Nothing Special   »   [go: up one dir, main page]

8 - Psychiatrie de Liaison OK

Télécharger au format docx, pdf ou txt
Télécharger au format docx, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 4

Psychologie médicale

Psychiatrie de liaison
Semaine 4 Heure : 10h – 11h Professeur : Horn
Date : 18/11/2021
Remarques du professeur : mathilde.horn@chru-lille.fr
La psychiatrie de liaison est la psychiatrie en dehors des services de psychiatrie, c’est-à-dire les patients
admis dans un service pour une autre pathologie. À Lille, on a un service de psychiatrie (Fontan : unité de
soins ouverte, fermée, de recours). C’est une équipe mobile qui se déplace dans tous les services pour
prendre en charge des patients qui présentent des problèmes psychiatriques.

I. Préambule

Les demandes en psychiatrie de liaison augmentent chaque année un petit peu plus, car il y a plus de
patients à l’hôpital. Les durées de séjour sont plus courtes, il y a beaucoup plus de soins obligatoires,
beaucoup plus de brassage de patients à l’hôpital et donc a fortiori, plus de patients en demande d’une prise
en charge psychiatrique.

A. La demande

Cette demande est double, elle peut émaner de 2 types de personnes différentes :
- Le service dans lequel est hospitalisé le patient qui va constater que le patient est anxieux, déprimé, a
des problèmes de sommeil, un comportement un peu bizarre.
- Mais aussi le patient qui va demander à l’équipe de voir un psychiatrie ou un psychologue car il se
sent en souffrance.
Parfois personne ne demande : interpellation par les collègues ou le service des urgences, le service n’a
rien repéré mais il existe bien une pathologie (souvent peu bruyante). Le service ne va jamais se rendre
compte qu’il y a un problème parce que le patient ne fait rien, il passe toute sa journée dans son lit.

B. Motifs de consultation

Quand on est sollicités pour passer dans les services pour évaluer ces patients, on peut être amené à voir :
- Les motifs habituels vus dans les services de psychiatrie : tous les troubles psychiatriques que les
psychiatres savent prendre en charge
- Les choses spécifiques de la psychiatrie de liaison qui concernent uniquement les patients qui sont
hospitalisés en hôpital général :
o Troubles de l’adaptation à l’environnement de l’hôpital
o Douleur : qui ne répond pas aux traitements antalgiques et on dit qu’il y a quelque chose de
psychiatrique ou psychologique associé parce que le patient se tord de douleur. Sa
manifestation douloureuse est disproportionnée par rapport à l’intensité réelle de la douleur.
o Patients en détresse psycho-sociale
o Le refus de soins et d’intervention : ce sont des patients qui doivent se faire opérer mais qui
refusent l’intervention. On leur dit que s’ils refusent ils ont un risque vital, et la personne
réitère son refus. Souvent les praticiens sont assez mal à l’aise dans cette situation et
appellent le psychiatre en demandant s’il a bien compris, s’il ne délire pas, s’il n’est pas
suicidaire pour essayer de comprendre pourquoi ces patients refusent les soins. Les
psychiatres sont dans une position où il faut évaluer l’état psychiatrique de la personne, ne
pas répondre à la question de refus de soin qui ne relève pas du psychiatre. À partir du
moment où la personne a compris ce qu’il se passait et on sent que psychiatriquement, il n’y a
pas de pathologies, on s’arrête là et ça relève de la relation entre le praticien et son patient. Il
va lui expliquer les enjeux et le patient a le droit de refuser une intervention, il a le libre
arbitre. Les psychiatres ne sont pas là pour aller dire à un patient ce qu’il doit faire. Le travail
du psychiatre (qui est à expliquer au médecin car parfois ils attendent des psychiatres qu’ils
puissent forcer le patient à se soigner) n’est pas de convaincre de se faire soigner mais juste

Page 1 sur 4
d’évaluer qu’il n’y a pas de troubles psychiatriques dans ce contexte qui altérerait le jugement
de la personne et sa capacité à consentir aux soins.

II. Le contexte de la psychiatrie

La psychiatrie, même pour les médecins qui ont fait des études médicales, reste quelque chose de parfois
assez stigmatisé.
Quand on parle de cancer, on évoque des images très scientifiques. Quand on parle de dépression, on voit
juste des gens qui se tiennent la tête entre les mains, mais ce sont 2 pathologies reconnues dans la
classification des maladies.

Pour beaucoup de personnes, ce n’est pas encore une maladie mais un problème de personne, de souffrance
individuelle. L’idée que la psychiatrie comme spécialité médicale avec des pathologies avec des bases
biologiques, même si elles ne sont pas encore toutes identifiées aujourd’hui, avec un ensemble de signes, de
symptômes, de diagnostics, de traitements, c’est pas quelque chose qui est admis. Si on ne fait jamais de
psychiatrie de notre vie, il faut juste retenir que la psychiatrie est une spécialité au même titre que toutes
les autres spécialités exercées par les médecins, qui est basée sur des données scientifiques avec des
champs de recherche.

Quand on parle de maladie psychiatrique, ce n’est pas un ressenti. Comme d’autres pathologies, on
recherche des signes (à la différence des autres spécialités, ce ne sont pas forcément des signes physiques,
d’auscultation, biologiques). On les repères sur la manière dont se présente le patient, la manière dont il va
s’exprimer. Ça reste un ensemble de signes, qu’on va regrouper pour en faire des syndromes et ces
syndromes amènent à un diagnostic, et à ce diagnostic médical est associé des recommandations de prise en
charge médicale, à la même logique que n’importe quelle autre spécialité, ce qui est vraiment important à
retenir parce que c’est quelque chose qu’on oublie très vite.

III. Définition d’un trouble psychiatrique

Un trouble psychiatrique, c’est une interaction entre un fait biologique et une valeur sociale.
De manière générale, dans toutes les pathologiques psychiatriques ou non, on parle souvent d’interaction
biologique et environnementale, c’est-à-dire qu’avec les mêmes prédispositions génétiques, on a un état
biologique qui nous prédispose à la maladie, et ce qui va la déclencher, c’est la rencontre avec un facteur
environnemental. C’est l’association des deux qui est importante.

Dans la psychiatrie plus particulièrement, on parle de troubles psychiatriques lorsqu’il y a une défaillance
des mécanismes internes à réaliser des fonctions pour lesquelles ils ont été façonnés par la nature,
c’est-à-dire que le cerveau est censé réaliser des choses, il est conçu pour ça, et quand ça ne se fait plus, c’est
là qu’on parle de troubles psychiatriques, à condition que cette défaillance affecte le bien-être du patient.
Si jamais quelque chose ne se fait plus mais qu’il n’y a aucune conséquence sur le plan fonctionnel, sur le
bien-être, on ne parlera pas de troubles. La condition est qu’il y a des conséquences sur le fonctionnement et
sur le bien-être. Ce bien-être est caractérisé par les valeurs qu’on a et par les considérations sociales.

IV. La psychiatrie de liaison : une discipline à part entière

A. Les difficultés de la psychiatrie de liaison

Contrairement à la psychiatrie en service habituel, les patients qui sont admis en service psychiatrique le
sont pour des troubles psychiatriques donc ils savent pourquoi ils viennent. C’est « soumis » au
raisonnement et à la manière de gérer les troubles psychiatriques. Dans la psychiatrie de liaison, on va nous
demander de faire de la psychiatrie dans un environnement qui n’est pas celui d’un service de soins
psychiatriques. On va devoir apporter les compétences et les recommandations de prise en charge dans un
service qui au départ est orienté, organisé pour des soins qui sont autres.

Page 2 sur 4
Il peut y avoir des discordances entre ce que nous recherchons à faire, ce que nous avons comme objectif de
prise en charge en tant que psychiatre, et ce que va attendre le service qui nous interpelle.
La première chose c’est la chronologie. En général, les services veulent une réponse à une situation
immédiate, c’est-à-dire que le patient ne va pas bien, il s’agit, on veut une réponse. Les psychiatres vont
plutôt avoir une vision très longitudinale de la situation, c’est-à-dire qui « oui » il a un trouble du
comportement mais on va se demander : pourquoi il a ce trouble du comportement, est-ce qu’il a une
maladie psychiatrique, est-ce qu’il a déjà fait des états similaires avant... Ensuite, que va devenir le patient
sur le long terme : est-ce qu’il va être hospitalisé en psychiatrie ou non, si oui dans quel service, de quelle
manière... Parfois, on a des situations compliquées parce que les services voudraient des réponses
immédiates ou alors un diagnostic qui a besoin d’un traitement alors que les traitements psychiatriques
mettent plusieurs semaines à agir.
On n’est pas vraiment dans la même dynamique dans les soins psychiatriques que ceux d’un certain nombre
de services. On va plus être sur des chronologies similaires avec les services de rééducation.

En fonction des demandes, parfois on demande des choses qui ne sont pas de leur compétence.

Sur les personnes difficiles (troubles du comportement, agitation, beaucoup de manifestations différentes) :
on veut que ces patients partent en psychiatrie car ils posent des soucis, ils désorganisent le service. Mais les
psychiatres proposent une prise en charge multidisciplinaire car c’est souvent une intrication entre une
pathologie, un trouble du comportement, un traitement qui peut aussi favoriser les troubles du
comportement. Le principe est d’apporter les compétences dans une prise en charge globale du patient, là où
certains services vont avoir tendance plutôt à essayer de transférer le patient en psychiatrie, en considérant
que ce n’est pas dans leur mission de gérer les troubles du comportement.

Les services sont plutôt sur des séjours d’hospitalisation courts. Les médecins sont peu enclins à garder des
patients atteints de troubles psychiatriques, là où ils le feraient plus facilement pour d’autres troubles.

B. Les missions des équipes de psychiatrie de liaison

Faire les diagnostics : c’est l’une des premières missions. Les médecins se lancent assez peu dans le
diagnostic psychiatrique de manière générale. On appelle les psychiatres parce qu’un patient est triste,
anxieux, bizarre, agité. La première mission est de re-contextualiser avec un vrai diagnostic, proposer un
traitement, orienter le patient (traitement suffisant, suivi avec un psychiatre, hospitalisation en psychiatrie
car troubles pas assez stabilisés...).

Enseigner et former aux notions de la psychiatrie : l’idée étant qu’on ne pourra pas demander à tous les
médecins de devenir des psychiatres, mais peut-être de savoir repérer, gérer dans son service un patient avec
risque suicidaire, savoir qu’on peut poser la question du risque suicidaire à un patient, c’est pas pour ça que
ça va lui donner l’idée de se suicider, au contraire ils sont soulagés qu’on leur pose la question. Savoir
enseigner aux médecins à repérer des signes d’alerte qui permettent d’appeler le psychiatre et pas seulement
quand le patient retourne dans le service et qu’on ne s’en sort pas, mais aussi pour des choses plus
insidieuses qu’on n’aurait peut-être pas repérées.

C. Exemple : la dépression

La dépression est le motif d’appel le plus fréquent, car c’est la pathologie psychiatrique la plus fréquente :
1 personne du 5 a une dépression au cours de sa vie.
C’est associé avec des nombreux troubles physiques. Des recherches ont permis de mettre en évidence
qu’il existait des bases communes entre la dépression et d’autres troubles. Il faut se sortir l’idée qu’on est
déprimé parce qu’on a une maladie. Plein de personnes ont des maladies et ne dépriment pas. La dépression
est une maladie à part entière, parce que le cerveau est en souffrance pour des raisons de micro-
inflammations au niveau cérébral qui seraient à l’origine de la dépression. Toutes les maladies
inflammatoires vont être liées à une inflammation au niveau de l’organisme, et cette inflammation va aussi
exister au niveau cérébral et déclencher une dépression. On a donc beaucoup de dépression chez les patients
qui ont une autre pathologie.

Page 3 sur 4
La même chose existe avec le stress (physique, agression de l’organisme). On sait que l’abus du stress peut
déclencher une cascade sur le plan biologique, activation de sécrétion de cortisol, d’adrénaline qui vont
avoir des répercussions cérébrales et qui peuvent entraîner des troubles comme la dépression.

On sait que la comorbidité dépressive majore la durée de séjour. La dépression entraîne un temps à
l’hôpital plus important pour une même pathologie. Il est donc important de traiter la dépression en même
temps que l’autre pathologie, car cela va avoir des répercussions sur le plan psychiatrique mais aussi sur le
plan de l’autre pathologie. Il y a plusieurs raisons à cela :
- Si on est déprimé, on prend moins bien son traitement donc on a une moins bonne observance, et
des conséquences sur les soins
- Moins de mobilisation : patient peu actif, va peu s’alimenter, reste dans son lit, et donc récupère
moins vite
- Traitement aussi des micro-inflammations : on arrive plus facilement à un système d’équilibre

La dépression saisonnière est liée au fait qu’il y a moins de lumière et d’autres facteurs. Ça peut avoir un
lien avec les pathologies physiques comme ça peut être aussi indépendant. Par contre, les mécanismes
d’inflammation peuvent être impliqués dans ces dépressions saisonnières à cause du manque de lumière, on
a moins de vitamines qui sont synthétisées par la lumière comme la vitamine D.

On travaille en équipe quand on va voir les patient. On le souvent en binôme interne ou psychiatre avec une
infirmière. Ça permet d’avoir une personne qui a du recul, quand on est face à face au patient il y a des
choses qu’on ne repère pas, car on est pris par les réponses que le patient nous livre, les questions que vous
allez poser et quelqu’un qui observe juste ce qu’il se passe peut parfois vous donner un peu plus
d’informations. On ne fait pas plus de 2 sinon c’est trop imposant et agressif pour le patient. En binôme on
crée plus facilement un climat de confiance.

Le psychologue est interpellé pour toute souffrance qui n’est pas liée à des pathologies psychiatriques.
Beaucoup de gens sont tristes, ou en souffrance mais ne sont pas malades.
On peut faire les 2. Par exemple, un patient qui a une dépression : le psychiatre va l’évaluer, poser un
traitement antidépresseur, faire l’éducation, informer du diagnostic. Le psychologue passe entre temps pour
essayer d’améliorer un peu les symptômes, de soutenir le patient.

Page 4 sur 4

Vous aimerez peut-être aussi