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Politique, échelles, pratiques du projet de territoire. Analyse des politiques autour de l'Espace Mont Blanc

Il s'agit de comprendre si la coopération transfrontalière permet de résoudre certaines problématiques des territoires composant l’Espace Mt.-Blanc. Les projets aboutis portés par l’Espace Mt.-Blanc, les projets émergents dans les domaines de l’agriculture locale, de la mobilité seront examinés pour ensuite s’intéresser aux blocages notamment en ce qui concerne une vision économique partagée et terminer par une étude de cas sur La Brévine, un territoire confronté à des problématiques similaires intégré dans l’Arc Jurassien.

Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 RAPPORT D’ÉTONNEMENT ESPACE MONT BLANC STAGE DU 29-30 AVRIL 2015 INTRODUCTION L’espace Mt.-Blanc s’étend sur trois pays que sont la France, la Suisse et l’)talie et concerne les régions de la Savoie, de la Haute-Savoie, la vallée d’Aoste et le Valais. Il compte environ 100'000 habitants. Cet espace est le résultat d’une prise de conscience de similarités entre les espaces de montagne à travers la reconnaissance de problématiques communes. Fondé par des associations en 1986, le projet est récupéré par les milieux politiques en qui y voient l’opportunité d’une collaboration transfrontalière. Document 1 : L’Espace Mont-Blanc. Source : http://www.espace-mont-blanc.com/ Résultante d’une volonté de coopération transfrontalière pour mieux résoudre des problèmes d’ordre environnementaux, économiques et de développement territorial, ce vaste territoire de 2800 km2 est abordé sous l’angle de différentes politiques publiques nationales et transnationales. En effet, chaque pays est libre de monter ses propres programmes nationaux, et de les coordonner ou non avec les autres programmes transnationaux. Ainsi, cet espace est caractérisé par cette double logique nationale et transnationale. Cela a son importance quand il s’agit de mettre en place des politiques communes, notamment au niveau de la répartition du financement au niveau local. Le Valais débloque par exemple des financements de la Confédération dans le cadre de la NPR alors que la France et l’)talie font appel à des fonds Européens du type FEDER. Les fonds Interreg sont quant à eux communs aux deux pays, bien qu’ayant des sources de financement différentes. Ces différences institutionnelles et budgétaires ne semblent pas constituer un frein à la mise en place d’un espace partagé. En effet, le sentiment d’appartenance à un paysage commun, composé de réalités similaires, semble faire triompher un certain pragmatisme menant à une collaboration. A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 Cet espace n’ayant pas de bases juridiques, demeure fragile dans son existence. Cela implique d’une part que suite à une décision unilatérale, liée à un changement de contexte politique, une région peut se désengager du processus de coopération. D’autre part, cela implique que les mesures de protection sont régies par des bases nationales, régionales ou européennes. L’espace Mt.-Blanc reflète une volonté à l’échelle européenne de régionaliser les politiques territoriales, de façon à mieux prendre en compte le contexte local et à être plus proche des citoyens. Des exemples similaires d’une coopération politique européenne autour d’un élément paysager ou géographique se retrouvent dans le cas de la coopération Danube ou Adriatique. L’espace Mt.-Blanc a cependant ceci de particulier qu’il concerne également la Suisse, un pays qui n’est pas dans l’Union Européenne. Cela rend donc plus complexe et intéressante l’articulation des politiques publiques et des leviers. Ceci permet aussi de faire émerger des similarités avec d’autres types d’espaces de collaboration que sont le Grand Genève ou le forum transfrontalier de l’Arc jurassien, qui ensemble, reflètent la dynamique de coopération transfrontalière actuelle. Il faut par ailleurs garder à l’esprit que les outils de financement mis à disposition des collectivités évoluent avec le temps, au fur et à mesure que les priorités évoluent elles aussi. Est-ce que la coopération transfrontalière permet de résoudre certaines problématiques des territoires composant l’Espace Mt.-Blanc ? Nous examinerons les projets aboutis portés par l’Espace Mt.-Blanc, les projets émergents dans les domaines de l’agriculture locale, de la mobilité pour ensuite s’intéresser aux blocages notamment en ce qui concerne une vision économique partagée et terminer par une étude de cas sur La Brévine, un territoire confronté à des problématiques similaires intégré dans l’Arc Jurassien. I. LES POINTS FORTS DE LA COLLABORATION TRANSFRONTALIÈRE ET L’ÉMERGENCE DE NOUVELLES THÉMATIQUES POTENTIELLEMENT FÉDÉRATRICES POUR LA COOPÉRATION Parmi les différents moyens de coopération qui sont à l’œuvre, certains ont donnés des résultats très satisfaisant aux dires des intervenants. Le programme Interreg IV (2007-2013) semble avoir été une réussite. Lors de cette première phase de coopération, l’espace Mt.-Blanc a vu se développer plusieurs projets porteurs. Dans le domaine de la mobilité, la réflexion a porté sur une liaison ferroviaire entre St.-Gingolf et Evian, bouclant ainsi le réseau ferroviaire autour du Lac Léman mais aussi sur l’aménagement d’aires de covoiturage et une plateforme internet dédiée à celui-ci. En ce qui concerne le tourisme, un projet intitulé « Patrimoine des trois Chablais » a créé des synergies entre les offices du tourisme français et suisses et le projet « Léman sans frontière » a mis l’accent sur la vente de produits touristiques transfrontaliers. Pour ces projets à succès, des fonds suisses et européens ont été débloqués. La collaboration transfrontalière autour du tourisme est très tôt apparue comme porteuse de projets. Dès 1960 on trouve la création du domaine skiable transfrontalier de Champéry. Aujourd’hui, un des volets touristique de la politique )nterreg s’axe sur la Vallée d’Abondance et une amélioration de l’accessibilité au domaine skiable français depuis Aigles. Il y a également un projet de report modal qui est en cours, permettant à l’économie touristique d’intégrer l’environnement dans son développement. A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 Document 2 : Les initiatives de coopération touristique. Source : http://www.espace-mont-blanc.com/ et http://www.interreg-francesuisse.org/les-realisations/3150,cartographie.html La génération Interreg V prévoit un élargissement des coopérations à toute la Suisse romande et même au canton de Berne, en ciblant les mêmes priorités que sont la mobilité, l’environnement et la culture, l’emploi, l’innovation et la formation. Suite au succès d’)nterreg )V et aux nombreuses initiatives porteuses de développement qu’il a permis de mettre en place, tout porte à croire qu’)nterreg V sera à son tour une réussite. En effet, les financements )nterreg dans l’espace Mt.-Blanc ont atteint une importance telle qu’ils dépassent les financements liés à la NPR, ce qui montre l’efficacité de cet outil. En outre, )nterreg est soutenu par le SECO comme un instrument d’aide à la compétitivité et de développement économique des régions de montagne. 14,6 millions de francs ont été investis sur trois ans dans l’ensemble des projets réalisés conjointement entre la Suisse, l’)talie et la France Minet, , p. . A peu près % de cette somme vient des « de Fonds européens de développement régional (FEDER) » (Minet, 2014, p.1) ; la Suisse a contribué quant à elle à « environ 1 million de francs suisse [ce total correspondent] au fonds perdu engagés par le canton du Valais et la Confédération, dans le cadre de la NPR » (Minet, 2014, p.1). Ce programme a donc des retombées positives sur l’économie des régions auxquelles il s’applique. Un autre aspect de la coopération transfrontalière qui semble bien fonctionner, concerne le diagnostic territorial et environnemental. En effet, le projet de coopération A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 transfrontalière permet la mise en place d’une recherche scientifique commune, notamment sur le changement climatique. On trouve également une coopération aboutie concernant l’éducation à l’environnement et la formation des guides de montagne. Sur le plan identitaire, on sent aussi des synergies fortes. En effet, le sentiment de partager les mêmes conditions de vie autour d’un environnement montagnard rude % de l’espace Mt.-Blanc est situé à plus de m d’altitude contribue à diminuer la sensation d’un effet frontière entre les régions. Un exemple se retrouve dans les combats de reines en Valais, tradition ancestrale, aujourd’hui ouverts à d’autres régions de l’espace Mt.-Blanc. Ainsi, des régions qui peuvent apparaître comme périphériques vis-à-vis de leur territoire national peuvent créer des dynamiques de développement fortes avec des régions voisines qui partagent le même cadre de vie. Des solutions territoriales sont en train de naître un peu partout sur l’Espace Mont-Blanc. Nous pouvons présenter par exemple le développement de l’agriculture locale à Servoz. Les élus ne savent pas comment développer cette région qui a énormément de potentiel sans détruire le territoire, surconsommer celui-ci, mais ils ont choisi d’entreprendre des expériences. C’est une vallée de montagne sans élevage ; les raisons sont dues aux difficiles accès à l’alpage. )l y a un conflit entre ceux qui veulent développer l’agriculture et ceux qui essayent de la stopper et préfèrent planter la forêt. La commune a alors décidé de se lancer dans une politique foncière, d’acheter du terrain pour développer l’agriculture. C’est un outil d’intervention, de régulation. )ls essayent de créer une meilleure qualité de vie, pour contrecarrer les nuisances causées par la mobilité. Les autorités développent l’agriculture de montagne. Dans les régions de montagne de l’arc alpin, les espaces ruraux connaissent des problèmes similaires qu’il s’agisse du dépeuplement, du vieillissement de la population, de l’importance des résidences secondaires, du rôle crucial joué par le tourisme ou encore de la disparition de services à la population liée au dépeuplement. Ne pourraiton pas imaginer un cahier des charges transfrontalier pour aider ces espaces ? II. LES FAIBLESSES DE LA COOPÉRATION La nouvelle politique régionale (NPR) a comme principaux buts de permettre à des régions périphériques d’accroître leur compétitivité, de développer leur potentiel économique, et de rester performantes dans ce domaine, en essayant de maintenir un niveau d’emplois stable tout en réduisant au maximum les inégalités régionales. Ces principaux objectifs sont louables et déclinés dans le premier article de la loi sur la politique régionale. Cette loi constitue une politique de développement mise en place par la Confédération ; celle-ci gère donc cette politique en même temps qu’elle finance les projets. Cette politique s’appuie sur des principes liés au développement durable ; la NPR soutient par exemple des politiques respectueuses de l’environnement. Parallèlement, les régions concernées doivent mettre en place des solutions pour parvenir à augmenter leur compétitivité et à créer de la valeur ajoutée. Il est aussi noté dans la loi, et ceci nous a également été présenté lors de notre visite de terrain, que « les centres régionaux sont les moteurs du développement » (NPR, 2013, p.1). Les régions ont comme interlocuteur les communes, qui se chargent de transmettre les informations à la Confédération ; les communes jouent donc le rôle de relais de communication. Les bureaux compétents de la Confédération travaillent par ailleurs conjointement avec de nombreuses instances pour tenter de résoudre les problèmes de développement qu’il s’agisse d’instances suisses ou étrangères. A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 Document 3 : La NPR, été 2009. Source : www.regiosuisse.ch Si nous analysons les différents buts de la NPR et les mettons en parallèle avec la réalité sur le terrain, présentée lors de la visite, nous nous rendons comptes qu’il existe un grand décalage. Il y a des réalités auxquelles les élus doivent faire face, qui sont difficiles à mettre en lien avec les objectifs de la NPR, notamment concernant le lien entre compétitivité et réduction des inégalités régionales. Nous avons constaté qu’il est extrêmement difficile pour une région de développer un projet qui accroît sa compétitivité et en même temps vise la réduction des inégalités régionales. La plupart des projets de développement qui s’affirment comme visant la croissance économique arrivent difficilement à être complètement respectueux de l’environnement. D’ailleurs, il n’est pas rare que le côté économique prenne le dessus sur les préoccupations environnementales. Nous pouvons noter que jusqu’à aujourd’hui les stations de montagnes qui ont réussi à atteindre une certaine notoriété, une réputation, comme Crans-Montana ou Verbier, ont fortement détruit le paysage sur lequel repose, du reste, leur réussite. Les gigantesques installations (résidences secondaires, hôtels, réseau viaire, infrastructures sportives, … , les importants flux occasionnés causés par les touristes, les besoins en terme de services, etc.) ne vont pas dans le même sens que les inquiétudes persistantes sur la question de l’environnement. La compétitivité touristique est la cause des dégradations accrues sur les milieux naturels. Servoz, petite commune de neuf cent habitants environ, présentée comme la « Porte d’entrée de la Vallée de Chamonix » par le site de l’Office du tourisme des (ouches OT(, , est confrontée à ces contradictions. Le tunnel du Mont-Blanc qui marque l’identité même de cette vallée pose problème à cette dernière. L’importance prise par le tunnel dans cette région est problématique. Les deux intervenants que nous avons rencontrés sur place, Jean-Marc Bonino et Nicolas Evrard nous ont affirmé que cette région a de plus en plus de mal à accepter de n’être qu’un simple lieu de passage. Son identité de débouché sur la Vallée d’Aoste ne lui convient plus. Aujourd’hui, c’est devenu un lieu excessivement fréquenté à la journée (heure). Cela dit, les autorités de cette commune ont de la peine à faire entendre leur voix face à la commune de Chamonix par exemple, pour laquelle Servoz n’a aucune raison de se plaindre. Elle est située sur un axe pivot dont elle devrait tirer profit. Grâce à sa position, de nombreux flux la traversent et tout ceci a des retombées économiques positives sur son territoire. Il est intéressant de souligner ici que selon l’échelle d’observation, le tunnel n’est pas vu de la même manière. Pour ceux qui ne sont pas de la région, c’est une aubaine ; le Mont-Blanc amène des clients, des touristes et il permet de booster l’économie locale. Cependant, si l’on se place au niveau des habitants et des élus de la commune, nous voyons que le tunnel du Mont-blanc entraîne plus de nuisances qu’il n’apporte d’effets positifs. Le lieu est très pollué. Il est très fréquenté par des camions transportant des marchandises entre le sud et le nord de A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 l’Europe ; ceux-ci polluent fois plus qu’une petite voiture. % des émissions de NOx sont dues aux véhicules (Lassman-Trappier, 2004, p.3). La pollution met la qualité et le cadre de vie, en danger. On peut se demander si les Etats sont l’échelon le plus pertinent pour s’occuper de cet espace Mont-Blanc. En effet, aucune montagne ne s’arrête aux frontières politiques. Le problème dans ce cas précis, dépasse la commune, ses compétences, mais aussi ses moyens et ses droits. Le massif du Mont-Blanc est classé depuis . Tout aménagement dans cet espace a besoin d’une autorisation ministérielle, ce qui complique l’action des membres aménageurs, élus locaux) de la commune. Les buts visés par la Confédération ne sont pas toujours rattachés à la réalité du territoire et les volontés des petites régions, des communes ne sont pas toujours prises en compte, car elles n’ont simplement pas les moyens de défendre leurs projets, donc de se faire entendre. Il manque un niveau juridique commun à tous les pays (Italie, France et Suisse . La coopération transfrontalière entre l’UE et la Suisse est soumise aux aléas politiques mais aussi à des structurations des politiques publiques et des échelons administratifs différents ; ceci rend la création d’une structure juridique non envisageable pour le moment. Les politiques publiques, l’échelle d’action devraient être plus centrées sur l’espace Mont-Blanc et moins reposer sur les différents Etats, qui n’ont pas forcément consciences des problématiques spécifiques aux régions de montagnes. La Confédération vient en aide à des communes qui présentent un projet de développement économiquement viable. Un projet prometteur qui créera de la valeur ajoutée peut donc être éligible. Ceci entre en contradiction avec l’objectif de vouloir créer un équilibre entre les régions. La règle qui veut que pour que la Confédération investisse un franc CHF, la commune avance elle aussi un franc CHF est un frein pour les petites communes. L’échelle à laquelle sont gérés les projets ne semble pas permettre des résultats efficaces. Certaines régions sont totalement laissées de côté car elles ne réussissent pas à convaincre la Confédération d’investir dans des projets de développement sur leur territoire. Lors de notre visite à Bourg-Saint-Pierre nous avons été confrontés à un cas de ce type. Le maire de la commune semblait ne posséder ni le temps, ni les compétences ni même la vision pour fédérer les autres communes et monter un projet qui puisse tenir financièrement. Le maire n’était pas en mesure d’établir un diagnostic territorial adéquat qui lui aurait permis de déterminer exactement les activités économiques rentables qu’il conviendrait de développer sur son territoire. Le maire de cette vallée a pourtant tenté de mettre en œuvre des projets, mais ceux-ci n’ont pas eu les effets escomptés ; ils n’ont pas attiré d’investisseurs. Les projets étaient soit surdimensionnés soit pas assez audacieux (intéressants) pour ces derniers. La Confédération dans le cadre de la NPR devrait intervenir même si la commune de Bourg-Saint-Pierre ne dispose pas des fonds nécessaire. Une équipe d’experts pourrait se déplacer sur les lieux et proposer un diagnostic économique, social et environnemental de cette région. Une question surgit à ce niveau-là de notre analyse. Les espaces à la marge, qui ne « fonctionnent plus », qui n’attirent plus ni la population ni les investisseurs et deviennent uniquement des charges pour le pays entier n’ont-ils pas tout simplement à être abandonnés? Quand des communes sont trop petites pour monter des projets dans le cadre de la NPR, ne serait-il pas souhaitable que la Confédération les aide à fusionner avec d’autres communes en fournissant l’expertise de professionnels et des moyens financiers ? On pourrait même imaginer que la Confédération rende la fusion obligatoire quand certains critères de taille, de compétences au sein de la commune ne sont plus remplis. A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 III. UN ESPACE RENCONTRANT DES DIFFICULTÉS DE DÉVELOPPEMENT LOCAL, LA BRÉVINE Document 4 : Profil de La vallée de La Brévine, canton de Neuchâtel. Source : Priscilla Allenbach Document 5 : Photographies de La vallée de La Brévine, canton de Neuchâtel. Source : Florence Fasler La rencontre avec le maire de Bourg Saint-Pierre nous a fortement rappelé la rencontre avec Madame le maire de La Brévine en automne 2014. Les communes de la Brévine comme celle de Bourg Saint Pierre sont intégrées dans un espace rural de montagne bénéficiant d’un patrimoine bâti historique d’une grande valeur et d’une grande richesse liée aux qualités de leur environnement. Plusieurs sites naturels et semi-naturels font l’objet de protections cantonales et fédérales et diverses initiatives ont été mises en place pour développer cet atout environnemental. Le paysage, marque de fabrique de La Brévine comme de Bourg Saint Pierre subit actuellement des transformations liées à la déprise rurale : on constate l’avancée de la forêt, la non remise en état de certains bâtiments, la diminution du nombre d’exploitants ou la disparition de certains services offerts à la population comme l’école élémentaire. Document 6: Croquis de La vallée de La Brévine, canton de Neuchâtel. Source : Andrea Salas A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 L’économie à Bourg Saint Pierre comme à la Brévine est monofonctionnelle. )l s’agissait essentiellement du tourisme à Bourg Saint Pierre et de l’agriculture à la Brévine. Dans cette dernière commune, l’économie est basée essentiellement sur l’exploitation des surfaces agricoles pour développer des pâturages et prairies fourragères dans le but d’élever des vaches à lait. Le lait récolté est ensuite pour les % vendu à des fromageries pour fabriquer du Gruyère AOP et pour les 20% restants vendu à des fédérations laitières. La production de lait pour le Gruyère est subventionnée à raison de 15 centimes par litre par la Confédération ce qui encourage les agriculteurs à intensifier l’élevage et les oblige à importer du fourrage pour nourrir les animaux. La situation de spécialisation dans un seul type de production est source de fragilité puisque les prix du lait produit en Suisse sont liés aux cours du marché mondial et à l’aide de la Confédération. Ce manque de diversification ne laisse qu’une faible marge de manœuvre aux agriculteurs s’il y avait un dysfonctionnement du marché du lait, une baisse de la demande ou une redéfinition de la politique agricole de la Confédération dans quatre ans. Cette dépendance vis-à-vis des subsides de l’Etat se retrouve aussi à Bourg Saint Pierre. )l s’agit cette fois de la dépendance vis-à-vis du revenu lié au barrage et des revenus anciennement liés au tourisme de sports d’hiver. Une piste de réflexion pour les espaces de montagne est de se diversifier mais aussi de jouer sur leur complémentarité à l’échelle transfrontalière. Les élus de ces espaces sont aussi souvent dépassés par l’ampleur des tâches à accomplir qu’il s’agisse d’œuvrer pour une fusion de commune, de monter des dossiers pour la NPR, pour des PDR (projets de développement régional) ou pour des projets de mise sous protection du patrimoine. Ils manquent aussi de vision innovante et à long-terme pour leur territoire ; en effet, ils y vivent depuis longtemps et manquent aussi de connaissances sur les avancées dans d’autres espaces similaires. On pourrait imaginer de créer un lieu de rencontre pour des élus dirigeant des territoires aux problématiques similaires ou ils pourraient échanger sur leurs pratiques mais aussi avoir l’avis d’experts dans différents domaines. Document 7: Chorèmes, Les dynamiques dans les espaces de montagne. Source : Anne-Laure Lepage A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer Master en développement territorial, Université de Genève, 2015 CONCLUSION Il faut constater un décalage entre la vision suisse du développement régional tournée autour de la compétitivité économique et la vision portée par l’UE tournée autour du développement durable surtout dans son volet social. Ce décalage entraîne des incompréhensions de part et d’autre et des difficultés à adopter une réelle politique de coopération transfrontalière qui porte des fruits dans tous les domaines. Le tourisme, la culture locale, l’environnement, la gestion des risques ou encore l’agriculture locale sont des domaines sur lesquels des actions peuvent être menées car ils n’ont pas d’impacts trop importants. Quand il s’agit de réfléchir en termes d’actions plus contraignantes comme l’urbanisation des stations de montagne, l’emploi, la formation, la stratégie de localisation des entreprises, la coopération prend du plomb dans l’aile. Ces difficultés prennent aussi leur source dans les différences liées aux structures administratives et politiques entre les trois pays et au sein même de la Suisse avec des systèmes différents selon les cantons. Une difficulté supplémentaire vient de la temporalité différente entre mandats politiques et réalisations de projets, du diagnostic à la maîtrise d’œuvre. La coopération dans l’espace Mont Blanc semble cependant porter plus de fruits que dans l’Arc jurassien peut-être aussi parce qu’elle est plus ambitieuse ; il s’agit par exemple de terminer la ligne ferroviaire du Tonkin qui lierait Genève aux autres villes le long du lac ainsi qu’aux espaces de piémont. Ces programmes de coopération doivent s’inscrire dans la continuité pour être réellement porteur de renouveau dans les espaces périphériques. Ils ne doivent pas s’arrêter parce qu’une nouvelle génération de programmes voit le jour mais réellement s’inscrire dans une vision prospective, dynamique et systémique. Ils doivent aussi être ambitieux pour encourager une coopération approfondie ; des actions ponctuelles dans les domaines du tourisme et des traditions locales ne sont pas suffisantes pour impliquer réellement des partenaires. BIBLIOGRAPHIE Géolocalisation des projets, 2015, In : Interreg France-Suisse, [en ligne], http://www.interreg-francesuisse.org/ , (consulté le 17 mai 2015) Office de Tourisme des Houches, 2015, « Servoz - L'authentique », In : Le site officiel des Houches – Servoz, [en ligne], http://www.leshouches.com/servoz,202,fr.html (consulté le 17 mai 2015) L’Assemblée fédérale de la Confédération suisse, , Loi fédérale sur la politique régionale, [en ligne], https://www.admin.ch/opc/fr/classifiedcompilation/20052127/201301010000/901.0 .pdf (consulté le 17 mai 2015) Lassman-Trappier A., 2004, Transport routier et pollution dans les Alpes, Le cas particulier de la vallée de Chamonix, [en ligne], http://www.emontblanc.com/Info/Entries/2004/5/12_Dossier_Transport_et_Pollution _files/Dossier%20Pollution%2012mai04.pdf (consulté le 17 mai 2015) Minet P., 2014, « Le Tour du Mont-Blanc : Une randonnée organisée en quelques clics », In : regiosuisse, centre du réseau de développement régional, [en ligne], http://www.regiosuisse.ch/regiosuisse-angebote/publikationen/regios/regios-0914/regios-0914-exemple-de-projet-interreg-mont-blanc-f.pdf (consulté le 17 mai 2015) A. Lepage- S. Saidi- S. Sossauer