Le Grand Meaulnes-Corriges
Le Grand Meaulnes-Corriges
Le Grand Meaulnes-Corriges
Corrigés
d’Alain-Fournier
Séquence
Séance 1
Un roman d’apprentissage
I. Découvrir dans l’école où ils habitent et travaillent. En revanche, les
1) Henri Alban-Fournier est né en 1886 à La Chapelle- indications spatio-temporelles sont vagues (quelle année
d’Angillon, près de Bourges. Il grandit dans cette même exactement ? où se trouve Sainte-Agathe ?), et surtout
région du Berry, qui sert de cadre au Grand Meaulnes. le personnage principal est évoqué immédiatement, sans
Ce roman est publié en 1913, et il n’a pas le temps de être cependant ni nommé ni présenté (seulement désigné
prolonger son œuvre car il meurt au combat l’année par le pronom personnel il) ; mais la première phrase fait
suivante, à l’âge de 27 ans. sentir que son arrivée va être déterminante. De plus, on
2) Le titre du roman focalise l’attention sur la figure constate que le narrateur, devenu adulte, fait un retour
centrale de l’œuvre, le personnage de Meaulnes. L’adjectif sur ses années de jeunesse, plus de quinze auparavant.
« grand » est non seulement une indication sur sa taille, 2) Le mystère : « Le Domaine mystérieux », « La fête
mais aussi sur la fascination qu’il exerce sur son entourage. étrange », « Où il est question du Domaine mystérieux »,
3) L’illustration de couverture reproduit une toile de « À la recherche du sentier perdu », « Le secret ».
Picasso, Jeune homme à la pipe, à peu près contemporaine L’aventure : « L’évasion », « L’aventure »,
de l’écriture du roman. Le portrait représente un adolescent, « La rencontre », « Nous tombons dans une embuscade »,
avec des traits encore enfantins mais une pipe à la main, ce « Les gendarmes ! », « Je trahis… », « Une apparition ».
qui le projette dans le monde des adultes. Le regard vide L’amour : « La rencontre », « La partie de plaisir »,
tout comme la couronne de fleurs et les grands bouquets « Le jour des noces ».
de l’arrière-plan donnent au jeune homme un aspect rêveur. 3) Un roman d’apprentissage retrace l’évolution d’un
Toutes ces caractéristiques font penser à Meaulnes. Elles jeune héros qui sort de l’enfance ou de l’adolescence et
pourraient aussi correspondre à Frantz, voire au narrateur. découvre le monde (souvent en perdant ses illusions…).
Le grand Meaulnes peut être rangé dans cette catégorie, car
II. Comprendre l’écart entre le début et la fin du récit correspond à la sortie
1) Les trois premiers paragraphes du roman donnent de l’adolescence pour les personnages principaux, et leur
un aperçu sur le milieu dans lequel l’action va se dérouler : apprentissage de la vie par des épreuves, des voyages et par
au sein d’une famille d’instituteurs, parents du narrateur, la découverte de l’amitié et de l’amour.
Séance 2
Première apparition
Support de travail : Première partie, chapitre I, le récit des escapades de Meaulnes (« moi qui n’osais plus
p. 28-31, de « Et aussitôt elle fit l’éloge… » jusqu’à rentrer à la maison quand j’avais un accroc à ma blouse »),
la fin du chapitre. puis par le fait qu’il tire de sa poche une boîte d’allumettes
(« cela nous était formellement interdit »). Meaulnes lui
I. Découvrir et comprendre apparaît comme un être audacieux et aventurier, qui brave
1. Meaulnes les interdits auxquels il s’est lui-même toujours soumis
a) Le texte nous livre deux présentations successives du jusque-là.
personnage : le première est faite par sa propre mère, en c) Dans ce passage, la mère du narrateur se montre
l’absence de Meaulnes ; la seconde est faite par le narrateur, plutôt passive et spectatrice : elle écoute et observe, mais
lors de l’apparition du personnage. Après la présentation ne s’exprime pas et n’exerce pas son autorité. Elle est en
élogieuse qu’en fait la mère, presque celle d’un enfant retrait, et le nouveau venu, qui s’est déjà approprié les lieux,
modèle, l’apparition de Meaulnes montre un jeune homme semble être le vrai personnage fort dans ce passage.
libre, aventurier, et peu soucieux des conventions.
b) « C’était un grand garçon de dix-sept ans environ. Je 3. L’aventure commence
ne vis d’abord de lui, dans la nuit tombante, que son a) Meaulnes prend des libertés avec les règles
chapeau de feutre paysan coiffé en arrière et sa blouse élémentaires de la politesse, et se montre peu soucieux de
noire sanglée d’une ceinture comme en portent les écoliers. l’autorité des adultes. Il ne se présente pas, s’introduit dans
Je pus distinguer aussi qu’il souriait... » le grenier d’autrui, s’approprie de vieilles pièces d’artifice
« À la lueur de la fin du jour, je regardais, en marchant, et les utilise sans demander aucune permission.
sa face anguleuse au nez droit, à la lèvre duvetée. » b) La position en retrait de la mère, la fascination
« Il jeta son chapeau par terre et je vis qu’il avait les immédiate exercée par Meaulnes annoncent la sortie de
cheveux complètement ras comme un paysan. » l’enfance, l’éloignement progressif du narrateur par rapport
Son apparition dans la pénombre le rend mystérieux. à la sphère familiale. Cela est bien symbolisé par la mère
Un peu fruste par sa tenue et sa coiffure, mais séduisant observant de loin les deux jeunes gens se tenant par la
par son sourire, il semble entre deux âges, encore écolier, main.
mais déjà « grand garçon » à la « lèvre duvetée ». c) Ce feu d’artifice est comme une célébration, celle
c) La conversation tourne autour de lui, et tous les d’une nouvelle amitié, ainsi que d’une nouvelle vie, pleine
regards convergent vers lui, lors de son apparition ou le soir d’éclat et de splendeur.
à table. Lui ne semble pas se soucier de cette attention
qu’il suscite. C’est aussi lui qui mène l’action, sans attendre II. Retenir et pratiquer
aucun ordre, ni aucune permission. Le narrateur suit, Le premier chapitre du Grand Meaulnes, d’Alain-
et les mères s’abstiennent de toute remarque. Fournier, s’ouvre sur l’arrivée du personnage éponyme dans
la famille du narrateur, fils des instituteurs qui le prendront
2. Le narrateur comme pensionnaire. Il est ici présenté par sa mère, avant
a) Le narrateur est un personnage de l’histoire, François d’apparaître au regard fasciné du narrateur. Ce passage
Seurel, fils des instituteurs du village de Sainte-Agathe. annonce ainsi l’amitié qui va les lier, et le bouleversement
b) L’étonnement du narrateur est provoqué d’abord par que Meaulnes apportera dans la vie de François Seurel.
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Séquence
Séance 3
La rencontre
Support de travail : Première partie, chapitre XV, b) De nombreux termes appartiennent au champ lexical
p. 106-109, de « Désœuvré… » jusqu’à « … prit une de la vue : examiner, regarder, voir, ressembler, regard,
allée transversale. » yeux, apercevoir, paraître. Certains de ces mots sont
répétés à plusieurs reprises. Cela est dû au point de vue
I. Découvrir et comprendre interne de Meaulnes, qui contemple cette fête et cette
1. La jeune fille jeune fille, mais aussi au fait que le rencontre se fait
a) La jeune fille n’est pas immédiatement identifiée par d’abord par l’échange de regards, car les deux jeunes gens
Meaulnes, puisqu’il la prend d’abord pour une comédienne. ne se connaissent pas et ne peuvent pas être présentés l’un
C’est la déférence que lui montre l’assistance qui lui fait à l’autre.
soupçonner sa véritable identité : « Un à un, sur le passage c) L’émotion de Meaulnes est rendue sensible par la
des dames, qui paraissaient être la châtelaine et sa fille, les présence de plusieurs points d’exclamation, mais aussi par
jeunes gens saluaient profondément, et les demoiselles les larmes qui lui montent aux yeux : « Il avait regardé ce
s’inclinaient. » profil si pur, de tous ses yeux, jusqu’à ce qu’ils fussent près
b) La description de la jeune fille est de plus en plus de s’emplir de larmes. »
précise car Meaulnes l’observe de plus en plus près : il d) L’attitude de Meaulnes vis-à-vis de la jeune femme
l’aperçoit de loin, puis l’observe de plus près sur le bateau, paraît très spontanée, car il ne réfléchit pas à ce qu’il fait :
et se retrouve juste derrière elle à la fin. Certains détails très « sans savoir comment, Meaulnes se trouva dans le même
précis attirent son attention : « en tenant sa lèvre un peu yacht que la jeune châtelaine », « Il se trouva près d’elle
mordue », « un peu de poudre restée sur sa joue ». sans avoir eu le temps de réfléchir ». Il ne semble même
c) L’expression « une finesse presque douloureuse » donne pas agir consciemment, mais se laisser guider par les
le sentiment d’une beauté très pure et délicate, mais aussi événements : « tout s’arrangea comme dans un rêve ».
d’une fragilité qui semble annoncer les malheurs futurs. e) Deux passages évoquent le souvenir que Meaulnes
d) Le point de vue interne de Meaulnes, adopté par garde plus tard de cette rencontre : « tandis que Meaulnes
le narrateur, nous empêche de connaître les pensées se disait, avec un étonnement qui lui parut plus tard bien
d’Yvonne, mais ses regards répétés montrent qu’elle a grossier », « Souvent, plus tard, lorsqu’il s’endormait après
remarqué le jeune homme. avoir désespérément essayé de se rappeler le beau visage
effacé, il voyait en rêve passer des rangées de jeunes
2. L’effet de cette rencontre sur Meaulnes femmes qui ressemblaient à celle-ci ». Cela rappelle que
a) La description du décor qui précède l’apparition des Meaulnes restera longtemps troublé et obsédé par cette
deux dames donne une touche ancienne au cadre de la rencontre enfouie dans le passé.
rencontre, tout comme les « déguisements
extraordinaires » : on a l’impression d’une scène irréelle II. Retenir et pratiquer
surgie du passé. Ce caractère onirique est augmenté par Les exemples peuvent être pris parmi les nombreux
l’atmosphère à la fois froide et ensoleillée : « Il faisait froid couples célèbres de la littérature : Tristan et Iseut,
malgré le soleil d’hiver », « On eût pu se croire au cœur Roméo et Juliette, la princesse de Clèves et le duc de
de l’été. […] Mais soudain une rafale glacée venait rappeler Nemours, Julien Sorel et Mme de Rênal, Frédéric Moreau
décembre aux invités de cette étrange fête. » La jeune fille et Mme Arnoux etc.
apparaît donc comme dans un rêve.
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Séquence
Séance 4
Étude lexicale
Support de travail : Deuxième partie, chapitre IX, brutal à une réalité triviale. Ces mots évoquent la banalité
p. 178-180, de « La merveilleuse promenade !… » du quotidien.
jusqu’à « … rien trouvé. » 4) Deux comparaisons font référence à la guerre dans le
texte : « M. Seurel dont on eût dit qu’il partait en guerre »,
I. Observer et comprendre « seul à travers la campagne pour la première fois de ma vie
1) Le point commun entre tous ces mots est qu’ils se comme une patrouille que son caporal a perdue ». Ces
rapportent à la nature. Ils définissent le cadre campagnard comparaisons sont produites par l’imagination fertile de
et sauvage de l’expédition du narrateur. François Seurel. La référence à la guerre souligne le
2) Les mots du texte qui montrent que le narrateur caractère solennel et aventureux de cette expédition dans
a le sentiment de vivre une aventure extraordinaire sont les son esprit, et aussi les dangers qu’elle peut présenter.
suivants : merveilleuse, mystérieux, explorer, découverte, 5) La lumière peut évoquer quelque chose de précieux,
je m’imagine, aventure, prince, expédition extraordinaire. fascinant et même sacré. Ici elle symbolise le but d’une
3) Après l’évocation d’une expédition merveilleuse digne longue quête et l’espoir d’atteindre l’objet de ses rêves.
d’un livre d’aventures, les mots paires de bas font un retour
I. Les connotations d’un mot fragile. Un grand manteau marron, qu’elle enleva en
1) Nuit : danger, mort, ignorance… entrant, était jeté sur ses épaules. C’était la plus grave des
Voyage : évasion, découverte, aventure… jeunes filles, la plus frêle des femmes. Une lourde chevelure
Enfant : innocence, fragilité, jeunesse… blonde pesait sur son front et sur son visage, délicatement
dessiné, finement modelé. Sur son teint très pur, l’été avait
2) « En rêve seulement j’avais connu jusque-là course aussi posé deux taches de rousseur… Je ne remarquai qu’un
charmante, aussi légère. Les côtes mêmes me trouvaient défaut à tant de beauté : aux moments de tristesse, de
plein d’entrain. Car c’était, il faut le dire, le chemin du pays découragement ou seulement de réflexion profonde,
de Meaulnes que je buvais ainsi… » ce visage si pur se marbrait légèrement de rouge, comme
Le mot boire traduit ici l’enthousiasme et l’avidité du il arrive chez certains malades gravement atteints sans
narrateur. Dans d’autres contextes, il peut traduire une qu’on le sache. »
autre forme d’ivresse, à connotation plus péjorative (liée 2) Enseignement, découverte, travail, épreuve, recherche,
à l’abus d’alcool). progrès…
3) Grand, aventureux, loyal, courageux…
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Séquence
Séance 5
Les propositions subordonnées
I. Observer et comprendre sans que j’eusse pu le voir. À la rentrée, exactement vers
1) Lettres de peu de confidence quoi qu’il paraisse ! la fin de novembre, tandis que je m’étais remis avec
Meaulnes ne me disait ni pourquoi il était resté si une morne ardeur à préparer le Brevet Supérieur, dans
longtemps silencieux, ni ce qu’il comptait faire maintenant. l’espoir d’être nommé instituteur l’année suivante, sans
J’eus l’impression qu’il rompait avec moi, parce que son passer par l’École Normale de Bourges, je reçus la dernière
aventure était finie, comme il rompait avec son passé. des trois lettres que j’aie jamais reçues d’Augustin.
J’eus beau lui écrire, en effet, je ne reçus plus de réponse. 2) Pronom relatif : « que j’aie jamais reçues ».
Un mot de félicitations seulement, lorsque j’obtins mon Pronom interrogatif : « ce qu’il comptait faire ».
Brevet Simple. En septembre je sus par un camarade Conjonction de subordination : « quoi qu’il paraisse »,
d’école qu’il était venu en vacances chez sa mère à « parce que son aventure était finie », « qu’il rompait
La Ferté-d’Angillon. Mais nous dûmes, cette année-là, avec moi », « qu’il était venu », « sans que j’eusse pu
invités par mon oncle Florentin du Vieux-Nançay, passer le voir », « tandis que je m’étais remis ».
chez lui les vacances. Et Meaulnes repartit pour Paris
1) Quand il arriva, il les trouva à table Il y avait entre nous une entente secrète que la mort
François ne pouvait les suivre parce qu’il avait mal seule devait briser : pronom relatif.
au genou. C’était le chemin de Meaulnes que je buvais ainsi :
S’il avait eu plus de chance, il aurait pu retrouver pronom relatif.
le Domaine bien plus vite. 3) Quoi qu’il demande, Frantz a l’habitude qu’on le lui
Bien qu’il aime Yvonne, Meaulnes reprend la route. accorde.
2) Et elle sourit, montrant ainsi que mes cousins lui François et Jasmin sont devenus amis, quoiqu’ils aient été
avaient parlé de moi : conjonction de subordination. rivaux par le passé.
J’apprendrai aux garçons à être sages, d’une sagesse que Quoique le retour de Meaulnes lui fasse plaisir, François
je sais : pronom relatif. se sent triste.
À ce moment précis, je me rappelai que Meaulnes lui Quoi que le futur lui réserve, Meaulnes semble toujours
avait dit son nom : conjonction de subordination. prêt à l’aventure.
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Séquence
Séance 6
« Un visage de vieux gamin »
Support de travail : Troisième partie, chapitre VIII, dans le texte sont les suivants : gamin, enfant, enfantillage,
p. 262-264, de « Il me montrait garçon, jeunesse, enfantin, puérilité. Les mots à
un visage… » jusqu’à la fin du chapitre. connotation péjorative (soulignés) dénotent un jugement
légèrement désapprobateur de la part du narrateur :
I. Découvrir et comprendre une nuance de légèreté, de naïveté et d’immaturité
1. Frantz qui ne serait plus de l’âge de Frantz.
a) La déchéance de Frantz est soulignée par son b) François se propose de chercher Adèle à la place
vieillissement, son épuisement et le caractère négligé de sa de Meaulnes. En jouant les intermédiaires, il cherche à
tenue : « Il me montrait un visage où, dans la poussière et empêcher Frantz de contacter Meaulnes afin de ne pas
la boue, les larmes avaient tracé des sillons sales, un visage gâcher la fête des noces.
de vieux gamin épuisé et battu. Ses yeux étaient cernés de c) Par la tante Moinel, François a pu connaître l’histoire
taches de rousseur ; son menton, mal rasé ; ses cheveux trop d’Adèle (chapitre III de la deuxième partie). Il sait donc
longs traînaient sur son col sale. Les mains dans les poches, comment la retrouver. Cependant il n’a pas révélé ces
il grelottait. Ce n’était plus ce royal enfant en guenilles des informations, afin de ne pas retarder l’union de Meaulnes
années passées. De cœur, sans doute, il était plus enfant avec Yvonne.
que jamais : impérieux, fantasque et tout de suite d) La dernière phrase laisse planer un mystère sur
désespéré. Mais cet enfantillage était pénible à supporter Meaulnes et « l’étrangeté de son allure ». Cependant, on
chez ce garçon déjà légèrement vieilli… » peut imaginer la raison pour laquelle il se trouve à sa
b) L’expression vieux gamin est un oxymore, car elle mêle fenêtre à ce moment-là : il a dû entendre aussi le signal
dans une même formule des termes de sens opposés. Elle de Frantz, ce qui nous fait craindre que le stratagème
caractérise le personnage par un contraste frappant entre de François aura été inutile. Cela sera confirmé dans le
son attitude restée enfantine et son physique d’adulte. chapitre suivant.
c) Le terrible serment enfantin ici évoqué est celui qui
avait été scellé entre les trois amis à la fin du chapitre IV de II. Retenir et pratiquer
la deuxième partie : « Jurez-moi que vous répondrez quand 1) Les points communs entre les deux personnages
je vous appellerai – quand je vous appellerai ainsi… (et il tiennent surtout à leur rapport avec Meaulnes : tous deux
poussa une sorte de cri étrange : Hou-ou !…) » (p.155). sont liés à lui par une amitié indéfectible. Tous deux sont
d) Le personnage très romantique de Frantz apparaît aussi des personnages rêveurs et solitaires, restant
tragique : abandonné par sa fiancée le jour de ses noces généralement à l’écart des groupes constitués.
(bien qu’elle l’aime), il traîne une vie misérable après 2) Cependant ils diffèrent par leur évolution, comme
un suicide raté, et semble condamné à une vaine errance le montre ce chapitre : Frantz reste fidèle à ses rêves de
dans une quête impossible. jeunesse et se fait bohémien pour poursuivre son idéal.
Au contraire du narrateur, il refuse de s’installer dans
2. Le rôle du narrateur une situation conforme à l’image que l’on se fait d’un
a) Les termes appartenant au champ lexical de l’enfance homme adulte et réfléchi.
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Séquence
Séance 7
Les discours rapportés
I. Observer et comprendre avec toute sa fièvre, son inquiétude, son remords
1) Les personnages qui dialoguent sont François Seurel et mystérieux, j’ai compris que je n’étais qu’une pauvre femme
Yvonne de Galais. Cependant, dans ses propres répliques, comme les autres…
Yvonne cite des dialogues plus anciens (mis en gras dans le » “Je ne suis pas digne de vous”, répétait-il, quand ce fut
texte ci-dessous), ce qui explique l’utilisation de deux types le petit jour et la fin de la nuit de nos noces.
de guillemets. » Et j’essayais de le consoler, de le rassurer. Rien ne calmait
Et ce fut en ce lieu, ce soir-là, que pour la première son angoisse. Alors j’ai dit : “S’il faut que vous partiez, si
et la dernière fois, elle me parla de Meaulnes. je suis venue vers vous au moment où rien ne pouvait
« Ne parlez pas ainsi, dit-elle doucement, François Seurel, vous rendre heureux, s’il faut que vous m’abandonniez
mon ami. Il n’y a que nous – il n’y a que moi de coupable. un temps pour ensuite revenir apaisé près de moi,
Songez à ce que nous avons fait… c’est moi qui vous demande de partir…” »
» Nous lui avons dit : “Voici le bonheur, voici ce que tu Dans l’ombre je vis qu’elle avait levé les yeux sur moi.
as cherché pendant toute ta jeunesse, voici la jeune C’était comme une confession qu’elle m’avait faite, et elle
fille qui était à la fin de tous tes rêves !” attendait, anxieusement, que je l’approuve ou la
» Comment celui que nous poussions ainsi par les épaules condamne. Mais que pouvais-je dire ?
n’aurait-il pas été saisi d’hésitation, puis de crainte, puis 2) Je répondis qu’il était malheureux.
d’épouvante, et n’aurait-il pas cédé à la tentation de Je répondis qu’en tout cas, il n’était plus temps de courir.
s’enfuir ! Elle répondit qu’elle ne savait pas quand il reviendrait.
– Yvonne, dis-je tout bas, vous saviez bien que vous étiez ce
bonheur-là, cette jeune fille-là. 3) « Frantz venait de partir, dis-je, et certainement on
– Ah ! soupira-t-elle. Comment ai-je pu un instant avoir ne le rejoindrait plus maintenant. » Ce fut pour Meaulnes
cette pensée orgueilleuse. C’est cette pensée-là qui est une grande déception. Il hésita, fit deux ou trois pas,
cause de tout. s’arrêta. Il paraissait au comble de l’indécision et du
» Je vous disais : “Peut-être que je ne puis rien faire chagrin. Je lui racontai ce que j’avais promis en son nom
pour lui.” Et au fond de moi, je pensais : “Puisqu’il m’a au jeune homme. « Je lui ai donné rendez-vous dans
tant cherchée et puisque je l’aime il faudra bien que je un an à la même place », lui dis-je.
fasse son bonheur.” Mais quand je l’ai vu près de moi,
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Séquence
Séance 9
L’épilogue
Support de travail : Épilogue, p. 327-329, 2. Des sentiments mêlés
de « J’étais là silencieux… » jusqu’à la fin a) Lors de leurs retrouvailles, les deux personnages ne
du chapitre. se parlent quasiment pas. Les mots semblent inutiles, car
les personnages se comprennent sans avoir à se
I. Découvrir et comprendre questionner : « Alors je m’avançai vers lui et, sans rien dire,
1. Le dénouement je l’embrassai en sanglotant. Tout de suite, il comprit. »
a) Le narrateur ménage un certain suspense autour de la De plus, l’émotion est trop forte et les gestes semblent plus
réapparition de Meaulnes en évoquant d’abord un début de importants que les mots, notamment les embrassades.
journée tout à fait normal : préparatifs d’une partie de b) Les formules exprimant les sentiments du narrateur
pêche. L’arrivée de Meaulnes fait l’objet d’une description sont les suivantes : « Un long moment je restai là, effrayé,
et d’un compte rendu de son attitude étrange, sans qu’il désespéré, repris soudain par toute la douleur qu’avait
soit immédiatement identifié : il est désigné par l’homme. réveillée son retour » ; « je l’embrassai en sanglotant » ;
La reconnaissance vient comme une surprise, au bout d’une « je m’en allai, tout pensif et presque heureux » ; « un peu
demi-page : « C’est alors seulement que je reconnus le déçu et pourtant émerveillé ». Les deux dernières formules
grand Meaulnes. » montrent bien l’ambiguïté de ses sentiments, hésitant entre
b) Les étapes successives du dénouement sont les la joie et la peine : joie de retrouver Meaulnes et de le voir
suivantes : Meaulnes apprend la mort de sa femme ; il fait réuni avec sa fille ; peine causée par le souvenir ravivé
la connaissance de sa fille ; on apprend ensuite que Meaulnes de la mort d’Yvonne, mais aussi par la conscience de se
a réuni et ramené Frantz et Adèle ; le dernier paragraphe est retrouver seul.
consacré aux réflexions du narrateur sur sa propre situation. c) Les émotions de Meaulnes se traduisent par son
c) L’évocation de Frantz et Adèle est très furtive : attitude dans la chambre de sa femme, puis dans celle
quelques lignes seulement, et on ne les aperçoit que de de sa fille :
loin, probablement pour ne pas détourner l’attention – « il tomba à deux genoux devant le lit et, longtemps,
de la scène émouvante entre Meaulnes et sa fille. C’est resta la tête enfouie dans ses deux bras », « Il se releva
aussi une manière de rappeler leur rôle secondaire, quoique enfin, les yeux égarés, titubant, ne sachant où il était » ;
déterminant, dans l’intrigue. Leur bonheur s’est fait aux – « il la saisit et l’enleva dans ses bras. Il ne put pas bien
dépens de celui de Meaulnes. la voir d’abord, parce qu’il pleurait. Alors, pour détourner
d) La situation du narrateur à la fin du roman est un peu ce grand attendrissement et ce flot de larmes, tout
ambiguë : il retrouve son ami, mais le perd en même temps en la tenant très serrée contre lui, assise sur son bras droit,
qu’il perd sa fille (« il était revenu pour me la prendre »). Il a il tourna vers moi sa tête baissée. »
remplacé Meaulnes auprès d’Yvonne puis de sa fille, et passe Cela traduit d’abord son effondrement total, puis un
maintenant le relais. L’union du père et de la fille semble débordement d’émotion qu’il cherche à dissimuler,
marquer le début d’une ère de solitude pour le narrateur. probablement par pudeur.
e) Le dernier mot du texte est aventures. Il conclut bien d) Le geste de la fillette consistant à taper de la main le
ce roman marqué par la personnalité très forte d’Augustin visage de son père semble réveiller ce dernier. Cela l’amène
Meaulnes. Il apporte une note d’espoir après quelques à la regarder enfin et à jouer avec elle. Les deux êtres sont
chapitres très sombres, et ouvre le dénouement vers de alors unis par le rire et le jeu.
nouvelles perspectives (sans le narrateur…).
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Séance 10
La Promenade (1875), de Claude Monet
Support de travail : La Promenade (1875), de Claude (contre-plongée), ce qui lui donne un caractère imposant
Monet, visible sur Internet à l’adresse : http:// et monumental.
fr.wikipedia.org/wiki/La_Promenade 3) La silhouette du personnage se découpe sur un fond
de ciel à la fois nuageux et lumineux, qui occupe la majeure
I. Découvrir l’œuvre partie de l’arrière-plan. Elle se distingue de ce fond car elle
1) Claude Monet (1840-1926) est un peintre français est en contre-jour, donc légèrement plus sombre, mais avec
de la fin du xixe siècle. Il est un des fondateurs du des teintes identiques, ce qui lui donne un caractère aérien
mouvement impressionniste, particulièrement connu (accentué par l’effet du vent sur sa robe et son voile).
pour ses séries sur la cathédrale de Rouen et sur les 4) Le contraste de couleur et de lumière attire l’attention
nymphéas de son jardin à Giverny, qu’il peint à différents sur l’ombrelle, donc sur l’impression d’une journée
moments de la journée. ensoleillée. Cependant, l’ombrelle est en harmonie avec
2) La Promenade est exposée à la National Gallery of l’ensemble, car son vert fait écho à l’herbe du premier plan.
Arts de Washington.
3) L’impressionnisme est un mouvement pictural qui III. Mettre en perspective
domine la fin du xixe siècle en France, représenté 1) Le tableau date de 1875 et l’histoire du Grand
notamment par Monet, Manet, Renoir, Pissarro ou Sisley. Meaulnes se situe dans les années 1890, comme l’indique
On le reconnaît à ses touches de pinceau bien visibles, la première phrase du roman.
par lesquelles le peintre cherche à capter la lumière. 2) Ce tableau peut faire penser au chapitre de la
Les impressionnistes travaillaient plus volontiers en extérieur rencontre pour différentes raisons : la situation (promenade
qu’en atelier, afin de saisir des scènes ou des paysages sur dans la nature), le caractère pur, évanescent et mystérieux
le vif. de la jeune femme (sa toilette blanche, son visage caché
par le voile).
II. Analyser et comprendre l’œuvre 3) L’enfant en arrière-plan peut rappeler l’univers de
1) La scène semble se dérouler en fin ou tout début de l’enfance, qui joue un rôle important dans l’imaginaire
journée, en raison des ombres très étalées et de la lumière du roman, notamment dans la première partie. Les enfants
légèrement rosée et dorée. occupent d’ailleurs une place prépondérante dans la fête
2) La jeune femme est placée au-dessus de notre regard du Domaine mystérieux.
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Séance 11
Évaluation de fin de séquence
Support de travail : Première partie, chapitre II, p. 32- 8) Cette arrivée de Meaulnes annonce clairement la fin
33, depuis « L’arrivée d’Augustin Meaulnes… » jusqu’à de la routine, de la solitude et de la tranquillité dans la vie
« … bientôt le grand Meaulnes ». de François Seurel. L’image de la lampe et de la bougie
éteintes par Meaulnes symbolise aussi l’effacement des
I. Questions parents.
1) La première phrase résume le mieux l’ensemble
du texte, qui veut souligner la différence entre la vie II. Réécriture
du narrateur avant et après l’arrivée de Meaulnes. Sa mère a commencé de préparer le repas. Il monte
2) La vie du narrateur avant l’arrivée de Meaulnes est trois marches de l’escalier du grenier ; il s’assoie sans rien
une vie à la fois solitaire et paisible, passée auprès de ses dire et, la tête appuyée aux barreaux froids de la rampe,
parents. Elle est dominée par des activités sédentaires (il ne il la regarde allumer son feu dans l’étroite cuisine où
sort pas de chez lui), contemplatives (lecture, observation vacille la flamme d’une bougie.
des travaux domestiques), et toujours identiques. (– 0,25 point pour les verbes, – 0,5 point pour les autres
3) La lumière est très présente dans les deux derniers modifications.)
paragraphes. Sa connotation semble être celle du foyer :
elle est toujours associée aux parents : « je la regardais III. Dictée
allumer son feu », « la bougie qui éclairait pour moi le doux Erreur lexicale : – 0,25 point.
visage maternel », « la lampe autour de laquelle nous Erreur grammaticale : – 0,5 point.
étions une famille heureuse ».
4) Les verbes du premier paragraphe sont conjugués IV. Rédaction
au passé simple ; ceux du deuxième paragraphe sont à Sujet 1
l’imparfait. Le premier paragraphe évoque l’irruption de Critères d’évaluation :
Meaulnes, l’événement perturbateur dans une vie – respect des consignes formelles (narration,
quotidienne marquée par la répétition et l’habitude, énonciation) ;
évoquée par les imparfaits du deuxième paragraphe. – description étoffée et précise du lieu
5) Le champ lexical de l’école domine le deuxième et des personnages ;
paragraphe : cours, classe, école, cour, élèves. Il s’agit – utilisation du lexique des sentiments ;
du cadre de vie de François Seurel : ses parents sont – cohérence avec l’extrait tiré du roman ;
instituteurs, et la famille habite dans l’école. – qualité de l’expression écrite.
6) L’anaphore de quelqu’un au début des trois premières
phrases du dernier paragraphe fait attendre, comme un Sujet 2
roulement de tambour, l’annonce solennelle de celui Critères d’évaluation :
qui va bouleverser la vie du narrateur. Cette annonce – respect de la problématique posée par le sujet ;
vient dans la dernière phrase du paragraphe. – pertinence et variété des arguments exprimés ;
7) Le narrateur évoque ici les activités du soir, car celles – appui sur des exemples précis (références à des
de la journée, essentiellement occupées par les cours, situations réelles ou à des œuvres littéraires,
ne changera guère. C’est dans le cadre plus personnel cinématographiques, etc.)
et intime de la soirée que ses activités et son univers en – organisation cohérente de l’argumentation ;
général seront bousculés. – qualité de l’expression écrite.
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