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Intérêt de La Torche À Plasma en Biologie Clinique. Quelles Applications en Toxicologie ?

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Intérêt de la torche à plasma en biologie clinique. Quelles applications en toxicologie ?

Inductively coupled plasma and clinical biology. Toxicological applications.

J.-P. Goullé1, L. Mahieu1, G. Lainé1, C. Lacroix1, F. Clarot2, E. Vaz2, B. Proust2

1
Laboratoire de pharmacocinétique et de toxicologie Cliniques, Groupe Hospitalier du Havre,

BP 24, 76083 LE HAVRE CEDEX


2
Institut de Médecine Légale, CHRU de Rouen, 1 rue de Germont, 76031 ROUEN CEDEX

Tirés à part :

J.-P. Goullé, à l’adresse ci-dessus.

E-mail : jgoulle@ch-havre.fr

* Présentation devant l’Académie nationale de pharmacie, séance du 17 mars 2004.

1
Résumé

Les auteurs présentent une technique de dosage multiélémentaire des métaux dans les milieux

biologiques par plasma à couplage inductif relié à un détecteur de masse. Les métaux suivants sont

quantifiés simultanément dans les échantillons biologiques par dilution en milieu acide en présence

de triton : Li, Be, B, Al, Mn, Co, Ni, Cu, Zn, Ga, Ge, As, Se, Rb, Sr, Mo, Pd, Cd, Sn, Sb, Te, Ba,

W, Pt, Hg, Tl, Pb, Bi, U. Le protocole de validation utilisé est celui recommandé par la Société

française de biologie clinique. Pour les urines, les résultats sont rapportés à la créatinine. Quatre

applications de toxicologie clinique et de toxicologie médico-légale sont présentées. L’évolution

rapide et récente de la torche à plasma constitue un apport déterminant en biologique clinique et

plus particulièrement dans le domaine de l’analyse toxicologique en raison de la puissance de

l’outil, offrant des perspectives nouvelles pour une meilleure prise en charge des malades ou des

recherches des causes de la mort.

Mots-clés : Plasma à couplage inductif, détecteur de masse, métaux, métalloïdes.

2
Summary

Multi-elementary quantitation method, using inductively coupled plasma mass spectrometry is

developed in biological fluids. Many elements are simultaneously quantified in biological fluids :

Li, Be, B, Al, Mn, Co, Ni, Cu, Zn, Ga, Ge, As, Se, Rb, Sr, Mo, Pd, Cd, Sn, Sb, Te, Ba, W, Pt, Hg,

Tl, Pb, Bi, U. The validation procedure used is described by the French society of clinical biology.

For urines, the results are corrected after creatinine determination. Four clinical toxicology and

forensic toxicology applications are reported. Inductively coupled plasma mass spectrometry major

advances in the field of clinical biology are very important especially for toxicological analysis as

this powerfull equipment allows better patient or dead people take in care.

Keys-words : Inductively coupled plasma, mass detector, metals, metalloids

3
Introduction

En biologie clinique, la recherche et le dosage des métaux font appel à la spectrophotométrie

d’absorption atomique (SAA) dans ses deux modes : SAA avec flamme et SAA électrothermique.

Si la première peut être facilement mise en œuvre pour traiter de grandes séries, pour l’immense

majorité des métaux, sa sensibilité n’est pas suffisante. Le nombre de métaux que l’on peut doser

par cette méthode est de l’ordre de vingt. Quant à la seconde, si elle dispose d’une sensibilité

supérieure permettant de quantifier environ quarante minéraux, elle est encore insuffisante pour

mesurer certains éléments comme le bore, le brome, l’étain, l’iode ou l’uranium, par exemple. La

SAA est essentiellement conçue et utilisée pour réaliser des dosages monoélémentaires et sa

cadence analytique est peu adaptée aux grandes séries, en particulier dans le mode le plus sensible

de SAA électrothermique qui nécessite souvent l’emploi d’ajouts dosés sur chaque échantillon, ce

qui limite considérablement la cadence analytique. Enfin le dosage dans les milieux biologiques

d’un certain nombre d’éléments réfractaires, les lanthanides ou les actinides, n’est accessible que

par la torche à plasma. L’introduction de la torche à plasma (ICP ou Inductively Coupled Plasma),

les progrès analytiques relativement récents grâce au détecteur de masse (ICP-MS), mais également

les avancées dans le domaine du traitement des signaux et du pilotage des appareils, améliorent

considérablement cette approche et ouvrent des perspectives nouvelles pour l’exploration des

métaux tant en pratique clinique qu’en médecine légale ou que sur l’impact des effets de

l’environnement chez l’homme (1,2). L’apparition récente sur le marché d’ICP-MS compacts dits

de « paillasse » avec des logiciels de pilotage élaborés et conviviaux met à la disposition des

biologistes des appareils d’une nouvelle génération offrant la possibilité de mesurer simultanément

environ 30 éléments à partir d’un échantillon unique (sang, plasma, urines, cheveux), avec une

cadence analytique élevée. Grâce au détecteur de masse, les performances de la torche à plasma

sont du plus haut niveau. Cette technique est caractérisée par d’excellentes précision et exactitude,

4
ainsi qu’une bonne spécificité pour la plupart des éléments. Le niveau moyen de sensibilité est

nettement supérieur à la SAA électrothermique (figure 1). Une des caractéristiques de l’ICP-MS est

de présenter une gamme de linéarité beaucoup plus importante que la majorité des techniques

utilisées en biologie clinique (108 contre 102 à 103). Le principe de la mesure repose sur le fait que

l’échantillon est amené jusqu’à la torche à plasma par une pompe péristaltique puis nébulisé et

atomisé à très haute température dans un plasma. Le plasma est généré par le couplage inductif

d’électrons libres avec des oscillations rapides du champ électromagnétique à la fréquence de 27

Mhz dans l’argon. Ce gaz présente de nombreux avantages : il est relativement inerte chimiquement

et s’obtient facilement avec un haut degré de pureté, limitant de ce fait les contaminations

éventuelles. Au contact de l’argon, l’échantillon est nébulisé puis transporté jusqu’au centre du

plasma où la température est proche de 8000K. Il est alors atomisé puis ionisé sous forme de cations

monovalents. Dans ces conditions, les éléments métalliques, les métalloïdes, les alcalins, les

alcalino-terreux, les lanthanides et les actinides sont ionisés à plus de 90 %. Le carbone, l’azote,

l’oxygène, le soufre, le mercure et les halogènes ne sont que partiellement ionisés. Cette ionisation

partielle est malgré tout suffisante pour quantifier le brome et l’iode dans les milieux biologiques.

Dans l’appareil d’ICP-MS, une interface composée de deux cônes de nickel et d’une série de

lentilles permet de stopper les photons et de focaliser les ions pour les amener au quadripôle où ils

sont séparés en fonction du rapport de leur masse atomique sur leur charge. Un détecteur permet de

quantifier l’intensité du signal pour chaque masse. L’ensemble du système est piloté par une station

informatique. Dans un premier temps, nous avons validé une technique multiélémentaire du dosage

simultané d’un grand nombre d’éléments dans trois matrices biologiques (sang total, plasma, urines)

(3). Dans un second temps, nous avons déterminé les valeurs habituelles chez 100 sujets témoins

(4), préalable à l’utilisation d’un dépistage multiélémentaire dans le cadre de la toxicologie clinique

5
ou médico-légale ou de programmes hospitaliers de recherche clinique axés sur les métaux et

consacrés à des pathologies variées.

Matériel et méthodes

- Instrumentation : Il s’agit d’une torche à plasma de type ThermoOptek X Series couplée à un

spectromètre de masse, modèle X7/CCT (ThermoOptek, Courtaboeuf, France). L’appareil est

équipé d’une torche en quartz de 1,5 mm, d’un nébuliseur concentrique en verre borosilicaté de 1

ml (type concentrique de Marque Glass Expansion – Référence ThermoElemental 1201318) avec

un débit d’échantillon de 0,85 ml/min, d’une chambre de nébulisation en quartz munie d’un

refroidisseur à effet Peltier régulant sa température à 3°C, et d’un passeur d’échantillons de type

CETAC ASX-510. L’ensemble des données est enregistré sur une station informatique dotée du

logiciel d’analyse PlasmaLab version 2.0 sous Windows NT. Les paramètres instrumentaux sont les

suivants : puissance de la torche 1200 W ; débits d’argon : plasmagène 15 l/min, nébuliseur 0,95

l/min, auxiliaire 0,66 l/min ; interface : cônes échantillonneur et écorceurs en nickel de diamètre

respectifs 1 mm et 0,44 mm ; vide au niveau de l’interface et du quadripôle respectivement 1,9

mbar et 1,6.10-7 mbar. Le dosage de la créatinine urinaire est réalisé par technique enzymatique sur

Intégra 400 (Roche, Meylan, France).

- Réactifs : La source de plasma utilisée est de l’argon présentant un haut degré de pureté, supérieur

à 99,999 % (Linde gas, Gargenville, France). L’eau utilisée est purifiée extemporanément sur Milli-

QPLUS 185 (Millipore, St Quentin en Yvelines, France). L’acide nitrique à 65 % de qualité

suprapur, le triton X100 et les solutions multi-élémentaires (multiélément standard solution VI

contenant 30 éléments à 10 ou 100 mg/l) proviennent de chez Merck (Darmstadt, Allemagne). Des

étalons individuels de W, Pt, Pd, Hg, Sb, Sn, Ge (CPI international, Amsterdam, Hollande) sont

ajoutés à ces solutions multi-élémentaires. L’étalonnage interne de l’appareil est réalisé avec une

solution de Rhodium (CPI international). La validité des dosages est vérifiée pour le plasma, le sang

6
total et les urines par des contrôles titrés par ICP-MS Seronorm niveau 1 (Trace elements serum

level 1 – réf. 201405 ; Trace elements whole blood 2 – réf. 201607 ; Trace elements urine – réf.

201207 ; SERO AS, Billingstade, Norvège). Le sang est prélevé dans un tube sous vide de 7 ml

hépariné pour éléments traces de type « Vacutainer® » référence 367735 (Beckton Dickinson, Le

Pont de Claix, France). La moitié de chaque prélèvement sanguin est décantée dans un tube en

polystyrène de 5 ml puis centrifugée dans un délai de 2 heures après le prélèvement et le plasma

immédiatement décanté. Le sang total, le plasma décanté sont congelés avant analyse. Les urines

sont recueillies sur un flacon de 30 ml en polystyrène transparent muni d’un bouchon à vis en

polypropylène et également congelées avant analyse. Le laboratoire participe au contrôle qualité

ICP-MS canadien (Programme de comparaisons interlaboratoires, Sainte Foy, Canada) qui adresse

trois fois par an à ses adhérents du sang total, des urines et des cheveux.

- Préparation des gammes d’étalonnage : Les gammes d’étalonnage permettant le dosage multi-

élémentaire dans le plasma sont réalisées en solution aqueuse, directement dans la solution diluante.

En fait, l’étalonnage se fait par l’intermédiaire d’une gamme de concentrations en 8 points, préparée

dans une solution d’acide nitrique à 0,144 M, s’échelonnant de 0 à 24 µg/l (0-0,5-1-2-3-6-12 et 24

µg/l) ou de 0 à 240 µg/l (0-5-10-20-30-60-120 et 240 µg/l) selon l’élément. En ce qui concerne le

sang total, le dosage multi-élémentaire est effectué par la méthode des ajouts dosés, autrement dit

par une gamme de concentrations préparée à l’aide d’un pool de sang, dans la matrice considérée.

Une gamme d’ajouts dosés est réalisée, s’échelonnant de X à X+24 µg/l (X, X+0,5, X+1, X+3,

X+6, X+12 et X+24 µg/l) ou de X à X+240 µg/l (X, X+5, X+10, X+30, X+60, X+120 et X+240

µg/l) selon les éléments. Pour les urines deux dilutions différentes sont utilisées en fonction de la

nature de l’élément : au dixième, dans ce cas il s’agit de la même gamme que pour le plasma ; au

cinquième avec des ajouts dosés aux mêmes surcharges dans la matrice à l’aide d’un pool d’urines,

que pour le sang total.

7
- Préparation des échantillons (Tableau I) : Les échantillons plasmatiques sont préparés par dilution

au dixième, dans une solution aqueuse composée d’acide nitrique à 0,144 M et de triton à 0,01 %

(v/v), dans des tubes en polypropylène. Les échantillons de sang, préalablement congelés à -20°C

puis décongelés, sont dilués au dixième dans une solution aqueuse composée d’acide nitrique à

0,144 M et de triton à 0,1 % (v/v) dans des tubes en polypropylène. Une fois l’hémolyse achevée,

les mélanges sont centrifugés à 4000 tours/min. Les urines sont préparées par dilution au 1 : 10 et

au 1 : 5 dans l’acide nitrique 0,216 M et de triton à 0,01 %v/v en fonction de l’élément à doser. Pour

des raisons pratiques, les mesures sont réalisées sur une miction, les résultats étant rapportés à la

créatinine déterminée par voie enzymatique. La quantité d’échantillon sanguin, plasmatique ou

urinaire nécessaire est de 0,4 ml.

- Conditions de validation : Nous avons utilisé le protocole recommandé par la Société française de

biologie clinique (SFBC) (5). Un pool est préparé pour la validation du dosage des métaux dans le

plasma et les urines, alors que pour le sang total, il est fait appel au contrôle Seronorm. Pour être

validé, le dosage d’un élément doit répondre aux critères établis par la SFBC. La linéarité est

validée pour chaque élément par l’établissement de la droite de régression sur la plage de

concentrations considérée ainsi que par le calcul du coefficient de corrélation. La récupération

d’ajouts est également mesurée dans les trois matrices : sang total, plasma, urines. L’exactitude est

appréciée par deux types de contrôles : un contrôle intralaboratoire constitué par des étalons titrés

par ICP-MS (Seronorm) pour chacune des matrices ; un contrôle interlaboratoire pour ICP-MS pour

le sang total et les urines (contrôle canadien). Pour chaque élément, les limites de détection et de

quantification sont calculées selon les recommandations de la SFBC. Dans ces conditions, la

validation de cette technique a pu être réalisée simultanément pour 27 éléments dans le plasma, 24

dans le sang total et pour 29 éléments dans les urines. Les limites de quantification s’échelonnement

de 0,003 µg/l (U) à 10 µg/l (B) pour le sang total, de 0,003 µg/l (U) à 17 µg/l (Al) pour le plasma et

8
de 0,002 µg/l (U) à 17 µg/l (Se) pour les urines. Elle est bien adaptée tant à la toxicologie clinique

qu’à la toxicologie médicolégale, mais également à la surveillance d’un certain nombre d’éléments

en médecine du travail (6) ou dans le cadre des effets des métaux lourds sur l’environnement et la

santé (7).

L’ICP-MS en toxicologie clinique

Nous présentons deux cas montrant une exposition à des minéraux révélée lors de la détermination

simultanée des valeurs de référence pour la trentaine d’éléments chez des témoins.

Cas N°1 : Exposition au plomb : Il s’agit d’un sujet de 55 ans, indemne de toute affection, sans

traitement médical, pour lequel il n’y avait aucune justification à pratiquer un dosage de plomb. La

détermination multiélémentaire dans le sang total et les urines révèle des concentrations normales

pour tous les éléments, à l’exception du plomb. Le plomb dans le sang total est de 120 µg/l (N <63

µg/l – 95è percentile). Le plomb urinaire est de 3,4 µg/l de créatinine (N <2,2 µg/g de créatinine –

95è percentile). Bien que le sujet ne présente aucun symptôme clinique, la valeur de la plombémie

>100 µg/l témoigne d’une imprégnation saturnique certaine (8). Le dosage du plomb dans l’eau du

robinet montre une concentration de 111 µg/l (N <25 µg/l), à l’origine de cette contamination.

L’enquête précise que l’habitat est un pavillon construit vers 1930, comportant des tuyauteries en

plomb. Le propriétaire a installé un adoucisseur d’eau, vraisemblablement à l’origine du relargage

de plomb du fait de l’absence de dépôt de calcaire à l’intérieur des canalisations et de la présence

d’une eau adoucie agressive. Un contrôle sanguin réalisé 3 mois plus tard confirme cette hypothèse,

même si la concentration n’est pas revenue à la normale (plombémie 90 µg/l – normale <63 µg/l).

Cas N°2 : Exposition à l’arsenic : C’est un homme de 42 ans, sans pathologie médicale, ni

traitement pour lequel la concentration en arsenic urinaire est franchement élevée : 1003 µg/g de

créatinine (N <175 µg/g de créatinine – 95è percentile), alors que l’arsenic sanguin est sensiblement

normal : 24 µg/l (N <19 µg/l – 95è percentile). Il ne présente aucun trouble clinique évocateur d’une

9
exposition à de l’arsenic minéral. S’agit-il d’un empoisonnement ou d’une intoxication

alimentaire ? Une seconde analyse après spéciation, permet de différencier l’arsenic minéral de

l’arsenic organique, et montre qu’il s’agit en réalité d’arsenic organique non toxique. Le sujet

indique avoir consommé des fruits de mer et du poisson la veille du recueil. Un nouveau

prélèvement réalisé cinq jours plus tard le confirme (arsenic urinaire 125 µg/g de créatinine – N

<175 µg/g de créatinine – 95è percentile).

L’ICP-MS en toxicologie médico-légale

Cas N°3 : Strontium et noyade : Au cours de la noyade vitale, lorsque l’eau pénètre dans les

poumons et avant que le sujet ne décède, des échanges ont lieu dans les alvéoles pulmonaires, entre

le sang et l’eau du milieu extérieur. Cela produit une faible hémodilution qui peut être objectivée

par une diminution de l’hémoglobine du sang provenant des poumons prélevé au niveau de

l’oreillette gauche. Le dosage de certains minéraux, comme le strontium, présent en faible

concentration dans le sang (N <43 µg/l – 95è percentile), mais dont la teneur est massive dans l’eau

de mer (7 à 8000 µg/l), peut s’avérer extrêmement précieux comme le montre le tableau II. Nous

constatons que le sang provenant des poumons s’est considérablement chargé en strontium, preuve

que le sujet était vivant lorsqu’il est tombé à l’eau.

Cas N°4 : Double empoisonnement criminel à l’arsenic : Une femme de 65 ans décède après une

courte hospitalisation. L’hypothèse évoquée est celle d’un choc septique. L’exploration biologique

réalisée s’avère négative. Le permis d’inhumer est délivré par erreur. Des prélèvements ont été

réalisés à titre conservatoire. L’analyse toxicologique de routine, comprenant des recherches par

immunoanalyse, par chromatographie en phase gazeuse couplée à une détection par espace de tête,

par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse et par chromatographie

en phase liquide couplée à une barrette de diodes, est négative. Le dosage des métaux et métalloïdes

révèle une concentration sanguine en arsenic minéral de 41,1 mg/l. On admet que des valeurs

10
sanguines de l’ordre de 1 mg/l sont susceptibles d’avoir une conséquence mortelle. Son époux est

décédé de manière inexpliquée il y a quelques mois. Il est procédé à l’exhumation des deux corps.

L’analyse toxicologique confirme le double empoisonnement criminel à l’arsenic. L’analyse des

cheveux (tableau III) montre que la femme a été empoisonnée récemment, alors que l’époux était

visé par l’assassin depuis de nombreux mois.

L’ICP-MS en toxicologie : quelles applications ?

La torche à plasma s’avère être un nouvel outil d’analyse extrêmement utile au toxicologue avec de

nombreuses applications dans les diverses matrices biologiques à partir d’un échantillon biologique

limité : sang, plasma, urines, cheveux en particulier. Nous en avons dénombré près d’une dizaine :

- la réalisation de dosages multiélémentaires (environ 30 éléments en simultané),

- la recherche d’une exposition aux métaux lourds, par la quantification simultanée des

métaux du groupe,

- la recherche d’une intoxication par un métal ou un métalloïde appartenant à l’un des 30

éléments du panel,

- le dosage de grandes séries d’un élément en pathologie professionnelle grâce à une cadence

analytique élevée,

- l’exploration de pathologies récidivantes ou inexpliquées, en particulier si l’analyse

toxicologique de routine est négative,

- le suivi et l’impact des biomatériaux chez l’homme,

- le détecteur de masse permet de réaliser des études isotopiques.

Conclusion

Le dosage multiélémentaire simultané d’un grand nombre d’éléments –environ 30– à partir d’un

échantillon biologique limité constitue une approche nouvelle en toxicologie analytique. La torche à

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plasma est une technique sensible, spécifique, rapide et flexible. Les diminutions de la taille et du

coût de l’appareillage devraient contribuer à une plus grande diffusion de ce type d’équipement

dans les laboratoires de biologie médicale ayant à répondre aux besoins de la toxicologie clinique et

de la toxicologie médico-légale.

Cet équipement a été acquis grâce à un financement de l’Association pour la Fondation Charles

Nicolle – Rouen - France (Président Professeur Eric Mallet).

12
Références :

1. Patriarca M. The contribution of inductively coupled plasma mass spectrometry to biomedical

research. Microchem J 1996 ; 54 : 262-71.

2. Goullé JP, Lacroix C. L’analyse toxicologique à l’aube du 3ème millénaire. Ann Biol Clin 2001 ;

59 : 605-12.

3. Goullé JP, Mahieu L, Castermant J, Neveu N, Lainé G, Nouveau MP, Gehanne R, Bouige D,

Lacroix C. Validation d’une technique de dosage multi-élémentaire des métaux par ICP-MS

dans les milieux biologiques. Ann Toxicol Anal 2003 ; 15 : 271-80.

4. Goullé JP, Mahieu L, Neveu N, Bouige D, Castermant J, Lainé G, Nouveau MP, Gehanne R,

Lacroix C. Dosage multiélémentaire des métaux et métalloïdes par ICP-MS : valeurs usuelles

chez 100 témoins. Ann Toxicol Anal 2004 ; soumis pour publication.

5. Protocole de validation de techniques. Commission validation de techniques de la Société

française de biologie clinique. L’information Scientifique du Biologiste. 1985 ; 11 : 5-51.

6. Dehon B, Nisse C, Lhermitte M, Haguenoer JM. Métaux et médecine du travail. Ann Toxicol

Anal 2001 ; 13 : 203-19.

7. Miquel G. Les effets des métaux lourds sur l’environnement et la santé. In : Rapport de l’office

parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. 2001 avril, n°27979,

Assemblée Nationale/n°261 Sénat.

8. Plomb dans l’environnement : quels risques pour la santé ? Expertise collective INSERM, 13

janvier 1999.

13
Tableau I : Modalités de préparation des échantillons.
Sample preparation.

Plasma (ml) Urines 1 (ml) Sang total (ml) Urines 2 (ml)


Échantillon 0,4 0,4 0,4 0,4
HNO3 0,65 %
3,6 *
Triton 0,01 % 3,6 3,6 1,8
(* triton 0,1 %)
Rh (étalon interne)
Centrifugation
- - -
après hémolyse
Étalonnage Gamme aqueuse Ajouts dosés dans la matrice

14
Tableau II : Strontium et noyade vitale en eau de mer.
Strontium and sea drowning.

Sang total Sr (µg/l) Hb (g %ml)


Témoins 16 (9 – 43) -
Oreillette droite 60 23,7
Oreillette gauche 192 20,3
Aorte 103 -

15
Tableau III : Datation d’un double empoisonnement criminel à l’arsenic.
Dating double criminal arsenic poisoning.

As dans les cheveux (ng/mg) – N = 0,1 – 1,0 ng/mg

Épouse Époux

2 cm (extrémité) 13,4

2 cm 1,3 13,0

2 cm 18,1
1,0
1 cm 21,4

1 cm 27,6
6,5
1 cm 43,3

1 cm 142,9
108,7
1 cm (racine) 293,6

16
Légende de la figure :

Figure 1 : Performances de la spectrophotométrie d’absorption atomique avec flamme (AAS) en

mode électrothermique (GFAAS), et de la torche à plasma avec détecteur optique (ICP-

AES), ou avec détecteur de masse (ICP-MS).

Flame atomic absorption spectrometry (AAS), graphite furnace atomic absorption

spectrometry (GFAAS), inductively coupled plasma atomic emission spectrometry (ICP-

AES) and inductively coupled plasma mass spectrometry (ICP-MS).

17
Quadripôle ICP-MS

ICP-AES

GFAAS

AAS

1ppq 1ppt 1ppb 1ppm 1000ppm

18

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