Aticle PR ELCADI Revue Menara Des Etudes Juridiques Et Administratives Sept 2014
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Aticle PR ELCADI Revue Menara Des Etudes Juridiques Et Administratives Sept 2014
Etudes et Recherches
العمل القضائي
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Revue Almanara pour les études juridiques et Administratives N 7 /2014______________________________________________________
LATIFA EL CADI
Professeur Habilité-FPJ
Introduction
L’expérience du Maroc en matière de régionalisation est assez typique en ce sens qu’elle est
passée par plusieurs phases. En effet, en 1956, le Maroc nouvellement indépendant devait non
seulement récupérer son territoire mais aussi et surtout le maitriser. Il a donc fallu mettre en place
une politique de décentralisation qui n’irait pas à l’encontre des structures traditionnelles locales.
Sur le plan historique, le Maroc a toujours été un Etat unitaire fortement centralisé, mais qui
a su laisser une marge de manœuvre aux structures locales comme les tribus, les jmaas ou les
confréries religieuses. Malgré cette tradition centralisatrice, le Maroc a dés l’indépendance en 1956
ouvert le chantier de la modernisation administrative dans lequel la décentralisation, la
déconcentration et la régionalisation occupent une place fondamentale.
La décentralisation est définie comme un système d’organisation dans lequel l’Etat transfère
des compétences au profit de collectivités locales élues, dotées de la personnalité morale et de
l’autonomie financière. Toutefois, la décentralisation se caractérise, simultanément par l’existence
d’un contrôle de tutelle des autorités supérieures sur les institutions décentralisées. Il s’agit, selon la
Constitution, de la région, de la préfecture, de la province et de la commune.
D’un autre côté, on peut définir la régionalisation comme une politique de l’Etat qui tend à
se décharger de certaines compétences au profit d’entités locales que sont les régions. Le but est de
permettre aux populations locales de gérer et d’administrer leurs propres affaires, et de bénéficier de
leurs propres ressources sous le contrôle de l’Etat. Ici nous partons du principe que ces populations
locales connaissent mieux leurs affaires et surtout leurs problèmes et par conséquent elles sont
mieux placées pour les gérer elles mêmes.
La régionalisation peut être considérée sur un double niveau : un niveau politique et un
niveau fonctionnel ou économique. La régionalisation est politique lorsqu’elle reproduit sur le plan
régional des structures identiques à celles de l’Etat (parlement, exécutif, tribunaux). Les régions
jouissent alors de compétences larges qui se superposent progressivement à l’ordre étatique jusqu’à
parfois le supplanter. Le danger de cette forme de régionalisation parait évident dans la mesure où, à
terme, elle menace la cohésion de l’Etat et parfois même son intégrité. On trouve ce type de
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régionalisation politique en Italie, en Espagne ou encore en Belgique. Nous connaissons tous les
tentatives séparatistes ou indépendantistes de certaines régions en Espagne comme la Catalogne ou
la région Basque.
Un autre type de régionalisation peut aussi être envisagé d’un point de vue fonctionnel ou
économique. Ce type de régionalisation donne aux régions la possibilité d’exercer certaines fonctions et
de participer au développement économique et social des populations locales sans que cela n’empiète
sur les compétences de l’Etat. C’est ce dernier modèle auquel aspire la régionalisation marocaine.
A cet égard, l’intérêt d’un tel sujet n’est plus à démontrer dans la mesure où la régionalisation
est un chantier toujours ouvert ce qui montre sa grande actualité pour notre pays qui est engagé sur
la voie de la régionalisation avancée. En outre, la régionalisation avancée fait partie des
préoccupations majeures des pouvoirs publics dans la perspective du règlement de l’affaire du
Sahara marocain. Mieux, la régionalisation peut être considérée comme un levier du développement
local, et de bonne gouvernance notamment au niveau de la nouvelle recomposition territoriale.
Ce sont ces différents éléments, qui constitueront le fond de notre contribution.
I- Les grandes lignes de la régionalisation au Maroc
Au Maroc, le processus de la régionalisation a été entamé à partir de 1971 avec la création
des sept régions économiques. Allant de pair avec la décentralisation administrative, ce processus a
été renforcé à partir de 1992 (lors de la révision constitutionnelle) avec la consécration de la région
comme collectivité locale avec une personnalité juridique.
Nous pouvons donc dire que la régionalisation au Maroc a connu une grande évolution
depuis sa mise en place. C’est donc un processus progressif qui s’est effectué par étapes.
A- La première phase : la mise en place de la régionalisation.
Pendant le protectorat français sur le Maroc, la régionalisation répondait à des impératifs de
sécurisation et de planification tendant à maîtriser l’espace hostile à la pénétration coloniale. Les
préoccupations sécuritaires ont poussé alors les autorités françaises à diviser le territoire marocain
en trois régions militaires (Fès, Meknès, Marrakech) et quatre régions civiles (Rabat, Chaouia, Gharb,
Oujda) de nature à permettre une intervention rapide et efficace.
Au lendemain de l’indépendance, le gouvernement marocain a vite pris conscience de la
gravité du problème et à partir de 1959 a jeté les fondements d’une nouvelle organisation
administrative qui repose sur les communes, sur les préfectures et sur les provinces. Pendant cette
période décisive marquée par le lancement des premiers jalons de la décentralisation, de nombreux
textes législatifs et réglementaires ont été adoptés. Parmi ces textes fondateurs, on peut citer le dahir
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comme la cellule de base. En effet, la charte communale a attribué à la commune une compétence
générale en matière de gestion des affaires locales. En plus de ses prérogatives économiques, elle est
chargée de l’ensemble des aspects ayant un rapport avec le cadre de vie des populations. A cet égard,
la commune assure la production des équipements et des infrastructures de base nécessaires à la
promotion de la vie locale et d’initier les bases du développement de son territoire.
Cependant, si le dahir de 16 juin 1971 a reconnu la région comme entité économique et si la
charte communale de septembre 1976 a accordé à la commune des compétences larges en matière
de gestion des affaires locales, il n’en reste pas moins que de nombreux dysfonctionnements ont été
constatés. En effet, les retombées économiques et sociales ont été très modestes et les disparités
régionales sont demeurées très vives.
Cette situation est due à l’absence d’un échelon institutionnel intermédiaire entre le niveau
national et le niveau local.
Cette lacune va être corrigée par l’article 100 de la constitution d’octobre 1996 qui, pour la
première fois, a reconnu la région comme collectivité locale. Cette proclamation a été suivie par le
dahir du 2 avril 1997 qui a défini le cadre institutionnel, structurel et juridique de la région. Ce Dahir
et le décret du 17 août 1997 ont tracé le découpage du territoire national en seize régions1 dotées de
la personnalité morale et de l’autonomie financière, ainsi que d’importantes prérogatives,
susceptibles d’en faire un instrument efficient de développement régional et local.
C’est ainsi que pour la première fois dans l’histoire institutionnelle du Maroc, la région a été
promue au rang de collectivité locale au même titre que la commune, la préfecture et la province.
Cette nouvelle situation va incontestablement avoir des répercussions positives sur le
développement local et sur l’efficience de l’action locale.
Toutefois, il a fallu attendre l’année 20022 pour reconnaître à la région un rôle de premier
plan dans le développement économique et social local. Et c’est dans cette optique que s’inscrit
1
Décret n° 2-97-246 du 12 rabii II 1418 (17 août 1997) fixant le nombre des régions. Ces 16 régions sont : - Oued-Ed-
Dahab-Lagouira ; Grand-Casablanca ; Laayoune-Boujdour-Sakia-El-Hamra ; Guelmim-Es-Semara ;Gharb-Chrarda-
Beni-Hssen; Marrakech-Tensift-Al Haouz ; Oriental ; Rabat-Sale-Zemmour-Zaer ; Doukkala -Abda ; Chaouia-
Ouardigha ; Fes-Boulemane ; Meknes-Tafilalt ;Tadla-Azilal; Tanger-Tetouan ; Taza-Al Hoceima-Taounate ; Souss-
Massa-Draa.
2- Loi n° 78-00 portant charte communale promulguée par le Dahir n°1-02-297 du 25 rejeb 1423 (3 octobre 2002) (B.O.
N° 5058 – 16 ramadan 1423 (21-11-2002)), telle qu’elle a été modifiée et complétée par la loi n°01-03 promulguée
par le Dahir n°1-03-82 du 20 moharrem 1424 (24 mars 2003) (B.O. N° 5096 – 30 moharrem 1424 (3-4-2003)) et la
loi n°17-08 promulguée par le Dahir n° 1-08-153 du 22 safar 1430 (18 février 2009) (B.O. N° 5714 – 7 rabii I 1430 (5-
3-2009)).
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l’action des seize régions économiques du royaume. D’un autre côté, la nouvelle charte communale
de 2002 a élargi de manière substantielle les attributions des conseils communaux, établi un statut
pour les élus locaux et instauré un statut spécial pour les grandes agglomérations.
En outre, la Constitution de juillet 2011 a consacré le Titre IX aux régions et aux collectivités
territoriales et a défini les nouvelles compétences dévolues aux régions et autres collectivités. Elle
dispose dans son article 135 que «les collectivités territoriales du Royaume sont les régions, les
préfectures, les provinces et les communes. Elles constituent des personnes morales de droit public
et gèrent démocratiquement leurs affaires ». C’est donc une autre consécration constitutionnelle qui
reconnait solennellement la région comme collectivité locale, avec toutes les conséquences qui en
découlent. Par ailleurs, l’article 137 de la constitution précise le rôle des régions et des autres
collectivités territoriales qui « participent à la mise en œuvre de la politique générale de l’Etat et à
l’élaboration des politiques territoriales à travers leurs représentants à la chambre des conseillers ».
Le Rapport1 du Cinquantenaire de l’Indépendance, précise que l’objectif de la réorganisation
de la région est « de constituer des espaces de développement économique et social homogènes
dont la composition dépasse le découpage exclusivement géographique effectué dans les années
1930 pour intégrer des données humaines, économiques et naturelles ».
Par conséquent, la région occupe une place prépondérante dans le système marocain de
décentralisation. En fait, la décentralisation au Maroc se décline en 3 échelons : un échelon inférieur
constitué par la commune. Elle constitue la cellule de base de la décentralisation, et assure les
services de proximité avec les citoyens. La préfecture ou la province constitue le deuxième niveau
de décentralisation territoriale. Son statut hybride à la fois déconcentré et décentralisé lui confère un
rôle de coordination des actions des entités qui lui sont rattachées. Enfin, la région forme un 3ème
niveau. Elle est gérée par un conseil régional qui règle par ses délibérations les affaires de la région,
et, à cet effet, décide des mesures à prendre pour lui assurer son développement économique, social
et culturel, et ce, dans le respect des compétences dévolues aux autres collectivités locales. Ainsi, en
matière de planification économique et spatiale, il élabore le plan de développement économique et
social de la région et le schéma régional d'aménagement du territoire, conformément aux
orientations et objectifs retenus au niveau national. Il engage les actions nécessaires à la promotion
des investissements privés et encourage leur réalisation, notamment par l'implantation et
l'organisation de zones industrielles et de zones d'activités économiques.
1
Le Maroc Possible : une offre de débat pour une ambition collective : Rapport du Cinquantenaire ; Ed Maghrébines,
2006, P 83.
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Entre ces trois niveaux existent des liens de coopération et de coordination très forts à
travers les instruments de planification économique et spatiale mais aucune collectivité territoriale
n’exerce un contrôle de tutelle sur l’autre (article 143). Ces dispositions montrent de manière claire
que la région est désormais un acteur incontournable dans l’édifice institutionnel de l’Etat et qu’elle
est appelée à jouer d’autres rôles à l’avenir. En effet, la région dispose actuellement de compétences
étendues qui vont certainement s’élargir davantage avec le projet de régionalisation avancée.
II- Un projet d’avenir : la régionalisation avancée.
La régionalisation avancée peut être envisagée comme l’aboutissement d’un long processus
de décentralisation initié au Maroc au lendemain de l’indépendance, et partant constitue un choix
stratégique irréversible dans les modes de gouvernance territoriale au Maroc. C’est un vaste chantier
entamé par l’Etat en vue d’activer le développement local. L’intérêt majeur de ce projet réside dans le
fait que c’est le Roi lui-même qui lui a donné le coup d’envoi. En effet, dans son discours du 3 janvier
2010, le Roi Mohammed VI a annoncé la mise en place d’une Commission Consultative de la
Régionalisation (CCR) dans le but de donner un cadre institutionnel aux réflexions et aux débats
autour de ce grand projet. Dans ce discours, le Roi a tenu à préciser que « ce projet n’est pas un
simple réaménagement territorial ou administratif, mais qu’il s’agit plutôt d’un véritable chantier de
réforme visant à rénover et à moderniser l’organisation territoriale de l’Etat ». La CCR a présenté ses
conclusions au Roi en mars 2011. Avec le lancement de ce grand chantier de régionalisation avancée,
le Maroc franchit un pas historique sur la voie des réformes et de la modernisation de son
architecture administrative et territoriale. Elle a également pour objectif majeur le développement
intégré et durable sur les plans économique, social, culturel et environnemental.
Ce paragraphe sera axé sur les éléments suivants : d’une part ; en quoi consiste la
régionalisation avancée ? Et d’autre part, quels sont les principes de base de ce projet ?
A- Le contenu de la régionalisation avancée
A un certain moment, le Maroc a envisagé de prendre exemple sur certaines expériences
européennes comme l’Allemagne ou la France. Mais finalement, il a opté pour un modèle
typiquement marocain. Ce modèle national de la régionalisation avancée devrait être issu des
spécificités marocaines, comprenant toutes les régions du Royaume, dont au premier chef les
provinces du Sud et reposer sur des atouts essentiels comme la préservation de l’intégrité
territoriale, et la monarchie, garante de l'unité et de la pérennité de la nation. C’est un modèle
qui doit être proche des préoccupations et des attentes des populations en termes de
démocratie et de développement local intégré. Ce projet doit aussi prendre en considération les
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rationalisation de la gestion des ressources hydrauliques au niveau de la région et à cet effet, il est
associé à l'élaboration de la politique de l'eau au niveau national. Il adopte aussi les mesures
nécessaires à la promotion des activités socioculturelles et engage des actions en vue de promouvoir
et de soutenir toute action de solidarité sociale et toute mesure à caractère caritatif.
La loi1 relative à la région fixe un domaine de compétences de l'Etat susceptible de faire
l'objet de transfert à la région ; en l'occurrence la réalisation et l'entretien des hôpitaux, des lycées et
des établissements universitaires et l'attribution de bourses d'études en fonction des orientations
nationales retenues par l'Etat en la matière ; la formation des agents et cadres des collectivités locales
; les équipements d'intérêt régional.
Les régions peuvent, en outre, entreprendre toute action nécessaire au développement
régional, en collaboration avec l'Etat ou avec toute autre personne morale de droit public, dans des
conditions fixées par des conventions. L'assemblée régionale propose à l'administration et aux
autres personnes morales de droit public, les actions à entreprendre et donne son avis sur les
politiques d'aménagement du territoire national et d'urbanisme et sur la politique d'implantation
dans la région, des établissements universitaires et des hôpitaux.
D’un autre côté, et pour plus d’efficacité et de cohérence, le projet de régionalisation avancée
propose un nouveau découpage du territoire. C’est ainsi qu’il prévoit la répartition du pays en douze
régions au lieu de seize actuellement, soit une réduction de 25%. Cette nouvelle configuration
régionale a été faite selon certains critères basés entre autres sur les principes d’efficience,
d’homogénéité, d’équilibre, et de proximité. Dans cette logique, la CCR a suggéré la création des
douze régions suivantes : Tanger-Tétouan ; Oriental et Rif ; Fès-Meknès ; Rabat-Salé-Kénitra ; Béni
Mellal-Khénifra ; Casablanca-Settat ; Marrakech-Safi ; Drâa-Tafilalet ; Souss-Massa ; Guelmim-Oued
Noun ; Laâyoune-Saguia al Hamra ; et Dakhla-Oued ed Dahab.
Cependant, si la régionalisation avancée s’accompagnera inéluctablement d’une
recomposition territoriale profonde, il apparait clairement que certaines régions vont tout
simplement disparaître. C’est le cas de la région Doukkala-Abda qui va disparaitre en tant qu’entité
régionale car Abda va être rattaché à Marrakech-Safi, et Doukkala fera partie du Grand-Casablanca.
1
Loi n° 47-96 relative à l'organisation de la région promulguée par le Dahir n°1-97-84 du 23 kaada 1417 (2 février 1997)
(B.O. N°4470 du 3 avril 1997).
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un levier efficace susceptible de contribuer au développement économique local. Encore faut-il lui
assurer les fondements de sa réussite.
B- Pour une bonne gouvernance de la région
La gouvernance peut être définie comme l’ensemble «des modalités de l’exercice de l’autorité
publique et de ses effets sur le développement des libertés et des capacités des citoyens avec lesquels
elle interagit 1». Il s’agit donc de définir les instruments essentiels indispensables au fonctionnement
des autorités publiques dans leurs rapports avec le citoyen, de préserver ses droits et libertés
fondamentales. C’est là tout le débat sur le rapport entre la liberté et l’autorité. La gouvernance peut
aussi signifier une mise en réseau des différents acteurs au niveau d’un territoire donné, autour de
projets fédérateurs provoquant une dynamique économique durable.
Or, la question qui se pose avec acuité est de savoir dans quelle mesure la nouvelle
recomposition territoriale contribuera à l’amélioration de la gouvernance au niveau de la région et
accéder à ce qu’on appelle communément la bonne gouvernance ?
Certes, le Maroc a depuis ces dernières années fourni des efforts remarquables en matière
d’amélioration des instruments d’administration, de la nouvelle perception du citoyen et son rôle en
tant qu’intervenant actif dans la gestion des affaires locales. Pour preuve, la panoplie des textes
relatifs aux droits de l’Homme adoptés ces dernières années et les différents instruments sur la
moralisation de la vie publique, la lutte contre la corruption… Mais, beaucoup reste à faire dans la
mesure où « la gouvernance a enregistré de sérieuses carences, malgré des évolutions ponctuelles et
localisées. Des problèmes de malversation, de détournement de fonds, de corruption, de népotisme
et de clientélisme subsistent, en dépit de mesures et d’intentions louables 2».
La bonne gouvernance suppose donc certains principes de base comme : la proximité,
l’intégration, la participation, la transparence ; la reddition des comptes. La mise en œuvre de ces
principes est la base même du développement local. C’est une démarche d’apprentissage de la
concertation, de la solidarité et de la démocratie locale. En conséquence, il est nécessaire de réunir
les ingrédients d’une bonne gouvernance pour réussir le développement local et par la même
occasion le développement régional.
Ces principes de base sont aussi énoncés par la constitution de juillet 2011 qui proclame
dans son article 136 que « l’organisation territoriale du Royaume repose sur les principes de libre
administration, de coopération et de solidarité. Elle assure la participation des populations
1
Rapport du Cinquantenaire ; page 86.
2
Rapport du Cinquantenaire ; page 82.
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une véritable force de proposition, de veille et d’interpellation auprès des instances élues. En outre,
ces acteurs associatifs participeront à la promotion de la culture de la démocratie locale et à la
réalisation de projets de développement régionaux.
3- Partenariat
La région est aussi appelée à jouer un rôle d’animation de l’économie locale à travers la
commune qui est la cellule de base du système. En effet, la commune a pour fonction économique
de produire les équipements de proximité. Les investissements d'infrastructure de base et les
équipements collectifs urbains sont considérés comme des éléments moteurs du développement
économique. La plupart des infrastructures et des équipements de base relèvent de la compétence
de la commune : réseau de distribution d'eau, d'électricité, d'assainissement de voirie, d'éclairage
public ... A cet égard, la région peut constituer un tremplin d’actions sociales, économiques,
culturelles dans la mesure où elle est susceptible de dynamiser l'économie locale en créant un cadre
favorable à l'investissement privé et à la promotion de l'emploi. En fait, il s’agit ici d’impliquer le
secteur privé dans les affaires locales à travers non seulement l’investissement proprement dit mais
aussi à travers des actions collectives d’intérêt local. Il est vrai que parmi les fonctions premières des
collectivités locales, il ya la fourniture des services de base, des équipements de proximité et
d'organisation des services publics notamment. Ils produisent un impact direct sur l'environnement
de l'entreprise et encouragent l’investissement. Mais le secteur privé a aussi un rôle de premier plan
à jouer à travers des actions de partenariat avec les autorités locales en vue de dynamiser l’emploi, la
culture, le sport…
Finalement, on peut dire que la régionalisation avancée constitue un processus qui émane
d’une volonté royale délibérée et d’un engagement libre de l’Etat.
Les spécificités ethniques et culturelles étant une richesse pour toute la société marocaine,
le projet de régionalisation avancée constitue par conséquent le cadre propice pour qu’elles puissent
s’exprimer librement.
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Ibtissam BEGHDALI
Doctorante en Droit privé
1 L’article 39 de la constitution de 2011 dispose « Tous supportent, en proportion de leurs facultés contributives, les
charges publiques que seule la loi peut, dans les formes prévues par la présente Constitution, créer et répartir ».
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Sur quelles bases opérer les prélèvements fiscaux, tout en favorisant le développement de
la classe moyenne et le soutien de son pouvoir d’achat, et tout en permettant à l’investissement de
prospérer et au tissu productif de rester compétitif ?
Comment soutenir la consommation des ménages, moteur de la croissance, sans que cela ne
profite exagérément aux importations et à l’accentuation du déséquilibre de la balance commerciale ?
Comment développer l’épargne nationale, et surtout l’épargne longue, pour limiter la
dépendance du pays vis-à-vis des marchés financiers internationaux et limiter l’endettement extérieur ?
Comment assurer le minimum vital aux plus démunis, notamment en matière de santé et
d’éducation, avec des coûts supportables pour la communauté ?
Comment généraliser la couverture sociale sans déséquilibrer les caisses qui la financent ?
Comment assurer une équation adéquate en faveur des collectivités territoriales
défavorisées sans tomber dans le piège de l’assistant permanent ?
Comment assurer l’attractivité nécessaire de l’économie pour attirer les investisseurs et les
projets dans une compétition aujourd’hui mondialisée ?
Et enfin comment assurer tout cela avec le respect des règles de justice et d’équité sans
lesquels aucune adhésion au projet de réforme ne peut être pérenne ?
Notre objectif principal, dans cet article, n’est pas de répondre aux problématiques ci-dessus
indiquées, mais de montrer comment les acteurs principaux en la matière continuent à raisonner
d’une manière unilatérale sans s’ouvrir sur les autres contraintes qui se présentent sur le système. Et
qui peuvent s’opposer à leurs intérêts ? Et ce, pour une finalité toute simple : un système fiscal peu
rentable mais accepté par tous.
Nous essayerons donc de bien relever le constat du système fiscal marocain à travers des
instances telles que la Cour des Comptes et le Conseil Economique et Social pour leur objectivité
mais aussi à travers les attentes et la position des principaux acteurs qui sont l’administration fiscale
(administration de l’exécutif) et le patronat (I), ensuite les ingrédients indispensables de
l’amélioration du système fiscal marocain ainsi que la nouvelle mission de l’administration fiscale en
tant que service public faisant l’objet de notre présente réflexion (II).
I – Attentes et positions des principaux acteurs.
Certes, la Cour des comptes et le Conseil économique et social sont des instances sensées
être objectives dans leur raisonnement et leur diagnostic mais parfois, on sent qu’elles n’intègrent
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pas dans leur manière de voir la problématique dans sa globalité car le Gouvernement, le patronat et
le simple citoyen1 peuvent avoir des attentes catégoriquement opposées.
« A fin mars 2012, les services d’assiette de l’administration des impôts gèrent environ 1,5
millions de contribuables (IS et IR) dont près de 315.000 sont des personnes morales et près de 1,2
millions des personnes physiques, en plus des contribuables soumis aux impôts locaux et ceux taxés
à l’occasion d’opérations ponctuelles (droits d’enregistrement et de timbre, IRPI, TVA livraison à soi
même…etc. » Nous dit la Cour des Comptes2.
Les assises nationales sur la fiscalité, organisées le 29 et 30 avril 2013 ont révélé,
effectivement, que notre système fiscal souffre de plus d’un mal.
A cette occasion, le premier homme de l’exécutif3 s’interroge :
o Est – il logique que moins de 2% des sociétés contribuent pour plus de 80% aux recettes
de l’impôt sur les sociétés ?
o Est – il équitable que 60% des sociétés déclarent un déficit et que 50% des sociétés, hors
celles nouvellement créées, déclarent un déficit et que 75% des recettes de l’impôt sur le revenu
proviennent des salaires ?
Pour mettre de l’ordre dans ce début de réflexion, nous devons admettre que l’illogique et
l’équité, ci-dessus indiquées, sont des conséquences du système fiscal actuel et non des causes de
son efficience.
Madame Miriem BENSALAH – CHAQROUN4 dans le cadre de ces assises trouve qu’il faudrait
arrêter de faire payer les mêmes en faisant en sorte que tout le monde paye son dû à la collectivité.
Bien que l’économie informelle soit considérée comme filet social est en général mal
appréciée : en effet, le vendeur ambulant dont la seule ambition de richesse est de trouver de quoi
nourrir sa famille au quotidien et l’entreprise qui ne paie ni impôts, ni charges sociales de ses
employés.
Face à cette critique, la réponse du Gouvernement était immédiate et ne passera pas sans
dégâts sociaux.
La nouvelle loi de Finances de 2014 dans l’article 105 bis oblige les petits commerçants voir
ceux qui ne peuvent ni obtenir ni délivrer des factures – contribuables soumis au régime forfaitaire5
1- Surtout celui qui paie l’impôt sur le revenu et honnête malgré lui parce qu’il s’agit d’une retenue à la source qu’il soit
employé du secteur privé ou fonctionnaire.
2 - Rapport annuel de la Cour des Comptes de 2011
3 - Le Chef du Gouvernement Abdel- Ilah BENKIRANE
4 - Présidente de la CGEM
5 - A titre d’exemples les petits commerçants du coin, les petits bouchers ……….etc.
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– de tenir, de manière régulière, des registres spéciaux dont lesquels sont enregistrés jour par jour
toutes les sommes versées au titre des achats et des sommes encaissées ainsi que la forme des pièces
justificatives des achats.
A notre sens cet article agitera profondément le rapport administration – contribuable.
D’un autre point de vue, à elle seule, la TVA montre jusqu’à quel point notre système fiscal
présente des distorsions : En principe cette taxe devrait être neutre pour toutes les entreprises mais
en fait, elle ne l’est pas pour certaines, en raison des problèmes de butoir1.
Pour la CGEM « Notre système fiscal se caractérise par un manque de confiance mutuel,
entre administration et contribuable, et qui rend les uns et les autres suspects par nature ou – sans
mauvais jeu de mot – taxés de mauvaise foi ».
Gouvernement et patronat rejettent le système fiscal donc, qu’en est – il alors pour le simple
citoyen ?
Ce dernier subit les tortures de cette grande machine bête et méchante à la fois.
Ainsi, à travers le rejet de I'administration fiscale c'est en fait Ie rejet du système fiscal dans
son ensemble dont il est question.
Les garanties du contribuable sont des procédures participatives utilisées davantage comme
dispositifs de socialisation que comme moyen de discussion égalitaire entre les parties en présence.
Elles servent avant tout à convaincre le contribuable de la pertinence des choix fiscaux et à éviter le
rejet de I'administration en renforçant le consensus autour de celle-ci.
Quand le rejet de l’administration se manifeste sous des formes violentes et se solde par la
critique de ses agents, ce n’est pas que le législateur n'ait pas pris suffisamment de mesures
répressives, c’est que I'action administrative conjuguée au poids financier et psychologique de
I'impôt sont insupportables pour le contribuable. Ces manifestations sont un rejet global de la loi
fiscale et de I'administration chargée de la mettre en œuvre d’autant plus que I' assimilation de
l'administration à la loi contribue à asseoir sa légitimité et encourage I'obéissance des administrés
aux commandements qu’elle émet.
1 - Mais comment cela est-il possible alors que le fondement même de la TVA est sa neutralité, puisque c’est le
consommateur final qui devrait seul en supporter le coût ? Il faut dire qu’en règle générale la TVA collectée par une
entreprise (TVA sur les ventes) est supérieure à la TVA déductible (celle grevant les achats), l’entreprise se contentant
de verser au Trésor la différence entre TVA perçue (collectée) et TVA déboursée (payée). Mais il arrive que ce ne soit
pas le cas principalement pour deux raisons. La première est d’ordre structurel et coïncide avec l’existence d’une
différence entre le taux de la TVA facturée et celui de la TVA déductible.
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Les résistances à I'impôt et son rejet sont si forts que, dès que les pouvoirs publics touchent à
ce domaine, la violence des sentiments exprimés est tout à fait révélatrice de tensions.
Y a-t-il d’autres paramètres d’ajustement fiscal ?
Une absence d’équité.
Pour d’autres acteurs, la vraie problématique de notre système fiscal est l’absence d’équité.
C’est vrai qu’il est difficile de définir de façon unanime et exhaustive l’équité mais on peut
avancer sans risque d’erreurs que l’équité fiscale revêt deux dimensions :
Une équité horizontale : A revenu égal, impôt égal.
Une équité verticale : Les riches contribuent fiscalement davantage afin qu’il y ait des
transferts de revenus vers les pauvres, une sorte de solidarité.
Des exonérations ciblées, étudiées et surtout sans complaisances.
Une autre catégorie d’acteurs met l’accent sur les systèmes incitatifs sous forme
d’exonérations.
Il n’est pas à rappeler que l’exonération fiscale est une manière de dépenser sous forme de
privation de recettes fiscales, dans un objectif bien déterminé.
D’ailleurs, le coût d’une dépense fiscale est égal à la différence entre les recettes perçues dans
le cadre d’un système fiscal neutre et celles perçues une fois la mesure introduite.
En l’absence d’objectifs clairs, précis, mesurables et suivis dans le temps, les exonérations
fiscales deviennent de simples cadeaux entre classes socio-économiques et politiques.
Toute exonération fiscale, doit obéir aux exigences suivantes1 :
- Evaluation de l’efficacité des dépenses fiscales octroyées sur la base des impacts (Emploi,
Valeur Ajoutée, …etc.) ;
- Ciblage des secteurs à inciter au regard de la politique économique et des performances
constatées.
- Conditionnement de l’octroi d’incitations fiscales sur la base d’un cahier de charges.
- Contractualisation des engagements des parties de façon formalisée et définition d’un
horizon temporel pour leur application.
Le Conseil Economique et Social2 (CES) considère que les recettes fiscales constituent
aujourd’hui le poste de recettes le plus important pour couvrir les dépenses de l’Etat (72% du total).
Dans ces recettes, les impôts indirects (TVA et TIC) représentent la part prépondérante, avec une TVA
à l’import qui en constitue la partie la plus importante (60% du total de la TVA collectée), marquant
ainsi le poids dominant des importations dans la consommation.
1 - Telles qu’elles sont citées par les intervenants lors des assises nationales de la fiscalité ci- dessus indiquées.
2 - Rapport de 2012
19
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1 - Piliers qui ont fait l’objet des recommandations des assises nationales de la fiscalité d’avril 2013.
20
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Parfois, la modification d’un seul article du droit pénal ou du droit civil fait l’objet de tables
rondes et d’émissions télévisées.
Une simple lecture des modifications1 apportées au Code Général des Impôts (CGI) de 2011
à 2013 fait montrer jusqu’à quel point d’une année à l’autre le cadre fiscal marocain connaît des
changements radicaux.
Ainsi, 82 grandes modifications ont été apportées au code général des impôts dans un laps
de temps du 29/12/2010 à 16/05/2012, soit une année et cinq mois et demi.
Pire est que chaque modification peut être à l’origine de la suppression d’une multitude de
droits et de garanties, et ce, pour ne parler que des modifications du CGI.
Chercher les modifications apportées au code de recouvrement des créances publiques, à la
fiscalité des collectivités locales et aux autres taxes stipulées par d’autres textes spéciaux, la question
prendra une autre ampleur.
b– Clarification des textes fiscaux et ajustement du pouvoir d’appréciation de
l’administration.
Cette clarification est conditionnée par la participation de la société civile à l’élaboration du
texte fiscal (Associations, Experts comptables, Avocats, Conseils fiscaux……etc.).
Il est à rappeler que toutes les modifications – et combien elles sont nombreuses – en d’une
année en année, passent à l’occasion de l’élaboration de la loi de finances, qui a un caractère
budgétaire.
1 - L’article 7 de la loi de finances n° 43-10 pour l’année 2011 promulguée par le Dahir n° 1-10-200 du 29/12/2010
er
stipule « A compter du 1 janvier 2011, les dispositions des articles 4, 6, 7, 8, 11, 19-II, 25, 57, 65, 66, 67, 68, 73-II, 84,
193, 212, 220, 225, 242, 247, 250 et 252 du code général des impôts, institué par l’article 5 de la loi de finances n° 43-
06 pour l’année budgétaire 2007, promulguée par le dahir n° 1-06-232 du 10 hija 1427 (31 décembre 2006), tel que
modifié et complété, sont modifiées et complétées comme suit : …………………. ».
L’article 7 de la loi de finances n° 22-12 pour l’année 2012 promulguée par le Dahir n° 1-12-10 du 16/05/2012 stipule
« Les dispositions des articles 6-II, 7, 11-IV, 19-II, 20, 31-II, 57, 60, 63-II, 70, 82, 86, 91, 92, 106, 121, 123, 124, 129, 130 ,
133, 134, 137, 191, 205, 207, 220, 225 (II-D) 232-VIII, 242, 247, 252 (II-L), 260 et 262 du code général des impôts,
institué par l’article 5 de la loi de finances n° 43-06 pour l’année budgétaire 2007, promulguée par le dahir n° 1-06-232
du 10 hija 1427 (31 décembre 2006), tel que modifié et complété, sont modifiées et complétées comme
suit : …………………. ».
L’article 9 de la loi de finances n° 115-12 pour l’année 2013 promulguée par le Dahir n° 1-12-57 du 28/12/2012
stipule « Les dispositions des articles 6 (I-A-17°), 7, 9, 11-IV, 14, 19, 57, 60, 62,-II, 63, 96, 99, 104-II, 117, 121, 123, 124,
129-IV, 135, 152, 179, 191, 194, 196, 232-VIII et 247 du code général des impôts, institué par l’article 5 de la loi de
finances n° 43-06 pour l’année budgétaire 2007, promulguée par le dahir n° 1-06-232 du 10 hija 1427 (31 décembre
2006), tel que modifié et complété, sont modifiées et complétées comme suit : …………………. ».
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C’est dire enfin que la législation fiscale est une imagination de l’administration fiscale pour
l’administration fiscale. Or, les contraintes budgétaires ne doivent pas trouver de solution au
détriment des garanties des contribuables. De même, la loi fiscale doit encadrer le pouvoir
d’appréciation de l’administration. Ainsi, dans les contentieux opposant administration fiscale et
contribuables en matière de taxe sur les profits immobiliers (TPI), l’inspecteur est en mesure de
remettre en cause le prix de vente déclaré par le vendeur et engager une révision – à sa guise –
pouvant aller jusqu’à quatre à cinq fois le prix réel, sans aucune référence ni comparaison.
Ce nouveaux prix, suite à une négligence ou ignorance du contribuable, peut devenir la
nouvelle base de la TPI en l’absence d’un recours judicaire respectant les délais et les réclamations
imposés.
Pour le CES1 « Dans la pratique, la fiscalité au Maroc est restée un domaine en perpétuelle
réforme, ainsi, à chaque loi de finance, des nouveautés sont introduites, dans une logique
d’incitation économique nouvelle ou pour répondre au souci de tel ou tel secteur économique, ou
telle catégorie sociale. A la longue, le système a perdu en lisibilité et a très largement renforcé la
Doctrine Administrative, qui, via les circulaires de la Direction Générale des Impôts ou ses autres
publications, fixe la manière dont la loi doit être interprétée. Cet état de fait est constaté lors des
révisions fiscales où l’écart d’interprétation des textes entre l’Administration et les agents
économiques, même les plus transparents peut représenter plusieurs années de résultat. Il en
découle un sentiment d’aléa fiscal très largement répandu auprès des entreprises comme des
particuliers ».
Pour la Cour des Comptes2 « Suite à divers entretiens avec des responsables de vérification, il
a été constaté l’absence d’une stratégie suffisamment claire en matière de contrôle fiscal. L’approche
adoptée se focalise essentiellement sur des objectifs de recettes annuelles pour faire face aux
exigences de la loi de finances et beaucoup moins sur des aspects importants des missions dévolues
en principe à l’administration fiscale comme l’élargissement d’assiette, l’établissement de l’équité
fiscale, la promotion de l’investissement et de l’activité économique ».
Ainsi, le vote de I'impôt par les représentants de la Nation, condition de sa légalité, n'est pas
suffisant pour assurer un consentement à I'impôt. Malheureusement, ce vote se fait à travers les lois
de finances, qui ont beaucoup plus un souci d’équilibre budgétaire que de justice fiscale.
C – L’amélioration de la qualité de services rendus aux contribuables.
22
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Ce pilier repose sur l’amélioration de la qualité d’accueil du contribuable ainsi que sur
l’amélioration du délai de traitements des demandes de ce dernier. Toutefois, ces deux améliorations
ne peuvent être assurées que par la simplification des procédures et l’accélération de la
dématérialisation de ces dernières.
1 – Pour un effort pédagogique de l’administration fiscale.
Ainsi, la direction des impôts est une institution administrative qui remplit une mission de
service public dans I'intérêt général : déterminer équitablement l’impôt à payer par les contribuables
pour alimenter le budget de I'Etat. Cette administration s’efforce avant tout de justifier cette nécessité
et d'expliquer le sens de sa démarche.
Ce souci pédagogique d'explication engendre des modalités particulières de socialisation des
contribuables. Dans cette logique de service public, bien rendu, justifié et explicité, le contribuable
ne peut qu’adhérer au modèle qui lui est proposé.
L’administration fiscale a des fonctions ambivalentes : elle est à la fois un service public, c'est-
à-dire au service du citoyen, et une institution répressive quand elle exerce le contrôle fiscal des
contribuables et assujettis. L'administration doit gérer quotidiennement, et souvent avec le
contribuable, cette contradiction. Celui-ci perçoit l’administration fiscale à la lumière de ces deux
fonctions dont I'antagonisme n'est, en fait, qu'apparent.
2 – Pour une administration fiscale cohérente et acceptée.
L’administration fiscale via ses agents – pour qu’elle soit acceptée – doit être impartiale. La
Cour des Comptes1 constate « Les approches et appréciations faites par les vérificateurs ne sont pas
uniformes. Elles varient d’une DRI à une autre, et même au sein d’une même DRI, entre un
vérificateur et un autre. De plus, ces approches restent discutables, surtout dans les cas nombreux de
rejet de la comptabilité. Ainsi :
Le vérificateur peut procéder à la reconstitution du chiffre d’affaires et rejeter la
comptabilité du contribuable. Pour ce faire, il utilise des données de gestion partielles internes à
l’entreprise contrôlée, alors même que la comptabilité de celle-ci est rejetée.
La comptabilité du contribuable n’est souvent pas suffisamment vérifiée pour relever
d’éventuelles réintégrations. Les vérificateurs rejettent souvent la comptabilité sans justifier
clairement les infractions constatées.
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Khadija ZEDDARI
Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales-Salé,
Université Mohammed V-Souissi.
Introduction
Le gouvernement d’entreprise est une notion née aux Etats-Unis pour organiser la relation
entre les propriétaires et les dirigeants de l’entreprise. Le professeur G. Charreaux a proposé une
définition plus large « Le gouvernement des entreprises recouvre l'ensemble des mécanismes qui ont
pour effet de délimiter les pouvoirs et d'influencer les décisions des dirigeants, autrement dit, qui
"gouvernent" leur conduite et définissent leur espace discrétionnaire »1.
Les scandales financiers et économiques de certaines grandes entreprises ont conduit à
remettre en question les instruments mobilisables du gouvernement d’entreprise. Certains auteurs
ont révélé la notion de la Responsabilisé Sociale et Environnementale (RSE) afin de réunir la
reconnaissance des entreprises de leur responsabilité envers ses parties prenantes ainsi qu’envers
son environnement.
Vu l’importance de la RSE dans le développement durable de l’entreprise, la communication
extra financière est devenue une nécessité. De ce fait, l’entreprise, en plus de la publication du
reporting financier, a commencé à publier des reporting extra-financiers. Elle s’est intéressée à
améliorer la qualité de son dialogue vis-à-vis de ses parties prenantes ainsi que vis-à-vis des pouvoirs
publics.
Le Maroc, depuis plus d’une décennie, s’est fortement ouvert sur l’extérieur et s’est trouvé de
fait dans l’obligation d’adopter des stratégies mettant en avant la responsabilité sociétale et
environnementale et ce au travers de la publication de la charte de développement durable et
d’environnement élaborée par la Confédération Générale des Entreprises Marocaines « CGEM »
baptisée « label CGEM ».
1
http://gerard.charreaux.pagesperso-orange.fr/perso/articles/THEOGE.pdf
25
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Depuis la prolifération de cette notion, les autorités internationales ont pris des engagements
afin de l’institutionnaliser.
1.1. Sur le plan international
1.1.1. Notion du développement durable et RSE
La notion de la responsabilité sociale de l’entreprise découle d’une notion plus large qu’est le
développement durable. Le rapport Brundtland de la Commission mondiale sur l’environnement et
le développement en 1987, présidée par Gro Harlem Brundtland, a apporté une définition du
développement durable « Le développement durable est un développement qui répond aux besoins
du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs»1.
Le rapport pose les fondements du développement durable, les politiques à mettre en œuvre
et les comportements à opter pour atteindre un développement soutenable, il était adopté par 178
gouvernements dans un but d’avoir un environnement vivable. Depuis ce rapport, le développement
durable s'est répandu dans le monde entier et plusieurs textes ont été élaborés pour accomplir cette
mission.
Dans les travaux préparatoires de la norme ISO 26000 ont défini la RSE comme « actions
d’un organisme pour assumer la responsabilité de l’impact de ses actions sur la société et
l’environnement pour autant que ses actions soient cohérentes avec les intérêts de la société et du
développement durable, fondées sur un comportement éthique, le respect de la loi en vigueur et les
instruments gouvernementaux, et intégrées aux activités habituelles de l’organisme2 ».
1.1.2. Le Pacte Mondial
En juillet 2000, à l’initiative de son ancien secrétaire général « Kofi Annan », l’Organisation
des Nations Unies a lancé le Pacte Mondial (Global Compact) en se basant sur quatre grandes
déclarations :
- Déclaration universelle des Droits de l’Homme ;
- Déclaration de l’Organisation Internationale de Travail (OIT) ;
- Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement ;
- Convention des Nations-Unies contre la corruption.
1
www.diplomatie.gouv.fr/fr/sites/odyssee.../5/rapport_brundtland.pdf
2 Source : Michel Capron, Françoise Quarel-Lanoizelée, La responsabilité sociale d’entreprise, La découverte, Collection -
Repères, 2007, p 23
27
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Ce Pacte a pour objectif de réunir tous les acteurs (les entreprises, les organismes, le monde
de travail et la société civile) autour de dix principes1 universels rassemblés en quatre domaines
considérés comme des codes de conduite des entreprises :
Domaines Principes
Principe 1: Les entreprises sont invitées à promouvoir et à respecter la protection du droit
international relatif aux droits de l'homme ;
Droit de l’Homme
Principe 2: Les entreprises sont invitées à veiller à ne pas se rendre complices de violations des
droits de l'homme ;
Principe 3: Les entreprises sont invitées à respecter la liberté d'association et à reconnaître le
droit de négociation collective ;
Principe 4: Les entreprises sont invitées à contribuer à l'élimination du travail forcé ou
Normes
obligatoire ;
internationales du
travail Principe 5: Les entreprises sont invitées à contribuer à l'abolition effective du travail des
enfants ;
Principe 6: Les entreprises sont invitées à contribuer à l'élimination de toute discrimination en
matière d'emploi et de profession ;
Principe 7: Les entreprises sont invitées à appliquer l'approche de précaution aux problèmes
touchant à l'environnement ;
Environnement Principe 8: Les entreprises sont invitées à prendre des initiatives tendant à promouvoir une
plus grande responsabilité en matière d'environnement ;
Principe 9: Les entreprises sont invitées à favoriser la mise au point et la diffusion de
technologies respectueuses de l'environnement ;
La lutte contre la Principe 10: Les entreprises sont invitées à agir contre la corruption sous toutes ses formes, y
corruption compris l'extorsion de fonds et les pots-de-vin.
1
http://www.unglobalcompact.org/Languages/french/dix_principes.html
2
http://www.oecd.org/fr/daf/inv/mne/48004355.pdf
28
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1
http://www.adequations.org/IMG/pdf/AdequationsCriteresDeveloppementDurable.pdf
29
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1
http://www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/00200-r1.f1.pdf
2
http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/site/fr/com/2001/com2001_0366fr01.pdf
3
La responsabilité sociale des entreprises : les aspects relatifs au travail, Mai 2009, CGEM
30
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1
Dahir n° 1-11-91 du 27 chaabane 1432 (29 juillet) portant promulgation du texte de la constitution
2
http://www.ccdh.org.ma
3
http://www.indh.gov.ma
4
Dahir n° 1-03-194 du 14 rejeb (11 septembre 2003) portant promulgation de la loi n° 65-99 relative au Code du Travail
31
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Mohammed VI et voté au Parlement en juin 2003. Ce Code a fait l’objet d’une appréciation et
honoration de la part de l’OIT pour son respect aux principes des conventions internationales de
travail. Il se caractérise par :
La liberté syndicale et l'adoption effective du droit d'organisation et de négociation
collective ;
L’interdiction de toutes formes de travail par contrainte ;
L’élimination effective du travail des enfants ;
L’interdiction de la discrimination en matière d'emploi et de professions ;
L’égalité des salaires.
2.3. Le droit de l’environnement
L’engagement du Maroc au développement durable lors de la conférence de Rio 1992 est
inspiré de la nécessité de la bonne utilisation des ressources naturelles et de l’amélioration de la
qualité de vie du citoyen. Et le discours de SM le Roi Mohammed VI au sommet de Johannesburg sur
le Développement durable (septembre 2002) constitue la volonté marocaine à l’incorporation des
normes environnementales1.
Le pays a des défis environnementaux concernant l’assainissement des eaux souillées par les
eaux d'égout crues, la dégradation des sols, la pollution pétrolière des eaux côtières. Son
engagement aux normes internationales se concrétise par l’adoption de textes réglementaires.
2.4. L’action contre la corruption
La corruption est un phénomène social, le Royaume du Maroc a placé un chantier pour
promouvoir la culture de l’intégrité, de la transparence et la lutte contre la corruption à travers la
mise en place du cadre juridique et institutionnel:
- Commission nationale de moralisation de la vie publique (1999) ;
- Convention avec les Nations Unies de lutte contre la corruption (2003) ;
- La suppression de la Cour spéciale de la justice ()
- Définition de plan d’action et la mise à œuvre des actions couvrant 2005-2009 ;
- Un plan d’action gouvernementale (2006) ;
- Création de l’autorité centrale pour la prévention de la corruption (2008)
- Commission Interministérielle Chargée de l’Actualisation et du Suivi du plan d’action de
prévention et de lutte contre la corruption (2009) ;
- Programme de lutte contre la corruption couvrant la période 2010-2012 ;
1
http://www.un.org/events/wssd/statements/marocF.htm
32
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1
http://www.cgem.ma/
33
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1
Source: Ministère de l’Education Nationale, Département de l’alphabétisation et de l’éducation non formelle
34
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Le travail des enfants enregistre un taux de 26,5% en 2011 pour la tranche d’âge de 7 à 14
ans et 73,5% pour la tranche d’âge de 15 à 17 ans1.
Le taux de pauvreté est de 9% en 2007, la vulnérabilité est de 17,5% et 2,8 millions de
personnes vivaient au dessous du seuil de la pauvreté2.
Cependant, l’indice de perception de la corruption au Maroc a perdu 8 places en passant de
80 à 88 entre 2011 et 2012 parmi 176 pays3.
Pour la protection d’environnement, le pays a élaboré des lois mais avec une absence de
textes d’application pour obliger les entreprises à respecter les clauses.
En matière de la législation du travail, le code ignore la protection des représentants
syndicaux au niveau des entreprises et les facilités pour poursuivre leurs activités. Certaines
catégories de travailleurs comme les bonnes travaillant à domicile, les salariés de l’artisanat
traditionnel sont en dehors de cette législation. Selon un sondage effectué par le ministère des
affaires sociales en 2008, 15% des entreprises enquêtées sont conformes à l’application des
règlements issus du nouveau Code de travail. La conformité à cette législation reste inappliquée par
la plupart des entreprises marocaines même dans les règlements essentiels tel que : la durée du
travail, l’augmentation du SMIG, la constitution des comités d’hygiène et de sécurité, des bureaux
syndicaux, des comités d’entreprise.
Malgré les efforts de l’Etat pour instaurer une philosophie de responsabilité sociétale de
l’entreprise, ils restent insuffisants.
Conclusion
Dans ce travail, on a posé la question sur les obstacles de développement de la responsabilité
sociétale de l’entreprise au Maroc. On a proposé de définir cette notion puis de la mettre dans son
cadre institutionnel à l’échelle international, européen et national. Cette étude nous permet
d’observer que l’autorité publique a instauré un cadre institutionnel de la responsabilité sociétale et
environnementale à travers les lois, les conventions et les textes réglementaires mais il y a un
décalage entre les attentes et les réalisations.
L’émergence de la RSE nécessite une réelle volonté par tous les acteurs. L’Etat en tant
qu’organisme institutionnel, les entreprises en tant qu’agent économique et la société civile qui
devrait être plus exigeante pour inciter l’Etat et les entreprises à s’impliquer davantage. L’application
1
Source : Haut-Commissariat au Plan : Enquête nationale sur l’emploi
2
www.hcp.ma
3
http://transparencymaroc.ma
35
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de la RSE devrait être obligatoire avec une publication de reporting extra-financier en décrivant la
politique de l’entreprise dans les droits de l’homme, la discrimination, l’égalité, la transparence, la
gestion de ressources, l’insertion des handicaps,… comparativement avec la France, les entreprises de
plus de 500 salariés doivent inclure dans les rapports de gestion les informations sociales,
environnementales et de développement durable.
Si notre étude a permis d’avoir une vision globale sur la RSE au Maroc, il nous faut élargir le
travail par une étude comparative avec un pays plus avancé en la matière, par exemple la France. Et
de pour déterminer les variables explicatives afin d’inciter la responsabilité sociétale et
environnementale au sein de l’entreprise.
36
Revue Almanara pour les études juridiques et Administratives N 7 /2014______________________________________________________
TARHZOUT ILHAM
Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales-Salé,
Université Mohammed V-Souissi.
La protection des droits des femmes, notamment le droit à la santé1 constitue de nos
jours un thème d’une grande actualité, et suscite un grand intérêt2, aussi bien sur le plan
international que national3.
Elle revêt une importance capitale, car elle constitue un indicateur essentiel du
développement humain. En effet, le développement d’un pays se mesure aujourd’hui et plus que
jamais aux places et aux rôles occupés par les femmes au sein de la société4. C’est là une règle
applicable à tous les peuples et qui tire son essence de tous les diagnostics faits du développement 5.
Tout autant que les hommes, la santé des femmes dépend en majorité des conditions
socio-économiques. Mais, de par la fonction reproductive, leur état de santé va poser des questions
spécifiques, en relation et en interaction avec leur statut juridique dans la société, et notamment au
travail.
1
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé : « La santé est un état complet ce bien être physique, mental et social, et ne
consiste pas seulement en l’absence de maladie ou d’infirmités ».
2 « Le bien le plus précieux d’une nation n’est cependant pas sa réserve d’or ou de devises, pour considérables qu’elle soit,
ce n’est pas d’avantage la richesse de son sous-sol ou la puissance de son industrie, c’est la santé de son peuple ».
Citation du Roi Hassan II tirée de l’ouvrage le Défi.
3
Dr Ahmed Belhadj SENDAGUE, De la promotion des droits de l’Homme en général et au Maroc en particulier, 2011, P
103.
4
« Conscient de la nécessite fondamentale de la mobilisation et de la participation des femmes pour la
concrétisation des objectifs que nous Nous sommes fixé en vue de réaliser la croissance et le développement
durable de notre pays, nous nous sommes engagé à améliorer le statut de la femme en consolidant ses acquis
et en veillant a lui assurer ses droits humains, économiques et politiques». Message de Sa Majesté le Roi
Mohammed VI adressé aux participants à la 13ème édition du Sommet Global des Femmes, Marrakech le
28/06/2003.
5
Fouzia RHISSASSI, Khalid BERJAOUI, femmes, droit de la famille et système judiciaire dans les Etats du Maghreb :
L’exemple du Maroc, édition UNESCO, Rabat , 2010.
37
Revue Almanara pour les études juridiques et Administratives N 7 /2014______________________________________________________
De ce fait, il peut paraître paradoxal d’évoquer une protection spéciale de la femme alors que
toutes les législations tendent vers la non-discrimination1. Mais compte tenu de son statut particulier,
elle a besoin d’une protection spéciale à l’occasion de certains événements notamment l’état de
maternité. Donc, quels sont les mécanismes juridiques mis en place afin de protéger le droit des
femmes à la santé maternelle au travail ?
La consécration juridique de la protection de la maternité au travail
Force est de souligner que la grossesse, l’accouchement et l’allaitement rendent difficile
l’intégration des femmes dans un marché de travail concurrentiel, dans la mesure où certaines
femmes sont menacées de licenciement abusif et ne bénéficient pas de congé de maternité.
Il n’est pas sans intérêt de rappeler en premier lieu la dimension juridique au niveau
international, pour analyser le Droit marocain en deuxième lieu.
1 - Au niveau international
Force est de rappeler que la protection maternelle se définit comme l'ensemble de mesures
réglementaires et de moyens adaptant le système de santé aux objectifs de réduction de la morbidité
et de la mortalité maternelle et de promotion de la santé. Ainsi, d’après le comité des experts 2 de la
santé maternelle de l’Organisation Mondiale de la Santé3 : « la protection de la maternité a pour
objet de sauvegarder la santé des femmes au cours de la grossesse et pendant l’allaitement, de leur
apprendre les soins à donner aux enfants, de leur permettre d’accoucher normalement, et de donner
le jour à des enfants sains. Dans son acception restreinte, l’expression protection de la maternité
désigne les soins à donner à la femme enceinte, les soins obstétricaux nécessaires pour assurer un
accouchement normal, l’examen de la mère après l’accouchement, et les soins dont elle a besoin à ce
moment, les soins au nouveau né, et les mesures permettant le maintien de la lactation.
Au sens large, la protection de la santé maternelle commence beaucoup plus tôt et concerne
toutes les mesures prises en faveur des jeunes gens susceptibles de devenir parents à leur tour, en
1
Selon l’article 34 de la Constitution marocaine : « Les pouvoirs publics élaborent et mettent en œuvre des politiques
destinées aux personnes et aux catégories à besoins spécifiques. A cet effet, ils veillent notamment à traiter et prévenir
la vulnérabilité de certaines catégories de femme et de mères… ».
2
Rapport du comité d’experts de la maternité, N° 51, OMS, Genève, 1952
3 L’OMS est une institution spécialisée des Nations Unies pour la santé, a été fondée le 7avril 1948. Comme il est précisé
dans sa Constitution, l'OMS a pour but d'amener tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible. Dans ce
même document, la santé est définie comme un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas
seulement en une absence de maladie ou d'infirmité.
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vue d’améliorer leur bien être et leur état de santé, et de les aider à se faire une idée juste de la vie
familiale et de la place de la famille dans la collectivité »1.
L’amélioration de la santé maternelle est une préoccupation internationale inscrite déjà dans
la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme qui dispose que « La maternité et l'enfance ont
droit à une aide et à une assistance spéciale2 ». Et c’est surtout dans le domaine du droit du travail
que la préoccupation de la maternité se traduit par un nombre important de recommandations.
En effet, les conventions ratifiées par l’Etat marocain et qui aménagent des conditions
particulières de travail pour les femmes ont trait à la protection de la santé maternelle3.
En l’occurrence, la convention nº 183 prévoit un congé de maternité de 14 semaines. Les
femmes qui bénéficient du congé de maternité ont droit à des prestations en espèces qui
garantissent qu'elles peuvent subvenir à leur entretien et à celui de leur enfant dans de bonnes
conditions de santé et selon un niveau de vie convenable. Le montant de ces prestations ne doit pas
être inférieur aux deux tiers du gain antérieur ou à un montant du même ordre de grandeur. La
convention demande également aux États qui l'ont ratifiée d'adopter les mesures nécessaires pour
que les femmes ne soient pas contraintes d'accomplir un travail préjudiciable à leur santé ou à celle
de leur enfant ainsi que des mesures propres à garantir que la maternité ne constitue pas une source
de discrimination.
Elle interdit également à l'employeur de licencier une femme pendant sa grossesse ou
pendant son congé de maternité, ou encore pendant une période suivant son retour au travail, sauf
pour des motifs sans lien avec la grossesse, la naissance et ses suites ou l'allaitement. Les femmes
doivent être assurées, lorsqu'elles reprennent le travail, de retrouver le même poste ou un poste
équivalent rémunéré au même taux. La convention prévoit également le droit à une ou plusieurs
pauses par jour ou à une réduction de la durée journalière du travail en cas d'allaitement.
La convention nº 183 portant révision de la convention n° 103 sur la protection de la
maternité de 1952 étend la protection accordée aux femmes pendant la grossesse et l’allaitement à
toutes les femmes salariées. De plus, elle contient des normes relatives à la protection de la santé, au
congé en cas de maladie ou de complications, aux prestations en espèces et aux prestations
médicales, à la protection de l’emploi et à la non-discrimination et à la protection des mères qui
allaitent.
1
http://whqlibdoc.who.int/euro/phie/ consulté le 22/04/2012
2
L’article 25 de la DUDH.
3
Julie COMBE, La condition de la femme marocaine, édition l’HARMATTAN, Paris, 2001, p 73.
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Elle porte sur l'accès aux prestations médicales, y compris les soins prénatals, lors de
l'accouchement, et les soins postnatals, ainsi que les soins d'hospitalisation si cela est nécessaire;
comme elle prévoit un congé de maternité de 14 semaines pour les femmes auxquelles l'instrument
s'applique. Les femmes en congé de maternité ont droit à des prestations en espèces qui garantissent
qu'elles peuvent subvenir à leur entretien et à celui de leur enfant dans de bonnes conditions de
santé et selon un niveau de vie convenable.
2- Au niveau national :
L’Etat marocain, en ratifiant les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne
humaine, il lui incombe l’obligation juridique de prendre des mesures pour concrétiser et protéger
les droits de la mère au travail, et qui constituent le point de départ d’une protection réelle 1, et
d’harmoniser les dispositions des instruments internationaux avec sa législation interne.
De ce fait, la protection de la maternité a été renforcée par l’adoption du code du travail qui a
pour objectif de prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et la sécurité des
travailleuses enceintes, celles qui accouchent ou celles en période d'allaitement qui doit être
considérées comme un groupe à risques spécifiques.
La maternité est composée de plusieurs étapes qui peuvent être résumées en une étape
prénatale et une étape postnatale. L’état de santé de la femme au travail pendant ces deux étapes
connaît une altération qui peut être préjudiciable à la santé de la femme.
Aussi, il convient d’assurer à la femme une protection avant l’accouchement pour préserver
sa santé et la prémunir contre tout risque de licenciement qui serait motivé par un manque de
rendement. Cette protection doit être étendue à la période postnatale pour permettre à la femme
d’avoir une convalescence adéquate et pour pouvoir allaiter et élever son enfant pendant les
premiers mois de son existence.
Le code du travail a pris en compte ces besoins sociaux spécifiques à la femme salariée en lui
reconnaissant certains avantages liés à sa condition de mère. Il s’agit notamment du rallongement du
congé de maternité2 qui est passé de 12 à 14 semaines3, conformément aux dispositions de
l’Organisation Internationale du Travail, dans ce domaine, sauf stipulation plus favorable dans le
1
http://www.who.int/whr/2005/chapter3/fr/index5.html consulté le 20/04/2012
2
La durée du congé de maternité a été approuvée par les pouvoirs publics et les partenaires sociaux lors des négociations
de l’accord du 30 avril 2003.
3
D’après l’article 152 du code du travail
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1
Selon l’article 104 de la loi n ° 65-99 portant code du travail, la convention collective de travail est un contrat collectif
régissant les relations de travail conclu entre d’une part, les représentants d’une ou plusieurs organisations syndicales
des salariés les plus représentatives ou leurs unions et, d’autre part, soit un ou plusieurs employeurs contractant à titre
personnel, soit les représentants d’une ou de plusieurs organisations professionnelles des employeurs.
2
L’art 153 du code du travail.
3
L’art 154 du code du travail.
4
A ce propos elle adroit à une demi heure le matin et une demi heure l’après midi pendant 12 mois à compter du jour de
la reprise du travail suite à l’accouchement.
5
L’art 156 du code du travail.
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ou ayant bénéficié d’un congé de maternité peut rompre le contrat de travail sans préavis, ni
indemnité en cas de constatation de l’état de grossesse ou de l’expiration de l’année de congé sans
solde dont elle aurait bénéficié.
L’innovation la plus importante institue une protection de la mère salariée dont le
licenciement ne peut être prononcé pendant la grossesse constatée par certificat médical et pendant
14 semaines après l’accouchement.
Il parait que les rédacteurs du code de travail ont suivi les termes de l’article 8 de la
convention 183 qui protège l’emploi et la non discrimination, et qui prévoit que la femme doit
retrouver, à l’issue du congé de maternité, le même poste ou un poste équivalent rémunéré au même
taux alors que l’article 156 du code prévoit en des termes plus généraux que la femme doit
poursuivre son travail après la fin des périodes de 90 jours ou d’une année précitée en bénéficiant
des droits acquis avant l’interruption de son contrat de travail. Ceci ne constituant pas une référence
à la récupération de sa fonction ou d’une fonction équivalente.
Egalement, l’employeur ne peut pas mettre fin au contrat de travail de la femme lorsqu’elle a
été obligée de s’arrêter de travailler par suite d’une maladie consécutive à la grossesse ou à
l’accouchement1.
Le non respect des dispositions en matière de protection de la maternité est passible de
peines d’amendes de 10 000 à 20 000 DH2. Comme elle a droit à un repos pour allaitement pendant
les heures de travail3.
Le code prévoit également la possibilité pour la femme salariée de bénéficier pendant 12
mois, après la reprise du travail, d’une période de repos rémunérée d’une demi-heure le matin et
d’une demi-heure l’après-midi pour allaiter son nouveau-né. Une salle aménagée doit être prévue
dans toute entreprise employant plus de 50 salariées âgées de 16 ans.
Conclusion :
S’il importe que le droit des femmes à la santé maternelle soit reconnu et que son contenu
juridique soit bien établi, il faut qu’ensuite ces dispositions juridiques trouvent une expression
pratique. Autrement dit, il faut passer des normes à des politiques de santé maternelle plus efficaces
et à des programmes plus concrets.
1
L’article 159 du code du travail.
2
L’article 165 du code du travail.
3
A ce propos, elle adroit à une demi heure le matin et une demi heure l’après midi pendant 12 mois à compter du jour de
la reprise du travail suite à l’accouchement.
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