsqu’ils abattent un cochon ou un poulet, une ou deux fois
par an. Le lait provient de l’unique vache qui ne donne guère plus d’un litre par
jour. Le troupeau d’une cinquantaine de moutons, qu’ils partagent avec d’autres
membres de la famille, constitue leur seule réserve. Les bêtes ne servent pas à
la nourriture mais à fournir un peu d’argent lorsqu’ils les vendent au marché.
Généralement, c’est Orlando qui se charge des courses au marché de Simiatug,
la ville située à 5 kilomètres de chez eux. Pour fa i re plaisir aux enfants, il lui
arrive de leur offrir du sucre brun coupé en tranches et enroulé dans des
fe u i l les en guise de friandise. Éloignée de tous les produits manufa c t u rés, la
famille a un rêve, goûter une fois des sardines en boîte.
98
S
é t i q u e t tes alimenta i res. Graig, lui, cherche à fa i re les co u rses le plus vite
possible, en choisissant les marques les moins chères. Sa femme opte pour des
aliments peu salés, maigres, achète rarement des aliments en boîtes et favorise
les produits bio, les fruits et les légumes frais. Pour donner le bon exemple, ils
mangent le plus souvent possible à la maison, mais emmènent parfois leurs
e n fants dans des fa st - foods. Se co m p o r ter comme il faut n’est pas fa c i le ,
a vouent ces parents consciencieux qui re g re t tent les te n tations sucré e s
auxquelles sont soumis les jeunes.
99
S • Resta u rants : McDonald’s : 2 menus enfants, Fresh Choice (éta b l i ss e m e n t
traditionnel) : 1 repas familial par mois.
• Divers : nourriture pour chat : 1,5 kg.
100
Une semaine de nourriture pour 4 personnes : 375 €
• C é ré a les et fécule n t s : flo cons de cé ré a le s : 1,5 kg, pains dive rs : 4,5 kg ,
croissants : 250 g, pâtes : 1 kg, farine : 300 g.
• Produits laitiers : Lait : 14,5 l, yaourts : 6,5 kg, fromages.
• Viandes, poissons et œufs : bœuf : 1,7 kg, porc : 630 g, charc u te r i e : 600 g,
S
poisson surgelé : 600 g, filets de harengs : 400 g.
• Fruits et légumes : ora n g e s : 4 kg, pommes : 1,8 kg, bananes : 1,1 kg ,
raisins noirs : 300 g, chou blanc : 1, tomates-cerises : 1,5 kg, petits pois
(surgelés) : 1 kg, oignons 1,2 kg, concombres : 1 kg, navets : 1 kg, laitues : 4,
fe n o u i l s : 800 g, ro q u e t te : 500 g, ca ro t te s : 500 g, poire a u x : 500 g,
champignons : 300 g, radis : 280 g, poivrons : 700 g, ail : 6 g.
• Condiment : huile d’olive : 480 g, vinaigre : 30 cl, moutarde : 250 g, vinaigrette :
45 cl, sucre : 375 g, ketchup : 240 g, sel : 200 g, lard : 550 g, margarine : 125 g,
olives et amandes : 300 g, paprika : 100 g, poivre : 50 g, origan : 6 g.
• Desserts snacks : chocolat : 500 g, gâteaux : 500 g, pistaches : 300 g, roulés à
la cannelle : 2.
• Plats cuisinés : Pizzas surgelées : 1,1 kg, pâtes surgelées : 1 kg, légumes
surgelés : 1 kg, goulasch : 1,1 kg, soupes en boîte : 770 g, conserves : 700 g,
sauce tomate : 400 g, tomates séchées : 250 g, soupes instantanées : 200 g.
• B o i ss o n s : eau pétillante : 14 l, Bière : 4,8 l, jus de fruits : 7,5 l, vin : 2,8 l,
cacao : 400 g, café : 250 g, thé aux fruits : 200 g, thé noir : 25 sachets.
• Divers : compléments vitaminés : 260 g, vitamines : 167 cachets.
101
S Document 9
102
Document 10
Chips violet tes ou sirops bleus égaient les repas. Et inspire nt les industriels qui
élaborent les plats de demain.
La couleur se posait déjà sur la table, les verres, les serviettes en papier et les
petits gâteaux redessinés par Ladurée ou par Pierre Hermé. Voici qu’elle gagne
l’univers du salé. Chips de fleurs, farfalles zébrées à l’encre de seiche, chocolat
vert au thé matcha, sel rouge ou noir, riz mauve… trônent sur les étals des
épiceries chics. Sans compter ces légumes oubliés comme la pomme de terre
violette Vitelotte, dont on fait des chips colorées, le poivron orange ou bleu (venu
de Hollande) la mini-tomate jaune en forme de poire.
« Tout a commencé il y a deux ans, avec les œufs de poisson Petrossian, teintés en
jaune grâce au pastis, rose vif (avec des baies), bleu (curaçao) et vert (carda-
mome) », ra conte Sylvain Gaudu, directeur du magasin Lafa ye t te Gourmet, à
Paris. « Depuis, la couleur se fait plus pré s e nte, des chips de bet te rave ou de
carotte aux sucres multicolores jusqu’aux plats de viande, agrémentés de végétaux
pimpants. Les consommateurs apprécient de pouvoir décorer leur assiette avec un
minimum de mise en scène. »
Dans le domaine des boissons, Suze s’inspire des rouges à lèvres pour proposer
son Gloss, un apéritif à base de griotte et de gingembre, à la robe cerise. Une
ancienne limonaderie, près de Calais, Les Gosses, revit depuis que ses artisans
ont lancé une gamme pétillante teintée et parfumée à la violette (avec de vraies
fleurs), à la pistache, au caramel ou à la clémentine.
Le succès de ces aliments couleur bonbon donne des idées à certains. Dans son
a telier, derrière les Champs-Élysées, à Paris, une laborantine mélange de la
pâte à modeler, des perles et du sable avec quelques miettes de nourriture. Sa
m i ss i o n ? Pré f i g u rer les aliments de demain pour les grands groupes de
l’agroalimentaire, tels McDonald’s ou Nestlé. « La couleur est primordiale puis-
qu’il faut ravir les yeux ava nt les papille s », explique Édouard Malbois, PDG et
fo n d a teur d’Enivra n ce, l’un des pre m i e rs bureaux de st y le alimenta i re au
monde, créé en 2001. « Nous travaillons aussi, explique-t-il, les effets de matières,
le cra q u a nt ou le moelleux, en te n a nt co m pte des nouveaux co m p o rte m e nt s
alimentaires des Français. »
103
S grignoter « équilibré » dans le métro ou dans sa salle de bains. Avec de tels en-
cas bariolés, s’ils voient le jour, les industriels entendent conquérir la clientèle
des enfants – peu enclins à manger des légumes – et s’absoudre, à terme, de leur
responsabilité dans la progression de l’obésité.
« Le ve rt et le blanc sero nt à l’honneur ces prochains mois, prédit M. Malbois, car le
souci de l’industrie est de fabriquer du naturel emballé qui ne soit pas eff raya nt. Le
blanc, nuageux, est synonyme de virginité : zéro ca lorie par exemple. Le ve rt est cham-
pêtre : il renvoie les urbains au verger ou au potager, sans qu’ils y aille nt vraiment. »
L’apparence des aliments revêt tant d’importance qu’elle a donné naissance au
métier de designer coloriste culinaire. À 24 ans, Caroline Gomez fait partie de la
petite dizaine de personnes qui l’exe rcent en Fra n ce. Elle tra n s forme buffe t s ,
vernissages ou cocktails en petits plaisirs inventifs, mettant ainsi au point des
menus monochromes ou à thème (des bijoux co m e st i b les, par exe m p le ) .
« L’idée, dit-elle, n’est pas de manger un couscous bleu mais d’assortir la couleur,
la saveur et le moment, pour réanimer le quotidien. »
104
l’ont adopté lo rs des élections législatives outre-Rhin en septe m b re. Quant à
François Bayrou, il a pris soin d’apparaître à la tribune de l’université d’été de
l’UDF sur un fond orangé.
Nombre d’entreprises se sont aussi ralliées au panache de cette couleur. De la
compagnie aérienne easyJet à France Télécom – qui s’efface devant la marque
S
Orange –, en passant par EDF.
Oubliant le strict bleu-blanc-rouge, son nouveau logo « dénationalise » l’entre-
prise publique en adoptant une petite étincelle flamboyante. Écrire avec un stylo
Mont Blanc ? Trop guindé. Sortez plutôt de votre poche une pointe Bic orange.
L’ o range revient de loin. Cette te i n te a longtemps été réputée re b e l le, vo i re
maléfique – au Moyen Âge, les roux et les rousses étaient supposés entretenir
des accointances avec le Malin. Plus tard, elle a été taxée au mieux de « cheap »
ou de « populaire », au pire de vulgaire. Une co u leur bâta rde, criarde, surex-
ploitée par les cré a te u rs des années 1970 et dont l’imaginaire semblait peu
fécond.
Tout cela n’a plus co u rs. Réhabilité, l’ o range effectue un re tour en majest é .
Depuis quelques années, des marques de luxe telles Hermès ou Veuve Clicquot
qui lui ont to u j o u rs été fidèles ne perdent pas une occasion de se draper en
o range. Dans les bureaux de st y le et chez les chass e u rs de tendances, on
confirme que les choses ont bien changé. « Énergique, presque subversive, c’est
la couleur du challenger, de l’outsider. Elle exprime une forme d’urgence », consi-
dère Edith Keller, présidente du bureau de st y le Carlin International. Et puis,
l’orange convient à tous les teints et donne bonne mine.
Un tel succès ne pouvant, par nature, durer trop longtemps, il convient de s’in-
terroger sur le prochain coloris dont il faudra s’enticher. Le rose paraît faire un
excellent candidat. D’aucuns y voient déjà la couleur de la modernité. Son atout
principal est de ne plus appara î t re exc l u s i vement comme un symbole de la
féminité et il a entrepris une percée remarquée dans la garde-robe masculine.
Désormais, le pull rose buvard est un attribut très « bobo ». Et l’on aperço i t
même quelques reflets saumon sur les maillots des joueurs de football.
105
S Document 11
L’INNOVATION ALIMENTAIRE
Innovation et invention
Qu’est-ce qu’un produit alimentaire nouveau ? Bien souvent l’innovation affichée
par le fabricant n’est que superficielle : le produit a simplement changé d’em-
ballage, ou il a subi une petite modification de recette… C’est que l’innovation
est un puissant argument de vente, en témoignent les étiquettes fluorescentes
« Nouveau ! » apposées sur les produits.
Si l’on entend par innovation alimentaire la création ex nihilo d’un produit ; si l’on
parle de véritable invention alimentaire, les exemples sont rares : peut-être le
Coca-Cola, le Nutella. En fait, l’innovation peut résider dans les diverses compo-
santes du produit (le procédé de fa b r i cation, le conditionnement, l’utilisation,
l’emballage…), ou simultanément dans plusieurs de ces composantes. Par
exemple, les plats cuisinés surgelés en sachets portionnables se caractérisent
par un procédé de fabrication nouveau, un conditionnement nouveau (le sachet
plastique), une utilisation nouve l le par le co n s o m m a teur (des portions indivi-
duelles à faire cuire à la poêle…).
Il y a une différence entre lancer sur le marché un téléphone porta b le et une
bière sans alcool. Le processus d’innovation dans le domaine de l’alimentation
possède des caractéristiques et des contraintes spécifiques, qui sont liées aux
particularités du secteur industriel, à l’évolution de la consommation, mais
surtout au rapport très singulier de l’individu à la nourriture. Pour prendre le
risque de lancer un produit nouveau, il vaut mieux connaître un tant soit peu les
106
attentes des consommateurs. Or, les comportements nutritionnels sont de plus
en plus éclatés et circo n stanciés, d’où la difficulté à anticiper leurs réactions.
Une « volatilité » qui se manifeste de diverses manières : des comportements
a m b i va lents (par exe m p le entre les deux pôles innovation et tradition), des
consommateurs plus informés et plus sensibilisés à certains paramètres (sécu-
S
rité alimentaire, facilité d’usage, environnement…), une population qui vieillit.
Nouveauté ou traditions
Vis-à-vis d’un produit nouveau, le co n s o m m a teur va se ré f é rer à un certain
nombre d’attentes (plaisir, facilité d’usage ou de préparation…), et vérifier que le
produit lui correspond. Si ses attentes sont déçues, la probabilité est très forte
qu’il n’y ait pas de réachat. Il importe donc de savoir comment le consommateur
s’y prend pour vérifier que le produit a les qualités qu’il espère. Bertil Sylvander,
économiste à l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) l’illustre à
travers une enquête sur le fromage au lait cru. À la question « qu’est-ce que la
qualité d’un fromage bleu ? », les consommateurs répondent, par ordre décrois-
sant : le goût, la conservabilité, le prix, le caractère naturel du produit. Si on leur
demande quels sont les facteurs de cette qualité, ils répondent : la tradition, et
le soin du professionnel. Enfin, quand on leur demande quelles sont les garan-
ties demandées au produit, les enquêtes mettent en avant d’une part l’ a p p a-
rence et, d’autre part, la confiance, la ce r t i f i cation et la marque (qui vont de
pair). Dans ce cas, observe B. Sylvander, on s’ a p e rçoit que c’est moins le
symbole du lait cru qui est important, que la manière dont les pro fe ssionnels
ont présenté ce produit.
107
S Pour ré p o n d re à l’ a n g o i sse générée par l’acte alimenta i re et aux incertitudes
créées par l’innovation, les consommateurs se réfèrent à des points de repères,
des signes de garantie. Les marques et les critères de certification (appellation
d’origine co n t rôlée, par exe m p le) servent à cela, mais leur importa n ce est
variable selon le type de produit, les caractéristiques du consommateur, le pays.
Ainsi, en Gra n d e - B retagne, le dist r i b u teur est un vé r i table pre s c r i p teur : le
consommateur accorde beaucoup d’importance à la marque du distributeur. On
co n sta te également que la ce r t i f i cation fonctionne, mais seulement pour une
p e t i te partie des co n s o m m a te u rs. En même temps, elle est associée à la
m a rque, autrement dit la ce r t i f i cation remplit un rô le de tremplin pour la
marque.
Les préférences alimentaires des individus ont tendance à se structurer autour
d’axes de représentations. L’opposition entre innovation et tradition fait partie de
ces « dilemmes » du consommateur. Celui-ci veut du nouveau, mais en même
temps il éprouve une grande attirance pour des produits à connotation « tradi-
tion, naturel, artisanat, etc . ». Dès lo rs, comment marier tradition et
innovation ? C’est évidemment une question que se posent beaucoup d’indus-
triels. Exemple avec le cas du pâté Henaff, produit traditionnel par excellence,
qui ex i ste depuis 1907, qui fait partie des habitudes de co n s o m m a t i o n
b re tonnes, et fonctionne comme un marqueur culturel. Tout en veillant à
préserver l’identité du produit, la société Henaff a cherché à introduire toute une
série d’innovations, dans les pro cédés (avec l’adoption de méthodes nouvelles
pour l’élevage des porcs et la prise en compte des progrès génétiques), et dans
le conditionnement (par exemple pour l’ouverture de la boîte). Autre illustration
des relations ambiguës entre innovation et tradition : les nouvelles chaînes de
bistros à l’ancienne qui fonctionnent avec des méthodes « innovantes » tout en
faisant référe n ce à des va le u rs traditionnelles, ou les plats cuisinés « à l’ a n-
cienne » vendus en boîte ou en surgelés. Dans tous ces cas, la valeur tradition
tient beaucoup au discours qui entoure le produit, à son emballage symbolique.
108
par le co n texte immédiat sur l’évaluation d’un produit, voire sur le comportement
alimenta i re lui-même. Pour ce fa i re, on a pro cédé en deux éta p e s . On a to u t
d’abord créé un produit (une mousse de fruits sans parfum), et demandé aux
co n s o m m a te u rs de noter le produit dans des « co n tex te s » co n n o t é s
positivement ou négativement (matérialisés par des diapositives présentant des
S
situations plus ou moins « agréables », te l les que : des enfants qui pleurent,
une situation d’examen, un annive rs a i re, un pique-nique en fa m i l le…). Les
résultats sont les suiva n t s : note moyenne en pré te st : 12,5/20 ; en co n tex te
positif : 16,5/20 ; en co n tex te négatif : 12/20 ; en co n tex te mixte : 12/20. Ainsi,
conclut Philippe Bernard, on augmente l’ a cce p tabilité du produit en lui
associant des affects positifs. La seconde étape cherchait à voir si l’on pouvait
aller jusqu’à modifier le comportement. D’où la mise en place d’une expérience
dans un re sta u rant co l le c t i f. On s’ e st installé à l’ e n t rée de la queue du
re sta u rant et on a soumis aux gens un quest i o n n a i re, les questions éta n t
formulées soit pour créer un contexte positif, soit pour créer un contexte négatif
vis-à-vis d’un produit : les pâtisseries. À la sortie de la chaîne, on observe si les
gens ont pris une pâtisserie, et on compare avec leur consommation habituelle de
pâtisserie. Résultat : ceux qui ont été soumis au co n tex te négatif consomment
nettement moins de pâtisserie.
L’environnement de l’ a c te de consommation peut donc créer un co n d i t i o n n e-
ment dans la perception d’un aliment. Ajoutons que de nombreuses recherches
ont montré que, dans le domaine alimentaire, il suffit souvent d’un seul condi-
tionnement négatif pour créer une inversion alimentaire, alors qu’en termes de
préférence, le conditionnement positif doit être répété.
109
S La notion de santé est une des pré o ccupations nouve l les formulées par le s
consommateurs. Des industriels ont donc été tentés d’innover par l’utilisation
du co n cept d’aliment-santé, en proposant par exe m p le des produits laitiers
sans cholestérol. Pourtant, ces produits ont été un échec. Selon Frédéric Oble,
p ro fe sseur à l’IGIA (Institut de gestion international agro a l i m e n ta i re), ce t
insuccès s’explique de diverses manières :
– le concept d’aliment-santé ne faisait pas sens aux yeux des consommateurs,
introduisant une confusion entre aliment et médicament ;
– ces produits subissaient une double concurrence : celle des produits végétaux
qui n’ont pas de cholestérol, et celle des produits laitiers traditionnels qui ont
l’avantage d’avoir bon goût et d’être moins chers ;
– les contraintes d’ordre réglementaire et scientifique sont très importantes sur
de tels produits.
110
Innovation et imaginaire collectif
La néce ss a i re co o p é ration entre tous ces acte u rs n’est pas fa c i le à mettre en
œuvre. Les relations entre les industriels de l’agroalimentaire et les gra n d e s
marques de distributeurs sont souvent difficiles. C’est notamment le cas des
PME qui cherchent soit à mettre sur le marché un produit nouveau, soit à être
S
sous-tra i tant pour la fa b r i cation de produits innovants sous la propre marque
d’un distributeur. Pourtant, les distributeurs peuvent avoir un rôle déterminant.
Prenons l’ exe m p le des viandes sous-vide qui peuvent se co n s e r ver jusqu’à
21 jours, et qui ont connu un essor considérable : selon Olivier Beyer, respon-
sable du service qualité chez Monoprix, une telle innovation n’aurait pas fonc-
tionné s’il n’y avait pas eu un petit groupe de commerçants qui y ont cru, qui ont
conseillé et aidé les entreprises fabricantes. Bien sûr, le système compte des
acteurs plus puissants que d’autres : grands groupes industriels comme Nestlé
ou Danone, experts… Par aille u rs, ce système d’action n’est pas un îlot de
spécialistes déterminant entre eux les produits nouveaux et les lois du marché.
Nous avons vu combien l’aliment, plus que tout autre objet de consommation,
est porteur d’imaginaire, de symbole, d’identité, de désirs, d’angoisses, etc. Ces
ca ra c t é r i stiques obligent les producte u rs à co n cevoir le u rs produits co m m e
porteurs de va le u rs (par exe m p le, pour une eau minérale, la légèreté, l’ é q u i-
libre, le naturel). Ils ont donc à mettre en œuvre toute une « ingénierie immaté-
rielle », autrement dit l’ a c t i vation de représentations. Cette tâche est dévo l u e
aux publicita i res et aux hommes de marketing. Mais co n t ra i rement à ce que
pensent souvent ces derniers, les « tendances » ou les « valeurs » mobilisées
pour vendre les produits ne sont pas « inventées » par eux : elles émanent de la
société, à travers une histoire, une culture, un inconscient collectif, qu’ils mobi-
lisent de fa çon plus ou moins pertinente selon les cas. Ainsi, l’ i n n ova t i o n
a l i m e n ta i re n’est que très exce p t i o n n e l lement le produit de l’intuition d’un
i n ve n teur génial. Elle est un pro ce ssus ancré dans un jeu d’acte u rs et un
ensemble de valeurs et de pratiques collectives.
111
S Document 12
Parmi tous les aliments, le vin a une signification symbolique et sociale trè s
particulière.
Sa consommation est le plus souvent liée à une situation de sociabilité et de
convivialité, et participe directement à l’entretien du lien social. D’où la néces-
sité de prendre en co m p te l’ i n f l u e n ce de la situation de consommation sur la
perception d’un vin ou d’une boisson dérivée. Une te l le démarche a permis à
François d’Hauteville, professeur à l’ENSA de Montpellier, d’expliquer pourquoi
la mise sur le marché de vin allégé en alcool n’a pas fonctionné. La recherche
de F. d’Hauteville, menée auprès de 400 personnes, cherchait à mettre en
év i d e n ce les relations entre : une liste de 17 pro d u i t s - b o i ssons (bière, jus de
fruit, vin…), une liste de 14 situations de consommation (repas classique, repas
d’affaire, fête, soif-détente…), et des profils d’attente (déterminant les boissons
les plus pertinentes par rapport à telle ou telle situation).
112
Document 13
113
S la première croisade, soit du XIe siècle, bien avant l’arrivée en Europe du haricot,
plante américaine. L’ i n n ovation dans ce cas réside dans la substitution du
haricot aux fèves qui constituaient originellement la base du produit. Et il faut
croire que cela pré s e n te un ava n tage économique, gustatif ou de préparation
pour le consommateur pour comprendre sa réussite.
Les huîtres à fil pour ouverture rapide, annoncées dès 1995, proposées sur le
marché en 1996, sont l’exemple d’une innovation manquée (pour l’instant). Dans
ce cas, il s’ a g i ssait d’insérer un fil ento u rant le pied de l’huître lo rs d’un des
pro ce ssus d’élevage, fil se terminant par un anneau sortant de la co q u i l le. Il
suffisait, par la suite de tirer sur cet anneau pour que le pied sectionné
permette une ouverture rapide du coquillage. La réussite commerciale n’a pas
été au re n d e z - vous. Outre le surcoût qu’entraînait cette « p ré p a ra t i o n » de
l’ h u î t re et des problèmes techniques, le pro cédé a rebuté bon nombre de
co n s o m m a te u rs en assimilant, en quelque sorte, l’ h u î t re à une boîte de
conserve à ouvrir en tirant sur la languette. Ce n’était plus la fraîcheur océane
dans leur assiette… Les surgelés, apparus massivement sur le marché il y a à
peine une tre n taine d’années, ont connu un succès inco n te sta b le. Ils permet-
taient d’avoir sous la main des produits frais à cuisiner, sans les contraintes du
marché et de la pré p a ration préalable. Très vite, au-delà des produits isolés,
co n st i t u a n tes de la pré p a ration finale, des plats cuisinés sont apparus.
Toutefois, ces derniers, après un succès immédiat, ont connu un certain déclin :
le co n s o m m a teur co n s i d é rait que le temps de ré c h a u f fement était trop long
(25 à 35 minutes) et la quantité parfois trop importante, compte tenu de l’obliga-
tion de consommation immédiate de la pré p a ration. Aussi, l’industrie agro a l i-
mentaire a su mettre au point des produits nouveaux. Il s’agit toujours de plats
préparés ; mais cette fois ils sont présentés en sacs dont le consommateur ne
p rend que la quantité néce ss a i re en fonction du nombre des convives. Par
aille u rs la préparation est ré d u i te à quelques minutes de ré c h a u f fement dans
une poêle. La prouesse technique qui est derrière est inconnue par l’utilisateur ;
mais la facilité d’emploi et la flexibilité ont assuré la réussite commerciale.
L’innovation dans le domaine alimentaire n’est pas nouvelle. Depuis toujours les
hommes ont sélectionné des produits, ont imaginé des modes de préparation
divers et des associations nouvelles. C’est ainsi, petit à petit, que se sont mis en
place des modes de consommation particuliers à des groupes humains, to u t
comme les connaiss a n ces nutritionnelles. Toutefois, les pro g rès actuels des
sciences et des techniques permettent une production à la fois plus rapide, de
qualité surveillée et constante, répondant à des critères d’hygiène et de santé
inconnus jusqu’alo rs. Les progrès des industries agro a l i m e n ta i res sont sans
pré cédent. En co n t repartie leur pérennité est liée à la possibilité de proposer
des produits nouveaux, innovations dans le domaine, permettant non seulement
de nourrir un public qui, dans nos sociétés d’abondance, ne connaît plus la
famine, mais aussi d’assurer leur réussite commerciale.
114
L’ i n n ovation, bien entendu, n’est pas un processus limité à ce seul secteur de
l’industrie humaine. On peut, en schématisant, définir une typologie de l’innova-
tion (inspirée d’une analyse de S. Lahlou) :
a) Le repositionnement, c’est - à - d i re l’ i n t roduction d’une nouve l le forme de
produit global dans une forme ex i stante. C’est ainsi, par exe m p le, qu’à ses
S
débuts, la télévision était présentée (ou cachée) en fonction des tendances de
l’ameublement de l’époque.
b) La reformulation, qui est l’introduction d’une nouvelle forme de produit dans
une classe existante : les pâtés ne sont plus, désormais, confectionnés seule-
ment à partir de viandes.
c) La production originale, qui est l’ i n t roduction d’une nouve l le classe de
produits. Il convient toutefois de souligner que la création ex nihilo de produits
qui n’existaient pas auparavant est rare. Cela est particulièrement vrai dans
le cas des produits alimentaires.
d) L’innovation dans les procédés, c’est-à-dire celle qui concerne avant tout les
techniques de production, par exemple : la lyophilisation ou encore celle des
surgelés portionnables, mentionnés plus haut, en font partie.
Appliquée aux aliments, l’innovation soulève par rapport à d’autres produits des
questionnements spécifiques. Cela est lié avant tout à la nature et au sta t u t
particulier de l’aliment. Dans l’espèce humaine, bien qu’obéissant à des méca-
nismes et déterminants biophysiologiques précis et spécifiques (par exemple la
nature de notre métabolisme ou le fait que l’homme soit omnivo re), manger
s’apprend. Or, il ne suffit pas qu’un produit soit biologiquement mangeable pour
qu’il soit, culturellement et individuellement, comestible.
L’apprentissage consiste dans ce cas dans la constitution du répertoire culturel
des produits acceptés et considérés comme comestibles par le groupe humain
auquel on appartient. Apprendre cela est un des actes majeurs de la socialisa-
tion, c’est - à - d i re de l’ i n t é g ration des normes sociales ré g i ssant une culture
donnée. Aussi, apprendre à manger contribue puissamment à la création de
l’identité, identité de soi, identité sociale, identité culturelle.
En effet, l’aliment n’est pas un produit « comme les autres » : pour remplir sa
fonction il doit être consommé, c’est-à-dire ingéré, accepté dans notre intimité
la plus profonde. De ce fait, il n’est pas un produit neutre, car une fois avalé il
peut s’avérer bénéfique ou nuisible. Pour pouvoir l’accepter, il convient encore
qu’on puisse le percevoir, le penser, comme aliment, re m p l i ssant to u te une
série de conditions et d’atte n tes. Autrement dit, il convient de co n st r u i re la
p e rception de l’aliment avant de pouvoir le co n s i d é rer comme tel et le
consommer par la suite.
C’est justement la construction de cette perception du produit nouveau qui peut
poser problème. Dans la société traditionnelle, réelle ou mythique pour beau-
coup des consommateurs actuels, les aliments étaient produits au vu de tous,
dans l’ i m m é d i a te proximité des individus. Cette proximité permettait une
connaissance rassurante du processus de fabrication, dont l’étape finale, celle
115
S de la consommation, se joue dans l’ a ss i e t te. Actuellement la production et la
fa b r i cation des produits se font dans des lieux et des circuits de plus en plus
séparés des consommateurs futurs.
116
l’agroalimentaire de prendre en considération d’autres perspectives afin de faire
leurs choix et pre n d re des décisions de re c h e rche et déve loppement ou de
lancement de produits nouveaux.
Elles apportent des éclairages à des niveaux différents et complémentaires :
– au niveau individuel, en permettant de mieux connaître les pro ce ssus de
S
formation des co n d u i tes alimenta i res, la construction des perceptions, le u r
inscription dans un contexte relationnel et social, les motivations et les modes
de pensée en jeu ;
– au niveau du groupe, en tenant compte des éléments sociologiques et ethno-
logiques qui permettent de saisir les dynamiques sociales et de groupe ;
– dans une pers p e c t i ve à la fois synchronique et diachronique à partir des
données que peuvent apporter les approches historiques, géographiques et
anthropologiques ;
– enfin, à un autre niveau, symbolique, philosophique et moral, aspects qui
jouent un rô le co n stant, majeur et souvent méconnu par les principaux
acteurs.
On re d é co u v re ainsi la vé racité de la sagesse ancienne qui disait déjà, dans
L’Ancien Te s t a m e nt que « l’homme ne se nourrit pas de pain seule m e nt ». En
tenant compte de cela, on peut permettre une meille u re innovation et son
acceptation dans le domaine alimentaire.
117
S Document 14
« Que nous devions manger est une réalité si banale, si primitive pour le dévelop-
pement de nos valeurs vitales, qu’elle est sans aucun doute commune à tous les
individus. C’est cela même qui rend possible le regroupement du repas commun,
et cette socialisation médiat r i ce permet ainsi que s’ effectue le dépass e m e nt du
simple naturalisme de I’alimentation. »
Georg Simmel, 1910
118
principale. Nous pouvons toute fois accéder grâce à ce codage des activités
s e co n d a i res à des informations supplémenta i res sur l’environnement dans
lequel se déroulent les repas.
Nous négligeons ici les activités qui ne concernent que quelques individus. En
e f fet, les deux personnes qui inscrivent en 1998 comme action seco n d a i re
S
pendant leur déjeuner l’activité « sommeil » ne sont pas très significa t i ve s …
Trois principaux types d’activités composent ainsi l’environnement du dîner :
é co u ter la radio ou de la musique, regarder la télévision et enfin discuter. On
doit noter qu’il ne s’agit pas de tâches en tant que telles, mais d’éléments de
contexte qui concernent davantage le cadre dans lequel s’effectue le repas.
Part des individus qui, pendant qu’ils mangent, déclarent réaliser au moins une fois une
autre activité (%)
En effet, comme le note Claude Fischler (1990, p. 225), « en France, mais aussi
dans une bonne partie de l’ E u rope et du monde, les usages inte rd i s e nt en rè g le
g é n é ra le le mélange des activités. Même si ces usages te n d e nt à changer, on ne
peut toujours pas (ce qui signifie que, le plus souvent, on ne songeait pas à le faire)
manger en travaillant, en écoutant un cours, en faisant ses courses ou en prenant le
métro ». On retrouve cette constante dans les emplois du temps. Pas de dîner en
même temps qu’une promenade ou que les devoirs des enfants. Fischler (1990)
explique ce t te te n d a n ce par le fait que « l’aliment ation est une activité sociale-
ment protégée. Il est disco u rtois de déranger la paix d’un repas, par exemple en
téléphonant. Dans l’éducation bourgeoise traditionnelle, on inculque aux enfants la
l i s te de tout ce qu’il est inte rdit de faire à table : lire, chanter, se lever, etc. Les
entorses se multiplient sans doute, mais le principe demeure. »
La lecture, moins fré q u e n te que les trois autres activités, ressort également
comme une activité réalisée pendant les prises alimentaires. Il ne s’agit pas de
grignotages réalisés pendant que la personne lit, car dans ce cas l’activité repas
serait celle déclarée comme secondaire. Les individus lisent, souvent un journal
comme l’indiquent les libellés inscrits par les enquêtes, en prenant leur petit-
déjeuner ou leur déjeuner. La lecture n’est plus alors une activité en tant que
telle, mais rejoint l’écoute de la radio ou de la télévision : il s’agit d’un élément
c i rconstanciel, pouvant participer à un rituel alimenta i re, c’est - à - d i re à la
co n stitution d’habitudes, de pratiques repro d u i tes chaque jour lors des repas,
mais sur lesquelles l’enquête Emploi du temps, limitée à une seule journée par
enquête, ne nous informe pas.
119
S Comme l’activité « lecture », quasi-absente le soir, l’ é co u te de la radio ou de
musique semble une pratique de mangeur plutôt matinale. Ainsi, plus de 20 %
des individus déclarent au moins une fois cette activité secondaire pendant une
prise alimentaire avant 11h00. La radio ou la musique constitue un fond sonore
qui accentue le ca ra c t è re récréatif du repas et le ra p p roche d’un moment de
loisir. C’est aussi le cas de la télévision qui apparaît néanmoins comme plutôt
une pratique du soir. Près de 22 % des individus allument leur poste pendant
une prise alimentaire après 18h00. Mais si 33 % de ceux qui allument la télévi-
sion pendant le repas mangent seuls, la radio et la musique comme fond sonore
sont au contraire des pratiques plutôt solitaires. 60 % de ceux qui l’inscrivent en
activité secondaire le soir dînent seuls.
Toutefois, l’activité secondaire majeure est la co n versation. La prise alimentaire
est un moment d’échange, de discussion. Naturellement, cela ne concerne pas la
fraction de personnes qui mangent seules. Toutefois, plus de 60 % des individus
déclarent la co n ve rsation comme activité secondaire d’une prise alimentaire au
co u rs de la journée. Ce taux notable témoigne de l’importance du ca ractère de
sociabilité de l’alimentation, et des repas en particulier, qu’ils soient pris au domi-
cile ou à l’extérieur. On doit noter que la conversation est beaucoup moins impor-
ta n te pour le petit-déjeuner, qui est d’ailleurs plus souvent pris seul.
Les cas, peu nombreux, où le repas a été inscrit en activité secondaire sont inté-
ressants pour co m p rendre le statut du repas et ce qui peut le rétro g rader au
second plan. Trois activités se détachent des autres : les rencontres, les conver-
sations et la télévision. Pour les rencontres et les conversations, il s’agit princi-
palement de cas où la fonction sociale du repas dépasse sa fonction biologique.
La prise alimentaire est soit un prétexte de rencontre, soit une pure contrainte
naturelle à laquelle on se soumet tout en ayant d’autres pré o ccupations. Le
repas n’est plus un simple moment de nutrition, mais l’occasion d’un échange
a vec quelqu’un d’autre. Un rendez-vous avec un ami dans un re sta u rant par
exemple peut constituer davantage une rencontre qu’une activité alimentaire.
La télévision occupe ici enco re une place privilégiée. Un peu moins de 2 % des
individus de la population des trois enquêtes Emploi du temps ont inscrit au
moins dix minutes d’alimentation en activité secondaire alors que la télévision
était l’activité principale. Qu’il s’ a g i sse de la pizza avalée devant le match de
football ou de biscuits devant le film de 20h50, le repas n’est plus seulement une
contrainte biologique à laquelle on obtempère. La nourriture peut faire partie d’un
« rituel télévision », c’est-à-dire d’un cérémonial alimentaire reproduit souvent
par habitude, allant de la pizza au pop-corn ou à la canette de bière.
Cette observation confirme, même s’il ne s’agit que d’une toute petite fraction
de la population, la place qu’occupe le petit écran dans la soirée des Français,
puisqu’il va même parfois jusqu’à rétro g rader les prises alimenta i res, et pour
certains individus les repas, en activités secondaires. Or les programmes télé-
visés ont leur propre grille horaire avec des rendez-vous quotidiens immuables,
comme le journal télévisé de vingt heures. Le rôle joué par la télévision dans le
120
m o d è le alimenta i re fra n çais, et donc par conséquent les hora i res de ses
programmes, expliquent sans doute une part non négligeable de la synchroni-
sation des repas en France. La télévision est souvent regardée à plusieurs, et
l’ i m p o r ta n ce de la co n ve rsation comme activité seco n d a i re nous invite égale-
ment à explorer la dimension sociale du dîner.
S
La commensalité
La commensalité désigne le fait de partager ou non sa ta b le avec d’autre s
convives. L’enquête Emploi du temps ne nous renseigne que sur les personnes
présentes pendant que l’activité est réalisée, sans impliquer nécessairement
leur participation à cette activité. On peut être dans la pièce où est réalisée l’ac-
tivité, la cuisine par exe m p le, sans fo rcément y participer active m e n t .
Néanmoins, pour les repas, on peut co n s i d é rer que les personnes pré s e n te s
sont celles avec lesquelles on mange. Cette information nous renseigne sur la
sociabilité alimentaire. On peut définir celle-ci « comme la propension à partager
des consommations alimentaires avec des personnes exté r i e u res au ménage,
autrement dit des repas avec des tiers » (Larmet, 2002). C’est bien sûr une défini-
tion très pratique pour l’ a n a lyse de l’ e n q u ê te Emploi du temps puisque la
présence de personnes extérieures au ménage pendant l’activité est indiquée
sur le carnet journalier rempli par les personnes interrogées.
Près de la moitié des prises alimentaires effectuées avant 11h00 le sont en soli-
taire (tableau ci-dessous). Le petit-déjeuner apparaît donc comme le repas où la
commensalité est la plus faible, qu’on vive seul ou non. C’est beaucoup moins le
cas le re ste de la journée. Ainsi, c’est entre 11h00 et 18h00 que les taux des
prises alimenta i res avec quelqu’un d’extérieur au ménage, qu’il s’agisse d’un
proche, d’un ami ou d’un collègue, sont les plus élevés. La période qui s’ouvre
après 18h00 présente quant à elle une structure totalement différente, avec une
commensalité centrée sur le ménage. Les trois quarts des prises alimentaires
ont alors lieu avec une personne vivant sous le même toit.
121
S ménage. C’est le cas pour 75,5 % des individus enquêtés sur les trois enquêtes.
Les repas pris à l’extérieur ne se font que très rarement seul. Autrement dit, les
personnes qui dînent seules mangent presque toutes à leur domicile (97 %).
To u te fois les individus qui mangent seuls ne sont pas ex a c tement les mêmes
selon la période de la journée considérée. Le fait de vivre seul a un impact beau-
coup plus important le soir sur la probabilité de manger seul. En effet, un indi-
vidu qui vit seul a trois fois plus de chance de manger seul le matin et le midi
par rapport à un individu qui vit en couple et de sexe, classe d’âge, type urbain,
niveau de diplôme et occupation identiques. Le rapport monte à quinze fois plus
après 18h00, c’est - à - d i re alo rs que la journée de tra vail est généra le m e n t
terminée, et que les prises alimentaires se font en dehors du cadre profes-
sionnel.
De même, c’est le soir que l’effet de la classe d’âge est le plus significatif. Un
individu dont l’âge se situe au moment de l’enquête entre 55 et 64 ans a alors,
to u tes choses égales par ailleurs, 4,7 fois plus de chances de manger seul
qu’un individu entre 18 et 24 ans.
Par co n t re, être un homme ou une femme n’a aucune influence sur le fait de
manger seul. La taille de la commune de résidence, notamment avant 11h00, a
un léger effet. Les individus habitant Paris et sa banlieue prennent leur petit-
déjeuner plus souvent seul, alors qu’ils semblent dîner moins seuls que les
autres. Le niveau de diplôme joue de manière différente le matin et le soir. Ceux
qui n’ont aucun diplôme mangent plus souvent seuls le matin, tandis que ceux
qui ont fait des études supérieures mangent plus souvent seuls le soir. Pe u t -
être est - ce parce que les pre m i e rs co m m e n cent généra lement plus tôt leur
journée de travail, tandis que celle des seconds se prolonge souvent plus tard.
Toute la journée, les individus en emploi ont, toutes choses égales par ailleurs,
b e a u coup plus de chances de manger en solita i re, du fait notamment des
co n t ra i n tes pro fe ss i o n n e l les, d’hora i res ou de lieu, qui pèsent sur eux. Mais
c’est le midi que le type d’occupation a l’effet le plus important. Personnes en
emploi, chômeurs et retraités ont plus de chances de manger seul entre 11h00
et 15h00 que les femmes au foyer ou les étudiants.
Les pratiques de commensalité répondent à des logiques différentes selon l’ho-
ra i re de la prise alimenta i re. Plus familial et moins soumis aux co n t ra i n tes
professionnelles, le repas du soir est un moment de rencontre entre les emplois
du temps des membres d’un même ménage, après un déjeuner plus souvent
pris seul ou avec quelqu’un d’extérieur au ménage. C’est ce sur quoi se fonde ce
que Chombart de Lauwe (1977) appelle la « communion alimentaire ». La prise
alimentaire est l’occasion pour les membres du ménage de se retrouver et de
partager la nourriture.
Mais ce t te communion est aussi plus large, tournée ve rs l’ extérieur et l’ e n-
semble de la société, puisqu’il y a des repas, et en particulier ceux de la journée
de travail, pour lesquels les membres du foyer sont séparés et partagent la
nourriture avec d’autres groupes. « Le besoin de partager de la nourriture est un
122
facteur essentiel dans les motivations du comportement alimentaire. » (Chombart
de Lauwe, 1977, p. 171) « Quand est-ce qu’on mange ? » est une question indis-
sociable de celles de savoir « avec qui on mange » et « où l’on mange ». Le temps
alimentaire, encadré par les autres temps sociaux, est un moment de rencontre
entre les emplois du temps individuels d’un même groupe familial, amical ou
S
même professionnel. Cette pratique de sociabilité, qui constitue également un
moment important de socialisation, est sans doute pour beaucoup dans la
simultanéité des prises alimentaires à l’échelle de la société.
Conclusion
Ce panorama descriptif des prises alimenta i res réalisé à partir des enquête s
Emploi du temps fait apparaître le caractère éminemment social de l’organisa-
tion de la nécessité, d’abord biologique, de s’alimenter. Si les données ne nous
permettent pas toujours de déterminer précisément les épisodes alimentaires
qui relèvent du grignotage, les déclarations des individus interrogés font claire-
ment apparaître trois pics, témoignant de la persistance des repas traditionnels
en France.
La réponse à la question « quand est-ce qu’on mange ? » est à chercher dans le
cadre dans lequel s’insèrent les repas. Le repas est un moment d’échange, de
rencontre, de conversation et non pas seulement un instant où l’on se nourrit.
On ne doit donc pas négliger les autres temps sociaux, en particulier l’influence
des co n t ra i n tes que font peser les autres activités, comme les hora i res des
p ro g rammes télévisés par exe m p le. L’ i m p o r ta n ce de la télévision dans le
modèle alimentaire français joue sans doute un rôle notable dans le maintien du
synchronisme observé le soir, comme les rythmes professionnels pour le midi
et dans une moindre mesure le matin. Le choix des hora i res ou du lieu des
épisodes alimenta i res est inséparable des personnes avec lesquelles le repas
est pris ou des activités dans lequel il s’insère.
123
S Morris et Goscinny, Dupuis, 1988
124
Document 16
GÉOPOLITIQUE DU GOÛT
La guerre culinaire
S
Christian Boudan, PUF, 2004
(…) L’histo i re de l’ expansion des cultures culinaires est aujourd’hui dans une
phase active, et depuis trois ou quatre décennies le paysage se transforme rapi-
dement dans de nombreuses régions du monde. En Amérique du Nord et pour
une grande part dans les pays d’Europe, de l’Asie enrichie et du Pacifique, les
savoir-faire culinaires locaux ont fo r tement ré g re ssé devant l’industrialisation
de la production alimenta i re. L’Amérique du Sud, sortie affaiblie du métissage
espagnol, s’est fait envahir par les habitudes de consommation venues du Nord.
L’Afrique noire, qui s’est aussi urbanisée, arrange maintenant à la mode locale
les surplus alimentaires mondiaux dont elle est devenue dépendante. La Chine
re t ro u ve son ra yonnement après s’être débarra ssée de ses réfe c to i res popu-
laires, mais elle se fait attaquer par la restauration industrielle américaine. La
France elle-même a abandonné sans regrets les vieux gestes techniques de sa
cuisine des sauces devenue invendable. Et de partout, ou presque, monte une
sourde inquiétude sanitaire devant la progression de l’obésité et les maladies de
dégénére s ce n ce, qu’elles soient largement attribuables aux mauvaises habi-
tudes locales, ou provoquées par les surplus de graisse et de sucre produits par
l’Occident.
Tout au long de ces pages nous avons montré que la cuisine est constitutive du
socle le plus dur des identités collectives, qu’elle est ancrée au plus profond des
représentations du monde, des croyances religieuses et des fiertés nationales.
Nous avons vu qu’elle accompagne la poussée des peuples hors de leurs zones
d’origine, même si les conditions géoclimatiques ne sont pas les meilleures. La
conquête armée et la colonisation n’ont pas été les seuls moyens de diffusion
des recettes, des techniques ou des produits ce livre montre encore qu’elle s’est
a u ssi fa i te par l’ava n cée des agriculte u rs ou la poussée des pasteurs, par le
grand commerce, par la diffusion des conceptions médicales ou des idées reli-
gieuses, philosophiques ou politiques, par l’émigration ou encore par l’imitation
de la culture des États dominants. (...)
Un jeu à trois
Les deux centres asiatiques de Chine du Nord et du Sud-Est ont fusionné dès la
plus haute Antiquité pour former la grande zone d’expansion asiatique. Cette
zone s’est consolidée au cours des deux derniers millénaires avec l’unification
te r r i to r i a le et culture l le de la Chine, intégrant à la périphérie des culture s
culinaires sous son influence (Japon, Corée, Indochine, Malaisie…). La culture
culinaire du monde chinois a longtemps été arrêtée par les distances maritimes
125
S de l’océan Indien et les étendues désertiques d’Asie ce n t ra le. Elle a fait une
première grande sortie hors d’Asie dès la fin du XIXe siècle, en contrecoup des
entreprises co lo n i a les occ i d e n ta les, accompagnant les pre m i è res migra t i o n s
é conomiques ve rs l’Amérique, le Pacifique ou enco re la Fra n ce durant la
Pre m i è re Guerre mondiale. La deuxième partie du XXe siècle a vu grandir la
puiss a n ce économique de Hong-Kong et de Taiwan et s’ a cc u m u ler les effe t s
induits des guerres d’Indochine et de l’ i m m i g ration. La diaspora chinoise et
indochinoise s’est étendue en Europe, en Aust ralie et en Amérique, avec sa
co h o r te de re sta u rants et supermarchés. Aujourd’hui, c’est l’Extrême-Orient
russe, désormais intégré au commerce chinois, qui ouvre une nouvelle direction
d’expansion.
La cuisine chinoise est aujourd’hui beaucoup plus présente en Occident qu’il y a
seulement vingt ou trente ans. Elle y a pris une part du marché de la restaura-
tion populaire qui avait déjà bien décliné dans sa forme traditionnelle, sous le
double effet de l’ i n d u strialisation et de la montée des charges d’ex p lo i ta t i o n ,
mais la qualité générale de la cuisine n’explique pas à elle seule ce succès. La
solidité de la fa m i l le chinoise et des réseaux communautaires de l’émigration
ont sans doute été des facteurs décisifs. L’inquiétude grandissante sur les effets
de l’alimentation occidentale a conduit à apprécier un régime alimentaire plus
varié, privilégiant les légumes verts peu cuits, le soja et les aromates, régime
valorisé par les études d’épidémiologie qui en ont fait un modèle concurrent de
l’ a l i m e n tation médite r ranéenne. C’est aussi la seule cuisine à pré s e n ter une
vraie alternative aux préparations de l’industrie, car les plats préparés au wok
ne se prê tent pas à la congélation, mais se réchauffent bien au four à micro-
ondes. En France, les charcutiers-traiteurs qui continuaient à vivre sur le vieux
m o d è le déco ratif hérité du XVIII e siècle (pré p a rations en gelée, mayo n n a i s e ,
sauce blanche, pâtés…) ont dû aussi abandonner le terrain à cette cuisine qui
n’est pas vraiment moins grasse mais est certainement plus saine. La poussée
chinoise est aujourd’hui très forte en Occident, irradiant comme un qi universel
la planète des mangeurs. Elle tire son énergie d’un monde rural qui continue à
transmettre sa culture culinaire aux nouvelles générations, et du renouveau de
sa restauration qui accompagne maintenant et sur place l’enrichissement de la
nouve l le Chine. À ce t te pré s e n ce gra n d i ss a n te de l’Asie ne s’opposent réelle-
ment que la culture culinaire d’Europe du Sud, en situation de résistance, et les
préparations de l’industrie qui se présentent partout comme une alternative à la
cuisine domestique.
Dans ce jeu mondial réduit à trois, la France tient toujours un rôle central dans
la troupe européenne du combat géoculinaire, représentante ambivalente d’un
Occident partagé entre la grande industrie et l’entretien d’une culture transmise
depuis l’Orient. Cette position doit cependant s’évaluer à plusieurs niveaux qui
n’ont pas la même solidité : production, grande cuisine et cuisine populaire. Le
pays est un des principaux acteurs sur le marché des produits alimentaires de
base et des produits transformés, il doit cela à la richesse de ses te r res aux
126
climats différenciés. Cette position indust r i e l le fo r te est cependant remar-
quable, compte tenu de l’industrialisation tardive de l’agriculture et de l’élevage
qui ne s’est généralisée que dans les années 1960. Auparavant le monde rural
a vait sauve g a rdé un savoir pluriséculaire de produits régionaux et lo caux de
qualité sans lequel la cuisine aristocratique et la grande restauration n’auraient
S
pu s’épanouir. Ce sont ces produits qui font encore la force et la spécificité fran-
çaises. C’est autour de ce savoir que se sont déve loppées des industries de
transformation proposant des versions moins coûteuses du luxe alimentaire.
Les bases de la cuisine décorative du XVIIIe, sur lesquelles avaient su capitaliser
au XIXe siècle l’ h ô te l lerie et la resta u ration, sont pratiquement abandonnées
depuis le mouvement de rénovation engagé dans les années 1970. Les fonds et
sauces génériques, perçus aujourd’hui comme des horre u rs antidiététiques,
sont beaucoup moins employés. Ils sont re m p l a cés par des bouillons réduits,
des jus courts ou des émulsions de légumes et aromates frais. Les cuissons se
sont raccourcies et les matériaux de décoration (roux, glaçages) sont devenus
inutiles dans un système qui a vu le centre du décor migrer successivement de
la table au plat de service, puis à l’assiette et à son contenu devenus créations
de désigner tout autant qu’œuvres de cuisinier. On a ass i sté à une sorte de
passage de l’architecture et de la maçonnerie – typiques des grosses pièces de
la cuisine de cour – vers la peinture et la sculpture des plats servis à l’assiette
et qui mettent Pollock et Calder à contribution dans une esthétique d’ensemble
fortement asiatisée.
La recomposition réussie de la cuisine de luxe française a su adapter ses prépa-
rations à la culture diététique et esthétique d’une clientèle inte r n a t i o n a le
fortunée. Ses re ce t tes, ses pré s e n tations et ses modes sont copiées par la
grande restauration internationale occidentalisée. Mais cette position française
dans une cuisine de luxe mondialisée est pote n t i e l lement fragile et menacé e
d’une perte d’identité. La capacité à employer les produits et les techniques de
c u i sson d’Asie ou d’ailleurs est ce r tainement indispensable pour re n o u ve le r
l’ancienne cuisine parfaitement inadaptée aux exigences actuelles de la diété-
tique. Que l’on pense au service classique des légumes surcuits, servis dans des
jus ou en purées. Mais elle l’éloigne encore un peu plus de la cuisine domes-
tique maintenant coupée de racines rurales et re stée calée sur les anciennes
méthodes. Cette cuisine populaire est aujourd’hui incapable de copier, même en
la simplifiant, la nouvelle grande cuisine fondée sur le design et l’assemblage,
le prix très élevé des produits, et les multiples cuissons différenciées utilisant
des techniques comme la cuisson au wok, sous vide ou sur la plaque dont la
mise en œuvre est impossible dans des cuisines d’appartement sans ventilation
et juste équipées de prises électriques. (...)
127
S Une culture de la diversité
Le présent voit co h a b i ter et s’ i n te r p é n é t rer deux logiques de pre s c r i p t i o n
a l i m e n ta i re ayant chacune pour objectif d’optimiser la santé co l le c t i ve des
populations. D’un côté, la logique empirique de la cuisine qui re commande la
fa b r i cation ré p é t i t i ve des re ce t tes à base de produits frais ou pré s e r vés, en
associant aux aliments une variété des produits végétaux peu nutritifs mais qui
sont par ailleurs souvent utilisés à des fins thérapeutiques (aromates, épices).
De l’ a u t re, la logique analytique de la science qui recommande de manger
ce r taines quantités de nutriments en fonction du savoir acquis sur leur utilité
métabolique. Ni l’une ni l’autre ne sont satisfaisantes. La cuisine est une tenta-
tive codifiée d’optimiser des ressources dont l’intérêt d’usage vient de l’ex p é-
r i e n ce. Comme ce livre le démontre, ce t te te n ta t i ve peut-être plus ou moins
réussie. Parce que le corpus des techniques et des ingrédients dépend du milieu
dans lequel il se construit et qu’il peut être chroniquement porteur de carences.
Parce que la technique peut reposer sur des bases anthropologiques dont les
fondements dégradent les potentialités des aliments ou provoquent des patho-
logies (le surcuit, le trop gras…). Parce que la cuisine est une pratique sociale et
comme telle utilisable à d’autres fins (politiques, religieuses…).
La nutrition scientifique énonce un savoir qui est par définition rév i s a b le ,
puisque construit à partir de la recherche expérimentale. Ce n’est pas un savoir
dont on verrait l’aboutissement final, car le métabolisme du corps humain n’est
pas encore complètement compris et décrit. La nutrition ne connaît pas tous les
effets de la consommation (sur le court terme ou à l’échelle d’une vie humaine)
de tous les ingrédients traditionnellement utilisés (seuls ou en combinaison
avec d’autres). Elle s’exprime aussi dans un langage qui n’est pas adapté à une
pédagogie collective, elle ne transmet pas une technique individuelle d’alimen-
tation, elle remplace une pratique collective par un discours et des recomman-
dations qui sont un co m p romis entre acte u rs sociaux aux intérêts opposés,
recommandations qui sont souvent inapplicables. À quoi cela sert-il de répéter
qu’il faut manger des légumes verts si le marché est totalement occupé par le
prêt-à-manger, ou si le choix se réduit à des préparations dégradées par leur
traitement industriel, ou si les produits frais ou surgelés sont trop chers pour
les plus pauvres ou introuvables dans certaines zones urbaines, ou si la tech-
nique pour les cuisiner n’a pas été apprise ?
La nutrition scientifique est le nouveau socle d’un savoir largement médiatisé
( ca lc u ler ses apports journaliers) qui permet aux produits industriels de se
présenter comme un substitut va l a b le à la cuisine quotidienne (tel aliment
préparé fournit tels apports). En contribuant à faire migrer le savoir-s’alimenter
de la cuisine ve rs l’addition d’aliments-nutriments, la nutrition n’a pas pu
empêcher la surconsommation pathologique ni même la dégradation de la
qualité de l’ a l i m e n tation dans une partie gra n d i ss a n te de la population
mondiale. Après plus d’un siècle de recommandations de régimes basés sur des
calculs de nutriments, les nutritionnistes donnent maintenant comme modèle le
128
« régime crétois » (pour ne pas dire la cuisine crétoise) riche en légumes verts
et en aromates. Ce n’est pas le témoignage d’un grand progrès du savoir, sinon
la confirmation par les études épidémiologiques des bienfaits de l’ex p é r i e n ce
culinaire accumulée pendant des milliers d’années. C’est reconnaître que la
pratique quotidienne de certaines cuisines traditionnelles est supérieure à tous
S
les régimes jusqu’à présent construits sur le savoir scientifique. Sans faire de
p a sséisme, on a envie de renvoyer au vieux « régime anglais » que Gerva s e
Markham enseignait il y a quatre siècles : « Pour ava n cer dans cet te co n n a i s-
s a n ce de la cuisine (...) le premier pas à faire est de connaître to u tes les sorte s
d’herbes utilisées, que ce soit pour le potage, pour les salades, pour les sauce s ,
pour les garnitures ou pour tout autre assaisonnement ou présentation. Avec cette
compétence dans les herbes (la ménagère) pourra acquérir par elle-même le vrai
travail et l’expérience de la cuisine. »
Montrer les logiques sociales et politiques qui sont à l’œuvre dans le champ
culinaire n’implique pas un amour inconditionnel du bon vieux temps ni un rejet
des produits de l’industrie. Et enco re moins une passion pour les femmes en
tablier ou les repas de fa m i l le inte r m i n a b les. Car si la standardisation des
aliments industriels va à l’encontre du besoin de diversité de l’organisme, elle
peut être compensée, pour beaucoup, par la diversité de l’offre alimentaire du
g rand marché mondial. Le futur n’est donc pas fo rcément pire que le passé,
d’autant que les graves problèmes de santé publique qui sont liés à l’alimenta-
tion suscitent dans le monde des efforts de re c h e rche co n s i d é ra b les. Ils
permettent d’espérer de nouvelles avancées du savoir sur le sujet.
129
S Document 17
Alimentation et imaginaire
Considérons deux aliments de statut imaginaire très différent, sinon opposé : le
caviar et la tomate. Le premier est ré s e r vé à un petit nombre de personnes et d’oc-
casions gastronomiques et festives. Même dans les catégories sociales qui peuvent
y avoir accès, on ne le consommera guère de manière solita i re, mais plutôt en
groupe ou en couple, c’est-à-dire dans des situations de cé l é b ration ou de séduc-
tion. Cette consommation se devra d’être parcimonieuse, par néce ssité mais aussi
par bienséance : pour ca ractériser des débordements somptuaires et excessifs, ne
parle-t-on pas de « flots de champagne » et de « caviar à la louche » ? L’imaginaire
du caviar évoquera la munificence et l’excès, les débordements affectifs et l’âme
slave. Notons au passage que la succ u lence de ce mets semble être une décou-
verte relativement récente : il s’agissait jadis, semble-t-il, d’un aliment de ca rême.
Certains lui attribuent en outre des vertus médicinales : en URSS, on l’a entendu
recommandé, y compris par des médecins, comme fortifiant pour les enfa n t s
fragiles (une fonction qui rappelle ce l le de l’huile de foie de morue de jadis…).
La tomate, de son côté, est économiquement plus accessible et fait partie des
aliments courants, sinon banals. Ses usages sont innombrables et quotidiens.
Pour autant, sa charge imaginaire n’est pas moins riche : elle est évocatrice de
130
fraîcheur, de légèreté, de soleil et d’été méditerranéen (même si elle provient
pro b a b lement de serres bre tonnes ou hollandaises). Idéalement, elle est à la
fois humble et savoureuse et on peut prédire qu’elle figurera volontiers dans le
frugal et solitaire repas d’une jeune citadine active, soucieuse de sa minceur et
nostalgique de ses dernières vacances italiennes.
S
Ainsi, les aliments sont porteurs de sens, et ce sens leur permet d’exercer des
e f fets symboliques et réels, individuels et sociaux. La tomate et le caviar, de
manière très différente, nourrissent tous deux et l’imaginaire et le corps. Ils
p e r m e t tent de « co n st r u i re » et de mettre en scène la réalité et les rapports
sociaux. Ils s’utilisent co n formément à des re p ré s e n tations et des usages qui
sont partagés par les membres d’une classe, d’un groupe, d’une culture. La
nature de l’ o ccasion, la qualité et le nombre des co n v i ves, le type de rituel
entourant la consommation constituent autant d’éléments à la fois nécessaires,
signifiants et significatifs. Les aliments s’agrègent eux-mêmes en repas ou
occasions de consommation qui, à leur tour, permettent de structurer les situa-
tions et le temps : ainsi par exemple, le déjeuner, un en-cas, une « pause-café »
(formule lancée jadis par une adroite campagne publicitaire) scandent le temps
laborieux, contribuent à l’ordonner et à ritualiser nos rapports avec lui. […]
Ainsi l’aliment (ou la boisson), le co n texte de sa consommation, les rites qui
l’entourent, exercent une série complexe de fonctions imaginaires, symboliques
et sociales. La charge imaginaire des aliments fait en quelque sorte voya g e r
dans l’espace et dans le temps, propulse au moins fantasmatiquement les indi-
vidus à travers l’espace social. Mais en même temps la connaissance des rites
et de l’étiquette manifeste et préserve les limites du territoire social de ceux qui
en bénéficient. L’inco r p o ration est l’un des re ssorts essentiels de ces pro j e c-
tions imaginaires. La cuisine remplit une fonction complexe, pour ainsi dire bio-
anthropologique, en aidant à résoudre le paradoxe de l’omnivore. C’est ce qui la
situe au cœur de l’identité, sociale et individuelle : elle fournit une « g r i l le »
pour considérer le monde et s’y situer, pour s’y incorporer et se l’incorporer. Les
individus appartenant à une culture ont en commun, entre autres ca ra c t é r i s-
tiques, de s’y référer, de s’y repérer implicitement.
Il nous faut maintenant passer d’un point de vue collectif, social, culturel à un
point de vue individuel, psyc h o logique et te n ter de répondre à ces quest i o n s :
comment ce t te grille est-elle intériorisée par les individus ? Comment appre-
nons-nous à manger à l’intérieur d’une cuisine, à effectuer des choix dans un
certain répertoire d’aliments ? Comment naissent, se développent, évoluent en
nous les goûts et les dégoûts, les préférences et les aversions ?
131
S Document 18
LA DISTINCTION
Sans façon ou sans gêne ?
132
des manières : par exe m p le, on peut, pour fa i re l’ é conomie des ass i e t tes à
dessert, découper – tout en plaisantant pour marquer qu’il s’agit d’une trans-
gression qu’on « peut se permet t re » des ass i e t tes de fortune dans la boîte à
g â teaux, et le voisin qu’on a invité au dessert re cev ra aussi son morceau de
carton (lui présenter une assiette reviendrait à l’exclure) comme un témoignage
S
de la familiarité où l’on est avec lui. De même, on ne change pas les assiettes
entre les plats. L’assiette à soupe, que l’on nettoie avec le pain, peut ainsi servir
jusqu’à la fin du repas. La maîtresse de maison ne manque pas de proposer de
« changer les ass i e t te s », en re t ro u ssant déjà sa chaise d’une main et en
tendant l’autre vers l’assiette de son voisin, mais tout le monde se récrie (« ça se
mélange dans le ventre ») et si elle insistait, elle aurait l’air de vouloir exhiber sa
vaisselle (ce qu’on lui acco rde lo rsque quelqu’un vient de la lui offrir) ou de
traiter ses invités en étra n g e rs, comme on fait parfois sciemment avec des
intrus ou des pique-ass i e t te connus pour ne jamais « rendre », que l’on veut
remettre à dista n ce en changeant les assiettes malgré leurs pro te stations, en
ne riant pas à leurs plaisanteries ou en rabrouant les enfants sur leur te n u e
(« mais non, laiss e z - les faire, ils peuve nt bien… », diront les invités –, « il est
temps qu’ils sachent se tenir » répondront les parents).
La racine commune de toutes ces « licences » que l’on s’accorde est sans doute
le sentiment qu’on ne va pas, en plus, s’imposer des contrôles, des contraintes
et des restrictions délibérés et cela en matière de nourriture, besoin primaire
et, revanche, et au sein même de la vie domestique, seul asile de liberté, alors
qu’on est de tous côtés et tout le re ste du temps soumis à la néce ssité. Au
« franc-manger » populaire, la bourgeoisie oppose le souci de manger dans les
formes. Les formes, ce sont d’abord des rythmes, qui impliquent des attentes,
des retards, des retenues ; on n’a jamais l’air de se précipiter sur les plats, on
attend que le dernier à se servir ait commencé à manger, on se sert et ressert
discrètement. On mange dans l’ordre et toute coexistence de mets que l’ordre
sépare, rôti et poisson, fromage et dessert, est exclue : par exemple, avant de
servir le dessert, on enlève tout ce qui reste sur la table, jusqu’à la salière, et on
balaie les miettes. Cette manière d’introduire la rigueur de la règle jusque dans
le quotidien (on se rase et on s’habille chaque jour dès le matin, et pas seule-
ment pour « sortir »), d’exc l u re la co u p u re entre le chez soi et le dehors, le
quotidien et l’ex t ra-quotidien (associé, pour les classes populaires, au fait de
s’endimancher) ne s’explique pas seulement par la présence au sein du monde
familial et familier de ces étrangers que sont les domestiques et les invités. Elle
est l’expression d’un habitus d’ordre, de tenue et de retenue qui ne saurait être
abdiquée. Et cela d’autant moins que le rapport à la nourriture – le besoin et le
plaisir primaires par excellence – n’est qu’une dimension du rapport bourgeois
au monde social : l’opposition entre l’immédiat et le différé, le facile et le diffi-
cile, la substance ou la fonction et la forme, qui s’y exprime de manière particu-
lièrement éclatante, est au principe de toute esthétisation des pratiques et de
133
S to u te esthétique. À tra ve rs to u tes les formes et tous les formalismes qui se
trouvent imposés à l’appétit immédiat, ce qui est exigé – et inculqué – ce n’est
pas seulement une disposition à discipliner la consommation alimenta i re par
une mise en forme qui est aussi une censure douce, indirecte, invisible (en tout
opposée à l’imposition brutale de privations) et qui est partie intégrante d’un art
de vivre, le fait de manger dans les formes étant par exemple une manière de
rendre hommage aux hôtes et à la maîtresse de maison, dont on respecte les
soins et le travail en respectant l’ordonnance rigoureuse du repas. C’est aussi
tout un rapport à la nature animale, aux besoins primaires et au vulgaire qui s’y
abandonne sans frein, c’est une manière de nier la consommation dans sa
signification et sa fonction primaires, essentiellement communes, en faisant du
repas une cé rémonie sociale, une affirmation de tenue éthique et de ra f f i n e-
ment esthétique. (...)
Et montrer que deux visions du monde antagonistes, deux mondes, deux repré-
s e n tations de l’excellence humaine sont enfermées dans cette matrice : la
substa n ce, – ou la matière – c’est ce qui est substantiel, au sens premier de
nourrissant mais aussi de réel, par opposition à toutes les apparences, tous les
(beaux) gestes, bref tout ce qui est, comme on dit, purement symbolique ; c’est
la réalité contre le toc, le simili, la poudre aux yeux ; c’est le petit bistrot qui ne
paie pas de mine avec ses tables de marbre et ses nappes de papier mais où on
en a pour son argent et où on n’est pas payé en monnaie de singe comme dans
les resta u rants à chichis ; c’est l’ ê t re co n t re le para î t re, la nature (« il est
nature ») et le naturel, la simplicité (à la bonne fra n q u e t te, sans fa çons, sans
cérémonie), contre les embarras, les mines, les simagrées, les manières et les
façons, toujours soupçonnés de n’être qu’un substitut de la substance, c’est-à-
dire de la sincérité, du sentiment, de ce qui est senti et qui se prouve par les
actes ; c’est le franc-parler et la politesse du cœur qui font le vrai « chic type »,
carré, entier, honnête, droit, franc, tout d’une pièce, par opposition à tout ce qui
est de pure forme, à tout ce que l’on ne fait que pour la forme (« du bout des
lèvres ») et à la politesse des mots (« trop poli pour être honnête ») ; c’est la
liberté et le refus des co m p l i cations, par opposition au respect des formes
spontanément perçues comme instruments de distinction et de pouvoir. Sur ces
morales, ces visions du monde, il n’est pas de point de vue neutre : là où les uns
voient le sans-gêne, le laiss e r - a l ler, les autres voient l’ a b s e n ce de fa çons, de
prétention ; la familiarité est pour les uns la forme la plus absolue de re co n-
naissance, l’abdication de toute distance, l’abandon confiant, la relation d’égal à
égal, pour les autres, qui veillent à ne pas se familiariser, l’ i n co n ve n a n ce de
façons trop libres. (…)
134
Document 19
135
S Français de bifteck. À peine à l’étranger, la nostalgie s’en déclare, le bifteck est
ici paré d’une vertu supplémentaire d’élégance, car dans la complication appa-
re n te des cuisines exotiques, c’est une nourriture qui joint, pense-t-on, la
succulence à la simplicité. National, il suit la co te des va le u rs patriotiques : il
les renfloue en temps de guerre, il est la chair même du combattant français, le
bien inaliénable qui ne peut passer à l’ennemi que par trahison. Dans un film
ancien (Deuxième Bureau contre Kommandantur) la bonne du curé patriote offre
à manger à l’espion boche déguisé en clandestin fra n ça i s : « Ah, c’est vo u s ,
L a u re nt ! Je vais vous donner de mon bifte c k . » Et puis, quand l’espion est
d é m a s q u é : « Et moi qui lui ai donné de mon bifte c k ! » Suprême abus de
confiance. Associé communément aux frites, le bifteck leur transmet son lustre
national : la frite est nostalgique et patriote comme le bifteck. M atc h nous a
appris qu’après l’armistice indochinois, « le général de Castries pour son premier
repas demanda des pommes de te r re frite s ». Et le président des Anciens
C o m b a t tants d’Indochine, co m m e n tant plus ta rd ce t te information, ajoutait :
« On n’a pas toujours compris le geste du général de Castries demandant pour son
p remier repas des pommes de te r re frite s . » Ce que l’on nous demandait de
comprendre, c’est que l’appel du général n’était certes pas un vulgaire réflexe
m a t é r i a l i ste, mais un épisode rituel d’approbation de l’ethnie fra n ça i s e
retrouvée. Le général connaissait bien notre symbolique nationale, il savait que
la frite est le signe alimentaire de la « francité ».
136
ÉLÉMENTS DE RÉPONSES AUX QUESTIONS
(Extraits des textes du dossier)
Question 1 :
Questions de repérage
C
En quelle année l’utilisation de la cigogne est-elle mentionnée pour la dernière
fois par un livre de cuisine ? (0,25 point)
1 5 5 5.
Plus significatives sont les disparitions d’espèces animales : des mammifères marins
comme la baleine ou le marsouin, et de grands oiseaux comme le cormoran, mentionnés
pour la dernière fois en 1490, le cygne, la cigogne et la grue, mentionnés jusqu’en 1555.
(Texte « Le lent cheminement de l’innovation alimentaire »)
Question 2 :
Par personne et pour une semaine, le ra p p o rt entre la dépense de nourriture
d’une famille allemande et d’une famille bhoutanaise est d’environ : (0,25 point)
300.
Bhoutan : famille Sangay – Une semaine de nourriture pour 13 personnes : 4 €
Allemagne : famille Melander – Une semaine de nourriture pour 4 personnes : 375 €.
(Texte « Le monde à table »)
Question 3 :
Le « régime crétois », c’est bon pour la santé ! Mais comment cela a-t-il été
établi ? (0,5 point)
Après plus d’un siècle de recommandations de régimes basés sur des calculs de
nutriments, les nutritionnistes donnent maintenant comme modèle le « régime crétois »
(pour ne pas dire la cuisine crétoise) riche en légumes ve rts et en aromates. Ce n’est pas le
témoignage d’un grand progrès du savo i r, sinon la confi rmation par les études
é p i d é m i o l ogiques des bienfaits de l’expérience culinaire accumulée pendant des
milliers d’années. C’est reconnaître que la pratique quotidienne de certaines cuisines
t raditionnelles est supérieure à tous les régimes jusqu’à présent construits sur le
savoir scientifique. (Texte « Géopolitique du goût »)
Question 4 :
Quel pourrait être le rapport entre la soupe et le sandwich ? (0,5 point)
Au Moyen Âge, la soupe est la tranche de pain posée dans l’écuelle sur laquelle
on versait le bouillon (d’où l’expression t rempé comme une soupe) .
(Texte « La soupe, toujours si populaire »)
La première consiste à étaler la nourriture sur un pain ou une pâte ou à l’en enrober.
C’est là une technique extrêmement répandue de par le monde, qui est apparue en Europe
dès le Moyen Âge sous la forme d’une tranche de gros pain rassis que l’on trempait
dans les plats : en absorbant la sauce et la graisse des préparations, il devenait lui-même
un aliment à part entière. L’usage a survécu à travers une quantité de variantes, tel le
très populaire sandw i c h. (Texte « Saveur pour tous »)
137
C Question 5 :
Sur quoi repose l’innovation culinaire apportée par le fast-food ? (0,5 point)
En ce sens, le fast-food représente l’une des innovations culinaires les plus specta-
culaires de l’histoire – un type d’alimentation destiné à tous, sans considération d’âge,
de sexe ou de culture. C’est par excellence un produit du melting pot et sans doute ne
pouvait-il naître qu’en Amérique, terre d’accueil du plus gigantesque déferlement d’immi-
grants jamais rassemblés en un seul endroit : une cuisine de l’abondance, conçue dans un
foyer pluriethnique mais dépouillée de tout particularisme culturel et élaborée jusqu’à
atteindre le dénominateur commun de l’humanité. (Texte « Saveur pour tous »)
Question 6 :
Pouvez-vous expliquer pourquoi la famille Ayme rêve de goûter au moins une
fois des sardines en boite ? (1 point)
Éloignée de tous les produits manufacturés, la famille a un rêve, goûter une fois des
sardines en boite. (Texte « Le monde à table »)
Parmi toutes les autres, on l’a vu, les consommations alimentaires présentent une
particularité essentielle : elles sont physiquement et littéralement incorporées. C’est sans
doute cette intimité ultime de l’incorporation qui donne aux consommations orales une
prégnance symbolique tout à fait particulière et qui contribue à faire de l’aliment une
s o rte de machine à voyager dans l’espace social et dans l’imaginaire.
(Texte « Les fonctions sociales de l’aliment et de la cuisine »)
Questions d’analyse
Question 7 :
D’où provient le succès du hamburger ? (2 points)
D’ab o rd , tout est conçu pour que l’on puisse saisir sa nourriture avec ses
mains et la porter à sa bouche sans avoir besoin d’intermédiaire s. Bien que cette
pratique trouve sans doute ses racines dans le monde des voyageurs ou des ouvriers
agricoles, son principal attrait dépasse de loin ces considérations matérielles : on aime à
tenir sa nourriture entre ses mains parce que l’on éprouve une incomparable inti-
mité avec ce que l’on mange, on ressent une stimulation olfactive beaucoup plus
intense qu’en s’aidant d’une cuiller, d’une fourchette ou de tout autre instrument. Les
règles du savoir-vivre interdisent de flairer ouvertement son assiette alors que, contra-
diction intéressante, la dégustation du vin prône justement ce type de comportement.
Quand on n’utilise que ses doigts, on décrit un arc de cercle qui place la nourriture sous
le nez et offre un prélude riche en sensations olfactives, sorte de prologue aromatique.
Ce puissant stimulus, combiné avec une importante mobilisation du toucher et de
la vue, semble indiquer une régression vers (ou un rappel de) certaines habitudes
plus enfantines, moins sophistiquées, où le contact avec la nourriture s’opère d’une
manière plus directe et plus sensorielle. En cela, le fast-food vise à combler les sens,
loin de toute excitation intellectuelle ou esthétique, et il ne s’en cache pas. […]
Si le fast-food satisfait notre besoin de gras sous différents aspects la saveur du
jus de viande, le croquant des féculents frits, l’onctuosité du fromage fondu, il nous
138
offre également, à profusion, les deux agents d’assaisonnement les plus communs,
le sucre et le sel. […]
Tout se passe comme si le triomphe du fast-food venait de ce qu’il offre d’une
façon directe et efficace des stimuli fondamentaux et séduisants, des substances, des
goûts, des textures et des arômes qui s’adressent à un dénominateur commun. […]
C’est par excellence un produit du melting pot et sans doute ne pouvait-il naître
C
qu’en Amérique, terre d’accueil du plus gigantesque déferlement d’immigrants jamais
r a s s e m blés en un seul endroit : une cuisine de l’ab o n d a n c e, conçue dans un foyer
pluriethnique mais dépouillée de tout particularisme culturel et élaborée jusqu’à
atteindre le dénominateur commun de l’humanité. (Texte « Saveur pour tous »)
Question 8 :
Comment rendre compte de l’échec commercial des huîtres à fil ? (2 points)
Les huîtres à fil pour ouve rture rapide, annoncées dès 1995, proposées sur le
marché en 1996, sont l’exemple d’une innovation manquée (pour l’instant). Dans ce cas,
il s’agissait d’insérer un fil entourant le pied de l’huître lors d’un des processus d’éle-
vage, fil se terminant par un anneau sortant de la coquille. Il suffisait, par la suite de
tirer sur cet anneau pour que le pied sectionné permette une ouve rture rapide du
coquillage. La réussite commerciale n’a pas été au rendez-vous. Outre le surcoût qu’en-
traînait cette « préparation » de l’huître et des problèmes techniques, le procédé a rebuté
bon nombre de consommateurs en assimilant, en quelque sorte, l’huître à une boîte de
conserve à ouvrir en tirant sur la languette. Ce n’était plus la fraîcheur océane dans
leur assiette… […]
Quels sont les modèles de référence, les signes, les indices, qui permettraient au
mangeur de bien choisir son aliment, d’avoir affaire à des produits vrais ? Mais aussi,
que veut dire vrai dans ce contexte ? Car, en fin de compte, un poulet, qu’il soit de grain
ou de batterie, est vrai dans les deux cas. Dès lors son authenticité ne dépend plus du
fait qu’il soit un poulet mais des normes dont dispose le mangeur pour lui accorder un
caractère d’authenticité. La référence à la « tradition » en est une…
(Texte « De la construction du goût aux assiettes »)
« Nous avons vu combien l’aliment, plus que tout autre objet de consommation,
est porteur d’imaginaire, de symbole, d’identité, de désirs, d’ango i s s e s, etc. Ces
caractéristiques obligent les producteurs à concevoir leurs produits comme porteurs
de valeurs (par exemple, pour une eau minérale, la légèreté, l’équilibre, le naturel). Ils
ont donc à mettre en œuvre toute une « ingénierie immatérielle », autrement dit l’activa-
tion de représentations. Cette tâche est dévolue aux publicitaires et aux hommes de
marketing. Mais contrairement à ce que pensent souvent ces derniers, les « tendances »
ou les « valeurs » mobilisées pour vendre les produits ne sont pas « inventées » par eux :
elles émanent de la société, à trave rs une histoire, une culture, un inconscient
collectif, qu’ils mobilisent de façon plus ou moins pertinente selon les cas. Ainsi, l’in-
novation alimentaire n’est que très exceptionnellement le produit de l’intuition d’un
inventeur génial. Elle est un processus ancré dans un jeu d’acteurs et un ensemble
de valeurs et de pratiques collectives. (Texte « L’innovation alimentaire »)
139
C Question 9 :
Pourquoi peut-on qualifier de très singulier le rapport de l’individu à la nourri-
ture ? (2 points)
La nourriture est l’un des liens les plus intimes à l’environnement, au monde.
(Texte « Dis moi ce que tu manges, je te dirai où tu vis »)
Un ra p p o rt très singulier de l’individu à la nourriture. [Il] tient à la nature même
de l’aliment. Celui-ci n’est pas un produit comme les autres. L’aliment est paré de
ve rtus capitales pour tout individu : il maintient la vie, la forme, la santé, la beauté, il
est source de bien-être, de plaisir, de sociabilité et de convivialité. Il est p o rteur de
significations symboliques et d’identités sociales et culture l l e s.L’acte alimentaire est à
la fois quotidien et indispensable. En outre, c’est un acte très intime, puisqu’il signifie
l’incorporation dans notre corps d’un élément extérieur ; en cela, il est porteur d’an-
goisse et de méfiance… (Texte « L’innovation alimentaire »)
Tout au long de ces pages nous avons montré que la cuisine est constitutive du
socle le plus dur des identités collectives, qu’elle est ancrée au plus profond des repré-
sentations du monde, des croyances religieuses et des fi e rtés nationales…
(Texte « Géopolitique du goût »)
En effet, l’aliment n’est pas un produit « comme les autres » : pour remplir sa fonc-
tion il doit être consommé, c’est-à-dire ingéré, accepté dans notre intimité la plus
profo n d e. De ce fait, il n’est pas un produit neutre, car une fois avalé il peut s’avérer
bénéfique ou nuisibl e. Pour pouvoir l’accepter, il convient encore qu’on puisse le perce-
voir, le penser, comme aliment, remplissant toute une série de conditions et d’attentes.
Autrement dit, il convient de construire la perception de l’aliment avant de pouvoir le
considérer comme tel et le consommer par la suite.
(Texte « De la construction du goût aux assiettes »)
Parmi toutes les autres, on l’a vu, les consommations alimentaires présentent une
p a rticularité essentielle : elles sont physiquement et littéralement incorporées. C’est
sans doute cette intimité ultime de l’incorp o ration qui donne aux consommations
orales une prégnance symbolique tout à fait particulière… […]
La cuisine remplit une fonction complexe, pour ainsi dire bio-anthropologique, en
aidant à résoudre le paradoxe de l’omnivore. C’est ce qui la situe au cœur de l’identité,
sociale et individuelle : elle fo u rnit une « grille » pour considérer le monde et s’y
situer, pour s’y incorp o rer et se l’incorporer. Les individus appartenant à une culture
ont en commun, entre autres caractéristiques, de s’y référer, de s’y repérer implicite-
ment. (Texte « Les fonctions sociales de l’aliment et de la cuisine »)
140
• La partie 1 (à partir de l’illustration 1) introduit le thème central du dossier et son
actualité : « identité et culture culinaire » (le sous-titre du texte de Bessis est :
« Cuisines et identités culturelle ») et ouvre, avec l’exemple de la soupe (texte de
Ribaut ; voir également la question 4), sur les évolutions historiques, les
mutations sociales et les ancrages identitaires de l’alimentation abordés dans les
parties suivantes (Flandrin ; question 1, question 2 et question 3).
C
• Pour la partie 2 : si la longue histoire de l’art culinaire nous incite à prendre en
compte les rapports que l’alimentation entretien avec nos valeurs sociales, va-t-on
aujourd’hui vers une mondialisation du goût ou recherche-t-on encore le goût
des autres ? Les exemples du fast-food (Rozin ; question 5) et du hambu rg e r
(Rozin ; question 7), cette « cuisine de l’ab o n d a n c e, conçue dans un foy e r
pluriethnique mais dépouillée de tout particularisme culturel » (le texte de Fumey
a pour sous-titre : « Va-t-on vers “Un” goût mondial ? ») soulignent le lien étroit
entre alimentation et identité culturelle et mettent en exe rgue le pouvoir de
d é p aysement (et donc d’ancrage territorial) que possède l’aliment :
« l ’ a l i m e n t a t i o n , un voyage dans l’espace social et dans l’imag i n a i re »
(Menzel ; question 6).
• La partie 3 poursuit cette réflexion en mettant notamment l’accent sur la prise en
compte dans l’innovation alimentaire des caractéristiques symboliques des
aliments ( C h iva). L’aliment, plus que tout autre objet de consommation, est
porteur d’identité. Les habitudes alimentaires émanent de la société (Lorelle,
Cabin) à travers une histoire, une culture, un inconscient collectif. Elles s’ancrent
dans un ensemble de valeurs et de pratiques collectives (St Pol, question 8).
• Pour la partie 4 : les aliments permettent de construire les ra p p o rts sociaux
(Fischler). L’alimentation constitue le socle le plus dur des identités collectives
(Boudan ; question 9). Elle fonde notre vision du monde social (Bourdieu). Les
aliments témoignent ainsi de nos appartenances, de nos cultures, et peuve n t
prendre le statut de symbole national (Barthes).
Question 11 :
Donnez un titre au dossier de textes. (1 point)
Le candidat peut rédiger de manière concrète (titre informatif) ou de manière plus
imagée (titre accrocheur) mais doit être en accord avec la thématique générale du
dossier : « Identité et culture culinaire ».
Question de synthèse
Question 12 :
Alors que certains évoquent un « goût mondial », cette phrase écrite à Paris en 1865
par J. et E. de Goncourt : « Le peuple déjeune, la bourgeoisie dîne, la noblesse soupe.
L’estomac se lève plus ou moins tard chez l’homme selon sa distinction » est-elle, selon
vous, toujours d’actualité ?
Après avoir affirmé vo t re position, vous montre rez en vous appuyant sur les
textes en quoi l’aliment n’est pas un produit comme les autres. (8 points)
141
C Le candidat afin de construire, de développer et d’ordonner sa réponse peut
s’appuyer sur le travail déjà réalisé, notamment à la question 10 (plan du dossier) et
utiliser les documents :
• Des parties 1, 2 et 3 afin de justifier en premier lieu de l’actualité et de l’importance
de cette question.
• Des parties 2, 3 et 4 afin de dégager rapidement les dimensions essentielles de
l’alimentation et d’accorder sa réflexion à la question posée.
• Des parties 1 et 4 pour souligner que l’aliment constitue le socle le plus dur des
identités collectives.
Consignes
Une majorité de candidats ne tient pas compte de la consigne explicite de s’ap-
puyer sur les textes pour rédiger la synthèse et ne semble pas savoir que cette rédaction
exige une introduction claire et la distinction visible des différentes parties.
Questions de repérage
L’échec dans cette partie de l’épreuve semble dû à une mauvaise gestion du temps
(questions non traitées).
Les points perdus sur cette partie de l’épreuve le sont donc le plus souvent à cause
d’une lecture insuffisamment attentive de la question précisément posée (ex. ne pas voir
dans la question 2 qu’il faut faire un calcul par personne).
Questions d’analyse
Pour répondre aux questions d’analyse, il serait souhaitable que les candidats refor-
mulent l’idée et ne se contentent pas de paraphraser avec plus ou moins d’adresse.
Beaucoup de candidats commentent ou illustrent. Très peu tentent de vraiment expliquer.
La différence se joue en général au niveau de la capacité à formuler la réponse de
façon synthétique.
Plan et titre
Les questions de titre et de plan sont souvent celles qui posent le plus de difficultés
aux candidats : soit que l’axe vraiment central du dossier ne soit pas repéré (par
142
exemple, le titre proposé pour l’ensemble du dossier fait totalement l’impasse sur les
questions d’identité culturelle liées au dossier…), soit que la progression du dossier ne
soit pas perçue.
Par ailleurs les candidats ont rarement le sens de la bonne formule et proposent
s o u vent soit des titres « fa d e s » et passe-partout, soit des formules excessives, certes
spectaculaires, mais qui ne sont pas fidèles à l’orientation générale du dossier.
C
Enfin, tous n’ont pas conscience du fait que cette partie de l’exercice exige une
exactitude lexicale et une correction syntaxique les plus parfaites possible.
Peu de candidats ont acquis le « sens du titre ».
Ils cherchent des titres très courts, des formules lapidaires et ne parviennent le plus
souvent qu’à des formules vides de sens.
Question de synthèse
Dans la synthèse, de nombreuses copies ne présentent ni introduction ni plan. La
synthèse se présente alors comme une énumération, marquée dans la forme par une
succession de paragraphes. Le lien est absent. De façon fréquente aussi les références
précises aux documents manquent.
La synthèse pour sa part a été diversement traitée. Des copies font l’impasse sur la
phrase des Goncourt ou y répondent dès l’introduction. Des copies ignorent ce qu’est
une véritable introduction : soit elles entrent directement dans le vif du sujet ; soit elles
oublient de poser la problématique suggérée par les 2 questions ; soit elles font l’im-
passe sur le plan adopté.
Quant à la synthèse proprement dite, quelques candidats se livrent à un catalogue
sans intérêt. D’autres sont tentés par le montage de citations.
Certaines copies se contentent de donner un avis personnel sur la question posée,
comme s’il n’y avait pas de dossier de textes.
Les meilleures copies sont celles qui ont révélé les capacités du candidat à struc-
turer sa réponse autour d’une réelle problématique celle-ci lui permettant de mobiliser
l’essentiel des points abordés dans le dossier.
Les moins bonnes copies ont pris évidemment des chemins plus variés. Quelques
copies inachevées, quelques catalogues incapables de hiérarchiser les idées, d’autres
enfin purement illustratives déclinant des successions d’exemples tirés du dossier.
Un grand nombre de synthèses, tout en proposant une exploitation du dossier plutôt
pertinente, n’ont pas vu que le sujet appelait une réflexion sur l’évolution des diff é-
rences culturelles et sociales exprimées par la gastronomie, et une réflexion parallèle sur
les différences, voire les inégalités, de conditions sociales qui s’expriment à travers le
mode d’alimentation.
Ont été davantage encore valorisées les synthèses qui ont su problématiser le traite-
ment du sujet, le plus souvent en examinant une opposition puisée dans le dossier de
texte entre tradition et innovation ou/et entre résistance de l’identité culturelle/alimen-
taire et développement d’une gastronomie perméable aux frontières, voire « globale ».
143
S ÉPREUVE DE LOG I Q UE
DÉROULEMENT DE L’ÉPREUVE
Elle se présente sous la forme de deux cahiers de questions.
Les questions sont précédées d’exemples résolus, d’exercices et de consignes précises.
Le travail demandé ne nécessite pas de connaissances particulières en mathéma-
tiques, mais une aptitude à passer d’un type de raisonnement à un autre.
Principes de correction
• Seules les bonnes réponses sont prises en compte ;
• Seules les réponses complètes et entièrement exactes sont comptées.
144
Les objectifs de cette épreuve sont :
• De tester les capacités d’observation et de compréhension du candidat ;
• De mesurer son aptitude au raisonnement logique sous différents aspects : verbal,
numérique, spatial, arithmétique, pictural, temporel… ;
• D’apprécier la manière dont il organise son temps et son travail.
S
Conseils
• Avant tout travail, lisez attentivement les consignes générales et les exemples
corrigés en page introductive, ils permettent d’entrer dans l’« esprit » de cette
épreuve ;
• Suivez les consignes du surveillant ;
• Écrivez soigneusement, distinctement, sans ambiguïté, précisément dans les
espaces prévus ;
• Ces épreuves appréhendant le rapport efficacité-rapidité, ne restez pas bloqué sur
une question, passez à la question suivante, ne perdez pas de temps à effacer.
A. B. C. D.
2. Monsieur SAS achète un portail pour sa nouvelle maison. Le vendeur lui accorde
un paiement en 3 échéances. Pour la première échéance, il verse les 2/5 de la
somme, pour la deuxième échéance, il verse 1/3 de ce qui reste et, à la troisième
échéance, il verse 600 euros. Quel est le prix du portail ?
A. 1 400 euros B. 1 500 euros C. 1 800 euros D. 2 000 euros
145
C 5. Le couple (-2 ; 1) est l’unique solution de l’un des quatre systèmes suivants :
A.
C.
B.
D.
6. Les tailles de quatre joueurs sont notées A, B, C, D, avec : A est plus petit que C ;
B n’est pas plus grand que D ; B n’est pas plus petit que C, donc :
A. D n’est pas plus petit que C B. D est plus petit que C
C. A est plus grand que D D. B est plus petit que A
D E
G F
146
CO URBES DE NOTES
Anglais
Allemand
Espagnol
147
CO URBES DE NOTES
Analyse et synthèse
Logique 1
Logique 2
148
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