Piete
Piete
Piete
2021 17:32
Anthropologie et Sociétés
Découvrir la revue
Tous droits réservés © Anthropologie et Sociétés, Université Laval, 2018 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des
services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique
d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne.
https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/
Géraldine Mossière
Tourner le regard vers le soi en vue de mener une « vie bonne » apparaît
comme un impératif individuel et moral pour beaucoup de contemporains. Le
sociologue Pierre Prades (2014) note que cette réflexivité est habituellement
vécue comme un choix non seulement rationnel mais aussi utilitariste, le sujet
devenant un projet en soi, et l’humain un foyer de potentialités à réaliser. Selon
lui, ce projet prend ses racines dans une éthique protestante libérale toujours active
dans les pays de tradition chrétienne, s’appuyant sur l’idéal de sanctification ou
de perfection propre aux puritains. Cette morale axée sur l’individu se conjugue
également à un principe de responsabilité personnelle et, on pourrait dire, sociale.
L’héritage de la philosophie antique et son intérêt pour le travail du sujet sur
lui-même ne sont pas étrangers à la centralité actuelle de l’accomplissement
du soi. La démarche typique du philosophe antique s’opère en effet à l’aide
d’exercices dits « spirituels » qui visent la connaissance et le déchiffrement du
soi de façon à, ultimement, incarner et refléter ce que l’on médite. Selon le
sociologue et philososophe Jean-Louis Schlegel, la sécularisation et l’avènement
du rationalisme ont relégué ces ascèses axées sur la sagesse et l’attention au soi
dans le domaine de la vie religieuse. Le philosophe Pierre Hadot (2002) ajoute
que, historiquement, ce souci du soi ne se dissociait guère du souci d’autrui ni
des affaires de la cité, au rang desquels figurent le devoir d’agir au service de la
communauté humaine, et selon la justice. Comme l’indique Jean-Louis Schlegel,
cette « tradition profane ou terrestre de la vie antique visait avant tout la vie
bonne en ce monde, le rapport à soi, au cosmos et aux autres hommes, et [elle]
apprenait aussi à mourir » (Schlegel 2014 : 36).
Technologie du soi par excellence (Foucault 2001), la conversion représente
sans doute l’archétype de ce travail d’amélioration et de réalisation de l’un,
au service du tout. Notre étude ethnographique menée auprès de converties à
l’islam au Québec et en France montre en effet que pour ces dernières, entrer
dans l’islam signifie incorporer un ensemble de pratiques religieuses et sociales
qui façonnent le sujet de piété musulman (Mossière 2013). Cette herméneutique
du soi s’opère conformément à une nouvelle conception du collectif qui, tout
comme elle, s’inscrit dans une structure sociale et politique, est porteuse de
Anthropologie et Sociétés, vol. 42, no 1, 2018 : 135-153
Nouvelles musulmanes
Éduquées, urbaines, connectées et engagées
Entre 2006 et 2008, nous avons mené une enquête ethnographique auprès
de femmes converties à l’islam en France et au Québec : 38 entretiens semi-
dirigés ont été menés au Québec et 40 en France, ces entrevues ont donné lieu à
deux études longitudinales au Québec et quatre en France, incluant observations
et plusieurs discussions informelles à intervalle. Les entrevues ont été dirigées
selon la technique du récit de conversion de façon à mettre en parallèle les
trajectoires biographiques et religieuses. Nous avons également effectué des
observations au sein d’associations où les répondantes sont actives ainsi que dans
des mosquées et dans divers centres d’apprentissage où elles suivent des cours
d’arabe ou sur l’islam. Les récits collectés auprès de ces femmes traitent de leur
parcours biographique antérieur à la conversion, puis de leur démarche vers et
dans l’islam. Ils portent en particulier sur les modes d’apprentissage des pratiques
religieuses et sociales et des codes de conduite liés à la tradition musulmane
(alimentation, habillement, hygiène, etc.). Plusieurs des femmes interviewées lors
de cette première phase de collecte des données ont été recontactées depuis 2016
dans le cadre d’une étude longitudinale toujours en cours qui a permis de
retrouver huit de ces femmes au Québec, et cinq en France.
Profils de converties
Parmi les 38 femmes rencontrées au Québec, 28 sont nées dans la province,
deux proviennent du Canada anglophone, cinq sont européennes, et trois sont
originaires d’Amérique du Sud. 36 des 40 répondantes rencontrées en France y
sont nées ; l’échantillon compte également deux Belges, une Britannique, et une
Rwandaise ; cinq des femmes nées en France sont filles d’immigrants (quatre
d’Europe du Sud ou de l’Est, une du Cambodge) tandis que quatre femmes sont
originaires des Antilles francophones (Guadeloupe, Martinique, Haïti). Si tous les
âges sont représentés, la génération des moins de 35 ans prédomine nettement, en
particulier en France : elles ont 30 ans ou moins (21 au Québec et 24 en France),
et la grande majorité est âgée de moins de 38 ans (31 au Québec et 30 en France).
La plupart des femmes interviewées sont mariées à des hommes nés dans l’islam,
et les rares célibataires recherchent activement un conjoint de la même confession.
Des profils-types de trajectoires de conversion semblent se dessiner selon les
catégories d’âge puisque les plus jeunes ont habituellement adopté l’islam à
la suite de démarches personnelles, alors que les quadragénaires y ont surtout
adhéré dans le cadre d’unions mixtes (via la reconversion d’un mari musulman
de naissance, non pratiquant au moment du mariage).
Étant donné leur catégorie d’âge, la plupart des répondantes sont étudiantes,
bien que toutes aspirent à rester au foyer afin de se consacrer à leur vie familiale
et religieuse qu’elles considèrent inextricablement liées. Les niveaux d’éducation
sont généralement élevés, en particulier au Québec où plus du trois-quart
des femmes préparent ou détiennent un diplôme universitaire, 17 de niveau
baccalauréat québécois (licence en France), et 12 de second cycle ou plus ; parmi
les neuf autres converties, certaines ont suivi une formation professionnelle ou
obtenu un diplôme collégial. Outre les 14 étudiantes, les sept femmes au foyer,
les trois en retraite ou préretraite, et une femme travaillant à temps partiel, les
domaines d’activités des autres femmes converties sont variés : enseignement,
administration, service à la clientèle. En France, neuf femmes rencontrées ont
une scolarité de niveau baccalauréat ou moins, et ce sont aussi les répondantes les
plus jeunes ; 11 converties ont suivi une formation technique ou professionnelle
de moins de trois ans après le baccalauréat, et 10 détiennent ou sont en voie de
détenir une licence ; 10 femmes, soit un quart des répondantes sont diplômées
de niveau second et troisième cycle. Les activités et choix professionnels des
répondantes ne reflètent pas leur niveau de qualifications : huit converties restent
au foyer, neuf sont étudiantes, et trois occupent des emplois précaires dans la
restauration, au sein de l’entreprise familiale, ou dans l’entretien ménager.
La plupart des musulmanes que nous avons interviewées vivent dans les
centres urbains (Paris, Lyon, Rennes, Montréal, Québec) et celles qui proviennent
de milieux plus ruraux ont habituellement une expérience internationale
(séjours touristiques à l’étranger, stage de coopération, unions mixtes, etc.).
Contrairement au Québec où les nouvelles musulmanes rencontrées proviennent
de milieux sociaux très divers, une forte proportion des converties françaises est
issue des « cités », c’est-à-dire de banlieues urbaines fortement défavorisées et
marginalisées. Tandis que la plupart des femmes adhèrent à une vision réformiste
de l’islam, certaines parmi les plus éduquées ont choisi la tradition soufie. Dans
les deux espaces considérés, une part significative des répondantes œuvre dans
le domaine associatif au sein de leur mosquée, des associations musulmanes
étudiantes, des associations de femmes musulmanes, ou encore sur les forums
et sites Internet d’échanges et d’entraide. De façon générale, même si elles ne
s’engagent pas activement sur ces sites, la majorité des femmes maintiennent
des liens avec la communauté musulmane francophone, souvent transnationale,
via Internet ; quelques femmes résidant en France étant d’ailleurs en interaction
virtuelle avec certaines de nos répondantes outre-Atlantique.
le cas de Nathalie, qui après avoir perdu son emploi d’architecte, décide de se
réorienter professionnellement dans le domaine de la relation d’aide. Lors de
notre deuxième rencontre en 2017, elle vit depuis dix ans en offrant des services
de coaching islamique auxquels elle invite ses frères et sœurs musulmans dans le
cadre d’ateliers tenus dans une des salles d’un centre communautaire musulman
de la ville. À sa clientèle dont les problèmes concernent essentiellement la vie
quotidienne (éducation des enfants, relations de couples, etc.), Nathalie propose
une interprétation religieuse qui fait intervenir la relation à Allah comme point
focal des gestes et pensées du croyant.
Anissa et Juliette sont les membres fondatrices d’une association humanitaire
créée récemment dans la banlieue parisienne par une convertie d’origine
camerounaise. Elles évoquent avec enthousiasme leurs projets : distribution de
repas aux Sans domicile fixe (SDF), aide matérielle aux sœurs musulmanes
démunies qui ne bénéficient d’aucune assistance gouvernementale, etc. Ces
activités caritatives reconfigurent le lien social au-delà du niveau local, puisque
des aides sont également organisées pour des « sœurs » résidant à l’étranger,
au Moyen-Orient par exemple, et qui expriment leurs besoins via les forums
Internet. Ces formes d’entraide sont vécues comme des mises en pratique de la
philosophie de l’islam qui est décrit, non sans émotion parfois, comme un modèle
de justice et de solidarité sociale. Une telle interprétation permet de concilier
des systèmes de valeurs en apparence contradictoires, en attribuant à l’islam des
principes communs à ceux de la société environnante, tels que la justice sociale,
la sensibilisation écologique, l’équité entre les genres, et la solidarité avec les
pauvres. La promotion d’une éthique partagée entre l’islam et la société d’origine
vise à réhabiliter le paradigme musulman au sein du groupe majoritaire et à
terme, à délégitimer un discours qui semble circuler parmi certains musulmans et
que des femmes converties qualifient de victimaire car, comme l’indique Anissa
(France), « être musulman c’est être en quête de savoir et de lien social, celui qui
donne et tend la main pas pour recevoir, mais pour donner ». Cette éthique n’est
par ailleurs pas étrangère à un projet prosélyte qui vise à diffuser l’islam, projet
dont la plupart des convertis se font les hérauts.
2. En référence à la part que le créateur est supposé insuffler aux créatures au moment même de
leur création.
3. Notre traduction, comme pour tous les extraits dans ce texte.
monde. C’est ainsi que les femmes rencontrées comprennent leur engagement
dans l’islam, la réflexivité et l’assiduité dont fait preuve leur démarche de
recomposition du soi au sein d’un nouveau cadre normatif pouvant confirmer
que le processus de conversion constitue une des plus importantes technologies
du soi comme le propose Foucault (2001).
Pour les femmes converties comme pour la majorité des femmes présentées
dans la littérature ethnographique (Mahmood 2005 ; Deeb 2006 ; Jouilli 2009),
reproduire les pratiques par lesquelles l’éthique musulmane s’incorpore ne
signifie pas les répéter de façon systématique. L’acte rituel ménage en effet
des espaces d’indétermination symbolique où peuvent se former changement,
résistance ou subversion, notamment via la performativité du corps qui ménage
un espace d’indétermination symbolique et de réinterprétation de la norme. Parmi
les femmes que nous avons rencontrées, la pratique du port du foulard est variable
et peut prendre diverses formes pour signifier aussi bien un acte de soumission
à la norme qu’un désir d’affirmation identitaire ou, dans certaines circonstances,
l’appartenance à une classe sociale moderne et urbaine. L’approche performative
de la ritualité quotidienne, axée sur l’examen microsociologique des discours
et activités sociales et rituelles, pourrait donc mettre en évidence la mouvance,
l’idiosyncrasie et l’historicité des appartenances, identités et subjectivités
(Werbner 2007 ; Fortin et al. 2008). Il s’agit donc moins de considérer le sujet
que la subjectivation, moins un modèle d’individu moderne qui s’inscrit dans
un passé et se projette dans un futur, que des processus de composition et
d’amalgames des subjectivités. Axée sur les discours et représentations qui
reconfigurent l’expérience subjective et la conscience du soi, la lecture éthique
des pratiques du soi trouve un champ d’application privilégié dans la conversion
du sujet. C’est dans cet espace liminal, transitoire, mouvant et éphémère de la
conversion que, à chaque instant et en tout lieu, le sujet compose et recompose le
soi et l’identité, entre l’être et le devenir. Comment alors se concilient la situation
historique et sociale du sujet et sa définition anthropologique ?
Parce que leur mode de subjectivation dans l’islam est ancré dans un
discours de justice et d’égalité des genres puisé dans les principes coraniques,
les converties pensent se positionner à l’avant garde d’une approche renouvelée
de l’islam (Badran 2006). « Délocalisant » l’islam de ses univers traditionnels,
elles le situent dans un champ cognitif initialement étranger à sa production
(Haenni 2005 ; Frégosi 2014), et engagent ainsi une réflexion sur l’univers
culturel musulman en terre d’altérité, voire d’hostilité. Certaines converties que
nous avons rencontrées ont effectivement montré un plaisir espiègle, et quelque
peu provocateur, à afficher les stéréotypes essentialistes de l’islam en affirmant
sur un ton dérisoire : « Bien sûr, mon mari me bat tous les jours ! », ou encore :
« Ma copine et moi avons tellement entendu l’histoire de conversion l’une de
l’autre qu’on s’était dit que la prochaine fois, je raconterais son histoire, et elle
la mienne ! »…
En construisant et en reconstruisant l’idiome « islam », les femmes
rencontrées composent et affirment leur propre subjectivité en tant que
nouvelle musulmane ; plus largement, elles donnent à voir la figure inédite
d’un sujet féminin, pieux et occidental. Par de subtils jeux de différentiation et
d’identification qui empruntent aux stéréotypes et rapports de pouvoir locaux,
ces techniques de subjectivation négocient les forces et contraintes de leur
environnement social, et de leur situation de l’entre-deux.
Références
Badran M., 2006, « Feminism and Conversion : Comparing British, Dutch, and South African
Life Stories » : 199-226, in K. Van Nieuwkerk (dir.), Women Embracing Islam : Gender
and Conversion in the West. Austin, University of Texas Press.
Benhadjoudja L., 2017, « Laïcité narrative et sécularonationalisme au Québec à l’épreuve
de la race, du genre et de la sexualité », Studies in Religion/Sciences religieuses, 46,
2 : 272-291, disponible sur Internet (doi : 10.1177/0008429817697281) le 23 janvier 2018.
Bilge S., 2012, « Mapping Québécois Sexual Nationalism in Times of “Crisis of Reasonable
Accommodations” », Journal of Intercultural Studies, 33 : 303-318, disponible sur
Internet (doi : 10.1080/07256868.2012.673473) le 23 janvier 2018.
Bourdieu P., 1982, Leçon inaugurale, faite le vendredi 23 avril (Paris : Collège de France).
Paris, Collège de France, Chaire de sociologie.
Calhoun C., 1994, « Social Theory and the Politics of Identity » : 9-36, in C. Calhoun (dir.)
Social Theory and the Politics of Identity. Oxford, Blackwell Publishing.
Deeb L., 2006, An Enchanted Modern : Gender and Public Piety in Shi’i Lebanon. Princeton,
Princeton University Press.
Ferrié J.-N., 1996, « Les paradoxes de la réislamisation en Égypte », Monde arabe Maghreb-
Machrek, 151 : 3-13.
Fortin S., M.-N. Leblanc et J. Le Gall, 2008, « Entre la Oumma, l’ethnicité et la culture :
le rapport à l’islam chez les musulmans francophones de Montréal », Diversité urbaine,
8, 2 : 99-134, disponible sur Internet (doi : 10.7202/000368ar) le 23 janvier 2018.
Foucault M., 2001, L’herméneutique du sujet. Cours au Collège de France, 1981-1982.
Paris, Éditions de l’EHESS, Éditions Gallimard, Éditions du Seuil.
Frégosi F., 2014, « Les nouveaux musulmans : entre surexposition et invisibilité », Esprit :
65-79, disponible sur Internet (http://www.esprit.presse.fr/article/fregosi-franck/les-
nouveaux-musulmans-entre-surexposition-et-invisibilite-37957?) le 23 janvier 2018.
Göle N., 2005, Interpénétrations. L’Islam et l’Europe. Paris, Galaade Éditions.
Hadot P., 2002, Exercices spirituels et philosophie antique. Paris, Éditions Albin Michel.
Haenni P., 2005, L’islam de marché. L’autre révolution conservatrice. Paris, Éditions du Seuil.
Jouilli J., 2007, Devenir pieuse : femmes musulmanes en France et en Allemagne. Entre
réforme de soi et quête de reconnaissance. Thèse de doctorat, École des hautes études
en sciences sociales, Europa-Universität Viadrina Fakultät für Kulturwissenschaften
Lehrstuhl für Kultur- und Sozialanthropologie, Paris.
—, 2009, « Negotiating Secular Boundaries : Pious Micro-Practices of Muslim Women in French
and German Public Sphere », Social Anthropology/Anthropologie sociale, 17, 4 : 455-470,
disponible sur Internet (doi : 10.1111/j.1469-8676.2009.00082.x) le 23 janvier 2018.
Mahmood S., 2005, Politics of Piety. The Islamic Revival and the Feminist Subject. Princeton,
Princeton University Press.
—, 2006, « Agency, Performativity, and the Feminist Subject » : 177-223, in E.T. Armour et
S.M. St. Ville (dir.), Bodily Citations : Religion and Judith Butler. New York, Columbia
University Press.
How to Achieve Piety in the Immanence ? Endeavors to Construct Social and Ethical
Models among Intellectual Women Committed and Converted to Islam
The ethnographic fieldwork I have conducted in France and in Quebec among women
who embraced Islam has shown that the work on the self (djihad an-nafs) is central in the
process of conversion. While this hermeneutic of the self is concurrent with a theological
reading of the Muslim being and her formation, those endeavors to produce the subject also
combine two cultural and social systems that are in tension, the one of origin and the on
chosen. How do the women I have met appropriate those two universes of meanings and
norms ? Which social and political possibilities do these processes of subejctivation open as
they are negotiated ? In this paper, I describe the charity activities, the mutual aid behaviours
and the social commitments that the new Muslim women enter into, as a form of praxis related
to their understanding of Islam. It is through action, demonstration or ostentation of religious
practices aimed at achieving piety in the immanence that the converts make up alternative
normative frames. As the will to improve the self serves the community, Islam appears here
as a political language to express the identity and to convey an alternative project for society.
Keywords : Mossière, Conversion, Islam, Subjet, Social Commitment, Norm, Political Project
Géraldine Mossière
Institut d’études religieuses
Pavillon Marguerite-d’Youville
Université de Montréal
C.P. 6128, succursale Centre-ville
Montréal (Québec) H3C 3J7
Canada
geraldine.mossiere@umontreal.ca