Annales historiques de la Révolution
française
323 | janvier-mars 2001
Varia
Théâtre du XVIIIe siècle. Jeux, écritures, regards
Michel Biard
Édition électronique
URL : https://journals.openedition.org/ahrf/1037
DOI : 10.4000/ahrf.1037
ISSN : 1952-403X
Éditeur :
Armand Colin, Société des études robespierristes
Édition imprimée
Date de publication : 1 mars 2001
Pagination : 127-128
ISSN : 0003-4436
Référence électronique
Michel Biard, « Théâtre du XVIIIe siècle. Jeux, écritures, regards », Annales historiques de la Révolution
française [En ligne], 323 | janvier-mars 2001, mis en ligne le 21 avril 2004, consulté le 24 avril 2022.
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Théâtre du xviiie siècle. Jeux, écritures, regards
Théâtre du XVIIIe siècle. Jeux,
écritures, regards
Michel Biard
RÉFÉRENCE
David Trott, Théâtre du xviiie siècle. Jeux, écritures, regards, Montpellier, Éditions Espaces,
2000, 304 p.
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Le sous‑titre de cet ouvrage est sans aucun doute plus important que le titre lui‑même.
Il ne s’agit point en effet d’un nouvel ouvrage qui tenterait une synthèse sur le théâtre
du siècle des Lumières, mais d’un travail qui vise à centrer le regard sur le spectacle
vivant, sur la représentation, sur le jeu, sans pour autant oublier le texte. David Trott,
professeur à l’Université de Toronto, choisit de mettre en parallèle les saisons
théâtrales 1700‑1701 et 1789‑1790. Bien entendu, cela le conduit vers des constats qui
ne sont pas véritablement nouveaux, tels le phénomène de la multiplication des
entreprises de spectacles, l’explosion de la production (plus de 250 pièces nouvelles
pour la première saison en Révolution) ou encore les modifications intervenues dans
l’espace théâtral. Mais au‑delà de ces premiers constats, le livre retient l’attention par
ses diverses évocations de ce siècle où «on aurait dit que tout le monde jouait».
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Entre 1700 et 1790, ce sont ainsi plusieurs aspects de la vie et du rôle des acteurs qui se
modifient. Le jeu improvisé hérité de la Commedia dell’arte disparaît peu à peu et, avec
lui, les pièces qui changeaient au gré des évolutions, trois actes pouvant se trouver
réduits en un seul d’une représentation à la suivante. Disparaissent aussi les
spectateurs qui s’installaient sur la scène, ce qui offre de nouvelles possibilités
d’utilisation de l’espace (en 1760, Le Café, ou L’Écossaise, de Voltaire, installe sur la scène
un café avec des chambres sur les ailes, ce qui permet de multiplier les vues sur les
personnages). La popularité des prologues s’estompe elle aussi tandis qu’au contraire
s’affirme la vogue des parodies, une arme qu’utilise «le non officiel pour attaquer le
canonique». La rivalité traditionnelle entre théâtre «officiel » et théâtre «non officiel»
Annales historiques de la Révolution française, 323 | janvier-mars 2001
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Théâtre du xviiie siècle. Jeux, écritures, regards
se développe avec l’essor des théâtres de la Foire. Le premier persiste à écarter de son
répertoire les pièces les plus dérangeantes telles le Brutus de Voltaire représenté à la
Comédie française en 1730 et qui a le destin que l’on sait à partir de 1789, ou Mélanie, ou
La Religieuse de La Harpe (1770) refusée pour avoir osé s’attaquer au monde des
couvents, ce qui devient plus que banal en 1790‑1791. Le théâtre «non officiel» est lui
en plein essor avec le développement des théâtres de la Foire (plus de 35 troupes
foraines à Paris dans la première moitié du siècle), la multiplication des salles de
boulevard à partir des années 1770 et celle des théâtres de société (peut‑être plus de
200 à Paris à la veille de la Révolution). Sur ces derniers, David Trott livre ici de
précieux exemples (quatorze au total) comme celui du théâtre de la marquise de
Montesson qui «paye » de sa personne pour jouer, chanter et même écrire ses propres
pièces (représentées en société). L’essai de David Trott met ainsi au premier plan une
impression de mobilité qui permet de grandement nuancer les traditionnels clichés sur
les hiérarchies rigides du «monde des ombres ».
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Outre des pages passionnantes sur Marivaux et la théâtralité, sur l’importance de
Diderot comme théoricien du théâtre ou encore sur les efforts de Mercier pour que
toutes les couches sociales soient présentes sur scène (L’Indigent, 1773), le lecteur
trouvera deux précieux index ainsi qu’une bibliographie (dans laquelle on peut
toutefois regretter quelques absences, celle, surprenante, de l’ouvrage collectif dirigé
par J. de Jomaron ou celle du livre récent de E.-J. Mannucci). Si ce livre ne fait
qu’effleurer la période révolutionnaire, toute sa réflexion n’en est pas moins essentielle
pour qui veut comprendre le théâtre de la Révolution française tant celui‑ci est fait de
continuités et d’héritages autant que de ruptures.
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