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‘‘Le mystère se concrète en monstres’’ (Hugo). La matérialite du surgissement fantastique, immanence, intermittences, inachèvement (2015)

Introduction à la journée d'études : "L’ellipse et l’excès, une poétique de la matière et du récit dans le cinéma fantastique". Université Toulouse Jean Jaurès, 17-18 novembre 2015.

Journée d’étude Direction scientifique : Philippe Ragel & Vincent Souladié (Université Toulouse - Jean Jaurès) Laboratoire : PLH-ELH L’ELLIPSE ET L’EXCÈS : UNE POÉTIQUE DE LA MATIÈRE ET DU RÉCIT DANS LE CINÉMA FANTASTIQUE Conception graphique : Benoît Colas, UT2J / DAR. Photographies : © DR. Mardi 17 LIBRAIRIE OMBRES BLANCHES Mercredi 18 UNIVERSITÉ TOULOUSE - JEAN JAURÈS Nouvelle Maison de la Recherche, amphi F417 et LA CINÉMATHÈQUE DE TOULOUSE novembre 2015 JOURNEE D’ETUDES L’ellipse et l’excès, une poétique de la matière et du récit dans le cinéma fantastique Université Toulouse Jean Jaurès, 17-18 novembre 2015 — INTRODUCTION DE LA JOURNEE D’ETUDES — ‘‘Le mystère se concrète en monstres’’ (Hugo). La matérialité du surgissement fantastique, immanence, intermittences, inachèvement « Le Possible est une matrice formidable. Le mystère se concrète en monstres. Des morceaux d’ombre sortent de ce bloc, l’immanence, se déchirent, se détachent, roulent, flottent, se condensent, font des emprunts à la noirceur ambiante, subissent des polarisations inconnues, prennent vie, se composent on ne sait quelle forme avec l’obscurité et on ne sait quelle âme avec le miasme, et s’en vont, larves, à travers la vitalité ». Les travailleurs de la mer Dans son ouvrage la Vie des Fantômes, Jean-Louis Leutrat pose un constat sans doute empreint d’un certain dogmatisme lorsqu’il affirme que « les créatures abjectes du fantastique […] consacrent la fin du fantastique fait de manière subtile quand l’indécision des frontières disparaît, quand la relation de l’intérieur à l’extérieur s’inverse » 1 . On reconnaîtra dans cette remarque la relance d’une opposition tenace entre deux grandes conceptions théoriques et définitoires du fantastique, laquelle opposition donne son titre à cette Journée d’Étude. Une majorité des théoriciens du fantastique (Todorov, Freud, Pierre-George Castex, Louis Vax, Roger Caillois) s’accordent à définir l’esthétique fantastique comme « un effacement de la frontière entre la réalité quotidienne et l’invraisemblable » 2 , causé par le surgissement de l’improbable, de l’inattendu, de l’indicible dans l’ordre logique soutenant ma réalité. Admettons en deux régimes d’inquiétude, deux polarités entre lesquelles le fantastique trouve des acceptions contradictoires. Michel Viegnes résume clairement les enjeux 3 : 1) d’un côté une conception « herméneutique ou intellectuelle », fondée sur l’incertitude et l’hésitation. Rattrapé par des phénomènes qu’il ne peut plus agréger aux lois de la raison, le regard leur infère intellectuellement une origine surnaturelle. 2) Une conception « spectaculaire ou visuelle », fondée sur la monstration. Face à l’évidence du phénomène fantastique, la sidération l’emporte et paralyse l’entendement. En nos termes, ce premier régime de fantastique ferait naître ses effets de l’art de l’ellipse, l’autre d’une logique de l’excès. 1. Jean-Louis Leutrat, Vie des Fantômes. 2. Kathryn Saint Ours, Le Fantastique chez Roger Caillois, p. 3. 3. Michel Viegnes, Le Fantastique, Paris : Flammarion, 2006, p. 14-15. Cette opposition est souvent déplacée par les chercheurs, au cinéma tout du moins, sur un axe diachronique. Pour S. S. Prawer4, Ivan Butler5 ou de Stephen Prince6, suggestion et monstration s’opposent historiquement. Si le cinéma fantastique laissait jadis les derniers mots de la terreur à l’imagination, il exposerait depuis les années 70/80 l’excès cru, manifeste et subversif de la violence et de l’horreur. L’écart serait donc a priori générationnel entre un âge de la subtilité et un âge de l’abjection, de l’ellipse et de l’excès, de la suggestion et de la monstration. Écart générationnel quand bien même, comme le rappellent à juste titre Laurent Guido et Richard Bégin, si elle a été « souvent méprisée et reléguée au niveau de la vulgarité, au profit d’une suggestion considérée comme plus subtile et complexe […] la monstration prolonge à l’évidence les objectifs du cinéma [muet] des attractions »7. Souhaitant penser l’ellipse et l’excès plutôt que l’ellipse contre l’excès, le titre de notre journée d’étude invite au croisement et au nouage de ces lignes de forces historiques et théoriques et entend investir l’imaginaire fantastique d’une approche esthétique, entendu que ce dernier légitime une puissance/poésie visuelle que tout répertoire de ses propriétés génériques nous semble circonscrire incomplètement. Dans un ouvrage intitulé Le Fantastique, Valérie Tritter conclut son dernier chapitre, consacré au cinéma fantastique, en posant une question ouverte construite sur cette opposition : « faut-il suggérer ou ‘’monstrer’’ »8 ? La peur, consubstantielle au fantastique pour de nombreux auteurs, ne nous gagnerait qu’à travers l’art de la suggestion. La nécessité pressante de l’excès monstratoire déjouerait en revanche l’emprise du fantastique suggestif sur l’imagination sensible. « Peur, terreur, horreur, et enfin soulagement. Il faut, paradoxalement, enlever la peur par l’horreur. On comprend enfin les excès du genre ‘’gore’’ »9, soutient encore Valérie Tritter. La retenue entretiendrait le mystère d’un monde que l’excès démythifie. Mais rares sont pourtant les films qui se déclareraient du fantastique et dans lesquels le surnaturel n’excéderait jamais l’idéel, sans actualisation figurative, et qui laisserait l’imagination travailler sur du vide. C’est du moins une première hypothèse que l’on peut poser ici. Quand bien même l’image ne nous intimerait qu’à douter du degré d’altération de la réalité ou de la nature de l’altérité qui s’y manifeste, elle souscrit pourtant au registre du visible en lequel cette manifestation de l’étrange se réifie, où l’incertitude trouve matière à s’incarner. Ainsi, de façon liminaire, peut-on déjà 4. S.S. Prawer, Caligari's Children : The Film as Tale of Terror, New York : Oxford University Press, 1980. 5. Ivan Butler, Horror in the Cinema, New york : Warner Paperback Library, 1970. 6. Stephen Prince, The Horror Film, New Brunswick : Rutgers university Press, 2004. 7. Richard Bégin et Laurent Guido, Cinémas, vol. 20, n° 2-3, p. 9. 8. Valérie Tritter, Le Fantastique, Paris : Ellipses, 2001, p. 155-156. 9. Ibid. 2 reconnaître que les gammes visuelles du fantastique cinématographique acclimatent souvent le spectateur à ses effets par l’accentuation, la distorsion, le gonflement, le grossissement produits des tensions entre le plein et le vide, le strident et le muet, l’opaque et le transparent, la délinéation des contours et l’agitation métamorphique. Cette visibilité du fantastique, Jean-Louis Leutrat l’identifie à sa façon dans Vie des Fantômes à partir de ce qu’il nomme les « blasons » du fantastique qui lui permettent d’identifier un fantastique « du » cinéma. Leutrat marquait ainsi une distance par rapport aux travaux précédents de René Prédal 10 , ou de Gérard Lenne 11 , qui répertoriaient les grands mythes du cinéma fantastique, pensé comme genre. Les blasons du fantastique repérés par Leutrat constituent pour leur part une série de topoï majoritairement figuratifs : le sang, les portes, les mains, les doubles, les miroirs, les portraits. Leutrat les relie par métaphore au pouvoir du dispositif cinématographique, dispositif vampirique qui absorbe la vie, dispositif de momification qui capture, retient et conserve intact ce que l’image enregistre mais sous la forme d’un corps sans organe, d’un automate mis en mouvement. On le voit, il s’agit ici d’arrimer la vie des formes au déterminisme essentialiste d’un dispositif. Or, ce mouvement des formes ne se joue-t-il pas incidemment de toute préséance technique, par la vie dont elles se trouvent animées devant le regard. C’est peutêtre en réponse à Leutrat que Jacques Aumont recommande de toujours « se souvenir qu’avant d’être un drame, un document ou un blason, l’image de film est une présence visuelle, polymorphe et qui nous atteint directement »12 (Aumont). C’est le projet figural qu’Aumont décrit ici, et que Luc Vancheri formule à sa façon : « les images […] procèdent de rapports de couleurs, de diagrammes plastiques, d’effets de lumière qui, pour s’ajuster au programme d’une fable ou au projet d’une sensation n’en ont pas moins une autonomie relative, qui est toujours libre d’ajouter des significations à la signification »13. C’est en cela que la matière de l’image nous semble essentielle pour traiter du fantastique cinématographique : les modulations permanentes, permises par le mouvement et la mixtion des images, peuvent entraîner le regard dans l’illusion d’une permanente réversibilité du visible, l’illusion d’une profondeur des choses ramenée à la surface du monde comme l’impensé à la raison, l’illusion d’une texturation des surfaces dont les ombres creusées dans leur volume révèleraient les trompe-l’œil du réel. Montrer, monstrer, 10. René Prédal, Le cinéma fantastique, Paris : Seghers, 1970. 11. Gérard Lenne, Le Cinéma "fantastique" et ses mythologies, Paris : Cerf, 1970. Histoires du Fantastique, Paris : Seghers, 1989. 12. Jacques Aumont, Matière d’images. 13. Luc Vancheri, Les Pensées Figurales de l’Image, Paris : Armand Colin, p. 26. 3 montrer le monstre ou la monstruosité, cela relève-t-il de l’exhibition ostentatoire et explicite, il s’agirait d’en remettre l’image à la plénitude du sens, ou le surgissement fantastique ne fait-il pas plutôt table rase de l’ordre figuratif, n’offre-t-il pas de délivrer les forces de la matière de l’ordre imposé par le langage, de les rendre par le mouvement de l’image à leur immanence chaotique ? En tant que signe radical d’altérité, l’excès figuratif du monstrueux, en certaines occasions tout au moins, ne fait-il donc pas cas d’une carence référentielle, d’une absence de deixis, ou d’une césure dans l’ordre commun qui priverait la raison d’une appropriation complète de son phénomène, d’une résistance de l’événement face à l’entendement ? C’est à cette indistinction de matière que Dennis Mellier accorde le pouvoir de l’effet fantastique au cinéma : selon lui « l’effet et sa cause, le monstre et la machine technique qui l’anime se confondent […] dans la fiction réalisée du fantastique. Dans l’image, l’un et l’autre se hantent mutuellement. L’image fait voir le monstre et le monstre fait voir l’image. Ce n’est donc pas le fantastique qui montre simplement des créatures, mais c’est bien celles-ci qui montrent le fantastique » 14 . Mais alors les événements de matière sont-ils sujets d’une fiction d’image autonome, figurale, ou en tant que produit d’une manifestation plastique déterminée par le régime fantastique, ne sont-ils pas légitimés par son caractère spectaculaire ? Ne conditionnent-ils pas les affects induits par le récit ? Le fantastique pose ainsi quelques principes d’indistinction entre la matière filmée et la matière visuelle (la matière dans l’image ou la matière de l’image). L’artifice du flou pouvant par exemple induire un décrochage énonciatif grâce à la connivence du regard avec le dispositif filmique, et laisser croire à une déformation de la réalité par la perception subjective d’un locuteur, ou bien référer par déformation de l’image à la présence sensible d’un être fantastique dont l’image capterait l’ondoiement spectral. Ce principe inchoatif produit alors une indistinction entre la marque stylistique, la figure, et le motif qui arguerait d’une présence invisible de la figure. 14. Dennis Mellier, Les écrans meurtriers: essais sur les scènes spéculaires du thriller, Liège : Éditions du Céfal, 2002, P. 48. 4 L’encre de l’image L’on voudrait tenir Jacques Tourneur et le cycle Val Lewton à la RKO pour les parangons du fantastique elliptique dans lequel le surnaturel n’est jamais laissé qu’à la supputation d’une présence. Mais pour en reprendre les termes à Noel Carroll, « un film comme La Féline est un répertoire de dispositifs et de conventions cinématographiques qui ont pour objet de saper notre certitude à l’égard du surnaturel […] en même temps que la preuve de son existence est avancée »15. Tout porte à croire qu’Irena est apte à se changer en panthère noire mais ce pouvoir de thérianthropie reste un devenir jamais vraiment avérée. Le doute est notamment insinué par le montage et par les réseaux plastiques qui se substituent à l’incarnation de la figure monstrueuse, si l’on se souvient de l’analyse de Nicole Brenez dans un chapitre qui s’intitulait justement « Esquisse / esquive / synthèse excessive »16. Suivie dans les rues par le silence, Alice ne se voit adjoindre, en réponse à son regard par derrière elle, aucune présence physique en contrechamp. Insidieuse ellipse. Pourtant, l’effet fantastique se joue-t-il seulement au prix de cette insupportable condamnation à l’inférence qui m’intimerait d’investir l’image de ce qui manifestement n’y est pas ? Ce déséquilibre du montage, ce raccord ‘pour rien’, dans l’économie utilitariste du cinéma classique, expose cette carence comme une saillie de l’image, dont l’intensité se veut événementielle. Alice dans La Féline ou Teresa dans L’Homme Leopard se tournent vers un espace vide. Vide ? Une large partie du cadre est pourtant rempli d’une masse noire, « excessivement noire »17 dans les mots de Noel Carroll. Le doute s’appuie sur cet excédent de visible que constitue le noir, en tant que réification de l’informe. Le cadre ne se vide de tout référent concret que si l’on considère le noir comme un agent de néantification. Caroline Renard décrit que « le travail de la nuit réside dans sa capacité à faire disparaître les formes, à les gommer de l’espace, à les dévorer. Liée à une esthétique de l’effacement en douceur ou de la disparition brutale […] la nuit est une matière-temps qui ronge le réel et conduit à sa perte, au trou noir. […] La nuit n’est pas un espace ni même une durée, elle est la matière qui s’infiltre. Du noir en formation »18 . Matière qui s’infiltre et dévore les formes, l’obscurité gagne donc une qualité de substance, une encre noire qui emplit le cadre tout autant qu’elle le vide, et contient le visible en le décontextualisant dans un espace plastique et en soumettant son mouvement à l’autonomie d’une temporalité événementielle. Un temps qui n’est pas une durée donc, mais la présentification d’une métamorphose de l’image arrachée à la linéarité temporelle du récit pour gagner une épaisseur monstrueuse qui ondoie avec intermittence sur les corps, les touche et les défigure. 15. « A film like Cat People is a repertory of cinematic devices and conventions for undermining our certainty that the supernatural is at large, at the same time that evidence for existence is being advanced ». Noel Carroll, Philosophy Of Horror, or Paradoxes of the Heart, New York : Routledge, 1990, p. 152. 16. Nicole Brenez, De la Figure en Général et du corps en particulier, Louvain-la-Neuve : De Boeck, 1998. 17. « Exceedingly Dark ». Philosophie Of Horror, op. cit., p. 153. 18. Caroline Renard, « La nuit : durée, espace, noir », Cinergon, n°8/9, 1999, 2000, p. 49. 5 The Leopard Man Isle of the Dead Paura nella città dei morti viventi 6 L’éther de l’image La substance volatile enveloppante dans laquelle se dissolve le visible dessine parfois d’inquiétantes formes qui lui confèrent le paradoxe d’un relief évanescent. Associé au fantastique, l’effet trouve racine dans le roman gothique, dans les créatures brumeuses d’Ann Radcliffe ou dans les brouillards Lovecraftiens, auxquels la physionomie des créatures fait explicitement référence dans Monsters. On retrouve le monstre chimérique surgi de la fumée dans Rendez-Vous Avec la Peur (Night of the Demon, Jacques Tourneur, 1957) ou dans le brouillard maléfique de Fog (John Carpenter, 1981) ou dans The Mist, au creux duquel sont dissimulés des revenants maudits. Dans ces derniers, le brouillard redouble le huis-clos en réduisant la possibilité d’un hors-champ salvateur. L’univers filmique est alors en proie au surgissement endogène de cette menace monstrueuse, laquelle ne départage pas l’intérieur et l’extérieur, ne surgit pas depuis cette inépuisable réserve d’altérité que constitue le hors-champ mais prend en fait consistance de ce tourbillon moléculaire qui cache, en même temps qu’elle la révèle, sa physionomie confuse. Le brouillard fait écran à son apparition en même temps qu’elle lui offre une substance d’avènement plastique et concrétise son impermanence par nature. La forme est exhumée de l’informe comme un manque à voir qui gagne sur la précarité figurative par l’exposition de ce débordement, de ce recel de visible, de cette distance oculaire face à laquelle nous demeurons impuissants et grâce à laquelle l’image opaque conserve une origine inconnue. Le monstre gagne à nos yeux sa dimension et son volume par le débord et par l’opacité que lui procure le dispositif brumeux. La terreur ou la stupéfaction qu’elle veut provoquer provient de cette indiscernabilité physique présentée comme un triomphe aspectuel engendré et entretenu par les limites imposées à notre regard. Il incarne l’excès par l’aporie. 7 Night of the Demon War of the Worlds Monsters The Mist 8 Le magma de l’image Est désignée ici le Golem, la matière sans forme, inachevée, en constante mutation, en laquelle se dessine ponctuellement des traits qui ont ceci de potentiellement rassurant qu’ils constituent un repère, qu’ils réfèrent à une présence humaine, et ceci de terrifiant que ce reliquat d’identité est inféodé à la vie indicible de cette masse grouillante qui refuse de se fixer. La vie magmatique des formes échappe au déterminisme figuratif (la constitution d’une figure mimétique armée d’un sens transparent) pour laisser cours à un déterminisme plastique (de l’antécédent référentiel découlent des figures variables qui lui sont conjointement affiliées par des relations de mimétisme et de dissemblance et qui tendent à la concrétion d’une irrésolution figurative qui vaut pour figure même, non pas de l’irreprésentable, mais de l’altérité que porte en elle chaque image). Le magma métamorphique qui résulte de l’absorption, de la contamination, de la transfusion des éléments et de leur moulage organique réifie l’intermittence entre deux états comme un événement et un progrès. The Thing, From Beyond : La condensation matérielle des images s'accentue au point de jonction de deux types de réalité mixtes et hétérogènes dont le figuratif ne peut contenir et présenter le pacifique mariage mais seulement dévoiler sa propre mise en crise. Il en résulte une image à la fois transitive : elle s'ouvre vers un endessous la représentation, un en-dedans du corps, elle retourne le visible comme un gant ; et une image intransitive : elle concrétise en une abstraction plastique l'irrésolution du monde et la duplicité de sa représentation, à laquelle le sens inauthentique du récit offre la meilleure des couvertures. 9 The Thing A Nightmare on Elm Street 4: The Dream Master From Beyond The Blob Blob 10 CONCLUSION Le doute qui justifie la désignation d’un degré d’excès ou de retenue, d’abondance ou de réserve, de grossièreté ou de finesse dans l’expression du fantastique ne vient-elle pas de l’assignation déclarée ou non des modulations plastiques de l’image à l’univers diégétique ? L’excès, dans sa mise à nu de la réalité matérielle, est taxé de gratuit lors même qu’il désigne explicitement l’intérieur de l’image et la factualité du représenté. Les digressions poétiques et visuelles qui n’ont pas d’objet référentiel déclaré sont en revanche considérées légitimes puisqu’elles en appelleraient à l’imaginaire en désignant implicitement l’extérieur mystérieux de l’image et l’abstraction de l’immontré, dont on est appelé à déduire le caractère irreprésentable et donc épouvantable. Dans tous les cas, il nous apparaît que le fantastique se fait le sujet d’une littéralisation narrative et figurative du mouvement de la matière par la mise en récit de ses mutations, de sa mixité, de ses aventures métamorphiques, lesquelles se donnent comme voie de conséquences des ruptures de l’unité filmique par les événements qui s’y manifestent. 11