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1.0 La Bio en 10 Questions

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Mai 2019

L’agriculture biologique
en 10 questions
1/
1/LLE
E MARCHÉ
MARCHEDU DU EST-IL
BIOBIO PORTEUR
EST-IL ?
PORTEUR ?
De la production à la consommation, le et 2016, le marché alimentaire des
développement du Bio n’a jamais atteint produits bio a progressé de plus de
un tel niveau. La progression récente des +82 % pour une valeur de+3,2 milliards
filières bio françaises et leur structuration d’euros. Le secteur bio demeure le facteur
répond, non seulement, à la demande de croissance majeur du secteur alimen-
croissante de produits bio, mais aussi à la taire.
sensibilité accrue des consommateurs
La meilleure diffusion des produits bio
concernant l’origine des produits biolo-
explique majoritairement cette crois-
giques (85 % des Français se déclarent
sance : meilleure présence dans les com-
intéressés par des produits bio et locaux).
merces de proximité, le drive, élargisse-
Entre 2011 et 2016, le nombre de ment des gammes dans les hyper et su-
producteurs bio a progressé de 40%, permarchés et de nombreuses ouvertures
les transformateurs et distributeurs de magasins spécialisés.
de 22,3%. Sur la même période, les
De plus, 71 % des produits bio con-
surfaces biologiques engagées en bio ont
sommés en France sont produits en
gagné 563 000 ha, soit une croissance de
France (81 % lorsque l’on exclut les pro-
+60 %. La part de la surface agricole utile
duits exotiques). Et 50% des importations
des exploitations françaises conduite en
proviennent des pays de l’Union euro-
bio est passée de 3,6 % à 6,5 %.
péenne.
Ces excellents chiffres sont portés par une
http://www.agencebio.org/communiques-
consommation des produits biologiques
et-dossiers-de-presse
qui ne cesse de se renforcer. Entre 2011

« La stabilité des prix des céréales bio se confirme ».

Voir l’enquête Prix annuels BIO 2015-16

2017
2/ Y A-T-IL DES DÉBOUCHÉS EN ALSACE ?
En grandes cultures, les producteurs bio met de proposer un débouché bio sur une
731 25090 ha 7,2 % historiques, équipés pour le stockage et bonne partie du territoire alsacien.
* triage à la ferme, travaillent souvent en
Pour la viande, une coopérative nationale
direct avec les moulins et fabricants d’ali-
* certifiées et en conversion
UNEBIO valorise la viande de bovin, veau,
ments. Depuis peu, les organismes stock-
agneau, porc (et volaille hors Alsace). En
eurs se positionnent sur le bio (ex. En
2018 Alsace, c’est CLOE qui assure la logistique.
Estimations au 31/12/2018 2016, Armbruster dédie un silo au bio. En
D’autres circuits de vente existent par le
2017, la CAC s’associe à Probiolor et le
839 fermes 27190 ha Comptoir Agricole s’affiche plus clairement
biais des maquignons pour les groupes
engagées en bio conduits en bio Charal et Bigard. Des débouchés directe-
sur ce créneau). Les filières céréalières
ment auprès des bouchers se développent
98 nouvelles fermes 8% de la SAU sont également portées par la demande
en AB, ainsi que la vente directe.
locale : orge et houblon pour des bières
100% Alsace, blés meuniers d’Alsace. Des En fruits et légumes, en lien avec
fabricants de bretzels et pâtes d’Alsace l’OPABA et l’IFLA, les producteurs alsaciens
sont à la recherche de matière première s’ouvrent à la GMS, en créant la marque
bio et locale. Une filière sarrasin bio d’Al- Fruits et légumes bio d’Alsace et ses outils
sace est également en projet. Enfin, la de communication. La majorité des vo-
demande en légumes secs (lentilles, pois lumes reste cependant écoulée en vente
chiches, pois cassés) ouvre de nouvelles directe, paniers, etc.
perspectives en plus des cultures tradition-
En viticulture, le label bio est un plus
nelles (maïs, soja, blé, triticale,
pour se démarquer notamment sur les
épeautre…).
marchés à l’export.
En lait, le débouché existe depuis plus de
Des fiches filières, réalisées par l’OPABA,
vingt ans pour les producteurs d’Alsace
donnent les principaux chiffres et opéra-
Bossue et de la vallée de Kaysersberg,
teurs économiques impliqués en Alsace et
collectés par Lactalis. Mais depuis 2015,
le schéma de filière.
Source : Observatoire régional de l’agriculture l’arrivée du GIE Biolait et le positionne-
biologique en Alsace—OPABA ment des laiteries Sodiaal et Eurial, per-
2
3/ L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE EST-ELLE MEILLEURE
POUR L’ENVIRONNEMENT ?
RMT DEV’AB
Le Réseau Mixte Technologique
D’après les travaux du RMT Dév’AB (voir ci-contre), les performances environnemen-
«Développement de l’Agriculture
tales de l’agriculture biologique (AB) sont globalement meilleures que celles de l’agri-
Biologique» est un réseau de
culture conventionnelle (AC).
compétences spécifiques à l’AB,
piloté par l’ACTA, qui associait des
partenaires de la recherche, de la
formation et du développement
agricole (11 instituts techniques
agricoles, 18 chambres d’agricul-
ture, l’INRA, 7 structures de dé-
veloppement de l’AB, 9 lycées
agricoles et 2 écoles d’ingé-
nieurs).

Les travaux du RMT ont notam-


ment abouti à la rédaction, sous
la coordination de P. Fleury, d’un
ouvrage intitulé « Agriculture
biologique et environnement : des
enjeux convergents ». Coédition
ACTA, Educagri éditions, collec-
tion « Références », février 2011.

A lire
L’agriculture biologique a tendance à mieux conserver la fertilité physique et
biologique des sols que les systèmes conventionnels. Synthèse « Agriculture biologique
et qualité de l’eau » - 4 pages—
En effet, les teneurs en matière organique et la biomasse microbienne des sols sont
2013— ISARA Lyon
souvent plus importantes, ce qui implique une réduction de la sensibilité des sols au
tassement et à l’érosion. Cependant l’action répétée d’outils mécaniques liés au désher-
bage parfois observée en AB, peut, en conditions humides, altérer la porosité du sol.
Synthèse « Agriculture Biologique
Les bénéfices de l’AB sur la qualité des ressources en eau sont principalement et environnement des enjeux
dus à l’absence de l’utilisation des engrais et produits phytosanitaires de syn- convergents » 8 pages - Août
thèse, interdits en AB. 2010—RMT Dév’AB

La protection des cultures biologiques est, avant tout, assurée par l’alternance des
cultures, le choix de variétés résistantes et l’usage ponctuel de produits phytosanitaires
naturels (principalement cuivre, soufre et extraits de végétaux).

En ce qui concerne les nitrates, l’AB induit, en général, moins de risques de pollution de
l’eau que l’agriculture conventionnelle du fait de l’absence d’engrais minéraux azotés et
du prix élevé des engrais organiques ce qui en réduit l’usage. Par ailleurs, les systèmes
biologiques laissent une place plus importante aux légumineuses. On observe fréquem-
ment des teneurs en nitrates dans les eaux de lessivage inférieures de moitié à celles
de l’AC. Cependant des pertes peuvent survenir à certains moments (retournement des
prairies, présence de sol nu) ou dans certaines exploitations utilisant des effluents or-
ganiques en excédent (maraîchage).

De nombreuses références bibliographiques attestent de l’impact positif de


l’AB sur la biodiversité. Cette plus forte diversité d’espèces concerne pratiquement
tous les groupes d’organismes, de la flore comme de la faune. De plus, la diversité des
paysages est plus grande dans les exploitations biologiques. On y trouve plus d’élé-
ments semi-naturels appelés aussi infrastructures agro-écologiques (IAE) : haies, talus,
fossés, bois, surfaces non cultivées… Toutefois, malgré ce bilan très largement positif,
certaines pratiques utilisées en AB peuvent avoir des effets négatifs sur la biodiversité.
Par exemple, les insecticides naturels comme les pyréthrines sont peu sélectifs et peu-
vent occasionner des dégâts sur les insectes pollinisateurs ou les auxiliaires.

Quant aux émissions de gaz à effet de serre (GES), celles de l’AB sont plus faibles
que celles de l’AC si l’on calcule par unité de surface. Mais quand on raisonne par unité
de produit (tonne de lait ou de viande), les performances sont équivalentes ou parfois
moins bonnes pour l’AB. Ceci s’explique par des rendements ou un chargement à l’hec-
tare généralement inférieurs. Il existe donc des marges de progrès pour améliorer les
performances de l’AB en matière de contribution au réchauffement climatique.
3
DÉROGATIONS ET EX- 4/ DU CONTRÔLE À LA CERTIFICATION BIO : QUELLES
CEPTIONS SONT LES GARANTIES ?
Des dérogations à la réglemen-
tation existent pour faire face à Pour commercialiser leurs produits comme jugés conformes à la réglementation euro-
des situations d’indisponibilité. étant issus de l’agriculture biologique, péenne et française en vigueur. L’étique-
agriculteurs et entreprises de collecte, de tage est la traduction concrète de cette
 Dérogations ponctuelles :
transformation et de distribution doivent certification. Il permet au consommateur
par exemple dans le cas
obligatoirement faire contrôler et certifier ou au destinataire de s’assurer de la con-
de perte de production
leur activité par un organisme certificateur formité du produit.
fourragère après séche-
(OC).
resse, La certification des exploitations agri-
Les contrôles ont donc lieu à tous les coles
 Dérogations structurelles,
stades des filières. En moyenne, les opéra-
vouées à disparaitre Un contrôle approfondi a lieu une fois par
teurs ont été contrôlés 1,5 fois en 2017
quand l’offre sera suffi- an sur l’ensemble du système de produc-
(source INAO).
sante. Exemple : achat de tion (parcelles, troupeaux, pratiques de
semences convention- L’organisme certificateur est accrédité et culture et d’élevage, lieux de stockage,
nelles non traitées*, de agréé par les Pouvoirs publics, pour sa transformation, étiquetage, comptabilité
poussins non bio (< 3 compétence, son indépendance et son matière, garanties données par les fournis-
jours), de poulettes éle- impartialité. seurs…). En fonction des risques, des con-
trôles complémentaires sont effectués,
vées en AB… En France, 10 organismes sont agréés pour
inopinés dans la plupart des cas.
le contrôle des produits biologiques dont 5
D’autres dérogations existent
présents en Alsace : Ecocert, Certipaq bio, Des prélèvements pour analyses peuvent
pour l’achat d’animaux non bio,
Bureau Veritas, Qualisud et Biotek. également être effectués afin de vérifier la
certaines mutilations
non utilisation de produits interdits
(écornage, castration, coupe Un certificat est délivré pour les produits
(pesticides, OGM…).
de queue…) ou encore l’attache
des animaux. Les dérogations
sont à demander par le produc-
teur à son organisme certifica-
teur (ou à l’INAO pour la déro-
gation fourrage). Il s’agit de
cas précis et encadrés (détail).

Cas des semences non bio

L’utilisation de semences con-


ventionnelles non traitées ne
peut se faire que pour les es-
pèces et variétés dont l’indis-
ponibilité est avérée dans le
secteur du demandeur. Le site
semencesbiologiques.org in-
dique les disponibilités par
5/ QUELLE EST LA RÈGLEMENTATION ?
département, les espèces et
variétés qui peuvent faire l’ob-
jet d’une dérogation. Cette Les textes qui régissent l’agriculture biolo- faciliter l’application de la réglementation
base évolue constamment. Dès gique sont communs à tous les pays sur le terrain. Il est régulièrement mise à
que la disponibilité d’une es- membres de l’Union européenne. jour par le Comité national de l'Agriculture
pèce en semences certifiées bio Biologique (CNAB) de l’INAO.
Le règlement (CE) n°834/2007 établit
est jugée suffisante, elle passe
le cadre juridique applicable à tous les Certaines productions comme l'élevage des
hors dérogation (aucune déro-
niveaux de production, distribution, con- lapins, des poulettes, des escargots et des
gation possible).
trôle et étiquetage des produits biologiques autruches ne disposent pas encore de
Autres autorisations pouvant être proposés et commercialisés règles de production harmonisées au ni-
dans l'UE. veau européen. Il existe donc un cahier
Pour l’instant la réglementation
des charges français, appelé "CCF Bio",
bio autorise, sans dérogation, Il est complété par des règlements d’ap-
pour ces productions. Ces documents
l’utilisation de paille provenant plication, notamment le CE n°889/2008
sont accessibles sur le site de l’INAO.
de cultures conventionnelles qui contient des règles détaillées en ma-
(pour litière uniquement) et tière de production, d'étiquetage et de Une nouvelle réglementation d’ici 2021
d’effluents d’élevage non bio, contrôle et le règlement CE n° 1235/2008,
La réglementation européenne est en cours
dans la mesure où ils ne pro- qui contient des règles détaillées en ma-
de révision. Après trois ans de discussions,
viennent pas d’élevages indus- tière d’importation de produits biologiques
le nouveau règlement cadre (RCE
triels et de préférence compos-
en provenance de pays non membres de
848/2018) a été publié en juin 2018. Il
l'UE. Ces règlements sont disponibles sur
tés. sera complété par des règles de production
le site de la Commission européenne.
détaillées qui sont en cours de discussion.
Un guide de lecture français permet de
4
6/ QUELS SONT LES PRINCIPAUX FREINS TECHNIQUES À
LA CONVERSION BIO EN ALSACE ?

La technicité La monoculture de maïs

En conduite biologique, il n’y a pas de La réglementation bio impose une rotation


rattrapage possible pour la gestion des des cultures, nécessaire pour maitriser
adventices mais aussi des maladies et adventices et maladies et pour la fertilité
parasites. Il est donc nécessaire de tout des sols. Il n’est possible d’avoir la même
mettre en œuvre en amont pour limiter les culture que deux années de suite maxi-
problèmes. Cela passe par l’alternance des mum. Il est donc nécessaire de diversifier
cultures dans la rotation, le choix des va- ses cultures.
riétés rustiques et résistantes, des tech-
Le stockage et triage du grain
niques comme le faux-semis…). Malgré
cela il peut arriver qu’une culture soit ra- En conduite biologique, il peut être néces-
tée. C’est un mode de production qui de- saire de trier rapidement le grain après
mande de la technicité, de l’observation et récolte pour éviter l’échauffement. Etre
de la réactivité pour intervenir au bon équipé pour le stockage et le triage à la
moment. ferme est alors un atout.

« Un des grands principes en bio est la prévention. »

Des variétés inadaptées vert pour compléter la ration.

Pour les cultures pérennes comme les La complexité à gérer la mixité


arbres fruitiers, certaines variétés ne sont
La règlementation bio permet, à certaines
pas adaptées à la conduite biologique car
conditions, de faire coexister bio et non bio
trop sensibles aux maladies. Tous les ver-
sur la même exploitation. On parle alors de
gers ne sont donc pas facile à convertir en
mixité.
AB.
En productions végétales, la mixité est
Des bâtiments d’élevage inadaptés
possible avec des espèces ou variétés faci-
En bio, tout animal doit avoir accès à une lement distinguables au champ et post-
surface suffisante dans le bâtiment et doit récolte. Par exemple, il est possible d’avoir
être libre de ses mouvements. un maïs corné pur et un maïs denté pur,
mais pas possible d’avoir de la mixité sur
A ce titre l’élevage de poules en cage est
les prairies (sauf si elles sont uniquement
interdit, tout comme l’attache des bovins.
pâturées et jamais fauchées). En viticul-
Une dérogation existe pour les petites
ture, il faut des cépages faciles à distin-
structures d’élevage bovins, qui doivent
guer visuellement par un œil non expert
alors sortir les animaux deux fois par se-
(couleur).
maine en hiver, sur une aire d’exercice.
Dans la nouvelle réglementation prévue Il doit s’agir d’unités clairement distinctes
pour application en 2021, l’autorisation de avec une traçabilité des produits. Cela
l’attache sera limitée aux cheptels de implique de bien séparer les parcelles, de
moins de 50 animaux (hors jeunes). gérer des assolements avec des cultures
différentes en grandes cultures. Cela im-
De même la surface en caillebottis ne doit
plique également une bonne traçabilité
pas représenter plus de 50% de la surface
pour le stockage des récoltes et des in-
accessible aux vaches laitières.
trants.
L’absence de pâturage
En productions animales, la mixité n’est
Le pâturage est obligatoire pour les rumi- possible que pour des espèces différentes.
nants élevés en bio et il doit être optimisé. Par exemple, on peut avoir l’élevage bovin
Il n’existe pas de surface minimale par laitier et les terres en bio et un atelier de
vache ni de durée minimale de pâturage, poules pondeuses non bio.
cependant cette question est régulière-
A noter également que les effluents d’un
ment discutée, notamment récemment
élevage bio doivent être épandus sur
avec l’arrivée du lait de pâturage.
des terres en bio. Une exploitation qui
Dans tous les cas, les animaux doivent aurait un atelier d’élevage en bio et une
avoir accès à la pâture pendant toute la partie des terres en conventionnel, ne
période de pacage pour y consommer de pourra pas épandre ses effluents d’élevage
l’herbe (à la différence d’une aire d’exer- sur la partie de ses terres en convention-
cice). Cela n’exclut pas l’affouragement en nel.
5
7/ PRODUIRE EN BIO EST-CE RENTABLE ?

Passer en conduite biologique nécessite similaires (CER France Occitanie, Champagne-


d’adapter le système aux ressources dispo- Ardenne/Bourgogne/ Franche-Comté). Les résul-
nibles, de chercher l’autonomie pour limiter tats économiques des exploitations en con-
les achats extérieurs (intrants bio très cou- duite biologique sont en moyenne supé-
teux). Cela implique souvent de viser des rieurs à ceux des exploitations en conven-
objectifs de rendement et productivité mo- tionnel. Les structures bio sont moins sou-
dérés, qui permettent d’éviter un certains mises à la volatilité du prix des intrants et
nombre de problèmes par exemple au ni- des récoltes. Leurs résultats sont donc plus
veau sanitaire pour le troupeau. stables dans le temps… mais la disparité
est forte entre exploitations en raison de la
Ainsi en cultures d’hiver le rendement en
taille, de la technicité. (ex. Analyse écono-
bio est inférieur de 30 à 60%. Pour les
mique des exploitations en grandes cul-
cultures de printemps, il est possible d’at-
tures bio en Occitanie)
teindre les mêmes rendements si l’azote
n’est pas limitant, ce qui est rarement le Références système bovin lait
cas dans les systèmes bio. Mais qu’en est-
Depuis 2004, l’INRA de Mirecourt (88)
il de la rentabilité économique des exploita-
mène des recherches sur deux systèmes de
tions en agriculture biologique? Elles sont
d’élevage bovins laitiers conduits dans une
globalement plus résilientes, avec des cul-
logique d’autonomie. Après 10 ans, leur
tures plus diversifiées et des charges opé-
analyse montre une rentabilité économique
rationnelles globalement mieux maitrisées.
plus élevé des systèmes biologiques que
Par contre elles nécessitent une bonne
lorsque le domaine était en conventionnel.
maitrise technique.
Le produit brut a augmenté de 25% sur 10
Des résultats en grandes cultures ans et les charges opérationnelles ont été
divisées par deux, notamment par la réduc-
Plusieurs études pluriannuelles menées sur
tion des achats d’intrants. INRA de Mirecourt—
des exploitations spécialisées en grandes
système bovin lait
cultures biologiques ont des conclusions

« Les exploitations bio spécialisées en viticulture, en maraîchage ou dans la production de


lait de vache ont enregistré en moyenne en 2013 une meilleure rentabilité par unité phy-
sique de production et par capitaux engagés que les exploitations conventionnelles. »

Références systèmes bovin lait Alsace et 79% en mécanisation. (source : en-


LES EXPLOITATIONS EN quête chambre d’agriculture d’Alsace – été
Les éleveurs laitiers bio subissent moins de
AB : QUELLES PERFOR- 2017).
fluctuations de revenu. Entre 2012 et
MANCES ÉCONOMIQUES ?
2016, les éleveurs bio de plaine ont subi Les aides à la conversion
De Marie-Sophie Dedieu, Alice une baisse du revenu de 18 % quand elle
La période de conversion peut être délicate
Lorge, Olivier Louveau, Vincent était de 79 % en conventionnel. Ils ont
Marcus* INSEE 5/12/2017 au niveau économique et en terme de
gagné en moyenne 18 800€/UTH/an soit
trésorerie. Pour cela, les montants de
« Avec des surfaces et/ou des 7000€ de plus qu’en conventionnel. Le
l’aide à la conversion ont été calculés pour
cheptels plus petits qu’en conven- prix du lait en bio était supérieur de 107
couvrir les charges supplémentaires liées à
tionnel, les exploitations bio €/1 000 L en moyenne sur les 5 dernières
spécialisées en viticulture, maraî- la conduite bio, qui ne sont, durant les
années. (source : CAA, échantillon de 19
chage ou dans la production de lait premières années, pas encore compensées
fermes bio, 58 fermes non bio).
de vache ont enregistré en par des prix de vente plus élevés. L’aide
moyenne en 2013 une meilleure En montagne, le revenu moyen des éle- est versée pendant 5 ans et n’est pas
rentabilité par unité physique de
veurs laitiers bio est de 7455€/UTH/an, à plafonnée en Alsace.
production et par capitaux engagés
peine plus élevé qu’en conventionnel
que les exploitations convention-
(+100€). Au niveau du prix du lait l’écart Aide Conversion
nelles. Ce différentiel de perfor- Couvert
mance peut avoir plusieurs ori- se creuse. En moyenne sur 5 ans, le prix €/ha/an
gines : une meilleure valorisation était de 432€/1000 L en bio contre 333€ Landes et parcours 1 44
des productions biologiques du fait en conventionnel. (source : CAA, échantil- 1
de prix plus élevés qui compensent
lon de 9 fermes bio, 11 fermes non bio).
Prairies 130
une productivité plus faible, une 2
meilleure maîtrise des consomma-
Cultures annuelles 300
Références coûts viticulture en Alsace
tions intermédiaires, parfois des Viticulture 350
subventions dédiées qui viennent Le surcoût de production entre un itiné-
soutenir les résultats, ou encore un raire conventionnel et un itinéraire bio a Légumes plein champ 450
recours plus systématique à la été estimé à 15 %. Cela vient du fait que Maraîchage, arbo, PAM 900
commercialisation des produits en
le travail du sol nécessite plus de main
circuits courts. D’autres facteurs,
d’œuvre, mais aussi de l’investissement en
indépendants du mode de produc- (1) associé à un atelier d’élevage (chargement minimum de

tion, sont susceptibles de contribuer matériel d’entretien mécanique des sols 0,2 UGB/ha)

aux différences observées. » notamment pour la gestion du cavaillon. (2) Cultures annuelles et prairies artificielles, semées à plus
Ainsi, on a estimé que la conduite bio en- de 50% de légumineuses et mise en culture au moins
6 trainait un surcoût 23 % en main d’œuvre une fois sur les 5 années.
8/ COMBIEN DE TEMPS FAUT-IL POUR PASSER EN BIO ?
Définition de la conversion

La période conversion corres-


Cultures pérennes (voir liste ci-contre) Il est possible d’étaler l’engagement en bio pond à la phase de transition
des parcelles sur plusieurs dates. Il faut entre un mode de production
La période de conversion est de 36 mois et conventionnel et l’obtention de
alors être vigilant au choix de l’assolement
la valorisation en bio est conditionnée à la la certification « agriculture
pour éviter d’avoir les doublons de culture. biologique ». Durant cette
date de récolte.
période, le producteur suit les
Il est donc préférable de s’engager avant
règles de production de l’agri-
les semis pour les cultures annuelles et culture biologique, sous le
Cultures annuelles, semi-pérennes* avant les récoltes pour les cultures pé- contrôle d’un organisme certi-
rennes ou semi-pérennes. ficateur, mais les produits
La période de conversion est de 24 mois. restent commercialisés dans
La valorisation en bio est conditionnée à la Pour les surfaces de parcours de ani- les filières classiques.
date de récolte pour les cultures semi- maux, la conversion dure 12 mois.
pérennes et la date de semis ou plantation
La période de conversion peut être réduite Cultures semi-pérennes
pour les cultures annuelles. Dans ce der-
dans certains cas : prairies naturelles,
nier cas, les cultures doivent effectuer tout Cultures maraîchères
friches... justifiant de l’absence de produits
leur cycle en bio pour être vendues en bio. (asperges et artichauts), pe-
interdits en AB depuis plus de 3 ans.
tits fruits avec fructification sur
le bourgeon de l’année
(fraises, mûres, framboise…),
fenouil, anis, menthe, marjo-
laine, aneth, angélique, sa-
fran...

01/05/2019 01/05/2020 01/05/2021


Cultures pérennes

Vigne, vergers, houblon, petits


fruits avec fructification sur le
1/05/2021
bourgeon de l’année précé-
dente (groseilles, cassis, myr-
tilles), lavandin, thym, estra-
gon, hysope, sauge sclarée et
officinale, romarin, rose de
mai, mélisse, origan, verveine,
Schéma de conversion en productions végétales annuelles et semi-pérennes gogi, camomille, bardane,

En productions animales allaitants, car elle permet de s’affranchir


de la règle des ¾ de la vie en bio.
La durée varie selon l’espèce animale et le
produit : lait ou viande (voir tableau ci- En élevage bovin lait, les éleveurs choisis-
contre). sent plutôt la conversion non simulta-
née (2). Ils engagent d’abord les terrains
Ainsi pour les bovins et équins, la conver-
et, 12 à 18 mois plus tard, le troupeau. Le
sion est de 6 mois pour le lait. Mais il faut
lait est bio après les 6 mois de conversion
12 mois minimum, avec la nécessité que
du troupeau, sous conditions que la part
l’animal ait été nourri en bio durant les ¾
en « pâturage, fourrages de cultures pé-
de sa vie pour que la viande soit considé-
rennes ou de protéagineux semés sur des Tableau des durées de conversion
rée bio. Deux possibilités se présentent en fonction de la production
parcelles en 1ère année de conversion
alors pour l’éleveur. Réaliser une conver-
(C1) » se limite à 20% de la ration an-
sion simultanée des surfaces et des ani-
nuelle (calcul par période de 6 mois).
maux (1). Dans ce cas, à l’issue des 24
Dans ce cas, la viande ne pourra être ven-
mois, les parcelles et l’ensemble des ani-
due en bio que pour les animaux ayant été
maux, quel que soit leur âge, est bio. Cette
nourris en bio au minimum 12 mois et ¾
option est choisie en élevage de bovins
de leur vie.

01/05/2019 01/05/2020 01/10/2020 01/05/2021

1/04/21

1/10/20

Schéma de conversion en élevage bovin 7


ORGANISMES 9/ LES DÉMARCHES POUR S’ENGAGER EN AB SONT-ELLES
CERTIFICATEURS DE COMPLIQUÉES ?
L’AB ACTIFS EN ALSACE
Les démarches d’engagement en AB sont (si la réglementation bio est respectée à
simples et rapides. partir de cette date, que les stocks
d’intrants non bio sont écoulés ou reven-
1/ Contacter les organismes certifica-
dus). Un auditeur passera sur l’exploitation
teurs pour faire des devis.
dans les premières semaines qui suivent
2/ Remplir le formu- l’engagement.
laire de notification sur
L’engagement peut se faire n’importe
le site de l’agence bio.
quand dans l’année mais la période est à
3/ Renvoyer le dossier d’engagement réfléchir pour optimiser la durée de la
à l’organisme certificateur choisi. période de conversion et en diminuer le
coût. Elle est généralement réalisée aux
Ensuite, l’exploitant peut solliciter les aides
périodes de semis en grandes cultures, au
à la conversion lors de la déclaration PAC.
printemps en élevage bovin et avant la
La conversion démarre lorsque l’organisme période de récolte en cultures pérennes.
certificateur accuse réception du dossier

LE POLE CONVERSION 10/ QUEL ACCOMPAGNEMENT EST PROPOSÉ EN ALSACE ?


BIO ALSACE
En Alsace, l’accompagnement des projets 3. Simulation technico-économique :
Il a été créé en 2010 entre de conversion est réalisé par la Chambre réalisée par Pascale KNEPFLER, du
l’OPABA et la Chambre d’agricul- d’agriculture et Bio en Grand Est (OPABA) service économique CAA (Prestation :
ture d’Alsace pour : dans le cadre du pôle conversion bio. Il 142€ HT), ou en lien avec les centres
est adapté aux besoins et au temps néces- de comptabilité et gestion.
- Sensibiliser professionnels, étu-
saire au porteur de projet pour mûrir sa
diants, opérateurs à l’AB (Fermes 4. Accompagnement sur la valorisa-
réflexion.
ouvertes, Mois de la bio…) tion des produits proposé par
1. Visite de sensibilisation ou jour- l’OPABA (Analyse des circuits de valo-
- Favoriser l’accompagnement des
née d’information collective pour risation, mise en relation avec les
porteurs de projet à l’AB.
don n e r l es ba s es de l ’A B opérateurs.
- Coordonner et harmoniser le (règlementation, démarches, atouts
Une fois engagé, le producteur dispose du
travail des conseillers en AB et freins de la ferme pour passer en
suivi technique de la Chambre adapté à
(procédures harmonisés, outils). bio). Par les conseillers référents du
la conduite biologique : individuel (contrôle
pôle : conseillers OPABA, Sophie DE-
Double contact : de performances, prestation de suivi) ou
LATTRE, Benoît GASSMANN (CAA).
collectif (flashs et réunions techniques,
Tél. 03 89 20 97 74
2. Appui technique personnalisé avec rdv bout de parcelle en saison).
pole.conversion@alsace.chambagri.fr
les conseillers spécialisés de la CAA
Tél. 03 89 24 45 35 L’OPABA intervient pour la structuration
pour caler les hypothèses techniques
pole.conversion@opaba.org des filières et facilite les échanges entre
du projet (Prestation : 142€ HT).
producteurs bio par le biais d’une bourse.

En plus de cet accompagnement, l’équipe (expérimentation) et technico -


bio mène des actions de sensibilisation à économiques. Avec l’aide des conseillers
l’agriculture biologique (Mois de la bio, spécialisés des différents services, un suivi
déplacement au Salon Tech & Bio, articles technique des producteurs est assuré dans
Rédaction : Sophie DELATTRE Coin du bio…), réalise un travail d’acquisi- toutes les filières de production (suivi ma-
sophie.delattre@alsace.chambagri.fr tion de références techniques raîchage assuré par Planète légumes).

Version du 3 mai 2019 De gauche à droite :


Sophie Delattre
Crédit photos : Chambre (réglementation, conversion)
d’agriculture d’Alsace
Daniel Brua (économie)
Pascale Knepfler (économie)
Benoît Gassmann (grandes
cultures)
Marie-Line Burtin
(responsable)
Jérôme Attard (viticulture)
Dorothée Stock (économie)
Philippe Le Stanguennec
(lait 67)
Alain Marcillet (lait 68)

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