Le Mariage de Figaro Analyse Acte 1 Scène 1
Le Mariage de Figaro Analyse Acte 1 Scène 1
Le Mariage de Figaro Analyse Acte 1 Scène 1
Commentaire littéraire
1. Le décor
L'unité de lieu n'est pas respectée, mais tout se passe à Aguas Frescas, près de
Séville.
Dans cette scène d'exposition, les didascalies et les dialogues nous apprennent
rapidement que l'action se place dans la chambre nuptiale de Suzanne et Figaro,
c'est pour cela qu'elle n'est pratiquement pas meublée.
Figaro nous apprend que la chambre mesure "Dix-neuf pieds sur vingt-six", soit l'équivalent
d'une scène de théâtre. Il s'y trouve un fauteuil (qui servira de cachette à Chérubin et au
comte > cette chambre est un lieu de passage : tout le monde va s'y retrouver).
Le lit est absent -> il est le symbole du mariage à venir, lieu du désir, de l'amour.
Il y a un miroir où Suzanne se mire -> elle est coquette. Elle place un bouquet de fleur
d'oranger sur sa tête, symbole de chasteté et de mariage.
C'est un début in media res, c'est-à-dire que le récit commence au cœur d'une action (Figaro
en train de mesurer la chambre).
Nous avons une indication sur le moment de la journée: le matin (discours de Figaro : "le
matin des Noces"). Moment : matin (discours de Figaro : "le matin des Noces").
Habituellement, le mariage termine la pièce et n'est pas au centre de l'action. Ici la
pièce commence sur le mariage, qui sera même le centre de l'action -> nouvelle forme
d'aborder le texte.
De plus c'est le mariage des valets et non des maîtres comme dans les comédies
"classiques".
A la fin, présentation de la comtesse, délaissée par son mari. Nous entrevoyons là que Figaro
et Suzanne vont lutter ensembles et que de l'autre côté le comte et Bazile seront alliés.
Visiblement, la comtesse se rangera du côté des valets.
On devine d'emblée que l'intrigue de la pièce va être riche. Suzanne elle-même en atteste :
"De l'intrigue et de l'argent". Figaro dit qu'il va devoir créer une intrigue d'où il va devoir
sortir vainqueur. Nous n'avons cependant pas toute l'intrigue : il nous manque Marceline.
1. Un couple amoureux
Les didascalies montrent l'amour entre les deux personnages : "lui prend les mains".
Noms tendres échangés, avec pronoms possessifs qui montrent un couple complice : "ma
charmante", "mon fils", "ma petite Suzanne".
Emphase de Figaro pour s'adresser à Suzanne ("Oh ! que ce joli bouquet…"). Utilisation d'un
vocabulaire élogieux : "charmante", "joli", "virginal", belle fille", "doux"…
Il s'exprime à travers la gaieté et la joie de vivre, par exemple Suzanne entonnant "Fi-
Fi-Figaro".
Le mariage est évoqué tout au londg de la scène par le champ lexical du mariage : par
exemple "époux", "dot"…
Il y a tout un jeu autour du baiser à la fin de la scène, un badinage amoureux entre ces
deux personnages qui s'aiment follement. Nous pouvons également remarquer une
alternance du tutoiement et du vouvoiement entre Suzanne et Figaro, autre marque du
badinage amoureux.
Suzanne est franche et honnête, elle est coquette, mais n'est pas compliquée.
La sorte de chiasme de la fin de la scène "m'en parler du matin au soir" / "du soir jusqu'au
matin" évoque de façon détournée et comique les désirs sexuels du couple.
Suzanne connaît les intentions du comte, alors que Figaro ne les soupçonnait pas.
Suzanne lui reproche de n'avoir rien vu, cela crée un moment de tension. Figaro est
piégé par le comte et mené par Suzanne.
Au début, Suzanne ne dit rien : elle a honte. Figaro ne comprend pas, il est naïf, et
Suzanne en est vexée. "Es-tu mon serviteur ?" > pique amoureuse = "M'es-tu dévoué ?".
C'est là que Figaro va développer les arguments pour la chambre, et c'est devant cette
naïveté que Suzanne va parler.
C'est toujours Suzanne qui mène le débat ("Il faudrait m’écouter tranquillement",
"Apprends qu’il…") et elle obtient ce qu'elle veut de Figaro. Comme Figaro ne semble
pas vouloir se réveiller, Suzanne lui remet les idées au clair. Il aura mis toute la scène à se
révéler. On ne retrouve dans cette scène le Figaro du Barbier de Séville, ici c'est un arrivé.
Suzanne se moque de Figaro : elle reprend ses mots, le qualifie de "bon garçon", qui a ici le
sens de naïf.
Ces amoureux heureux sont devenus complices pour déjouer les plans du comte.
1. La tonalité comique
Le comique est très important dans cette scène d'exposition car il donne la tonalité
de la pièce.
b) Le jeu verbal
Beaumarchais use d'un procédé : l'économie du langage, qui dit le strict minimum >
vivacité du dialogue, on fait appel à l'intelligence du spectateur pour deviner le reste. Pendant
tout le temps où Suzanne refuse de parler, on assiste à une joute verbale avec utilisation de
sous-entendus.
Le fait que Suzanne reprenne les mots de Figaro donne un aspect comique ("tinté", "zeste",
"crac"). Suzanne évoque de façon malicieuse, mais presque crue les vues sexuelles du comte
sur elle : "et crac, en trois sauts".
Nouvel aspect novateur de la pièce : les valets ont de l'esprit, ils parlent très bien.
Les piques entre les deux personnages sont comiques : "Que les gens d'esprit sont
bêtes" => Suzanne dit à Figaro qu'il est bête, et celui-ci ne dément pas "On le dit".
c) La gaieté
Les personnages sont toujours gais, même quand ils prennent conscience d'un piège
douloureux, ils rient. Tout s'arrangera dans la gaieté par d'heureux hasards.
Stichomythie rendant le rythme de la scène rapide et enjoué.
a) Un décor symbolique
Tous les éléments sont importants.
Non seulement Suzanne et Figaro sont logés d'office mais en plus ils sont meublés, et Figaro
n'en est pas mécontent > utilisation d'un vocabulaire positif. Pourtant, la pièce est
pauvrement meublée, comme nous l'apprend la didascalie initiale : Beaumarchais utilise le
mot "démeublée", qui est dépréciatif. Figaro n'est finalement pas si révolutionnaire que cela :
il est content de la chambre > Figaro accepte la dépendance, il ne remet pas en cause
l'ordre social maître/valet.
Pour Figaro, tout est positif dans cette chambre, mais pour Suzanne, c'est le contraire :
elle y voit un piège car elle y voit la marque de son aseervissement sexuel au comte,
comme le montre ses lucides paroles : "en deux pas il est à ma porte, et crac, en
trois sauts…".
b) La toute-puissance du comte
Ici, on assiste à mise en valeur de la toute-puissance tyrannique d'un seigneur
féodal. Il a envie de rétablir un droit féodal honteux, le droit de cuissage : "s'il l'a détruit, il
s'en repend" > révolte des valets, et surtout de Suzanne au début ; Figaro se révèle ensuite.
En conquérant Suzanne, le comte montre sa toute-puissance ; cela soulève le problème de
l'asservissement des femmes. Suzanne se révolte devant la condition féminine et devant
les Grands > c'est pour cela qu'elle considère la chambre comme un piège.
Conclusion
Comme dans toute scène d'exposition, Beaumarchais nous livre dans cette première scène
du Mariage de Figaro tous les renseignements nécessaires pour comprendre cette pièce
compliquée. Cette scène d'exposition pose tous les grands thèmes et elle nous donne aussi la
tonalité de la pièce : tout est gai malgré tout, mais la pièce sera l'occasion pour Beaumarchais
de dresser une satire sociale de son époque.