L'Aretin
L'Aretin
L'Aretin
/#'-^
dVof OTTAWA
39003002^91610
^r
-^^s'^m^iiT
.^
rn^m
L'Artin
LES RAGIO>'AMENTI
l'oRAZIA
LETTRES
LE PHILOSOPHE
SONNETS
LUXURIEDX,
APPENDICE
:
SATIRIQUES
OU LAUDATIFS.
BIBILIOGRAPHIE
ARETINESQUE
VIE DE l'aHTIN
PARIS
MERGVRE DE FRAiNGE
XXVI, RVE DE COND, XXVI
L'ARTIN
. . .
M.
REMY DE GOURMONT
le
volume.
i
1
vol,
vol. vol. vol. vol.
uiie notice et
et
un
portrait
1 4 1
un
portrait
et
un
portrait
mont
et
un
1 1
vol. vol.
STENDHAL (henri
Lautaud
et
beyle), avcc
un
portrait d'aprs
Sodermark
vol.
CYRANO de BERGERAC, avcc uuc Hoticc dc Rcmy de Gourmont, un portrait et deux gravures anciennes
SAINT-SIMON, avec une notice
et
1 vol.
d'Edmond Barthlmy
1 vol,
d'Albert
Keim
et
un
d
Vanloo
Notice de
vol
Remy
1
de Gourmont
vol
le
volume.
THOPHILE, avec
le portrait
.
de Danet
et
une notice de
1
Remy
de Gourmont.
vol,
vol.
Remy
de Gourmont.
Remy
Ad,
de
1
Gourmont
TRISTAN
et
un
portrait
vol
l'hermite, hvcc
unc
notice
de
Van
1
vol.
(le
Charles Verrier
un
Ghampaigne.
vol.
L'Artin
LES RAGIOfAMENTI
l'oRAZIA
LETTRES
LE PHILOSOPHE
SONNETS
LUXURIEUX,
APPENDICE
:
SATIRIQUES
OU LAUDATIFS.
BIBILIOGRAPHIE ARETlIfESQUE
VIE DE l'aITIN
QUATRIBME EDITION
PARIS
MERGVRE DE FRANCE
XXVI, RVE DE COND, XXVI
MCUXTU
/\.
PIERRE ARTIN
Un
dans
val
c'est la
Chiana.
les
Elle est en
vrai dire,
de son vivant
mme,
les
renomme
pchs de son
l'auteur
On ne comprenait
pas
comment
les
Trois
li-
comment
ce
dbauch
qui devait
t cause
le justifier
de sa condamnation.
En
fait
de gnie, on
ne
lui
mme
la plupart
de ses
nom seul
plus bn-
le
En
Italie, les
me
noncent son
du bout des
Chez
monde accouplent
;
sa
mmoire
du marquis de Sade
de Musset
;
les collgiens,
le
celle
petite
d'Alfred
pour
peuple
et la
bourgeoisie, son
nom voque
Boccace
la sant
et
et la
la varit est
arme que
l'on
possde
les
postu-
mme
si le
PIFURE AnK.TIN
pas t
crit,
Tpoux
el
sur
le
Mo-
l'Amour
Pan-
occidental (2).
11
est
On
les
l'invoque ou on
moment
En
Italie
mme
t traduits
en franais
lesquels
pu citer Rabelais et Molire comme des auteurs sur Divin a exerc son influence, il serait injuste de ne pas tjouterque, de notre temps, Hugues Rebell, grand lecteurdes publirations de Liseux, devait l'Artin une trs grande partie de ses
mrites d'crivain,.
Toutes les nuances des attitudes galantes ont t traites avec tant d'nergie par le clbre Pierre Arlin,r qui vivait dans * le quinzime sicle (sic),(\Wi\ n'en reste rien dire aujourd'hui. Thr<^e philostopfie, 2^- partie. Celte ojiinion, exprime dans un des ouvrages les plus licencieux du xviu* sicle, reprsente bien l'ide que l'on se fait encore en gn'al du Divin.
(2)
<*
l.*ARTIIf
le texte
accompagn
d'aprs la-
(i),
mme
modle au
D"^
allemande
ques europennes
lui
appartient
pas attribue.
dant
la nuit
du
du jeudi
la
le
au vendredi
saint,
dcou21 oc-
verte de l'Amrique, et
mourut Venise
tobre i556.
Avec une
prim de
la
Pie-
(1) Cette traduction fut d'abord publie, sans le texte italien, en dix volumes, 1 879-1880. Vers la fin de l'anne 1908, quelques librairies ont insr leur catalogue l'annonce d'un ouvrage que j'ai pu avoir entre les mains et qui est de la plus grande raret, puisque, imprim par le traducteur, A. Ribeaucourt, il n'a t tir qu'
i5 exemplaires.
le
JUau
in-8.
Dialoqiies de P. Artin, surnomm vridiqae le divin Paris, 1884, 4 vol. Ribeaucourt imprimait ses traductions lui-racnae, sur une
Il
s'agit des
le
des Princes,
presse bras.
PIERRE ARETIN
tro
qu'on
avait
abandonne au-
tilhomme d'Arezzo
saient nullement
les
nomm
bibliographes de
Messer Pietro
Nationale
accorder ce
nom
qui,,
de toute
qu'on
l'a gratifi
de
noms comme
le
Dlia Bura, ou
On
sait
maintenant que
pre de l'Artin
tait
gard
(i).
En
i55o,
un
certain
Medoro Nucci,d'A'
le
le
protge,
prsente
Medoro Nucci
qui,
lui
reproche d'avoir
Raphal lo du
les
Orbino,
le
TrentunOy
la
Puttana Errante,
Six
c'est--dii\i
10
Voici donc
nom du
envoie au duc
:
Gme
((
la lettre
en
crit
la
...
mention de
glorifie
il
me
du
me donne pour
m'avilir, car
ensei-
;^ne ainsi
fils
sem-
blables celui
Arezzo.
Quel orgueil
Ne
un
Ce sont ces
Elles
qu'a retrouves
M. Alessandro Luzio.
le
pr-
nom
et l'tat du pre de l'Artin. Et nous ne sommes pas pour cela plus avancs au sujet du nom
Il
au
demeurant que
tre
le
nom.
Il
se peut
galement que ce
est
ft le
nom
de
la famille
du Divin. Luca
un nom patronymique
trs
en
Italie,
ne semble pas,
que ce
soit
touchant le
nom
de son pre
en
ait fait
mention. Cependant, je crois tre en mesure d'indiquer dans un giadicio retrouv et publi par
PIKRRE ARKTIM
M. Alessandro Luzio
Divino mentionnait
(i)
un passage dans
le
lequel,
le
message du Nucci,
nom
paternel en quivoquant.
Au temps
florissante.
Au commencement
du
de chaque anne
les
Avec
cette prescience
et
rle
un prcurseur du
parti qu'on
pou-
de ces
Il
libelles
publique.
crivit plusieurs
ques
et
d'ailleurs
ments.
cette heure,
on possde en entier
celui
qu'a publi
et
qui
du
xvi sicle,
un Allemand
les
et conserv
le
Vienne, en
copiste allemand
C'est l'avis de
eu sous
yeux un imprim.
En
effet,
on
de I'Artin. Et cependant,
raisons
:omme
(i
1
Uno Pronoslico
;d illustrato
L ARKTIN
d'effet sur
Topinion publique
taient destins)
que
s'ils
taient rpandus
l'on sait
un
que l'Ar-
fait
manuscrit de
Vienne, affirmeque
natre
le
mal
l'italien et n'aurait
Il
rectement un manuscrit.
les
qu'il
dans
le
parti duquel
allait
ddie-t-il
tianissima et
l'intitule
MDXXXIIII composta da
PietroAretino Flagella
Pourquoi
Il
s'appellerait-il
cinquime vanil
giliste ?..,
donne
eut
la clef
Principi, qui
commence
En
effet,
ainsi
comme ascendants
(i).
Luc,
Marc
et
Mathieu..,
le
Luc
est cit
gnralement
Ar-
quatrime parmi
(i)
Marco
Matteo
,.
PIEARE AFMTIN
lirij fils
l3
lui, peut
si
cinquime vang^liste,
le
nom
de son
cordonnier
et
pour cela
il
mention
du nom de
On
lui
a reproch de ne pas
lesar-s
du Berni touchant
le
bonhomme,
au Divin.
Il
soit
s'il
n'est taj
par des
documents
irrfutables. Mais, ne se
manifestant
(i) On pourrait aussi expliquer ce jeu de mots en avanant que rorgueilleux Art'lin. a voulu se moquer des quatre grandes familles vnitiennes dsignes sous le nom des quatre vanglisles. C'taient les Giusliniani, les Bragadini, les Cornari et les Bembi. Le cardinal Bembo tait un ennemi du fils du cordonnier Luca. Et
jouant sur ce
donner comme le cinquime un Bembo, quatrime vangliste. Ceci renforrorait l'hypothse que Luca srail le nom patronymique
nom
l'Artin pouvait se
bien
lie
notre l'ierre.
l4
l'artin
ramour
filial
du peuple nomme
a conclu
Taima tendrement. On en
Monna
pendant quelque
si-
et certains
artiniens voudraient
sainte
!
faire
une
Il
une prostitue.
au courant de
la vie
n'est pas
que mena
de sa beaut dont
artistes qui
de nombreux
voulurent
l'origine
rendre immortelle.
En somme,
qui, lui
nullement monstrueuse.
On
est loin
du
sacrilge
et
une
bguine, faisait de
mme,
le
selon la
pre de
du mal, encore
venir, soit
un
On
sait aussi
Il
PIERRE ARETIN
les
romans
Il
il
alla
tu-
Un
livre
dcouvert
la
Marciana
la prcocit poti-
qu'il
se des-
pour
les arts
la fin impresso in
nelMCCCCCXI
cet avertissement
a di
XXII
di Zenro. L'Artin
peinture.
Un
il
est
question
tait
d*un
Prugin,
que TArtin
alors Prouse.
Un
novembre i532,
:
fait
louange,
je
l'ai
un temps comme
[entendu dire,
Plutt que de vouloir
devenir, petit
misrable,
De
Matre, Pote.
l6
l'artin
En
nu
vice
Rome.
Il
y
Il
et craint
entra au ser-
du pape Lon
fait
et
Aprs avoir
pour
quitta
d'Adrien VI,
le
interprtes
Pasquin, l'Artin
Rome
avec
cardinal et
lu
ne revint
le
que
de
pape
sous
nom
Clment VII,
3i ans.
Il
le
jouissait la cour de
et
Clment de beau-
coup de considration
l'esprit
du
pontife
i).
En 1624
est
en guerre avec
le faire
assassiner par
Bolonais Achille de
la
Volta.
peine remis
de
Rome pour
aller
Rome,
assiste
au sac de
la ville.
et l'Artin,
ne se sentant plus
il
arrive le 25
mars
dfi-
1627
(1)
et s'y tablit,
un adieu
Baschet,
t.
Documenli
111, a
Archivo sto-
rico ilaliano,
partie.
nilif.
C'est alors
il
qu'homme
:
libre
par
la
grce de
le
Dieu
que
s'intitule
le
Vridi-
et le Divin.
Pourquoi,
demand Jacobus
avec
le
Gaddius
con-
Je ne sais.
signifier
il
ne voult
qu'il
de Dieu, en foudroyant, au
les ttes les
le
moyen de
s'enrichir
dans
celui
de Charles-Quint,
respect par
les
le roi et
de
On
le
craint,
il
on
le flatte,
il
a de
est
l'abri et
Ils
ses
encore.
socit.
Son nom
Il
habite, sur le
Canal Grande, un
somptueux
dtruit aujourd'hui.
Au
d'intendants et de
majordomes, ce sont
maison
;
on
les
choisit
la
res
matresses
(i) Cit
comme
commensaux, dans
no-
l8
LARTIN
Sa maison
C'est une
les let'
pour
de
affams
et
chevaliers
ce qu'il
donne tout
crit
flatteries,
l'ad-
plume
lui
si tin-
en quelque sorte
pu voir en
un prcur-
mode du temps,
il
lesquelles
chapeau de
cardinal.
11
non seule-
ment en
Italie,
Il
Allemagne.
aux
artistes
et entasse chez
uvres
d'art.
le
A peine Venise,
son compre
et
rencontre
Titien qurdevient
pre-
marquis de Mantoue.
encore
du peintre
et
du
peut
citer
le
Sansovino,
Sbastien del
PIMVUE ARETIN
ig
Sodoma, Jules Romain, Giovanni da Udineet mme Michel- Ange qui, s'il semble n'avoir
Piombo,
le
lo
Flau
et la
Le Roi
plume de
l'Artin les
nommt.
Dans
jour
le
chaque
la foule
m-
ganymdes
rit
et
plaisante et
est
l'homme
sonne.
Il
le
plus libre
du monde,
il
ne craint per-
ont
donn des
Il
mais ne
se
croit le droit
de changer de parti.
a consciencede
On
a des
n'est
que trop
et
Il
ne mnage rien
dit
hardiment sa pense.
Il
dans
cur de
la chrtient le
il
couteau ottoman.
par droit divin.
les flagelle
lui tait,
pour
ao
pas
trouver de meilleur
Le Divin ayant
une dans laquelle
fant, incapable
et
se
promne en despote
faisait dire
h( n en-
bon de
cette
bont qui
Jean des
Bandes-Noires qu'elle
tait la
source de la plupart
de
fait,
il
le
il
monde
est trs
soit
heureux aules
tour de
lui.
Pour
cela,
humain avec
femmes de sa maison,
ner cela
mme
quoi
il
tient le plus.
Le regard du
Divino va de
la
s'il
aime
il
beaucoup
les
femmes
et si
deux
fois
au moins
connu
le
vritable
et
amour
mme sans espoir, il ne mprise pas des plaisirs qui, comme aujourd'hui mme, choquant
pectueux
l'autorit,
ne faut
Sodoma, que
le
Berni,
le
Tasse,
PIERRE ARTIN
21
lemmo
la cuisinire,
comtesse Matrina, de
la
la
vertueuse Angela
Serena, de
malheureuse
et frivole
Perina Ric-
a des
et s'occupe
charm
pape
le
m baisa au
dit
confra l'ordre
magnifique
et
TAmmirato
qu'on
aurait difficilement uu
un
Les fables
circonstances
les
qui
entourrent
la
mort du Fla-
On
a retrouv
un tmoignage
fait
notari et revtu
du firman ducal
la
probablement pour couper court aux bruits calomnieux qui recommenaient courir sur
l'Artin.
Il
la
mort de
58 1, c'est--dire ^5
L AnETlN
ans {fprs
la
mort de
tiennement TArtin
subite,
dit qu'il
mourut de mort
et
que
il
le
se
confessa et
et le
comme
C'est avait
il
Ta vu lui-mme.
n'tait
que TArtin
le
pas un mcrant.
Il
un confesseur,
se
la
moque
ce
respecte
infiniment
faire
religion. Jules
pas voulu
un cardinal. Et
refus
parat
avoir eu
pieux
et les ornait
avec la
le
pro-
le
trne ponti-
L'Artina
laiss (i)
I1EKIIK
AUETIN
l'Art, ses
il
pamphlets
et ses
posies de circonstance,
vers,
Orazia^
et cinq
comdies en prose
il
Mariscalco^la Cortlginna,
il
Vlpocrita^ la Talanta^
On
a bien avanc
t le
prototype du Tartufe:
VOrazia. Cet ouvrage a longtemps pass inabien que TArtin n'ait pas
peru,
manqu une
d'uvre.
Il
au demeurant, que
certainement inspir
la
pice de
Lope de
Ve^a. Ces
du mpris que
fait
les
ennemis du
VOrazia
tote).
Le thtre
italien
du
mod-
Tragdie
semble que l'Artin ait joui d'une grande vog'ue parmi les du Dauphin.Dans son ouvrage snr \ Artin (Hachette, i8g5). M. Pierre Gauthiezcite une pice dout le Divin est un des personnages le Courtisan parfait, tragi-comdie par M. D. G. B. T.
lettres
:
24
l'aRTIN
le
Drame popu-
il y eut en Italie deux sortes de comdies qui ne se mlrent point. La comdie de la rue se main-
tenait sous \e
elle
log^iques
relles
de masques
et
gracieux ou
mles de fous
vessies de porc.
A ct de
prosprait.
et
la
On
en plusieurs genres
poser.
fut
l'imitation
de
en
latin,
Rome,
duisit des
uvres en vers
en prose
La
de ce
Comdie de Caractre vraiment digne nom et s'levant au sublime comique est due
seule
:
Machiavel
c'est la
Mandragore, un des
Ecrite produit
chefs-
d'uvre du thtre
italien.
La Comdie Populaire
un grand
nombre de
crites
La Com-
PIERRE ARTIN
sS
celte
et
poque avec
les
Bruno
et surtout
et
deTA-
abondent
le
Divin aime
comdie
et
comme
son style
mme aux
et
comptent parmi
les
gue considrable.
tentiels, parle
Il
paraphrase
les
psaumes pni-
de
la
de la vie de Sainte Catherine, Il a compos une uvre chevaleresque dontles strophes se comptaient
par dizaines de mille, mais
il
la dtruisit
lui-mme,
Lar/rime d'Angelica ou
la
comme Orlandino,qui
et l'Astol/eide,
eut
un
trs
grand succs,
dont on
la Biblio-
et
iVo/i ce
20
L^AHlirlN
On a dit de
rArlin
qu'il tait
un grand prosateur,
cette
le
Divin a t,
pour
le
quelques
les
(
beaux morceaux de
Victor
Hugo, dans
Pour ma
ltiments.
moins en
comme
la
Puttana
l'on at-
rrante
(2), //
me
devait plus
tard siger au
de
hautes fonctions dans le gouvernement de la Rpublique vnitienne, ayait vingt ans lorsque Franceso
Zeno l'amena
Et
l'Artin
pour que
:
celui-ci le formt.
ma
la
Puttana errante,
la
ressemblance avec
les
je
gnie artinesque
mme.
il
Voir
con-
clave e VeAezione di Adriono VI pub. et ill. da Vitlorio liossi. Palermo-Toriuo, C. Clausen, 1891, in- 16. (2) La Putlana errante est un pome en quatre chants qui n'a rien voir avec l'insipide dialogue de Marguerite et de Julie, qu'on a aussi intitule la Puttana errante. C'est dans celte plate lucnbration, qui n'a rien d'arliuesqae, que l'on trouve ruunaeratio de 35 poilures.
PIFRRE AHETIN
2'J
et,
pense
dsagrmenls en
mrtrices.
Il
de
mes au compte du jeune Veniero qui ne demandait pas mieux, et qui, sans doute, tait trs fier de
se faire passer
Puttana
est l'uvre
du Veniero, son
creato,
il
au
nom du
la
que
il
et ces coquetteries
Au
fond, l'Artin
son discip'e,
il
reprend
et
mieux
les
ve-
Ragio-
namentiy y mentionnant
Putain errante en se
Tarif des
Putain er-
la
mme,
(i)
imagination.
Cette
composition,
dont
le
Dans
il
le
errante et
il
Filosofo, l'Arlia mentionne le pome de la pulain ne cite pas voloritiecs les ouvrages contemporains dont
28
titre italien est la
l'arTIN
a t vraisemblablement
compose en manire de
partie des
la
entre la Premire et la
Deuxime
Ragio-
namenti, L'Artin
la
mentionne dans
premire
mises
crit
les trois
ouvrages
dont
et
il
a t question,
leur a
beaucoup emprunt,
Il
tire,
en
Il
le retar-
dans cer-
de Musset
c(
Il
dans
Je
que
mme
des
contemporains. Sans
autres
lui
de
Boccace
et
Italiens
dont
lecture a
il
donnant une
citer
direction,
de ne pas
l'Es-
I'Iehuf,
\urTiN
29
immdiate sur
le
talent
Dlicat,
connus, vivait en
Italie. Il tait
Rome
en
mme
et
alla
compost
une nouvelle
qui,
dramatique
la
Lozana Andalusa,
la
fameuse Clestine.
il
comme
apparat
de ses dialogues.
et,
Il
a conn la
Lozana
tait
il
Andalusa,
sans
un
lettr et
un savant. Quoi
en
soit,
ne
le
La Lozana Andaliiza
pendant
le
fut
compose
Il
Rome
sjour qu'y
l'y
fit
Dlicat.
la
retoucha
Venise avant de
tiers ce
longtemps donn
a comme titre le
En
tout cas, le
Zoppino
(i)Cf. Dialogue du Zoppino... altriba Francisco D^licar'o, auteur de la Lozana Andalasa... Paris, Bibliothque des curieux
(tgii),
un
vol. in-i2,
3,
3o
le
l'artin
monde
au
Mamotreto ou cahier
XXXIX
le
de \d.Lozana
Anda-
Six jourAndaluza
composs
Rome
et
retouchs Venise.
mme
et
de
de
mme que
t le
Francisque
la
la
Dlicat
Clestine,
modle de
Lozana Andaluza, dont elle diffre de faons. Mes hypothses sur l'inlluence et
reste,
toutes les
les
ouvra-
mon
et le Tarif.
de
Venise, attaquer
rtrices
de
la
*
On
a pens
que
le
Divin, dont
le
nom
est
popu-
PIERRE ARETIN
laire
3i
en
On
choisi
pour
me
le
On
donner
les seize
Sonnets
les
le
ouvrages de l'ArtiUjle
non
plus ignor.
On
sait
la
que
mort
Romain.
l'histoire
Raimondi,
ils
ont compltement
On
les fac-simils
d'une srie
italien,
Raet
Rome
sur les dessins de Jules liomain, i^ravcs par Marc-Antoine. Im[)rin cent exeuiplaires pour I-i<lore Liseux et ses auiis. (Paris, 18S3). Cf. aussi l'uvre du Divin Artin... (ia-8, Paris, Biblio-
32
l'autin
et
qui auraient t
ne
s'agirait-il
faite
d'aprs
description de
Bonneau
et
l'on
que
cette
livres
ont t rendus.
La Bibliothque Nationale en possde un exemplaire qui se trouve l'Enfer, sans toutefois avoir
t port
au
catalog-ue... Voil
donc un
livre
qui
(i)
l'Artin
(I
sonetli lussuriosi
di
Pietro Aretino). Texte italien et traduction en regard acconopagne de la notice et de commentaires de Is. Liseux et publis pour la
premire
fois
avec
la
Romain
pet. in-4 oblong, d'aprs des documents orie;inaux (Paris, 1904), cartonn, imprim en deux couleurs, encadrements typographiques.
160 pages de texte, 16 fac-simils et 17 gravures en taille-douce. Ces 17 gravures comprennent un frontispice et les gravures acheves par un artiste morierne d'aprs les calques. Ce livre a t publi par l'diteur Hirsch. Ajoutons que les commentaires supposs d'I. Liseux sont, en ralit, de l'rudit Alcide Bonneau.
PIEIVKE A IV t. r IN
En
se servant
du recueil du Cosmopolite
a
(i),
Alcide Bonneau
les
autres sonnets
il
n'y
Ainsi
la
Go-
ment
pre-
la
Tarijfa
dans ce Recueil, les (i) Alcide Bonneau fait remarquer que Corona di Cazzi, Sonnetli [sic] Divi Aresonnets sont intituls dans le Cosmopolite on trouve fini. Ce n'est pas tout fait exact Divi Arelini SonnetLi et ce mauvais latin, qui choquait Alcide Bonneau, devient plus macaronique encore au titre du premier Sonnet Divi Aretini Sonnello primo.
:
:
Le recueil dit du Cosmopolite est peu connu. En voici le titre Recueil de pices choisies rassembles par les soins du Cosmo:
polite.
Anconne,chez Vriel Bandant, l'enseigne de la Libert J'en ai vu une rimpression (i835), qui prsenie quelques diffrences dans le titre. Un des exemplaires, conserv
MDCCXXXV.
l'Enfer de
la Bibliothque Nationale, porte cette note manuscrite Ce Recueil a t form par M. le duc d'Aiguillon, pre du dernier mort, imprim par lui et chez lui en sa terre de Verets, en Touraine, et tir au nombre de douze exemplaires seulement. La femme de son intendant, qu'il avait fait prote et qui tait dans un entre-sol o elle travaillait, lui cria un jour Monsieur le Duc, ? l\ rpondit gravement faut-il deux R aa mot F... // en vaudrait bien la peine, mais Vusage est de n'y en mettre qu'un. L'Epitre M"' de Miramion, qui est la tte de l'ouvrae, ainsi que la Prface, sont de M. de Moncrif. On trouve la fm du volume une traduction eu vers franais des Noeis Bourguignons qui n'existe que l. Ce recueil d'ordures est sans contredit le plus complet et le plus rare qu'il y ait il renferme beaucoup de pices qu'on recher:
:
34
L*ARTm
dlie Puttane di Venegia, anv me parat avoir t compos au moins en partie par l'Artin. Les Sonnets luxurieux de TArtin sont queue, colla coda.
On
dont
premier
vers
le
n^est
qu'un
simple hmistiche
rimant avec
que d'un
Dans
net
II.
les
la
queue du son-
FArtin
meure.
La queue du Sonnet IV
Je ne m'en
Signera chre, d'une aussi douce
blise,-
irai pas,
Quand
bien
mme
dont
le
dernier vers
l'''"
de
Franois
nous renseigne sur l'poque laquelle furent coinposs ces sonnets. C'est vraisemblablement vers
fin
la
de 1625
et peut-tre
ms du vivant de TArlin
et
l'Iiistoire
du scan-
PIERRE ARTIN
35
dalequ'ils causrent
si
Rome
Au
personnage
Fra Mariano.
Il
s'appelait
Mariano
de L^iurent de Mdicis,
de ses joyeux
caprices w, en
ft
le
Frate
del
du Plx)mb
tait
Bramante
mort de
lui
le
celui-ci,
Benvenuto
le
pour
succder, mais
peintre
lui prfra
Sebastiano Luciani,
del Piombo,
cause- de sa charge.
Mariano
dans
vonarole
et
un tmoin de
la fin
qu'il
chargea
et
aux artistes. Le
l'glise Saint-
pape
lui avait
il
Silvestre et
la
>''
partie des
36
l'artin
Rome
sur
le
Monte
Cavallo.
des CourSf'
fait
montre
la
fin
la
d'un festin
la
cour pontificale
dansant sur
allumes. Lon
dont
les
Alfonso Pauluzzo ou
Pocolucci, ambassadeur
rare,
Rome du
duc de Fer-
Alphonse d'Est,
lui
dcrit dans
une
lettre
date du 8 mars
1619 une
reprsentation des
cdent
et
l'Ambassadeur
dit
que
le
dcor
un rideau
de chaque ct de
la toile,
il
la toile, et puis,
au milieu
disait
:
de
Ce sont l les caprices de Fra Mariano. Il lait trs gourmand et, dans la Cortigiana, TArtin fait dire au Rosso par un pcheur qui lui montre quelques lamproies
tes par le souper
:
d'tre acheoffrir
Tioja
faisait
et tous ces
Lon
PIBRRE ARTIN
87
l'ap-
becs%ues,
les faisans^
tait
paons
:
et les lamproies.
il
Sa voracit
inima;
ginable
ne
faisait
got
un seigneur parvint
Une
mangea
tout
un
froc
et plein
de crasse.
n'tait
pas
le seul, d'ailleurs,
excentricits
la cour de
frre
Lon X. L'Artin
aussi
un autre
dont
la spcialit tait
de man-
Un
pous:
manger
moins comestibles
journaux,
etc.
botes
avait
d'allumettes, crayons,
Il
mme un
passant ensuite
il
ceux de
l'assemble.
Un
soir d't,
rveilla
russit s'emparer
du chapeau
38
dlectant, tandis
que l'Anglais,
en courant par
effray, se sauvait
n'tait
rnoins farceur et la moindre de ses espigleries, c tait, a table,de renverser les sauces sur les vte^ nenls des convives. Ses traits d'esprit avaient un grand succs, c'est lui qui
pas
surnomma Lucques
qu'il
y pleut toujours.
anticipe de
.o:L^ff::f
"'"^"^ -pitaphe
Au
Ce
dehors porc et dedans puant Tandis qu'iJ vcut, maintenant infecte un cimetire.
n'est pas d'eau bnite ni de psautier faut le munir,
!
excelent.
Uu,
ArZTlT
Arrose -le
Passant Mais seulement, """ '='"'='= ''erMe sou esp Ht. de bon vin et raisonne sur
zro.
il
la religion,
triste jeu,
un plus
'
0^11'"""' Que
I
'''
"""''" "
.1
et
tenait
pour
l 'i^ma L me
!> tu
^^ I'"""" conclusion, -. ( au feu, ,1 apporta de la renomme en bas ne peux tomber mort, tudie le pas.
Fra Mariano aurait pu lui-mme composer cette le plaisant pontife, son bienfaiteur, auquel .1 survcut. Selon lun des nombreux
ep.laphe pour
bruits
PIEUUE AUTIN
Sq
il
lui cria
Sou-
Cette bouffon-
se soit livr.
Au demeurant,
c'tait
un
brave
homme
1
de
53 1
il
difia tout le
monde. M. Arturo
Au
sonnet IX,
il
sonnages de XdiCortigiana.W
mentionne encore
dit
dans
les
Ragionamenti^ o laNanna
veuve
si elle
que
Rome
fait
resterait
perdait
le .
Rosso qui
Ortensio Lando
((
de
la
renomme
et
il
vivra ternellement.
Le
mme
rtin
C'est
le
Divin,
couvrait de cou-
4o
L ARETIN
est
un des
de
mou-
Mars, le plus maudit de tous les poltrons. On ne se place pas ainsi sous une femmelette Et l'on ne f... pas Vnus l'aveuglette
Avec
Et vous, Signora, ma douce pouse, Dans le mirely vous ferez baller la chouze En remuant le c. 1 et en poussant trs fort.
Cupidon
Il
est
mon
bardache, or
il
est votre
les
fils,
et
mes armes
la
les
garde
Pour
consacrer
un personnage nomm
Ercolc Rangone.
l'illustre famille
des Rangoni.
avait cette
nom
PIERRE AKETIN
en i5i2, aprs
la bataille
de Ravenne. Le jeune
homme
s'offrit aussi
l'accompagner en France.
Aprs sa
Rangoni,
le
Modne.
Eicole,
Il
Rome,
jeune
le
et,
nom
I"
le
de Lon X,
le
protonotaire apostolique.
juillet
nomma
cardinal,
le
mentionne dans
et
de Fra Mariano
dans laquelle
est parl
:
de
la
Je fus
et
Monseigneur de
iBig,
il
Rangoni me
entrer...
et
En
fut lu
tait,
l'vchd'Adria
dmissionna en i524-Il
et
en
i520,vque de Modne
d'un vicaire par lequel
il
fit
un
les
synode qui
est
le
premier dont on
possde
Rome, en 1527, au
castel
moment du
Saint-Ange
sac,
et
il
suivit
Clment VII au
finit
pondants de l'Artin,
tait
le
cousin
lui,
du fameux
la car-
Ludavico Rangone
et,
comme
embrassa
Ferrare, lorsqu'en
1629, les
42i
l'arTIN
le
fils
Hercule,
Rangone
alla
un
fait
oprait
cela fut
manifeste au sige de
se dcouvrit
Le motif de
le
cette conduite
rappela.
En
i548,
il
fut dsi-
De i549
la
i552,
il
fut
cour
impriale.
Il
mourut Modne,
le
27 mai 1572.
l'on a
de
lui
tiels. Il
deuxime
n'est
moins
avait-il
de bonnes raisons pour en vouloir Hercule Rangone. Le Sonnet XII est nettement satirique,
et
il
comme
Divin a
le
effet,
le
le
prcdent.
Il
a t
PIERRE ARTIN
43
publi par
indite di
ifaliane
^^^0
song
(et c'est
Ercolc et comte
Et de'Rang-oni il mrite tre nomm) D'pouser l'Ano-iola grecque a termin. gardien de btail, quand t'en-iras tu vers
le
mont
De
se faire voir
Rome
encore
il
a le front,
triste et le
malencontreux,
!
bannire, spontanment
hibou
!
archipoltron
toi,
Tu
voulais tre,
coquin
Ta
Poltron, archipoltron,
ne vaut pas un sou, tel point que les goujats S'archivergogneraient de te garder leur solde.
vie, poltron,
Et moi je m'acoquine
discourir de
et
toi, vilain
poltron,
Infamie
honte de
la
maison Rangone.
II
ressort de ces
deux
sonnets
que
le
comte
dans
est dit
Zoppino
Rome
l'po-
que de Lon X;
menrent au Gampo
di Fiorc
44
l'artin
le
quartier de
comme
elle tait
une
belle
dame
fort
honnte
et
mit en faveur.
fut,
en
effet,
Mdicis, c'est--dire
Lon
lui-mme, auprs de
si
en faveur,
les
deux sonnets,
si
cet
se-
bien au
comme
les
Malatesta di
lettre
dans une
Mars se peignait
l'horrible
a enlevs de force
que
les valets
en ce
Bandes-Noires.
De
toute faon,
le
sonnet luxurieux
contre nature
murs
PIERRE ARTIN
et
4^
nous
le
montre
se laissant entirement
dominer
publi par
M. Trucchi
ce
fait
mariage
auquel
famille
des
tait
Rangoni
se
serait oppose.
Le comte Ugo
:
un
frre
du
qui
second Hercule
le
militaire.
Ugo Rangone,
embrassa
nonce en Allemalui
gne au temps de
la dite
de Smalcalde. Mais on
retira sa charge de
nonce
comme
incapable de la
et
remplir.
Il
fut aussi
gouverneur de Plaisance
de
ill,
gouverneur de Rome,nonce
et
cour de Charles-Quint
mourut Modne en
mention de deux riches
qui, d'aprs le
i54o.
Au Sonnet XIII, il
est fait
courtisanes romaines:
La Lorenzina
les
auberges, et la
par
le
Zoppino,
et
tait
jolies
putains de
cotaient
le
Rome
une de
celles
les faveurs
plus cher.
Au Sonnet XIV
mode.
Enfin,
le
l'Artinmet en scne
la Batrice,
sonnet
XVI
il
Matre Andra,
admirait
peintre
il
si fort les
productions qu'il
les recopiait
pour
soi et
il
pour
les autres
admirateurs du Divin
tait
auxquels
ses
les envoyait. Il
renomm pour
Rome.
impayables
le
Espagnols,
les
Ragionamenti, l'Artin
le
si
Ton
parcouru
priapes que
sicle.
le
La
la
troi-
sime Journe de
la
plus
quio de las
Damas
et
Bonneaua
la Vie des
Jemmes maries
et la Vie des
lement forme de
trois
PIERRE AnTTN
4?
a respectivementintitules
pa,
les
Dans
la
premire Journe de
deuxime
partie
Nanna enseigne sa fille, la Pippa, l'art d'tre Le second jour il s'agit des bons tours que les hommes s'ingnient jouer aux courtisanes trop confiantes. Et le troisime jour, la Nanna et la Pippa, assises dans leur jardin, coutent la Commrtrice.
mre
et la
Nourrice parler de
la Rufrianerie,c'est--
maque-
donn
le
le
Zoppino,
le
et
Dialogue du jeu
comme
et
complte. Le Ragionamento
mrite
dfinies et
racontes les
colore et particulirement
la rhabili-
mauvaises
48
l'artin
talion
tation.
de
la
bonnes
capricieuses,
sans
scrupules,
superstitieuses, et
et
charmantes
finale.
mme
avec la vrole
TArtin,
tt
qu'il
dans
la
misre
En somme,
loue plu-
comme on
ne
Il
a toujours
et elles
telles
fait, les
les
les
blme
mement.
montre
igno-
Primocier
pour
pour
le
Primicier,
les
Psaumes
pestilentiels
pnitentiels,
aimant
les
comme
sur Legato
qui
Parfois
ainsi
de
l'expression
il
jeu de mots
Modona et Madonnd)
de Modne
et la
natura
de
Madonna.
On
trouve dans
les
la
du landes
gage
et les
le
poivre.
Ce ne sont
que Cornes
menstrues,
et
Chancres
/...
Qu'il parle
dira le
dit les
en France, on
PIEHRE AP.ETIN
^9
il
parle aussitt
du ma-
boubons ou de
et
dont
la
les
mains,
disait
comme
il
de
la ptrir,
on
en
le faisant
mots qui
la
commenaient; d'o
nom de
Pour
le
la friandise, aussi
qu'en
Italie.
congrs,
il
de
la
femme
c'est-
une quintaine.
U ingiiintana ou la cjaintana,
Italie et
surtout en
l'air
et
que
l'on
s'efforait
d'enfiler
:
avec la lance.
En
et
courir la bague
quintaine.
que
l'on y
nommait une
mme
La Nanna
la
maladetta sia
fie
:
la scesa e la salita, ce
qui signi-
maudites soient
descente
et la
monte.
la fois
descente et
rhume de
mdecins
dans
la poitrine
cela
sens par:
mau-
toux
et
son issue.
5o
t traduites
l'aritin
bizarrement en franais.
ainsi qu'ailleurs
:
On
:
trouve
dans TArtin
demment pas
fie
le
sion, et particulirement
Baco
signifie ver^
et far
comme
lever qui,
brus-
la tte et la rentre
quement
cachant
si
quelque chose
l'effraye.
On comprend
comment, en
comme
ment en
dit
criant coucou,
on puisse
faire
peur aux
il
comme
est
dans
le
:
expliquer
fumer
la pipe,
par dplaire
aux dames
dans un wagon de chemin de fer. Bien que l'Artin cite beaucoup d'auteurs, de
vers, de titres,
il
ne mentionne gure
les crivains
contemporains.
Il
romans
chevaleresques
commeVAncroa,
pome de chevalerie populaire cette poque. C'est la sur du roi Mambrin, que Renaud a tu de sa main.
La
Elle
est invincible et
et
rduirait
si
compltement
la
France
Charlemagne
une
Roland
n'arrivait point
Il
pour
lui
livrer
terrible bataille.
lui
propose
PIERRE ARTIN
5l
deux
que
fois
malgr
la subtilit
lui fournit le
neveu de Charlemagne,
le
se
refuse
comprendre
(i) et celui
mystre de l'Immacule
la
Conception
de
Roland se dcide
reine sarrazine.
Au
il
terso Serafino.
On
main
la
la
et,
de l'autre,
Lucien,
il
Regina Ancroja
Amours de
parle encore de la
tona.
Il
s'agit
de Bovo (TAntona
la fin
anonyme de
tion
du
xii sicle
c'est
une imita-
de
la
chanson
il
de geste
franaise
Beiwes
et
d'Hanstonne, dont
y a plusieurs versions
de France dj populaires en
(i)
de son temps
52
et
l'artin
o Ton irouveBouo d'Antona. La BelleDrasiana, la fille du roi d'Armnie, Tamante et puis l'pouse
de Bovo,
veille
;
faisait
sonner
la
harpe
et chantait
mer-
mer,
elle
retrouva
et
se
fit
reconnatre rien
qu'en chantant.
Il cite
de Ptrarque arrivent
Ragiona-
LArtin
parle-t-il
d'un
prtre
dbauch,
il
l'vch de
Fiesole, et rput
pour ses
Elles
facties
clbres
trs
au
temps de
l'Artin.
ont t
sicle.
M. Remy de Gourmont
signifie
//
piovano Arlotto
proprement
le
cur arsouille.
et
il
avec complaisance
Burchiello, parce
Domenico di Giovanni,
un sens, mais selon
les
dit
hasards de
soi> inspiration
un
art potique
si
mdiocre. Grescim-
beni
fait
la
Il
va
comme
je te
faut ajouter
que
vu dans l'obscurit de
PIERRE ARETIN
53
que de l'absurdit.
l'po-
que de l'Artin,
tion
;
il
n'avait pas
mauvaise rputa:
on avait
tir
sens d'nig-
Rome
en i448.
Ce
inaugur un genre
Il
ne
burchiellesque avec
et
]^os\e /identiane
obscure
raffine, appele
Ludimagis-
tro (i).
le
des amphi-
comme on en
fit
tant
en
France
au
xviii^ sicle.
cite
le
plus souvent
Boccace.
Il
mentionne
le
Fhilocole, amplifi-
et
surtout
le
Dca-
mron.
dant,
(i)
la
54
L'AHKTrN
et
son rudi-
il
traduit
Ce qui
le
communs que
aussi
ainsi qu'il
devait
rendre schiavina
(i),
non pas
simplement par
et
manteau
le
)>,mais
para esclavine,
que traduire
fa rendato da
me
migliaccio
lui
un
parat
l'officine
de
sortait
sans
On
n'aurait pas
les rptitions
que n'avait
style de
son auteur,
et l'on n'est
les
rp-
style
comme on
communment aujourd'hui,
la
l'on alourdit et
embarrasse souvent
phrase
(i) 5c^/ayma, manteau de plerin: Le prince Perse commande un sien serviteur de leur faire tailler deux esclavines, et de recouyer deux bourdons, tels que les plerins ont en coutume d'en por{Hiit, de Flor et de Blanche flor.) ter,
j
PIKRRE ARriN
55
du mot
Beaucoup,
core obscurs.
enfin,
Il
ble la vrit,
public
n'a
pas ide
la
aujourd'hui.
Toutefois,
la lecture
de
plupart des
ouvrages du Flau
et c'est
le
des
balance du style,
Guillaume Apollinaire.
LES RAGIONAMENTI
L'ERMITE
quarantaine d'annes, pays un domaine d'une grande valeur, fille d'une trs honorable famille, femme d'un docteur qui faisait des merveilles avec sa littrature, dont il remplissait de g-ros livres, cette matrone que je te dis s'en allait toujours vtue de brun, et si le matin elle n'avait pas entendu cinq ou six messes, elle n'aurait pas pu tenir en place de la journe c'tait une
qui possdait dans
le
;
Nanna.
file-Ave- Maria
une happe-saints, une balaye-g-lises; elle jenait les vendredis de tous les mois et non pas seulement ceux du mois de mars, faisait les rpons, la messe, comme l'enfant de chur, et chantait Vpres on disaitqu'elle portait jusqu' sur le ton des moines une ceinture de fer sur les chairs. J'en compisse sainte Verdiana. Anionia.
^
Nanna.
fois
plus
nombreuses que celles de cette Sainte Elle ne portait jamais que des socques et aux vig-iies de saint Franois (le la Vernia et de celui des Ascses (i), elle ne mangeait de pain que ce qui aurait pu tenir dans sa main, ne buvait que de l'eau claire, une seule fois, et restait
(i) Elle
veut parler de saint Franois d'Assise, dont elle fait deux le nom de l'Alvere (o il reut ses stig-
58
l'artin
le
c'-
Antonia.
Je ne saurais te le dire. Il lui arriva qu'un solitaire prchi-prcha, qui vivait dans un petit ermitag"e un mille du bourg", peut-tre deux, venait
Nanna.
Sans chemise?
presque chaque jour par chez nous, se procurer de il ne retournait jamais les mains vides de quoi vivre en son dsert, parce que le sac dont il se couvrait, sa long"ue face maig-re, sa barbe pendant jusqu' la ceinture, sa chevelure bouriffe et je ne sais qu'elle pierre qu'il portait la main, la faon de saint Jrme, excitaient la piti de tout le monde. Sur ce vnrable ermite jeta son dvolu la femme du docteur, qui se trouvait alors la ville, en train de plaider de nombreux procs; elle lui faisait d'abondantes aumnes, allait souvent son ermitag-e, certainement dvot et ag-rable, d'o elle rapportait quelques salades amres car elle se serait fait conscience d'en goter de
; :
la douce.
Antonia,
au fate d'une colline assez de Calvaire. Au milieu s'levait un g"rand crucifix, avec trois gros clous de bois, qui faisaient peur aux pauvres bonnes femmes. Cette croix portait la tLe la couronne d'pines; des bras pendaient deux disciplines faites de cordes noues; au pied tait une tte de mort; d'un ct gisait par terre l'ponge, au bout d'un bton, et de l'autre un fer de lance tout rouill, au bout du manche d'une vieille pertuisane. Au bas de la colline s'tendait un jardin potager, entour d'une haie de rosiers, et dont la porte tait de baguettes de saule entrelaces, avec sa chevillettc de bois je ne sais pas si, en cherchant toute une journe, on
Nanna.
Il
Gomment
se trouvait
nom
y aurait trouv un caillou, tant l'ermite le tenait proprement. Les car;s,s.';parcspar de petites alles, taient
LES RAGIONAMENTI
5g
tues frises et
pommes,
les
pu
les
arracher et
enlever avec
un compas
d'autres
des plus beaux choux du monde. Le serpolet, la menthe, l'anis, la marjolaine, le persil avaient aussi chacun leur
place dans le jardinet, et au milieu duquel faisait un peu d'ombre un amandier, de ces g'ros amandiers corce lisse. Par do petits ruisseaux courait une eau
claire, jaillissant
elle serpentait dans l'herbette. au pied de la colline Tout le temps que l'ermite drobait aux oraisons, il le dpensait cultiver le potag-er non loin s'levait la chapelle avec son clocheton et ses deux clochettes, et la cabane o il reposait, appiivce au mur de la chapelle.
;
Dans
comme
je te
pour que leurs corps ne fussent pas jaloux de leurs mes, un jour entre autres qu'ils s'taient cetirs sous la hutte, fuyant l'incommodit du soleil, je se sais comment ils en arrivrent aux mauvaises fins. Juste en ce moment un paysan (la langue de ces gens est mordante et pernicieuse), un paysan la recherche de son nn, qui avait perdu sa mre, passant par hasard prs de la petite cabane, vit nos deux saints accoupls, comme le chien s'accouple avec la chienne il courut au village et donna l'veil aux paroissiens en sonnant les cloches au bruit, presque tous, quittant leur ouvrage, se rassemblrent l'glise, tant hommes que femmes, et trouvrent le vilain en train de conter au prtre comment l'ermite faisait des miracles. Le prtre endossa son surplis, se mit l'tole au cou et, le brviaire la main, l'enfant de chur devant, portant la croix, se mit en route avec plus de cinquante personnes derrire lui. Le temps d'un Credo^ ils furent la cabane et y trouvrent la servante et le serviteur des serviteurs du ciel dormant comme des laboureurs. L'ermite, tout en ron-
l'ai dit, et
:
6o
fiant,
l'ahtin
maintenait son flau dans le bas des reins de la dvote du Gordon, ce qui, au premier aspect, rendit muette toute la foule, comme reste bouche be une
bonne femme en voyant un talon grimper sur une jument; puis, de voir leurs pouses dtourner la tte, les
hommes
poussrent un clat de rire, qui aurait rveill le couple ouvrit les yeux. L-dessus, le prtre, les apercevant si bien conjoints, se mita entonner de sa plus belle voix de chur Et incarnatus est ! Antonia. ... mais dis-moi, l'ermite et ses dvots
des loirs:
? La lime une fois arrache de l'entaille, l'ermite se redressa, tout debout, et, aprs s'tre administr deux cing"lons avec ces sarments
!
de vig-ne
dit
:
il
damnez-moi au
feu, tout ce qu'il vous plaira. C'est le Diable qui, ma place, sous ma propre fg"ure, a commis le pch et non mon corps ce serait une infamie que de lui faire du mal. Et maintenant, veux-tu que je te
:
dise ?
t soldat, assassin,
si
bien
le
diable a la queue, et
mis au
fait
par
la
tout le monde le crut, parce qu'il jurait par la vigne vierge de sa ceinture, et que les esprits tentateurs des
Ermites s'appellentiywccwmZ^es ellncumbes{i). La demireligieuse, qui pendant tout le bavardage du solitaire avait eu le temps de penser la malice, commena aussitt se tordre, se gonfler la gorge en retenant son vent, rouler des yeux hagards, hurler, se dbattre de telle sorte qu'elle faisait peur voir. Voici le malin esprit dans le corps de la pauvrette , s'cria l'ermite le syndic du village s'approchant pour l'emmener, elle se
;
(i)
LES RAGIONAMENTI
6l
soli-
mit raordre
et
dement attache par une dizaine de paysans et conduite l'glise, on lui appliqua deux petits os, qui passaient
pour
tre les os
des
un
comme
re-
sermon.
LE PRISONlNIER
Venons-en une madone (i) (je veux taire Nanna. son nom), qui eut un beau caprice pour un prisonnier dont le podestat reculait indfiniment la pendaison, de peur de faire ce plaisir la potence. Son pre, en mourant, lorsque le drle tait g de vingt et un ans environ, l'avait laiss hritier de quatorze mille ducats, moiti comptant, le reste en domaine, plus les meubles d'une maison ou pour mieux dire d'un palais. En trois ans, se mangea, se joua et se spermatisa tout l'argent comptant puis il mit la main sur les terres, et en trois an;
nes dvora
le reste.
Comme
que
lui
mobilier
en vendit les pierres; puis ce fut le tour du empruntant un jour sur les draps, vendant le lendemain une nappe, puis un lit, puis un autre, aujourd'hui ceci, demain cela, il alla ainsi jusqu'au derdmolit
et
:
nier
sou
et fit
avoir d'abord
si bien trbucher la balance qu'aprs engag, puis vendu, autant dire donn
(i)Ce mot en franais s'a'pplique gnralen[ient la Sainte Vierg^e. Nous avons cru pouvoir l'employer dans un sens plus gnral, o il rend bien l'italieu Madonna.
62
l'autin
le palais, il
pour rien
il
resta tout
nu
et tout
cru. Alors
s'enfona dans toutes les sclratesses que peut non seulement faire, mais imag-iner un homme faux ser:
mis en prison des quatre et cinq ans la fois, avait reu plus d'ang-uillades que de bouches de pain, et il s'y trouvait en ce moment pour avoir crach la ligure d'un messire... je ne veux pas le mentionner en
avait t
vain.
Ribaud Tratre Antonia. JSanna. ~ C'tait un si fieff ribaud que, d'avoir couch avec sa mre, on pouvait dire que c'et t le moindre de ses pchs. Rduit la mendicit, en ce
!
qui concerne tout le reste, il tait si opulent en fait de mal franais qu' lui seul il aurait pu le donner un millier de ses pareils et en garder encore pour lui tout
ce rengat tait en prison, un mdecin, aux gages de la ville pour soigner les pauvres dtenus, s'occupait de gurir la jambe de l'un d'eux, qui craignait que le chancre ne la lui ronget. Comment s'cria ce mdecin, j'ai guri la nature surnaturelle de ce brigand, et je ne gurirais pas ta jambe ? Cette surnaturelle nature parvint aux oreilles de la dite madone, et le paquet dmesur du sclrat qui tait en prison lui entra si profondment dans le cur qu'elle se mit brler pour lui plus que cette reine (i) d'autrefois ne brla, dit-on, pour le taureau. Comme elle n'apercevait ni voie ni mojen de pouvoir s'en passer la fantaisie, elle rsolut de commettre quelque mfait, afin qu'on l'enfermt dans cotte mme' prison o tait le
!
crache-sur-la-croix.
se confesser
;
Pques
arrives, elle
;
communia sans
on
l'en reprit
elle
bien fait
la
LES UAGIONAMENTI
63
alors
podestat qui la
elle
fit
frne qu'elle avait du poireau de l'homme en question aux yeux en dedans et si petits qu' peine y vovait-il, au nez larg-e et cras sur la fg-ure, avec une balafre en travers et deux cicatrices du mal de Job qui ressemblaient deux g-relols de mule, dguenill, puant, dg-otant, tout rempli de poux et de vermine. L'ho'norable podestat le lui donna pour compag^non en lui disant: Ce sera la pnitence deton pch, per Injnita secula
fit
me pour
prison.
On
sime
g"erbe,
prtend qu'aprs avoir tt de cette g-randis Dressons ici nos tabernaelle s'cria
:
cles (i).
Antonia.
tait
Plus Que d'un mulet? Nanna. Encore plus. Antonia. D'un taureau
Nanna.
Anionia.
celle
?
Nanna.
Trois
lit
fois
Antonia.
Elle tait
g-rosse
que
les
colonnes d'un
de parade?
t'en
semble?
dans
l'allgresse
qu'elle nag-eait
jusqu'au cou,
ner
commune
pour satisfaire
susdit criminel la
(i) Allusion la fle des Tabernacles chez les Juifs. La pannochia signifierait le loulab, les loulabim, gerbes ou branches qu'on porte dans les synagoejues ce jour-l avec les dons de la terre, en chantant la prire de Hosannah.
64
lui
L^ARBTIN
ayant t sigriifis. ..J'ai laiss de ct quelque chose; nous reviendrons au sclrat, oui. La g-ourmande n'tait pas plutt en prison et peine avait-elle jet le masque, que la nouvelle s'en rpandit par la ville et donna matire aux caquets des badauds, des artisans, des femmes surtout; dans les rues, aux fentres, sur les marchs, on n'entendait causer que de l'emprisonne, et avec des moqueries, des airs de dg^ot Lorque six commres se trouvaient runies autour du pilier l'eau bnite, elles en bavardaient deux heures durant. Entre autres cnacles, il s'en forma un dans mon quartier, et une monna(i) prude-de-campag"ne, entendant de quoi il s'agissait et voyant toute la bande en suspens, la quenouille la main, pour l'couter, s'cria Nous autres qui, pour tres femmes, somrnes toutes dshonores par les dportements de cette coquine, nous devrions marcher l'ins!
y mettre
tant sur le Palais, Tarracher de la prison, dussions-nous le feu, la flanquer sur une charrette et la dchi
elle s'loig-na
comme un crapaud
comme
si
femmes du monde
pcore!
entier dpendait
Antonia.
La
Les dix jours de grce signifis au malandrin, vint l'apprendre cette ne-crache-pas--l'g^lise dont
Nanna.
en y mettant le feu Elle en eut g-rande compassion, song-eant au prjudice qu'prouveraitla ville perdre sa plus g-rosse pice d'artillerie, celle dont. la renomme, seule, dfaut de meilleure preuve, attirait les femmes qui se trouvaient mal partages, comme l'ai-
mant
attire l'aig-uille
ou un brin de
paille.
La mme
et elle
qui
Diminutif de Madonna.
LES RACflONAMENTl
65
imagina
ait
la
plus ruse,
la
Antonia.
Qu'imag-ina-t-elle? Dieu g'arde de Nanna. Elle avait un mari continuellement madeux jours au lit, cur qu'il en toufsemblait prs de passer. Ayant appris d'une des
lev et
!
jamais ou.
deux heures
(qu'elle aille la malheure) qu'elles pouvaient sauver l'homme qu'on mne la potence, rien qu'en se jetant au-devant de lui et en criant: Celui-ci est mon mari! ... Antonia. Ou'entends-je? ...elle rsolut de donner le coup de pouce Nanna. au sien, puis, usant du droit des ribaudes, de prendre le vaurien pour poux. Pendant qu'elle y songeait, voici qu'avec des Ae !ae son pauvre homme, fermant les yeux, crispant les poings, battant des jambes, vint se pmer. Elle, qui ressemblait une caque de thon sal, pour tre moins haute que large, lui mit un oreiller sur la bouche, s'assit et, sans avoir l'aide d'aucune servante, lui fit sortir l'me par o sort le pain
balave-bordels
digr.
.4
ntonia.
les
Nanna.
racha
Oh Alors
oh
oh
elle
fit
un tapage pouvantable,
s'ar-
cheveux, rassembla tout le voisinage qui, connaissant l'indisposition du pauvre homme, ne douta pas qu'il n'et t touff dans une de ces crises dont il souffrait continuellement. On l'enterra fort honntement,car il tait honntement riche, et aussitt la veuve, vritable chienne en chaleur, se rfugia au bordel, pour ne pas mcher le mot. Comme de son cot, ni de celui de son
elle
de parents qui valussent deux deniers, empchement aucun, tout le monde sans y pensant qu'elle tait devenue folle de douleur aprs la mort du susdit. Arriva la nuit qui nrcda le matin o
mari
elle n'avait
resta
66
le
L'AnTIN
misrable devait tre excut ; la ville en devint hommes et presque toutes les femmes
s'tant rassembls au Palais du podestat pour voir annoncer son supplice celui qui en mritait mille. L'homme se mit rire en entendant dire au Prvt La volont de Dieu et celle du mag-nifique podestat (j'aurais d le nommer le premier) est que tu meures. Il fut extrait de la prison et conduit au milieu du peuple, les pieds dans les ceps, avec les menottes, assis sur une mchante poig-ne de paille, entre deux prtres qui le rconfortaient, et ne faisant pas une mine trop rechig-ne l'image qu'on lui prsentait baiser. Comme s'il ne s'agissait pas de lui, il contait des bourdes en chemin, et tous ceux qui se prsentaient, il les appelait par leurs noms. Depuis le matin, la g-rosse cloche du communal sonnait lentement, lentement, pour annoncer l'excution qui allait avoir lieu. Les bannires furent dployes, puis lecture faite (elle dura jusqu'au soir) de la condamnation par un de ceux du tribunal criminel, qui avait une voix retentissante; ensuite, il s'achemina une grosse corde dore au col et une mitre de papier dor sur la tte, pour sig'nifier qu'il tait le roi des coquins. Au son de Ta trompette, veuve de son g"land, on le ft avancer au milieu d'une escouade de sbires, la populace marchant par derrire, et partout o il passait, les balcons, les toits, les fentres, tout tait plein de femmes et d'enfants. Ds qu'il fut prs de la catin qui, avec un g-rand battement de cur, g-uettait le moment de se jeter au cou du sclrat, avec cette avidit dont un malade
:
brl de la fivre se jette sur un seau d'eau frache, sans le moindre trouble elle s'lana furieusenient, fendit la foule g^rands cris,et,chevele, battant des mains,
l'treignit
femme!
Je suis sa
le
poussait, se
monde se un vacarme, on
cloches
du monde
entier sonnaient
LES RAGIONAMENTI
67
aux armes, au prche, la fte. aux oreilles du Podestat, il fut oblig de tenir la main la loi, et le misrable fut livr, pieds et mains libres^ pour tre accroch aux fourches
en
mme
temps au
feu,
La nouvelle
arrive
de
la sclrate.
Antonia.
Nanna. Nanna.
Nous sommes Ah ah ah
!
la fin
du monde
Antonia.
De quoi
ris-tu ?
s'tait faite
De celle qui
:
luthrienne pour
vivre en prison avec lui, et qui j resta avec trois coups de couteau dans le cur le premier fut de l'en sortir
;
second de croire qu'il allait tre pendu le troisime d'apprendre qu'une autre s'tait empar deson chteau, de sa ville, de ses tats. Antonia. Dieu fasse du bien au Seigneur Dieu qui la punit de ces trois coups de couteau
le
;
LE PUTANISME
Il vint, te dis-je, Rome un jeune homme de vingldeux ans, noble, riche, marchand de nom seulement, un vrai morceau de putain. A son arrive, du premier coup il me tomba entre les mains et je feignis de m'amouracher de lui il s'en dressa d'autant plus sur ses ergots que je me tenais haute sur les miens. Je commenai par lui envoyer ma servante quatre ou six fois par jour, pour le prier de daigner venir me voir; le bruit se rpandit partout que j'en tais au bouillon de poulet et l'extrme-onction pour lui. La putain a fini par donner dedans, disait-on, et pour qui ? pour un gamin dont la bouche pue encore le lait Il la fera damner, ne jamais rester srieux une heure. Moi, je ne disais rien, mais je me rongeais, oh fleur de peau. Alors
;
! !
68
je
l'arktin
fis semblant de ne pouvoir plus ni mang-er ni dormir; j'en parlais toute la journe, je l'appelais continuellement et fis si bien qu'on se mettait parier que j'irais ramasser des pierres et que je finirais par mourir pour ses beaux yeux. Le jouvenceau, qui profitait de quelques bonnes nuits et de quelques friands soupers, allait partout faire le vantard et montrait qui voulait une turquoise de peu de valeur que je lui avais donne. Quand il tait avec moi, je ne cessais de lui dire Ne vous laissez pas manquer d'arg-ent, n'allez pas en importuner d'autres que moi, tout ce que je possde est vous,
:
puisque moi aussi je suis vtre. C'est ce qui le faisait se pavaner dans les Banchi(i), quand il voyait qu'on le montrait du doig-t. Un jour qu'il tait chez moi, vint me voir un haut et puissant personnag-e je fis cacher mon jeune homme dans un
;
Le g-rand
votre
Ganymde?
rappellepas. lien aura l'trenne poursr^rpoadis-je;je raime,je l'adore, c'est mon dieu, je suis sa servante, et je la serai ternellement, tout en
ouCanymde,jeneme
vous caressaot, vous autres, pour votre arg-ent. Pense un peu s'il se reng-orgeait en m'entendant parler comme il s'lana dehors; a. L'autre parti,je revins lui ouvrir
:
sa chemise ne lui touchait pas le cul, et, se prlassant par la salle, il avait l'air de s'approprier du regard et ma personne et mes chambrires et toute ma maison.
Pour en venir
qu'il voulut
me
caisse, je le
VAmen de mon Pater noster, un jour donner l'estrapade, sa faon, sur une laissai en bonne humeur et fus m'enfermer
avec un autre. Lui qui n'tait pas habitu des plaisanteries de ce genre, il prit sa cape, en lchant au vent La Via
dei Banchi tait alors la principale rue de
{\]
Rome
et la
LES RAGIONAMKNTI
69
le
quelque
sottise, et sortit,
faire rappeler,
comme
d'ordinaire
mais
il
ne
vit
pas
La sig-nora est en compag-nie en resta comme une souris noye dans l'huile, le menton pench sur la poitrine, la bouche amre, les lvres sches, les veux larmoyants, la tte sur le cou d'un autre (i), et le cur lui battant fort; il s'loigna pas pas et les jambes lui tremblotaient comme quelqu'un qui relve de maladie. A travers les fentes de la jalousie, je le voyais s'en aller par saccades, et je riais! Je ne sais qui le salua il lui rendit le bonjour en soulevant un peu la tte. Le soir, il revint; je lui fis ouvrir et il me trouva en train de m'amuseravec une nombreuse socit voyant que je ne lui disais pas Asseyez- vous! , il s'en octroya lui-mme la permission, se campa dans un coin, sans se drider aux plaisanteries qu'il entendait, et resta jusqu' ce que tout le monde t parti. Quand il se trouva seul Sont-ce l des amours ? s'cria-t-il; sont-ce l des caresses? Sontl tes serments ? Mon chri, lui rpondis-je, je suis, grce toi, devenue la fable des courtisanes de Rome on fait des comdies de ma simplicit, et, ce qui me cuit bien davantag-e, c'est que mes amoureux ne Nous ne veulent plus rien me donner ils me disent voulons pas acheter la g-raisse pour qu'un autre mange la rtie. Mais si tu veux que je redevienne celle que j'tais pour toi et que tu connais bien, fais une chose. A ces mots, le voil qui se redresse la tte comme la redresse aux cris de Sauve-toi sauve-toi un homme qu'on va pendre; il mejureque, pour l'amour de moi, il crverait des yeux aux puces et m'afhrme(|ue Je je n'ai qu' demander de bouche. Je lui dis alors voudrais avoir un lit de soie cela cote, avec les frauet
il
revint la porte:
lui fut-il
rpondu.
Il
(1)
l'ar^tin
ducats ou peu prs, sans la faon et pour que mes amis voient que tu fais grandement les choses et que tu t'endettes me faire des cadeaux, prends-moi tout cela crdit Theure de payer venue, laisse -moi faire; je veux que ce soient eux qui payent ou qu'ils crvent Gela ne se peut pas, rpondit-il, mon pre a crit partout et dfendu de me faire crdit que ce serait au risque de qui me prterait quoi que ce soit. Je lui
;
;
le fis sortir
de chez moi.
:
Un
jour
Va
trouver
Salomon, il te prtera de l'arg-ent sur simple billet de ta main. Il y va Salomon lui dit Mais je ne prte que sur g'ages Il revient chez moi et me conte l'affaire. Va chez un tel, lui dis--je alors. Il te donnera des bijoux pour telle ou telle somme et le Juif te les
;
: !
achtera volontiers.
Il
Antonia.
Nanna.
qui je rendis son argent, mles rapporta. Au bout de huit jours, j'envoie chercher l'homme qui lui avait vendu les bijoux sur billet, et je lui dis Fais mettre le jeune homme en prison, comme suspect de vouloir s'enJe
Le marchand suivit mon conseil, nigaud fut mis sous clef et ne sortit qu'aprs avoir pay son cot au double, parce que les vieux hteliers, pas plus que les nouveaux, n'ont pour habitude de donfuir; tu en jureras.
ner
manger
gratis.
LES CARACTERES
Comme
les caractres
LES RAGIONAMENTI
7I
varits que leurs fantaisies, tudie-les, g-uette, prvols, examine, rflchis, analyse et passe au crible les cervelles de tout le monde. Te voici un Espag-nol, bien attif, parfum, dlicat comme le cul d'un pot de chambre, qui se brise ds qu'on le cog-ne, l'pe au ct, bouffi d'arrogance, son moo par derrire, la bouche pleine de ses Par la vie et autres g-entillesses. Dis-lui de l'Impratrice Je ne mrite pas qu'un cavalier tel que vous me fasse tant d'honneur! Que Votre Seigneurie se couvre la tte je ne l'couterai pas qu'elle ne se la soit couverte. Si les Votre Altesse qu'il te lchera par la figure et les baisers dont il te lchera les mains taient le moyen alchimique de t'enrichir, grce ses Altesses et toutes ses crmonies, tes revenus dpasseraient ceux d'Agos!
((
tino Chigi.
avec eux.
qu' leur
pas autre chose faire rendre de la fume en chang-e du vent et des bouffes en change de ces soupirs qu'ils savent si bien lcher pleins boyaux. Incline-toi cependant leurs rvrences, ne leur baise pas seulement la main, mais le g"ant, et si tu ne veux pas qu'ils te payent avec le rcit de la prise de Milan, dpetre-toi d'eux le mieux
qu'il n'y a
rien
gagner
lui vite,
Ouvrependant que tout guilleret il t'embrasse, il te baise la bonne franquette, fais apporter le vin avec les gens de cette nation, sors du naturel des putains, qui ne te donne celui-l
;
Nanna.
un
clair, et
raient pas
et
un
verre d'eau
si elles te
voyaient trpasser,
commencez vous
rester trop
familiariser
7
toi et
L AUKTIN
mets-moi gentiment
la porte tous
les autres
vra de victuailles dans ta cuisine. Quoi de plus ? Il sors tira en chemise de tes griffes, parce que ce sont de bonivrognes, sachant mieux dpenser l'argent que le gagner et s'oubliant eux-mmes plus facilement qu'ils ne se souviennent d'une injure qu'on leur a faite; il se souciera bien que tu l'aies vol ou non Pippa. Amours de Franais Soyez-vous bnis Nanna. Songe aussi que les Franais retournent deniers et les Espagnols coupes. Les Allemands, par-
'
faits d'un autre moule, et il y a lieu de jeter sur eux son dvolu: je parle des gros marchands qui se plongent dans les amours, je ne veux pas dire comme dans le vin, parce que j'en ai connu d'on ne peut plus sobres, mais comme dans les luthrianeries. Ils te donneront de grands ducats, si tu sais les prendre par le bon bout, sans aller crier sur les toits qu'ils sont les amants, ni qu'ils te font ceci, qu'ils te disent cela plume-les secrtement, ils se laisseront plumer.
Pippa.
Nanna.
quand
rait.
ils
et grossier
la
Dieu seul
leur te-
la
Donc, sache les oindre, comme d'huile douce, de connaissance que tu as de leur caractre.
Pippa.
Que me
restera-t-il faire
de plus
Nanna.
n'ose
Je voudrais t'exhorter
?
une chose,
et je
Pippa.
Nanna.
me
risquer la dire.
Nanna.
pch.
le savoir.
Non,
ce
me
serait
imput blme
et
Pippa.
savoir
?
A
te dire le vrai,
got de
le
Nanna.
que diable en
sera-t-il,
LES RAGIONAMENTI
si
7^
tu
peux
endure-
donc, mais adroitement. Trouve un prtexte, comme de vouloir acheter des tapisseries, des garnitures de lit ou semblables babioles tu verras qu'il s'en rencontrera
la
;
bien quelqu'un qui te mettra dans le tiroir de devant se produit net de toutes leurs usures, de toutes leurs
filouteries, et
s'ils
qui y ajoutera
mme
l'argent
du change
puent
le
me
confier quel-
Naana.
Que
sais-je,
moi?
maladie me faisait hsiter t'en parler. Mais sais-tu ce qu'il en est ? Les gros gains ramasss par les gens qui vont sur mer, c'est au risque d'aller ramer sur les galres, au risque des Catalans, au risque de se noyer, de tomber entre les mains des Turcs, de Barberousse, de voir le vaisseau s'effondrer, de manger du pain sec et plein de vermine, de boire de l'eau et du vinaigre, et de supporter mille autres misres, ce que j'ai entendu dire. Si celui qui va sur mer ne s'inquite ni du vent ni de la pluie ni de ses fatigues, pourquoi une courtisane ne se moquerait-elle pas de la puanteur des juifs? Vous faites des comparaisons on ne peut Pippa. plus jolies. Mais si je m'emptre d'eux, que diront mes amis ? Aanna. Que veux-tu qu'ils disent, s'ils ne savent
rien ?
Pippa. Comment ne sauraient-ils pas Nanna. Si tu n'en par crainte qu'on ne casse sera discret comme un voleur. Pippa. De faon, oui Nanna. Te dans ta chambre un Florentin,
le
dis rien,
le
juif,
lui
les os,
cette
voici
avec ses froncements, ses remuements de babines fais-lui bon accueil. Les Florentins, hors de Florence, ressemblent k ces gens qui ont la vessie pleine et n'o;
sent
aller pisser,
ils
se
74
;
l'artin
trouvent une fois sortis, ils submerg^ent un terrain d'une long-ueur.'.-.d'unelong-ueur! avec l'urine que verse leur ustensile. Ils sont, jetedis, pluslar^es dehors qu'ils ne sont chez eux serrs en outre, il's se montrentleltrs, gentils, polis, spirituels, savoureux, et quand ils ne te feraient cadeau de rien plus que de leur aimable langage, ne pourris-tu pas t'en contenter ? Moi, non. Pippa, C'est une faon de parler. Suffit qu'ils Nanna. dpensent au possible, qu'ils font des soupers pontificaux et des parties de plaisir bien autrement galantes que les autres; enfin, leur langue plat tout le monde. Venez-en donc un peu aux Vnitiens. Pippa. Je ne veux pas te renseigner sur eux, Nanna. parce que si je t'en disais autant de bien qu'ils en m;
L'amour te doit! et, on me riposterait ne me doit nullement, car ce sont les dieux, les matres de l'univers, et les p'/us beaux jeunes gens, les plus beaux hommes faits, les plus beaux vieillards du monde. Dpouille-les de ces vtements austres qu'ils
ritent,
certes,
il
hommes te paratront des fantoen comparaison, et bien qu'ils soient fiers, parce qu'ils sont riches, ils sont la bont mme, pourtraite au naturel. Quoiqu'ils vivent en marchands, vis-vis de nous autres ils se comportent royalement, et toute celle qui sait les prendre peut s'estimer heureuse chose en ce monde est plaisanterie, sauf ces grands coffres qu'ils ont, pleins jusqu'au bord de ducats, et qu'il tonne ou pleuve, ils n'en font pas plus de cas que d'un
portent, tous les autres
ches de
cire,
bagattino
Pif)pa.
(ij.
Nanna.
Mais maintenant que je m'en souviens, Pippa. expliquez-moi donc pourquoi la signora qui est revenue
(i;
Dieu
Il les
les
protge!
protge bien.
Monnaie de
trci
pclilc valeur^
ES RAGIONAMENTI
75
de chez eux l'autre jour n'a pu y rester; d'aprs ce que ma marraine disait, elle s'en est revenue avec ving-t paires de caisses remplies de cailloux. Nanna. Je vais te le dire. Les Vnitiens ont le
g'ot
fesses,
fait
leur
faon
particulire
ils
veulent des
des ttons et des chairs fermes, de quinze seize ans jusqu' vingt ans, au plus, et non pas des
ptrarquesqueries.
Pour
cette
raison,
ma
fille,
avec
eux mets dans le coin les manires de courtisane et rg"ale-les au naturel, si tu veux qu'ils te jettent pleines mains de l'or couleur de braise et non des sornettes couleur de brouillard. Pour moi, si j'tais homme je voudrais coucher avec une femme qui aurait plutt la lang-ue bien emmielle que bien endoctrine, et j'aimerais mieux tenir dans mes bras la plus grande catin que
messire Dante...
Pour
te
te
faire faire
les
je
dirai
que
sont de
bons fous, pas mchants, encore bien que depuis quelques annes ils aient empir, ce que disent certaines
g'ens.
De
la
quantit
le
d'hommes que
ils
j'ai
pratiqus,
ils
sont exprs pour moi. Oui, certes; maintenant, passons NaPippa. Ne m'en parlez pas; rien que d'y songer, je rends l'me. Nanna. Ecoute, ma de signera, par
Pippa.
Ils
ont quelque chose des g-entillesses et des talents des Florentins, mais sans tre si adroits, si fins de nez, et qui sait les duper, les rase et les ple jusqu'au vif; ce sont de bons couillards, plutt que non, d'un commerce honorable et agrable.
superlatif;
faits
me
semblent tre
Nanna.
ples.
petite
la vie
ta
mort Les Napolitains sont mis au monde pour vous faire perdre le sommeil ou pour que l'on en prenneune bonne lippe une fois par mois, un jour qu'on en a la fantaisie en tte, que l'on est seule ou avec quelqu'un
!
7^
L*ARKTIN
de peu d'importance. Je dois t'en prvenir, leurs hbleries vont jusqu'au ciel; parle-leur chevaux ils possdent les meilleurs d'Espag-ne; parle vtements ils en ont plein deux ou trois g-arde-robes; de l'arg-ent, ils en
:
du royaume meurent
d'a-
mour pour
les
g'ant, ils te le
qu'on
ait
ramassent, avec les plus g-alantes parabooues jamais la cour de Capoue; oui,
sig-nora
Pippa. Quel amusement Nanna. J'avais pris l'habitude jadis de dsesprer un de ces brig-ands, appel Giovanni Agnese, en m'ef!
forant de le contrefaire (en paroles, car en actions le bourreau n'y parviendrait pas c'est l'cume de la ribauderie des ribauds), et un Gnois s'en touffait de rire. Je me tournai un jour vers celui-ci et je luis dis Ma Gnes moi, ta superbe toi, vous savez si bien, vous autres, acheter la vache sans vous laisser mettre un seul os, que nous n'avons pas grand'chose g-ag-ner avec vous. C'est vrai ils trouvent moyen de raffiner le fin, d'aig-uiser l'aig-u, sont excellents mnagers, coupent la tranche aussi mince qu'elle doit tre et ne t'en donneraient pas un tantinet de plus. Glorieux au demeurant, je ne saurais te dire comme, amateurs des
:
:
g-enti lies
te faisant paratre
du sucre
le
peu
qu'ils te
donnent,
et
ce peu ne leur
manque
de
ils te
payer de fumet et mesure-leur les denres comme mesurent les leurs; sans trop te dgoter de ce qu'ils parlent de la gorge et du nez, avec des hoquets, prends avec eux la vie comme elle vient. Pippa. Les Bergamasques ont plus de grce que
les
(i).-
'i]
Le dialecte de Bergame
passait
pour
le
plus gros^^ r
de
l'iialie.
LR8 RAGIONAMENTI
77
Il y en a parmi eux aussi d'agrables et Nanna. de sduisants, oui, certes; mais venons-en nos Piomains g-are les coups, Rienzi! Ma fille, s'il te convient de manger du pain et du fromage avec des lames d'pes et des pointes de pique en salade, assaisonnes de superbes bravades que leurs bisaeux tirent jadis aux Prvts, va t'emptrer d'eux. Bref, le jour du sac (i) leur chie encore sur la tte (rvrence parler), et c'est pourquoi le pape Clment n'a jamais voulu les revoir. Pippa. N'oubliez pas Bologne... Nanna. Oublier les Bolonais Quelle mine auraient les logis des putains sans l'ombre de ces grands chalas taills en fltes? Ns seulement pour faire nombre et pour faire ombre, dit la chanson : en amour, dis-je,et non la guerre , ajoutait Fra Mariano(2), suivant ce que me racontait un jeune drle d'une vingtaine d'anne-s, sa crature
;
.Jamais
il
plus joufflus
ni
mieux
fte,
et
vtus.
Par consquent,
bouche-trous de
toi,
Pippa,
fais-leur
comme aux
la
que
mme
se dlectaient de
Lombards,
chacun du chevalier
du comte
oui,signor; non, signoi* )),ilsy tiennent comme un il. xVvec eux, quelque bonne petite piperie ne gtera pas le potage; il est honnte de leur en faire avaler quelqu'une et plus encore de s'en
la
par
moustache;
les
(i)
Le sac de Rome, dont on verra plus loin uoe relation saisisSur Fra Mariano, voir l'introduction.
tante.
(i)
78
l'artin
vanter
les
les
(i)
Venons-en maintenant
la
g-randepiperie.
mme que
vous ne l'entamiez.
officier, un g-aillard qui ses charges en rente prs de deux mille ducats de chambre, tait si dmesurment amoureux de moi qu'il en faisait pnitence de ses pchs. Il dpensait lunatiquement, et besoin tait de recourir l'astrologie, je puis le dire, pour en tirer quoi que ce ft s'il ne se trouvait pas en fantaisie de donner. Ce qui est bien pis, c'est que la mauvaise humeur naquit le jour o il vint au mtonde; pour la moindre parole dont le son lui dplaimettre la main son poignard sait, il entrait en colre et t'en fourrer la pointe jusque sous le nez, c'est la moindre frayeur qu'il pt te faire. Pour ce motif, les courtisanes le dtestaient comme les paysans dtestent la pluie; moi qui ai donn ma peur ressemeler, je le recevais tant qu'il voulait, et bien qu'il me ft quelquesunes de ses mauvaises plaisanteries, je le souffrais patiemment, mditant toujours de lui en rendre une qui me payt de toutes les siennes. J'y songeai si assidment
Nanna.
Un
rapportaient
qu'
la
fin je
la
trouvai.
Que
fis-je ?
Je
me
confiai
nommer,
prendre quelques menus suffrages, conque je voudrais et viendrait se cacher sous mon lit, muni de couleurs et de pinceaux, pour me dessiner une balafre sur la figure, un moment
dition qu'il ferait ce
(i)
LES RAGIONAMENTI
7Q
donn;
je m'en ouvris galement matre Merciirio, d'heureuse mmoire je sais que tu l'as connu. Oui, je l'ai connu. Pippa.
Nanna.
Je
lui dis
que
pour m'obliger, il ne sortit pas de chez lui le jour de la fte que je voulais fter. Voici donc matre Andra sous le lit et matre Mercurio chez lui; moi, je suis table avec l'officier. Nous avions presque fini de souper,quand je me mis lui rappeler certain camrier du Rvrendissime qui il m'avait dfendu de parler, sous n'importe quel prtexte; c'tait pour le faire monter. Pain dj lev n'a pas besoin de beaucoup de levain.
s'cria-
comme
dans
son poignard sur la joue un tel soufflet que je le sentis pour de bon. J'avais dans une vessie je ne sais quel vermillon dtremp d'huile, moii donn par matre
la g'orge
avec un dmenti,
me donna du
plat de
m'en barbouillai les mams, m'en frottai le aux cris les plus pouvantables qu'ait jamais pousss une femme en couches, je lui fis vritablement croire qu'il m'avait frappe de la pointe. pouvant comme un homme qui en a tu un autre, il joua des jambes, s'enfuit au palais du cardinal Golonna et,s'tant blotti dans la chambre d'un courtisan de ses amis, se
Andra;
je
visag-e et
Hlas mit geindre tout bas, tout bas adieu Moi la Nanna, Rome et mes emplois; j'ai tout perdu je m'tais renferme dans ma chambre avec ma vieille servante seulement matre Andra, sorti du nid, en un
:
!
clin d'il
si
dessina une balafre sur la joue droite, et parfaitement que, me regardant au miroir, je fus sur
me
le pint de tomber la renverse de saisissement et de tremblement. A l'instant mme arrive matre Mercurio... N'avez pas peur vous n'avez aucun il entre et mdit mal. 11 laisse la couleur le temps de scher, me l'ar:
8o
rang-e bien
l'artin
ave de
la
o une
:
Impossible qu'elle en rchappe Le bruit en courut par toute la ville de Rome et en vint jusqu'aux oreilles du meurtrier, en train de pleurer comme un enfant qu'on a battu. Le lendemain matin arrive; le mdecin, tenant allume la main une chandelle d'un denier, lve l'appareil je ne sais combien de personnes qui avaient russi passer leur tte par la porte de la chambre (toutes les fentres taient fermes) se mirent pleurer, et je ne sais qii,ne pouvant supporter la vue d'une si horrible blessure, s'vanouit en l'apercevant. C'tait le bruit public que j'avais la fig-ure abme pour toujours, et de la plus triste faon, de sorte que le malfaiteur, en m'envojant de l'argent, des mdecines et des mdecins, cherchait s'pargner la visite du bargello,
:
peu confiant qu'il tait, au fond, dans la protection des Golonna.Au bout de huit jours,je fais courir le bruit que j'en rchappe, mais avec une cicatrice plus affreuse, pour une courtisane, que ne le serait la mort le bon ami de vouloir me l'adoucir force d'argent; il employa tant de moyens par ici, tant de moyens par l, fit si bien agir amis et patrons, que je consentis un accord, sans me laisser voir de personne, si ce n'est d'un monsignor
:
la fve
et je lui
lui
dpens
l'ai
le
jardin dont je
Pippa. Vous tiez un vaillant homme, maman, quand vous vous lanciez dans semblable aventure.
LES RaGIONAMI'.NTI
8i
Nanna.
lais te les
L'aventure n'en
et je n'en viendrais
conter toutes. En bonne foi, je n'ai pas jet dans l'eau le temps que j'ai vcu; ma foi non, je ne l'ai pas jet dans l'eau, va. Cela se voit bien au rsultat. Pippa. Continuons. Ne trouvant pas que les cinq Nanna. cents cus, avec cinquante aprs, eussent tonch le palais mon apptit, j'imaginai trs putanesquement une ruse putanesque. Et de quelle faon, crois- tu ? Je fis surgir un Napolitain, matre filou des filous, et sous le prtexte d'un secret qu'il possdait, au moyen duquel on pouvait clfacer toute trace de blessure -laisse au visage de quelqu'un par un mauvais coup, il vint me voir. Le jour que l'on voudra dposer cent cus, dit-il, je me charge de votre affaire; vous n'aurez pas plus de cicatrices sur la figure que vous ne m'en voyez l il montrait le creux de sa main. Je me contorsionne et Allez faire je lui dis avec un semblant de soupir part de ce miracle celui qui est cause que je ne suis plus... j'allais ajouter reconnaissable, mais je dtournai la tte pour sangloter petit bruit. Le charlatan, beaucoup trop honorablement habill de soie, sort, va trouver l'officier tomb en mauvaises griffes et lui expose l'preuve qu'il se targue de faire. Pense si notre homme, que crucifiait le dpit de ne plus me possder jamais, dposa la centaine d'cus. Mais pourquoi te traner en longueur? La cicatrice, qui n'avait jamais exist, s'en alla grce l'eau merveilleuse dont il m'injecta par six fois le visage en prononant les paroles qui semblaient dire mirabilium, et qui ne disaient rien
du
tout.
De
la sorte, les
cent piaceri
(i),
comme
dit le
Pippa.
(i)
Les bienvenus
arg-olique
bon an
je leur
;
souhaite.
en italien,
il
Terme
pour dsigner
signifie plaisirs.
82
l'artin
Attends un peu. Ds que la rumeur se rNanna. pandit que je restais ainsi sans une cicatrice au monde, quiconque avait une balafre par la figure se mit courir au lo^is du drle, comme les synag-og-ues accourraient au Messie, s'il descendait en pleine Piazza Giudea ; le
tratre,
aprs avoir rempli d'arrhes sa bourse, fit ses paquets son compte, puisque je lui abandonnais quelques-uns de ces ducats qu'il m'avait fait gagner, les autres devaient montrer la mme discrtion. Pippa. Est-ce que l'officier sut, comprit et crut la
;
chose ?
la
Nanna.
Il
la sut
sans
le
comprendre et la crut sans la croire. Suffit alors. Pippa. Dans la queue gt le venin. Nanna. Pippa. Qu'y a-t-il encore ? aprs tant Il reste le meilleur. Le sot, Nanna. de dpenses, pour lesquelles il fut forc, dit-on, de vendre un titre de chevalier, se rconcilia avec moi, par
l'entremise de ruffians et par le moyen de ses lettres et embrassades, qui me chantrent sa passion. Il vint pour se jeter mes pieds, la corde au cou, et comme il se composait intrieurement quelques paroles propres le faire rentrer dans mes bonnes grces, il se trouva passer devant la boutique du peintre qui m'avait barbouill le tableau miracle que je devais, je le disais bien haut, porter en personne Lorette. Ses yeux se fixrent sur la toile et il se vit l tout crach, le poignard la main, en train de me balafrer, moi, pauvrette ce n' Moi, la signetait rien encore, s'il n'avait lu dessous
; :
ra Nanna, j'adorais rnessire Maco ; mais grce au diable qui lai entra dans le gobelet en rcompense de mon adoration, fai reu de lui cette balajre, dont m'a gurie la Madone laquelle je suspends
cet ex-voto.
Pippa.
Ah
Ah
LES RAr.IONAMENTI
83
Il fit, en lisant son histoire, la mme griNanna. mace que les vques (i) font leurs pancartes, sous les pieds des dmons qui les btonnent quant on les excommunie. De retour chez lui, sorti de ses g-onds, il me fit consentir moyennant le cadeau d'une robe effacer son nom du tableau
.
ce bravache dpens me donna encore l'arg-ent ncessaire pour aller o je n'avais nullement fait vu d'aller; mais cela ne. suffisait pas, je refusai de partir et force lui fut de
Ah Nanna. L
Pippa.
ah
ah
conclusion, la voici
ses
me
Venu chez
vous,
il
jamais eu de cicatrice la figure ? lYanna. Je vais te dire, Pippa. Je pris je ne sais plus quoi, quelque chose comme une lame de couteau, et
je
me
tins
vint.
ferme toute
me
Pour un peu, tu aurais cru, en apercevant la trace livide profondment empreinte dans la chair, que c'tait une balafre gurie.
Un
chapp du sac de
avec une
Rome
par
un
foul de ses compagnons, par la fureur des vents dchans, sur le rivage d'une grande ville, dont tait souveraine une signora dont je no me rappelle pas
le
nom.
Gomme
elle allait
84
le
l'ahtin
pauvre
homme
tout hriss et plus semblable la peur que ne ressemble la canaille la Cour d' prsent. Le pis, c'est que les
paysans, le prenant pour quelque grand seig-neur espalui et de ses camarades malandrins d'un homme qui se trouve sans armes, avoir perdu son chemin. Mais la sig-nora, les ayant envoys se faire pendre rien qu'en relevant la tte, s'approcha de lui, le rconforta d'un air g-racieux, d'un g-este bienveillant, l'emmena dans son palais, fit renflouer le navire et restaurer les navi^-ateurs plus que princirement puis, tant alle rendre visite au baron, qui avait repris sa bonne mine, elle se prit couter le pome, le discours, le sermon, le prche
g-nol, l'entouraient
pour
faire
de
quand les fleuves couleraient rebours. Tratres d'hommes Menteurs d'hommes Faussets d'hommes Tan!
et,
remarquant
la
larg-eur de sa poitrine et
;
de ses paules, en restait stupfaite elle acheva detomber d'tonnement en contemplant la fiert de sa haute mine ses yeux, pleins d'honneur, la'faisaient soupirer, et ses cheveux d'or frisl'enivrrent compltement elle ne pouvait s'arracher au plaisir de parcourir des yeux toute son aimable personne, d'admirer la g-rce dont l'avait dou la nature, celte truie, et restait entirement absorbe dans la divinit de son visag-e. Maudits soient le visage et le reste
;
Pourquoi les maudire ? Nanna. Le plus souvent ils sont trompeurs deux fois pour une ils vous abusent, il m'en est tmoin de la bonne mine du baron, qui ft devenir moiti folle la signora dont je te parle. Eu moins de temps qu'une femme ne change de fantaisie, elle ordonna de prpa-
Pippa.
et,
quand
auprs
le
royal
;
avec
le niessire
d'elle
venaient de proche en
LES R VGIONAMENTI
85
proche
l'ordre de Melchisedech.
Sur
devant
les
il
quand
atrams par une multitude de serviteurs, et, le baron fit ses prlui ?
sents la signora.
Pippa.
Sa Saintet une paire de mules brodes de feston d'or, qu'elle avait aux pieds le jour que Gian-Matteo (i) les lui baisait le pastoral du pape Etoupe je veux dire Lin la boule de l'oblisque une
portait sur la tte le jour des Cendres;
;
; ;
;
Nanna.
de force Saint-Pierre, gardien de ses escaliers une nappe de l'office secret du Palais, et je nesais combien de reliquesdes Santa Santorum que sa prosopope, ce qu'il prtendait, avait rchappes des mains des ennemis. L-dessus se montra un habile joueur de rebec qui aprs avoir accord son instrument chanta d'tranges sottises. Pippa. Que chanta- t-il, Dieu vous bnisse ? La haine du chaud contre le froid, du Nanna. froid contre le chaud; il dit pourquoi l't a les jours longs, pourquoi l'hiver les a courts; il chanta la parent qui relie le coup de foudre du bruit du tonnerre, le bruitdu tonnerre l'clair. l'clair aunuasre et le nuaofe au beau temps il dit o gt la pluie quand il fait beau il dit la grle, la et le beau temps, quaqd il pleut
clef arrache
;
il
l'htesse
quand on quand on
celle
il
la fin
dit
le
feu
chante
Pippa.
(i)
Jolis secrets
Giaa-Matteo
Gtiiberti, le Ditaire,
ennemi de
l'Arc'tin.
86
l'arbtin
Nanna.
tait le
Dj Sa Seig-neurie
comme
du
il
la sig-nora,
\e
qui cou-
chant
les
morts coutent
Kyrie Eleison,
semblait vivre que lorsque cet mit l'interroger sur les papes, les cardinaux puis elle en vint le supplier de lui conter comment l'astuce clricale s'tait laiss choir dans les g-riffes des mauvaises pattes. Alors le baron, pour obir aux ordres de sa supplique, tirant de sa poitrine un de ces soupirs qui s'chappent astucieusement du foie d'une putain lorsqu'elle aperoit une bourse pleine, a Puisque Ton Altesse, sig-nora, veut que je me dit ressouvienne de choses qui me font prendre en haine
hte, et,
comme
;
ne
homme
parlait, elle se
ma mmoire quand
comment
Espagnols,
elle se
l'impratrice
du monde devint
esclave des
de plus tout ce que j'ai vu de misres. Mais quel Marane, quel Tudesque, quel Juif serait si cruel qu'il puisse raconter de telles choses quelqu'un sans se briser de sanglots ? Puis il ajouta: Sig-nora, il est l'heure de dormir, les toiles disparaissent pourtant, si ta volont est de connatre nos infortunes, quoique ce soit renouveler ma douleur que de les
et je te dirai
;
commencerai. Aprs ces mots, il entama l'histoire de ce peuple qui, pour parg-ner six ducats, s fit massacrer, puis conta comment un bruit circula tout coup dans Rome des
dire, je
;
lansquenets et des jure-Dieu venaient, enseignes dployes, pour la faire la queue du monde. L'un disait l'autre Prends son grabat et marche ,et certes, plus d'un s'en allait par les jachres, si cette tratresse de proclamation A peine de la hart ne s'j tait oppose. Il conta comment aprs cette proclamation, ce
:
peuple lche se mita enfouirses cus, sesplats d'arg-ent, ses joyaux, ses colliers, ses vtements et tous ses objets prcieux comment dans les groupes, les attroupements d'hommes, pars ou rassembls et l, chacun disait
;
ILES
RAG'ONAMENTI
87
de
la
files
de soldats
et, certes, si
le
cou-
consistait
chausses, les
sent
t
les
beaux pourpoints, les belles pes dores, Espag-nols et Allemands eusmal venus. Le baron conta comment un
les les
dans
rues
!
et
demandez Dieu
misri-
chtiment est proche, elle Mais leur org-ueil n'avait pas d'oreilles. Mais pourquoi les scribes et les pharisiens apparurent la croix de Monte-Mari, comme il disait, et quand le soleil donna sur leurs armures, l'clat terrible qui s'en chappait fit trembler les poltrons accourus aux remparts de plus d'pouvante que n'en causent les clairs et les coups de tonnerre. Ni les uns ni les autres ne songeaient aux moyens de repousser l'ennemi qui s'avantous cherchaient des yeux quelque trou pour s'y ait blottir. En ce moment, une rumeur s'leva du ct du Monte-San-Spirito, et nos braves la parade, ds le premier assaut, ressemblrent celui qui fait du premier coup une chose, puis ne la russit plus jamais si bien. Je veux dire qu'ils turent Bourbon et qu'aprs avoir pris je ne sais combien de bannires, ils allrent les porter au palais avec des Vivat vivat assourdir le ciel et la terre. Pendant qu'ils croyaient tenir la victoire, voici que les barricades du Monte sont emportes et que l'ennemi faisant de la chair pt d'une foule de g-ens qui n'avaient commis ni faute, ni pch dans la bataille, s'lana dans le Borgo; de l, quelques-uns passrent le pont, pntrrent jusqu'aux Banchi, puis rtrogradrent, et l'on prtend que cette bonne me de castel Saint-Ange, dans lequel s'tait mis l'abri le bon ami, ne les bombarda pas pour deux raisons l'une, crainte l'autre, de de jeter au vent ses pilules et sa poudre
; !
!
88
L ARTIN
mettre l'ennemi plus en colre qu'il n'tait. On ne s'y proccupait que de faire dvaler des cordes pour hisser dans le Saint des Saints les g-rands clercs qui avaient le feu au cul. Mais voici venir la nuit, voici que les grosses bedaines qui gardaient le Ponte-Sisto ont la venette, et voici
Rome mme;
dj s'lvent des clameurs, les portes sont jetes bas, chacun s'enfuit, chacun se cache, chacun se lamente.
ceux sang- baigne les rues, partout on massacre qu'on torture poussent des cris, les prisonniers font des supplications, les femmes s'arrachent les cheveux, les vieillards tremblent, toute la ville est mise les pieds en l'air, et bienheureux celui qui meurt du premier coup ou qui, ag-onisant, rencontre quelqu'un qui l'achve: Mais qui pourrait dire les horreurs d'une pareille nuit? Frres, moines, chapelains et toute la squelle, arms
Le
ou sans armes, se blottissaient dans les spultures, plus morts que vifs, et il ne resta pas un rduit, pas un trou, pas un puits, pas un clocher, pas une cave, pas le moindre g-te secret qui ne se trouvt aussitt plein
de toutes sortes de g-ens. Les respectables personnages, on les tournait en drision et, leurs vtements dchirs, relevs sur leur dos, on les fouaillait, on leur crachait dessus; on ne respectait ni les g-lises, ni les hpitaux, ni ils entrrent, les mcrants, jusque les maisons, ni rien dans ces lieux o les hommes ne doivent pas pntrer eti pour comble d'-affront, ils forcrent les femmes d'aller o l'excommunication attend toute femme qui y met
;
le pied.
La
tout rouges
du
g-rand piti, c'tait d'entendre les maris, sang- qui coulait de leurs blessures, ap-
ter ce bloc de
peler leurs femnies perdues, d'une voix faire sanglomarbre du Colise, qui se tient debout
sans ciment. Le baron racontait la signora ce que je te raconte et, comme il en venait aux lamentations que faisait le pape dans le chteau, maudissant je ne sais qui de lui avoir manqu de parole, il laissa chapper de
LES RAGIONAMENTl
ses
8^
yeux tant de larmes, qu'il aurait pu s'y noyer. Enfin, ne pouvant plus cracher un mot, il resta comme muet.
Pippa. Gomment est-ce possible, qu'il plaig-nt les malheurs du pape, tant ennemi des prtres ? Parce que nous n'en sommes pas moins Nanna. chrtiens, qu'ils n'en sont pas moins prtres, et que
l'me, d'ailleurs, doit aussi penser ses aiFaires. Voil
d'une telle angoisse que la mains, qu'elle treig-nit doucement deux reprises et l'accompag-na jusqu' sa chambre, o elle le laissa en lui souhaitant le bonsoir,
pourquoi
le
baron fut
saisi
Pippa.
je ne pouvais plus
JS'aiina.
che-pied, te
fait de m'abrg-er l'histoire vous couter sans pleurer. Je ne t'en ai cont qu'une bribe, clofaisant part d'un dtail par-ci, d'un autre
;
donn
ma mmoire
res-
semeler; puis, on n'en viendrait jamais bout, tant il y eut de cruauts dans ce sac, et si je voulais te dire les vols, les assassinats, les violences exerces par ceux-l mmes dans les maisons desquels les fug^itifs pensaient
en sret, je serais en danger de m'attirer la haine de nombre de g-ens qui ne croient pas que l'on sache
tre
comment
Pippa.
ils
Laissez de ct
;
mensong-es
Nanna.
faons.
Pippa.
Nanna.
La
la
bonne mine
s'il
el
toute en feu, et le
comme
l
et t
manires du baron, tait dans la poitrine de vif arg-ent. Song-eant la g-randisles belles
cur
lui tressautait
sime renomme de sa race et aux prouesses qu'elle l'eslimait avoir d faia*e dans cette horrible nuit, elle se
9
dbattait sur sa couche
i"lacial et
l'artin
personne qui a un paroles de cet homme lui restaient enfonces dans la mmoire, et elle faisciit peu de cas du sommeil. Dj le jour suivant, l'aide des couleurs de messire le Soleil, avait mis le fard aux joues de madone l'Aurore elle s'en fut trouver sa sur, et aprs lui avoir cont un song-e, au pied lev,
brlant souci
;
comme une
la fig-ure et les
lui dit
Que te semble du plerin qui nous est survenu? As- tu jamais vu plus belle prestance que la sienne ?
Quels miracles il devait accomplir, les armes la main, pendant que l'on se disputait Rome? Impossible qu'il ne soit pas issu d'un noble sang-, et certes, si depuis que la mort m'a enlev mon premier poux je n'avais fait vu de rester veuve, peut-tre, peut-tre me laisserais-je aller faire cette faute une seconde fois, mais pour lui seul. Certes, ma sur, je ne veux rien te cacher bien mieux, je te jure par l'affection nouvelle que je porte la noblesse de l'tranger, que, depuis la mort de mon poux, mon cur est rest on ne peut plus avare d'amour maintenant je reconnais les vestig-es de cette ancienne flamme qui jadis me consuma tout coup et non petit petit. Mais avant que je commette aucune
;
que la terre s'entr'ouvre et m'eng-loutisse vive, ou que la foudre du ciel m'abme dans les profondeurs. Je ne suis pas femme mettre en lambeaux les lois de l'honneur celui qui eut mon amour l'a emport avec lui dans l'autre monde, et il en jouira in s.^.gula s^guloRUM. En achevant ces mots, elle se mit pleurer, qu'on
vilenie,
;
))
l'aurait crue
Pauvrette La sur, qui n'tait pas hypocrite et qui prenait les choses par l'endroit, fit des moqueries de son vu, de ses lamentations, et lui rpliqua Est-il possible que tu ne veuilles pas connatre combien il est doux d'avoir de petits enfants et de quel miel sont les
Pippa.
assomme de coups.
!
Nanna.
LES RAGIONAMBNTI
9I
ions de M'o Vnus? Quelle folie est la tienne, si tu crois que les mes des morts n'ont d'autres soucis que de savoir si leurs femmes se remarient ou non ? Mais je veux que tu te contentes pour toute victoire de ne t'tre pas plie prendre un de ces nombreux princes qui
malin deCupidon? que te t'y casser le cou. En outre, tous tes voisins sont tes ennemis sache donc reconnatre l'occasion, qui t'a mis sa mche de cheveux dans la main, et si notre sang se mle au sang- romain, quelle cit pourra galer la ntre ? A prsent, faisons faire des prires dans les monastres pour que le Ciel conduise bien nos projets. Pendant ce temps-l, nous trouverons le moyen de le retenir ici ;
t'ont convoite.
Veux-tu
rsister ce
comme
:
il
cause aussi de la rudesse du froid qui sort du cur de l'hiver. Tu m'interrog-es desyeux, Pippa elle
et
sut
si
le
coup
de pouce au vu, la pudeur, et que la signora, jetant son honneur derrire ses paules, soit qu'elle reste assise, soit qu'elle se promne, toujours voit, toujours entend le baron. La nuit vient, et quand tout dort, mme les grillons, elle veille, elle se retourne dans son lit, tantt sur un flanc, tantt sur l'autre, s'entretenant de lui avec elle-mme et se consumant dans cette angoisse connue seulement de celui qui se couche et se relve, selon que la jalousie dont il est travaill veut qu'il se couche ou se lve. Pour te le dclarer net, elle qui avait la tte l'envers en arriva aux mauvaises fins avec le bel ami; elle en vint l, ma tille. Elle fit sagement. Pippa.
Nanna.
Pippa.
le
le dit
Qui
Il
sein.
92
l'aRTIN
Quand
Il le
il
du
trait.
Ds que
la sig-nora
eut
mmoire de
celui qui
s'en
a porta inferi peu de temps auparavant, cette bavarde de Renomme, cette dsuvre de Renomme, cette mauvaise lang-ue de Renomme courut le proclamer partout les princes qui l'avaient demande en mariag-e en donnrent leurs mes Satanasavec les plus g-rosses injures du monde, et dirent pire que pendre du ciel et de la fortune. Sur ces entrefaites, le Gain se voyant bien
;
((.
Amis,
la
Rome
donn, de
une autre plus belle. Mettezvous donc commencer vos prparatifs discrtement, et pendant que vous ferez ce que je vous commande, je trouverai quelque moyen adroit de prendre cong- de la sig^nora. Mais qui pourrait jeter del cendre dans les yeux des amants, lesquels voient ce que nul ne voit, et entendent ce que nul n'entend? Aussitt qu'elle vit tout sens dessus dessous, elle s'aperut que la bonne pice voulait, l'aide de son navire, oprer le Leva ejas, et, transporte de fureur, sans chandelle et sans raison, se mit courir par le pays comme une folle. Arrive devant le baron, le visag-e couvert de pleur, les yeux noys, les lvres sches, elle dnoua sa lang-ue entortille dans les lacets de l'amour, et laissa chapper de sa bouche ces
je suis destin en rdilier
paroles
amour,
comme
es
tu
l'as
toi
que tu
cruel, de
LES RAGIONAMENTI
q5
mer ceUe heure que l'hiver est dans grande rie^ueur de toute l'anne homme sans piti qui non seulement ne devrais pas aller chercher [juelque rgion lointaine, mais ne pas mme retourner bien mme 1 Piome par d'aussi affreux temps, quand elle serait plus que jamais florissante, c'est moi que tu fuis, cruel, c'est moi que tu fuis, impie Hlas! je t'en
vouloir prendre la
sa pi as
;
!
me
;
main
mon
DOS noces peine entames si les plaisirs que tu as gots avec moi sont de quelque prix tes yeux, aie piti
mon tat et de ma maison qui, toi parti, tomberont en ruine ; et si les prires qui flchissent jusqu' Dieu trouvent accs dans ton sein, renonce ce projet que tu as de t'en aller. Dj, pour m'tre abandonne toi, j'ai encouru la haine non seulement des ducs, des marquis, des seigneurs dont j'ai refus la main, mais celle de mes propres sujets et vassaux, qui me mprisent, et il me semble vraiment tre prisonnire des uns et des autres.
de
Je supporterais tout cependant,
qui,
si
j'avais de toi
tes
un
fils
grces et ton
visage.
matre en
fait d'astuce,
obstinment attach
l'illu;
il ne par ses prires, ni par les larmes, semblable cet avare, ce ladre qui, en un temps de famine, et vo^^ant les pauvres mourir par les rues, refuse de donner une bouche de pain aux supplications d'un mendiant affam. Enfin, d'une faon brve, il lui rpondit qu'il ne voulait pas nier les obbgations dont il
mme
les
yeux
se laissa flchir ni
lui tait
qu'il n'avait
jamais song
la quitter
nir
un front d'airain lui avoir promis de la prendre pour femme, et rejetait la faute sur le cli clorum. 11 lui jura que l'ange lui tait apparu et lui
;
il
niait avec
94
L*ARJTIN
mais
c'tait pr-
cher devant des poireaux, car elle le reg'ardait d'un il en courroux, et la rag'e qui lui faisait sortir de son cur
enflamm un juste mpris ml de douleur lui jaillissait des yeux et de la bouche. C'est pourquoi elle se tourna de son ct et lui dit Tu n'as jamais t un Romain, et tu mens par la gorg-e quand tu dis tre de ce
:
noble sang. C'est le Mont-Testaccio (i), homme sans foi, t'a form de ces culs de bouteilles dont il est fait lui-mme, et les chiennes de l'endroit t'ont nourri de leur lait voil pourquoi tu n'as pas seulement montr un sig-ne de compassion pendant que je te suppliais, que je sanglotais. Mais qui donc conterai-je mes malheurs, puisque c'est comme s'il n'y avait l-haut personne pour peser les torts dans la balance de la justice ? Certes,
qui
;
aujourd'hui,
il
n'y a plus de
:
bonne
je recueille cet
homme maltrait
de tout ce que j'ai, je me donne et m'abandonne lui, et cela n'empche pas qu'il me quitte, trahie, dshonore; pour comble d'outrag-e, il veut me faire accroire qu'un messager lui est venu du ciel, charg de lui dcouvrir les secrets du bon Dieu, qui n'a rien de mieux faire que de s'occuper de tes petites histoires Mais je ne te retiens pas va-t'en, suis le chemin que te montrent les song-es et les visions; bien sr, bien sr tu rtabliras le peuple d'Isral. J'ai toujours l'esprance que le chtiment t'attend au. milieu des cueils tu invoqueras mon nom alors, tu imploreras plus de sept fois ma g-nrosit et ma tendresse, mais je te poursuivrai de ma haine, je me vengerai par le feu et par le fer; morte, mon ombre, mon me, mon esprit te poursuivront encore! Elle ne put en dire davantage, car
par la mer; je
lui fais part
!
(i) ^fonliclJle, au bord du Tibre, Home. Il a t form par raccumulatioa des tessons de pots qu'y laissaient ceux qui, allant au fleuve chercher de l'eau, cassaient la cruche. De l le nom de
Teslaccio.
LES RAGIONAMBNTt
la
q5
douleur lui obstrua le chemin de la parole, et force de couper son discours par la moiti. Comme une malade, la vue teinte, ne pouvant plus se tenir sur les jambes, elle se fit un lit des bras de ses suivantes, qui l'emportrent et la couchrent, laissante le baron, non sans que la honte de la trahison dont il accablait l'infortune ne couvrt de roui^eur son visage infme. Tu
lui fut
pleures, Pippa ?
Pippa.
Nanna.
t-il
les
la-
mentations del signora, il se disposa nanmoins partir. Ses gens, qui tranaient le navire au rivage, ressemblaient des fourmis s'approvisionnant de g-rain peur l'hiver; l'un portait de Teau, l'autre des rameaux garnis de feuillage, un autre... tous les malheurs que je lui
souhaite
l ?
!
Pippa.
faisait
elle
elle
gnaittoute^ et rien que d'entendre les cris des mariniers bien repus, le branle-bas de la chiourme et du reste de
l'quipage, elle se pmait, elle haletait, elle se mourait.
Hlas cruel amour, pourquoi nous crucifies-tu sibarbaet de tant de faons ? Mais voici que la signora, avant encore un peu d'espoir, s'entretient avec sa sur
!
rement
et lui dit
Chre sur, ne vois-tu pas qu'il s'en va et que dj le navire appareille pour dtaler? Mais pourquoi, cieux ingrats si je devais m'attendre cet abandon, n'ai-je pas la force de le silpporter? Sur chrie, toi seule maintenant me viendras en aide, puisque ce tratre ht toujours de toi le secrtaire de ses penses, et toujours eut en toi confiance. Va donc, parle-lui, et en lui parlant cherche le flchir dis-lui de ma part que je n'tais point l'allie de ceux qui, sous prtexte d'accord, ont fait de sa patrie un monceau de ruines; que je n'ai
gt)
L*ARTIN
pas tran hors du spulcre fes os de mon pre, et que, par consquent, il lui plaise de m'entendre lui dire quatre paroles avant que je meure. Qu'il me fasse, lui diras-tu, moi qui l'adore perdument, cette seule g-rcc de ne pas partir l'heure qu'il est et d'attendre que le chemin soit plusnavig-able. Je n'entends pas le forcer m'pouser, puisqu'il me mprise, et encore moins
rester
attnuer
la
qu'il m'accorde quelque petit dlai pour douleur; mons^ul dsir, c'est d'apprendre supporter. Aprs ces mots, elle se tut, en larici
;
mais
ma
moyant. Pippa.
Mon
Nanna.
poir,
dit
le
mais
cruel ne s'attendrit
un mur qui un
Enfin jours
la sig-nora,
lui jeter
sort,
bien certaine de son dpart, rsolut de encore qu'elle s'en ft jusque-l toului russit-il ?
!
fait
conscience.
Pippa.
Cela
Nanna.
le soleil,
Ah bien, oui
mers, les enfers et toute la diablerie elle parpilla des eaux noires, des poussires de morts, des herbes sches Tombre elle pronona des formules magiques, traa des sig-nes, des caractres, des fig"ures bizarres, dialogua avec elle-mme, et il n'y eut pas un seul saint qui ft mine de se soucier des amants trompeurs! Il tait minuit quand elle faisait ainsi crdit ses incantations, et les hiboux, les chats-huants, les chauves-souris dormaient tout eng-ourdis seule, elle ne pouvait appesantir ses yeux de sommeil l'amour, au contraire, la tourmentait davantag-e. Aprs tre reste muette un bout de temps, elle se mit parler et se dit elle-mme <k Mainlenant, que faire, misrable ? Redemanderai:
; ;
LES RAGIONAMENTl
je
97
j'ai
refuss ?
Siivrai-je la fortune
Romains
Oui,
cela pourra
m'tre utile, puisque je leur suis venue en aide et que Mais cette nation sait si bien reconnatre les bienfaits
I
m'embarquerais sur leur fier navire ? N'ai-je pas approuv les parjures de ces Romains, qui se moqueront de moi si je vais
je
quand
mme
eux? Enfin,
et qu'en ce
las
!
ils vog-uenl sur la mer ? Hmeurs, meurs donc, infortune et guris ta douleur avec du fer. Mais toi, ma sur, c'est toi qui m'as prcipite dans tous mes maux, toi qui m'as fait trahir les cendres de mon poux et mon vu de chastet, dloyale et coupable femme que je suis Quelles belles imprcations Pippa, Si tu t'meus de les entendre raconter par Nanna. moi, qui n'en rpte pas une bribe comme il faut et qui les emmle en les rcitant pitoyablement, qu'aurais-tu fait en les entendant de sa propre bouche?... En ce moment le baron faisait nager les rames dans l'eau, et, en s'esquivant, souvent se retournait, dans la crainte d'avoir tout le peuple ses trousses. Quand l'aube se montra, la dsole, qui cette nuit avait paru d'un tiers plus longue, comme les messes de Nol, se mit sa fentre et s'gratigna la figure, s'arracha les cheveux et
!
moment mme
se prit dire
Dieu, cet homme s'chappera malgr moi ? Un tranger mprisera ma Seigneurie, et ma puissance ne pourra rien contre lui, elle ne le poursuivra pas
mon
travers le
monde
Mais que dis-je? et o suis-je? qi m'a arrach l'me de sa place ? Ah malheureuse, i cruelle destine est proche je devais faire cela quand j le pouvais, et non cette heure que je ne le puis plu ;.
i
!
Voil
la
!
fidlit
les reliques
de
Rome
Voil
sa pairie! le
qB
voil;
il
l'arAtin
moi en me tournant le dos, paye de ma bienveillance etde ma courtoisie! Mais pourquoi, sitt que je souponnais sa flonie, ne l'ai-je pas empoisonn ? Ou mieux, que ne l'ai-je fait hacher menu, pour dvorer sa chair pantelante et chaude ? Peut-tre tait-ce chanceux ou dang-ereux ; mais quand mme, pouvait-il m'arriver pis que ce qui m'arrive ? Puisqu'il me fallait mourir, mieux valait, certes, les noyer d'abord ou les brler, eux et leur navire. Cela dit, elle maudit l'origine de Rome et la place o elle est btie, et son pass, et son avenir elle pria le ciel et l'abme de faire natre de ses ossements et de ceux de sa race des hommes de vengeance et de haine puis, aprs avoir dit tout ce qui lui sortit de la bouche et envoy sa nourrice s'occuper je ne sais quoi, elle se disposa se tuer. Pippa. Gomment se tuer ?
vient au-devant de
cela qu'il
c'est
comme
me
les
joues tachetes de
la
yeux ir^jects de sang, elle entra dans sa chambre et, mise en fureur par le comble du dsespoir, dgaina je ne sais quelle pe, elle donne
pleur de la mort,
par
Gain;
comme
elle allait,
vtements romains et le lit dans le Judas. Elle suspendit un moment sa main, elle la suspendit pour profrer les dernires paroles, qui furent presque en propres termes celles-ci depuis qu'un pdagogue me les a enseignes, je les ai toujours tenues dans ma mmoire comme le
sentrent
quelques
lequel
elle
couchait avec
si
chres,
quand Dieu
et le
me
le fussiez,
prenez, je vous
me
spare
du
Moi qui
vais sous
vcu
le
m'en
LES RAGIONAMENTI
terre,
99
avec mon ombre. J'ai bti une ville d'un assez grand nom; j'ai vu s'lever mes difices et je me suis je serais donc veng-e du frre de l'poux que j'ai eu heureuse entre les plus heureuses, si la nef romaine n'avait abord mes rivages. Cela dit, elle bouleversa le lit grands coups de tte,
;
le
s'cria
((
la vie
sans vengeance
fer,
en
me
tuocciras ce
;
vit toujours
dans
mon cur
mourons donc
A peine avait-elle
achev
il
Nanna.
alla faire
le
sut ?
folle.
Ainsi elle
de promenade dans l'autre monde de la manire que je viens de te le dire, et cela lui advint pour avoir trop complu un autre. Oh les hommes, les hommes pardieu, c'est un sucre que de les assassiner comme nous le faisons, "si Ton considre la faon dont ils nous assassinent, nous
un
autres.
L'COLIER MALICIEUX
ISanna. Un colier, plus fond en g-alanteries qu'en livres, madr, rus, adroit, vif, malicieux et vaurien au superlatif degr, s'en vient Venise; il y reste cach quelques jours, assez de temps pour s'informer au juste des courtisanes les plus voleuses et les plus riches
qu'il V et
dans
la ville, et
;
demande
lui avait
parler au nigaud
qui
le
il
donn entendre
^fvensvs
loc
l'aiietin
il tait venu sous un dguisement Venise pour prendre du plaisir un bon mois et en mme temps acheter des bijoux et des toffes sa fantaisie. Il le prend donc part et lui dit Mon ami, je voudrais coucher avec telle sig-nora; va la trouver et dis-lui qui jesuis, mais sous serment qu'elle ne
:
jour
pas. Si elle est discrte, elle connatra un beaut de mon me. Le messag^er s'en va au g'alop, arrive la porte de la belle, et l'aide d'un tic, toc, tac fait comparoir la chambrire au balcon, pour me servir de leurs termes. La chambrire reconnat le courtier en marchandises de la patronne, tire le cordon sans faire autrement de difficult, et l'homme, aprs avoir mis la belle amie au fait de tout, introduit dans l'estacade le neveu postiche de Monseig-neur le Rvrendissime, qui se met gravir l'escalier avec une majest pontificale. La signora s'avance sa rencontre et remarque de prime abord comme il a bon air sur champ do drap avec le pourpoint de satin lioir, la toque et les escarpins deterzio pelo, espag-nolement parlant. Elle lui tend alors la main et les lvres, avec la plus honnte putanerie qui se puisse imaginer, et, la conversation engage, l'entend tout propos y faire intervenir oncle... Il branlait la tte avec (( Monseigneur mon certains hochements plus princiers que n'en ont les princes et faisait comme si tout lui puait au nez; il parlait lentement, doucement, honntement, et, en lanant de petits crachats faits au moule, semblait s'couter
la
:
me trahira
parler.
Pippa.
Naniia.
Je
le
La Vnitienne se chaque compliment que le ribaud lui adressait, rpondait Ze me meurs, assez de cses! et plus de btises que je ne saurais t'en dire; ils convinrent dcoucher ensemble. L'colier Fait signe celui qui lui avait servi d'entremetteur et lui donne
t'inquites tu ?
vois en imagination.
,
De quoi
*|
LES ragiona?.:enti
deux sequins en
charg-e toi
lui
disant
Dpense-moi
cela,
de tout. Mcssire le sot va, et tout en achetant, chlppe les marquettes et les marcelli; puis il envoie porter les provisions de table par un portefaix la maison de la divine. Pippa. On dirait que vous tes alle Venise, la faon dont vous parlez de portefaix et de panier. Ne le sais-tu pas si j'y suis alle? Nanna.
se
Pippa. En Nanna. Le moment vint de se mettre au d'adshabillant, docteur venir, aprs avoir rien ajout bord Je ne veux pas, n'en
Si, si.
lit.
le
dit
.((
faites
, et
Votre Seig'neurie est trop bonne , la laissa l'aider s'ter de dessus le dos une jaquette de toile toute cras
au poids que
parler.
Pippa.
Je suis
dans
la
l'attente.
Nanna.
sous
le
Quand
putain sentit sa
la
main
flchir
doublure, on
un filou en train de guigner de l'il un de ces badauds qui se laissent enlever leur bourse d'entre les cuisses. La veste pose sur la table, elle fit mine de ne
et dit
aperue de rien, se promettant bien d'aveugler force de caresses et de baisers, et en lui donnant discrtion, ds qu'elle serait couche avec lui, pommes et fenouil. Le matin venu, le petit valet du fripon entre dans la chambre, en faisant des rvrences crmonieuses, et le maudit colier lui jette sa bourse qui, en tombant par terre, ne fit pas grand bruit. Va chercher la malvoisie et des massepains, )) lui ditlongtemps les massepains et la il. On n'attendit pas malvoisie arrivrent, accompagns d'ufs frais. On dne ensuite, par le moyen de celui qui tait all acheter le souper, puis on se recouche et on se relve comme cela cinq ou six matins la file compte que le malandrin en
s'tre
l'homme
7-
102
fut
l'arTIN
enviiron, et
que pour
ce prix-l
des caresses du meilleur aloi. Continuellement l'colier, vaurien au sortir du nid, levait la voix et s'criait. Que ne faisje un g"aron Votre Seig-neurie Je lui rsig-nerais prieur,
eut
et
un amour
Plt Dieu rpondit-elle. Alors ne perdons pas de temps , dit l'enjleur de celle qui enjlait tout le monde. Que fit- il il. ta la
!
paroisse et abbaye
((
jaquette
main, aperut un coffre plein de ferrures et de serrures diaboliques il la pria de serrer dedans les ducats cousus et cachs par lui dans la doublure, pour de bonnes raisons. Elle les y enferme et lui remet la clef, se croyant bien certaine d'en avoir revenir au moins une ou deux centaines. Aussitt la mauvaise laine, la triste espce lui dit Je vouet, la
tenant
la
une chane de dame, d'environ cent cinquante sequins comme je ne suis pas grand connaisseur, faites-m'en apporter une ici, aujourd'hui ou demain, je l'achterai aussitt. Elle y courut en poste, pensant que le cadeau tait pour elle, feig-nit d'aller chez
drais acheter
;
tel
ou
tel
joaillier, et
fit
du cou
non
de
orfvre.
En
l'or fin,
qui pesait deux cents ducats d'or par un prtendu la lui montrant, force de dire C'est et quel travail merveilleux! il fit si bien
la sienne,
:
que l'on en vint au march et que le prix fut convenu deux cent ving-t-cinq ducats. Voil la sig-nora bien contente et se disant par soi a Outre que la chane me reviendra, j'aurai encore du profit les ving-t-cinq ducats
:
de surplus.
Pippa.
et
la
la
la
LKS n vniONWENTI
[o3
jet
m'en rpondre, je donnerai en g'age ce marchand l'obque je vous ai remis pour le garder, parce que je voudrais aller montrer la chane l'un de mes amis; j'irai ensuite toucher la somme que je dois pour le joyau l'endroit o est payable cette lettre de chang-e. En
lui
exhibant un bout de papier, il fit bondir celle qui pas si maligne que lui. Comment bondir? Pippa. Nanna. Pour ne pas laisser sortir de son coffre la jaquette rembourre de ducats de laiton, elle dit grce Dieu, Emportez tout de mme la chane j'ai du crdit pour plus que cela et se tournant vers
n'tait
congdia d'un signe. L'colier prit maison. Le soir arrive, il ne se montre pas, le matin se lve, il nevient pas d'avantage; le jour entier se passe, point de nouvelles. Elle envoie chez l'homme qui le logeait; l'homme lve les paules et accuse pour tout bagage une paire de besaces, une chemise sale et un chapeau laisss par lui dans sa chambre. Quand on lui rapporta la chose, elle devint de
son compre, elle
le
fis-ure
le
le coffre, dchira la jaquette coups de dents, trouvant bourre de jetons faire les comptes, ne se pendit point, par la raison qu'on l'en empcha.
briser
et, la
LE COURTISAN
Nanna.
vivent
le-coin,
Certain messire,
meurent sur
relevt jamais
le
un de
la paille,
ces
sir^nors
qui
l'office et
derrire,
un ciachc-dansun tortille-duet le
plus joli
muguet qui
les plats
ou vidt
io4
l'artin
fr-
chenapan dans ses moindres gestes, bourdonna si bien aux oreilles d'une pauvre malheureuse, qu'elle secuisittout fait la fume de ses vantardises. Il la lanterna quatre mois, lui donner quelques chtifs
cadeaux, comme dirait de petites bagues, des pantoude satin et de velours us, des gants l'illet, des charpes, des coiffes et, une fois sur dix, une paire de poulets maigres, un chapelet de grives, un baril de corso et autres prsents de galants sans le sou. Tu peux compter qu'il y dpensa une vingtaine d'cus, en tout temps, pour la maniera son plaisir. Elle, qui tait entretenue l'gal de n'importe quelle autre, ne se souciant plus de rien, si ce n'est del grce de ce pouilleux, se laissa chapper des mains autant d'amants qu'elle en avait et, toute au courtisan, se rengorgeait quand elle le voyait trancher du grand seigneur. Pippa. A quel propos tranchait-il du grand seifles
gneur?
propos de son cardinal, dont la Rvrendissime Seigneurie l'embrassait par le cou deux fois par jour, ne mangeait rien sans le partager avec lui et lui dcouvrait tous ses secrets quand il avait dissert tort et travers de rentes, provisions, expectatives, montr des airs d'Espagne, de France et d'Allemagne, il se mettait chantonner d'une voix de cloche fle
;
:
Nanna. A
et:
Si
mince
est le
fil
oh
!...
Il
pleine et
archipieine de madrigaux, de la
la
mme
ftes.
LES RAGIONAMENTI
io5
connat pas
autrefois
;
si
bien que je
les tais
les
connaissais
la tte
moi-mme
utiles,
je
me
mis dans
et ils
l'occasion
me furent trs
j'tais
quelqu'un que
une po-
tesse, suffit.
Pippa.
tirer.
Apprenez-les-moi donc,
que vous
faisiez, je
Nanna.
Pippa.
les
Les
les
Pourquoi avec les noms, et pourquoi pas personnes ? Nanna. Parce que leurs cus ont la croix de bois et qu'ils vous payent de (7 /orm Pa/r/; qu'ils sont(je leur en demande pardon) une niche de fous en cag"e. Gomme je te le disais hier, ouvre-leur, choie-les, colloque les table la meilleure place, mais ne leur donne pas do nanan, si tu ne veux avoir pas t'en repentir. Pour retourner mon courtisan parfum, sans sou ni maille, tout en brouillard, le voici qui vient un soir se heurtera la porte de sa sig-nora une fois entr, il dcoche un Te Dell m laiid amu s d\ine g-rce exquise et, grimpant l'escalier avec la hte de celui qui apporte une bonne nouvelle, baise la signora venue sa rencontre, et aprs a Le diable enfin a voulu que je le baiser s'crie sorte de la misre, en dpit des cours et des balivernes dont elles leurrent ceux qui servent les rvrends cuistres. La bonne niaise se troubla toute ces mots, et comme elle croyait bien avoir plac usure tous les
avec
;
:
donns
Que t'est-il
arriv
de bon ? coutume.
dcmanda-t-cllc avec uuj hardiesse inacMon oncle est mort, ce g'ros richard qui n'a ni o'arons ni filles, ni d'autres neveux que moi. Ah ah fit-elle; Votre Seig-neure veut parler de ce vieil avare dont elle m'aentretenue maintes fois? C'est cela
))
lui
((
mme,
>)
rpondit
il.
En
fille
madre,
elle se
mit
lui
io6
L ARETIN
lcher
du monseigneur par
la
fig-ure, aussitt
qu'elle
eut entendu parler de l'hritag-e, et il se risqua lui donner du tu ; cet artifice tait suffisant, pensait-il,
pour qu'elle crt sa nouvelle g-randeur. Pippa, Voyez les petits sclrats Nanna. La chose alla droit au but o
visait le
courtisan, et
la
fit
il
cimes des arbres. Voici les Ma chre matresse, je n'ai jamais pu jusqu'ici vous montrer rellement l'amour que je vous porte je dpensais toute mon me au service de Monseig'neur,attendant que ma rcompense vnt de lui. Maintenant, Dieu a voulu, en ramenant lui le frre de mon pre, me faire connatre qu'il est, j'allais dire aussi misricordieux que sont ing-rats ces gredins de patrons. Ce que je puis t'al'firmer, c'est que j'hrite de cinquante mille ducats, tant en maisons qu'en terres et en cus sonnants, et que je n'ai ni pre, ni mre, ni frres, ni surs en vertu de quoi je te choisis pour
hbleries qu'il lui dbita
:
monter par-dessus
et
dit,
d'un prtre la baisa, et s'tant une bag-ue du doigt, la passa au doigt de la signora. Tu penses si cette histoire la rendit contente et la fit rougir d'aise si, en le serrant entre ses bras, elle put retenir ses larmes Elle voulait le remercier et ne pouvait l-dessus, l'enjleur dplie la lettre d'avis, crite de son encre, sa faon, prend un sige et dit: Voici ce que chante la
; I ;
lettre
il
Pippa.
bet.
Jusqu'
La
V Allluia^
il
lui
rcita
l'alpha-
attir sur elle pt aller metti^e ordre leur dpart qu'ils devaient effectuer ensemble, comme elle se l'tait fourr dans la tte, et il n'eut pas plus tt franchi le seuil de la porte qu'elle ouvrit une
Nanna.
signora, aprs
l'avoir
une
pour
qu'il
LES RAGIONAMENTI
IO7
colliers et
cassette o, tant en
plateaux
cents.
Comme
;
elle
retour
elle,
((
elle
court lui
Mon
cher poux
;
dit-
vous les offre pas comme ma dot, mais en signe d'amoureuse affection. L'affreux tratre prit les objets de valeur, les remit o ils taient auparavant, et ferma de sa main la cassette. La folle lier, ne sachant comment entrer encore plus avant dans les bonnes grces, voulut qu'il gardt la clef, envoya chercher des juifs et fit de Tor de tout ce qu'elle possdait en robes et autres parures avec l'argent de la vente, il s'habilla en paladin, acheta au Gampo di Fiore deux haquenes de voyage, et, sans un mot de plus, emmena la pauvrette aprs l'avoir fait habiller en homme. Il ne voulut rien emporter, si ce n'est les bijoux et autres objets prcieux de la cassette, et se dirigea avec elle du ct de Naples. Bon endroit pour les filous Pippa. Deux ou trois gtes de suite, il la traita en Nanna. marquise la nuit.il la tenait entre ses bras avec les plus grandes protestations du monde. A la fin, il voulut abrger l'histoire, et, aprs lui avoir mis dans son vin je ne sais quelle drogue soporifique apporte par lui de Rome, au beau moment o elle ronflait de son mieux il la planta l, courtisanesquement, dans lelit de l'aubergiste, lui enlevantjusqu'sahaquene,sur laquelle il fit monter un jeune gars qui se rencontra l juste comme il sortait de Ihtellerle; puis il se mit courir la poste d'un tel trot que l'on ne sut jamais o il tait all. Que fit la malheureuse, son rveil ? Pippa. Elle mit sens dessus dessous tout le vilNanna. lage, courut l'curie, prit la longe de sa monture et se pendit au rtelier de la mangeoire on prtend que l'hle, pour hriter ses vtcmants, la regarda faire.
voil toutes
mes pauvres
richesses
je ne
io8
l'artin
Pippa.
Celle qui
pour
elle
LE PUTASSIER
Nanna.
Je le parlais d'un decestruffcurs de
la
qui se prlassait
mangeait la franaise, buvait l'allemande, et, sur une petite crdence, faisait parade d'un plateau et d'un gobelet d'argent fort beau et de grande taille; plateau et gobelet taient disposs au milieu de quatre grandes coupes galement d'argent, de deux compotiers et de trois salires. Cet homme-l serait mort si chaque semaine il n'avait pas chang de putain, et il avait imagin pour besogner sans bourse dlier la plus nouvelle
piperie, la plus jolie niche laquelle ait jamais song vaurien digne de la potence et de la corde qui vive cette heure. Le chenapan sur cet article (car pour tout
le reste c'tait un honnte homme) possdait une jupe de satin cramoisi, sans le corsage, et chaque fois qu'il emmenait une signora coucher chez lui, vers la fin du souper, il se mettait dire Votre Seigneurie a sans doute entendu parler du vilain tour que m'a jou une telle par le corps par le sang on ne se comporte pas ainsi, et elle mriterait autre chose que des injures II n'y avait pas un mot de vrai dans ce qu'il disait. La bonne signora, donnant raison au hbleur, s'efforait tout fait de lui faire croire qu'elle n'tait pas une de ces espces et lui jurait de n'avoir rien promis" sans tenir. Le galant homme lui prenait la main et s'criait Ne jurez pas, je vous crois je sais que vous tes une femme comme on n'en trouve plus. Bref, il finissait par appeler un sien valet qui tait, je n'ai pas besoin de le dire, ma chre enfant, bien au courant de la
:
LES RAGIONAMBNTI
TCQ
Lev3 (le table, il l'essayait la sig'nora et lui donnait entendre que, de toute faon, il voulait lui en faire prsent. La jupe, pour n'avoir pas de corsag-e, tait comme peinte sur le corps de toutes celles qui l'essayaient, et alla donc la putain dont je te parle. Le du peur de
appelle orgueilleusement son valet et lui crie Cours chez mon tailleur et dis-lui d'apporter de quoi prendre mesure la sig'nora; qu'il vienne tout de suite, tout de suite, car je suis las de ces tout l'heure, tout l'heure. Le drevole, plutt qu'il ne court, et en moins de temps qu'on n'essuie un bu fie t revient avec le marchand, qui tait dans la confidence de la banne histoire la jupe. Il monte l'escalier, essoufllcommeun homme qui a couru, et dit en tant son bonnet Que com:
femmes
mande Votre
Pippa.
Voyez la farce Je veux,. lui dit-il, que tu trouves Narina. assez de satin cramoisi pour en faire un corsa^^re cette jupe (il lui montrait la robe qui tait encore sur le dos Ce de la pauvrette). Le tailleur mchonne un sera difficile de trouver du satin de cette qualit-l, mais je veux pour vous tre agrable et je crois pouvoir si bien m'arrang"er que nous aurons le reste de celui-L mme qui sert faire les chaussures de monseig-neur; il se les a fait confectionner en pnitence de ses pchs et quand mme je ne pourrais pas l'avoir, je me procurerais les rognures des chapeaux des cardinaux promus aux prochains Ouatre-Temps. iMatre, je vous serai bien oblig si vous le faites, dclare en minaudant la dame la jupe verte, couleur d'esprance. Le marchand en N'en doutez pas , feint de prend cong avec. un porter la robe sa boutique, s'en va, et elle reste gorger des fruits de son jardin le gros sclrat, qui la retient Ce soir prs de lui tant qu'il veut avec l'appt du vous l'aurez, sinon demain sans faute puis il prend
!
Seig"neurie ?
les
devants
et,
moindre
8
Alelle
;
me
traite, hein ?
Il
s'enferme dans
l.
tir
dans
rempliras de science. Il faisait ainsi essayer la jupe et venir le susdit tailleur pour toutes les putains amenes par lui dans sa maison, et aprs en avoir joui de toutes faons, bouilli et, rti, il feignait de se fcher tout roug-e et les mettait la porte sans rien leur donner; il croyait avoir assez fait en les payant de Tespoir
et tu le
personne.
LE TRENTE ET UN DOUBLE
Nanna.
taine
Il
madone...
brin de fille, g-rande, belle, frache au possible, etsi une putain peut tre d'une bonne nature, elle en tait; avec c?la, plaisante, alfable, ayant avec tous le mot pour rire, s'acwommodant tous avec cette g-rce aimable que l'on a ds le berceau. Elle fut un jour prie d'aller souper bi \ig'ne et mang-er la galette romagnole; ceux qui l'invitaient n'eurent [)as liesoin de la prier beaucoup, car elle prenait sa mine riante ds qu'il lui tait fait quelque pr )position agrable de la part de gens qui lui semblaient comme il faut, et ils lui avaient sembl bien comme il faut, ces misrables. Vers les vingt-deux heures, ils la -menrent la maudite vig-ne, en croupe sur
une mule;
le
LtS KAOIONA.MKNTI
III
veau de lait, buf, perdrix, tourtes, rag"ots, et ce qu'il y avait de mieux en fruit mais cela tourna mal pour
;
Pippa.
pices ?
Eh Nanna. En
le voir.
madone.
!
quoi
est-ce
qu'ils la
taillrent
en
pices, non,
tu vas
rpondre par un mchant plaisant digne du fouet, qui lui dit Signora, cette nuit nous est due^ nous et nos garons d'curie; nous voulons qu'il vous plaise que dornavant les trente-et-un simples deviennent les trente-et-un doubles, et, g-rce vous, on les appellera les archi-trente-et-un de la sorte, il y aura entre
:
les
les
anciens et les nouveaux la mme diffrence qu'entre vques et les archevques. Si vous ne vous trouvez
l'endroit
pas traite selon votre propre mrite, prenez-vous-en o nous sommes. Le scribe ne dit pas un
La
petite veuve,
quand
elle
Peut se plaindre
d'elle; de
tort.
En
rel et
coutant ces paroles, la victime de son bon natude la mchancet des autres me ressembla moi-
mme
du
elle
quand, dans
la fort
de Montetiascone, l'aube
se sentit treinte d'une telle douleur qu'elle n'en put profrer une parole. Voici que ce cochon l'entrane jusiju'au tronc d'un amandier abattu, sur lequel il lui
a|)puie le front.
tle et,
Il
lui
aprs
le lui
avoir mis o
bon
lui semblait,
il
la
lia
l'artn
remercie du service en lui appliquant sur les fesses deux tapes des plus cruelles qu'on puisse recevoir. Ce fut le
sig-nal
la
renversa sur
le
tronc
ce que les asprits du bois mal uni piquaient au derrire rinfortune,ce qui la forait malgr elle se trmousser sous lui en achevant il lui ft faire la culbute, du singe
;
;
poussa firent accourir le troisime champion mais ce sont simples gentillesses le plaisir que prit celui-ci l'ter, le remettre, le fourrer partout. La mort, ce fut de voir arriver une troupe de g'oujats, de marmitons, de cuisiniers qui sortirent de la maison de la vigne avec un tapage de chiens affams que l'on dchane, et qui sautrent sur leur proie comme des moines sur le potage. Ma fille, je te ferais pleurer si je te contais par le menu tous les outrages qu'il lui
et les cris
qu'elle
firent subir,
comment
ils
la tte,
en quelle posture
gmissements de
la
ou celuimalheu-
que toute
rent
ils la
de
fig^uier et la
fouettrent tour de bras avec des b ag-uettes de saule, pendant qu'un des bons raillards lisait haute voix la
sentence porte contre elle pour cause de malfices, numrait toutes les filouteries, sorcelleries, coqumeries,
sodomies, putaneries, faussets, cruauts, ribauderiesqui se peuvent imag-iner, et les lui mettait sur le dos. Pippa. Les bras m'en tombent. Nanna. Le matin venu, ils commencrent lui donner une aubade de sifilets, de hurlements, de ptarades et de claques^ avec plus de vacarme que n'en font les paysans la vue du renard et du loup. Plus morte que vive, avec les paroles les plus douces et les plus aUendrissantes qu'on puisse our, elle les priait de la laisser dsormais en repos; ses yeux enflamms, ses
LES RAGIONAMENTl
ses cheveux emmls, ses vtements en lambeaux la faisaient ressembler l'une de ces relig"ieuses maudites de leur papa et de leur maman et tombes entre les jambes des Allemands en se rendant Rome, o ils l'avaient envoye Pretrorum pretarum. J'en ai compassion. Fippa. La fin fut encore pire que le commenceNanna. ment. Ils la renvoyrent chez elle, l'heure o les boutiques des chang-eurs sont ouvertes, sur un cheval de bat, tout pareil ces rosses qui amnent les revendeurs au march au bl. Et sache bien quejamais voleuse qui ait recule fouet n'eut autant de honte; elle en perdit tout cidit et ne se reconnut plus elle-mme, si bien qu'elle en mourut de douleur et de dpit.
LA FUSTIGATION
Nanna.
et
proprette chez elle, pleine de suc, savoureuse au possible. Quoiqu'elle loig-nt d'elle
ne
le
quitter ni jour ni
mal
et se disait: Je
g"ai;^ne
ne perds en mcontentant les le capitaine dut s'en aller le heure: la pauvre crut que Sa Seigneurie, qui la tenait par la main, disait l'un de ses familiers, auquel il il ordonparlait dans l'oreille Donne-lui centcus nait tout justement de lui attacher ses jupes par-dessus
:
bon nombre de clients, moquait pas plus avec celui-ci que je autres. Or il arriva que lendemain de trs bonne
ii4
la tte et
l'artin
entre
de la fouaillcr avec une paire de bottes d'hiver, deux torches allumes, par le Borg-o-Vecchio, le
Borg-o-Nuovo et le Pont, jusqu' la Chiavica. On l'empoig"na donc et, avec une ceinture de taffetas, on lui lia sa robe releve du bout des pieds par-dessus la tte; son sant apparut, rond et blanc comme la lune en son plein. Oh qu'il tait ferme oh qu'il tait bien fait ni g-ros ni maigre, ni trop larg'e ni trop troit, soutenu par deux cuissettes qui surmontaient deux jambes tournes en fuseaux, plus jolies que ne le sont deux petites colonnes de cet albtre transparent que l'on travaille au tour, Florence les mmes veines que possde e marbre dont je te parle se dessinaient le long- des cuisses et des mollets. Pendant que de l'intrieur des jupons elle jetait des cris, de la voix de quelqu'un qui se trouve enferm dans un r.Dffre, les torches allumes, la paire de bottes apporte, voici que les valets appels pour la fouailler, stupfaits de la gentillesse du culise, en eurent le vertige et, laissant les bottes leur tomber des mains, restrent comme ensorcels; de bons cou[)s de bton, tout frais sortis de la Monnaie, les rveillrent; ils reprirent les bottes, chassrent la malheureuse hors du seuil et se mirent la frapper tant et tant que d'abord se montra le rouge, puis le bleu, puis le noir, puis le sang, et aux tuff, tatf, tolf qu.e faisaient les coups de semelle, canaille ou non, tout le monde poussait les mmes clameurs que les gamins quand le bourreau accomplit son office et fustige les malfaiteurs. La mal tombe fut ainsi ramene chez elle, o elle se renferma un bout de temps, dshonore par la srnade qu'on lui avait donne et mprise de tous ceux qui l'ap!
prirent.
LES RAGIONAMENTI
ii5
LA DEMOISELLE
d'une grande signera, la plus douce petite personne que Ton ait jamais vue de nos jours, se tenait au service de sa matresse, qui n'avait pas de plus grand plaisir que de 'a voir s'empresser autour d'elle, tant ses faons talent aimables et dlicates pour lui prparer boire, pour l'habiller, la dshabiller, elle montrait de si gracieuses manires qu'elle en rendait tout le monde amoureux d'elle, non sans envie de la part des autres' paresseuses chambrires. Sur cette damoiselle jeta les yeux certain comte de carton, qui portait toute sa fortune dans les broderies de son pourpoint, les ornements de sa toque, les galons de sa cape et la gane de son pe ce?
Certaine demoiselle
gentille et la plus
; ;
comte, dis-je, s'en alTola, et comme il avait ses entres la Cour, il lui parlait souvent, dansait souvent avec
qu'enfin le feu prit la il parla et dansa tant mche. Le comte de deux llards, qui s'en aperut, fit fabriquer un sonnet en son honneur et le lui adressa, envelopp dans une lettre pleine de ses soupirs, de ses tourments, de ses flammes et de ses fournaises; il y exaltait les charmes de la jeune fille avec ses jactances habituelles et disait de ses cheveux, de son visage, de sa bouche, de ses mains et de toute sa personne des choses de l'autre monde. Elle, qui n'avait pas plus de cervelle que les crabes hors de leurs bonnes lunes, s rengorgeait et croyait tre l'Anglique de Roland de Montauban. Renaud, voulez-vous dire. Pippa. Je dis Roland. Nanna. Pippa. Vous vous trompez, Roland tait d'un
elle
;
en tait; quant d'amasser de l'argent non pas des lgendes ou des termes choisis arrire
pis
pour
lui, s'il
tudi toute
ma
vie afin
ii6
l'artin
donc. Roland
culier-l, c'est
Si j'ai
que je
les ai
gars qui tous les soirs, quatre heures, passait devant notre porte. Quoi qu'il en soit, la damoiselle, qui savait lire l'criture, se g-obait elle-mme en lisant ces fadeurs,
aussi fausses que celui
ses billets doux, plus
qui les lui adressait, de sorte que, bientt, plus elle pouvait l'apercevoir et tenir de
elle tait heureuse. Des fois, il s'appujant le long- du mur, dans un coin, il mordillait son mouchoir belles dents, le jetait en l'air et le rattrapait de la main, avec un g-este de dpit comme si le Destin lui dissquait les entrailles, il menaait le ciel et lui faisait la figue. Des fois, il dansait avec une autre et ne faisait que soupirer; son pag-e, avec sa livre aux couleurs qu'elle lui avait donnes, par faveur, tait sans cesse en campag-ne. Mais cette tratresse de Fortune ne fut pas satisfaite tant qu'elle ne les eut pas amens, par le plus sing-ulier moyen, s'aboucher ensemble. Englue par les promesses et par l'amour, qui donne le monde entier en paroles, l'aide d'un bout de corde qu'il lui avait fait passer, elle se laissa dgringoler d'une fentre laquelle servait de toit la saillie d'un balcon, situ derrire le palais, et comme la corde n'allait pas tout fait jusqu' terre, elle faillit se casser les jambes en tombant. Sitt descendue, le comte pour rire, le drle de comte, le vaurien de comte la fit porter en croupe par un des <yalets qui, mont cheval, suivit son matre; celui-ci s'enfuit franc trier, avec sa proie. Pippa. Moi, je serais tombe, en croupe d'un cheval qui galopait. P]lle maniait un cheval barbe comine l'auNanna. rait fait un gamin et chevauchait mieux qu'une paladiue; elle s'enfuit donc avec le sclrat qui, force de croiser une route, puis l'autre, sut fort bien se garantir de ceux qui pouvaient lui courir sus. La fin de la cliose,
venait la
Cour
et,
L\:S
RAGIONAMENTI
II7
qu'au bout de vingt-deux jours il se dgota d'elle qu'un beau soir, pour deux paroles qu'elle osa rpliquer un petit valet qui le gouvernait, elle toucba le salaire promis et espr, c'est--dire une vole de coups de bton huit jours de l, il la laissa sec, avec cette jupe de satin jaune us, brode de taffetas vert, et la coiffe de nuit qu'elle portait en s'en allant. La pauvrette, que sa matresse aurais marie quelque digne et riche personnage, tomba entre les mains d'une bande de jeunes vauriens qui se la repassrent l'un l'autre; mais quand on la vit toute fleurie des bubons dont le comte lui avait fait cadeau, elle ne trouva plus un chien ni un chat qui voult la flairer, et le bordel seul eut sa misc'est
et
;
ricorde.
Pippa.
l'y rencontra disait que ses camarades s'merveillaient de l'entendre parler et que l'honntet apporte par elle, de la Cour o elle avait t leve, donnait au bordel un air de couvent; il n'y a pas de doute, l'honntet servant de parure une putain reluit au milieu du bordel avec plus d'clat que n'en a un prtre en grand costume au milieu du faste de sa
Nanna.
Quelqu'un qui
Bni
soit-il
premire messe.
LA VENGEANCE DC GALANT
femme (mieux lui et valu de supporter les rages, les afl'ronts, les mpris, les blasphmes et les coups dont l'avait deux annes durant, rgale son gros animal de galant, leva le pied en n'emportant que sa propre personne, en lui laissant toutes ses bardes, tant celles qu'il lui avait donnes que celles qui lui app irtenaient elle et, lorsqu'elle partit, fit le vu de ne jam:;is revenir
Il
Nanna.
advint qu'une
Il8
l.'ARTjr
avant d'tre rduite en poussire. Elle s'en fut ainsi, et, avec l'obstination d'une femme tenace, elle mettait les grifFes la fig-ure de quiconque lui parlait de se recoller avec lui. Il lui dpcha amis et camarades, maquerelles et maquereaux, jusqu' son confesseur, et ne put jamais la faire chang-er d'ide. Bien vrai est-il qu'il ne lui envoya pas ses robes, parce que l'homme qui a perdu sa matresse s'imagine la retrouver par le moyen des bardes qu'elle lui a laisses entre les mains. Voyons la suite. Le ribaud, qui songeait continuellement au moyen de la ravoir, finit par le trouver au bout de quelques semaines
et
une
fois
qu'il
l'eut trouv,
croyant
dj tre se veng-er de ce qu'elle n'avait pas encore voulu revenir chez lui, s'exaspra de colre. Que fit-il
donc? Il feig-nit une fivre subite, une cruelle maladie de poitrine et se laissa choir tout de son long la rumeur s'en rpandit dans le quartier. Serviteurs et servantes accourent et le font souvenir de penser son me quant au corps, qui n'avait aucun mal, ils le croyaient dj
;
;
perdu.
buche.
fait
un
Dieu vous
rende la sant!
se
met
horte faire bonne contenance, puis entame le chapitre des gros pchs mortels et lui demande s'il a assassin
ou
fait assassiner
larmes
et s'crie
personne. Le drle rpand aussitt des J'ai fait bien pis. Ce qui m'ar-
de ma perversit vis--vis de madone... Il n'eut plutt dit de son nom tout juste assez pour que le moine comprt, qu'il fit semblant de s'vanouiret queles cris Du vinaigre! du vinaigre retentirent par toute la maison. On lui baigna les pouls avec, et il reprit connaissance immdiatement, revenant alors la confes Mon pre, je sion, il dit d'une voix entrecoupe me meurs; je sens bien ce que j'ai; et puisque nous
rive, c'est le prix
:
1.ES
RAGION'\MK!STI
IIQ
avons une me, puisque aussi il y a un enfer, je l'^ue tel domaine celle que je vous ai dite. Faites-le lui savoir, comme venant de vous, et, au cas o j'en rchapperais,je veux que cela soit port sur mon testament par le notaire. Il abrg-ea le reste de sa confession. Sa Rvrence lui donna l'absolution, et s'en allant tout de suite trouver madone, la prit part et lui dit en
conscience ce qu'il savait du
Pippa.
elle
leg's.
du domaine,
commena
joie
un peu,
si
elle
en bpuche, elle dit Je ne me soucie ni de domaine ni de leg's. Cela mit en colre le moine, qui se tourna vers elle en s'criant: De quel bois tes vous donc? Voulez-vous faire fi de la sorte du bien qui vous arrive Per DomiMUM NosTRUM? Et puis quelle patarine de juive souf frirait d'tre la cause de la perdition d'une me? Songez votre for intrieur, ma fille spirituelle; habillezvous dare dare et courez chez lui en un clin d'il. Je crois m'entendre corner aux oreilles: Il g"urira,sielle y va. Pippa, c'est le diable que de se savoir appel un hritag-e; c'est ce qui fait que frres et cousins se crucifient entre eux. Voil pourquoi la malheureuse, cmpaume par Sa Paternit, se mit en route et, arrive la porte, frappa avec cette assurance qu'ont, au coup de marteau, les souveraines des matres des maisons o
hochait la tte et pinait
faisait
:
comme
elle
elles
se
rendent.
rien
Sitt
que
lo
comme mort
quoi-
n'et
du
tout,
lui
fit
l'escalier
en deux bonds,
et, se
em-
barrassaient la langue.
Pippa.
yeux ouverts.
il
long"?
Nanna.
dormant
qu'elle les
Comme
si
son arrive
l'avait ressuscit,
du de miracle, montra en quatre jours une parfaite sant. 11 lui dit alors Allons au domaine que je t'ai lg"u quand j'tais en train de mourir; je t'en fais donation, puisque, g'rce ta bont, me voici rtabli. Elle se mit en chemin avec lui et, au moment o elle croyait entrer en possession des terres, elle fut livre en proie plus de quarante paysans qui, ce jour-l tant la fte de San-Galg-ano, se tenaient rassembls en une masure sans fentre, demi tombant en ruines, et se
se leva et, appelant cette visite
nom
garg-arisaient
du
aux
manne
On jeta donc la fraise dans g-ueule de l'ours Nanna. Ainsi fut dire je voulais
Pippa.
?
tomba entre
les dents.
la
fait, et
si
te
quoi ressemblaient ces machines rouillesqu'ilsexhibrent de leurs culottes, je trouverais les comparer autre chose qu' des cornes de limaons mais ce n'est pas honnte dire, et je ne veux pas davantage te dpeindre les gestes qu'ils faisaient en fournissant pleine cluse l'eau au moulin; suffit qu'ils secouaient le poisson la mode du village, et, selon ce que put en dire celle qu'avaient mise mal les exhortations du moine, que la puanteur de crasse qu'ils exhalaient, les rots aux radis
;
que
Pippa.
aprs l'avoir
fois que furent rassasis les paysans, change en un tonneau d'huile de leur rcolte, tandis qu'chevele elle s'gratignait toute, on la jeta au milieu d'une couverture tenue par les quatre coins, et les trente-et-uniers s'amusrent la faire sau-
Nanna.
Je Une
le crois bien.
LES U\GIONAMENTI
ter si
haut qu'elle restait un quart d'heure en l'air avant de retomber; sa chemise et ses jupons, enlevs au vol par le souffle du vent, lui faisaient montrer la lune au soleil, et s'il n'tait arriv que la peur lui drangea le corps et lui fit enduire d'une couche de vernis la couvertureet les mains qui la tenaient, elle sauterait encore.
Plt au de que sautt aussi ordonn ce jeu. Naiina. Quand trente-et-un sembla que
Pippa.
ciel
la
tte
il
lui
le
l'avait chatouille et
couverture promene suffisamment, il commanda qu'on prt un paquet d'osier et la fit mettre califourchon sur les paules d'un g-rand
la
si serre qu'elle avait l'air de dvider l'cheveau, en jouant des mains et des pieds mais elle filait son rouet une poigne d'toupe trop
emmle
de temps,
et,
elle reut
aprs qu'elle se fut trmousse un bout sur le cul autant de coups de verges
prier avant de pour que rien ne manqut la frocit nronienne du misrable gredin, il lui coupa sa robe la ceinture, et la lassa libre de s'en aller, avec sa
;
bndiction.
Pippa. Qu'il soit laiss la discrtion du coupequand le bourreau se lve pour couper le cou des gens qui ne le mritent pas autant
ret,
Nanna.
On prtend,
et c'est vrai,
que,
comme
ses
ses
elle
pudeur avec
mains,
cuisses,
un essaim d'abeilles vint se blottir entre croyant que c'tait l leur ruche miel. Il lui manquait cela. Pippa.
L'AMANT VERT
ISanna,
Un de ces
122
l'ahTIN
tte
une solennelle lubie, la plus folle que se mt jamais en un amant plein de mensonge, de faussets et de
Pippa.
sottise.
Quelle lubie?
Pour montrer qu'il ne vivait que de l'espNaiina. rance d'obtenir la dame de ses penses et pour que celle-ci, quand elle l'aurait compris, songet le rendre heureux, il s'habilla tout en vert; la toque vert,la cape, le pourpoint, les chausses, le fourreau, le bout du fourreau et le manche de l'pe, la ceinture, la chemise, les
bottes, jusqu' sa chevelure et sa barbe, car je crois
qu'il les teignit aussi en vert, le
plumet
I
et l'agrafe, les
Pippa.
JSanna.
Ah
!
ne mangeait que des choses vertes, des courges, des citrouilles, des melons, des pures d'herbes, des choux, des laitues, de la bour-
ah
ah
Il
rache, des
le
amandes
s'il
le
versait
de
se contentait de sucer les feuilles de laurier qu'on met dedans; il se faisait ptrir son pain de romarin brov
dans
l'huile,
s'asseyait sur
couchait dans un lit vert et causait d'herbes, des prairies, de jardins et de printemps. S'il chantait, il n'tait jamais question que
Il
la
couleur verte, et
de l'esprance poussant ses frondaisons dans les champs couvert d'pis, et il entrelaait ses vers de pampres, de pimprenelles et de pissenlits. S'ilenvojaitquelque lettre
la divine, il crivait sur des feuilles vertes, et je crois que, lorsqu'il allait du corps, il faisait vert, de la couleur
de sa figurine
et de son urine. Quel fou achev Folle acheve tait celle qui croyait que Nanna. en Tbonneur de ses perfections l'on faisait tout cela divines, et non cause de sasottiste. Veux-tu en savoir
Pippa.
LES nAOfONVMENTI
123
encore davantage ? Il simula si bien l'esprance, il la picha si haut que la bonne bte, ne voulant pas le dmentir, s'y laissa prendre et s'imag-ina que cette invention
du
vert tait
un suprme hommage
sa beaut
le
planta
l,
la
paillasse de son
DAME QUINIMINA
Certaine pauvre dame Ouinimina,laquelle i\anna. nature avait concd un peu de physionomie et un peu de belle prestance, pour mieux la faire se casser le cou et pour sa plus sre ruine, comme il arrive celui qui sait assez jouer pour avoir Toccasion de perdre, connaissait si bien ses lettres qu'elle put lire une ptre Dieu! comment se fait-il elle adresse par un farceur. que Gupidon prenne les gens sans y voir clair? Comment est-il possible qu'un chie-en-culotte comme lui sache tirer de l'arc et transpercer les curs? Qu'il nous crve donc l'apostume qui puisse nous venir nous autres femmes, quand nous prtons crance aux charlataneries, quand nous croyons avoir des yeux comme des soleils, une chevelure d'or, des joues de roses, des lvres de rubis, des dents de perles, un air majestueux, une bouche divine, une langue anglique quand nous nous laissons aveugler par des billets doux que nous envoient les attrapeurs de femmes, del mme faon que se laisse duper l'infortune dont je parle. Pourquetout le quartier jast de ce qu'elle savait lire, chaque fois qu'elle pouvait drober une minute, elle se plantait sa fentre, un livre la main, ce qui Ht qu'un regratteur de rimes
la
;
fort
bien
l'encocher par
le
moyeu de quelque
sornette en style
24
l'arTIN
d'or, teig-nit
fle,
une feuille de papier dans du suc de g'irode celles qui sont rouges, trempa sa plume dans du lait de fig-uier et lui crivit que ses charmes faisaient le dsespoir de ceux des ang-es; que l'or empruntait son clat ses cheveux et le printemps ses fleurs ses joues;
il
que
le lait se
blanchirait la
blancheur de sa
si elle
commit
exalter de la sorte
elle eut achev dlire sa perdition, dans laquelle elle vit qu'on l'accablait de plus d'log-es qu'on n'en donne au Laadamus, elle s'attendrit de tout son tre et, comme on la conjurait de rendre rponse, elle se jeta de confiance dans les bras de ce seul-en-secret. Qu'au milieu de leurs bavardag-es les trompeurs ne manquent pas de promettre en toutes lettres, afin que de prime abord nousleur prtions l'oreille. Aprs lui avoir assig-n rendez-vous pour le surlendemain, parce que ce jour-l son mari allait la campag"ne, elle se mit aux aiiuets, attendant le moment. Quoi elle avait un mari? Pippa. Oui, la malheure. Nanna. Et en plus mauvais point. Pippa. Ds que messire le faiseur de sonnets eut Nanna. obtenu ce oui, il ramassa je ne sais combien de barbouilleurs de papier, de racleurs de chansonnettes et leur Je veux donner la srnade une petite putain, dit marie, assez gentille crature, que je vais mettre sous presse un de ces jours. Preuve que c'est vrai, la voici l couche par crit, mana propria et il leur montra quelques lignes de son criture, ce dont ils se mirent rire un bout de temps ensemble. Puis il empoigna un luth, l'accorda en un clin d'il et pina un trille assez gaillardement la villageoise. Aprsun ah! ah pouss rge godpoje,il se posta sous la fentre de lacham-
cette lettre
.C'5
RAfIONAMFNTI
125
il
bre de la bonne amie, laquelle donnait sur une ruelle o passait une personne par an, et, s'appuyant les reins
au mur, l'instrument appliqu sur sa poitrine, leva la pendant qu'elle semontrait par instants en haut, il chantonna cette chansonnette:
Pour tout
l'or
du monde,
:
Dame, vous louanger ne dirais menteries Cela me ferait honte moi comme vous.
Par Dieu, non, je ne dirai point Qu'en voire bouche avez parfums de l'Inde ou d'Arabie; Ni que vos crins Sont plus beaux que l'or Ni que dans vos yeux soit nich l'Amour Ni que le Soleil leur emprunte sa splendeur Ni que vos lvres et vos dents Soient de blanches perles et de beaux rubis ardents; Ni que vos gentilles manires Fassent au bordel accourir les rivires jNIais bien dirai que vous tes un fiiand morceau, Plus que darne qui soit au monde. Et que vous avez tant de grce Que pour vous le faire se dfroquerait un ermite. Partout je ne veux dire que vous soyez divine, Car vous ne pissez pas d'eau de fleur d'orange en guise d'urine.
; ; ;
;
Moi, pour mon compte, je lui aurais jet mortier par la tte; oui, je lui aurais jet, c'est sr. Naana. Elle, qui n'tait pas plus cruelle que tu ne le seras toi-mme, s'en estima bien heureuse et bien grande; elle n'attendit pas le dpart de son mari, et ds le lendemain se renditen cachette la maison d'un boulanger, ami du hbleur, auquel elle donna garder une de ses parures qui se mettent la taille des femmes. Quand le messire eut vu la ceinture, il se dit part soi: Les grains d'ambre seront excellents pour me faire
Pippa.
le
un
bourse.
Ce
disant,
il
s'en fut la
Monnaie
120
le
l'aRTIN
mtal non frapp en mtal frapp au bon coin il eut Pater nostri qui entrecoupaient le chapelet d'ambre et les joua tout de suite. Quand il revint, sans plus les avoir, la maison d'U boulang;"er,il se mit dans une de ces colres qui passent par la tte de ceux qui restent sans un as, grce l'as, et,
;
du
persil
ou du prezze-
molo,
comme
l'escalier
malheureuse de coups de bton et la fitrouler du haut de sous une g-rle de coups de poing".
Pippa.
Grand bien
elle
lui fasse
Nanna.
une once
;
dormir pour temps de songer sa vengeance, et elle y songea de la faon que je vais te dire. La ceinture que le mauvais drle venait degaspiller avait t vole par son mari dans cette maison, tu sais, appartenant au cardinal dlia Valla, o il y eut le feu il n'y a pas longtemps elle-mme l'avait soustraite son mari, qui l'avait serre dans un coffre. A cette heure, se voyant sans cette ceinture, pour se venger de celui qui l'avait si bien moulue, et sans penser ce qui pouvait en advenir, elle alla trouver le propritaire de la maison
y resta
la nuit, sans
le
comment un tel se trouvait avoir la Le gentilhomme, mis au fait de l'histoire, commena par faire jeter le grappin sur celui qui l'avait
de
la
vol, et le capitaine
d drober encore bien d'autres objets, lui fitap liquerbon nombre de tours de corde. De la sorte, la pcore en fut pour sa msaventure et pour sa honte, ainsi que son mari, et celui qui l'avait traite sa faon s'esquiva par les mailles du lilet.
indice qu'il avait
LES RAGIONAMRNTI
I27
LA FILLE DE ROI
N'arma.
Il
Je m'en ressouviens.
:
d'un roi d'un roi et non pas d'un fichu docteur, d'un chef d'escouade, d'un roi, te dis-je. Celui-l, la tte d'une multitude de gens pied et cheval, se mit en campag-ne travers le pays d'un autre roi, son ennemi, et aprs l'avoir saccag, brl, ruin, vint poser le sig-e autour d'une ville forte o l'autre, ne pouvant arriver le flchir par aucune espce de concession, s'tait rfugi avec sa femme etunefille unique qu'il avait. La g-uerre se continuant ainsi, le roi, qui voulait prendre la ville, pouvait bien se dmener elle tait si forte que le seig-neur Jean des Mdicis (i), c'est--dire Mars en personne, n'en serait pas venu bout il aurait eu beau
s'agit
:
bombarder, la fusiller, l'arquebuser tant et plus. Quoi qu'il en soit, le roi qui la battait en brche jetait feu et flamme dans les escarmouches l'un il fendait
la
;
la tte,
l'autre
;
il
il
tranchait
une main d'un coup de lance il envoyait un autre en Tair, un mille de haut, de sorte qu'amis et ennemis ne savaient plus qu'en dire. Cela fut cause que la prsomptueuse
Renomme
se
ft
son g"uide,
le
promena triom:
phalement par tout le camp, puis entra dans la ville, rencontra la fille de l'infortun monarque et lui dit Viens sur les murailles et tu verras le plus beau et le plus vaillant et le mieux arm de tous les jeunes g-ens qui soient ns jamais. A peine lui eut-elle dit cela que la jeune lille y courut, et l'ayant reconnu au terrible })anache qui se balanait sur son cimier, sa casaque
les
d'elle-mme
(i)
che-
128
L*ARTm
val et l'armure et les g-estes du roi, le voici qui se lance jusqu'auprs des portes, et comme il brandissait son pe pour tuer un soldat qui fuyait devant lui clopin-clopant, la courroie de son heaume se dtacha, le casque lui tomba de la tte elle aperut alors ce visage de roses, devenu vermeil dans l'ardeur du combat, et la sueur quy faisait perler la fatig'ue ressemblait la rose qui les baigne quand l'aube les fait entr'ouvrir.
:
Pippa.
de telle faon qu'elle en devint aveugle et que, sans plus se soucier de ce qu'il
avait fait son pre, de ce qu'il voulait lui faire encore,
elle
Nannd.
qu'il
Amour
la
rendit
si
poterne secrte de son palais, une poterne qui avait t construite pour les besoins des temps et par o l'on
pouvait entrer
et sortir
sans
tre vu.
Comme
elle
en
Pippa.
nbres
?
Gomment
On
dit
son sang.
put-elle se diriger
dans
les t-
Naana.
que
le
feu de son
cur
lui servit
de flambeau. Pippa.
il
Eh bienlon
faut.
Elle brlait tant qu'elle ne se contenta pas Nanna. de se faire reconnatre du roi perfide et dloyal, mais qu'elle coucha avec lui et se laissa engluer parce qu'il lui dit Signora, je vous accepte pour ma femme et je reconnais votre pre pour mon beau-pre et mon seigneur, la condition que vous m'ouvriez les portes de la ville, car ce n'est point par haine, c'est pour l'amour de la gloire que je fais la guerre Sa Majest. Aussitt que je serai le matre de tout, je lui ferai hommage du
:
ISQ
do
ma victoire
et
de
mon
il
march.
Pippa.
linsi
Comment
se
Nanna.
t
Tu peux penser
si,
endoctrine, conseille
e que lui sugg^ra d'articuler, de refuser et de concder 'amour; on doit croire qu'elle ne semblait pas tre une illette inexprimente et craintive, mais une femme .vise et hardie, qu'elle usait de paroles propres attenirir tout noble cur, qu'elle y mlait de ces larmes, de es soupirsentrecoups de sang-lots, de ces tristesses cliles par le moyen desquelles on obtient ce que l'on dire. On doit croire aussi que le galant, si doucereux au iehors, si cruel au dedans, pour qui la vie de laquelle tait sa mort lui, sut emmieller son langag-e et, par des ermenls et de g-randes promesses, la dcider lui ouvrir es portes qu'enlin lui ouvrit l'cervele. La premire hose que fit le tratre, ce fut de s'emparer du vieux et ie la vieille dont elle avait rey le jour et de leur couler la tte l'un et l'autre en sa prsence.
Et n'en mourut point On ne meurt pas de douleur. Pippa. Ave Maria Nanna. Eux mit feu aux maisons,
Pippa.
elle
Nanna.
tus,
il
le
aux
glises,
i
aux
palais,
et
aux boutiques,
laissa brler
fil
du peuple
mles
les
Pippa.
Et
elle
ne se pendit point ?
pas dit que l'amour l'avait aveumise toute hors d'elle-mme? Gomme une folle, lie dlirait, elle se lamentait, et chaque fois qu'elle ouruait les yeux vers celui qui tait plutt son bourt'ai-je
gle et
Nanna.
Ne
i3o
l'artn
elle le
contemplait ni plus ni moins eu quelque obligation. C'tait Je la folie et non de l'amour. Dieu g-arde les chiens, Pippa, Dieu prNanna. serve les Maures d'un tourment pareil A^ oui l'amour est une cruelle histoire, et crois-en une qui l'a prouv crois-m'en, Pippa, l'amour, ah!... Pour moi, je prfrerais mourir que d'endurer un mois la torture d'un homme qui n'a plus aucune esprance de ravoir la femme qu'il adore j'aimerais mieux la fivre. Se trouver sans un'sou, ce n'est rien avoir des ennemis, bagatelle; le vrai supplice, c'est celui d'un homme qui aime, et qui ne dort, ni ne boit, ni ne mang-e, qui ne peut res-
lui avait
par elle, ils'puise y penser, mais ses ides ne peuvent Dourtant pas s'assouvir en ide. Tout le monde aime cependant. Pippa.
Nanna.
peau,
C'est vrai;
trou-
l'innombrable quantit des filles folles, car sur cent putains quatre-ving-dix-neuf n'existent qu'en perspective, comme disait le Fiomanello. Le puta-
nisme,dans sonenseml)Ie,
aune bou:
elle
amandes
drages, anis^ avec des tiquettes o on lit confites, noix pralines, poivre en grains, safran, pignons; mais ouvre celle-ci ou celle-l, il n'y a rien du tout dedans. De mme les chanettes d'or, les ventails, les bagues, les jolies robes, les coit'es les plus
:
huppes sont les tiquettes des pots et des botes vides dont je te parle. Ainsi, pour un amoureux qui a lieu de se fliciter de son amour, il y en a mille qui en tombent dans le dsespoir. Pievenez-en donc votre histoire, si vous ne Pippa. voulez pu^ quou dise que voire fil est emml.
LES n AGIONAMENTI
;3i
Nanna.
On ne
le
femmes
vont contre leur naturel, elles peuvent toujours rpondre qui les en reprend Vous ne savez pas ce que vous dites. Or donc, la pauvre enfant ainsi trahie reste avec celui qui a saccag^ son pays, tu son pre et sa mre, et s'en va avec lui. Mais voici venir le moment o, tant i:;'rosse de lui, elle est sur le pointd'accouchcr. Le sclrat l'apprend et commande qu'elle soit jete toute nue sur un buisson d'pines, pour que les pointes la dchirent, elle et son
sont des femmes, et que
elles
:
quand
fruit.
<(
In^-rat! est-ce la
rcompense de mon amour? Te semble-t-il qu'une reine mrite un pareil sort ? O jamais a-t-on ou dire qu'un pre assassinat son enfant avant qu'il et commis aucun crime, avant mme qu'il ft n ? Misricorde Pippa.
Nanna.
Comme
elle
les
pines en furent attendries et s'cartrent, de sorte que les herbes vertes et fraches qui poussaient sous le buis-
son
la
lit
poupon qui
avait
fait.
avait la ressemblance
L-dessus, voici la petite crature par le bras et dit Le roi veut que je la tue, pour en finir en mme temps avec sa haine, avec ta vie et avec ta sale race. Ce disant, d'un coup de couteau, qu'il me semble sentir dans le cur, il pera ce corps peine form, et la petite me, qui vit le ciel avant d'apercevoir le soleil, eut le fil
elle
nud.
tence
;
IMais
il y tait fait le premier une telle mort est plus douce que l'exismourir avant de savoir ce que c'est que la vie,
Nanna. Cela
crois,
on
la rcvcli, et
comme elle
allait
i3i
se
l'artin
lui
apporte dans
un bassin
ces
Quand
a Choisis l'un de
moyens qui par trois routes diffrentes te tireront d'embarrasle corps etl'me , sans s'effrayer ni s'mouvoir, elle prit la corde, le poison et le couteau, et s'effora de s'ter la vie des trois faons tout ensemble n'y pouvant russir, elle s'en prit au Ciel de ce qu'il ne consentait pas ce qu'elle pt en mme temps se pendre, s'empoisonner et se pol^-narder.
;
Pippa.
la corde autour du cou, l'attala corde se cha quelque part et se lana dans l'espace rompit et elle ne put mourir; elle but l'arsenic et n'en prouva aucun mal, parce qu'tant encore enfant son pre l'avait prmunie contre les poisons; elle s'empara du poig-nard, leva le bras pour se percer le cur et, au moment o elle allait enfoncer la pointe, l'Amour se g-lissa entre le fer et son corsag-e, et lui montra le portrait de sa fausse idole, qu'elle s'tait brod sur le sein en soie de toutes couleurs le couteau lui tomba des mains, car elle eut plus d'g-ards pour son imag-e peinte qu'il n'en avait, lui, pour sa personne vivante. Jamais plus on n'a entendu parler de choses Pippa.
Nanna.
si
extraordinaires.
la hassait plus que la mort, pour ennemi, ne va pas croire qu'il en devint plus pitoyable en apprenant cette marque de sa tendresse. Loin de l, il la lit prcipiter dans la mer, qui tait proche les desses marines la ramenrent au
Nanna.
du
Lui, qui
:
tre
sang- de son
rivag-e,
Je veux brler deux chandelles en l'honPippa. neur de ces desses que vo^js dites.
le
Nanna. Quand
homme
et
saine et sauve.
il
appela un
pe
Dg-aine ton
coupe-lui le cou.
L'homme
LES RAGION'AMENTI
l33
haute,
la
'^Ile
retombe
et
Comment? En faisant que Tpe ne plat. Dieu Pippa. Lou Le cruel Nanna. Ce n'est pas
Pippa.
{.auvrette.
Nanna.
la
toucha que du
soit
fini.
fit
allumer un
qrand feu
dedans, niais elle ne l)rla pas ds qu'elle fut pour y tomber, le Ciel, tjiii en eut piti, s'obscnrcit tout coup et versa une telle quantit d'eau que cela aurait pu teindre non seulement un
et la
fit
jeter de force
monceau de copeaux
naises de Tenfer.
et
de
branchai^'-es^
mais
les
four-
Honnte Ciel, Ciel misricordieux Sitt que fut leinte la flamme, qui tchait de s'lever en l'air avec la fume, le peuple se mit Pippa.
Nanna.
:
sire, ne persistez pas: vouloir ce qui Eh ne veut pas Celui qui est l-haut. Hlas pardonnez l'innocente qui vous aime trop; c'est le trop d'amour qu'elle eut pour vous qui a permis de vous veng-er et
crier
Et ne pas, en entendant de porte-mitres sont accessibles Nanna. Est-ce que aux supplications des honntes g"ens? Pippa. Patience Nanna. Ecarte du bcher teint par pluie, en
Pippa.
il
d'obtenir la victoire.
flchissait
telles prires ?
les
la
la
elle,
on
fit
entrer
dans une
cag-e
tait
renferm un lion;
la vrit
pourinfor-
pour sa
si
femme
Pippa.
Dieu
lui veuille
du bien
Nanna.
mord
i34
l'artin
se rong-er les
tu en as vu, tu as vu ce diable incarn mains de dsespoir de ce qu'il ne pouvait se rassasier de son trpas. Il l'empoigna par les cheveux et la trana au fond d'une tour o il la fit demeurer huit jours sans vouloir que personne lui portt boire et manger. Mais elle mang'ea tout de mme, son
Nanna.
Si
chien de dpit.
Pippa.
et ses lar-
diront
comment
ils lui
servirent de pain et
de vin. On ouvrit la prison et on la retrouva vivante, dont le mtin de rengat s'en alla cogner de la tte par tous les murs. Aprs qu'il se la fut ainsi abme, son grand dommage, il lia sa femme de sa propre main au tronc d'un arbre et la fit cribler de flches par ses archers. Qui croirait que le vent, mu de compassion, cartait d'elle tous les coups et, partageant en deux la nue de flches, en faisait tomber la moiti d'un ct, la moiti de l'autre?
Pippa.
la cruaut suprme. Gonfl de ce poison dont se gonfle quiconque ne peut noyer le feu que la colre lui a allum dans le sein, il ordonna de la prcipiter de la plus haute tour. Elle fut donc prise et mene sur le fate mais lorsqu'elle vit qu'on lui attachait les mains, elle s'cria: Les filles de roi doivent-elles donc mourir de la mort des servantes? La tour touchait presque le ciel avec ses crneaux, et parmi les bourreaux qui devaient la prcipiter il ne s'en trouvait pas un seul qui et le cur de regarder le peuple d'en bas, les yeux carquills, il attendait le saut qu'elle devait faire malgr elle, tandis que la malheureuse, digne d'un meilleur sort, frissonnait de tout son corps en plongeant le regard dans si peu que ce ft de la profondour. Le soleil, .(pii en ce moment luisait de out son clat, se cacha entra les nuages, de peur de la
;
Nanna.
LKS RAGIONAMENTI
35
Pour elle, elle se mit pleurer et fit de ses yeux un Tibre et un Arno; mais elle ne pleurait pas de la frayeur d'avoir se meurtrir et se briser en tombant; non, elle avait honte de rencontrer l'ombre de Voil celle sa mre, qui lui disait a Oclel! Abme qui me dpouilla de la chair dont je l'avais revtue.
voir se fracasser.
:
Pippa.
tit
Nanna.
la
Je n'en puis plus d'motion. Ne t'meus pas encore. Lorsqu'elle se senhaussa souleve de terre par ces cruelles mains, Vous qui restez aprs moi, excusezvoix
elle
et dit:
j'ai
vieux renard..., il tait tout chenu, tout blanc et plus madr, plus malicieux, plus pervers que celui qui dit compre le Louj), pendant que le pauvre hre dvalait dans le seau pour le faire sortir du puits: Le monde
est fait
La
l'un
Il
... Un renard de tous les renards, La commre. ayant envie de manj^er du poisson tout son sol, s'en alla du ct du lac de Prouse, avec la plus grande fourberie que jamais, fourbe imagina, et aprs tre rest quelque temps songer sur le bord, la queue immobile, son mus'oau pointu en avant, les oreilles tendues, vit venir petits pas une troupe de muletiers qui, pendant que les mulets attachs la file le long* d'une corde
i36
l'artin
la raret
du
g-ardon, de l'abondance
du brochet,
faisaient
grand loge de certaine tanche qu'ils avaient ce matin dvore, avec le chou et la sauce aux noix piles, et projetaient de donner les derniers sacrements une grosse anguille, ds qu'ils auraient dcharg leurs btes. Le renard les eut peine aperus qu'il se mit rire sa faon et se coucha en travers du chemin absolument comme s'il tait mort; lorsqu'il les vit s'approcher, il
retint son
souffle,
comme
le
retient
un homme qui
plonge sous l'eau, et, les jambes tendues, allonges, il ne bougeait ni plus ni moins que s'il et t trpass. Les mulets le virent de loin et s'cartrent, montrant plus de compassion que les muletiers qui, sa vue, poussant ces oh ohiohi que l'on pousse lorsqu'on voit le livre s'escarpiner haut d'une toise dans un champ de bl, coururent s'en saisir pour gagner la peau. Mais comme ils l'empoignrent tous en mme temps et que chacun la voulait pour soi seul, peu s'en fallut qu'ils ne se coupassent en morceaux, criant de leurs voix de C'est moi qui l'ai vu le premier! J'ai muletiers: mis la main dessus avant toi Si l'un des plus anciens n'y avait remdi en prenant un caillou noir et une poigne de cailloux blancs, qu'il jeta dans un chaj)eau aprs les avoir bien remus sens dessus dessous, de sorte qu'aprs que le sort eut dcid en faveur de l'un d'eux, tout le monde se calma, sans aucun doute ils se cognaient joliment.
La nourrice.
sent par des coups d'pe ou des coups do lance. Celui qui le sort a fait choir La commre.
Souventes
fois, les
querelles finis-
le
Par renard le sentit chaud en le touchant et dit: Dieu, il vient de mourir l'instant, et de graisse, autant que je puis comprendi-e. Cela dit, il le mit en dessus des paniers d'un de ses mulets et rejoignit la troupe.
LES RAGIONAMENTI
l^'J
Toute
ils reprirent leur marche, coutumes, pour la commodit de cette bonnne pice du renard qui, sans tre vu, se retourna tout doucement et, partag- entre la faim qui le poussait et l'envie qui l'obsdait, fit un bon trou dans le poisson des maudits paniers et, aprs avoir mis sac tout ce qui restait dans les deux, bondit d'un de ces sauts que les renards savent excuter pour franchir un
l'ag-tcition tait
calme,
selon leurs
murs
et
foss,
quand
ils
ont
le
trousses.
((
Un
le
des
!
muletiers
aperut,
il
cria
renard et courut vite l'endroit o l'on avait mis le prtendu mort; il ne le vit plus et, la confusion de celui qui voulait se battre pour l'avoir, ils faillirent crever de rire comme Morg-ant. La nourrice. Marg-utte, tu veux dire.
Hol,
La commre. La nourrice.
LES SUPERSTITIONS
La nourrice. La commre.
tu crois
aux aug-ures
;
song-es, oui
mais
!
si je
Il faut pense aux augures, que la peste me vienne pourtant les consulter pour faire que les autres y aient couliance, et jamais je n'aperois une corneille ou un corbeau sans en donner l'interprtation, selon qu'ils ont ou non la queue tourne du ct du cul. S'il tombe une plume d'un oiseau qui vole, d'un coq qui chante, vite je l'attrape et je la mets part, donnant entendre aux nio^auds que je sais bien quoi en faire. Si on dpouille un bouc ou une chvre, je suis l pour en emporter la g-raisse. Si on enterre quelqu'un, je dchire quelque petit morceau de ses habits. Si on dpend des pendus, je leur enlve des cheveux, des poils de barbe. A
i38
l'aide
l'artin
de ces
btises, je
comment on charme
comment on
la
en l'air
Lanourrice.
Tu m'as
Je
tir la
demande de
bouche.
encore profession de dire la bonne aventure, et avec une autre g-alanterie que celle des Zing-ari, quand ils vous reg^ardent dans la paume
fais
La commre.
de la main. Quels g-redins de pronostics je tire de mes connaissances en physionomie II n'existe pas de mal que je ne gurisse, par paroles ou par ordonnances, et quelqu'un ne m'a pas plutt dit J'ai telle maladie , que je lui en donne le remde. Sainte Apolline (i) n'a
I
:
(i) L'oraison Sainte Apolline pour gurir les maux de dents a t clbre dans toute la chrtient. Elle est mentionne l'Acte Qua-
trime de la Clestine : Cervantes en a fait mention dans son Don Quichotte, o le bachelier Samson Garrasco la conseillait la gouvernante du valeureux chevalier. De nos jours, cette patronne des dentistes est encore invoque en Espagne, en Italie et mme en France. Je n'ai pas retrouv la prire italienne, mais voici une traduction de l'oraison espagnole
:
Et
la
Vierge Marie
:
Par
Dis,
l passait
7 Ma Senoi'a, je ne dors ni ne Mais d'une douleur de tlcuts, Je vais mourant. Par l'Eioile de Vnus, Et par le Soleil au Ponant, Par le Trs Saint Sacr'nieut Qu'eu mon ventre j'ai tenu
veille.
OnQ ne m'endolorisse
plus
en fran(;ais,
telle
qu'on
LES n\G10NAMF.NTI
.^f)
pas autant * ex-voto placs ses pieds que j'ai t de fois rclame pour le mal de dents, et si tu as jamais vu la squelle attendre que le marmiton des moines arrive avec les cuelles de soupe, tu vois d'ici celle qui vient le matin, de bonne heure, faire la cour ma porte. L'un veut que j'aille parler une femme que j'ai vue l'autre veut que j'aille tel endroit, il y a deux jours porter une lettre celle-ci me dpche sa servante pour
;
un
sortilg^e.
LE MAQUERELLAGE
La commre.
sonnage.
petite
le
i^-rce
point de s'exasprer
un grand per-
L'homme dont je te parle s'prit d'une jolie femme pas si fluette pourtant qu'on ne la retroule lit,
vt dans
g-rce
;
une
Le
force
la possder. Je
de faire de la dpense avec elle et avec moi, il parvint le laissai prendre cinq ou six fois son plaisir, mais de jour, tantt de bon matin, tantt sur le soir, aujourd'hui none, demain vpres, de sorte que
la trouve dans un livret populaire intitul: le Mdecin des pauvres ou RecaeiL des prires et oraisons prcieuses contre le mal de
dents,
les
coupures,
les rluinialisnies, la
brlures, les mauvais esprits, etc. (s. I. n. d.). Sainte Apolline assise sur une pierre de marbre, Notre Seigneur Apolline, que fais-tu l? passant par l lui dit Je suis ici
:
si
pour
mou
un
chef,
pour
:
mon
san;^-
et
pour
mon mal
Apolline, retourne-toi
si c'est
c'est
une
de dents. tombera, et
yer,
il
mourra.
i/jo
l'artin
cette fureur
d'amour dont
lui
il
pour ravoir
(les
passion
j)ria
ce
fut presque
pour en
rire
de venir coucher avec lui, ce dont elle me fit confidence. Je m'avisai de le faire un peu jener, pour qu'il en vnt mieux nos fins, et je dis la belle de lui promettre qu'elle se trouverait six heures dans la maison d'une sienne voisine. Je le fis de la sorte droguer six nuits de suite la premire s'coule sans trop d'ennuis la seconde, un tantinet de dsir fait son apparition la troisime, le four commence chauffer et les sou la quatrime, la colre et pirs se mettent en branle la cinquime a jalousie lui font battre la campagne la rage et la fureur lui mettent les armes la main la sixime et dernire tout le mobilier vole en clats, la patience est bout, l'intellect draisonne, la langue va d'estoc et de taille, l'haleine brle, la cervelle se drange, il rompt la bride des convenances et se prcipite par la maison avec menaces, cris, gmissements, larmes, dsespoir, puis se plante l, toujours attendre plus enfivr de passion que n'avait montr l'tre celui qui m'avait faitl'affaire en attendant celle qui ne devait jamais venir. Il se prend croire que si elle ne vientpas,c'est parce qu'il ne m'a pas donn, il me ledit, assez d'arg-ent, m'en donne, m'en promet d'autre et me caresse, tout en menaant ; puis trouve moyen de parler son amoureuse et la voit lui jurer avec larmes que ce n'est pas sa faute, que sa mre la surveille. La potion que vous m'avez procure pour la faire dormir , lui dit-elle, lui a paru bien amre lorsqu'elle y a g-ot, ce qui fait qu'elle" a conu un soupon et qu'elle ne s'endormirait pas pour tout l'or
;
; ;
""
du monde avant de me voir couche. Elle lui promit nanmoins do venir, pour sr et certain, la nuit pror chane elle ne vint pas, et c'tait la fois un amusement et une piti que de voir un homme de ce rang se
;
LES RAGIONAAIENTI
lijl
mcltre la fenlre cent fois en une minute en demandant Quelle heure est-il ? La voici qui vient, elle ne
:
peut
jur
tarder,
je
suis sr
qu'elle
viendra,
elle
me
l'a
sur
il
sa
religion, w
voletait
croyait
que
c'tait
encore un peu, puis un peu plus, lorqu'une heure se fut coule il se mit souffler, se rong-er en dedans,
dlirer
comme
le
Prends
tes dernires
dispositions , en
mme
temps
qu'il
lui montre te confesseur. L'heure passe depuis longtemps, il se jette tout habill sur les draps et, qu'il se mette plat-ventre, sur le dos, sur les flancs, nulle part il ne trouve assez de repos pour pouvoir clore les yeux sa pense est toujours avec celle qui se moque de lui. Il se lve, se promne par la chambre, retourne la fentre, se recouche et, au moment o il va s'endormir, se rveille, bris de fatigue alors, il s'habille en soupirant, le jour tant dj haut. L'heure de manger arrive mais l'odeur de la viande lui pue, lui te l'apptit; il essaye de mang-er une bouche et il la crache comme si c'tait du poison il vite ses amis si l'un d'eux chante, il croit qu'on se moque de lui si un autre se met rire, il s'en fche; il nesepeig-ne plus la barbe, ne se lave plus le visag^e, ne change plus de chemise il erre seul et pendant que ses penses, son cur, son esprit, son imag-ination, sa cervelle se perdent dans les
;
;
rvasseries,
il
s'arrte, plus
mort que
;
vif, biitit
des jar-
dins en
ne se dcide rien il crit des lettres, puis les dchire; envoie des messages, puis s'en repent; tantt prie, tantt menace, espre, dsespre et toujours
l'air et
draisonne.
La
nourrice.
de t'en-
Malheur qui prouve de tels tourments! C'est d'un cruel martyre qu'Amour flagelle ceux qui aiment. Dieu, dans quel tat se trouve l'infortun! Tout lui dplat, le miel lui
tend re raconter ce que tu
1^2
l'artin
semble amer; le repos est pour lui une fatigue; il jene en mang-eant, il a soif en buvant, il veille en dormant.
La commre.
qu' un
si
tu
homme;
dans son miroir. Bien sur, je ne lui avais pas infli;,;c tant de tours de corde parce que je lui en voulais; non, mais j'tais bien aise d'essajer si c'tait une bonne recette pour mettre aux hommes martel en tte. Maintenant, nourrice, puisque la recette a opr, emploie-la, ot tu auras tout ce que tu voudras des gens que tu sauras mettre dans un tat pareil. La nourrice. N'en as-tu pas eu piti ensuite?
La commre. Si, tu t'en doutes bien. La nourrice. J'en suis contente. La commre. Je la fis venir coucher avec
lui
nom-
bre de fois
serr
mon
;
lorsque je lui voyais tenir le poing trop gard, je raccourcissais les rens de la hadliait les
quene
s'il
la bride.
La
nourrice.
ma
bride,
quand
un homme comme
main.
LE BELLATRE
mu::;-uet qui n'aurait pas concd la beaut du Parmigiano, camrier du pape Jules; un de ses vnlets lui ayant dit que toutes les courtisanes et nobles dames de la ville se retenaient de ne pas se jeter par les fentres sur son passage, par amour pour lui, il acheta autant de paillasses et de matelas qu'il put trouver, dans l'intention de les faire porter derrire lui partout o il allait, de peur de les
Il
y avait certain
droite la
main
LES RAGIONAMENTI
laisser se casser le
1^3
cou lorsqu'elles se prcipiteraient. Il il faisait avec toutes le trpass, tait continuellement en srnades, crivait toute heure quelque nouvelle lettre d'amour, lisait toute la journe des sonnets et subitement se mettait vous quitter pour courir aprs quelque porteuse de poulets. Gomme il avait besogn des yeux toutes les femmes, il tait connu jusque derrire les Banchi. Je lui en jouai une, celui-l, et une douce, douce Je veux tre ton esclave la chane; La nourrice. je me croirais une comtesse si je voyais jeter dans les latrines un de ces maroufles, et combien y en a-t-il Il venait tous les matins la Pace, La commre. se plaait toujours aux endroits les plus honorables et g-uig'nait de Til toutes les femmes; tu aurais dit en le voyant mugueter u Celui-l leur met le bt toutes. Moi, aprs m'tre aperue qu'il coutait ce dont nous Le hibou nous parlions, je dis ma compagne espionne; ne te trouble pas et fais semblant de t'merveiller de mes paroles. Cela dit, je hausse un peu la voix et j'ajoute Je suis pour le restant de mes jours toute tourdie, cause des cassements de tte que me donne ce dal Piombo, qui est un si grand peintre. Je lui ai montr Le doigt, et il a pris le doigt et la main.
dcochait des sourires toutes,
Comment cela
mal de
me
demanda-t-elle.
le
Je lui ai
non, d'une miraculeuse jeune fille cela m'a cot un la vrit se doit chien, mais il m'en a paye toujours confesser. A cette heure, il est sans cesse sur mes paules, pour la peindre de nouveau, quoiqu'il Tait
:
eue dj tant de fois il l'a fait poser pour l'ange Gabriel, pour la Madone, pour la Madeleine, pour sainte Apollonie, pour sainte Ursule, pour sainte Lucie, pour sainte Catherine, et je l'excuse, car elle est bien belle, je te t'assure. Le bltre, qui avait les oicilles ouvertes deux battants, ds que j'eus quiU mon amie aprs nos
;
^44
l'autin
bavardages,
si
il
me
suit la piste
il
si
je
marche,
je
il
marche;
m'arrte,
je vais
doucement,
ralentit le pas; si
s'arrte, tousse un brin, s'claircit la voix, salue un passant d'une voix si haute que je l'entends, et fait mille
gestes pour que je le remarque. Je laisse alors tomber mon chapelet et je j^ursuis ma route, feignant de ne
pas m'en tre aperue; le coon s'lance d'un bond, le et avec un Madone Madone me fait retourner; il me tend le chapelet, je m'crie Tte
ramasse
l'vent que je suis grand merci Votre Seigneurie. Si je puis quelque chose, votre service et je vais
!
pour continuer
tire
ma
;
me
retient,
me
l'cart et commence me dire tout le plaisir de m'tre agrable que bien qu'il soit jeune encore, je ne l'accuse pas de prsomption s'il recherche mon entremise pour profiter d'une bonne aubaine; que, grce tout le bien qu'il m'a entendu dire de celle dont on fait tant de fois le portrait en ange Gabriel, il en est tomb en
un
tel
flamme
pmer.
La
nourrice.
galamment.
lui coupe la parole d'un de ces dont on use quand on veut parler son tour, et je rponds vasivement en concluant que c'est chose impossible que de l'aboucher avec elle; je lui allgue les convenances, les mfiances, et, prenant cong de lui je fais cinq ou six pas, tout en mchonnant le
La commre.
Oh Je
tu le faisais
monter
l'chelle
Excusez-moi
Rflclssez-y bien
puis je
:
me
me (lit Que m'ordonnez-vous, ma mre ? J'ai bon espoir pour vous, je me suis rappel que..., suffit, pour l'instant. l'ai tes en sorte de vous trouver chez moi ce soir, la demi-heure de nuit et peut-tre, peut-tre...
Adieu.
La
nourrice.
LES RAGIONAMENTI
^D
La commre,
et
Si tu avais vu
de quel air majestueux il s'loig-na, ce fou lier, tu aurais bien ri. Il s'eu alla tout de suite voir l'horlog-e quelle heure venait de sonner et, chaque ami qu'il
rencontrait,
il
lui posait la
bas
main sur
Je
l'paule
et lui di-
m'en
vais tter ce
soir
d'un morceau dont un Duc s'estimerait heureux; n'en parle personne, je ne puis t'en dire plus long-, La nourrice. Le bltre Voici que l'heure sonne; il arrive La commre. et je lui dis Faut-il vous l'avouer ? elle vous connat, ce qui fait qu'elle hsite pour de bonnes raisons. Comment, pour de bonnes raisons ? rplique le niOui, sig-nor g-aud ne suis-je pas un homme, hein ? ne vous emportez pas , lui rpond la commre; mais elle sait que vous voulez toutes les femmes, que vous les avez toutes, et elle craint qu'une fois rassasi vous ne vous moquiez d'elle. Mais moi qui connais les g-ens en deux coups d'il, j'ai tant fait et tant dit qu'enfin elle sera votre servante. Non pas, ma souveraine, par la potta de sainte Isabella par le chien de la chatte! dgana-t-il. Je poursuivis Que votre Seig-neurie le sache elle m'avait donn une bag"ue, absolument pareille celle que vous portez au doigt, afin que vous la Non; preniez pour l'amour d'elle; mais je lui ai dit il veut au contraire vous donner la sienne et que vous la portiez en sig-ne de la foi qu'il vous jure. A peine eus-je achev la phrase qu'il se mouilla le doig-t du bout de la lang ne et sortit la bague en me disant Vous tiez dans mon sentiment quand vous lui parliez de la sorte dpchez-vous d'aller la lui remettre et d'arranger
l'affaire.
nourrice. Ah ah ah Qui ne rirait de la manire dont tu lui as flibuste le joyau ? La commre. La bag-ue obtenue, je lui promets qu u coucherait la nuit prochaine avec sa belle et, aprs
!
La
i46
lui
l'n
tite
L AUKTIN
avoir encore soutir cinq Jules, je le cong-die avec (( Portez- vous bien . Puis je me procure une peg-ueuse on ne peut plus sufHsante, je la nippe d'ef-
fets
la
que
le taudis d'un mien compre, et je la couche entre les bras du sire qui se met renier le ciel^ parce qu'un mauvais lumig-non, alambiqu d'huile par moi et toujours sur le point de s'teindre, ne lui permettait pas de la voir son g-r. Mais il fut sur le point de prononcer le vu de se faire moine quand, une heure avant le jour, je vins le trouver au nid et le forai de se dresser sur pied en m'arrachant les cheveux, en m'-
mne dans
criant :
ri, les
les frres, le
I
ma-
Malheureuse que je suis misrable !... Puiss-je faire une triste fin si la peur qu'il eut ne lui fit pas oublier sa bourse sous le traversin. Il revintle matin chez moi, pour causer mais un mien marlou, qui semblait exaspr, lui donna tant d'inquitude que jamais plus il ne se montra.
;
beaux-frres
LA VEUVE
La commre. Un homme
toine,
de qualit, un
renomm
venait la messe. Pour attraper l'un ou l'autre, comme j'en vins bout, j'arrivais toujours l'g'lise avant elle
et je m'installais sur les
marches de son autel prfr pour lui donner l'occasion de me parler, ne fut-ce que pour me dire: Ote-toi de l, et c'est ce qui advint; chaque fois qu'elle me voyait, elle nie saluait gracieusement et souvent me deuandait
;
LES UACIONAMENTI
l^J
comment
allait
ma
sant,
si
j'avais
un mari, combien
je
pavais de lover et autres histoires. Celui cjui la lorgnait en prit occasion deme faire l'intermdiaire deses amours ;
soir il vint me trouver, en secret, et m'exposa sa requte d'honnte faon. Moi qui ai mon latin en bouche, je promets en lui disant je ])romels sans promettre Une pauvre femme comme moi n'est que l'humble
un
((
homme comme vous et je me rtracte en ajoutant Je doute de russir; toutefois, je lui parlerai, soyez-en certain. Je le fais alors venir l'g-lise, je m'approche de
servante d'un
: ;
la veuve et je l'entretiens d'autres choses, puis, me retournant vers lui, je lui fais entendre par si^-nes qu'elle riait de ce que je lui avais parl de lui, tandis qu'elle le voil bien content. riait de mon simple bavardage Quelle piti La nourrice. L'ofHce achev, je retourne la maiLa commre son et il arrive je lui touche la main et je lui dis
vous fasse tout Je bien qu'elle vous veut! Bon Je ne pouvais lui parler de chose qui lui ag-rt davantag-e. Pour la premire fois, elle ne s'est pas risque me dire toute sa pense, mais qui ne la devinerait ? Ecrivez-lui donc une lettre, avec quelque petit sonnet; car elle en est friande, et je la lui remettrai. Ds qu'il entendit parler de la lettre, il sortitunecouplede ducats: Je ne vous les donne pas en payement , me dit-il, ce sont les arrhes de ce qne je compte vous offrir, et ce
profit
mme j'apporterai la lettre. Il s'en va et revient avec la lettre enveloppe dans un morceau de velours noir,
soir
lie
prsente
avec un cordon de soie verte il la baise et je la rebaise etje la prends. Crmonies pour crmonies. La nourrice.
; :
-
me
la
Aprs l'avoir empoche, je cong-die La commre. mon homme etje promets de porter la lettre le lendemain. Je me rends l'glise, je rencontre la dame et je
ne
lui parle pas,
voyant avec
elle
une servante
qu'elle
i48
l'autin
n'avait pas coutume d'amener sans rien de plus, je C'est bien , me dit-il, m'excuse vis--vis de lui. ce qui ne se peut ne se peut pourvu que vous penComment cela penser siez moi, cela me suffit. vous V Je remettrai la lettre aujourd'hui mme, ou je civerai laissez-moi faire, je veux aller chez elle. Soyez ici deux heures et j'aurai quelque chose vous dire.
remercie, renouvelle ses promesses, lche un autre ducat et tourne les talons. Un bon bout de temps apis, je me rends chez la veuve, qui je ne demande que si elle n'a pas un peu de lin, d'toupe ou de chanvre me donner, pour filer. Tu te souviens bien de ce que je t'ai dit que dans les maisons riches j'allais vtue en pauIl
me
petit
vresse
et,
riche. J'obtins
rhomme
monde
maisons pauvres, vtue en femme et tout ce que je voulais, puis, Je la lui ai tant revenu me voir, je lui dis
dans
les
du
lin
remise de
ni vraie ni
la
)),et
faon la plus
adroite, la plus
mme approchant du vrai, je lui fais croire que j'irais, le lendemain soir chercher la rponse. Le lendemain matin arrive, et j'avais aller endoctriner une
de ces petites dvideuses de soie, assez jeune, gentille et pauvre au possible. Je laisse une nice que j'ai la maison et j'oublie la lettre que je n'avais ni donne ni
tcnlion de donner
fatal oni)Ii qui
lier
;
l'in;
elle tait
dans
le tiroir
de
ma
le
table
faillit
causer
ma
il
perte,
car
particu-
qui
me
l'avait
dans
le tiroir,
:
trouve sa lettre et
la
met dans
sa poche en se disant
La commnre.
le
cur mdisait
le
;
dans
Je rentre, mais comme y a quelque chose, je regarde tiroir, je n'y vois plus la letti-e et je fais venir la
:
Doucement.
11
gamine
elle
me
dit
Messire un
LES RAGIONAMENTI
1^9
nraborde en souriant
comme
l'ordinaire et
me parle
laisse
madre commre ne
s'y
pas prendre, elle se rapproche de lui et lui dit: Je sais que vous n'accordez pas vos pauvres servantes le temps de dormir, ni celui de digrer leur dner surmon me, j'ai pass l'une des plus mauvaises soires et des plus tristes nuits que ron puisse avoir. Il est vrai que je vous ai dit avoir remis la lettre, je ne le nie pas, et je ne vous ai pas dit cela pour vous en conter. Mais je n'ai pas
;
et,
Peu iinporte pouvoir le faire ce soir mme, je me dis du moment que sa (.le lui en avoir donn l'assurance, commission sera faite temps. Maintenant, vous avez repris votre lettre et je suis sre que vous ne croiriez plus de moi la vrit mme. Mais rendez-la-mol et vous
verrez,
je
suis capable.
La nourrice. La commre.
bonasse,
et tout
de sa poche et me la rend. Certes, J'tais un peu en colre, dit-il, parce qu'il me semblait tre trait en nigaud, mais je suis un homme raisonnable j'accepte donc vos excuses et tout mcontentement s'est envol la faute se rparera par Je salsbien, rpliquai-je, que c'est chose la dilig'ence. grave de ne pas dire la vrit un seigneur tel que vous mais c'est fait, songeons au remde. Il s'en va empochant ces btises et moi de rire et de dplier la lettre. Nourrice, jamais on ne vit plus belle affaire ; chaque lettre semblait une perle et il n'y aurait pas au
tire
la
lettre
si
dure
et
si
et
i5o
l'artim
lire et
conque! Je pris un tonnant amusement ce petit madrigal, qui s'y trouvait inclus
relire
Dame,
la
Est belle seulement parce qu'elle vous ressemble. Pour la rendre plus belle encore,
r)issipez
vos glaons
et
teignez
ma flamme
Vous
Qu'avec la piti vous aurez plus de ressemblance, Car enfin vous en recevrez blme Si c'est en vain que mon espoir espre, Et l'on dira Est .cruelle merveille La cruaut, rien que parce qu'elle vous ressemble.
:
La nourrice. La commre.
je laissai l et,
je
mon
aise,
avec
mo confectionnai deux sachets porter au cou, tout en riant de celui qui attendait la rponse, laquelle vint comme tu vas voir. Quand je retournai chez la veuve, j'entendis que l'on y criait propos de je ne sais- quelle chane de cou brise en quatre morceaux pendant qu'on ^c'tait le plus beau travail qu'on et tirait dessus jamais vu, un travail comme personne Rome n'en aussi madone menait-elle grand tapage. sait faire En femme ruse, je pense la malice et je lui dis quand vous viendrez la Ne vous emportez pas messe, je vous aboucherai avec un matre orfvre que vous.avez peut-tre aperu quelquefois, et il vous la raccommodera si bien qu elle sera plus belle aux en:
que l oui elle est reste intacte. Elle se Tchez de venir calma aussitt et me rpondit Tglisc demain matin sans faute. Je lui promets, rentre au galop chez moi et, le temps de dire un bndiIl faut tre femme, cit table, le galant apparat. lui dis-je, et avoir la volont de vous servir comme je viens de le faire. Votre lettre a plu, et tellement, telledroits briss
:
LKS RAGIONAMENTI
l5l
scniljlerca
trang-e
c'taient
des
parlez
les vers
;
les petites risettes. Dix fois elle a lu a fait des loges, je ne peux pas vous dire ce ne fut pas sans la baiser et la rebaiser qu'elle la nicha entre ses deux seins de neig-e et de roses, et la
compter
en
et
l'g^lise,
quand tout
monde
nant
voix haute.
homme
qui veut
me
En appreremercier
chemine
le
dis-je,
on
endroits scabreux ?
dire,
me
demande-t-il.
se fie pas
Je vais vous
Gomment, quels
sa suivante, et de peur que votre secret ne se dcouvre, nous avons trouv un joli expdient. La noble dame a bris une elle fera semchane laquelle elle tient beaucoup
rpliquai-je.
;
Elle ne
un orfvre
et,
de suivante ne s'aperoive de rien, elle vous prsentera la chane, vous demandera ce qu'il en coiHera pour la raccommoder et quand elle pourra la ravoir. Tchez de ne pas sortir de votre rle et arrang-ez-vous de manire la satisfaire. Quelle diable d'intrigue La nourrice. La comdie fut joue; ils s'abouLa commre. chrent ensemble et tu aurais crev de rire si, pendant que le sot maniait la chane, tu avais vu lui trembler les lvres et les mains. Il s'efforait de parler par paraboles, ne parvenait pas se faire entendre et comprenait encore moins la veuve. A la fin, il s'loigna en lui promettant de lui envoyer, pour qu'elle pt le voir, un travail de mme g-enre que celui de la chane brise. Il se laissa mener par le bout du nez trois mois durant, g-rce mes a Aujourd'hui ou demain, vous serez aux prises avec elle , et je parlai de lui la veuve tout autant que tu en parlais toi-mme. A la dernire extrmit, il vit clair, et, de la honte qu'il eut de s'tre laiss
que
cette rapporteuse
l5s
L*ARTIN
promener de la sorte, n'osa souffler mot. Entre autres bonnes farces, il roug-issait surtout d'une belle aubade donne par lui la veuve, pour laq'uelle aubade il avait
rassembl les premiers musiciens d'Italie, avec ou sans instruments, et s'tait mis chanter de jolis vers tout fait nouveaux, La nourrice. Si tu t'en souviens, dis-les-moi.
La commre.
la
Que je me
et
seig-nait
quand
j'tais petite
luth
Ma
Quand
douce flamme,
ma
le
matresse,
je vois toute
ma
flicit
autre part,
figure.
doit tre
n'est
Et
il
une image prise sur vous. beau que pour ressembler votre
Court et bon. Puis ils chantrent sur entours d'une foule de g-ens
La nourrice. La commre.
le
livre,
Puisque le monde refuse de croire Qu'en moi, grce l'amour, habite tout malheur, Tandis que tout bonheur rside en mon ennemie; O Roi cruel des races maudites, Et toi, le Dieu des Dieux, Pour grce que je voudrais Qu'un de vous arracht aux flammes, aux monstres,aux glaons, La plus tourmente des mes-. Et l'autre l'me la plus heureuse Aux anges du ciel ; Que la mal partage ft une heure avec moi
Et
la
bienheureuse avec
ma Dame.
:
Mise en fuite par mes gmissements pour mes pchs moindre supplice; Et que pleine de joie, l'me bienheureuse, Prise au filet de ce doux visaare.
J'endure
LKS RAGIONAMKNTI
l53
Ne vouJrait
Car en moi est un Enfer plus cruel. Et en elle un Paradis plus sempiternel.
Voil qui est stupidement beau; tes La nourrice. bavards de potes peuvent se vanter de dire de grandes sottises et de dlirer continuellement.
La commre. Aux peintres et aux potes il est permis de mentir, et c'est pour eux une faon de pailer que de grandir les dames qu'ils aiment et le tourment qu'ils prouvent les aimer. La nourrice. Une corde et qu'on m'attache ensemble peintres, sculpteurs et potes ce sont tous des
fous.
LE MOINE
La
commre. Je saute, avec ma cervelle, qui toujours
un grand diable de moine, gros,
joufflu,
vole,
ronde
il
rendre son amie, il y parvint et, pour y russir, me donna tantt des petits cordons artistement dresss, tantt de gTosses salades, des prunes, que sais-je ? un tas d'histoires de moiiies. Lorsqu'il m'apercevait l'g-lise, il quittait n'importe qui pour venir mol, et comme je voyais bien de quel pied boitait mon mulet, je faisais celle qui est absorbe dans la contrition et cherche le bien de son me en inflig-eant toutes les souilVances son corps. A la fin des fins, il se dcouvre moi, me fait la confidence de sa passion amoureuse et veut m'envoyer faire une ambassade qui aurait donn rflchir des ambassadeurs eux-mmes, eux qui ne portent pas la peine de ce qu'il leur est ordonn
cherchait
me
de dire. Les moines aussi se plaisent donc La nourrice. joujr des basses marches ?
54
l'artin
la
chose, du g"ot La nourrice. Au feu de saint Ban, que l'on teint coup de pierres La commre. Moi qui ne pouvais faire faux bond
La commre. Oui, ils trouvent quelque sauce qu'on la leur serve.
!
la paterne paternit
du pre, au moment qu'il m'ouvrit son cur, je lui dis Soyez sans crainte; je ferai plus qu'il ne faut, et demain matin je suis votre disposi:
m'en
vais, toute
songeuse, aprs l'avoir quitt, me demandant par quel moyen je pourrais lui tirer de l'me une centaine de ducats dont il me mettait souvent, souvent l'eau la
bouche, rien qu'en vue de me donner des ailes pour contenter; je n'eus pas aller pcher bien loin sans trouver, ce moyen.
le
le
La
Peux-tu me dire comment tu Tas pch? Tu bien que La nourrice. La commre. J'arrtai mon ide sur une {^ourg-anLanoiirrice.
commre.
sais
oui.
Dis-le, alors.
de taille et pour la g"rosseur, les membres dodus, ressemblait (j'entends dans Tobscurit) la madine qui,
trone que dsirait
le
Sa Rvrence pour
;
ce qui est
du reste,
des valets des Espagnols et des Allemands, qui vinrent faire Rome le beau remue-maag-e,et rassasi la f.ira
des assig-s de Florence, sans compter tout ce qu'il y
eut jamais de g-ens Milan, tant dedans qu'au
(1 liors.
Songe maintenant,
la
si elle s'tait si
guerre, quelles prouesses elle dut faire durant la paix daUvS les curies et les cuisines et les tavernes Mais ses charmes supplaient au peu de fracheur de sa virginit elle avait deux yeux dont, la barbe de la chanson, qui dit
!
Deux
on pouvait dire que
vivants soleils.
c'taient
LES nAGIONAMENTI
l55
La nourrice. sieux?
La commre.
un
or-otre
abominable
gorg-e, et l'on
Ma
oui,
lui .produisait
ne
gens qui tombent malades son service. Ne m'en dis pas plus long-. J'en ai dit assez; mais je veux te conterque le moine, habill en capitaine de g'ens d'armes, arriva chez moi l'heure que je lui avais assigne et, comme il en avait encore trois attendre, se mita lire un livre que je gardais pour passer le temps; il ne l'eut pas plutt ouvert, qu'il lut haute voix certaine pice
La nourrice. La commre.
tourne de la sorte
Madone, parler
Si je vous
le fais,
vrai.
puiss-je mourir!
le
savez,
Amour joute avec les morpions; Puis vous avez l'anus si large Que toute notre poque y entrerait; Et toi. Amour, crois-moi sans que j'en jure. Elle pue galement de la bouche et, des pieds. Voil pourquoi parler vrai, Si je vous le fais, puiss-je mourir
!
-
Aprs avoir lu cela, il se met rire crve-panse et, croyant que je riais de le voir rire, redouble ses ah! ah sans se douter que la commre se dcrochait la mchoire de ce que le morceau dont il devait tter tait en tout
!
semblable celui de la canzone. Oh! bien. La nourrice. Le moine tourne La commre. chantonnant
la
page
et lit
en
56
li*ARTIN
Madone, je veux le dire et que chacun m'entende: Je vous aime parce que je ne suis pas bien riche,
Et s'il me fallait acheter Les faons, un quattrino pice, A ne pas dire de mensonge, Je vous verrais moins d'une fois par mois. Oh vous pourriez prtendre Que j'ai dit que le feu Me consume (en votre honneur) petit petit. Je l'ai dit, c'est vrai, mais pour rire, Et mille fois je mens par la gorge.
!
Il lut encore toute la suite, que des soucis de plus grande importance m^ont te de la mmoire, La belle fin que cette chanson doit La nourrice.
avoir
Elle Ta pour sr. Il se mit ensuite une terrible, compose la louange d'une certaine Angela Zaffeta, et que jem'en vais parfois gazouillant quand je n'ai rien de mieux faire ou quand mes
La commre.
lire
en
tracas
nourrice. chantant?
La
me
tourmentent
(i).
tracas en
te
qui
minuit passe par un cimetire chante pour donner du courage sa frayeur, et celle qui semblablement fredonne en songeant ses ennuis le fait pour donner le change son chagrin Jamais, jamais on ne trouvera une La nourrice. autre commre. Aboie qui voudra, par envie ou pour
n'importe quoi,
La commre.
c'est la vrit.
tre priv du
supplice
On (i) Oq voit par l combien TArtin en voulait la Znffeia. peut donc croire qu'il a au moins mis la main au Irenteet un de la ZaU'etta attribu auVeniero. Cf. riutroduclion.
LKS UAGIONAMBNTl
l57
De la gent rprouve. Savez-vous quel tourment Accable les mes damnes? C'est de ne plus pouvoir contempler l'Angela sur Rien que l'envie et la jalousie Qu'elles ont de notre bonheur. Et l'espoir perdu de jamais la voir Les plon2;ent toute heure
Dans
S'il
terre.
l'ternelle douleur.
La
la
nourrice.
!
Que
c'est
beau, que
c'est
bon, que
c'est jgalant
pour qui
que
les flatteries
n'emplissent
pas
ventre.
La commre.
moine
Je meurs,
Le
:
entama
tais;
:
madone,
me
Interrogez
Amour
l-dessus
Il
la raison
que
le reste
tait
bien
voulut
la lire et je
ne pus
lui
arracher
le livre
des mains. Je voudrais bien te dire cette pice-l, et je voudrais tout autant ne pas te la dire. Dis-la, j'en courrai le risque. La nourrice.
La commre
Sil est possible. Amour, Rpartis dans les curs des autres
Cette
hommes
mienne passion. Mes esprits, mon me, mes sens. Sous la souflrance dont tu m'accables. Endurent en cette chair un martyre immense; Et puisijue c'est un supphce atroce
Que
l58
L*ARTIN
J'espre eu ta piti
mon
dernier soupir.
Mais non
A mes
grandes peines.
Et bien qu'en la douleur Le corps sente son saint, Oue ta volont soit faite!
parle
il n'tait encore qu'un disciple, ainsi que tous ceux que tu nous as rcits et que tu nous rciteras (2). La commre. Le Flau des Princes les a composs dans la fleur de sa jeunesse. En ce moment, le moine, entendant heurter la porte, jette le livre, court s'enfermer dans la chambre, et moi j'ouvre la g-ourgandine je la prends par la main, je la mne au beau sire sans lui laisser le temps de reprendre haleine et, aprs avoir tir sur moi la porte de la chambre, je reste en suspens une minute j'entends alors un tic, toc, tic le plus brutal dont on ait jamais frapp porte de maquerelle ou de putain, aprs quelque trahison. Qui est-ce qui frappait si fort? La nourrice.
quand
Certains miens coupe-jarrets. Oh! pourquoi La commre. Par ordre de moi-mme. La nourrice. Je ne comprends pas.
La commre. La nourrice.
?
La commre
J'avais
fait
accompagner
;
la drlesse
de peut-tre bien treize ans par mes brigands ils avaient ordre d'attendre un instant, puis de heurter de toutes
leurs forces.
La nourrice.
La commre.
(1)
Pourquoi cela?
Tous ceux que tuas rrils et nous rciteras. I.a commre a une chanson contre la Zaffeta.Il .semble qu'il y ait l comme un aveu implicite au sujet du Trent'anode la Zajfeta.
(2)
rcit
OQ
Cachez-vous sous le lit, viteet sans bruit. Hol l! nous voici dshonors. Le Bargello, avec toute son escouade par derrire, veut vous prendre. Ne vous l'avais-je pas dit, de n'en pas souffler mot dans le couvent ? Est-ce que je ne connais pas les murs des relig-ieux? Ne sais-je pas l'envie qui vous dvore tous, ne le
sig-iie
au moine
et je lui
sais-je
pm
et
la volont con;
ne
sachant que faire, croyant se fourrer sous le lit, il mit le genou sur le bord de la fentre et, si je ne le retenais, il se prcipitait du haut en bas. La nourrice. Ah! ah! La commre. Un larron pris en flagrant dlit, voil quoi ressemblait le Rvrend. Cependant, on ne cesse de frappera la porte, on me menace avec des hur-
Ouvre, ouvre, sorcire, lements d'enrag-s, on crie sinon nous flanquons la porte bas. Je tremble et, d'une fig-ure jaune comme une omelette, je lui dis Apaisons-les avec quelques cus. Pourvu qu'ils Essayons tous'en contentent, soupire le gros porc. jours , lui dis-je. Lui qui aurait volontiers donn toute la soupe destine lui venir en subsistance le reste de ses jours, il me lche vingt ducats je me montre la fentre et je dis d'une voix humble Seigneur capitaine, monseigneur, misricorde et non justice Nous sommes tous de chair et d'os ne dshonorez pas Sa Paternit vis--vis du Snateur et du Gnral... Je suis toute hors de moi d'entendre La nourrice.
: :
ce
La commre.
:
que tu me racontes.
...
et
j'era-
pocheles autreset je rends grces au Bargello pour rire, qui me dit Votre bont, votre courtoisie, votre
gnrosit,
tte.
commre, lui ont t la mitre de dessus la Toute revenue moi, je dniche le pauvi-e homme,
L*AIVT1N
de
la cachette
:
quand
j'y pense, la
je l'avais
Vous
l'avez
n'est rien,
voulait se montrer
Nourrice, il de cur et retourner saillir la jument, mais des tais n'auraient pas pu faire dresser son pal, et il s'en alla sans commettre de pch. Avec cinq Jules je satisfis la drlesse, et mon sac tripes ne me souffla plus mot d'amoureuses ni de quoi que ce
homme
ft.
LES SORTILGES
La commre.
je
si
l'ai
dit;
mais
veux terminer en
enceinte
pour assurer une ou un garon pour dire si les objets perdus se retrouveront, si le mariage doit se faire ou non, si le voyage aura lieu, si la marchandise rapportera bnfice, si un tel vous aime, si un tel a d'autres matresses que vous, si le dpit passera, si
d'abord de quels sortilges j'usais
femme
ce sera
une
fille
votre
vite, et
un
La
attrape-nigauds
main un
petit
chrubin de lige, mignon, mignon, et on ne peut mieux colori; au fond d'un verre perc, au beau milieu, se trouvait un pivot, c'est--dire une pointe fine, sur laquelle tait fixe la plante du pied du chrubin, qu'un souCnc il tenait la main un lis en fer. Pour faisait tourner dire la bonne aventure, je prenais une baguette dont le bout tait une pierre d'aimant je n'avais qu' l'approcher du fer pour qu'il tournt aussitt du ct o je
; ;
LES RAGIONAMENTI
i6i
femme ou qu'un ou si elle tait aime, si la paix se referait avec celui-ci ou celle-l, je pratiquais des conjurations et, marmottant des paroles inintelligibles, j'oprais le miracle l'aide de ma baguette, vers l'aimant de laquelle le lis de fer tournait aussitt le chrubin faisait passer le mensong-e pour vrit pure. La nourrice. Oui n'y aurait t pris? La commre. Par hasard, il m'arrivait quelquefois de tomber juste et, comme la chose paraissait merveilleuse ceux qui ne connaissaient pas la fourberie, bien des g'ens pensaient que j'avais tous les dmons mon service. Mais venons la manire de jeter les fves. La nourrice. Je n'ai jamais vu cette momerie-l, mais j'en ai entendu dire des merveilles.
homme
dsirait savoir
s'il
tait
La commre. Je vais
;
pas en grande faveur ici elle se pratique Venise et il y a des g"ens qui y croient comme les luthriens croient au bon chrtien Fra Martino. La nourrice. Qu'est-ce que ces fves-l? La commre. On en prend dix-huit, neuf fves femelles et neuf mles d'un coup de dents, on en marque deux qui seront l'une la femme et l'autre l'homme. faut avoir avec cela un bout de cierg-e bnit, une Il branche de palme et du sel blanc, toutes choses qui symbolisent les peines de cur des amoureux. On prend ensuite un morceau de charbon qui signifie le courroux dont l'amant est ag-it et un peu de suie de la chemine, pour savoir quand il reviendra lamaison.Et o laissje le pain? A tous les inqrdients ci-dessus, on ajoute une bouche de pain qui doit servir connatre le bien que l'amant pourra faire. Aprs cela, on prend une moiti de fve, en sus du nombre de dix-huit, et cette moiti sig-nilie le bonheur ou le malheur. Lorsqu'on a mis le tout en tas, fves, bout de cierge, paltne, sel, suie, paiu, on mle le tout et, avec les deux mains, on
i6j
le brouille,
l'artin
on le ressasse lgrement, puis on fait dessus signe de la croix la bouche ouverte si, par hasard, la bouche, place au-dessus du tas, se met biller, c'est bon signe, parce que les billements assurent la
le
;
russite.
Quand
la
pratique a
le
signe
de
la croix,
Ave, mre de Ave, madame Sainte-Hlne, reine Constantin, empereur; mre vous ftes, mre vous tes; sur la sainte mer vous alltes, . onze mille vierges vous vous mltes, d'autant et plus de chevaliers vous accom;
pagntes ;la sainte table vous dresstes, avec trois curs de mille-feuilles le sort vous jettes, la Sainte-Croix vous trouvtes, au mont Calvaire vous alltes, et le monde
entier vous illumintes.
On remle encore une fois, on parpille, on ressasse de nouveau les fves et le reste, et aprs avoir fait le signe de la croix, on dit Parles mains qui les ont semes, par la terre qui les a fait germer, par l'eau qui les a mouilles, par le soleil qui lesasches, je vous prie de^montrer la vrit. Si un tel lui veut du bien, faites que je le trouve ct s'il lui parlera tt, faites que je le d'elle, sur ces fves trouve bouche bouche avec elle; s'il viendra tt^ faites s'il lui donnera de l'argent, qu'il tombe de ces fves faites que je voie des fves en croix ct d'elle, ou, s'il me mandera quelque chose, montrez-moi la vrit dans
:
bouche de pain. prend ensuite les fves, on les enveloppe dans un morceau de toile blanche, en faisant trois nuds, et chaque nud on prononce ces paroles Je ne noue pas ces fves, je noue le cur d'un tel. Qu'il ne puisse jamais avoir de bonheur, ni de repos, ni de tranquillit en aucun lieu qu'il ne puisse ni manger
cette
On
ni boire, ni
dormir ni
veiller,
ni
ni lire ni crire, ni
parler
homme
quoi que ce
jusqu' ce qu'il
LES RAGIONAMENTI
soit
l63
venu
la voir
et qu'il
elle.
On
terre
:
tombe
le
nud
mour
ries
toutes les
la
sing-e-
que
on attache
paquet
g-auche de la
elle
le
femme
jambe quand
de
la
va se coucher,
elle le
moyen de donner de
La
que
dra
nourrice.
je le trouve
Faites
s'il
vien-
Cela veut dire Faites que la fve La commre. mle touche la fve femelle et qu'en tombant seule, pendant qu'on les mle, elle montre que l'amant vien:
tombe de
ces fves.
dra voir sa matresse. La nourrice. Je vois clair maintenant; oui, oui, sur ma foi, cela me plat beaucoup. On prtend que sainte Hlne se La commre. lve par trois fois de dessus son sig-e quand on dit la bonne aventure l'aide de son oraison, et c'est un pch dont n'absoudraient pas les stations de dix carmes. J'ai pourtant vu croire cela des personnes dont tu ne te
douterais jamais,
La nourrice. La commre.
j'ai
A quoi donc?
Pour
la
et, j'y
pense
..
mag-ie au chrubin
du
lig^e
avant que l'on ne touche le lis avec la baguette. Il me semblait aussi qu'il manquait La nourrice. quelque chose. Dis-la-moi.
La commre
Bon
petit Ange, beau petit Ange, Messire saint Raphal, Par vos ailes d'oiseau.
i64
l'artin
Ecoutez ce que je vous demande. un tel mprise une telle, Tournez-vous par-ci, de grce, Et par-l, si nulle autre ne le soulage.
Si
disentet se croient!
si
on y
croit,
hein?
et
bien sre que qui ferait le compte des sclrats des im.bciles ne trouverait pas beaucoup moins de nig-auds que de coquins. La nourrice. Je n'en fais aucun doute. La commre. Pour la bonne aventure la cire vierg-e, on prend une marmite neuve et on la met sur le feu avec de la cire dedans. Quand la cire commence
s'chaufer,
cire
fondue et, sitt qu'elle est refroidie, on y voit tout ce qu'on sait demander. Dis-moi l'incantation. La nourrice.
La commre. Une autre fois. La nourrice. Pourquoi pas maintenant? La commre. J'ai fait vu de ne pas la
dire
le
jour o nous sommes, mais je t'enseignerai celle du Pater nostri, l'ensorcellement de l'uf et jusqu'au sas bluter la farine, o l'on plante des ciseaux, avec l'oraison de saint Pierre et de saint Paul. Tout cela, ce sont des niaiseries, des attrapes, des moqueries, proches parentes de la perversit de celles qui usent de semblables malfices. Mais comme tout le monde est port sans peine croire ce qui lui agre, la maquercllc donne pour vrits pures les mensonges de la sorcellerie, et le hasard qui fait parfois tomber l'un d'eux juste sauve celles de ses prdictions qui tournent mal.
LE DIALOGUE DU JEU
l65
LE DliLOGUE DU JEU
OU
LE SIENNOIS
y avait Sienne nn joueur trs connu par Thabilel possdait aux jeux de cartes; mais il tait dblasphmes qu'il profrait lorsqu'il cri cause des jouait. II advint que, par uti tour fort ing-nieux, quelques-uns de ses amis l'amenrent se corriger. La nuit de Sainte-Lucie, ce SIennois se mit jouer et chaque coup qu'il perdait, sa langue effronte martyrisait le nom de la pauvre V^ierge et profraitdes horreurs scandaleuses. Quand la partie fut finie, il ne restait plus au Siennois d'autre vtement que sachemise; et s'il ne perdit pasgalement tout ce qu'il avait dans sa maison, c'est que ses adversaires ne voulurent pas le laisser sans un abri o se reposer. A la fin, fatig-u de vocifrer contre tous les
Il
qu'il
saints,
il
lit,
il
et bientt, la lassitude
l'em-
cach
la
dans
lieu
rol)scurit,
lumire, se mirent faire semblant de jouer annonant haute voix les coups et
la partie tout
suivant la marche de
comme
si elle
avait
avec activit. Le bruit rveilla le Siennois, et, en ouvrant les yeux, il fut saisi de surprise de ne pas voir la lumire et d'entendre compter l'argent qui passait de main en main. Les plaisants qui lui jouaient ce tour continuaient de dire Huit sept, neuf dix ou au:
homme
s'cria
ment
que
dinble jouez-vous
dans l'obscurit?
Com-
Ou'est-ce
tu
rpondirent
l66
ils,
L'AnTIN
et finalement ils lui firent croire que, si les cartes avaient enlev son argent, sainte Lucie l'avait priv
lui
de la vue pour le chtier de sa mauvaise habitude. Ils continurent de suivre avec activit leur partie imaginaire, tandis que le Siennois restait dans les tnbres
Tenant pour certain que la martyre puni en le rendant aveugle, il se mit demander misricorde, promettant Uieu, par les vux les pUis formels, de ne plus blasphmer de sa vie. Quand il eut prit cet eng-ag-ement, ses amis, remettant la lumire sur
les phis paisses.
l'avait
la table, lui rendirent la vue, et c'est aini qu'ils furent cause qu'il se corrlg-ea, pour le reste de sa vie, de ses blasphmes.
LE PAPE ET LE RUSTRE
Le comte Manfredi di Gotalto raconte que le pape Lon, se rendant Montalto pour y chasser, passa auprs d'une fontaine ct de laquelle tait assis un ptre, qui, voyant devant lui ce g-rand et pompeux cortg-e, ne se troubla nullement, ne parut pas s'en apercevoir; mais, prenant une bouteille, en mit le g"Oulot dans sa bouche, et, le visage tourn vers le ciel, but avec le plus grand sang--froid. Sa Saintet, ayant piti de l'ignorance de cette espce de brute qui ne savait pas seulement qu'il existait un Souverain Pontife, mit la main l'escarcelle, et ayant retir un paquet o taient trois cents ducats, il les jeta cet animal, qui ne se remuait mme pas, en lui disant Prends, j.e ne veux pas que tu aies plus que moi du bon temps. Aussitt que ce rustre ouvrit le paquet, ses yeux, qui n'avaient jamais vu que des bois, des cavernes, des prairies, des ruisseaux, des prcipices et des valles, furent blouis par l'cclat do l'or; illui sembla voir la s[)leudeur du
:
LK DIALOGUE DU JEU
soleil.
7 les
Cet
dont
mains n'avaient
ci-
loncli
que
seaux destins tondre les brebis, maniait ces ducats en grinant des dents; son visag-e se crispalt_, son cur battait avec violence. Ses ides furent tentes chang"es. Use disait: Si j'avais salu respectueusement celui qui m'a fait ce cadeau, il m'aurait peut-tre donn le double ou davantag-e. Il tait comme un joueur qui, en comptant Targ-eiit qu'il a gag-n, se dit en lui-mme: Je n'ai pas su faire; si j'avais opr de telle faon, il ne serait pas rest un sou aucun d'eux. Il se mit
faire le
son matre;
compte du troupeau qu'il se proposait d'acheter roulait dans sa tte les maisons, les il
d'oliviers, les vignes,
les
champs
il
qu'il
comptait acqurir;
ducats que le pape lui avait jets fussent des millions. Il passa la nuit entire dans la plus grande agitation et le malin, en se levant, il avait l'air d'un pervier dont on a cousu les paupires. C'est ainsi que l'argent qui lui avait t donn le priva de
lui
semblait que
la simplicit
il
avait vcu, et
il
ceurs de son
LE BARON FRANAIS
avait et
baron franais ayant jou et perdu tout ce qu'il mme au del, puisqu'il avait engag sa parole, Fit, pour se procurer de l'argent, le tour le plus trange qu'on ait jamais vu. Etant dans la chambre du roi Louis avec un grand nombre de seigneurs qui se disposaient accompagner Sa Majest quelque solennit, il s'<<dossa une table sur laquelle tait place une horloge garnie d'or massif, et il la fit hal>ilement passer sous ses vtements. .Mais, comme il n"v a rien de tel que le
Un
propritaire
d'un
objet
pour
veiller sur
lui, le
roi
mouvements de
ce
seig-neur autour de
rhorloge
ct,
il
et,
tout en
vit trs
bien ce qu'il
rire, et, se
eut de la peine
il
s'empcher de
sortir, et
il
s'ar-
rta ensuite de
se
manire que les assistants ne pouvaient mit parler avec un de ses ministres en
attendant que l'horlog-e sonnt. Bientt un fintin qui se fit entendre sur la personne du baron attira tous les reg-ards vers lui; on ne savait que penser, et l'horlog-e continuait de sonner. Le pauvre homme, accabl de
honte
et
d'effroi, avait
le visag^e
la fois livide et
enflamm. Les courtisans, revenus de leur surprise, riaient d'autant mieux que le roi, force de rire lui-
mme, ne pouvait
s'cria
si
:
de
la
coupa la parole en disant Seig-neur, le plaisir que nous avons prouv compense au del lo tort que vous avez fait; l'horloge est vous.
Mais
THTRE
L'OllAZI
Tragdie
SPURio,
ami de
PUBLIC
si'URio.
Son
Piihlio
(i).
sort.
l'oiiibre
ombre
Peu de
chose coupe
rend l'haleine
p( BLio.
Pre, pre chrie, pourquoi cela CKLiE. Amour n'a pas de Bien qu'avant tout
cLiE.
!
l'UBLio.
]'^t
loi.
amour
Se place celui que doit tmoigner la patrie Ouiconque a de la noblesse dans le cur,
Tu
fais le contraire,
comme
si
plus dig^ne
Que
(i)
la victoire
permt
Voici une scne on l'Artin montre Cclie (la Camille n'a Corneille], swur des Iljraces, pouse dun des Cariaces, en p- ctjnce de I'ujUo, son vieux pre.
17^
lVrktin
il
Qui donne
lieu
une feb('il certaine que ce flommag-e quelque chose d'utile comme ce q_uoi
[je
vois
Que
et
en faveur de qui,
[Cclie ?
En
De En
faveur do Rome, Celle Elle a t faite reine qui voulait tre son impratrice. plus de cela, dois-tu oublier
!
A cause
de
la
Le trpas de tes frres lg-ilimes ? Tempre par la haine de ce forfait L'amour extrme de l'autre objet,
Et
si
tu veux tout de
mme
Ns avec toi d'une semence dans le mme Car tu ne retrouveras plus Tes frres dfunts tandis que les poux
;
Vertueuse
et gentille, et si j'ajoutais
De celle qui te mit au monde et mourut Ds qu'elle t'eut enfante, peut-tre, peut-tre Pour ne pas ressentir de toi une plus grande peine
prouva en te mettant au monde. les Dieux il faut rvrer Qui vous a engendr je vous rends grces, mon pre Oui, je vous rends grces, mon pre, et vous dis Que lorsque tombrent morts mes frres bion-aims Deux de mes membres tombrent, Mais par la mort de mon poux sublime Je tombe moi-mme, car les pouses Vivent avec la vie des maris Et meurent avec la mort des poux
celle qu'lle
Que
cLiE.
Puisque aprs
L HYPOCRITE
171
L'HYPOCniTE
Comdie
PROLOGUE
Piiissele Prince qui
(i)
{fragment)
iwanque de libralit tomber dans misre de celui qui le sert Puisse l'insolence des sclrats tre abaisse jusqu' battre et gratter les vieux chiens et les mules Je voudrais couronner de tripes quiconque, g-rand ne^ a comme proie un grand matre et n'aide pas qui le mrite Je souhaite les pdants tant cheval que la lanire d'un fouet leur enseigrie comment se font les uvres et non comment on les mord que les pauvres qui, pour se faire un nom, mo plagient aient tant de g-nie que le public, en daig-nant les lire, mesure mon mrite leur envie Je voudrais boire le sani- des 2;"ens chiches et borns Puisse celui qui estime plus un cu qu'un homme tre lapid par le peuple Je voudrais voir un norme gourdin travailler et rompre les os de certains hiboux qui, pour paratre exister, prennent parti pour l'Espagne ou pour la Franla
!
ce Que celui qui donne aux boulions ce que l'on doit aux grands artistes mendie juscju'aux fourches o il sera pendu Ouand donc la cour deviendra-t-elle honnte ou ne prendra-t-elle pas en mauvaise part qu'on
! !
,
Ah
si
je pouvais
me
chan-
ger en une
boucherie
!
pour
vendre, en
quartiers, les
amitis assassines
cire engloutis
Puisse le bien et la vie des avares par les g-ueules de deux mille Satanas,la lchet des adulateurs tre suffoque dans la plnitude de toutes les latrines conventuelles Je voudrais dvisager les impudents la faon dont les porcs s'grati!
(i)
Le prologue
deux acteurs.
172
L ARETIN
sur
nent! Je voudrais lre pilori de ceux qui font les beaux la place Je voudrais frapper les menteurs comme on bat les pourpoints Je voudrais vouer au biscuit de g-alre les escrocs qui viennent aux tables o ils ne sont point invits Signors, qui promettez ce que vous }]e voulez pas tenir, puissiez-vous vous consumer esprer toute votre vie deux jours de sant Et vous, gracieux qui n'entendez rien et mettez le bec toute chose, puissiez-vous avoir le visage condamn recevoir un perptuel asperges d'urines pourries Et vous qui pensez tre des vases d'lection je vous souhaite d'avoir toujours votre nez dans la puanteur de vos ordures Puisse une constante inflammation de poumons abattre la moustache de ces denii-tles ( i), de ces singes aussi lches que rodomonts Je voudrais faire des beignets et des pts de ceux qui fomentent des scandales et de ceux qui font des cancans
!
!
LE PHILOSOPHE
Cor^die.
PAPA.
Maintenant
femmes
Ah!
tout fait;
il
DRUDA.
Moi, je ne me sens
ma
que je puisse
me
dire
tom-
be en enfance... Je me rappelle qu'ils avaient jadis du sens dans le ciboulot, les hommes, avant de se dcider au mariage; tclli;ment que, en vivant avec leurs jeunes
femmes,
(i)
ils
pour
elles
des maris
Hurluberlus,
LE PUIIOSOPUE
et des g-ardiens, TTiais des tuteurs et
1^5
des gouverneurs. Maintenant, on n'entend point dire que les hommes se marient, moins que ce soient des fous, des libertins et des coupe-jarrets ou, si quelques-uns le font dans Tg-e mr, ce sont des cervelles extravagantes et des ttes creuses, qui perdent leurs forces sur ces vieux livres pleins des folies qu'tudie ton hibou de gendre PAPA. Oh! que c'est bien dit DRUDA. Ne te souviens-tu point, Papa, des royales fayons d'ag-ir du tien, quand tu le compares ceux qui font faire aux femmes qu'ils prennent plus djeunes qu'il ne te Ht faire de ftes en te prenant, lui? PAPA. Je suis toute prte le maudire, biea qu'il ne soit plus que poudre au cimetire !... DRUDA. Modre-toi.
; !
Ses chieries, ses niaiseries de l'ancien temps elles ont t vraiment les maquerelles qui ont fait marier ma fille l celui avec qui je la mariai car, pour ma part, je voulais la laisser vivre
PAPA.
m'ont attrape
auprs de moi, innocente comme au jour de sa naissance, sinon la planter dans un monastre, o du moins les
prtres, dont on court le risque, tiennent les nonnains pour des desses. DRUDA. A mon avis, Lucifer devrait eng-loutir les assassins qui font le mtier matrimonial... Avec leurs sermons d'ermites, ils mettent dans le ciel tout misrable qui cherche femme et, se faisant peu scrupule de
jurer qu'il possde les vertus qu'il n'eut jamais, ils forcent croire qu'il ne joue point, qu'il ne hante point
blasphmateur ni prodig-ue l'herbe coupe que de la boue il fait de l'or qu'il est sain comme un poisson qu'il mettrait en fte un mort, qu'il donne du vous tout le monde..., et plus encore. PAPA. Charlatans DRUDA. Aprs une semaine, ou deux, de plaisir, la
les tavernes, qu'il n'est ni
;
humble comme
;
174
l'artin
nouvelle marie le voit jouer jusqu' ses braies; elle l'entend s'attaquer au calendrier mme; ivrog-ne, dissipateur, ne croyant rien, extravagant tout de bon, et enfrancis de la belle manire.
PAPA.
Que
t'en
semble
DRUDA.
de lgende qu'ils dbitent au mpris des femmes, savoir: qu'aussitt qu'elles ont vu une mode nouvelle sur le dos de leurs voisines, elles ne parlent plus leurs maris, ne lui disent plus un mot, jusqu' ce qu'elles se soient fait comprendre je devrais, dis-je, crier sur les toits que ces loups enrags feignent d'tre jaloux, jusqu' ce que (plt Dieu qu'elles ne fussent jamais nes!) ils s'aperoivent qu'il leur faut trouver des galants pour l'entretien de leurs tavernes, de leurs brelans, et de leurs... J'ai t sur le point de le dire.
;
PAPA.
leurs
DRUDA.
a-t-il
fois
que
femmes ouvrent
la
bouche,
la leur
ferment avec
des soufflets! Qui, durant des mois entiers, non seulepoint avec elles, mais ne leur parlent mme pas PAPA. Canaille DRUDA. Combien qui, jouant les dsesprs, feignent de vouloir aller se faire soldats, afin que les nigau-
ment ne couchent
des qui
riers
les
aiment
les
retiennent en
PAPA.
pense aux battements de cur qu'prouvent ces pauvres femmes qui les entendent, aprs qu'ils ont tout perdu au jeu, briser la porte coups de pied, et monter Tescalier en courant puis, arrivs dans la salle manger avec des regards enflamms, et assis cette table qui les a attendus des heures Quelle salade bonne pour entires, s'crier aussitt
DRUDA.
Je frmis quand je
la
taverne
LK PHILOSOPHE
175
des oisons! Quel pain sans levain! Quel vin g^t! Quelle nappe sale! Quelle... La fistule puisse vous dvorer! leur rPA.PA.
pondrait la Papa. Si tu as jamais vu un gros vilain chien, qui DRUDA. grogne pour un os qu'il ronge, et un chat amoureux, lu
as vu
je dis.
ils s'-
tournent^le tous cts des yeux menaants; leur femme qui et g'agn leur argent, ils crient: a. Quelles cuelles mal places Quels baquets sens dessus dessous! Quels chaudrons sur le carreau! Quels chandeliers malpropres! Otez de l cette pole! Pendez l ce trpied Quelles broches dans Emmaiis Que de bois sur le feu! Mille lampes allumes! Tu n'achtes pas Thuile, toi, madone! Non, vraiment, tu ne Tachets pas! Oh! plt Dieu que je fusse encore
faite, ils
comme
me
tient
que je ne
t'-
PAPA. Que le bourreau les mette sous ses pieds DRUDA. Que penses-tu de quelques-uns qui, non seulement disent toute sorte de salets en prsence de leurs femmes, mais cherchent encore leur en faire ? PAPA. Justice, jette-les dans la fournaise DRUDA. Je m'indigne quand je me souviens d'aucuns, qui se pavanent avec Targ-cnt qu'ils tirent des galants de leurs femmes PAPA. Je reviens de l'autre monde. DRUDA. En voici unequi n'a rien mettre dans son estomac En voil une autre en "ourdie de froid, et qui n'a que la peau sur les os Celle-ci, un souffle la i\ :iverserait Celle-l respire encore, mais c'est tout et on ne leur donne pas de mdecin, de peur qu'il ne publie que ce ne sont ni les obstructions, ni la phtisie, qui les
!
! !
176
tVnTIN
arrangent de la sorte, mais les poisons lents, qui leur ont t donnes par ces ennemis de notre Seigneur Dieu. Les larmes me sont venues aux yeux. PAPA. Ce troupeau (i) qui les (2) rpudie l'une DRUDA.
aprs l'autre est plus nombreux que celui des bufs et des brebis les podestats et gouverneurs servent peu, parce que quelque argent par-dessous main fait donner tort
;
qui a raison, et raison qui tort, foi de Druda Misricorde PAPA. DRUDA. Oh quelles omelettes fera Belzbuthde ceux qui, n'aimant que la chair frache, ont recours aux abs!
tiiiences hypocrites,
donnent pour excuse leurs compagnes qu'on doit ne toucher sa femme qu'en carnaval,
et disent qu'il faut
PAPA.
Oh que n'ai-je les ongles au visage de DRUDA. ceux qui ne s'abstiennent point de caresser leurs servantes, quoique leur pouse le voie.'
!
Ciel, foudroie-les
PAPA.
Sclrats
Puis,
si
pourtant
:
ils
lui disent
Mets-toi de ct, ne
tte,
J'ai
autre chose en
Me
DRUDA. Il fut un temps o, pour la moindre douleur que causait aux femmes le mal de tte, les maris, s'ils l'apprenaient, fussent-ils la campagne ou l'arme, partaient tout seuls, trottaient, couraient, volaient pour
s'en venir auprs d'elles
;
leur
paraissait avoir
mille lieues,
chambre
lui
les
femme,
redonnaient got
la
(i)
(a)
LE pniLosoniE
177
DRUDA. Qu'elles aillent aadiable, et tombent malades maintenant Car on ne peut faire aux maris une plus grande joie que de leur dire Votro femme ne peut en revenir, pourvojez-vous de cierg-es... t, pendant qu'elles tardent mourir, et qu'eux en lorgnent une autre, ils laissent mourir qui veut...
!
PAPA.
DRUDA. approchant
qu'ils
les
en
:
d'elles,-
au
lieu
de
consoler,
ils
crient
D! onilis-toi,
empltre-toi
mange
davantage la taille !... Ce qui mal non seulement une femme en si piteux at, mais une Ancroia(i). PAPA. Plt Dieu qne je pusse donner aux maris une autre maladie que les oreillons j'en dtruirais la race pour toujours
DRUDA.
de consoler leurs femmes avec de petites paroles apprtes; ils le font, oui..., mais saisfois le feuillet, et fei;crnent
tu
Non vraiment. Pour leur faire un testament. PAPA. Caphes de Rhodes DRUDA. Les fourbes,prenantla main delamoribonde
PAPA.
pourquoi?
DRUDA.
avec un sourire perfide, lui demandent en donation qu'elle consent faire Non que jo redoute l'issue de la maladie, disent-ils, mais je vous la demande comme un tmoignag-e d,u bien que vous me voulez, et de l'estime que vous avez pour moi, o vous, qu'une fois gurie je veux adorer... Ds qu'ils ont tout obtenu, ils ne la revoient plus jamais,
dans
la leur,
g-rce cette
ni
PAPA.
morte
ni vive.
aient
de
leurs
g-rossesses ?
(i) Cf. l'Iiitroduclioa.
l-jS
l'artin
Ce sont des Judas Iscarioles et des Piltes Ils ne leur donneraient pas, pour les conDHUDA. tenter, une cerise, une fraise, une prune, une figue, un concombre, une sorbe, une g-ousse d'ail Monstres PAPA. Et quand ces brig-ands prtendent, si les DRUDA. infortunes succombent, que c'est d'tre tombes bas de l'escalier, et non pour y avoir t jetes par eux coups de bton !... Nrons PAPA. J'en connais dix qui ont t sur le point DRUDA. d'tre crucifies par leurs maris, pour avoir fait une
PAPA.
fille!
Cans !... Oh dira quelqu'un, le duc d'Urbin, au DRUDA. vrai, a donn de g-randes ftes la naissance d'une
PAPA.
!
fille...
Oui, messire..
.,
et puis,
o trouve-t-on un autre seigneur ainsi fait ? seculorum du secula ! Qu'il vive donc PAPA. Combien y en a-t-il qui, pour avoir, par la DRUDA. faute de leur mari, engag chez le juif jusqu' leur chemise, n'entendent jamais ni messe, ni matines Maures I... PAPA. Se plaigne qui voudra, en voyant son mari DRUDA. lui sauter aux cheveux, la renverser terre comme une
chienne,
sortir les
et, lui
mettant
les pieds
sur
le
boyaux coups de talons !... Et, plus il y court de voisins, plus le mari se complat dans sa frocit,
qui
le
porte en finir
celle
d'une
sotte qui
les
Et surtout alors que le pain perdu ne lui filles de joie qu'il paye... Car il en mne jusque dans la maison. 11 faut^tre deux de jeu. PAPA.
dents
cache
mme
pas les
LE PHILOSOPHE
79
J*ai grand'piti des femmes qu'ils ont prises DRUD.i. par amonrachement, parce qu'en deux jours ils s'en di^oiitent; comme les i^ens rassasis se dg^oiitent de ce qu'on sert ensuite devant eux. Il n'y a plus de bont dans le monde PAPA. Je connais des hommes qui forcent leurs DRUDA. femmes devenir voleuses, en leur donnant de petites chanes et autres choses qu'ils volent; ainsi, pour tre bien avec eux, elles ne s'inquitent point d'tre mal avec
les autres.
PAPA. Ce trait-l manquait au tableau Je sais que je suis une babillarde en te diDRUDA. sant que plusieurs, pour paratre quelque chose, et pour participer aux faveurs des grands seigneurs, amnent leurs femmes dans la chambre de ces derniers, en plein our Bien en ait Ferra re PAPA. Quel autre purg-atoire infernal veux-tu que DRUDA. ces chambres o la jalousie de leurs maris les emprisonne sans qu'elles voient jamais le ciel ? Pharaons PAPA. DRUDA. Je voudrais que tu entendisses leurs lamentations, lorsque, effrays des dettes qui menacent de
!
ils
!
dcident leurs
femmes
PAPA.
Et gros vilains moines ne g'ourmandebas; parce DRUDA. Jeng'lig'e d'attraper sac par
les
le
le
jamais si je voulais te parler de ceux qui, sous prtexte de commerce, vendent ple-mle tout ce que leurs femmes possdent. Je me tais sur celles qui sont abandonnes avec une troupe d'enfants sur les bras; je suismuette l'g-ard de ceux qui ont une femme pour chaque rsidence; je n'en sortirais pas en cent ans, si je voulais te dire l'envie que porte de viles servantes la fc:nme marie un homme de plus haute naissance
que
je n'achverais
i8o
qu'elle,
L ARETIN
ou la vie miscraLle de celle qiil^ quoique issue de notre lignag-e, s'allie avec un homme du peuple... Je termine par ces femmes riches hritires qui, donnant beaucoup qui n'a pas un zesLe, mriteraient que leurs maris fussent leurs esclaves.
PAPA. Nous autres femmes, nous ne retranchons pas un mot nos bavardages, pas plus que les vierc-es qui n'en finissent jamais.
veulent qu'une telle chronique ne soit pas longue. PAPA. Maintenant je suis claire
!
Que maris diminuent leurs mfaits, DRUDA. En veux-tu davantage PAPA. Non. DRUDA. Donc, va-t'en chez moi chez moi
DRUDA.
les
?
toi, et
s'ils
LA FEMME DE COUR
(la cortigiana)
prologue
UN tbanger et un gentilhomme
1,'TRANGKR. Cc licu ressemble l'me du grand Antoine de Lve (i) tant il est beau et noblement orn; pour sr, quelque grande fte doit se faire ici. Je veux le demander ce gentilhomme qui se promne l. Hem! Monsieur, sauriez-vous mdire quel fin un si pompeux apprt? LE GENTILHOMME. A Toccasion d'ijuc comdie qu'on
Grand capitaine
italien
il
tait
combl d houncurs
et
mou;
ut
en i53.
LA FEMME DE COUR
l8l
l'tranger. Qui l'a faite? la toute divine marquise de Pescara ( i ) ? Non,car soii stjle immortel place LE GENTILHOMME. au nombre des dieux son illustre poux. l'tranger. Est-elle de Madonna Vronique, de
D'elle
non
plus, parce
qu'elle
emploie
travaux.
la
grandeur de son
g-cnie
de plus glorieux
Est-elle de Luigi Alamanni ? l'tranger. le gentilhomme. Luig-i clbre les mrites du roi trs chrtien, pain quotidien de tout talent (3). l'tranger. Est-elle de l'Arioste ? Hlas l'Arioste s'en est all au le gentilhomme. ciel, puisqu'il n'avait plus besoin de gloire sur la terre. Le monde a fait une grande perte en l'tranger. perdant un si grand homme, qui, outre le gnie, tait la boat suprme. le gentilhomme. Heureux, s'il et t la suprme
mchancet
l'tranger. Pourquoi? le gentilhomme. Parce qu'il ne serait jamais mort. l'tranger. Et ce n'est p.int un conte. Mais, ditesmoi, est-ce l'uvre du trs gracieux Molza, ou du
Bembo, pre des ?duses, que je devais nommer avant tous? Ni flur.embo,nideMolza; car Tiin le gentilhomme. crit V Histoire de Venise, Qi l'autre les louanges d'Hippolyte de Mdicis. l'tranger. Est-elle du Guidiccioni. LE gentilhomme. Nou, car il no daignerait point employer sa merveilleuse plume de telles folies. Certainement elle doit tre de Pviccio, l'tranger.
(i) Vittoria
{>]
(3,
Colonna.
Veroniqiif
Gambara.
Franois
1er.
i82
l'artin
et
LE GENTILHOMME. Elle n'cst pas dc lui, car il est maintenant occup de plus dig-nes tudes. l'tranger. entrevoir qu'elle sera Il me semble l'uvre de quelque pcore, qii pars est. Le Seig-neur Dieu peut-il faire que le.'j potes nous inondent, comme les luthriens!... Si la fort de Baccano tait toute de lauriers, elle ne suffirait pas pour couronner les crucilicateurs de Ptrarque, qui, avec leurs commentaires, lui font dire des choses que ne lui eussent point fait confesser dix traits de corde. Il est heureux pour Dante que,
grce ses diableries, il tienne les sots distance; car cette heure, il serait en croix, lui aussi. LE GENTILHOMxME. Ail Ah Ah Elle sera peut-tre de Giulio Gamillo (i ). l'tranger. Il nc l'a point faite, parce qu'il est LE GENTILHOMME.
!
!
occup montrer au roi la g-rande cration de son prodigieux gnie. Est-elle du Tasse (2)? l'tranger. LE GENTILHOMME. LcTasse ne songc qu' rendre grce la courtoisie du prince de Salerne et. pour te le dire enfin, cette comdie est l'uvrede Pierre Artin. l'tranger. Quand je devrais creverdefaim, je veux l'entendre car je suis certain que j'entendrai l des paroles de prophtes et d'vanglistes. Eh! peut-tre qu'elle ne regarde personne? LE GENTILHOMME. Elle prconisc vraiment la bont du roi Franois, avec une ferveur incroyable. l'tranger. Eh! qui ne loue pas Sa Majest? LE gentilhomme. Ne loue-t-elle pas -aussi le duc Alexandre, le marquis du Guast, et Claude Rangone, qui est la perle de la valeur et de la raison?
Professeur d'loquence Colojnc. Bernsrdo Tasso, pre du pote de la Jrusalem dlivre pote lui-mme.
(i)
(2)
et
KA FE.MMK DE COUR
i83
lande.
Trois fleurs ne font point une guirLE (E.NTiLHOMME. Et trs libral Maximilien Stampa. l'tranger. Trouvez-vous qu'elle parle d'autres ? Trente. LE gentilhomme. Lorraine, iMdicis l'tranger. est vrai, eHe loue tous ceux qui
l'tranger.
le
et
11
le
le
cardinal
de Mdicis, le cardinal de Lorraine et le cardinal de Trente ? le gentilhomme. Pour ne point assassiner leur nom avec ce titre de cardinal. l'i RANGER. Oli quc c'cst bicu fait Ali ah ah! Dites-moi, de quoi traite-t-elle ? LE GENTILHOMME. Elle olTrc dciix faclics la fois. En premier, vient en prsence raesser Maco(le Siennois), lequel est venu Pvome pour accomplir un vu qu'avait fait son pre, de le faire cardinal; et, lui avant t
se faire cardinal,
il prend matre pour pdagogue, car il croit que cet Andra est le matre qui fait les courtisans; et, men par le dit matre Andra dans une tuve,il tient pour certain que
d'abord
il
Andra
(i)
ltuve est
ras et
le
moule
il
et,
la
fin,
rajust,
Rome
pour
lui,
de
la
manireque tu sauras. Et messer Maco se joint un certain ^I. I^irabolano, de Naples (un de ces Acurse et un de
ces Saravico, qui, tirs des triers
et
dos
curies, sont
le
commis par
et
l'elTronte fortune k
gouverner
le
monde),
Lucius,
femme du Romain
dcouvre en levant tout haut; et, entendu par le Rosso, son laquais iavoii, 11 est trahi par celui-ci, parce que le Rosso hii fait cioire que celle dont il est amoureux est aussi prise
(i) Cf. l'uitruduclioa
84
l'artin
et, lui
de 'lui;
lui
ayant
amen
la
Alvig-ia, entremetteuse,
il
met en
lieu
lete
que
il
c'est
g-ouvernante
dsirs la
au
ne
de Livie,
livre ses
lang-er Arcolano.
la
me
l'tranger.
ici?
LE GENTILHOMME.
l'tran<er.
O font de A Romc
Je ne C'est ici Rome? Misricorde jamais reconnue. LE GENTILHOMME. Je VOUS rappelle qu'elle est reste pour expier ses pchs entre le mains des Espa;?^nols et elle a eu bien du bonheur de n'avoir pas pis. Maintenant tirons-nous l'cart; et lors mme que vous verriez les personnages paratre plus de cinq fois en scne, ne vous moquez point, parce que les chanes qui tiennent les moulins sur le fleuve ne tiendraient point les fous d'aujourd'hui. Outre cela, ne vous merveillez point si le style comique n'est pas observ dans la forme requise, parce qu'on vit d'une autre manire Rome qu'on ne vivait Athnes. l'tranger. Qui en doute ? LE gentilhomme. Voil messire Maco.Ah ah ah
!
l'aurais
ACTE
Scne I
MESSER
IMACO, LE SIENNOS
Enfin, Rome est la queue du monde MACo. le siennois. La tte, avez-vous voulu dire. Autant vaut. Et si je n'y tais pas venu... MACO. le siennois. Le pain moisissait. MACO. Je dis que, si je n'y tais pas venu,je n'aurais jamais voulu croire qu'elle ft plus belle que Sienne.
LA FEMME DE COUR
i85
LE siNNois,
tait
Ne vous
(lisais-je point,
:
Rome? Et
vous rpondiez
Sienne,
y a
la
avec les docteurs, la fontaine Branda, la fontaine Becci, la place avec les hommes, la fte de la mi-aot, les chars avec cierj^es, bandelettes et jets d'eau; le combat de taureaux, le palio (i) et les biscotes (2) par centaines, ainsi que les
les bravi, et le Sfiidio
Guardia avec
massepains de Sienne. MACO. Oui, mais tu ne dis pas que l'empereur nous
Vous
!
ileste coi.
Un
Guenon, hem
LE siENNOis.
les
g-uenon
si vous ne vous faites prendre pour un fou, sans qu'on sache que vous iesde Sienne. MACO. Ecoute un perroquet parle.
C'est uu matre. dplaise. MACO. C'est un perroquet, ne LE siENNOis. C'est uu de ces oiseaux peints
:
LE siENNOis.
pivert,
te
de
un perro,
MACO. J'en ai pourtant montr les plumes l'orfvre Ottonao; il dit qu'a les voir elles sont de perroquet, et des plus belles. LEsiENNois. Vous tcs uuebte, pardoni:\ez-moi, de
MACO. Prends g-arde que je ne te chtie. LE siENNOLs. Ne VOUS fclicz pas. MACO. Je veux me fcher, moi je le veux. Et, ne m'estimes point, malheur toi LE siENNOis. Je vous cstime.
;
!
si
tu
(i)
(2)
Pice d'toffe qui tait le prix des courses. Les biscotes, massepains et autres ptisseries de Sienne on
86
i/auftin
maintenant sache-le.
Scne II
MAITRE ANDREA,
peintre,
ANDREA, au Siennois.
Cherchez-vous un ma.re ? MACO. Vous savez bien que, moi, je suis son maU\ Laissez-moi parler, moi qui entends LE SIENNOIS.
le
romanesque
MACO. Parle donc main tenant. ANDREA. Rpondez, si vous voulez une adresse. LE SIENNOIS. Messer Maco, docte in libris^ et riche, et de Sienne... ANDREA. Au fait, je disqueje vous ferai donnercinq carlins par mois, et vous n'avez rien faire, sinon triller quatre chevaux et deux mules porter de l'eau et du bois la cuisine, balayer la maison, chevaucher et nettoyer les vlements le reste du temps, vous pourrez mener joyeuse vie. MACO. A vous dire le vrai, je suis venu tout exprs
(2).
pour...
LE SIENNOIS Se faire cardinal, et s'arrang-er avec... MACO. Le roi de France. LE SIENNOIS. Le pape plutt... Ne vous ai-je pas dit de me laisser parler? ANDREA. Ah! ah! ah MACO. De quoi riez-vous, l'hoinme ANDREA. Je ris de ce(|uc vouschercliez unechimre.ll
comme
on
le
parle dans la
Romagne.
LA FLMIIE DE COUR
187
le
la courtisa-
monseigneur de la Storta, le Rvrendissime de Baccano, le prvt de Montemari, le patriarche de laMag'liana, et m.ille autres. Et, si cela vous plat, nous feronsencore Votre Seig^neurie, parce que vous avez lair de faire honneur au pajs.
MACo.
?
Que dis-tu, Siennois La chose m'arrang-e, chose me chose me convient. MACO. Quand me tendrez-vous main Aujourd'hui, demain, ou quand plaira Votre Seigneurie. me MACO. ^Maintenant, ANDREA. De grce.. qurir qui enseiq-ne
LE SIENNOIS.
la
va, la
la
AiNDiiEA.
il
il
plat.
.J'irai
lelivre
devenir courtisan, etje reviens aussitt vers Votre Seig-neurie. O logez-vous ? LE SIENNOIS et MAGo.
Dans
la
maison de Ceccolo,
Gnois.
la fols n'est
deux
fait
tomber en
faute.
LE SIENNOIS.
moi,
me
;
faire soldat, et
vous vous ne
!
ANDREA.
Restez en
pour
les
paix
car,
fte.
Rome,
poltron est
un nom
fait
jours de
Maintenant, je pars
et reviens tout
l'heure.
MAGO. ANDREA.
ciel.
Matre Andra, au
tt
!
lo
Je
me recommande donc
MACO.
LE 8IENN01S.
Votre Seigneurie,
ANDREA.
i88
Scne II [
MESSER MACO, LE SIENNOIS
MACo. Sic fata volant. Maintenant, allez-vous ainsi nous faire LE SIENNOIS. des prophties MACO. Qu'est-ce, bavard ? LE SIENNOIS. Dites Votre Seigneurie N'avez-voiis pas entendu le matre, qui a dit Je me recommande Votre Seig-neurie? MACO. Je recommande Votre Seigneurie avec
le
bonnet
la
main,
LE SIENNOIS.
sur l'paule
loin,
:
est-il
pas vrai ?
oui,
I
bien! Promenez-vous
au
larg"e, bien,
trs
bien
Scne
IV
des histoires.
Aux
belles
MAGo. Reste coi. Que crie celui-l? LE SIENNOIS. Ce doit tre un fou. LE PAUVRE DIABLE. Aux bellcs histoires,
histoires,
les
histoires!
Pr-
Concile{?>). Histoires,
et
vavode de Transylvanie, du roi Louis II, dernier des Jagellons, avait appel les Turcs son secours contre Ferdinand d'Autriche qui, se fondant sur les droits de sa femme, sur unique du roi dfunt, voulait s'emparer de la couronne. (2) Martin Luther. (3) On en parlait et il s'ouvrit en i545. Ce fut celui de Trente,
lu au trne de Hongrie, vacant la mort, en i520,
LA FEMME DK COUR
histoires.
et
189
Le Schisme d'Angleterre, la Pompe du pape de l'empereur, la Circoncision du Vouode [i) le Sac de Rome, le Sige de Florence (2), l'Abouchement de Marseille, avec la conclusion (3). Histoires,
histoires
!
MACo. Cours, vole, trotte, Siennois. Voil un Jules, achte-moi la Lgende des courtisans je me ferai courtisan, avant que vienne le matre. Mais ne te fais point courtisan, toi, avant moi, sais-tu bien ? Non diable .. Hem l'homme aux LE SIENNOIS.
:
livres!
toi
!
papiers
!...
hem, vous
le
diable te
:
rompe
a tourn MACo.
iNIarche,
lui.
Scne
V
seul.
MESSER MACO,
Oh quelles rues C'est un hasard que d'y rencontrer un caillou... Je vois l-haut, cette fentre, une belle dame; elle doit tre la duchesse de Rome. Je me sens devenir amoureux. Si je me fais cardinal, si je deviens courtisan, elle n'chappera pas de mes mains. Elle me
! !
regarde,
elle
le
me
lorgne...
Que
oui,
que
oui,
est
que je
le
lui
applique
croc. Voil le
Siennois.
livre,
Siennois?
(i)
pliis
haut, la
note qui
(2)
(3)
concern.
lin
Il
1529.
rnit
le
en prsence
le
clusion
mariage
d'ileuri,
I'^ et
roi,
Mdicis,
igo
Scme VI
LE SIENNOIS, MESSIRE MACO.
LE SIENNOIS.
MACO. Nocera.
La
Le voil,
le
lisez le titre?
Oh que
gros mal
Il
que
les
le
je fasse des
Turcs?
si
mains...
Gomme
vienne Que veux-tu envie de m'en laver je ne l'avais pas dit ... Emportete
!
me prend
donc.
LE SIENNOIS.
Je
lui ai
;
demand
il
les
:
Courtisans^ei
il
m'a dit Sache si ton matre veut le Mal franais du Strascino (i), de Sienne. MACO. Quel mal franais? Suis-je homme l'avoir? LE SIENNOIS. Est-ce uu si g-rand mal de l'avoir ? MACO. Viens la maison, que je t'assomme.
livre-ci
et
m'a donn ce
Grillo, et
te
laisser, toi.
Scne
XXII
g"neurie.
MACO.
Je mourrai,
si
vous ne
me
lisez
pas une
leon maintenant.
(i) Niccolo Campani dit il Strascino, auteur comique n probablement Sienne vers i4qo, mort vers 1550. L'ouvrage ai; quoi il est fait allusion ici est sans doute Lainento di quel trihiilalo dl Strascino sopra il maie incognito che traita delta nazicnza ed impazienza Venise, i523).
:
:
LA FEMME DE COUR
IQI
les factieux.
tort
Je vous dis
Oui, parce
factieux ?
que ni moi ni aucun de ma commencez. Il importe, avant tout, que le courtisan ANDREA. sache blasphmer; qu'il sache tre joueur, envieux, pufamille ne fut jamais factieux. Maintenant,
ne
fois
nymphe
(i) et tre
la
agent et patient. Adagio ! piano ! fermo ! Que veut dire MACO. agent patient? Je n'entends point cette nigme. Cela veut dire femme et mari. ANDREA. MAGo. ^^ Il me semble vous comprendre. Mais com-
ment devient-on hrtique ? C'est l ANDREA. Remarquez. Je remarque trs bien. MACO.
la cour on trouve bont, discrtion, amour ou conscience, dites Je n'en dirai point credo.
:
la question.
MACO.
Et l-dessus les Grces. A qui voudrait ANDREA. vous faire croire que ce soit un pch de rompre le carme, dites a Je m'en moque. Je m'en moque. MACO. ANDRA. En somme, qui vous dit du bien de la a Tu es un menteur. cour dites Tu mens par Il sera mieux que je dise MACO.
:
la
gorge.
ANDRA.
MACO. matre ?
ANDREA.
(i)
Pour paratre
le
G'cst--dire
bardache.
192
'
l'aivtin
d'Acursius et de ses pareils qui dispensent les pouvoirs de la cour, lesquels, donnant les renies des vauriens, et faisant ptir les bons serviteurs, rduisent un tel dsespoir les courtisans, que ceux-ci sont prs de dire Je renonce au baptme. MACo. Comment fait- on pour tre ig-norant ?
:
ANDREA
MACO. ANDREA. MACO. ANDREA. MACO.
le premier faquin de courtisan qui, du soir au matin, fait nettoyer, comme un pardon (i), sa cape et son pourpoint de drap fris, et passe des heures devant le miroir boucler ses cheveux et oindre sa tte antique et qui, avec le parler
;
En crevant du bien d'autrui. Comment devient-on adulateur En louant toute coquinerie. Gomment hble-t-on ANDREA. En comptant des miracles. MACO. Gomment fait-on damoiseau ANDREA. Geci vous sera enseign par
? le
Et envieux ?
En se maintenant buffle.
?
un
oui,
ma
foi,
du Petrarchino
En disant vrit, en disant Gomment fait-on pour tre ing-rat ANDREA. En feignant de n'avoir jamais vu gens qui vous ont rendu service. MACO. Ane, comment devient-on ? ANDREA. Interrogez l-dessus jusqu'aux escaliers de
la
Gomment mdit-on
la vrit.
?
les
le
palais.
Dans
Maintenant ceci suffit quant la premire leon. seconde, nous traiterons du Culise. Attendez. Le Culise, qu'est-ce donc ? MACO. ANDREA. Le trsor et la consolation de Rome.
la
(1)
dsii^ner la patne.
tait le livre
(?) C'est le
de chevet
LA FEMME DE COUR
I)3
MAco. De quelle manire? ANDREA. Je vous le dirai demain; puis, nous viendrons matre Pasquin. Qui est ce matre Pasquin ? MACo. ANDREA. Un gaillard qui se moque des sig-nors et
monsii^-noris.
travaille
de
la posie.
latin et
en lang-ue
ANDREA.
MACO.
Qui
ma
louante.
l'a faite ?
Qui cet homme de bien MACO. C'est moi-mme. ANDREA. iVh ah dites donc, que je veux entendre. MACO. Hanc tua, Pnlope, miisam medituns
ANDREA.
est
?
!
Un homme
de bien.
la
avenaru.
Nii mihi rescribas, nimium ne crede colori. Corniia cm lun recabans sub tegminefag i.
A rue rue MACO. Pourquoi vous accours l'homme ANDREA. Parce qu'un fou hroque vous a vols. MACO. Qui est ce fou loque ANDREA. Un homme capable de dfier aux canonnades son matre d'htel. Poursuivez donc. MACO. Arma viramque cano, vaccinia nirjra
ANDREA.
la
!
Titijre, ta
patal lento
la
(i)
criez-
ainsi,
les
le-
[gantar. Italiam fato numeram sine viribas axor. Omiiia vincitamory nabis at carmina dicant, Sylvestrem tenais et nos cedanias aniori. ANDREA. On veut qu'il imprime ces vers avec un titre, la faconde Bologne; et j'crirai la vie de l'auteur, qui est bon plaisant.
,
(i)
Gest--dire
Au
voleur.
ig*
l'artin
MACo. ANDREA.
s'arrang-e.
MACO.
homme
Entrez.
Le Siennois est un vaurien, et Grillo un de bien; or, je veux Grillo et non le Siennois.
la
ACTE II
Scne
XI
seul.
MAITRE ANDREA,
Pendant que messerl'hbt buvait, il s'est amourach de Camilla Pisana, pour l'avoir vue de la fentre de sa chambre. C'est pour cette fois que Cupidon devient docteur,
ici
est pcore.
La
plainte
mme
:
riraitde l'entendre
chanter en improvisant. Il a tout le style de l'abb de il a compos quelques Gate couronn sur l'lphant si vers, les plus g-rands pillards qu'on ait jamais vus
;
le
Casio de Bolog-ne, et
dom Marco
de Lodi, sont des Virg-iles et desHomres auprs de lui. s'il y manquait quelque chose, cette lettre en prose nous l'apprendra. Je veux savoir ce que le bentcrit
madame
Camilla.
Lettre de messer Maco.
Salve regina Prends piti de moi, parce que vos yeux odorifrants, et votre front de marbre, qui distille une manne emmielle, me tuent de telle sorte que,
!
d'un ct et de l'autre, l'or et les perles m'oblig-ent vous aimer. Car l'on ne voit jamais que joues d'meraude, que cheveux de lait et de pourpre, qui moUement caressent votre poitrine o log^ent deux mamelles en guise de deux petites raves et de deux petits melons bien apparis. Voici que je suis en train de me faire cardinal, et puis courtisan, pour l'amour de
LA
VOUS.
((
FIM.MK. t>E
<;Oim
()5
Trouvez donc le temps, et choisissez le lieu, afin que je puisse vous dire la souffrance de mon pauvre cur; lequel se reconforte dans les liquides cristaux de votre petite bouche, douce comme massepain. Et FIAT voluntas, tua, parce que omnia vincit amor.
v<
Dsire
Maco, qui demeure pour nous la faon d'un poulet hach vous faire cela de suite et presto.
Ces paroles donneraient des nauses un Frre. Et !... Le SeigT.eur Dieu peut-il faire que le monde soit renvers de fond en comble ?... Oui croirait jamais que de Sienne, ville honnte, noble,
quelle souscription
courtoise, et
ing-nieuse,
?...
soit sortie
C'est pour
si g^lorieuse ville car, sans parler qui y ont t et qui y sont, ses deux Acdidmes,\aLG^(ifideetVIntronata,oni embelli la posie
d'une
des
et
hommes fameux
la
ennobli
sance des lettres g-recques, latines et vulgaires, joint une suprme bont. Mais ily a pourtant des fous, et de moins
bon
aloi que messer retire-colimaons, lequel a rsolu de se faire canoniser comme fou. Le voil.
Scne XII
MESSER MACO, MAITRE ANDREA
MACO.
^
Avec VOS coionuades. Avec mes posies Oui, seigneur. MACO. Oiie vous en semble?
?
Avec
ANDREA. MACO.
haut.
196
L''AHTm
ANDREA. De grce, petites toiles d'amour, ansje de jardin, tte de bois, et visaie d'Orient, je suis plus mal pour vous que la vaisseau dans le pori. Je dors, la nuit, la tempte et au vent. Tes beauts vinrent de France.
Comme
Qu'en dites-vous ? MACo. ANDREA. Ah quels vers sentencieux, pleins, coulants, doux, doctes, suaves, fins, agrables, clairs, nets, charmants, polis, sonores, nouveaux, et divins !... Ils vous stupfient, hein ? MACO. Ils me stupfient, m'lectrisent et me ANDREA. mais il y a un barbarisme. dsesprent Lequel ? Le vaisseau dans le port? MAGO. Oui. ANDREA. MACO. C'est une licence potique. Et puis ? ANDREA. Le mrite des chevaux ne g't pas dans la
!
croupire.
vous-en car, MACO. Oui, matre. Maintenant, moi, je m'en ANDREA. y a bien des jours que vous vous en
allez;
vais.
Il
tes
all.
Scne XIII
MAITRE ANDREA,
Je suis d'avis que cet
seul.
homme, pour
quatrecaratsdeviendrale mieux favoris de cette cour etGiannozzo Pandolfini, levant la voix jusqu'au ciel, a dit sag'ernent: Je suis heureux d'avoir t lou Lon, comme fou voulant infrer de l qu'avec les princes il faut tre fou, du moins feindre de l'tre, et vivre en
; ;
LA FEMME DE COUR
I97
fou ce fut ainsi que l'entendait messer Gimicnano de Modne, docteur, qui,voulant g-agner un procs Mantoue pourGiannino deCorreggio, lequel taitaussi fond en droit que le docteur es lois se mit jouer de l'pieu devant le duc. Et rsolvons-n^us vraiment croire qu'on ne peut faire une plus -rande injure un seig^neur que de se montrer sage devant lui. Or, revenons notre pote il Fera si bien son chemin qu'il deviendra d'ahord cardinal selon le vu, sur le chameau, puisque l';
:
dont fut pdadog-ue Jean-Baptiste d'Aquila, d'abord orfvre, et puis camrier du pape, par l'entremise de sa belle-sur, et ctera^ est all se promener. Maintenant, cherchons le Zoppino (i), et menons-le messire, en qualit d'ambassadeur de la dame, pour remercier notre homme de sa merveilleuse lettre et de
lphant,
Scne
XVI
que madone Gamilla m'envoie don Dieg-o deLainis, qui, par jalousie, la fait garder la maison, il pourmais que, rait venir elle vtu de ses habits ordinaires pour cette raison, force est qu'il y vienne vtu en portefaix. Paix car la grosse bte a paru. Les fous se donZOPPINO.
lui dirai
Je
19
Scne
XVII
jNIadone Camilla,
ma
petite lettre ?
vrai a ne pourrait je veux MACO. Ds qu'elle me fera un berceau. payer semble ANDREA, Zoppirio. Que vois de prs.je crois ZOPPINO. Maintenantque en disant qu'elle meurt pour bien qu'elle donns MACO. Combien de baisers plus de mille. ZOPPINO. Oh Et pas dgote, l'hpatique MACO. Elle strambotto, qu'en mis part. ZOPPINO. Elle
est-il
fils,
lui
le
t'en
je le
dit vrai,
lui.
a-t-elle
la
ri'est
a-t-elle fait ?
l'a
MACO.
Entre
les
mains de qui
tailleur
ZOPPINO.
De son
porte
d'habits.
Eh
qu'il aille
donc
Pj^ase,
picotin
il
a bien gag-n
les
rgales
ZOPPINO.
Je improvis. Oh quelle veine de fou MACO. C'est moi, moi-mme. honneur au possible. ZOPPINO. Vous vous signora, savez vous MACO. vous, l'envoy de
MACO.
l'ai
I
du fumier.
faites
la
ce
que je veux vous dire, moi? Non, Monsieur. ZOPPINO. Lorsque j'enverrai chercher des biscotes et MACO. des massepains, Sienne, je veux vous en donner deux. Ne t'ai-je pas dit qu'il est ANDREA, Zoppirio. libral comme un pape et comme un empereur ?
LA FEMME DE COUR
I99
la visite
de mcsGrillo
dame.
MAGo.
Tt,
dpchons-nous.
Oh!
Grillo,
Scne
GRILLO,
la fentre ;
XVIII
Que voulez-vous Rien... pourtant... Oh Grillo GRILLO. Me Que voulez-vous oubli. MAGO. Je ANDREA. Entrez, signor Zoppino. zoppiNO. Que Votre Seigneurie entre donc, Andra ANDREA. Que ce Votre Seigneurie zjppiNo. Ce sera vtre.
GRILLO.
?
MAco.
Si,
voici.
l'ai
matre
soit la
A\^o.
Je
veux entrer
le
Scne
XX
On
les
dre Grillo
costume
ber;^amasque.
ZOPPINO. Ds qu'il sera assis prs de la porte de madone, moi, qui aurai alors chang d'habits, je feindrai
de croire qu'il
porter
et tu
demanderai
s'il
veut
un mort au
cimetire
toi,
tu paratras l-dessus,
l'engageras porter ce mort. Grillo fera semblant de ne pas le connatre. ANDREA. Trs bicD.
20Q
zoppiNo.
L AUETIN
En
mme
temps
je
un ban au
g"ello
:
bar-
fais
seulement sortir
amis;
et
quant moi,
me
charg-e
du
reste.
Scne
XXI
matre;
MAITRE ANDREA, GRILLO, avec les habits de son MESSEU MACO, avec ceux d'un portefaix.
ANDREA.
GRILLO.
!
Venez donc... Ah ah ah Suis-je bien sous velours MACO. A qui que je ressemble, matre
I
!
le
est-ce
I
ANDREA. Ah ah Oh oh votre pre mme ne vous reconnatrait pas... Maintenant restez en cervelle. Si vous voyez quelqu'un, faites semblant de vouloir porter une valise de madone; et, si vous ne voyez personne, entrez dans la maison excutez les calculs, et passezvous-en la fantaisie une bonne fois. Le temps me semble durer mille ans, oui, MACO.
!
mille ans.
ANDREA.
el, si
car,
comme
tu
MACO. Venez
ne
J'ai
me
Le voyez-vous
peur, je tremble.
Oh
'Necraig-nez rien, allez toujours. (4 part.) quel subtil pendard que Zoppino Aux g^estes, la dmarche, et la manire dont il porte la cape et l'pe, on le prendrait pour un vrai jure-dieu.
!
ANDREA.
LA K:^MMB DE
COU*'
401
Srrnr
ZOrPIXO,
travesti
;
XXlf
MILSSKll
Veux-tu porter un mort au suis car pain pas cher, vous autres zoppiNO. Comme marauds, vous ne voulez pas prendre de peine. ne veux pas prendre de peine, MACO. Non, ce
zorpiNo.
MACO.
Oui,
j'y
all..
le
n'est
je
si
de Madone. Salue ce g-entilhomme, portefaix, ANDREA. Vous ne me reconnaissez pas, matre ? MACO. Que le chancre te mang-e Qui es-tu ? ANDREA. Oh, Dieu Je ne suis plus moi depuis que je MACO. suis dguis dans ces habits !... Grillo, ne suis-je pas ton matre ? GRILLO. Par le corps de celui que je ne renie pas,
je
veux
il
te
aller cet ne. Je lui en ferai porter, en devrait crever. Il a t publi un ban, d'aprs lequel quiconque saurait dcouvrir, sinon prendre, certain messer Maco, venu Rome sans passe-poit, comme un espion, doit, sous peine du poumon, le livrer au gouverneur, et l'on pense que celui-ci veut le ch-
zoppiNo.
Laissez
tuer
quand
trer.
GRILLO.
Hlas
ANDREA.
N'ayez
pas peur
le
habits ce portefaix; et
Je suis portefaix
suis portefaix
!
Je ne
ZOPPINO.
Arrte
Au
secours! au secours
!
arrte
A l'espion
au
tratre
Ah
Ah! Cours-lui
son parent et
nous g-arde ensuite de la haine. Il me semble le voir, comme une grosse chouette, au milieu des comptoirs, avec un tas de g-ausseurs autour de lui, lesquels se rjouissent d'une pareille farce.
CTB ni
Scne
IX
MACO
ANDREA.
Vous
Parabolano, qui nous a renvoys au log-is invislbitiiim^ m'a fait faire une bravade la napolitaine ? MGo. Le seig-iieur Giamba... Maintenant, ditesmoi par quelle voie on vient au monde, matre ?
ANDREA.
Larg-e, ou troit ? MACo. Larg-e comme un four. ANDREA. Q^i'y vient-on faire? MACo. Y vivre. ANDREA. Gomment y vit-on ? MAGO. En mang-eant et en buvant. ANDREA. J'y vivrai donc, parce que je mang-e comme MACO. un loup, et bois comme un cheval oui, par ma foi, j'en jure Dieu (je baise la main). Mais que fait-on quand
;
Par un
trou.
on a vcu? ANDREA.
les
On
trou, comme
meurent
araignes.
Ne sommes-nous point tous lils d'aller et de MACO. a ira ? Tous d'Adam et d'Eve, mon macaroni ANDREA.
sans
sel,
MACO.
Giillo
Je
bon de
me
faire courtisan
l'aide d'un
moule
et je
l'ai
me
l'a dit.
LA FEMME DE COUR
2o3
ANDREA. Vous parlez mieux que ne fait un cancre qui deux bouches... Et, afin que Votre Seigneuriale sache, les bombardes mmes, les cloches, les tours se font avec
des moules.
MAGo.
Je croyais
comme
elles sont
nes Sienne.
ANDREA. Vous VOUS trompicz grossirement. MACo. Me ferai- je bien ? ANDREA. Trs bien. MAGO. Pourquoi ? ANDREA. Parce qu'il j a moins de fatigue faire un homme qu' faire une bombarde... Mais, puisque vous avez trouv un si bon expdient, dpchons-nous. MAGo Allons car je veux me mettre au moule aujourd'hui, ou crever.
Scne XII J
GRILLO,
seul.
Il me faut trouver matre Mercurio, le meilleur compagnon et le plus gausseur de Home, parce que matre Andr a fait croire messer Maco que ce Mercurio est le mdecin prpos aux moules o se font les courtisans... Mais le voil, par ma foi
!
Scne
XIV
Choses surprenantes
Q^i'y a-t-il ?
!.,. II
est
venu
ici
un
gros vilain oiseau de Sicnnois qui veut devenir cardinal et matre Andra lui a dit que vous tiez le mdecin surintendant des moules o on les fait. MERGURio. - N'en dis pas plus car un de ses dmes:
204
tiques, lequel a t
L*ARTIN
renvovc pour
riiistois^e.
!
s'tre
mis en
colre^
GRiLLo. Ah ah ah MERGURio. Je veux que nous mettions notre homn^e dans une de ces grandes chaudires pleines d'eau niais
!
je
premirement prendre une dose de pilules. GRILLO. Ah ah ah !... Allons, vke car messire Priamo et matre Andra nous attendent.
lui ferai
! !
ACTE IV
Scne I
MAITRE ANDREA, MESSEil MACO, MAITRE MERGURIO, GRILLO
ANDREA. Nous sommcs d'accord sur le prix, et messer Maco, avec un courage siennois, se risquera prendre les pilules. MACO. Ces pilules-l me donnent beaucoup penser, beaucoup. MERGURIO. Pilolarum Boman Curi sunt dnl-
ciora.
valets.
Plaisantez avec de ct MAGO. Pourquoi dis-tu GRILLO. N'entendoz-vous pas que mdecin blasphme comme un joueur MACo. parle comme un savant, imbcile (A
GRILLO.
les saints, laissez
les
cela, toi ?
le
Il
!...
Mercario.) Occupez-vous de moi, domine mi. MERGURIO. Dico vohis, dalciora sunt Cari Roman pilolarum MACO. Nerjo islam.. MERGURIO. A progressas herbi^ et in verbis, sic
LA FEMME DE COUR
205
Cortigianos Ptrarque ne point. en mille endroits. dit dans ce sonnet MACO. C'est Ptrarque dbile ANDREA. Vous plus doctc que ne fut Roland. cannatMF.RcuRio. Pour conclure, votre nfles MACo. Oui, messire. MERCURio. Les nfles de Sienne sont pilules de Rome. MACo. Si pilules de Rome sont nlles de Sienne, j'en prendrai GRLLo. Oui chante toute nuit. MACO. Que dis-tu GRiLLO. Je disque tout sera pour mieux, vous
MACo.
/.
.
le dit
ANDREA.
si
Il le
dit
vrai.
le
il filo,
etc.
tcs
seij^iicurie
elle les
les
les
les
l'infini.
la
le
si
vous dpchez car je vais pier quelle pense fait le moule de votre afaire. MACO. Va donc, et choisis le moule le plus ais mettre ?
;
GRILLO.
J'y vais.
le
MACO.
Ecoute... Prends
GRILLO.
MACO. Sais-tu, Grillo ?... prends g-arde que personne ne se fasse courtisan avant moi ? GRILLO. Je vous le promets. ANDREA. N'oublie point la romaine (i), car, aussitt que nous l'aurons moul, il faut le peser et payer tant par livre, suivant l'ordre de l'hermine. GRILLO. Rien n'y manquera. ANDREA. Il n'y a riend.'i plus faire, sinon que vous juriez de' me bien caresser quand vous serez fait courti-
.l'entends.
san
et
cardinal
car
un homme
2oO
l'aktin
la
et
de docte,
sag-e et
bon
vil
Tout
coquin, ds qu'il entend frmir la soie dont il est vtu, ddaig-ne tout le monde, et il est l'ennemi mortel de qui lui a rendu service, parce qu'il a honte d'avouer
qu'il s'est
trouv dans
la misre...
si
donc
Je vous passerai la main sous le menton. \NDREA. Plaisanteries d'enfants. Allons, jurez MACO. Par la Sainte Croix ? ANDREA. Serment de femmes. MACO. Par le saint Evang-ile ? ANDREA. Ainsi disent les villageois. MACO. Par la foi de Dieu ? ANDREA. Parole de portefaix. MACO. Par mon me ?
MACo.
l.
ANDREA. Conscience d'hypocrites. MACO. Par corps du monde ANDREA. Coonnerics de MACO. Voulez-vous que je jure parle corps du Scile
sots.
g-neur Dieu ?
MERGURio.
frottez pas
((
et
ne vous
aux diables , a dit tout l'heure Grillo. MAGO. Je veux contenter matre Mercurio, je le veux. ANDREA. Ne vousai-je pas dit que le blasphme est ncessaire au courtisan ?
Oui; mais je l'avais oubli. MACO. MERCURIO. Ne perdons point de temps, car se refroidira, et le bois cote cher Piome.
le
moule
ANDREA.
MACO.
Ah
ah
ah
.'
LA FEMME DE COUR
GRiLLo.
pilules, le
et le
2O7
attendent.
Les moule monde entier vous MACo, La lune, o trouve-t-elle MERCuRio. In Colocut. MACO. Si n'est pas son quinzime jour, MERCURIO. y a peut-tre un an qu'elle y MACo. Je peux donc prendre pilules sine timor injltxi? MERCURIO. Le mieux du monde. ANDREA. Entrez, MACO. J'y
se
?
elle
il
suffit.
Il
fut.
les
allez l.
vais,
'entre.
Scne XII
GRILLO,
seul.
ah messer Maco a t mis dans la chaud'tremisau moule et il a vid ses boyaux comme vomit celui dont l'estomac ne peut supporter la chaleur. On l'a parfum, ras, rhabill, si bien qu'il s'imag-ine n'tre plus le mme. Il saute, danse, chante, et dit des choses... et avec de si vilains propos, qu'on le croirait plutt de ierg-ame que de Sienne... Et matre Andra, feig-nant d'tre merveill de chacjue parole qi i s'chappede sa bouche, lui fait croire, avec des jurements inous, qu'il est le plus beau courtisan qu'on ait jamais vu... Et messer Maco, qui se complat dans cette ide, se persuade qu'ilest encore plus beau qu'onne dit. Ah ah ah !... Et il veut, toute force, briser la chaudire, afin qu'on ne fasse dedans aucun autre courtisan beau comme lui... Et ib m'envoie chercher des massepains Sienne; ei il m'a dit que, si je ne reviens tout l'heure, il me donnera des coups... Etil attendra... le merle blanc. Le plaisant sera, quand, au sortir de sa chaudire, oa
!
Ah
ail
dire, aulieu
lui
208
g-es contrefaits...
L ARliTIN
Oh
quel amusement!...
S'il
ne
me
fallait
Adieu, Rosso
Scne
MAITRE ANDREA, MESSEU
XVII
M,\CO,
le
MAITRE MERGURIO,
visage contrefait.
ANDREA.
fit ,
la
dit la devise
garde de Dieu! car peu de sens sufque porte crite le Tedeschino sur sa
beau,
le
rondache. MAGo.
suis
Oh
le
divin
courtisan
que
je
MERGURIO.
autre.
En
un
Je veux me tenir sur mon quant moi, MACo. maintenant que je me sens devenu courtisan. Mirez-vous un peu, et ne faites point les ANDREA. folies que ft sire Narcisse.
le visage,
MAGO. Je me mirerai
donnez...
Oh!
quel
tourment j'ai souffert !... J'aimerais mieux accoucher qu'tre mis au moule. Regardez-vous donc une fois. ANDREA. je suis dfigur !... Dieu Seigneur MAGO. Ah! voleurs, rendez-moi mon visage, rendez-moi ma tle, mes cheveux, mon nez !... Oh! quelle bouche !:.. quels yeux !... Commeado spiritam meam. hlas
Levez-vous... Ce sont des frissons et des vapeurs qui vous obscurcissent le cerveau. Mirez-vous, et vous verrez que c'a t un ANDREA.
MERGUJiio.
accident.
MAGO.
Je me regarde. {Tenant
le
miroir vrai la
LA FEMME DE COUR
ZOQ
!...
main.)
Ah
je sors de ce
cauchemar
Le miroir
est
Votre Seig-neurie nous a tir une carotte, ANDREA. en disant que vous tiez dfig-ur. Jesuis raccommod, je suis vivant.je suis moi. MAGO. Et je veux maintenanttre tout Rome; je veux corcher le g"ouverneur, qui me faisait chercher par le prvt... Je veux blasphmer, je veux porter des armes, je veux possder toutes les dames... Allez- vous-en, mdecin !... Notre putain, votre putain !... Eloig-ne-toi, matre; car, parle corps !... Tu ne me reconnais pas, maintenant
Je me recommande Votre Seig-neurie. Au revoir. ah ah ANDREA. Ah MAco. Je veux tre aujourd'hui vque, demain
! ! !
Ah
!...
cardinal, et
ce soir pape
fort.
!...
Tu
vois la
maison de
la
Camilla? frappe
Scne XVIII
BIAGINA, MAITRE ANDREA, MESSER
BiAGiNA.
MACO
Oui frappe
ANDREA.
BIAGINA.
Ouvre au
Quel
te
sig-nor.
Le sig-nor Maco. BIAGINA. Quel signer Maco donne mal an, mauvaise truie! MACO. Que Dieu BIAGINA. La dame est en compagnie. MACO. Chassez toute cette compagnie. amis de ma mai BIAGINA. Gomment! chasser tresse MACO. Oui, chasser... sinon je donnerai,
ANDREA.
?
le
est ce sig-nor ?
les
te
toi,
d'trivire,
et
elle je lui
un
i3.
210
L ARETIN
Ouvre au nouveau courtisan. Je suis des matre Andra, corde. anirea. Tire BIAGINA. Tout
ANDREA.
BiAGiNA.
vtres,
la
l'heure.
Qu'elle vous adore. Qu'elle meure BIAGINA. Oh quel fou MACO. Que marmotte-t-elle
!
!
Que
dit-elle ?
g-ros
ANDREA.
MAGO.
naissait pas.
Je
ANDREA.
MAGO. sous clef.
veux
tre
connu, je
le
veux
J'entre...
je
Scne VI
MAITRE ANDP.EA,
]Mon vilain
Je jure
s'est jet
il
seul.
sur
la
Camilla
comme
le
vautour
sur sa proie, et
Castillan
lui
conte son
Dieu, je vous baise les mains , qu'un jeune amoureux. Don Sancio en conterait plus en
paroles...
Il
moins de
hble
la
napolitaine,
il
soupire
l'espagnole, il rit la siennoise, et il sollicite en courtisan... Et il veut copuler avec elle de toutes les faons du monde, si bien que la dame en crve de rire... Mais voil le Zoppino !... , tu avais disparu en un clin d'il, comme la viande servie sur la table du Com-
mun
Scne VIT
ZOPPINO, MA[riU!: andrea.
ZOPPINO.
Je,
si
que
les folies
de ton
Sicnnois sont
me
plaisent peu.
LA FEMME DE COUR
211
ANDREA. Par Dieu tu dis vrai; elles me sont devenues ennuyeuses, moi aussi. zoppiNO. Sais-tu ce qui en adviendra ANDREA. Quoi ? En nous y frottant, nous voil imbciles ZOPPINO. comme lui... si bien que... Echangeons nos capes et puis, avec des paroles hardies, assaillons nos bonnets la maison de la dame et faisons sauter notre homme par les fentres elles sont si basses qu'il ne peut se faire aucun mal. Bien dit. Prends ma cape, donne-moi la ANDRA.
!
mien. ZOPPINO. Donne-moi ton boimet, voici ANDUEA. Lors mme que nous ne serions point dbte guiss, ne nous reconnatrait point, tant tempte, menace. ZOPPINO. Enfonce porte,
tienne.
le
il
il
est
la
crie,
{Zoppino
ANDREA.
et
ANDiiEA.
Qu'on
le
fils
je
veux
Scne VIII
MESSER MAGO
la
MACO. Je suis mort!... Accourez dans la rue dans rue !... Les Espagnols m'ont fait un trou par derriavec l'pe re. O vais- je ?... o m'enfuir ? o me
!
!
cacher
Scne
XX
Espagnols
Les Espagnols!
les
212
L ARETIN
Voic messer Maco. PARABOLAN. Les Espagnols m'ont taill en pices !... MAGo. Qu'avcz-vous faire avec les EspaPARABOLAN.
g-nols ?
MAGO.
PARABOLAN.
j'tais,
j'tais all, ou plutt ou plutt j'allais ma... madone Ga... Car mille... Je ne peux pas me remettre... Ecoutez-moi^ si vous voulez que je vous conte le fait... Matre Andra m'avait fait courtisan au moule, et le diable me "ta puis, je me raccommodai, puis je me reg"tai, puis
J'a... j'allais,
;
..
matre Andra
me raccommoda
vert g-alant comme vous voyez,j 'allai chez Madone Camilla, parce que j'y pouvais aller; je le pouvais, parce que
je suis courtisan, je
firent descendre, ce
le
suis...
qu'il
me
haute, haute
!...
Aujourd'hui encore vous commettiez PARABOLAN. de vos extravagances !... Mais, certes, Dieu protge les
enfants et les fous. De quelle faon ? MAGO.
PARABOLAN.
De
la
faon dont
viennent Rome bien accommods, qui s'en retournent dfaits chez eux sans trouver personne qui prenne soin, non vraiment de les refaire, mais d'empcher qu'ils ne se gtent tout fait d'une manire irrparable!... Et l'on n'a gard ni la noblesse, ni la sagesse I
LES LE J TRES
(1)
Voici, ma vritable idole que j'offre surTautelde vos honneurs suprmes une de mes uvres, telle que vient de la produire mon petit gnie dans sa grande pauvret. Je vous l'offre, afin de donner une preuve du respect que je dois la Divinit de ces honneurs, non que l'on
!
puisse rien ajouter la gloire qui les environne; car, de mme que les simples planches, qui enferment les ossements sacrs de votre pre immortel, surpassent en dignit et en magnificence les marbres sculpts qui les recouvrent; ainsi vos clestes vertus, que rehausse encore votre modestie, surpassent tout ce qu'on vnre chez les hommes. Mais comme c'est le cur qui prsent, cette uvre la mansutude dont vous tes dou, agrez agrez-les, seigneur; car, les sentiments de ce cur
:
certes, ils
sont
les
les
plus entiers,
les
plus
ardents, les
plus intrinsques,
//
lelli-re
cli
primo [secondo, terso, quarto, quinto, sesto] libro de le M. Pielro Arelino Parigi Matteo il Maestro, i6oq,
6 vol. io-S.
ilaliano Terza Sria,
Baschet, Documenti inedili su Pietro Aretino (Archivio Storico tome III, partie II), Florence, 1866.
L'AHrm
vraiment la Fortune qui les prive de la de votre Excellence, voit bien que moins votre Excellence les considre, plus s'accrot leur dsir de
vivant...; et
faveur
l'adorer.
L'humilissime esclave.
AU PICOLOMINI
(i)
O
les
Alexandre, crature noble, esprit distine^u dans heures que j'ai drobes au sommeil, durant envi!
j'ai,
comme on
sait,
compos deux
est celle-ci,
co-
que j'envoie Votre Seigneurie, et l'autre, appele l'Hypocrite, qui est celle que j'ai envoye au duc de Florence. Or, dans le cas o vous ne trouveriez rien qui vaille dans cette comdie, accusez-en mon peu de savoir, et aussi
:
mdies
l'une, intitule la
Talania, qui
qui me contraig-nit l'achever en moins de temps qu'on n'en mit la transcrire... Mais espre, j Dieu aidant, montrer ce que je sais faire dans ia tragdie de Christ, laquelle je travaille sans relcle. En
la circonstance
tendresse de pre.
AU SCULPTEUR TRIBOLO
A PROPOS d'une uvre DU TITIEN
Faisant votre
(i)
log-e, voici
L'auteur du
Dialogue dove
dlie donne.
(a) M. Pierre Gauthiez pense que cette tragdie du Christ devenue le livre de Vllatnanitde Christ.
LES LEITRRS
21 5
Pierre marfijr qui, lorsque vous le vtes, vous et Benvenuto (i), vous chang-ea en imag-es de la stupeur car, ayant fix sur cette uvre les yeux du visage et les lumires de l'esprit, vous avez saisi toutes les vraies terreurs de la mort et toutes les vraies douleurs de la vie sur le front et dans les membres de l'homme tomb terre, vous merveillant du froid et de la pleur qui lui apparaissent jusqu'au bout du nez et dans les extrmits du corps, et, ne pouvant vous contenir, vous avez pouss un cri, lorsqu'en reg-ardant son compag-non qui fuit, vous avez remarqu sur son visage la blancheur de la lchet et la pleur de l'pouvante. Vraiment, vous avez jug-le mrite de ce grand tableau, en me disant qu'il n'y avait point de plus belle chose en Italie. Quel admirable groupe d'enfants en l'air et se dtachant si bien des arbres qui y rpandent leurs branches et leurs feuilles Quel paysage recueilli dans sa simplicit naturelle Comme les rochers sont herbeux et comme l'eau les baigne bien, cette eau que fait courir la verve du divin Titien, dont la bienveillance modeste vous salue trs chaudement...
;
!
!
AU NON MOINS PRUDENT QUE VALEUREUX SEIGNEUR GUIDO BALDO^ DUC D'URBIN
EN LUI DDIANT l'hYPOCRITE
Comme ilmeparaissait, vraiment digne fils et successeur du clair Franois Marie, que la Ddicace de cette petite chose votre Graud' Excellence n'tait ni votre honneur
ni ma (jette, je pensai la retourner quelqu'autre (irand Matre ^t je l'aurais fait si ma Conscience y avait consenti. Celle-ci, persuade par son jugement, que dans un
(i)
BeuveDiil CclUni.
L ARETIN
semblable acteje manquerais de discrtion, ne m'en reprit pas autrement que si la prsente comdie avait t une
vierge simplette et
l'envoyer,
le
un adultre
que
le pril
que
courrait la demoiselle prcite, en parvenant dans le ressort de l'homme que je dis, la menacerait mme si
elle s'en allait ailleurs
;
dirig-ent autrui
au lieu de
avec
emploient toute leur industrie les soulever avec Igi cruaut des travaux. Il m'a donc bien fallu obir et la sage Raison et la Conscience svre qui ont voulu que
je la ddiasse
vous seul, parce que vous seul, en chaque action, g-ardezla majest au trne et au lieu o vous conserventla bienfaisance de Dieu etla condition du mrite. Daignez donc la lire comme rcration de ces pensers magnanimes, qui, engendrs dans votre haute intelligence par l'hrosme de leur propre gnrosit, accou-
chrent son temps, des fruits d'une nouvelle louange, d'un insolite honneur et d'une gloire inusite.
AU MARQUIS DE MANTOUE
POUR
SE
Vous ayant choisi pour mon Dieu parmi les hommes, force est que j'essaye de tous les moyens pour vous montrer combien est grande ma dvotion et, puisqu'en toutes choses je suis in lime, il faut bien que ce soit au moyen d'infimos prsents que je fasse souvenir Votre Altesse de mon iidle et entier attachement. Je vous envoie donc, non en don, mais pour vous rappeler que je vous adore, quatre peignes d'bne parmi eux, le plus noir est celui dont Venus se servait pour peigner
;
LKS LETTRES
ses crins d'or, et
il
21
cependant on est l-dessus d'opinions qui disent que c'tait le peig-ne de a en y d'autres, celui la Rvrende, concubine de Grassis (i) de Madone Honesta, pouse de ce coquin d'Armellino (2) qui dit une chose, qui une autre. Mon opinion, moi, est que ce doit tre le peigne de la sacralissime Nonne, lavandire du pdant Adrien (3). Je l'ai eu par ncrodiverses;
;
;
mancie. Les autres sont trs certainement ceux dont Mars se peig'qait la barbe, et les lui a enlevs de force l'horrible Maiatesta des Mdicis. C'est majtre Pasquin qui me les a donns. Je vous envoie encore une paire d'perons d'os de mule ils ont appartenu saint Pierre, premier pane, et leur g-nalog-ie serait trop long-ue raconter. S. lit que le Pontife cherche les avoir, parce qu'il croit qu'avec une paire d'perons d'os de buffle il va tout de suite chasser les Turcs, comme Sa Saintet pousse sa mule en la piquant par en dessous. Mais moi, qui suis un dsespr et qui crois peine au Credo, je ne veux pas que cette grosse bte les ait, et, pour que la Croisade n'aille pas plus avant, je les donne Votre Excel:
lence.
une chane, trs noire, fine amoureuse. Elle appartenait Cupidon, ce fripon de bardache, et je ne sais comment elle m'est venue entre les mains. Je vous adresse encore une bote de musc. Cette bote, certain chevalier de Malvezzi l'a rapporte de Rhodes, et il prtend que le g"rand Turc la lui a donne l'occasion d'une pouvantable prouesse dont il fut le hros, lors de la reddition de la Levra. Daig-nez donc, Prince
plus, je vous envoie
et fort jolie,
De
fminine
et
(i)
tait le
Lon X.
(3) {]i
(3i
Adrien VI,
2l8
1res courtois,
l'aKLTIN
accepter ces
ba^^-alelles,
et,
cela
me
rendrez cerlain que mon attachement vous est cher. Mais, comme je sais que c'est la coutume de votre gentillesse de rendre cent pour un, je vous supplie de me l'aire acheter deux bonnets d'hommes, l'un de drap d'or et d'argent, parFd de soie noire, comme on les porte Mantoue, Tautre de soie noire et d'or. Je mettrai cela au nombre des faveurs infinies que j'ai reues de Votre Seigneurie Illustrissime. Monseigneur, si je vous harcle ainsi de mes demandes de grces, ce n'est point chez moi prsomption un si grand Prince que vous ne doit pas congdier ses serviteurs sans leur accorder leurs requtes, et le devoir des grands seigneurs est d'en agir comme vous faites, vous qui accordez tous des grces dlicates et rendez chacun heureux et content, non pas seulement en promesses. C'est pourquoi, le plus humblement que je puis, je vous supplie de me faire unesingulire faveur et je m'adresse vous, d'un front aussi assur que je m'adresse d'ordinaire au Cardinal de Mdicis, pre de Votre Excellence. La faveur que je vous demande c'est l'octroi de l'ordre du Camp Primo Perini, noble Florentin, porteur de la prsente. Je sais que Votre Excellence Illustrissime a pris la ferme rsolution de ne plus
:
l'accorder,
mais
je n'en estime
que davantage
cette dis-
tinction
Si
moias
elle
dai-
gne me
de Nuvolara, et je vous jure, par l'amour que je porto votre honneur, que vous me faites en ce cas une faveur unique et dont vous aurez bon remerciement.
faire obtenir celui
LES LETTRES
aiQ
un
t,
petit l)ronze, personnag-e nu, d'une haute antiquitrouv dans les fomiations des latrines que fait di-
fier le j)ro(lig'ue
mmoire
du
ponlificat
d'Adrien VI et
Les connaisseurs, comme qui dirait Zeccotto, le Gnois, disent qu'il est de la main d'Hnoch et d'Hlie, et je le crois, puisque Hlie et Hnoch taient sculpteurs et prophtes. Gomme j'aime fort iNIantoue et que je ne veux pas qu'un objet si rare tombe entre les mains d'ig-norants, je l'envoie au Mainoldo, joaillier des Antonins ; vraiment, matre Mainoldo est dig^ne d'avoir un tel morceau de sculpture et, que Votre Seig'neurie Illustrissime le sache, le Pape en a ofl'ert je ne sais combien de milliers d'cus. L'expriment Mainoldo s'estimera donc heureux de l'avoir, par main de notaire. Au cas que Votre Seig'neurie invincible aille confrer de quelque porcelaine avec le gentil messer Mainoldo, qu'elle le lui montre et le lui fasse paratre d'or. Le signor Giovanni, qui est l'extrme-onction pour l'amour de vous, baise les mains et les pieds Votre Excellence et vous recommande le diffrend qui le ruine; vous savez combien il est votre serviteur et que nul autre au monde ne vous adore davantage. Vous pourrez faire de lui ce que vous voudrez, et je crois que ce ne sera pas dans bien longtemps. Rien d'autre. La vig-ile
du corps
et
du
sang-
du Gbrist. De
Reg"g"io, mdxxiii.
De Votre
Excellenlissime Seigneurie,
le
dvou serviteur.
(i)
en
fdiL
220
L ARKTIN
AU MARQUIS DE MANTOUE
SUR UNE COPIE
Excellent Prince,
mains et, autant que je le puis, vous remercie du don, digne d'tre offert plus g-rand personnag-e que moi. Je m'en parerai pour l'amour de vous et je suis fch que le porteur n'ait pu, cause de quelque ornementation inacheve, vous rapporter un
Je vous baise les
petit travail
gnag"e de
mon
en stuc
le
dre, peu
mentdu Pape ainsi que de tous les sculpteurs de Rome, on n'a jamais excut copie si parfaite. Celui qui l'a faite est Jacopo Sansovino don messer Giulio, votre peintre (i), peut vous dire quel homme il est. 11 a pass tout l'hiver achever cette copie, et Notre Seig"neur est souvent all au Belvdre le voir travailler. Enfin, sous dix jours je vous l'expdie, accompag-n de quelques petites autres nouveauts. Hier soir, Notre Seig-neur m'a justement dit que le tableau de Raphal tait peu prs fini de copier Florence, et qu'aussitt il l'enverrait Votre Excellentissime Seig-neurie. Matre Pasquin se fait mon nom, cette anne, et il a un succs .'...Dieu rchappe tout fidle chrtien des mauvaises lang^ues des potes! Pour moi, Monseig-neur, tout ce que Pasquin dit, je vous l'enverrai, et, en fidle serviteur, je me recommande Votre Excellence. De Rome,
;
le 20...
MDXXIV.
si
Je serai un misrable
je ne
vous envoyai un
pelit
Jules
Romain.
1,F.S
LETTRES
221
un
Jupiter, l'une
Rome. Le
SONNET.
y eut autrefois sept merveilles du monde, Ainsi parle messer Pline, qui tut homme docte; Mais celles qu'on a vues de nos jours sont Innt, Comme le Jove (1) le met dans ses Chroniques.
Il
La premire
Puisque
le
fut que Milan se perdit, pape Lon mourut, sans dire mot La suivante, le pontificat de l'ignare pdant (2)
;
La quatrime, que Rhodes se rendit; Lorsque a porta inferi Adrien, En moins d'un an alla heurter bien fort, Cinquime allgresse de tout bon Chrtien
La sixime fut que la haute prudence de Clment Pronona l'inutile serment de foi catholique, Et fut lu Pape, canoniquement
;
La septime
C'est
n'est rien:
que se
fit
prendre,
comme
par plaisanterie,
Avec tous
France
Donne
balance huitime, qui va nous stupfier, Car nul ne devine ce que je vais vous dire.
le trait cette
Mais
Du Sermoneta
en
l'art militaire,
le fait faire;
Mais
Se
(i) (i)
c'est
vous renverser.
le
De penser que
soit fait le
divin Jupiter
vigneron de l'Armellino!
Paul Jove.
Adrien
VL
2:ta
A CLEMENT
VII
EN MANIRE DE CONSOLATION
r^ir les destines des hommes de que toute leur prvoyance ne saurait prvaloir contre elle, nanmoins elle perd ses droits ds que Dieu veut y mettre la main. Quiconque tombe de si haut que Votre Saintet doit donc se tourner vers Jsus, les prires la bouche, et non contre le Destin, en exhalant des plaintes. Il tait de toute ncessit que le vicaire de Christ, en soufl'rant les misres de l'heure prsente, payt pour les fautes des autres, et la justice avec la-
La fortune a beau
telle sorte
quelle
le
ment, si votre prison n'en portait tmoig-nag-e. Consolezvous donc dans les ang^oisses o vous tes, puisque sa volont vous a plac en la puissance de Csar, et que vous pourrez du mme coup prouver la misricorde divine et la clmence humaine. Si pour un prince toujours ferme, toujours prudent, toujours prpar aux insultes du Destin, aprs qu'il a tout fait pour se mettre l'abri de ses coups, c'est un honneur que de supporter patiemment tous les malheurs que l'adversit du Destin veut qu'il supporte, quelle gloire sera la vtre, si, ceint de patience, aprs avoir encore surpass ce Prince en adresse, en fermet, en prudence, vous souffrez ce que Recueillez en vousla volont de Dieu vous impose mme votre suprme intelligence et, examinant chacune de ses facults, sachez me dire s'il est digne d'elle de ne pns esprer monter plus haut encore que vous n'tes mont. Ne doutez pas que Dieu ne veuille soutenir la religion de son Eglise, qu'en la soutenant il ne vous dirige, et que, s'il vous dirige, votre chute ne soit qu'apparente, non effective. Ce qui doit tre clfectif, et non pas seulement apparent, c'est la manire d'agir du
!
LES LRTTKES
22^
Po:Uifc,qiii (ioit penser au pardon et non la veng-cance vous n'aurez pas plutt song- pardonner au lieu de vous veng-er que vous vous proposerez ainsi une fin convenable la haute dignit dont vous tes revtu. Quelle uvre serait plus propre exalter au del do toute limite le nom du Sanctissime et du Batissime que de vaincre les haines par la pit et la perfidie par la
;
gnrosit ?
La meule
les
aig-uise le fer et le
;
rend apte
l'adversit
couper
les
choses
plus dures
de
mme
aiguise les coeurs g-nrcux de telle sorte qu'ils se moquent de la Fortune elle en sera pour sa courte honte,
;
vous ne lui rapportez pas elle l'immensit du dsastre qui vous prive de la libert. On ne peut nier qu'elle ne vous ait assailli de toutes sortes de cruelles injures et que, par sa faute, vous n'ayez rencontr de la perfidie dans Rome mme, de la fraude chez vos amis, de la faiblesse chez vos capitaines, de l'ingratitude chez ceux que vous aviez combls de bienfaits, de la trahison chez ceux qui vous devaient fidlit, de l'envie chez les potenmais, si Dieu ft rest neutre, vous auriez montr tats la Fortune, par votre habilet, que c'tait elle non de commander, mais d'obir. A Dieu seul, qui peut tout, vous devez tout rapporter, et, en lui rapportant tout, lui rendre grces. L'Empereur tant le ferme appui de cette Foi dont vous tes le pre, Dieu vous a mis en son pouvoir pour que vous unissiez vos intentions avec les intentions de l'Empereur. Votre honneur ne fera que s'acsi
;
crotre et resplendir
Voici que
le
il
vous
comme
devant
vous, avec l'humilit due celui qui tient sur la terre la place du Christ: en le haut rang o est Csar, Sa Majest ne g-rde nul orgueil. Appuyez-vous donc au bras de la
puissance qu'il lient d'en haut et, dirigeant la pointe de sa catholique pce sur le cur froce de l'Orient, tournez-le contre l'objet de votre courroux. Ainsi de la
224
L AUETIN
dplorable situation o vous ont plac les fautes et les pchs du Clerg-, vous sortirez votre gloire et votre louan{-e, emportant le prix de la patience avec laquelle a tout endur la ferme constance de Votre Saintet^ dont je baise les pieds bien dvotement. De Venise, le dernier jour de mai mdxxvii.
AU MARQUIS DE MANTOUE
A PROPOS d'ouvrages DU TITIEN, DU SANSOVINO ET DE SBASTIEN DEL PIOMBO
Comme je sais que Votre Excellence veut que ceux qui elle donne la remercient en ne lui faisant pas de remerciement, je lui dirai seulement que Mazzone, mon serviteur, m'a rapport les cinquante cus et le pourpoint de drap d'or que vous m'envoyez. Je vous dirai encore de vous souvenir de la promesse que vous avez faite
Titien, l'occasion
offrir
de
mon
portrait,
que je vous
ai fait
Je crois que messer Jacopo Sansovino, artiste d'un rare talent, ornera votre chambre d'une Vnus si vraie qu'elle remplit de dsirs libidineux la
en
mon nom.
fantaisie de
quiconque
la
quelque tableau de son invention, mais qu'il vous que ce ne fussent pas de ses hypocrisies habituelles, de ses clous et de ses stygmates il m'a jur de vous peindre quelque chose de surprenant; .quand serace? voil ce que se rserve in petto la fantasque humeur qui trop souvent bataille en la tte des gens comme lui.
ft
plairait
Je
ai
le
bon
en viendra bout.
En
attendant,
le
Titien et
26
d'aot MDxxvii.
LES LKTTKES
225
d'une toque
Le prsent d'une toque, avec ses ferrets et son mque m'a tait Votre Excellence, est arriv plus temps que n'arrive une corbeille de fruits quand on dne et qu' la fin du repas la rclamait la fantaisie de
daillon,
l'apptit.
garnie dans
l'acheter,
de
la
ntre et j'allais
fait fte, et
envoyer
quand un de vos
me
pour sa
beaut et parce que je la dsirais avec autant d'ardeur que peut-tre Votre Seigneurie Illustrissime, laquelle je me recommande, dsire le livre des Sonnets et des
A L'ABBE GONZAGA
POUR LUI FAIRE PRESENT d'uN BARBE
Votre Seigneurie voudra bien accepter en cadeau le jeune cheval barbe qu'en partant pour Venie j'ai laiss dans son curie; cette ville me plat tellement que, maintenant, c'est un cheval de bois que j'ai me procurer, si je veux chevaucher travers ses eaux. Son Excellence votre cousin (i) m'avait dj donn deux chevaux, un maure et un turc, qui m'taient de beaucoup de prix j'espre que le mien en aura autant pour vous et que vous l'accepterez volontiers. Si vous ne voulez l'avoir que contre change, attendez que je parte, et alors vous
:
(i)
Le marquis de Mantoue.
14.
2 26
l'arTIIST
mais vous serez lon;?;-lemps avant d'avoir me faire ce troc, car mon intention est de rester ici tout jamais est bien fou quiconque ne sait pas vivre en Paradis! Si j'avais su qu'ici on pouvait conserver une monture, j'aurais gard Lubino, que j'ai donn au marquis je l'aurais gard, autant en souvenir du pape Clment, qui m'en aurait fait cadeau, que pour sa beaut ayant entendu dire que ce pays tait magnifique, j'aurais bien d m'imaginer qu'une haquene y pouvait subsister par magie. La mienne, en tous cas, est bien place. Je me recommande Votre
;
: ;
Excellence.
De
Venise,
le
8 de juin mdxx.
A L'VQUE DE VAISON
POUR LE REMERCIER d'uNK GUANE
La plus
belle, la
LES LETTRES
227
jamais vue,
Elle est
si
c'est
celle
me
prive
que je la cache de quiconque est orfvre et de quiconque en porte. Certainement je ne m'en sparerai jamais, tant pour sa g-rce et sa nouveaut que parce qu'elle me vient de celui que
de
la porter,
ou bien,
si
je la porte,
les
autres
hommes.
Je
me
faire chevalier
imprial.
J'ai dit,
en
effet,
dans
ma comdiedu Marchal,
un mur o
l'on a nj^lig-
qu'un de
De
mettre une croix :tout le monde vient pisser dessus... Venise, le 17 de septembre mdxxx.
A CLEMENT
VII
EN MANIRE DE RECONCILIATION
La cruaut de
rang" ni
s'est-elle rvle
mon
g-ard
actes
du doge. Messer Girolamo de Vicence, vque de Vaison, votre majordome, ici mme, en la maison de la reine de Chypre, sur de Cornaro, m'a remis en mainspropres le Bref, et, comme vous le lui aviez formellement ordonn, il m'a rapport que vous l'aviez charg- de me dire que, de simple chevalier de Rhodes devenu pape, et de pape, prisonnier, rien de tout cela ne vous avait tant stupfait que de me voir, moi, vous dchirer dans mes crits, surtout lorsque je savais fort bien pourquoi vous n'aviez pas tir
que par
les intercessions
de chtiment de ceux qui avaient essay dem'assassiner. Saint-Pre, dans tout ce que j'ai dit ou crit, toujours ma langue a t d'accord avec mon cur, et si je vous ai attaqu dans votre honneur, ma fidlit a toujours
228
i/aRKIIN
de ma part. Lorsque des g'ens parvenus, grce vous, au sommet des grandeurs, vous ont attaqu coups de lances, quelle merveille que, moi, j'aie pu vous attaquer coups de lang-ue ? Je me retiriques, nulle faute
pens
et je roug"is de deux choses: je me repens d'avoir blm ce pape, dont la gloire m'a toujours t plus chre que ma propre vie, et je rougis de ce que, voulant le b]mer,je l'aie t'ait durant la plus grande ardeur de ses infortunes. Mais le Destin qui vous confina dans le
castel
Saint
le
Ange
si,
par-
march, il n'avait fait de moi voiio ennemi. A cette heure je remercie Dieu qui a cart de votre esprit l'pret de la rancune, et de ma plume la douceur de la vengeance. Dornavent je serai pour vous ce bon serviteur que je vous tais jadis, quand ma verve, qui se repaissait de votre louange, s'arma pour vous contre Rome entire, lors de la vacance du trne de Lon. Je ferai en sorte que le srnissime Gritti, dont la parfaite prudence s'est interpose entre votre patience et ma colre, ait plutt me rcompense!; qu' me punir. De toute la force de ma volont, je baise les pieds sacrs de Votre Saintet avec la mme tendresse que je les lui baisais autrefois. De Venise, le 20 de septembre MDXXX.
dessus
(i)
La mdaille, Seigneur, o tait sculpte, de la main de Luigi Anichini, l'image de Mars, n'allait pas bien sans la compagnie des boutons de cristal d'Orient que je vous envoie avec un miroir de mme matire, et un
(i)
LEB LETTRES
239
tableau de la
main de l'admirable Titien. Je vous les envoie par Rosello Roselli, mon parent. Et vous ne devez point apprcier le prsent, mais l'art qui le rend prcieux regardez la souplesse des cheveux annels et la charmante jeunesse de saint Jean; regardez ses chairs si bien peintes qui, dans leur fracheur, ressemblent del neige teinte de vermillon, mais mue par les battements et rchauffe par les haleines de la vie. Du cramoisi du vtement et du pelage de la fourrure, je n'en parle pas, parce qu'en comparaison le vrai cramoisi et le vrai pelage paraissent peints, et ceux-l sont vivants. Et l'agneau qu'il a dans les bras a fait bler une brebis tant il est naturel A Venise, le 8 d'octobre mdxxxi.
: !
AU DUC DE MANTOUE
SUR DES VSES EN VERAES DE VENISE
La
sette,
foi
sans les
uvres
est chose
aussi
fragile
que
cas-
une
beaut de ces par Giovanni d'Udine. Cette nouveaut a tellement plu aux matres verriers de la Serena qu'ils appellent maintenant des artins
faire apprcier la
que pour
pices,
dessines
l'antique
Mon-
seigneur de Vaison, matre d'htel du pape, en a emport quelques-uns Rome pour sa Saintet, qui leur
a fait grand accueil, selon qu'il m'en avise, et j'en rfte abasourdi, car je croyais qu'en Cour de Rome on regardait l'or, non au verre, et je pense que c'est aussi
l'ide
serviteur.
le
23o
o je
me
laquelle
bont de Sa
Batitude, je n'oserais pas me transporter Gonstantinople, o m'appelle la libralit du signor Gritti.o m'entrane de force ma pauvret, sans vous en donner avis,
j'ai envoy le faire pour Sa Majest. Daig-ne^, en ces conjonctures, m'ordonner quoi que ce soit, et je vous obirai comme un fidle sert son Dieu. Ainsi donc, voici que l'Aretin l'homme toujours sincre, sauf dans les satires que de trop cruelles raisons m'ont fait adresser Notre Seii^neur, aujourd'hui vieux misrable, s'en va g-ag'ner son pain en Turquie, laissant heureux sur la terre chrtienne les ruflians, les flatteurs, les hermaphrodites, mignons de couchette des princes et ceux-ci, fermant les yeux Texemple que
, ;
comme
donne votre royale g-nroslt, tant qu'ils vivent, voient mendier ces honntes g"ens pour qui vous avez la main ouverte toute heure et en tout lieu. Maintenant, avec votre permission, moi qui ai achet au prix de mon sang- le droit de dire la vrit, je m'en irai l-bas et de mme que les au trs montrent leurs dig'nits, leurs pensions, les faveurs que leur ont acquises la Gour de Rome leurs vices, je montrerai les outrages- que m'ont
leur
attirs
i|
mes
mu P
'
de
mouvra de compassion
ces sauva-
g-es, et
dessein
sans
De
Venise,
le
19 de
dcembre mdxxxiii.
LES LETTRES
231
P. P.
VERCxERIO
I^'
Si jamais il arrive que Notre Seig-neur aille Nice s'aboucher avec le roi Franois, vous verrez le plus trang'e miracle dont on ait jamais ou parler. Gaurico (i), prophte aprs l'vnement, me le dit, et me le disent aussi jusqu'aux lang-ues de ma chane (2); elles me disent que la libralit franaise est si grande que,
tomber un regard sur le Pontife, elle en prodigalit sa ladrerie inne et son incomprhensible avarice. Oh ne sera-ce pas l un plus g-rand miracle qu'aucun de ceux qu'ait jamais fait le Giberti ? Par Dieu l'immense courtoisie royale Dieu ce mtamorphosera Clment en un Lon. serait un beau spectacle de voir le Saint Pre, comme un camlon, se teindre dos couleurs de l'me du Trs Chrtien. Mais ne dois-je pas le dire? Cette bte de Pasquin a peur au contraire que le roi, en frayant avec le pape, ne devienne comme le pape, ce dont
rien qu' laisser
lui
convertira
Dieu nous prserve Et si je ne lui avais t cette ide de la cervelle, il y demeurait plus attach que ne l'est le cardinal des .Aldicis donner ceux qui le mritent
!
eu
De
Venise,
le
20 de janvier mdxxxiv.
madone
lgante,
le
L'astrolouc.
(2)
faiie
La chane d'or que Franois I" avait do.iace l'Arclin tait de fleurs de !ys relies par des langues.
232
Al,K,rJN
m'avez demand et qu*a cr ma fantaisie l'occasion du pinceau de Titien, car, demme qu'il ne pouvait portraire un prince plus g-lorieux, je ne pouvais non plus me fatig"uer l'esprit pour un portrait moins honorable. Eki le voyant, j'ai appelle la nature en tmoig^nage, lui faisant confesser que Fart s'tait confondu avec elle. Et de cela la preuve en est chaque ride, chaque poil, dtail et les couleurs dont il est peint qui ne rendent pas seulement l'ardeur de la chair, mais dcouvrent la virilit de l'me. Et dans le brillant des armes qu'il a sur le dos se reflte le vermillon du velours qui lui sert d'ornement au fond. Quel bel eftet font les panaches de la salade, vivement enlevs avec leurs reflets sur le poli de la cuirasse de ce duc Jusqu'aux btons de ses gnralats qui sont naturels Qui ne dirait que les btons que lui mirent en mains l'Eg-lise, Venise et Florence, ne fussent d'argent? Quelle haine doit porter la mort ce gnie sacr qui donne la vie aux gens qu'elle tue La majest de Csar le reconnut bien Bologne quand, se voyant dans sa peinture, il s'en merveilla plus que des victoires et des triomphes par lesquels il est toujours sr d'aller aux astres. Lisez donc le sonnet avec un * autre ensuite, puis rsolvez-nous priser la volont que j'ai eue de glorifier le duc et la duchesse d'Urbin, mais non louer le style d'aussi faibles vers. De Venise, le 7 de novembre mdxxxvii.
! I
main de
l'art.
Reprsenta d'Alexandre le visage et le corps, Il ne rendit pas pourtant de son rare modle Cette noble vigueur qui est le partage de l'me.
grand-duc dans sa figure peinte Dcouvre toutes les gloires parses dans son cur.
LES LKTTHES
11
233
porte la terreur entre ses deux sourcils, Le courag'e dans ss yeux et la fiert sur son front, Dans l'ampleur duquel sig-ent l'honneur et la raison.
Dans son
torse arm et dans ses bras dispos Brle celte valeur qui garde du pril L'Italie confie ses glorieuses vertus.
Il
L'harmonie des couleurs, que le pinceau Titien a tendues, exprime en dehors Sa concorde qui gouverne en Leonora Toutes les puissances de son noble esprit.
De
Avec
elle sige la modestie dans une humble attitude, L'honntet rside en sa parure,
Lui cache
la
l'amour.
ternels,
Pudeur
et beaut, ces
ennemis
traits, et
se discerne.
La prudence garde sa vertu et lui conseille Le beau silence; mais ses autres vertus intimes Lui orneut le front d'un clat meiveilleux.
AU
TITIEN
Vous VOUS tes sagement avis, cher compre, en vous dcidant d'envoyer l'image de la Reine du ciel l'impratrice de la terre. La hauteur de votre esprit, dont vous tirez les merveilles de la peinture, ne pouvait placer plus haut le tableau oii vous avez peint l'Annonciatton.
On
des
234
l'artin
les ang-os ac-
commods en
de sa
g'ioire,
battement de ses ailes, a pris la forme L'arcen-ciel traversant l'air du paysg-e, qui dcouvre leblanchissement de l'aurore, est plus vrai que celui que nous voyons aprs la pluie du soir. Mais que dirais-jc do Gabriel, le messa^;er divin? Emplissant tout de lumire, resplendissant dans la salle d'une splendeur inconnue, il s'incline si doucement dans l'attitude du respect qu'il faut bien croire qu'il s'est prsent ainsi devant
le
entendre
il
Marie.
11
le visag-e et
de lait que reproduit au naturel l'harmonie de votre coloris. Sa tte se tourne avec modestie, tandis qu'avec gravit il abaisse
sent de cet clat tendre fait
sang- et
du
suavement
les
Son habit
cacher;
lg-er d'toffe
point
la
d'une blancheur inaccoutume. Bref, il semble que la bouche dont sortit le salut qui fut notre salut dise en sons angliques Ave. Je ne dis rien de la Vierge d'abord adore, et ensuite console par le courrier de Dion, car vous l'avez peinte de telle faon et si fort mervcii'ci que les yeux blouis par l'clat do ses yeux pleins d.^ calme et de puret ne la peuvent regarder. C'est ainsi que nous ne pourrions louer, cause de l'trang-et de ses beauts, l'histoire que vous peig-nez dans le palais de Saint-Marc, en l'honneur de nos Seigneurs et pour craser ceux qui, ne pouvant nier votre g'nie, vous
:
LES LETTHES
donnent vous le premier rang- seulement dans le portrait et moi dans l'art de mdire, comme si Ton ne vovait pas le monde et vos uvres et les miennes. De Venise, le g de novembre mdxxvu.
AU
FILS
DU
TITIEN
Pomponio, votre
pre,
Titien,
a.
bonjours que vous m'envovez et qui m'ont presque autant fait plaisir que deux coqs sauvages que je me suis offert moi-mme, votre pre m'ayant dit d'en faire cadeau en son nom quelque signor. Et pour que vous voyiez ma libralit, je vous en renvoie mille qui chantent toute la nuit, comme dit l'autre, en vous priant de donner les plus maig^res votre petit frre Orazio, pour avoir oubli de me faire dire o en est sa fantaisie de dpenser autant qu'on peut dans ce monde et dans l'autre. Votre seule conomie suffira sans doute qui gagne l'argent, puisqu'lant prtre il est croire que vous ne sortirez pas des rgles de Melchissdec. Ce que je vous dis n'est que du bon sens, ou mme pis il est grand temps de revenir l'tude, car !a campagne, selon moi, ne tient pas cole, et d'ailleurs la ville est une bonne pelisse pour l'hiver. Allons, venez donc, qu'en faisant, avec les douze ans que vous avez, quelques bon repas d'hbreu, de grec, de latin, je veux (ji:3 nous fassions dsesprer tous les docteurs de la mappemonde, comme font enrag-er tous les peintres d'Italie les belles choses que fait messer papa. Suffit, soyez bien portants et en bon apptit.
les
;
donn
Le 26 de novembre mdxxvii.
s36
Leva me donna jadis. Mais comme c'tait dommag-e d'avoir perdu un temps si cher et si louable
Antonio da
rpondre,je dis que cem'taitunetrop grande faveur de vous tre inclin jusqu' accepter mes crivasseries, non pour vous conseiller propos de la peinture du Jugement, mais pour vous convaincre de ce qu'on ne peut imaginer de chose moindre que votre mtier. Certainement, vous tes personne divine, et qui parle de vous le fait avec des paroles surhumaines, s'il ne confesse son ignorance ou mente pour parler familirement. Maintenant, je reois pour un singulier prsent la licence que vous me donnez d'crire une partie de ce que vous savez del faon que je le sais. Pour que vous en voyiez le commencement, voici le livre o pour m'honorer avec la gloire de votre nom je me suis en plusieurs conjonctures prvalu de lui. Mais ma dvotion ne doit-elle pas tirer du prince de la sculpture et de la peinture un morceau de ces cartons que vous avez coutume de donner mme au feu, afin que j'en jouisse ma vie durant, et que, mort, je l'emporte avec moi dans le spulcre? Je sais que la superbe d'une telle prire ne sera point ddaigne par l'excellence de l'ami pri et parce qu'il est de gentil sang;
me
LES LETTRES
287
pour ne pas rendre mensongres les offres que de lui-mme et de toutes ses bonts il m'a faites. De Venise, le 20 de janvier mdxxxvui.
et
AU
TITIEN
238 vous,
l'artin
dans
d'abord les difices, lesquels, de vraies pierres, paraissaient de matires artificielles. Et puis, apercevez cette atmosphre, qu'en certains endroits je dcouvrais pure et vive, et, d'autre part, trouble et morte. Considrez
rcit
:
mon
c'tait
faits
et l'humidit condense.
firent les nuages composs Ces nuages se tenaient voisins des toits des difices, moiti sur le premier plan et moiCar le fond tait plein d'une ti l'avant-dernier. vapeur tirant sur le g-ris noir. Je m'tonnai, certes, des couleurs varices qu'ils faisaient paratre. Les plus voisins flambaient comme les flammes du feu solaire, et les plus lointains roug'issaient d'une ardeur de minium, un peu moins incandescente seulement. Ode quels beaux traits les pinceaux de la nature peig-naient l'air, l-
me
pays
haut, l'cartant des palais ainsi que le Vecellio fait des De certains cts apparaissait un vert qu'il figure
I
rellement compos par la nature, matresse des matres. L'atmosphre se fondait avec les clairs et les obscurs, et
mettait
si
bien
si
bien son gr fondre ce qu'il lui plaisait de fondre, que moi, qui sais comment votre pinceau est le g"nie des g-nies, par trois et quatre fois je m'excla-
ou savait
mai O Titien, o donc tes-vous Par ma foi, si vous aviez peint ce que je vous narre, vous induiriez les hommes dans la mme stupeur qui me consuma, lorsque contemplant une telle peinture, je m'en repus longtemps l'me, bien plus longtemps que n'avait dur la merveille de ce spectacle. Oe Mai, Venise mdliiii.
:
yi
..?%^
LES LhTTRES
sSq
AU
A PROPOS DE MICHEL
ANflE,
TITIEN
DE EUAMANTE, DE
Sr:BA;TlEN
Bien que je
l'avoir
sois
en
pour m'avoir
autrement reprsent de votre main, et ensuite mon portrait plutt bauch qu'achev, il n'en est pas moins vrai que vos lettres me sont trsao-rables, surtout lorsque j'apprends les larmes qui ont baign les yeux du Bembo, ds que vous avez transmis la Seigneurie Rvrendissime les salutations que je lui encause de
voyais d'uneaflection vritable, et
vou. Si sa bont, en recevant
comme
son
bien d-
bouche, a vers des larmes, mais aussi, en coutant les siens dans votre lettre, j'ai pleur; et je n'ai pas j)u ne pas m'mouvoir encore de tout mon cur de toutes les amabilits qu'on vo^us montre et de l'accueil qui vous est fait par le Pape Notre Seigneur. C'est une grce particulire de la maison Farnese d'abonder en quantit de caresses, car on sait qu'elles sont la mre des espran;es inventes par la nature pour l'entretien des hommes qui se repaissent au moins de la certitude des promesses dans la grandeur de leurs doutes. Maintenant, que vous soyez pein que ce caprice qui vous est vnu prsent de vous transporter Rome ne vous soit pas venu vingt ans plus tt, je le crois fort bien mais si vous en restez merveill, dans l'tat o vous la trouvez aujourd'hin, qu'auriez-vous donc fait en la voyant dans l'tat o je la laissai? Sachez pourtant que cette grande ville est dans les troubles de ses malheurs, semblable un excellent prince maltrait par l'exil; si les incommodits de la misje le])crverlissc'nt, il n'en reste pas moins
;
2^0
l'aritin
semble un mois attendre que vous reveniez, ne que pour entendre ce qu'il vous semble des antiques dans les marbres, et en quoi le Buonarotti vaut plus ou moins qu'eux, et en quoi ne l'approche pas oa le dpasse Raphal pour la peinture. Je me rjouirai raisonner avec vous de la construction de Bramante Saint Pierre et des uvresdes autres architectes et sculpteurs. Retenez bien le faire de chaque peintre fameux, et de notre Fra Bastiano(i) spcialement. Reg-ardez bien chaque entaille de Bucino, et n'oubliez pas de comparer en vous-mme les fg-ures de notre compre M. Jacopo avec les statues de ceux qui rivalisent tort avec lui, ce qui les fait blmer avec raison. En somme, informez-vous aussi de la cour, aussi des murs des courtisans, comme des uvres du pinceau et du ciseau, et surtout faites attention aux choses de Brin del Vag-a, car c'est une admirable intellig^ence. Cependant souvenez-vous de ne pas vous perdre tellement dans la contemplation du jugement de l Chapelle, que vous en oubliiez le dpart, et que vous restiez absent tout l'hiver loin de moi et de Sansoviuo. D'octobre, Venise, MDXLV.
ft-ce
me
AU DUC DE FLORENCE
(2)
La non
petite quantit
trouve possder, et Tassez g-rande avidit qu'il a nanmoins pour l'accrotre est cause qu'il ne donne pas ses
soins k l'oblig-ation que l'on a envers un ami, non plus qu'au devoir qui convient envers un pre, mais qu'il fait
Sbastien del Piombo,
(i)
(2)
Gosmeler.
LBS LETTRES
24*
avec une trang-e anxit celui-l seulement promet de grandes choses aussi n'est-ce point merveille si, aprs qu'il m'a entretenu six mois durant de rcsprancc qu'il tirait de la prodig-alit du pape Paul, il s'en est all Rome sans autrement me faire le portrait de votre trs immortel pre. Laquelle imag-e paisible et terrible je vous manderai bientt, et sans doute conforme la vritable, tout ainsi que si elle tait sorattention
qui
lui
tie
peintre susdit voici toujours l'image ressemblance moi, faite par son propre pinceau. Assurment, elle respire, le pouls bat et les esprits se meurent tout ainsi que je le fais, moi, vivant; et si les cus que je lui ai vraiment donns eussent t plus en nombre, les toiles seraient luisantes, souples ou rig-ides, comme le satin, et le velours et le brocart
la
;
de
main du
mme
de
ma
vritables
me
coutume de me regarder votre pre dont je ne fus pas moins compag-non que serviteur; mais comme ce serait trop, je me fciliterais d'tre au moins des familiers qui vous adorent. D'octobre, Venise, mdxlv.
En voyant
C'est la
242
saint baptme,
l'esprit
j'ai
L*ARTIN
honte de
la licence
si
interdite
prise
d'exprimer
la lin
o aspire tout sentiment de notre foi trs vritable. Ainsi donc, ce Michel-Ang'e tonnant en renomme, ce Michel-Ang'e remarquable en prudence, ce Michel-Ang-e admirable a voulu montrer aux gens non moins d'impit, d'irrlig^ion que de perfection de peinture ?
Est-il possible
commerce avec les hommes, vous ayez fait cela dans le plus g-rand temple de Dieu? sur le premier autel de Jsus ? dans la plus g-rande chapelle du monde? o les grands cardinaux (i) de l'Eglise, o les pontifes vnrables, o le vicaire du Christ avec les crmonies catholiques, avec les ordres sacrs et les oraisons divines, confessent, contemplent et adorent son corps, son sang et sa chair ? Si ce n'tait chose impie que d'allguer une telle comparaison, je me vanterais de ma prud'homie dans mon ouvrage de la Nanna, prfrant mon jug"ement votre indiscrte conscience, attendu que, dans une matire lascive et impudique, je n'use pourtant point des paroles ambigus et habituelles cette g'ent, mais je parle avec des termes irrprochables et chastes et vous, dans le sujet d'une si haute histoire, vous avez montr lesang-eset les saints, ceux-ci sans aucune honntet terrestre, ceux-l privs de tout cleste ornement. Voyez pourtant les Gentils, quand ils sculptent, je ne dis pas Diane vtue, mais
divin ne daig-nez pas entretenir
;
quand
:
ils lui font recouqui ne sauraient se dcouvrir et pourtant voici qu'un chrtien, pour estimer l'art au-dessus del foi, tient pour un spectacle mag"nifique de ne point observer pareille dcence envers les
ils
figurent
vrir avec la
main
les parties
(i) Cardin[a]]i
peut-cire
dine, gond, ou
mme
I
I
LES LETTRES
2^3
martyrs
saisir
que
le
geste de faire
un homme par ses parties g-nitales, tellement qu'une maison mal fame fermerait tout entire les veux pour ne le point voir. C'est dans un bain de plaisir, non dans le cur souverain, que votre style convenait. Ce
serait mX)indre forfait de
ne point croire, que de rabaisser en cette g-uise la croyance chez autrui. Maisjusqu'ici
Texcellence de si tmraires merveilles ne demeura point impunie, puisqu'elles ont fait ce miracle de tuer votre
renomme. Aussi, ressuscitez votre nom en faisant des flammes de feu avec les parties honteuses des damns,
transmuez celles des bienheureux en rayons de soleil, ou bien imitez la modestie des Florentins, laquelle dissimule sous de belles feuilles d'or celles de leur beau Colosse et pourtant il est plac sur une place publique et non en un lieu sacr. Or, que Dieu vous le pardonne, aussi vrai que ce que je dis l n'est point inspir par le ressentiment que j'eus de n'avoir point ce que je dsirais, car de satisfaire aux envois auxquels vous vous
et
:
moi, vous auriez dil pourvoir cela avec toute la sollicitude possible, d'autant qu'en ag-issant ainsi vous eussiez apais l'envie, laquelle prtend que seuls les Gherardi et les Tomai peuvent user de vous. Mais si le trsor que Jules (i) vous laissa pour celte fin que ses restes fussent placs dansie spulcre de vos sculptures, n'a pas t bastant faire que vous observiez
tiez eng-ag envers
soit
vos promesses, que puis-je esprer, moi ? Bipn .que ce non point votre ing-ratitude, ni votre avarice, pein-
tre
fameux, mais la grce et le mrite du Pasteur trs grand qui est cause de cela. Attendu que Dieu a voulu que son ternelle renomme vive dans la simplicit de son tombeau, dans son essence propre et non dans l'altire machine d'une spulture faite par le talent de votre ciseau. Toujours est-il que le manquement votre dette
(i)
Jules
II.
2^4
l'aRtIN
VOUS est attribu comme un vol. Mais attendu que nos mes ont plus besoin du sentiment de la dvotion que de la vivacit du dessin, que Dieu inspire la Saintet de
Paul(i), comme il inspira la Batitude de Grgoire, lequel voulut premirement faire disparatre de Rome la parure des superbes statues des idoles, plutt que d'enlelever, grce elles, le respect
d aux humbles
imag-es
des saints. Enfin, si vous eussiez pris conseil, pour composer l'univers, l'abme et le paradis, del g'ioire, de
rhonneur
cle
(2) et
l'ins-
que
le
si-
a lu de mon cru, je m'assure que jamais la nature et tout ce qui reut quelque vertu du ciel ne se fussent repenties que le ciel vous et
illustre,
l'air
qu'aujourd'hui, en mrite suprme, vous avez d'une merveille mais la Providence qui voit tout
;
prendrait soin d'une telle uvre^ jusqu' ce que l'ordre qui rg-it les hmisphres s'y trouvt conserv. De no-
moi
lettre,
tout
ainsi
que
je l'ai
moi-mme mise en
pices,
et
dcidezet
homme
auquel rois
Puisque
(i)
la
Le pape Paul
(2)
M. P. Gauthies.)
LES
i,f.tt:;ks
24i>
donnant votre surhumaine Excellence et le bton et le drapeau de g-nral, gouverneur et chef; puisque, en les
donnant, dis-je, avec la pompe d'un spectacle dig-ne du couronnement de quelque empereur ou quelque roi que ce soit, elle a fait que non seulement tous les peului
au saint empire de cette vie ternelle de Dieu s'en sont rjouis cause de vos nombreuses vertus, mais encore tous les peuples soumis au sceptre de votre glorieuse domination, en un mot la g-nreuse nation italienne; il m'a paru propos, pour publier la prsente comdie, par moi compose votre instance, de la recommander toute socit de personnes honorables, en lui faisant voir le jour dans une si grande occasion d'allgresse universelle et comme, si je ne l'eusse pas fait, je ne pouvais d'aucune autre faon tmoig-ner, au milieu de tous vos honneurs, que je partageais la joie intime de chacun je sais que votre incomprhensible bont me pardonne la faute de l'avoir imprime ici Venise, avant qu'elle s'en soit divertie l-bas Pesaro.Le dernier de mai mdxlv.
ples qui obissent
:
;
AU SANSOVINO
cette question hier au soir pensouper entre trois de vos sculpteurs et peintres, mon cher Jacopo. Les uns voulant que les bauchoirs eussent le pas sur les pinceaux, les autres que les pinceaux le prissent sur les bauchoirs. Dispute eng-ag-e plus de fois, non pas seulement qu'il n'y a de marbres au monde, et de couleurs, mais encore qu'il ne se trouve de fantaisies dans la tte des sculpteurs et des peintres. Chercher mon opinion ta ce sujet, c'est une folie qui canonise la folie. A peine si je sais combien il faut de
dant
246
syllabes
l'artin
vaux
pour organiser un vers; et par ainsi, je ne une question qui est pendante depuis qu'apparat le dessin dans les pierres et sur des
rien pour trancher
toiles...
De dcembre,
Venise, mdliu.
APPENDICE
lien sont
L'Artin a laiss une uvre importante dont les ditions en itanombreuses. La biblio2:raphie de ces ouvrages n'a encore t qu'bauclu'e })ar Brunct, par Gracssc, etc. On espre que l'essai que voici pourra, tout imparfait qu'il soit, rendre quelques services. L'Artin fut prcoce, et au titre de l'uvre mcnlioime ci-aprs, la premire sans doute qu'il ait publie, il est qualifi de jeune
homme
trs fcond .
Opra nova del fecandissimo giovene Pi'etro Aretino zo slramboUi, soiietti, capitoli, epistnle, barzeleite e una desperaia
;
Et
la fin
MCCCCCXI
Ce livre, dcouvert par M. d'Ancona, la Marciana, quand l'Arctin avait 19 ans et qu'il tait Prouse.
fut publi
inter-
^e Jules Romain.
aucune ide de ces gravures, dont il n'existe aucun exemDes fragments ont t, il est vrai, signals e et l, mais jamais leur authenticit ne fut absolument certaine. Nul doute cepcn-
On
n'a
plaire.
2/}8
l'arTIN
dant qu'elles n'aient exist, mais elles ont t poursuivies et dtruites avec tant d'acharnement qu'elles paraissent aujourd'hui dfinitivement perdues. Ces estampes ont-elles paru sans les sonnets de l'Artin ? Un passage curieux d'Ebert {Beschreibung der Knigl. Diblioth. zu Dresden) semble indiquer l'existence d'une dition orig-inale comprenant les sonnets et les gravures. D'autre part, dans une lettre du g novembre 1027, l'Artin, remerciant Cesare Fregoso, qui lui avait envoy
pour sa beaut et parce que je la dsirais avec autant d'ardeur que peut-tre votre Seigneurie illustrissime,
Je
lui ai fait fte, et
laquelle je me recommande, dsire le livre des sonnets et des figures luxurieuses que je lui envoie en chang-e. En fait il est fort possible que les estampes aient paru sans les sonnets.
D'aprs Ebert, la Bibliothque royale de Dresde aurait possd jusqu'en 1871 un exemplaire des Sonetti lussuriosi avec des dessins de Jules Romain (Gracsse, qui cite Ebert, donne aux termes dessins le sens de gravures d'aprs les dessins).
Mais
1er,
le
gouvernement
fit
bibliothcaire, put
cependant
copier
les
sonnets.
Etait-ce
M. Canzun
Romain ou
un imprim? S'agit-il des dessins originaux de Jules des estampes de Marc-Antoine? S'agit-il simplement, ce qui est probable, d'un tout autre livre ? On ne sait, et personne, que je sache, n'a mme vu si les sonnets copis par M. Canzler sont bien les Sonetti lussuriosi.
manusci-it ou
Il semble dmontr que les Sonneti n'ont pas t gravs au bas des planches de Marc-Antoine, ni mme imprims en Italie du vivant de l'Artin. La premire mention qui ait t faite des
Sonnetti lussuriosi
d'un livre imprim parut dans les Memori historico-critilibrorum rariorum d'Auguste Beyer. (Dresde et Leipzig, 1784, in-8.) Il y est dit que ce petit livre, in- 12 (s, 1. n. d.), contient 28 ff., dont le recto seul est imprim. L'ouvrage ne contient qu'une gravure qui est libre et sert de frontispice.
comme
cce
n. d.,
figurant au catalogue
de Boze.
l'a
De Bure
rap-
porte
a
On
croit
jninois eue en sa
APPENDICE
2^9
possession et ne l'avait annonce dans son catalogue que sur l'espraiicc qu'il avait
...
reli
comme
en maroquin roug-e et cot i.ooo francs, ce qui serait bien singulier s'il tait lout fait imaginaire; une autre raison nous incline croire que les sonnets ont pu porter le titre de Corona de i Cazzi, c'est le titre qu'on leur a donn en les rimprimant dans le Recueil du Cosmopolite (1785, in-8). Ce recueil, exclusivement compos de pices franaises l'exception des Sonetti, des Dubhii amorosi, et du Capitolo del Fovno, de IMgr dlia Casa, a t, chacun diteurs, typographes et correcteurs, le sait, imprim en France tous ceux qui ont concouru son excution ignoraient compltement ritalien, comme il n'appert que trop du nombre considrable de mots qu'ils ont estropis, notamment en prenant presque toujours les s longues pour des f^ et rciproquement. Ils ont d se borner copier de leur mieux un livre qu'ils avaient entre les mains. Dans Corona di Cazzi, Sonefti (sic) ce Recueil, les Sonnets sont intituls Dioi Aretini : Corona di Cazzi est videmment le titre copi sur Sonnetti Divi Aretini, au lieu l'imprim, et qu'on n'a pas invent de Sonnetti dcL diuino Aretino, qu'il faudrait en italien, est un soustitre de mauvais latin imagin par l'diteur qui a cru bien faire. A cela s'est born, sans aucun doute, son intervention, et nous tenons l, exempte de toute retouche, une reproduction exacte d'une des plus anciennes ditions, un texte d'une antiquit certifie par son orthographe archaque du xvi sicle. Bonneau cite mal on ne lit pas dans le Cosmopolite : Sonnetti Divi Aretini, mais Divi Aretini Sonnetti.
;
:
Nodier
(Z)^.cr?/)/jon
raisonnes d'une
jolie collection de livres. Techner, i88/{, in-8), parat avoir t excute, en Suisse, dans le courant
du xviii sicle. compose de 22 ff., dont le premier contient le titre et les autres un Sonnet imprim au recto; le vingt et uriime ne contient qu'un huitain. La marque du papier est un double aigle couCe
livre se
ronn.
Diibbii amorosi,
In 8,
s.
1.
n. d.
tro
Dabbii amorosi, altri Dabbii et Sonetti Aretino. Nclla Stampcria del Forno,
lussnriosi,<\'\ Piealla
corona
de'
cazzi.
Paris, chez Grange, vers 1767, in-i6 de 84 pp. Tous sont tirs sur papier de Hollande.
les
exemp.
25o
l'autin
Diibbj amorosi Altri Dabbj e Sonetti lussuriosi di Piead clero ; in Parigi^ appi^esso Giacomo Girouard nella strada del fine del mondo.
Dabbii amorosi,
MDCCLXXIX.
comme
celle
Cette dition,
tient 22
ff.
mentionne
et dcrite
aux versos blancs. Comme il y manque le Sonnet IV*, Aicide Bonneau pense, non sans raison, que ce sonnet omis par ntoutes les
lets .
aussi dans l'dition dont Nodier fait mention et que deux sont, sauf cette lacune, la reproduction textuelle de l'exemplaire mentionn par A. Beyer, qui avait vingt-trois feuil-
gligence
manque
Dubbj amorosi
altri
dabbj
in
privilegio di
In-i8 (Paris; Girouard), 68 pp., 5o ex. sur pap. vlin et un ex. sur la fin :1e sonpap. bleu. (Marque sur le titre un panier fleuri.
:
net de Nicolo Franco, alV Arcidivino Pietro Aretino, FlageiiodeCazzi et une pice de vers Anacreontica estemporanea a Giovan
:
Gustonede
iJ/ec^/ci, attribue
au Grudeli ou au Buondelmonte.
Hecaeil de Pices choisies rassembles par les soins du Cosmopolite Anconne chez Vriel Bandant l'enseigne de la
Libert,
MDCCXXV.
par
le
Ce
recueil, form
duc d'Aiguillon
et
imprim par
lui et
chez
12 exemplaires, il contient La Corona di Gazzi, Diui Aretini Sonneiti, o se trouve, et dans son ordre logique, le meilleur texte que l'on connaisse des sonnets d'Artin.
Ce recueil a t imprim plusieurs fois, notamment en i835 (?) avec quelques diffrences dans le texte, mais insignifiantes et en deux volumes chez Gay. On a aussi tir part
;
italiennes extraites
In-^ de v-9g pp. tir 76 ex., i)ar Gay, inq)rim Bruxelles cette ville en octobre i805.
efc
APPENDICE
25 1
ita-
authentique, et traduction littrale par le traducteur des Raqionamenti, avec une notice sur les Sonnets luxurieux, l'poque de leur composition, les rapports de
l'Artin avec la
Romain
In-8,
gravs par
Cour de Rome et sur les dessins de Jules Marc Antoine. Imprim cent exemplaiet noir et notice),
une
p.
cxx pp. (faux-titre, titre rouge non chillVe (table des matires).
porte
et
:
79 pp. et
Bonneau. Tir 100 exemp. numrots, plus quelques exemp. de passe numrots 100 a, 100 b, etc. (Typ. A. H. Bcus.) La notice et la traduction sont d'Alcide Bonneau, le tout a t rl'introduction
La couverture La traduction
Muse
secret
du Bibliophile
n 2.
sont d'Alcide
Les Sonnets luxurieux de l'Artin [Sonetti lussuriosi di texte italien avec traduction franaise en regard prcde de la notice et des commentaires d'Isidore Liseux et publis pour la premire fois avec la suite complte des dessins de Jules Romain d'aprs des documents originaux.
Pietro Aretino),
Paris, C. Hirsch, 1904.
In-4'' oblong, xii-i5i pp. pi. en noir et en couleurs; les exemp. ord. comportent 33 planches, un frontispice, 16 fac-similes d'un calque (ou soi-disant calque) des qravures de Marc Antoine d'aprs Jules
Romain, 16 planches reproduisant les mmes dessins retouchs et moderniss. Il y a des exemplaires comportant en outre 16 planches reproduisant les mmes dessins retouchs et moderniss en couleur. lOn conserve l'Enfer de la Bibliothque Nationale un exemplaire de cette dernire sorte.) Tir 3oo exemp. Celte dition est la mme que celle de Liseux, elle (Comporte des dessins que je crois excuts d'aprs la description des g-rav. de Marc Antoine donne par Bonneau dans sa notice (elle n'est pas de Liseux, malgr ce qu'en pense l'd. Hirsch.) 11 y a de plus, une en France des soi-disant petite notice relatant la dcouverte
calques.
LES RAGIONAMENTI
On comprend, sous le nom de Raqionamenti, les Dialogues piitanesques diviss en deux parties et en six journes, et deux autres dialogues appels respectivement le Dialogue des cours et le Dialo-
jeu, que l'on a appel aussi les Caries parlantes; on a voulu de ces deux dialogues et du Zoppino une troisime partie des Dialogues puianesques ou Caprices d'A/'l in. Ma\s le Dialogue des cours et le Dialogue du jeu sont des uvres distinctes, qui n'ont rien voir avec les fameux Caprices; quant au Zoppino, il parat certain qu'on ne doit plus l'attribuer l'Artin. Le troisime dialogue a t traduit en espagnol par Francisco Xuars ; Coloquio de las Damas... 1607 (in-12) et d'aprs la trad. espagnole en latin Pornodidascalus seu colloguium muliebre, par Gaspard Barth, i6'io, in-8. 11 y a une Irad. franaise (du xvi= sicle) o les interlocutrices sont nommes Las et Lamia. Il y a aussi une traduction latine-franaise par Bonneau des six dialogues, publie par Liseux avant la traduction intgrale avec le texte italien et d'aprs laquelle ont t faites les traductions anglaise [Liseux) et allemande [Insel Verlag).
gue du
faire
sotto
Ragionamento dlia Nanna e della Antonia fatto in Roma una ficaia, composto dal divino Aretino per suo capricio
i
a correttione de
donne.
A la
Egli
fin: si
datto
aile
stampe
di
queste
mese
di
aprile,
MDXXXIIIl,
Opra nova
scuopore
inganni, trularie, strigarie, calcagnarie robarie. Et la gran fintion et dolce paroline ch'usano le cortigiane a voi dir ta-
pune, per ingannar H semplici gioveni per la quai causa i poverelli per clo restano appesi corne ucelli al vischio. E tal fin CD vitupio et dishonor posli al basso co la borsa leggiera. Et chi questa opra leggera gli sera uno especchio el a potersi schilFar dalle lor iganatrice mani.
la fin
Napoli, 1534.
In-8, lettres rondes.
Le titre est impr. en rouge et noir dans une bordure grave en bois. Le livre comprend 4 cahiers de 8 fF., sign. A.-D. C'est le troisime dialogue des Rag.
On
cite
Napoli, d535.
In-8.
APPENDICE
Et une troisime faite Venise.
a55
1335.
In-8.
Dialogo di M. Pietro Aretino, nel quale la Nanna il primo giorno inseg'iia a la Pippa sua fgliola a esser puttana; nel seconde g"li conta i tradimenti che fanno gli huomini a le meschine che gli credono nel terzo et ultimo la Nanna e la Pippa sedendo nel orto ascoltano la comare e la balia che raiionano de la ruffianeria. Impressa in Turino, P.-M.-L., 1336.
;
In-8, siga.
A. -T.
Elle est
imprime avec
les
mmes
caract. que la
prcd., c'est pourquoi Brunet la croit aussi impr. Venise. 11 existe des exemplaires avec un nouveau front, dat.
Vinegia, 13-40.
Dialogo
Ru-
ch'usano le Corteggione per inq-annare li simplici huomini che de loro s'innamorano. Entitolala la Nanna e Antonia, Parigi.
batie, tradimenti
i44 ff'j non chiff., sign. A. -S., rare, vol. attrib. par In-8, s. d Ebert une presse de Rome. Il contient la 2^ journe de la i" partie des Rag. et les 3 journes de la 2^ partie.
,
Ragionamento
cielo,
quattro suoi
di
mondo,
quella
de
Nova. 1338.
ff.,
In-8, 78
11
y a deux rimpress.
nel,
Impr.
mdxxxviii.
MDXXXIX.
In-8., 55
ff.,
13-41.
^ ln-8,
56
ff.
Dialogo nel quale f^i parla del gioco, ^ero/e, N'inegia, pcr Giovanni, 1343.
ln-8.
16
Dialogo nel quels si parla del gioco con moral i ta pia^ gevole, Vinegia, per Bartolomeo delto l'Imperador, 4544.
In-8, 127
ff.
Le carte parlanii, dialog-o., Yen., per Bartol. detto l'Impe. radore ad inslanza di M. Cessa, 4544.
In-8, 137
ff.
et
f.
bl.
La prima parte de Ragionamenti di M. Pietro Aretino cognominato il Flagello de Prencipi, il Veritiero e'I Divino
divisa in tre giornate la contenenza de le quali si
la facciata
porra ne seguente veritas odium parit mdlxxxiui commento di scr Agresto da Ficaruolo sopra la prima ficata del Padre SIceo con la diceria de Nasi. La Seconda parte De Ragionamenti di M. Pietro Aretino. Cognominato il Flagello de Prencipi, il verifiero, et divino, Divisa in tre giornale.La contenenza de le qualisi porta ne la facciata seguente. Doppo le quali habbiamo aggiunto il piacevol ragonamento dal Zoppino, composto da questo medesimo Autore, persuo piacere. Veritas odium parit et la Stampata, con buona licenza (toltami) nella nobil fin on lit
:
citta
di
Bengodi ne
l'Italia arelt
il
viggesimo
alphabti(iuement.
A) L'dition, dont l'intitul vient d'tre donn ou dition A, comprend part. \, 198 pages, part. II, 889 pages, Commento de ser A gretso[sic] 1 18 pp. 29 lignes, a t contrefaite au xvii* sicle. Dans cette copie exacte pour la typographie et le nombre de pages.quelques
fautes et
t corriges.
Et
la fin,
Finisce la Seconda parte de Ragionamenti di M. Pietro Aretino, cogQominalo il Flagello de Prencipi, il Vcritierio e'I
Divino.
APPENDICE
tSS
Bengodi, ne
d'ottobre.
Stampati, con buona licenza (toltami) nella nobil citt di l'Italia allre voile piu felice, il viggesimo primo
gnral comporte un titre en deux lignes dans l'dition de i584 et un titre en trois lignes dans l'dition de 1649. Voici encore la description de l'dition B de i584 !in-i2).
B)
Tome
I,
228
pp.Commento
II,
di ser
plus grands.
Tome
4oi pp.
La prima parte de Ragionamenti di M. Pietro Aretino, cognominato il Flagello de prencipi,il verifiero,e'l divine, divisa
in tre giornate la contenenza de le qvali si porra
ne la facciata seguenle mdxxxliiii. La seconda parte de Ragionamenti di M. Pietro Aretino coguominato il flagello de preucij)i, il veretiero, el divine, divisa in Ire giornate, la coulenenza de le qvali si porra ne la Facciata segvente. Doppo le quali habbiamo aggiunto il piaceuol ragionamento del Zoppino composte da questo medesinio autore per suo piacere.
Veritas
Et
la fin
odium
on bt
:
parit.
M. Pietro AreVeritiero,
e'i
cognominato
il
Flagello de prencipi,
il
Divino.
piu
Stampata con buona licenza (toltami) ne l'Italia altre volte t'elice, il viggesimo primo d'Octobre, MDXXXIV.
C)
Tome
D) Tomel, 6
entre les
Tome II, pp. ig5-422. deprf., 219 pp. Tome 11,3 fF. deprf., 878 pp., 2" et 3* tomes sont 2 t. blancs. Tome III, 6 ff. de prf. et
I,
p, i-igAff.
116 pp.
del diuino Aredue raggionamenti cio de le Corti, e del Giaoco, cosa morale e bella Veritas odium parit. Apresso Gio. Andr. del Melagrano, 1589.
tino ne la quale si conten^ono,
In-8, 3
ff.
La
Ragionamenti
prf., 202
ff.
chiff. et
f.
non
chiff., les
66prem.
ff.
con-
2 56
tiennent
le
l'artin
Rag. de
le
Corti
et les autres le
un
titre particulier.
qiiale si
[sic].
Raggionamento del divino Pietro Arelino ne parla del gioco con moralita piacevole, M. D. XLXXIX
di Partenio Etiro net quale Y enetia, per
'
Le
si
M. Ginammi, 4650.
In-8.
piacevoli ragionamenti di Pietro Aretino... nova editione, con certe poslille, che spianano et dichiarano evidemente i luoghi e le parole pi oscure e pi difficili deir opra. La Pattana errante^ overo dialogo di Madalena e Giulia, Cosmopoli, 4660.
Capricciosi
(Amsterdam, Elzvir ou Leyde, Elzvier). Edition avec des marginales qui n'ont pas grand intrt. Partie I, pp. I-I74' Partie II, pp. l'jb-li^iS. Rag. del Zoppino, pp.4i9-45i. Comm.di ser Agresto, pp. 452-54 1 La Pattana errante, overo dialogo di Madalena e Giulia, 38 pp. (c'est le Dialogue en prose qui n'est pas d'Arlin). Il y a des exemp. sans cette fausse Pattana errante et d'autres avec une contrefaon de 54 TV-, contenant cette pice en caractres
In-8
;
notes
plus gros.
la fin
(mais avant
la
Pattana errante), on
lit
tino,
Finisce la seconda Parte de ragionamenti di M. Pietro Arecognominato il flagello de Principi, il veritiero e'I divino
Stampata con buona licenza (toltami(l) ) nella nobil citta di Bengodi, ne l'Italia alLre vulte pi felice, il viggesimo primo
d'octobre m.d.lxxxiv.
Et en marge
4.
Il
:
portant
la
mme
date,
entire.
d. se distingue par la forme allonge de la lettre Z employe dans les notes marginales en caractre italique, et par une variante de la 282 page o la dernire ligne de la note
La premire
donne
la
la copie
ajoute
le
mot
Les Ragionamenti ou Dialogues du Divin Pietro Arelino. Texte italien et traduction complte par le traducteur des Dialogues de Lui sa Sigea, avec une rduction du portrait
APPENDICE
57
de l'Artin peint par le Titien et grav par Marc-Antoine. Imprim cent exemplaires pour Isidore Lisieux et ses amis. Paris, 1882.
6 vol. in-8 (Impr. Ch. Unsiner).
I xliii, pp. (faux-litre, rouge et noir, avant-propos, avertissement, Le vieil imprimeur Barbagrig-ia et Pietro Aretino son sapajou ), et 109 pp., contient la Vie des Religieuses.
:
Tome
Tome
Vie des
II
le
faux-titre
et
le titre,
contient la
Femmes maries.
III
:
Tome
,
Cour tisanes.
Tome IV
:
xvirpp. (faux-titre,
272 pp., et
f.n.
(nom de l'imprimenr), contient V Education de la Pippa. Tome V 268 pp. y compris le faux-titre et le titre, plus un carton pr. les pages 3-6 du tome I, contient les Roueries des Hommes.
ch.
Tome VI 3 ff (faux-tiire et titre), 286 pp et i f. v. ch. (table des matires des six volumes et l'Achev d'imprimeur). Tir 100 exemp. numrots, plus quelques exemplaires dpasse
:
numrots 100
a,
100
b, etc.
POEMES PUTANESQUES
Deux des pomes patanesques o l'Artin a tout au moins mis la main ont t attribus par lui-mme Lorenzo Veniero qui en prit la responsabilit. Les diteurs ont plus tard attribue la Patlana errante et la Zajfetta MafFeo Veniero, fils de Lorenzo. Pour la Tari (fa, on en a ddi la paternit et lArtin et aux Veniero. Mais
le
Flau des Princes parat y avoir aussi rpandu des traits de son
esprit
joyeux
et
caustique.
La Pattana
In-8, 5
ff.
Ma ffeo Veniero,
II
quatre
i'autore
y aune d. de i53i (Venise), et une de 1587, antrieures celle que nous dcrivons, mais on n'en cite point d'exemcroit qu'il
On
Le nom de Maf. Veniero est mis l parce qu'il est possible que cet ecclsiastique, fils de Lorenzo, se soit attribu ce pome dont il n'tait pas l'auteur Au demeurant, Maffeo Veniero, qui fut archevque de Corfou, composa dans sa jeunesse un certain nombre de pomes dont la Strazzosa est d'un burlesque qui contient un lyrisme vritable. La Pattana errante aurait aussi paru la suite des Posie da /"uoco..., Lucerna, 1601, in-12. Cette rimpression
plaire.
258
l'artin
contiendrait, d'aprs de Bure, quelques augmentations, L'd. de i53i contiendrait sept cahiers de signatures A. -G., chaque signature
tant de huit feuillets, sauf la dernire, qui en aurait six. La Puttana
finit
au second
feuillet
de
la signature E,,
o commence
la Zaffetta'
errante^ Veniero, gentilhomme vnitien (xvie sicle), littralement traduit, texte italien en regard. Paris, Isidore Liseux, diteur quai Malaquais, n 5, 1883.
noir, xxiii-iSg pp. i f. blanc, couv. imprime. Nouvelle collection elzviriennek i5o ex., numr. imp. Unsinger. Notice et trad. d'Alcide Bonneau.
La Paiiana
pome en quatre
chants, de Lorenzo
Titre en rouge et
la
De
La Zajeita,
i6
le
fF.
dit
Maf. Ven.
et
non chif., comprenant le titre orn, le port, de Maf. Ven. pome en caractre ital. ^V. l'article sur la Puttana.)
La Za^etta,
In-8 (xvi et 79 pp.) Cette d., qui fait partie del Recc. di rariss. opuscoli italiani
a t tire 100 ex. seulement, dont go sur pap. verg pap. de Hollande.
et
10
sur
Le trente et un de la Zaffetta^ pome de Lorenzo Veniero, gentilhomme vnitien (xvie sicle), littralement traduit, texte italien en regard. Paris, Isidore Liseux, diteur, quai Malaquais, no 5, 1883.
Titre rouge et noir, xv-79 pp., imp. Unsinger, couv. imprime,
Tariffa dlie puttane overo ragionamento del forestire e del gentiVhuomo : nel quale si dinota il prezzo e la qualita di tutte le Cortegiane di Vinezia ; col nome dlie Rufjane: et alcune novelle piacevoli da ridert faite da alcane di queste famose signore a gli suoi amrosi [In terza rima).
la fin:
ne
M. Deschamps
Venise.
le
APPENDTCE
25g
sicle,
La Tariffa
italien et
dlie Puttane
di Venegia, xvi
texte
MalaquaiSj no 5, 1883.
la collection
noir, vin-87 PP-> couv.. impr., imp. Unsinger. De Elzvirienne i5o ex. numr. Intr. et trad. d'Alcide Bonneau sur une copie de Tricotel. A la page i se trouve le titre
Titre roue et
Tariffa dlie Puttane overo Racfionamenio del Forestire e del gentilhnomo : ne quale si dinota il prezzo et laqualita di tutte le cortigianedi Venegia; col nome dlie Ruffians e alcune novelle fatle de alcune di queste famose signore agli suoi amorosi.
entier
:
THTRE
Le thtre d'Artin est peut-tre ce qui honore le plus son talent. Ses comdies sont parmi les meilleures qui aient t crites en italien jusqu' Goldoni, et son Orazia ou Tragdie d'Horace, la plus parfaite tragdie dont l'Italie puisse se vanter. Le bibliophile Jacob a publi une traduction de quatre comdies d'Artin (Paris, Gosse1845) et Bonneau (chez Liseux) a aussi donn des traductions de comdies artinesques. 11 reste traduire VOrazia et l'Hypocrite. Ajoutons qu'il y a du thtre arlinien des ditions classi({ucs modernes parues en italien et qui ne figurent pas dans cette bibliogralin,
phie.
// J^/are5ca/co...,
In-4.
//
Marescalco.
1.
,,
1534.
In-8 (s.
//
ni. n.
d'impr.)
//
*
Marescalco..
(s. 1.)
.,
\bZ^.
In-8
//
In-8.
//
In-8.
Jl
ln-8.
afio
L ARETIN
H
li
In-8.
In-8.
//
In-8.
// Marescalco... i 1588.
In-8,
s.
1.
ni
nom
d'impr.
le litre
de
et en
retranchant plu-
Comedia
4533.
ln-4.
intitolata,
il
'
Comedia
In-8.
intitolata, il Filosofo,
Comeda
In-8.
Comedia
Contrefaon de
In-12.
Elle a t publie par Jac. Doronetti, qui l'attribue Luigi
sillo,
Tan-
La
In-4.
La
APPENDICE
261
La
Corfigiana...,
comcdia
di
Lu La La
Cortigianu..., 1537.
I.
In-8, s.
Cortigiana..., 1539,
In-8.
In-8.
La
La
Cortigiana..., 1545.
1.
In-8, s.
In-8.
La Cortigiana, commedia
pata novamente..., Vinegia,
In- 12
d.
G. Giolito, 1550.
d.
le titre
:
Lo
In-i2.
Elle a
l'a
mutile
et attri-
Av.
portrait d'Artin.
le titre
Vicenza, 1601.
par Jac. Doronetti, qui l'attribue
h
In-i2,
Elle a t publie
Luigi Tan16.
aCa
sillo,
L*ARBTIN
en chang^eant
le
nom
La
In-i2.
La Talanta,
In~a
La
In-i2,
Elle a
il
et l'Ipo
dlia
Quattro comdie... nouellamente ritornate, per mezzo stampa, a luce, a richiesta de conoscitopi di lor valore,
ou
in-i6, 8
1560.
In-8
ff.
de prel.
et
titre
particulier
Mares-
Les trois comdies, intitules il Filosofo, il Mariscalco et il Ip crito, ont t reproduites par Jac. Doronetti, qui les a attribues Luigi Tansillo, en changeant les titres (voir l'art, consacr chaque comdie), les noms des personnages et en supprimant certains passages libres. Elles parurent d'abord sparment, en i6oi et ensemble
:
...
Vicenza, 1610.
Forianio...
...
Zeno, dans ses Letere, vol. VI, p. 4oi, assure que la comdie imprime sous le nom de Vinc. Giusli et intitule /^or/an/o appartient aussi l'Artin.
La Horaiia,
1546.
In-8.
di
Giolito,
APPENDICE
2G3
La
//oraiia, di messer
In-i2, 53
ff.
chiffr.
tragedia di M. Pietro Aretino. Terza edizione da quella rarissima di ViDeia appresso Gabriel Giolito, 1549 (publicata daA. G. G. Gallelti) si ag-giungono alcune sue leltere ed altre illustrazioni. Firenze, L. Molini,
tratta
La Orazia,
1855.
In-ia.
Esortatione de la pace tra llmperdore et il Re di Francia composilione di messer Pietro Aretino. In Roma per Lodovico Vicentinoet Laurentio Perugino nel MDXXIII.
In-4, i4
ff.,
Canzon
in
Laude
del
Datario.
Compositionedcl preclaro
la fin
Stampata in
Peruiiino.
In-4, 4
ff-, s.
Roma
da Lodovici Vincentino
Laurentio
la morte de II divino Pietro Aretino a lo imperadore ne duca d'Urbino, Roma, stamp. per A Blado, 4530.
In-8.
Due primi
In-4,
s.
d.
Dclle
canti,
In-8,s.
l<j
grime d'Angelica
ni
di
1538.
1.
nom d'imprimeur.
L ARETIN
Bellono di
Y tnezia,
1541.
nom
d'imprimeur.
M. Ginammi, 1630.
Il
In-24.La Sirena est un petit pome la louange d'Angela Serena. avait paru Venise avec les Strambotti cits ci-dessous.
Strambotti alla Villanesca; Freneticati da la Qaartana de l'Aretino, con le stanze de la Serena appresso in comparatione de gli stili, Venezia, Marcolini, 1544.
In-8. Imitation en
langage rustique de
la
Beca de L. Mdicis
et
de
la
Nencia de L.
...
Pulci.
Marphisa..,,
dition, publie l'insu de l'auteur et trs
1"
incorrectement,
Ancone,
Tre primi canti di Marfisa del divino Pietro Aretino, nuovamente stampati et historiati, Vinegia, stamp. per N.
d'Aristotile detto Zoppino, 1535.
In-8. Avait aussi
Sirena
et
Al gran Marcheso
phisa
In-4,
s.
1.
del
sign.
A.-E. Le second feuillet du dernier cahier porte par erreur signature E iii au lieu de E ii.
...
In-4, s.
n. d.
APPKvniCK
265
avec gr. en bois, lettres italiques. Rimpression des deux premiers chants de la Marjsa, auxquels
n.
,
est
Tre primi canti di battaglia del Divino Pietro Aretino nuovamente stampati e historiati, Venezia..., 1535.
ln-8.
Tre primi canti di battaglia del Divino Pietro Aretino nuovamente stampati e historiati, Venezia, Zoppino, 1537.
I11-8,
Tre primi canti di battaglia del Divino Aretino..., Venezia, Gio. Andra Vanassore ditto Giiadagnino et Florio
iratelli,
1544.
et le portrait
In-8,
d'Artin sur
le
frontispice.
U Italie
du XVI^
sicle. L'Artin,
1
in-12.
On
trouve
ma-
au moins
est
de l'Artin.
en prose
croit. Il a
Le Flau des Princes a crit moins de satires qu'on ne compos quelques parodies des pomes chevaleresques si
fort
mode
en prose, mais ces crits n'ont pas aujourd'hui l'importance qu'ils pouvaient avoir l'poque. L'Artin a compos d'autres ouvrages qui sauveront sa mmoire...
n. d.
A
e
la fin
Stampato ne
la
da
la citta in
casa
non
di
266
L AaiLTlN
de Gaetano Romagnoli (con una nota di Giammaria Mazzuchelli traita dalla vitadi Pietro Aretino). Bologna, G. Romagnoli, 1868.
In-8.
leggere,
In-8,
Astolfeide del divino Pietro Aretino opra delettevole da che contiene la vita e fatti de tutti li paladini di
s.
1.
Francia...
n. d. n.
nom
d'impr., 20
ff.
On
die des
la
pomes chevaleresques que l'exemplaire de Paris, conserv Bibliothque Nationale. Ce pome est inachev.
e del Bestiale albi-
celebrata nella academia degli Intronati a Siena. In-4, s. d., avec 3 fig:. en bois au nombre desquelles le portrait de l'auteur. Le pome en octaves de Giov. Aberto Albicante, qui donna lieu VAbaitimenio, est intitul Historia de la guerra del Piemonte. (Milan, i538, in-4).
Abattimento poetico
Piemonte, e
la
pace loro,
Combattimento poetico
celebrata nella
In-8, s.
1.
pace loro,
Copitoli dei signori di messer di Pietro Aretino, di messer Lodovico Dolce, di xM. Francerco Sansovino e d'altri Vinegia aculissimi ingegni per curta di Navone fratelli, 1540.
In-8, 55
ff.,
plus
ff.
dans un Capitolo.
Capitoli di
In-8,
s.
S.
Pietro
Aretino, di
Lodovico
Dolce, di
M. Francesso Sansovino
1.
d'altri
di
Franc. Sansovino
Capitoli d P. Aretino,
rPF.NiMCR
267
di altri acutissimi
//
Mangantllo...
1.
In-i2, s,
n. d, (vers
ont t
parmi lesquels
l'Artin,
Fano, etc. Il a t rimp. Paris, en 1860, in-8, 100 exempl. Hors commerce. Manganello signifie dre avec un sens obscne.
le
indits d'Artin
Uno pronostico
Ce pampblet
Bergamo, 1900.
giiidicii
M. Luzio,
du xvi* sicle, copi par un Allemand conserv Vienne, en Autriche. Il est possible qu'il y ait eu une dition ancienne de ce Pronostic, maison n'en connat aucun exemplaire. Voici le titre du pamphlet qui est ddi Alla Sacra Maesia Christanissima :
du
nom
UVRES SPIRITUELLES
ils
Les ouvrages religieux de l'Artin ont joui d'une grande vogue, ne lui ont point valu ce chapeau de cardinal qu'il ambitionnait, mais ils ont certainement forc les dvots rvrer un crivain aussi difiant. 11 est vrai que le nom de Pietro Aretino paraissant trop peu recommandnble, la plupart des rimpressions de ces pieu-'
ses lucubrations
indiquent
comme
auteur
Tanagramme Parlcnio
208
l'artin
indique quelques passages scabreux ou sing-uliers dans ces mais ils n'ont ni l'importance ni l'impit (ju'on leur attri-
On
bue.
ouvrag-es,
nella
Genesi, di M. Pietro Aretino, con la visione di Noe quae sivedi i misterii de! testamento vecchio e delnuovo... Venetia, impr. per F.Marcolini, 1538.
//
In-8.
// Genesi, di Pietro Aretino con la visione de Noe ne la qualde side i misterii del testamento vecchio e del nuovo,
4539.
In-8,
s. 1.
//
454i.
// Genesi, di
In-8.
M. Pietro
// Genesi,
con
la visione
H genesi,
fF.,
rhana-
3 tomes en
registre.
vol. in-4, 4
ff-
prl., 8o, 82 et 33
et
f.
pour
le
M. Ginammi,
1629.
In-24.
APPF.NDICE
69
VHiimanUa
In-8.
Ne
I quattro libri de la Hamanita di Chriato... novamente stampata, Vinegia, Fr. Marcolini, MDXXXIX.
In-8,
119
fF.
V Humaniia di
In-8.
Dell'
In-24.
Hamanita
Etiro..,, Venetia,
Dell'
Etiro..
Hamanita
Venetia
del Fliglialo di
Dio
.,
..,
1633.
In-24.
DdV Hamanita del Fligliuolo di Dio tri libri ire, Partenio Etiro..., Venetia, 16 io.
In-i2.
di
La Passions de
In-4.
e l'altra al christianissimo.
la fin
Ho
falto
imprimere
qiieste cose
iti
vergine
La Passions di
l'altra al
Marcolini, 1536.
nier de 6
In-8, 9 cahiers sig-ns A. J., chacun de 8 ff., <[ui finit par cette souscr.
t.,
Per testimonio
la
Areda Forli ha ristampato in Vinegia prsente opra, del mese genaro MDXXXVI.
dlia bonta et dlia cortesia del divino
270
L*AUTIN
(j/wm..., Bologna..., 1535.
La Passione de
!n-8.
Pietro Aretino,
chiffrs et
f,
pour
le
registre.
Gli sette salmi dlia penitentia, dl David, impr. per composti per Pietro Aretino, Vinegia, impr. per Franc. Marcolini
da
Forli, 1536.
In-4.
n. d., in-8,
avec
8,
le
non
chif-
A. -F. par
ayant
le
dernier
1627.
In-i2.
eia,
In-16.
APPENDICE
Gli sette salmi di peniterUia, Lione, 1648.
In-io.
271
Parafrasi sopra
In-24.
sette
Aretino peniito, cio parafrasi sovra i sette salmi deila penitenza di Davide, di nuovo correcto e ristampat, Lione, G. Barbier, 1648.
In-i2.
La
In-8, Venise.
La
In-8.
M. Pietro
La
In-8, s.
Avec un
la
ff.,
lettres itabques.
mme
le cat.
de
la
Vallicre,
sous
la
La ddicace ayant
t signe
du 26 no-
vembre i54o.
La
In-8, s.
n. d.
La
In-8, s.
n. d,
libri
M. Ginammi, 1630.
La
vita di
mente
In-8, vers
italiques.
La
vita di
Tamentc correta
In-8, s.
l.
272
L ARETIN
vita di
La
telli.
Maria
fra-
In-8, s. d.
Vita di
Eliro.
.
.,
Venetia,
tre libri
da Partenio
Vita di
In- 12.
Maria
libri
de Partenio
La
Giouanni de Furrie
les souscrip. et
fratelli
ad
M. Biagio, 1543.
fF.,
Pet. in 8 de 126
ch.
f.
pour
f.
blanc, caract.
Vita di san
ln-24.
Tomaso d'Aqaino,
M. Giouanni, 1618.
Alla
somma
bont di Giulio
III
pontefice...
La
vita di
Maria
Tomaso Aquinate,
del
bcato. Composition di
figliuoli d'Aldo, 1552.
In-4, 4
ff
M. Pietro Aretino
Monte eccelso
huomo
pour
titre et
f.
f.
blanc, 106, 76 et 70
fF.
pour
l'ancre.
RECUEILS PISTOJAIRES
L'Arctin crivait beaucoup de lettres et l'on en dcouvre souvent
d'indites. Toutes n'ont pas encore t runies.
Dlie lettre di
In-fol.
APPENDICE
Dlie lettre di
73
libro
M. Pictro Aretino,
giuiila d altre
nuovamente con
Marcolini, 4538.
XXV.
Deux
fois, in-fl.
Le
lettre [sic] di
M. Piero Aretino,
di
pino, 1338.
In-8.
Le
In-8
lettre di
M.
Le lettre di M. Pictro Aretino, di nuovo con la gionta ristampate e con somma'diligenza ricorrette (libro primo), Venelia,
In-8.
De
G.
le lettre di M. Pietro Aretino libro primo..., Venezia Padovano a spesa di Fed. Torresano d'Asola, 4339.
De
le lettere di
Marcolini, 4338.
In -fol.
De
le lettere
di
M. Pietro Aretino
Marcolini, 4342.
De De De
4G09.
le lettere di
M. Pietro Aretino
le lettere di -AL
1.
In-8,
le lettere
di !\L
In-8.
De
lito,
le lettere di
43iG.
Ia-8.
UjA
l'artiN
le lettere di
De De
M.
In-8.
le
lettere di
Cesano, 1550.
In-8.
Monte,
In 8.
del ma^nanimo sijnore Baldovino de quinto libro de le lettere di M. Pietra Aretino... Vinegia, per Gomin da Trino, 4550.
la
il
Bon ta somma
De
le lettere
di
sesto, Venezia,
Giolito, 1557.
In-8.
Il
lettere di
primo [secondo, terzo, quarto, quinto, sesto [libro de le M. Pietro Aretino, Parigi, Matteo il Maestro, 1609.
mme
anne
et le
tome IV porte
la
y a aussi deux
vol.
de
non
chif.
G. A.
ABREGE DE LA
VIE
DE
PIERRE ARIN
Le morceau qui suit est la traduction abrge de la Vita di P. Avtimo par le comte G. M. Macuchelli {Padova, Comino, in-S^, ij^t-iyo)- E^f-^ ^^t due Dujardin qui la publia sous le pseudonyme de lioispraux {La Haye, J. Neauline,iy5o).On trouve dans cette pice curieuse des choses intressantes. Mais aussi des
erreurs voulues ou non et quelques jugements injustes. C'est avec raison qu'Alcide Bonneau appelle Mazuchelli : Biographe du genre hostile.
Quel homme a prsenter qu'Artin, dans un sicle o les femmes, concourant l'avancement des sciences, apportent dans l'tude cette urbanit qui ne se trouve qu'avec elles S'il eut quelque rputation, ce fut peu aprs la renaissance des lettres, temps o le seul nom d'auteur imprimait du respect. Les yeux, longtemps aveugls par les tnbres de l'ignorance, taient blouis de la moindre lueur aujourd'hui cet homme, qui se nommait Divin est compt au rang des
! :
crivains pitoyables.
Tel est
et le
plat
le sort de ceux qui n'ont de mrite que l'impudence, malheureux talent d'intresser la malignit. Le public se dans l'humiliation de ceux mme qu'il estime. Il court
leur
plume
ses gots
qu'ils travaillaient per la Jame, e no per la fania. Chaque jour dmasque leur ignorance et leurs bvues ils sont le jouet de leur sicle; ils deviendront le mpris de la postrit mais
;
:
276
il
l'autin
ils ien sentent d'autant plus vivement la nque les personnes qui pourraient la soulager par les rcompenses destines aux lettres les en jugent indignes. Plus caustique que capable, et toujours avide, Artin mania avec une effronterie gale l'adulation la plus basse et la satire la plus effrne. Il s'embarrassa peu de mentir et de se contredire. L'intrt dictait ses jugements, et ceux auxquels il devait tout furent maltraits les premiers. Les rponses les plus solides, les reproches les mieux fonds, les affronts, les corrections ne purent temprer sa causticit famlique. I^es chtiments publics avaient accoutum son front l'infamie; il se consolait en se prodiguant des loges, et en dcorant ses
faut vivre, et
cessit
n'avais pu m'empcher d'en rire. Que peut-on imaginer de plus ridicule que de voir un bndictin, un philosophe, un thologien entrer en lice avec Pierre A rtin V Cet homme a sans doute oubli ce qu'il se devait. Il lui reproche son impudence, sa sclratesse, son impit. Qu'avancera- t-il ? Ce n'est ni par les paroles, ni par les crits qu'on peut corriger de pareils personnages; c'est par les lois,
Pierre Artin, et je
peines qu'on doit les refrner (1). semblable doit surprendre le lecteur. Mais s'il est avantageux de conserver la mmoire des grands hommes, il n'est pas inutile de dmasquer ceux qui en ont impos par des moyens condamnables. L'exemple des premiers anime la pratique des vertus; le portrait des autres apprend n
c'est
par
les
Un dbut
pas leur ressembler. C'est dans cette vue que j'ose amener Artin sur la scne. Son style affect, son ignorance, sa prsomption, sa critique mordante, les garements de son gnie, les chtiments qu'il essuya, et la rputation qu'il laisse aprs lui forment un tableau qui n'est pas dplac dans un sicle o l'on court aprs
Letlare raccoUe de Mic/iaele Bruto,p. 359.
(1)
APPENDICE
les crits
377
hardis ou mdisants, o l'on substitue le jargon aux penses, les pointes aux sen-
Les actions frappent plus vivement que les prceptes, et les exemples instruisent plus srement que la thorie la mieux dveloppe. Les jeunes gens apprendront qu'on ne doit jamais sacrifier les murs la fureur de l'esprit; qu'il est dangereux de rduire en problme les principes qui sont la base et la sret des socits; que l'insolence et la prsomption caractrisent l'ignorance et que ceux qui croient se faire un nom par de pareils moyens achtent une rputation quivoque et momentane, par la perte de leur repos et de leur honneur.
ville de Toscane, le 20 avril calomnie et l'erreur jettent quelques nuages sur son origine. Franco lui donne un cord(mnier pour pre (i). Doni, voulant accrditer les conforrr/its qu'il lui cherche avec l'autechrist, le fait sortir d'un moine et d'une nonne (2). Quelques autres, le confondant avec Pierre Bertini, l'ont cru de la famille des Buonamici (3). Mais ses let-
1492.
Son
silence, la
lui sont
crites (5), et le
tmoignage du
gnalogiste de Toscane (6), constatent qu'il tait fils naturel de Luigi Bacci; et si l'on voulait argumenter de l'aflectation
avec laquelle
sumer
qu'il tait
justifier les
avantage de ce qu'il crit on pourrait prbtard adultrin, par le soin qu'il prend de enfants ns dans cet opprobre (7).
il
tire
Franco, Priapeia. Mazzuchelli, Vita d'Aretino, p. f^, n i. Terre moto di Doni, etc. (3) Zilioli, Istor. di Poeti itaL, p. 222. Annot. alla poesia del Crescembeni, t. IV, p. 46, n 33. t. IV, pp. 64, 166, 2i5 ; t. VI, (4) Lettres d'Artin, 1. 1, p. i32 p. 5o, dition de IMalhieu le Matre, Paris, 1669. (5) Lettres t' Artin, t. II, pp. i6, 161, i63. Gammurini, Isiur. geneal. del. famig. nob. T'ose, t. llf, (6)
(i)
(2)
;
p. 329.
E se la mande
Ese pur brami la encressione aqiiisfa conscienza li rimor.ie del adullerio f^-liuoli con la tua bonita, la virtu libre nobilita il natal suo facendo scorJere
(7)
la
coa
le
fa
:
quel
al
t.
I,
p.
ic'5.
278
L*ARiTIN
Sa mre se nommait Tita (4). On la voyait sur le portail de Saint-Pierre d'Arezzo, sous la figure de la Vierge qui reoit l'Annonciation et notre auteur ne manque pas de tirer parti
:
de cette fantaisie du peintre, pour rhabiliter l'honneur de cette femme (2). Elle l'leva sous ses yeux, et, si nous en croyons Grasso (3), il tudia la rhtorique, la philosophie, et fit de grands progrs par la lecture des anciens. Gomment accorder cet loge avec Artin lui-mme, qui nous dit qu'il ne fut l'cole que pour apprendre lire,qu'il n'eut jamais de matre, qu'il ignorait le
ce cas,
ti
il
grec et savait trs peu de latin (4) ?Dans mrite quelque indulgence, et son gnie fait prsu-
les Muses ne l'eussent pas dsavou, s'il et t inidans leur socit. On peut croire que le feu qui le domina tie tarda gure jeter des tincelles mais c'est abuser de la supposition que de lui attribuer, avec Fontanini, l'pitaphe de Sraphin d'Aquila (5), puisqu'il n'avait que neuf ans lorsque ce pote mourut. Il est vrai qu'il fut banni d'Arezzo, presque au sortir de l'enfance, pour un sonnet qu'il ft contre les indulgences (6). Perruggio lui servit d'asile; aussi nomme-t-il cette ne le ville le jardin qui vit fleurir sa jeunesse (7). L'exil rendit pas plus religieux ayant vu dans un lieu frquent un tableau qui reprsentait la Madeleine, les mains tendues aux pieds du Sauveur, il s'y glissa secrtement et peignit un luth
; ;
mer que
(8).
t.
t.
(2)
(3) (4) (5)
Elog. d'Uom.
letter.,
t.
:
I,
p. 243.
;
I,
p.
202
t.
II, p.
24a.
Fontanini a pris le chance sur ce que Toppi, Biblioth. napolitain, mais il entend parler de Berattribue cette pitaphe l'Artin nard Accolti, surnomm l'unico Aretino. (6) Leet. cathol. di Muzio. Vinezia, i57i,p. aSa,
;
(7)
t.
I,
p.
4S
t.
III, p.
46;
t.
V, pp. i34,
871, 3o4.
(^\
zia,
APPENDICE
Si sa vanit
279
exera dans cette
ville,
supprime
le
mtier
le
qu'il
commerce des
savants, lui
donnrent du got pour la lecture (2)., Avec un esprit vif second d'une grande mmoire, il fit des progrs rapides, quoiqu'il ne pt profiter que des livres crits dans sa langue naturelle, et bientt il se crut en tat de se procurer une condition plus avantageuse. Celui qui commence bgayer dans les sciences ne doute de rien, et juge de tout. Le vrai savant sent ce qui lui manque, et se dfie de ses lumires. Artiu n'hsita pas s'exposer au grand jour. 11 partit pour Rome, pied, sans argent et ne possdant que son habit (3). Il fut reu chez Nicolas Chigi, marchand connu par sa magnificence et ses richesses (4). Il sortit de cette maison, o l'on ignore son emploi, pour passer successivement au service de Lon X, et de Jules de Mdicis, son neveu, qui fut pape sous le nom de Clment VII. Sa prsomption lui avait fait imaginer que les biens et les dignits allaient fondre sur sa tte. Bientt les lenteurs .de la cour romaine lassrent sa patience (5). Les sommes considrables qu'il reut de Lon ne purent remplir son avidit, et les dgots dont nous allons parler anantirent sa reconnaissance.
Toutes les qualits minentes de l'esprit se rassemblent rarement dans la mme personne. Le feu fait tort au jugement,
sublimes sont suivis des chutes les plus des imaginations brillantes, qui, semblables l'clair, jettent une lumire que l'il a peine soutenir, et qui s'abme dans une nuit, dont l'clat prcdent redouble l'obscurit. Ce sont ces hauts et ces bas qui ont fait dire quelqu'un, en parlant d'un pote clbre, qu il avait la
et les efforts les plus
le sort
{\]
Rime
piac.
di
Brni. Vinezia,
t.
1609,
p. 12.
IV, p.
44.
Ce dernier
s'est
Crescembeni, tromp, en
t. II,
l'Artin,
pp. 178,
ai6.
(.H)
L'Amnoiirato, Opuscuoli,
t.
II,
p. 274.
t.
(4)
I.
Lettres d'Ariiin,
t.
I,
p.
126;
t.
II,
p.
282
t.
III,
p. 268;
t.
I,
p.
i4;
III,
pp. 86, lS
280.
l'artin
fivre de Vesprit.QQ dsordre influe jusque sur la conduite, et plus d'un sicle a vu l'alliance des talents les plus rares
avec les carts les plus honteux. Jules Romain, le premier de son temps, profanant l'art dans l'^quel il excellait, dessina seize (i) attitudes de la dernire ouscnit, et Marc Raymondi les grava. Clment, qui sigeait alors, ne put s'empcher de svir contre les auteurs d'un scandale d'autant plus grand de leur part qu'ils taient plus connus. La fortune avait pourvu la sret du peintre. Baldassar, comte de Castiglione, venait de l'envoyer Mantoue, o le duc voulait faire peindre une galerie. Le graveur fut tran dans les prisons, et le zle ecclsiastique et t plus loin, sans les sollicitations d'Artin, appuyes du crdit d'Hippolyte, cardinal de Mdicis, qui
obtinrent la libert du prisonnier.
affaire lui
pudence du burin il crivit mme Baptiste Zatti, citoyen de Rome, une ptre apologtique des vers et des figures (2). Alors la perscution se ranima Jean-Matthieu Gibcrti, vque de Vrone, conseiller intime de Clment et son dataire, qui avait t le plus ardent ennemi de Raymondi, redoubla de
: :
vivacit (3), et ce fut la source de cette haine irrconciliable qu'Artin lui voua tant qu'il vcut (4).
de
Notre pote s'tait rfugi dans sa ville natale ds le mois juillet 4524 (5). Fontanini,qui le fait aller Mantoue, d'o
Vasari,
.
(i)
Vite di
in
Pitt., p.
p.
3o2. Balduini,
Comm.
pro(/.
de
VArte intag
Rame,
des Peint.
Vie de
p. 264. Bayle,
Dict.,
mot
Artin (Pierre). Ces deux derniers font monter le nombre des dessins vingt; mais il est constant, par Artin mme, qu'il n'y en eut que seize.
Lettres d'Artin, t. I, p. 288. (2) Cette lettre, que nous venons de citer dans la remarque cidessus, est regarde comme un jeu d'esprit qui ne dut son origine qu' la ncessit de remplir le volume o elle se trouve,
(3) Lettres
(li)
d'Artin
t.
I, p.
288.
l'
Artin,
t.
I,
p. 5,
Lettres d'Artin,
t.
IV, p.
8.
(5)
Artin arriva
Rome
t.
en i5i7. Il fut quatre ans au service de V, p. 6/4), et trois celui de Clment {Let-
APPF.NniCE
281
sortie de
il
le
conduit Venise, a
confondu cette
(1).
Rome
avec
la
l'appela prs de
Artin ne demeura pas longtemps Arezzo. Jeande Mdics lui. Ce capitaine, mcontent de Charles-
Ouint, venait de passer au service de Franois 1er, qui entrait en Italie pour faire valoir les droits qu'il avait, du chef de Valentine Sforce, sa mre, sur le duch de Milan (2). La nature avait dou notre pote de ces talents superficiels qui sduisent, et lorsque la prudence guidait ses dmarches, il tait impossible de rsister aux charmes de son esprit. La disgrce il ne se qu'il venait d'essuyer l'avait rendu plus attentif montra que par ce qu'il avait d'aimable. Mdicis lui donna son cur, et Franois, qui ne le vit qu'en passant, ne put lui
:
refuser sa bienveillance.
Quoique assur de leur protection, il travaillait sa rconciavec le pape. Ses amis sollicitrent si vivement son rappel qu'ils l'obtinrent, et ce fut peu aprs son retour Rome que Mdicis lui crivit une lettre qui finit par ces mots J'oubliais de vous dire qu'hier le roi se plaignit de ce que vous ne m'aviez pas accompagn. Je m'excusai sur la prfrence que vous aviez donne la tranquillit de la cour sur le tumulte du camp. Sa Majest me dit de vous demander de revenir. Je lui rpondis que je ne pouvais me flatter de votre complaisance. Il rpliqua qu'il crirait Sa Saintet de vous l'ordonner. Mon cur ne permet pas de supprimer une conversation qui lie si parfaitement mon intrt au vtre, puisqu'il est vrai que je ne peux vivre sans Arliation
:
tin (3).
Cette lettre ne
tre
fit
aucun
effet
il
fallait
des
motifs
fit
plus
Une
satire qu'il
con-
une cuisinire de Giberti tomba malheureusement entre cette femme, qui, les mains d'Achille de la Volta, amant de trouvant l'auteur dans un endroit cart, lui porta cinq coups de poignard dans la poitrine, lui estropia les mains, et lui
trs d' Artin,
lettre,
.
t.
V,
p. 71
t.
VI, p.
m). Il
I,
p. 7, qu'il
if al.,
y eut quelque
Mila
en i520.
(i)
(3)
lorj.
p. 36'j.
Varchi
(3)
I,
p. 6.
>7.
282
l'artin
coupa le visage. Les fastes potiques nous apprennent que ceux mme dont les ouvrages ont b sceau de l'immortalit ont essuy des corrections un peu vives mais celle-ci passait la raillerie. Artin se plaignit au pape,qui,prvenu par Giberti, rejeta sa requte. Le dni de justice aggrava l'injure. Il jura de punir une cour ingrate, en la privant de sa prsence mais
; ;
il
signala son dpart par les plaintes les plus aigres. Elles lui
une rponse du Bcrni, secrtaire du prlat, dont les termes, quoique fort adoucis, serviront prouver avec quelle dcence les gens de lettres se sont traits dans tous les temps.
attirrent
Ta
Te
langue, qui
le fiel distille,
ou tard vengeur muni d'un poignard Plus tranchant que celui d'Achille. Pauvre, mais insolent esprit Que la mdisance nourrit, Sache qu' quelque excs que ta fureur s'chappe, Le pape sera toujours pape; Et que tu n'es qu'un franc pied plat,
fera trouver tt
Un
Du
Un
Ne
pied dans leb...., l'autre dans l'hpital, De tous les grands tu dis du mal.
fin,
Crains, la
que ceux que ta fureur attaque dans un sale cloaque. Coquin, la crainte du bton, Gomme un chien, te fait fuir mais si rien ne La foudre sur ton dos s'apprte, Qui te fera changer de ton. Si mdire t'est ncessaire. Tu peux parler de tes deux surs. Qui de leur amour mercenaire Aux faquins d'Arezzo font payer les faveurs. Fonde ton espoir sur leur bourse Ce sera dsormais ton unique ressource. Ha des hommes et de Dieu,
te fassent jeter
:
t'arrte,
Nous
De
fait chasser de chaque lieu. verrons dans peu sur le haut d'une chelle, valets de taverne et de crocs entour, Danser au bout d'une ficelle,
te
Te
APPENDICE
283
Au doux
Ou
le
bton, ou
le
couteau,
(i).
Quelques auteurs transportent la scne de cette aventure Venise (2;. Ils racontent qu'Artin n'chappa des mains de son ennemi qu'en se prcipitant dans une g^ondole que les mariniers loignrent aussitt du bord. Mais Volta ne vint Venise qu'en 1530, et pour lors Artin, faisant parade de sentiments fort chrtiens, se raccommoda avec ce mauvais plaisant. Je viens de me rconcilier avec Achille, dit-il, dans la vue seulement d'imiter Jsus-Christ, dont la bont misricordieuse, loin de demander la vengeance son pre, le priait pour le salut de ceux qui le crucifiaient, et j'aime prsent Volta comme mon frre en Dieu (3). Sans esprance du ct de l'glise, Artin se donna tout entier Mdicis, sur l'esprit duquel il poussa si loin son ascendant que son matre le faisait manger (4) et coucher (3) avec lui. Ceux qui connaissaient l'aversion de ce seigneur pour la mdisance avaient peine dmler le motif d'un faible si
dcid.
champs de Mars, la suite de Mdicis, ne pas longtemps sans se ressentir des hasards attachs au mtier (6^. Son Mcne reut devant Governolo une mousquetade qui lui cassa la jambe. Le duc de Mantoue lui refusait un asile, dans la crainte de dplaire l'empereur. Le zle et l'loquence d* Artin dissiprent les frayeurs du duc, qui non seulement ouvrit ses portes, mais encore visita Mdicis,
Artin, dans les
fut
et le
furent
secourut de tout ce qui dpendait de lui (7). Les soins il fallut couper la inutiles, la plaie s'envemina (8)
:
(i) {2)
Rime Piae.
Annot.,
t.
II,
p. la.
ibid. p. io3.
\^l\.
IV, p.
III, p.
t.
3o3.
p. 2o3.
L'Ammirato, Oppusc,
Lettres d'Ariin,
i.
lil,
(7)
(8)
III, p.
I,
198.
Lettres d'Ariin,
t.
pp. 5, 87.
5184
l'autin
les
le
Artin prouva dans cette occasion que l'intrt n'tait pas motif de son attachement. Il n abandonna son matre qu'aprs lui avoir rendu les derniers devoirs. Il enj2;^agea Jules
peindre aprs sa mort, et conserva toujours ce prcieux de l'amiti qu'il y avait eue entre Mdicis et lui. Sa gnrosit se soutint-elle jusqu' la fin ? C'est ce qu'on peut rvoquer en doute, en voyant l'alfcctation avec laquelle il rappelle Cme, fils de Jean, devenu grand-duc, ce qu'il avait fait pour son pre, lorsqu'en parle
Romain
portrait
comme un gage
lant de ce capitaine,
il
lui dit
Lui qui d'aucun prsent ne paya mon service, Comme chacun le peut savoir, Me disait sous Milan Ah si le Ciel propice Me permet un jour de revoir Ma femme et mes enfants, libre de cette guerre, De ton pays je te ferai seigneur. Mais, hlas pauvre et vieux, jouet d'un sort trompeur, Mon esprance est avec lui sous terre (2).
:
Ce revers acheva de dgoter notre auteur du service des grands il rsolut de vivre indpendant, des fruits de sa plume. Les sentiments qu'il affecte, et la peinture qu'il fait de son nouvel tat mritent d'tre rapports. Je ne suis plus, dit-il, le jouet de la fortune, et je rends grce Dieu d'avoir prserv mon cur de la soif de l'avarice. Je ne drobe le temps de personne, et la nudit des autres n'excite pas une joie maligne dans mon cur. Je partage avec les miens la chemise de mon dos et le pain de ma bouche. Je regarde
;
mes mes
servantes
frres.
comme mes
fait la
filles, et
mes
serviteurs
comme
mngnificence de ma maison, et la libert en est le majordome. Mes jours coulent dans la satisfaction, et je ne dsire rien de plus. Le souffle de la malignit, ni les vapeurs de l'envie n'ont point encore altr
La paix
ma
(i) (2)
(3)
p. 23.
II,
p.
58.
APl'ENDICE
choisit Venise
(1). Il
l85
II
i527
fut
de distinction, et
ticulire (2).
pour son sjour, et s'y tablit sur la fin de reu bras ouverts par toutes les personnes le doge Gritti l'honora d'une protection par-
Le ressentiment des injures qu'il avait reues de la cour romaine tait trop rcent et trop vif pour lui permettre de dissimuler. Le sac de Rome par l'arme de l'empereur et la dtention du saint-pre dans le chteau Saint-An^e enhardirent sa plume. Il publia quelques satires contre Clment et ses cardinaux. Le pontife se plaignit au snat (3) le doge
:
manda
Il
le
ne chanta cependant la palinodie qu'en 1530. Son excuse tourne si singulirement qu'on me permettra de la rapporter Si celui que vous avez lev au comble de l'honneur, crit-il au pape, vous outrage par l'pe, est-il tonnant que celui qui n'a reu que des injures se venge par la plume ? Je me repens cependant d'avoir abus de la circonstance de vos malheurs (5).
est
:
rconciliation, lui
Vasone, suffragant de Vicence, qui s'tait ml de cette procura un bref honorable. Artin fit des protestations pour l'avenir il rtracta par une lettre adresse au cardinal Ilippolyte tout ce qu'il avait avanc dans sa colre (6) ; et ce n'est pas la seule fois qu'il se reconnat im:
posteur.
Il
rgala
le
cardinal
fession (7).
Le mme Vasone, accompagnant l'empereur qui retournait en Allemagne par le Trentin (8), obtint pour son ami un collier d'or et des lettres de chevalier. Artin accepta l'utile et refusa l'honorable par ces mots
:
(i)
Lettres dWrefin, Lettres dWretin, Lettres dWr.t in, Lettres d' Artin,
Lettres dWrtin,
l ettrcs
t. t. t.
I,
p. 83.
(a)
(3)
III, p.
I,
I,
25.
p.
i4.
(4)
(5)
i.
p. i4.
t. I,
t.
p. 62.
I,
(6)
ferms
(7)
qu'il publia
d Artin, une
p. 42.
yeux
mmoire.
I,
p. 43.
(8;
t. I,
p. 6a.
286
l'artin
Un mur sans criteaux, un cordon sans finance, Du public prt mordre excitent l'in^Ience (i).
Vasone avait encore extorqu de Clment une promesse de 500 cus, pour marier une des surs de notre pote. Quelque nouveau coup de langue en empcha l'effet (2) et ce fut Benot, cardinal d'Accolti, qui suppla au dfaut du pontife (3). Aussi PArtin lui donne-t-il la gloire d'avoir ralis ce que ses services n'avaient pu obtenir de la pit de deux pa:
pes
(4).
sur se nommait Francesca (5). Elle fut marie un Horace Gendarme. L'un et l'autre moururent en 4547, laissant une fille et un fils jumeaux. Muchio de Mdicis et Frdric de Montaigu se chargrent de les lever (6). Artin s'intrigua dans la suite pour placer cette nice dans un coumais Muchio la maria (8). Cette Francesca n'tait vent (7) pas vraisemblablement du mtier que Berni reproche ses
Cette
certain
;
autres surs.
En
faiteurs, crivit
1573, Ar1n,voulant rechauffer la libralit de ses bienau cardinal Hippolyte qu'il tait rsolu de pas-
(c J'irai, disait-il, tramer ma vieillesse et ma pauvret chez les infidles. Si quelques-uns talent leurs yeux les biens et les dignits dont la cour de Rome rcompense le crime, je leur ferai voir les cicatrices des coups que j'ai reus pour avoir aim la vrit, et ma misre leur
ser en Turquie,
apprendra le prix qu'elle donne la vertu. Ce qui n'a pu toucher le cur des chrtiens entranera l'me des barbares (9).
Ces vers sont du Marescallo, comed., alto Lettres r Artin, t. I, p. 67. Lettres r Artin, t. I, p. 60.
Lettres d'Artin^t.
I,
(i)
(a)
(3)
(4)
II,
scena
ni.
p. 14. p. 178.
II,
Lettres d' Artin, t. II, p. 79; t. V, p. 34Artin, t. III, p. 26; t. V, p. 72. (7) Lettres d' (8) Lorenzi, Dial. de Risu, p. 38. Zilioli, Istor. di Poeti ital. ide l'Ar(g) Lettres d' Artin, t. I, p. 3o. Ce qui donna cette tin fut la proposition que lui fit le doge Gritti d'entrer au service
de Louis Gritti, son fils naturel, alors ambassadeur du roi de Hongrie la Porte Ottomane (Parula, Istor. Venez. 1. VIII, p. 364).
APPENDICE
net artifice
du.
287
comdie
ne fut pas infructueux. Il nous apprend, dans sa Courtisan (1), qu'il tait prt s'embarquer pour Constantinople, lorsque Franois 1er l'avait li par une chane d'or, et que le duc de Lev avait achev de le fixer par une bonne pension. S'il feignit dans la suite quelque regret de n'avoir pas excut son projet (2), ce fut une suite de la mme ruse, dont il attendait de nouveaux supplments de finances. Le cardinal Farnse ayant succd Clment VII, sous le nom de Paul III, Artin, qui craignait le ressentiment des prtres qu'il avait offenss, engagea un parent du doge se joindre Giudiccione pour solliciter un bref de domesticit du nouveau pontife (3). Ceux-ci se persuadrent qu'il avait envie de rentrer au service du pape mais il leur dclara nettement qu'il ne voulait qu'tre autoris divertir sa saintet une fois le mois, en lui crivant des bagatelles amusantes (4). En effet, il ne devait pas souhaiter de retourner Rome. La libert dont les trangers jouissent Venise, asile assur contre la bigoterie des autres Italiens, convenait trop ses inclinations et
:
y composait en sret des crits obscnes et et la malignit sontgarants du dbit de ces marchandises, et son avidit ne lui avait pas permis de renoncer ses avantages. Ses feuilles taient enleves mesure qu'elles paraissaient. On raconte mme qu'un prince espagnol entretenait un courrier pour avoir le premier ce qui sortait de sa plume (5). Sans compter les pensions, il se vantait d'avoir su. avec une bouteille d'encre et une main de papier, se crer 2.000 cus de rente, dont les fonds taient assigns sur la sotses intrts.
Il
satiriques.
La corruption
Malgr sa vanit,
il
sentit
que
Mais ArLin ne pensa jamais accepter ces offres, et, pour en dcouvrir la vrit, il ne faut que rapprocher les dates. La lettre dont nous parlons est du 19 novembre i533. Il y avait alors six mois que Louis Gritti t^it revenu de sou ambassade, et de retour
en Hongrie, comme il parafl par la lettre d'Artin, t. I, p. i35. (y) La Cortiggiann, comed., alto III, scena vui. (2) Lettres d Artin, t, I, p. 34. (3) Lettres d'Artin^ t. I, p. 34- A V Artin, t. I, pp. 100, lia.
(4) (5)
(6)
t.
\, II,
p. 34.
i.
p. 374.
288
l'arAtjn
Il
donc prs de lui Nicolas Franco de Benevent, homme trs vers dans leslang'ues savantes (1). Celui-ci, dont le caractre imprudent et caustique sympathisait avec le gnie d'Artio, supplait ce qui lui manquait d'rudition par des traductions qu'il faisait exprs pour lui. L'un fournissait l'tofe, l'autre taillait l'habit. Ces associations ne sont pas sans exemple nous avons vu des imposteurs littraires s'chafauder sur le savoir d'autrui, et se faire un nom aux dpens d'un mrite moins connu. Mais l'appui venant manquer, le savant disparat, l'homme est dmasqu. La convenance et le besoin semblaient ici garantir le trait l'avarice l'anantit. Franco, se croyant ncessaire, voulut exiger un partage gal. L'Artin ne put y consentir ils se sparrent. Le savant revendiqua les ouvrages qui avaient paru
: :
:
sous le nom de l'crivain (2). Celui-ci dfendit sa proprit par mrite du style,et demanda la confrontation des crits contests, avec ceux qui appartenaient rellement Franco. Eusbi, jeune lve d'Artin, ayant sur ces entrefaites donn quelques coups de bton Franco, le rendit irrconciliable. Cette aventure corrigea notre auteur, et si dans la suite il se servit de
le
pareils ouvriers,
il
si
dans l'impuissance de lui porter ombrage. On ne saurait pourtant douter qu'Artin n'et de grandes obligations Franco. Il ne faut que comparer les premiers ouvrages qui lui firent un nom avec ceux qui parurent depuis la sparation mais la prvention qUe les premiers avaient tablie fut si forte qu'il fit encore des dupes malgr ses bvues et ses imprudences. La conviction infrieure qu'il avait de son incapacit, loin de diminuer son orgueil, augmentait encore son insolence (3) et, semblable ces menteurs qui, force de rpter une fausset, parviennent la croire vritable, force de vanter son mrite, il s'imaginait tre un personnage important. Le plus grand nombre, et surtout la province, donnrent dans le panqu'ils
;
tnbreuse
(i)
Toscan., Ppias
t.
Itali,
p.
io6.
Gaddi,
De Script,
t.
non
eccles.,
t.
II,
p.
i/\b.
t.
A lArtin,
III, p.
I,
p.
872.
(3)
Lettres d'Artin,
t. I,
p.
247;
i52.
APPENDICE
neau. Plusieurs trangers
sit
le visitrent (1)
:
IS9
il
pour un hommage. Un si grand nombre de gens, critil Aluno, viennent me rompre la tte que les marches de mon escalier se cavent sous leurs pieds, comme les pavs du Capitole l'taient par les roues des chars de triomphe. Les Turcs, les Juifs, les Indiens, les Franais, les Allemands, jugez assigent continuellement ma porte les Espagnols du nombre de nos Italiens Je crois qu'il serait plus facile de vous dtacher du service de l'empereur que de me trouver sans cette cohue. Je suis assailli de gens de guerre, de prtres et de moines. Chacun vient me raconter les sujets de plainte qu'il s'imagine avoir. Je suis devenu l'oracle de la vrit, et vous avez raison de m'appeler le secrtaire du
:
!
monde
(2).
il
Quoiqu'il y ait bien rabattre de ces fanfaronnades, constant que les trangers qui venaient Venise ne
:
est
man-
nit
il
quaient gure de visiter Artin il se plaint de leur importudans plusieurs endroits. Je suis las d'incommodes, crit son libraire
:
de
me
Titien.
le
Il
me prend
grenier de quel-
que pauvre
fille,
qui
me
aumne
(3).
;
dupes dans tous les sicles mais sottise de ses contemporains que la conduite des plus grands princes son gard. CharlesOuint lui assigne une pension de 200 cus sur le duch de Milan, et Franois l*'" fit ses efforts pour le ranger de son parti. Ces souverains avaient t en concurrence pour l'empire et la rivalit de gloire nourrissait dans leur cur une jalousie qui clata par des guerres sanglantes. Artin partageait d'abord ses loges entre ces monarques la pension dcida sa
L'effronterie a fait des
rien ne prouve
mieux
la
(i)
t.
IV,
t.
p. 396;
I,
t.
I,
p.
18.
Lettre de Ber-
p.
184.
(a) Lettres d' Artin, t. I, p. 306. Ces gasconnades sont rptes avec tant d'aftectatioQ par un certain Andra (Lettres l Artin, t. II, p. ii3) qu'on est tent de croire qu'il s'est crit sous ce notn cette seconde lettre, pour accrditer ses rodomontades par le tmoignage d'un tiers.
(3)
t.
III,
p. 7a.
agO
plume,
il
L AIXETIN
toujours
serviteur
de votre
annonc ses vertus toute la terre, et Sa Majest n'a pas daig-n s'informer si je mange. La chane qu'elle m'avait promise a il y en a quatre qu'elle ne m'a pas t trois ans en chemin donn le bon jour. Je me suis rang du ct de celui qui donne sans promettre. Franois fut longtemps l'idole de mon cur le feu qui brlait sur son autel s'est teint faute d'aliments (1). Le conntable de Montmorency, ayant lu cette lettre, dit, en prsence d'Allemani, que si l'Armatre.
crits ont
Mes
mais je ne
de son matre et de l'empereur avec vrit, il lui ferait donner une pension de 400 cus. Allemani l'ayant crit au pote, il se pressa de rpondre qu'aussitt qu'il verrait l'assignation des 400 cus il obirait au conntable (2). Mais les promesses de Montmorency s'en allrent en fume, et je ne sais sur quel fondement quelques auteurs ont avanc qu'il fut pensionn de la France et de la Porte Ottomane. Franois et Soliman lui firent des prsents, mais il n'eut jamais rien de fixe de ces cours; et,, bien loin de donner dans le discours du conntable, il s'attacha uniquement l'empereur, qui de son ct ne ngligea aucune occasion de lui faire sentir des marques d'une distinction particulire (3).
Un
le
secrtaire de ses
commandements ayant prsent un grand nombre de dpches, ordonne pour recommander il demanda la lettre qu'il avait
Artin au grand-duc,
fois (4).
la signa, et
remit
le reste
une autre
Le
mme empereur
passant, en 1543, sur les Etats des VLa Rovre, duc d'Urbin,
la Rpublique, accompagn de quelques nobles, avec ordre de le suivre par honneur tant qu'il serait sur leurs terres. Ce seigneur, qui aimait
t.
I,
p.
no.
i3.
V Artin,
t.
I,
t. I,
p.
Masa
i.
25.
APPENDICE
agt
dont l'empereur lui avait donn des preuves relles (1). Charles tait cheval, lorsque les ambassadeurs le joignirent. A peine eut-il aperu l'Artin qu'il lui fit signe d'approcher, le mit sa droite, et s'entretint avec min. Arriv au logis qui lui tait prpar,
qu'il expdiait les affaires
lui parler.
lui
il
pendant
le retint
le
che-
les
pendant de pouvoir
qu'il
Ce fut dans cette occasion qu'Artin rcita le pome avait compos en son honneur (2), et que, profitant de
qui parut sur
le
la satisfaction
quelques
marquis
Du Guast
se mit mdiateur dans cette affaire, et le raccommoder avec le gouverneur de Milan (3). Le lendemain, il ordonna Davila de lui compter une somme considrable, indpendamment des arrrages qui pouvaient lui tre dus. La libralit des princes pargnait alors aux auteurs les souplesses devenues presque invitables ceux qui dpendent de l'avarice des libraires et des ddains du public. L'empereur, sortant de la messe, fit signe au pote de le
monarque
comme il veut le faire entendre, ne prt fantaisie Charles de l'emmener en Allemagne (4), Artin feignit de ne rien voir, et se cacha de faon que les ambassadeurs qui le cherchrent ne purent le reprsenter. Charles, quoique piqu de ce qu'Artin n'avait pas pris cong de lui, ne lassa pas de charger le duc d'Urbin de le recommander la Rpublique comme une personne qui lui tait chre (5).
suivre; mais, soit timidit,
soit
apprhension
qu'il
lorsqu'elles
taient
striles,
il
les
quand
elles
furent accompa^nes d'un revenu, quoique fort modique. Le lecteur me permettra de reprendre ce fait de plus haut. Quoi-
que Artin n'et aucune envie de retourner Rome, nous avons vu (juil avait toujours souhait de se raccommoder
(i)
29
avec cette cour.
Il
L ARETIN
crut avoir
gagn
les
bonnes grces d
Paul
sa vanit l'aveugla au point que, sur des marques assez lgres de la bienveillance du pontife, il se flatta d'obtenir un chapeau qu'il fit demander par le duc de Parme (1).
III, et
Un
refus formel mortifia sa prsomption, et suspendit ses poursuites. Mais lorsqu'il vit Jules III sur la chaire, ses esp-
tant d'Arezzo,
lui
rances se ranimrent d'autant plus vivement que, ce pape il comptait sur l'affection ordinaire entre ceux d'une mme ville. Il lui crivit des lettres de flicitation, et
le cardinal Carpi un sonnet sur son avpapaut (2). Baudouin del Monte, frre du pontife, joignit ses bons offices auprs de Sa Saintet, et Jules envoya au pote 400 cus d'or, et des lettres de chevalier de Latran(3).
fit
prsenter par
la
nement
La
dans
trs
profit.
Le revenu
n'tait
le
discrdit (5).
mince pour l'honneur et pour le que de 8o cus (4), et cet ordre tait On le res^ardait comme une tiquette
quivoque du mrite, et l'affiche n'en imposait qu'au peuple. Clment l'avait confr Bandinelli (6) pour le prix de quelques statues Jules en fit la rcompense d'un sonnet. Quelque lgre que ft cette faveur, elle surprit tout le monde et les Vnitiens ne pouvaient s'empcher de rire en voyant cette dcoration orner les cicatrices du bton mais ils auraient d s'tonner de la confiance du personnage qui l'talait comme le prix de ses services (7). Ce cordon lui parut un prsage assur des dignits les plus minentes. Il composa un pome (8) dans la vue de dterminer le pape l'appeler auprs de lui (9). Cette ide diminuait l'ancienne aversion qu'il conservait contre la cour de Rome et lorsque le duc d'Urbin, que le pape avait nomm gnra; ;
(i) Lettres
d'Artin,
t. III,
p.
43;
t.
IV, p. 5i.
VArtin,
t.
II,
p. 277.
Lettres d'Artin, t. V, p. 289. Lettres d'Artin, t. V, p. 236. A VArtin, t. (4) Luaa Dore, Relaz. di corte di Roina, p. 68. (5) Manni, De Fiorent. Invenl. (6) Vasari, Vite di Pitt., t. II, part, ir, p. 429. t. V, p. 268. (7) Lettres d'Artin, t. I, p. agi (8) Lettres d'Artin, t. V, p. ii4. (9) Lettres d'Artin, t. II, p. 891
(2)
(3)
;
II, p.
35a.
APPENDICE
293
commandement,
apprend qu'
la
il
ne balana plus
le
suivre
(1).
:
Il
nous
Si cet
homme
vient
Romains
croiront voir
un autre
jubil
par l'affluence de ceux que sa prsence attirera (2), Les honneurs qu'on lui rendit semblent autoriser ce discours (3). Lorsqu'il s'agenouilla dan le conclave, le pape se pressa de le relever, et le baisa au front, a Je ne suis pas sur pris, lui crit un de ses adulateurs, que les papes vous vos e embrassent, que les empereurs vous cdent la droite crits dispensent l'immortalit. Je m'tonne de ce qu'ils ne partagent pas leurs Etats avec vous (4) . Un peu de vanit n'est-elle pas excusable avec de pareilles distinctions ? Si l'Artin se voyait en butte aux satires les plus infamantes de ceux qu'il avait outrags, ses amis le consolaient par des loges bien flatteurs, les souverains le caressaient, et l'aveu du plus grand nombre corrigeait le ridicule de l'affection avec
laquelle
il
se faisait valoir.
;
Cependant il n'tait pas homme se repatre de fume et la cour ecclsiastique, plus avare de biens que d'honneur, lassa bientt sa patience. Le saint-pre m'a donn l'accolade, disait-il, mais ses baisers ne sont pas des lettres de change (5). Piqu jusqu'au vif de se voir les mains vides (6), il retourna Venise, dont il ne sortit plus, et toutes les fois qu'il tait question de ce voyage, il se vantait d'avoir refus la barrette (7).
eut
(1)
Lettres d'Arlin,
t.
t.
VI, p. 170.
VI, p. 160. (3) Lettres d'Artin, t. IV, pp. 173, 178, 174, 181. (4) Lettres de Paolo Mannuztio. Pezzaro, i556, p. (5) Lettres d'Artin, t. IV, p. 2o5.
(6)
II
ii5.
partit de Venise en
(t.
mai
pp. 166, 470). cembre [Lettres, t. VI, pp. 172, 187). t. VI, p. agS. (7) Lettres d'Artin, p. a65.
IV,
tait
de retour en dt. II
L'Ammirato, 0pp.,
29^
l'artin
Pierre Strozzi, capitaine au service de France, ayant enlev sur Ferdinand, roi de Hongrie, le chteau de Murano, Artin, alors dvou la maison d'Autriche, ne put retenir un trait de satire (i). Strozzi, qui n'entendait pas raillerie, le menaa de le faire poig-narder dans son lit. Artin, qui le savait homme tenir parole, se barricada dans sa maison, n'osant ni sortir ni laisser entrer personne, tant que ce gnral fut sur les terres de la rpublique (2).
Le Tintoret
propos que
le
se
saillie
Titien, et l'Artin, intime ami du derdans la querelle. Tintoret, le rencontrant un jour prs de sa maison, le pria d'y entrer sous prtexte de faire son portrait, et le pressa avec tant d'instance qu'il lui fut impossible de s'en dfendre. A peine fut-il assis que le peintre vint lui d'un air furieux, le pistolet la main. Eh Jacques, que voulez-vous faire? s'cria le pote pouvante. Prendre votre mesure, rpondit gravement le Tintoret; et aprs avoir achev la crmonie, il ajouta avec le mme flegme Vous avezdeiuc de mes pistolets et demi de haut. Artin, qui s'tait un peu remis, lui dit, avec un ris forc, qu'il ne serait jamais qu'un badin. Mais cette leon corrigea sa langue; il rechercha mme l'amiti du peintre, qui le lira pour faire assaut contre le portraitque le Titien avait fait (3). Nous avons vu la monnaie dont la Volta paya ses satires contre lacuisinire de Giberti; le comte d'Arundel, ambassadeur d'Angleterre, lui en fit donner au mme coin. Artin avait ddi Jacques 1er le second volume de ses Lettres. Aprs cinq ans d'importunit,il obtint du monarque une gratification de 500 cus (4). On lui crivit d'Angleterre que l'ambassadeur avait ordre de lui compter cette somme (5), et quelques jours aprs il fut averti par un billet qu'il la toucherait le lendemain (6). Le payement ayant manqu, notre auteur, aussi somptueux qu'avide, s'imagina que le comte
l'avait brouill
avec
(i) (a)
Opre burlescke, capit. Alla qnartana, t. III, p. 3i. Paruta, Istor. Venez., t. XI, p. 282. Alberti, Descrip. d'Ilalia, (3) Ridolfi, Vite di Pitt. Venez. Vinezia, 1646, pp. 42, 69. (4) Lettres d' Artin, t. IV, p. 54; t. V, p. 24.
Lettres d'Are tin,
t.
(5) (6)
II, p.
t.
Lettre l'Artin,
II,
298. p. a6i.
APPENDICR
s'v'tait
295
appropri son argent (1), et se plaignit avec tant d'imprudence que ces discours revinrent d'Arundel, qui le fit charger coups de bton par cinq ou six de ses gens (2). Cette aventure fit grand bruit Venise. Mais Artin, dont ces sortes d'accidents rveillaient la dvotion, s'enveloppa dans son christianisme, et refusa de porter sa plainte devant le magistrat. Ne parlons plus, dit-il, du malheureux qui m'a attaqu seul et sans armes, la tte de cinq ou six assassins arms. Il ne m'a fait ni peur ni mal; et je rends grce Dieu de m'avoir donn un cur qui ne peut garder de rancune, et qui ne sait qu'aimer. Je renonce la vengeance. Je sais que celui qui, l'exemple de Jsus-Christ, pardonne ses ennemis, mrite que Dieu lui pardonne ses offenses... (3) Que Dieu, par sa misricorde, me remette les pchs que j'ai commis contre sa bont, comme je pardonne du fond du cur les injures que j'ai reues. J'approcherai des sacrements cette semaine, ce que je n'aurais garde de faire s'il restait quelque dsir de vengeance dans mon cur (4). Cet talage dvot ne l'empcha pas de rpondre un ami qui lui peignait la frayeur qu'un de ses assassins avait qu'il ne prt sa revanche Je ne veux ni le faire assassiner, ni le mutiler dans ses membres car je le dois tout entier au bourreau (5). Cependant, soit politique, ou crainte de pis, il s'en tint la ngociation. Don Juan de Mendozza, ambassadeur d'Espagne, se porta mdiateur, le comte fit une espce d'excuse, et paya les 500 cus dont la vue gurit les meurtrissures du bton. Lelnitifdes prsents, pour adoucir la bile d'Artin, parut un moyen trop humiliant aux yeux de quelques princes mais d'Italie ; ils usrent de la mme recette que l'Ecossais on peut douter qu'ils aient employ le remde aussi frquemment que Zilioli le fait entendre (6). Cet historien prend plaisir multiplier ces scnes, dont il place les thtres Rome, Venise, Florence et Naples, quoique notre pote ait fait peu de sjour dans ces deux dernires villes. Il faut conve:
(i)
(3)
(3) (4)
(b)
Lettres d'Artin, t. IV, p. 288. Lettres cV Artin, t. IV, pp. lu, ii4. Lettres d'Artin, t. IV, p. 94.
Lellrer, d'Artin,
t.
t.
Lettres d'Artin,
di Poeti ital.
296
Dr que
dies.
l'artin
Rome vit plus d'une reprsentation de ces tragi-comFerragut de Lazzara l'avait arrach demi-mort des mains des assassins ds le pontificat de Lon X(l), et cette aventure ne peut tre confondue avec celle dont Volta fut le hros, puisque, lors de cette dernire, Clment VIII tait sur le sige. D'ailleurs, tous ses contemporains semblent s'tre donn le mot pour le plaisanter sur ces petits accidents. Mauro, parlant d'une de ses aventures, dit
:
s'est sauv par un vrai coup du ciel, Mais on a noblement relev sa moustache ; Pour rcompense de son fiel, Il s'enfuit reint comme un malin d'attache. Sa bouche est prompte rvler Ce que prudemment on doit taire ; Et de sa langue tmraire, Toujours habile mal parler, II a rembours le salaire. D'autres que lui, pour pareil cas,
Artin
Aux
(3).
le propos, ne veux rien dire Je sais trop qu'Artin, aux dpens de son dos, Apprit ce que vaut la satire (3).
me
tais et
Tani, parlant d'un babillard, dit qu'il tait plus riche en paroles qu'Artin en coups de bton (4). Et Boccalini nous apprend que notre pote avait souvent trouv dans son chemin des gens aussi prompts de la main qu'il l'tait de la langue, qui lui avaient chamarr le visage et les paules, de faon qu'il ressemblait une carte marine (5). Mais rien n'tablit mieux la multiplicit de ces sortes d'aventures qu'un sonnet que le Marini mit au bas d'un de ses portraits grav en sanguine
:
Lx)
(3) (3) (4)
(5)
Famig. di Lazzara, p. io4. Opre bur les che, Londres, 1733, Gap. dlie Buggies, pliime di Cadamosto, F. VIII. La Cognata, comedia. Padova, i583, atto III, scena 1. Rugguagli di Parnasse, cent. II, num. 98.
Alberto, Isior. dlia
io4.
APPKNDICE
29T
Si l'art
Tisag>c,
:
mon
^e,
Pour avoir su leur honte au grand jour dcouvrir. Pour former de mes traits le baroque assemblage. Le pinceau le plus sr n'aurait fait que blanchir. Mon front cicatris du burin fut l'ouvrage, Le sang est la couleur qui pouvait le finir.
Vrai foudre de Pasquin, et de Momus l'pe, INIa plume fut toujours par le diable guide Par lui je mritai le titre de Divin.
;
Le vice mon aspect se cachait avec crainte. Frappez, grands outrags, le corps de l'Artin Ses crits immortels mprisent votre atteinte.
S'il
chappa de ce grand nombre d'aventures, sa fin n'en moins funeste. Lorenzini raconte qu'un jour, en coutant le rcit d'un tour qu'une de ses surs avait jou quelque galant, il lui prit un rire si violent qu'il tomba de son sige et se cassa la tte. Quelque singulire que paraisse cette catastrophe, le got qu'Artin eut toute sa vie pour ces sortes de contes la rend vraisemblable. On rapporte qu'aprs avoir Gaardatereu les sacrements il dit ceux qui l'assistaient mi di toppior che son unio.ll mourut vers 1557, g de soixante-cinq ans (1).
fut pas
:
surprenant que, dans un sicle o tant de gens s mpersonne n'ait conserv l'poque de la mort d'un homme si clbre. Nous sommes forcs de recourir aux conjectures pour la fixer. L'cptre ddicatoire du sixime volume de ses lettres prouve qu'il vivait en i555, et le Dictionnaire de Ruscelli, citant Artin au mot Rota, ajoute, d'heureuse mmoire, d'o il rsulte qu'il tait mort lors de l'impression de ce livre. Mais pour trouver l'anne de cette dition il faut avoir recours un autre ouvrage du mme auteur. Or, dans le huitime chapitre de son Trait de la Composition, on trouve qu'il publia son Dictionnaire deux ans aprs le passage de la reine de Pologne, et l'on sait que Bonne Sforce vint Venise en i555, allant prendre possession de sa coumais pour ronne. Ceci constate biea qu'Artin tait mort en i557
(i) Il
est
laient
d'crire,
298
l'ariltin
Son corps
fut
l'glise
demand
tre
dme d'Urbain
fut
et,
selon l'apparence, sa
mal excute. C'est une opinion commune grava sur sa tombe cette pitaphe
:
que ion
Condit Aretini cineres lapis iste sepultos, Mortales atro qui sale perfricuit.
Intactus
Deus
:
est
illi;
Hanc
ddit
Ille,
inquit,
l'on attacha
Qui giace L'Aretin, amaro Tosco, Del semen uman. La cui lin^ua trafisse vivi, e morti. D'Iddio mal non disse, E si scuso col dir' lo nol conosco.
:
ait
grav
une pitaphe dans un lieu o son corps n'tait qu'en dpt, peut-on penser que le patriarche de Venise et souffert dans une glise des vers qui tournent l'athisme en plaisanterie ?
savoir si ce fut cette anne mme, il faut recourir aux registres mortuaires qui sont gards Venise chez le magistrat de sant. Le nom de Pierre Arctin ne se trouvant pas dans les annes i556, i558, ni i56o, et le registre de i557 tant perdu, comme il parat par une note d'une ancienne criture qui est en tte d'un supplment qui ne centient que les noms des snateurs, il s'ensuit que le nom de notre auteur tait dans le registre qui ne subsiste plus. Mazzuch., Vita d'Aret., p. 77 Gaffero, Synih. Ve tus t., mici. V; Frherus, Theat. vir. erud., p. i446; Le Long, Biblioth. sacra, t. H. p. 6i3, se sont tromps en plaant sa mort en i55o. Zilioli, ht. di Poet. ital.; Grescembeni, Ist. dekla volg. Poes., t. IV, Dapor. Aile rime di G. Gapor., p. 219 et p. 6; Observ. di G. Bayle, Dict., mot Arlin [Pierre], le font vivre jusqu'en i556, en quoi ils se sont pareillement tromps. (i) Sansovino, Venez, illusl., 1. Forest., lUum., II, p. 120. Mission, Voi/. d'Ital., t. I, p. 286, Zor^i, Lelter. erud., p. 65. Theat. vir. erud., p. 461. Flix, Litter. Spizel. p. 62. Frherus,
;
;
Morac,
p. 19^-
Biblioth.
Moreri, Dict.,
Mariana. Grasso, Elog. Vir erud., t. I, p. 39. mot Artin. Ghilini, Teat. d'Uom. lett^r., part. I,
APPENDICE
:
299
C'est la coutume, Ecoutons l-dessus M. de La Monnoye dit cet acadmicien, d'attacher auprs du tombeau des morts de rputation des inscriptions funbres. Ordinairement elles sont la gloire du dfunt. Mais Artin ayant t un homme d'un libertinage distingu, il est fort probable que quelque railleur, avant ou aprs l'enterrement, ait port cette pitaphe dans l'glise de Saint-Luc. On pourrait mme prsumer que cette pense, sur laquelle tant d'auteurs ont gay leurs muses dans diffrentes langues, n'a paru que longtemps aprs la mort d'Artin, et n'est qu'un jeu d'esprit.
Nous en rapporterons
ici
Qui giace quel amaro Tosco. Ch' ognun' vivcndo col dir' mal Irafsse. Vero che mal d'Iddio non disse, E si scuso dicendo lo nol conosco.
:
Hic jacet
ille
omnes,
Dec.
Excusans,
sibi
cognitos negavit.
Le temps, par qui tout se consume, Sous cette tombe a mis le corps De TArtin, de qui la plume
Blessa
les
vivants et
les
morts.
Ne
Il
soumit tout h sa satire Dieu mme aurait passe le pas, S'il n'et appris, dans plus d'un cas, Qu'il est dangereux de mdire Des gens que l'on ne connat pas.
3oo
l'artin
On ne sait pas quel hopime c'est : Tout le choque, tout lui dplat ; Sa muse pique, mord, ou gronde,
Il
'
^^
Et
s'il
du monde,
Peut-tre
ne
le
connat pas.
Ne trouverait-on pas la source de toutes ces pigrammes dans les rbus du sieur Des Accords, o on lit l'pitaphe d'un mdisant, conue dans ces termes
:
mdirait
mme
la
S'il
en avait
de Dieu connaissance.
d'Artin,
les principaux vnements de la vie passons l'examen de son caractre, apprcions son mrite, dmlons les moyens par lesquels il en imposa son sicle, et ensuite nous dirons un mot de ses ouvrages. Artin aima les beaux-arts, et particulirement la peinture et la musique. Il jouait assez passablement de l'archiluth (1). Il fut intimement li avec le Titien et avec Michel-Ange Buonarotti, et son amiti ne fut pas infructueuse au premier. Le pote aida le peintre se faire connatre, et ce fut sur son tmoignage que Charles-Quint nomma le Titien pour faire son portrait, qu'il paya 1.000 cus d'or (2). On doit mettre au nombre de ses vices ses faiblesses pour les femmes, et son got pour la bonne chre. Il n'est jamais plus loquent que dans ses remerciements sur l'envoi de quelques vins rares, ou de quelques morceaux dlicats. Sa table tait toujours bien servie. 11 aimait rgaler ses amis, et sa dlicatesse ne lui permettait gure de manger chez les autres. Plusieurs de ceux qui avaient t de ses convives les plus assidus tant devenus ses ennemis, il compare sa table une vigne plante sur un rocher, qui sert de pture aux oiseaux
de proie
(1)
(2)
(3).
part,
m,
p. 3io. Ridolfi,
Vite
APPRNDICB
Il
30I
se livrait l'occasion, et
n'tait
pas
difficile
en
amour
;
il
mais il n'eut jamais d'attachement bien srieux. Je n'ai pas voulu me marier dans ma jeunesse, crit-il, parce qu' ma naissance le Ciel m'a donn la vertu pour compagne, et que c'est de cette alliance que sont ns ces enfants que toute la terre admire (1). Le respect d'un si beau nud ne l'empcha pas d'avoir des matresses sans nombre et de tous les tages (2). Il joua, pour dona Angela Sirena, une de ces passions dsintresses, espce de fanatisme qui cependant a trouv d'illustres imitateurs.il composa un volume de vers la louange de cette dame mais ses parents, apprhendant que tant d'honneurs ne produisissent
la facilit dcidait ses
gots
ges
(3). Il
aima
filles
service (4), et Sansoviuo lui reproche d'ouvrir sa porte aux courtisanes les plus dcries (5). Mariette del Oro aurait d le dgoter des
commerces domestiques.
Il
avait
un jeune
lve d'une
(i) (2)
Lettres
Lettres
III,
cl'
Are fin,
t.
t.
t.
IV, p. 34.
a/jS
rB/j;
;
d" Artin,
83;
t.
t.
p. 3i3;
t. II,
t.
pp. 82,
p.
V,
244;
t.
t.
I,
IV, p. i33.
III,
I,
(5)
(6)
t.
t.
l'
Artin,
t. I,
p. 96.
p.
290;
114.
t. II,
p. 20.
La Cognata, com.,
atlo
m,
scena
i.
t.
(7)
II, p.
3oa
ter
L'AnTiN
(1)
il
fit
la reprt
au
faire (2), et
longtemps aprs qu'elle fut morte (3). Quelques-unes de ces intrigues portrent leur fruit. Catherine Sandella lui donna une fille en 1537 (4). Il la nomma dria, du lieu de sa naissance (5). L'esprit et la gentillesse de cette enfant mritrent toute sa tendresse (6). Il poussa mme la folie jusqu' faire frapper une mdaille, o l'on voit d'un Catharina Mater, ct le buste de Sandella avec ces mots Adria Divi P. et de l'autre la tte d'Adrienne avec ceux-ci
:
:
Aretini filia. Il la fit lever dans un couvent (7) ; et aussitt qu'elle fut en ge, il fit une qute gnrale pour la marier (8). Malgr l'importunit de ses sollicitations, il fut huit mois rassembler mille ducats qu'il avait promis pour la dot. Diovatelli Rota, son gendre, exigea, avant de passer la clbration, qu'il lui remt, en nantissement de ce qui manquait la somme, la chane d'or qu'il tenait de la libralit de Philippe, prince d'Espagne (9). Quoique muni de ce bijou et d'une assignation sur la premire ddicace, Diovatelli s'opinitra demeurer chez son beau-pre jusqu'au parfait payement et ce ne fut qu'en 1550 qu'Artin conduisit ces poux Urbino, o la famille de Rota tait tablie (10). Le duc et la duchesse se signalrent par la rception qu'ils firent l'Artin. Ils envoyrent un corps de cavalerie huit milles au-devant ; la ville fut illumine la nuit de son arrive,
;
(i)
(2)
(3) (4)
(5)
II,
II,
t.
;
III,
III,
I, I,
t.
t.
t.
(6)
dArtin,
IV, pp.
264, 3i4;
t.
V, pp.
186,218,
236.
(7)
Lettres dArtin,
t. III,
p. 254-
donna 4oo ducats. Lettres d'Artin, t. VI, 102 et le cardinal de llavenncs 200, compte des t. V, p. p. 5oo qu'il avait promis. Lettres d'Artin, t. II, pp. i, m. Meadozza, ambassadeur d'Espagne, en joignit 100. Lettres dArtin,
(8)
I
Le grand-duc
;
lui
t.
Il,
p. 9-
(9)
Lettres d'Artin,
t.
t.
(10) Lettres
d'Artin,
71, 77;
lArtin,
t.
II.
p. 52.
ArrcNoicE
et l'un
et
3o3
le
l'autre dputrent
pour
complimenter
(i).
Ce
mariage n'en
Adrienne, maltraite par son mari, se rfugia chez son pre, qui parvint, avec bien de la peine, pltrer cette rupture i2). Les troubles domestiques ne furent pas longtemps sans se "renouveler, et la duchesse, qui avait pris Adrienne sous sa protection, fut souvent oblige d'interposer son autorit pour tablir une ombre de paix
fut pas plus heureux.
dans ce mnage (3). Il eut une autre fille en 4547 (4), laquelle il donna le nom d'Austria, tant pour marquer son dvouement la maison d'Autriche, que pour intresser l'impratrice en sa faveur. Doni raconte qu'un jour, conduisant un ami qui souhaitait de voir Artin, ils le surprirent jouant avec cette enfant, et qu'ayant arrt l'tranger par le bras, Artin, qui vit ce mouvement, leur cria qu'ils pouvaient entrer quoi Doni rpliqua: Non pas lui il n'a pas t pre (5). Cette fille mourut dix ans, et ds lors Artin avait remis au duc d'Urbin une somme d'argent pour la marier (6). Il eut une troisime fille, qui mourut au berceau (7). Quelqu'un l'ayant blm de n'en avoir fait lgitimer aucune rpondit-il, je me tais sur un reproche Ouai-je Oh Dieu besoin d'importuner le pape ou l'empereur ? Les sentiments de mon cur pargnent mes filles la vanit des crmo; :
!
>
l'crivain.
et
(i)
(a)
(3)
t.
t. t.
V Artin, V, pp. 227, 391 V, pp. 284, 289. IV, pp. 100, 190,211.
;
t.
II, p.
(4)
(h)
Lettres d'Artin,
t.
Doni, nelLa Baia delta Zucca, Lettres d'Artin, 229, 3o5;t. VI, pp. i33, 189,208. (6) Lettres d'Artin, t. VI, pp. 112, 121.
.
V, pp. 220,
(7)
L'ttres d'Artin,
t.
VI, p. i35.
(8i
(9)
de
d'Artiri,
p.
III. p.
92. Celle de
GU
Infianxmati
l'lut
i5'i5.
199; Artin. t. I, pp. i3. i^'i. Il fut a'^r aux Intrunati en Lettres d'Artin, t. III, pp. 92, 96. Lettres De Nic.Mortelli,
3o4
t'ARTIT*
illustres
Ces
les
si dlicates
:
murs
elles
sur donnaient
Un
Il
esprit
fait
son portrait,
Artin en
fit
prsent la
ville
sovino,
Joseph Betucci lui ddia les posies de Louis Casola; Sanson Trait de Arte oratoria ; Dolce, sa Traduction de la Potique d'Arisiote, et Franois r4usano celle du premier livre de V Iliade d'Homre. Doni plaa le portrait d'Artin la tte de son premier livre deL Inferno^ avec une ode en son honneur. Marcolini lui adressa la Dfense de la Langue italienne, par Citolini Alessandro Garraria, son pome burlesque de la Mort de Guirco et Gnoni ; Pierre Nelli, sous le nom de M. Andr de Bergame, lui ddia la treizime et la quatorzime satire Alla Garlona, et Dolce lui adressa sa trag^die Del Negromante. On pourrait encore citer un petit pome de Laurent Venier, dont nous parlerons mais cette
(i)
;
ddicace ne peut lui faire honneur, cause des obscnits de l'ouvrage. (a) Jean-Polio Aretino, surnomm Polastrino, le pria de recevoir
son livre De gli Triomji. Franois Aluno l'engagea, conjointement avec Dolce, corriger ses notes sur Ptrarque, et Jrme Maggi fie voulut jamais publier les cinq chants du pome qu'il avait compos sur la guerre belgique qu'Artin ne les et revus, et qu'il n'et fait une prface et une eptre ddicatoirc qu'il fit imprimer
en
tte.
(3)
(4)
APPENDICE
placrent ce tableau dans la salle du conseil,
tinction due
3o5
comme une
(1).
dis-
au mrite d'un
vers suivants
tel
:
compatriote
Beazino mit
au-dessous
les
A A
Passant, tu vois les traits de cet homme divin qui n'en imposa ni rang-, ni caractre
;
Oui, poursuivant
le
vice avec
un
zle austre,
Des abmes du cur s'est fray le chemin. l'aspect du dang^er qui menaait un pre Si le fils de Crsus a recouvr la voix, Par un plus grand effort, forant l'ordre et Ce tableau va parler redoute sa colre.
;
les lois,
Jamais auteur n'a chant ses propres louans^es avec une impudence pareille. Aprs avoir pass en revue les potes de
son temps,
hros
et
:
il
lui
de louer
les
moi,
la
dit-il,
des nerfs
parfume, et dont la plume ne fait que des miniatures (2). L'loije que j'ai fait de Jules III, crit-il ailleurs, respire quel(pie chose de divin (3). Ces vers, par lesquels j'ai sculpt les portraits de Jules, de Charles, de Catherine, et de Franest
ois-Marie, s'lvent comme des colosses d'or et d'argent, au-dessus des statues de marbre et de bronze que les autres rig-ent leur gloire. Dans ces vers, dont le mouvement et la dure galent ceux du soleil, on reconnat l'arrondissement des parties, le relief des muscles, les intentions et les profils des passions caches. Si j'avais prch Jsus-
Christ
comme
j'ai
amass plus de
la
terre.
permettra encore de rapporter son rve. Il se feint endormi sur le Parnasse, lorsiju'ApolIon lui prsente une corbeille pleine de couronnes, u Je te donne, lui dit le dieu, celle de rue pour rcompense des discours aigus que tu mets dans la bouche de tes courtisanes celle d'orties honorera tes satires piquantes contre les prtres; cette autre de fleurs de mille couleurs est le prix de tes agrables 'comdies ; celte quatrime, compose d'pines, appartient tes livres
;
On me
(i)
t. t.
(a)
(3)
Lettres d'Artin,
t.
3o6
pieux;
le
l'artin
les noms que tu as dvous la due ces exhortations touchantes qui ont rtabli la paix entre de grands princes le laurier couronnera tes posies hroques Qt tendres ; enfin celle de chne est donne au courage avec lequel tu as terrass l'ava-
cyprs consacrera
est
mort
l'olive
rice (i).
))
la plupart des hommes ne se donnent pas la peine de penser par eux-mmes, il voulait donner le ton au public; et, l'avouerai-je ? la honte de l'humanit, il ne se
Convaincu que
trompa pas
le
plus grand
et rien
que
les
lui
don-
On
que sa plume avait assujetti plus de princes que les plus lameux conqurants n'en avaient soumis par l'pe qu'il mritait les titres de Gallique, de Pannonique, d'Ibrique, de Germanique, avec plus de justice que les empereurs auxquels la flatterie les avait dcerns (2). On le citait dans les chaires (3). On l'appelait la colonne de l'Eglise (4j, le guide des prdicateurs, le cinquime vangliste (5) On soutenait que ses livres taient plus utiles la socit que les plus beaux sermons, ceux-ci ne parlant qu'aux simples, et ses crits portant la vrit dans le cabinet des monarques (6). Franois Riggardini de Messine, et Gnatio de Fassembrune, ont pouss
;
.
le
premier,
condition que
la
le
Credo ne m'en-
treprendra pas,
vrit dans
le ciel,
de
la
terre, le
que vous tes le fils de Dieu. S'il est la vous l'tes sur la terre. Soyez l'ornement trsor de la mer, et la gloire du ciel. Vous
semblable la pelle d'or qu'on pose sur l'autel de saint Marc le jour de la grande foire (7). Le second, quoique religieux, n'a pas honte de lui dire Vous tes la colonne, la lampe, la splendeur de l'Eglise. Si elle parlait elle-mme
tes
:
\\)
(2)
Lettres d'Artin,
Letter. vlg.
1.
t.
I,
p.
235.
di diversi, Race, da P.
Manuezio. Venezia,
1667,
(3)
l'Artin, t. H, p. 388. Epit. dedic. de gli Bnggion., Gosmopoli, i66. Let. Race, da P. Mnnuccio, p. 128. Lettres CArtin^ t. II, p.
m.
APPENDICE
elle
307
revenus de Chieti, de Santa Fiore, de qui sont la proie de tant de fainants, soient donns au seigneur Pierre, qui m'illustre, qui m'exalte, qui m'honore ; dans lequel sont runis la morale de Grgoire, la profondeur de Jrme, !a subtilit d'Augustin et le style sententieux d'Ambroise. Vous tes un nouveau Jean -Baptiste pour dcouvrir, reprendre, corriger avec courage la malice et l'hypocrisie. Vous tes un second Jean l'vangliste pour prier, pour exhorter, pour honorer les bons et les vertueux. On peut vous appliquer ce que JsusChrist adresse saint Pierre Beatiis es, quia caro et sanguis non revelavit tibi, sed Pater noster qui est in cdirait
:
Que
les
Farnsc,
et les autres
lis{i).
))
le
Artin les adopta, mais imprimer Venise en loo2. Il voulait prouver le commerce que les plus grands hommes de son temps entreteles
fit
Non seulement
naient avec
lorsqu'il tait question d'opposer une batterie aux invectives sanglantes que ses ennemis ne cessaient de publier. On pourrait mme croire qu'il retoucha la plus grande partie de ces lettres avant de les publier. L'imposture, la lche adulation, la conformit du style, les erreurs chronologiques, et
lui,
il
jusqu' se dgrader
l
de
le
louer
se flattait par
lettres
que Tolome
imprimer par
Son nom ne
est
et
incrdules de
droits
son vivant,
mort
sur
du consentement de
veuille dire
ses contemporains,
moins qu'on ne
qu'
l'e-
xemple de Dieu
foudroya les ttes les plus leves, et corrigea par ses crits ceux qui sont au^lessus des chtiments (2).i Je ne peux assez m'tonner, crit Montaigne, de ce que les Italiens, qui se vantent avec raison d'avoir l'esprit plus veill et le discours plus sain que les autres nations, ont fait tant d'honneur leur Artin, qui n'a rien
il
(i)
Lettres d'Artin,
Lilter., p.
t. II,
p.
(a) Flix,
12a.
3o8
au-dessus des
faut qu'il
l'artin
communs auteurs de son sicle, tant s'en approche de cette divinit (4)* Son impudence fut son titre la crainte de sa plume lui subjug-ea de faibles crivains dont les fades adulations accrditrent l'usurpation, et la malignit des hommes lui donna la vogue; mais tant d'honneurs si peu mrits disparurent avec lui. Cependant il ne sera pas hors de propos de remarquer que dans le seizime sicle ce titre de divin se donnait facilement, et qu'Artin mme en faisait si peu de cas qu'il le pro:
digue un peintre de cartes jouer (2). La lchet presque gnrale le rendit insolent il poussa l'eflronterie jusqu' copier les monarques dans les qualifica:
tions qu'il
homme
de ces livres. Il s'intitula Diviis Petrus Arelinus, per divina grazia, homo liber acerrimus virtutum ac vitiorum demonstrator. Il s'imagina que le public devait tre curieux de sa figure, et la prfrait celle des Alexandre et des Csar. Si nous le croyons, on la plaait sur le frontispice
fit
imprimer
la
tte
libre par la
grce de Dieu
dcorait les appartements les plus somptueux l'ornement des salles publiques; on la peignait jusque sur la porcelaine (3). Il ne se contenta pas d'tre peint et grav, il fit frapper des mdailles, et ne s'pargna pas dans les lgendes. Il en faisait des prsents aux souverains. Il accompagna des vers suivants celle qu'il fit prsenter Fran-
des palais,
elle
elle faisait
ois
I^'.
Dans cet envoi que je vous fais. Grand roi, reconnaissez mes traits.
Ma
la satire,
bien dans
mes vers
Ibrahim, grand vizir, voyant une de ces mdailles entre les mains de Barberousse, demanda plaisamment dans quelles rgions taient situs les Etats de ce nouveau souverain (5),
(i)
(a)
(3)
vol.
Scanza XXIII,
p. 65.
Lettres d'Artin, t. III, p. i45. III, p. 35. (4) Opre barlesche, t. (5) Lettres l'Artin, t. I, p. 6i.
Lettrti d'Artin,
t. I, p.
89
t.
V,
p. 336.
APPENDICE
3o0
Outre celle d'Adria, dont nous avons parl, il en fit frapper ])lusieurs, dont quelques-unes ont t conserves dans les cabinets des curieux. Nous rendrons compte de celles qui sont tombes entre nos mains, et l'empreinte en marquera la forme et la grandeur. La premire reprsente le buste d'un vieillard avec une grande barbe, et ces mots Diiuis Petriis Aretiniis flagellum principiam. Le revers porte une couronne de lauriers, et on lit au milieu Veritas odium pari t. La seconde a la mme tte, avec la mme inscription au dos est la Vrit, sous l'emblme d'une femme nue assise sur
:
:
une pierre son pied gauche est appuy sur un satyre elle regarde Jupiter qui parat sur un nuage, le foudre la main; derrire elle est la Renomme qui la couronne, et l'on voit Veritas odium parit. autour la mme lgende La troisime porte d'un ct le mme vieillard et la mme inscription dans l'exergue sont un A et un V, qui marquent que le coin a t grav par Agostino Veneziano au revers, devant lui Artin parat sur un trne, un livre sous le bras sont plusieurs personnages qui lui prsentent des vases, et on lit autour / principi tributati dai popoli il servo loro tribatano. Quand on voudrait douter de l'auteur des autres mdailles, pourrait-on se mprendre celle-ci ? Lorsqu'on lui entend dire a Qui ne sait pas que je suis connu des Persans La renomme a port mon nom chez tous et des Indiens il est devenu de toutes les langues. les peuples de la terre
; ; :
'?
recevoir
le tribut
des
peuples,
(1).
me nomment
mes comptables
Les temps sont changs il n'est pas jusqu'au peuple qui ne devienne mutin, et ne s'oppose aux exacteurs par des manifestes sanglants.
on lit autte parat sur la quatrime mdaille Lacet aima virtus ramis virens semper, et au revers Cedantur a est une couronne de lauriers avec ces mots morte inique lacessenlcs lingue uiperibus si mi le. Les deux fautes d'orthographe dmasquont l'auteur. Aprs tant de preuves d'un orgueil qui ddaigne de se lcher, pourrait-on prsumer qu' Artin voulut se faire un
;
La mme
:
tour
V, p. 382.
3iO
mrite de sa modestie?
dit-il,
t'ARrm
On peut me taxer de plusieurs dfauts mais on ne saurait m'accuser d'org-ueil (1)... Je n'ai jamais donn dans les panneaux de l'ambition (2)... Je rends grces Dieu de m'avoir donn un cur qui ne connat ni l'ingratitude ni l'orgueil (3). Ne doit-on pas tre galement surpris de la. docilit des princes qui se voyaient si bonnement ranger au rang de ses sujets ? Ils le regardrent comme un fou sans consquence, ou craignirent de s'attirer une application particulire de ce qu'il ne disait qu'en gnral. La plupart affectrent de lui marquer leur gnrosit, et nous n'avons pas d'exemple qu'un bon auteur ait t si bien rcompens. Il semblait que les grands se fissent un lionneur de le coucher sur l'tat de leurs maisons. La mode tait de lui faire des prsents Soliman et Barberousse mme se plirent la folie du sicle (4). Lopez de Soria lui prsenta, au nom de l'impratrice, une chane d'or du poids de trois livres (5). Franois 1er lui en envoya une autre de la valeur de 600 cus, dont le travail surpassait la matire (6). Les chanons taient forms de langues de feu entrelaces de serpentaux avec cette devise: Lingaa ejas loqaetiirmendaciurn. Dolce L'interprtation de ces mots exera les beaux esprits prtendit que Franois avait voulu caractriser Artin dont le propre tait de mordre, et lui faire entendre qu'on pourrait le corriger (7). a Le roi, dit Bullard, voulut enchaner cette muse indiscrte et volage, et la rendre muette et sourde (8). Quelques autres imaginrent que. prvoyant les adulations dont le pote ne manquerait pas de payer un prsent de cette consquence, Franois voulait marquer d'avance le cas qu'il en ferait. Dans ce sens, il fut prophte jamais Artin ne char; :
(i)
(::)
t.
t.
t.
II,
II,
p. 5o.
p. 99. p. i48.
(3)
Lettres
p.
d Artin, d Artin,
III,
Toscano, Ppias Itali, p. Su. Gaddi, de Script, non eccles.f 4- Bullard, Acad. des Scicnc. et des Arts, t. II, liv. V, p. 3^7. Lettres d' Artin, t. III, p. 2^3. (5) Lettres dArtin, i. I, p. 4'3. 4i3. Marescalco, cotn. alto III, (6) Lettres d'Artin, t. I, p. scena v. (7) Dialogho de Color., p. 55. (8) Acad. des scienc. et des arts, t. II, 1. V, p. 827.
(4)
1, t.
APPENDICE
OII
crit-il
gea
les
l'log-e
ce prince, que vous tes vos peuples ce que Dieu est tous
plus opposes, la
la
valeur et
la
clmence,
magnanimit et ?
me
trai-
donna une
serait entre-
Ce
de bijouterie, que. d'extraire de ses qu''il reut. Mais outre ces libralits fortuites, plusieurs princes lui payrent des pensions annuelles. Nous avons vu que l'empereur lui avait assign
prendre
lettres
un
inventaire
deux cents cus sur le duch de Milan le marquis du Guast l'augmenta de cent (3). Le duc d Urbiu lui donnaitdeux cents cus par an (4). Louis Grjtti lui payait rgulirement une somme dont on ignore la quotit (5). F3audouiu del Monte (6j et le prince de Salerne (7) lui promirent chacun cent cus. Le premier supprima le payement ds le cinquime mois (8), et aussi le second fut longtemps sans elfectuer sa parole (9) lui en fait-il des reproches dans les vers suivants
;
J'imputerais
Du
(lo).
la
Antoine de Lev lui crivit pour le prier de fixer pension qu'il exigeait de lui (11). I,
(i)
lui-mme
Lettres d'Artin,
Lettres dWrtin,
1. 1, t.
1.
L
p. 98.
p. 116. p.
(2)
V,
t.
A
t.
l'Artin,
t.
II,
p. 116.
(3)
(4)
(5)
Lettres l'Artin,
I,
Lettres d'Arlin,
Lettres d'Artin,
t.
IV",
t.
Sa;
p.
V, p. 104.
11!,
loS.
l'Artin,
t.
II,
pp.
126,
142, 288.
(6)
(7)
Lettres d'Artin,
t.
t. t.
IV, p. 178.
III, p.
Lettres d'Artin,
Lettres d'Artin,
31 3.
l'Artin,
t. I,
pp.
1G8, 280.
(8)
(9)
(10)
La Rime
VI, pp. 261, 280, Cortiggiana, comed., alto II, icena vni.
barlesche,
I.
III,
t.I,
p. 21.
(11) Lettres
l'Artin,
p. 12a.
6 12
Il
L^ARTIN
la mag-nificeuce
de ses bienfaiteurs.
fait dire
Il
tait
somptueux dans
(1).
le
vu de
la
vieillard
plus mignon, ni
mieux orn
Fontanini
gouffre do
dbauche
(2)
mais
sur
malheureux, et ses contemporains rendent un tmoignage avantageux de sa charit (3). Tout le monde vient moi, nous dit-il, comme si j'tais un caissier royal. Qu'une pauvre femme accouche, c'est aux dpens de ma maison qu'un misrable soit mis en prison, il me demande sa libert. Le soldat tout nu, le voyageur dvalis, toute espce d'aventurier me regarde comme le rparateur de ses pertes. Il n'y a point de malade qui ne s'adresse mon apothicaire ou mon mdecin (4). Un de ses amis lui conseillant de supprimer ces dpenses Il ne sera pas dit, lui rpond-il, que j'aie ferm aux malheureux un asile que mon cur leur ouvre depuis dix-huit ans. On aurait raison de regarder une conomie si tardive, plutt comme une banqueroute que comme une rforme raisonnable (5). La vanit et le soin de se faire des trompettes de sa gloire n'avaient-ils pas plus de part ses largesses que la bont de son cur ? Il est temps d'couter ses ennemis et d'abord, Crescimbeni propose comme un problme si l'Artin fut plus digne de blme que de louange (6). Toscanella lui reproche un style enfl et peu naturel (7). Guarini l'accuse de donner dans l'hyperbole (8), et Fontanini d'outrer l'expression et la pense (9). Malheureusement tous ces reproches sont fonds. On trouve partout un homme qui court aprs l'esprit, qui ne dit rien
s'tendait aussi
les
; :
:
(i)
()
Opuscuoli,
t.
II.
p. lA-
(3) Lettres de Doni VArtin, t. I, p. \\l\. Marcolini, t. II, p. 432. (4) Lettres d'Artin, t. II, p. 207. (5) Lettres d'Artin, t. 111, p. 34o. (6) Istor. delta Poes., volij., t. II, p. 45 (7) liethor. Gaio Erennio, p. 4o2. (8) Segret., p. i/|6. (9) iog. ItaL, p. 367.
Du
Titien, p. 147.
De
APPENDICE
3l3
comme un
obscur ou prtentieux (1), qui personnifie ridiculement les choses inanimes (?}), mtamorphose l'adjectif en substantif (3), rpte une phrase par une inversion dsacrrable (4) ; en sorte qu'un homme de bon got ne peut soutenir l'ennui d'une lecture aussi fastidieuse. Comme il n'y eut qu'une voix sur son ignorance, et qu'il tait forc d'en convenir (5), il conut une aversion pour les anciens qui retombait sur leurs admirateurs il traitait ces derniers de plagiaires, et comparait ceux qui les prenaient pour modles des voleurs qui croient cacher leur larcin en effaant les armes du matre (6). Il dit que les sentiments taient partags sur son compte ds son vivant, que les uns le traitaient de brouillon, parce qu'il n'avait pas de lettres que les autres soutenaient qu'il n'avait pas compos les livres qui paraissaient sous son nom ; et qu'enfin les troisimes le regardaient comme un gnie extraordinaire qui savait tout sans avoir eu de matre (7). On ne peut lui refuser le feu et l'imagination ses comdies sont remplies de sel et de sailmais elles blessent les rgles du thtre et la pudeur. Ce lies
:
a a
Voici des exemples de ces tours vicieux Aig^uiser l'imapcher avec la li^ne de la rflexion dans le lac de la mmoire mettre le pied de la maturit refrner la bouche des passions dans le chemin de la jeunesse
(i)
avec
le
mors de
la rflexion;
le
joindre
le
bois de
la
courtoisie au
coin de l'affection au
nom
de l'ami-
ti;
ensevelir l'esprance
etc.
(a)
Les mains de
l'art, les
la
chair, l'humeur de la
joie, etc.
(3)
Le
facile, le clair, le
gracieux,
noble,
le
fervent, le fidle, le
par de paexpressions qu'il avait tellement su gagner les esprits que Lucretia Marinella s'efforce de justifier cette faon d'crire, par l'exemple d'Apule. 82. Muzzio, Batag., p. 68. Essais (4l Toscane, Ppias liai., p. de Mont., 1. I, ch. li. (5) La Monnoye. Mnag., Paris, 1729, t. IV, p. 3o3. (6) Lettres d'Artin, t. III, p. 241. t. V, p. 368. (7) Lettres d'Artin,
bon,
le vrai, l'agrable, le
reilles
3l4
L*ARTIN
ne sont })roprement que des dialogues assez mal cousus. Sa versification est dure, entortille, sans grces et sans naturel. Il n'est plus supportable ds qu'il veut louer nous rapporterons pour exemple le fameux sonnet qu'il fit pour Jules III, auquel les Romains donnrent le prix sur tous les vers qui parurent l'avnement de ce pontife.
:
Du monarque des cieux la sagesse profonde Pour le bien des morLels a fait ce chane^ement Si Jules III jadis fut la terreur du monde,
Jules
III
en devient aujourd'hui rornemcnt. Ce dieu qui le forma par sa bont fconde, De toutes les vertus l'a dou richement On entend retentir sur la terre et sur l'onde Son log^e, qui doit vivre ternellement Sa force et son savoir g-alent sa puissance ; Courageux, loquent, plein d'esprit, de science. Mais ces biens ne sont pas les plus chers ses yeux n prfre la paix, la douceur, la justice. Le bonheur des humains est pour lui prcieux, La vertu qui renat va terrasser le vice.
; : :
Je doute fort que le lecteur s'crie avec Ruscelli Oh! Vad' mutable pote (1)1 Manuzzio, d'ailleurs assez bon juge, lui fait un mrite de n'avoir imit personne. Vous n'avez pu vous rsoudre, lui dit-il, marcher dans les routes battues, et l'lvation de votre gnie a ddaign les sentiers ordinaires. Sans autre secours que celui de vos propres lumires, vous avez parcouru rapidement la carrire de la nouveaut, et vous avez atteint un but qu'aucun mortel n'avait frapp. Vous avez appris sans connatre les rgles de l'art, et compx)s sans modle des ouvrages qui vous rendent immortel (2). Barbaro lui dit que les Florentins lui doivent des remerciements de ce qu' l'exemple des autres potes il n'a pas drob la robe du bon Ptrarque. Quelques modernes ont imit notre auteur dans la fureur de se rendre originaux; mais ils n'ont pas eu la bonne
(i)
Annot.
la
APPBNDICB
foi
3I5
a Si
Ptrarque,
maisj'ai senti que j'aurais perdu mon temps et marputation en voulant leurressembleT (i).)i Celui qui s'loigne des grands modles, dit M. de\ ohaire, ne doit pas se flatter d'en servir ;
il n imite personne, personne ne l'imitera. Artin se dfiait Quand je ne mriterais de lui-mme lorsqu'il crivait aucun honneur pour avoir su donner de l'me mon style par le secours de l'invention, je mrite au moins quelque gloire pour avoir eu la hardiesse de porter la vrit dans le
:
cabinet
la flatterie
et
du men-
songe
satire
(2).
ennemis poussrent la dans l'autre extrmit. Ils firent frapper une mdaille avec le buste d'Artin d'un ct, et de l'autre la reprsentation d'une figure que la modestie n'a pas permis de graver, et pour lgende Toto in loto et tt us in qiialibet parie. Paul Jove est souponn d'en tre l'auteur, et d'avoir voulu se venger de Tpitaphe suivante
Si ses partisans outrrent l'loge, ses
:
L'hermaphrodite Jove
Il
fut
femme
Mais on peut donner de cette anecdote, qui n'est fonde que sur l'autorit de quelques antiquaires, qui souvent inventent
pour appuyer leurs conjectures. Il faudrait, pour prouver une rupture entre ces deux amis, et leurs lettres annoncent une liaison intime et sans interruption. Paul Jove mourut en i562, et l'Arcliu crivit ce sujet une lettre au grand-duc, dans laquelle il fait l'loge du dfunt (3). Il est donc plus naturel d'attribuer celle mdaille Franco, qui composa un volume entier de satires contre Artin. Il fut imprim en 1557, Venise, sous le titre de Priapeia, et comme il est fort rare, pour satisfaire la curiosit du lecteur, nous en rapporterons deux sonnets des moins mauvais.
les
faits
l'tablir,
(i)
(a)
t.
I,
p. 128.
(3) Lettres
VI, p. 125.
3i6
l'ar^tin
Ces mains dignes d'un roi, dont le mle courage, dpens d'Artin, ont sig-nal leur rage, Et veng bravement le reste des humains. Qu'importe si le sort, le sauvant du naufrage, A tromp du poignard les coups trop incertains, Et si de nos clochers les lugubres tocsins N'annoncent pas sa mort notre voisinage ? Souvent l'vnement est un signe trompeur Un effort gnreux met le prix l'honneur, Et l'entreprise seule en fait la renomme. Aussi l'on m'entendra rpter dans ces vers: Contre un monstre odieux la main d'Achille arme A voulu d'un seul coup en purger l'univers.
Aux
II
Courage, Titien, que ton repentir cesse ; Tu peux te dispenser de voir le sacristain,
un grand mal d'avoir peint Artin peut te pardonner sans aller confesse. Pour l'lever, ton art, il est vrai, se rabaisse ; Tu profanes l'honneur de ton pinceau divin, Et, peignant un sujet digne de Dragonzin (i), Sa gloire tes dpens vainement t'intresse.
Ce
n'est pas
On
Modre cependant
ta vive affliction
Loin de diminuer ta rputation, Ce tableau va te faire une gloire infinie. Tu viens, par un dessin vivement color. De placer savamment, dans un petit carr,
De
On ne sait o BuUard a pria que ces satires portrent coup, qu'Artin changea de vie et de langage, et que Franco se fit
qu'il
de ce changement un nouveau sujet d'pigramme (2). Quoi en soit Fontanini applique notre auteur (3) ces vers de
Faerno
(i)
(a)
(3)
Le Dragonzin tait un peintre de taverne. Acad. des scienc. et des arts, ch. 278.
Elog. ItaL,
p. 367.
APPENDICK
CONTRE ON MENDIANT
fiel et de poison ta langue est Ineuve, Et ta plume distille un funeste venin. Qui bornera le cours de ta verve etTrne, A tes fougueux accs qui pourra mettre fin ? Les lois pour ta fureur ont de vaines entraves Tu mprises l'honneur qui gmit sous tes traits Les princes les plus grands, les hros les plus braves. Sont tout dfigurs dans tes hideux portraits* Ni crainte ni pudeur n'en impose ta plume, La vertu la plus pure prouve ta noirceur
: ; ;
317
De
Mme
Vomit
contre
le ciel ta bile
qui s'allume
l'affreux poison qui dvore ton cur. Serpent plus dangereux cent fois que la vipre, Puisse un jour le bourreau rpandre de ton flanc, Ministre prcurseur d'une vengeance austre, Le bitume empest qui te tient lieu de sang (i).
teindre la haine
queMuzio
lui avait
que Boccace n'appelait Venise le rceptacle des immondices, que parce qu'elle avait reu l'.\rtin (2), il dfra ses livres l'inquisition (3), et en poursuivit la condamnation par le crdit de Bernardino Scotto, cardinal de Trani. On ne doit pas oublier que la sentence qui intervint qualifie l'Artin de pauvre homme qui a pch par ignorance (4).
Perion, moine bndictin, composa contre notre auteur une invective violente qu'il adressa Henri II et tous les princes chrtiens. Ce discours, que le Mire appelle loquent (5), fut imprim Paris en 4551, et Fontanini en cite plusieurs
di Ferno. Padoua, 1718, p. 68. Bataglie, c. xv, p. 08. (3) Let. cath. di G. Muzio. Roma, i56o. (4) Domi envoya Muzio le livre de Uruanita del Cristo avfc des remarques sur les endroits qu'il ne jugeait pas orthodoxes. Muzio. layant-lu avec attention, crivit au cardinal de Trani, l'un des inquisiteurs, qui en poursuivit la condamnation. Ce tribunal avait fltri ce livre ds 1037 ; mais, cette fois, les uvres d'Aii'tia furent
(i)
Rime
(2)
condamnes, ce qui
pressioa.
'5)
les
remit en vogue,
et fut
De Script, non
eccles,, n. 460.
19.
3i8
t.'artin
passages dignes des curieux (1). Matudano,envoyaDt ce discours Lambin, ajoute qu'il est craindre qu'Artin, aprs s'tre intitul le flau des princes, ne veuille devenir celui des moines (2). Enfin, Doni publia un livre extravagant, dans lequel il s'efforce de dmontrer qu'Artin est l'antechrist de son sicle. Le titre seul suffit pour prouver quel point cet
ouvrage est ridicule (3). Les fulminations de la Cour de Rome contriburent beaucoup l'accusation d'athisme dont notre auteur fut noirci. On lui attribua le livre excTRhle De Tribus impostoribus,q\ioique cet ouvrage ft connu longtemps avant lui (4), et qu'on le donne avec beaucoup de vraisemblance Pierre des Vignes, secrtaire de l'empereur Frdric II, par ordre duquel il fut compos, pendant les guerres entre le sacerdoce et l'empire. M. de La Monnoye justifie Artin en niant l'existence du livre, qui cependant se trouve en Allemagne dans plusieurs
bibliothques, et qui a t
imprim en Hollande, sans nom d'imprimeur et sans date d'anne, sur un ancien manuscrit qui fut vol dans la bibliothque de Munich, aprs la bataille d'Hoechstet, lorsque les Impriaux s'emparrent de la Bavire. Mais je demanderais volontiers au pre Mersenne,
de
ville
ni
qui croit y reconnatre le style d' Artin, quelles sont les pices de comparaison sur lesquelles il a fait sa vrification,puis-
ItaL, p., 268. M. Bruto., p. 35i. (3) Terre moto del Doni con la ruina d'un gran colosso bestiale Anti-Cristo dlia nostra etate al vituperoso d'ogni tristezia fonte e origine, membro puzzolente dlia diabolica falsita, e vero Anti-Cristo
(i) Eloff.
(2)
Let. raccol. de
Le pre
Mersenne
{in
Genesim,
p.
i83o), Spizel
{Scrutinum
atheismi, sect. 11, p. 18), Endrecius [Pandect. Brandeb., p. 260), Tentzel (in BibL Cur., 1704, p. 4oi) assurent le fait, et le pre Mersenne, que ceux-ci ont fidlement copi, croit y reconnatre le style d'Artin. Freerus (Theat. viror. illust., part, n, p. 4^4) Gortolto {de tribas Imp'>st.
Fascino magico,
leci.,
t. I.
1.
III,
sect. n,
i),
Frotman
{de
{de
Disput. se-
p. 206),
c.
din {Gomm. de Script, ecles., t. IFI, p. 78), La Place {Thty anon., pp. i8 et 190) se sont contents de mettre la question en
problme
APPENDICE
qu'il est
3ig
constant qu'Artin n'a jamais crit en latin, et qu'il cetlp, langue. Il n'est pas aussi facile de dtruire l'accusation principale. Artin affectera la vrit, dans plusieurs de ses lettres, des sen-
timents d'un vrai chrtien (l).Il attaque mme les hrtiques de son temps (2) mais ses murs et ses crits dposent contre lui. Bayle allgue en sa faveur (3) les ouvrages de dvotion qui sont sortis de sa plume, La preuve serait concluante si sa pit les et dicts, non pas l'intrt, et si l'inquisition ne les et pas condamns comme hrtique est scandaleux,
;
Baillet
suppose que ce ne fut qu'aprs sa conversion qu'il dans la mme ide qu'on impride ses psaumes
:
ma
la tte
De David
Dans
et
de l'Artin,
nom
mmoire
des
hommes,
l'avait
avoir dshonor sa
au nombre des savants, si, aprs plume par ses ouvrages scandaleux, il
pas signale par la composition de ses livres pieux larmes de sa pnitence ; larmes qu'il tira du fond de sa veine, et qu'il mla celles de ses yeux, afin de laver dans ses eaux toutes pures les taches normes de sa vie passe, et la honte de ses premiers vers ; larmes qui expriment si vivement la grandeur et la force de son repensont capables de toucher les mes les plus tir, qu'elles insensibles et les plus obstines. Depuis cet heureux chan-
ne
gement,
(i)
il
composa
la vie
de
la
Vierge
et celle
de
sainte
Lettres d'Artin,
t.
II.
p.
200;
t.
V, p. zb^.Rime di diversi,
;
t.
III,
t.
V, p. a68
VI, pp. 66, 76, 175, (3) Bayle, Dict., au mot Artin (Pierre), (4) Jugem. des Sau., Prf. sur les potes,
(5)
t. II,
part, i, p. 78.
Mnag.,
t.
II,
p. 109.
320
L'ARiTIN
Catherine, et mourut quelque temps aprs arec toutes les marques d'une parfaite repentance (1). Il est fcheux
qu'un talage aussi touchant soit dmenti par le fait. M. de La Monnoye nous apprend qu'Artin ne composait exercer son imagination, ses livres de pit que pour pour faire voir qu'il tait capable d'crire sur toutes sortes
de matires, pour apaiser
les
lui,
et
pour
s'attirer la libralit
envoyait
des exemplaires de ces sortes de livres. Il n'en tait pas pour cela plus sage puisque, aprs avoir publi sa Paraphrase sur les sept psaumes de la pnitence, et son Umanita del Cristo en 1525, il s'avisa, en 1537, de ddiera Baptiste Zatti, citoyen de Rome, ces postures infmes dont on a tant parl, au bas de chacune desquelles il avait mis un sonnet aussi dshonnte, comme le dit M. Flibien, que les actions reprsentes. Il composait tour tour des crits de pit et de dbauche (2). On ne saurait donc conclure qu'il y ait eu du changement dans son cur. Frerus avance, sans plus de fondement, que les mauvais traitements qu'il esssuya le forcrent d'abjurer la satire et le jetrent dans la rforme (3). L'exprience fait voir que ces sortes de corrections allument la bile, endurcissent le cur, et font vanouir la pudeur naturelle. Artin apprend ceux dont la faiblesse redoute le coup de dent qu'on ne peut apaiser ces famliques qu'en les intressant. Ce n'est, dit-il, que par prsents qu'on ferme la bouche de celui qui mord (4). Boissard s'est encore tromp lorqu'il avance que les fulminations ecclsiastiques ne portrent que sur les crits obscnes
;
puisque son Umanita fut dfre et condamne premire. Il en est de mme de Baylc, lorsqu'il dit que ses ouvrages de dvotion ne furent imprims que sous le nom de Partenio Eiiro, qui est l'anagramme de Pietro Aretino (6).
Acad. desscienc. et des arts, i. II, 1. V, p. 827. Lettre de La Monnoye, Mcnag., t. IV, p. 228. t. 1, p. 547- Haitnoadi Erom., de bonis (3) Mag. Bibliot. eccles., et malis libris, Erom. IX. Frereus, Theat. Viror. illust., p. ll^6l.
(i)
{2) (4) (5)
Lettres
d' Artin, t.
I,
p. 76.
p. 266.
Icnes L.
Viror. illust.,
Artin (Pierre), n. i. Giardina, de (6) Baile, Dict., au mot Meth. cit. auth.y p. i5o. Baillet, Ju^. des Sav., L. C.
recta
Idem
APPENDICE
321
Ce ne
fut
que dans
:
ma
de l'inquisition
d'Artin.
dix-septime sicle que Ginami rimpripostiche, afin d'luder les dfenses premire dition tait sous le propre nom
le
un nom
il
les
pas difficile de prouver au contraire qu'il les dut la bassesse de sa flatterie. Mais commenons par le laver d'un soupon plus infamant dont Zilioli s'efforce de noircir sa mmoire. Cet historien prtend qu'Artin parcourait les villes d'Italie, et que, mettant en pratique les talents dont il tait dou, il cherchait pntrer dans les curs pour y dcouvrir les secrets les p'us cachs, dont il trafiquait ensuite avec ses bienfaiteurs (2). De nos jours, un auteur espion ne pourrait au
plus s'exercer que dans
sicle auraient-ils
la librairie les hommes du seizime donn leur confiance un marchand de mdisance? De plus, on sait qu'Artin n'aima i^ure voyager, et qu'il demeura presque toujours Venise, depuis qu'il s'y
:
ne sera
(fut
tabli.
:
forg des resorts d'une espce bien diffrente son premier soin fut d'flC({urir la rputation d'un homme caustique et vridique, auquel aucun respect humain ne pouvait imposer. 11 disait ordinairement qu'il ne connaissait personne de plus mprisable (|ae celui qui fait le bien par limpuissance de faire du mal (3) mais il tait fort rserv dans la pratique. Auprs des grands, adulateur et soumis, il savait flatter ou se taire (4). Sa critique ne portait jamais qu'en gnral, sans singulariser le prince ni le courtisan, et la cour de Home fut son but favori. Outre le dsir de se venger, il s'tablissait l avec moins de danger cette rputation de caustique qu'il souhaitait avoir, et ne sacrifiait que de lgres esprances
Il s'tait
;
Degais. des /lii^, part, et, p. Sao., anne i686, p. 5o8. (i) Dialogues des morts.
(a) Zilioli, (3) Lettres d'Artin,
(4)
t.
i36.
Mag
aao.
et
Voyez
ses Lettrss
aux roU
aux personnes
distingues.
32 2
l'arTIN
car l'exprience lui avait appris que l'Eglise ne donne pas vonommment quelqu'un, il tait bien sr de l'impuissance ou de Tinsensibilit de celui contre lequel il s'levait. Le cardinal Gaddi fut du nombre
de ces derniers Artin avait envoy en France Eusebi pour y toucher 600 cus; ce jeune homme perdit cet argent Rome, et, pour s'excuser, il accusa Gaddi de l'avoir fait jouer de malheur. Le pote, furieux, crivit une lettre impertinente au cardinal. J'apprends, lui dit-il, que mon lve a fait une perte considrable dans votre maison, et que vous lui teniez
:
les mains. Cette action, qui serait dtestable dans un brigand, est bien digne d'un cardinal. Je ne peux me refuser une vengeance lgitime, et les prochaines affiches vous en instruiront. Au surplus, sachez que le public voudrait me voir dans le rang que vous dshonorez (1). Cette aventure s'tait passe chez Strozzi mais Artin, qui n'osait se jouer ce gnral, passa sa colre sur le cardinal qui y tait. Celui-ci se contenta de dire qu'il s'embarrassait peu des injures d' Artin que de plus grands matres que lui avaient pris patience qu'au surplus cet homme avait tort de lui vouloir du mal que lui, Gaddi avait toujours t son ami, et qu'il voulait l'tre l'avenir (2). Si Gaddi l'et pris sur un autre ton, Artin et abrg l'invective, car il tait poltron, et devenait souple comme un gant quand on lui montrait le bton. D'un autre ct, Rome faisait si peu de cas de ses attaques qu'Orsinio Fulvio, qu'il avait appel mchant prtre , le remerciait de ce qu'il le traitait comme un
; ; ;
grand soin d'viter les disputes littraires. Sa prsomption ne l'avait pas aveugl sur la faiblesse de ses armes. S'il se vit engag dans quelques-unes de ces querelles, il fibientt les avances du raccommodement. Berni, dont il crait gnait la supriorit, ne put lattirer dans la lice s'il attaqua l'Albicante, il se livra avec bassesse aux conditions de la paix. La contestation qu'il eut avec Bernardo Tasso fut assoupie aussitt que forme, par l'entremise de Sperone, qu' Artin
:
(i)
t.
II,
p.
3o4.
(a)
(3)
t. II, t.
p. 207.
p. 17.
Lettres
d' Artin,
II,
APPENDICK
sollicita
323
Use vante
d'avoir
coup mortel Boyardo(l); mais s'il s'acharna contre ce pote, ce ne fut que dans la vue de gagner les bonnes grces du Bembe, qui lui tait plus utile. Le titre de vridique, qu'il affectait, donnait un nouveau prix ses loges. Il ne manquait pas de les accompagner d'une peinture touchante de ses besoins. Il prchait la gnrosit comme une vertu qui galait les princes Dieu mme (2). Loin de rougir des mensonges et mme des contradictions o la ncessit de flatter l'entranait, il s'en vantait ses amis. Personne, leur dit-il, ne me croit assez stupide pour ne pas apercevoir les dfauts du coloris et les imperfections du dessin. Je me suis fait un style qui convient
port
le
me
vois forc
grands pour l'tre moi-mme. Je les porte au ciel sur les ailes de l'hyperbole je joins l'art, l'agrment du nombre et de la cadence. J'exprime mes penses avec grce je donne de la force aux paroles: je mets en place les digressions, les mtaphores et les autres figures de rcole. Ce sont l les ressorts qui impriment le mouvement, et les tenailles qui
;
ouvrent
les
l'avarice (3). Je
suis
parve-
que je m'embarrasse peu de mentir quand il s'agit de louer ceux qui ne le mritent pas (4). Un de ses amis l'avertissant qu'on Dites ceux qui l'accusait de se contredire, il lui rpond me font ce reproche que, par ses satires, Pierre Artin se montre tel qu'il est, et que dans ses loges il apprend aux
nu au point o
me
ce
princes quels
ils
devraient tre.
Au
m'gorge
Les
leurs,
fle
me permet
que j'emploie pour extorquer le payement de la pension que l'empereur me fait, me sont d'une grande utilit. Je les charge dencre, de faon que je ne psux m'empcher de rire en les relisant. Vous pouvez en faire de mme.
(i)
(2)
(3) (4)
(5j
Lettres ( Artin, Lettres (T Artin, Lettres d' Artin, Lettres d' Artin,
t.
t.
H,
I,
II,
p.
217;
t.
V, p.
il
p. 212.
t.
t.
p. 62. p. i33.
IV, p. 168.
III,
t.
324
L*ARTIN
quand vous me voyez louer des pagodes indignes de mon encens. Vous devez encore traiter de chansons ces discours: Je meurs de misre Je suis dans le plus grand besoin, et
!cs
(4).
ceux dont il atlendait quelque bienfait, pour les piquer d'honneur (2). Il envoyait dans les cours les plus loignes, pour tre inform de ceux dont il pouvait se flatter de tirer quelque chose, et ne manquait pas de leur crire (3) Il devenait importun quand on lui avait donn quelque esprance (4), et insolent quand il avait obtenu ce qu'il demandait. Il rpond un trsorier de France qui venait de lui payer une gratification Ne soyez pas surpris si je garde le silence. J'ai us mes forces demander, il ne m'en reste plus pour remercier (5). Il se servait de l'appui des plus grands pour forcer la libralit des infrieurs. Il employa Marguerite d'Autriche auprs du duc de Camrino\ ((>), Charles-Quint prs du grand-duc (7), et ce dernier auprs du cardinal de l\avennes(8). Il n'ignorait pas l'usage des ddicaces. Il les adressait ceux dont la gnrosit lui tait connue. Un simple marchand fut associ aux honneurs qu'il faisait valoir aux souverains. Charles Affactati, lui ayant fait prsent d'un diamant et d'un collier de 400 cus, cela lui fit croire que cet homme payerait chrement une ddicace il ne manqua pas de lui adresser le quatrime volume de ses lettres, avec le compliment circuet Je me laire qu'il faisait aux rois repens, lui dit-il, de ne vous avoir pas adress tout ce qui est sorti de ma plume, je vous la consacre en ce jour, et je n'crirai plus que pour vous (9).)) Lorsque l'ptre ne rendait pas ce qu'il s'tait pro11
des
prsents
(j)
{2)
t.
1. 1,
III,
p.
124.
t.
VI,
188,
(3) (4)
t.
27.
t.
t. I,
pp. 37, 146, 176, 92, 817 ; (5) Lettres d'Artin, t. IV, p. 42. (6) Lettres d'Artin, t. IV, p. 3.
(7)
is)
II,
pp. 53,
76;
t. III,
Lettres d'Artin,
t.
II,
Lettres d'Artin,
Lettres d'Artin,
t.
t.
111,
p. 69. p. ujb.
{9)
1G6;
t.
APPENDICE
mis,
il
325
entrait en fureur.
qu'il n'avait
Il
Paul
III,
parce
pas pay
le
menara d'adresser au sultan sa Lgende des Saints (1). Il travaillait de commande, et la matire lui tait jale. De l celle biu^arrure de sacr, de profane et d'obscne. La marquise de Pesquaire l'exhortant consacrer sa plume la pit:
La volont d'autrui et ma misre, lui rpondit-il, sont les causes de tout le mal. L'avarice des grands est gale ma pauvret, et ma plume ne recueillerait que des compliments de commisration, sans sa complaisance (2). Il composa les vies de sainte Catherine et de Saint Thomas d'Aquin, par la marquise du Guast la Comdie du Philosophe Baudoin del Monte lui ft pour le duc d'Urbain commencer la Lgende des Sainis : mais ce seigneur ayant cess de paye'' la pension qu'il lui avait promise, Artin abandonna Touvrage. Ses autres livres de dvotion durent leur naissance l'envie de se raccommoder avec la cour romaine (3). Doni, pour exprimer la facilit avec laquelle Artin composait, dit qu'il faisait un livre, comme on crache (i). Artin La vie m'est prsentelui-mme en convient lorsqu'il dit ment charge il m'est impossible de satisfaire l'avidit des seigneurs. Je n'ai plus de neuf leur offrir. La vieillesse engourdit mon imagination, et l'amour, qui rveillait autrefois mon esprit, ne fait plus que l'endormir. Je faisais quarante stances dans une matine, je suis bien heureux quand je peux en achever une. Je n'ai mis que sept jours Courtisan et le ma Paraphrase des Psaumes ; le j'ai employ Marchal ne m'ont cot que dix matines trente jours la Vie de Jsus-Christ, et j'ai acher en moins de six mois l'uvre entier da la Sirena (5). Coccio dit qu'Artin ne travaillait qu'une heure ou deux chaque matine (6), et il et t souhaiter, suivant le Bembe,
ordre de
fut faite
l'
Artin,
t.
II,
p. 294.
Rime
t.
t.
1.
III,
p. 4o.
(1)
(2)
(3)
III, II,
I,
Lettres d Artin,
Lettres d' Artin,
t.
p. 225;
5,
II,
p.
168.
(4)
(5) (6)
Libreiria
Lettres
I,
Venezia, i53
p. 4o-
d' Artin, t. I,
Let, la ae
Hagg.
20
326
qu'il eut
L*AI\KTfPf
eu assez d'aisance et de tranquillit pour pouvoir de sa fertilit (1). On ne sera pas surpris, avec celte abondance, qu'un homme qui faisait mtier de littrature ft plus curieux de livrer sa marchandise que de la finir. Les erreurs et les bvues l'inquitaient peu, pourvu que la satire en favorist le dhit. Une critique mordante lui tint lieu de justesse, et le soutint pendant sa vie il n'approuvait rien qui lui ft tr;mger, et ne cessait de louer ce qui lui appartenait; mais il n'en imposait qu' ceux qui prennent les eiets d'un mauvais cur et d'un esprit mal fait pour les marques d'un, gnie suprieur. reliIl avait un principe bien dangereux en matire de gion (2). Il soutenait que les fictions potiques deviennent des
recueillir les fruits
:
vrits
contribuent relever la gloire des saints. en parlant de la Vie de Sainte Catherine, l'ouvrage et t peu se soutient sur le dos de l'invention de chose sans le secours de mes mditations (3j. ^ Sa confession de foi s'accorde assez avec ce sentiment. Je crois, dit-il, en Jsus-Christ, et sans chercher autre chose, je m'acquitte des devoirs de la foi (4). Il avoue cependant la tmrit de son entreprise il reconnat qu'il crivait sur des matires au-dessus de ses forces (5), et s'en excuse dans ces
elles
quand
Ce
livre, dit-il
compos ces ouvrages par une confiance que je mriterais plutt un chtiment qu'une rprimande mais n'ayant travaill que par obissance, je suis digne d'excuse (6). Il me reste rendre compte des ouvrages de notre auteur, et parler de ceux qui lui ont t faussement attribus.
termes
:
Si j'eusse
tmraire, j'avoue
mieux
Ses dialogues obscnes sont sans contredit ce qu'il y a de crit pour le style. Il se vante d'avoir trait les matires les plus infmes, sans qu'il lui soit chapp un terme dshounle (7). Jelaisse juger si cette excuse justifie le choix de la matire.
I,
Le*, de Dembo,
t. III, t.
p.
p.
285.
i68.
i6().
Lettres dWrt^n,
Lettres d'Artin, Lettres d'Artin, Lettres d'Artin, Lettres d'Artin,
II,
t.
III,
III,
p.
p.
1.
t.
io6.
t.
t.
Lettres d'Artin,
p.
196,
APPENDICE
327
trois parties
.
premire,
il
maries et l'esprit des dernires. L'auteur les intitula d'abord Caprici, invention bizarre et sans rgle il les nomma dans la suite Dialogues. Ils ont t imprims ensemble et sparment. La premire partie est ddie son singe, et finit par cette invective contre les nonnes Bien loin d'crire sur ces matires, je n'aurais pas seulement os y penser, si je n'eusse espr que le feu de ma plume pourrait servir purifier les traces honteuses de leurs dbauches. Elles devraient clater dans
;
:
La derDans la est question des dsordres des nonnes, des femmes des courtisanes. La seconde traite de la vie et de
plus supportable.
leurs clotres
souilles
comme les lis des champs; mais elles se sont dans la fange du sicle, de faon que les monastres, tablis pour nous donner une ide du paradis, sont devenus l'image de lenfer. Je me flatte que cet crit fera rof'ficc du fer cruellement pitoyable, avec lequel le bon mdecin retranche le membre infect pour sauver ceux qui sont
sains (1).
La seconde partie est ddie la Valdaura, clbre courtisane de son temps. On ne vit des ditions un peu correctes qu'aprs la mort de l'auteur. La plus complte a pour titre Raggionamenti di M.P.Aretino cognominato il Jlagellodi principi,il vere iiero e il divino, diuisi in ire giornaie, 1584. La seconde partie est intitule :// Piacevole Raggionamento del Aretino nel qaale il Zoppino fra4e, e Lodovico Palassiero, trattano de la vita e de la genealogia de tatte corieggiane di Jioma. On y a ajout // commento di ser Agreslo sopra la prima ficaia del padre Siceo con la diceria de Nasi (2). On lit la tte de la quatrime partie Raggionamento nel qaale M. P. Aretino figura con quarto saoi amici, chefavellano de tutte le Corti di mondo,e di qaella del Cielo. Il y avait eu une dition antrieure o l'on avait dat Cosmopoli, au lieu du nom de la ville dans laquelle parut' pour la premire' fois le Dialogue de Madeleine et de Julie, sous le titre de la Putana errante. Cet ouvrage a form de gran;
:
Edit. Cosmopoli, 1660, p. i. Molza est l'auteur du premier ouvrage, rangue sur les nez.
it) (3)
Ragg.
et
Dolce a
fait la
ha-
328
l'ahtin
des disputes dans la rpublique des lettres, les uns l'attribuant l'Artin, et les autres le donnant Laurent Venier. Bayle se dclare pour les premiers (1), Ceux qui adoptent le sentiment des seconds se fondent sur ce qu'Artin dit lui- mme :
Moi qui connois l'odeur un ouvrage, Qui sais sentir un ^-enlil badinage, Je vous envoie, en un style bouflbn, Du bon Venier la Courtisane errante; Mon colier dont la plume galante
Passe son matre en ce mtier fripon
(2).
Et La Mothe
le
tirement dcrie, l'appelle la Courtisane de Venier (3). Il n'est pas cependant si difficile d'accorder ces deux opinions, quand on sait que deux ouvrages ont port le mme titre. Le premier est un petit pome divis en trois chants qui contient 138 stances, et qui fut imprim Venise en 1531 (4); et le
second est
et
le
l'autre
:
dialogue dont il s'agit. Ce dernier est d'Artin, de Laurent Venier, qui invoque son matre en ces
termes
Illustre et
sublime Artin,
fanatique
Prte
ma muse
Dans la seconde dition de ce petit pome, qui ne parut qu'en 1558, il y a une prface d'Artin, qui ne vivait plus alors, et Venier y ajouta 144 stances, sous le titre Trent'uno{^) de la ZaJ/eta, qui contiennent le rcit d'une aventure de sa courtisane. Venier, qui tait piqu de ce qu'on avait donn
son premier ouvrasse Artin, s'en plaint aigrement au com-
mencement de
(i)
(2)
cette dition
(3)
(',)
Bayle, Dict., mol Artin (Pierre), note k. Opcre barlesche, t. III, pp. 28, 29. J) ca lof/ ue du mariage, p\ 3y6.
C'est de cette
p.
dition
t.
I,
io5.
faon figure de parler qu'on peut (5) Dure il trent'ano est une rendre en franais par donner le reste.
APPENDIGB
Il
329
n est point de
tt-te if:;iiorante
le
Dans
sa langue et dans
:
lalin,
Qui ne dise C'est Arn Oui fit la Courtisane errante. Ils ont menti, les sots et pour mieux claircir Jusqu' quel point va leur btise, De Saffette en ce jour je chante le plaisir. Mais d'o peut natre leur mprise?
!
Si cet crit brille de quelques feux, Arctin m'a prt son pinceau merveilleux. Pense-ton qu'un esprit de glace Pour avoir invoqu sa muse une ou deux fois,
Atteii;;ne au sommet du Parnasse? Ce serait dans un jour gurir du mal franais. Il faut que l'on invoque Artin, vrai prophte, Si l'on veut, comme moi, devenir bon pote D'un style plus sublime et crit l'Artin,
;
S'il
et fait parler
ma
P...
Je
dus ces talents qui font que l'on me prise, Mais jamais d'une femme a-t-il vu la chemise? Il vous a donc aid. J'ose encor dire Noa; Et ne veux point que l'on me berne Avec Berni (i), qui souscrit de son nom Ces vers dignes de la tavv rne, O si mal est peint le g^uerrier Qu'en ridicule il a su copier.
lui
:
Et plus bas
il
ajoute
Saffette, j'entreprends
Press par deux motifs dans un style divin, de chanter votre gloire J'ai voulu prouver qu'Arlin N'avait pas de part l'histoire, etc.
Malgr ces preuves, qui sont concluantes, l'auteur anonyme d'une lettre rapporte par Mnage ne laisse pas de s'opinitrer soutenir que le dialogue et le pomc sont d'Artin (i).
L'dition de Lucerne attribue
malignement
les
deux pomes
(i)
Berni, trouvant
le
style
du boyard
mme
20.
33o
L AUTIN
Maffe Veniero, archevque de Corfou, et ce n'est pas la seule fois que les protestants ont us de cette ruse, dans le dessein de porter atteinte aux chefs de l'Eg-Iise romaine. Mafte n'tait pas n lorsque ces ouvrages parurent, et le vritable
tuteur se
nomme
Extravaguer une fois l'an Votre Laurent Venier prend ici sa licence
Pierre Marteau, un petit livre Il a paru Cologne, chez sans date d'anne, intitul la Bibliothque d'Artin, quoiqu'on y sait insr plusieurs pices qui ne sont pas de lui. On trouve au commencement une traduction des deux premiers celle de l'entretien de dialoj^ues, qui n'est ni exacte ni fidle Madeleine et de Julie, qui est la fin est un peu meilleure. Ces dialogues ont t traduits en espagnol et en latin, et imprims Zuickaw et Francfort en 1624, sous le titre de Ponnobosco-didascalus, seii Colloqiiim muliebre de astu et dolis meretricum, exitalico in hispanicum versus Ferdinando Xiiaresio, ex hispanico in latinum Gaspare Barthio, Ils ont encore t mis en allemand sous le nom de P. Aretini Ilalianischer Hiiren Spiegel. Nuremb., 4672. Goccio parle ainsi de cet ouvrage Artin a plus rassembl de paroles en dix jours que les presses n'en pourraient
;
rassembler
leur caractre;
;
introduit gardent propos sans ordre et la ngligence qui caractrise les ouvrages de sans liaison l'auteur est une beaut dans* celui-ci. Les priodes coupes, les expressions impropres, les vices de la diction contribuent le rendre plus ingnu. L'auteur reprsente au naturel deux femmelettes qui entament les grands discours sans les
en
vingt. Les
il
femmes
qu'il
leur fait
tenir des
finir,
qui
rptent ce
qu'elles
ont
dit,
et
recommencent
qu'il
quand on
sont
la
Les matires
traite v,
le
porte de tout
le
monde.
On
reconnat pai*tout
de cet admirable gnie. Il n'y a personne qui ne croie entendre deux Florentines causant coeur oufeu et la fertilit
vert, etc.
II.
M.
/ setli Salmi di Penitentia di David, composti par Pietro Aretino. Cette paraphrase des Psaumes fut impri-
APPENDICE
33l
me pour
li
U premire fois en 1531, et ddie Antoine Lev. y en eut dans la suite plusieurs ditions. Leuis de Vaucelles,
prieur de Montrottir, matre des requtes de la reine de Navarre, se donna la peine de la traduire en franais. Cresla jue dig-ne d'tre lue mais il faut avouer qu'Areu le sort de tous ceux qui ont voulu faire parler le toiprophte sans avoir ses sentiments. III. 1 tre libri de VUmanita di Cristo di M. P. Aretino. Artin ddia ce livre au marquis de la Stampa, son bienfaiteur, qu'il y qualifiait de magnanime seigneur mais le titre et la ddicace furent supprims aussitt que le marquis de la Stampa cessa d'tre utile; exemple de dsintressement renouvel de nos jaurs. Le prieur de Montrottier habilla aussi cette
;
cembeni
tin a
Humanit
IV.
//
la
franaise.
Genesi di M. P. Aretino, con la Visione di Noe, nella qiiale si vede i Misterii del Testamento Vecchio e Niiovo. Vinezia, 1538. L'infatigable Vaucelles donna encore une traduction de cette rapsodie. L'inquisition, en condamnant ces ouvrag-es, leur donna la vogue. Aussi furent-ils rimprims le sicle smivant , sous le nom anagrammatique de Partenio Etiro. V. La Viia di Catharina Vergin'e, divisa in tre liriy ddie au marquis du Guast. Il y eut une seconde dition de ce livre en 1552, sous le mme nom de Partenio Etiro. VI. La Vita di Maria Vergine, ddie la marquise du Guast. Ce livre fut traduit en franais par un anonyme et rimprim dans le dix-septime sitle. VII. La Vita di san Thomaso d'Aquino. Vinezia, 1543. Artin nous apprend que le chevalier Vendrino s'avisa d'en faire un pome (1). Elle fut rimprime en 1628 et en 1630. Tous ces ouvrages sont d'une Si l'on en croit Ghilini grande beaut, remplis de doctrine, et prouvent que le gnie d'Artin embrassait tous les gsnres de littrature (2). Il fallait que Ghilini ne connt ces livres que superficiellement ou qu'il ft aveugl par l'amour de la patrie et le mauvais got des sicles prcdents. Mnage en juge plus saine Artin n'est supportable que dans ce ment, lorsqu'au dit
:
y>
(i)
(a)
Lettres d'Artin,
t.
I,
p. a48.
I,
letier., t.
p.
iga.
332
qu'il a fait
l'ahtin
de libre
le souffrir, et c'est la
et de saint Thomas d'Aquin, sa Gense et sa Paraphrase des Psaumes,soit pour les expressions, soit pour les penses (1). VIII. La Corteggia, comedia del divino M. P. Aretino. Vinezia, 4534. Dans cette pice, Maco de Sienne vient Rome pour accomplir le vu de son pre de le faire cardinal. Convaincu qu'on ne peut attraper la barrette sans tre rompu au mange de la cour, il s'adresse matre Andr pour apprendre le mtier de courtisan. Celui-ci le conduit auxtuves et le fait entrer dans une cuve qu'il nomme le moule des cardinaux. Aprs l'avoir fait raser et parfumer, il lui persuade que ce crmonial lui a donn l'esprit et la science qui lui manquaient, et lui prsente un miroir concave. Le bon Maco, voyant son visage grossi de moiti, s'imagine qu'il en est de mme de" son mrite, que toutes les femmes vont courir aprs lui, et qu'il sera bientt le matre dans Rome. Il faut remarquer que l'auteur introduit sur la scne le sacristain de
Saint-Pierre et le prieur des rcollets d'Ara Cli. Le clerg de ce temps n'tait pas si chatouilleux que le ntre, puisqu'il laissa reprsenter cette pice pendant le carme de 1537, dans la ville de Bologne, qu'Artin nomme la Servante des prtres et V Adulatrice de leurs dbauches [^).
IX. Il Marescalo, comedia di M. F. Aretino, 1533. Un duc de Mantoue avait un marchal qui regardait les femmes de travers. Ce duc feignit de vouloir le marier, et promit 400 ducats pour la dot de la future. Quoique le marchal se trouvt dans un grand embarras, l'avarice triompha nanmoins de l'aversion mais le duc lui prsenta un jeune garon habill en fille. Ce galant homme ne se fut pas plutt aperu de la raillerie qu'il reprit toute sa gaiet. Ces pices ne sont que des scnes dtaches. L'auteur avait dessein de jes rduire en cinq actes (3), pour leur donner une forme rgulire ce projet n'a pas t excut. Il fait paratre dans ces deux pi;
:
(i)
(a)
Menag.,
t.
II,
p.
io8.
t.
Lettres d'\rlin,
I,
(3)
Lettres d'Arlin,
t.
I,
p. 245. p. 20r.
APPBWDTCE
333
Vinezia, de famille, accabl de malheurs et rduit ou dsespoir, reprend courage par les conseils de l'Hypocrite, et s'lve au-dessus de ses adversits. La perscution de ses gendres et la dbauche de ses filles ne le touchent plus. Il mprise mme les faveurs que la Fortune lui vient offrir, d o l'auteur conclut que cette desse, sujette aux travers de son sexe, refuse ses grces ceux qui les sollicitent, et les prodio^ue ceux qui n'en font pas de cas. Cette pice ne tient rien de ce que son titre promet, exemple fidlement copi par plus d'un moderne. On croit trouver un caractre comme dans le Tartufe, on n'y voit que quelques traits contre les
X.
L'Ipocrito^
comedia di M. P. Aretino.
4542.
faux dvots. XI. Il Filosojo, comedia di M. P. Aretino. Vinezia, 4546, Toutes ces comdies tant extrmement rares, nous n'avons pu recouvrer celle-ci, ce qui nous met dans l'impossibilit d'en donner l'artrument. Un certain Jacques Doronnetti, sur la fin du dix-septime sicle, fit une imposture la rpublique des lettres, dont il est propos de rendre compte. Aprs avoir chang les prolog'ues, les noms des personnages et retranch les obscnits, il fit rimprimer les comdies dontil s'agit, comme des pices nouvellement dcouvertes. Le marchal fut dguis sous le nom d7/ Cavalerrizo, comedia inge-
niosa ; le Philosophe prit le titre 6' Il Sojista, comedia bellissima, et l'Hypocrite fut masqu sous celui d'il jinto corne' dia leggiadra. Pour appuyer l'imposture, il raconte, dans la prface qu'il a mise la tte de cette dition, que ces comdies ont t trouves dans les papiers d'un bel esprit qu'il nomme Luigi Tansillo, mort depuis peu de temps. Stigliani a donn
dans
tes.
le
panneau
(1)
Il impute cette supposition la ncessit d'luder les fulminations qui enveloppaient indistinctement tous les ouvrages de notre auteur. XII. La Talenta di M. P. Aretino, composta alla petizione de magnifiai signori sempiterni, e recitata d'alla loro proprie magnificenze col mirnbelapparato. Vinezia, 4542. Talente, courtisane, se plaint de la fuite d'un Maure et
(i)
334
d'une esclave, qui
pitaine napolitain,
afin d'avoir entre
lui
l'artin
l'autre
pour cette courtisane, dans sa maison, et pouvoir parler l'esclave qu'il aimait. Fch de l'avoir perdue, il rencontre B'iando, qu'il souponnait de l'avoir enleve, etentre chez lui, o il apprend que le Maure est la femme de Marchetto, filsdeVerg"olo, qu'on avait peinte en noir que l'esclave est un jeune garon habill en fille, et mari depuis peu Marmilla, fille de Tinca, et que ces dguisements n'avaient eu pour objet que d'escroquer les faveurs de Talente. Cette dcouverte gurit Armillio de sa premire passion, et lui fait ouvrir les yeux Vergolo et sur les beauts de la fille de Blando qu'il pouse Tinca payent la valeur des esclaves, et Talente se raccommode avec Orsinio, son ancien galant (i). XI!I. Lettere di M. P. Aretino, Vinezia, 1537. Ce recueil, dont il ne parut d'abord qu'un volume, fut pouss jusqu' six, qui furent runis dans une dition qu'en donna Mathieu Le Matre, Paris, en 16i9 (2). Quoique Artin se vante d'avoir t le premier qui ait publi des lettres familires (3), l'Addo avait fait imprimer (4), longtemps avant, celles de Catherine de Sienne et celles de Filclfo; mais il faut convenir qu'il est le premier qui se soit avis de donner au public ses proprs lettres (5). Mihutoli prtend que le premier volume mrite quelque attention (6). Et Mnage dit qu'il a lu avec attention
; :
pu y trouver
II, p. ^S?. Giornale dlie LeUer< XI, p. i53'. (2) Le premier volume, imprim en i537, ^^^ ddi au duc d'Urbia. Ce livre eut tant de vo;ijue qu'il y CQ eut neuf ditions en sept ans. Ledeuxime fut imprim en i542, et ddi Jacques I", roi d'Angleterre. Le troisirue en i548, ddi Corne de Mdicis, duc de Florence. Le quatrime fut ddi Charles AfFaetati Marchand, en i55o; il le qijalifie de magnnnirne seignear Le cinquime parut la nimeaanc, et est ddi Baudouin del Monte. Le sixime parut en inoy, et est ddi Hercule d'Est. (3) Lettres d' Artin, t. III, p. 19; Mnag., t. II, p. 178. \k] Elog. liai., pp. 36i, 362. (5) Let. d'Aposloio Zeno.
(<)
d'Ha.,
(6)
Bayle, Dicl,,
mot Artin
(Pierre), note r.
APPENOIGK
335
ses
un mot
qu'il
lui
ft possible
ou-
vra^-es (i).
Max. Pont., ccmpoAretino. Ce petit pome et le suivant ne se trouvent que dans les anciennes bibliolhcjues. Ils furent imprims Rome en i53i. XV. Canzone in Iode del Dntnrio^ compozitione del preclaro poeta M. P. Aretino. On peut regarder ces ouvrages comme des pices fui^itives, qui parleur valeur n'ont intress personne les conserver. XVI. Sonnetii lussuriosi di P. Aretino. Ce sont ces sonnets, dont nous avons parl, qu'Artin fit pour mettre au-dessus des dessins de Jules Romain, gravs par MarcRaymondi. Ce petit livre est aussi rare qu'il est obscne, et ne contient que 25 pages. On ne trouve plus que l'estampe qui servait de frontispice. Lallain, riche marchand de Paris, acheta ces planches pour dOO cus, somme alors considrable, dans le dessein de les anantir ce que son zle excuta, de faon que les misrables copies qui courent aujourd'hui le monde n'ont que le venin de celles de ces grands matres (2). M. de La Monnoye, pour gayer sa srieuse littrature, a bien voulu rduire en distiques latins chacun de ces sonnets. Il a mis ces deux vers sous le portrait d'Artin
XI V\ Lande di Clmente Vif, Opt.
zitione del diuino poeta
M. P.
Marc grava
L'un
et l'autre le
:
Et pour prface
De Marc
du Romain les noms sont oublis ; Le public toi seul adju^-e ces figures Tes vers font oublier les traits et les postures,' Et les honneurs communs te sont appropris. Mais, victime du temps, ton galant hadinage,
et
:
Pour rparer du sort l'injurieuse rairc. Faible soulagement des pleurs superflus,
J'ose t'ofTnr, lecteur, dans ces faibles distiques
Un essai de ces sels attiques. Priape coutera volontiers mes discours , frre des Amours. Il est, quoique grossier, le
(i)
Mnag.,
t.
II,
p.
109.
p. 234.
(2) Ghevillier,
336
l'artin
Qui ne serait attendri des regrets de ce grave acadmicien? Quelques auteurs, qui avaient entendu parler de ses sonnets sans les avoir vus, se sont imagin qu'Artin avait compos un livre, de omnibus Veneris schematibus.
XVII. Duoi primi Canti di Marjisia del divino M. P' Aretino. Ce pome n'est que commenc. Le troisime chant parut en 1538. L'auteur en fit brler le reste (1). Bernard AccoUi en parle avec loge (2). XVIII. Stanze di M. P. Aretino in Iode di Madona Angela Sirena. Vinezia, i^^il. L'impratrice, laquelle il ddia cet ouvrage, lui envoya un collier d'or de cinq cents cus. Il a fait imprimer la tte quelques sonnets apologtiques qu'il avait mendis de quelques potes de ses amis. Nos anciens les Comits des cafs n'taient n'en savaient pas davantage pas encore forms. Aujourd'hui, cinq ou six missaires dputs dans ces regrats du bel esprit emportent les suffrages, et la
:
cohue subjugue le parterre et le public. XIX. Dlie lagrime d'Angelica di M. P. Aretino, duoi primi canti. 4538. Ce pome eut le mme sort que celui de Marfise, et quoique imparfait, la marquise du Guast, laquelle il tait ddi, le paya comme achev sur la parole de fauteur. UUnico Aretino se rcrie aprs l'avoir lu Moi dont l'art a
:
fait
larmes celles d'Anglique (3). XX.Strambotti (4) alla Villanesca Freneticati dalla quartana, con le Stanze alla Sirena in comparas ione de gli stili. Vinezia, 1544. Ces vers mordants sont adresss al facettissimo Trippa Cantianese Slafieri d'ogni sema menda
duca d'Urbino (5). XXI. Crescembeni parle d'un pome la quise du Guast, imprim en 1542, dont il ne
tige (6).
(i) (2)
gloire de la
reste
maraucun ves-
Lettres cfArtin,
Lettres
t.
III, p.
t. I,
288.
1
Lettres l'Artin,
p.
34.
VArtin, t. I, p. i34. une espce de posie divise par stances (4) Les Strambolti sont de huit vers chacune. II, p. 781. Il y a un exemplaire (5) Bibliot. du P. Montfaucon, t. de. cet ouvrage dans la Bibliothque du Roi Pari< (6; Istor. dlia volg, Poes., t. IV, p. 46.
(3|
APPENDICE
337
XXII. UOrasia di M. P. Aretino. Vinezia, 45^6. C'est une espce de tragdie en vers libres, que l'auteur appelle son chef-d'uvre (1), et qu'il ddia Paul III. On ne la trouve qu'en manuscrit (2). XXIII. Capitoli (3) di M. P. Aretino in Iode dcl magnani/no daca d'Urbinn. Ce pome contient deux cent vingt-six vers, et deux sonnets, dont l'un est le portrait du duc et l'autre
Tlog'e de la clbre Vittoria Farnse, son pouse.
e dlia
in
1551.
Li daoi Canti di Orlandino di divino P. Arenella Stampa pel maestro delta Stampa d'entro la Citta ; e non faori, nel mille, vallo cerca. Artin, sans s'excepter, tourne en ridicule tous les potes de son temps qui affectaient de prendre leurs hros dans la cour de Charlemagne. Il invoque, au lieu d'Apollon, un certain Gambano, personnage infme, et la fameuse Saffette lui tient lieu de muse. Il s'est servi du diminutif de Roland non qu' l'exemple de quelques autres il ait pris pour sujet l'enfance de ce paladin, mais parce qu'il en fait un pauvre petit homme, et qu'il reprsente Astolphe, Renaud et les autres comme une
.
XXV.
tino.
Stampato
de poltrons. poetico del divino P. Aretino^ e del bestiale Albicante, occorso sopra la gaerra di Piedemonte,e la loro pace celebrata nelV Academia de gli Intronati di Sienna. Il composa encore un grand nombre de satires, dont il ne reste plus de vestiges. La mort de Jsus-Christ, tragdie de
et
troupe de goujats
XXVI. Combattimento
sa composition, a eu
trait del
le
mme
sort (5).
Il
t.
IV, p. Bg.
Allac, Drammalurr/ia, p. 62^. (3) Les Capitoli sont un g^enre de posie dont les stances sont de six vers, et les rimes redoublent de trois en trois vers. stances sont encore de six (4) C'est un genre de posie dont les vers, mais snns rimes rednnblt-'es. (5) Lettres d'Ailm, l. VI, p. iS/j.
(6)
(7)
I,
p.
rga.
Etoy. d'Uoin.
lelter.,
t,
I,
p. 4o.
ai
338
et
l'artin
(1) parlent
(Fun ouvrage qui n*a pas vu le lgende des Saints (2). Le snat voulut 'engas^er entreprendre l'histoire de Venise (3), et CharlesQuint lui proposa d'crire sa vie (4). Mais il s'excusa de l'un et de l'autre sur son incapacit. Alexandre Piccolomini (5) parle d'un dialogue entre deux cardinaux sur les murs du clerg, et Coccio lui allribue un Trait de la servitude et de la libert (6). H y a bien de rappnrence que ces (ieux ouvrages ne furent qu'en projet. Il en est de mme de la comdie, et des quatre thses que le Pdant annonce la fin de la
Doni
Il
comme
jour.
commena
la
Dieu aidant, lors du comdie du Marchal lorsqu'il dit relchement de nos tudes, nous esprons vous donner une comdie des progrs du Marchal suivie de quatre thses. La premire tablira quel est le boheur de ceux qui n'ont point de femme. La deuxime Jmonlrera la misre de ceux qui en ont une qui ne veut pas mourir. La troisime prouvera les accidents qui menacent le front et les paules de ceux qui se chargent de cette niarchamiisc. Enfin, la quatrime conclura par la flicit de Cijx (jui n'en ont point, qui n'en ont point
^
d'homme
caustique,
regarder comme un cynique. Ce titre do flau des princes et de censeur du monde autorisait les railleurs mettre leurs productions malif^'nes l'abri de son nom 11 se vit bientt le pre de ces libelles dont le venin fait le mrite, misrables enfants du secret et del perversit, monstres dsavous par leurs parents
et ses crits satiriques et licencieux l'ont fait et qui
lui attribua ces satires sanFrgosse, contre Antoine de Lev, et contre Charles-Quint. On le fit l'outear de ce testament ridicule qui dchire galement le pape et l'empereur (8).
glantes
(i)
Zirarm
//.
Vinezia,
t.
t.
t.
i55,5, p.
lA?
VI, p. 7. I, p. 820.
III, p.
187
t.
IV, p. 104.
(7)
(8)
Lettres rArtin, t. H, p. i43. Let. in fine dei Raggion., edit. 1660. Cosmopoli, p. 417. Marescalco, com., atto V, scena ultima. Il s'en dfend vivement dans ses Let., t. I, p. 76; t. IJ,
p. 69.
APl'IiNDlCE
33^
On
mme
intitul
de prface.
Docteurs es lois, sublimes ergoteurs, Qui connaissez le Grand Balde et Barthole, Qui nivelez le droit dans votre cole. Expliquez-nous, magnanimes seig'neurs, Ces doutes amoureux, source d'une querelle, Qui partage en ce jour P... et M
'
est
Le caractre de l'impression n'est pas d'Italie, et le style du dix-septime sicle. Il contient trente-un huitains, suivis
de seize problmes et de leurs rsolutions. On y a joint dixsept sonnets dont quelques-uns pourraient bien tre d'Artin,
et qui
Il
le tout.
VAlcibiade fanciallo a la scuola di P. A., et on mit sur son compte le Commento de la Grappa interno al Sonnetto, poiche miaSpeme longo venire troppo, doue ciarlo e longo dlie Donne e del mal francese. Mantoua,i^i^. L'auteur affecte de n'employer que les expressions dont Artin s'est servi dans ses dialogues mais ces ouvrai^es n'ont de commun avec lui que les obscDits dont ils sont remplis.
servit encore de couverture
:
21
TABLE
l?iTRODUCTIOM
Sonnet du Pape Lon
Xlle Sonaet luxurieux
38
Ao
43
RAGIONAMENTI
l'ermite
)7
LE PRISONNIER
6l
lb putanisme
les caractres
,
67
:
7*^
7^ 83
99
LE COURTISAN LB PUTASSIER
o3
o8
O
^
LB TRENTE-ET-UN DOUBLE
> ^
I
LA FUSTIGATION
LA DEMOISELLE
H^
.
LA VENGEANCE DU GALANT
l'amant vert
I I
121
DAMB QUINIMINA
LA FILLE DK ROI
LE RENARD DES MULETIERS
LES SUPERSTITIONS
123
^7
'
I '
^^1
LE MA(2UEHt.LLAGE
^Q
3^2
LE BKLLATRE
l'aul;iin
....
I ^*|2
LA VEUVE
LE MOINE
LES SORTlLriES
1^6
I
53
Go
LANTES
LE SIENNOIS LE PAPE ET LE KlJSiUE
LE Baron franais
l65
1
66
167
THTRE
l'orazia
169
I
-y I
l'hypocrite
LE PflLOSOPHE
in 2
I
LA FEMME DE COUR
8o
LES LETTRES
AU DUC PERPTUEL DE FLORENCE AU PICCOLOMINI
AU SCULPTEUR TRIBOLO
AU MARQUIS DE MANTOUE
2l3
2
I
4
Zj
2
2
AU MME
A CLMENT
VII
2^0
222
224
225
li2
226
2
;
A l'VQUE DE VAISON
A CLMENT
VII.
26
......
227
228
229 23o
aSi
VEKGERIO
sSf
TABLB
343
,
AU TITIEN
233
AU AU AU AU AU AU AU AU
FILS DU TITIEN
235
a36
237 239 2^0
24l
MME
2^4 245
APPENDICE
KSSAI DE BIBLIOGRAPHIE ARTINESQUE
2^7
276
ACHEV D'IMPRIMER
le
PAR
G.
HO Y
le
A POITIERS
pour
MERGVRE
DE
FRANCE
MERCVRE DE FRANC)
XXVI,
Parat
le
RVE DE
COND
et
PARIS-VI*
forme dans l'anne six volume
"
et le 16
de chaque mois,
Littrature, Posie, Thtre. Beaux-Arts Philosophie, Histoire, Sociologie, Sciences, Voyages Bibliophilie, Sciences occultes Critique, Littratures trangres, Revue de la Quinzaine
Revue de la Quinzaine s'alimente l'tranger autant qn en France ore un nombre considrable de documents, et constitue une sorte d'er. cyclopdie au jour le jour du mouvemeat universel des ides. Chronique suisse romande Re. Les Pomes Georges Duhamel. de Week. Les Romans Rachide. Lettres allemandes Albert. Henri Littrature Jean de Gourmont. Lettres anglaises Henry-D. I^avray. Histoire Edmond Barthlmy. Lettres italiennes Giovanni l'apini. Philosophie Georges Palante, Lettres espagnoles Marcel Robin. Le Mouvement scientifique Georges Lettres portugaises Philas Lebesgue. Bohn. Lettres amricaines Thodore Stanton. Sciences mdicales : D' Paul Voivenel. Lettres hispano-amricaines FranScience sociale Henri Mazel.
La
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