Regards Messiaen Web
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1 9 0 8 ● 1 9 9 2
D U R A N D . S A L A B E R T . E S C H I G
TABLE DES MATIÈRES
TABLE OF CONTENTS
BIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .4
BIOGRAPHY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
BIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .6
BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE /
SELECTED BIBLIOGRAPHY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .44
DISCOGRAPHIE SÉLECTIVE EN CD /
CD SELECTED DISCOGRAPHY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .48
1
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Regards sur Olivier Messiaen
Seventeeen accompanying notes
on works of Olivier Messiaen
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BIOGRAPHIE N é en 1908 à Avignon et issu d’une famille acquise à la littérature
(son père, Pierre Messiaen, était traducteur et sa mère, Cécile
Sauvage, poétesse), Olivier Messiaen fut marqué par l’idée de
langage. D’abord, il conçut tôt sa propre langue (Technique de
mon langage musical a été achevé en 1943) et la fonda sur cette
modalité que, enfant, il avait découverte chez Debussy puis appro-
fondie au Conservatoire de Paris avec Paul Dukas (composition),
Maurice Emmanuel (histoire de la musique) et Marcel Dupré
(orgue). Puis, il créa sa propre langue poétique, dont procédèrent
toutes ses œuvres vocales. Enfin, identifier le langage musical d’autrui
nourrit l’enseignement qu’il délivra, tant dans ses leçons privées
(données, entre 1943 et 1947, à un cénacle d’élèves, dont Pierre
Boulez et Yvonne Loriod, sa future épouse) que, dès 1947, dans sa
classe, mondialement reconnue, au Conservatoire de Paris.
Frank Langlois
translation Jeremy Drake
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BIOGRAPHIE O livier Messiaen wurde 1908 in Avignon in eine mit der
Literatur wohlvertraute Familie geboren. Sein Vater Pierre
Messiaen war Übersetzer und seine Mutter Cécile Sauvage
Dichterin. Früh von der Vorstellung der Sprachlichkeit geprägt, entwarf
er zunächst seine eigene musikalische Sprache (dargelegt in der
1943 vollendeten Schrift Technique de mon langage musical) und
gründete sie auf jene Formenwelt, die er als Kind bei Debussy
entdeckte und deren Kenntnis er später am Pariser Conservatoire
mit Paul Dukas (Komposition), Maurice Emmanuel
(Musikgeschichte) und Marcel Dupré (Orgel) vertiefte. In der Folge
schuf er seine eigene poetische Sprache, aus der all seine
Vokalwerke hervorgingen. Schließlich wurde der Unterricht, den er
sowohl in Form von Privatstunden (zwischen 1943 und 1947 mit
Schülern wie Pierre Boulez und Yvonne Loriod, seiner späteren
Ehefrau), als auch in seiner weltweit berühmten Klasse am Pariser
Conservatoire selbst erteilte, vom Aufspüren fremder musikalischer
Sprachen genährt.
Frank Langlois
Üb. Andreas Mayer
Prélude (1964)
pour piano
durée : 3 min.
première audition : 8.12.2000, Paris,
Conservatoire national supérieur de musique de Paris,
Yvonne Loriod (pno)
D. & F. 15355
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E n 1929, Messiaen n’avait pas encore achevé ses études au Conservatoire de Paris ;
cependant, voici sa première œuvre importante. Certes, ces Huit Préludes respirent
l’influence de ses divers maîtres (Dukas, Emmanuel, Gallon et Dupré), et attestent éga-
lement du poids, plus fort encore, de Debussy. Et pourtant, Messiaen, alors âgé de 20
ans, y est déjà tout entier. S’il n’y applique pas encore « les recherches rythmiques qui
devaient transformer ma vie » et les chants d’oiseaux qui le singulariseraient bientôt, sa
nature musicale y éclate en puissance. Pour écrire sa musique, il n’est déjà plus guidé
par une pensée architecturale ou formelle, il compose, comme un peintre, avec des
sons-couleurs. Dans ses Huit Préludes, les sons-couleurs conditionnent tout le reste : « Au
moyen de modes harmoniques, transposables seulement un certain nombre de fois, et
tirant de ce fait leurs coloris particuliers, je suis arrivé à opposer des disques de couleurs,
à entrelacer des arcs-en-ciel, à trouver en musique des « couleurs complémentaires ».
Les titres des Préludes cachent des études de couleurs ». Et, sans que Messiaen ne s’en
rendît compte, ces études de couleurs que sont les Huit Préludes prolongèrent le piano
debussyste et ouvrirent la voie au piano moderne : le piano–espace était né, dont les
résonances (presque) indéfiniment prolongées dévoilent un espace sonore jusqu’alors
inconcevable, et créent un ciel poétique et méditatif qui avait disparu depuis longtemps
de la musique occidentale. L’art poétique de Messiaen est déjà constitué, en une ahu-
rissante alliance entre la spiritualité du christianisme et le merveilleux du surréalisme. En
1964, un neuvième Prélude montra tout ce que ses huit devanciers avaient d’abouti et
de prémonitoire.
M essiaen’s first major work dates from 1929, when he was still a student at the Paris
Conservatoire. It is true that these Huit Préludes are imbued with the influence of
his various teachers (Dukas, Emmanuel, Gallon and Dupré), and attest even more stron-
gly to the weight of Debussy’s influence. And yet, at the age of 20, Messiaen had truly
arrived. Although he had not yet begun to apply the “experiments in rhythm which were
to transform my life,” and the bird songs which would soon become his signature, the
force of his musical personality is astonishing. Rather than being guided by architectural
or formal considerations, he was already composing like a painter, with tone-colours. In
his Huit Préludes these tone-colours pervade the entire piece: “By means of harmonic
modes that can only be transposed a certain number of times, lending each mode its own
particular color, I began to juxtapose discs of color, to interlace rainbows, and to find
‘complementary colours’ in music. The titles of the Préludes conceal studies in colour.”
Without fully realizing it, Messiaen had moved beyond Debussy’s piano writing and
opened the way to the modern piano. These studies in color mark the birth of the piano
as a spatial concept, its (almost) infinitely prolonged resonances revealing a soundspace
that, until then, had been inconceivable, creating a poetic and meditative firmament that
had not been seen in Western music for a very long time. Messiaen’s poetic art was
already formed, in an astounding alliance between Christian spirituality and the marvels
of surrealism. In 1964 a ninth Prélude showed all the accomplishment and visionary
qualities of its eight predecessors.
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MUSIQUE POUR INSTRUMENT SEUL
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A u XXème siècle, Olivier Messiaen révolutionna la musique d’orgue, alors qu’il devint
organiste par accident, et non par vocation. Au Conservatoire, il avait étudié le
piano, non pour devenir un grand soliste mais pour en acquérir une bonne maîtrise. Et
c’est parce que Jean Gallon, son professeur d’harmonie, avait remarqué ses dons
d’improvisateur qu’il le dirigea vers la classe d’orgue où, à cette époque, avec Marcel
Dupré, l’improvisation était essentielle. Jean Gallon avait vu juste : Messiaen reçut vite un
premier prix et, en 1930, fut nommé titulaire à l’Église de la Sainte–Trinité à Paris.
Jusqu’à ses derniers jours, en minutieux « fonctionnaire liturgique », il ne se déroba pas
à mission et assura ses charges cultuelles dominicales.
Sans doute parce qu’il n’était pas organiste–né, Messiaen envisagea l’orgue hors de
toute tradition, et l’attira dans une double voie. Une voie spirituelle, presque théologique :
dans sa musique d’orgue, qui n’illustre ni l’Ordinaire ni le Propre des offices catholiques,
Messiaen « exprime les Vérités de la Foi, qui sont terribles : ce sont des contes de fées,
tour à tour mystérieux, déchirants, glorieux, quelquefois terrifiants, reposant toujours sur
une Réalité lumineuse et immuable. » Et une voie purement acoustique : dévoilant, grâce
aux sons–couleurs, des sonorités jusque-là inouïes, il obtint ainsi « un matériau nouveau,
tout à fait étrange, qui annonçait déjà les sonorités de la musique électronique. »
En ses deux volets, l’un inquiétant et l’autre féerique, Diptyque : Essai sur la vie terres-
tre et l’éternité bienheureuse, écrit en 1929, est la première pierre d’un prodigieux cor-
pus pour l’orgue.
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MUSIQUE POUR INSTRUMENT SEUL
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À en croire ses condisciples au Conservatoire de Paris, Messiaen était gentiment raillé
pour son sérieux, pour ses permanentes rêveries et contemplations. Et pourtant, il
avait le sens de l’humour, mais un humour doux, tout emprunt d’un non sense poétique.
Avec Fantaisie burlesque, il répondit à ses moqueurs. Œuvre modeste mais non mineure,
cette page est inhabituellement symétrique, en ses trois volets : le premier et le dernier
sont le terrain d’un bienveillant affrontement entre tonalité et modalité, tandis que, dans
le volet central, le compositeur ne parvient pas à étouffer son langage le plus personnel,
déjà révélé par Huit Préludes.
En 1935, immédiatement après la mort de Paul Dukas, Revue Musicale, principal
périodique musical français de ce temps, décida de réaliser un numéro, sorte de « tombeau »
collectif baroque, et sollicita le concours de ses anciens amis et élèves. À l’été 1935, pour
saluer « mon maître Dukas » et « mon professeur principal », Messiaen écrivit Pièce pour
le tombeau de Paul Dukas. Il se souvint que, à dix-huit ans, alors qu’il étudiait dans sa
classe, il découvrit les prémisses de sa théorie des sons–couleurs en écoutant la scène des
pierreries, au premier acte d’Ariane et Barbe-Bleue, « le chef d’œuvre » composé par son
maître. Justement, Pièce pour le tombeau de Paul Dukas évolue dans un « éclairage orangé,
blanc et or ». Et le compositeur d’ajouter : « C’est statique, solennel et dépouillé comme
un énorme bloc de pierre ». Presque quatre-vingts ans après, cette œuvre minérale
bouleverse toujours autant.
A ccording to his fellow students at the Paris Conservatoire, Messiaen was the target
of good-natured teasing for his serious nature, his permanent reveries and contem-
plations. Messiaen did have a sense of humor, but it was a gentle humor, imbued with
poetic nonsense. His Fantaisie burlesque was his reply to his mockers. Modest but by
no means minor, this work is unusually symmetrical, with three panels: the first and last
set the stage for a benevolent confrontation between tonality and modality, whereas in
the second panel, the composer is unable to stifle his own, more personal language,
already revealed in his Huit Préludes.
Immediately after Paul Dukas’s death in 1935, Revue Musicale, the leading French
musical periodical of the time, decided to issue a modern-day “tombeau” (collection of
works in memoriam), and sought the participation of his former friends and pupils. In the
summer of 1935, as a farewell homage to “my master Dukas” and “my principal teacher”,
Messiaen wrote Pièce pour le tombeau de Paul Dukas. It was in a class taught by
Dukas that the eighteen-year-old Messiaen first hit upon his theory of tone-colors, while
listening to the scene of the precious stones in Act I of Ariane et Barbe-Bleue, his master’s
“masterpiece”. As described by Messiaen, Pièce pour le tombeau de Paul Dukas evolves
in “orange, white and golden lighting.” The composer adds: “It is static, solemn, and
stripped bare like an enormous block of stone”. Almost eighty years later this granitic
work is still just as moving.
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MUSIQUE POUR INSTRUMENT SEUL
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V ingt regards sur l’Enfant–Jésus est une des plus grandes épopées de toute la litté-
rature pour le piano. Par sa durée et par son élan spirituel, ce recueil amplifie
Quatuor pour la fin du Temps et Visions de l’Amen : en son architecture de polyptyque
en vingt panneaux, il en double la durée ; quant à son élan spirituel, il s’agit, encore, de
toucher l’être humain non dans les églises mais dans la « mondaine » salle de concerts.
Messiaen continue d’être obsédé par la vue (Visions, regards), ou plutôt par la fusion de
la vue et de l’ouïe en une entité sensorielle, en écho à L’œil écoute de ce Claudel tant
estimé. Et pourquoi fondre ces deux sens, si ce n’est pour mieux contempler ? Ainsi
Messiaen présenta-t-il ses Vingt regards sur l’Enfant–Jésus : « Contemplation de
Enfant–Dieu de la crèche et regards qui se posent sur Lui : depuis le regard indicible de
Dieu le Père jusqu’au regard multiple de l’Église d’amour, en passant par le regard inouï
de l’esprit de Joie, par le regard si tendre de la Vierge, puis des Anges, des Mages et des
créatures immatérielles ou symboliques ».
Écrit entre mars (les ultimes mois de l’Occupation nazie) et septembre 1944 (Paris
fraîchement libéré), Vingt regards sur l’Enfant–Jésus porte une exaltation irrépressible.
En son écriture, ce recueil reprend les thèmes cycliques (ici, au nombre de quatre). Et en
sa technique pianistique, il innove encore : accords en grappes ; traits obtenus par des
arpèges en mouvements contraires ; doigtés où le pouce sert de pivot au basculement de
la main ; usage simultané des registres extrêmes ; et synchronie d’une main accélérée et
d’une main ralentie.
Avec Vingt regards sur l’Enfant–Jésus, Messiaen a continué, décidément, d’être le
visionnaire de l’Homme.
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Q uatre Études de rythme n’est pas un recueil de virtuosité pianistique, mais … com-
positionnelle, tant Messiaen y a placé parmi ses plus ambitieuses recherches. Ces
quatre pages sont le laboratoire, fertile, de bien de ses œuvres ultérieures : un laboratoire
de rythmes, inspirés de traités de métrique et de rythmique remontant à l’Inde antique ;
et un laboratoire de ce sérialisme que ses bouillonnants élèves (à commencer par Pierre
Boulez) avaient découvert depuis peu et qu’il s’appropria en en transgressant les règles
par lesquelles rythmes, durées, intensités et registres sont organisés. Et, comme dans ce
Wozzeck qu’il admirait tant, Messiaen conçut une écriture sur–organisée qu’il dissimula
sous une ardente expressivité et sous de nouveaux sons–couleurs.
Dans Île de feu 1 et Île de feu 2, une atmosphère sombre et échevelée recouvre un
étonnant travail sur la variation et sur la permutation. Dans Neumes rythmiques, de violents
contrastes de registres et de dynamiques font oublier la quête d’un noyau sonore qui
contient toute l’œuvre en son germe, et que l’acte compositionnel consiste à le maté-
rialiser (Messiaen anticipait là, de vingt-cinq ans, la théorie spectrale qu’allait fonder la
dernière génération de ses élèves, avec Gérard Grisey et Tristan Murail). Enfin, dans
Modes de valeurs et d’intensité (y règne une puissante minéralité sonore, identique à
celle de Pièce pour le tombeau de Paul Dukas), Messiaen propose une myriade d’espaces
acoustiques, tous issus du foisonnement rythmique et dynamique, prolonge l’espace du
Livre mallarméen que Debussy avait entrevu et lance un pont vers la musique concrète
qui avait alors fraîchement éclos.
Quatre études : quatre diamants bruts et purs.
S uch is the ambitious research that went into Quatre Études de rythme (“Four studies
in rhythm”) that the result is less a collection of pianistic virtuosity than one of
compositional virtuosity. These four pieces serve as the fertile laboratory for many of
his later works: a laboratory of rhythms, inspired by metrical and rhythmic treatises
dating back to ancient India, and a laboratory of serialism, which Messiaen’s effervescent
pupils (starting with Pierre Boulez) had recently discovered, and which he appropriated –
while breaking all of its rules with regard to the organization of rhythm, duration, inten-
sity and register. As in Wozzeck, which he so admired, Messiaen disguised highly
organized writing beneath an ardent expressivity and novel tone-colours.
In Île de feu 1 and Île de feu 2, a somber, chaotic atmosphere conceals an astonishing
study in variation and permutation. In Neumes rythmiques, violent contrasts of register
and dynamics cause one to forget the sonic core that contains the seeds of the whole
work. Here, the compositional act consists of materializing that sonic core; in this,
Messiaen anticipates, by some twenty-five years, the spectral theory founded by his last
generation of students, among them Gérard Grisey and Tristan Murail. Finally, in Modes
de valeurs et d’intensité (which is pervaded by a powerful minerality of sound, as in
Pièce pour le tombeau de Paul Dukas), Messiaen offers a myriad of acoustic spaces,
all emanating from the work’s rhythmic and dynamic abundance; he extends the space
of the Livre Mallarméan that Debussy had glimpsed, and creates a bridge towards
musique concrète, which had just recently begun to bud.
Four études: four diamonds, uncut and pure.
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MUSIQUE DE CHAMBRE
Fantaisie (1933)
pour violon et piano
durée : 15 min.
première audition : 16.08.2006, La Roque d’Anthéron /
Festival international de piano de La Roque d’Anthéron,
Parc du Château de Florans,
Isabelle Faust (vl),
Momo Kodama (pno)
D. & F. 15726
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D istantes d’environ cinquante années, ces deux pièces montrent combien, entre sa
première maturité et ses ultimes années, Messiaen a maintenu constante son écriture
mélodique. Au regard de cet important élément de la composition qu’est la mélodie, il a
toujours rejeté le modèle proposé par le bel canto. À l’exact opposé, il prolongea l’em-
preinte mélodique ineffaçable que le chant grégorien avait tôt laissée en lui : une écriture
monophonique, un but transcendantal, un chant exempt de toute expression subjective,
une pratique collective, et un flux sonore infiniment continué et physiquement irrespirable
(rares y sont les césures pour que le chanteur puisse respirer). Bref, il s’agit d’un idéal de
plénitude, par lequel l’espace sonore doit être saturé, à l’imitation d’un vitrail gothique
dont la plus grande surface doit être comblée, de surcroît par les plus chatoyantes
couleurs. Mais Messiaen n’a-t-il pas, tout au long de sa vie, espéré que sa musique aurait
les vertus du vitrail ?
Dans Fantaisie, écrit en 1933, l’écriture mélodique est confiée au violon, que Messiaen
emploie pour sa seule aptitude, grâce à l’archet, à produire une ligne que n’interrompt
nulle césure ni respiration. Mais, dans sa pure et nue essentialité, elle aurait tout aussi
bien être confiée à la main droite d’un orgue ou … à l’onde Martenot.
Et c’est justement à cet instrument que, dans Feuillets inédits, à la fin des années
1980, cette même écriture est destinée : guidée par le compositeur, Yvonne Loriod rassem-
bla, en une seule œuvre, des fragments musicaux – pour la plupart des chants d’oiseaux
– notés et agencés par Messiaen. Parce qu’elle dévoile des fragments, cette œuvre se
révèle passionnante : elle permet, sans effraction, d’entrer dans l’atelier du Maître. Rare
privilège !
S eparated by more than fifty years, these two pieces show how faithful Messiaen
remained to his melodic style, from his earliest maturity to his final years. With regard
to this important element of composition, he always rejected bel canto as a model. On
the contrary, from the Gregorian chant that left an early, indelible imprint on his melodic
thinking, he developed a monophonic style: a transcendental goal, a chant free of any
subjective expression, a collective practice, an unending flow of sound and breath that is
physically unattainable (caesuras enabling the singer to breathe are very rare). In short,
it is an ideal of richness, a way of saturating the soundspace – as in a Gothic stained-glass
window, in which the greatest possible surface must be filled by the most shimmering
colors. Indeed, thoughout his life, Messiaen hoped that his music would have the qualities
of stained glass.
In Fantaisie, written in 1933, the melodic writing is entrusted to the violin, which
Messiaen uses solely for its ability (thanks to its bow) to produce a line uninterrupted by
any caesura or breath. But in its pure, naked essentiality, it could just as well have been
entrusted to a right hand playing the organ…or to the Ondes Martenot.
And it is to that very instrument that this same melodic style is destined, in the
Feuillets inédits of the late 1980s. Guided by the composer, Yvonne Loriod assembled
a single work from musical fragments – mostly bird songs – that had been noted down
and organized by Messiaen.
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MUSIQUE DE CHAMBRE
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C ette œuvre, parmi les plus célèbres de Messiaen, est frappée par l’Histoire. Elle a été
écrite à un des moment les plus tragiques du XXème siècle : au début de la Seconde
guerre mondiale, dès l’automne de 1940, dans un camp allemand où Messiaen était
prisonnier. Pour trois compagnons de captivité (le violoniste Jean Le Boulaire, le clarinet-
tiste Henri Akoka et le violoncelliste Étienne Pasquier), il écrivit d’abord Intermède, une
page brève et assez légère. Puis il approfondit sa démarche, décida de composer sept autres
mouvements et de les inscrire dans le terreau théologique qui l’avait toujours nourri. En
écho, étonnamment adouci, aux cataclysmes historiques qui engloutissaient alors
l’Humanité, sa pensée se dirigea vers l’ultime temps de la théologie chrétienne : le
Jugement dernier, tel que le décrit L’Apocalypse de Saint-Jean. Il en retint un passage,
qu’il plaça au début de sa partition :
« Je vis un ange plein de force, descendant du ciel, revêtu d’une nuée, ayant un arc-
en-ciel sur la tête. Son visage était comme le soleil, ses pieds comme des colonnes de
feu. Il posa son pied droit sur la mer, son pied gauche sur la terre, et, se tenant debout
sur la mer et sur la terre, il leva la main vers le Ciel et jura par Celui qui vit dans les
siècles des siècles, disant : « Il n’y aura plus de Temps ». »
Entendu pour la première fois en janvier 1941, ce Quatuor pour la fin du Temps n’est
pas une illustration du texte de Jean. Messiaen y déploie une méditation bouleversante
et universelle, en sublimant sa propre privation de liberté et l’ascèse alimentaire ainsi
imposées. De quatre instruments fortuitement rassemblés, il parvient à tirer des couleurs
chatoyantes et des rythmes infiniment libres. Elles n’ont pas fini de nous ravir.
T his work, one of Messiaen’s most famous, is marked by history. It was written at one
of the most tragic moments of the 20th century: at the beginning of World War II, in
the autumn of 1940, in a German camp where Messiaen was a prisoner. For three of his
fellow captives (the violinist Jean Le Boulaire, the clarinetist Henri Akoka and the cellist
Étienne Pasquier), he first wrote the Intermède, a short, rather light movement. Then he
went deeper into the work and decided to compose seven further movements, planted
in the theological soil that had always nourished him. In a surprisingly sweet echo of the
historical cataclysms that were engulfing Mankind at that time, his thoughts turned
towards the final moment of Christian theology: the Last Judgement, as described in the
Revelation of Saint John the Divine. He recalled a passage from it, which he quoted
at the beginning of the score:
“I saw a mighty angel coming down from heaven, clothed with a cloud: and a rain-
bow was upon his head. His face was like the sun, and his feet were like pillars of
fire. He set his right foot upon the sea, and his left foot on the earth, and standing
on the sea and the earth, he lifted up his hand to heaven and swore by Him that lives
for ever and ever, saying: ‘There shall be Time no longer’”.
This Quatuor pour la fin du Temps, which was first heard in January 1941, is not
an illustration of Saint John’s text. Rather, Messiaen transcended the deprivations imposed
by his captivity to create a deeply moving, universal meditation. From this fortuitous
combination of four instruments he managed to draw shimmering colours and infinitely
free rhythms, which continue to delight our ears.
21
MUSIQUE DE CHAMBRE
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D ans l’œuvre de Messiaen, Visions de l’Amen, composé en 1943 pour deux pianos, se
situe au carrefour de sa musique pour l’orgue et pour le piano. De l’orgue, cette
œuvre prolonge la vocation théologique et les incroyables novations sonores que
Messiaen avait produites dans ses grands cycles organistiques d’avant 1939 (La Nativité
du Seigneur et Les Corps glorieux). Et du piano, elle amplifie le piano-espace et les sons-
couleurs, et s’offre comme la poursuite du profond renouvellement que la technique
pianistique moderne doit à Messiaen. Mais c’est aussi à l’orchestre que cette œuvre
magistrale fait songer.
Chaque piano a un rôle différent car Messiaen a valorisé les compétences des deux
pianistes qui créèrent l’œuvre : son élève (et future seconde épouse) Yvonne Loriod et …
lui-même. D’Yvonne Loriod, il magnifia « la virtuosité transcendante et les possibilités
techniques absolument inouïes » ; à lui-même, il destina une écriture de « faux orchestre,
avec une grande palette de timbres et d’attaques ». Comme Quatuor pour la fin du
Temps, Visions de l’Amen est une œuvre au souffle long et se nourrit également du Livre
de l’Apocalypse de Jean. Quant à son langage musical, Messiaen y a ajouté un thème
cyclique (ici, le « Thème de la Création » court tout au long des sept panneaux) qui allait
structurer toutes ses œuvres à venir jusqu’à Turangalîla-Symphonie.
La première audition de Visions de l’Amen fut particulière : elle fut produite dans le
Paris occupé, par Les Concerts de La Pléiade – organisme commanditaire de l’œuvre – et
sous les auspices des Éditions Gallimard, et devant un public dont la ferveur sembla un
défi lancé à l’armée allemande. Cette ferveur a franchi l’Histoire.
W ithin Messiaen’s output, Visions de l’Amen, composed in 1943 for two pianos,
stands at the intersection of his piano music and his organ music. With regard to
the organ, this work continues his theological vocation, along with the incredible inno-
vations in sound that Messiaen had produced in his great organ cycles written before
1939 (La Nativité du Seigneur and Les Corps glorieux). As for the piano, Messiaen
further develops its spatial element and its tone-colors, in the service of his profound
revolution in modern pianistic technique. But this masterly work also calls the orchestra
to mind.
Each piano has a different role, since Messiaen recognized the respective abilities of
the two pianists who premièred the work: his pupil (and future second wife) Yvonne
Loriod…and himself. He glorified Yvonne Loriod’s “transcendant virtuosity and absolutely
incredible technical possibilities”; for himself, he wrote a “pseudo-orchestral part, with a
rich palette of timbres and attacks”. Like Quatuor pour la fin du Temps, Visions de
l’Amen is a work with a long breath-span; it also takes its sustenance from the book of
the Revelation of Saint John the Divine. As for its musical language, Messiaen also
added a cyclic theme – in this case the “theme of the Creation,” which runs throughout
its seven panels – as he did in all the works he wrote from this piece until the
Turangalîla-Symphonie.
The first performance of Visions de l’Amen was a remarkable event: it took place in
occupied Paris, produced by Les Concerts de la Pléiade – the organization that had com-
missioned the work – under the auspices of Éditions Gallimard, in front of an audience
whose fervor seemed to challenge the German army.
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MUSIQUE POUR ORCHESTRE
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E crit en 1930, le triptyque Les Offrandes oubliées est la première œuvre orchestrale de
Messiaen jouée en public. Par son sous-titre « méditation symphonique », inhabituel
dans le monde de l’orchestre, il poursuit l’esprit du répertoire de l’orgue. Ses trois panneaux
ont entre eux des relations tendues : leurs univers expressifs sont violemment distincts,
tandis que leur enchaînement, en une seule coulée musicale, est contredit par leurs
couleurs orchestrales contrastées. Et on admire que, dès l’âge de vingt-deux ans,
Messiaen ait déjà trouvé son chant (des mélodies de couleurs, si opposées aux mélodies
de timbres de Schönberg) et son univers affectif (une douleur recueillie que brisent des
éclats de révolte et d’âpreté).
Là encore, l’évidence de la foi irradie cette œuvre, dont voici le socle théologique : « Le
péché est l’oubli de Dieu. La Croix et l’Eucharistie sont les divines Offrandes : « Ceci est
mon Corps, donné pour vous ; ceci est mon Sang, donné pour vous. ». » Le premier volet,
La Croix, évolue dans un caractère « très lent, douloureux, profondément triste », et,
dans une nomenclature modeste, alterne courtes plaintes et longs gémissements. Le
deuxième, Le Péché, est le seul à solliciter tout l’orchestre ; et, par sa rythmique aussi
rigoureuse que sauvage, il salue Le Sacre du Printemps dont Messiaen allait réaliser une
mémorable analyse. Le dernier, L’Eucharistie, pour cordes seules, évolue dans des lenteurs
extatiques « avec une grande piété et un grand amour » ; avec son allure de plain-chant,
il porte à merveille son programme théologique : « Voici la table pure, la source de
charité, le banquet du pauvre, voici la Pitié adorable offrant le pain de la vie et de
l’Amour. Vous nous aimez, doux Jésus, nous l’avions oublié. » Trois volets mais une même
œuvre, née d’un génie tôt révélé.
W ritten in 1930, the triptych Les Offrandes oubliées was the first of Messiaen’s
orchestral works to be performed in public. With its unusual subtitle, “méditation
symphonique”, it pursues the spirit of the organ repertoire. Relations between the work’s
three panels are strained: their expressive worlds are violently distinct; the fact that they
are linked in a single musical flow is contradicted by their sharply contrasted orchestral
colours. And we can admire how Messiaen, at the age of twenty-two, had already found
his melodic voice (melodies with colours, as opposed to Schoenberg’s melodies with
timbres) and his emotional universe (a contemplative pain, broken by outbursts of revolt
and bitterness).
Once again, evidence of Messiaen’s faith shines through in this work. Its theological
basis is as follows: “Sin is the forgetting of God. The Cross and the Eucharist are the
Divine Offerings: ‘This is my Body which is given for you; this is my Blood which is shed
for you.’” The first panel, ‘The Cross’, evolves in a “very slow, painful, profoundly sad”
spirit; modestly scored, it alternates between short laments and long groans. The second
panel, ‘Sin’, is the only one to use the whole orchestra. With its rhythms – as rigorous as
they are wild – it pays homage to Le Sacre du Printemps, a work for which Messiaen
would later offer a memorable analysis. The last panel, ‘The Eucharist’, for strings alone,
evolves in ecstatic slowness “with great piety and great love”; with its resemblance to
plainsong, it perfectly expresses its theological program: “Here is the pure table, the source
of charity, the banquet of the poor, here is worshipful Pity offering the bread of life and
of Love. You love us, sweet Jesus, but we had forgotten it.”
25
MUSIQUE POUR ORCHESTRE
26
L e diptyque Le Tombeau resplendissant a été écrit un an après Les Offrandes oubliées.
C’est une œuvre tout aussi considérable ; et on s’étonne de la mésestime dont
Messiaen l’entoura, au point d’en retenir longtemps l’édition. Dans toute la création
musicale de Messiaen – pudique au regard de sa vie privée –, il n’est pas d’autre
œuvre à porter une empreinte autobiographique si manifeste et si profonde.
Semblable aux « tombeaux » musicaux à l’époque baroque, Le Tombeau resplendissant
est l’hommage rendu par un jeune fils de vingt-trois ans à sa mère, la poétesse Cécile
Sauvage, décédée quatre années auparavant, en 1927.
Dans le texte accompagnant sa partition, Messiaen endosse la doctrine catholique, par
laquelle tout fidèle a sa part dans la faute collective que le Christ – fait homme et mou-
rant sur la croix – racheta. Il y sanctifie Cécile Sauvage au moment même où il fond sa
jeunesse et sa propre Mater dolorosa en une métaphore unique, avant de se rendre
responsable du décès de cette dernière. Animé d’une rare âpreté, il écrit notamment :
« Ma jeunesse est morte : c’est moi qui l’ai tuée. Colère qui s’élance, colère qui
déborde ! […] Désespoir et larmes !
Ma jeunesse vivait d’une musique de fleurs. Un escalier enchanté s’offrait à mes
yeux. L’oiseau bleu des illusions l’éclairait de son plumage. […]
Quel est ce tombeau resplendissant ? C’est le tombeau de ma jeunesse, c’est mon
cœur. […] »
Alternant désespoir féroce (avec ses heurts rythmiques et harmoniques) et sérénité
séraphique (avec ses tenues quasi-grégoriennes), Le Tombeau resplendissant stupéfie par
sa puissance expressive sans limite.
28
E nfant, Messiaen fut fasciné par la passion amoureuse qui lia Tristan à Isolde, tant au
travers du roman médiéval que de l’opéra wagnérien. Affirmant même qu’il s’agissait
« du plus grand mythe de l’amour humain », il le plaça au cœur de trois de ses œuvres :
Harawi, Turangalîla-Symphonie et Cinq Rechants. De cette légende celtique, Messiaen a
seulement retenu « l’idée d’un amour fatal, d’un amour irrésistible, d’un amour qui, en
principe, conduit à la mort et qui, dans une certaine mesure, appelle la mort, car c’est un
amour qui dépasse le corps, qui dépasse même les données de l’esprit et s’agrandit à
l’échelle cosmique ». Cosmique est réellement l’envergure de cette œuvre, qui résulta
d’une commande totalement libre de Sergey Koussevitzky pour le Boston Symphony
Orchestra. Composée en 1946 et 1948 et créée par le jeune Leonard Bernstein, elle s’insère
dans l’élargissement sans fin du genre symphonique, qui débuta avec les ultimes sym-
phonies de Haydn et se poursuivit avec les œuvres de Beethoven, Berlioz, Bruckner,
Mahler et Schönberg.
Qualifiée par Messiaen, d’ordinaire fort modeste, comme « la plus mélodique, la plus
chaleureuse, la plus dynamique et la plus de colorée » de ses œuvres, Turangalîla-
Symphonie est formée de dix panneaux contrastés et recourt à une nomenclature orchestra-
le opulente que ses foisonnantes percussions relient au lointain Orient. Sollicitant deux
instruments principaux – le piano, doté d’amples cadences, et l’onde Martenot –, elle est
parcourue de quatre thèmes cycliques (le leitmotiv wagnérien n’est pas si loin) dénommés
successivement « thème-statue, thème-fleur, thème d’amour et thème d’accords ». Par
son souffle épique sans équivalent, Turangalîla symphonie est le cœur même de l’œuvre
de Messiaen.
A s a child Messiaen was fascinated by the amorous passion that bound Tristan and
Isolde, as much in the medieval romance as in Wagner’s opera. He even declared
that it was “the greatest myth of human love”, and set it at the heart of three of his
works: Harawi, Turangalîla-Symphonie and Cinq Rechants. The only element of this
Celtic legend that Messiaen retained was “the idea of a fatal love, an irresistible love, a
love that inevitably leads to death and which, to a certain extent, summons death, as it
is a love that surpasses the body, one that surpasses even the particulars of the spirit and
grows on a cosmic scale.” ‘Cosmic’ truly describes the scope of this work, which was the
result of a commission from Serge Koussevitzky, who gave the composer free rein to
write for the Boston Symphony Orchestra. Composed between 1946 and 1948 and
premiered by the young Leonard Bernstein, it takes its place among works that have
endlessly expanded the symphonic genre, starting with Haydn’s final symphonies and
growing through the works of Beethoven, Berlioz, Bruckner, Mahler and Schoenberg.
Messiaen, who was usually very modest in his utterances, described the Turangalïla-
Symphonie as “the most melodic, the warmest, the most dynamic and the most
colourful” of his works. Consisting of ten contrasting panels, it calls for an opulent
orchestration that, through its abundant percussion, creates a link to the Far East. The
work uses two principal solo instruments – the piano, with a generous number of cadenzas,
and the Ondes Martenot. Four cyclical themes run through the work (echoing of
Wagner’s use of leitmotif), successively titled “statue theme, flower theme, love theme
and chord theme”. Matchlessly epic in its inspiration, Turangalïla-Symphonie is the
very heart of Messiaen’s oeuvre.
29
MUSIQUE POUR ORCHESTRE
30
A vec Le Réveil des Oiseaux, Messiaen ouvrit à sa création une nouvelle voie, dévolue
aux oiseaux. À l’égard de la Nature que, en croyant et en théologien, il considéra
toujours comme procédant de Dieu, le compositeur demeura humble : « La nature nous
surpasse infiniment et je lui ai toujours demandé des leçons ; par goût, j’ai aimé les
oiseaux, j’ai donc spécialement interrogé les chants des oiseaux ; j’ai fait de l’ornithologie.
Les oiseaux ont tout inventé. » Et Messiaen d’ajouter avec malice : « y compris l’impro-
visation collective » ! Car c’est l’impression de liberté qui étonne dès la première écoute
du Réveil des Oiseaux, comme si cette liberté avait été nécessaire au moment où le
compositeur conduisait, notamment avec Quatre Études de rythme, ses recherches les
plus poussées.
Pour son entrée dans le monde des oiseaux, Messiaen se fit leur simple messager,
affirmant que, dans Le Réveil des oiseaux, « il n’y a vraiment que des chants d’oiseaux,
sans aucun rythme ni contrepoint ajoutés, et les oiseaux qui chantent se trouvent
réellement réunis par la nature ; c’est une œuvre complètement véridique. Il s’agit d’un
réveil d’oiseaux au début d’une matinée de printemps ; le cycle va de minuit à midi :
chants de la nuit, réveil à quatre heures du matin, grand tutti d’oiseaux coupé par le lever
du soleil, chants de la matinée, grand silence de midi ». En réalité, l’œuvre est plus
complexe : la forme de ce quasi-concerto pour piano s’organise autour d’un grand tutti
central, tandis que, en amont comme en aval, alternent des cadences pour le piano et
des conversations entre le piano et de petits ensembles de chambre aux nomenclatures
et à la disposition spatiale à chaque fois dissemblables.
Messiaen chanta avec les oiseaux. Mieux encore, il parla leur céleste langage.
L e Réveil des oiseaux opened a new path in Messiaen’s creative life – one devoted to
birds. As a believer and a theologian, the composer remained humble with regard to
Nature, which he always considered to proceed from God: “Nature surpasses us infini-
tely and I have always sought to learn from it. I have always loved birds, so I have made
a point of examining their songs; I became an ornithologist. The birds invented everything.”
Adds Messiaen, mischievously, “including collective improvisation”! Indeed, from the very
first hearing of Le Réveil des oiseaux, there is a surprising impression of freedom – as
if the composer had needed this freedom at the very moment he was carrying out his
most advanced experiments, particularly in Quatre Études de rythme.
In order to enter the world of the birds, Messiaen simply turned himself into their
messenger. He asserts that in Le Réveil des oiseaux, “truly, there are only bird songs,
with no rhythm or counterpoint added, and birds that sing are actually united by Nature
– it is a completely truthful work. It is about the birds’ awakening, early on a Spring
morning. The cycle goes from midnight to noon: night songs, awakening at four o’clock
in the morning, a great tutti of the birds interrupted by the sunrise, morning songs, a
great silence at midday”. In reality the work is more complex than that: formally, this
quasi-concerto for piano is organized around a big central tutti, while here and there,
cadenzas for piano alternate with conversations between the piano and little chamber
ensembles, each with a different instrumentation and spatial layout.
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MUSIQUE VOCALE
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L a mélodie française a accompagné la maturation d’Olivier Messiaen, au point de ne
presque concerner que les seules années 1930. Ce genre semble être même le corps
nourricier de toute sa production, tant, en poète et en vocaliste, Messiaen y prolonge la
voix de sa mère. Poète car, persuadé que Cécile Sauvage, enceinte, avait pressenti la
vocation musicale de son enfant (« Je dois ma carrière à cette attente lyrique »), Messiaen
se résolut à écrire sa propre poésie afin de disposer d’un matériau ductile à ses recherches
rythmiques et harmoniques, et apte à donner corps à ses inimitables sons–couleurs. Et
vocaliste car Messiaen coalesce, dans la seule ligne mélodique (« l’élément le plus noble
de la musique »), un triple chant : le chant maternel (il constitue l’intimité de l’être
humain), le chant spirituel (il projette l’homme, mystique, dans le cosmos) et le chant
humain (il révèle les passions personnelles).
Contemporain des Offrandes oubliées, le recueil Trois mélodies a été écrit sur un
poème de Cécile Sauvage et sur deux poèmes du compositeur. Pourquoi ? prolonge
l’esprit de Préludes pour piano. En sa brièveté et en sa pure modalité organistique, Le
Sourire magnifie la fragilité de la poésie maternelle. La Fiancée perdue émeut par la
passion debussyste qu’elle porte.
Datée de la même année, la cantate La Mort du nombre (1930) offre bien des singularités.
Son inhabituelle nomenclature : soprano, ténor, violon et piano. Son identité allégorique :
comme aux débuts de l’histoire de l’opéra, il s’agit d’un dialogue, non entre des person-
nages, mais entre deux âmes, l’espérance et la crainte. Enfin, sa réalité sonore : s’y
côtoient des échappées de plain-chant, des aigus séraphiques au violon et une construction
par panneaux de polyptyque … ou par facettes de vitraux. Il faut redécouvrir cette œuvre
méconnue.
F rench art song played a part in the maturing of Olivier Messiaen’s style, to the point
where it features almost exclusively in his output during the 1930s. This genre seems
to nourish his whole body of work, such is the extent to which Messiaen, both as poet
and vocal writer, prolongs his mother’s voice in it. Convinced that Cécile Sauvage had
experienced a premonition of her son’s musical calling during her pregnancy – “I owe my
career to this lyrical expectation” – Messiaen resolved to write his own poetry, in order to
have at his disposal textual material adaptable to his rhythmic and harmonic experiments,
and suitable for giving body to his inimitable tone-colours. And in each vocal line – “the
most noble element in music” – a triple song coalesced: the maternal song (which cons-
titutes the intimacy of the human being), spiritual song (which projects man, the mystic,
into the cosmos) and human song (which reveals personal passions).
The Trois mélodies, written in the same year as les Offrandes oubliées, contain set-
tings of one poem by Cécile Sauvage and two by the composer. “Pourquoi?” continues
the spirit of Préludes pour piano. In its brevity and its pure, organistic modality, “Le
Sourire” magnifies the fragility of his mother’s poetry. “La Fiancée perdue” moves us with
its Debussyan passion.
The cantata La Mort du nombre, written in the same year (1930), has several pecu-
liarities. Its scoring is unusual: soprano, tenor, violin and piano. It has an allegorical
character: as in early Baroque opera, it is a dialogue, not between characters but between
two souls, Hope and Fear. Finally, its soundscape combines outbursts of plainsong, a
soaring, seraphic violin line and a formal design of multiple panels... or facets of stained-
glass windows. This neglected work deserves to be rediscovered.
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MUSIQUE VOCALE
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L e cycle de mélodies Poèmes pour Mi porte une vive tension entre la nature de sa
poésie et l’ampleur de sa musique. Avec un recul de quatre années, cette poésie
chante la joie profonde du mariage, dont elle semble être, en quelque sorte, le journal
intime : en 1932, Olivier Messiaen avait épousé Claire Delbos, surnommée « Mi » . Les
neufs mélodies qui, en deux livres, constituent Poèmes pour Mi, peignent l’amour et son
accomplissement ; toutefois, malgré une fin resplendissante, elles frappent par leur
alternance de sereine gratitude adressée à Dieu et de visions d’épouvante presque
prémonitoires (après la naissance d’un fils, cette union allait s’achever par le décès
prématuré de Claire Delbos). L’amour conjugal ici décrit est placé sous les influences
croisées du poète Pierre Reverdy, de diverses lectures saintes et de ces paysages des Alpes
qui allaient être chers au compositeur jusqu’à la fin de sa vie.
Au genre de la mélodie, d’ordinaire concis et économe en moyens, Messiaen apporta
ici une considérable densité, tant rythmique que vocale. Dans Poèmes pour Mi, il propose
toutes les facettes de ses découvertes rythmiques : rythmes non-rétrogradables, mètres
grecs, canons rythmiques ou mètres de l’Inde ancienne. Quant à l’écriture vocale, elle
n’aurait pu atteindre cette ampleur si le compositeur n’avait rencontré le « grand soprano
dramatique », Marcelle Bunlet, « qui avait une voix très malléable et un registre très
étendu, et qui chantait facilement Isolde, Kundry et Brünnhilde. Je lui ai donc destiné mes
cycles de mélodies qui sont très longs, très fatigants pour le souffle, et qui exigent une
très grande étendue vocale. »
En 1937, Messiaen allait orchestrer ces Poèmes pour Mi, devenu un trésor à deux
faces : le noir et blanc du piano et le « chatoiement sonore » de l’orchestre.
I n the song cycle Poèmes pour Mi, there is a lively tension between the nature of the
poetry and the opulence of the music. Written four years after Messiaen’s marriage, in
1932, to Claire Delbos (nicknamed ‘Mi’), the poetry celebrates the profound joy of
marriage, and seems to be an intimate journal of that marriage. The nine songs in two
books that constitute Poèmes pour Mi depict love and its fulfillment; however, in spite
of its resplendent ending, the cycle is striking for the way it alternates serene gratitude,
addressed to God, with almost premonitory visions of terror (after the birth of a son, this
union would be brought to an end by the premature death of Claire Delbos). Messiaen’s
depiction of conjugal love is influenced in turn by the poet Pierre Reverdy, by various
sacred texts, and by the Alpine landscapes that the composer treasured until the end of
his life.
In this work, Messiaen brought considerable rhythmic and vocal complexity to the
genre of the French art song, which is generally known for its economy of means. In
Poèmes pour Mi he uses every facet of his rhythmic discoveries: non-retrogradable
rhythms, Greek meters, rhythmic canons, and ancient Indian meters. As for the vocal
writing, it would not have been so opulent if the composer had not met the “great
dramatic soprano” Marcelle Bunlet, “who had a very versatile voice and a very wide
range, and was at ease singing Isolde, Kundry and Brünnhilde. Thus, it is for her that I
wrote my song cycles that are very long, very tiring for the breath, and require a very
wide vocal range.”
In 1937 Messiaen was to orchestrate ‘Poèmes pour Mi’, making the cycle into a
double-sided treasure: the black and white of the piano, and the “shimmering sonority”
of the orchestra.
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MUSIQUE VOCALE
36
L e cycle de six mélodies Chants de Terre et de Ciel (1938) semble être le jumeau de
Poèmes pour Mi, tant les ressemblances sont frappantes : une identique densité
d’écriture, notamment rythmique ; une destination à la même interprète, le « grand
soprano dramatique » Marcelle Bunlet ; enfin, des poésies, bien entendu toujours écrites
par le compositeur, qui prolongent ses méditations sur le mariage et l’amour entre un
homme et une femme (ne s’agit-il pas d’un des jalons de sa sempiternelle passion pour
le mythe de Tristan et Yseult ?). Ces méditations entrecroisent quatre thématiques bien
tracées : l’amour humain, entre une femme et un homme ; le double amour, celui,
inaltérable, de Dieu envers chaque être humain, et, celui, toujours limité, de l’homme
vers Dieu ; la crainte coupable du tort fait à Dieu par l’homme ; et la mort rédemptrice
par laquelle l’âme se fond en Dieu. Dans Chants de Terre et de Ciel, Messiaen ajouta une
cinquième thématique : l’arrivée de l’enfant.
On le constate, Olivier Messiaen reprit à son compte le chemin dont son aîné et ami,
Darius Milhaud avait déjà montré la voie avec Alissa, écrit en 1913 : non plus la mélodie
française – fragile et destinée aux « salons » – ou la cantate de chambre, mais le mono-
drame selon Schönberg, avec Erwartung (L’Attente) ou Das Buch der hängenden Gärten
(Le Livre des Jardins suspendus). Avec leurs œuvres mélodiques d’une ampleur sans
précédent, ces trois compositeurs conçurent une bouleversante dramaturgie de l’intime,
non en une vulgaire projection théâtrale mais en une quête de l’identité humaine au-delà
de la subjectivité immédiate.
Ainsi ces œuvres traversent-elles l’histoire, loin de tout aspect anecdotique.
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MUSIQUE VOCALE
38
L e cadre historique dans lequel Trois petites liturgies de la Présence Divine fut écrit,
entre novembre 1943 et mars 1944, est essentiel : au regard de l’Histoire, Messiaen
ressentit l’espoir, de plus en plus sûr, de la libération de la France, tandis que, le concernant,
il avait rassemblé sa pensée créatrice dans le traité Technique de mon langage musical.
(N’y a-t-il pas audace, voire présomption, à écrire une telle somme théorique à l’âge de
trente-six ans ?)
Mais Trois petites liturgies de la Présence Divine est également précieux à deux autres
titres. Dans la lignée des oratorios de Haydn, c’est une œuvre sacrée destinée aux profanes
salles de concert : « J’ai impose les vérités de la foi au concert, mais dans un sens liturgique ;
je pensais accomplir un acte liturgique, c’est-à-dire, transporter, au concert, une sorte
d’office, une sorte de louange organisée. ». Puis, de tous ses textes que Messiaen mit en
musique, celui-ci est le seul – certes en forme poétique – à exposer sa doctrine théologique.
Et puisque Dieu est présent « en nous, en Lui-même et en toutes choses », l’œuvre est
en trois parties.
Très loin de la douce réserve propre aux musiques sacrées de son temps, Trois petites
liturgies de la Présence Divine frappe par sa joie irradiante et par sa naïve exaltation mystique.
Dans un bouillonnement de couleurs et de rythmes, on observe une nomenclature en trois
groupes : son socle est un flux mélodique à l’unisson (donc dépourvu de toute polyphonie,
comme le plain-chant) chanté par un chœur de séraphiques voix aiguës ; le deuxième
groupe rassemble les percussions, les claviers et l’onde Martenot ; enfin, le troisième
sollicite les seules cordes « qui sont la base de l’orchestre symphonique ».
Assurément, Trois petites liturgies de la Présence Divine est la plus séduisante de
œuvres de Messiaen.
40
C omposé en 1948, Cinq Rechants est le dernier volet d’une trilogie symbolisant l’amour
de Tristan et Yseult et dont les deux premiers sont Harawi et Turangalîla–Symphonie.
Dans son grand poème en cinq volets, Messiaen fait allusion à quelques grandes gestes
amoureuses (Orphée et Euridice, la légende de Barbe–Bleue). Autre singularité, il y
recourt à une « langue inventée » : « J’ai composé Cinq Rechants sur un poème partiel-
lement écrit en français, mais dont l’essentiel est rédigé dans une langue nouvelle qui
ressemble parfois à du sanskrit, parfois à du quechua (l’ancienne langue péruvienne) : il
s’agit finalement de mots inventés en fonction de leurs qualités phonétiques, de mots
dont les voyelles et les consonnes sont volontairement choisies pour correspondre à
certains rythmes et à certains registres de la voix ». Quant à la musique, Messiaen
précisa : « Cinq Rechants représente un hommage indirect au Printemps de Claude Le
Jeune : en effet, ils sont de forme strophique, avec des couplets qui s’appellent « chants »
et des refrains nommés « rechants », exactement comme le Printemps de Claude Le
Jeune. Dans cette œuvre, j’ai également fait grand usage des rythmes hindous (deçi-talas
de l’Inde antique), et aussi des rythmes non-rétrogradables développés. »
Quant à son bref et nu motet O sacrum convivium, Messiaen y appliqua, par l’écritu-
re chorale, ses graves méditations organistiques ou orchestrales.
Mais jubilantes ou graves, ces deux œuvres chorales sont à situer dans cette réflexion
par laquelle Messiaen fonde toute son œuvre, profane et sacrée (mais a-t-il jamais écrit
une œuvre purement profane ?) : « Il n’y a probablement qu’une seule musique vraiment
religieuse parce qu’elle est détachée de tout effet extérieur : c’est le chant grégorien. »
C omposed in 1948, Cinq Rechants is the last part of a trilogy symbolizing the love of
Tristan and Isolde, of which the first two are Harawi and Turangalîla-Symphonie.
In his great five-part poem, Messiaen alludes to certain great tales of love (Orpheus and
Euridice, the legend of Bluebeard). Another distinctive feature of this work is Messiaen’s
use of an “invented language”: “I composed Cinq Rechants to a poem written partially
in French, but essentially in a new language that sometimes resembles Sanskrit, sometimes
Quechua (the ancient Peruvian language): they are words invented for their phonetic
qualities, with vowels and consonants deliberately chosen to correspond to certain
rhythms and registers of the voice”. As to the music, Messiaen noted: “Cinq Rechants is
an indirect homage to Le Printemps by Claude Le Jeune: indeed it uses strophic form,
with verses called “chants” and refrains called “rechants”, exactly as in Le Printemps. In
this work I have also made considerable use of Hindu rhythms (desi-talas from ancient
India), as well as original non-retrogradable rhythms”.
In his short, plain motet O sacrum convivium, Messiaen applied the style of his grave
organ and orchestral meditations to his choral writing.
But whether jubilant or grave, these two choral works should be seen in the light of
a reflection of Messiaen’s – one on which he based his whole oeuvre, whether sacred or
secular (but then, did he ever write a purely secular work?): “There is probably only one
music that is truly religious, because it is detached from any external effect: Gregorian
chant.”
41
ÉCRITS ANALYTIQUES D’OLIVIER MESSIAEN
ANALYSIS WORKS BY OLIVIER MESSIAEN
42
Turangalîla II (début),
septième partie de Turangalîla-Symphonie
43
BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE
SELECTED BIBLIOGRAPHY
44
Bibiographie sélective
(par ordre chronologique de publication)
Claude Samuel, Entretiens avec Olivier Messiaen (éd. Belfond, Paris, 1967) ;
english version by Felix Aprahamian (éd. Stainer & Bell, London, 1976)
45
Harry Halbreich, Olivier Messiaen
(éd. Fayard / Fondation Sacem, Paris, 1980)
46
Catherine Massip (sous la dir. de), Portrait(s) d’Olivier Messiaen
(éd. Bibliothèque nationale de France, Paris, 1996)
47
DISCOGRAPHIE SÉLECTIVE EN CD
CD SELECTED DISCOGRAPHY
Cinq Rechants
● Chœur de chambre de Stockholm, Eric Ericson (dir) EMI 7698172
● Groupe Vocal de France, Michel Tranchant (dir) Arion ARN 68084
● London Sinfonietta Voices, Terry Edwards (dir) Virgin VC 791472-2
● The Sixteen, Harry Christophers (dir) Collins CLOC 14802
Fantaisie burlesque
● Haakon Autsbö (pno) Naxos 8.554655
● Peter Hill (pno) Unicorn DKP 9144
● Roger Muraro (pno) Accord 461 645-2
Huit Préludes
● Alice Ader (pno) Pianovox PIA 504-2
● Yvonne Loriod (pno) Erato ECD 71589
● Roger Muraro (pno) Accord 461 645-2
Mort du nombre, La
● Ensemble Alice Ader, Alice Ader (dir) Assai 333112
● Françoise Pollet (S), Hervé Lamy (T),
48
Pièce pour le tombeau de Paul Dukas
● Alice Ader (pno) Pianovox PIA 504-2
● Haakon Autsbö (pno) Naxos 8.554655
● Yvonne Loriod (pno) Jade 67411-2
Prélude (1964)
● Haakon Autsbö (pno) Naxos 8.554655
● Yvonne Loriod (pno) Jade 67411-2
● Roger Muraro (pno) Accord 461 645-2
Tombeau resplendissant, Le
● Orchestre de l’Opéra national de Paris,
49
Trois Mélodies
● Michèle Command (S), Marie-Madeleine Petit (pno) EMI 7640932
● Ingrid Kappelle (S), Haakon Autsbö (pno) Brilliant Classics 7448
● Frederica Von Stade (S), Martin Katz (pno) RCA 09026 62711 2
Turangalîla-Symphonie
● Jean-Yves Thibaudet (pno), Takashi Harada (oM),
Visions de l’Amen
● Maarten Bon et Reinbert de Leeuw (pnos) Montaigne MO 782050
● Yvonne Loriod et Olivier Messiaen (pnos) Adès 13233-2
● Alexander Rabinovitch et Marta Argerich (pnos) EMI 7540502
50
FILMOGRAPHIE
FILMOGRAPHY
51
52
Analyse des œuvres pour piano de Maurice Ravel ................42
INDEX Analysis of the Piano Works of Maurice Ravel ........................42
ALPHABÉTIQUE Chants de Terre et de Ciel ..................................................36, 48
ALPHABETICAL Cinq Rechants......................................................................40, 48
Fantaisie ....................................................................................18
Fantaisie burlesque ............................................................12, 48
Feuillets inédits ..........................................................................18
Neumes rythmiques :
voir Quatre Études de rythme ......................................16
55
2000 ex.
56
OLIVIER M E S S I A E N
Cat. 174
ISMN M-044-08039-7