Responsabilite Des Administrateurs
Responsabilite Des Administrateurs
Responsabilite Des Administrateurs
Bibliographie.
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STEPHAN et AMADOU, Marchés dérivés et gestion des risques financiers : compétence et
devoir de dirigeants sociaux, Bull. Joly Bourse 1995.95.
254. La nature - contractuelle ou délictuelle - de la responsabilité des administrateurs est
controversée (V. G. RIPERT et R. ROBLOT, op. cit., n o 1760). La discussion est peut-être un
peu vaine quand on sait que les administrateurs tirent leurs pouvoirs davantage de la loi que
du contrat. Leur responsabilité est donc avant tout une responsabilité légale qui repose sur
les trois conditions classiques : faute, préjudice, lien de causalité. La première de ces
conditions appelle quelques observations, les secondes dépendent essentiellement
d'éléments de fait. Il faudra aussi préciser le régime de cette responsabilité. On ajoutera,
pour ne plus y revenir, qu'une responsabilité aggravée pèse sur les administrateurs en cas de
redressement ou de liquidation judiciaire de la société (C. com., art. L. 624-3 ; V. Entreprise
en difficulté : personnes morales et dirigeants [Com., Sociétés]). Sur l'exercice cumulé d'une
action pour faute de gestion et d'une action en comblement d'insuffisance d'actif, V. Cass.
com. 4 févr. 1980, Bull. civ. IV, n o 55 ; V. égal. jurisprudence citée sous art. L. 624-3 .
ACTUALISATION
256-1. Responsabilité civile. Défaut de convocation de l'assemblée générale. - La
directive 2009/101/CE du 16 septembre 2009 tendant à coordonner, pour les rendre
équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au
sens de l'article 48, deuxième alinéa, [CE], pour protéger les intérêts tant des associés
que des tiers, et en particulier ses articles 2 et 6 à 8, ainsi que la directive 2012/30/UE du
Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, tendant à coordonner, pour les
rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés
au sens de l'article 54, deuxième alinéa, [TFUE], en vue de la protection tant des associés
que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le
maintien et les modifications de son capital, et en particulier ses articles 19 et 36,
doivent être interprétées en ce sens qu'elles ne confèrent pas à des travailleurs salariés,
créanciers d'une société anonyme au titre de la rupture de leur contrat de travail, le droit
d'exercer, devant la même juridiction sociale que celle qui est compétente pour connaître
de leur action visant la reconnaissance de leur créance salariale, une action en
responsabilité contre l'administrateur de cette société, pour avoir omis de convoquer
l'assemblée générale de celle-ci malgré les pertes graves qu'elle avait subies, aux fins de
voir déclarer cet administrateur codébiteur solidaire de ladite créance salariale (CJUE
14 déc. 2017, aff. C-243/16, D. 2017. Actu. 2537 ).
§ 2 - Faute de gestion
257. Comme la précédente, la responsabilité pour fautes de gestion pose un double problème
de qualification et de partage de compétence entre le président-directeur et le conseil. Sur le
plan de la preuve des faits matériels, la solution est moins immédiate que dans le cas
précédent, mais guère moins facile. La comptabilité et les archives sociales sont des éléments
de preuve sérieux. Les constatations des juges du fond sont souveraines (Cass. civ. 2 juill.
1901, DP 1903.1.161). Il n'en est pas de même de leur qualification sur le plan de la faute de
gestion, qui est soumise au contrôle de la Cour de cassation (Cass. civ. 19 févr. 1890, DP
1890.1.244 ; 13 janv. 1892, DP 1892.1.157), et qui est de beaucoup la question la plus
délicate. Ont été retenus comme engageant la responsabilité du conseil : l'emploi de fonds
sociaux en opérations de bourse aléatoires (Cass. civ. 21 janv. 1891, DP 1892.1.237) ;… le
paiement du prix d'achat d'immeubles hypothéqués, au risque de payer une seconde fois entre
les mains des créanciers inscrits (CA Bordeaux, 2 mai 1886, Journ. soc. 1887.148) ;… l'octroi à
des intermédiaires de commissions manifestement exagérées (T. com. Seine, 10 févr. 1908,
ibid. 1909.221) ;… le dépôt des fonds sociaux dans une banque dont l'insolvabilité était à peu
près certaine (T. com. Seine, 14 avr. 1896, Rev. sociétés 1896.325). Mais en dehors
d'opérations de cette nature, difficilement défendables, les responsables d'une gestion, quels
qu'ils soient, fournissent généralement une explication plausible de la non-réussite d'une
opération, ou de résultats déficitaires d'un ou plusieurs exercices. L'échec commercial est un
motif décisif de révocation (celle-ci étant d'ailleurs discrétionnaire). Mais il n'est pas en soi
une faute génératrice de dommages-intérêts.
258. La faute de gestion s'apprécie ainsi in abstracto, par référence à la conduite d'un
dirigeant prudent, diligent et actif (V. Y. GUY ON, op. cit., n o 459 ; F. CHERCHOULY-SICARD,
La responsabilité civile des dirigeants sociaux pour faute de gestion, thèse, Paris II, 1982).
Ainsi, le président du conseil d'administration n'est tenu que d'une obligation générale de
moyens, le mauvais état des affaires sociales ne pouvant faire présumer sa faute (CA
Versailles, 11 juin 1998, Bull. Joly 1998.1168, note Baillod). La portée du contrôle du juge a
été précisée par un arrêt récent de la cour d'appel de Versailles. Le juge ne doit pas, lors de
la mise en cause de la responsabilité des administrateurs, juger de l'opportunité des décisions
de gestion, mais apprécier ces décisions en fonction de la régularité du processus qui a
conduit à leur adoption, de leur caractère anormal au moment où elles ont été prises en
tenant compte de l'acceptation des risques générés par la gestion de toute société et du
contrôle incombant au conseil d'administration (CA Versailles, 17 mars 1998, Rev.
sociétés 1998.828, obs. Y. Guyon, RJ com. 1999.331, obs. Maury). Cette faute peut être
volontaire (Cass. com. 21 oct. 1974, Bull. civ. IV, n o 257 ; 11 oct. 1988, Bull. Joly 1988.925,
note P. Le Cannu ; 18 juin 1996, Bull. Joly 1996.922, BRDA 1996, n o 13, p. 3), ou procéder
d'une imprudence ou d'une simple négligence (Cass. com. 4 févr. 1980, Bull. civ. IV, n o 55 ;
CA Aix-en-Provence, 9 avr. 1974, D. 1974.690, note F. Derrida ; CA Rouen, 20 oct. 1983,
D. 1985.161, note J.-J. Daigre ; Cass. com. 4 févr. 1980, Bull. civ. IV, n o 55 ; 21 juill. 1987
[2 e esp.], RJ com. 1988.298, note Cherchouly-Sicard ; 23 mars 1993, RJDA 1993.697, n o 799 ;
CA Paris, 4 févr. 1994, Rev. sociétés 1994.336, obs. Y. Guyon). Constitueraient assurément
une faute de gestion les actes contraires à l'intérêt social (Cass. com. 7 oct. 1997, JCP, éd. E,
1997. I. 710, n o 2, obs. Viandier et Caussain).
259. Depuis la réforme de 1940, reprise par la loi de 1966, la répartition des tâches entre le
conseil d'administration et le président-directeur général qu'il élit aurait dû conduire
logiquement à une répartition des responsabilités. Mais la solution qui prévaut est toute
différente. Le conseil est considéré comme responsable, non seulement du mauvais choix qu'il
a pu faire, donc de son manque de perspicacité, mais encore de son défaut de vigilance
(V. des arrêts sanctionnant une certaine « complaisance » des administrateurs : Cass. com.
31 janv. 1995, Bull. Joly 1995.341, n o 109, note Couret, Rev. sociétés 1995.763 , RJDA
1995.643, n o 11, RTD com. 1996.543, obs. J.-P. Haehl ; 25 mars 1997, JCP, éd. E, 1997.
I. 676, n o 1, obs. Viandier et Caussain, Bull. Joly 1997.799, n o 292 ; 23 juin et 7 juill. 1998,
JCP, éd. E, 1999.29, obs. Viandier et Caussain ; 16 févr. 1999, Bull. Joly 1999.774, n o 171,
p. 5). L'évolution des missions confiées au directeur général et aux directeurs délégués par la
loi NRE devrait conduire à limiter les mises en cause de la responsabilité des administrateurs
sur le terrain de la gestion, mais sans aucun doute à renforcer la mise en cause de leur
responsabilité pour défaut de surveillance (on admettait avant la loi NRE que le président
étant personnellement chargé d'assurer la direction, la responsabilité des administrateurs
ayant trait à la surveillance du personnel est moindre : en ce sens, Cass. com. 3 mai 1954,
D. 1954.437 ; V. J. HAMEL, G. LAGARDE et A. JAUFFRET, Droit commercial, t. 1, vol. 2 :
Sociétés, groupements d'intérêt économique, entreprises publiques, 2 e éd., 1980, Dalloz,
n o 661 ; G. RIPERT et R. ROBLOT, op. cit., n o 1760-1). Si la responsabilité des
administrateurs est recherchée pour une faute de gestion, encore faut-il qu'un comportement
matérialisé soit caractérisé ; de simples considérations générales et l'existence d'une gestion
familiale ne caractérisent pas suffisamment la faute de gestion (T. com. Paris, 20 juin 2000,
Bull. Joly 2000.1125, Les annonces de la Seine, 20 juill. 2000.7). Il est certain que le conseil
est responsable du choix qu'il a fait (qui exonère de toute responsabilité les administrateurs
non en fonction à l'époque ; V. Cass. com. 11 oct. 1988, Bull. Joly 1988.925, note P. Le
Cannu ; 7 nov. 1977, Bull. civ. IV, n o 251). Mais, à tout moment, il peut exercer
discrétionnairement la faculté de révocation que lui donne l'article L. 225-47 du code de
commerce. Il doit le faire sans tarder si la confiance s'est altérée, et c'est à ce moment
surtout que se situe sa responsabilité, et celle de ses membres en fonction.
260. La participation des actionnaires à la faute invoquée par eux est susceptible d'atténuer
la responsabilité des administrateurs (CA Paris, 9 déc. 1942, Rev. sociétés 1944.157) ; il en
est ainsi en particulier de l'approbation par l'assemblée générale des actionnaires des faits
invoqués (Cass. com. 26 nov. 1956, Bull. civ. III, n o 263, RTD com. 1957.402, obs. Rault ;
7 oct. 1974, JCP 1975. II. 18129, note F. Grua ; comp. Cass. crim. 5 nov. 1963, D. 1964.52 :
V., dans le sens de l'exclusion de la responsabilité, Cass. req. 12 avr. 1881, S. 1881.1.241).
263. Par exception, la responsabilité peut être solidaire. Ainsi en est-il lorsque plusieurs
administrateurs sont condamnés pénalement à raison des mêmes faits (C. pén., art. 55), ou
encore lorsqu'il est établi qu'ils ont commis une faute commune, la condamnation étant alors
prononcée in solidum (V. Cass. com. 5 juill. 1967, Bull. civ. III, n o 279, JCP 1967. II. 15245 ;
C. com., art. L. 225-251 ). Le dirigeant qui voudrait s'exonérer devrait démontrer le défaut
de causalité dans l'enchaînement des responsabilités (non-participation au conseil
d'administration…). (V. P. MERLE, op. cit., n o 406 ; COPPER-ROY ER, De la solidarité des
administrateurs, Rev. spéc. soc. 1938.493 ; DECUGIS, La responsabilité solidaire des
administrateurs, Journ. soc. 1935.1 ; HAMEL, De la responsabilité individuelle ou solidaire des
administrateurs, Rev. sociétés 1923.123 ; J. DI VITTORIO, La distinction entre la
responsabilité individuelle et la responsabilité solidaire des administrateurs des sociétés
anonymes, Petites affiches 25 oct. 1978 ; V. encore Cass. 3 e civ. 17 janv. 1978, Bull. civ. III,
n o 43).
267. Dans tous les cas, le tribunal saisi peut nommer un expert dont la mission consiste à
l'éclairer sur le bien-fondé de la demande ou l'étendue du préjudice subi (Cass. com. 21 oct.
1974, Journ. agréés 1975.386, note Y . Chartier, RTD com. 1975.551, obs. R. Houin).
§ 1 er - Action individuelle
269. L'action individuelle, qui trouve sa source dans l'article 1382 du code civil, est prévue par
l'article L. 225-252 du code de commerce. Elle débouche sur l'allocation de dommages-intérêts
au seul profit de la victime. Elle suppose d'une part, que le préjudice ait été causé par
l'administrateur lui-même, et d'autre part, que ce préjudice soit personnel, c'est-à-dire
indépendant de celui que la société elle-même a pu subir. L'actionnaire qui a perdu sa qualité
peut donc l'intenter dès l'instant qu'il peut établir un préjudice qui lui est propre. Ces
conditions sont strictes, si bien que les exemples d'actions individuelles sont rares
(V. G. RIPERT et R. ROBLOT, op. cit., n o 1766). On peut cependant citer le cas de
l'administrateur ayant détourné les dividendes destinés à un actionnaire (CA Paris, 2 mai
1935, Gaz. Pal. 1935.2.113 ; rappr. Cass. com. 15 mars 1971, Bull. civ. IV, n o 81 ; plus
récemment, CA Paris, 15 déc. 1995 et 19 janv. 1996, RTD com. 1997.286, obs. B. Petit et
Y. Reinhard ) ou porté préjudice à un actionnaire par la violation du pacte social (Cass. req.
5 juill. 1933 et 29 oct. 1934, S. 1935.1.89, note H. Rousseau) ou laissé détourner par sa faute
les fonds versés pour la libération des actions (Cass. req. 30 oct. 1945, D. 1946.93) ou publié
des faits faux pour nuire à un actionnaire (CA Paris, 26 janv. 1938, S. 1939.1.49, note
H. Rousseau), ou encore commis un délit d'abus de biens sociaux (détournement de
dividendes destinés aux actionnaires : Cass. crim. 25 nov. 1975, D. 1976.224, note
A. Honorat ; rappr. Cass. crim. 2 déc. 1991, Bull. Joly 1992.423, obs. P. Delebecque ; le plus
souvent, l'abus de biens sociaux constituera cependant un préjudice fait à l'entreprise
atteignant également les actionnaires, Cass. crim. 9 nov. 1992, Rev. sociétés 1993.433, note
B. Bouloc ).
270. Jugé cependant que faute de rapporter la preuve d'un préjudice personnel, l'action
individuelle exercée par un actionnaire contre le président-directeur général de la société qui
avait dû procéder à un « coup d'accordéon », est irrecevable (Cass. com. 4 mars 1986, Bull.
civ. IV, n o 42). De même en est-il en cas de baisse de valeur d'un titre (Cass. com. 18 juill.
1989, Defrénois 1990.633, obs. J. Honorat, Rev. sociétés 1989, n o 261 ; CA Aix-en-Provence,
16 févr. 1977, D. 1979, IR 106, obs. J.-C. Bousquet ; rappr. Cass. com. 26 janv. 1970, JCP
1970. II. 16385, note Y. Guyon ; 1 er avr. 1997, D. 1998, somm. 180, obs. J.-C. Hallouin ,
Bull. Joly 1997.650, note Barbièri, RTD com. 1997.647, obs. B. Petit et Y. Reinhard , RJDA
1997, n o 659 ; 14 déc. 1999, RTD com. 2000.372, note C. Champaud et D. Danet ; V. égal.
CA Paris, 20 oct. 1998, Bull. Joly 1999.493, n o 103, note Barbièri, D. 1998, IR 259 , Rev.
sociétés 1999.194, obs. Y. Guyon ; CA Douai, 15 nov. 1999, Bull. Joly 2000.409, n o 83, note
Daigre).
271. Si plusieurs actionnaires subissent un préjudice personnel en raison des mêmes faits, ils
peuvent se grouper pour charger l'un ou plusieurs d'entre eux d'agir en leur nom devant les
juridictions civiles (Décr., art. 199). Le mandat doit être donné par écrit et préciser
expressément qu'il donne au(x) mandataire(s) le pouvoir d'accomplir tous les actes de
procédure (y compris, s'il y a lieu, l'exercice des voies de recours) ; la demande en justice doit
préciser l'identité de chacun des mandants, le nombre d'actions qu'il détient, le montant de la
réparation qu'il réclame. Les actes de procédure sont alors réputés valablement accomplis à
l'égard des mandataires (et des mandataires seuls) sans qu'il soit nécessaire de les notifier à
chacun (Décr., art. 199-1).
§ 2 - Action sociale
272. L'action sociale est l'action intentée par la société contre les administrateurs à raison du
préjudice causé par leur faute. Elle doit être exercée au nom de la société par ses
représentants. S'il s'agit de la responsabilité d'un seul dirigeant, l'action est exercée par les
autres (Rappr. Cass. com. 11 oct. 1988, Bull. Joly 1988.925, note Le Cannu, RJ com. 1989.158,
obs. Cherchouly-Sicard, décidant qu'un nouveau président peut mettre en jeu la responsabilité
de son prédécesseur qui lui avait cédé ses actions). Si tous les administrateurs sont en cause,
l'action ne peut être exercée qu'après démission ou révocation de l'ancien conseil
(V. G. RIPERT et R. ROBLOT, op. cit., n o 1765).
275. Cette action peut donc être intentée soit par un actionnaire agissant individuellement,
soit par un groupe d'actionnaires (sur l'incidence de l'action ut universi, par le nouveau
dirigeant, sur l'action ut singuli, Cass. crim. 12 déc. 2000, Bull. Joly 2001.508, n o 131 note
Barbièri, Rev. sociétés 2001.323, note A. Constantin , D. 2001, AJ 1031, obs. M. Boizard ,
cassant CA Douai, 29 avr. 1997, JCP, éd. E, 1997. II. 1009, note Daigre). La qualité
d'actionnaire doit être conservée pendant toute la durée de l'instance (V. COURET,
Interrogations autour de la réparation du préjudice individuel de l'actionnaire, RJDA 1997.391 ;
Cass. com. 26 janv. 1970, Bull. civ. IV, n o 30, D. 1970.643, note Guyénot, Rev. sociétés
1970.476, JCP 1970. II. 16385, note Guyon ; CA Paris, 4 févr. 1994, Bull. Joly 1994.402, note
Pariente ; Cass. com. 18 févr. 1997, Bull. Joly 1997.408, n o 173, note Daigre, Dr. sociétés
1997, n o 75, note Bonneau). Elle suppose une mise en cause de la société (V. CA Douai,
31 janv. 1975, Rev. sociétés 1975.282, note J.-J. Taisne ; CA Paris, 15 févr. 1990, D. 1990, IR
8 0 , Bull. Joly 1990.523 ; Cass. com. 5 nov. 1991, Dr. sociétés 1992, n o 17, obs. H. Le
Nabasque), mais elle appartient à la société elle-même et c'est pourquoi les dommages-
intérêts éventuellement alloués sont versés dans son propre patrimoine.
276. Un actionnaire peut exercer l'action sociale même s'il demande par ailleurs la réparation
de son préjudice personnel (Cass. crim. 3 nov. 1980, Bull. Joly 1980.698). En revanche, cette
action doit être refusée à l'actionnaire qui, étant par ailleurs administrateur, n'a fait, au
moment où sont intervenus les agissements qu'il dénonce, aucune observation (CA Paris,
11 mai 1982, Gaz. Pal. 1982.2, somm. 319).
277. V., pour les groupes de sociétés, C. ARMAND et A. VIANDIER, Réflexions sur l'exercice de
l'action sociale dans le groupe de sociétés : transparence des personnalités et opacité des
responsabilités ?, Rev. sociétés 1986.557.
278. La loi n o 89-421 du 23 juin 1989 (art. 11, D. 1989.211) a donné aux associations agréées
de défense des investisseurs le droit de demander des dommages-intérêts (V. Y. GUY ON, op.
cit., n o 463-1 ; la position de la jurisprudence était auparavant hostile à une telle action :
Cass. crim. 4 nov. 1969, Bull. crim. n o 281, D. 1970, somm. 83). Ce droit est aujourd'hui
inscrit à l'article L. 125-252 du code de commerce : outre l'action en réparation du préjudice
subi personnellement, les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une
association (C. com., art. L. 225-120 ) intenter l'action sociale en responsabilité contre les
administrateurs ou le directeur général. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la
réparation de l'entier préjudice subi par la société, à laquelle, le cas échéant, les dommages-
intérêts sont alloués. Ces associations ne sont pas des associations classiques de défense ;
elles n'ont pas besoin, semble-t-il, de compter parmi leurs membres des actionnaires de la
société dont les dirigeants ont commis une faute (Y. GUY ON, op. cit.). Elles ont qualité pour
agir du moment que la société fait publiquement appel à l'épargne. Ces associations peuvent
aussi demander au tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, d'enjoindre
aux dirigeants de mettre un terme aux irrégularités. Autrement dit, l'action a un double objet
(comme c'est souvent le cas en droit positif ) réparation et exécution forcée (V. sur la question
Associations d'actionnaires et d'investisseurs).
279. L'action en responsabilité doit être librement exercée. C'est pourquoi l'article L. 225-253
du code de commerce répute non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de
subordonner l'exercice de l'action sociale à l'avis préalable ou à l'autorisation de l'assemblée
générale ou qui comporterait renonciation anticipée à l'exercice de cette action. La solution a,
semble-t-il, une portée générale et s'applique ainsi aux actions individuelles (Comp., pour le
régime antérieur, Cass. civ. 29 juill. 1941, S. 1942.1.57). Autrement, les règles sur la
responsabilité des administrateurs ont un caractère impératif : les clauses de non-
responsabilité ou limitatives de responsabilité ne sont donc pas admises.
280. Dans le même esprit, l'article L. 225-253, alinéa 2, du même code précise qu'aucune
décision de l'assemblée générale ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en
responsabilité contre les administrateurs pour faute commise dans l'accomplissement de leur
mandat (pour une approbation des comptes et un quitus : Cass. com. 15 déc. 1987, Bull. civ.
IV, n o 280, D. 1988, IR 23, JCP, éd. E, 1988. II. 15240, n o 6, obs. Viandier et Caussain ; en ce
sens égal. Communication de la COB, Bull. COB, n o 128, juill. 1980 ; V. cep. Cass. com. 5 déc.
2000, Bull. civ. IV, n o 192, D. 2001, AJ 239, obs. A. Lienhard , Bull. Joly 2001.262, n o 71,
note Le Cannu, RTD com. 2001.446, obs. C. Champaud et D. Danet : après avoir constaté
que l'associée demanderesse en annulation de l'assemblée générale d'une société à
responsabilité limitée avait donné quitus sans réserve aux gérants pour leur gestion au cours
des trois exercices précédents, alors que la prise de participation de cette société dans une
autre société apparaissait au bilan, la Cour d'appel a pu estimer que, ce faisant, l'intéressée
avait expressément approuvé les actes accomplis en exécution de la résolution adoptée au
cours de l'assemblée générale litigieuse et avait, par conséquent, tacitement ratifié cette
résolution elle-même). La solution vise le quitus, jadis trop facilement accordé aux
administrateurs. Ce quitus doit être considéré comme inefficace (Comp. P. MERLE, note sous
Cass. com. 26 janv. 1983, Rev. sociétés 1984.360). En réalité, l'efficacité du quitus doit
s'apprécier en fonction de l'information fournie aux actionnaires : dans la mesure où celle-ci
est claire et loyale, le quitus peut retrouver son efficacité et c'est le sens de la décision
précitée du 5 décembre 2000.
283. Quant au point de départ du délai de prescription (V. RAULT, Le point de départ de la
prescription de l'action en responsabilité de l'article 247 de la loi du 24 juillet 1966, JCP, éd.
E, 2000.1462), l'article L. 225-254 du code de commerce vise soit le fait dommageable
(V. Cass. com. 2 mai 1983, Rev. sociétés 1984.775, note Didier ; CA Paris, 29 nov. 1994, RJDA
1995, n o 163, JCP, éd. E, 1995. I. 447, n o 5, obs. Viandier et Caussain, Bull. Joly 1995.177 ;
TGI Aix-en-Provence, 10 avr. 1997, Bull. CNCC 1997.263, note Merle), soit, s'il a été
dissimulé, le jour de sa révélation (l'art. 247 [lire L. 225-254] n'exige pas que la dissimulation
soit imputable au commissaire aux comptes : CA Paris, 13 nov. 1998, Dalloz affaires
1999.136, Bull. Joly 1999.347, note Barbièri, JCP, éd. E, 1998, n o 51, p. 2001 ; V. égal. Cass.
com. 3 juill. 1984, Rev. sociétés 1985.422, note Bouloc ; CA Paris, 15 févr. 1990, D. 1990, IR
8 0 , Bull. Joly 1990.523 ; sur le particularisme du point de départ en cas de procédure
judiciaire contre la société : CA Paris, 2 juin 1988, D. 1988, IR 220 ; Cass. com. 23 mars 1993,
Dr. sociétés 1993, n o 134, note Bonneau, RJDA 1993, n o 1046 ; 7 déc. 1993, Dr. sociétés
1994, n o 21, note Bonneau, Bull. Joly 1994.280, note Hannoun). La jurisprudence a estimé
qu'en cas d'opérations complexes, le point de départ ne pouvait être fixé avec certitude que
connaissance prise de la totalité des opérations du groupe qui se commandent et ont été
menées dans un but unique (Cass. com. 21 oct. 1974, Bull. civ. IV, n o 257, Rev. sociétés
1975.113, note Bouloc).
284. La forme juridique de société sert parfois d'écran à des entreprises individuelles dont les
chefs sont soucieux de ne pas engager leur propre patrimoine ; l'article 58 de l'ordonnance du
29 décembre 1958, codifié à l'article 266 du livre des procédures fiscales du nouveau code
général des impôts (ex-art. 1724 ter CGI) pose le principe d'une responsabilité solidaire du
dirigeant dans le cas où le débiteur des droits est une SARL gérée par son principal porteur de
parts (V. DAVOUST, L'engagement de la responsabilité pécuniaire des associés et des
dirigeants d'entreprise par l'administration fiscale, Petites affiches, 13 févr. 1995, n o 19, p. 4 ;
La responsabilité des dirigeants en cas de méconnaissances des obligations fiscales de la
société, Dossier ANSA, mai-juin 1995, n o 2270).
285. L'article 74 de la loi n o 80-30 du 18 janvier 1980 (D. 1980.97, Dr. fisc. 1980.156) portant
loi de finances pour 1980 a étendu sous certaines conditions à toutes les formes de
personnalité collective la responsabilité de la gestion édictée par l'article L. 266 du livre des
procédures fiscales. L'article L. 267 dudit code dispose donc désormais « Lorsqu'un dirigeant
d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement, est responsable des
manœuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui
ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la
personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des
dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable
du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance,
dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 266. Cette disposition est
applicable à toute personne exerçant en droit ou en fait, directement ou indirectement, la
direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement ».
287. L'intention du législateur était de conférer à l'article L. 267 du livre des procédures
fiscales une portée très générale. Il ne se limite pas à la direction de droit, mais envisage
également la direction de fait ; dès lors, l'article L. 267 doit avoir le même champ
d'application que l'article L. 624-5 du code de commerce qui étend le redressement judiciaire
ou la liquidation judiciaire d'une personne morale à « tout dirigeant de droit ou de fait,
apparent ou occulte, rémunéré ou non ».
288. Sont notamment visées par l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, les personnes
régulièrement désignées pour exercer des fonctions spécifiques de gestion, de direction ou
d'administration. Il en est notamment ainsi : du président-directeur général d'une société
anonyme ; du président ou des membres du directoire ou du conseil d'administration ; de
façon générale, de toute personne désignée pour être responsable des actes de gestion et de
leurs résultats.
289. Ne sont pas concernées les personnes ne participant pas à la gestion générale (par
exemple, les membres du conseil de surveillance, commissaires aux comptes, directeurs
salariés, responsables d'une division technique, s'ils s'en tiennent aux fonctions pour
lesquelles ils ont été désignés et n'empiètent pas sur les attributions de la direction
générale).
290. Le fait que le dirigeant soit une personne morale n'exclut pas que sa responsabilité soit
recherchée, voire que soit poursuivi le dirigeant de cette personne morale qui doit alors, selon
l'Administration, être considéré comme « dirigeant indirect » dans la société. Comme en
matière de responsabilité civile, le fait qu'un dirigeant ait cessé d'exercer ses fonctions au
moment où l'action est intentée ne suffit pas à le dégager de sa responsabilité.
291. Comme l'article L. 624-4 du code de commerce, l'article L. 267 du livre des procédures
fiscales peut être mis en œuvre contre toute personne assurant la direction effective de la
société, de la personne morale ou du groupement ; le fait que le dirigeant de la société
débitrice d'impositions soit une personne morale n'exclut pas que sa responsabilité soit
recherchée, ainsi que celle de son dirigeant, lequel est alors considéré comme un « dirigeant
indirect » ou « par personne interposée » de la société débitrice.
292. Selon l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, un dirigeant ne peut être déclaré
solidairement responsable des impositions de la société qu'autant qu'il n'est pas tenu au
paiement des dettes sociales, en application d'une autre disposition. Sont donc exclus : 1 o les
dirigeants qui sont tenus de plein droit au passif de l'organisme concerné (par ex. les
dirigeants d'un GIE et qui en sont membres en même temps) ; 2 o les dirigeants déjà
condamnés par un juge à répondre de la totalité des dettes sociales, y compris le passif social
susceptible d'être mis à leur charge en application de l'article L. 267 (par ex. lorsqu'en
application de l'article 1745 CGI, la solidarité est prononcée et porte sur toutes les
impositions et pénalités dont le dirigeant pourrait être tenu pour responsable sur le
fondement de l'article L. 267) ; 3 o le dirigeant, condamné en vertu de l'article L. 624-3 du
code de commerce à combler le passif social ; 4 o le dirigeant personnellement mis en
liquidation judiciaire conformément à l'article L. 624-4 du code de commerce. Avant la loi de
1985, la Cour de cassation avait déjà décidé que les conditions d'application de l'article L. 267
du livre des procédures fiscales étaient indépendantes de celles de l'article 99 de la loi du
13 juillet 1967. Il n'était donc pas interdit d'appliquer le premier texte au président-directeur
général d'une société bien que l'action fondée sur le second et dirigée contre lui ait été
rejetée par une décision antérieure. D'autre part, cet arrêt ayant relevé que les manquements
graves et répétés aux obligations fiscales de la société étaient imputables au dirigeant social
qui avait suivi pendant toute la durée de son mandat la pratique antérieure consistant à
financer les besoins de trésorerie de la société par le non-paiement de la taxe sur la valeur
ajoutée et des charges sociales, la cour d'appel l'a donc justement déclaré solidairement
responsable avec la société du paiement de ces taxes (Cass. com. 20 nov. 1990, Bull. civ. IV,
n o 289, Rev. sociétés 1991.572 ; même solution pour l'art. L. 266, CA Paris, 20 sept. 1996,
BRDA 1996, n o 20, p. 2). Cette solution fut reprise, toujours sur le fondement de l'article
ancien 180 du code de commerce dans un arrêt remarqué : l'action prévue par l'article L. 267
du livre des procédures fiscales à l'encontre du dirigeant d'une société, d'une personne morale
ou de tout autre groupement, lorsque ce dirigeant est responsable des manœuvres
frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu
impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la personne
morale ou le groupement, n'est exclue que si, en vertu d'une autre disposition légale, le
dirigeant est tenu de la totalité de la dette fiscale due au comptable poursuivant. Les
dispositions de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, qui permettent, lorsque le
redressement ou la liquidation judiciaires d'une entreprise font apparaître une insuffisance
d'actif, de décider que les dettes de la personne morale seront supportées en tout ou en
partie par ses dirigeants, et qui prévoient que les sommes versées à ce titre entrent dans le
patrimoine du débiteur et sont affectées, en cas de continuation de l'entreprise, selon les
modalités du plan d'apurement du passif, tandis qu'en cas de liquidation, elles sont réparties
entre tous les créanciers au marc le franc, ne font pas obstacle à l'application de l'article
L. 267 précité (Cass. com. 9 déc. 1997, Bull. civ. IV, n o 331, Dalloz affaires 1998.159, obs.
J. F., JCP, éd. E, 1998, n o 17, p. 659, obs. Pétel, Rev. sociétés 1998.316, note J.-J. Daigre ,
Gaz. Pal. 1998, somm. 343, note P.-P. Massoni ; V. PINIOT, concl. RJDA 1998, p. 3 ;
POULLAIN, Dr. et patrimoine févr. 1998.35). L'action en comblement de passif, prévue par
l'article 180 (C. com., art. L. 624-3 ), n'a pas la même finalité et ne saurait faire échec aux
dispositions du livre des procédures fiscales, lesquelles mettent en œuvre une action
spécifique en responsabilité au seul profit du Trésor (CA Versailles, 26 mars 1992, D. 1992, IR
165 , conf. par Cass. com. 21 juin 1994, RJF 1994, n o 1272 ; pour une autre application de
l'art. L. 267 LPF, V. Cass. com. 25 avr. 2001, Dr. sociétés 2001, n o 128, note Legros). De
même, la clôture pour insuffisance d'actif, malgré les conséquences qui s'y attachent à l'égard
du débiteur en application des dispositions de l'article 169 de la loi n o 85-98 du 25 janvier
1985, ne fait pas obstacle à l'exercice par l'administration fiscale, à l'encontre du dirigeant de
la société en liquidation, de l'action instituée à l'article L. 267 (Cass. com. 30 mai 2000, Bull.
civ. IV, n o 115, D. 2000, AJ 302, obs. Lienhard , RD bancaire et financier 2000, n o 163, obs.
F.-X. Lucas, Bull. Joly 2000.903, note Serlooten, Petites affiches 10 sept. 2001, p. 11, note
B. Poullain). La solution a été reprise par la Cour de cassation la même année (Cass. com.
28 nov. 2000, Bull. civ. IV, n o 184, D. 2001, AJ 235, obs. Lienhard , JCP, éd. E, 2001, n o 18,
p. 752, obs. Pétel).
293. L'article L. 267 du livre des procédures fiscales vise successivement « une société, une
personne morale ou tout autre groupement ». Dans le cadre de cette étude, nous retiendrons
seulement l'hypothèse des groupes de sociétés.
294. L'article L. 267 du livre des procédures fiscales est applicable au groupement constitué
par des sociétés placées sous le contrôle d'une « holding », à condition que l'on établisse
l'existence d'un groupe de sociétés ayant à sa tête une « holding », véritable maître de
l'affaire. Il faut pour cela que l'on analyse les différents liens de fait ou de droit qui unissent
toutes les sociétés du groupe entre elles, ou ceux qui unissent une des sociétés avec toutes
les autres. On doit établir un lien de dépendance (prise de participation majoritaire, politique
commerciale aboutissant à la signature de contrats d'affiliation ou de subordination, etc.,
existence de liens personnels par l'identité des dirigeants pour plusieurs des sociétés du
groupe). Mais cette application de l'article L. 267 va être subordonnée à la qualification des
relations entretenues par les différents membres du groupe. S'il s'agit de relations très
étroites (l'actif et le passif et/ou l'activité de tous sont confondus ou étroitement imbriqués),
elles donnent lieu à une liquidation judiciaire fondée sur l'unité de la masse active et passive.
S'il s'agit de relations plus distendues, mais certaines, elles engageront la responsabilité de
la « holding » sur le fondement de l'article L. 267 (Instr. 25 août 1981, § 28, toujours en
vigueur).
295. Ils résultent en général d'un contrat d'entreprises, aux termes duquel chacune d'elles
demeure responsable, tant à l'égard du maître du groupe que des créanciers pour le passif
résultant de son activité propre. Sauf circonstance particulière permettant de conclure à la
constitution d'une société créée de fait, ce type de groupement n'a pas d'obligations fiscales
particulières et reste exclu de l'application de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales
(Instr. préc., § 29).
296. Le GIE en tant que personne morale entre dans le champ d'application de l'article L. 267
du livre des procédures fiscales. Cependant, les administrateurs peuvent être choisis parmi les
membres du GIE, ou en dehors d'eux selon l'article L. 251-11 du code de commerce
(anciennement Ord. n o 67-821 du 23 sept. 1967, art. 9, D. 1967.361, qui a institué le GIE).
Sauf accord particulier d'un ou de plusieurs des créanciers, les membres du GIE sont tenus
solidairement des dettes de celui-ci sur leur patrimoine propre (C. com., art. L. 256-6, al. 1 er,
ex-art. 4 Ord. 23 sept. 1967).
297. La mise en jeu de la responsabilité pécuniaire sur le fondement de l'article L. 267, dans
le cadre d'un GIE, ne peut intervenir qu'à l'égard des administrateurs qui ne sont pas en
même temps les membres du GIE, car ceux qui en sont membres sont déjà tenus
solidairement, en vertu d'un autre texte (C. com., art. L. 256-6, al. 1 er, ex-art. 4 Ord. 23 sept.
1967).
298. Quant aux agissements propres à engager la responsabilité des dirigeants, il s'agit de
« manœuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales »
(LPF, art. L. 267). Si l'un des deux agissements fautifs est démontré, l'article L. 267 s'applique
(V. Cass. com. 13 mars 1978, Bull. civ. IV, n o 88 ; 10 mars 1975, ibid. IV, n o 76 ; TGI Paris,
13 avr. 1978, Dr. fisc. 1978.3302, I.D. et C.A. 5866, JCP, éd. CI, 1978. IV. 5866).
300. Quant à la notion de gravité l'infraction est réputée grave, dans les cas suivants :
absence de toute déclaration et de tout paiement (CA Lyon, 5 mars 1985, Dr. fisc. 1985.6070,
I. D. 8524 ; CA Versailles, 26 mars 1992, D. 1992, IR 165 ) ; le fait de négliger
systématiquement le paiement des taxes dont une société est redevable sur le chiffre
d'affaires est une inobservation « répétée », mais aussi « grave » (s'agissant de la TVA, qui
est collectée auprès du consommateur, et qui doit être spontanément versée ; en la
conservant irrégulièrement par-devers elle, la société s'était donné les moyens d'une survie
artificielle, augmentant son passif, V. TGI Strasbourg, 9 nov. 1983, Dr. fisc. 1985.5996,
I.D. 8421) ; le fait de ne pas déposer en temps voulu les déclarations fiscales exigées par la
législation fiscale est en soi une faute (CA Paris, 17 janv. 1997, Gaz. Pal. 1997, somm. 245,
et la note). Une décision a rappelé que le délai de prescription de trois ans de la loi du
24 juillet 1966 n'est donc pas applicable aux actions de poursuites sur le fondement de
l'article précité du livre des procédures fiscales, seule la prescription quadriennale prévue par
la loi fiscale s'appliquant alors (CA Colmar, 10 mars 1995, JCP 1996. IV. 325).
301. Les administrateurs, de droit ou de fait, peuvent engager leur responsabilité pénale s'ils
commettent l'une des infractions ci-aprèsénumérées (V., pour plus de précisions, Infractions
pénales).
■ Abus de droit 18
démission 149
majorité 22
non-renouvellement 34, 141
révocation 144
■ Actionnaire 5
candidature, présentation à l'AGO 19
qualité d' 40 s.
■ Actionnaire salarié 40
■ Administrateur
actionnaire 40 s.
âge 57
bonne foi 203
capacité 53
compétence 54
copropriétaire d'action 41
discrétion 182, 256
droits 173 s.
élection 10 s.
élu par les salariés 103s
époux 55
information, droit à l' 174 s.
nationalité 56
nombre 6
nomination 10 s.
V. ce mot
non-commerçant 171 s.
obligations 202
organe de la société 9, 164 s.
personne morale 97 s.
pouvoir personnel, non 9
réélection 18
réintégration 147
renouvellement 34, 141
responsabilité 254 s.
statut 164 s.
usufruitier 41
■ Administrateur judiciaire 69
■ Administrateur provisoire 124
■ Administrateur représentant des salariés 103 s.
action, possession 120
candidature 108
contrat de travail 106, 116
corps électoral 107
emprunt personnel 119
incompatibilité 105
nombre 104
révocation 117
salaire 115
vacance d'un siège 118
vote secret 110
■ Capacité 80 s.
V. Incapacité
■ Casier judiciaire 86 s.
■ Cautionnement 172, 219 s.
■ Cessation des fonctions 122 s.
collective 124
V. Démission, Révocation
■ Conseil d'administration
collégialité 184
convention réglementée 238 s.
V. ce mot
délibération, nullité 185
liste des candidats 19
renouvellement partiel et par roulement 33
renvoi 4
réunion, ajournement 185
■ Cooptation 24 s.
facultative 26, 29
impossible 28
obligatoire 27
■ Corporate Governance 40
rapport Besson 201
rapport Viénot 59
■ Élection 10 s.
acceptation des fonctions 23
AGO ou AGE 11 s., 17
candidat, liste 19
mandat, durée 32 s.
ordre du jour 18
réélection 18, 34, 141
■ Époux 55
convention interdite 219
■ Faute 256 s.
détachable des fonctions 261
de gestion 257
personnelle ou commune 262 s.
de surveillance 259
V. Responsabilité civile
■ Fonctionnaire 68
■ Fonctions
V. Mandat social
■ Groupe de sociétés
action sociale 277
holding 294
prêt intragroupe 220 s.
responsabilité fiscale 293 s.
■ Location 235
■ Mandat social
durée 32 s.
limitation 59 s.
renouvellement 18 s.
V. Cumul de mandats sociaux
■ Mandataire ad hoc 31
■ Mandataire-liquidateur 69
■ Nationalité 56
■ Nomination 10 s.
assemblée générale 10 s.
conditions 38 s.
cooptation 24 s.
V. ce mot
dans les statuts 13, 36
durée 32 s.
élection 10 s.
V. ce mot
non-renouvellement 34
publicité 155 s.
remplacement 18
■ Notaire 69
■ Nue-propriété 41
■ Nullité 43
droit à l'information 184 s.
■ Préavis 133
■ Prescription 283
■ Prestation de service 235
■ Prêt
consenti par la société 235
intragroupe 219 s.
de titres 42
■ Salariés 2, 103 s.
actionnaire 40
administrateur 66, 71 s.
convention réglementée 206 s.
cumul d'un contrat de travail et d'un mandat 66, 71 s.
V. Administrateur représentant les salariés
■ SICAV 61
■ SNCF 181
■ Société privatisée 103
■ Statuts
action
inaliénabilité 51
nombre minimum d'actions 44 s.
administrateur représentant des salariés 103 s.
cooptation 24 s.
désignation 13 s.
diplôme 54
durée du mandat 14, 32
signataire 15
■ Transformation 125
■ Tribunal de commerce
compétence 171
■ Voiture 186 s.
Actualisation
137. Révocation. Entrave. Directeur général. Pacte d'actionnaires. - Est illicite toute
stipulation ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la libre révocabilité de
l'administrateur d'une société anonyme (Com. 26 avr. 2017, n o 15-12.888 , Rev. sociétés
2018. 107 obs. E. Schlumberger).
Une société anonyme est condamnée à indemniser un administrateur révoqué dans des
circonstances à caractère vexatoire (Com. 16 févr. 2016, n o 14-21.934 , Rev. sociétés 2016.
297, obs. Pisoni ).
172. Action en comblement de passif. - Bien qu'ils n'assument pas la direction générale de
la société, les administrateurs ont la qualité de dirigeants de droit au sens de l'article L. 624-
3 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde
des entreprises, applicable en la cause (Com. 31 mai 2011, n os 09-13.975 09-14.026, 09-
16.522 et 09-67.661, Rev. sociétés 2011. 521, Roussel-Galle, Chronique de droit des
entreprises en difficulté ; Bull. Joly 2011. 817, note Saintourens).
176. Information personnelle. - Le président ou le directeur général de la société est tenu
de communiquer à chaque administrateur tous les documents et informations nécessaires à
l'accomplissement de sa mission : C. com., art. L. 225-35 , mod. L. n o 2003-706 du 1 er août
2003, de sécurité financière, art. 129, D. 2003. 2000, obs. Lienhard . Par rapport à la loi
NRE : l'obligation incombe désormais au président et au DG, puis « l'expression de documents
et informations nécessaires » a été substituée à celle "de se faire communiquer les
documents que l'administrateur estime utiles". La loi LSF retire ainsi à l'administrateur un rôle
actif que lui avait octroyé la loi NRE, qui aurait pu générer une attitude de harcèlement ou un
risque de responsabilité individuelle.
178. En ce sens que l'information doit être préalable à la réunion : Com. 8 oct. 2002, Bull.
Joly 2003. 353, note D. Vidal; JCP E 2003. 374, note Viandier; RTD com 2003. 327, chron.
Chazal et Reinhard .
1) Un premier vote, ex ante, qui fait l'objet des nouveaux articles L. 225-37-2 (pour les
sociétés anonymes) et L. 226-8-1 (pour les sociétés en commandite par actions) du code de
commerce, porte sur la politique de rémunération des dirigeants de la société. Les dirigeants
de la société sont tous les dirigeants mandataires sociaux, c'est-à-dire les administrateurs ou
les membres du conseil de surveillance, les directeurs généraux délégués, les directeurs
généraux, les membres du directoire ou le directeur général unique, dans les sociétés
anonymes, ou les membres du conseil de surveillance et les gérants des sociétés en
commandite par actions. Cette politique doit présenter les principes et les critères, alignés sur
les intérêts de la société, déterminant les rémunérations des dirigeants. Cette politique est
contraignante, ce qui signifie que ne peuvent être versées aux dirigeants que des
rémunérations conformes à une politique de rémunération approuvée.
La directive prévoit un contenu détaillé pour la politique de rémunération, qui est fixé par
décret en Conseil d'État. La périodicité de vote prévue par la directive - tous les quatre ans et
à chaque changement important - n'est pas reprise par l'ordonnance, qui maintient sur ce
point le droit français préexistant, prévoyant un vote annuel. Ce vote annuel n'est pas de
nature à dissuader les sociétés de mettre en place une politique de rémunération objective et
de long terme, ce qui constitue l'un des objectifs poursuivis par le texte. Il s'agit seulement
de permettre un contrôle plus fréquent des actionnaires sur la politique de rémunération,
cette dernière pouvant rester identique d'année en année et reconduire ses critères de long
terme.
Le droit français n'est pas modifié non plus concernant le régime applicable en cas de
désapprobation, par l'assemblée générale, de la politique de rémunération. Les rémunérations
doivent alors être attribuées selon la dernière politique de rémunération approuvée. En
l'absence de politique de rémunération approuvée, les rémunérations sont déterminées
conformément à la rémunération attribuée au titre de l'exercice précédent ou, en l'absence de
rémunération attribuée au titre de l'exercice précédent, conformément aux pratiques existant
au sein de la société.
Enfin, l'ordonnance lève l'option de la directive selon laquelle les sociétés sont autorisées,
dans des « circonstances exceptionnelles », à « déroger temporairement à la politique de
rémunération », à condition que cette politique prévoie « les conditions procédurales en vertu
desquelles la dérogation peut être appliquée et précise les éléments de la politique auxquels
il peut être dérogé ». Cette dérogation encadre les circonstances dans lesquelles la politique
de rémunération serait susceptible de ne pas s'appliquer : les circonstances exceptionnelles
ne couvrent que les situations « dans lesquelles la dérogation à la politique de rémunération
est nécessaire pour servir les intérêts et la pérennité à long terme de la société dans son
ensemble ou garantir sa viabilité » (Dir., art. 9 bis, 4).
2) Un second vote, ex post, porte sur le rapport présentant le détail des rémunérations
versées ou attribuées aux dirigeants durant l'exercice écoulé ainsi qu'un ensemble
d'information s'y rapportant. L'ordonnance dresse la liste de ces informations à l'article L. 225-
37-3 du code de commerce, complétant ainsi le rapport sur le gouvernement d'entreprise. En
termes de vote, l'ordonnance présentée, modifiant les articles L. 225-100 et L. 226-8-2 du
code de commerce, procède d'abord à la transposition de la directive, en demandant à
l'assemblée générale des actionnaires de se prononcer sur les informations concernant
l'ensemble des rémunérations de l'exercice écoulé ; elle maintient ensuite le vote de
l'assemblée générale sur les rémunérations individuelles de chaque dirigeant, hors
administrateurs et membres du conseil de surveillance, actuellement prévu en droit positif.
Respectant la demande faite par l'habilitation de mettre en place un dispositif « unifié et
contraignant », l'ordonnance associe un système de sanction à ces votes. En ce qui concerne
les votes individuels relatifs à chaque dirigeant, hors administrateurs et membres du conseil
de surveillance, elle procède au maintien de la sanction actuellement associée à un vote
négatif de l'assemblée générale : le versement de la partie variable et exceptionnelle de la
rémunération du dirigeant est conditionné à l'approbation de sa rémunération totale. En ce qui
concerne le vote relatif aux informations sur l'ensemble des rémunérations versées durant
l'exercice, l'ordonnance l'utilise pour responsabiliser les membres du conseil d'administration
ou du conseil de surveillance, qui ne font pas l'objet de vote individuel : un vote négatif sur
ces informations entrainerait l'obligation de réviser la politique de rémunération. Le versement
de la rémunération de ces membres serait conditionné à l'approbation de la politique de
rémunération par l'assemblée générale suivante. Une nouvelle désapprobation entrainerait
l'interdiction définitive de verser les rémunérations suspendues.
256-1. Responsabilité civile. Défaut de convocation de l'assemblée générale. - La directive
2009/101/CE du 16 septembre 2009 tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les
garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l'article 48,
deuxième alinéa, [CE], pour protéger les intérêts tant des associés que des tiers, et en
particulier ses articles 2 et 6 à 8, ainsi que la directive 2012/30/UE du Parlement européen et
du Conseil, du 25 octobre 2012, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les
garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l'article 54,
deuxième alinéa, [TFUE], en vue de la protection tant des associés que des tiers, en ce qui
concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de
son capital, et en particulier ses articles 19 et 36, doivent être interprétées en ce sens
qu'elles ne confèrent pas à des travailleurs salariés, créanciers d'une société anonyme au titre
de la rupture de leur contrat de travail, le droit d'exercer, devant la même juridiction sociale
que celle qui est compétente pour connaître de leur action visant la reconnaissance de leur
créance salariale, une action en responsabilité contre l'administrateur de cette société, pour
avoir omis de convoquer l'assemblée générale de celle-ci malgré les pertes graves qu'elle
avait subies, aux fins de voir déclarer cet administrateur codébiteur solidaire de ladite créance
salariale (CJUE 14 déc. 2017, aff. C-243/16, D. 2017. Actu. 2537 ).