ASUD Journal Août 2012 N°50 - DROGUES
ASUD Journal Août 2012 N°50 - DROGUES
ASUD Journal Août 2012 N°50 - DROGUES
Journal
ao û t 2 012
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30 € jusqu'à 500 brochures mies lectrices, amis lecteurs, Asudiennes, Asu-
diens, ivrognes invétérés, communistes, jet-setteu-
Abonnement (trimestriel : 4 numéros par an) ses, intermittents du spectacle, femmes de mau-
vaise vie, pigistes de Valeurs Actuelles, bref vous
Particulier (1 ex de chaque numéro)...........……12 € qui savez qu’en France, les drogués ont un journal,
Professionnel, association et collectivité locale nous vous saluons. Ceci est notre cinquantième numéro.
1 ex de chaque numéro…................................….. 30 € La petite bande de tox réunie un soir d’hiver 19922 n’était
pas censée durer et encore moins perdurer. Décimés par le
10 ex de chaque numéro……………………… 77 € sida, surveillés par la police, dégagés en touche par les gens sé-
20 ex de chaque numéro……………………… 97 € rieux – « c’est quoi ce Journal des drogués heureux ? » –, notre
survie économique, sociale et politique tient du miracle, une
25 ex de chaque numéro……………………… 106 €
formule magique en trois lettres dont le sens reste obscur au
50 ex de chaque numéro……………....………..152 € plus grand nombre : RdR, la politique de réduction des ris-
100 ex de chaque numéro……………….……...200 € ques liés à l’usage de drogue. Aujourd’hui, tous les acteurs du
soin la revendiquent. Appelée « réduction des dommages »
par certains, camouflée en prévention secondaire par le lexi-
Asud-Journal 32 rue de Vitruve 75020 Paris que médicosocial (voir p.34) cette politique – car il s’agit
Association Loi 1901 d’une politique – n’est plus contestée par personne. Et pour-
Pour tout renseignement : 01 71 93 16 48 tant, la distorsion qui continue d’exister entre son principe
fondamental et la législation pénale constitue probablement
ou contact@asud.org. la meilleure des raisons pour continuer à nous battre.
Prenons un exemple concret : pour ce cinquantième
numéro, nous avons choisi de tester et de vous présenter
cinquante produits licites ou illicites. Ce choix éditorial
pose avec limpidité tous les termes d’un débat qui sépare
notre définition de la réduction des risques de sa déno-
mination officielle, définie par la loi de 2004. Notre ré-
duction des risques flirte dangereusement avec les limites
posées par l’article L 3421-4 du code de la santé publique,
qui punit la provocation à l'usage, et pour cette raison,
nous avons besoin de l’aide de nos plus proches alliés : les
professionnels de l’addictologie.
info d.org
professeur Parquet, rendu public dans un rapport cosigné
w w w. a s u
par Michel Reynaud3, résume à la fois les enjeux et les li-
mites de ce « pacte addictologique » passé entre l’État et
le système de soin. Cela ne va pas faire plaisir à tout le
Le site d’Asud monde, mais Michel Reynaud n’est pas loin de représenter
Certains d’entre vous ont dû le constater : le site d’Asud l’équivalent contemporain de ce que fut le Dr Olievenstein
est en phase de transformation radicale. Nous travaillons
dans les années 70 (tiens, le temps se gâte du côté de Tou-
sur une nouvelle formule plus en synergie avec le jour-
nal papier. De nouvelles rubriques interactives vous se- louse4). Olive était le pape de la toxicomanie, Michel Rey-
ront progressivement proposées sur des sujets divers : naud est un peu le pape de l’addictologie. Mais à l’heure
• Droits des usagers • Substitution • Psychostimulants... des coupes sombres, il lui faut partager cette papitude avec
une constellation de papounets et d’antipapes qui n’exis-
Le Forum d’Asud taient pas, ou moins, aux temps bénis de l’invention du
Rebaptisé psychoactif.org depuis quelques mois, le Forum toxicomane. À ce détail près : le positionnement des deux
d’Asud a pris son envol en dehors de l’association. Après figures est incroyablement symétrique.
avoir été porté pendant cinq ans dans le giron d’Asud, il est
désormais autonome. Bon vent camarades.
50
journal n°50
So mMa i r e
Politique 4
Pour un début de changement
Le temps de l’armistice
Décroche 8
Traitements de substitution : stop ou encore ?
Substitution 10
Campagne « Mon traitement, mon choix »
Cannabis 12
Circ’Story / épisode 2
Leur doctrine est fondée sur un triptyque simple, intelligent, dont la fonction est
essentiellement diplomatique. Pour Olive, c’était la rencontre « d’un produit, d’un VHC 15
individu, et d’une histoire », pour Michel Reynaud, c’est le déjà cité « usages, abus et Nouvelles thérapies, plus que de l’espoir
dépendances ». Tous deux contournent habilement le cœur du problème posé par « la
drogue », laissant ainsi toute latitude à la police et aux douanes, les vrais spécialistes, de Dossier spécial n°50 17
Asud a testé pour vous 50 produits !
continuer à exercer leur art sans souci éthique superflu. Aujourd’hui comme hier, le pôle
répressif se moque comme d’une guigne des spéculations intellectuelles des mandarins de International 34
l’addictologie. Ils se contentent d’un syllogisme mis en vogue par notre dernier Drug Czar : Jeunes et « Rehab » : les exclus de la RdR
la drogue c’est dangereux, d’ailleurs c’est interdit. Enfin, et ce n’est pas le moindre des pa-
radoxes à quarante années de distance, nos deux figures pontificales finissent par souffler Quoi de neuf doc ? 38
r Chronique des évènements courants
une petite brise discordante vis-à-vis du pouvoir. Rappelons que le D Olievenstien a tenté
tardivement de revenir sur l’interdiction de vente des seringues, sans grand succès il est vrai. A-Kroniks 40
De son côté, le Pr Reynaud prêche de plus en plus ouvertement pour une réforme de cette C’est la jungle là-dehors
bonne vielle loi de 70 mise en musique avec l’aval de son prédécesseur5.
Cette petite brise est-elle destinée à devenir tempête ? Les cinquante produits testés Courrier des lecteurs 42
et présentés par Asud dans ce journal franchissent délibérément les limites instituées Notre culture 44
par le « pacte addictologique ». Comme hier le « soin aux toxicomanes », le pacte Séries, Hallu-ciné
addictologique, c’est un peu la trahison des clercs. Aujourd’hui comme hier, nous autres
consommateurs de drogues avons besoin du soutien de ces personnalités qui nous soi- A dresses 49
gnent, nous accueillent et la plupart du temps, veulent notre bien (coup de tonnerre du
côté de Marseille cette fois6). Directeur de la publication :
Mais à la toute fin, ils nous trahissent. En 1970, le slogan olievensteinien de rencontre Michel Velazquez Gonzalez
entre « un individu, un produit et une histoire » avait subrepticement évacué le produit pour Rédacteur en chef : Fabrice Olivet
ne retenir que l’individu et son histoire (généralement racontés sur un divan), au point de Secrétaire de rédaction : Isabelle Célérier
bannir de la clinique des toxicomanes toute référence aux effets des drogues ou à la question Coordination : Fabienne Lopez
posée par leur interdiction. Aujourd’hui, « usages, abus et dépendances » connaît approxima- Maquette & illustrations : Damien Roudeau
tivement le même travers. Seuls les deux derniers termes sont l’objet d’une véritable clinique. Bloodi : Pierre Ouin
L’usage, notion cruciale partagée par des millions de consommateurs, est laissé au bon soin de la
maréchaussée ou… d’Asud. Merci à ASUD Loiret pour les
La dépendance est en train d’étouffer ce droit à l’usage qui est pourtant implicite dans l’énon- illustrations de couverture extraites de leur
cé du triptyque Parquetto-Reynaldiste. Contrairement à ce que croient les autorités, rassurées brochure Bars et Boites de nuits.
par le caractère scientifique de l’addictologie, c’est l’usage qui est au cœur du « problème de la dro-
gue ». C’est l’usage qui génère les millions d’euros de profit, pas la dépendance, ni même l’abus7. Ont participé à ce numéro : Laurent Appel,
C’est l’usage qui intéresse les jeunes consommateurs et rend le discours classique de prévention Vincent Benso, Michel Bonjour, Anne
totalement inopérant, justement parce qu’il ne parle que de dépendance comme le démontre le Coppel, Marc Dufaud, Eric, Jean-Pierre
mouvement Youth Rise (voir p. 35). Enfin, c’est l’usage qui pose le problème dans sa dimension Galland, Speedy Gonzalez, Pierre
sociologique et sécuritaire, comme le souligne Anne Coppel avec sa sagacité habituelle (voir p. 5). Human, Bertrand Lebeau, Fabrice
Asud est donc condamnée à défendre cet usage, courant, classique, BANALISÉ – le mot inter- Olivet, Fabrice Perez, Emma Richaud,
.
dit qui vous vaut un contrôle urinaire instantané. Avec les amoureux et les poètes, nous savons que Monique Whalen.
l’ivresse est un trésor caché qui mérite d’être défendu, analysé, socialisé. Si la dépendance et l’abus sont
à juste titre dénoncés comme des nuisances, l’équilibre voudrait que l’usage, convivial ou solitaire, soit Asud-Journal est un trimestriel édité
innocenté. Fabrice Olivet par l’association Asud.
Tirage 10 000 exemplaires. ISSN :
1. Hommage à René Goscinny, rédacteur en chef de Pïlote, inventeur de la potion magique. 1257 - 3280
2. Le dépôt de nos statuts en préfecture datant de 1993, pas d’affolement pour la petite fête Impression print[team]
des 20 ans d’Asud : vous serez tous invités l’année prochaine. zac km delta - 30900 Nîmes
3. Chef du département de psychiatrie et addictologie, hôpitaux universitaires de Paris-Sud (APHP) Commission paritaire en cours
4. Message personnel de la rédaction Ce numéro a pu paraître grâce
5. Voir l’emission de Benoit Duquesne sur France 2, « Complément d’enquête : Drogue, l’overdose » du 17 mai 2012 aux soutiens de Sidaction et de
6. Re-message perso de la rédac. la Direction générale de la santé
7. à l’exception notable du tabac qui est encore licite.
(DGS).
politique & citoyenneté
L’intense débat auquel nous avons
activement participé depuis deux
ans débouche sur un résultat
très décevant : le président Hol-
lande, son gouvernement et la
majorité socialiste ne veulent pas
dépénaliser la consommation de
stupéfiants. Pas de changement
pour les usagers, nous restons des
sous-citoyens criminalisés. Pas de
changement de stratégie, la guerre
à la drogue continue ses ravages. La
gauche puritaine succède à la droite
démagogue. Quatre propositions
pour sortir de l’impasse.
ngement
ut de cha
déb
Pour un pourront plus ignorer ces propositions
alternatives, ni l’honorabilité et les com-
de répartir équitablement le fonds de
concours alimenté par les saisies judi-
ciaires (plus de 20 millions d’euros en
pétences des éminentes personnalités in- 2011). Actuellement, la police et la jus-
Deuxième rapport de la ternationales qui les soutiennent. tice s’en partagent 80% et la douane en
Global Commission À l’échelle française, la nécessité reçoit 10%. Soit 90 % au répressif contre
on Drug Policy d’analyse et de réflexion sur notre po- 10% à la prévention, la RdR et le soin,
litique des drogues est évidente. Le der- une répartition qui reflète parfaitement
Les nombreux arguments en faveur de la nier rapport fondé sur des auditions va- l’orientation répressive des dix dernières
décriminalisation énoncés en juin 2011 riées et des évidences scientifiques date années. Un équilibrage serait un sym-
dans le premier rapport de la Global de la commission Henrion en 1994-95. bole politique très fort.
Commission on Drug Policy1 (GCDP) Les travaux plus récents de nos parle-
n’ont pas été entendus par la classe poli- mentaires étaient trop orientés et par- Innover en matière de
tique et l’opinion publique française. Un cellaires pour être crédibles. Le candi- RdR et de prescription
an plus tard (le 25 juin 2012), un second dat François Hollande avait promis un
rapport insiste sur les conséquences dé- débat, Jean-Marc Ayrault avait proposé Les salles de consommation à moindres
sastreuses de la prohibition sur l’épidé- une conférence de consensus lorsqu’il risques, la substitution injectable et la
mie de VIH et la santé des usagers, en était chef des députés PS, c’est le mo- prescription médicale de cannabis sont
rappelant les recommandations généra- ment. La Commission française pour la aussi des dossiers sur lesquels un consen-
les de la GCDP. Ces travaux suscitent un politique des drogues se devra d’être in- sus paraît possible, au moins pour des
vif intérêt international, surtout en Amé- dépendante, représentative et paritaire, expérimentations. Un accès facilité à
rique du Sud. Des présidents en exercice autrement dit comprendre des repré- l’analyse des produits, une RdR mieux
(Colombie ou Uruguay) appellent au sentants d’usagers. adaptée à la polyconsommation et aux
changement, mais la France reste très en plus jeunes, un renforcement de la pré-
retrait de ce mouvement mondial. Les Répartir équitablement vention et du dépistage de l’hépatite C
militants et les associations françaises les fonds de la Mildt sont des sujets qui méritent une concer-
doivent se mobiliser pour mieux diffuser tation et de nouveaux dispositifs.
les propositions réformistes. La ministre des Affaires sociales, Marisol Nous ne renoncerons pas à revendi-
Touraine a récemment déclaré : « Il ne quer la dépénalisation afin de rétablir la
Créer une Commission suffit pas d’avoir la sanction, il faut ac- citoyenneté de l’usager. Pourtant, cette
française sur la compagner, prévenir, expliquer. » Cette position de principe ne doit pas bloquer
politique des drogues stratégie pourrait s’avérer plus efficace à d’autres actions afin d’obtenir ces amé-
condition d’équilibrer les quatre piliers : liorations indispensables. Nous espé-
Nous allons prochainement envoyer un répression, prévention, RdR et soin. rons que la volonté de dialogue, claire-
tirage de ces deux rapports à l’Élysée, Traduire cette volonté politique en une ment affichée par le gouvernement avec
.
Matignon, aux ministères concernés, action concrète est très facile. En accord les partenaires sociaux sur d’autres sujets
à l’Assemblée nationale, au Sénat et au avec les ministres de tutelle, le Premier sensibles, ne s’arrêtera pas aux drogues.
siège des partis politiques. Nos respon- ministre peut donner au(à la) futur(e) Au risque de faire de nous les parias du
sables politiques et leurs conseillers ne président(e) de la Mildt l’instruction changement. Laurent Appel
E
nfin, la politique des drogues va marcher sur ses deux le monde peut se mettre d’accord. Mais la prise de conscience de
pieds : réduction des risques liés à l’usage pour ce qui est « l’incarcération de masse » est bien un tournant majeur. C’est
la santé, réduction des dommages causés par le trafic pour le cœur de la discussion puisque dans ce même article, Bernard
ce qui est la sécurité. Il reste encore une longue marche Leroy tient à rappeler qu’il est possible de ne pas incarcérer les
pour construire les régulations de l’avenir mais au moins, usagers drogues sans renoncer à la prohibition. Sans doute. Il
on sait désormais dans quelle direction aller. Le continent n’en reste pas moins que partout dans le monde, usagers de dro-
américain a déjà basculé dans l’ère nouvelle et le grand retour- gues et petits trafiquants remplissent pour moitié les prisons.
nement menace désormais les Nations unies. Les Français ne
l’ont pas compris, parce qu’ils restent enfermés dans l’alterna- L’incarcération de masse
tive « guerre à la drogue ou légalisation ». Comme la légalisa-
tion des drogues n’est pas imaginable, du moins dans un avenir Mais nulle part au monde, l’incarcération n’a été aussi massive
prévisible, la guerre à la drogue poursuit son escalade. Ces der- qu’aux États-Unis. Un livre vient de dénoncer ce scandale : The
nières années pourtant, les nouvelles d’outre-Atlantique n’ont New Jim Crow : Mass Incarceration in the Age of Colorblindess,
cessé de tomber en cascade : « La guerre à la drogue est per- que l’on pourrait traduire par « Les nouvelles lois de ségrégation :
due ! » Qui s’en soucie ? Dans notre belle république, la guerre L’incarcération de masse au temps du déni des discriminations ra-
à la drogue doit se mener coûte que coûte. ciales ». En deux décennies de tolérance zéro, 30 millions de
Blacks et quelques autres minorités ont été incarcérés pour une
Une forme d’armistice infraction liée aux drogues. Ces pratiques discriminatoires ont
longtemps été masquées par l’idéologie « Law and Order » qui
Or justement, ce n’est déjà plus le cas sur le continent américain. sévit depuis les années Reagan, et que les Américains ont réussi
À l’ONU même, où pourtant le langage le plus diplomatique à propager dans le monde entier. Dans les séries TV ou les films,
est de rigueur, il n’est plus possible de masquer les conséquences les trafiquants de drogue sont toujours des Noirs, et c’est effec-
de ce retournement. Dans un article publié dans Le Monde.fr, tivement le cas dans la rue.
Bernard Leroy a d’ailleurs tenté d’alerter les Français : « La Mais comme le montre Michelle Alexander, auteure de ce
légalisation des drogues : une illusion », écrit-il ce 12 avril 2012. best-seller, l’essentiel de ce marché se passe ailleurs. Les Blancs
Que se passe-t-il exactement à l’ONU pour que cet éminent consomment plus de drogues illicites que les minorités et ils
avocat général, qui a longtemps représenté la France au sein de achètent leurs produits en appartement, dans les milieux festifs et
cet organisme, estime nécessaire de discuter cette illusion ? Le plus récemment, sur le Net. Les quelque 2,5 millions d’incarcé-
Guatemala a bien demandé la légalisation des drogues, mais rations par an ont brisé des millions de vies, avec pour principale
en quoi ce petit pays peut-il provoquer un tel émoi ? Un autre conséquence l’exacerbation de la violence et l’enferment dans la
article publié dans Le Monde peu après aurait dû le rassurer : délinquance ou l’exclusion des victimes de la répression. La dé-
Barack Obama était sans équivoque, « Pour les États-Unis, la monstration de Michelle Alexander ne laisse pas de doute : la
légalisation de la drogue n’est pas une option » (Le Monde, 20 lutte contre « la » drogue a pris la relève d’une ségrégation qui,
avril 2012). S’il n’est effectivement pas question de légalisation depuis le mouvement des droits civiques, ne pouvait plus s’affi-
de drogues, ce qui est à l’ordre du jour aujourd’hui, c’est plutôt cher. Le vingtième siècle se termine ainsi par cette dernière grande
une forme d’armistice. tragédie, dont les conséquences sociales et politiques vont peser
C’est précisément ce qu’a proposé la Maison Blanche au longtemps sur les États-Unis. Il ne sera pas facile de sortir de ce
sommet des Amériques en Colombie, ce 20 avril 2012 : « L’in- piège qui exige une profonde réforme des administrations de la
carcération de masse est une politique du passé qui ignorait la né- justice et de la police, non seulement au niveau fédéral, mais dans
cessité d’avoir une approche plus équilibrée face à la drogue, entre chaque État. Impossible sans un vaste mouvement d’opinion pre-
santé et sécurité », a ainsi déclaré Gil Kerlikowske, le responsable nant conscience que la guerre à la drogue a servi de cache-sexe à
de la politique de lutte contre les drogues aux États-Unis. Voilà une ségrégation raciale qui est aussi sociale.
.
elle a fait appel à des médiateurs, chargés aujourd’hui expérimenter de nouvelles France en particulier, où cette question a
de négocier entre trafiquants et habi- formes de régulation du marché en éva- été curieusement négligée. Bref, prendre
tants « pour éviter le pire ». Réduire les luant leurs résultats, comme l’ont été ceux la question des drogues au sérieux. Est-ce
dommages causés par le trafic, c’est tout de la réduction des risques liés à l’usage. trop demander ? Anne Coppel
simplement le bon sens. L’autoproduc- L’avenir se fabrique au présent : il nous
tion de cannabis est d’ailleurs une des ré-
bstitution
ents de su
Traitem que la prescription médicale d’opiacés
augmente chaque année sans que nous
ayons une vue d’ensemble sur la qualité
La responsabilité de vie des bénéficiaires. Toutes ces rai-
des usagers sons plaident pour une remise à plat des
Stop ou encore ? schémas directeurs qui ont présidé à la
I
La mise en place de la substitution doit mise en place des TSO.
l y a quatre ans, Asud-Journal avait tiré beaucoup à l’activisme des usagers. Pas seu- En 1995-1996, nous ne nous po-
une première fois la sonnette d’alarme lement celui des groupes d’autosupport, sions pas la question de l’arrêt du trai-
dans un silence assourdissant1. Les mais surtout celui des usagers eux-mêmes tement, ni même du sevrage. L’objectif
fins de traitement de substitution engagés dans une démarche volontariste principal était d’obtenir une place sur
étaient alors un non-sujet. de militantisme en faveur des traitements. le vaisseau de la substitution pour quit-
Aujourd’hui, malgré quelques in- Si la substitution fut un tel succès dès le ter la galère de l’héroïne. L’idée même
terventions en colloque (en général milieu des années 1990, c’est qu’elle a ré- de l’arrêt est restée incongrue jusqu’à la
aussi roboratives que dépourvues de pondu massivement à leurs attentes : sortir généralisation des traitements anti-VIH.
statistiques), rien n’a changé. Ni l’im- du cycle de la délinquance, ne plus souffrir Le paradoxe de cette histoire, c’est que
portance consacrée au sujet, ni l’intérêt du manque, rendre possible une réconci- la survie enfin assurée des usagers de
porté aux trajectoires des sevrés de la liation sociale, enfin permise au-delà des drogues touchés par le VIH a coïncidé à
substitution. barrières instaurées par la législation sur quelques années près avec les premières
Rappelons tout d’abord le contexte les stupéfiants. Asud a pleinement parti- théories sur la chronicité de la « maladie
historique de la naissance des traitements cipé à ce mouvement au point de tenir des de la dépendance ». Enfin libérés d’une
de substitution aux opiacés (TSO) : ces positions maximalistes en faveur des TSO. mort programmée à brève échéance, de
traitements sont les enfants illégitimes À l’époque, tout ce qui rimait avec sevrage plus en plus d’usagers se sont vu apposer
du sida. et abstinence était marqué du sceau du un diagnostic de malades à vie.
Illégitimes puisque non explicite- passé, voire de la réaction ou du purita-
ment voués à combattre l’épidémie1, nisme déguisé. Le bien, l’avenir, le sens de
mais enfants tout de même, car le virage l’histoire, c’était la substitution, de préfé- Rouvrir une fenêtre
à 180° pris par le système de soins fran- rence élargie à d’autres molécules comme de liberté
çais en matière de traitement de la toxi- l’héroïne et distribuée selon les modalités
comanie est une conséquence de l’argu- les plus libérales. Les faits sont têtus. Depuis le tournant
mentaire des partisans de la politique de C’est de cette responsabilité dont il des années 2000, la question du sevrage
réduction des risques (RdR) sur l’inef- faut parler aujourd’hui, du fait que nous et de l’abstinence d’opiacés revient hanter
ficacité des sevrages pour combattre la nous soyons massivement engagés sur la le monde de la substitution comme elle
maladie. voie de la substitution dans un contexte a hanté le monde de la toxicomanie dans
Enfin, et c’est le point central : ce quasi militaire de survie. Du fait que les années 1970. C’est d’abord et surtout
dispositif devait tout à l’urgence et pas le nombre d’usagers en traitement une demande qui vient des usagers, c’est
grand-chose au long, ni même au moyen soit passé de 60 000 environ en 1997 à d’ailleurs pour cela qu’il faut la prendre au
terme. 160 000 quinze ans après. Ou de celui sérieux. Rappelons-nous les précédents de
.
avoir dans des choix de vie majeurs. Hier comme aujourd’hui, la qui ne soit pas une déclaration de guerre au principe même des
vraie question est de rouvrir une fenêtre de liberté dans le champ TSO suppose d’inventer une nouvelle clinique, utilitariste, au
de la dépendance aux opiacés, comme le fut l’ouverture de Mar- service des usagers, prête à sortir des querelles d’école et surtout,
mottan dans les 70’s ou l’AMM du Subutex® en 1996. Mais com- consciente de ses propres limites. Fabrice Olivet
me souvent, le fléau de la balance bénéfices/contraintes est passé
d’un extrême à l’autre. Hier, il fallait se battre pour instiller un Cet article est inspiré d’une communication faite lors de la
peu de science médicale dans un monde dominé par l’approche journée sur les « fins de traitements » organisée le 10/11/2010
psychanalytique. Aujourd’hui, il s’agit de s’insurger contre une par le groupe de travail sur les Traitements de substitution
fatalité qui voudrait plonger les usagers dans la surdétermination aux opiacés à la Direction générale de la santé.
neurobiologique. 1. « Y-a-t-il une vie après la substitution ? » Asud-Journal n°36
Le dossier « fin de traitement » a le mérite de plonger au 2. L’Autorisation de mise sur le marché (AMM) du Subutex®,
cœur des non-dits de la prise en charge des usagers de drogues c’est-à-dire la buprénorphine haut dosage, de février 1996 ne
telle qu’elle est organisée depuis l’institutionnalisation des TSO. fait aucune référence à l’épidémie de sida. Quant à la métha-
La substitution n’a jamais voulu être soumise au débat citoyen done, son AMM remonte bien avant l’apparition du virus.
qui ne manquerait pas de souligner la contradiction entre pres-
cription d’opiacés et lutte contre la drogue. Deux frères ennemis
c h o i x»
a i t eme n t , m on
t r
« Mon « Qu’est-ce que la dépendance ? »
L
a campagne « Mon Traitement, Mon Choix » Les seules difficultés rencontrées ont essentiellement porté sur
(MTMC) est en effet le fruit d’une étroite collabo- des problèmes de traduction et aux exigences d’une campagne
ration entre PCM Scientific, une société d’éducation internationale. Son titre dans chacune des onze autres langues de-
médicale britannique chargée de sa réalisation tech- vait par exemple être la traduction pratiquement littérale de celui
nique, de sa coordination au niveau européen et de la (bien) choisi en anglais, tout en permettant à chaque langue et
rigueur scientifique de son contenu, d’une part et de trois as- culture de mieux se l’approprier…
sociations d’UD (Asud, l’espagnole Apdo et l’allemande Jes) Avant d’en examiner le contenu, soulignons une fois encore
d’autre part. qu’il s’agit d’une campagne destinée aux UD dépendants aux
Le rôle d’Asud n’est donc pas simplement d’assurer la dif- opiacés, qui veulent sortir de cette situation pour différentes rai-
fusion de la campagne en France mais aussi de contribuer à dé- sons. Dès le début vient d’ailleurs l’éternel test pour savoir si
terminer son contenu et son ton pour qu’elle soit réellement l’on est dépendant ou non. Mais le ton est donné dès le troisième
utile aux usagers et réponde à leurs demandes, loin des préjugés des sept grands chapitres qui constituent le site, « Qu’est-ce que
moraux ou idéologiques. la dépendance ? » : « Toutes les personnes ayant consommé des
opiacés ne sont pas dépendantes et la dépendance n’est pas une chose
Déculpabiliser, qui intervient après la première prise d’opiacés. » Évident, mais
dédramatiser, informer bon à rappeler, car bien souvent absent des campagnes alarmistes
sur l’usage des drogues.
Objectifs : DÉCULPABILISER les usagers par rapport à Plusieurs éléments suscitent l’attention de celui qui visite le
leur addiction éventuelle, « une pathologie chronique récidi- site MTMC. Une présentation assez attirante, optimiste, pas du
vante comme le diabète », DÉDRAMATISER le traitement tout noire ou misérabiliste, et une note originale : de belles pho-
s’ils choisissent d’en faire un, « une composante importante tos de parties du corps tatouées avec un slogan, dont certains
de toute pathologie… », et surtout, INFORMER pour aider résument bien l’esprit de MTMC – « Plus vous en savez, plus
à choisir... vous êtes capable de faire valoir votre point de vue ». Comme le
Pour des raisons de cohérence et d’unicité du message, le souligne le titre de l’introduction, « Information = pouvoir »,
travail a d’abord été fait en anglais, puis traduit par PCM dans cette campagne souhaite que les personnes puissent décider par
les onze autres langues. Asud s’est ensuite chargée de la correc- elles-mêmes en connaissance de cause, bien évidemment (et on
tion et des adaptations nécessaires pour la version française qui insiste toujours dessus) avec l’aide d’un médecin.
servira de base aux autres pays francophones. MTMC se décli-
ne sur plusieurs supports : sur Internet, avec un site européen
(www.mytreatmentmychoice.eu) accessible en douze langues et
un site par pays (www.montraitementmonchoix.fr pour la Fran-
ce), sur les réseaux sociaux et enfin, sur papier, avec des posters,
des cartes postales, une brochure résumant l’essentiel…
Cette campagne est née grâce au soutien du laboratoire
Reckitt Benkiser Pharmaceuticals(qui produit notamment
le Suboxone®).
.
et cliquer sur la langue française pour croire à « la pilule miracle »… Des adres- de l’année 2012. Aidez-nous à l’amélio-
trouver dans l’espace « Médicaments » ses où trouver de l’aide dans tous les pays rer en répondant à un questionnaire que
des infos ciblées sur sept d’entre eux, de listés et les traitements qui y sont dispo- vous trouverez sur la page d’accueil du
la buprénorphine à la morphine orale à nibles (bien pratique !). site ! Speedy Gonzalez
2012. - - .org
ur http://rdr a f r
Inscrivez-vous s
25 & 26 octobre
5 rue Curial
75019 Paris
cannabis
Suite de la fabuleuse histoire
du Circ. Ou comment, vingt
ans après sa création
(Asud-Journal n°49),
l’association et son clown
rieur aux cheveux en forme
de feuilles de beuh organise
une Journée internationale
du cannabis à Paris.
Circ’story
épisode 2
Black listé ? nité se présentera, nous avons hâte d’en
E
découdre avec les représentants du pou-
n 1992, on ne rigole pas. Mon Nous installons les bureaux du Circ dans voir. Le 25 janvier 1992, lors d’une mani-
premier s’appelle Robert Brous- mon appartement et adressons aux médias festation contre le racisme et pour l’éga-
sard. Célèbre pour avoir flingué un faire-part annonçant la naissance de lité des droits organisée par SOS Racisme,
Mesrine, il est nommé à la tête l’association. Les journalistes sont scepti- nous distribuons donc des pétards (rien
de la toute nouvelle Mission ques, à l’image de Christophe Bourseiller, que des feuilles en provenance de notre
de lutte antidrogue (Milad). Le second le premier à mentionner notre existence jardin d’intérieur)… Une provocation qui
s’appelle Paul Quiles. Il est ministre de dans le magazine 7 à Paris : « Je ne suis pas n’aura aucune répercussion médiatique,
l’Intérieur et considère « la drogue » sûr que cette nouvelle association reste légale mais nous vaudra une première visite des
comme le mal absolu. Il n’est pas ques- bien longtemps », « le Circ milite à terme gendarmes à notre boîte postale… Ils vou-
tion de distinguer les différents produits pour une légalisation du cannabis. Tout un laient savoir si nous n’avions reçu un colis
et qu’importe le sida galopant, il ne veut programme hautement douteux… ». suspect en provenance des Pays-Bas !
pas entendre parler des programmes de Jean-Luc Bennahmias, qui m’a ouvert Nous écrivons nos premiers tracts et réa-
substitution. Quant à la vente libre des les portes de ses archives, nous accueille gissons lorsque l’actualité l’exige, espérant que
seringues, c’est selon lui inutile car « une dans son bureau car avant d’être conseiller les médias reprendront nos arguments, mais
partie des toxicomanes continue d’échanger général du parti des Verts (et son futur ils nous boudent. Par contre, des fanzines
des seringues usagées pour satisfaire ce qu’il Secrétaire national), Jean-Luc avait relayé tendance punk et libertaire se passionnent
est convenu d’appeler un rituel collectif », « L’Appel du 18 joint » dans le magazine pour Fumée clandestine et je profite d’une
ose-t-il déclarer. Antirouille et milité pour la légalisation tournée promotionnelle dans les Fnac pour
En 1992, le Circ lui décerne le bonnet du cannabis. Il nous assure de son soutien, annoncer aux amateurs de petite fumette
d’âne de l’année pour s’être exclamé lors mais refuse de tirer sur le pétard que Caro- qu’ils disposent désormais d’une association
d’une interview : « Mais quel type de can- lien vient de rouler sur le coin de la table. à leur mesure. Comme nous avons promis
nabis ? Le haschich ou la résine concentrée Alors que les journalistes nous répon- aux cent premiers adhérents une carte origi-
à 40% qui est encore plus toxique que la co- dent généralement qu’ils mentionneront nale, nous passons l’été à colorier des petits
caïne frelatée ? » l’existence du Circ lorsqu’une opportu- dessins en fumant des gros pétards.
.
dez-vous avec la Fédération des œuvres laïques. On les baratine et d’autant mieux qu’il est situé boulevard Rochechouart dans un
on les rassure sur notre mission qui consiste à prévenir les jeunes quartier populaire de Paris. Y aura-t-il un avant et un après18
fumeurs des dangers du cannabis. Notre joker ? Un document du juin 1993 ? Tel sera l’objet du prochain épisode de cette petite
Parlement répertoriant toutes les associations de réduction des histoire du Circ. Jean-Pierre Galland
.
de Paris à Saint-Denis de la Réunion…) Remercions celles et ceux qui, partout d’être arrêtés à tous les coins de rue, mar-
à sortir dans la rue pour exprimer dans en France, ont travaillé pour que cette re d’une politique d’un autre âge. Si le
la bonne humeur leur ras-le-bol d’une onzième édition de la Marche mondiale changement n’est pas pour aujourd’hui,
politique à ras du bitume. soit un succès. Certes, les grands médias il sera pour demain. J.-P. G.
s,
mauvais génotype ou aux
L
es choses vont vite, mon télé- lisés : les patients naïfs (ce ne sont pas des • Recherche d’interactions médicamen-
phone portable d’il y a deux ans malades qui croient au père Noël, mais teuses associées à des précautions d’em-
est dépassé depuis longtemps, ceux qui n’ont jamais eu de traitement) et ploi : cordarone, flécaïne, quinidine, dros-
que dire de mon ordinateur et les patients en échec de traitement. pirénone, statines, ritonavir, raltegravir,
je ne vous parle pas du dernier groupe de ténofovir, méthadone, sildénafil, etc.
zik qu’il faut avoir écouté. Mais qu’en Bilan préthérapeutique
est-il dans le traitement de l’hépatite Avant tout traitement, un bilan préthé- Patients naïfs
C ? Contrairement au téléphone, en ma- rapeutique doit être réalisé par un spécia- Pour les patients naïfs de génotype 2 à 6,
tière d’hépatites virales, on observe que liste, il est identique à celui prescrit en cas la bithérapie classique permet la guéri-
chaque nouveauté est un progrès vers la de bithérapie : son dans plus de 80% des cas et ces nou-
guérison et le traitement de cette putain • Virologie : recherche de coïnfection velles molécules ne les concernent pas.
de maladie. VIH, VHB, charge virale, génotype viral. Les facteurs prédictifs de réponse à ce
En janvier 2011, nous avons connu • Bilan hépatique : TP, albumine, bilirubi- traitement sont bien identifiés. Chez les
un véritable progrès dans le traitement ne, échographie éventuellement associée à malades infectés par des génotypes 2 à 6,
de l’hépatite C de génotype 1 : deux une gastroscopie à la recherche de varices il s’agit essentiellement de l’âge (moins
nouvelles antiprotéases – le télaprévir et œsophagiennes. de 40 ans), du niveau de la charge virale
le bocéprévir – ont été mises sur le mar- • Biologie : NFS, plaquettes, créatinine, (en dessous de 600 000 UI/ml), de l’ab-
ché pour un traitement combiné avec la ALAT, ASAT, anticorps anti-tissus, TSH . sence de fibrose sévère et de l’absence
bithérapie classique (interféron pégylé • Évaluation des comorbidités : hépatite d’insulino-résistance (l’insulino-résis-
et ribavirine). Il est désolant que ça ne auto-immune (contre-indication), coro- tance s’observe souvent chez des person-
marche que pour les génotypes 1 mais naropathie, insuffisance rénale. nes en surcharge pondérale présentant
d’autres médicaments arrivent à toute • Évaluation de la contraception qui doit un trouble du métabolisme du sucre
allure. Ces molécules on été prescrites être double pendant tout le traitement. (glucides) et des graisses (lipides) ainsi
dans un premier temps dans le cadre • Recherche d’interactions médicamen- qu’un risque cardiovasculaire élevé).
d’une ATU (Autorisation temporaire teuses contre-indiquant le traitement : anti- Si une réponse virologique rapide
d’utilisation) et réservées à 1 000 ma- arythmiques, midazolam et triazolam (par (RVR) est obtenue (ARN VHC indé-
lades environ, qui risquaient d’aggraver voie orale), bépridil, pimozidine, luméfan- tectable après 4 semaines de traitement),
leur maladie rapidement. trine, halofantrine, inhibiteurs de tyrosines la bithérapie peut être poursuivie. En
En attendant l’autorisation de mise clair, vous avez des chances de guérir
sur le marché pour tous les malades, et ça on peut le voir à un mois de trai-
ce qui est le cas aujourd’hui, l’AFEF tement avec la disparition de la charge
(Association française pour l’étude du virale (l’essayer c’est parfois l’adopter !).
foie) a émis des recommandations en En l’absence de réponse virale, chez les
novembre 2011 afin d’aider les méde- malades naïfs de génotype 1 ou en cas de
cins à la délicate gestion de ces nouvel- facteurs prédictifs de mauvaise réponse
les approches. Je recommande forte- (génotype non CC de l’IL28B ou fibro-
ment de s’y référer car contrairement à se F3-F4), une trithérapie peut être pro-
certains labos (voir le Mediator®), nos posée. Elle permet un gain d’efficacité de
experts sont très prudents et nous pou- 30% par rapport à la bithérapie et laisse
vons leur faire confiance. Que recom- la possibilité d’un traitement court sur
mande l’AFEF1 ? 24 semaines.
.
rapeutiques sont donc indispensables peutique ramène le virus à un taux indétec- hépatites et dans d’autres instances.
chez ces malades2. table après deux semaines de traitement. Pour en savoir plus, écrivez à Asud qui
Pour les malades de génotype 1, les Toutefois, les chercheurs ne négligent pas vous donnera mon mail et mon télépho-
nouvelles molécules sont un vrai espoir. la possibilité d’éviter l’utilisation de riba- ne, et on en discutera. Michel Bonjour
Essayez le traitement, on peut toujours virine et d’interféron, donc de déclencher
l’arrêter si c’est dur mais si on découvre au des effets secondaires majeurs, en associant 1. Prise de position de l’Association fran-
bout de 4 semaines que l’on peut en finir ce nucléoside à des inhibiteurs de protéase. çaise pour l’étude du foie (AFEF) sur les
avec ce connard de virus avec une certitude Le PSI 7977 est donc une véritable révolu- trithérapies (Peg-IFN + ribavirine + in-
de 90% en 16 semaines (donc plus que 12 à tion pour les patients touchés par le VHC, hibiteur de protéase) dans la prise en
serrer les dents), ça vaut le déplacement. le nouveau traitement sera disponible sur charge des malades atteints d’hépatite
La trithérapie est devenue le traite- le marché dans peu de temps, des essais de chronique C (8 et 9 avril 2011).
ment de référence en cas de fibrose F3-F4 phase 3 pour des naïfs vont commencer en 2. ibid
chez les rechuteurs, chez les répondeurs France d’ici deux mois. 3. ibid
50
Pour son numéro
Asud-Journal
a testé pour vous
PRODUITS
L
50
’idée a germé lors d’un comité de rédaction particuliè-
rement psychoactif. L’angoisse était palpable du fait de
la dimension métaphysique de l’enjeu : Asud-Journal
sort sa cinquantième édition et pas question de laisser Abstinence, usage, abus et dépendance sont les quatre
passer l’événement dans l’indifférence générale. piliers de la consommation. La loi impose l’abstinence, mais
la réalité est constituée de millions d’usagers de drogues à
La loi Evin ayant été enfermée aux toilettes, l’atmosphère l’image des lecteurs de ce journal. Pour ne pas devenir abu-
s’alourdit, jusqu’à ce qu’une lumière étrange illumine le sifs ou dépendants, ces consommateurs devraient bénéficier
plus chéper d’entre nous. « Alléluia, mes frères, dit-il entre d’une culture de l’usage raisonnable, de la fameuse modéra-
deux transes mêlées d’hallucinations, et pourquoi pas un n°50 tion qui pour certains doit aller jusqu’à l’abstinence. Hélas,
: Asud a testé pour vous 50 produits ? » Un retour aux fon- nous ne sommes pas égaux devant les substances.
damentaux en somme. Le challenge était double : réussir à Concrètement, notre fibre d’usagers militants s’est re-
décrire une substance en quelques lignes sans enfreindre le trouvée prise en otage par la double injonction contradic-
fameux article L. 3421-4 du code de la santé publique qui toire qui est au cœur de ce journal : ne pas cacher le plaisir
punit toute incitation à l’usage d’un produit stupéfiant. Le que chacun retire d’une prise de drogues, tout en dénon-
tout en un paragraphe. Un vrai casse-tête, même pour notre çant les ravages de la culture « trash ». Le ban et l’arrière-
.
équipe de journalistes gonzos archi-capés en drogues diver- ban de la milice Asudienne s’est pliée à l’exercice. Merci
ses. Outre qu’il a fallu puiser dans nos archives très privées, pour ce grand élan de solidarité psychotrope.
revisiter nos jardins secrets, se remémorer des « premières À vous de juger si le grand écart est réussi ou si nous man-
fois » pas toujours flatteuses pour l’ego, le flirt avec la présen- quons de souplesse. F.O. et L.A.
tation sous un jour favorable a rendu l’exercice périlleux.
Asud-Journal 50
49 juillet
mars 2012 19
Asud 50 produits
derrière mes yeux clos. Je venais de trouver
ma drogue de prédilection, celle qui me
Cannabis
(CBD)
thérapeutique 09 Champignons
hallucinogènes 10
dégoûta de l’alcool. Compagne fidèle, elle
me booste le matin et me calme le soir, elle Pourquoi le cannabis peut parfois m’être
m’aide à créer et met une certaine distance très utile pour calmer certaines douleurs
entre la société du spectacle et moi. et parfois accentuer les mêmes douleurs ?
Le cannabis n’est pas une drogue in- Pourquoi certaines variétés d’herbes trou-
nocente et ne convient pas à tout le monde, blent considérablement mon sommeil et
déclenchant chez certains des paranos ga- pas d’autres ? Pourquoi certaines beuzes
lopantes et des angoisses. N’insistez pas, le me filent du stress et d’autres m’euphori-
cannabis n’est pas fait pour vous… Même sent en douceur ? Voilà des questions qui
les petits malins qui fument de gros joints ont longtemps tourné dans mon cerveau.
dès le matin ne sont pas à l’abri d’un acci- Jusqu’à ce que je découvre le rôle du CBD J’ai testé les champis qui contiennent de
dent de parcours, le cannabis peut profiter dans les effets du cannabis. Il équilibre les la psilocine et de la psilocybine. Pour la
d’une faiblesse physique ou psychique pour effets des autres cannabinoïdes et renforce cueillette ou la culture, mieux vaut être ini-
vous secouer comme un cocotier… Gare aux l’action antalgique du cannabis, son effet tié par un habitué face à toutes les espèces
gâteaux de l’espace ! Le grand danger du stoned aussi. Voilà pourquoi le shit maro- vénéneuses. Les proportions des principes
cannabis, c’est le goudron qu’il dégage lors cain décontracte bien plus mes crampes actifs pouvant aussi différer d’une variété
de sa combustion et le tabac avec lequel on que de nombreux hybrides américano- à l’autre (psylo, mexicain, hawaïen...), les
le mélange. Pour pallier à ces deux incon- hollandais. Il existe plein de variétés Indica dosages ne sont donc pas les mêmes. La
vénients et protéger votre santé, adoptez le riches en CBD comme la Black Widow, montée (20 à 60 min) des champis n’est
« vaporisateur » qui libère sous forme de Indu Kush, Mr Nice G13, Purpurea Tici- pas très agréable. C’est ni plus ni moins
vapeur le THC de vos trois brins de beuh, nencis. Par contre, si j’ai besoin d’un effet une intoxication. Puis cette horrible sen-
juste avant sa combustion. speedant, de trouver l’appétit, de supporter sation laisse la place à son exact opposé.
toute la souffrance du monde, j’ai surtout Ce bien-être à la fois tonique et re-
Le meilleur et le pire se cô- besoin d’une grosse dose de THC. laxant est un prélude indispensable à la
ingéré
chaque injection, jusqu’à ne plus sentir de CC avec de l’ammonia- bien. Soirée dans un squat en proche ban-
que le pire de la gamme des sensation of- que (facile, rapide mais assez lieue. Fin d’automne tranquille. Déten-
fertes par les psychostimulants : crises de toxique), en France on préfè- due, j’avais fumé un peu d’opium. « Ça te
panique, dépression, envie suicidaire, bref, re la « cuisiner » avec du bi- dit, j’ai du Crystal ? » Une pipe en verre
que du « down ». carbonate (plus délicat et lent, mais moins au foyer quasi clos. Quelques paillettes
N’oubliez pas d’enterrer votre car- toxique). Je place mon caillou sur l’alu translucides. Quelques secondes sous la
te bleue, loin, très loin de votre spot de mais contrairement à l’héro (voir p.24), je flamme et les cristaux fondent. Une fumée
consommation. Après, tout ce qui touche le fais fondre pour obtenir ma goutte en le blanche et dense. Il suffit d’aspirer. Une
aux risques liés à l’injection est à multi- chauffant directement par-dessus. J’évite sorte de non goût, une amertume douce.
plier par 100 quand vous shootez la coke. ainsi d’éventuelles projections sur les yeux Et un effet supérieur à de l’excellente coke.
Rapidement, votre soif libidineuse de sen- et de voir mon alu constellé de petites ta- Quelques inspirations plus tard, c’est re-
sation forte va vous conduire à multiplier ches de base sur lesquelles il faudra repasser parti dans la fête. Et envie d’y retourner.
les trous, sortir de la veine, chiper la pompe pour ne pas les perdre. La goutte se forme Assez souvent. Assez vite. Ça fait rien et ça
des invités en étant persuadé d’être un as vite, elle doit être collante, la plus transpa- fait tout. Esprit clair, tout est bien, tout est
de la réduction des risques. Un conseil : rente et la moins jaune possible et le rester possible. Et besoin d’eau, de soft. Douleur
après le deuxième fix, un Valium® et dodo. une fois refroidie. Si elle devient comme de désagréable dans les reins. Descente dou-
la craie, c’est mauvais signe ! Pour inhaler, ce, en chassant tranquillement le dragon.
À l’aide du bouchon d’une je replace ma flamme sous l’alu. Comme sa
sniff
bouteille de limonade à l’an- vitesse de descente est bien plus rapide que
cienne, j’écrase bien la coke celle de l’héro, je dois juste m’arrêter de
sur une coupelle en porcelaine. chauffer un peu avant la fin pour qu’elle ne
La poudre ne doit plus crisser sorte pas de l’alu. L’effet est immédiat, une
pour ne pas couper le nez. Je m’enfile une montée super rapide mais un peu moins
paire de lignes en dix minutes. Ma pensée violente qu’avec un doseur. On ressent
s’éclaircit, j’accède bien plus vite à mon l’envie irrésistible de parler, on a la pêche,
cerveau, comme après une défragmenta- on est apparemment si lucide, mais cela
tion de disque dur. Une autre ligne m’en- ne dure que quelques minutes…
voie dans un état d’euphorie supérieur à Lavez la pâte de base obtenue avec
l’alcool mais sans perte de contrôle. J’ai de l’eau puis séchez-la avec un kleenex.
envie de discuter, d’écrire ou de faire Même conseils pour l’alu et le matos que
quelque chose de créatif comme la cuisine pour l’héro (p.24). Malgré l’envie de re-
ou voir un spectacle. Là, l’expérience peut prendre tout de suite, il faut marquer des
déraper. Si je bois de l’alcool, en mode pauses les plus longues possibles sous peine
soirée festive, je vais enchaîner les clopes, de dérapage. La base de CC est terrible-
les verres et les traces jusqu’à finir cada- ment accrocheuse et bien des UD chevron-
véré à l’aube, avec les risques de ce genre nés sont partis en live avec…
© Erowid
J’ai pris un coup de bambou à la plosions. Il est parfois utilisé pour transfor-
dixième heure, trop d’énergie brûlée sans mer de la coke en crack : attention au feu et
refaire le plein. Pas faim, ni soif. Il est laissez évaporer au moins 24 heures avant
préférable d’avoir un ange gardien pour de consommer. D’un coup c’est trop, et voilà le G-Hole,
veiller à l’intendance. Le produit est vrai- qui se manifeste de diverses façons. Le plus
GHB/GBL 18
ment puissant, à doser avec précaution connu, le « coma », n’est pas le plus désa-
sous peine de distorsion grave de la per- gréable. Tu t’endors tranquille et te réveille
sonnalité et de panique. Cette expérience deux heures plus tard, mais sommeil souvent
intense nécessite de bonnes dispositions Gi, glouglou, Dame Jouvence : autant de habité de cauchemars. Attention à ne pas
physiques et mentales, et de bien préparer petits noms pour cette substance abusive- dormir sur le dos, le Gi fait souvent vomir.
les conditions d’usage : environnement ment appelée « drogue du viol » en po- Ou alors grosse crise d’angoisse et autres ef-
safe, bonne ambiance musicale et visuelle, pulation générale. Mais de quoi s’agit-il ? fets paradoxaux décrits par beaucoup d’usa-
chill-out de luxe. D’un « nouveau » produit incroyable gers réguliers. Là sérieux, c’est pas cool et ça
qui aurait pour effet de nous désinhiber peut être violent, surtout en prenant beau-
sexuellement en augmentant de surcroît coup de coke en même temps. J’ai eu envie
Éther 17 notre dose de plaisir, mais avec une bonne d’arrêter. L’air de rien, c’est difficile à gérer
amnésie par dessus, quel dommage ! comme prod, et puis j’avais mal au bide à
Ma grand-mère aimait bien se péter la ru- Revenons cinq ans en arrière. Je sors beau- force de boire du décapant, même au ml,
che à l’éther de temps à autres. Elle finis- coup, tape beaucoup de coke, fréquente ça attaque l’estomac.
sait fin ronde, incohérente et trébuchante essentiellement la scène free et la scène gay. Avec le « vrai »
avant de sombrer dans un profond som- Un jour, tranquillement posée chez un ami GHB, plus difficile à
meil et de se réveiller avec une grosse mi- proche, il me propose un nouveau bap- trouver, pas perçu de
graine et des nausées. Moi aussi, malgré tême : le Gi. Ok, je dis, toujours avide de différence niveau
ce spectacle peu ragoûtant, j’ai fini par nouvelles expériences. Il m’en explique les effets, différem-
sniffer mon mouchoir comme les autres. effets, la condition préalable primordiale ment mauvais
L’éther était toujours très populaire chez étant la non consommation d’alcool. Les au goût, un peu
les ados niveau 5e/4e dans les années effets des deux prod se potentialisent. moins corrosif
70. C’était facilement disponible, bien Une grosse seringue doseuse, et voilà 2 ml pour les
plus rapide et moins cher qu’une cuite de Glouglou dans mon verre de grenadine. muqueuses
à l’alcool. Avec en plus ce doux cocon L’odeur et le goût sont infects, et le mieux digestives.
après l’euphorie qui est plus proche des pour les dissimuler reste les sirops bien su-
opiacés que de la bière. Mais aussi une crés. Je sais que je vais boire du décapant
accoutumance digne de l’héro et de pour graffitis mais je me dis qu’après tout,
gros dégâts sur la concentration, une im- 2 ml dans 250 c’est bien dilué.
mense irritabilité et le besoin compulsif Après quelques gorgées et une petite di-
de sniffer. J’ai rapidement préféré fumer zaine de minutes, grande détente, ça va
des joints. Et je n’ai plus jamais sniffé de trop bien avec la coke, ça temporise son
sac ou de mouchoir. Il faut savoir dire non côté un peu speed. Et ça fait parler grave,
aux drogues de merde. totalement logorrhéique. Côté excitation
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Asud 50 produits
Héroïne 19 Huile de cannabis 20
Bon d’accord de nos jours, on J’ai placé sur le côté mat
chasse
sniff
prescriptions habituelles de procher un peu plus la flamme de celui- trop flippé. Un usage prolongé accentue
l’injection à moindres risques. ci. On prend vite le coup mais les débuts les risques liés au cannabis dont le manque
L’idéal est de rester « récréa- sont parfois difficiles… d’attention, l’asocialité et la démotivation.
tif » car vous serez le dernier C’est un procédé convivial et économi- Le sevrage peut provoquer un manque
informé de votre potentiel de résistance à que car on peut fumer une petite quantité psychologique et même physique plus im-
l’addiction aux opiacés. De nombreux expé- à plusieurs. Assez safe si on ne partage pas portant qu’avec le hasch ou l’herbe.
rimentateurs restent des amateurs éclairés, son tube et si l’on marque des pauses entre Même règle que pour l’alcool : on ne
d’autres en prennent pour vingt ans ou per- chaque prise. Mais attention, c’est aussi consomme pas la même dose de bière que de
pète. Pas de méthode, pas de manuel, alors très accrocheur et pas du tout bon pour les gnôle maison, ni la même dose de marocain
adoptez une méfiance de Sioux. Autre piège : poumons ! Les débutants peuvent tracer sur de cité que l’huile de cannabis. Bien préve-
sous ses dehors cajoleurs la belle Hélène est l’alu un chemin avec le doigt afin de mieux nir du potentiel avant de faire tourner un
mortelle. Pas à tous les coups, mais mortelle diriger la goutte. Ne pas repasser là où la joint, ne pas consommer avec des néophytes
quand même. La première consommation, dope a pu brûler et prendre un alu le plus ou des personnes présentant une fragilité
la sortie de prison ou le retour de cure, sont épais possible. Certains centres de RdR en psychologique.
les moments de vulnérabilité maximum. donnent même du non traité...
Iceolator hasch 21
Mila a puisé dans son sachet l’équivalent
d’une ligne de poudre cristalline couleur
sable. Elle l’a saupoudrée sur le tabac déjà
dans la feuille, l’a fait pénétrer dans les fibres
puis a roulé le spliff. Elle a tiré trois lattes et
me l’a passé. Malgré le peu de substance
utilisée, le goût de résine était très puis-
sant, acide, prenant. Après une quinte de
toux sans fin, j’étais rouge et tout essoufflé.
J’y suis retourné prudemment et j’ai passé
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Asud 50 produits
Khat 25 LSD 25 28
C’est au Yémen que j’ai testé la mastication De mon premier trip, je me souviens
du khat alors que je faisais un mémoire uni- comme si c’était hier, une expérience qui
versitaire sur cet arbuste. Je venais à peine m’a marqué, que j’ai renouvelée maintes
d’atterrir à Sanaa avec deux amis, que nous fois et qui m’a rarement déçu. « Un sen-
sautions déjà dans un taxi pour lui demander timent de bien-être m’enveloppait, comme
où trouver du khat. Heureux que des étran- si une vie nouvelle s’ouvrait », écrit Albert
gers s’intéressent à cette pratique typique de Hoffmann de sa première (et involontaire)
cet endroit du monde, il nous conduisit dans expérience de l’acide D-lysergique
un mafraj, sorte de bistrot dédié au khat. La L’acide a changé subtilement ma vie. Ce
première fois, je n’ai pas vraiment ressenti n’est pas la « bombe psychique » décrite
les effets. La mastication du khat n’est pas par certains mais avec le LSD 25, vous
si simple, ni très agréable pour un novice. Il retrouvez l’innocence et l’insouciance de
faut bien mâcher les feuilles, mais sans trop votre enfance. Faire l’amour sous acide,
les émietter, tout en buvant du thé afin d’ob- LSA (Hawaiian 27 c’est comme voyager dans l’univers, un
tenir en bouche une pâte. Avec la langue et Baby Woodrose) feu d’artifice. Si j’osais, je conseillerais à
les dents, on en fait une boule que l’on main- toute personne normalement constituée
tient entre la joue et la gencive. Chaque nou- Douze graines lavées puis pilées au mor- d’expérimenter cette drogue psychédéli-
velle feuille mâchée alimente la boule pâteuse tier avaient infusé dans 10 cl de rhum que. Avec le LSD, vous prenez conscience
qui, en baignant dans la salive et grâce à l’ac- brun pendant 3 jours. Nous avons par- du mot harmonie, vous êtes tout amour
tion mécanique de la mâchoire, libère enfin tagé ce breuvage au goût végétal en trois, pour la vie, vous parlez avec les arbres et les
son principe actif, la cathinone. Une amphé- le temps était idéal pour une promenade aliments ont des saveurs que jamais vous
tamine naturelle qui produit d’abord une vi- dans les collines alentours. Les crampes n’auriez soupçonnées…
vacité tranquille et empathique propice aux d’estomac de la montée furent supporta- Après être monté jusqu’à toucher le ciel,
grandes discussions pour refaire le monde bles, une légère nausée pour mon amie. de la musique douce, des joints et un lit
avec conviction jusqu’à pas d’heure. Cette J’ai soudain ressenti des frissons élec- douillet atténueront la descente.
phase de désinhibition est suivie quelques triques le long de la moelle épinière, les Le diéthylamide de l’acide lysergi-
heures après de ce qu’il est difficile d’appeler sons devenaient très intenses avec un lé- que n’est sans doute pas à mettre dans
une descente : les effets s’estompent dans une ger écho, les nuances de couleurs étaient toutes les mains. Si aucun mort n’est
rêvasserie plutôt agréable. remplacées par des taches vives. La forêt directement imputable au LSD, certai-
La consommation quotidienne est toutefois baignait dans une lumière irréelle, elle nes personnes perdent les pédales sous
déconseillée sous peine de sérieux problèmes attirait vraiment. Nous avons marché l’effet de cette drogue dont la puissance
d’hygiène buccale (liés aux pesticides) et de deux heures, le temps semblait suspendu se mesure en microgrammes. Présenté
fortes baisses de régime les lendemains (ce puis accéléré. Nous avons squatté un pré sous forme liquide ou de gouttes posées
qui incite à reconsommer). L’humeur est fleuri pour déguster notre gourde de thé sur un buvard, mieux vaut connaître le
alors changeante, on devient facilement ir- froid, grave délire sur les fleurs et les in- dosage avant de se lancer dans l’aven-
ritable, voire agressif. sectes. Nous avons décidé d’acheter du ture car plus le LSD sera dosé, plus vous
lait à une ferme voisine. Nos pupilles multiplierez le risque de partir en su-
Kratom 26 très dilatées ont rendu le paysan agressif.
Le stress s’était installé et la descente fut
cette. Les buvards en vente dans les offi-
cines sérieuses sont généralement dosés
Il y a plus de vingt ans, j’avais vraiment ap- pénible. Mes amis avaient froid, peur de à 240 microgrammes et je ne saurais
précié l’effet narcotique du thé de kratom se perdre, ils entendaient des bruits in- trop vous conseiller d’en prendre seule-
dans le cadre d’un sevrage à l’opium (et un quiétants et s’effrayaient de l’ombre des ment une moitié.
peu de brune). Je ne connaissais pas la dose arbres. Ils restèrent très tendus toute la
utilisée ni la provenance de l’herbe, mais soirée, à la fois crevés et agités. Cela m’a
cela calmait un peu mes douleurs et me gâché la fin du trip. Sous LSA, il faut se
tranquillisait beaucoup durant le manque. préserver des mauvaises vibes.
J’ai depuis essayé plusieurs présentations Être à jeun depuis au moins cinq heu-
dans les smartshops et je n’ai plus jamais res avant de consommer du LSA. Selon la
retrouvé cette intensité. En infusant 6-7 g, sensibilité des usagers, les crampes d’estomac
j’ai un petit coup de speed et une eupho- et les nausées peuvent être sévères. Il est pré-
rie légère, avec 10-12 g, un effet sédatif férable de tester une quantité minime (une
et vaguement planant. Ce dosage devrait à deux graines d’HBW) pour connaître sa
pourtant suffire avec un kratom de bonne réaction. Bad trip en cas de surdose.
qualité. Pas de chance sur ces coups-là.
En cas de surdose, le kratom provoque
des nausées violentes, vertige et anxiété.
Adapter la dose graduellement pour tester
la qualité du produit et votre sensibilité.
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que jamais. Comme si le MDMA révélait
une facette de sa personnalité enfouie sous
Attention quand même, son ancien sta-
tut légal et sa faible puissance en termes de
Méthoxétamine 35
de trop lourdes normes sociales. Rien ne rapport quantité/défonce ne doivent pas fai- J’ai testé à deux reprises la méthoxétamine
l’empêche plus de parler aux inconnus, de re oublier que la méphédrone entraîne sou- à l’insu de mon plein gré. La première fois,
se mettre à nu et surtout, de voir la beauté vent des comportements compulsifs, qu’elle a c’était il y a deux ans en teknival et j’étais à sec
cachée en chacun de nous. un certain potentiel addictif et que certaines de kétamine. Vers un dancefloor anglais, je
Combien de fois ai-je essayé de fixer cet personnes supportent très mal sa descente. rencontre un gars qui m’en propose au prix im-
état d’esprit, me disant qu’il ne tenait qu’à battable de 20 € le gramme finalement obtenu
moi le lendemain de continuer à fonc- à 10 € ! J’aurais dû me méfier mais l’envie était
tionner ainsi ? Peine perdue : environ six plus forte. Avec mon pote, on tape sans hésiter
heures après la prise, l’effet du produit dis- chacun une poutre de 0,2 g. D’habitude, la
paraît progressivement pour laisser place à montée de kétamine est assez rapide mais là,
une descente beaucoup moins funky (fris- rien : juste une grosse patate, envie de parler et
sons, fatigue, apathie...). de bouger comme le speed et des picotements.
Le MDMA est un produit fort et Pas très agréable. Peu à peu, je commence à
particulièrement toxique ( foie, système avoir des sensations proches de la kéta mais
cérébral...) qui déséquilibre le cerveau. avec des hallus façon LSD. Cinq heures plus
D’après la légende, Shulgin conseillait tard, une fois le trip terminé, j’apprends par
d’espacer les prises d’au moins qua- des amis que de la méthoxétamine tournait
rante jours. Pour les conseils « classi- vers les camions des anglais. De la métho...
ques » de RdR, je vous renvoie au site quoi ? Kézako ? Rares sont les produits
de Technoplus (www.technoplus.org) vendus en teuf qui peuvent se targuer d’être
où tout est détaillé. Ah, un petit truc
perso pour éviter de se fissurer les dents
Méthadone 34 des nouvelles drogues. La plupart ont tou-
tes déjà été synthétisées du temps de mon
en dormant sans se ruiner dans l’achat « Ces petits manques que la métha… donne », arrière-grand-papi. La méthoxétamine est
d’une gouttière : les magasins de sport disait l’autre. En sirop ou en gélule, la mé- tellement nouvelle qu’elle n’a aucun statut
vendent des protège-dents de boxe à en- thadone est un médicament, c’est marqué. juridique, ni médoc ni stupéfiant. Plusieurs
viron 5 euros. Pas question de se défoncer avec… Enfin, mois plus tard, à jeun de tout autre produit,
tout dépend de ce que l’on entend par dé- moi et un ami tapons une grosse trace de ce
fonce. Si vous êtes amateur d’héroïne, y’a qui m’avait été vendu pour de la kétamine.
quand même un fort cousinage. En fait, Eh bien non, me voilà à nouveau avec la pâ-
vous pouvez reprendre à peu près intégrale- teuse et la parlotte (pensez à boire de l’eau)
ment les symptômes décrits précédemment et des picotements partout dans le corps. Les
avec un petit quelque chose de synthétique hallus s’installent, le spectacle commence et
qui rebute parfois les puristes. Mais soyons là surprise, plus possible de parler, je plonge
juste : en matière de prescription, le flacon hors de mon corps dans un K-hole ou plutôt
tue l’ivresse. Le cadre médicalisé de votre M-hole psychédélique et éprouvant. Après
consommation vous place rapidement sur coup, le vendeur me confirme qu’il s’agissait
une orbite moyenne où les effets de high de méthoxétamine mais comme personne
sortent essorés par la mécanique neurobio- ne connaît ce produit, il préfère parler de
logique de la tolérance. C’est du reste ce kéta, le bouffon. Dans ces deux expériences,
qui fait le principal intérêt de ce stupé- ce qui m’a rassuré est qu’à chaque fois la per-
fiant majeur pour de nombreux exilés de sonne avec qui je consommais était dans le
Méphédrone 33 l’héro, sauvés de l’enfer de la prohibition
par la fée méthadone.
même état. Ça aide à surmonter l’angoisse
des effets inattendus.
Produit classé dans les « MDMA like », Deux règles majeures : no shoot, la mé-
c’est-à-dire les produits aux effets assez thadone vous flinguera les veines plus vite
proches du MDMA. On en a beaucoup que n’importe quel autre opiacé, et inter-
entendu parler en 2009 (lorsqu’une pé- dit de décrocher brutalement sous peine de
nurie généralisée de MDMA a poussé les voyage au pays du cauchemar, avec pétage
consommateurs à rechercher des alterna- de plombs en HP à la clé. Décrocher de la
tives sur les sites de vente de produits en méthadone reste un souci sans être absolu-
ligne) mais la méphédrone tend depuis à ment impossible mais surtout, piano piano.
se raréfier. Les prohibitionnistes y voient Dernière chose, on a dit stupéfiant majeur :
une preuve de l’efficacité de son inter- la dose létale est de moins d’un demi mg par
diction en 2010, nous y voyons plutôt kilo pour les néophytes et de toute façon, cette
une conséquence du retour en force du règle ne s’applique plus au-dessus de 40 mg.
MDMA. En effet, les effets ont beau être Bref, si vous testez hors cadre médical (a
assez proches, la plupart des consomma- fortiori si vous n’êtes pas accro), vous êtes en
teurs préfèrent le MDMA. danger… de mort.
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PCP 39 Philosopher’s Stones40 Poppers 41
J’ai goûté l’Angel Dust sans le savoir. Les truffes magiques ! Ces petits champi-
C’était avec des Américains, l’été à Val- gnons informes, visqueux et encore plus
Thorens. Nous étions attablés à la ter- dégueulasses que les autres sont pourtant
rasse d’un chalet, deux joints au goût très recherchés. Il en existe plusieurs varié-
métallique ont tourné, l’herbe ne sem- tés, toutes rattachées à l’immense groupe
blait pas terrible jusqu’à un rush violent des psilos dont elles partagent les prin-
au bout de trois minutes. Toute la tablée cipes actifs (psilocine et psilocybine). À
était explosée de rire, j’avais mal aux mâ- dose égale, les effets psychoactifs des truf-
choires. Les Américains ont expliqué le fes sont toutefois moins forts que ceux des
joint pur farci au PCP. Nous en avons autres psilos, ce qui fait qu’on les conseille
discuté vivement. J’ai voulu me lever et souvent aux débutants. Certains connais-
j’ai failli me viander, je titubais comme seurs plus expérimentés apprécient aussi le
un poivrot à deux grammes. Toutes les côté soft de ces champignons, notamment
distances me semblaient gigantesques, je pour revenir aux hallucinogènes après un Fallait bien que quelqu’un se dévoue.
voulais absolument me trouver un coin bad trip, mais la plupart des habitués des Vous savez le poppers, c’est la drogue des…
pénard pour kiffer en paix. Un transat enfin ça sert à… Bref, y paraît que c’est la
n’attendait que moi à trente mètres, un drogue des messieurs qui aiment les mes-
chemin de croix et enfin la béatitude, sieurs. Même qu’il faut en prendre pendant.
mais le cœur à cent vingt pulsations, un Et bien non, même pas vrai : on peut aussi
chaud-froid permanent, des sueurs et en prendre avant, après, en dehors, le nitrite
un stress qui s’apaisait difficilement. Je d’amyle – c’est son nom scientifique – est
suis rentré dans un long rêve éveillé où aussi une drogue de psychonaute qui cher-
se mélangeaient à toute allure des sou- che l’aventure au galop. Bon pour être hon-
venirs personnels, le décor et les person- nête, c’est pas vraiment l’extase : une tachy-
nages présents autour de moi. Je passais cardie carabinée, suivie d’un mini collapsus.
sans cesse du calme à l’agitation. Puis je Et puis alors cette odeur… c’est vrai que ça
me suis endormi vraiment pendant une rappelle un peu les senteurs musquées d’un
heure à peine. Le réveil fut pâteux, j’ai coït vespasien. Oups, grillé !! Non sérieux :
peiné pour retourner à mon studio et essayez plutôt la colle.
j’étais bien naze le lendemain. Un sou- RdR ? Je sais pas trop, peut-être éviter
venir mitigé. psychédéliques qui en commandent sur le de s’envoyer trois tubes cul sec… Qu’est-ce
L’usage du PCP n’a jamais été très po- Net s’avèrent déçus après consommation. qu’on se marre…
pulaire en France. L’agitation et la panique La faute à la faible puissance du produit
de l’usager en surdose peuvent créer des si- mais aussi et surtout, au marketing des
tuations très critiques, des convulsions et la smartshops en ligne... J’attends toujours
mort. Il faut vraiment éviter les joints sur- mon « trip philosophique », cet « état rê-
prise dosés à l’arrache et ne pas dépasser les veur » et ces « pensées profondes » que
10 mg, surtout en sniff ou en shoot. l’on m’avait promis car moi tout ce que
j’ai eu, c’est une légère nausée et un début
de trip d’ampleur comparable à quelques
lattes sur un bon pétard !
Si vous décidez de tenter l’expérience,
faites tout de même attention au surdo-
sage. Rien n’incite plus à ingurgiter des
quantités démesurées qu’un produit soft à
montée lente mais gare à la triple montée :
truffes ou pas, le duo psilocine/psilocybine
demeure l’un des plus gros hallucinogène
connus avec les risques de bad trips ha-
bituels. Renseignez-vous sur la RdR liés
aux champignons sur le site de Technoplus
(www.technoplus.org) et si vous vous posez
des questions sur les différentes variétés de
champis, le forum www.psychonaut.com
ou le site www.erowid.org devraient vous
éclairer.
sniff
au fond de l’appartement. Un truc din- butant. On les consomme à petites doses brun et du blanc en même
gue. Une sensation « mystique » intense, comme un joint, une bouffée puis on fait temps. Le mélange à deux
comme si on avait la visite d’un « ange ». tourner au voisin. À ce rythme, une fois temps qui te booste ta
Très vite, cette sensation s’amenuise et de temps en temps, il y a peu de risques. journée à courir la ville
j’aperçois mon amie qui tire sur la pipe. Je Mais à forte dose et/ou très fréquemment, sans fatigue ni douleur, et qui t’aplatit ta
la vois exploser de rire. Moi, je m’accroche ces produits sont probablement parmi les soirée dans un doux cocon. Ou l’inverse
aux accoudoirs de mon fauteuil car j’ai plus toxiques, notamment pour l’appareil en version teufeur. Le dosage permet de
l’impression très réaliste de m’enfoncer respiratoire, les yeux et le cerveau. De plus, moduler les effets, on peut limiter l’an-
et de tomber dans un trou béant. Puis une leurs effets à ce niveau de consommation xiété de la coke ou la mollesse de l’héro.
crise de fou rire qui n’en finit plus nous ne sont pas très intéressants. Au mieux un J’avais de quoi carburer trois jours, j’ai
gagne et une demi-heure après, nous som- endormissement vertigineux, au pire une géré sur quatre et demi. Je pensais que
mes revenus à la normale. Une première perte de conscience. J’en connais certains c’était la limite pour atterrir sans trop de
expérience plutôt éprouvante, on ne re- qui ont essayé de boire des solvants, pour dégâts. Grave erreur : il m’a fallu combat-
commencera pas demain, ça c’est sûr. voir les effets. Ils ont tous fini au centre an- tre une grosse envie de retourner chez le
Il est impératif de bien lire le Guide tipoison avec un lavage gastrique. dealer. Je l’ai enterrée sous beaucoup de
d’utilisation de la Salvia Divinorum vin rouge et de Haze. Semi-coma, réveil
de Daniel Siebert. La Salvia est un en- horrible, fièvre, migraine, douleurs aux
théogène, un trip peut vite se transfor- jambes et aux reins, nausée, j’étais très fai-
mer en un véritable cauchemar. Ne pas ble. Je cumulais un crash post-coke et un
fumer de la Salvia au bord d’un préci- léger syndrome de manque. Additionnés
pice ou à côté du vase de Chine de papa. aux vieilles douleurs réveillées par les heu-
Rangez bien tout ce qui pourrait être res en surrégime, j’étais cramé pour la se-
une source de danger (ciseaux, bougies maine. J’avais violé la règle d’or de l’usa-
allumées, etc.) et préférez un jour où ger récréatif de speedball : jamais plus de
vous êtes en forme. Évitez de consom- 48 heures, sinon la récréation se paye trop
mer si vous avez des gros soucis. cher. Plus on a été accro au bourrin et/ou
à la C, plus l’addition est salée.
Les produits sous forme de gaz (proto, Attention à l’OD, toujours tester sépa-
air sec...) contenus dans des récipients sous rément les deux substances en quantité mi-
pression ne doivent pas être mis directe- nime pour bien évaluer la dose selon sa sen-
ment à la bouche sous peine de se geler sibilité du moment. Se méfier de l’euphorie
les cordes vocales et les poumons. Il faut provoquée par la coke qui pousse à rajouter
d’abord transférer le gaz dans un ballon trop d’héro, surtout avec de l’alcool (mélan-
de baudruche, puis respirer dans celui-ci. ge dangereux). Ne pas sniffer d’autoroute
Avis aux amateurs d’états de conscience (une ligne = danger ; deux lignes = sécu-
modifiée : il existe des produits moins dan- rité), attendre la fin de la montée de héro
gereux et plus plaisants. Ceux-ci sont donc avant de prendre la seconde.
à ranger aux rayons « erreurs de jeunes-
se » ou « très occasionnellement ».
Mention spéciale quand même au
proto, le fameux gaz hilarant, encore
très présent dans les soirées techno et ser-
vant principalement à faire (re)monter
ou pimenter ponctuellement un autre
produit consommée. Si vous croisez
quelqu’un avec une machine à chan-
tilly, ce n’est peut être pas pour faire de
la pâtisserie.
le piège parfait tendu par la comme une vielle montre sur le sujet, un
censure. En guise d’appât, vrai croisé... Parce que quelle arnaKKKe...
cette chose, ce truc : le spee- d’État, soutenue par moult groupes de pres-
dball en shoot, la meilleure sion, lobbies puissants et associations foutra-
drogue du monde. Ça y est, c’est dit. Après ques (bien nocives). Qui dit prohibition dit
tout, c’est pas bien de mentir. 2/3 coke, trafic dit gangstérisme organisé (merci bien)
1/3 héro (de la thaï n°4 s’il vous plait), 5 et répression. On ne compte plus les morts
cc d’eau froide, et paf : l’équilibre parfait, des deux côtés ! Stupéfiant, non ?
le nirvana, la fraîcheur cristalline d’un Bien sûr, ça m’étonnerait que le tabac ar-
lac de montagne sur canapé de moiteur range l’état de nos poumons. Mais la bouffe
sensuelle. On tutoie les sommets parmi J’ai fait partie des premiers ex-tox à décro- indus, les pesticides, l’air vicié, ça n’attaque
les edelweiss avant de se laisser douillette- cher au Subutex®. Vers 1997. Le produit ve- pas l’organisme, non ? Troublant qu’on ait
ment envelopper par les bras d’Aphrodite, nait d’être introduit en France. Pas de flash fait de cette lutte-ci un enjeu de santé publi-
on… Heu… pour la suite adressez-vous au ni de doux flottement, mais principalement que primordial, loin devant tout le reste. Le
directeur de publication. l’abolition des douleurs physiques liées au marché est juteux, en particulier pour les labos
Comme précisé ci-dessus, attention : manque. Dès l’instant où tu décroches, c’est pharmaceutiques qui engrangent des profits
dans le speedball, un stupéfiant en cache quand même ça qui te crucifie. Conservateur vertigineux et n’ont rien à envier aux lobbies
toujours un autre, c’est le principe. Dans le comme je suis, j’étais pas très chaud à l’idée du tabac. Et puis, le paquet de clopes à 10, 20,
cas présent, c’est de l’héroïne dont il faut se de lâcher le Temgésic®. Mais je me suis laissé 50 €, ça change rien pour les plus fortunés. Par
méfier. La cocaïne peut momentanément en convaincre, principalement parce qu’avec le contre, le laborieux, le smicard, lui, il est fra-
masquer les effets et vous piéger à la sortie Sub, j’étais en charge de ma propre désintox. cassé au porte-monnaie d’abord, au cœur et au
avec une surdose. Si vous piquez trop fort Le maître de ma douleur, comme disait Ar- poumon ensuite. À chaque volute, culpabilité
du zen, un petit fix de coke… Quoi ? C’est taud. Et de ma « guérison » ! Je n’en deman- maximale d’engloutir un quart de sa paye dans
pas ça qu’il faut écrire ? dais pas plus. Quoi qu’on en dise, le Subutex® l’achat de son « poison » alors qu’il faut de
aura été une bénédiction pour une tripotée nouvelles pompes aux enfants. Le tabac fina-
On ne peut faire un speed- d’anciens héroïnomanes. Certains fonda- lement est un révélateur criant de la perversion
chasse
ball en chassant le dragon mentalistes restent sceptiques, évoquent la hygiéniste de ce temps. Ah merde, mon pa-
qu’avec de la base de CC. perdurance d’un comportement addictif. quet de Lucky est vide... Je vous laisse. Faut que
Je place d’abord ma base sur Mais à l’heure où un fort pourcentage de la je trouve un bar tabac ouvert !
un bout de la feuille d’alu population dite normale se gave de somnifè-
en procédant comme on l’a vu pour for- res et d’antidépresseurs, c’est assez cocasse...
mer la goutte (cf cocaïne). Je mets l’héro
à l’autre bout de la feuille, en suivant la
Le sujet n’a d’ailleurs rien de tabou chez ces
gens-là. J’ai adopté une attitude similaire en-
TMA-2 50
manière décrite plus haut (cf héroïne). vers le Sub. Question de principe ! Les réac- « TMA2, c’est un hybride MD et mescaline,
Puis j’amène la goutte de base (plus facile tions sont curieuses. Défiance incrédule, en dosé gentil », nous dit-il en faisant tourner sa
à manier) rejoindre celle d’héro. La gout- particulier quand on comprend qu’il s’agit bière. Quarante minutes après, montée d’une
te qui se forme alors est collante, moins de ce produit sulfureux pointé du doigt par suée dégoulinante, température élevée mais
brune, assez facile à manier. D’abord, les les journaux. Parce que pour eux, les antidé- mains gelées et renvois d’air, j’étais scotché.
bons mais courts effets de la base et avant presseurs, euphorisants, somnifères, ça n’a « C’est bon mais c’est fort, dosé gentil mon
d’en ressentir les plus négatifs, l’héro ren- vraiment rien à voir avec ça ! L’ignorance, cul ! » Visions intérieures très changean-
tre en action et calme le jeu ! Pas éton- une fois encore, mère de tous les vices, de tes, géométriques avec des couleurs étran-
nant que les amateurs de dragon aiment toutes les coercitions aussi. Il serait temps que ges, comme dans un dessin de Moebius ou
le speedball ! tous ces bien-pensants songent à s’informer Druillet. Le rush s’est calmé, j’étais plus se-
En effectuant les deux opérations sépa- plutôt que de se contenter d’approximations rein, je faisais corps avec la foule passant d’un
rément, on évite de gâcher un des produits finalement très confortables. Subuesque ! groupe à l’autre avec empathie. Je voyais les
si l’autre ne passe pas le contrôle de qualité. contours très mouvants, les lumières chan-
Attention : le speedball étant un mélange
agréable, on a vite tendance à y revenir Tabac 49 geantes ou décomposées, des traînées de cou-
leurs pales derrière les mouvements de per-
avec le risque de conjuguer l’accroche de sonnes ou d’objets. Après trois heures, je suis
l’héro à celle de la coke ! Bonjour les dégâts ! Ça ferait une jolie petite comptine pour devenu mou, j’ai été m’écrouler backstage où
Mêmes conseils que pour l’héro et la CC les gosses, mnémotechnique et tout, au ser- j’ai un peu tchatché et beaucoup rêvassé. La
pour inhaler et pour le matos. vice de la bonne cause : « Le tabac c’est de descente fut longue et physiquement cris-
la drogue et la drogue, c’est de la merde » ! pante, un Myolastan® m’a bien aidé.
Notre génération, c’est trop tard, plus qu’à La montée peut déclencher un malaise
attendre qu’elle crève, un bon crabe... par voire une panique. Ne pas consommer seul et
où elle a péché, bien fait ! Mais pour les pro- sans expérience, ne dépassez pas 25 mg. Il faut
chaines, tous les espoirs sont permis. Dans un endroit frais et ventilé pour le gérer, boire
quinze ans n’en doutez pas, le tabac figurera lentement assez d’eau. Prévoir le coup de mou
au Tableau B toxique. et une petite dose de benzo pour la descente.
u c t i o n de
réd
D
eux interventions faites en dehors de nos frontières « clean », vous êtes enrôlé d’office dans les bataillons de la guerre à
par Matthew Southwell et Anita Krug proposent, à la drogue sous prétexte de vous soustraire à la contagion.
l’inverse, de ne plus exclure jeunes et désintoxiqués Cette manière de cliver le champ de la prévention des
des programmes de réduction des risques car ils sont dépendances n’est pas neutre. Elle cantonne effectivement
souvent le plus en danger. la réduction des risques à la prévention « secondaire », qui
La politique de réduction concerne les personnes en si-
des risques est une peau de tuation de dépendance. Une
chagrin. Un très gros chagrin classification binaire qui ba-
mais un chagrin quand même. laye le fameux arc de progres-
De paradigme dominant il y sion, usage, abus, dépendance.
a vingt ans, nous sommes de- À l’exemple de l’éducation
venus les braves petits soldats sexuelle, la réduction des ris-
de la lutte contre les risques ques devrait pouvoir diffuser
infectieux avant d’être défini- une information globale sur
tivement classés spécialistes en les drogues qui n’inclut pas
galères toutes catégories, cham- uniquement des critères de
pions de la prise en charge de dangerosité, mais aussi l’usage
ceux que l’on ne doit pas voir raisonné, voire raisonnable. Il
traîner dans les rues. Dans une est même paradoxal de consta-
compréhension classique de ter que les jeunes – par défini-
« la drogue », les non-con- tion potentiels consommateurs
sommateurs, et tout particuliè- inexpérimentés – sont, comme
rement les « jeunes », ne sont le précise Anita Krug, structu-
théoriquement pas concernés rellement exclus de tout mes-
par ce champ de compétence. sage de réduction des risques.
Sur le papier, les actions de pré- Quant aux « Rehab » sortis de
vention en direction des « jeu- cure ou de prison, c’est presque
nes » appartiennent au domaine la prévention « primaire » qui plus tragique : ils sont les principales victimes des overdoses
consiste à éloigner les consommateurs potentiels de tout passage et leur environnement idéologique interdit toute action de
à l’acte. D’où la floraison de messages alarmistes sur les dangers sensibilisation sortant du sacro-saint « Just Say No ».
du cannabis et cent autres pièges tendus par le démon de la dé- Confrontés à ces impasses, Matt Southwell et Anita Krug
pendance. proposent chacun dans leur genre de nouveaux horizons à la
.
À l’autre bout du spectre, les « Rehab », candidats à la désin- réduction des risques. Deux interventions qui tentent de ral-
toxication sous diverses modalités, sont également tenus à l’écart du lier à nos objectifs de lutte contre la stigmatisation les deux
monde de la réduction des risques, toujours à cause du mode suppo- populations habituellement instrumentalisées au profit de la
sé épidémique de la consommation de drogues. En clair, si vous êtes guerre à la drogue : les jeunes et les ex. Fabrice Olivet
av ec de Youth ( je u n e s) q u
. Sous prét de discou
association
st une à la drogue
guerre nt abreuvés
iqueme irs sur le s
Youth Rise e muns véhiculés par la adultes sont systémat transmission des savo
m s
les lieux co s mineurs et les jeune par les « pairs » dans la noré par les
le ig
jeunesse », s ». Le rôle crucial joué tion est étrangement s plus
e a
« antidrog s modes de consomm paradoxale, ce sont le litique
u
le re o
produits et prévention. De maniè ivement exclus de la p Krug,
la c t it a
tenants de ui se retrouvent obje la q u e s t io n avec An
q e
vulnérables de risques. Petit tour d ment iconoclaste.
n v e
de réductio onnalités de ce mou
rs
l’une des pe
«
L
e seul message adressé aux jeunes qui consomment des dro- Asud Pourquoi établir une différence basée sur l’âge en ma-
gues est le « Just Say No », articulé avec un discours de tière de discrimination ? Tous les usagers ne sont-ils pas victi-
prévention inopérant au regard des millions de jeunes dans mes de la guerre à la drogue ?
le monde qui consomment des drogues. » : Anita pose crû- A K Les jeunes usagers sont exclus des programmes de réduc-
ment les termes du sujet. Partout, la question des « jeu- tion des risques pour de multiples raisons. Pour prendre un
nes » et celle de « la drogue » relèvent du registre émotionnel exemple tragique, 45% des nouvelles infections VIH parmi
et moralisateur, une barrière psychologique qui place les adoles- les 15-24 ans sont dues au partage de seringues. Entre 72 et
cents et les jeunes adultes en dehors de l’approche pragmatique 96% des injecteurs de drogues déclarent avoir commencé
défendue par la réduction des risques. Sur le terrain sensible des avant l’âge de 25 ans. Or dans la plupart des pays (et notam-
addictions, certains mots déclenchent un réflexe conditionné : ment en France), il existe des normes légales qui interdisent
les jeunes doivent être protégés par tous les moyens, y compris de fournir du matériel stérile aux plus jeunes. Tout cela est
la désinformation et les postures ridicules, autant de pierres je- sous-tendu par l’idée qu’il faut protéger « l’innocence » d’une
tées dans le jardin des « jeunes » qui dénient toute crédibilité jeunesse prétendument menacée par les actions de réduction
aux adultes. C’est sur ce constat qu’a été fondée Youth Rise, en des risques. Il est donc déplorable que ces programmes soient
2006 à Vancouver, lors de la 17e Conférence internationale de exclusivement destinés aux adultes et pas aux usagers poten-
réduction des risques. « L’absence de voix jeunes chez les acteurs tiellement les plus en danger
des politiques de drogues » est le leitmotiv de cette organisation
aujourd’hui devenue incontournable sur la scène internationale Asud YR se définit-elle comme un groupe d’autosupport
de la réduction des risques. d’usagers de drogues ?
A K Nous ne posons pas le problème en ces termes. Nous nous
Asud Anita, pourquoi et comment as-tu intégré Youth Rise ? définissons comme acteurs de la RdR (Harm Reductionist) tout
A K Mon implication dans le projet est liée à mon histoire per- en encourageant les jeunes consommateurs à rejoindre notre com-
sonnelle. J’ai consommé des drogues dures dès l’adolescence en munauté. Notre but est de permettre aux jeunes consommateurs
Australie, ensuite j’ai voyagé et constaté que les jeunes usagers de s’exprimer en tant que personnes concernées, tout en nous re-
étaient plus fréquemment confrontés à de graves dénis de jus- fusant à les enfermer dans une identité d’« usagers de drogues »
.
tice, et cela partout dans le monde. Je suis fermement convain- qui convient généralement à une population plus âgée. L’usage
cue que YR peut être l’outil qui permettra un jour aux jeunes des drogues à l’adolescence est souvent plus expérimental, récréa-
consommateurs d’être enfin reconnus comme des acteurs légiti- tif, fluide, il est important que nous reconnaissions cette pluralité
mes de la politique de drogues. d’approches chez nos adhérents. Recueilli par Fabrice Olivet
u nis
- Ma n c h e : t o u s
a d r o gue
Outrre l a guerre à
e l l’abstinence ou de façon moins condes-
L
cative des personnes consommatrices de Le travail de rue consiste désormais à
es groupes d’autosupport da- drogues s’est aussi affaibli. En Écosse, convaincre ceux qui sont encore dans le
tent de la fin des années 70, foyer de l’école de pensée puritaine, les déni, et les services de soins pour toxi-
avec la création du réseau de choses sont encore pires sous l’influence comanes semblent rejouer une version
traitement de substitution mé- du gouvernement écossais. Après avoir de la réhabilitation tout droit venue de
thadone (NAMA) aux États- été un modèle de participation colla- la révolution culturelle chinoise. Mem-
Unis et celle du Junkie Bund à Rotter- borative, l’engagement de ces patients bres d’Inpud2, nous voyons les terribles
dam et Amsterdam. Le mouvement dans les services de soins est au plus bas, abus commis contre les usagers de dro-
d’origine en Angleterre, représenté par sauf à vouloir jouer le rôle du drogué re- gues au nom du traitement de la toxi-
des groupes comme Respect et Chemi- connaissant. Conséquences : une réelle comanie, ce qui nous fait apprécier le
cal Reaction (CR), retrace son histoire méfiance et dans de nombreux cas, un fameux système anglais malgré toutes
jusqu’aux racines hollandaises (…). désengagement vis-à-vis du système de ses limites. Nous avons le devoir de dé-
Pour comprendre les préoccupa- soins. fendre ce modèle pour nos pairs britan-
tions des usagers de drogues, il est im- niques et pour les activistes usagers de
portant de les placer dans le contexte Un rapprochement drogues du monde entier, qui le voient
de notre histoire. Dans les années 90, stratégique comme porteur d’espoir et de pratiques
lorsque Respect et CR ont été créés, Respect et CR voient maintenant le basées sur des preuves empiriques.
les usagers militants étaient déjà par- système de soins comme un environne- Au Royaume-Uni, les usagers de
tie prenante des actions contre le ment largement hostile, qui nous fait drogues militants de la réduction des
sida dans nos communautés. Les usa- perdre notre temps dans des réunions risques et le mouvement « Rehab » ont
gers activistes étaient impliqués dans politiques prêtant peu attention à la entamé un rapprochement stratégique
l’éducation des pairs, le travail de rue science, et qui résiste activement à notre autour de quelques valeurs communes.
et la mise en place de programmes engagement. Plusieurs de nos activistes La guerre livrée aux drogués est un fléau
d’échange de seringues, même si ceux- choisissent ainsi de s’éloigner des ser- qui pèse sur tous les individus ayant fait
ci ont dû commencer dans l’illégalité, vices spécialisés et de s’investir dans le l’expérience de l’usage. Quel que soit le
comme à Édimbourg. Ces groupes de soutien des pairs, dans leurs problèmes niveau de leur consommation, tous les
terrain avaient noué un dialogue avec juridiques, leur besoin de conseils de ré- drogués du monde connaissent le poids
le secteur thérapeutique spécialisé et duction de risques ou de coaching pour de la stigmatisation et de l’exclusion.
occasionnellement, certains usagers contrôler leur consommation, ou face Que les choses soient claires, nous ne
ont même obtenu des emplois au sein aux pressions du gouvernement(…). tenons pas le mouvement de « l’absti-
des ces services, en dépit des deux an- Les usagers de drogues militants qui nence » pour responsable du contexte
nées d’abstinence requises. sont restés représentants actifs dans le actuel.
Des services efficaces ont vu le jour système de soins doivent cacher leur
grâce aux financements pour le VIH et consommation et laisser les gens croire Nous mobiliser
contre l’abus de drogues. Cependant, qu’eux aussi sont, comme les autres, « en pour résister
lorsque la crise s’est résorbée, l’intérêt rémission ». Les pairs qui y travaillent Le nouvel agenda puritain instauré par
pour une implication active et signifi- sont devenus des « champions » de le New Labour a été un cauchemar pour
.
leurs vies et de les aider par quelque moyen que ce soit à réussir
dans ce qu’ils souhaitent changer, dans la mesure où les options
sont validées par la science et qu’elles respectent les droits de
l’homme… Matt Southwell, traduit par Monique Whalen
o u r a n t s
n e m e n t s c
ue des évèsa fierté tout de même ! Mais nous ne sommes que seconds en
Chroniq
L
matière de tabac et d’alcool (Le Monde du 01/06/12). On peut
pas être premier partout.
’Afssaps est morte, vive l’Ansm (Agence nationale de sé- En attendant, l’OFDT continue, avec courage, à travailler et
curité du médicament ! L’Agence française de sécurité vient de sortir dans sa collection « Données essentielles », un
sanitaire des produits de santé avait beaucoup perdu de gros ouvrage sur la cocaïne. Qu’on se le dise ! Et qu’on le lise !
sa crédibilité après la très lourde affaire du Mediator®
et la révélation de quelques conflits d’intérêts assez Ben Laden, Internet...
moches. Était-ce encore l’Afssaps ou déjà l’Ansm ? En tout cas, Après Whitney Houston, voilà que disparaît à son tour Donna
elle a radicalement changé de position sur le baclofène et c’est Summer (Love to Love You Baby). Mais ma parole, c’est un com-
une bonne chose. Elle dissuadait les médecins de prescrire, elle plot ! Concernant Whitney, j’ai appris avec un certain trouble
reconnaît aujourd’hui que le baclofène est une avancée majeure que j’avais un point commun avec Oussama Ben Laden : il en
en alcoologie. était raide dingue, lui aussi, au point d’avoir voulu l’enlever des
En « cannabinologie », les progrès sont, hélas, nettement griffes de son « bad boy ». Certains ne me croiront pas, tant pis
plus lents. J’en profite donc pour lancer un appel à la toute nou- pour eux ! J’ai moi aussi eu un peu de mal à imaginer Ben Laden
velle Ansm : qu’elle organise une réunion pour tirer un bilan de en train de regarder Bodyguard pour la énième fois en se pâmant,
la navrante ATU (Autorisation temporaire d’utilisation) nomi- mais c’est ainsi.
native permettant à quelques dizaines de personnes seulement Trêve de badineries, je dois évoquer quelques problèmes de
d’avoir accès au seul Marinol® (THC). Une ATU de cohorte et mon dur métier de docteur. J’ai vu récemment en consultation
l’accès au Sativex® (un spray contenant du THC et du CBD) une jeune femme assez fragile que je connais depuis longtemps.
seraient un premier pas. Une fois entrée dans mon box, elle a fondu en larmes. Toujours
fin psychologue, j’ai voulu savoir pourquoi. Elle m’a raconté com-
L’actu hexagonale ment un ami lui avait donné l’adresse d’un site de vente en ligne
On notera que le cannabis a fait sa première victime politique : sur lequel elle a acheté très probablement une cathinone (chef de
le maire de Dijon et éléphant du PS, François Rebsamen. Alors file : méphédrone). Elle était en descente de ce stimulant dont elle
qu’il se tirait la bourre avec Manuel Valls pour la place Beauvau, il avait usé et abusé depuis quelques mois mais dont elle me parlait
a indiqué, entre les deux tours, que l’on devrait cesser de pénaliser pour la première fois. Acheter des drogues sur Internet est une sor-
l’usage du cannabis pour le « contraventionnaliser ». Sèchement te d’enfer car une fois qu’on sait comment se procurer le produit,
recadré par le patron, qui rappela la nécessité de l’interdit, le beau comment l’oublier, comment résister à la tentation ?
François a ainsi perdu toute chance d’accéder à l’Intérieur. À quoi Disponibles à la vente sur Internet, les « designer drugs »,
tient un maroquin ! « research chemicals » ou « legal highs » possèdent des structures
Ne quittons pas tout à fait la politique. Un bruit a couru selon moléculaires proches des substances interdites dont elles imitent
lequel Frédéric Péchenard, directeur de la Police nationale et ami les effets (ecstasy, amphétamine, cocaïne ou cannabis). Elles sont
d’enfance de Nicolas Sarkozy serait muté à la… Mildt ! Dommage, pour la plupart non inscrites sur la liste des substances stupéfiantes.
ça aurait eu beaucoup de gueule ! Mais ce ne sera pas ce coup-là. Une étude sur l’offre de drogues de synthèse sur Internet réalisée
Il a été nommé à la Délégation interministérielle … à la sécurité en novembre 2011 recensait 63 nouvelles substances disponibles,
routière. Il y a du contrôle anticannabis dans l’air… sur environ 32 sites francophones de vente en ligne. À cette même
D’autant que la dernière enquête Espad remet la France lar- date, 43 nouvelles substances étaient identifiées comme ayant ef-
gement en tête pour la conso de cannabis chez les jeunes. On a fectivement circulé au moins une fois sur le territoire français 1.
.
gagée. Je connais mal la question des drogues sur Internet mais je de drogues sans activité sexuelle, pas d’activité sexuelle sans
pense qu’Asud-Journal devrait y consacrer un dossier (toutes mes drogues. Il s’agit souvent d’une sexualité de groupe. Et puis,
excuses si ça a déjà été fait…). ce patient, je ne l’ai plus vu. J’espère que cela veut dire qu’il va
bien, sans en être vraiment convaincu. Bertrand Lebeau
La menace slam
Le 31 mars dernier, Didier Lestrade, co-fondateur d’Act Up, 1. Drogues, chiffres clés, 4e édition, OFDT, 2012. C’est la première fois
publiait dans la revue Minorités une interview de Philippe que Drogues, chiffres clés consacre un paragraphe à cette question.
Batel, alcoologue et addictologue bien connu, sur la pratique 2. « Alerte sur la pratique du slam chez les gays », Minorités, 31/03/12.
du « slam » chez les gays2. Ce faisant, ils ont brisé un tabou. 3. Préface à Homosexualité masculine et usage de substances psy-
D’une manière générale, il existe très peu d’études sur les choactives en contextes festifs gais, enquête ethnographique à Paris
consommations de drogues chez les gays. La raison en est et Toulouse en 2007-2008, Sandrine Fournier et Serge Escots, OFDT,
simple : « pédé » et « drogué », ça fait beaucoup. Et l’in- septembre 2010.
quiétude concernant cette double stigmatisation explique
largement pourquoi cette question est restée si longtemps
discrète sinon secrète. D’autant que certaines pratiques hard
ou SM se terminent parfois très mal et ne peuvent d’ailleurs
s’expliquer que si l’on est sous l’influence de stimulants et
d’anesthésiants puissants.
Mais il arrive un moment où il faut tirer la sonnette
d’alarme. On connaissait les risques sexuels pris par des
consommateurs recherchant, je cite Serge Hefez, « perfor-
mance avec la cocaïne, désinhibition avec l’alcool, sensualité
avec l’ecstasy, orgasme avec les poppers ou le GHB, érection,
dilatation anale… »3. L’apparition du slam, c’est-à-dire de
l’injection, dans ce milieu accentue les inquiétudes en ter-
mes de santé publique.
On notera que, tout comme le crack devenu « base » ou
« free base » dans le milieu des teufeurs, le fix, shoot, teushoo,
taquet, trou, etc. est devenu « slam ». Mais il s’agit bien de la
bonne vieille injection avec les risques connus de transmission
du VIH, du VHC, du VHB et de complications infectieuses :
abcès, endocardite, septicémie…
Mais si l’on s’intéresse désormais à l’usage de drogues chez
les gays, c’est aussi parce que le milieu festif homosexuel est
- d e h o rs
n g l à
eL’autrel faraud, un maghrébin rendent
ju
’ a
mon passeport. Juste avant de
C s t l
L
e les croise.
court sur pattes, la trentaine bombant le
me foutre la paix, son gardien, rouleur de
mécaniques, ne manque pas de me van-
e Marais en fête, un dimanche de mai torse me fait de suite l’effet du coq cher- ter les vertus du sport, sa silhouette étant
ensoleillé. Ça flanelle, se gondole, mais chant à impressionner sa basse-cour. Faut censée en attester. Et puis, histoire d’avoir
rien n’assèche la fange. On s’enfonce dire que les escort girls ne sont pas en res- le dernier mot, il me souhaite, goguenard
dans ce quartier comme dans un ma- te côté vacheries. Odieuses ! Bon, je pas- et avec un soupçon de mépris, « Bonne
récage. Sables peu émouvants. J’en ai se, j’abrège les vexations ordinaires, sues journée et bon Subutex® ! » Aussi risible et
jusqu’aux genoux, paludier absurde paumé et connues, le ton qui monte, la fouille au puéril qu’haïssable, selon l’humeur.
dans la mangrove parigote. Je me demande corps... Et puis, bingo ! Dans mon sac, la Une interpellation en appelant une
ce que je fous là, au milieu des bobos frin- pièce à conviction, une tablette de Subu- autre, une plus ancienne me revient à
gants, couples pacsés, homos branchés, peti- tex®. Il pavoise, le blaireau : « J’espère que l’esprit – j’en ai pléthore. Il me souvient,
tes friquées qui s’allèchent vitrines et autres tu as une ordonnance ! » (ah le soudain il me rappelle, il y a un an et demi, avec un
vélibérés accros au klaxon juchés comme de tutoiement) ! Abracadabra, Houdini ami, sur le faubourg Saint-Antoine... À
petits empereurs verts sur leurs deux roues. c’est moi, je la fais apparaître (en vérité, l’époque, la chasse aux bobos toxicos était
Tout ce petit monde patauge ici avec bon- j’avais vu mon toubib la veille). ouverte du côté de Bastoche (la consigne
heur. à 16 heures tapantes, les adeptes du « Ça doit pas être facile la vie pour venait dit-on d’en haut, trop de complai-
roller convergent jusqu’à la rue du Renard. les gens comme vous », me fait le coque- sance). Deux condés en civils nous alpa-
Ils viennent gentiment se placer sous l’égide let feignant d’examiner mon ordo. Et guent et droit au but cherchent la came.
de la police pour prendre le départ de leur de m’expliquer qu’il a grandi dans une Le premier, raide dans ses pompes, me la
balade dominicale. Ça me viendrait pas à cité, histoire de me prouver comme il est joue à l’ancienne. J’aime autant, chacun
l’idée, comme disait Johnny... J’aurais trop crédible sur le sujet. Les dealers et tout à sa place. Son collègue en revanche pro-
peur que les flics me tombent dessus. J’exa- le toutim, ça l’connaît à l’entendre. Au cède à la palpation en discutant le coup
gère ? Parano mythomaniaque sur les bords ? point d’avoir opté pour la garantie de avec mon pote : « Alors, t’as décroché ?
Que nenni ! Je veux bien admettre une ins- l’emploi et la retraite anticipée !? Tu prends plus de dope ? » Évidemment
tinctive réticence. Je peux même concéder « Et alors, je demande, ce contrôle c’est non, super clean et même parfait rédimé.
avoir conservé à leur endroit une certaine quoi, un délit de faciès, visage pâle ? » Li- Bref, un junky comme il faut : marrant au
déméfiance, pas absolument injustifiée. mite, mais c’était le but. Ils me fatiguent passage de constater l’espèce de vénéra-
Y a pas deux mois, avenue d’Italie, un peu ces nouveaux keufs recrutés en tion, notamment des médias, à l’endroit
métro Tolbiac, en milieu d’après-midi, banlieue jouant les affranchis au prétexte des EX, ex-camés, ex-alcoolos... Une
25°C, le pas léger, cœur svelte, humeur qu’ils viennent des cités, qu’ils ont frayé bonne confession et c’est l’absolution
primesautière m’en allant récupérer mon avec la racaille, convaincus qu’ils savent cathodique. Mais gare à la rechute parce
fils à l’école primaire – je vous situe du tout de la marge, des interzones. Et j’en que là, c’est sans pitié, black listé à mort !
mieux possible. À peine si je remarque, ai autant au service de leurs collègues Fin de parenthèse...
remontant le trottoir, les deux fliquettes blancs-becs courageux comme pas cinq Mon pote, du coup, lui retourne la
et leur collègue mâle en chemisette, se qui se mettent à autant sur la peau (!) question au poulet et sa réponse me si-
pavanant au centre. Qu’a-t-il bien pu leur d’un jeune Black en vélo et le font chier dère : « Oh ! Un peu de coke de temps en
passer par l’esprit, j’en sais foutre rien, avec leur contrôle pendant trois quarts temps mais mon kif c’est plutôt le chichon,
mais ils m’interpellent au moment où je d’heure ! Finalement, les poulettes me ça me détend ! » Tout est dit ! La fouille
.
de gueule que les Faudel, Mireille Mathieu, Enrico Macias d’il y sûr ! C’est ça La Société du spectacle !
a cinq ans. Procrastinateur forcené, j’y étais pas. Pour tout vous Ma seule – maigre – consolante, parfaitement fortuite : la
dire, deux heures après l’annonce du résultat des élections, un remise en liberté conditionnelle de Rouillan. Pas de fumée sans
incendie ravageait la pizzeria en bas de chez moi. Pas moins de 7 feu, la maison qui brûle... Marc Dufaud
camions de pompiers, des fumées toxiques dans l’appartement,
e t d é s i nto
o nges
D o g u e s, me n s avait encore chacun notre appart et on
M
r plus ravivée,
partais
à peine
direction
sortie de
Rotterdam...
l’hosto,
Bref
je
depuis
décrochait chacun de notre côté. Sauf
que lui a eu plus de mal que moi : quand
erde, j’étais pas préparée à ça ! Enfin, ça, je n’avais plus jamais essayé de tout ar- j’étais à 0, lui était encore à 10 mg de mé-
heureusement qu’un vieux tox endurci rêter. Quinze ans plus tard... me revoilà à tha + 100 à 150 mg de Skénan® en rail
par une centaine de sevrages m’avait retenter une décroche... (ahem...).
prévenu qu’avec la métha, ça pouvait Pour avoir droit au traitement in- Un jour, alors que j’étais particulière-
durer longtemps, sinon ça aurait été terféron/ribavirine, quatre ans après ma ment mal au bout de ces trois semaines
encore pire à vivre. malheureuse première expérience, j’avais sans rien, il débarque chez moi en me di-
Lors de ma dernière décroche (il y a été obligée de commencer la méthadone : sant : « Si je te proposais une boulette, tu
heu... une quinzaine d’années), le côté échec. Pourtant, j’ai vraiment essayé, dirais oui ?
physique avait duré genre dix jours maxi ! j’ai vraiment joué le jeu... (je précise, vu – !!! (genre... je vais dire « NON ») .J’ai
Et après, le plus dur avait été le côté qu’avec les toubibs, j’ai toujours cette évidemment dis « OUI... je dirais oui. »
« psy »… À l’époque, j’avais tenu deux impression que si les traitements ne mar- « Ben en fait, j’ai retrouvé une bou-
mois. J’avais replongé après avoir appris chent pas, c’est parce que j’y mets de la lette au fond d’un tiroir »...
que j’avais une hépatite C. D’autant que mauvaise volonté). Il y a eu une période où j’ai essayé de
l’enfoiré d’hépato qui m’avait annoncé la Y’a des tox qui tentent une décroche limiter les dégâts, où j’ai repris du tra-
nouvelle m’avait en gros laissé entendre très régulièrement, moi non. Pendant des madol, re-décroché presque totalement.
que je n’avais qu’à attendre gentiment la années, ma dépendance était un fait ac- Mais à chaque fois, y’a eu le retour de la
cirrhose, que j’avais le mauvais génotype quis, sans aucune velléité d’arrêt. Le fait de boulette maudite... J’avais mis 3 000 € de
(Eh oui, c’est con hein, malgré le fait que vouloir arrêter était donc en lui-même un côté pour refaire la SdB de ma nouvelle
je sois une tox, j’ai le génotype 1, habituel- « évènement », ce n’était pas une décision maison. Grillés, partis en fumée...
lement celui des transfusés, qui réagit le prise à la légère. En gros, dans ma tête, si Donc voilà, on est six mois plus tard,
moins bien à l’interféron, y’avait pas en- j’arrêtais, ce n’était pas pour retomber. Si je viens de prendre un arrêt de cinq se-
core la ribavirine à l’époque). je réussissais à arrêter, c’était sûr, je n’allais maines pour re-décrocher. Pour que dal-
Il (le Dr Foutrac, j’oublierai jamais pas retomber, sinon ce n’était même pas la le, j’y arrive plus, je sais ce qui m’attend
son nom, moyen mnémotechnique : peine d’essayer. Pauvre naïveté... ce coup-ci en plus.
« FoutrAC » comme « j’en ai rien à J’arrivais à résister aux tentations en Je vais reprendre le taf, va falloir « te-
foutre des tox ») m’avait fait faire une bas de chez moi... Ça dealait en bas de nir » tant bien que mal jusqu‘à mes trois
ponction du foie sous anesthésie locale : mon immeuble et même sur mon palier, semaines de congés où je vais retenter,
« Heu docteur, je crois pas que la piqûre y’a eu des nuits en manque super diffici- mais en ayant envoyé mon haltère-égo-
anesthésiante aie fait effet, je sens encore les, à penser aux boulettes de came qui se ïste loin très loin.
l’aiguille contre ma peau, c’est normal ? trouvaient peut-être à trois mètres de moi, Seule, j’aurai bien plus de chances
Non, tirez pas, attend... » SCHPEUH, à vol de tox... d’y arriver… Je n’ai pas su me « proté-
gros coup de pistolet injecteur, genre Je ne pensais pas que le danger vien- ger », j’ai failli décider de rompre mais…
.
pistolet à bestiau, ARGH, douleur fulgu- drait de celui qui, justement, aurait dû être Maintenant, je n’ai plus qu’à assumer...
rante et persistante, du coup... bah on m’a le premier à me soutenir : X, mon boy- Lendemains qui déchantent… Soupir...
donné du Temgésic® injectable. « Miam, friend (mais si, dans le merveilleux monde Décrocher en couple ? Y’a de quoi écrire
je peux en ravoir ? » Appétence encore de Candy, ça se passe comme ça...). On un article, c’est sûr. Sélène
J
e suis vénère. J’étais dans un centre Csst (maintenant C’est le sport, ma passion pour l’escalade, qui m’a décidé à
Csapa) et la psychiatre qui me suivait ne voulait pas que vouloir arrêter les opiacés et j’y suis arrivé. Je vais de mieux en
j’arrête la méthadone. J’étais a 120 mg, elle m’a dit : mieux chaque jour, je fais des progrès en escalade et j’ai totale-
« Vous prendrez votre traitement à vie ! » J’étais hors ment arrêté de boire, de fumer (cannabis et cigarettes), je m’en
de moi qu’elle ne veuille pas m’aider et qu’elle me dise : rends compte surtout en montagne. Les émotions reviennent
« Vos endorphines naturelles ne reviendront jamais » !!! doucement à la « normale », j’avais une insensibilité à la douleur
J’ai donc été voir un médecin qui ne savait pas qu’il n’avait et maintenant, je ressens à nouveau les douleurs physiques. La joie
pas le droit de me prescrire la métha et qui m’a baissé de 5 en 5 mg revient également doucement, il m’arrive d’avoir des fous rires, ce
à ma demande. Mais il ne m’a rien prescrit pour m’aider, pas même qui ne m’arrivait plus. Même si la sensation est longue à revenir,
des benzos, donc la seule solution que j’ai trouvée, c’est de picoler c’est à nouveau présent.
pour atténuer la douleur. J’ai arrêté en huit mois mais c’était très Trente ans d’opiacés et toujours vivant. J’ai pas le VIH mais
dur ! La métha est une vraie saloperie, surtout la fin. Par deux fois, j’ai une hépatite C que j’ai soignée à l’interféron pendant un an
j’ai été si mal que j’en ai repris (5 mg), ce qui m’a rendu malade. et demi, je ne bois plus, ne fume plus et ne prends pas d’autres
J’avais un stock de 500 mg dont je me suis débarrassé avec diffi- produits à part deux benzos que je n’ai pas l’intention d’arrêter.
culté. Je voulais en garder pour me suicider, au cas où... La psychia- Maintenant, je suis avec une femme qui ne prend rien mais qui
tre qui m’a dit que jamais je n’arrêterais la métha m’a également comprend par où je suis passé. (…)
diagnostiqué bipolaire. Je ne comprends pas ces médecins qui vous Je souhaite bon courage à tous ceux qui veulent arrêter et en-
prescrivent des médicaments en vous trouvant une maladie et fina- courage même les autres à stopper tout ça. Mais il faut savoir à
lement, qui n’y comprennent rien. Je suis quelqu’un de mélanco- quoi vous allez être confronté, l’incompréhension, le rejet, sans
lique c’est vrai, de par ma vie, mes antécédents familiaux, mais je parler de la douleur. Mais c’est possible, plus ou moins longue-
n’ai pas de phase maniaque, c’est héréditaire et je fais avec (...). ment, mais c’est possible. Le positif aujourd’hui, c’est : plus be-
J’ai beaucoup souffert et je souffre encore, pourtant, ça fait soin d’aller toutes les deux semaines prendre ma métha, je me
.
huit mois que j’ai complètement arrêté (…). Je fais de l’escalade sens bien, même mieux, libre de toute contrainte, je peux aller où
et de l’alpinisme, plus de la batterie depuis l’âge de 12 ans et j’en je veux quand je le veux sans être malade, ma libido est revenue.
ai 46 aujourd’hui. Les endorphines naturelles finalement, elles re- N’hésitez pas à me contacter si vous avez des questions ou
viennent. C’est pour ça que je parle d’escalade, le sport et le sexe tout simplement envie de partager ce que vous vivez. Gilles
sont les meilleurs médicaments et je vous les conseille vivement. Choderlos de Laclos (gchoderlos_de_laclos@bbox.fr)
S
alut à toute la rédaction d’Asud, j’hésite à faire un sevrage de Skénan®. J’espère un jour me dé-
Merci pour votre journal qui paraît régulièrement. barrasser du geste de l’injection, juste m’entretenir à la métha
J’aime bien vos articles de fond et vos illustrations sont et un peu de fumette.
sympas avec Bloodi et les dessins de Pierre Ouin. Continuez à promouvoir la RdR, l’accès aux soins et le
.
J’ai 38 ans et baigne dans différentes drogues de- dialogue entre usagers et professionnels, et la légalisation du
puis plus de vingt ans. Actuellement, j’ai réussi à me stabiliser cannabis. J’attends votre prochain numéro avec impatience
avec de la méthadone, enfin à peu près car je shoote du Skénan® et encore merci pour le soutien que vous apportez aux usagers
suite à une hernie discale qui s’est terminée en sciatique. Alors (injecteurs surtout). Luigi
®:
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Depuis le 17 titu tio n a u médecin
t de subs ité, si votre
médicamen s d éjà tra si
m arc h é. Si vous ête tex ® a u Su boxone®, ou
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P .org
a r m a il : co ntact@asud
P
Asud-Journal 50 juillet 2012 43
notre culture (séries)
Encore qualifiée aujourd’hui
de meilleure série au monde
par un buzz qui n’en finit
plus,The Wire autopsie la
ville américaine de Baltimore
pour dépeindre la réalité
de la « guerre à la drogue »,
autrement dit, son échec.
Rayonnant bien au-delà des
écrans, chercheurs et élus
s’en emparent pour repenser,
voire bousculer, la politique
des drogues.
C
sociaux impuissants. Bref, une civilisation la fraîche va arriver ?
’est l’histoire d’une grande ville perdue si elle ne change pas son logiciel – Y’a pas de fraîche, mec. Ce sera la
ordinaire insidieusement façon- en profondeur. CQFD. Et rien de mieux même qu’on vendra dans des capsules
née par le trafic de drogues. Les pour l’illustrer que l’aberration que repré- différentes. C’est tout. On la coupera
auteurs sont un ancien journaliste sentent nos choix de société en matière de avec un anesthésiant et de la caféine.
et un ancien policier, ayant tous politique de drogues.
Et tu sais pourquoi ? Avec les junkies,
deux fait leur carrière à Baltimore. Cha-
si t’as de la pure, t’en vends. Si tu la
que saison agit comme un microscope Un usager
détaillant certains aspects : l’organisa- coupes, t’en vends deux fois plus. »
nommé victime (les dealers)
tion du deal de rue et l’investigation poli-
cière (saison 1), les filières d’importation Pour Asud, dont le rôle est de porter et
et la classe ouvrière en crise (saison 2), défendre la parole des usagers de dro- côté de l’élément essentiel qui explique
la guerre des gangs et l’innovation sociale gues, ce qui est frappant dans The Wire, l’ampleur prise par ce business : la nature
(saison 3), le système scolaire et la politi- c’est que la critique de la prohibition de la drogue elle-même, le plaisir qu’elle
que locale (saison 4), le rôle des médias des drogues ne se fait à aucun moment procure, les dangers auxquels elle expose,
et la bureaucratie policière (saison 5). à travers le regard des usagers. Les grands les moments qu’elle permet de vivre, la
Attention, il faut toutefois être honnête : absents de la série. Pire, Bubbles, le per- place qu’elle occupe chez les consomma-
The Wire, c’est plutôt un bon buvard qui sonnage censé les représenter, corres- teurs, leurs rituels et leurs motivations,
mettrait longtemps à monter qu’un flash pond aux pires clichés du toxicomane : l’intarissable appétit humain pour ce
de coke rapide à obtenir. Nombreux sont héroïnomane injecteur, SDF pouilleux, genre de substances... Comme si, noyée
ceux – et on les comprend – qui ont dé- menteur et voleur, toujours prêt à jouer dans la lutte des classes, la Drug Culture
croché à la saison 2, pensant s’être fait les balances pour un billet de 10 $. Victi- n’existait pas.
carotter. En réunissant avec cohérence me permanente des dealers qui le mépri-
et virtuosité les précédentes, la dernière sent, des flics qui l’utilisent et des non-
saison donne pourtant une vision d’en- usagers qui le fuient, ses compagnons Hamsterdam
semble réaliste. On croirait les 60 épiso- de galère finissent tous par mourir (OD,
des écrits d’une traite (ce qui n’est pas le balles perdues, sida...). Son seul salut est Le père de la série, David Simon, dit
cas !). La série fonctionne au final comme d’arriver à décrocher, peut-être l’unique écrire des fictions à défaut de pouvoir
une démonstration : l’ascenseur social en reproche qu’il convient de faire à la série. changer le monde. Pragmatique, il met en
panne, une économie illégale à l’influen- Les auteurs ont excellé à monter la com- scène deux tentatives de transformation
ce grandissante, des services publics lais- plexité de la nature humaine des person- sociale se heurtant au mur de l’idéologie
sés à l’abandon, un establishment nom- nages, tiraillés entre ambition, honneur, réactionnaire. Un chercheur expérimente
briliste et avide, une population clivée cupidité et intégrité. Ils ont dressé avec dans un collège un programme éducatif
retranchée dans brio une ethnographie du trafic et du cir- consistant à extraire les élèves perturba-
« Ce n’est pas une ses valeurs mora- cuit de l’argent. Mais l’usage de drogues teurs pour les regrouper dans une classe
guerre ! Une guerre, ça les communautai- n’est vu que comme un vice ou une ma- réduite avec programme scolaire adapté.
a une fin. » (les flics) res sans vision ni ladie subie par l’individu. Ils sont passés à Les résultats sont là : le niveau scolaire
.
tolérance ne peut, de fix en aiguille, que mener à une forme de
légalisation contrôlée.
Vous savez ce qu’il vous reste à faire pour savoir comment
tout ça se termine... Fabrice Perez
Série de David Simon et Ed Burns, 5 saisons (60 épisodes), 2002-2008.
Disponible en DVD.
1. Basé sur un fait réel , voir p.6
B
sobriété rare. Ici, pas de musique triste
altimore, à l’angle de la rue La lorsqu’un personnage décède, pas de su-
Fayette et de la rue Monroe. Un renchère dans la violence ni d’emphase
coin de rue où le trafic se fait à sur la misère dans laquelle évoluent les
ciel ouvert, 24/24. Un Corner personnages. Tout est fait pour que le
comme il en existe des milliers spectateur se rende compte de la norma-
e of
aux USA : l’endroit où l’on retrouve ses lité de ce qu’il découvre. Cette violence,
rn e r : A Y e ar in the Lif d
compagnons de galère et où l’on discute cette misère, cette malchance, tout cela The Co y
hoo
Neighbour livre ori-
ne r-C it
du dernier arrivage d’héroïne. L’endroit est ordinaire, banal, semblent nous crier
an In duit en fra
nçais, le
yle
où l’on vient demander qui a été tué la les auteurs. Banal mais réel : C. Dutton nt tra oscille entr son
e st
Récemme et Simon
veille, par qui et pourquoi. Un lieu de vie, fait mine de sillonner le quartier, caméra à d e B u rn s C o m m e
ginel ancé.
un lieu de mort. l’épaule, interrogeant travailleurs sociaux, alist iq u e et rom te d ’u n e étude
journ il re n d comp imo -
iq u e , B a lt
« Cette série raconte l’histoire vraie de dealers et consommateurs. L’idée n’est nom l’ind ier de
p h iq u e d’un quart ir privilégié
ceux qui vivent à ce coin de rue, pris dans pas de faire vraiment croire à un docu- ethnogra blent avo
teurs sem tale, mais
le tourbillon des drogues. » Voilà com- mentaire, mais plutôt de rappeler à cha- re. Les au ’i m m ersion to e
une méth
od e d leur étud
ment C. Dutton, le réalisateur, introduit que instant que cette série n’est pas une
é th o d o lo gique de d a n s un
cette minisérie qui propose de suivre en fiction mais une reconstitution. l’aspec t m sement développé
st m a lh e ureu m n e ) apparem-
six épisodes le quotidien d’une famille Le résultat est décapant, beaucoup e -auto
lume (été livre est a
gréable
désunie, avec en toile de fond la vie d’un plus secouant que n’importe quelle autre second vo . S i le
ou v a b le re se ras-
« ghetto » noir américain rongé par la série. Les mécanismes de reproduction ment intr ll e rg iq u es à la lec tu ment
les a x trême
misère et les drogues. Fran, la mère tente sociale sont flagrants et le déterminisme à lire, que ta tio n télé est e
d a p
surent : l’a
de se désintoxiquer, de retrouver un em- qui pèse sur les habitants de ce quartier x te.
ploi et de reprendre en mains l’éducation est évident. Malgré un certain humour, fidèle au te
de ses enfants. Gary, le père qui gagnait le ton est pessimiste. Comme La Haine,
si bien sa vie quelques années auparavant, The Corner est l’histoire d’une chute et
va de plans foireux en procès absurdes l’on redoute l’atterrissage. Pourtant l’es-
et n’essaye même plus d’arrêter la came. poir perce sans cesse, jaillissant des per-
Pendant ce temps, leur fils aîné, De-An- sonnages qui se démènent pour essayer de
dré, dérive entre sa volonté de mener une braver leur destin et qui rayonnent d’hu-
vie normale et son système de valeurs qui manité. Car dans The Corner comme dans
le pousse vers le deal au coin de la rue. la vraie vie il n’y a pas de « méchants ».
Drogue, grossesses précoces, overdo- Les junkies escrocs, les flics violents, les
.
ses et guerre des gangs : le sujet est difficile dealers méprisants, les copines arnaqueu-
mais la série arrive à aborder toutes ces ses, tous sont au fond de braves gens qui
questions sans tomber dans les clichés. jouent malgré eux le rôle que la vie leur a
Grâce au jeu des acteurs, excellents, mais assigné. Vincent Benso
.
la fin définitive de la série. Ayant accès à toute une intéressante Karine invite ses potes fumeurs de chichon à la maison ? Que le
pharmacopée industrielle dans son hôpital, notre bon docteur livreur de beuh des stars fait sa tournée juste avant le week-end ? Le
accro à la Vicodin décide de se suicider d’un bon gros shoot fameux « esprit Canal » serait-il un esprit frappeur ? Voilà, c’est
d’héroïne de rue... tout pour cette fois. Mais d’ici là, ouvrez l’œil. Kritik
Oslo, 31 août
Coup de piston
I
ntervenant remarqué des
derniers évènements asu-
diens, le spécialiste du
crime organisé Fabrice
Rizzoli vient de publier
aux éditions de l’Opportun le
Petit dictionnaire énervé de la
mafia. : Un exemple d’entrée,
« Prohibitionnisme : La mafia
te remercie. Autorisés pendant
des siècles, la consommation et
le commerce des drogues, sous la
pression des États-Unis, sont in-
terdits depuis la conférence de Shanghai en 1912, ce qui génère
une accumulation de capitaux gigantesque pour les mafias. À
l’échelle des États-Unis, la prohibition de l’alcool a créé une mafia :
La Cosa Nostra. »
.
« Fabrice Rizzoli a puissamment contribué à retirer à la ma-
fia ses masques exotiques ; derrière les rituels qui fascinent, il fait
apparaître le cours de l’argent mafieux jusqu’à son recyclage dans
l’économie mondiale et les connivences d’une partie du monde po-
litique. » (Mario Vaudano, magistrat italien) Laurent Appel
C
Chaman Jim entre en transe, élève sa allait suivre, la direction progressiste que
‘est sur le campus de l’UCLA où il suit conscience afin de transmettre son Éner- prenait le rock et ses tentations virtuoses à
des études de cinéma que Jim rencontre gie à ses adeptes ! « Nous sommes des po- venir (les Who de Tommy, Deep Purple et
Ray Manzarek, Robby Krieger et John liticiens érotiques », beugle-t-il, jamais en son philharmonique orchestra...)
Desmore, tous trois issus comme lui de retard d’une sentence définitive bien sen-
la middle class. Ils fondent les Doors, pas tie. Car les Doors théâtralisent de plus en « Rock is Dead »
vraiment A Feast of Friends, mais l’alchimie plus leurs prestations scéniques, cherchent Ayant rompu avec les Doors, seul en stu-
musicale entre eux fonctionnent parfaite- à les transformer en cérémonies mystiques. dio le soir de son anniversaire, Jim Morri-
ment : au jeune héros la lumière, tandis que Hélas, c’est bien cette imagerie empesée, ce son enregistre ses poésies et hurle « Rock
dans l’ombre, les trois autres s’activent à éla- fourre-tout Chaman-loo qu’a retenu Oli- is Dead ». Peut-être pressent-il justement
borer une musique hypnotique propre à ac- ver Stone dans le biopic roboratif qui exalta l’impasse qui se profile en ce début seven-
croître le rayonnement de l’éphèbe solaire. le mythe et relança les ventes d’albums. ties pour une musique sur le point d’en-
En 1967, l’année du Love Summer, la Heureusement, il y a le concert du 1er fler jusqu’à ce qu’une nouvelle génération,
jeunesse se découvre un nouvel amant : Jim mars 1969 à Miami : sur scène, Morrison, punk, ne fasse exploser la bulle dorée.
Morrison. Il a 23 ans, une allure folle de poè- ivre, se met à insulter les flics, les provo- En mars 1971, le roi Lézard fatigué jette
te sexy rock qu’il cultive à souhait, et un ego que avec un sourire sardonique et brandit l’éponge, décrète qu’il en a fini avec le rock.
à faire pâlir Jagger. Bref, tout pour devenir (ou ne brandit pas, telle est la question) sa Il veut écrire. Méconnaissable, il s’exile à Pa-
rock star. Incontrôlable sur scène comme à la queue. Jeté en taule, il en sort rapidement ris, rejoint par sa compagne Pamela Cour-
ville, il multiplie les frasques et les expérien- mais reste interdit de concert dans l’atten- son, junky notoire. La mort déjà ricane. Elle
ces extrêmes sur fond de quête mystique Lu- te du procès... Bref, il redevient un rocker. l’attend tapie au fond d’une boîte de Saint-
ciférico-chamaniKKK. Obsédé par William Au moment même où son image de rock Michel, et lui tombe dessus sans coup férir.
Blake et Huxley, Jim veut « ouvrir les portes star l’encombre, il semble s’affranchir du Heavy Drinker, Morrison n’a pas l’appéten-
de la perception », chimère qui deviendra un carcan spiritualo-mystique balourd, mal ce de sa compagne pour la dope mais ce soir-
véritable serpent de mer s’enroulant autour assimilé et bourré de trous qu’il a entre- là, il déroge et accepte l’héroïne trop pure
de cet arbre un peu creux d’élévation du ni- tenu. En juillet de la même année, il assiste d’un Frenchy des beaux quartiers, l’un de ces
veau de conscience et de perception. L’épo- subjugué au retour sur scène d’un Elvis fils de bonne famille jouant au dealer. Fou-
que s’y prête ! S’il expérimente les drogues Presley sauvage : vêtu d’une combinaison droyé par une surdose, son cœur lâche. On
hallucinogènes, acides et psychotropes en kimono noir, son magnétisme animal irra- le ramène (mort ou encore vivant, le mystère
tous genres, l’héroïne ne le branche pas plus die et le replace sur le trône. C’est cette pu- demeure) dans l’appartement qu’il occupe
que ça. L’alcool est sa drogue dure. reté originelle, l’Énergie rock’n’roll infes- dans le Marais. La mort le fige dans son bain
tée de Rythm and Blues, que Jim Morrison rue Beautreillis, dans une posture de rupture
Le roi Lézard traque sur l’album Morrison Hotel (Peace irréversible avec le rock. C’est bien le propre
Se laissant surnommer le roi Lézard, il en- Frog) ou sur LA Woman. Aux antipodes d’une mort prématurée que de fixer les êtres
.
tretient des rapports ambivalents avec son du piètre Soft Parade, dont il avait laissé dans l’instant où elle les a surpris, ouvrant sur
statut de rock star. Statut qui le gêne aux en- les commandes à Manzarek, lequel s’était toutes les conjectures possibles.
tournures, panoplie étriquée craquant peu à englué dans une préciosité éprouvante. Un Personne ne sortira d’ici vivant, comme le
peu aux coutures comme craquent ses futes naufrage artistique et public cuisant ! Avec chantait… Hank Williams ! Marc Dufaud