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Revue du Rhumatisme 82S (2015) A23-A26

Conférence d’actualité

Nouvelle approche du traitement de l’hyperuricémie et de la goutte à la lumière


des recommandations
Frédéric Lioté
Service de Rhumatologie et Unité INSERM UMR 1132, Centre Viggo Petersen, Hôpital Lariboisière, 2, rue Ambroise Paré, 75010 Paris, France ; Université Paris-Diderot, Sorbonne Paris-
Cité 75205 Paris Cedex 13, France

L’année 2016 sera une année charnière dans la goutte ou ne le de l’uricémie correspond aussi à la valeur cible à atteindre avec les
sera pas. En effet les recommandations dans la prise en charge de la traitements hypouricémiants (THU). Abaisser l’uricémie en dessous
goutte ont 10 ans pour les premières, celles de l’EUropean League de la valeur-cible permet la dissolution des cristaux dans un délai
Against Rheumatism (EULAR) [1, 2] qui viennent d’être récemment d’autant plus rapide que la baisse de l’uricémie est importante. La
revues et sont en attente de publication ; elles remontent à 2012 seu- vitesse n’a pas d’intérêt et expose lors d’une baisse trop rapide à des
lement pour celles de l’American College of Rheumatology [3,4] avec accès goutteux. Ces accès sont fréquents en début de traitement et ne
entre temps des recommandations nationales comme celles de la Bri- doivent pas être considérés comme un échec du traitement. Ce ne
tish Society for Rheumatology (BSR) en 2007. Manquent celles de notre sont pas non plus des effets indésirables de l’ULT, mais « le prix à
Société : la question mérite d’être posée mais est-ce la bonne payer pour guérir ».
question ? En effet au-delà des sensibilités nationalistes, voire conti-
nentales ou intercontinentales, les différences sont ténues et ne tien- 2. Recommandations européennes 2006 et 2014
nent qu’à la fréquence de la maladie, en hausse dans certains pays
pouvant atteindre 3,5 % (USA, Royaume-Uni, Chine) ou même faibles Les recommandations EULAR [1,2] comportent deux aspects, celui
de l’ordre de 0,9-1 % (Italie, France) et à la pharmacopée disponible du diagnostic et celui de la prise en charge thérapeutique.
dans chaque pays.
Les vraies questions à aborder dans les recommandations sont 2.1 Approches diagnostiques
moins leur contenu que leur implémentation, c’est-à-dire leur diffu- Elles sont simples à résumer. La podagre n’est plus ce qu’elle
sion auprès des professionnels et, pour ceux-ci, leur appropriation et était : en effet des médecins généralistes ont inclus des premiers
leur emploi au quotidien. « Emploi au quotidien » signifie que les accès articulaires aigus dans une étude prospective avec validation
professionnels de santé devront appliquer des connaissances et des du diagnostic de goutte sur la présence du « gold standard » actuel,
modalités pratiques chez leurs patients goutteux. Le développement les microcristaux d’urate de sodium (UMS) dans le liquide articulaire
d’indicateurs de qualité (« quality indicators ») ou objectifs de soins de la 1re MTP (pas si difficile, disent les experts). Le fait est que 30 %
va en faciliter la mémorisation, la mise en pratique et l’amélioration des malades n’avaient pas de goutte mais un autre diagnostic soit à
in fine de la qualité de prise en charge des patients. Le but de cette l’inclusion soit après un suivi de 12 mois…[7]. La clinique est donc
mise au point est de résumer les principales recommandations ou utile mais n’est pas infaillible. Toutefois les nouveaux critères de clas-
leurs mises à jour les plus récentes et d’approcher les modalités sification de la goutte mis au point par un groupe international,
d’implémentation. C’est déjà une méthode d’implémentation de ces mixte EULAR/ACR, viennent d’être mis en avant dans deux articles
recommandations… « face à face », articles similaires au mot prêt dans ARD [8] et dans
Arthritis and Rheumatology [9].
1. Quel(s) est (sont) l’es) objectif(s) thérapeutique(s) ? La part belle est faite à la clinique avec une dissection des élé-
ments sémiologiques d’une crise de goutte typique (Tableau 1) : Le
La goutte est une maladie de surcharge en acide urique qui, peu à ‘critère d’entrée’ dans l’algorithme commence par au moins un accès
peu, s’accumulant dans l’organisme va constituer des microcristaux de douleur, gonflement ou sensibilité d’une articulation périphérique
d’urate. C’est d’abord et avant tout une maladie de surcharge. Les ou d’une bourse séreuse ; Le ‘critère de diagnostic suffisant’ est bien
microcristaux se déposent dans et autour des articulations et struc- sûr la présence de cristaux d’UMS dans une articulation ou une bur-
tures articulaires, ce qui inclut les enthèses, les tendons, ligaments, site symptomatique, voire un tophus ; En l’absence de ce critère suf-
voire aussi tissu osseux et tissus extra-osseux comme la peau. Ces fisant (évidemment), les critères cliniques mais aussi biologiques et
amas de cristaux ou tophus sont un marqueur de sévérité de cette d’imagerie de l’algorithme se déclinent.
maladie à dépôts. Les points originaux de la démarche concernent : le choix de cri-
tères négatifs comme dans le cas d’un liquide articulaire ponctionné
Le niveau d’uricémie associé à ce phénomène de cristallisation est
mais ne contenant pas de cristaux d’UMS (– 2 points) ; Celui de
défini par le seuil de saturation de l’acide urique, variable selon la
décliner les valeurs de l’uricémie selon la plus forte valeur atteinte quel
température, et qui débute à 360 mol/l (60 mg/l) [5,6]. Cette valeur
que soit le moment. C’est dire qu’une uricémie inférieure à 40 mg/l
confère – 4 points au score. À l’inverse une uricémie entre 40 et 60 mg/
Tel 01 49 95 62 91 l n’a pas de conséquence. En revanche la valeur de 60 mg/l déclenche
Fax : 01 49 95 86 31 un score positif (+ 2) ; Les nouvelles modalités d’imagerie prennent
Adresse e-mail : frederic.liote@aphp.fr leur valeur comme le double contour en échographie [10] ou les

1169-8330/$ - see front matter © 2015 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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Tableau 1 Critères de classification de la goutte du Collège Américain de Rhumatologie et de l’EULAR 2015.

Catégories Score
Étape 1. Critère d’entrée Au moins un épisode de gonflement, douleur, sensibilité à la pression
d’une articulation périphérique ou d’une bourse séreuse
Étape 2. Critère suffisant (= classement comme goutte) Cristaux d’urate présents dans une articulation ou une bursite symptomatique
(ou tophus)
Étape 3. Critères 2016 à appliquer en l’absence de cristaux d’urate
3.1. Cliniques
Topographie de l’atteinte articulaire ou bursite au cours d’un épisode aigu (Mono/oligo)-arthrite du médio-pied ou de la cheville SANS atteinte de la MTP du GO 1
Atteinte de la 1re MTP (mono/oligoarthrite) 2
Caractéristiques d’un accès aigu
Rougeur articulaire (décrit par le malade ou le médecin) UNE caractéristique 1
Attouchement ou pression intolérable DEUX caractéristiques 2
Difficulté ou incapacité à marcher ou à mobiliser l’articulation TROIS caractéristiques 3
Évolution chronologique d’un accès UN épisode typique 1
≥ 2 accès ; douleur maximale < 24 h ; résolution en moins de 14 j Plusieurs épisodes typiques récidivants 2
Résolution complète entre chaque épisode
Présence de tophus clinique Présence 4
(Nodule sous cutané blanchâtre sous une peau transparente,
ou avec écoulement, avec hypervascularisation locale, en zone typique)
3.2. Biologiques
Uricémie (méthode de l’uricase) < 40 mg/l (<240 mol/l) –4
Idéalement dosée à un moment où le patient ne reçoit pas de THU, et à > 4 semaines 60-80 mg/l (360-480 mol/l) 2
D’un accès aigu (période intercritique). Si possible, répéter le dosage dans ces conditions 80-100 mg/l (460-600 mol/l) 3
Prise en compte de la plus haute valeur mesurée ≥100 mg/l (≥600 mol/l) 4
Analyse du liquide synovial d’une quelconque articulation ou bursite ABSENCE de cristaux d’urate –2
symptomatique (par un observateur entrainé)
3.3. Imagerie
Présence de dépôts uratiques dans une quelconque articulation ou bursite PRÉSENCE (quelle que soit la technique) 4
symptomatique
Aspect en double contour en échographie
OU aspect de dépôts uratiques en scanner double énergie
Aspect de lésions d’arthropathies uratiques en radiographie conventionnelle PRÉSENCE 4
Radiographies des mains et/ou des pieds mettant en évidence au moins
une érosion
Un score ≥ 8 points valide le diagnostic de goutte
Les points négatifs doivent être soustraits du total
Pour l’uricémie, un dosage entre 40 et 60 mg/l à une valeur de score à 0
Pour l’examen du liquide, si un microscope polarisant est utilisé par un lecteur entraîné, il faut retirer 2 points
En l’absence d’imagerie il faut donner 0 point à cet item
Pour les érosions, on tient compte d’un aspect dit en hallebarde. Les aspects arthrosiques des IPD ou les aspects en aile de mouette ne sont pas pris en compte.
Abréviations : MPT = articulation métatarsophalangienne ; GO = gros orteil ;

dépôts d’acide urique en scanner double énergie. À l’inverse les tophus breux travaux d’épidémiologie clinique aux USA, en Europe et en
échographiques ne trouvent pas leur place. À la fin de l’analyse le Nouvelle Zélande (N-Z).
calcul du score avec ses points positifs et négatifs conduit à définir un
diagnostic probable de goutte lorsque qu’il est supérieur à 8.Un calcu- 1.1.2 Facteurs pharmacologiques
lateur est disponible en ligne sur les sites de l’ACR et de l’EULAR, ainsi 1.1.2.1 Allopurinol
que sur l’adresse : http://goutclassificationcalculator.auckland.ac.nz
La molécule de choix pour abaisser l’uricémie reste en première
La sensibilité (Se) des critères cliniques est de 0,85 et la spécificité
ligne l’allopurinol (ALLO). Il est ancien, connu, de maniement facile
(Sp) de 0,78 ; lorsque les autres paramètres sont pris en compte, la Se
avec ses comprimés sécables dosés à 100, 200 et 300 mg, ce qui
augmente à 0,92 et la Sp à 0,89. Ce nouvel outil de classification de la
permet d’ajuster progressivement la dose à la cible voulue. Il faut
goutte trouvera sa place dans les essais thérapeutiques. Il remplace
rappeler ici la règle-clé bien discutée par le groupe de l’EULAR et par
les critères préliminaires de 1977.
les collègues Néo-Zélandais [13] : posologie initiale d’ALLO de
100 mg, à augmenter progressivement selon l’uricémie dosée après
2.2 Approches thérapeutiques
chaque palier de 2-3 semaines. C’est le secret pour réduire les risques
La difficulté de la prise en charge thérapeutique de la goutte de crises de goutte, et surtout de toxidermie qui surviennent habi-
réside dans les comorbidités associées [11, 12] qui vont rendre plus tuellement lors des posologies initiales anciennes de 300 mg par jour.
difficile le maniement de médicaments simples. Les mesures géné- Cette démarche d’ajustement progressif de la dose d’ALLO est désor-
rales et non pharmacologiques sont présentes dans toutes les recom- mais une démarche obligatoire avec des conséquences médicolégales
mandations et leur impact ne se limitent pas à la goutte mais aussi en cas d’accident immunoallergique. C’est aussi un médicament qui
au diabète et aux complications cardiovasculaires. est réservé encore à ce jour à la goutte et non pas à l’hyperuricémie
asymptomatique sauf cas particuliers.
1.1.1 Facteurs non pharmacologiques En France la posologie d’allopurinol est limitée selon la fonction
Il est intéressant de voir la progression de la démarche de prise rénale estimée par la clairance à la créatinine. Les abaques de la RCP
en charge qui prend toujours en compte les facteurs non pharma- Vidal sont anciens et ont fait appel à la formule de Cockroft-Gault, et
cologiques : connaissance de la maladie et de son traitement ; non pas à celles en vigueur à ce jour, formule MDRD ou formule CKD-
repérage des comorbidités ; réduction pondérale et en apports EPI, qui figurent désormais sur les résultats rendus par les biologistes.
caloriques ; réduction des boissons alcoolisées en 2006. En 2014 Certains pays comme la N-Z ne limitent pas la posologie à la fonction
sont pris en compte l’arrêt des sodas sucrés riches en fructose, rénale malgré les risques non négligeables de toxidermie [14].
converti rapidement en acide urique, de la bière y compris sans L’indication de traitement hypouricémiant s’est aussi élargie car
alcool, riches en purines, et des alcools forts. Cela est issu de nom- une première crise peut justifier un tel traitement : stocks d’urate
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plus facile à réduire, absence d’insuffisance rénale et moindre comor- Les indications d’un IXO en première ligne ne sont pas seulement
bidités. En contrepoint, une durée plus longue d’exposition au médi- les critères cliniques (3 accès goutteux, tophus, arthropathies) mais
cament qui semble contrebalancée par les effets généraux favorables aussi la présence de double contour ou de tophus échographique !
à long terme d’une uricémie normalisée. L’insuffisance rénale est aussi un critère décisionnel logique [14]
car la maladie chronique rend plus difficile le maniement des traite-
1.1.2.2 L’arsenal thérapeutique s’est enrichi pour permettre la réduction ments hypouricémiants et anti-inflammatoires (AINS, colchicine).
progressive et constante de l’acide urique (c’est le secret pour permettre de Une seule crise de goutte chez un patient en CKD 3 est logiquement
déstocker les cristaux d’urate accumulés.), d ‘un nouvel inhibiteur de la
traitée.
xanthine oxydase.
a) C’est le cas du fébuxostat (FBX) en 2010. Son effet hypouricé- 3.2 Recommandations non pharmacologiques
miant est (trop) rapidement efficace avec les formes disponibles en Elles diffèrent de celles des Européens car la bière ne trouve pas
France, 80 et 120 mg non sécables. Nous manque la forme à 40 mg d’interdiction mais une réduction… Les sodas sucrés sont aussi mis à
disponible aux USA qui permet une meilleure escalade de dose, l’index et d’ailleurs leur consommation commence à baisser aux USA.
secret de la bonne tolérance et donc de l’observance. La rapidité n’est
pas utile car la dissolution des cristaux va conduire à des crises de
goutte fréquentes et attendues en début de traitement. En revanche, 4. Traitement de la crise de goutte
plus l’uricémie sera basse, plus rapidement les tophus disparaîtront.
4.1 Colchicine
Toutefois dans notre expérience leur disparition peut prendre un à
deux ans. La colchicine est LE traitement recommandé en France. Il reste
La tolérance cardiovasculaire du FBX n’est pas encore démontrée encore au second plan en Europe ou en tout cas a retrouvé sa place
d’où les précautions d’emploi en cas d’insuffisance coronaire et en 2014 par rapport à 2006 : à l’époque les rhumatologues du Nord
d’insuffisance cardiaque. Des études sont en cours avec les accidents avaient privilégié les AINS et donné un accessit à la colchicine : « à de
cardiovasculaires comme critère principal. petites doses de l’ordre de 1,5 mg/j, elle peut rendre service » pour
caricaturer [2].
Le risque de toxidermie sévère existe comme avec l’allopurinol, et
Les Américains ont mis à profit cette proposition et ont pu, dans
un antécédent de toxidermie à l’allopurinol doit rendre prudent dans
un bel essai au plan méthodologique, montrer qu’effectivement
l’emploi du FBX. Enfin son emploi dans l’insuffisance rénale chro-
1,8 mg donnée en deux prises dans les 24 premières heures de la
nique (IRC) évoluée (stades 4 et 5) fait l’objet de plusieurs séries rap-
crise était aussi efficace et parfaitement toléré (comme le placebo)
portées, dont l’une à ce congrès (Ea H-K et al), avec la bonne surprise
que de fortes doses communes auparavant de 4,8 mg/j le premier
d’une efficacité au rendez-vous et d’une tolérance acceptable.
jour ! [17]. L’histoire ne dit pas quelle dose utiliser à partir du deu-
b) Les recommandations de l’EULAR comme celles de l’ACR men- xième jour. Le schéma 3-2-2-1 a vécu. Depuis la colchicine a obtenu
tionnent déjà la possibilité de recourir à un uricosurique en combi- ses lettres de marque et non de cachet ! [3]
naison à l’IXO de première ligne. Ces combinaisons ne sont pas faites Les risques sont toutefois au mésusage et à l’absence de prise en
pour surprendre les « vieux » rhumatologues qui ont connu le Désa- compte des comorbidités fréquentes chez nos goutteux : insuffisance
tura®, association d’allopurinol et de benzbromarone. Les candidats rénale toujours, âge, médicaments associés, en particulier des asso-
possibles sont le probénécide, la benzbromarone et, à terme, le lési- ciations à haut risque iatrogène (macrolides, pristinamycine, statines
nurad (Zampuric®). Cela aura pour avantage de ne pas dépasser cer- parfois) [18].
tains dosages d’allopurinol chez des malades en IRC 3 par exemple, 4.2 On attend aussi beaucoup des agents inhibant la voie de l’IL-1β,
et surtout d’avoir un traitement véritablement attaché à combattre le cytokine pivot de l’inflammation microcristalline. L’anakinra
défaut pathogénique d’excrétion rénale défaillant d’acide urique. (Kineret®), déjà commercialisé, a trouvé une place [19] qui n’est pas
c) Depuis 2006, les uricases recombinantes sont venues sur le validée par une AMM. Sa demi-vie courte, son faible prix et son
marché [15]. Il ne s’agit pas de la rasburicase IV, commercialisée dans emploi en ville sont à mettre en avant.
les hyperuricémies des traitements cytolytiques en cancérologie ou Le canakinumab (Ilaris®), anticorps monoclonal anti-IL-1β, a
en hématologie. Son emploi a été mis en avant par les équipes fran- obtenu l’AMM Européenne dans la crise de goutte « difficile à traiter »
çaises de Lariboisière et de Nancy, avec un schéma mensuel parfois et est déjà commercialisé dans certains pays d’Europe. Son coût est
interrompu par des réactions à la perfusion. élevé et ses conditions d’emploi et de remboursement ne sont pas
La vraie nouveauté, présente dans les arbres de décision théra- encore connues en France.
peutique, est la pégloticase IV bimensuelle. Son emploi n’est plus Tous deux figurent dans les choix thérapeutiques des Européens
possible en France après une période de prescription en ATU nomi- et des Nord-Américains [3] dans les crises de « goutte difficiles à
native. Mais elle peut représenter une vraie aide dans les formes les traiter » du fait de la sévérité, des comorbidités, des effets indési-
plus sévères au prix d’un risque d’immunogénicité neutralisante rables des médications usuelles (AINS, colchicine, mais aussi corti-
(50 % des patients). coïdes) [2,20]. Il aura aussi un intérêt pour permettre, une fois la crise
traitée et contrôlée pour deux ou trois mois, la mise en route dans de
bonnes conditions d’un hypouricémiant [21].
3. Recommandations américaines [3,4]

Celles-ci ont été très discutées [16] car le texte en est de lecture 5. Education thérapeutique
difficile. Le contenu a pu aussi paraitre complexe, voire très complexe
même pour un(e) gouttologue averti(e) et même discutable [16]. Plus que dans la PR, c’est sans doute le secret d’un succès thé-
rapeutique et d’une « guérison » sous traitement (mais est-ce une
3.1 Stratégies et indications des hypouricémiants guérison ?). Le déstockage des urates s’accompagne après plu-
sieurs années d’une disparition des accès et des tophus. On voit
Les stratégies et les indications ont des différences à connaitre et même de curieuses reconstructions des pertes osseuses parfois
à discuter [4] : impressionnantes.
• Choix de l’ALLO OU du FBX en première ligne de traitement, sans L’observance du traitement est donc essentielle. Elle est médiocre
critère de prix prise en compte ; dans la goutte : moins d’un patient sur deux à un an de traitement. Il
• Switch entre les deux IXO en cas de réponse insuffisante ou de faut du temps pour expliquer et négocier. Cela a été fait dans une
mauvaise tolérance ; étude pilote par Michael Doherty et son équipe à Nottingham, UK :
• Combinaison IXO-uricosurique. l’étude de Rees et al [22] montre qu’après 1 heure d’explication, une
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prescription d’allopurinol et un suivi par une infirmière soit par télé- [9] Neogi T, Jansen TL, Dalbeth N, et al. 2015 Gout Classification Criteria: An Ame-
rican College of Rheumatology/European League Against Rheumatism Collabora-
phone soit en face-face, permet d’abaisser l’uricémie à la cible de
tive Initiative. Arthritis Rheumatol. 2015;67:2557-68.
60 mg/l dans 92 % des cas, et même à moins de 50 mg/l dans 85 % des [10] Ottaviani S, Bardin T, Richette P. Usefulness of ultrasonography for gout. Joint
cas [22]. Ce travail remarquable montre que moins du fait de nou- Bone Spine. 2012;79:441-5.
velles médications que de temps médical ou parémédical les gout- [11] Lioté F, Lancrenon S, Lanz S, et al. GOSPEL: prospective survey of gout in France.
teux peuvent guérir [23]. Part I: design and patient characteristics (n=1003). Joint Bone Spine. 2012;79:
464-70.
L’éducation du malade est donc essentielle sous ses différentes [12] Richette P, Flipo RN, Patrikos DK. Characteristics and management of gout
composantes : deux équipes l’ont monté en France, celle de Lons le patients in Europe: data from a large cohort of patients. Eur Rev Med Pharmacol
Saunier et celle de Lariboisière [24] (« Parlons goutte »), reconnue par Sci 2015;19:630-9.
l’ARS d’Île de France. On attend toujours les résultats de dosage d’uri- [13] Stamp LK, Taylor WJ, Jones PB, et al. Starting dose is a risk factor for allopurinol
hypersensitivity syndrome: a proposed safe starting dose of allopurinol. Arthritis
cémie à 6 mois et un an pour valider l’efficacité de tels programmes. Rheum. 2012;64:2529-36.
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