Nothing Special   »   [go: up one dir, main page]

Bases Psychopathologiques de La Psychologie Médicale

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 9

Faculté de Médecine de Marseille

Bases psychopathologiques de la psychologie


médicale (47)
Professeur Jean Naudin
Mai 2005

Références :
JEAMMET P. et al. Psychologie médicale, coll. ABrégés, Masson, Paris, 2° éd. 1996
BALINT M. Le Médecin, son malade et la maladie, 7° éd. Petite coll. Payot, Paris, 1996.
GUYOTAT J (éd) et al. Psychothérapies Médicales, Masson, Paris, 1978.
ADAM P., HERSLICH C. Sociologie de la maladie et de la médecine, sociologie 128,
Nathan, Paris, 1994.

1. Introduction

La psychopathologie étudie en profondeur le fonctionnement de la vie mentale et des


relations humaines, notamment la dynamique liée à la souffrance psychique et à ses
déterminants.

La psychologie médicale cherche à comprendre la situation médicale, situation humaine


d’interaction impliquant le malade et le médecin dans une relation de partenariat : le malade
ressent et réagit à sa propre maladie, il demande des soins et compte sur le médecin pour les
lui apporter, le médecin en retour interprète et réagit au comportement du malade, il lui
propose des soins et compte sur le malade pour les accepter.

La dynamique de la relation médecin-malade a été étudiée


• du point de vue sociologique, en termes de rôles
• du point de vue psychopathologique, en termes d’affects en référence à la
psychanalyse (transfert/contre-transfert, régression, stades du développement libidinal,
etc).

2. Psychologie de l’homme malade

2.1. Confronté à la maladie, l’homme réagit sur le plan émotif

La psychologie médicale étudie les craintes du sujet malade, la souffrance psychique générée
par sa situation et la façon dont il s’adapte à la maladie suivant ses traits de personnalité.
L’annonce d’un diagnostic grave, la perte de fonction qu’engendre une maladie chronique, la
douleur physique sont de véritables traumatismes. Plus qu’un simple stress, c’est un
bouleversement du monde, bouleversement face auquel le sujet doit opérer une reconstruction.
La réaction du sujet face à ce traumatisme peut être :

2.1.1. L’adaptation
Réaction souhaitée et voulue par les soignants. Dans ce cas, l’attitude souple et équilibrée du
malade lui permet de changer son mode de fonctionnement habituel sans pour autant se
désorganiser. La qualité de l’adaptation est fonction de la personnalité du sujet, de son
système de valeurs et de son fonctionnement habituel.
1
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

2.1.2. La régression et la dépendance


Réaction banale, la régression est un processus normal et nécessaire car il permet au patient
de s’adapter à la situation nouvelle de maladie. Elle peut aussi être utile au processus
thérapeutique (observance du traitement par exemple). Alors que la maladie favorise les
processus de régression, la guérison doit s’accompagner d’une reprise d’autonomie. C’est le
cas pour nombre de patients. Ainsi un malade peut fort bien s’adapter à sa maladie même s’il
existe une grande dépendance envers le médecin, dépendance que peut aussi masquer une
attitude agressive et revendicatrice. La régression n’est pathologique que si elle est trop
importante en intensité et en durée et empêche la participation active et énergique du patient
au processus thérapeutique. Dans ces circonstances, la tâche du médecin consistera à tenter
de limiter les tendances régressives, pour qu’elles ne constituent pas un frein à la guérison.
Ces attitudes sont souvent retrouvées chez les personnalités passives-dépendantes et
histrioniques. A l’inverse, lorsque la régression et la dépendance sont absentes, le médecin
doit favoriser l’expression de ces processus pour obtenir de bons résultats thérapeutiques.

2.1.3. La minimisation de la maladie et le déni


Réactions également courantes. Elles peuvent aller jusqu’à des attitudes de négation et de
refus de la maladie reposant sur des mécanismes de dénégation ou de déni. Par exemple, tel
patient « refuse de s’écouter » et dénie partiellement la réalité en méconnaissant la gravité de
son état et en rationalisant sa maladie qui « est due à un surmenage passager ». Ces attitudes
peuvent s’accompagner parfois de comportements d’hyperactivité centrée sur la maladie
(consultations multiples) ou se camoufler sous de pseudo-revendications (refus du traitement
imposé, poursuite des habitudes déconseillées par le médecin, etc). Le déni est un mécanisme
de défense archaïque, le sujet se défend ainsi d’un effondrement. Le médecin doit éviter le
risque d’une escalade symétrique entre le patient restant sur ses positions et le médecin
faisant de même. Il faut parvenir à gagner la confiance du patient en ayant à l’esprit que c’est
la peur qui le fait agir ainsi.

2.1.4. Les réactions narcissiques


Le narcissisme définit le caractère de « tout inviolable, impérissable, important, capable et
digne d’être aimé » de l’individu (Balint). La maladie menace l’intégrité de l’individu et
induit des réactions variables sur son narcissisme. Certains patients se sentent avant tout
blessés et vivent une expérience de « faille, ou blessure, narcissique ». Certains la
surmonteront en se repliant sur eux-mêmes et en accentuant leur égocentrisme, alors que
d’autres développeront des thèmes dépressifs associés à la crainte de ne plus être dignes d’être
aimés.

Certains patients au contraire voient leur narcissisme renforcé par l’expérience de la maladie :
l’intérêt porté à sa propre personne malade devient la source de nombreuses satisfactions.
Certains comportements narcissiques pourront être utiles au médecin, s’ils facilitent la
participation du patient à la thérapeutique. Ces réactions narcissiques sont fréquentes chez les
sujets dont la dimension de narcissisme est une dimension dominante du fonctionnement
psychique.

2
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

2.1.5. Les réactions dépressives


Elles sont fréquentes au cours des maladies chroniques et/ou sévères. En effet, la maladie
représente une atteinte de l’image idéale de soi, c’est à dire du narcissisme du sujet. Elle
représente aussi une confrontation avec la mort. A ce double titre, elle peut être à l’origine de
réactions dépressives, qui sont par ailleurs favorisées par certains facteurs biologiques,
lésionnels et thérapeutiques. Les réactions dépressives peuvent être exprimées par le malade
(sentiment de dévalorisation, d’incomplétude, de fatalité avec abandon de tout projet et de
tout souhait) ou masquées par des plaintes en particulier somatiques.

2.1.6. Les réactions persécutives


L’agressivité n’est pas l’apanage des patients psychiatriques. Elle est souvent le reflet de la
perception d’une menace. Elle peut s’exprimer de façons très variées : agressivité passive,
agressivité verbale voire agressivité physique. L’agressivité peut aussi témoigner d’un
sentiment d’injustice et de persécution. Se considérant comme victimes d’une agression,
certains patients pensent plus ou moins consciemment qu’on leur « veut du mal ». Le
mécanisme de défense mis en jeu est un mécanisme projectif.

2.1.7. L’isolement
Il correspond à une absence apparente d’affects, d’émotions lors de la prise de conscience de
la maladie. Le malade bien documenté sur sa maladie paraît prendre très bien l’annonce du
diagnostic. Les affects sont réprimés, laissés sans mots, ils ne sont pas communicables,
comme s’ils n’avaient pas de sens. Ceci peut contribuer à une aggravation secondaire de la
maladie. Le médecin doit maintenir un rôle apaisant et réorganisateur. Aider le malade à
mettre sa maladie en mot, à l’intégrer dans une histoire est primordial pour atténuer l’angoisse
et faciliter la réorganisation du monde. Le médecin doit pour cela partager le langage du
patient, respecter ses croyances, et parfois même les utiliser.

2.2. Le comportement adaptif


Dès qu’il s’agit d’une maladie chronique, le patient tente d’y faire face (to cope) par un
comportement adaptatif (stratégies de coping) :

Les modèles de coping sont issus des théories cognitivo-comportementales. D’après ces
modèles, le stress, que l’on peut définir comme une « réaction adaptative à un stimulus », ne
dépendrait pas seulement de l’événement, ni de l’individu, mais d’une transaction entre
l’individu et l’environnement.

Ainsi, une réponse inadaptée survient lorsqu’une situation (par exemple une maladie ou un
handicap) est évaluée comme débordant les ressources et pouvant mettre en danger le bien-
être.

Cette réponse est le résultat d’un déséquilibre entre les exigences de la situation provocatrice
et les ressources de l’individu pour y faire face. Les stratégies d’adaptation au stress peuvent
être de différentes natures : résolution du problème, notamment recherche d’information.,
acceptation de la confrontation, prise de distance ou minimisation des menaces, ré-évaluation
positive, auto-accusation, fuite-évitement, recherche d’un soutien social, maîtrise de soi par

3
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

exemple. Globalement les stratégies actives sont souvent les plus efficaces pour réduire la
tension.

2.3. Comportement du sujet face à la maladie


Il dépend de son histoire propre :
Tout entretien clinique doit toujours comporter des questions sur les événements qui ont pu
marquer l’histoire du sujet (événements de vie) : la recherche des antécédents médicaux n’est
qu’une partie de cette investigation qui doit rechercher aussi bien les traumatismes antérieurs
(réels et psychiques) que les événements professionnels et familiaux, naissances, deuils,
séparations, tous les facteurs éventuels de stress et les réactions adaptatives que ces
événements passés ont eux-même engendré chez le sujet et son entourage.

2.4. Description des personnalités pathologiques


Il y a aussi une pertinence dans le domaine de la psychologie médicale. Les personnalités
pathologiques induisent de véritables difficultés thérapeutiques pour les médecins mal
informés ou peu sensibles à cet aspect de la psychopathologie.

3. La relation médecin-malade

La relation thérapeutique médecin-malade est déterminée par de nombreux facteurs,


individuels et socio-culturels. De même que le malade réagit à sa maladie en fonction de sa
personnalité propre, le médecin réagit face à son malade par un certain nombre d’attitudes
conscientes et inconscientes qui dépendent de sa personnalité et de son histoire, et qui sont
susceptibles d’infléchir le cours de la relation thérapeutique :

3.1. Les particularités psychiques et psychosociales du


médecin
3.1.1. Le choix individuel de la profession
Il s’explicite par des motivations conscientes sous-tendues par des mobiles plus inconscients.
Ainsi les désirs de voir, comprendre, savoir, toucher, pouvoir sont sous tendus par le couple
pulsionnel voyeur-exhibitionniste plus inconscient.

Les désirs conscients de soulager, se rendre utile, réparer, gagner de l’argent sont sous tendus
par l’attrait de la réparation des tendances agressives et sadiques.

3.1.2. Les attentes de la société


Elles peuvent influer sur le choix de la profession. Elles concernent : le savoir technique,
l’altruisme, l’universalité du pouvoir, le désintéressement, la neutralité affective, morale,
juridique voire politique et religieuse. Ces attentes réelles ou imaginaires peuvent confronter
le médecin à des conflits internes.

4
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

3.2. Les caractéristiques sociologiques de la relation médecin-


malade
3.2.1. Le modèle de Parsons
La relation médecin-malade est fondamentalement une relation d’inégalité. Parsons a proposé
un modèle sociologique de cette relation d’inégalité. Ce premier modèle de la relation
médecin-malade repose sur l’idée que la structure sociale organise fortement le comportement
du médecine et du malade, tous deux définis comme des acteurs sociaux. Pour Parsons, c’est
une relation asymétrique et consensuelle. Elle est asymétrique parce que c’est le médecin qui
résout le problème du malade : le médecin est actif, le malade est passif. Mais elle est
également consensuelle parce que le malade reconnaît le pouvoir du médecin et parce que la
relation thérapeutique est fondée sur une certaine réciprocité. Suivant ce modèle, une
consultation réussie est une consultation où le médecin et le malade jouent correctement leur
rôle respectif (ce que les médecins appellent parfois les bons malades, à sa voir ceux qui
reconnaissent leur pouvoir). Le rôle du malade se définit par son exemption des
responsabilités habituelles, en échange de quoi il doit considérer la maladie comme
indésirable et souhaiter aller mieux. Il a pour obligation de se soigner pour guérir. Le rôle du
médecin tourne autour de sa compétence technique, reconnue comme devant s’exercer dans
un domaine précis et spécifique. Son rapport au malade ne doit pas reposer sur des liens
personnels mais au contraire sur des règles abstraites qui renvoient à sa compétence
technique. Il doit également faire preuve de neutralité affective dans la mesure où il a affaire à
l’intimité du malade. Dans le cas contraire, l’attente affective transforme les rapports
d’échange en rapports de force.

3.2.2. Compléments et critiques au modèle de Parsons


Le modèle de Parsons s’applique plus facilement à la relation médecin-malade dans le cas des
maladies aiguës. Les maladies chroniques, comme telles, ne peuvent pas aspirer à la guérison,
ce qui suppose d’autres rapports. Si dans le cas d’un malade dans le coma, l’asymétrie est
totale, la relation prenant la forme activité-passivité sans discussion possible, le malade est
dans les cas moins graves de maladie aiguë peu ou prou en mesure de participer activement à
la relation thérapeutique. Le malade est ici capable de suivre ou non les indications du
praticien et d’exercer une part du jugement, la relation fonctionnant dès lors pour le mieux sur
le mode de la coopération guidée. Dans le cas d’une maladie chronique, comme par exemple
le diabète, le rôle du médecin consiste à aider le malade à se prendre lui-même en charge.

Dans ce cas de figure, la relation prend la forme de la “participation mutuelle”. On assiste par
ailleurs de plus en plus à un modèle de relation médecin-malade de type conflictuel,
professionnels et profanes mettant à profit leurs savoirs respectifs pour étayer ce qui prend dès
lors la forme d’un véritable conflit de perspectives (Freidson).
Dans tous les cas, il faut reconnaître la valeur primordiale de la négociation dans la relation
médecin-malade, aujourd’hui essentiellement plurale.

5
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

3.3. Le modèle psychanalytique appliqué à la relation


médecin-malade (transfert et contre-transfert)

3.3.1. Le transfert
La théorie psychanalytique a défini le concept de transfert. Il s’agit des réactions affectives
conscientes et inconscientes qu’éprouve le patient à l’égard de son médecin. En effet, dans le
cadre de la relation médecin-malade des désirs inconscients sont actualisés et un certain
nombre de désirs insatisfaits du patient vont se projeter sur la personne du médecin en ce qu’il
représente – inconsciemment – un autre personnage. Le malade peut ainsi répéter des
situations conflictuelles qu’il a vécu dans son passé.

3.3.2. Le contre-transfert
La théorie psychanalytique a aussi défini le concept de contre-transfert alors que le malade est
sujet au transfert, le contre-transfert se définit comme les réactions affectives conscientes et
inconscientes qu’éprouve le médecin vis à vis de son patient. Ce contre-transfert et très
directement lié à la personnalité et à l’histoire personnelle du médecin. Le plus souvent, le
contre-transfert est positif, permettant une relation médecin-malade de qualité caractérisée par
l’empathie du médecin et une action thérapeutique efficace. Une relation médecin-malade de
qualité fait référence au fait que le médecin s’identifie au patient et comprend sa situation tout
en étant capable de garder une certaine distance vis à vis de lui, distance requise par
l’objectivité nécessaire à la prise de décisions thérapeutiques. Un contre-transfert
excessivement positif risque de conduire à une identification massive au malade et/ou à une
perte d’objectivité dans les soins. Ailleurs, un contre transfert négatif induisant l’agressivité
et des frustrations excessives du malade peut être à l’origine d’échecs de la relation
thérapeutique. Il en est de même pour une absence de contre-transfert qui peut conduire à une
froideur excessive.

3.4. L’apport des travaux de Michael Balint


M. Balint, psychanalyste hongrois, a développé une modalité originale d’approche de la
relation médecin-malade. Ces travaux sont issus de quelques constatations :
• Il existe un certain nombre d’insuffisances de la médecine traditionnelle, qui étudie
plus les maladies que les malades,
• Un tiers de l’activité professionnelle d’un médecin généraliste ne relève que d’une
action psychothérapeutique,
• La relation médecin-malade s’organise entre 2 pôles extrêmes de domination et de
soumission auxquels correspondent le pouvoir du médecin et la fragilité du malade.
Pour Balint, le médecin est un remède en soi, même si son action est médiatisée par un
médicament. Ainsi, une meilleure maîtrise de la relation inter-individuelle doit
permettre au médecin d’établir avec son patient un échange affectif qui aura des
vertus curatives. C’est l’objectif des « Groupes Balint » consacrés à l’approche en
groupe des diverses problématiques relationnelles médecin-malade.

3.4.1. Les données récentes


La relation médecin-patient est actuellement en pleine mutation. Mettant en avant les droits de
l’individu, notre société souhaite faire évoluer la relation médecin-patient d’un modèle
6
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

« paternaliste » vers un modèle d’ « autonomie ». Cette évolution se traduit notamment dans


les nouvelles obligations liées à l’information et consentement éclairé du patient concernant
les soins et à la communication du dossier médical au patient. Ainsi, le médecin risque
d’avoir une marge de manœuvre relativement faible entre ses obligations éthiques et
déontologiques anciennes d’une part et ces nouvelles modalités de fonctionnement d’autre
part. D’une façon un peu schématique, la situation pourrait être ainsi résumée : le médecin
devra trouver un juste milieu entre deux pôles extrêmes. Le premier pôle est une relation dite
« paternaliste » trop inégalitaire, respectant insuffisamment l’individu, trop peu concerté et
informé des traitements.
Le second rôle correspond à une relation dite d’ « autonomie ». Dans cette relation, le
médecin, désinvestissant son rôle et son statut de médecin, se déresponsabiliserait de toute
décision pour le patient : le patient, sensé être capable de prendre les meilleures décisions
pour lui-même (dans les domaines aussi difficiles que sa maladie ou sa mort par exemple),
serait quant à lui renvoyé à des décisions imprenables, car le mettant dans une position
ingérable en termes psychologiques et risquant de conduire au fait qu’il ne bénéficie pas des
meilleurs traitements pour lui-même. En pratique, et pour respecter le patient sans se
dédouaner de son rôle, le médecin se devra d’expliquer sa maladie au patient en adaptant son
langage à celui du patient. La communication du dossier médical devra se faire, autant que
possible, dans le respect de ces grands principes.

4. Quelques situations pratiques

4.1. Attitudes face à l’angoisse


L’attitude la plus adaptée est le plus souvent une attitude souple d’écoute bienveillante,
centrée sur les préoccupations du malade, associée une attitude de ré-assurance et
d’explication des symptômes. Certains médecins, au tempérament « actif » et « volontaire »
préfèreront des attitudes plus directives, qui entretiennent l’image mythique du « médecin-
Sauveur ». Elles sont sous-tendues par une tentative d’identification directe du malade au
médecin : « Soyez fort comme moi ». Ce type d’attitude donne des résultats inconstants,
parfois négatifs.

4.2. Attitudes face à l’agressivité


Les réactions agressives du médecin face à l’agressivité du patient sont fréquentes car certains
médecins tolèrent mal les revendications agressives de leurs patients. Ces réactions agressives
sont à éviter car elles entraînent souvent une escalade dans l’agressivité et une rupture de la
relation thérapeutique. L’attitude la plus adaptée consiste, dans la mesure du possible à
reconnaître et nommer l’émotion du patient, ne pas refuser le principe du dialogue mais sans
chercher à discuter rationnellement.

4.3. Attitudes face à l’hypochondrie


L’hypochondriaque confrontera le médecin à l’impuissance thérapeutique. Si le médecin
l’accepte, il évitera toute surenchère de médicalisation qui pérenniserait les troubles voire les
aggraverait.

7
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

4.4. Attitudes face à la séduction histrionique


Ces patients, suggestibles, influençables, dépendants se moulent au corps médical avec une
plasticité étonnante. Guérir pourrait alors signifier pour eux une rupture de ce lien affectif. Ce
phénomène favorise l’engrenage des hospitalisations abusives, de la iatrogénie, des bénéfices
secondaires. Le médecin doit avoir pour objectif de prévenir cet engrenage.

4.5. Effet non spécifique : effet placebo


Le placebo désigne toute substance pharmacologique inerte, susceptible de modifier l’état du
malade, soit en l’améliorant (effet placebo-positif), soit en déclenchant des effets indésirables
(effet placebo-négatif ou effet nocebo). L’effet placebo dépend de nombreux facteurs : nature
des symptômes pour lesquels il est administré, présentation du placebo et modalités de sa
prise (nombre et couleur des comprimés), personnalité du sujet, influence du prescripteur. Les
sujets placebo-répondeurs sont plutôt les sujets sociables et extravertis, qui ont une « attente »
par rapport aux effets du produit. Le prescripteur, influence la réponse au placebo. La relation
positive au médecin favorise la réponse au placebo et par extension au traitement actif.

4.6. Observance et relation médecin-malade


Une réaction médecin-malade de qualité est un facteur qui favorise l’observance du traitement
médicamenteux au long cours.

5. Conclusion

L’ensemble de ces enjeux, dont la complexité est perceptible justifie pour le moins une
formation psychologique du médecin, qui devrait être acceptée et reconnue par tous.
Dans une société en pleine mutation pour ce qui est de la relation médecin-patient, cette
formation permettra au médecin :

• d’éviter l’utilisation inadaptée et parfois pathogène des dimensions psychologiques


• de jouer son rôle apaisant et réorganisateur à travers la qualité de la relation établie
avec le patient et son entourage.

6. Points forts

• Les réactions du sujet face au traumatisme qu’est la maladie peuvent être :


l’adaptation, la régression, la dépendance, la minimisation, voire le déni, une réaction
narcissique, dépressive, persécutive, à l’opposé l’isolement.
• Dans les maladies chroniques, le patient adopte parfois une stratégie de coping.
• Le comportement du sujet face à la maladie dépend de son histoire propre et de sa
personnalité.
• Dans les maladies aiguës, la relation médecin-malade est une relation d’inégalité,
asymétrique et consensuelle, le malade jouant un rôle passif et le médecin un rôle actif
(modèle de Parsons).
• Ce modèle n’est guère opérant dans les maladies chroniques où la relation est faite
d’une coopération guidée et d’une participation mutuelle. Les savoirs du médecin et
du malade entrent parfois dans un conflit de perspectives (négociation +++).

8
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie
Faculté de Médecine de Marseille

• Les effets plus ou moins inconscients du transfert (affects éprouvés par le malade pour
le médecin) et du contre-transfert (affects éprouvés par le médecin pour le malade) se
font sentir dans la relation médecin-malade : ces effets peuvent être positifs, facteurs
de bonne observance et d’efficacité, comme négatifs, facteurs d’agressivité et d’échec
thérapeutique.
• Le médecin est souvent lui-même le remède.
• La relation médecin-malade est en pleine mutation, évoluant vers une plus grande
autonomie du malade, garantie par des droits (information, consentement éclairé,
communication du dossier).
• Lorsque la relation médecin-malade s’avère difficile, le médecin doit toujours éviter
l’escalade en ne cherchant ni à avoir raison, ni à jouer au sauveur. L’attitude la pluis
adaptée est de rassurer en reconnaissant et nommant l’émotion du patient.
• La séduction parfois exercée par le malade favorise l’engrenage des hospitalisations
abusives, de la iatrogénie et des bénéfices secondaires.

9
DCEM 3 – Module optionnel n° 13
Psychiatrie

Vous aimerez peut-être aussi