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Tanger

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REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE

Ministère De L’enseignement Supérieur Et De La Recherche Scientifique

Université Abdelhamid Ibn Badis, Mostaganem

Faculté Des Sciences économiques, commerciales et des sciences de gestion


Département des sciences commerciales

Mémoire de fin d’études


En vue de l’obtention de diplôme de Magister en Management et Commerce
international

Intitule : Transport maritime en Algérie, insuffisances et


opportunités « comparaison entre le port de Mostaganem en
Algérie et le port de Tanger Med au Maroc »

Présenté par : Dirigé par :


KHADRA BRAHMA MEDJDOUB Docteur BENZIDANE EL HADJ
Le jury est composé de Messieurs :
Professeur Grade Qualité Université

Pr.YOUCEFI RACHID Professeur Président Mostaganem

Dr.BENZIDANE HADJ Maître de conférences A Rapporteur Mostaganem

Dr.MOKHEFI AMINE Maître de conférences A Examinateur Mostaganem

Dr.BELGACEM M’HAMED Maître de conférences A Examinateur Mostaganem

Dr.AHMED SEDIKI Maître de conférences A Examinateur Adrar

Année universitaire : 2016-2017


TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS
DEDICACE
TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX
RESUME
INTRODUCTION
PARTIE I. CADRE THEORIQUE : TRANSPORT MARITIME, LOGISTIQUE
MARITIME ET COMPETITIVITE INTERNATIONALE
I. Actualité, Faits et Chiffres du transport Maritime international
1. Le transport maritime à l’échelle mondiale et africaine
2. Le transport maritime à l’échelle du Maghreb

II. Logistique maritime et compétitivité internationale


1. Spécificités de la logistique maritime
2. La conteneurisation et son fonctionnement
3. Les leviers de la compétitivité dans le contexte portuaire
PARTIE II. LE SYSTEME PORTUAIRE ALGERIEN ET SES DEFIS
I. Economie algérienne et industrie maritime
1. Caractéristiques et état de l’économie Algérienne
2. Généralités sur le contexte maritime algérien
II. L’Etat des Infrastructures maritimes en Algérie
1. La flotte algérienne et son évolution
2. Les installations techniques
III. L’organisation et les acteurs du transport maritime algérien
1. Le poids du transport maritime dans l’économie algérienne
2. Dimension fonctionnelle (qui fait quoi ?)
IV. Dimension économique (comment sont générées les plus-values ?)
V. Analyse de la performance des ports algériens : résultats et insuffisances
1. Etat des résultats des ports Algériens sur les dernières années
2. Actions importantes à engager par les ports algériens
3. Bilan de performance : notre matrice d’évaluation des ports algériens
4. Perspectives de développement des ports algériens
Conclusion de la Partie II.
PARTIE III. ANALYSE COMPARATIVE ENTRE LE PORT DE MOSTAGANEM
(ALGERIE) ET LE PORT DE TANGER (MAROC)
I. Objectifs et méthodologie
1. Objectifs et contexte de la comparaison
2. Economie algérienne et économie marocaine : une confrontation
3. Méthodologie et ressources pour l’analyse comparative
4. Présentation des axes de comparaison considérés
5. Présentation rapide des ports comparés
II. Comparaison selon l’axe technique et logistique
1. Matrice de comparaison par critères (axe technique)

1
2. Focus sur quelques points
III. Comparaison selon l’axe organisationnel et managérial
1. Matrice de comparaison par critères (axe organisationnel et managérial)
2. Focus sur quelques points clés

IV. Comparaison selon l’axe économique et de compétitivité


1. Comparaison par critères
2. Focus sur quelques points clés

V. Bilan et test des hypothèses


1. Bilan de la comparaison
2. Interprétation et test des hypothèses

CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

2
Remerciements

Dédicaces

3
4
RESUME

L’objet du présent Mémoire est de proposer une analyse du secteur portuaire algérien afin de
déterminer ses vulnérabilités et d’en explorer les possibilités d’amélioration. Après de
longues décennies de résultats parfaitement intéressants à l’échelle régionale et même
africaine, le transport maritime algérien connait, depuis quelques années, de graves difficultés
qui affectent son fonctionnement interne et plombent sa compétitivité internationale. Les
faiblesses les plus notables semblent porter sur la taille de la flotte et la faiblesse logistique,
notamment s’agissant des capacités de gestion en matière de conteneurisation. Face à ces
difficultés, les autorités algériennes ont entrepris un certain nombre de réformes qui tardent
cependant à prendre corps. La problématique de ce travail tourne dès lors autour des
difficultés du transport maritime algérien et des nouvelles opportunités offertes au secteur afin
de retrouver la performance et la compétitivité : « Quelle est la nature des problèmes qui
limitent la compétitivité des ports algériens et comment y remédier ?». Deux dimensions
sont explorées afin de répondre à cette question : - Tout d’abord La dimension des difficultés
(les écueils de l’exploitation portuaire en Algérie) : qui répond à la question de savoir
pourquoi les ports algériens sont aussi peu performants. - La dimension des opportunités (les
nouvelles possibilités de développement portuaire en Algérie) qui répond à la question de
savoir « Comment rendre les ports algériens compétitifs?». Afin de répondre à cette
question, nous nous sommes appuyé sur une analyse documentaire et une enquête
comparative entre le deux ports opérant dans deux environnements : le port de Mostaganem
(pour le contexte algérien) et le port de Tanger (pour le contexte de comparaison, précisément
marocain). Nos investigations tant théoriques qu’empiriques révèlent globalement deux
tendances et niveaux de résultats provisoires :

- S’agissant des difficultés, les ports algériens souffrent d’un défaut d’organisation technique
et logistique. Ils sont aussi affectés par une flotte limitée et des coûts d’exploitation trop
élevés pour être compétitifs à l’échelle internationale. Ces difficultés apparaissent toutes au
niveau du port de Mostaganem que nous avons étudié.

- S’agissant des opportunités, la piste de la conteneurisation semble pouvoir offrir de


nouvelles perspectives en termes d’optimisation de la chaine logistique, ce qui procurerait des
avantages techniques et financiers importants qui apparaissent dans le contexte du port de
Tanger et qui peuvent être reproduits dans l’environnement algérien

Mots clés : transport maritime, logistique maritime, conteneurisation, coûts,


compétitivité

5
INTRODUCTION

Le transport maritime est le mode de transport le plus utilisé pour le commerce international.
Selon la CNUCED, 80% du commerce mondial en volume (et 70% en valeur)1 transitent par
voie maritime. C'est le seul mode de transport capable d'assurer à un coût attractif les
échanges liés au commerce intercontinental, le commerce maritime correspond donc à
l’ossature du commerce international. A. Smith (1776) dans son livre La richesse des Nations
soulignait déjà l’importance des transports par eau pour l’industrialisation des villes côtières.
Des analyses économiques ont démontré aussi l’importance de l’impact des ports dans le
développement économique d’un pays. Ainsi, d’après (FUJITA et al. 1999 ; Clark et al.
2004), les ports sont considérés comme des pôles de croissance, véritable moteur du
développement économique. Selon D. Salvatore (2008) les coûts de transport au Moyen orient
et Afrique du nord sont deux fois plus élevés que ceux des pays développés. L’Algérie
dispose d’une façade maritime de plus de 1200 km jalonnée de 11 ports de commerce, ce qui
à priori lui offre de nombreuses opportunités naturelles en termes de développement portuaire.
En effet, durant les années 80, l’Algérie disposait d’une flotte enviable, parmi les plus
importantes du tiers monde. Elle était classée parmi les 50 premières mondiales. La flotte,
sous pavillon algérien, était alors composée de plus de 80 navires de tous types confondus
(vraquiers, tankers, chimiquiers, transporteurs de gaz, pétroliers, Multipurpose, RORO, car-
ferries). L’ensemble de cette flotte était exploitée par la CNAN qui constituait un grand
armateur au niveau mondial. En plus de sa propre flotte, la CNAN faisait appel à des navires
affrétés dans le domaine aussi bien des produits en vrac(s) que des produits secs et liquides
(céréales, charbon, huiles, vins, etc.…)

Toutefois, ces dernières années, à l’observation, l’Algérie a cumulé les mauvais points en
matière de développement des infrastructures portuaires, se situant, selon une étude du réseau
ANIMA2, bien loin derrière le Maroc, la Tunisie, et l’Egypte. Nous arrivons en fait à un stade
où l’on peut objectivement considérer que l’Algérie ne dispose plus d’un armement pour le
transport maritime des marchandises générales. Avec l’effritement de la flotte restante, on
peut s’interroger à présent sur le devenir des personnels, notamment les centaines de
navigants formés à prix fort et constituant la ressource à la fois la plus précieuse et la plus

1
OCDE :Etude sur les transports maritime,2012, < http://unctad.org/fr/PublicationsLibrary/rmt2012_fr.pdf>
consulté le 23 janvier 2014
2
ANIMA : réseau Euro-méditerranéen d’agence de promotion de l’investissement, revue de presse <
http://www.animaweb.org/sites/default/files/kcfinder/files/AIN_Revue%20de%20Presse_May2012.pdf>
consulté le 24 juillet 2014

6
difficile à reconstituer et également sur les risques qui pèsent sur notre pays en matière de
sécurité des approvisionnements et d’exportation. Aujourd’hui l’Algérie fait face à de
sérieuses difficultés dans son exploitation portuaire. Les ports algériens notamment sont
considérés comme les ports les moins performants de la Méditerranée malgré leur importance
(étant donné qu’y transitent 95% des échanges de marchandises du pays). Ces ports ont connu
depuis l’indépendance, une gestion étatique et ont continuellement, «souffert du manque
d’investissement et de l’abus de la part des sociétés nationales qui sont les principaux
chargeurs» (MOHAMMED-CHERIF, 2007). L’investissement public dans ce secteur n’a
concerné que les ports pétroliers importants pour l’économie nationale au vu de la rente que
génèrent les hydrocarbures. Le transport maritime algérien peut dès lors être perçu comme le
véritable talon d’Achille du commerce international algérien.

Ce constat est lié à un certain nombre de vulnérabilités qu’il convient d’emblée, dans cette
introduction, d’évoquer : - Une gestion inefficace des coûts qui génère une fragilité
économique : d’après le secrétaire général du ministère des transports Algérien, s’il est vrai
que 95% du transport de marchandises se fait par voie maritime, il se trouve aussi que le coût
du transport représente 10 % du coût de la valeur de la marchandise, alors que dans les pays
développés, il est de moins de 4%. Les surestaries (frais de déchargement) notamment ne
cessent d’augmenter chaque année. - Conséquence de ces coûts logistiques non maitrisés :un
défaut de compétitivité des produits algériens, leur coût à l’export constituant même un
facteur d’éviction et à l’inverse, un surenchérissement ensuite des prix des produits importés.
- Une gestion administrative et logistique aléatoire : les ports commerciaux algériens
subissent une forte pression, engendrant la congestion des plus grands ports du pays. Cette
situation s’explique entre autres par une importante lourdeur dans la gestion portuaire. Ainsi
donc, les ports algériens tendent à constituer un frein au développement du commerce
extérieur et sont devenus au fil des ans, sources de pertes impactant la balance des paiements.
Ainsi, L’Algérie perdrait de ce fait, chaque année, 2,6 milliards de dollars en coûts de fret en
raison de la taille et de la mauvaise gestion de ses ports3.

A ce propos, la question des flux de conteneurs est cruciale dans le contexte maritime
algérien. En effet, on sait que les flux de conteneurs ont été un levier important de

3
BOUMESSILA, A.2010 «Quelles Perspectives pour le système portuaire algérien " , CARE , http://care-
dz.org/wp-content/uploads/2013/11/REVUE-DE-PRESSE-13-04-2010.pdf consulté le 03 juin 2014

7
globalisation et de libéralisation des échanges ces dernières années4 et sont désormais au cœur
de la compétition portuaire (MARCADON, 1995). La conteneurisation permet notamment
d’éviter les ruptures de charges génératrices de coûts. A cet effet, on peut se demander si la
conteneurisation ne serait pas la solution pour améliorer la compétitivité des ports algériens,
puisqu’elle engendrerait une réorganisation des procédures et de la chaine logistique, dans
l’esprit d’un gain en flexibilité et en compétitivité.

Notre travail de Magistère repose sur ce contexte et ces différents constats. En termes
d’objectifs, nous avons en effet souhaité analyser en profondeur les différentes vulnérabilités
du système portuaire algérien afin de comprendre où en est l’exploitation portuaire
aujourd’hui en Algérie et comment améliorer la performance maritime en Algérie. La
problématique qui découle de cet objectif s’énonce dès lors assez clairement : « Quelle est la
nature des problèmes qui limitent la compétitivité des ports algériens et comment y remédier ?
» Une telle problématique permet de poser deux questions associées (Q1 et Q2) qui sont liées
aux deux dimensions de ce travail (« la dimension des limites » et « la dimension des
opportunités »), lesquelles vont constituer précisément nos deux axes d’analyse :

- Axe 1. Dimension des difficultés (les écueils de l’exploitation portuaire en Algérie) : « Q1 :


Pourquoi les ports algériens sont-ils aussi peu performants ?». Il s’agit pour nous d’évaluer le
niveau et la qualité de la de l’exploitation des ports algériens. La question principale ici est
donc celle de la gestion managériale et de l’impact des ports algériens sur le commerce
international.

- Axe 2. Dimension des opportunités (les nouvelles possibilités de développement portuaire


en Algérie) : « Q1 : Comment rendre les ports algériens compétitifs?». La question qui se
pose ici est celle de la gestion optimale des opportunités sociales, économiques et logistiques
qui s’offrent aux ports algériens en vue de parvenir à une gestion efficiente et une
compétitivité internationale accrue. Une des pistes prometteuses peut être celle d’un
déploiement optimal du système de conteneurisation notamment au sein du port de
Mostaganem

L’intérêt finalement de ce travail est de savoir pourquoi les ports algériens sont peu
compétitifs et comment inverser cette tendance au regard des opportunités du contexte socio-

4
Antoine Frémont, « Conteneurisation et mondialisation : Les logiques des armements de lignes
régulières »,texte d’habilitation à dériger des recherches, Univrsité Paris 1 Panthéon Sorbonne,2010, 59P

8
économique algérien. Deux Hypothèses, en réponse à ces deux sous questions, peuvent être
avancées comme piste de réponse provisoire : - H1 : les ports algériens souffrent d’une
mauvaise organisation managériale et d’une incapacité à affronter la concurrence
internationale, du fait notamment d’une flotte insuffisante et d’une gestion des coûts
défaillante.

- H2 : une meilleure exploitation des atouts géographiques, structurels et socio économiques


de l’Algérie est le point de départ pour une meilleure performance des ports du pays.

En termes de méthodologie, nous nous appuyons (1) pour le volet théorique, sur une
recherche documentaire pour la récolte des données théoriques et contextuelles et (2) pour le
volet empirique, sur une enquête statistique qui dégage les grands axes et chiffres de la
performance portuaire algérienne, La méthode inductive nous a été très utile dans la
généralisation des résultats. Enfin (3) pour le volet interprétatif, un exercice de comparaison
qui a permis d’effectuer des confrontations analytiques utiles entre un port algérien et un port
marocain. Précisément, nous avons entrepris d’effectuer une comparaison entre deux
environnements empiriques correspondant à deux infrastructures portuaires : le port de
Mostaganem en Algérie et le port de Tanger au Maroc. Cette comparaison est effectuée pour,
entre autres, vérifier l’hypothèse de l’opportunité de la conteneurisation pour les ports
Algériens.

Notre Mémoire va se décliner, dans sa rédaction, en trois moments :

Tout d’abord, dans une première partie conceptuelle et théorique, nous explorerons
l’univers du transport maritime, du commerce international et de la logistique
maritime en général.
Ensuite, dans une seconde partie descriptive, nous présenterons le système portuaire
algérien (infrastructures, équipements, organisation). Nous évaluerons le volume du
trafic portuaire des quinze dernières années et son impact sur l’économie nationale.

9
Partie I. Cadre théorique : Transport maritime, logistique
maritime et compétitivité internationale

Dans cette première partie conceptuelle et théorique, nous explorerons l’univers du transport
maritime, du commerce international et de la logistique maritime en général. Par ailleurs dans
une logique descriptive, nous présenterons le système portuaire algérien (infrastructures,
équipements, organisation), et le volume du trafic portuaire des quinze dernières années de
même que son impact sur l’économie nationale.

10
I. Actualité, faits et chiffres du transport maritime international

Décrivons les grands traits du transport maritime à l’échelle mondiale et africaine. Nous
ferons ensuite un focus sur le cas spécifique du Maghreb.

1. Le transport maritime à l’échelle mondiale et africaine

Dans le secteur des transports maritimes, tout tient aux conditions macroéconomiques
mondiales dans la mesure où l’évolution du trafic maritime international est le reflet de la
conjoncture de l’économie toute entière. De fait, après le recul enregistré en 2009, le trafic
maritime international a été marqué par une reprise de la demande en 2010, couplée à une
augmentation du volume des échanges par voie maritime, en particulier dans les secteurs du
vrac sec et des marchandises conteneurisées. Les perspectives restent toutefois fragiles, le
commerce maritime étant soumis aux mêmes incertitudes et aux mêmes chocs que connaît
l’économie mondiale.

1.1. Contexte mondial du transport maritime

Avant de décrire les chiffres du transport maritime à l’échelle mondiale, il convient de citer
quelques données sur l’évolution actuelle de l’économie mondiale étant donné la forte
corrélation existant entre transport maritime et la macroéconomie internationale.

1.1.1. Evolution de l’économie mondiale

D’après la Banque Mondiale, l’économie mondiale s’est considérablement affaiblie en 2012.


Un nombre croissant de pays développés sont retombés dans une récession, notamment en
Europe, tandis que ceux faisant face à un surendettement ont sombré encore plus
profondément dans la récession. De nombreux pays développés sont pris dans une spirale
descendante se renforçant à cause d’un chômage élevé, d’une faiblesse de la demande globale
exacerbée par l’austérité budgétaire, un endettement public élevé et un système financier
toujours fragile. Pour 2014 toutefois les perspectives semblent être prometteuses, même s’il
faut rester prudent. Pour Jim Yong Kim, Président du Groupe de la Banque mondiale « la
croissance semble se renforcer aussi bien dans les pays à revenu élevé que dans les pays en
développement, mais des risques de détérioration continuent de peser sur la reprise
économique mondiale » dans le Rapport 2013 de la Banque Mondiale sur les perspectives de
l’économie, la situation est celle d’une légère reprise (autant pour les pays développés que

11
pour les pays en voie de développement), ce qui est appréciable, après les difficultés de 2011
et 2012. Le graphique ci-dessous le décrit assez bien.

Figure 1 : Perspectives de l’économie mondiale, 2013-2016

Source : Rapport sur le commerce mondiale5


Globalement, trois enseignements majeurs peuvent être mis en exergue, suite au rapport 2013
de la Banque Mondiale :

Une tendance au redressement des pays avancés, selon les perspectives économiques
mondiales
Un raffermissement de l’’activité économique des pays en développement après deux
années de fléchissement
L’atténuation des mesures de relance monétaire aux États-Unis qui pourraient
compliquer la reprise de l’économie mondiale

1.1.2. Chiffres et réalités du transport maritime à l’échelle mondiale

a. Contexte global

«Qui tient la mer tient le commerce du monde", écrivait le poète et explorateur anglais sir
Walter Raleigh (1552-1618). Le transport maritime est la pierre angulaire du commerce

5
OMC :Rapport sur le commerce mondiale 2013, « Facteurs déterminant l’avenir du commerce mondiale » <
https://www.wto.org/english/res_e/publications_e/wtr13_e.htm> consulté le 22/04/2014

12
international et de l’économie mondiale. Environ 80 % du commerce mondial en volume et
plus de 70 % en valeur sont acheminés par mer et manipulés par les ports du monde entier. La
proportion est encore plus élevée pour la plupart des pays en développement. Ces dernières
années, les services de transport maritime ont connu une forte expansion grâce à la
mondialisation. De nombreuses mesures visant à restreindre la fourniture de ces services ont
expiré ou ont cessé d'être appliquées. Cependant au rang des difficultés auxquelles le secteur
est confronté, nous pouvons citer le marasme économique mondial de ces dernières années,
les coûts et la sécurité énergétique ainsi que la question connexe de l’empreinte écologique
des transports

Une récente étude de la CNUCED souligne en revanche que de nouvelles opportunités


émergent du fait notamment de la croissance du trafic maritime régional et de la coopération
Sud-Sud, du changement structurel de la carte énergétique mondiale et de ses répercussions
sur le trafic des pétroliers, de l’expansion ou de l’ouverture prévue de nouveaux itinéraires par
l’océan Arctique et par le canal de Panama élargi (le nouveau canal devrait être ouvert en
2015) 6.

b. Analyse des chiffres

Stimulé par la croissance de la demande intérieure en Chine et du commerce intra-asiatique et


Sud-Sud, la performance positive du trafic maritime international s’est poursuivie en 2012
avec une croissance annuelle des volumes estimée à 4,3 % et un chiffre record de 9,2
milliards de tonnes indique la nouvelle Étude sur les transports maritimes 2013 que la
CNUCED rend public en fin 20137. L'étude constate une augmentation du débit mondial des
ports de conteneurs dans une proportion estimée à 3,8 %, atteignant 601,8 millions
d’équivalents 20 pieds en 2012. Cette croissance s’est répercutée sur le dynamisme du secteur
du financement des ports, les investisseurs s'étant tournés vers l’infrastructure pour obtenir
des rendements à long terme stables8. L’accroissement du trafic en 2012 n’a guère contribué
à stimuler la rentabilité des transports maritimes, bien que l’an dernier, pour la première fois
depuis plus de dix ans, le nombre de navires mis en service ait diminué par rapport au total de
l’année précédente. Le plus vigoureux cycle de construction navale de l’histoire − la capacité
de port en lourd de la flotte mondiale a plus que doublé entre 2001 et janvier 2013 − a
finalement amorcé un ralentissement. Or, malgré un nombre plus restreint de navires neufs, la

6
UNCTAD, Review of Maritime Transport,op.cit, p. 2013, Geneva
7
UNCTAD, Ibid, 2013
8
UNCTAD, Ibid (op cit), p.

13
capacité mondiale de port en lourd a continué à croître en 2012, enregistrant un accroissement
de 6 % par rapport à janvier de la même année. En conséquence, l’excédent généralisé de
capacité s’est maintenu tout au long de l’année 20129.

c. Réalités du transport maritime

Les navires transporteurs sont de plus en plus grands. Ils dépassent aujourd’hui 350 m de long
(plus que la hauteur de la Tour Eiffel !). Chaque conteneur mesure 6,06 m de long, 2,44 m de
large et 2,60 m de hauteur. Il peut transporter 18 000 kg de marchandises. Le prix du transport
maritime pour aller au bout du monde a beaucoup diminué : selon une comparaison du
BELEM10, cela coûte aujourd’hui moins cher de transporter une voiture de Chine en Europe
que de prendre un taxi pour aller du centre de Paris à l’aéroport d’Orly en France.

Au niveau de la règlementation internationale il est important de signaler que l’Organisation


maritime internationale (OMI) a adopté en octobre 2012 et mai 2013 de nouvelles directives
et des interprétations unifiées pour faciliter l’application depuis le 1er janvier 2013 d’un
ensemble de mesures techniques et opérationnelles visant à améliorer l’efficacité énergétique
et à réduire les émissions de gaz à effet de serre causées par le transport maritime
international.

En termes de volume pour les porte-conteneurs, quelques chiffres s’imposent : dans son
rapport annuel en 2012, le courtier parisien BRS met en évidence la croissance continue du
monde de la conteneurisation.

« La flotte conteneurisée a augmenté de 7,9% en 2010 et de 8% en 2011 »11. Au 1er janvier


2012, Alphaliner recense ainsi 4 849 navires pour une capacité de 15,7 MEVP. Pour la
première fois depuis quatre ans, le nombre de navires est en baisse de 1,1% à 4 849 unités.
Dans le même temps, la capacité de la flotte continue sa croissance. Elle progresse de 11,4% à
15,7 MEVP en 201112.

9
UNCTAD : communiqué de presse : 04 décembre 2013, Geneve, Suisse
http://unctad.org/fr/Pages/PressRelease.aspx?OriginalVersionID=166 consulté le 20 février 2014
10
BELEM, Le commerce maritime international aujourd’hui ;fiche n°28 http://www.editions-
belize.com/f/fiches/CHAP02/fiche28.pdf consulté le 20 Août 2014
11
Journal de la Marine marchande, Dossier : Conteneurisation, le tiercé de tête reste en Europe, n°4850 du 23
novembre 2012
12
Chiffres repris dans Journal de la Marine marchande, Dossier : Conteneurisation, le tiercé de tête reste en
Europe, n°4850 du 23 novembre 2012

14
Finalement, malgré quelques récents soubresauts marqués parfois par des récessions, la
croissance du trafic de conteneurs a été constante depuis 40 ans. Récemment le conteneur a
retrouvé un réel dynamisme qui s’est confirmé en 2011, comme en témoigne le graphique
suivant qui livre l’évolution du phénomène dans le temps.

Figure 2. Le marché des conteneurs de 1966 à 2011

Source : Direction des études économiques, Port de Montréal

Livrons à présent une liste des plus grands ports à conteneurs qui donne précisément le
classement annuel et l'évolution du trafic conteneurs des principaux ports de commerce
mondiaux. Le nombre de conteneurs est exprimé en millions d'EVP, « équivalent vingt pieds
» Sont pris en compte celles arrivant au port ainsi que celles partant, qu'elles soient chargées
ou vides.

15
Figure 3. Tableau des 30 plus grands ports de porte-conteneurs du monde en 2013 avec
l’évolution depuis 2010

Source : AAPA (American Association of Port Authorities)

16
Voyons à présent ce qu’il en est des évolutions du contexte africain pour le transport
maritime. Nous ferons plus loin un focus sur la situation au Maghreb.

1.2. Contexte africain

La part de l'Afrique dans le commerce mondial n’a cessé d'augmenter ces dernières années et
les armateurs l'ont bien compris. Confrontés à la crise presque partout ailleurs, ils intensifient
leurs activités en direction du continent. "En 1974, l'Afrique représentait 10,2 % des
cargaisons embarquées dans le monde et 2,5 % des cargaisons débarquées. Ces pourcentages
ont nettement augmenté, surtout pour les tonnages débarqués, qui ont plus que doublé",
constate l'expert maritime Serigne Thiam Diop, secrétaire général de l'Union des conseils des
chargeurs africains13. Au sortir de la crise de 2008-2010, les trois grands armateurs mondiaux
que sont Maersk, CMA CGM et Mediterranean Shipping Company (MSC) ont bien compris
que le maintien de leur hégémonie passait par le renforcement de leur positionnement sur le
continent africain, où le commerce maritime est en expansion constante. La CNUCED dans
un rapport publié en 2011 ne s’y trompait pas lorsqu’elle revelait, dans un rapport publié en
2011 que " les 30 plus grandes compagnies maritimes de ligne ont enregistré en 2009 les pires
résultats de leur histoire, avec des pertes collectives estimées à 19,4 milliards de dollars [13,5
milliards d'euros], après des bénéfices de 5 milliards de dollars l'année précédente". Mais en
2010, "les mêmes compagnies ont réalisé des bénéfices cumulés de 17 milliards de dollars",
soit plus du double de leurs prévisions. Entre-temps, elles se sont réorganisées en remplaçant
certains de leurs navires et ont bénéficié d'une baisse providentielle des prix du carburant14.
Les principaux armateurs ont du reste singulièrement conforté leur présence sur le continent
africain en nouant des alliances et en procédant à des fusions. Ils ont aussi diversifié leurs
activités dans la manutention, la gestion des terminaux et la logistique. Enfin, ils ont
réorganisé leurs lignes maritimes afin que leurs navires se croisent sur des plateformes de
transbordement, réduisant ainsi les coûts d'escale. Dès lors, les pays côtiers s'organisent afin
de préparer leur interfaces portuaires et notamment de les adapter aux navires de nouvelle
génération. Les exemples ne manquent pas, comme le constatent les analystes15 :

Le port de Tanger Med, au Maroc, existe depuis moins de 10 ans, mais a la ferme
détermination de capter sa part des 100 000 navires qui passent chaque année par le
13
Abdel Pitroipa : Les armateurs mettent le cap sur la croissance africaine, Jeune Afrique oct 2013,
http://economie.jeuneafrique.com/dossiers-2/530-transport-maritime--ports-a-prendre/18778-les-armateurs-
mettent-le-cap-sur-la-croissance-africaine.html consulté le 16 juin 2014
14
CNUCED, Review of Maritime Transport, 2011, Geneva
15
Abdel Pitroipa, op . cit.

17
détroit de Gibraltar (20 % du trafic mondial). Cela en fait le grand rival d'Algésiras
(Espagne). Le Port de Tanger Med vise 8 millions de conteneurs manutentionnés par
an à l'horizon 2016, en construisant une extension portuaire d'une capacité de 5,2
millions de conteneurs qui viendra s'ajouter aux 3 millions actuels.
En Afrique de l'Est, la Tanzanie s'apprête à abriter le plus grand port d'Afrique à
Bagamoyo afin de devenir l'interface de référence pour toute la côte orientale,
reléguant Port Louis et Djibouti (qui prévoit cinq nouveaux terminaux d'ici à 2017) au
rang de destinations secondaires.
Dans le golfe de Guinée, la grande plateforme de transit régional d'Abidjan se dote
d'un second terminal à conteneurs, dont la concession a été attribuée à Bolloré Africa
Logistics (BAL), tandis qu'un mégaport est prévu à Badagry, au Nigeria, dont les
travaux doivent débuter en 2016. Le projet de l'investisseur APM Terminals (APMT,
filiale de Maersk) doit permettre au pays d'éviter une saturation de ses capacités
portuaires et d'absorber un trafic de 10 millions d'équivalents vingt pieds (EVP) par
an, volume que le Nigeria pourrait atteindre d'ici à trente ans.
Enfin, les ports sud-africains font quant à eux à l'objet d'un investissement national
de 4,5 milliards d'euros jusqu'en 2019, afin de conserver leur leadership dans la zone
australe

Portons un focus sur les évolutions au niveau spécifique de la région du Maghreb.

2. Le transport maritime à l’échelle du Maghreb

2.1. L’environnement portuaire méditerranéen

Mohamed-Chérif et Ducruet, (2011) passent en revue les éléments de convergence et de


divergence dans l’organisation spatiale de cette façade du Maghreb central (Maroc, Algérie,
Tunisie) et analysent le rôle des ports et du transport maritime dans la mise en relation
régionale et mondiale des espaces du Maghreb. Malgré le rôle-clé des ports dans l’économie
régionale, la croissance du trafic et l’élargissement géographique des avant-pays maritimes,
l’intégration territoriale de cette région reste limitée. Restituons quelques uns des atouts de
ces pays, tout comme quelques faiblesses.

18
2.2. Atouts et défis du transport maritime au Maghreb

2.2.1. Atouts

La position géographique : le Maghreb central (Maroc, Algérie, Tunisie) détient une


façade maritime d’environ 3 000 km située en bordure de la mer Méditerranée et de
l’océan Atlantique. Sa position de carrefour entre deux mers et deux continents en fait
un acteur stratégique de l’interface Nord/Sud que constitue la mer Méditerranée.

L’extraversion : il s’agit d’une donnée historique importante. En effet, le transport


maritime concentre l’essentiel du commerce international des pays du Maghreb, ce
qui donne aux ports un rôle essentiel dans la structuration des territoires. Les raisons
de cette situation interessante correspondent à un modèle spatial fréquent dans les
pays en voie de développement qui vient en fait de l’histoire : il s’agit de
l’extraversion en direction de l’Europe, laquelle a conduit à un basculement du
peuplement et des activités économiques sur le littoral, comme en Afrique de l’Ouest
(Debrie et al., 2003). Les échanges internationaux y dépendent fortement du transport
maritime (environ 90%).

La densité humaine et la concentration sur le littoral C’est la conséquence naturelle de


l’extraversion citée ci-haut. Les capitales politiques (Rabat, Alger, Tunis) et
économiques (Casablanca, Alger, Tunis) actuelles sont toutes situées sur les côtes,
comme d’autres grandes villes telles qu’Agadir, Tanger (Maroc) et Oran (Algérie).
Les seules agglomérations d’envergure à l’intérieur des terres sont Fès et Marrakech,
les deux capitales historiques du Maroc, et Constantine en Algérie. La façade
maritime est ainsi devenue une zone de concentration de la population comme le
démontre la figure ci-dessous (MohamedChérif, Ducruet, 2011)

19
Figure 4. Hiérarchie urbaine et densité de population au Maghreb en 2005

Source : Mohamed Cherif et ducuret

A partir de ce graphique, on peut selon Mohamed-Chérif et Ducruet, (2011) le constat de


systèmes polycéphales spatialement déséquilibrés au Maroc et en Algérie, et d’un système
macrocéphale en Tunisie. Le rythme de la croissance urbaine est soutenu, effet d’un
accroissement naturel fort et d’un exode rural qui perdure. En Algérie, le littoral qui occupe
2% du territoire national regroupe plus de 40% de la population. En Tunisie, le taux
d’urbanisation est le plus élevé du Maghreb avec 64% (Belhedi, 2005). Précisons avec les
auteurs qu’au Maroc, sur la façade atlantique, la densité moyenne est de 160 habitants/km2
entre Kénitra et Casablanca, contre 90 habitants/km2 sur le littoral méditerranéen.

Un rôle économique important La façade maritime maghrébine combine ainsi une


multitude de fonctions économiques en lien étroit avec les ports et le commerce
maritime, lesquels jouent un rôle pivot dans l’économie des pays concernés.
L’approvisionnement en biens manufacturés, en produits alimentaires, les exportations
de matières premières, les flux de l’industrie textile et les voyageurs sont autant de
flux alimentant (et causés par) la façade maritime. Le graphique suivant met en
lumière quelques tendances intéressantes qu’il convient de commenter plus loin

20
Figure 5. Évolution du trafic portuaire par pays, 1981-2009

D’après ce graphique (Mohamed-Chérif, Ducruet, 2011), la Tunisie importait 20 millions de


tonnes sur un total de 30 millions de tonnes de trafic en 2008, le port principal du pays étant
Rades, dans l’orbite de Tunis. Le Maroc, pour sa part importait par voie maritime, en 2009,
deux tiers des 59,8 millions de tonnes manutentionnées dans ses ports, le port de Casablanca
absorbant 40% du trafic national. Enfin l’Algérie, quant à elle, importait seulement 23% du
trafic total passant par ses ports (130 millions de tonnes) en 2008, en raison du poids énorme
des exportations d’hydrocarbures, le port d’Alger monopolisant le trafic des marchandises
diverses. Ainsi, le trafic maritime reflète la nature du commerce extérieur de ces nations, avec
un poids plus faible du trafic portuaire tunisien lié à la dominance de produits finis ou semi-
finis comme le textile

2.2.2. Limites et défis

Le niveau des infrastructures : paradoxalement, les infrastructures portuaires par


lesquelles transitent ces échanges ont été très peu modernisées depuis la fin de
l’époque coloniale; elles se trouvent donc en décalage croissant par rapport aux
normes mondiales de la logistique moderne (Tourret, 2005; Frémont, 2010) et par
rapports aux attentes économiques et stratégiques de ces Etats. Le défaut
d’intégration à l’échelle régionale : il s’agit d’un handicap majeur. Les trois principaux
pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) ont certes connu des trajectoires politico-

21
économiques assez différentes depuis leur indépendance, mais on aurait pu imaginer
tout de même l’émergence, au bout de quelques décennies, de dynamiques communes
qui permettent de faire l’hypothèse de la constitution d’une façade maritime intégrée.
Mais pour le moment force est de constater que ce n’est pas encore le cas. En réalité,
en dépit du rôle-clé des ports dans l’économie régionale, la croissance du trafic et
l’élargissement géographique des avant-pays maritimes, l’intégration territoriale de
cette région reste outrageusement limitée. A ce propos, Romagnoli et Mengoni
(2009). observent que « seulement 7 à 8% du commerce total des pays concernés est
interne à la région, tandis que le commerce intra-régional ne représente qu’environ 3,5
% du produit régional brut, contre 26% en Asie orientale et en Amérique du Nord,
16% en Europe et 6% en Amérique latine » Par ailleurs, l’hétérogénéité des conditions
économiques, l’internationalisation limitée, la trop forte spécialisation dans les
ressources naturelles et les produits à faible valeur, et la polarisation des flux
commerciaux par l’Europe sont autant de facteurs limitant l’intégration. Par ailleurs,
les tensions politiques entre les différents pays, le protectionnisme, les barrières
tarifaires et la faible connectivité des transports terrestres (Mohamed-Chérif, Ducruet,
2011) n’ont pas facilité le rapprochement. A titre d’illustration, la fermeture de la
frontière Maroc/Algérie, les barrières douanières et le raccordement très partiel des
voies ferrées et routières entre les trois pays sont autant d’éléments qui font du
Maghreb un espace faiblement intégré du point de vue logistique. La concentration des
réseaux terrestres le long du littoral et autour des ports fait de ces derniers des goulets
d’étranglement (Benabderrazik, 2008) (Mohamed-Chérif, Ducruet, 2011).
Les dysfonctionnements logistiques : conséquence au moins en partie de ce défaut
d’intégration, de multiples dysfonctionnement apparaissent notamment au niveau de la
gestion logistique. Ces dysfonctionnements sont énumérés par les analystes qui y
voient la source du manque de performance des ports dans la région du Maghreb
(Mohamed-Chérif, Ducruet, 2008). (Mohamed-Chérif, Ducruet, 2011).
(i) l’efficacité de la chaîne de transport maritime reste faible par rapport aux
standards internationaux, en raison de la gestion médiocre des opérations
portuaires par les autorités publiques (frais de maintenance portuaire, lenteur
des opérations douanières, faiblesse de la concurrence et de la participation du
secteur privé), d’où un coût du transport maritime avec le Maghreb plus élevé
qu’avec les autres régions méditerranéennes (Ulied, Bosca, 2008);

22
(ii) l’absence d’une chaîne de logistique de transport reliant les trois pays du
Maghreb. Cette absence a pour effet d’augmenter le coût du transport à cause
du retour à vide, mais aussi du fait de l’insuffisance du groupage et des frais
administratifs des échanges intra-Maghreb;
(iii) la faible implication des armateurs nationaux dans le transport international,
s’explique quant à elle par l’existence de situations de monopole de la part de
sociétés publiques de transport, spécialisées chacune dans l’exportation d’une
matière première spécifique. Ces compagnies maritimes nationales disposent,
en outre, de flottes très souvent vétustes, sources de coûts d’exploitation
élevés et de bilans médiocres.

Finalement le niveau du trafic reste moyen en comparaison internationale et au regard des


atouts géographiques, humains et naturels que présente à priori la région du Maghreb. Le
graphique ci-dessous donne un état de la situation :

Figure 5. Hiérarchie portuaire et évolution du trafic, 1996-2008

Source : (Mohamed-Chérif, Ducruet, 2011).

2.2.3. Perspectives d’évolution du transport maritime au Maghreb

On a constaté que la façade maritime du Maghreb, malgré les lacunes que nous venons de
décliner, est tout de même diversifiée et dynamique. Il se trouve que l’émergence du port de
Tanger-Méditerranée (Maroc), les futurs hubs de Djen Djen (Algérie) et d’Enfidha (Tunisie)
ajoutés au développement de l’activité touristique (Maroc, Tunisie) et de l’activité gazière
(Algérie) laissent présager une certaine embellie. Ces projets et réalisations, certaines très

23
avancées (Tanger-Med par exemple) symbolisent en effet l’insertion croissante du Maghreb
dans le système maritime mondial, ce qui est aussi illustré et soutenu par l’évolution
géographique des connexions maritimes à porte-conteneurs.

Les données de plusieurs analystes permettent finalement de souligner que la croissance


générale du trafic portuaire va de pair avec, à la fois, une dynamique d’intégration,
(harmonisation des rythmes de croissance) quoique lente, et une diversification géographique
des avant-pays maritimes. A ce sujet, un processus d’intégration régionale semble être à
l’œuvre au Maghreb suite à l’harmonisation croissante des régimes portuaires entre 1995-
2001 et 2002-2008. Celle-ci demande évidemment à être soutenue et confortée dans le temps.
Mohamed-Chérif et Ducruet, (2011) proposent une lecture intéressante de cette nouvelle
dynamique d’intégration. Parmi toutes les relations directes et indirectes créées par les
circulations de navires porte-conteneurs, seule la connexion de trafic la plus forte est retenue
par ces auteurs afin de mettre en valeur les logiques fortes d’organisation et de polarisation du
réseau ainsi formé, comme l’illustre le graphique suivant :

Figure 6. Flux majeurs de conteneurs en 2006

Source : (Mohamed-Chérif, Ducruet, 2011).

Les auteurs estiment que « l’apparition de deux régions «nodales» est en soi révélateur d’un
manque d’intégration du Maghreb, l’une centrée sur Alger et englobant la plupart des ports
algériens, l’autre centrée sur Casablanca et Tanger, principalement marocaine. La plus forte
centralité d’Alger, qui s’explique par sa situation de pivot et sa fonction de grande métropole
maritime multifonctionnelle, compense son retard en termes de conteneurisation et

24
d’accessibilité nautique ». (Mohamed-Chérif, Ducruet, 2011). Toutefois cette évolution ne
devrait pas forcément contribuer à réduire les inégalités au sein d’un espace déjà morcelé
géographiquement et économiquement. En effet, l’ensemble du territoire maghrébin
s’articule, à cette façade maritime, de manière variable et différenciée. Il est souhaitable qu’à
terme, la dynamique maritime puisse entraîner le développement et l’intégration territoriale
du Maghreb de l’intérieur.

II. Logistique maritime et compétitivité internationale

A l’ère de la mondialisation, une série de changements, marqués notamment par la


spécialisation en termes de trafic, sont récemment apparus dans le transport maritime. De plus
en plus, la libéralisation des activités portuaires a conduit à la concentration des opérateurs et
à la croissance du trafic de conteneurs. Pour cela, une gestion optimale des flux physiques et
d'informations est actuellement essentielle pour une maîtrise parfaite de la chaîne portuaire.
Dès lors, les acteurs portuaires sont désormais tenus d’adopter une organisation adéquate du
système portuaire et un recours à une gestion logistique intégrée des opérations portuaires.
Cette démarche suppose le déploiement de la logistique en tant que concept de management
Dans la partie qui suit nous allons explorer le domaine de la logistique maritime pour en
dégager les logiques, les acteurs et le fonctionnement. Par la suite nous allons parler tout
particulièrement de la conteneurisation et de ses enjeux.

1. Spécificités de la logistique maritime

L’industrie maritime est différente de l'industrie du transport général et elle comporte son lot
de défis. A ce sujet, une première question à se poser est de savoir qu’est ce qu’un port ?
L’Union Maritime de Bordeaux donne une définition sous trois angles16 :

géographique : un espace aménagé pour recevoir les navires


économique : un système complexe d’éléments matériels et immatériels assurant
l’interface entre navires et marchandises
institutionnelle : le port est une institution, dotée ou non de la personnalité morale,
chargée d’exercer des compétences à la fois de travaux publics, de police (fonction
régalienne), et éventuellement d’exploitation

16
Union Maritime et Portuaire de Bordeaux : les métiers du port < http://www.uniport-
bordeaux.fr/metiers.php> consulté le 26 juin 2014

25
Ce triple point de vue décrit assez bien les contours du port tel que nous le connaissons
aujourd’hui. Décrivons à présent ses acteurs et ses particularités

1.1. Acteurs et processus

Un port de commerce est donc dédié au transit des marchandises (et éventuellement de
passagers) ; il réunit une multiplicité d’acteurs qui donnent vie à l’espace portuaire. C’est
pourquoi, pour mieux saisir le contexte de l’industrie portuaire, il est utile d’en connaitre les
acteurs.

1.1.1. L’armateur

Il peut s’agir :

du propriétaire du navire qu'il utilise pour son propre compte ou pour celui de ses
clients. Il met alors son navire à la disposition d’un affréteur.
du gérant, désigné par le Propriétaire pour accomplir les actes nécessaires à la bonne
marche et à l’exploitation du navire : approvisionnements, équipements, réparations,
recherche de fret, affrètement du navire, engagement de personnel maritime

1.1.2. Le Transitaire / Affréteur / Commissionnaire de transport :

C’est l’entreprise mandatée par l’expéditeur ou le destinataire d’une marchandise qui doit
subir plusieurs transports successifs. Sa mission est d’organiser la liaison entre les différents
transporteurs et d’assurer ainsi la continuité du transport. Il confie à l’armateur une ou des
cargaisons complètes pour un ou des voyages donnés.

1.1.3. Le consignataire

Il s’agit du spécialiste portuaire auquel l’armateur confie l’organisation de l’escale des


navires, la gestion opérationnelle des navires (liaison entre le port, le navire et l’équipage)
pendant l’escale maritime et le suivi administratif des marchandises transportées. Il doit en
particulier remettre à bord du navire les documents qui accompagnent la marchandise et
déclarer la marchandise sur le quai auprès de la douane. Au service du commandant de bord,
le consignataire travaille aussi et surtout pour le compte de l’armateur (le propriétaire du
navire).

26
1.1.4. Les gestionnaires de parc / Terminal Operator

C’est l’acteur chargé de faire transiter les véhicules sur les ports en terme de Qualité / Coûts /
Délais (réception, contrôle véhicule, mise en lot physiques et informatiques, suivi
chargement).

1.2. Acteurs publics et acteurs privés

Parmi les acteurs, il convient aussi finalement de comprendre qu’il s’opère une interaction
continue entre secteur privé et secteur public, chaque acteur jouant sa partition en fonction de
ses intérêts et de ses objectifs.

A travers le monde, les ports ont connu des réformes importantes allant vers la privatisation,
la déréglementation et la décentralisation des infrastructures portuaires dont les
objectifs sont l’amélioration de l’efficacité portuaire, la réduction de l’intervention de l’Etat
dans la planification et la gestion des infrastructures maritimes pour réduire l’enveloppe
financière à investir (COMTOIS et SLACK, 2003). La figure ci-dessous, tirée de
l’exploitation du port de Bordeaux donne une vue assez claire de ces interrelations entre
acteurs publics et acteurs privés.

Figure 7. Domaine portuaire : interrelations entre secteurs public et privé

Source : Union Maritime et Portuaire de Bordeaux : www.uniport-bordeaux.fr/metiers

27
1.3. La chaine logistique maritime

La chaîne logistique, en transport maritime, est « l'ensemble des flux physiques, des processus
et des informations associés, relatifs à la marchandise depuis son expédition, en passant par
son transport principal via navire et qui transite par le port jusqu'à sa mise à disposition au
destinataire final »17.

1.3.1. Vue globale

Globalement la chaire de transport dans le domaine portuaire se présente comme décrite dans
le graphique ci-dessous :

Figure 8. Chaine de transport et professions dans le domaine portuaire

Source : www.nantes.port.fr, professions portuaires

17
Ulrich G. TAMBY, Optimisation de l'exploitation et de la logistique portuaire. Cas du port de Toamasina à
Madagascar, Institut supérieur de la technologie d'Antananarivo, 2010

28
1.3.2. Exemple de chaine d’opérations : la manutention de marchandises

S’agissant des principales opérations à l’œuvre dans la chaine logistique maritime on peut
citer à titre principal l'opération de manutention de marchandises sur la quelle nous
choisissons de nous concentrer ici pour l’approfondir. Elle consiste, pour le navire, en
chargement, déchargement et manipulation à bord du navire et pour le client, en opération de
réception et de livraison à terre.

a. Le débarquement

Le débarquement consiste à décharger la marchandise du bord des navires (en cale ou en


pontée), de le transférer vers le lieu d'entreposage adéquat (sécurisé contre le vol et tout autre
facteur qui pourrait porter préjudice à la marchandise), permettant une meilleure réception de
la marchandise pour le client au moment de l'enlèvement. Le débarquement est classé selon le
lieu de stockage :

Débarquement magasin ou hangar


Débarquement terre-plein
Débarquement indirecte : la marchandise débarquée ne passe pas par un entrepôt. Elle
reste sur le quai pendant une courte durée avant l'enlèvement.
Débarquement et enlèvement direct : la marchandise débarquée du bord est aussitôt
enlevée sous-palan du navire par le réceptionnaire.

b. L'embarquement

L'opération d'embarquement, quant à elle, consiste à transférer ou acheminer la marchandise


depuis le lieu d'entreposage vers le quai où le navire opère, afin de pouvoir procéder au
chargement à bord. Le lieu d'entreposage est dans ce cas le lieu de prise en charge de la
marchandise par l'acconier via le chargeur. Il peut s'agir d'un magasin, terre-plein, ou hangar.
De ce fait, l'embarquement est classé suivant le lieu de prise en charge de la marchandise :

Embarquement magasin ou hangar;


Embarquement terre-plein;
Embarquement direct : le lieu de prise en charge par l'acconier est sous palan du
navire. Il est communément appelé embarquement sous palan.

29
c. La manipulation

A la demande du capitaine du navire, il est parfois nécessaire de déplacer, des marchandises


qui ne sont pas destinées au port d'escale, afin de pouvoir accéder à celles destinées à être
débarquées sur place. Cette opération de déplacement est appelée "manipulation de
marchandises". En ce sens, l'opération de manipulation consiste à déplacer la marchandise de
son lieu d'arrimage à bord du navire, vers un autre lieu (à bord ou momentanément à quai)
pour différentes raisons :

Pour accéder plus facilement à des marchandises à débarquer ;


Pour assurer la stabilité du navire pour le prochain voyage ;
Pour libérer de l'espace pour les marchandises à embarquer. La manipulation peut
être avec ou sans mise à terre. La manipulation sans mise à terre est le transfert des
marchandises d'un endroit à un autre à bord du navire (dans un autre entrepont ou une
autre cale du même navire). La manipulation avec mise à terre consiste à décharger
momentanément les marchandises sur le quai d'accostage et à les réembarquer sur le
même navire pour le même voyage.

d. Livraison de marchandise :

L'opération de livraison consiste à déplacer la marchandise de son lieu d'entreposage, après


débarquement, en vue de sa remise au client et pour la sortie de l'enceinte portuaire. Cette
opération détermine la fin de la manutention à l'import.

e. Réception de marchandise :

L'opération de réception consiste en la remise de la marchandise par le chargeur, sur le lieu


d'entreposage, en vue de sa prise en charge avant embarquement. Cette opération détermine le
début de la manutention à l'export.

Opérons à présent un focus sur la conteneurisation qui est au cœur de l’activité de la majorité
des ports. Cela nous permettra, par la suite d’analyser les facteurs importants de la
compétitivité des ports aujourd’hui.

2. La conteneurisation et son fonctionnement

La conteneurisation des marchandises a joué un rôle important dans le développement des


réseaux internationaux de transport intermodal. En effet, avec l’arrivée du conteneur, un

30
important réseau international de transport basé sur l’utilisation d’un format standard de
cargaison s’est développé. Cette standardisation a permis d’accélérer le transfert de la
marchandise d’un mode de transport à l’autre. Aujourd’hui encore, les opérations de transfert
d’un mode de transport à l’autre demeurent l’élément clé d’un système de transport
performant (Dubreuil, 2008)

2.1. Origines et apports

Jusqu’au milieu des années 50, les marchandises sont transportées dans des sacs, entreposés
dans les cales des cargos, de gros navires à forte contenance. Mais les sacs préservent mal les
denrées pendant le voyage. C’est un Américain, Malcolm MacLean, qui trouve le premier un
moyen de transport plus simple et plus rentable. Il invente le conteneur, un parallélépipède
métallique de taille standard. Ainsi, les transporteurs peuvent faire transiter leurs
marchandises en plus grande quantité et en toute sécurité. Le porte-conteneurs est donc le
dernier-né de la marine marchande. Les conteneurs sont alignés et empilés, et ainsi l’espace
de la cale est utilisé au mieux. Les opérations pour transborder un conteneur du navire sur un
camion ne durent que quelques minutes (Dubreuil, 2008).

Les ports qui peuvent accueillir ces géants des mers sont équipés de grands bassins et
d’énormes grues pour charger et décharger les cargaisons. Ils sont situés sur les grands axes
de commerce international. Certains de ces énormes bateaux peuvent recevoir jusqu’à douze
mille conteneurs. Le rôle des terminaux de conteneurs est donc de servir de plateforme de
transbordement entre les navires océaniques et les autres modes de transport plus locaux
(Dubreuil, 2008). Dès lors, Crainic et Kim (2005) identifient trois types d’opérations de
manutention dans ces terminaux :

(i) les opérations portuaires qui comprennent l’amarrage, le déchargement et le


chargement des porte-conteneurs,
(ii) les opérations de réception et d’expédition en provenance ou partant vers les autres
modes de transport (camions, trains),
(iii) les activités de manutention et d’entreposage des conteneurs dans la cour du
terminal.

Les opérations des terminaux de conteneurs peuvent être divisées en trois grandes catégories
(Dubreuil, 2008).

31
(i) La première catégorie regroupe les opérations liées au chargement et au
déchargement des navires et barges. Ces opérations sont réalisées dans la zone
d’opérations portuaires.
(ii) La seconde catégorie contient l’ensemble des opérations de stockage et de
manutention des conteneurs dans la cour et les opérations sont effectuées dans la zone
de stockage du terminal.
(iii)La dernière catégorie d’opérations concerne le transfert des conteneurs vers les modes
de transport terrestres

2.2. Contexte et acteurs

La décennie 90, surtout dans sa seconde partie, à vu l’émergence puis l’essor de groupes de
manutention internationaux, axés sur le secteur du conteneur. Les entreprises asiatiques se
sont révélées particulièrement efficaces en ce domaine, aux côtés des européens et des
américains18. Leur développement s’est opéré à partir d’une base nationale qui leur a permis
d’expérimenter de nouvelles techniques de gestion (ingénierie, finances, ressources humaines)
qu’ils ont par la suite, et progressivement, exporté. D’un point de vue opérationnel, c’est dans
le terminal portuaire que sont consolidés les conteneurs qui nécessitent un transport maritime
en eaux profondes. On retrouve chez les opérateurs de terminaux portuaires des acteurs
indépendants, tout comme on en retrouve d’autres qui sont la propriété de transporteurs
maritimes (Dubreuil, 2008). Voyons à présent quel est le volume d’activité de la
conteneurisation. L’on examinera ensuite les avantages et les défis de la conteneurisation.

2.3. Description et volume du marché

Le transport maritime occupe une place importante dans les mouvements internationaux de
conteneurs. En effet, plus de 60% du cargo général transporté par navire est aujourd’hui
conteneurisé, certaines routes entre les pays industrialisés atteignant un taux de 100%
(Steenken et col. 2004). De plus, cette conteneurisation s’est effectuée rapidement, le premier
service régulier remontant seulement à 1961 (Steenken et col. 2004). De nos jours, le trafic
international de conteneurs est estimé à environ 300 millions de conteneurs EVP (Équivalent
Vingt Pieds) (Crainic et Kim 2005). L’EVP est la mesure utilisée dans le domaine du
transport intermodal de conteneur. Un EVP équivaut à l’espace occupé par un conteneur de

18
ISEMAR, La manutention portuaire conteneurs : les opérateurs internationaux – perspectives européennes,
synthèse n°39 – novembre 2001 < http://www.isemar.asso.fr/fr/pdf/note-de-synthese-isemar-39.pdf>
consulté le 19 juillet 2014

32
norme ISO, qui a une largeur de huit pieds, une hauteur de huit pieds et une demi et une
longueur de vingt pieds. Selon cette unité de mesure, un conteneur de quarante pieds de long
correspond donc à deux EVP (Dubreuil, 2008). L’industrie du transport maritime de
conteneurs a subi d’importantes transformations au cours des dernières années. Tout d’abord,
le marché a été marqué par de nombreuses fusions et acquisitions. D’ailleurs, ce processus de
consolidation du marché ne semble pas encore terminé puisque deux importantes transactions
ont eu lieu au cours de l’année 2005, soit l’acquisition de l’entreprise anglaise P&O Nedlloyd
par la danoise Maersk et l’achat de la compagnie canadienne CP Ships par le conglomérat
allemand TUI propriétaire du transporteur Hapag Lloyd. Afin de survivre, la majorité des plus
petits transporteurs s'est intégrée à l’intérieur d’alliances avec d’autres transporteurs dans le
but d’offrir une couverture mondiale des routes de transport. Les routes asiatiques ont l’a vu
sont aujourd’hui prépondérante dans le transport des conteneurs par voie maritime. Il faut
relever que les routes asiatiques ont subi une transformation majeure. En effet, la
consolidation du marché et la recherche d’économies d’échelle ont mené à la construction de
navires de tailles de plus en plus importantes. Les capacités de ceux-ci atteignent maintenant
de 8 000 à 10 000 EVP, comparativement aux premiers porte-conteneurs qui pouvaient
accommoder plus ou moins 1 000 EVP. Par contre, la taille et le tirant d’eau de ceux-ci
restreignent leurs déplacements. En effet, plusieurs ports ne peuvent pas accommoder de tels
navires et leur taille imposante ne leur permettent pas d’utiliser le canal de Panama ou le canal
de Suez. En conséquence, les routes asiatiques ont dû être modifiées pour accommoder ces
navires, ce qui a mené à la création d’un pont terrestre entre les ports des côtes Ouest et Est de
l’Amérique. Ainsi, les navires en provenance d’Asie s’arrêtent à un port de la côte Ouest
américaine, ils sont déchargés du navire et chargé sur un train à destination d’un port de la
côte Est, pour être, ensuite, transbordé sur un navire à destination de l’Europe. En ce qui a
trait au service de l’Asie vers la côte Est américaine, des mini-ponts ont été mis en place et
lient celle-ci avec les ports de la côte Ouest par transport ferroviaire. La consolidation des
transporteurs et la construction de plus gros navires ont eu pour conséquence une
réorganisation des réseaux de transport maritime sous une forme « hub and spoke » (Dubreuil,
2008). Dans ce type de réseau, les navires de plus grande taille opèrent sur des lignes
transocéaniques régulières entre un nombre limité de ports. À partir de ces ports, les
conteneurs sont transférés sur de plus petits navires et distribués vers les ports ne pouvant
recevoir les navires plus imposants. Le développement de ces réseaux a eu d’importants
impacts sur le transport international. En effet, les ports qui ont été choisi comme points de
transfert (hub) par les grandes lignes maritimes ont dû faire face à des augmentations

33
considérables et rapides du volume de conteneurs manutentionnés. De plus, la recherche
d’économies d’échelles a mené à une forte concentration du trafic international. C’est
notamment le cas de Côte Ouest américaine où trois groupes de ports (Los Angeles et Long
Beach, Oakland, Seattle et Tacoma) reçoivent 95% du trafic international (Slack 2001). La
réorganisation du réseau de transport maritime international sous une forme « hub and spoke
», ainsi que la forte compétition qui existe entre les ports ont pour conséquence de créer de
fortes pressions sur les terminaux portuaires de conteneurs (Dubreuil, 2008). À ces pressions,
s’ajoute la croissance constante des volumes de conteneurs transportés. C’est ce qui explique
pourquoi les ports sont souvent identifiés comme le goulot dans les réseaux de transport
intermodal internationaux. Afin de demeurer compétitifs, les terminaux portuaires de
conteneurs doivent donc miser sur l’efficacité des opérations de transbordement.

2.4. Avantages

Quelques avantages et atouts de la conteneurisation peuvent être d’emblée évoqués :

La conteneurisation a largement participé à l'augmentation du trafic maritime


international étant donné qu'elle rend plus facile le transport des marchandises de tous
types en permettant des transports de petite quantité à moindre coût.
Comme on l’a évoqué, cette conteneurisation a conduit à la construction de bateaux
spécifiques, les portes conteneurs, ce qui a été de nature à révolutionner l’industrie
portuaire.
La standardisation des manutentions qu’a entraîné le conteneur est une des principales
raisons du développement du transport intermodal. à l’heure actuelle, la part la plus
importante du transport intermodal international revient aux conteneurs (Günther et
Kim 2005). - La quasi-totalité du transport maritime des biens manufacturés l'est
désormais par ce type de navires mais qui peuvent aussi transporter d'autres produits
en moindre quantité avec des conteneurs de fruits et des légumes, de produits
alimentaires, de liquides (hors carburant) voire de voiture grâce aux conteneurs
spécialisés. - Cette polyvalence est l'un des principaux avantages de ces navires. Ils
peuvent charger, transporter ensemble et décharger facilement différents types de
produits. Les années 1990 et 2000 ont vu un accroissement de la taille de ces navires
avec l'arrivée de bateaux d'une capacité de plus de 11 000 EVP. En 2005, plus de 116
millions de conteneurs ont ainsi voyagé sur les mers du globe.

34
2.5. Défis

o Le coût : l’équipement nécessaire à l’exploitation d’un terminal portuaire est


très dispendieux. Bien que les équipements utilisés dans le terminal soient
semblables à ceux utilisés dans les terminaux terrestres, la nécessité d’utiliser
des grues de quais pour les transferts entre les navires et le quai contribue à
augmenter la capitalisation des terminaux portuaires. Le coût de ces grues était
estimé à environ 8 millions de dollars américains en 2001 (Slack 2001). Par
contre, la taille de plus en plus importante des navires a entraîné une
prolifération des grues de type post-panamax, qui sont plus dispendieuses
o Le défi logistique : La complexité des opérations et l’augmentation des
volumes manutentionnés confèrent donc aux terminaux maritimes un rôle
prépondérant dans les réseaux de transport internationaux. En effet, ils doivent
être en mesure d’assurer un cycle de déchargement/chargement rapide. Les
coûts d’acquisition et d’opération des porteconteneurs représentent des
milliers de dollars par jour, c’est pourquoi les armateurs cherchent à utiliser
les terminaux les plus efficaces (Dubreuil, 2008). Cependant, l’efficience
opérationnelle n’est pas la seule tributaire de la compétitivité d’un port.
Puisque les conteneurs doivent être ensuite livrés aux destinataires finaux, la
connectivité aux modes de transport terrestres joue aussi un rôle important.
Afin de s’adapter à ces changements, des terminaux maritimes spécialisés
dans la manutention de conteneurs se sont développés.
o Les choix logistiques et économiques (nombre de quais, investissements,
rentabilité etc.) : une fois l’emplacement du terminal choisi, la décision
suivante au niveau du design d’un terminal maritime de conteneurs consiste à
déterminer le nombre de quais qui sera mis à la disposition des porte
conteneurs. L’objectif de cette problématique est de déterminer un nombre de
quais optimal. Il est entendu par optimal que le design choisi permettra un
équilibre entre le niveau de service aux porte-conteneurs, les coûts de
construction et d’exploitation du terminal et la capacité d’adaptation aux
variations de volume. Un plus grand nombre de quais permettra d’offrir un
meilleur service en diminuant les risques de congestion des quais. Par contre,
plus le nombre de quais augmente, plus les risques d’interférences entre les
opérations des différents navires augmentent. En effet, une augmentation du

35
nombre de quais nécessite plus d’équipement pour les opérations de transport
et d’entreposage des conteneurs, donc, plus de circulation dans le terminal19.
De plus, une augmentation du nombre de quais permet de diminuer le taux
d’utilisation de la capacité du terminal, puisqu’elle augmente la capacité du
terminal. Cependant, cette diminution entraîne une augmentation des coûts
d’exploitation, puisque des investissements plus importants sont absorbés par
un même volume d’activités. Le problème de la détermination du nombre de
quais doit donc prendre en considération les coûts associés au temps
d’opération sur les navires, les coûts de construction des quais et les coûts
d’opérations des quais. Ces derniers coûts font référence aux coûts
qu’implique l’utilisation d’un quai, soit le coût des équipements, de la main
d’œuvre, etc

3. Les leviers de la compétitivité dans le contexte portuaire

Les facteurs que nous allons décrire sont des éléments clés de la compétitivité portuaire. Pour
mettre en place une stratégie d'aménagement portuaire et améliorer le rendement d'un port, il
est essentiel d'analyser dans tous les cas (qu'il y ait ou non une concurrence entre ports)
chacun de ces facteurs, car ils reposent sur un principe unique, à savoir mieux servir les
usagers du port. Nous avons choisi de décliner ici quelques facteurs non exhaustifs bien-sûr,
mais qui nous semblent représentatifs de la capacité d’un port à faire face à la concurrence
nationale et internationale. Il s’agit de :

La situation géographique
L’intégration avec les autres modes de transport
La qualité des relations entre les différents acteurs
L’efficacité du service (qualité, delais, coûts)
La stabilité socio-économique
D’autres facteurs contextuels

3.1. La situation géographique

19
DUBREUIL Julien : « La logistique des terminaux portuaires de conteneurs », Août 2008, CIRRELT ,56p

36
La situation géographique peut, de toute évidence, être considérée comme une condition
primordiale. Un port a plus d'avantages compétitifs lorsqu'il occupe une situation stratégique.
Pour cela, il doit présenter au minimum une des trois caractéristiques suivantes:

être situé sur une grande route maritime;


être situé à l'intérieur ou à proximité d'une zone de production et/ou de consommation;
disposer de bassins naturels en eau profonde, de brise-lames concrets et d'importantes
possibilités d'aménagement du front de mer et des terrains adjacents.

Les ports qui ne bénéficient pas de ces conditions naturelles favorables doivent draguer leur
plan d'eau et édifier une digue, ce qui accroît d'autant le coût des services portuaires.
Remarquons que des changements dans l'environnement peuvent faire perdre à un
emplacement son avantage géographique (exemple: augmentation des tailles des navires).
Notons que de nombreux ports dépourvus de conditions naturelles aussi propices se sont taillé
des parts de marché considérables en mettant l'accent sur d'autres facteurs compétitifs.

3.2. L’intégration avec les autres modes de transport

On considère souvent la liaison de transport avec l'intérieur comme une des conditions de
base de l'existence d'un port. En fait, tel n'est pas vraiment le cas. En Amérique du Nord, les
ports interviennent de plus en plus activement dans des projets prévoyant un accès ferroviaire
ou routier à la zone portuaire. Un système de transport ferroviaire/routier et/ou pluvial, qui
soit à la fois régulier, efficace, bon marché et fiable, est essentiel pour que le port puisse
attirer des marchandises. Normalement, entre des ports rivaux, la différence des coûts de
transports est plus importante dans la portion terrestre que dans la portion maritime. Ainsi
donc, les responsables des pays en développement devraient s'intéresser tout autant aux
liaisons avec l'arrière-pays qu'aux installations techniques ou de manutention des
marchandises. La présence d'un embranchement ferroviaire «à quai», de terminaux
multimodaux et de réseaux autoroutiers devient une condition sine que non de transport
moderne de marchandises. Remarquons qu'il n'est pas nécessaire que les ports participent
directement aux opérations d'acheminement terrestre, mais ils doivent veiller au bon
fonctionnement du marché des transports.

3.3. La gestion des relations entre les acteurs

Les agents maritimes et les transitaires jouent un rôle fondamental en travaillant pour les
armateurs et les chargeurs qui sont les deux seules catégories de clients du port. Ce rôle

37
d'agents maritimes et de transitaires reste souvent plus ou moins méconnu dans les pays en
développement. L'établissement portuaire devrait les considérer comme faisant partie de son
propre personnel commercial en les consultant, en les aidant à résoudre leurs problèmes, bref
en tirant pleinement parti de leurs compétences. Vu que des transitaires actifs drainent
davantage de marchandises au profit du port, des agents maritimes motivés incitent les
armateurs à continuer d'utiliser le port. Pour conserver un environnement dynamique, il
convient d'assurer une concurrence à l'intérieur du port et une participation du secteur privé.

3.4. L’efficacité du service (maitrise des coûts, rapidité et fiabilité)

Il s’agit d’un point autant important que sensible. L’efficacité du service fourni par les ports
est en effet un élément fondamental de leur compétitivité. Cette efficacité recouvre plusieurs
aspects : la rapidité, la fiabilité, les tarifs, etc. S'agissant des transports internationaux et de la
distribution, de plus en plus de chargeurs semblent d’ailleurs accorder davantage d'importance
à la qualité ou à l'efficacité des services qu'à l'élément «prix». Ce dernier demeure un des
facteurs les plus importants -sinon le facteur essentiel- de la compétitivité des ports et ce pour
les raisons suivantes:

Premièrement, les utilisateurs du port n'ont pas tous les mêmes exigences dans ce
domaine. Il y aura toujours certains types de marchandises de faible valeur unitaire ou
des navires plus sensibles à la tarification des services portuaires qu'à tout autre
facteur.
Deuxièmement, pour les chargeurs, plutôt que le prix des services portuaires, c'est la
qualité qui compte avant tout lorsqu'elle diffère d'un port à un autre. En revanche, s'il
y a peu de différences sur ce point entre les ports c'est, bien entendu, le facteur prix
qui est déterminant. Tel est le cas dans la plupart des pays industrialisés et dans
certains pays en développement. Si l'on compare les tarifs des ports dans le monde, on
constate que les places portuaires les plus importantes et les plus efficaces sont, dans
l'ensemble, les moins chères.
Troisièmement, tous les responsables portuaires doivent savoir que les deux
catégories de clientèle auxquelles ils ont affaire, à savoir les chargeurs et les
amateurs, ont des préoccupations très différentes, notamment en matière de
tarification des services portuaires. De nombreux chargeurs, en particulier ceux qui
expédient des marchandises diverses, sont moins sensibles au faible poids des

38
redevances du transport des marchandises (10% environ) et celle des coûts portuaires
encore plus réduite de sorte qu'ils insistent plutôt sur la qualité des services.

Cependant, l'administration du port serait malvenue de relever le niveau des redevances sous
prétexte que le prix importe peu aux chargeurs, car ce faisant elle ne tiendrait pas compte des
armateurs. Si l'on considère la part que représentent les redevances portuaires dans les coûts
de production d'une compagnie de navigation, il est aisé de comprendre pourquoi les prix des
services sont d'une telle importance pour la compétitivité portuaire. Par exemple, pour un
porte-conteneur de 2.500 EVP, la part des coûts portuaires est d'environ 1,38% du total des
coûts d'opération. Donc, les armateurs sont plus sensibles aux variations des redevances
portuaires, compte tenu de la portion qu'elles représentent.

3.5. La stabilité socio économique

Généralement, la tendance chez les usagers d'un port est de s'inquiéter moins de la qualité ou
du prix des services portuaires - qu'ils peuvent évaluer et négocier avec les exploitants du port
- que de la stabilité socioéconomique. Mais cette stabilité socio-économique, l'autorité
portuaire et les sociétés exploitantes n'ont souvent que très peu d’emprise dessus. Alors, que
suppose au juste cet environnement dit « instable » qui est tant craint par les acteurs ?
L'instabilité sociale et économique englobe, non seulement des événements tels que les
guerres civiles ou les troubles sociaux, mais aussi les grèves, les problèmes de sécurité, les
actions de boycottage, les fluctuations dans la qualité, les tarifs des services, etc. Par exemple,
le gouvernement australien a publié un rapport du Bureau of Transport and Communications
Economics, intitulé «Coût du manque de fiabilité des ports de mer en 1988». D'après cette
étude, les estimations du coût global des diverses carences en matière de fiabilité des ports est
de l'ordre de 131 à 146 millions de Dollars australiens pour les exportateurs nationaux, de 513
à 534 millions pour les importateurs australiens et de 210 à 314 millions en exportations
perdues pour l'Australie, soit, pour 1988, un total compris entre 854 et 994 millions de Dollars
australiens.

Ce montant correspond, non pas au coût de l'inefficacité en tant que telle, mais aux seuls
effets du manque de fiabilité. Un climat socio-économique favorable est une condition
essentielle pour la stabilité et l'efficacité des activités portuaires. Les compagnies modernes
de transport de conteneurs calculent leur temps d'escale dans les ports en heures et aucun arrêt
des opérations portuaires n'est acceptable. D'autres problèmes sociaux peuvent également

39
avoir de graves conséquences pour les ports (exemple: barrer la route aux trafiquants de
drogues, apparemment déterminés à utiliser des conteneurs pour leurs envois illicites).

3.6. Autres facteurs contextuels

Outre les facteurs évoqués ci-dessus, d’autres facteurs circonstanciels affectent la


compétitivité des ports, notamment dans des environnements de sous-développement. Ainsi,
dans la plupart des pays en développement, les problèmes de communications sont récurrents,
en particulier des installations de télécommunications qui relient le port et la ville voisine au
reste du monde. Ces installations sont généralement mises en place par l'Etat (ou la
municipalité). Les chargeurs n'expédieront pas leurs marchandises par l'intermédiaire d'un
port où il n'existe aucun moyen de suivre les mouvements des cargaisons. A l'heure actuelle, il
devient de plus en plus difficile pour un port d'attirer des marchandises, notamment des
envois conteneurisés, sans un bon système de télécommunications -comprenant des
télécopieurs, des téléphones, d'accès direct au réseau international ou, même, un système
d'EDI géré par ordinateur et lié au réseau mondial. Il convient enfin de mentionner d'autres
éléments, moins importants, peutêtre, mais qui ont néanmoins une incidence directe sur la
compétitivité d'un port: existence et développement d'institutions financières comme les
banques et les sociétés d'assurances, etc.

40
Conclusion de la Partie I.

Au terme de cette première partie, nous avons situé les contours de la logistique maritime et
proposé un panorama mondial puis africain de la situation de l’exploitation portuaire. Nous
avons relevé à ce titre que la conjoncture était plutôt favorable, malgré les derniers
soubresauts de l’économie qui ont affecté le transport maritime au même titre que les autres
secteurs de l’économie.

Un focus sur la situation dans le Maghreb nous a permis de relever que cette région regorge,
avec son ouverture à la méditerranée, d’atouts structurels venant de sa géographie, de sa
population et de l‘histoire. Les pays du Maghreb souffre cependant d’insuffisances
managériales et techniques qui affectent profondément la performance portuaire dans cette
région, précisément, le Maroc, l’Algérie et la Tunisie qu’il nous a été donné d’étudier.

Après ce tour d’horizon théorique et contextuel, proposons à présent une première exploration
de notre terrain d’étude à travers la présentation puis l’évaluation de l’environnement
portuaire de l’Algérie en tant que cas d’étude spécifique. Dans une troisième partie nous
proposerons une confrontation entre un port algérien (Mostaganem) et un port marocain
(Tanger).

41
Partie II : le système portuaire algérien et ses défis

Dans cette seconde partie descriptive, nous présenterons le système portuaire algérien
(infrastructures, équipements, organisation). Nous évaluerons le volume du trafic portuaire
des quinze dernières années et son impact sur l’économie nationale.

Cette description va s’opérer d’un triple point de vue : les infrastructures, l’organisation et la
performance. Mais avant d’y arriver, nous allons situer le contexte actuel de l’économie
algérienne.

42
I. ECONOMIE ALGERIENNE ET INDUSTRIE MARITIME

Cette section introductive est importante pour comprendre rapidement les leviers de
l’économie algérienne et le rôle de l’industrie maritime dans ce contexte.

1. Caractéristiques et état de l’économie Algérienne

On sait que le trafic maritime reflète la nature du commerce extérieur d’un pays. C’est le cas
au Maghreb et c’est évidemment le cas en Algérie.

Voici quelques données sur l’Algérie en 2013 (source : FMI et Planet Experts) :

Population :

- Population totale : 39.208.194

- Accroissement naturel : 1,9%

- Densité : 16 habitants/km²

- Population urbaine : 74,5%

- Population des principales villes (banlieue inclue) : Alger (3.354.000) ; Oran


(772.000) ; Setif (1.500.000) ; Djelfa (1.200.000) ; Tizi Ouzou (1.100.000).

- Langue officielle : Depuis juillet 1998, la langue officielle de l'Algérie est l'arabe.

- Langue(s) des affaires : Le français et l'arabe sont généralement les langues des
affaires, bien que certaines entreprises utilisent l'anglais.

- Taux d'alphabétisation : 69,9%

Taux de change au 13/04/2015 :

- Monnaie locale : Dinar algérien (DZD) 1 DZD = 0,0119 USD, 1 USD = 84,0431
DZD 1 DZD = 0,0094 EUR, 1 EUR = 106,1691 DZD

43
Profil du pays

- Superficie : 2.381.740 km²

- Nature de l'Etat : République, démocratie parlementaire combinée à un pouvoir


présidentiel.

- Niveau de développement : Pays à revenu intermédiaire (tranche inférieure). Pays


qui dépend beaucoup de l'activité pétrolière et gazière ; l'Algérie est un grand
producteur de liège et un important éleveur de bétail

- IDH* : 0.698/1

- IDH (rang mondial) : 90/187

D’un point de vue strictement économique, le Gouvernement algérien a publié en


2013 dans sa loi de fiance de 2014, un taux de croissance de 5 %, seulement, le Fonds
monétaire international (FMI) en publiant son rapport sur les perspectives
économiques mondiales prévoit 3,1% de croissance pour l’Algérie en 2013. Loin des
5% espérés par le gouvernement.

La situation du commerce extérieur est un indicateur important pour jauger le


dynamisme d’une économie et la place de l’industrie portuaire. C’est particulièrement
le cas en Algérie où 95% des échanges internationaux de marchandises transitent par
les ports. Voici la dernière situation du commerce extérieur algérien.

Figure 10. Chiffres du commerce extérieur de l’Algérie

Source : Organisation mondiale du Commerce, OMC

44
2. Généralités sur le contexte maritime algérien

D’un point de vue général, l’Algérie accuse un important retard dans les ports
polyfonctionnels. Le pays est en effet confronté à des infrastructures vétustes et à un
investissement moderne retardé, longtemps limité à des ports considérés comme des ports de
la première génération.

En effet, jusqu’en 2000, l’investissement de l’Algérie dans le domaine portuaire a concerné


davantage les ports pétroliers. D’ailleurs, l’unique spécialisation à laquelle les ports algériens
ont consenti des efforts est celle du transport des hydrocarbures.

Ainsi, « construits selon des normes anciennes, ces ports constituaient une configuration
adaptée aux navires de petites tailles en raison également de la profondeur théorique de ces
ports réduite par le phénomène d’envasement et par le dragage » (Tadjine, Ahmed Zaid,
2011).

Cette situation a obligé les armateurs qui desservent les ports algériens à recourir aux cargos
de petites tailles. Ces derniers apparaissent cependant comme non économiques et surtout ils
engendrent des manques à gagner importants pour les chargeurs algériens qui payent des taux
de frets plus élevés.

Aujourd’hui, la globalisation et l’internationalisation de la compétition obligent la majorité


des pays économiquement ambitieux (et l’Algérie souhaite en faire partie) à se recentrer sur la
création de la valeur portuaire proprement dite, tout en rationnalisant l’exploitation technique
et managériale des ports et de leur environnement.

Ceci rend, comme nous l’avons expliqué en théorie, la logistique portuaire indispensable, la
plaçant en première ligne des défis maritimes. C’est à ce niveau que se situe, à notre sens, le
grand challenge de l’Algérie presque 15 ans après le virage de 2000 et bientôt 10 ans après la
libéralisation de 2006.

II. L’état des infrastructures maritimes en Algérie

Les infrastructures portuaires algériennes concernent la flotte algérienne et les installations


techniques.

45
1. La flotte algérienne et son évolution

Alors que l’Algérie possédait 78 navires, dans les 80, elle se retrouve en 2009, avec 30
seulement. Selon plusieurs analystes, la flotte couvre moins de 3 % des besoins de l’industrie
maritime. Les autorités algériennes ont prescrit des mesures our le développement de cette
flotte. La stratégie de rénovation de la flotte marine comptera sur le partenariat avec des
sociétés étrangères, avec un taux de participation de la partie algérienne, estimé à 51%. Dans
ce sens, la stratégie du secteur se penchera sur la modernisation de la formation, qui ne pourra
être réalisé qu’à travers la modernisation des instituts et des écoles, qui assurent la formation
du personnel qualifié. Par ailleurs, les moyens d’intervention en haute mer sont appelés à être
renforcés. Trois remorqueurs seront acquis, prochainement, 11 centres de contrôle régionale
veront le jour, ainsi qu’un centre national du contrôle de la navigation maritime. Cette
stratégie, adoptée par le secteur, est susceptible de mettre l’Algérie, en pole position, en
termes de sécurité et de contrôle, dans la Méditerranée20.

2. Les installations techniques

Parlons à présent des installations techniques au-delà de la flotte.

2.1. Situation actuelle

En raison du faible investissement technique que nous avons évoqué en introduction de cette
partie, il se trouve que les équipements destinés à la manipulation de marchandises dans les
ports algériens ont besoin d'une mise à niveau et ceux servant à la gestion des conteneurs
doivent être actualisés de toute urgence.

Il est vrai que près d’une cinquantaine de projets, dans le domaine des infrastructures
maritimes, ont été livrés au cours du programme quinquennal 2005-2009, pour un montant
avoisinant les 85 milliards de dinars. Mais il faut noter que le coût total du programme
quinquennal pour les opérations de développement n’était que de 175 milliards de DA. Il y a
dès lors lieu de constater, avec Tadjine et Ahmed Zaid, (2011), que « le programme de
développement portuaire n’a pas pris en compte les besoins financiers colossaux du secteur
».

Dans ce contexte, rappelons que le Ministère des Travaux Publics a alloué plus de 100
milliards de dinars, dans le cadre du plan quinquennal 2010/2014, afin de financer une

20
Selon le Bulletin Officiel Algérien

46
soixantaine de projets de réalisation et d’aménagement de plusieurs infrastructures portuaires.
Pourtant, d’après les analyses de Tadjine et Ahmed Zaid, (2011), « le programme
d’investissements publics réserve près de 40% de ses ressources à la poursuite du
développement des infrastructures de base et à l’amélioration du secteur public, avec
notamment plus de 3.100 milliards de DA destinés au secteur des travaux publics pour
poursuivre l’extension et la modernisation du réseau routier et l’augmentation des capacités
portuaires ». Dès lors, la somme de 100 milliards DA semble bien en dessous des besoins du
système portuaire algérien, lorsqu’on sait, à titre de comparaison, que le port Med II de
Tanger au Maroc, par exemple, a suscité à lui seul un investissement global de 3 milliards
d’euros.

Quoi qu’il en soit, outre la réalisation de 4 ports de pêche et de plaisance, le programme des
autorités algériennes comprend le dragage de certains ports et la protection contre
l’ensablement des bassins portuaires et de rivages et l’extension de certains ports de pêche.

De nombreuses opérations viendront conforter ce processus. D’abord, des opérations de


réhabilitation, de confortement de jetées et le rempiétement des quais de certains ports.
Egalement des opérations de protection de rivages qui seront menées sur le front de mer
(Tadjine et Ahmed Zaid, 2011).

2.2. Enjeux et défis

Il existe d'importants défis auxquels font face les acteurs portuaires relativement aux
infrastructures.

L’on note par exemple des problèmes de connexion informatique entre les douanes et les
transitaires ou les autres acteurs et, surtout, les procédures douanières requièrent des
connaissances professionnelles relatives à la législation et aux circuits administratifs que les
acteurs concernés ne possèdent pas toujours. En outre, la concentration de l'activité
commerciale sur Alger a créé une tendance à la concentration des acteurs et des
administrations peu propices à la décentralisation et à la rapidité des opérations.

Il faut noter aussi que les opérateurs logistiques sont peu nombreux. S’il est vrai qu’il existe
effectivement quelques sociétés internationales implantées en Algérie, la réalité est que leur
activité reste nettement réduite. La plupart des organismes algériens restent quant à eux
centrés sur le transit et le transport routier. L'activité de groupage n’existe pratiquement pas

47
encore véritablement et devrait se développer davantage lorsque les plates-formes logistiques
appelées à être prochainement installées seront pleinement opérationnelles.

Les obstacles au développement de ces plateformes logistiques sont multiples. Ils concernent
principalement : la disponibilité de réserves foncières, la proximité des espaces où des
services logistiques sont nécessaires et la difficulté d'effectuer le dédouanement des
opérations à valeur ajoutée sur la marchandise.

Un espoir important pour le développement des plateformes logistiques algériennes et leur


exploitation optimale semble résider dans la privatisation et les Partenariats Public-Privé.

III. L’ORGANISATION ET LES ACTEURS DU TRANSPORT MARITIME


ALGERIEN

1. Le poids du transport maritime dans l’économie algérienne

La part du secteur des transports cumulée avec le secteur de la communication s'élève à 9,7 %
du PIB. Il absorbe 10 % des investissements du pays. En outre, le secteur des transports et
communication, commerce et services hors administration, emploie 24,1 % de la population
active (Tadjine et Ahmed Zaid, 2011). D’après Mohamed-Cherif et Ducruet (2012), l’Algérie
assure la quasi-totalité de ses échanges extérieurs par voie maritime, soit près de 95%.

2. Dimension fonctionnelle (qui fait quoi ?)

2.1. L’Etat et son rôle : une analyse

L’Etat algérien a évidemment un rôle central a jouer dans le secteur portuaire algérien. La
CNAN (Compagnie Nationale Algérienne de Navigation) a été créée par décret le 31
décembre 1963 et a détenu le monopole pendant plus de 30 ans. En 2005, la Société Nationale
de Transport Maritime (SNTM/CNAN) ou CNAN a été restructurée dans le cadre d'une
stratégie mise en place par la Chambre du Commerce et d’Industrie de l’Oranie (CCIO). Cette
restructuration a donné lieu naissance à quatre filiales : CNAN Nour, CNAN Mediterranean,
CNAN Maghreb et NASCHO. Les trois premières se consacrent au transport maritime de
marchandises et la dernière à la consignation de bateaux. En 2006 une étape importante a été
franchie : chacune des filiales actives dans le transport de marchandises a été privatisée à titre
de partenariat avec des opérateurs venant de France, d’Italie et d’Arabie Saoudite.

48
L’action de l’Etat algérien a tendance à se résumer à une allocation financière insuffisante ne
permettant pas d’atteindre les objectifs fixés dans le secteur portuaire. En effet, comme on l’a
vu en parlant de l’investissement en infrastructures, le Ministère des Travaux Publics a alloué
plus de 100 milliards de dinars, dans le cadre du plan quinquennal 2010/2014, pour financer
environ 60 projets de réalisation et d’aménagement de plusieurs infrastructures portuaires.
Alors même que l’Etat réserve près de 40% de ses ressources à la poursuite du développement
des infrastructures de base et à l’amélioration du secteur public, avec notamment plus de
3.100 milliards de DA destinés au secteur des travaux publics La somme de 100 milliards DA
est absolument insuffisante comme nous l’avons soutenu.

Rappelons que le coût total du programme quinquennal pour les opérations de développement
était de 175 milliards de DA. Le programme de développement portuaire n’a donc pas pris en
compte les besoins financiers colossaux du secteur (Tadjine et Ahmed Zaid, 2011). .

S’agissant des attributions et prérogatives dans la gestion, il faut noter que depuis le décret de
2006 qui a posé les fondements de la privatisation, la séparation de la fonction commerciale
des entreprises portuaires et leur mission de puissance publique a été rendue possible. Il est
maintenant question de délimiter clairement les activités relevant du ressort de la puissance
publique et celles relevant du secteur concurrentiel. La mission de régulation des activités
portuaires incombe, de fait, aux entreprises portuaires qui assurent le rôle d’autorité portuaire.
Or, le caractère conjointement commercial et monopolistique créait une certaine confusion et
même un paradoxe certain.

D’autres types de chantiers préoccupent les pouvoirs publics algériens, notamment la création
d'un observatoire des coûts des passages portuaires : il s’agit d’une institution publique qui
disposera de l'autorité d'exiger de l'information aux acteurs des secteurs maritime et portuaire.

Pour permettre aux ports algériens de rattraper leur retard sur leurs concurrents
méditerranéens, le secteur a en outre besoin d'accélérer l'application des réformes décidées il y
a quelques années.

Il a été décidé d'agir pour remédier aux faibles performances des ports algériens, d'autant plus
que le trafic maritime entre les deux rives de la Méditerranée a explosé. Les causes de cette
contre-performance sont le manque de fiabilité sociale, la faible productivité des terminaux et
un coût plus élevé que celui des concurrents. Un fret Marseille –Alger coûte 40 % plus cher

49
qu'un Marseille – Tunis, les transporteurs facturant le manque de performance du port d’Alger
(Rapport REG MED, 2007).

Associé à ses partenaires étrangers, les autorités publiques élaborent des programmes de
développement intégrant le secteur portuaire dans le but d’améliorer ses performances.
L’acteur public en tant que maillon déterminant de la chaîne entreprendra des actions pour
l’extension, la modernisation et la réhabilitation du secteur par une allocation financière
quoique conséquente mais reste insuffisante

2.2. Les acteurs privés et le chantier de la privatisation

En 2006, la privatisation des ports d'Algérie s'est concrétisée avec le lancement de plusieurs
appels d'offres à l'échelle internationale pour la gestion du port d'Alger. A cette date
d’ailleurs, chacune des filiales se consacrant au transport de marchandises a été privatisée à
titre de partenariat avec des opérateurs français, italien et saoudien.

Mohamed-Cherif et Ducruet et notent que l’Etat algérien a pris conscience de l’échec du


modèle de gestion portuaire étatiste et depuis 2006, la réforme portuaire a eu lieu en
autorisant, à travers un partenariat public-privé, la concession de terminaux portuaires à des
partenaires étrangers21.

À l'heure actuelle, l'activité de consignataire par exemple est entièrement libéralisée. La


tutelle ou le registre d'une société consignataire incombe au Ministère des Transports. Un total
de 195 sociétés de consignation est enregistré, alors que 12 seraient suffisantes pour satisfaire
les besoins du marché. Par ailleurs, 70 % du marché des conteneurs est contrôlé uniquement
par trois sociétés : CMA CGM, MSC Algérie et MAERSK Alger. La tutelle ou le registre de
transitaire ou de commissionnaire en douanes relève des Douanes Algériennes.

La privatisation du port d’Oran a quant à elle commencé en juin 2008 et la sélection des
possibles opérateurs privés internationaux intéressés par sa gestion est en cours.

Le port d’Oran est considéré comme une installation portuaire qui pourra accueillir en 2017
des bateaux de dernière génération et dont la capacité sera de 1,5 à 2 millions de conteneurs
par an, alors qu’actuellement, ils ne peuvent accueillir que l'entrée de bateaux transportant un

21
Mohamed-Cherif, Ducruet, Du global au local : les nouveaux gérants des terminaux portuaires algériens,
Politique(s) de l’espace portuaire, 16| 2012-1:

50
maximum de 400 conteneurs. Il est également envisagé de privatiser les ports de Mostaganem
et d’Annaba.

En 2008, au port d'Alger, le trafic annuel n'a pas dépassé les 400 000 conteneurs avec une
moyenne horaire de déchargement de 10 conteneurs, la plus faible de toute la Méditerranée. A
terme, le trafic annuel doit passer, avec DPW, à plus de 700 000 conteneurs.

En tant que partenaire étranger, Djazaïr Port World a payé un ticket d'entrée de 16 millions
d'euros. Le capital de la société DPW atteint 20 millions d'euros, réparti à raison de 50-50
entre l'EPAL et Djazaïr Port World. La société bénéficie d'une concession du terminal à
conteneur sur 30 ans.

L'objectif à terme de DPW est de faire du port d'Alger une infrastructure rentable. Il faut donc
bien investir massivement : l'EPAL partage à moitié avec son partenaire, les dépenses
d'investissements de près de 10 milliards de dinars prévus notamment pour les infrastructures,
(environ 4,1 milliards de dinars), l'acquisition d'équipements (dont des portiques) et la mise en
place d'un système de gestion informatique (250 millions de dinars) et autant pour les
ressources humaines. Le nouveau partenariat

vise à induire une baisse des coûts et de la durée du passage dans ce port algérois. Un bateau
perd de l'argent quand il est au port et en gagne quand il est en mer. Le port algérois s'étendra
sur 18 hectares de surface, supérieure à sa surface initiale qui était de 12.

Le système de management est confié à Dubaï Port World selon deux modalités. La première
est un contrat de performance, payé durant sept ans par la société concessionnaire. La
seconde, au delà, prévoit un management sans paiement, à la responsabilité de Dubaï Port
World avec un encadrement qui sera totalement assuré par des Algériens. Le business plan
prévoit de faire progresser de 20 % la rentabilité au bout de dix ans. Les deux sociétés
concessionnaires payeront à l'Etat algérien une redevance fixe sur le m² et une redevance
variable sur le chiffre d'affaires.

L'EPAL doit fournir à Djazaïr Port World 660 employés, durant la première année. Le
terminal va devoir encore recruter mais de façon modérée ; à long terme, par souci de
productivité, les effectifs sont même appelés à baisser. En 1982, à sa naissance, l'EPAL faisait
travailler 7.000 travailleurs pour manutentionner environ 4 millions de tonnes de
marchandises par an. En 2008, ce port traite plus de 6 millions de tonnes, avec la moitié de cet
effectif. Les ports algériens sont en retard dans les qualifications requises pour un terminal

51
moderne. Il est prévu que les opérateurs étrangers se chargeront de la mise à niveau. Selon des
données officielles, 70 navires attendaient en moyenne chaque jour pour s’arrimer à un quai
en 2009, ce qui a coûté à l’État 700 millions de dollars (490 millions d’euros à l’époque) de
dédommagements.

Djazaïr Port World a également obtenu la concession du port de Djendjen. Ce port en eau
profonde est destiné à devenir un véritable port de transbordement et d'éclatement dont
l’objectif est d’accroître le trafic pour atteindre 1,5 million d'EVP (conteneurs) par an, alors
qu'il se situe à moins de 100.000 EVP en 2009, l’année de la conclusion du contrat.
L’entreprise joint venture conclue avec un opérateur étranger et un contrat a été signé par le
port de Béjaia avec le singapourien PORTEK

IV. DIMENSION ECONOMIQUE (COMMENT SONT GENEREES LES PLUS-


VALUES ?)

L’Algérie occupe la 140ème place au sein du classement mondial des ports. Les tarifs des
transports vers l’Algérie ont connu une augmentation de 50 % ces récentes années, les
entreprises portuaires cherchant à pratiquer depuis près d’une décennie la vérité des prix. Les
pertes pour chaque conteneur ont cependant atteint 120 dollars par jour. La faiblesse des
capacités de déchargement et la bureaucratie sont parmi les raisons qui ont conduit à la
détérioration de la qualité de service, de la productivité et de la compétitivité – prix.
Actuellement, le gouvernement tente de mettre fin à ces tares au port d’Alger en obligeant les
importateurs de marchandises non conteneurisées à opérer leur déchargement dans d’autres
enceintes portuaires. Cette mesure est renforcée par la création de magasins sous douane de
stockage de marchandises, des parcs à feu pour le stockage des produits dangereux et la
réalisation de ports secs. Or, les cinq wilayates du centre (Alger, Boumerdes, Blida, Tipaza et
Tizi Ouzou) totalisent 4 000 ha (soit environ 40 km2) de ports secs, de magasins et d’aires de
transit temporaire. Ces mesures peuvent être l’oeuvre des opérateurs eux-mêmes sauf pour les
ports secs où une intervention de l’Etat est nécessaire (Rapport de la CNAN, 2007).

Il demeure important que les ports algériens puissent redynamiser leurs activités en mobilisant
les ressources spécifiques, seules susceptibles d’améliorer leur attractivité en suivant une
stratégie résolument commerciale. Il est à relever la mauvaise répartition des rôles dévolus à
chaque port ; à titre d’exemple, le port d’Alger monopolise le trafic. La nature centralisatrice

52
de l’Etat algérien bloquant ainsi l’émergence des ports secondaires en est la raison essentielle.
Le cabotage national n’est pas développé, alors qu’il pourrait alléger les insuffisances des
réseaux de transport terrestre en le prenant en compte dans la chaîne logistique de transport.

Et, il n’existe aucune structure à l’échelle locale pour promouvoir cette pratique qui pourrait
dynamiser les petits ports. L’imbrication des ports dans des trames urbaines génère un effet de
congestion et des problèmes de fluidité du transit de la marchandise. Dans ce contexte,
l’inexistence d’aires de stockage propres aux importateurs à proximité raisonnable du port,
pousse ceux-ci à prolonger l’entreposage de leurs marchandises dans l’enceinte même du port.
Surtout que le trafic, déjà en 2010, avoisinait 13 millions de tonnes dans le port d’Alger.
Cependant, depuis une décennie, le système portuaire algérien se trouve dans une phase de
déconcentration, suivant le modèle de HAYUTH (1981) relatif à l’évolution spatiale d’un
système de port. Il se caractérise par des dé-économies d’échelles affectant le port principal
(Alger), engendrant une augmentation du trafic dans un ou plusieurs ports secondaires ou dits
« périphériques », en l’occurrence Béjaia, où le trafic conteneurisé a décuplé entre 2001 et
2010 alors qu’il a seulement doublé à Alger pour la même période.

V. Analyse de la performance des ports algériens : résultats et insuffisances

L’évaluation des résultats des ports algériens et de l’industrie maritime algérienne sera
effectuée sous le prisme d’un certains nombre de critères et d’indicateurs qui permettront de
situer le niveau de performance. Nous aborderons tout d’abord la performance dans le
contexte global du Maghreb et nous proposerons ensuite plus spécifiquement une analyse de
performance de l’industrie portuaire algérienne, avec un classement des ports algériens.

1. Etat des résultats des ports Algériens sur les dernières années

Les ports algériens sont considérés comme les ports les moins performants de la Méditerranée
malgré leur importance dans l’économie nationale (95% des échanges de marchandises du
pays transite dans ces ports). Ils ont connu depuis l’indépendance jusqu’aux années 2000, une
gestion exclusivement étatiste et ont continuellement « souffert du manque d’investissement et
de l’abus de la part des sociétés nationales qui sont les principaux chargeurs » (Zohra,
Mohamed-Cherif, Ducret, 2011).

53
1.1. Trafic portuaire et hiérarchie portuaire au Maghreb

Le Maghreb nous l’avons vu est avant tout importateur. Ce titre les résultats des différents
pays du Maghreb sont différents (Zohra, Mohamed-Cherif, Ducret, 2011). . La Tunisie
importait 20 millions de tonnes sur un total de 30 millions de tonnes de trafic en 2008, le port
principal du pays étant Rades, dans l’orbite de Tunis. Le Maroc, en 2009, importait par voie
maritime deux tiers des 59,8 millions de tonnes manutentionnées dans ses ports, le port de
Casablanca absorbant 40% du trafic national. L’Algérie, quant à elle, importait seulement
23% du trafic total passant par ses ports (130 millions de tonnes) en 2008, en raison du poids
énorme des exportations d’hydrocarbures, le port d’Alger monopolisant le trafic des
marchandises diverses (Zohra, Mohamed-Cherif, Ducruet, 2011). Ainsi, le trafic maritime
reflète la nature du commerce extérieur de ces nations, avec un poids plus faible du trafic
portuaire tunisien lié à la dominance de produits finis ou semi-finis comme le textile comme
l’indique la figure ci-dessous :

Figure 11. Évolution du trafic portuaire par pays, 1981-2009

Cette tendance est confirmée par la figure suivante qui montre la performance en trafic des
différents ports du Maghreb en 2008. Le port d’Oran en Algérie vient largement en tête

54
Figure 12. Hiérarchie portuaire et évolution du trafic au Maghreb, 1996-2008

1.2. Performance dans la spécialisation : le cas des hydrocarbures

Comme on l’a indiqué, l’industrie portuaire d’un pays est très souvent à l’image de son
commerce extérieur. A ce titre, un pays doit pouvoir faire montre d’une capacité de
spécialisation, qui est un moyen d’atteindre la performance économique. Chaque pays le fait
en fonction de ses possibilités et de ses atouts. A ce propos, Il convient de reconnaitre à
l’Algérie une certaine performance dans l’exportation minière via son industrie portuaire.
L’Algérie est en effet un pays mono-exportateur. (Zohra, Mohamed-Cherif, Ducret, 2011).
Les hydrocarbures (surtout le gaz) ont un poids écrasant dans son économie; l’Algérie est un
fournisseur privilégié des pays européens. Le gaz transite principalement par les ports
d’Arzew et de Skikda. Il est chargé sur des méthaniers (8 navires dont un super-méthanier
d’une capacité de 175 000 m3). Le transport par tube sera un sérieux concurrent des
méthaniers, même si la tendance actuelle est au maintien des lignes maritimes. En effet, la
construction de deux gazoducs est en cours ou programmée: l’un vers l’Espagne (Medgaz)
opérationnel depuis mars 2011 (El Watan, 2011), et l’autre vers l’Italie (Galsi: Gasdotto
Algeria Sardegna Italia) dont la construction devrait s’achever en 2015.

La production annuelle (60 milliards de m3) repose sur d’énormes infrastructures de


liquéfaction (capacité de 30 millions de m3), connectées à un réseau de canalisations

55
acheminant les hydrocarbures depuis l’arrière-pays saharien (Hassi Rmel et Hassi Messaoud)
jusqu’aux ports (Zohra, Mohamed-Cherif, Ducret, 2011). Ces lignes algériennes constituent
l’épine dorsale des flux de gaz naturel liquéfié du Maghreb. La réalisation du projet
d’exploitation du gisement de Gassi Touil (Timimoune) et la mise en service de la nouvelle
unité de liquéfaction à Skikda en 2012 devraient permettre à l’Algérie de renforcer sa
présence sur cette route méditerranéenne (H. Benabderrazik, 2008)

1.3. Les partenariats réalisés

En raison de l’importance des aspects de réseaux dans la gestion de l’industrie portuaire, la


qualité et la durabilité des partenariats établis entre acteurs dans le secteur est un gage
important de performance.

La nouveauté dans l’organisation du système portuaire algérien est néanmoins l’apparition


d’un partenariat privé étranger, en l’occurrence avec l’Emirati Dubaï World Ports (DWP). Par
ailleurs, Djazaïr Port World (DPW), une deuxième entreprise joint-venture a officiellement
été créée le 15 février 2009 à la faveur d’un marché passé de gré à gré, entre l’EPAL et Dubaï
World Ports (DWP), troisième opérateur mondial dans les terminaux à conteneurs, a pris les
commandes du terminal à conteneurs du port d’Alger.

1.4. Résultats financiers et classement des ports algériens

En 2007, l'ensemble des ports d'Algérie a réalisé un trafic de 130 millions de tonnes de
marchandises, dont 102 millions étaient des produits pétrolifères. En 2006, un total de 126
millions de tonnes de marchandises sont passées par ces ports, ce qui a permis d'enregistrer un
chiffre d'affaires de 25,5 milliards DA. En termes de chiffres de trafic et d'affaires, les ports
les plus importants sont ceux d’Arzew, avec 71 millions de tonnes et 7,4 milliards DA ; de
Skikda avec 19,9 millions de tonnes et 3,5 milliards DA ; de Béjaïa avec 14 millions de
tonnes et 2,4 milliards DA, et d’Alger avec 10,1 millions de tonnes et 7 milliards DA
(Tadjine, Ahmed Zaid, 2011).

En 2008, les autorités algériennes livraient un classement de la performance des principaux


ports algériens :

56
Figure 13. Trafic des ports algériens en 2008 (tonnes métriques)

Source : Annuaire statistique des ports de commerce d'Algérie, Ministère des transports.

Une autre représentation digne d’intérêt et provenant de la même source donne l’évolution du
trafic conteneurisé dans les ports algériens entre 2001 et 2010.

Figure 14. Evolution du trafic conteneurisé dans les ports algériens, 2001-2010 (EVP)

Source : Annuaire statistique des ports de commerce d'Algérie, Ministère des transports.

57
Il faut noter que depuis ces classements, la situation a quelque peu évolué. En effet, le port de
Bejaia est classé, depuis 2012, premier au niveau national.

Après s’être classé 2ème port d’Algérie en marchandises générales et 3ème port pétrolier, en
2010, l’entreprise portuaire de Bejaia s’est hissé en 2012 à la première place au classement
national des ports d’Algérie en matière de transactions internationales. Selon son DG Achouri
Djeloul, 16 666 000 tonnes de marchandises ont transité par le port de Bejaia, du 1er janvier
au 31 octobre de l’année en cours, dépassant ainsi ceux d’Alger, d’Oran et d’Annaba.

A l’import, le port de Bejaia a reçu 8 688 000 tonnes de marchandises, notamment de la


matière première commandé par les entreprises nationales. A l’export, ce sont 7 777 000
tonnes de marchandises essentiellement des produits pétroliers, qui ont transités à travers cette
infrastructure portuaire.

Finalement, à titre de synthèse sur ces résultats au niveau des ports algériens, on peut relever
deux aspects d’insuffisance.

D’abord, l'Algérie conserve le coût moyen d'importation/exportation d'un conteneur le


plus élevé parmi de nombreux pays émergents (environ 1300 euros pour le transport
maritime d'un conteneur entre Marseille et Alger), le temps nécessaire aux procédures
d'acheminement étant également très long, plaçant l'Algérie juste derrière la Chine, le
Vietnam et la Pologne (Mohamed-Cherif, Ducruet, 2012).
Ensuite, son indice de "performance logistique" est le plus faible du Maghreb, ainsi
que son niveau de développement des infrastructures de transport en général. Le
rendement portuaire algérien est, enfin, le plus faible en Méditerranée, notamment en
raison du sous-équipement des terminaux, de la mauvaise gestion du stockage, et des
faibles tirants d'eau (Setti et al., 2011).

Cette synthèse des résultats des ports algériens nous permet à présent de décliner les points de
défaillance qui expliquent ces mauvais résultats

2. Actions importantes à engager par les ports algériens

Passons en revue les principales failles observées dans le système portuaire algérien et par
ricochet, les mesures à engager pour inverser la tendance

58
2.1. Des Infrastructures vétustes à renouveler

Les équipements destinés à la manipulation de marchandises dans les ports algériens ont
besoin d'une mise à niveau et ceux servant à la gestion des conteneurs doivent être actualisés
de toute urgence.

Au niveau purement portuaire, les investissements en cours (agrandissement et amélioration


des infrastructures) s'élèvent à environ 507 millions d'euros, soit moins de 7% du total des
investissements de ce type à l'échelle du Maghreb (INVEST IN MED, 2009)

2.2. Une Gouvernance à revoir

Il y a évidemment un problème de gouvernance autour des ports. Ce défaut de gouvernance


touche plusieurs aspects. D’abord l’urbanisation autour des ports a été mal pensée jusqu’ici
car elle doit aller au delà des infrastructures strictement portuaires pour être efficace.

Ainsi, il n'y a pas, à proprement parler, de corridors Nord-Sud de transport en Algérie à cause
de l'importance écrasante du littoral dans l'organisation territoriale et du caractère captif des
arrière-pays portuaires concentrés autour de chaque port (Mohamed-Cherif et Ducruet, 2011).

Du point de vue de la gouvernance managériale, on sait qu’à travers le monde, les ports ont
connu des réformes importantes allant vers la privatisation, la déréglementation et la
décentralisation des infrastructures portuaires dont les objectifs sont l’amélioration de
l’efficacité portuaire, la réduction de l’intervention de l’Etat dans la planification et la gestion
des infrastructures maritimes pour réduire l’enveloppe financière à investir (COMTOIS et
SLACK, 2003).

Dans ce contexte mondial, les autorités algériennes réfléchissent à de nouveaux modes de


gouvernance en s’associant avec des partenaires privés étrangers. L’enjeu est d’arriver à avoir
le mode de Partenariat Public Privé qui convienne aux spécificités algériennes réticentes aux
réformes domaniales. Ils optent, alors, pour une privatisation des activités portuaires
commerciales dans le décret exécutif de 2006.

2.3. Une ouverture internationale à renforcer

Il ya lieu de noter la faible présence des opérateurs logistiques internationaux en Algérie. Des
opérateurs comme DHL, CEVA et MAERSK n'y ont qu'un bureau chacun de taille modeste
en comparaison des entrepôts et zones dédiées de ces mêmes opérateurs au Maroc et en

59
Tunisie. Finalement, la logistique algérienne repose essentiellement sur les entreprises locales
(comme les transitaires).

Cet état de fait affecte évidemment le volume du trafic et a aussi des incidences sur les
investissements. Les investissements en cours (agrandissement et amélioration des
infrastructures) s'élèvent en effet à environ 507 millions d'euros, soit moins de 7% du total des
investissements de ce type à l'échelle du Maghreb (INVEST IN MED, 2009). Il n'y a pas, à
proprement parler, de corridors Nord-Sud de transport en Algérie à cause de l'importance
écrasante du littoral dans l'organisation territoriale et du caractère captif des arrière-pays
portuaires concentrés autour de chaque port (MOHAMED-CHERIF et DUCRUET, 2011).

2.4. Une privatisation à mieux encadrer et optimiser

En termes de privatisations, les résultats restent mitigés, le succès n’étant pas souvent très loin
de l’échec, suivant les cas. Si l’arrivée du singapourien PORTEK est une réussite, l’émirati
DUBAI PORTS WORLD (DPW) peine à concrétiser ses objectifs. La nouvelle gestion du
terminal à conteneurs d’Alger depuis le 17 mars 2009 n’a pas engendré d'impact significatif
sur la fluidité du trafic. Des chiffres récents montrent, en effet, que la part de DPW dans le
trafic algérois aurait même baissé de 13% sur la période janvier-mai 2011 par rapport à
l'année précédente (Mohammed-Cherif et Ducruet, 2012).

Cependant, le bilan est contrasté puisqu'en termes de trafic conteneurisé, l'Entreprise Portuaire
d'Alger (EPAL) accuse une baisse bien plus forte que DPW en référence aux mêmes périodes,
soit -27% et -9% respectivement (Mohammed-Cherif et Ducruet, 2012).

Le développement du trafic conteneurisé sur le terminal concédé semble souffrir de difficultés


financières. Le groupe émirati a prévu d’équiper le terminal de 4 portiques, mais cette
démarche ne peut pas avoir lieu sans la consolidation des quais et le prolongement de la jetée,
des oeuvres à la charge de l’Etat. Le même problème se pose pour le port de Djen Djen.
D’après la vision de DPW, le port d'Alger pourrait recevoir 100 millions d'euros de nouveaux
investissements et celui de Djen Djen, 400 millions d'euros pour devenir le second port à
conteneurs du pays. Mais, le groupe émirati veut que l’Etat soutienne ses investissements
puisque ce n’est pas une concession domaniale. Le malaise est tellement important qu’une
révision du contrat de concession serait envisagée. La « formule » de concession à l’émirati
affiche déjà ses limites.

60
Le manque d’expérience et les lourdeurs de gestion portuaire étatiste perdurent. Le
concessionnaire émirati a d'ores et déjà affronté plusieurs problèmes localement : les grèves à
répétition des dockers due au changement de la cadence du volume horaire ainsi que le
manque d’équipement accentuent l’absence du respect de l’engagement de l’Etat établi dans
le contrat.

Le concessionnaire émirati, en étendant son réseau aux deux ports algériens, pensait réaliser
des investissements à un endroit stratégique, l’Algérie pouvant jouer le rôle de passerelle
entre les ports européens de la rive sud de la Méditerranée et ceux de l’Afrique noire. DP
World semble avoir surestimé cet aspect, l'Algérie n’ayant pas de culture de la gestion
portuaire privée. Par ailleurs, les ports algériens sont de taille modeste, par rapport notamment
au port de Lattaquié (Syrie) venant d’être octroyé à l’armateur français CMA CGM et
s’étalant sur une surface de 69 ha, soit plus du double de celles d’Alger, Djen Djen et Béjaïa
réunis. Par ailleurs, le port d’Alger a un autre handicap, celui de sa configuration : la pression
spatiale urbaine reste un problème de taille face aux exigences de la logistique moderne. Or,
les grands investisseurs, surtout dans le domaine portuaire, dans le monde, ne s’intéressent
pas aux marchés nationaux, mais interviennent sur le plan mondial.

L’évolution des hubs concurrents de Djen Djen (Maroc, Tunisie) ainsi que l'imbrication entre
port et zone franche ne peut que rendre le projet algérien caduc. La réforme a eu des effets sur
l’activité portuaire : l’augmentation des flux conteneurisés des terminaux gérés par les
manutentionnaires étrangers mais ceci ne peut occulter le fait que certaines pratiques du
modèle de gestion étatique algérien demeurent surtout au port d’Alger où les retards et la
congestion perdurent mettant en difficulté la coopération avec les nouveaux acteurs étrangers.

2.5. Une absence d’intégration multimodale à corriger

L’organisation multimodale est quasiment absente du système de transport algérien (Tadjine,


Ahmed Zaid, 2011). Or, l’intégration de bases logistiques et de plates-formes de
correspondance et de transit intermodal n’en est qu’à un stade de réflexion et de conception.
La création de ports secs, tels qu’ils sont conçus actuellement, soulage certainement
l’utilisation des espaces portuaires mais ne résout par les problèmes d’intermodalité du
système. Toutefois, l'importance actuelle de l'offre de services logistiques est indéniable et,
même si elle en est à un stade embryonnaire en Algérie, des opérateurs logistiques
appartenant au secteur privé y consacrent leurs efforts.

61
3. Bilan de performance : notre matrice d’évaluation des ports algériens

La matrice d’évaluation que nous proposons ci-dessous restitue les grands axes de
l’évaluation de la performance des ports algériens. Elle repose sur une synthèse des
différentes études et donnée que nous avons exploré afin d’évaluer la performance de
l’industrie portuaire algérienne et des ports algériens.

La matrice que nous suggérons est bâtie autour de plusieurs critères

Des critères de nature technique, liés aux infrastructures et à leur fonctionnement

Des critères de nature managériale, liés à l’organisation globale du système et aux


interactions entre acteurs

Des critères de nature économique, liés à la rentabilité pour les acteurs et pour le
système.

Pour chacun des critères, nous avons tenu à proposer une pondération de l’évaluation. Nous
explicitons et justifions par ailleurs l’évaluation qui est faite de la performance des ports
algériens à l’un de chacun des critères.

62
Figure 15. Notre Matrice récapitulative de l’évaluation de la performance du système
portuaire algérien

CRITERE NATURE DU PONDERATION CARATERISTIQUE


CRITERE S PRINCIPALES ET
Très Limité Bon Très EXPLICATIONS
limité bon
Limitée et
insuffisante
FLOTTE TECHNIQUE X
Flotte algérienne est
constituée de bateaux
anciens et de taille
moyenne. Un
renouvellement est
nécessaire tant sur la
qualité et que sur la
quantité
Ancienne et
dépassé
Actualité TECHNIQUE X
Ports algériens
des ports
construits jusqu’en
2000 selon des
normes anciennes,
pour exploitation
pétrolière. Absence
d’infrastructures
portuaires modernes
Qualité TECHNIQUE Inefficace et
vétuste
technique X
configuration des
des ports
ports adaptée aux
navires de petites
tailles en raison de la
profondeur théorique
de ces ports réduite

63
par le phénomène
d’envasement et par
le dragage
Qualité et TECHNIQUE Sous-équipé
Sous-équipement des
fiabilité X
des terminaux, mauvaise

installation gestion du stockage et

s des faibles tirants


techniques d'eau. Faiblesse des
capacités de
déchargement
Gestion TECHNIQUE Insupportable
défaillances sur le plan
des délais X
(temps des superstructures

d’attente) sont aussi lourdes


imposent aux navires
des temps d’attente
très élevés (par
exemple, la durée de
séjour à quai des
navires céréaliers est
de 16 jours22)
Tarifs et Managériales Très élevés
Tarifs vers l’Algérie
maitrise et X
des couts économiques ont connu une
augmentation de 50 %
début 2011. Pertes
pour chaque
conteneur ont atteint
120 dollars par jour.
Un fret Marseille –

22
Mohamed Cherif – F-Z : les ports Algériens : revue maritime n°480 [en ligne],
http://ifm.free.fr/htmlpages/pdf/2007/480%20_7%20ports%20algeriens.PDF consulté le 12 mars 2014

64
Alger coûte 40 % plus
cher qu'un Marseille –
Tunis
Offre de Managériales Importante
importance indéniable
services et X
logistiques économiques de l'offre de services
logistiques même à un
stade embryonnaire.
De nombreux
opérateurs logistiques
appartenant au
secteur privé
Collaborat Managériales Incohérente et
Inefficace
ion entre X
Désordre dans la
acteurs
répartition des rôles
nationaux
public-privé et
déresponsabilisation.
Partenanariats
publics-privés encore
récents.
Collaborat Managariales Limitée
Faible présence des
ion entre et économique X
acteurs opérateurs logistiques

internation internationaux en

aux Algérie, DHL, CEVA et


MAERSK n'y ayant
qu'un bureau chacun
de taille modeste en
comparaison des
entrepôts et zones
dédiées de ces mêmes
opérateurs au Maroc

65
et en Tunisie
Capacité Manageriale et Inefficace et
Vétuste
de l’Etat à juridique X
Investissement public
jouer son
insuffisant malgré
rôle
l’évolution du cadre
(Investisse
juridique et réforme
ment,
du modèle de gestion
encadreme
portuaire (les
nt et
régulation) investissements en
cours s'élèvent à
environ 507 millions
d'euros, soit moins de
7% du total des
investissements de ce
type à l'échelle du
Maghreb. La
bureaucratie conduit à
la détérioration de la
qualité de service, de
la productivité et de la
compétitivité – prix
Dynamism Managariale et Déséquilibré et non
maitrisé
e et économique X
Parfois trop d’acteurs
efficacité
(un total de 195
du secteur
sociétés de
privé
consignation est
enregistré, alors que
12 seraient suffisantes
pour satisfaire les
besoins du marché) ou
trop peu (70 % du

66
marché des
conteneurs est
contrôlé uniquement
par trois sociétés :
CMA CGM, MSC
Algérie et MAERSK
Alger)
Multimoda Economique et Inexistante
Pas d’organisation
lité et managériale X
intégration multimodale, pas de
cabotage national.
Congestion et
problèmes de fluidité
du transit de la
marchandise
Volume du Limitée
En 2007, seulement
trafic et X
Performan 130 millions de tonnes

ce de marchandises, dont

financière 102 millions étaient


des produits
pétrolifères. Pour un
chiffre d'affaires de
25,5 milliards DA
Capacité à Technique Efficace et réussie
spécialisation réussie
se X
spécialiser des ports algériens
dans le transport des
hydrocarbures
Poids dans Economique
Prépondérant
l’économie X
Dans les ports
du pays algériens
transitent 95% des
échanges de
67
marchandises du
pays

Performan Technique
Limitée
ce globale Managériale X
Les ports algériens
Economique
sont considérés
comme les ports les
moins performants de
la Méditerranée.
L’Algérie occupe la
140ème place au sein
du classement
mondial des ports

4. Perspectives de développement des ports algériens

4.1. Au niveau des infrastructures

En termes de perspectives, l’Algérie mise beaucoup sur l’agrandissement du port de Djen


Djen pour assurer la fonction de hub. Le port sera doté d’une superficie supplémentaire de 78
hectares pour une capacité de 2 millions d’EVP et pour un coût de 500 millions d’euros étalés
sur 30 ans. Au-delà de la fonction de transbordement, le port veut élargir son arrière-pays aux
pays limitrophes, notamment au Niger, et plusieurs éléments plaident en sa faveur, comme la
réalisation de la pénétrante autoroutière reliant le port à l’autoroute Est-Ouest, ce qui devrait
lui permettre d’être connecté à la Transsaharienne. Le port pourrait alors devenir la porte de
l’Afrique subsaharienne. Le groupe nucléaire français Areva étudie d’ailleurs la possibilité
d’évacuer par le port de Djen Djen l’uranium extrait à Imouraren, dans le Nord du Niger
(Jeune Afrique, 2010).

68
4.2. Au niveau de la logistique maritime et l’optimisation des services

Les pouvoirs publics se préoccupent aussi de la création d'un observatoire des coûts des
passages portuaires : une institution publique qui disposera de l'autorité d'exiger de
l'information aux acteurs des secteurs maritime et portuaire. Aussi, le secteur a besoin
d'accélérer l'application des réformes décidées il y a quelques années, l’objectif étant de
permettre aux ports algériens de rattraper leur retard sur leurs concurrents méditerranéens. Il a
été décidé d'agir pour remédier aux faibles performances des ports algériens, d'autant plus que
le trafic maritime entre les deux rives de la

Méditerranée a explosé. Les causes de cette contre-performance sont le manque de fiabilité


sociale, la faible productivité des terminaux et un coût plus élevé que celui des concurrents.
Un fret Marseille – Alger coûte 40 % plus cher qu'un Marseille – Tunis, les transporteurs
facturant le manque de performance du port d’Alger (Rapport REG MED, 2007).

Associé à ses partenaires étrangers, les autorités publiques élaborent des programmes de
développement intégrant le secteur portuaire dans le but d’améliorer ses performances.
L’acteur public en tant que maillon déterminant de la chaîne entreprendra des actions pour
l’extension, la modernisation et la réhabilitation du secteur par une allocation financière
quoique conséquente mais reste insuffisante.

4.3. Au niveau de la Gouvernance

Les autorités algériennes réfléchissent à de nouveaux modes de gouvernance en s’associant


avec des partenaires privés étrangers. L’enjeu est d’arriver à avoir le mode de Partenariat
Public Privé qui convienne aux spécificités algériennes réticentes aux réformes domaniales.
Ils optent, alors, pour une privatisation des activités portuaires commerciales dans le décret
exécutif de 2006.

La présentation des failles du service logistique dans la première partie nous a permis
d’appréhender les leviers de la gouvernance à travers et l’identification des nouveaux acteurs
et les actions de l’acteur public afin de nous éclairer sur la situation des ports et les limites du
nouveau mode de régulation.

Ce changement important dans la législation portuaire devrait ouvrir aux entreprises publiques
et privées la possibilité d’intervenir dans le secteur portuaire. Dès sa publication le décret a
cependant suscité l’intérêt d’acteurs économiques nouveaux voulant investir le domaine

69
portuaire. Le groupe algérien CEVITAL a demandé l’autorisation de la construction d’un hub
portuaire à Cap Djinet, mais sans résultat.

A travers une privatisation partielle des ports, l’Etat algérien espère obtenir l’efficacité des
ports et augmenter ses capacités en infrastructures. Mais la réforme domaniale qui permettrait
à l’investisseur de jouir de tous les droits d’un propriétaire n’est pas encore à l’ordre du jour.
Cette politique portuaire devait être adaptée aux mutations en cours de l’économie mondiale,
mais l’Algérie connaît un retard dans le mouvement de privatisation qui a touché plusieurs
ports des pays en développement tel le Maroc (MOHAMMED-CHERIF, 2007). Dès les
années 1990, ce pays a en effet privatisé la manutention dans ces ports et les résultats ont été
un dédoublement de la productivité de cette activité.

La nouveauté dans l’organisation du système portuaire algérien est néanmoins l’apparition


d’un partenariat privé étranger, en l’occurrence avec l’Emirati Dubaï World Ports (DWP). Par
ailleurs, Djazaïr Port World (DPW), une deuxième entreprise joint-venture a officiellement
été créée le 15 février 2009 à la faveur d’un marché passé de gré à gré, entre l’EPAL et Dubaï
World Ports (DWP), troisième opérateur mondial dans les terminaux à conteneurs, a pris les
commandes du terminal à conteneurs du port d’Alger.

En 2006, la privatisation des ports d'Algérie s'est concrétisée avec le lancement de plusieurs
appels d'offres à l'échelle internationale pour la gestion du port d'Alger. La privatisation du
port d’Oran a commencé en juin 2008 et la sélection des possibles opérateurs privés
internationaux intéressés par sa gestion est en cours. Le port d’Oran est considéré comme une
installation portuaire qui pourra accueillir en 2017 des bateaux de dernière génération et dont
la capacité sera de 1,5 à 2 millions de conteneurs par an, alors qu’actuellement, ils ne peuvent
accueillir que l'entrée de bateaux transportant un maximum de 400 conteneurs. Il est
également envisagé de privatiser les ports de Mostaganem et d’Annaba.

4.4. Au niveau de la coopération avec l’Europe

De son côté, l’Europe veut soutenir le développement portuaire au Maghreb: les fondateurs de
l’Union pour la Méditerranée, créée en 2008, ont mis en place le projet Meda Mos
(Motorways of the Sea). Le projet d’autoroutes de la mer est censé arrimer les deux rives de la
Méditerranée et donc servir l’intégration euro-méditerranéenne (Weigert, 2010). Le
programme Meda Mos a débuté par la mise en oeuvre de projets pilotes en 2009. Trois ports
maghrébins ont été retenus dans ce cadre: Tanger Med, Tunis-Rades et Bejaia. Ils bénéficient

70
d’une assistance technique et financière. À la fin 2010, les lignes suivantes étaient
opérationnelles: Rades-Gênes et Rades-Marseille pour la Tunisie (lignes de navires rouliers),
Agadir-Port Vendres pour le Maroc (ligne de porte-conteneurs, fruits et légumes), Bejaia-
Barcelone et Bejaia-Marseille pour l’Algérie (lignes de navires rouliers). Les trafics de
transbordements ne sont pas exclus de ces projets, mais la priorité est donnée aux échanges
intra-méditerranéens.

71
Conclusion de la Partie II

En refermant cette seconde partie, rappelons que nous nous sommes posés la question de
savoir quel est le niveau de performance des ports algériens dans l’espace méditerranéen, si la
qualité de leur gestion est opportune, au regard notamment de leurs capacités logistiques.

C’est ainsi que nous nous sommes attelés à mesurer les efforts accomplis pour la
modernisation du secteur en examinant la teneur des mesures prises et leur capacité réelle à
contribuer à l’augmentation des possibilités logistiques des ports algériens et du trafic
portuaire en général.

Nos constats au terme de cette partie sont sans appel : les ports algériens ont besoin autant de
savoir-faire étranger que d'une injection massive d'argent public, et, l'État est appelé à doubler
ses investissements.

Dans la troisième partie que nous introduisons ici, nous irons plus en détail dans ce constat.

Déjà notons que dans le contexte régional du Maghreb, la somme de 100 milliards DA
avancée par les autorités algérienne au titre des investissements à venir semble en effet bien
dérisoire face aux enjeux. A titre de comparaison, donné le port Med II de Tanger au Maroc a
suscité un investissement global de 3 milliards d’euros. Pendant que les autorités publiques
algériennes escomptent la création de quelque 18.000 emplois dont près de 3.000 directs grâce
à ces projets, l’on préconise la création de 145 000 emplois à Tanger Med à l’horizon 2015.

Ce sont des paradoxes et décalages de cette nature qui nous ont conduits à proposer l’analyse
comparative qui suit.

72
PARTIE III. Analyse comparative entre le port de Mostaganem
(Algérie) et le port de Tanger (Maroc)

Dans cette ultime partie, notre démarche sera empirique, et plus précisément comparative et
analytique. Nous proposerons en effet une confrontation entre un port algérien (Mostaganem)
et un port maghrébin, marocain en l’occurrence (Tanger). Cette démarche nous offrira des
résultats autant quantitatifs que qualitatifs et que nous analyserons. Au terme de cet exercice
nous testerons nos hypothèses vérifierons nos hypothèses, l’objectif étant finalement de savoir
comment décongestionner le système portuaire algérien et de rendre le secteur efficient.

73
I. OBJECTIFS ET METHODOLOGIE

1. Objectifs et contexte de la comparaison

L’objectif majeur de cette analyse comparative est de démontrer que l’atteinte des les buts que
se sont fixés les acteurs algériens et leurs partenaires pour développer les ports algériens n’est
possible que s’ils s’inscrivent dans une stratégie plus globale allant dans le sens de créer des
plateformes portuaires à conteneurs et s’éloigner de l’enclave du port secondaire polarisé
par les autres hubs méditerranéens. Nous souhaitons à ce propos démontrer que le temps joue
contre les projets algériens, au regard de la dynamique lancée par les projets des pays voisins.

La comparaison entre les ports de Mostaganem et de Tanger nous permettra de mettre cela en
exergue.

2. Economie algérienne et économie marocaine : une confrontation

La situation économique d’un territoire est fondamentale dans l’analyse de l’évolution des
transactions portuaires. Il est donc essentiel de proposer une confrontation des
environnements économiques de l’Algérie et du Maroc avant d’arriver, à proprement parler, à
la confrontation des secteurs portuaires et précisément la comparaison de deux ports actifs
dans chacun des pays. Commençons par une confrontation des données sociales des deux
pays.

Figure 16. Caractéristiques comparées des sociétés algérienne et marocaine

Algérie Maroc

Superficie (km²) 2 381 741 446 550


Population 35 400 000 32 300 000
Densité de population (hab/km²) 14,52 83,14
Capitale Alger Rabat
Plus grande ville Alger (2 740 000 hab) Casablanca (3 245 000 hab)
Gouvernement République à régime semi- Monarchie constitutionnelle
présidentiel
Langues officielles arabe Arabe, Berbère
Langues nationales Berbère
PIB (nominal) (milliards de dollars) 183,4 101,8
PIB (PPA) milliards de dollars 264,1 163
PIB (nominal) par habitant US $ 5180 3150
PIB (PPA) par habitant US $ 7200 5100
IDH3 0.713 (93ème ) 0,591 (130ème )

74
Une autre perspective est celle de la comparaison des données purement économiques sur les
dernières années. La figure ci-dessous schématise l’état comparé des deux environnements
économiques.

Figure 17. Caractéristiques comparées des économies algérienne et marocaine

Source : www.banquemondiale.org/data

3. Méthodologie et ressources pour l’analyse comparative

Cette section traite de la démarche que nous allons adopter pour conduire notre analyse
comparative.

3.1. Pourquoi avons-nous choisi la méthode comparative ?

Depuis les années récentes, observer, comprendre et expliquer des processus qui désormais se
déroulent à une échelle transnationale tout en ayant des impacts locaux, ne relève plus d'un
exercice confiné à un contexte uniquement national. Il est devenu précieux de confronter,
comparer plusieurs environnements, afin de mieux comprendre et mieux anticiper.

75
3.2. La méthode comparative dans le contexte des sciences sociales

Face à cette nouvelle situation où les phénomènes de sociétés sont plus perçus comme des
phénomènes globaux, la démarche comparative s’impose donc. Cette démarche comparative
ne peut se limiter à juxtaposer la production d'études de cas probablement pertinentes mais
élaborées en dehors de toute comparaison transnationale.

La méthode comparative, se veut un substitut à l'expérimentation des sciences exactes. Elle


autorise à dégager des lois en dissociant un phénomène de son environnement. Dans la
comparaison on traite d’abord d’un « environnement culturel », qui inclut les institutions,
coutumes, traditions, systèmes de valeurs et modes de vie en relation avec les processus de
production économique dans cet environnement, afin de confronter ces valeurs avec un autre
environnement. La recherche en comparative en sciences sociales oscille ainsi entre deux
pôles, celui de la validation scientifique et celui de l'historicité23.

Cependant cette démarche a beaucoup d’exigence que nous allons d’ailleurs naturellement
tenter de respecter dans le cadre de ce travail. Aussi toute étude comparative implique, d'une
part, d'identifier des concepts pertinents au-delà de la division entre sciences sociales et,
d'autre part, de construire des catégories supposant la comparabilité au delà des frontières
nationales. Elle exige un effort de standardisation et d'harmonisation mais aussi de
clarification du vocabulaire scientifique, dépassant les différences sémantiques: il s'agit
d'identifier les variables communes tout en se mettant d'accord sur la manière d'attribuer à
chacune de ces variables une valeur empirique identique. Dans le cas d’une analyse
comparative dans le domaine portuaire, la complexité est importante car il ya plusieurs
éléments de comparaison possible et beaucoup de façon de les aborder.

Par ailleurs, construire une problématique commune va supposer de se doter d'une grille de
lecture transversale, transculturelle ou transnationale, exige ainsi au préalable de se mettre
d'accord sur les éléments de la thématique et de la problématique susceptibles de faire l'objet
de la comparaison. Mais faut-il opter pour des indicateurs quantitatifs ou qualitatifs? Voyons
comment notre comparaison sera conduite sur le terrain

23
Cynthia Ghorra-Gobin, La démarche comparative en Sciences Sociales, Gestion des Transformations sociales,
n°40, 1998

76
3.3. Comment va s’effectuer notre analyse comparative ?

Tout d’abord, en termes d’objectif assigné à la comparaison, on sait que le principe de


comparabilité qui s'inscrit dans toute démarche comparative, se décline toutefois en fonction
de l'objectif que va poursuivre la recherche comparative. Notre comparaison des ports de
Mostaganem et Tanger ne vise pas à tirer des enseignements globaux sur l’exploitation
portuaire en Algérie et au Maroc. Il vise plus modestement à confirmer les constats que nous
avons au préalable opérés sur les limites et les défis de l’environnement portuaire algérien. En
ce sens, il s’agit donc plus d’une analyse comparative de vérification / confirmation, avec un
objectif bien encadré : savoir si les conclusions opérées au niveau national algérien se
confirment dans le cas précis du port de Mostaganem et pour cela, confronter le
fonctionnement de ce port avec un autre, dans un environnement différent, le port de Tanger.

S’agissant ensuite de la méthode et du périmètre : notre comparaison ne va pas consister


en une exploration exhaustive des réalités des ports de Tanger et de Mostaganem. Beaucoup
d’aspects techniques, politiques, structurels ne seront pas abordés ici. Il s’agit davantage de
dégager des variables médiatrices afin de parvenir à des réalités et conclusions pertinentes et
dignes d’intérêt. C’est pourquoi l’accent sera porté sur la confrontation des deux terrains à
travers précisément les axes d’analyse qui nous ont servi de fil conducteur jusqu’ici : l’axe
technique et logistique, l’axe organisationnel et l’axe économique. De cette façon, les données
recueillies seront directement orientées vers l’évaluation de notre revue de la littérature (ou
revue d’actualité) et aussi la vérification de nos trois hypothèses de recherche.

4. Présentation des axes de comparaison considérés

Nous allons reprendre des critères qui ont déjà été exploité lors de l’analyse du système
portuaire algérien et les transposer au cadre plus restreints des ports de Mostaganem et de
Tanger.

4.1. Axe technique et logistique

C’est le premier axe de comparaison. Il concerne l’état des infrastructures portuaires et le


niveau des investissements techniques. Les critères déterminants ici sont : nature et qualité
des outils techniques, nature et qualité de l’entretien de ce patrimoine, volume des
investissements. Nous proposerons en outre un focus sur la variable de la conteneurisation et
verrons comment sa présence ou son absence affecte les différents environnements.

77
4.2. Axe organisationnel

L’axe organisationnel va concerner la gestion managériale autour des ports dans les deux
environnements étudiés. Les principaux critères considérés ici sont : la gestion des structures,
la gestion des acteurs et la gestion des processus.

4.3. Axe financier et de compétitivité

Cet ultime axe concerne l’évaluation de la performance économique des deux ports et de leur
compétitivité. Les critères déterminants ici concernent le dynamisme économique et les
résultats financiers principalement. La variable de la capacité du port à faire face à la
concurrence est déterminante.

5. Présentation rapide des ports comparés

Avant la comparaison proprement dite, présentons rapidement les deux cas d’étude : le cas
principal (port de Mostaganem en Algérie) et le cas de comparaison (port de Tanger- Med au
Maroc).

5.1. Cas principal : le port de Mostaganem

Le port de Mostaganem est notre cas principal puisque le Mémoire part prioritairement de
l’analyse de l’exploitation portuaire en Algérie. Nous allons présenter ce port de Mostaganem,
examiner ses atouts et ses failles, afin de le comparer au port de Tanger Med (notre cas de
confrontation).

Figure 18. Une vue du port de Mostaganem

78
Source : www.djazair50.dz

Mostaganem est une ville portuaire, le port est situé dans le golfe d'Arzew et doté d’une
superficie de 68 ha et deux bassins. Il est traversé par un réseau de voie ferrée. Situé à
proximité du premier pôle gazier et pétrolier d'Arzew, le port de Mostaganem constitue la
voie la plus courte pour l'acheminement des marchandises à destination des régions
pétrolières et gazières de Hassi-Messaoud, Hassi-R'mel, Hassi-Berkine et Haoudh-El-Hamra.
Localisé dans une zone agricole, son hinterland est formé de 12 Wilayas situées au Nord et
Sud représentant le quart de l'ensemble des circonscriptions administratives de l'Algérie et le
tiers de la superficie du pays. Le port est situé dans le golfe d'Arzew (Site Internet Port
Mostaganem). Le port de Mostaganem est desservi par un réseau ferroviaire et routier menant
aux plus grands centres urbains du nord et du sud de l’Algérie. Ce réseau de transport
relativement complet offre un accès direct aux voies de chemin de fer et ce, à partir de tous les
terminaux.
Le port de Mostaganem est relié par quatre lignes régulières avec les ports de Marseille,
Hambourg (Allemagne), Anvers (Belgique) et Huston-Baltimore (USA). Ces liaisons
permettent de garantir à l’infrastructure mostaganémoise un trafic et une activité quasi-
permanente et fluide.

5.2. Cas de confrontation : le port de Tanger


Tanger Med est notre cas de confrontation. Il s’agit d’un Port marocain en eau profonde
construit entre 2004 et juillet 2007. Le port de Tanger est bordé par une zone franche

79
d'activités industrielles et logistiques dans la Région de Tanger-Tétouan, au Nord du
Maroc.
Le Port est situé sur la seconde voie maritime la plus fréquentée au monde, le détroit de
Gibraltar avec plus de 100 000 bateaux par an.
Le Port Tanger Med c’est 250 ha et des activités autour des axes suivants : conteneurs,
passagers, roulier, véhicules neufs, hydrocarbures, vrac

Figure 19. Une vue du port de Tanger Med

Le Port Tanger Med comprend précisément :


Deux terminaux à conteneurs, d'une capacité totale de 3 millions de conteneurs EVP,
Un port passager et roulier avec 8 postes à quai,
Un terminal à hydrocarbures de 500.000 tonnes de stockage,
Deux terminaux à voitures pour un total de 20 hectares,
Un terminal vraquier de 450 mètres de quai et 7 hectares
Plusieurs connexions ferroviaires pour les marchandises et pour les passagers.
L’une des particularités du port de Tanger est évidemment la conteneurisation. Son activité
principale est le transbordement de conteneurs. Les porte-conteneurs géants débarquent leurs
marchandises sans dévier de leur route et repartent aussitôt, à charge ensuite à de plus petits
navires, ou feeders ships de desservir des ports de second ordre.
Finalement, on peut rappeler que le Port Tanger Med est connecté à plus de 120 ports dans 50
pays au monde auquel il est relié par des lignes régulières hebdomadaires.

80
II. COMPARAISON SELON L’AXE TECHNIQUE ET LOGISTIQUE

Procédons à présent à la comparaison proprement dite en passant en revue chacun des axes
(technique, organisationnel et économique). Pour chacun de ces axes nous procéderons en
deux étapes : (1) D’abord une matrice de confrontation des deux ports suivant des critères
sélectionnés pour chacun des axes (2) Ensuite un focus sur des points jugés essentiels et qui
méritent d’être approfondis.
1. Matrice de comparaison par critères (axe technique)

CRITERE CARATERISTIQU
ES PRINCIPALES
NATURE DU PONDERATION
ET
CRITERE Très Limité Bon Très EXPLICATIONS
limité bon
MOSTAGANE
Port ancien et vétuste
1- Actualités des M X
Installations de taille
ports relativement modeste en
terme de zone
d’exploitation et de
modernité des
’installations techniques :
69.000m² de surfaces non
couvertes, de terre-pleins
dont 65.000m² à usage
commerciale. Pour les
Surfaces couvertes: 16
Docks-magasin d'une
superficie de 8.950m²
dont 5.950m² à usage
commercial. Un parc de
véhicule de 60 000 m²
avec capacité d’accueil 4
500 unités. Des voies de
dessertes existantes de
4.805m de route.

Port moderne
X
Construit entre 2004
TANGER et 2007, le port de
Tanger Med
bénéficie d’un
équipement moderne
et pointu.
81
Port techniquement
limité
X
Silo de céréales mis
en service en 1986.
Doté de 12 cellules
et de 2 portiques à
2- Qualité et grain d'un débit de
300T/H. Capacité de
fiabilité des MOSTAGANE
stockage de 30.000T.
installations M Station de bitume:
Construite en 1929.
techniques
Capacité de stockage
4.700T, pour le
traitement
30.000T/An. Silo à
sucre: Réceptionné
en 1971. Capacité de
stockage de 17.000T,
pour le transit de
150.000T/An. Cale
de halage: 02 bers
de 100 T et 01 ber
central de 250 T
Pont bascule: 02
ponts bascules d'une
capacité de charge
utile de 50T.

Port techniquement
X
avancé
Port particulièrement
bien équipé avec
TANGER
installations fiables,
notamment deux
terminaux à
conteneurs, d’une
capacité totale de 3
millions de
conteneurs EVP, un
port passager et
roulier avec 8 postes
à quai, un
terminal à
hydrocarbures de
500.000 tonnes de
stockage etc.

Capacité et activité
MOSTAGANE X
restreintes

82
3- Capacité et M Flotte constituée de
bateaux anciens et de
volume
taille moyenne.
d’activité Activité largement
concentrée sur
terminaux à voitures.
Port passager et
routier.. Pas encore
de conteneurisation
X
Capacité et activité
TANGER
importantes
Volume important
d’activité grâce à la
conteneurisation. 2,5
millions de
conteneurs en 2013
et une prévision de
2,7 millions de
conteneurs pour
2014
MOSTAGANE Port peu flexible et
lent
M X
Problème de lenteur
4- Gestion des des enlèvements des
véhicules par les
délais ( temps
concessionnaires. En
d’attente) outre, les bateaux de
transport de
véhicules passent au
minimum 21 jours en
rade dans les ports
de Jijel et
Mostaganem. Les
affréteurs paient des
surestaries
(indemnités de retard
dans le chargement
ou déchargement de
marchandises, ndlr)
d’au moins 25 000
dollars par jour aux
armateurs. C’est une
perte sèche pour
l’économie nationale
TANGER Port flexible et
relativement rapide
X
Conçue selon les
standards de qualité
internationaux, Zone

83
Franche Logistique
offre des avantages
fiscaux et douaniers
attractifs, notamment
en termes de temps
de passage réduits.
Politique du juste-à-
temps
Inexistante
Pas encore de
MOSTAGANE X
véritable politique de
5- Performance M conteneurisation
Port prioritairement
de la
destiné à recevoir
conteneurisatio des marchandises
hors conteneurs
n
Avancée
En 2013, le Port de
Tanger Med a réalisé
TANGER X 10.000 escales de
navires dont les
géants porte-
conteneurs de CMA
CGM et Maersk.
MOSTAGANE Engagée
Suite à un conseil
6- Capacité à se M X
interministériel, tenu
specialisé en 2009, décision a
été prise de
transférer le trafic
des véhicules du port
d’Alger vers ceux de
Mostaganem, Djen
Djen et Ghazaouet,
afin de
décongestionner le
port d’Alger. Avec
l’évolution
constante du trafic de
véhicules et de
marchandises, le port
de Mostaganem a
orienté sa
’’spécialisation’ sur
le trafic des
véhicules
TANGER Engagée
Périmètre d’activités
X
finalement assez
large. Cela ne cause

84
pas de problèmes
jusqu’ici. Son
activité principale est
le transbordement de
conteneurs.
Performance
insatisfaisante
MOSTAGANE X
Flotte angérienne est
Performance M constituée de
bateaux anciens et de
globale volet
taille moyenne
technique Performance
largement
TANGER X
satisfaisante
Port techniquement
avancé, avec une
activité riche et
aboutie. Volume
d’activités et
résultats techniques
impressionnants.
Dans l’activité de
transbordement,
Tanger Med 1
occupe la deuxième
place africaine et la
septième en
Méditerranée

2. Focus sur quelques points


2.1. La conteneurisation
La conteneurisation est un point de différence important entre les deux ports. Elle fait
clairement la différence en termes de capacités et de volume d’activité. Mostaganem est
largement pénalisée par son absence de conteneurisation pour le moment.
En revanche, l’expertise de Tanger Med en termes de conteneurisation lui procure un
avantage certain, démultipliant ses capacités et son volume d’activité. Ainsi, Tanger Med
comporte 2 terminaux à conteneurs, d'une capacité totale de 3 millions de conteneurs EVP.
Après seulement six ans d’activité, le Port Tanger Med 1 se hisse déjà au 55e rang mondial
avec la plus forte progression , au lieu de la 72e place l’année précédente, selon le classement
mondial à fin 2013, établi par Containers Management. Il enregistre la plus forte
augmentation de 40 % en volume traité suivi du port de Mundra en Inde avec 28%.

85
Bien plus, l'extension "Tanger-Med II" (Située sur le flanc ouest de Tanger Med I ),
renforcera les capacités des premières installations avec deux terminaux (terminal 3 et
terminal 4) à conteneurs en eaux profondes qui offriront une capacité supplémentaire de 5
millions de conteneurs EVP (conteneurs standard de 2,5 m de hauteur et 6 m de longueur); ce
qui portera à 8,5 millions, la capacité totale des deux ports réunis.
Le terminal 3 est d'une capacité de 3 millions de conteneurs EVP et comprend 1 600 mètres
de quais et 78 ha de terre-pleins.
Figure 20 activité conteneur du port TANGER Med

Source : 3ème forum des entrepreneurs marocain, Marakech, 2014

Figure 21 : activité conteneur du port de Mostaganem


7 000

6 000

5 000

4 000

3 000

2 000

1 000

0
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

Source : Entreprise Portuaire de Mostaganem ( EPM), 2014

86
III. Comparaison selon l’axe organisationnel et managerial
1. Matrice de comparaison par critères (axe organisationnel et managérial)

Figure 21. Matrice de comparaison suivant l’axe technique

CRITERE NATURE PONDERATION CARATERISTIQUES


DU PRINCIPALES ET
CRITERE EXPLICATIONS
Très Li Bo Tr
limité mi n ès
té bo
n

1- Tarifs et MOSTAGA X Couts importants


maitrise des NEM Tarifs assez élevés,
coûts couts logistiques
importants

Couts limités
TANGER X Gestion intelligente des coûts :
Les porte-conteneurs géants
débarquent leurs
marchandises sans dévier de
leur route et repartent
aussitôt, à charge ensuite à de
plus petits navires, ou feeders
ships de desservir des ports de
second ordre
Offre relativement limitée
X Offre réduite à la gestion des
2- Offres de MOSTAGA passages des marchandises et
services NEM des véhicules principalement.
logistiques Quelques services
complémentaires gravitant
autour de ces activités
principales

Offre étendue
TANGER X Offre élargie au
transbordement de
conteneurs, en plus des
activités classiques du port
Omniprésence du pouvoir
public
3- Collaboratio Monopole étatique historique
ns entre MOSTAGA X dans le secteur portuaire.
acteurs NEM Incapacité de l’Etat à relever

87
nationaux les défis du port, notamment
en termes d’investissements.
Privatisation récente et encore
inefficace
Synergie intéressante
TANGER entre acteurs publics et
privés
X La construction,
l’aménagement et la
commercialisation ont été
confiés à une société
appartenant à l'État marocain
dénommée Agence Spéciale
Tanger Méditerranée (TMSA).
Cependant, le terminal 1 à
conteneurs a été concédé au
groupe APM Terminals pour
une durée de 30 ans, tandis
que le terminal 2 est revenu au
consortium Eurogate-Contship
/ MSC / CMA-CGM pour la
même durée.
Coopération existante
MOSTAGA X Le Port de Mostaganem est
4- Coopération NEM ouvert à la collaboration
avec acteurs méditerranéenne. Mais peu de
internationa synergies durables. Présence
ux en définitive de peu d’acteurs
internationaux, en dépit des
activités, autour du port, de
quelques constructeurs
automobiles.
TANGER Coopération avancée
X Le Port Tanger Med est
connecté à plus de 120 ports
dans 50 pays au monde auquel
il est relié par des lignes
régulières hebdomadaires.
Port opéré par les leaders
mondiaux des métiers
portuaires. L’implantation
croissante d’industriels et de
logisticiens de renom confirme
l’avantage compétitif. Par
exemple, la Zone Franche
Logistique du Port Tanger Med
est opérée par Medhub et

88
dédiée aux activités logistiques
à valeur ajoutée de groupage,
de distribution et
d’approvisionnement à
l’échelle des flux
intercontinentaux. Avec une
superficie de 250 ha, c’est une
plateforme logistique et
multimodale par excellence
pour les opérateurs désirant
optimiser leurs activités vers le
monde. Un des premiers
groupes installés sur 300
hectares est le groupe Franco-
Japonais Renault-Nissan qui
possède une usine de
production d'une capacité de
200 000 voitures/an,
extensible à 400 000
voitures/an.

Rôle étatique assumé


MOSTAGA X Une Agence étatique sous
5- Capacité de NEM forme de société anonyme
l’état à jouer dirige le port de Mostaganem.
son rôle ( Ses prérogatives sont assez
investisseme clairement définies même si la
nt, pertinence de son
encadrement management et de ses
, régulation)
décisions est régulièrement
contestée par les acteurs du
secteur
Rôle étatique assumé et
réussi
TANGER X La construction,
l’aménagement et la
commercialisation ont été
confiés à une société
appartenant à l'État marocain
dénommée Agence Spéciale
Tanger Méditerranée (TMSA
De nombreux acteurs privés
6- Capacité à se MOSTAGA X investissement le port de
specialisé NEM Mostaganem et proposent de
plus en plus de services, mais
cela s’effectue dans un
environnement assez

89
désordonné dans lequel
chaque prestataire joue sa
partition

TANGER Secteur privé dynamique


X La Zone Franche Logistique du
Port Tanger Med, opérée par
Medhub, complète cette offre
coordonnée et
particulièrement riche, avec
l’ambition d’asseoir un pôle
logistique leader dans la
région. Opérationnelle depuis
fin 2008, cette Zone, intégrée
au Port Tanger Med est dédiée
aux activités logistiques à
valeur ajoutée de groupage, de
distribution et
d’approvisionnement à
l’échelle des flux
intercontinentaux
Multimodalité et
intégration limitée
7- Mulitimodali L’Algérie paie annuellement
té et MOSTAGA X des centaines de millions de
intégration NEM dollars de surestaries aux
armateurs étrangers en raison
de la congestion du port de
Mostaganem et du retard dans
le dédouanement des
marchandises. On attend plus
de 21 jours pour décharger au
port de Mostaganem, alors
que les ports d’Oran et de
Ghazaouet sont parfois vides.
Même situation à l’Est du pays
Multimodalité et
TANGER X intégration réussies
Afin de mieux assurer la
complémentarité avec le Port
de Casablanca l'ancien premier
port
marocain, une Liaison
Ferroviaire à grande vitesse
LGV Tanger-Casablanca est en
cours de construction entre les
villes de Tanger et Casablanca

90
en plus de la ligne de chemin
de fer classique existante. La
LGV Tanger-Casablanca
raccourcira le trajet de moitié
et la même liaison est
pressentie optimale pour le
Fret rapide nocturne entre les
deux villes portuaires
Performance Management opérationnel
globale volet MOSTAGA X La gestion autour du port de
organisationnel NEM Mostaganem permet à celui-ci
et managériale de fonctionner et d’affronter
les besoins opérationnels
quotidiens. Mais sans plus. Un
pilotage stratégique véritable
tarde à se manifester
Management efficace
TANGER X La gestion autour du port de
Tanger Med se caractérise par
sa clarté, sa rationalité et sa
vision stratégique, ce qui
permet de générer une
importante plus value du point
de vue de l’efficacité des
processus

2. Focus sur quelques points clés


Plusieurs réalités empêchent le port de Mostaganem d’être au niveau d’un port comme celui
de Tanger Med. Pour aller dans le détail, le port de Mostaganem souffre évidemment des
écueils propres au contexte difficile des ports algériens. Concentrons nous sur deux aspects :
le manque d’investissement financier et la difficile coopération internationale.

2.1. Le manque d’investissement financier


En plus des évidentes considérations stratégiques (privilégier un port plutôt qu’un autre), le
développement du trafic conteneurisé sur les terminaux concédés à Mostaganem semble buter
sur des difficultés financières et de répartition des rôles dans la responsabilité des
investissements financiers à réaliser,, comme c’est le cas pour la plupart des ports algériens.
Très souvent, des groupes privés souhaitent équiper des terminaux de plusieurs portiques par

91
exemple mais cette démarche ne peut pas avoir lieu sans la consolidation des quais et le
prolongement de la jetée : des oeuvres à la charge de l’Etat algérien. Le port de Tanger Med,
avec son investissement financier colossal pris en charge par l’Etat et ses partenaires n’a pas
eu les mêmes difficultés
2.2. La difficile collaboration internationale
Des écueils au sein du système de gestion du port de Mostaganem limitent son ouverture
internationale : poids de la fiscalité, lourdeurs bureaucratiques pour l’enregistrement des actes
de propriétés, et retards dans la modernisation de son système bancaire. Dans ce contexte, les
investisseurs étrangers ne se sont pas précipités pour négocier des concessions dans les ports
algériens. A contrario, avec le projet Tanger Med, le Maroc accueille d'ores et déjà des
opérateurs portuaires globaux comme APM Terminals (Danemark), PSA (Singapour) et
Eurogate (Allemagne) en plus de l'opérateur local MarsaMaroc, signe d'une intégration plus
poussée dans le système logistique mondial (Invest in Med, 2009).

IV. COMPARAISON SELON L’AXE ECONOMIQUE ET DE COMPETITIVITE

1. Comparaison par critères


Cet ultime axe permet de confronter les performances financières des deux ports. Il
questionne aussi leurs compétitivités respectives
Figure 22. Matrice de comparaison suivant l’axe économique et de compétitivité

CRITERE NATURE DU PONDERATION CARATERISTIQUES


PRINCIPALES ET
CRITERE
EXPLICATIONS
Très Limité Bo Tr
limité n ès
bo
n
Limitée bien
Politique de MOSTAGANE X qu’encourageant
e
maitrise M Très peu de prise
globale des de position de la
Direction du port
coûts sur la capacité de
ce dernier à

92
maitriser les
coûts pour les
acteurs comme
pour les
opérations.
Même si des
efforts récents
ont été consentis
pour la réduction
des temps de
passage portuaire
Avancée et coordonnée
Tanger Med est devenu
TANGER X
une plateforme logistique
aux portes de l'Europe en
jouant sur le
fonctionnement de la
production en juste-à-
temps, ce qui entraine une
économie globale des coûts
Limitée et
Trafic en progression mais
Volume du X
encore limité (4ème port
trafic et MOSTAGANE d’Algérie en 2012).
performance M Performance financière
modeste.
financière Ancienne et dépassé
En 2013, le Port de Tanger
TANGER X
Med a réalisé 10.000
escales de navires dont les
géants porte-conteneurs
de CMA CGM et Maersk.
Après seulement six ans
d’activité, le Port Tanger
Med 1 se hisse déjà au 55e
rang mondial avec la plus
forte progression, au lieu
de la 72e place l’année
précédente, selon le
classement mondial à fin
2013, établi par Containers
Management. Il enregistre
la plus forte augmentation
de 40 % en volume traité
suivi du port de Mundra en
Inde avec 28%. Dans
l’activité transbordement,

93
Tanger Med 1 occupe la
deuxième place africaine et
la septième en
Méditerranée. Avec ce
classement, le port Tanger
Med 1 renforce la position
du Maroc comme hub dans
le commerce maritime.
Important
En 2012, 99.000 tonnes de
ciment, 72.300 tonnes de
MOSTAGANE X bois et 120.800 tonnes de
M semences de pommes de
terre. Ce tonnage
représente 80% des
importations nationales

Important
Poids important dans
TANGER X
l’économie marocaine. Port
construit dans une visée
stratégique pour servir à
terme de hub national et
régional.
Compétitivité limitée
Comme pour le reste des
MOSTAGANE X
ports algériens, forte
Compétitivité M vulnérabilité face à la
concurrence régionale et
mondiale.
TANGER Compétitivité
supportée
X
Le Port de Tanger Med vise
8 millions de conteneurs
manutentionnés par an à
l'horizon 2016, en
construisant une extension
portuaire d'une capacité de
5,2 millions de conteneurs
qui viendra s'ajouter aux 3
millions actuels.

Insuffisante, bien
Performa MOSTAGANE X
qu’encourageante
nce M

94
globale
Avancé
volet
résultats TANGER X
financiers
et
compétitiv
ité

V. BILAN ET TEST DES HYPOTHESES


1. Bilan de la comparaison
Restituons, dans la matrice ci-dessous, l’essence des enseignements à l’issue de cette
confrontation entre les ports de Mostaganem et de Tanger Med

Figure 23. Matrice récapitulative de la comparaison Mostaganem-Tanger

VARIABLES MOSTAGANEM TANGER COMMENTAIRE


COMPARATIF
Concentration Installations Tanger Med
assez réussie
techniques de surpasse
ATOUTS dans le créneau haut niveau, Mostaganem
PRINCIPAUX des véhicules,implication au niveau des
rôle historique
étatique atouts
reconnu, importante techniques,
Poids important (investissements financiers et
financiers et managériaux.
dans l’économie régulation), Il ajoute aux
nationale ouverture atouts
internationale technico-
intelligente, économique
transbordement, des atouts de
conteneurisation, management
multimodalité.

Investissement L’Algérie ne doit


financier pas
Quasi
colossal. être exclue, avec
inexistence de
FAIBLESSES Exigence de des ports
l’activité de
PRINCIPALES résultats. comme
transbordement
Possible Mostaganem, de
et de
la fonction de
conteneurisation, dépendance vis-à-
transbordement
ce qui limite le
95
port à une vis d’acteurs et de qui doit
position de permettre de
seconde zone financements capter des
internationaux. trafics
est-ouest et de
créer de la
valeur ajoutée.
Or cette activité
est déjà
concurrencée
par les Tanger
Med
opérationnel
depuis 2007.
Intéressante Très Tanger Med a
PERFORMANCE dans le domaine intéressante du une longueur
DES PORTS du fait de la d’avance en
déchargement richesse des terme de
de véhicule mais services, des performance
globalement options et des technique,
limité acteurs organisationnelle
et financière

Des Situé sur le flanc Perspectives du


PERSPECTIVES perspectives ouest de Tanger port de Tanger
DE PROGRESSION intéressantes se Med I, sont plus
dessinent à l'extension perceptibles et
l’horizon "Tanger-Med II" plus concrètes
notamment avec renforcera les notamment avec
la future usine capacités des Tanger Med II.
de montage de premières Cela est le fait
véhicules installations avec d’une vision
’’Renault’’ de deux terminaux stratégique aux
Oued (terminal 3 et objectifs plus
Tlelat (Oran). Le terminal 4) à clairs et aussi
port de conteneurs en plus globaux
Mostaganem est eaux profondes (pas seulement
appelé à servir qui offriront une le port de
de lieu de transit capacité Tanger Med,
des parties et supplémentaire mais tout son
composants de 5 millions de environnement
d’automobiles conteneurs EVP
devant être (conteneurs
montés dans standard de 2,5
cette usine. m de hauteur et
6 m de
longueur); ce qui
portera à 8,5

96
millions, la
capacité totale
des deux ports
réunis.
Le terminal 3 est
d'une capacité
de 3 millions de
conteneurs EVP
et comprend 1
600 mètres de
quais et 78 ha
de terre-pleins.
En 2016, Tanger
Med pourrait
traiter 3 millions
de conteneurs,
et deviendra
ainsi le plus
grand port
d'Afrique au
niveau du
transbordement.

2. Interprétation et test des hypothèses


Cette étape de test des hypothèses s’appuie sur nos deux niveaux d’analyse :
L’examen empirique du contexte portuaire algérien, ses atouts, ses failles, ses
perspectives (Partie II)
La comparaison entre les ports de Mostaganem et de Tanger (Partie III).

2.1. Hypothèse H1 : axe sur les points de difficultés


Testons tout d’abord l’hypothèse H1 émise dans le cadre de l’axe d’analyse 1 de ce Mémoire,
c'est-à-dire la dimension des difficultés écueils de l’exploitation portuaire en Algérie) : qui
répondait à la question de savoir pourquoi les « Pourquoi les ports algériens sont-ils aussi peu
performants ?». Cette hypothèse a été énoncée comme suit :
H1 : les ports algériens souffrent d’un investissement technique insuffisant, une
mauvaise organisation managériale et d’une incapacité à affronter la concurrence
internationale, du fait notamment d’une gestion des coûts défaillante.
Avec l’analyse du contexte algérien, puis la comparaison des ports de Mostaganem et de
Tanger, nous avons en effet constaté que

97
Du point de vue de l’investissement technique et des capacités techniques, on a
observé le caractère vétustes, dépassé des installations dans la plupart des ports
algériens. A l’occasion de la comparaison entre les ports de Mostaganem et de Tanger,
l’on a pu mesurer d’emblée le décalage entre l’investissement financier dans les deux
contextes. Rien de comparable en effet entre l’implication financière de l’Etat et ses
partenaires dans les deux cas. A cela il existe des raisons stratégiques certes (chaque
Etat décide de la nature et la portée des investissements à partager entre ses différents
ports, suivant son plan directeur). Mais l’on ne peut s’empêcher de constater tout
simplement un défaut d’implication politique (et budgétaire) forte dans l’exploitation
des ports algérien. Comme on l’a évoqué c’est aux autorités algériennes de décider
véritablement si elles souhaitent réellement tenter de s’imposer comme leader dans des
activités comme e transbordement ou la conteneurisation. Auquel cas des sacrifices
financiers et structurels sont inévitablement à consentir

Du point de vue managérial et organisationnel, l’on a observé des efforts de


clarification des rôles avec la privatisation, mais le contexte reste difficile en Algérie.
Le poids de la bureaucratie, de l’inexploitation des TIC et de plusieurs autres
difficultés affecte encore trop lourdement les ports algériens. On l’a vu avec le port de
Mostaganem. Comparativement au port de Tanger son organisation structurelle reste
défaillante et impose une modernisation du management.
Enfin du point de vue de la compétitivité internationale, on a clairement constaté
que l’Algérie était à la traine comparativement à ses voisins du Maghreb. Il se trouve
que l’organisation déplorée ci-haut, l’engorgement et l’absence de multimodalité entre
autres failles empêchent les ports algériens de proposer des tarifs compétitifs et d’être
eux-mêmes durablement rentables. En comparant les ports de Tanger et de
Mostaganem, nous avons constaté le décalage entre les services, et les délais par
exemple entre les deux ports, « le port de tanger med est un catalyseur de l’econimie
marocaineet un fédérateur des different maillons de la chaine logistique qui permet de
converger vers performance accrue » 24
Au regard de ces points d’analyse, on peut donc confirmer notre
hypothèse H1, qui se trouve vérifiée.

24
3ème forum des entrepreneurs maghrébins : le port de Tanger Med au service de la logistique [en ligne],
http://fr.slideshare.net/CGEM_Maroc/le-port-de-tanger-med-forum-ume-2014 consulté le 15 mai 2014

98
2.2. Hypothèse H2 : axe sur les opportunités et solutions
Testons à présent l’hypothèse H2 émise dans le cadre de l’axe d’analyse 2 de ce Mémoire,
c'est-à-dire la dimension des opportunités (les nouvelles possibilités de développement
portuaire en Algérie) qui répond à la question de savoir « Comment rendre les ports algériens
compétitifs?». Cette hypothèse a été énoncée comme suit :
H2 : une meilleure exploitation des atouts géographiques, structurels et socio
économiques de l’Algérie est le point de départ pour une meilleure performance des
ports du pays.
La question qui se pose ici est celle de la gestion optimale des opportunités sociales,
économiques et logistiques qui s’offrent aux ports algériens en vue de parvenir à une gestion
efficiente et une compétitivité internationale accrue. Des dimensions ressortent à ce niveau, au
terme de nos investigations. Elles se situent du point de vue des activités des ports algérien et
du point de vue de l’organisation de ces ports ;
Tout d’abord du point de vue des activités, on a clairement constaté que
l’Algérie doit tout faire pour ne pas de trouvée exclue de la fonction de
transbordement qui doit permettre de capter des trafics est-ouest et de créer de la
valeur ajoutée. Or cette activité est déjà concurrencée par les Tanger Med et
bientôt Med II le premier étant déjà opérationnel depuis 2007 et parfaitement
établi. La conteneurisation n’est plus une option, elle est une nécessité
industrielle, logistique et financière et ce, indépendamment du port. Au regard de
la situation géographique de l’Algérie, le pays ne doit ni ne peut faire l’économie
des capacités d’activité d’aucun de ses ports. Il convient de tous les remettre à
niveau, leur conférer un minimum de capacité afin de relever globalement le
niveau de l’exploitation portuaire algérienne, Un port comme celui de
Mostaganem ne doit donc pas, de notre point de vue, être exclu des activités de
transbordement ni de conteneurisation qui
permettent de générer aujourd’hui l’essentiel des recettes dans le domaine
portuaire à l’échelle africaine et mondiale, l’Algérie pouvant entre autres atouts
jouer le rôle de passerelle entre les ports européens de la rive sud de la
méditerranée et ceux de l’Afrique noire.

Ensuite du point de vue de l’organisation et de la gestion des perspectives : le


manque d’expérience et les lourdeurs de gestion portuaire étatiste qui perdurent
99
doivent absolument être résolus. L’Algérie doit absolument l'Algérie doit
absolument développer sa culture de la gestion portuaire privée.

Enfin du point de vue du réseau, de la stratégie et de l’intégration, l’Algérie a


pris un retard considérable par rapport à ses voisins, retard qu’il faut rapidement
combler. En effet, Les atouts des hubs concurrents des ports algériens résident
essentiellement dans l'imbrication entre port et zone franche. Ce scenario encore
rare dans le contexte algérien semble mettre en difficulté, à terme, les projets de
développement portuaire algériens. On a vu avec le port de Tanger que l’existence
d’une zone franche industrielle, conférait au port marocain un avantage technique,
logistique, stratégique et financier sur tous ses concurrents. La comparaison avec
Mostaganem se révélant finalement bien incongrue. Les ports algérien doivent
fonctionner plus en réseau, privilégier les synergies, les spécialisations
complémentaires, les chaines logistiques et les interrelations. C’est évidemment en
priorité le rôle de l’Etat algérien de construire de tels hubs à l’échelle nationale.
Plus tard il sera peut être opportun d’envisager ces projets à l’échelle du Maghreb
Au regard de ces points d’analyse, on peut donc confirmer notre
hypothèse H2, qui se trouve ainsi vérifiée.

100
CONCLUSION GENERALE

En définitive, à travers ce travail de Magistère, nous avons souhaité analyser en profondeur


les différentes vulnérabilités du système portuaire algérien afin de comprendre où en est
l’exploitation portuaire aujourd’hui en Algérie et comment améliorer la performance maritime
dans le pays.
La problématique découlant de cet objectif s’est énoncée comme suit :
« Quelle est la nature des problèmes qui limitent la compétitivité des ports
algériens et comment y remédier ? »
Une telle problématique a permis l’exploration du sujet suivant deux axes d’analyse :
Le premier axe a touché à la dimension des difficultés (les écueils de l’exploitation portuaire
en Algérie) : « Q1 : Pourquoi les ports algériens sont-ils aussi peu performants ?». Il s’est
agit pour nous d’évaluer le niveau et la qualité de la de l’exploitation des ports algériens.
Le second axe a été lié à la dimension des opportunités (les nouvelles possibilités de
développement portuaire en Algérie) : « Q2 : Comment rendre les ports algériens
compétitifs?». La question posée ici a été celle de la gestion optimale des opportunités
sociales, économiques et logistiques qui s’offrent aux ports algériens en vue de parvenir à une
gestion efficiente et une compétitivité internationale accrue. Avec une attention particulière à
la conteneurisation.
Afin d’étayer notre travail nous avons exploité deux approches méthodologiques :
(1) pour le volet théorique, sur une recherche documentaire pour la récolte des données
théoriques et contextuelles, ensuite (2) pour le volet empirique, sur une enquête qui a dégagé
les grands axes et chiffres de la performance portuaire algérienne. Enfin, (3) pour le volet
interprétatif, un exercice de comparaison qui a permis d’effectuer des confrontations
analytiques utiles entre un port algérien et un port marocain.
Nos investigations ont permis de dégager les résultats suivants :
En termes d’analyse des difficultés (axe 1)
D’un point de vue technique : les ports algériens souffrent d’une vétusté générale
des équipements technique et d’une grave insuffisance des investissements
techniques. Le poids des finances injectés pour le développement technique du
secteur reste largement insuffisant, qu’il provienne de l’Etat ou des partenaires
privés. Ainsi, nos investigations ont rappelé que les investissements en cours dans
les ports algériens (agrandissement et amélioration des infrastructures) s'élèvent à

101
environ 507 millions d'euros, soit moins de 7% du total des investissements de ce
type à l'échelle du Maghreb (Invest in Med, 2009)

D’un point de vue organisationnel et managérial : les ports algériens sont mal
organisés et mal managés, en termes de structure, en termes d’interrelation entre
les acteurs locaux, en terme de pertinence et de solidités des coopérations avec les
partenaires internationaux (on note une faible présence des opérateurs logistiques
internationaux en Algérie comme DHL, CEVA et Maersk), mais aussi en termes
de capacité opérationnelle et logistique (notamment pour ce qui concerne la
gestion des délais et la gestion des coûts. On a pu voir par exemple que l'Algérie
conserve le coût moyen d'importation/exportation d'un conteneur le plus élevé
parmi de nombreux pays émergents (environ 1300 euros pour le transport
maritime d'un conteneur entre Marseille et Alger).
Du point de vue de la performance économique et de la compétitivité : les ports
algériens, en dépit d’un poids considérable dans l’économie du pays produisent
encore des résultats que l’on peut qualifier de limités en termes de performance
économique et financière. En effet, l’Algérie assure la quasi-totalité de ses
échanges extérieurs par voie maritime, soit près de 95%. Mais ces ports sont loin
d’être performants. Déficients pour la plupart, ces ports font supporter au pays
environ 170 millions de dollars par an de surestaries du fait de leur mauvaise
gestion.

En outre, l’indice de "performance logistique" des ports algérien est le plus faible du
Maghreb. Le rendement portuaire algérien est ainsi le plus faible en Méditerranée, notamment
en raison du sous-équipement des terminaux, de la mauvaise gestion du stockage, et des
faibles tirants d'eau (Setti et al., 2011).

A propos des points de vulnérabilités identifiés, la comparaison ente le port de Mostaganem et


celui de Tanger a finalement permis de constater le gouffre entre les deux ports du point de
vue de l’efficacité et de l’efficience économique. La compétitivité des ports algériens reste par
ailleurs faible et ils subissent de plein fouet la concurrence des autres ports du Maghreb
(notamment du Maroc) et évidemment l’écrasante concurrence européenne et internationale.

En termes d’analyse des opportunités (axe 2), les ports algériens présentent cependant
quelques atouts qui doivent et peuvent encore être capitalisés. Ces opportunités tiennent à la

102
position géographique, à la vague de privatisation lancée il ya quelques années et à la
coopération inter-algérienne et la coopération régionale. En parlant par exemple des
opportunités offertes par la nouvelle évolution du cadre juridique concernant les concessions
et les partenariats public-privé plusieurs avantages transparaissent pour le système portuaire
algérien : attirer les investisseurs privés dans les ports, améliorer la rentabilité des ports et
ainsi réduire le coût du transport, soulager l’Etat algérien d’une partie des charges financières,
faciliter la mise en place des chaines logistiques avec un transport de bout en bout, doter le
secteur portuaire d'un cadre législatif et réglementaire adapté aux évolutions actuelles, enfin
ouvrir de nouvelles lignes maritimes.

Finalement, quelques constats s’imposent, sous forme de proposition de solutions et de


perspectives :

Sans réforme portuaire profonde (réforme juridique, mais aussi réforme logistique et
managériale), l'Algérie court le risque de voir se creuser un écart irrémédiable entre
son système portuaire et le système de transport méditerranéen et mondial. La
situation pourrait être dramatique au regard de sa forte dépendance envers le transport
maritime pour son commerce et son économie. Les ports algériens ont besoin
d’investissements, de finances et de grands projets. La privatisation est donc
bienvenue, son déploiement actuel pourrait s’avérer efficace, à condition que les
préalables de claire répartition des responsabilités et d’encadrement soit bien définis.

Certes l’Etat algérien semble avoir pris la mesure, depuis 2006, de l’échec du modèle de
gestion portuaire étatiste. La réforme portuaire qu’il a engagée a donné lieu à un partenariat
public-privé permettant la concession de terminaux portuaires à des partenaires étrangers.
Toutefois, la perspective pour des concessionnaires venant du monde entier de développer des
ports à envergure nationale ne sera réalisée de façon optimale et aboutie que si les ports
deviennent des plates-formes portuaires à conteneurs et non uniquement des ports secondaires
polarisés par les autres hubs méditerranéens. C’est le cas notamment avec des ports comme
celui de port de Mostaganem dont nous avons pu observer les limites opérationnelles et
stratégiques.

103
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 Méditerranée : Revue Géographique des Pays Méditerranéens, nº 116, p. 85-93

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Figure 1 Perspectives de l’économie Page 15
mondiale, 2013-2016
Figure 2 Le marché des conteneurs de 1966 18
à 2011
Figure 3 Tableau des 30 plus grands ports 19
de porte-conteneurs du monde :
2010 à 2013
Figure 4 Hiérarchie urbaine et densité de 23
population au Maghreb en 2005
Figure 5 Évolution du trafic portuaire par 24
pays, 1981-2009
Figure 6 Hiérarchie portuaire et évolution 26
du trafic, 1996-2008
Figure 7 Flux majeurs de conteneurs en 2006 27
Figure 7 Domaine portuaire : 31
interrelations entre secteurs
public et privé
Figure 8 Chaine de transport et professions 32
dans le domaine portuaire
Figure 09 Chiffres du commerce extérieur 49
de l’Algérie
Figure 10 Évolution du trafic portuaire par 59
pays, 1981-2009
Figure 11 Hiérarchie portuaire et évolution 60
du trafic au Maghreb, 1996-2008
Figure 12 Trafic des ports algériens en 2008 62
(tonnes métriques)
Figure 13 Evolution du trafic conteneurisé 62
dans les ports algériens, 2001-
2010 (EVP)
Figure 14 Matrice récapitulative de 68
l’évaluation de la performance du
système portuaire algérien
Figure 15 Caractéristiques comparées des 79
sociétés algérienne et marocaine
Figure 16 Caractéristiques comparées des 80
économies algérienne et
marocaine
Figure 17 Une vue du port de Mostaganem 84
Figure 18 Une vue du port de Tanger Med 85
Figure 19 Matrice de comparaison suivant 86
l’axe technique
Figure 20 Activités conteneur du port 91
TANGER Med 2007-2013

Figure 21 Activité conteneur du port de 92


Mostaganem 2003-2012

Figure 22 Matrice de comparaison suivant 92


l’axe organisationnel et
managérial
Figure 23 Matrice de comparaison suivant 98
l’axe économique et de
compétitivité
Figure 24 Matrice récapitulative de la 101
comparaison Mostaganem-Tanger

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