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Infidèles, Zappeurs Et Slasheurs ? Les Z Et L'émergence D'une Nouvelle Forme de Fidélité Employeur

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Infidèles, zappeurs et slasheurs ?

Les Z et l’émergence
d’une nouvelle forme de fidélité employeur
Élodie Gentina, Véronique Pauwels-Delassus, Aurélie Leclercq-Vandelannoitte
Dans Revue de gestion des ressources humaines 2022/3 (N° 125), pages 55 à 71
Éditions ESKA
ISSN 1163-913X
ISBN 9782747233606
DOI 10.3917/grhu.125.0055
© ESKA | Téléchargé le 01/03/2023 sur www.cairn.info via Excelia Group (IP: 81.1.0.41)

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© Éditions ESKA, 2022

INFIDÈLES, ZAPPEURS
ET SLASHEURS ?
LES Z ET L’ÉMERGENCE
D’UNE NOUVELLE FORME
DE FIDÉLITÉ EMPLOYEUR
Elodie GENTINA
IESEG School of Management, Univ. Lille, CNRS, UMR 9221 - LEM - Lille Economie
Management, F-59000 Lille, France

Véronique PAUWELS-DELASSUS
IESEG School of Management, Univ. Lille, CNRS, UMR 9221 - LEM - Lille Economie
Management, F-59000 Lille, France

Aurélie LECLERCQ-VANDELANNOITTE
CNRS, IESEG School of Management, Univ. Lille, UMR 9221– LEM- Lille Économie
Management, 3 rue de la Digue, F-59000 Lille, France

INTRODUCTION 2005 ; Bender, 2010 ; Dejoux & Wechtler, 2011 ;


Martin, 2014). Autre fait clé : un jeune français
La fidélité est à la fois un atout important sur deux refuse de s’engager dans l’entreprise à
(Martin, 2014), un enjeu de taille (Paillé, 2004, long terme, privilégiant le statut d’intérimaire
p.5), et une préoccupation majeure pour les orga- ou de « free-lance », qui offre plus de souplesse,
nisations (Poulain-Rehm, 2012). Elle est rapide- d’autonomie et de flexibilité (Aroles et al., 2019) ;
ment devenue une problématique centrale de la ainsi, le classique Contrat à Durée Indéterminée
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recherche en gestion des ressources humaines (CDI) n’apparait plus comme une fin en soi pour
(GRH) (Giraud et al., 2012, 2015). La fidélité est les jeunes talents (Gentina & Delécluse, 2018).
encore plus stratégique pour les organisations Comme souvent, ces derniers sont affublés des
lorsqu’il s’agit de pérenniser les relations qu’elles nouveaux maux de la société. Dans un contexte
établissent avec les jeunes issus de la Génération Z dit de « modernité liquide » (Bauman, 2000), la
(nés après 1995, pendant la 4ème révolution indus- nouvelle génération est ainsi qualifiée de géné-
trielle, encore connus sous le terme de « digital ration de « slasheurs » ou de zappeurs, adeptes
natives »). Alors que la fidélité et la loyauté étaient du changement permanent et du court terme.
des valeurs propres aux générations passées (les Ces caractéristiques sont souvent prises pour une
baby-boomers et les X), les Z semblent ne plus forme d’impatience, renvoyant à un comporte-
sacraliser l’entreprise, et peuvent même la quitter ment d’infidélité, d’absence d’engagement et de
sans état d’âme rapidement après leur embauche. désintérêt pour l’entreprise. Pourtant, les mana-
Si 80 % des jeunes français considèrent le travail gers auraient tort d’assimiler ce comportement à
comme important, seuls 18% le jugent prioritaire de l’inconstance. Si, pendant longtemps, le terme
(Marriault & Vairet, 2021), comme en attestent « slasheur » a revêtu une connotation négative,
les recherches en GRH qui montrent que le tra- décrivant un comportement d’infidélité associé
vail chez les jeunes prend place dans une concep- à l’arrivée de la génération Z, il prend une autre
tion plus large de l’existence (Albert & Bournois, dimension aujourd’hui, renvoyant à une diversité

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d’expériences et de compétences clés (telles collaborative (Gentina et al., 2012), ainsi que le
que l’exemplarité et l’esprit critique) et dans des suggèrent des recherches émergentes en marketing
dimensions diverses - digitales, collectives, entre- relatives à la fidélité du (jeune) consommateur.
preneuriales (Gentina & Delecluse, 2018). Dans ce Cette nouvelle forme de fidélité met au jour l’im-
contexte, il est devenu primordial pour les entre- portance des collaborateurs et du « do-it together »
prises de capter ces compétences sur le long terme (DIT), et témoigne du passage d’une fidélité abso-
et, pour ce faire, de repenser la fidélité des jeunes à lue et subie à une fidélité choisie ; d’une fidélité
leur employeur. Par ailleurs, bien que les Z soient négative liée à la peur de perdre son emploi à une
souvent qualifiés de matérialistes, à l’affût des fidélité positive liée à la volonté d’être heureux
marques (Chaplin & John, 2010), la réalité est plus au travail (Gentina, 2018). Ces résultats invitent à
complexe puisque ces derniers semblent privilé- remettre en question les politiques traditionnelles
gier l’expérience à partager avec les autres, « leur de fidélisation des ressources humaines.
tribu », à la possession (Gentina, 2014), laissant Après un éclairage théorique sur la notion de
entrevoir une évolution possible de leur fidélité à fidélité à l’entreprise, et l’analyse des spécificités
l’entreprise, en phase avec leurs attentes, valeurs de la génération Z dans ce domaine, nous pré-
et projets de vie. sentons la méthode de recherche adoptée dans
Dès lors, comment repenser la question de cet article. S’inscrivant dans une démarche qua-
la fidélité de la jeune génération à l’entreprise? litative interprétativiste, notre étude de cas per-
Cette question se pose avec d’autant plus d’acuité met d’explorer la relation des Z avec l’entreprise,
dans le contexte actuel de crise économique lié amenant à une conception renouvelée, pluridimen-
à la pandémie de Covid-19. Sur l’ensemble de sionnelle, de la fidélité. Après avoir discuté ces
l’année 2020, selon la Direction Des Statistiques résultats, dans un contexte où l’émergence de nou-
du Ministère du Travail (DARES), le nombre veaux comportements appelle au développement
d’embauches de jeunes de moins de 26 ans en d’une « nouvelle GRH » (Honoré et al., 2010),
Contrat à Durée Indéterminée (CDI) et Contrat nous concluons par une analyse des implications
à Durée Déterminée (CDD) de plus de trois mois de cette recherche sur l’évolution nécessaire des
a reculé de 14% par rapport à 2019 (Guyot, 2021). politiques de fidélisation des ressources humaines.
Si le slashing concerne toutes les générations, il
touche particulièrement les jeunes de moins de
30 ans (39 % contre 19 % des plus de 60 ans), 1. CADRE THÉORIQUE
maitrisant parfaitement le digital et vivant dans
une culture de l’instantanéité (Gentina, 2022). En
dépit de cette crise, les jeunes talents se montrent
paradoxalement plus critiques et plus exigeants 1.1. Le concept de fidélité des salariés à leur
à l’égard de l’entreprise, sans doute car ils sont
entreprise
nés dans l’incertitude économique et sont prêts à
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prendre plus de risques face à un avenir incertain. La fidélité des salariés se fonde sur une
L’objectif de cet article est d’explorer les clés de connexion relationnelle particulière (Schrag,
la fidélité de la nouvelle génération à l’entreprise, 2001 ; Giraud et al., 2012). Elle peut être défi-
en prenant en considération l’évolution possible du nie comme un lien fort qui lie un employé à
concept de fidélité à l’employeur et les nouvelles son entreprise même s’il n’est pas forcément
dimensions de cette dernière, a fortiori dans le économiquement favorable pour lui d’y rester
contexte de crise actuel. A l’appui d’une étude de (Logan, 1984). La fidélité se traduit par « une
cas menée dans une grande entreprise française faible propension à rechercher et à examiner les
caractérisée par son attractivité auprès des jeunes offres d’emploi externes ainsi qu’un sentiment
(Décathlon), cette recherche analyse l’évolution d’appartenance élevé » (Brillet et al., 2013, p.3).
du concept de fidélité à l’entreprise dans le cadre Tout comme en marketing où la définition de la
de la génération Z en deux phases (2018 et 2020). fidélité fait référence à l’engagement profond du
Les résultats contribuent aux recherches portant consommateur à racheter le produit préféré de
sur le concept de fidélité à l’employeur, en per- manière régulière et répétitive, et ceci même dans
mettant de spécifier les contours d’une nouvelle un contexte où des actions marketing concur-
forme de fidélité, pluridimensionnelle, à travers rentes pourraient inciter le changement d’achat
notamment le passage d’une fidélité à l’entreprise de produit (Oliver, 1999), la fidélité à l’entreprise
à une fidélité plus sociale (Price et al., 2007), et peut être abordée de manière comportementale

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ou attitudinale (Giraud et al., 2012). En effet le sein de l’organisation (Zayas Ortis et al., 2015).
fait qu’un salarié reste dans l’entreprise n’est pas A travers ce cercle vertueux, les salariés s’inves-
forcément représentatif de sa fidélité (Paillé, tissent alors de plus en plus pour leur entreprise
2005) ; c’est notamment le cas dans un contexte et en véhiculent une image positive à l’extérieur
de crise où les salariés ont peu d’alternatives ou (Durkin, 2007).
ne souhaitent pas prendre de risque. Il faut donc L’implication dite rationnelle (aussi appe-
distinguer cette forme de « fausse fidélité » (Dick lée « implication de continuité », Bentein et al.,
et Basu, 1994) où le salarié reste dans l’entreprise 2004), renvoie à un attachement calculé (Luchak,
par obligation, à la « fidélité réelle » qui corres-
2003), utile, individualiste, amenant le salarié à
pond à une réelle volonté de rester, accompagnée
mettre en balance les coûts versus les bénéfices
d’un attachement très fort à l’entreprise (Giraud
associés à la décision de rester dans l’entreprise
et al., 2012 ; Peretti, 2001).
ou de la quitter. Cette fidélité revêt ici une dimen-
Plus particulièrement, les recherches en GRH sion éminemment sécuritaire, en ce sens où elle
suggèrent que la fidélité des salariés à l’entreprise vise la sécurité de l’emploi et la sécurité finan-
est fonction de la satisfaction et de l’implication cière, d’où l’importance accordée au salaire et
de ces derniers (Chang et al. 2022, Giraud, 2015 ; autres récompenses matérielles associées à la
Poulain-Rehm, 2012), cette dernière désignant performance individuelle dans la tâche. Cette
un « lien qui attache l’individu à une entité, à fidélité reflète également une connotation plus
une notion ou à un comportement » (Meyer & négative, en ce qu’elle est liée à la peur de perdre
Herscovitch, 2001, p. 301). La recherche en GRH son emploi (telle une fidélité « par défaut »).
spécifie que ce lien d’attachement peut être de
trois natures : affective, calculée ou normative Enfin, l’implication dite normative se fonde sur
(Allen & Meyer, 1991 ; Giraud et al., 2012, p.46). la conscience professionnelle du salarié, qui sera peu
enclin à quitter son entreprise en raison d’une atti-
L’implication dite affective reflète un attache- tude forte de loyauté, d’une éthique professionnelle,
ment émotionnel à l’organisation et à ses valeurs voire d’un sentiment d’obligation morale vis-à-vis
(Becker & Billings, 1993; Buchanan, 1974). Les de l’entreprise (Bentein et al., 2004). Cette vision de
salariés restent parce qu’il existe un lien affec- la fidélité s’inscrit dans des schémas normatifs de
tif à l’égard de l’organisation (Mitchell & Lee, comportement, qui amènent le salarié à penser qu’il
2001), un attachement psychologique envers n’est pas concevable de sortir du chemin prescrit par
celle-ci qui découle de leur satisfaction (Dhir et l’organisation et de quitter l’entreprise.
al., 2019). Cette fidélité est généralement bâtie
sur une relation de confiance qui se traduit par Traditionnellement, ces trois dimensions de la
un certain niveau d’engagement, de fierté d’ap- fidélité se retrouvent mêlées dans la décision des
partenance, voire d’identification du salarié à son salariés de rester dans leur entreprise. Néanmoins,
entreprise (Giraud et al., 2012 ; Mowday et al., le concept de fidélité a évolué récemment, comme
1983 ; Guillon & Cezanne, 2014) ; celle-ci l’em- en attestent de nouvelles approches en GRH qui
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pêche de postuler à des offres d’emploi externes insistent sur le rôle plus actif des employés dans
et de vouloir quitter l’entreprise. L’affect déve- leurs attitudes, la gestion de leur carrière (Giraud,
loppé par le salarié pour son organisation passe 2015) et leurs choix ; cette évolution semble
généralement par un besoin de reconnaissance, d’autant plus problématique dans le contexte des
de sens et de légitimité de ce dernier, qui doit jeunes générations. Le modèle du cadre dévoué
sentir un intérêt dans son travail pour avoir envie à son entreprise, motivé par la seule sécurité
d’y rester sur le long terme. Un environnement de l’emploi, semble avoir vécu. Les salariés ne
de travail approprié et une ambiance agréable, semblent plus vouloir sacrifier leur vie personnelle
avec des processus d’organisation perçus comme au nom du travail. Cette évolution peut occasion-
équitables, ainsi qu’une volonté d’instaurer des ner des problèmes, notamment pour fidéliser les
relations professionnelles durables et de qualité plus jeunes générations, par nature très mobiles et
sont propices à favoriser la fidélité affective des prêtes à ‘zapper’ sur le marché de l’emploi (Lewi,
salariés, ce qui permet en retour une meilleure 2018). Certains travaux mettent ainsi en évidence
performance de l’entreprise (Obedgiu et al., une complexification possible de la question de la
2017). Se sentant apprécié par l’entreprise, le fidélité à l’entreprise chez les jeunes, pour lesquels
salarié déclenche une attitude émotionnelle posi- le travail reste un bien précieux mais toutefois
tive envers l’organisation, ce qui augmente son inscrit dans une conception plus large de la vie
sentiment d’appartenance et son engagement au (Bender, 2010 ; Albert et Bournois, 2005).

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D’un autre côté, les Z ayant peu de goût pour


1.2. Une problématique pertinente pour la la possession en elle-même, leur matérialisme est
nouvelle Génération Z ? sans doute mal posé aujourd’hui. Contrairement
aux idées préconçues, de récentes études en
La génération Z présente des caractéristiques marketing suggèrent que les jeunes ne sont
et attentes nouvelles par rapport aux générations pas si matérialistes que l’on peut le penser : ils
passées, comme en témoignent leur quête de échangent, partagent et donc ne cherchent pas
bien-être au travail, d’authenticité et d’affectivité, seulement à posséder des objets (Chaplin et al.,
de créativité et d’engagement, d’ultra-connexion 2019). Ils misent sur la collaboration et privilégient
et de partage (Gentina & Delécluse, 2018), mais plutôt les expériences à la propriété, le lien étant
aussi la recherche de souplesse, d’autonomie, de important plus que le bien (Cova, 2017). En vue
changement et de flexibilité dans l’accomplisse- de comprendre l’évolution de la fidélité des Z à
ment de leur vie professionnelle (Aroles et al., l’entreprise, les travaux issus du marketing mettent
2019). En raison de ces caractéristiques nouvelles, ainsi en lumière la transformation des pratiques
il convient de s’interroger sur l’évolution possible de consommation des jeunes dans la société : par
de la fidélité des jeunes à l’entreprise par rapport exemple, Collin-Lachaud et al. (2012) ont montré
aux générations passées. Les recherches en GRH que pour qu’une intention de fidélité se concrétise
ont porté un intérêt croissant à la compréhen- en un comportement de fidélité au point de vente,
sion des attitudes des jeunes au travail (Bender, il est nécessaire que le jeune consommateur soit
2010 ; Martin, 2014 ; Nair & Sadasivan, 2019), satisfait et ait l’intention d’être fidèle, mais aussi
mettant en évidence des continuités génération- que ses accompagnateurs dans ses sorties shop-
nelles, liées aux aspects qualitatifs du travail, ping se montrent fidèles. Dans la mesure où les Z
tels que l’intérêt du travail, l’apprentissage, les sont fortement attachés à leur groupe de pairs, on
contacts et l’ambiance, ou encore l’aspiration à un passerait d’une fidélité transactionnelle à une fidé-
équilibre de vie (Grodet & Tremblay, 2013) et la lité sociale, qui aujourd’hui prend la forme d’une
reconnaissance (Brillet et al., 2013). Néanmoins, fidélité collaborative. Nous rejoignons ici plus
la question spécifique de la fidélité des jeunes largement les travaux en marketing qui ont mis
(Martin, 2014 ; Gentina, 2018), notamment ceux en évidence le passage d’une approche compor-
issus de la génération Z, à leur employeur n’a pas tementale statique et transactionnelle de la fidélité
été abordée en tant que telle. à une vision multidimensionnelle (Bendapudi &
La recherche en marketing s’avère ici d’un Berry, 1997 ; Oliver, 1997), dynamique (Frisou,
grand pouvoir heuristique, en ce qu’elle a iden- 2005), relationnelle (N’Goala, 2003), situation-
tifié deux grandes approches de la fidélité du nelle, contingente, sociale (Fournier & Mick,
client à l’entreprise qui paraissent très inspirantes 1999) et interactive (Arnould et al., 2006). Cette
pour appréhender la fidélité des jeunes à l’entre- dernière reconnaît l’importance de l’affect et la
prise : une vision de la fidélité transactionnelle, pluralité des formes de fidélité.
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centrée sur la recherche de gains monétaires, et Par conséquent, face à la diversité des conclu-
une vision plus élargie, centrée sur la conception sions des recherches sur l’évolution du concept
plus affective et collective de la fidélité (Collin- de fidélité en marketing et en GRH, et au regard
Lachaud, 2010). Cette dernière semble plus en du manque de recherche sur la fidélité à l’entre-
phase avec le comportement actuel des Z à la prise dans le cadre spécifique de la génération
recherche d’émotions, de lien social et de sens Z, cet article cherche à comprendre, au moyen
(Gentina et al., 2012). d’une étude empirique, les ressorts de la fidélité
D’un côté, l’importance que les Z accordent à à l’entreprise de la jeune génération.
la consommation peut faire craindre l’avènement
d’une génération matérialiste, ayant la consom-
mation pour seule valeur (Chaplin & John, 2010). 2. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Attirés par les marques et davantage exposés aux
difficultés financières, les Z privilégieraient logi-
quement des entreprises prônant des stratégies
classiques de fidélisation transactionnelles basées 2.1. Design de recherche
notamment sur la seule récompense monétaire,
sous formes de versements d’intéressement aux Notre objectif étant de comprendre les res-
bénéfices, de commissions et de primes. sorts de la fidélité des jeunes à l’entreprise, et

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en l’absence d’autre recherche menée dans cette


perspective, une approche exploratoire a été rete-
2.2. Collecte de données
nue. En particulier, nous avons fait le choix d’op- Plusieurs sources de données ont été mobi-
ter pour une approche qualitative interprétativiste lisées dans le cadre de cette étude de cas,
dans laquelle le questionnement est construit à notamment des données primaires, à travers
partir des représentations des acteurs (Miles & principalement la technique de l’entretien semi-
Huberman, 1991). directif centré, et également l’observation partici-
Plus particulièrement, la méthode de l’étude pante et la constitution d’un journal de recherche.
de cas, souvent considérée comme l’une des stra- Trente-neuf entretiens semi-directifs ont été
tégies les plus utilisées en recherche qualitative menés auprès des jeunes Z (ayant entre 20 et 24
(Stake, 2005) dont la légitimité est aujourd’hui ans principalement, apprentis, en stage dans l’en-
reconnue (Eisenhardt, 1989; Yin, 1994, 2003; treprise), des managers, et des membres de la
Guba & Lincoln 1994), a été retenue. L’étude DRH, avec trois objectifs principaux : premiè-
de cas vise à « comprendre la dynamique et rement, comprendre les attentes de la nouvelle
les processus sous-jacents de certains phéno- génération en termes de fidélité ; deuxièmement,
mènes » (Eisenhardt, 1989, p. 354). L’utilisation cerner toutes les dimensions de la fidélité des Z ;
de l’étude de cas en sciences de gestion contri- et troisièmement, analyser comment les stratégies
bue à la contextualisation d’une problématique de fidélisation des jeunes recrues ont évolué dans
dans une situation organisationnelle concrète, un contexte de crise sanitaire.
notamment quand se posent des questions du
type « comment » ou « pourquoi » à propos Notre méthodologie, au départ centrée à un
d’un ensemble contemporain d’événements (Yin, instant T sur la notion même de fidélité, s’est
1994). Cette méthode de recherche s’avère donc adaptée à la réalité du terrain pour embrasser une
particulièrement adaptée à la problématique perspective longitudinale, ce qui nous a semblé
posée dans cet article. pertinent compte tenu du fait que le processus de
fidélisation des jeunes s’inscrit dans un espace-
Nous avons fait le choix de centrer notre étude temps relativement long. En raison de la crise
sur le cas de Décathlon, entreprise française de inédite survenue en 2020, il nous a paru impor-
production et de grande distribution de sport et tant de comprendre l’évolution de la fidélité des
de loisirs, qui se caractérise précisément par un jeunes recrues avant (en 2018) et pendant la crise
fort recrutement ces dernières années de jeunes sanitaire (en 2020). Deux phases d’entretiens
issus de la génération Z. Le choix de Décathlon peuvent ainsi être distinguées.
a été motivé par le fait que le groupe, regroupant
plus de 23 000 collaborateurs, est entré en 2019 Durant la première phase d’entretiens, conduite
dans le « top 5 » des entreprises jugées les plus entre janvier et mai 2018, nous avons interviewé
attractives par les étudiants et les jeunes cadres, huit jeunes salariés issus de la Génération Z, âgés
en termes d’environnement de travail et de rela- de 20 à 24 ans, à différents postes (tels que des
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tions (« friendly »), de respect des salariés, de ingénieurs produit, gestionnaires de paie, chefs de
parité et d’esprit d’équipe, selon le cabinet sué- produits ou encore commerciaux) que nous avons
dois Universum (Lemarchand & Clivio, 2019). choisis en visant une diversité d’anciennetés –
Pour les jeunes, Décathlon fait aussi partie des allant de quelques mois (des apprentis), à 1 à 2 ans,
marques qui se sont le mieux mobilisées pen- voire 3 à 4 ans. La majorité des jeunes est titulaire
dant la crise de la Covid-19 (Pastezeur, 2020). d’un diplôme bac + 3 à bac + 5. Nous avons égale-
Pour la quatrième année consécutive, le groupe ment rencontré sept managers et six représentants
Décathlon a décroché la palme du classement de la DRH. Les entretiens individuels, réalisés en
« Great Place to Work » (Mollaret, 2020). Ce en face-à-face sur le lieu de travail, duraient envi-
groupe multinational, dont le chiffre d’affaires ron 1h à 1h30 et ont été intégralement enregistrés
global s’élève à plus de 13.8 milliards d’euros et transcrits.
en 2021, compte 1747 magasins répartis dans Durant la deuxième phase d’entretiens,
60 pays. L’étude de cas a été menée au siège du conduite entre janvier et juin 2020, nous avons
groupe, situé à Villeneuve d’Ascq, dans le nord interviewé onze jeunes salariés issus de la
de la France, auprès de diverses cibles : jeunes Génération Z, ayant entre 20 et 24 ans. Nous avons
salariés issus de la Génération Z, managers et également rencontré cinq managers et deux repré-
représentants issues de la Direction des RH sentants de la DRH. En raison du confinement, les
(DRH). entretiens individuels, d’une durée d’1h à 1h30 ont

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été réalisés en ligne (via Zoom). Ils ont tous été observations, et articles de presse) ont été ana-
enregistrés et retranscrits pour analyse. lysées, en parallèle par les trois chercheurs, à
Différents guides d’entretien ont été préparés travers une analyse qualitative thématique de
au préalable pour s’adapter aux diverses fonctions contenu (Richards, 2005). Nous avons appliqué
des répondants. Chaque entretien débutait par des les principes de codage identifiés par Richards
questions générales sur le répondant (rôle, mis- (2005), afin de renforcer la pertinence et la vali-
sions et responsabilités) puis couvrait des sujets dité de nos interprétations.
variés allant de la description du parcours indi- Nous avons d’abord procédé à un codage des-
viduel, du travail et de l’environnement de tra- criptif des données, par exemple en répertoriant
vail, des attentes des jeunes recrues, des attitudes systématiquement les attributs des entretiens :
envers la nouvelle génération Z, de la relation à fonctions des répondants, descriptions du poste
l’entreprise ainsi que des projets professionnels et de l’activité.
et personnels. La notion même de fidélité était Nous avons ensuite réalisé un codage thé-
ensuite abordée, à travers des questions relatives matique, consistant à rattacher des extraits à des
à ses différentes dimensions et à son évolution en thèmes particuliers. Pour ce faire, nous avons
fonction du contexte. Nous avons également posé adopté un raisonnement abductif, permettant
aux répondants des questions sur leurs relations d’aligner les domaines conceptuel (déductif)
avec la direction, le management et leurs pairs, et empirique (inductif) de la recherche. D’une
leur satisfaction et motivation au travail. part, conformément à la perspective déductive,
La deuxième technique de collecte de données nous avons répertorié les principaux thèmes
mobilisée dans cette recherche est l’observation issus de la revue de littérature (contenus dans le
participante, permettant d’éviter les biais inter- guide d’entretien), portant sur la fidélité à l’em-
prétatifs inhérents à la méthode déclarative et de ployeur et les spécificités de la génération Z ; la
s’assurer à la fois de la robustesse et de la cohé- littérature en marketing sur la fidélité des Z en
rence des résultats issus des entretiens. A cette fin, tant que consommateurs a également été intégrée
l’un des trois chercheurs a réalisé trois séances à cette identification thématique afin d’éclairer
d’observation sur trois demi-journées, au sein de d’un nouvel œil la problématique de la fidélité
« Décathlon ALIVE » (espace ouvert à tous), dans des jeunes à l’entreprise. D’autre part, conformé-
le cadre de différents projets (par exemple en lien ment à la perspective inductive, d’autres thèmes
avec le développement de la « Vision 2025 » de ont émergé du corpus des données collectées,
Décathlon, projet durant lequel le chercheur était comme par exemple de nouvelles dimensions de
invité en tant qu’expert sur les nouvelles pratiques la fidélité des jeunes à l’entreprise – la dimension
de travail). Cette phase d’observation, menée en intrapreneuriale, éthique, ou encore collaborative
mars 2018 et mars 2019, s’est traduite par une – ou encore l’évolution de la fidélité en temps de
immersion sur le terrain dans l’environnement des crise sanitaire et économique.
Z, permettant de capter un maximum d’informa- Enfin, nous avons procédé à un codage ana-
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tions contextuelles sans devoir solliciter directement lytique reposant sur un acte d’interprétation et
les individus concernés (Miles & Huberman, 1991). de réflexion sur le sens du matériau collecté, à
L’observation a permis d’observer les échanges, travers une comparaison des codes identifiés par
comportements, pratiques de travail de la jeune les trois chercheurs et des thèmes issus de la lit-
génération avec leurs pairs et managers, amenés térature en RH et en marketing sur le concept
par exemple à interagir de façon collaborative (en de fidélité. Cette analyse s’est également faite à
mode projet, avec des missions en équipe). travers une prise en considération du contexte lié
Des données secondaires ont également été à la crise sanitaire et économique de 2020.
collectées (à travers le recueil de documents
internes, la participation à des réunions, et des
analyses sectorielles et socio-économiques), nous
permettant de préciser le contexte.
3. RÉSULTATS DE L’ÉTUDE EMPIRIQUE
L’analyse thématique révèle l’émergence
de cinq dimensions de la fidélité des Z : les
2.3. Analyse des données dimensions émotionnelle, sociale, collaborative,
intrapreneuriale et éthique, que nous détail-
Toutes les données collectées (transcrip- lons ci-après. L’analyse des entretiens conduits
tions des entretiens, notes de terrain issues des en phases 1 et 2 fait ressortir une évolution de

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Infidèles, zappeurs et slasheurs ? Les Z et l’émergence d’une nouvelle forme de fidélité employeur

certaines dimensions de la fidélité, telles que les lieu de vie où tu te sens bien avec des personnes
dimensions éthique ou intrapreneuriale, qui se qui te comprennent et qui ont les mêmes objectifs
sont trouvées renforcées, lors la crise sanitaire. que toi. » (Gen Z, phase 2). En d’autres termes,
la fidélité à l’entreprise n’est pas liée à la peur
de perdre son emploi (dimension négative de la
3.1. La dimension émotionnelle fidélité) mais plutôt à la volonté d’être heureux
au travail (dimension positive de la fidélité) : « Je
Une nouvelle forme de fidélité émotionnelle reste dans l’entreprise car je m’y sens bien, je
voit le jour, dans laquelle la recherche d’un suis heureuse, sinon je la quitte. Si la boîte à
équilibre entre vie professionnelle et vie person- un moment ne me donne pas la reconnaissance
nelle tient une place primordiale, bien plus que que j’estime mériter, je quitterai l’entreprise. »
la sécurité financière : « Ils veulent un équilibre, (Gen Z, phase 2)
ils ne veulent pas un 9h-18h. Ils veulent leur
équilibre de telle façon à se sentir le mieux
possible ; il y en a qui travaillent mieux le soir, 3.2. La dimension sociale
d’autres mieux le matin. La parentalité prend de
plus en plus de place, et ils ne conçoivent pas de Les Z ont besoin de se sentir intégrés au sein
sacrifier leur vie perso pour une vie au boulot » de l’équipe. Les Z souhaitent tisser des liens
(Manager, phase 2). Cette recherche d’équilibre et interagir au quotidien avec leurs collègues
entre vie professionnelle et vie personnelle n’est pour partager des moments ensemble à l’exté-
possible que s’il règne un climat de confiance rieur de l’entreprise. Ils se soucient davantage
entre les collègues d’une même entreprise, un de leur équipe et se sentent plus fidèles à leurs
des leviers de la dimension émotionnelle de la collègues qu’à toute autre entité : « Il faut être
fidélité: « Ce qui motive les jeunes à travail- surtout disponible pour ton équipe et pas seule-
ler c’est donner de la liberté de faire ce qu’ils ment pour ton employeur. La fidélité, je la vois
veulent, d’avoir confiance en eux. Si le jeune surtout à l’équipe. J’aurais du mal à partir de
veut voyager, bosser dans son maillot de bain, Décat, car je me sens bien dans mon équipe. »
sur une plage en Indonésie mais qu’il réussit la (Gen Z, phase 2). Leurs collègues peuvent même
mission, il peut. C’est juste que j’ai confiance en devenir leurs copains : « Mes collègues, ce sont
la personne » (Manager, phase 1). Contrairement comme mes amis. Je m’épanouis aussi dans mon
aux générations plus anciennes (X, baby-boo- boulot car je bosse avec eux, je fais aussi des
mers) qui exprimaient une loyauté fidèle, voire sorties avec eux. Quand j’ai fêté mon anniver-
un dévouement pour l’entreprise, dans une rela- saire, j’ai invité ma boss. C’est autant mes amis
tion ressemblant à celle d’un enfant (le colla- que mes collègues de Décathlon. » (Gen Z, phase
borateur) à l’égard de sa « mère nourricière » 2). Les Z vont même jusqu’à défier l’entreprise en
(l’entreprise), la génération Z a un rapport moins cooptant et en recrutant leur réseau de copains :
dévoué à l’entreprise : c’est un rapport de type « Je suis quelqu’un de tellement corporate que
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« couple amoureux » où chacun se choisit, se res- j’ai des potes à moi qui sont venus me rejoindre
pecte et se fait grandir : « Je pense que la fidélité chez Décathlon. Je vends mon entreprise corps
a changé. Avant, du temps de nos parents, on et âme et mes copains deviennent mes collabo-
restait dans l’entreprise, par devoir de loyauté. rateurs. » (Gen Z, phase 2). La fidélité des jeunes
Avant, lorsque tu rentrais dans une entreprise si se veut davantage communautaire et tribale :
tu étais bien traité, bien payé, un employé n’avait « Les jeunes, ils ont besoin d’être en réseau et
aucun souci à faire toute une carrière dans la de se sentir comme dans une meute. Je pense
même entreprise. Aujourd’hui, la fidélité, c’est que l’instinct grégaire est quand même présent.
un peu comme les couples amoureux. S’il y a une C’est s’identifier à un groupe, je pense que c’est
différence d’incompréhension, on peut se dire important dans une entreprise aujourd’hui,
cette entreprise n’est pas faite pour moi. C’est peut-être même plus qu’avant » (Gen Z, phase 1).
comme un couple, on quitte l’entreprise. » (RH, Au-delà du plaisir qu’ils éprouvent en travaillant
phase 2). L’entreprise n’est plus un lieu de travail avec leur équipe, ils ont une fierté d’appartenance
mais devient un lieu de vie au sein duquel les Z à l’entreprise : « Le fait que nous sommes des
souhaitent s’épanouir aussi bien professionnelle- Décathloniens, nous on est bleus, nous on est
ment que personnellement : « Décathlon, c’est un tous très fiers de la boite où on travaille. Cette
endroit où tu te sens bien, où tu as envie de venir. fierté, pour moi ça fidélise aussi. » (RH, phase
C’est un endroit de travail mais c’est aussi un 1). Ce besoin d’appartenance à la communauté

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devient un véritable levier de fidélité qui per- une énorme expérience chez Décathlon, qui a un
met aux Z d’être reconnus et valorisés au sein de super réseau et qui va me faire découvrir l’entre-
leur tribu : « Le bien-être personnel passe par prise en accéléré et qui va révéler mon potentiel ;
ton appartenance à un groupe et le retour que c’est un coaching particulier ». (RH, phase 2).
te fait ce groupe également. Si tu te sens bien Si pendant des années, le concept d’« entreprise
dans un groupe parce que tu performes dans apprenante » était revendiqué (Arnaud, 2019),
ton travail, tu as des bons résultats et que tu aujourd’hui, les résultats de l’étude mettent en
es reconnu dans le groupe, c’est une source de exergue l’idée d’« organisations partageantes ».
valorisation. » (Manager, phase 1). Des organisations qui font du partage leur maitre
mot : « Forcément je prends plaisir à venir tra-
vailler chez Decathlon. Je suis fidèle car je suis
motivée, on me donne l’opportunité d’évoluer, de
3.3. La dimension collaborative monter en compétences, de partager mes com-
pétences avec les autres membres de l’équipe et
La dimension sociale de la fidélité s’étend
de me construire finalement. » (Gen Z, phase 2).
à la dimension collaborative. Les Z sont avides
de nouvelles expériences et attendent que les
entreprises leur confient des projets variés dans
lesquels ils peuvent prendre des responsabili- 3.4. La dimension intrapreneuriale
tés ensemble avec leur l’équipe : « L’atout des
jeunes, c’est d’une part, qu’ils osent prendre des L’analyse des résultats montre qu’un des
initiatives ensemble, oser discuter, dire ce qui ne leviers motivationnels des Z est la possibi-
va pas, être beaucoup plus dans le relationnel lité de choisir son propre parcours au sein de
facilement, en ayant moins peur » (HR, phase l’entreprise : « A Décathlon, il y a cette notion
1). Les Z souhaitent participer aux décisions de parcours où tu n’es pas enfermé dans un
concernant les projets au sein de l’équipe. Pour métier. Des salariés commencent en magasin et
cela, ils valorisent le manager qui sait favoriser finissent en marque employeur par exemple. Il
la collaboration entre les membres, en permet- y a plein de possibilités différentes et on n’est
tant l’épanouissement personnel tout en relevant pas enfermé dans un parcours, on est maître de
des défis collectifs pour atteindre les objectifs son parcours. » (RH, phase 2). Cette volonté de
de l’équipe : « Aujourd’hui, quand je prends choisir son propre parcours pour renouveler le
des décisions qui impactent toute l’équipe, non spectre de compétences se développe avec l’ap-
pas un collaborateur individuellement, mais la parition des jeunes Z « slasheurs », qui cumulent
dynamique de l’équipe, je les prends en incluant plusieurs activités professionnelles et changent
mon équipe. » (Manager, Phase 1). fréquemment de missions : « Les Z sont des
slasheurs, ils ne voudront pas un job mais des
Trop souvent, en entreprise, on attend qu’un missions sur le court terme. Ils ont une curiosité
senior transmette ses compétences à un plus très développée. Je les imagine avec un job qui
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jeune, selon un processus de socialisation clas- leur est propre et des prestations en entreprise.
sique. Or, cette dynamique n’est plus suffisante. L’entreprise viendra chercher un talent à un
Il importe aujourd’hui de passer à la co-transmis- moment donné plutôt qu’intégrer le Z en per-
sion et donc au partage à proprement parler de manence. On serait en mode très agile, et les
compétences. Cette démarche de « reverse men- Z ne pourront pas trouver cette flexibilité dans
toring » sollicite les jeunes collaborateurs pour des entreprises classiques. En revanche, dans
apporter aux générations précédentes une nou- des start-ups ou des entreprises libérées comme
velle méthodologie de travail, un regard extérieur, Décathlon, ils pourront le faire. » (Manager,
et une ouverture vers de nouvelles techniques et phase 1). Dans un modèle de management agile
outils, comme le souligne ce manager : « J’avais tel que Décathlon, les entretiens font ressortir que
envie qu’ils m’apportent cette jeunesse, cette le droit à l’erreur, comme facteur d’apprentissage,
fraîcheur, cette différence par rapport à d’autres doit être développé pour favoriser la production
membres de l’équipe qui sont plus seniors, plus collective : « Chez Décathlon Exchange, là où il
experts, ils m’apportent une autre façon de voir y a de la formation, sur les escaliers c’est écrit
l’entreprise. » (Manager, phase 1), ou encore ce «fail, fail, fail better».» (Manager, phase 1). Dans
responsable des RH : « Le mentoring chez Décat, ce contexte, l’intrapreneuriat - processus qui se
c’est un accompagnement éclair-flash. Avoir un réalise dans l’entreprise dans laquelle l’individu
mentor, c’est avoir quelqu’un qui m’inspire, qui a est salarié - tient une place particulièrement

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Infidèles, zappeurs et slasheurs ? Les Z et l’émergence d’une nouvelle forme de fidélité employeur

importante chez les Z. L’intrapreneuriat répond la planète. Tout le monde mène des actions à
effectivement tant à leurs besoins d’épanouisse- droite à gauche. Pareil, avec Décat, on va tous
ment qu’aux besoins d’innovation et de progrès se retrouver pour aller marcher, courir, faire du
des entreprises, comme témoigne un responsable sport en ramassant des déchets. Ça aussi c’est
RH : « Le fait de devoir oser tout le temps, le quelque chose qui est fort. » (RH, phase 1). La
fait de tout le temps proposer. » (RH, Phase 1) ou crise sanitaire de la Covid-19 a joué un rôle d’ac-
encore un membre de la génération Z: « Avec célérateur dans le questionnement de ces jeunes
ce côté libéré tu peux entreprendre ce que tu face aux enjeux sociétaux et environnementaux,
veux. Moi, on m’a dit la première fois « tu as le en créant un sentiment d’urgence très puissant,
droit à l’erreur, tu as le droit à l’essai ». C’est jusqu’à consolider leur position militante: « Chez
une entreprise où tu peux entreprendre, évoluer, Décathlon, nous on a eu cette chance qu’il y ait
t’épanouir, tu vas vivre ton « toi » dans l’entre- eu un besoin sur les masques par rapport au
prise. » (Gen Z, Phase 2). personnel aide-soignant. On a transformé des
masques de plongée en masques de protection
pour répondre à ce besoin d’utilité publique.
3.5. La dimension éthique C’est bien que Decathlon fasse vivre des spor-
tifs mais quand la société a besoin d’une entre-
L’authenticité et l’exemplarité sont des valeurs prise, on a su répondre et c’est une fierté qui
qui ont émergé des entretiens et qui sont por- donne l’envie d’y rester. La nouvelle Génération
tées par les jeunes collaborateurs aujourd’hui a besoin de se sentir fière de son entreprise, et
lorsqu’ils rejoignent une entreprise. « C’est de se sentir utile pour les autres. Il y a 3 ans on
l’authenticité qui fait que les Z vont rester dans n’avait pas tous ces projets engageants pour des
l’entreprise. Ils ont besoin d’être en adéquation causes sociales, environnementales. La crise de
avec les valeurs de l’entreprise, la générosité, la Covid-19 a joué un rôle d’accélérateur : il
le partage, la responsabilité. Si les valeurs faut être utile aux humains et à leur planète et
intrinsèques portées par les jeunes sont les on incite les jeunes à nous rejoindre » (GRH,
mêmes que celles de l’entreprise, le chemin phase 2).
sera pérenne » (Manager, phase 2). Le besoin La figure 1 représente de façon synthétique
d’utilité sociale émerge aussi comme un critère l’ensemble des dimensions de la fidélité des
auquel les jeunes sont attachés qui pèse de façon Z qui ont émergé de l’analyse de contenu. Ce
déterminante quand vient le moment de choisir cadre d’analyse, développé à partir de notre
s’ils restent ou non dans l’entreprise : « C’est le étude de cas, présente cinq dimensions de la
côté humain qui est hyper fort chez Décathlon, fidélité – émotionnelle, sociale, collaborative,
on te fait grandir humainement et tu as envie de intrapreneuriale et éthique, regroupées selon les
rester » (Manager, phase 1). Les Z recherchent traits de personnalité les plus significatifs de la
des missions en entreprise dans lesquelles ils Génération Z – authenticité et affectivité, bien-
peuvent s’engager pour défendre des causes être et plaisir, création et engagement et ultra-
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environnementales et/ou sociétales – « Ce week- connexion et partage (Gentina & Delécluse,
end, c’est la journée mondiale du nettoyage de 2018).

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Infidèles, zappeurs et slasheurs ? Les Z et l’émergence d’une nouvelle forme de fidélité employeur

Figure 1 : Synthèse des principaux thèmes de l’analyse.


La fidélité des Z en entreprise

4. DISCUSSION des dimensions interreliées, à savoir une dimen-


sion émotionnelle, une dimension sociale et une
dimension collaborative, ainsi qu’une dimen-
sion éthique et une dimension intrapreneuriale
4.1. Une conception renouvelée de la fidélité (Tableau 1).
à l’entreprise La dimension affective a depuis toujours été
reconnue dans la recherche en GRH comme une
Malgré les caractéristiques des jeunes issus part importante de la fidélité et de l’implication
de la génération Z, souvent qualifiés d’infidèles, des salariés (Becker & Billings, 1993; Lodhal
de « zappeurs » et de « slasheurs », la question & Kejner, 1965 ; Buchanan, 1974), reflétant un
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de la fidélité à l’entreprise se pose toujours, plus attachement et une identification à l’organisation,
que jamais même, mais en des termes renouve- et s’appuyant sur la recherche de sens et l’im-
lés. Comme en témoignent les résultats de l’étude portance des relations au travail. La dimension
empirique, l’arrivée des Z sur le marché du tra- affective de la fidélité prend une place beaucoup
vail fait évoluer le concept de fidélité à l’entre- plus prépondérante qu’autrefois, et revêt même
prise, a fortiori dans le contexte de crise sanitaire un aspect émotionnel encore plus fort. Les tra-
actuel, amenant à une nouvelle conceptualisation vaux récents sur les moins de 30 ans (génération
de cette problématique en GRH. Y) avaient déjà mis en évidence l’aspiration des
jeunes salariés à un meilleur équilibre de vie
Alors que la fidélité à l’entreprise s’est ainsi que l’importance des contacts et de l’am-
longtemps exprimée à travers trois principales biance au travail (Bender, 2010), dans la mesure
caractéristiques auprès des générations passées où le travail a commencé à être considéré par
(baby-boomers et génération X notamment), à les jeunes comme un bien précieux mais prenant
savoir la fidélité affective, la fidélité rationnelle, place dans une conception plus large de l’exis-
et la fidélité normative, l’étude de cas met en tence (Bender, 2010, p.41 ; Albert & Bournois,
évidence l’émergence d’une conception pluridi- 2005). Nos résultats portant sur la génération Z
mensionnelle de la fidélité chez les jeunes. Cette confirment et renforcent largement cette ten-
fidélité est plus complexe, en ce qu’elle comporte dance, en mettant l’accent sur l’aspect émotionnel

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Infidèles, zappeurs et slasheurs ? Les Z et l’émergence d’une nouvelle forme de fidélité employeur

de la relation au travail, à travers la recherche et Y aspiraient encore récemment à mener une car-
la co-création d’une « atmosphère » de vie, voire rière à l’international, un retour en arrière semble
de jeu, de confiance, de bonheur, de plaisir, et caractériser les Z, plus soucieux de tisser des
d’épanouissement personnel au travail, et dans relations de proximité, localement ancrées avec
la vie. Les Z ne désirent plus sacrifier leur vie leur tribu (collègues, amis, famille) et de vivre
au travail, comme les Y (Dejoux & Wechtler, une expérience avec elle, l’international étant
2011), mais souhaitent avant tout réussir leur vie quant à lui permis et vécu à travers la connexion
dans sa globalité, ce qui va de pair avec la néces- digitale.
sité d’être heureux au travail. L’équilibre entre Enfin, la dimension normative de la fidé-
vie professionnelle et vie personnelle tient une lité classique, reposant sur la conscience pro-
place primordiale dans cette conception renouve- fessionnelle du salarié, une attitude de loyauté
lée de la fidélité chez les Z, plus que toute autre voire une perception d’obligation morale, a elle
dimension. aussi beaucoup évolué avec l’arrivée des Z sur
Par ailleurs, la dimension rationnelle de la le marché du travail, et ne semble plus compter
fidélité traditionnelle, liée à un attachement autant que pour leurs aînés. Les Z restent moins
calculé fondé sur la recherche de la sécurité dans l’entreprise par obligation, par respect de
de l’emploi et financière (Bentein et al., 2004 ; normes sociales et de régularités comportemen-
Luchak, 2003), semble beaucoup moins pré- tales, que parce qu’ils développent une éthique à
sente chez les Z. Bien que l’aspect salarial soit la fois professionnelle et sociétale, qui passe par
mentionné par certains comme une condition la recherche d’authenticité, l’adéquation entre
nécessaire, mais loin d’être suffisante, de leur les valeurs de l’entreprise et celles des salariés,
fidélité à l’entreprise, l’aspect salarial n’est plus et la perception d’un sentiment d’utilité sociale
une variable primordiale pour la majorité d’entre (dimension éthique). Plutôt que de suivre un
eux. Paradoxalement, alors que la génération pré- parcours tout tracé, une carrière prédétermi-
cédente Y (née entre 1980 et fin des années 1990) née, visant à ne pas sortir du chemin prescrit
est souvent considérée comme plus individualiste par l’organisation et amenant le salarié à être
(Giraud et al., 2012), c’est une fidélité beaucoup spectateur de sa fidélité (dans une vision très
plus sociale et collaborative qui caractérise les Z passive, subie, de cette dernière), les Z semblent
par rapport à leurs aînés. Ayant intégré le contexte beaucoup plus acteurs de leurs parcours et de
d’incertitude, de risque (Bender, 2010), et d’in- leurs missions (selon une vision beaucoup plus
sécurité en matière d’emploi (Chauvel, 2006), active, choisie, de leur fidélité). Les recherches
les Z semblent délaisser une vision rationnelle, en GRH ont mis en évidence, récemment, à quel
calculée, très individualiste et auto-centrée de point les jeunes ont été amenés à gérer progres-
la fidélité pour lui préférer une vision beaucoup sivement leur propre parcours professionnel et
plus sociale et collaborative. Le salaire est certes leur carrière sur un marché de l’emploi précaire
nécessaire, mais c’est l’équipe, la tribu, la com- (Giraud, 2012). Confortant cette tendance, nos
munauté, le lien social qui priment (dimension résultats mettent en exergue que la fidélité des
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sociale). De même, c’est la volonté de construire Z passe par la co-création, la prise d’initiatives
quelque chose ensemble, de vivre et de partager et de risques au sein de leur entreprise, le sens
une expérience, qui est au cœur de la fidélité des du challenge et des responsabilités allant de pair
Z à l’organisation (dimension collaborative). En avec le droit à l’erreur, ainsi qu’une capacité à
témoigne, par exemple, le changement de regard se former et à renouveler leurs compétences en
des Z par rapport à l’international : alors que les permanence (dimension intrapreneuriale).

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Infidèles, zappeurs et slasheurs ? Les Z et l’émergence d’une nouvelle forme de fidélité employeur

Tableau 1 : L’évolution de la fidélité des salariés à l’entreprise chez les jeunes générations

Fidélité traditionnelle (Générations passées) Fidélité pluridimensionnelle (Génération Z)

- Affective - Emotionnelle
Engagement affectif Recherche d’un esprit de cocooning
Attachement à l’organisation Co-création d’une atmosphère de vie
Identification à l’entreprise Confiance avec les pairs et le management.
Fidélité « corporate » (fierté d’appartenance à l’entreprise, Aspect ludique.
plus qu’aux pairs) Recherche de bonheur dans le travail, comme condition
Reconnaissance de la réussite dans la vie.
Besoin de sens et de légitimité Volonté d’être heureux au travail (dimension positive de
Fondée sur l’intérêt du travail, le contenu du travail la fidélité)
Volonté d’instaurer des relations durables Recherche d’équilibre de vie (place primordiale).
Qualité des relations professionnelles
Perception d’équité (égalité de traitement)
Environnement de travail approprié avec des processus
d’organisation équitables
Reconnaissance progressive des contacts et de
l’ambiance, l’aspiration à un équilibre de vie

- Rationnelle - Sociale
Implication calculée, utile, individuelle Le salaire est nécessaire mais c’est la communauté qui
Calcul coûts-bénéfices à rester ou quitter l’entreprise prime.
Evaluation des coûts associés à un départ éventuel Esprit d’équipe
Fidélité liée à la peur de perdre son emploi (dimension Besoin de lien social
négative de la fidélité, par défaut) Tribu
Aspect sécuritaire (importance du rapport salarial, Fierté d’appartenance à la communauté
recherche de la sécurité de l’emploi et financière)
Récompenses matérielles, en réponse à la performance - Collaborative
individuelle dans la tâche. Vivre une expérience ensemble
Fidélité autocentrée. Partage de compétences (digital natives vs. autres
générations)
Co-construction et partage d’une expérience.

- Normative - Ethique
Conscience professionnelle Recherche d’authenticité
Attitude de loyauté Adéquation entre les valeurs de l’entreprise et celles des
Obligation morale à l’égard de l’entreprise jeunes
Inscription dans des schémas traditionnels normatifs de Sentiment d’utilité sociale
comportements
Ethique professionnelle - Intrapreneuriale
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Parcours tout tracé, carrière prédéterminée Etre acteur de son parcours, de ses missions
Vision passive de la fidélité, le salarié comme spectateur Se former et à se renouveler ses compétences
de sa fidélité (volonté de ne pas sortir du chemin prescrit Co-créer
par l’organisation). Favoriser la prise d’initiative, la prise de risque et le sens
des responsabilités
Droit à l’erreur
Le salarié acteur de sa fidélité

4.2. Comment repenser les politiques de 2009), a fortiori en temps de crise (Giraud et al.,
fidélisation dans ce contexte ? 2012). En dépit du contexte (modernité liquide,
morosité économique, situation de crise sanitaire)
Dans un contexte de volatilité des jeunes et des caractéristiques des jeunes de la génération
talents, attirer et retenir les Z, dotés de com- Z (qualifiés d’infidèles et de zappeurs), le concept
pétences spécifiques et rares sur le marché du de « fidélisation » a bel et bien toujours un sens
travail (digitales, collectives, entrepreneuriales), pour les organisations.
semble devenir un défi stratégique pour les entre- Si la fidélité porte sur « les conduites indi-
prises en concurrence (Trabelsi & Le Berre, viduelles en situation professionnelle », « la

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fidélisation désigne l’ensemble des « disposi- accord avec celles des jeunes générations ; les
tifs de management » mobilisés par l’entreprise efforts des entreprises afin de développer des
« pour obtenir la fidélité de ses salariés » (Paillé, politiques de responsabilité sociétale (servant
2004, p.5). Alors que la fidélisation apparait par exemple la protection de l’environnement
comme un thème important de la GRH (Cerdin ou des causes humanitaires) vont en ce sens.
et al., 2005, p. 1), peu d’entreprises semblent – Création et engagement : le troisième levier
conduire des politiques concrètes de fidélisa- appelle à encourager le sens de la création
tion, adaptées notamment aux spécificités de la et de l’engagement des salariés, à travers
génération Z, qui constitueront pourtant 30% de l’adoption de méthodes de travail plus agiles
la population mondiale en 2025 (Prudhomme, et flexibles (« design thinking », « learning
2019). by doing », approche « test and learn »), ini-
Dès lors, les résultats de notre recherche nous tiant de nouvelles façons de collaborer et de
permettent de spécifier quatre leviers principaux travailler, sources d’engagement de la part des
à mobiliser dans les politiques de fidélisation des collaborateurs. Ces méthodes s’accompagnent
jeunes à l’entreprise présentés en figure 1, per- de logiques de « co-création » avec toutes les
mettant d’adresser les caractéristiques clés de la parties prenantes (clients, utilisateurs finaux,
génération Z et leur nouvelle relation au travail, partenaires, employés), et d’empowerment
au carrefour des nouvelles dimensions de la fidé- des salariés, comme en témoigne le déve-
lité établies plus haut : loppement de l’intrapreneuriat au sein même
– Bien-être et plaisir : le premier levier invite de l’organisation (Gentina, 2018). Certains
les entreprises à développer le bien-être, le grands groupes ont même baptisé « start-up
plaisir de leurs salariés, et le partage d’émo- studios » leurs programmes d’intrapreneuriat.
tions à travers par exemple la création d’un A travers ce système, l’entreprise positionne
environnement conçu non seulement comme ses jeunes salariés comme des intrapreneurs,
un lieu de travail mais aussi comme un lieu de acteurs clés du changement, et leur donne les
vie (tels les espaces collaboratifs de travail, à moyens d’inventer l’entreprise de demain,
l’instar des espaces de coworking). Répondre mais sous une forme plus souple et choisie ;
aux nouvelles attentes des jeunes (autonomie l’intrapreneuriat répond ainsi à leurs aspira-
et flexibilité) passe également par une meil- tions et leur permet d’affirmer leur créativité
leure prise en compte de leurs préférences sans risquer de s’endetter outre mesure, à titre
en matière d’horaires de travail (à travers le personnel.
développement des politiques de ‘flexitime’ – Ultra connexion et partage : enfin, le qua-
par exemple, qui donnent aux employés la trième levier doit chercher à favoriser l’ultra
possibilité de travailler selon les heures de connexion et le partage des salariés, et ce à
leur choix, ou du travail hybride – mêlant travers une adaptation de l’espace de travail
travail en présentiel et en télétravail - sur des à la fois numérique et présentiel des salariés,
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modalités choisies par les salariés en accord et une amélioration de leur expérience digi-
avec leur entreprise). tale, vers plus de simplicité et d’efficacité. Il
– Authenticité et affectivité : étroitement lié convient ici pour les organisations de pouvoir
au premier, le deuxième levier doit viser la concilier espaces de travail numérique et phy-
recherche d’authenticité et d’affectivité au tra- sique, à des fins de « sérendipité » et de « col-
vail. Les développements précédents doivent laboration non planifiée », à la fois hors ligne
par exemple s’accompagner d’une évolution et en ligne. Les jeunes recrues souhaitent pou-
nécessaire des modes de management, non voir travailler à distance tout en continuant à
plus basés sur le temps de présence, mais sur échanger avec leurs pairs, au moyen d’outils
la confiance et l’atteinte d’objectifs réalisables intuitifs, tels que les technologies collabo-
fixés en accord avec le salarié. Cela va de ratives et les réseaux sociaux d’entreprise,
pair avec une évolution du rôle du manager, leur permettant d’être à la fois productifs et
appelé à délaisser les rôles de « supervision autonomes dans l’accomplissement de leurs
et de contrôle » pour privilégier ceux d’ac- tâches. Outre l’espace de travail, la « gami-
compagnement, de soutien et de guide, visant fication » est une solution pour favoriser la
à faire grandir les Z dans l’entreprise. Ce rétention des jeunes talents, en leur propo-
levier passe également par le développement sant de relever des défis par équipe et des
et le partage de valeurs organisationnelles en actions communes permettant de remporter

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Infidèles, zappeurs et slasheurs ? Les Z et l’émergence d’une nouvelle forme de fidélité employeur

des épreuves dans un environnement totale- qualifiés de digital natives, « hyperconnectés »,


ment digitalisé (Rochas, 2020). extrêmement à l’aise avec la technologie, le
contexte actuel de travail à distance montre toute
l’importance pour les jeunes de maintenir du lien
social physique, réel, en face-à-face, avec leur
5. CONCLUSION
communauté (Zohin, 2020). Plus que jamais,
La littérature en GRH traite fréquemment de les entreprises devront réfléchir à de nouvelles
l’intention de quitter ou de l’implication organisa- façons de favoriser ce lien et l’esprit d’équipe, qui
tionnelle, mais la question spécifique de la fidé- sont capitales pour fidéliser les jeunes, appelant
lité est rarement abordée. Sur les vingt dernières par ailleurs à de nouvelles recherches dans ce
années, seuls 37 articles publiés dans la revue de domaine.
Gestion des Ressources Humaines portent sur le
concept de fidélité, et aucun n’a traité plus spé-
cifiquement de la fidélité de la Génération Z à BIBLIOGRAPHIE
l’employeur. Pourtant, fidéliser la nouvelle géné-
ration est stratégique, puisqu’elle est un élément Albert, E. & Bournois, F. (2005). Pourquoi j’irais
clé du renouvellement des compétences au sein travailler. Paris : Editions d’Organisation.
des organisations et notamment un moteur de la
transformation digitale des entreprises, qui s’est Arnaud, B. (2019). Les organisations appre-
accélérée dans le contexte de la Covid-19. nantes. In Frimousse S. (Ed.). L’apprenance
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A travers une approche pluridisciplinaire, EMS Editions.
mêlant les apports de la recherche en marketing
sur la fidélité du consommateur et ceux de la Allen, N. J., & Meyer, J.P. (1991). A three com-
recherche en RH sur la fidélité à l’entreprise, ponent conceptualization of organizational
notre recherche contribue à faire émerger une commitment. Human Resource Management
nouvelle conception de la fidélité. D’une fidé- Review, 1(1), 61–89.
lité traditionnellement conçue comme affective, Arnould, E. J., Price, L. L., & Malshe, A. (2006).
rationnelle et normative, nos résultats spécifient Toward a cultural resource-based theory
les contours d’une nouvelle forme de fidélité of the customer. In Lush, R. F. & Vargo,
auprès de la Génération Z, en dégageant cinq L.S. (Eds.). The New Dominant Logic in
dimensions : émotionnelle, sociale, collaborative, Marketing (320-333). Taylor & Francis Group.
intrapreneuriale et éthique, que l’on retrouve lors
des deux phases de l’étude, avant (2018) et pen- Aroles, J., Mitev, N., & de Vaujany, F. X. (2019).
dant la crise de la Covid-19 (2020). Mapping themes in the study of new work
practices. New Technology, Work and
Notre recherche à caractère exploratoire pré- Employment, 34(3), 285-299.
sente des limites. La première limite concerne
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la généralisation des résultats. En effet, notre Bauman, Z. (20 0 0). Liquid Modernit y.
recherche pourrait être étendue à d’autres études Cambridge: Polity.
de cas au sein d’entreprises appartenant à d’autres Becker, T. E., & Billings, R. S. (1993). Profiles
secteurs d’activité, et ayant des modes de mana- of commitment: An empirical test. Journal
gement et des méthodes de travail différents. De of Organizational Behavior, 14(2), 177–190.
plus, bien que Décathlon soit une entreprise inter- Bendapudi N., & Berry L.L. (1997). Customers’
nationale, notre étude s’est limitée au contexte motivations for maintaining relationships
français. Dès lors, il serait intéressant de mener
with service providers. Journal of Retailing,
d’autres études dans un contexte international.
73(1), 15-37.
En dépit de ces limites, cette recherche consti-
Bender, A. F. (2010). Formation et évolution
tue un premier pas vers la compréhension de la
du contrat psychologique parmi des jeunes
fidélité des jeunes à l’entreprise. Cette probléma-
tique sera d’autant plus cruciale dans les années embauchés d’une société de services. Revue de
à venir que les entreprises seront nécessaire- gestion des ressources humaines, 3(77), 38-55.
ment amenées à adopter de nouvelles méthodes Bentein, K., Vandenberghe, C., & Dulac, T.
de travail, telles que le télétravail, comme en (2004). Engagement organisationnel de conti-
témoigne le contexte actuel de crise sanitaire. nuité et indicateurs d’efficacité au travail.
Paradoxalement, alors que les jeunes sont Congrès de l’AGRH.

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