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Cours Hugo

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Victor Hugo (1802-1885)

Victor Hugo naît le 26 février 1802 à Besançon. Sa jeunesse est entrecoupée de nombreux
voyages à travers l’Europe, car la carrière d’officier de son père oblige celui-ci et sa famille de voyager.
Après la séparation de ses parents, Victor et ses deux autres frères vivront à Paris avec leur mère,
Sophie. Victor hésitera toujours dans ses affections entre son père, le général d’Empire tour à tour craint
et admiré, et sa mère, royaliste, dont il idéalisera longtemps l’indulgence.
Le jeune Hugo commence des études à l’École Polytechnique, mais ses premiers succès
littéraires lui font oublier ce projet. Il est aussitôt célébré par le monde littéraire comme un prodige. Il
rassemble autour de lui les jeunes écrivains et s’emploie à définir un nouvel art dramatique dans la
préface de son drame Cromwell (1827), où il prend nettement position en faveur du romantisme et
contre le classicisme. Dans ce manifeste du théâtre romantique, Hugo affirme la supériorité du drame,
synthèse entre la tragédie et la comédie, en démolissant les règles classiques, excepté la règle de l’unité
d’action. Le romantisme est, selon lui, un retour à la vérité et à la vie : « tout ce qui est dans la nature
est dans l’art». Tout peut devenir matière poétique ou littéraire : le sublime et le grotesque, le laid, le
tragique et le comique. Le drame suppose une harmonie des contraires.
Victor Hugo devient le chef de file de l’école romantique et son théâtre, la tribune des idées
nouvelles et des audaces littéraires. En moins de dix ans, Hugo écrit huit drames, dont Hernani (1830),
qui déclenche une bataille mémorable. Lors de sa première représentation, à la Comédie française, le
public traditionnel fut choqué par «la trivialité» des dialogues, l'usage d'un vocabulaire qui n'avait pas
cours dans la tragédie classique et par les distorsions que Hugo faisait subir à l'alexandrin classique. Par
leurs applaudissements, les jeunes défenseurs du romantisme forcent le succès du drame.
Victor Hugo connaît alors une intense activité littéraire dans tous les genres. De 1830 à 1840,
quatre recueils de poésie lyrique (Les feuilles d’automne, Les chants du crépuscule, Les voix intérieures,
Les rayons et les ombres), un roman (Notre-Dame de Paris) et son drame Ruy Blas font de lui un grand
écrivain de sa génération. En 1841, il entre à l’Académie française. Cette période féconde est pourtant
assombrie par des chagrins personnels. Son ménage est brisé par la trahison de son ami Saint-Beuve. La
mort de sa fille aînée Léopoldine, en 1843, noyée accidentellement dans la Seine avec son mari, lui
produit un choc terrible. Il cesse de publier des livres (mais il ne cesse pas d’écrire) et se lance dans la vie
publique. Bien qu’il soutienne initialement Louis-Napoléon, il change de camp et devient vite un
opposant de celui qu’il considère comme un tyran. Il est obligé de s’enfuir en Belgique et il est exilé
ensuite dans les îles anglaises de la Manche. Hugo reste en exil presque 20 ans, écrivant des satires
contre celui qu’il appelle «Napoléon le petit». Mais c’est aussi l’époque où il produit ses plus grandes
œuvres : Les contemplations (1856), La légende des siècles (1859) et Les misérables (1862). Pendant
toutes ces années, son influence grandit. La publication clandestine des Châtiments (1853), recueil de
sept livres, où le poète exprime sa haine de Napoléon III, fait de lui le phare de l’opposition au Second
Empire. La chute de l’Empire, en 1870, permet à Hugo de rentrer en France. La foule qui l’accueille crie  :
«Vive Hugo ! Vive la République !». Après 15 ans, en 1885, une foule de deux millions de personnes
participera à ses funérailles nationales. Il fut enterré au Panthéon.
Hugo avait une forte personnalité et était pleinement conscient de son génie. Il aimait jouer les
patriarches tout-puissants. Il en tirait un orgueil que beaucoup de critiques ont jugé excessif.

L’œuvre poétique
À ses débuts, Hugo se contente d’imiter le lyrisme de Lamartine et son inspiration est souvent
dictée par la mode du moment, comme en témoigne son engouement pour la Grèce et l’Orient, dans
Les orientales (1829). À partir des Feuilles d’automne (1831), le lyrisme de Hugo se développe dans toute
son ampleur. Le poète s’y laisse aller à la rêverie. Amis, parents, enfants, paysages et souvenirs, tout ce
qui le touche entre dans cette poésie intime.
Dans Les rayons et les ombres (1840), le quotidien, les sentiments intimes trouvent leur sens
dans un «ailleurs» qui correspond à l’importance que prennent chez Hugo l’imagination et le sentiment
religieux. Le premier texte du recueil définit la «fonction du poète» : il est le voyant, le prophète qui
«Vient préparer des jours meilleurs», qui doit «faire flamboyer l’avenir !». Le poète, comme tout
créateur, a une mission éducative, il doit être un guide de l’humanité.
Les contemplations (1856), le recueil poétique le plus important de Hugo, se compose de deux
tomes : Autrefois (1830-1843) et Aujourd’hui (1843-1845), composés de trois livres chacun. Au centre du
diptyque, il y a une date : 4 septembre 1843, la mort de Léopoldine. Le recueil est construit autour de
cet événement. Aujourd’hui rassemble les poèmes inspirés par le deuil, le souvenir, la solitude de l’exil,
la révolte et la méditation sut la mort. Hugo dépasse l’aventure individuelle pour atteindre l’Homme et
sa destinée. Dans ce journal poétique, il donne sa vision sur l’humanité : si elle souffre de son
imperfection, c’est parce qu’elle est faite de matière. Elle doit s’en libérer pour rejoindre le monde de
l’esprit. Toute l’histoire des hommes est celle de ce combat entre le mal et le bien, l’obscurité et la
lumière.
La légende des siècles (1859, 1876, 1883) est le seul vrai poème épique de la littérature
française. Hugo n’a pas écrit un poème suivi, à l’exemple de l’Iliade, mais il a composé des épisodes
détachés. Le poète veut peindre l’humanité à ses différents âges et montrer «l’homme montant des
ténèbres à l’idéal», la lutte éternelle entre le Bien et le Mal. Hugo y raconte l’histoire vue à travers
l’imagination populaire ou la sienne. Le merveilleux y trouve naturellement sa place.
Le but du poète est de «devenir l’écho sonore» de toutes les aspirations et de toutes les
sensations de son époque. Selon lui, notre vie a trois aspects : le foyer, le champ et la rue : «Le foyer qui
est notre cœur même, le champ où la nature nous parle, la rue où tempête, à travers les coups de fouet
des partis, cet embarras de charrettes qu’on appelle les événements politiques» (préface des Voix
intérieures). C’est cette triple voix qu’il se propose de faire entendre dans ses poèmes. Son lyrisme
célèbre la poésie du foyer, avec la famille et la patrie, la poésie de la nature, la poésie des événements,
en donnant une grande place à l’actualité.
Hugo est très réceptif aux images, étant doué d’une incroyable mémoire visuelle. Ses évocations
et ses descriptions sont très précises. L’image sert mieux à faire saisir une abstraction ou à exprimer des
notions indicibles comme l’Infini, le Temps et l’Éternité. Inversement, l’image se transforme aussi en
idée. C’est pourquoi l’œuvre de Hugo contient tant de poèmes symboliques, c’est-à-dire d’images
développées : le génie est un cheval fougueux qui emporte un captif attaché sur son dos ( Les
orientales) ; le progrès est comme un ballon qui s’élève (La légende des siècles).
Victor Hugo utilise la rime avec beaucoup de sûreté, recourant aux formes les plus variées, en
fonction de ce qu’il désire exprimer. La rime est riche, par exemple, si Hugo veut donner une impression
de grandeur épique et pauvre, quand il évoque l’intimité. On trouve chez lui les types les plus variés de
strophes et de vers. Le poète utilise souvent l’alexandrin, mais le mêle parfois à l’octosyllabe ou à
d’autres types de vers. Dans les Contemplations, les vers de douze et de six pieds alternent souvent.
C’est en modifiant la coupe de l’alexandrin (la césure) qu’il obtient des effets rythmiques inouïs.

L’œuvre romanesque
L’œuvre romanesque de Victor Hugo est ample, passionnée et multiforme, embrassant une
variété de formules narratives : des romans noirs, historiques, sociaux, d’idées, à thèse, etc.
Les premiers romans, Han d’Islande (1823) et Bug-Jargal (1826), présentent des histoires
terrifiantes et exotiques au goût de l’époque. Le dernier jour d’un condamné à mort (1829) contient déjà
les principaux fantasmes hugoliens, les thèmes de l’emprisonnement et de l’aliénation de l’individu, la
défense de la liberté, l’opposition l’ombre/la lumière, etc. Les romans les plus grands de Hugo sont
considérés Notre-Dame de Paris (1831), Les misérables (1862), Les travailleurs de la mer (1866),
L’homme qui rit (1869) et Quatre-vingt-treize (1874).
Le personnage hugolien est toujours peint selon l’esthétique du contraste et du renversement.
L’action du roman est dirigée par la Providence, par la sombre formule Ananké au sens lugubre et fatal,
gravée sur les murs de la cellule de Claude Frollo (Notre-Dame de Paris) et figurée par une immense
araignée. Les hommes se débattent sans espoir dans sa toile maudite.
Pour écrire son roman Notre-Dame de Paris (1831), Hugo avait rassemblé une importante
documentation sur Paris au XVe siècle. Le roman vit par ses vertus descriptives, par l’évocation
pittoresque et par la vision onirique du Paris du Moyen Âge. Il s’agit d’un roman historique, à idées et
dramatique à la fois. L’intrigue amoureuse reste mélodramatique et traduit une inclination très
accentuée pour le mystère, l’horreur et le macabre. Les seules présences véritables sont les foules, la
ville et la cathédrale. La vie hallucinante de la cathédrale polarise les autres existences.
Le sonneur Quasimodo, dont la silhouette difforme semble s’unir aux formes bizarres de
l’édifice, aux démons en pierre qui gardent les tours, illustre le personnage idéal projeté par Hugo dans
la préface de Cromwell, ce mélange de grotesque et de sublime, propre à l’art gothique. Ayant un aspect
dégoûtant et effrayant (il est bossu, borgne et sourd), il subit une transfiguration spirituelle, grâce à la
pitié et à la tendresse. Enfant trouvé, il a été élevé par l’archidiacre Claude Frollo, pour lequel il éprouve
une humble reconnaissance. Rejeté par les autres à cause de sa difformité, Quasimodo considère la
cathédrale comme sa patrie, comme une amante. Après sa tentative d’enlever la gracieuse danseuse
Esmeralda, le personnage est mis au pilori et torturé. La jeune bohémienne est aimée à la fois par le
capitaine Phoebus et par le poète vagabond Gringoire, interprété comme un double ironique du
romancier. Elle est également poursuivie, avec une passion funeste, par Claude Frollo. Bien qu’elle soit
attirée uniquement par Phœbus, Esmeralda a envers Quasimodo un comportement émouvant qui
contraste avec l’attitude de la foule, ce qui fait naître en celui-ci des sentiments inattendus de
dévouement et de bonté. Dans un roman dominé par la fatalité, Quasimodo devient à la fin l’image de la
vengeance. Il jette dans le vide, des hauteurs de la cathédrale, son père adoptif, qui avait livré Esmeralda
aux bourreaux. Le sonneur meurt ensuite sur le cadavre de la danseuse qui lui a ouvert une porte vers le
monde de la tendresse et du bonheur.
Le roman Les misérables (1862) (16 ans de travail) comporte 8 volumes, qui composent, selon
les vœux de l’auteur, «une montagne», «le poème de la conscience humaine». Hugo s’assigne une
mission morale, sociale et politique clairement affirmée dans la préface : « Tant qu’il existera, par le fait
des lois et des mœurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et
compliquant d’une fatalité humaine la destinée qui est divine ; […] tant qu’il y aura sur la terre ignorance
et misère, des livres de nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles.». Le roman a joui d’un immense
succès populaire. Cette œuvre monumentale est une variation sur quelques thèmes qui apparaissent
surtout dans la dramaturgie hugolienne : l’incarcération/l’évasion, le retour du passé accusateur, la
relation persécuteur/persécuté. On retrouve aussi le procédé des digressions qui entrecoupent la
narration, les allusions aux événements contemporains.
À un premier niveau de lecture, cette histoire d’un bagnard condamné pour avoir volé du pain a
une signification sociale : la volonté du romantisme humanitaire de réhabiliter la notion de peuple. Mais
ce récit mythique des déshérités de la vie est centré finalement sur des questions morales. Les
biographies de l’ancien forçat Jean Valjean et de l’étudiant Marius (fils d’un colonel de l’Empire), de la
prostituée Fantine et de sa fille Cosette s’entrecroisent avec celle des insurgés républicains ou du
«gamin de Paris», Gavroche, pour former un roman du rachat et des sacrifices successifs.
Jean Valjean réussit à s’échapper du bagne et a, pour la première fois, la révélation de la charité
humaine, dans la personne de l’évêque Myriel. Devenu honnête, le héros s’enrichit grâce à son travail et
veut se consacrer à l’éducation de la petite Cosette, restée orpheline. Mais il doit passer par toute une
série d’épreuves, changer toujours d’identité et de domicile, qui sont, en réalité, des formes de prison. Il
est sans cesse traqué par le policier Javert qui incarne, à la fois, la Fatalité, la force sociale et la justice
cruelle des hommes. Quand Javert se tue, après avoir été sauvé par son ancienne victime, Jean Valjean
peut unir Cosette à l’être qu’elle aime. Il ne peut pas pourtant trouver la paix, car de nouveaux obstacles
surviennent : l’ingratitude des jeunes mariés, l’oubli.
Autour de l’intrigue se greffent des descriptions du Paris du XIX e siècle, de ses quartiers
populaires, de ses journées tragiques (barricades de 1830), des pages d’histoire (Waterloo) et des
études de mœurs.
Victor Hugo est un artiste complet qui a créé une œuvre diverse qui embrasse tous les genres  :
poésie, théâtre, roman. C’est aussi un écrivain engagé, un homme politique libéral qui s’est mis au
service des grandes idées humanitaires. Par la variété de son talent, par son énergie créatrice et par son
engagement dans la vie politique, Hugo fait figure de monument du XIX e siècle. C’est pourquoi le XIXe
siècle pourrait être considéré comme «le siècle de Victor Hugo».

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