Tiers Monde
Tiers Monde
Tiers Monde
COFRAL
Pour votre EXPANSION à !'Etranger
Principales branches : Chimie
Agro-alimentaire
Plastiques
Bâtiment
dossier préparé par Michel Arnaudon (51), Pierre Garrigues (34) et Claude Laigle (53)
3
L'année 1973 a brutalement attiré l'attention du monde occidental
sur ses relations avec le Tiers Monde. Confrontés à une situation
nouvelle de l'économie mondiale, théoriciens et experts tentent
depuis lors de préciser avec le plus de rigueur possible le visage du
monde de demain, un monde enfin saisi dans sa globalité. Les
responsables d'aujourd'hui, qui ont à déterminer les orientations à
long terme de la politique de notre pays, se doivent de participer à
cette recherche. Il est donc normal que le Ministre de l'Éducation,
ayant en charge la formation des jeunes générations, tienne sa
place dans ce grand débat. Depuis 1973 en effet, le contexte
international nous impose, d'une façon beaucoup plus évidente
qu'auparavant, d'adapter notre politique éducative aux conditions
économiques nouvelles, changeantes, auxquelles nous sommes et
serons toujours plus étroitement confrontés.
LE DEVELOPPEMENT
DU
TIERS MONDE
auel intérêt pour la France ?
PAR CHRISTIAN BEULLAC (1943)
Ministre de !'Éducation
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VIVRE A HUIS CLOS la maturité industrielle représentent ac- concurrence du Tiers Monde sur l'in-
tuéllement moins de 30 % de la popula- dustrie française sont encore globale-
tion mondiale. A la fin de ce siècle, ils ment très limités (7 % des importations
L'émergence des pays du Tiers
seront réduits à 20 %, et à 10 % au mi- de produits manufacturés), mais il faut
Monde est trop souvent perçue comme lieu du prochain. Qui peut imaginer aussi relativiser les pertes d'emplois que
une menace pour l'économie française.
On parle de «déferlement}), on s'émeut
qu'un dixième de la population mon- provoque cette concurrence par rapport
d'une concurrence « sauvage», notam- diale puisse continuer à vivre dans une à celles qu'entraînent les mutations nor-
ment dans le textile et l'habillement, on île de prospérité et à contrôler économi- males de l'économie (augmentation de
prévoit des coupes sombres dans l'ap- quement l'univers, alors que sa dépen- la productivité par exemple).
dance va croître par rapport au reste du
pareil productif français. Ensuite, s'il y a une menace, elle
monde?
Notre industrie, par surcroît, doit vient surtout des autres pays industria-
faire face à des revendications sociales lisés dont la concurrence est beaUcoup
profondes, tout en restant perçue plus redoutable pour nous que celle des
comme le recours suprême pour la sau- pays du Tiers Monde. Même 'si la
RICHES TOUT SEULS ? France s'est beaucoup plus ouverte au
vegarde économique du pays. Est-il
alors bien opportun de la fragiliser, monde depuis vingt-cinq ans qu'elle ne
c'est-à-dire de compromettre la crois- La prise en compte lucide et respon- l'avait jamais fait auparavant, sa situa-
sance de secteurs entiers, en l'exposant sable de l'émergence économique du tion actuelle demeure peu favorable
à cette « concurrence indésirable » ? Tiers Monde est enfin (et surtout) une dans le cadre de la spécialisation inter-
condition essentielle d'efficacité pour la nationale qui caractérise le nouvel ordre
Tel est bien l'étau dans lequel elle est politique économique de la France. économique. Elle a investi, en effet,
prise : aménager les conditions sociales Aujourd'hui, l'alliance peut et doit se dans les domaines où la demande mon-
de la production et défendre sa place substituer à l'antagonisme. Aucun pays diale est en déclin. De plus, ses investis-
dans la compétition internationale. La ne peut plus espérer maîtriser seul son sements directs dans le Tiers Monde
pire manière pour notre pays de tenter économie. Nous sommes entrés dans restent faibles et le retard s'accentue
de desserrer cet étau serait sans doute une ère d'interdépendance économique. par rapport à d'autres pays comme l'Al-
de revenir à un repliement sur soi dé- Tous les pays du monde occidental sont lemagne ou les USA.
sormais anachronique, et qui risquerait d'ores et déjà devenus dépendants de
de le conduire, au sein d'une économie Ainsi les liens économiques solides
l'extérieur pour leurs importations avec le Tiers Monde ne constitueraient
en voie d'intégration mondiale, à la comme pour leurs exportations, c'est-à-
·marginalisation, sans parler de la réces- pas seulement pour la France un moyen
dire aussi bien du point de vue de la de relance, mais aussi la base d'une
sion sociale. croissance que du point de vue de l'em- stratégie plus indépendante vis-à-vis des
Il nous faut admettre désormais que ploi. grands pays industrialisés.
l'industrialisation des pays du Tiers L'économie française, elle aussi, s'est
Monde est non seulement inévitable, ouverte, et d'une manière irréversible,
mais souhaitable à bien des égards pour aux échanges mondiaux. Notre taux
les économies développées en général et d'exportation est passé de 14 à 22 % du
pour la France en particulier. Nous ne PNB en 10 ans, ce qui est remarqua-
pouvons refuser ce processus prévisible, ble ; nous exportons 40 % de notre pro-
pour des raisons de justice, d'intérêt duction industrielle. Cette nécessité de
bien compris et d'efficacité. l'exportation ne saurait d'ailleurs être CONCURRENTS
remise en question : pour acquitter la MAIS CLIENTS
facture pétrolière, étant donnée notre
dépendance énergétique, nous sommes Il faut adopter une vue plus dynami-
condamnés à garder les frontières ou- que et moins malthusienne : nous nous
vertes. créerons des concurrents, certes, mais
DE LA CHARITÉ C'est dans ce nouveau contexte que aussi des partenaires et de nouveaux
A LA SOLIDARITÉ va se faire l'industrialisation du Tiers marchés. L'industrialisation du Tiers
Monde. Elle se fera, que la France y Monde est une chance à saisir pour
participe ou non. C'est dès maintenant notre économie. Et ce pour trois raisons
C'est tout d'abord une question de que nous devons nous préparer, lucide- principales :
justice. Les temps ont en effet changé. ment, à ce qu'elle se fasse avec la
Il y eut une époque où l'on affirmait - Sur le marché mondial, le Tiers
France. Monde est un client privilégié offrant à
que la responsabilité principale en ma-
Bien entendu, participer à l'industria- notre production des débouchés indis-
tière de sous-développement était le fait
lisation des pays du Tiers Monde, c'est pensables. La saturation des marchés
des pays développés. Faut-il rappeler
renforcer une concurrence-boomerang. est en effet devenue la règle pour de
que la France, pour sa part, n'a jamais
On ne manquera pas de mentionner les nombreux biens et l'exportation de
failli au devoir d'assistance qu'elle
s'était fixé à l'égard des pays en voie de importations sauvages qui commencent biens d'équipement ne doit pas exclure
à provenir de pays à bas salaires et sans celle de biens de consommation. La
développement? Il reste que le Tiers
législation sociale. clientèle du Tiers Monde, où les besoins
Monde, jusque dans un passé encore
sont imm.enses et les marchés nom-
proche, demeurait exclu d'un dévelop-
breux, est 'également nécessaire pour as-
pement mondial qui s'était fait en pui-
surer les emplois des pays développés,
sant de plus en plus dans ses ressources.
voire en créer de nouveaux, comme
C'est ensuite notre intérêt bien dans le secteur des biens d'équipement.
compris. On ne peut pas plus envisager LES GRANDES INVASIONS? Si on estime, par exemple, que les
un retour des pays pauvres à leur rési- achats de la France au Tiers Monde lui
gnation historique qu'une croissance Mais ce schéma est trop facile et il ont « coûté » près de 100 000 emplois
des inégalités comparable à celle du faut dissiper une illusion d'optique. Le en 1976, on doit reconnaître aussi que
passé. Le risque d'explosion serait trop danger est probablement plus ressenti ses ventes au Tiers Monde ont corres-
grand. En effet, les peuples parvenus à que réel. Non seulement les effets de la pondu à 360 000 emplois. 5
EXPORTER MIEUX FAIRE PEAU NEUVE Dans cette optique, notre pays doit
faire un gros effort de prospective di-
- Les économies du Tiers Monde peu- S'il faut faire progresser les échanges men~ion nouvelle et primordiale qu'il
vent être pour la France un complé- avec les pays en voie de développement, conviendrait d'institutionnaliser. Les
ment appréciable. Il faut développer un il faut également permettre aux entre- exportations françaises devraient être
prises françaises de faire face aux nou- facilitées par un réseau d'information
flux d'activités économiques dans les
velles concurrences présentes et à venir. comparable à celui dont disposent les
deux sens, intensifier avec des écono-
Et cet effort spectaculaire et parfois sociétés de commerce international ja-
mies en voie de développement un
douloureux entraîne pour notre pays et ponaises ou allemandes.
échange entre biens de consommation
et biens énergétiques d'un côté, et de notre société plusieurs conséquences : Pour l'exportation à destination des
l'autre biens d'équipement pour un - Il nous faut en premier lieu accepter pays du Tiers Monde, la France pos-
début d'industrialisation. Ce n'est qu'en toutes les mutations intervenues dans le sède des atouts considérables qu'elle
favorisant l'entrée à l'intérieur de nos jeu économique mondial et changer doit exploiter résolument : technologies,
frontières des productions du Tiers notre état d'esprit dans bien des domai- ingénierie, transfert de maîtrise indus-
Monde que nous pourrons accroître ra- nes. Ainsi, trop de mentalités dans trielle, toutes «exportations » dont les
pidement nos exportations de biens notre pays sont restées profondément répercussions sur l'emploi à l'intérieur
d'équipement et de produits élaborés déterminées par un long passé histori- de notre pays ne peuvent être que béné-
dits «à haute technologie». C'est « im- que d'autarcie relative, alors que la fiques.
porter mieux pour exporter plus 1>. Il est France dépend désormais fortement de Pour pouvoir exporter des produits
désormais admis que les restrictions im- l'extérieur (20 % de son produit natio- ou des technologies, la France expor-
posées aux importations en provenance nal environ). Il est peut-être temps d'en tera des hommes. Il faut les y préparer.
des pays en voie de développement peu- finir avec les vieux réflexes d'indépen- Dans ce domaine également le Français
vent aller à l'encontre ·de leur but, car dance économique absolue. doit changer de mentalité. Pas seule-
elles compromettent un courant d'ex- ment l'ingénieur de haut niveau, mais
portations beaucoup plus important, de aussi bien le cadre moyen, l'agent de
l'ordre du quintuple. A terme, accepter maîtrise, le professionnel. ..
les importations du Tiers Monde per-
met donc de réduire l'inflation ·et d'ac- REFUSER L'ACHARNEMENT
célérer la croissance. On sait aussi que THËRAPEUTIOUE
la similitude entre la structure des éco-
nomies, de même qu'entre les deman- - Il faut également en finir avec certai-
des, permet une plus grande progres- nes allocations de ressources dans l'in-
sion des échanges commerciaux : ici EXPORTER DU SAVOIR
dustrie française. Des entreprises qui
encore, dans l'immédiat comme à n'ont pas su s'adapter sont maintenues
terme, l'intérêt pour l'économie fran- artificiellement en état de survie pré- S'il faut former des- hommes pour
çaise du développement du Tiers caire alors que des entreprises saines ne l'étranger, il faut aussi leur apprendre à
Monde paraît certain. trouvent pas les moyens- de se dévelop- en former d'autres. Et notre chance,
per. Tel empire qui a refusé de voir c'est qu'au-delà de la mise en place des
l'évidence il y a dix ans aboutit au- équipements, ce que nous demandent
jourd'hui à la catastrophe, avec toutes les pays du Tiers Monde, c'est la forma-
ses incidences sociales et humaines trop tion des hommes. Si elle ne cède pas à
souvent dramatiques. Ces pratiques la facilité, 1a France a, dans ce do-
SOUS-TRAITER coûtent cher à la collectivité nationale. maine, un avenir immense. Ne pas
Sachons mettre en œuvre une économie céder à la facilité, c'est ne pas chercher
ABON MARCHÉ
de responsabilité. à imposer à des pays qui manquent de
La nouvelle répartition mondiale ne capital financier et font face à un excé-
- La troisième raison rejoint et renforce dent de capital humain une technologie
les deux autres : la division internatio- signifie pas nécessairement la dispari-
tion de certaines de nos industries qua- et donc une formation à l'occidentale,
nale du travail en fonction des coûts de qui supposeraient une utilisation inten-
main d'œuvre, telle qu'on la connaît lifiées et traditionnelles. Elle implique
seulement qu'elles doivent s'adapter sive du premier et un faible recours au
dans le textile, gagnera sans doute dans second. Ces pays ont surtout besoin de
l'avenir d'autres produits plus élaborés. aux nouveaux marchés. Or elles en ont
la capacité, mais à la condition de re- contremaîtres, de chefs d'équipes, de
La sous-traitance d'une partie du cycle techniciens. En effet, participer à l'in-
de production dans les pays à main garder les réalités en face. Notre indus-
trie textile, par exemple, n'est pas du dustrialisation du Tiers Monde, ce doit
d'œuvre ou à matières premières à bon être l'aider à se doter de moyens auto-
marché va constituer, de plus en plus, tout destinée à disparaître, comme on
l'entend dire parfois, mais à évoluer nomes de développement, par le biais
une source essentielle de compétitivité. peut-être d'une « technologie intermé-
vers la fabrication de produits plus éla-
Le Tiers Monde peut offrir à notre in- diaire>) immédiatement utilisable. Il y a
borés, incorporant une technologie plus
dustrie ce lieu de déplacement stratégi- trop d'exeinples de machines importées
recherchée.
que si les groupes français cherchent à par le Tiers Monde et qui n'ont jamais
y implanter des filiales. servi après le départ des experts. Une
L'industrialisation du Tiers Monde, nation industrialisée comme la Fiance
on le voit, constitue donc pour la devrait donc se mettre à l'écoute des
France une occasion unique de revitali- MONTER AU CRENEAU ... «vrais 1> besoins du Tiers Monde et ré-
ser son propre tissu industriel pour ET LE TROUVER sister à la tentation de lui faire connaî-
mieux l'adapter aux nécessités du nou- tre un dévêloppement {(mimétique »
vel ordre économique mondial. Il ne La recherche du marché doit être dé- plaqué du dehors et donc sans efficacité
doit plus s'agir maintenant de peser les sormais le principal critère de notre pour personne.
avantages et les inconvénients d'une production industrielle en matière d'ex-
partîcipation de notre pays à cette mu- portations. Il faut coller à la demande
tation, mais bien d'y voir une condition mondiale et savoir tfouver les bons
6 de survie polir 1' économie française. (f créneaux >).
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S'ÉDUQUER A CHANGER l'autonomie de l'élève permettra d'at- évidemment donner une priorité à l'en-
teindre ce but. seignement technique en développant
Changer les mentalités, cela pose, Il faut favoriser les reconversions et .ses voies longues et en valorisant ses di-
pour les hommes d'aujourd'hui, un pro- la mobilité des hommes et des entrepri- plômes. L'introduction récente de l'édu-
blème d'éducation au sens le plus ses. Au mythe sécurisant de l'universa- cation manuelle et technique dans l'en-
large : tous les partenaires économiques lité de la langue française doit succéder seignement général des collèges est à cet
sont concernés. Mais le Ministère de une ouverture résolue aux langues vi- égard déterminante. Cette formation
l'Education a un rôle particulier à vantes et aux civilisations étrangères. professionnelle n'a pas besoin d'être
jouer. Outre de nouvelles mentalités, ce C'est la seule réponse possible à l'inter- une formation <1 pointue » mais devrait
monde qui est en train de naître appelle nationalisation des rapports économi- plutôt correspondre aux grandes caté-
en effet de nouvelles formations. Pour ques. gories ou aux grands types de métiers.
aujourd'hui et pour demain, l'une des Il est nécessaire parallèlement d'orga- A l'entreprise, ensuite, d'adapter plus
meilleures chances de développement niser et de développer les actions de re- précisément cette formation à tel sec-
de notre économie se trouve dans nos cherche en les obligeant notamment à teur ou à telle activité.
rapports avec l'extérieur, donc avec le devenir de plus en plus internationales. La France ne pratique aucune forme
Tiers Monde. Pour l'Education, ce Et plus que jamais notre système éduca- d'impérialisme, ni économique, ni cul-
quasi-p.ostulat s'énonce en terme d'ou- tif doit former des jeunes dotés, outre turel, ni politique. Pour nous, dans le
verture au monde, de mobilité, de for- de solides connaissances de base, de développement de nos rapports avec le
mation professionnelle. cette capacité à «continuer à appren- Tiers Monde, il n'y a pas d'un côté une
L'ouverture de l'école sur les réalités dre» qu'exigent les sociétés et les éco- utopie qui nous coûterait cher et de
du monde contemporain, déjà mise en nomies en mouvement qui soi:it les l'autre une exploitation indirecte visant
œuvre dans les contenus d'enseigne- nôtres. à la «récupération». Il y a au contraire
ment du collège unique, devrait donner une réelle convergence entre la volonté
aux adultes de demain, selon les termes d'indépendance de la France d'une part
de M. Giscard d'Estaing à !'Unesco, et la pratique de la solidarité et de la
«les moyens de mieux comprendre le coopération d'autre part. Le système
monde qui est le nôtre, mais qui, cha- éducatif français peut et doit être pour
que jour qui passe, devient le leur, d'en APPRENDRE POUR AGIR les responsables de demain le lieu de
mieux percevoir et prévoir les évolu- cette prise de conscience : c'est en dé-
tions de plus en plus rapides et de plus L'adaptation de notre politique édu- fendant nos valeurs, que nous défen-
en plus profondes » : Telle doit être cative aux conditions économiques nou- drons le mieux nos intérêts. C'est de
notre école, « mémoire des civilisations velles passe enfin par un renforcement cette façon, et de cette façon seule,
et des cultures » pour mieux remplir sa de la formation professionnelle. Jamais que la France pourra rester, comme
seconde fonction qui est essentielle : nous n'avons ressenti à ce point la né- l'écrivait M. Giscard d'Estaing dans
celle de «moteur du changement». cessité d'armer les jeunes générations Démocratie fra'nçaise: « un partenaire
Seule une pédagogie favorisant l'imagi- pour la compétition internationale. inventif et respecté du monde contem-
nation et laissant une grande place à Dans cette perspective, nous devons porain».
réalités du tiers monde
LA COMPLEXITE GEOPOLITIQUE
DU
TIERS MONDE
PAR MICHEL MALHERBE (50) "
e tiers monde n'est pas je ne sais d'avoir vécu à l'étranger, perçoit mal
8
boulet ... "' ingénieur en chef des Ponts et Chaus-
sées, ancien expert des Nations-Unies
tes que la nuit polaire et le froid impo-
se11t aux Eskimos?
riance de leur végétation ne sont donc Mais comment accéder à ce niveau
pas, tant s'en faut, synonymes d'agricul- quand on appartient à une tribu de
ture potentiellement florissante. De plus quelques centaines de personnes enfer-
la prolifération de la vie là où l'eau et le mées dans une clairière péniblement dé-
soleil existent en abondance entraîne frichée où la nature est si hostile que la
aussi, entre autres, la prolifération des durée moyenne de vie ne dépasse pas
insectes et des maladies. vingt ans.
Les grandes endémies tropicales - Ce sont pourtant quelques dizaines
'"°- 4 __s.
... de. Vercin~é..t.o..-·1x
malaria, filaTioses, bilharziose, tripano-
somiase - sont la rançon de cette exubé-
rante vitalité de la nature et l'homme de
de millions d'hommes qui vivent encore
dans ces conditions, de 1'Amazonie à la
Nouvelle Guinée en passant par l'Afri-
Les pays désertiques semblent à tels pays doit faire face à une inégalité que Équatoriale et l'Asie du Sud-Est.
priori les plus deshérités mais, si l'agri- de plus : l'inégalité devant la maladie
qui n'est que l'expression de cette loi de L'organisation sociale est déjà beau-
culture y est effectivement un exploit li- coup plus élaborée et hiérarchisée dans
mité à des oasis ou à des irrigations la nature de maintien des équilibres
entre les espèces. C'est l'écologie à l'état les pays de Savane où les communica-
aléatoires, ces pays se trouvent être gé- tions à pied ou à cheval sont plus faci-
néralement vastes par suite de leur pau- pur.
Les ressources naturelles, telles qu'el- les : les colporteurs, les griots comme
vreté même. Ils ont ainsi des chances nos anciens troubadours, transmettent
quasi-proportionnelles à leur surface de les correspondent aux besoins que nous
exprimons, sont pour beaucoup de pays par leurs récits la conscience d'un «ail-
disposer de ressources minérales : fer de leurs » forcément embelli qui peut
la Mauritanie, pétrole d'Arabie, ura- petits ou moyens un facteur de distor-
sion supplémentaire. pousser la société à l'évolution. Ce rôle
nium du Niger etc... est maintenant prolongé par les travail-
Un certain décollage économique qui Par quel effet du sort, le Gabon, forêt
vide d'habitants, a-t-il à la fois du pé- leurs immigrés qui reviennent au village
n'ira pas sans perturber grandement le auréolés de prestige et font des récits
mode de vie traditionnel, peut, pour trole, du fer, du manganèse, de l'ura-
idéalisés de leur expérience.
certains de ces pays,être envisagé à plus nium, plus les bois tropicaux alors que
ou moins longue échéance. d'autres pays africains comme le
La situation la plus dramatique, ne Rwanda et le Burundi doivent nourrir
serait-ce que par le nombre des person- 150 habitants au kilomètre carré - près
nes concernées, est celle des pays qui de 100 fois plus que le Gabon sans au-
vivent uniquement - ou presque - de cune ressource utilisable à ce jour?
l'agriculture et qui ne peuvent accroître
leur production aussi vite qu'augmente
DIVERSITÉ SOCIALE,
leur population. CULTURELLE ET LINGUISTIQUE
On a trop tendance à oublier dans Les conditions climatiques réagissent
nos pays où les naissances sont si bien vigoureusement non seulement sur le
contrôlées qu'il n'y aura peut-être bien- mode de vie, mais sur la structure so-
tôt plus assez de jeunes pour payer la ciale et politique des pays.
retraite des vieux, qu'une loi perma- Prirnum vivere : tout approfondisse-
nente de la nature est l'adaptation du ment d'une culture, toute amélioration est dans ces espaces plus clairse-
nombre des représentants d'une espèce de la structure sociale implique qu'une més que ce sont ainsi brassées
aux disponibilités de ses ressources ali- partie au moins de la société soit débar- les populations - souvent à l'oc-
mentaires : protégeons les éléphants, ils rassée du souci exclusif de la survie. ( casion de guerres - et constitués
pullulent, dévorent plus que la terre ne La majorité, pas la totalité hélas, de les royaumes dont il subsiste de
produit et finissent par mourir de faim la population des pays développés en nombreuses traces : sultanats peuls du
jusqu'à ce que le nombre des survivants est à ce stade. Dans les civilisations an- Cameroun, empire du Mossi en Haute
corresponde à ce que la terre peut leur ciennes, l'exploitation des serfs, des es- Volta, etc... Chacun de ces ensembles
offrir. claves ou des prisonniers de guerre lais- qui peut toucher quelques centaines de
sait à une minorité la possibilité milliers à quelques millions d'hommes a
d'allumer les flambeaux de la pensée créé ou développé sa culture et sa lan-
qui font encore notre admiration. gue propre.
Louis X[
Nous sommes, nous aussi, soumis à
cette loi que nous avons tournée en ce
qui concerne les pays développés par le
progrès technique et la productivité.
Mais il existe des pays, Haïti en est
peut-être le pire exemple, où l'homme a
détruit pour ses besoins la nature et les
sols qui le faisaient vivre provoquant
ainsi inexorablement la misère, la fa-
mine et la mort. Les climats tropicaux
et équatoriaux quelque soit la luxu- , .. 01Qintleti
n trouve donc simultanément, a religion - ou la philosophie - toire et de la culture : de même que les
0
dans les pays du Tiers Monde constitue également un élément Britanniques se sont <t décomprimés »
de micro-sociétés assimilables à important du substrat culturel après leur victoire de 1945 de même les
des tribus, des « royaumes » qui des peuples et contribue à la _di- Stakhanovistes qui dans les années 1920
ont, au sein des gouvernements versité des situations. se répétaient «iechtchodvatsat liet i bu-
actuels, une place analogue à celle des diet kommunism » (encore vingt ans et
grands féodaux dans notre moyen-âge Il est certain que les grands ensem- ce sera le communisme) n'ont pour hé-
et, bien sûr, des états plus centralisés et bles, chrétiens, islamiques, bouddhistes, ritiers aujourd'hui que des bureaucrates
proches de ce que nous connaissons en indouistes, marxites ou même animistes combinards et désabusés. La philoso-
Europe. impriment à leurs «fidèles )} un certain phie révolutionnaire ou la mobifisation
type de comportement qui les détermi- patriotique ont le souffle plus court que
La situation peut être toute différente nent ou plus souvent infléchissent la ré-
dans deux pays voisins de taille et de les grands courants religieux.
sultante des autres tendances.
population comparables : alors que la
Thaïlande eSt un royaume comparative- La société et la religion interagissent
ment très unifié culturellement où ne l'une sur l'autre. L'Islam n'est pas vécu
subsiste que des minorités marginales, de la même façon en Indonésie, en LES PROBLÈMES POLITIQUES
la Birmanie est une mosaïque de peu- Afrique Noire qu'en Afrique du Nord
ples - Kachin, Çhan, Chin, Karen, ou en Arabie Saoudite. Si l'on veut discerner comment la vie
Kayah, Birman etc... fédérés officielle- politique influence les conditions du dé-
ment mais pratîquement en équilibre Au Sénégal par exemple des confré- veloppement, il faut se résigner à sim-
très instable. ries comme les Tidjanes et surtout les plifier considérablement la complexité
Mourides forment des groupes impor- inextricable des situations réelles.
Mêmes différences entre les deux na- tants totalement dévoués à leurs chefs.
tions géantes de l'Asie. La Chine, mal- L'une des schématisations possibles
Ceux-ci, riches et puissants, représen-
gré de très importantes nationalités mi- consiste à évoquer les faits de nature
tent un pouvoir politique considérable économique et ceux liés au comporte-
noritaires apparaît infiniment plus et aucun gouvernement ne pourrait sub-
unitaire que l'Inde. ment des dirigeants.
sister sans leur neutralité; ce n'est pas
En ce qui concerne l'économie, la
Sur le plan linguistique, la Chine l'une des moindres qualités du Prési-
mode consiste aujourd'hui à imputer au
n'utilise pratiquement qu'un système dent Senghor, Serère chrétien, que
colonialisme les malheurs du Tiers
d'écriture utilisé sans modification no- d'avoir su s'en accommoder.
monde.
table par les différents dialectes chinois
En Iran, où la vieille civilisation· indi- La générosité précédente qu'on peut
alors qu'en Inde les treize langues offi-
européenne et zoroastrienne a été penser ni meilleure ni pire que la nôtre
cielles utilisent une dizaine de système
contrainte à capituler devant les Arabes s'est, elle, enthousiasmée pour l'aven-
d'écriture différente - soit près de la
et leur islam, le pays, pour garder en ture coloniale qui consistait dans l'es-
moitié de ceux en usage dans le monde
quelque sorte sa personnalité sans pour prit de la majorité de ceux qui la vi-
entier.
autant encourir les foudres des soldats vaient à prendre des risques physiques
Et que dire de pays africains comme du prophète, s'est réfugié dans le considérables pour évangéliser, instruire
le Gabon où l'on parle plusieurs dizai- chiisme un peu de la même façon que et civiliser les «sauvages». Il est faux
nes de langues pour à peine quelques pour des raisons d'antagonisme politi- de penser que ces lampistes du colonia-
centaines de milliers d'habitants. que s'est effectué en Europe quelques lisme aient eu un comportement diffé-
A l'intérieur de l'Afrique, et toujours siècles plus tard le clivage entre États rent en face des réalités que nos coopé-
sur le plan linguistique qui est un bon protestants et États catholiques dans ce rants d'aujourd'hui: certains ont servi,
révélateur des diversités culturelles, les qui est aujourd'hui l'Allemagne. d'autres se sont servis. Les pays où il
situations sont radicalement différentes n'y a aucune richesse n'ont pas pu être
d'un pays à l'autre: le Rwanda et le « exploités » : ils ont bénéficié de la
Burundi constituent un ensemble de 6 à paix, qu'ils ignoraient, d'une certaine
7 millions d'habitants qui parlent sensi- justice qui protège les plus faibles, de
blement la même langue alors que des médecins et d'infrastructures. A moins
pays comme le Gabon mais aussi le d'interroger un militant politique en
Benin, le Togo, la Côte d'Ivoire souf~ 'homme a besoin pour se déve- transes, force est de reconnaître avec le
frent d'une diversité telle que seul le lopper d'abord d'être assez paysan de base de ces pays que le bilan
franÇais permet l'intercommunication nourri mais aussi d'être poussé a été positif : c'est en général le cas de
des citoyens d'un même pays. Entre ces par une force intérieure qui le l'Afrique Noire où, c'est un bon indice,
deux extrêmes des pays comme le Séné- sorte de lui-même. Peut-être l'ap- l'indépendance s'est passée sans dou-
gal avec le ouolof, l'Empire Centre pât du gain, du confort et de la leurs : la puissance coloniale n'avait
Africain avec le Sango ou la Tanzanie consommation constitueront-ils un res- rien à y perdre, les élites locales tout à
avec le swahili peuvent hésiter entre sort plus puissant que la philosophie ou y gagner, les paysans rien à comprendre
une langue nationale comprise sinon la religion mais il faut bien constater dans ce changement de maître.
parlée par la majorité de la population que le fatalisme musulman du «mek- Par contre de la même façon que
mais de portée réduite et l'usage d'une toub » - c'est écrit - ou celui de l'indou l'empire Inca a été culturellement mas-
langue européenne. pris dans le cercle des réincarnations sacré par le colonialisme espagnol, de la
Des solutions de bilinguisme comme successives ont contribué largement à la même façon l'Inde a été économique-
au Pérou où le quechua - la langue des léthargie relative d'une bonne partie du ment très traumatisée par la colonisa-
Incas - vient d'être réhabilitée comme Tiers monde. tion britannique.
langue nationale aux côtés de l'espagnol La confrontation entre une philoso- Mais alors que dans le premier cas la
constitueront peut-être une solution phie ou un système de valeurs et les destruction a été irréversible, il est im-
moyenne permettant à la fois la scolari- événements peut engendrer des situa- possible d'admettre que le péché colo-
sation des habitants dans leur langue tions de tension dramatique qui stimu- nial entraîne des conséquences écono-
maternelle et la recherche d'une expres- lera pour un temps toute une popula- miques indéfinies. L'Allemagne était
sion culturelle originale en même temps tion mais cette tension retombe et profondément détruite après la guerre,
que le rattachement à un ensemble lin- disparaît bientôt pour laisser s'exprimer les hommes qui restaient vivaient
10 guistique d'importance internationale. les tendances plus profondes de l'his- comme des rats et en 10 ans le pays
--------------------------------------~-----,----·
L
pour prendre un vocabulaire à la mode,
pouvoir joue un rôle bien plus ce serait une attitude néo-colonialiste
important dans la politique de ce ne sont pas forcément les mieux aussi bien de chercher à imposer notre
leur pays que dans le cas des formés qui sont les plus forts. On peut modèle - seuls quelques rares attardés y
pays développés. Sous la 3' Ré- même trouver des polytechniciens du songent encore - que de souhaiter à leur
publique, les fonctionnaires français ont Tiers monde qui sont sortis dans l'ar- place que ces peuples gardent intacte,
permis au pays de vivre sans grands inée pour tenter de résoudre cette équa- écologiquement, leur culture alors _que
dégâts malgré la valse des Gouverne- tion ... tout prouve qu'ils veulent en changer.
12
LE DEVELOPPEMENT
DE
L'AMERIQ IBERIQUE
PAR SALVADOR DE MADARIAGA (06)
Le texte que nous vous présentons est peut-être la dernière œuvre de notre camarade.
Son attachement à l'École s'est, jusqu'à la fin, manifesté, et par son immédiate acceptation de participer à ce numéro, et par
son désir, encore exprimé à la veille de sa mort, de créer un prix littéraire polytechnicien.
Lorsque le 2 mai 1976, il fut enfin reçu à l'Académie Espagnole, il évoqua Polytechnique. Voici comment:
« Mon souvenir comme étudiant en France était surtout vivace en ce qui concerne la superbe intelligence didactique des
professeurs français ... Je parlais de ((la Beauté dans la Science 1>, pour me permettre d'évoquer la figure de mes anciens maîtres
admirés, précisément, pour la beauté de leurs exposés. J'aurais aimé que ce discours, où il est surtout question du Professeur
Humbert qui enseignait l'analyse algébrique à l'X et la résistance des matériaux aux Mines, trouve sa place parmi vos
publications».
Sa mort l'a empêché de poursuivre ses «retrouvailles » avec l'École, au moment où X Littérature allait commencer avec lui une
sympathique collaboration.
e commence par déclarer que, Or, rien n'arrive dans le langage qui nutile aussi de s'égarer en des cas
C
économîque des 1?.tats-Unis et de l'An-
jamais ou presque se rappeler que gleterre sur le continent ibérique gran- anglo-saxonisme pur sang acceptant les
Cuba et Puerto Rico sont restés dit rapidement. La force priva le Mexi- contradictions vitales, ont reçu un nom
dans l'ensemble espagnol jusqu'à que de vastes territoires aujourd'hui pittoresque et sagace : ils sont des
la fin du siècle. La raison en est «américains», et cette évolution se ter- guêpes. Pourquoi? Parce que l'anglais
bien simple. Les deux îles étaient en mina par la guerre américaine qui arra- pour guêpe est Wasp qui réunit les ca-
parfait accord avec leur situation. Les cha à l'Espagne non seulement le Cuba, ractéristiques de l'américain anglais jus-
guerres séparatistes du siècle n'avaient où existait un parti séparatiste soutenu qu'au bout : W veut dire blanc ; AS
lieu qu'à Cuba, dont les États-Unis par les États-Unis, mais le Puerto Rico veut dire Anglo-saxon ; P veut dire Pro-
d'Amérique désiraient s'emparer ; mais dont le désir de quitter l'Espagne était testant. Après avoir mis à la porte le
rien ne troublait le Paradis portoricain. nul. plus gentlemanly possible du monde,
Le lecteur que ce thème intéresse devra juifs, catholiques, latiris, slaves et Dieu
lire PO!NSETI*, auteur tout ce qu'il y sait quoi, le <1 guêpe l} peut penser à son
a de plus américain qui le constate au aise sans avoir à être logique - chose
début du siècle. que l'Anglais n'aime pas du tout.
Aujourd'hui, les cubains sont des sa- LA RELIGION DE DARWIN Inutile de dire que lorsque les guêpes
tellites de l'Europe russe et les portori- ont purifi.é leur maison, ils n'en sont
cains les plus misérables des américains. pourtant pas capables d'expulser les in-
Ce qui a disparu, c'est le Paradis. endant cette guerre, l'Angle- désirables, et c'est ici que se trouve la
terre fit tout ce qui était en son vraie faille qui sépare les deux partis
pouvoir pour aider les États- américains.
Unis et notamment trouva le Lorsqu'un Américain vous avoue
moyen de refuser à l'Espagne le qu'il est devenu démocrate, il n'oublie
AVANT ET APRÈS droit de passage par le Suez, qui lui
« L'INDÉPENDANCE,, jamais de vous avertir que sa famille a
était indispensable pour ravitailler sa été, toute sa vie, républicaine. Ça veut
flotte des Philippines. Cette attitude dire : Je suis démocrate malgré que,
plus ou moins tacite contre l'Espagne chez moi, nous sommes tous guêpes. Le
oilà ce qui a été notre passé. était déjà traditionnelle en Angleterre et
Mais il est aussi vrai de !'His- paysage est clair. Démocrates, populai-
s'explique par la communauté de foi res, <~ gauche » ; républicains, aristocra-
toire que de la biologie que entre les deux pays dont l'un pouvait
l'avenir est porté par le présent tes, guêpes.
être considéré comme la mère-patrie de Mais qu'eqt devenu Darwin? That is
dans son ventre. Nous pointe- l'autre.
rons donc au fait que ce sont des the question. Wasps et anglais (qu'ils ad-
Nous sommes déjà sur le terrain de la
cubains qui ont pris une part peut-être mirent et détestent) sont danviniens.
foi. Mais il y a lieu d'éviter toute confu-
déterminante dans l'avenir de l'Angola Pendant le dix-neuvième siècle, le
sion entre foi et confession. Bien en-
et du Mozambique, ce qui montre que concept d'évolution prend possession
tendu, les deux pays comptent dans les
la politique américaine des 1?.tats-Unis des esprits scientifiques et, graduelle-
statistiques comme prostestants, et il ne
n'est pas seulement une erreur en soi, ment, fait disparaître l'idée d'une créa-
serait guère sage de l'oublier; mais la tion subite et explosive que des anglo-
mais aussi une cause de graves erreurs.
Je voudrais à cet égard essayer de met- * J.R. POINSEIT - Notes on Mexico saxons et autres guêpes ridiculisent sous
14 tre en avant trois propositions : made in the autumn of 1822. London, 1825. le nom pittoresque de Big-bang c/·eation.
PËROU, PROVINCE DE PUNO, CHINCHERA
UNESCO/P. ALMASY
15
Il semble à l'auteur de ces lignes que Etats-Unis contre l'Espagne. Mais darwiniens ? Mais on pouvait être cela,
l'opposition elle-même ainsi suggérée Cuba? Au fond c'était bien le même et bien d'autres choses, avec une diffé-
est loin d'être inspirée dans un esprit cas mais les circonstances en furent un rence. Mon plan, cependant, n'était
scientifique et il a essayé de donner un événement tout différent où les respon- nullement darwinien. Il cOnsistait à es-
aperçu de ses. raisons pour s'en écarter sabilités semblaient peu claires. sayer de faire un traité à trois où les
dans des ouvrages tels que Portrait d'un Le cas clair c'est ~uerto Rico. Car à trois parties - les Etats-Unis, l'Améri-
homme debout (Stock, Paris, 1968). Puerto Rico jamais ne s'était produit un que Ibérique et l'Espagne - y trouvent
Quoi qu'il en soit, il ne semble pas que, mouvement de séparatisme comme leur compte. pour moi, et cela est tou-
même si l'idée aujourd'hui discutée de celui qui avait permis aux Etats-Unis de jours mon opinion, l'intérêt des Etats-
l'évolution était admise, elle autoriserait se présenter à Cuba comme un pays li- Unis était de se faire en Amérique un
des sociologues et politiciens à cons- bérateur. Mais les Etats-Unis se sont vaste marché, en contribuant par ses
truire sur une base aussi précaire un emparés de Puerto Rico par la force du capitaux à augmenter la population.
édifice aussi mal conçu que la politique plus fort ; et cette île, hetireuse sous' les L'intérêt de l'Amérique Ibérique était
du plus fort et le Faustrecht der Macht. espagnols, est devenue le plus misérable de choisir cette population en Espagne
C'est pourtant ce qui s'est passé. Avec des pays. et au Portugal avec un certain apport
la ponctualité étonnante que !'Histoire Presque inaperçu alors, cet évén~ d'autres peuples méditerranéens. C'était
révèle quelquefois, nous observons ment, le plus brutal des vols qu'enregis- là aussi l'intérêt de l'Espagne. Elle four-
comment Philippe Il (mort en 1598, fils tre l'Histoire·, fut perpétré par un pays nirait non pas des individus isolés mais
de Charles V né en 1500) semble, par la au sommet de sa puissance, et ce en aussi des communautés déjà consti-
même magie des chiffres, présider la li- vertu d'un programme d'expulsion de tuées, avec docteur et curé tout prêts.
quidation de l'empire espagnol, dévoré tous les Etats européens qui avaient été Et il me semble encore que la vraie so-
par les «américains» en 1898. Et alors mis en avant par Roosevelt I. Cet acte lution est là.
que l'empiFe espagnol avait été fondé de «violation de droit 1> a· empoisonné Dans le plan Dar\vin, variété Wal-
au nom de Dieu le Père, l'empire tout notre siècle. Aujourd'hui, la lace, cette vue n'avait pas de place. Cela
« américain}) s'élève sur la doctrine dÙ. science s'étant déclirée athée, tout un n'existait pas. Cela n'existe toujours
Père Charles Darwin. chacun se croit en droit d'occuper le pas, et c'est pourquoi cet article a été
Or cette doctrine ne tient pas debout. trône vide et, donc, à se déclarer Dieu. écrit.
J'ai essayé de montrer pourquoi dans D'où ·1e droit de mort que n'importe
d'autres ouvrages. Elle ne tient pas de- quël terroriste s'arroge d'assumer pour
vant une critique scientifique sérieuse ; lui-même.
mais même si elle tenait, ce qu'elle di-
rait n'autoriserait guère les anglo- e maintiens que c'est dommage,
saxons à se rêver dans le rôle des «plus
aptes » à qui la victoire est due, ne füt-
ce que parce que nous tous, les hommes
et femmes du monde, sans autre préten-
tion à la sagesse que le sens commun,
ne reconnaissons pas l'homme « apte })
ni dans le ridicule Roosevelt I, ni dans
D
ans un de mes voyages à Wa-
shington, Roosevelt II régnant,
je rendis visite à John Wallace,
ministre de l'Agriculture, afin
de lui exposer ma façon de
voir le problème du développement de
l'Amérique Ibérique. John Wail ace était
J entre autres raisons parce que le
résultat ne. fait pas justice au peu-
ple des Etats-Unis, dont les non-
guêpes, grosso-tnodo des démocra-
tes, valent beaucoup plus que la réputa-
tion qu'on leur a faite, comme les deux
grandes guerres du siècle le prouvent.
le pédant, sagace tacticien mais autre- un Wasp pur, dans tous les sens du Le peuple américain est beaucoup plus
ment aveugle Roosevelt Il, ni dans le mot : car il devait sa fortune à des ex- idéaliste et noble que ses wasps le di-
féroce Kitchener. périences réussies dans l'art difficile de sent aux chardons.
C'est pourtant cette doctrine, tacite- l'hybridation du maïs. Darwinien à la Après tant d'austérité, je crois de
ment maintenue, qui autorise les Etats- base. Pas l'e moindre doute. 11 était ce- mon devoir de terminer avec une anec-
Unis, menés par leurs guêpes, à pendant de ceux qui disaient : {( Ma fa- dote. Deux protestants essayent de
commettre en 1898 le plus grand crime mille a toujours été républicaine 1>, car convertir un portoricain d'origine espa-
politique de notre siècle. Ce crime ce ce n'est que relativement tard qu'il était gnole: «Comment 1>, leur demande-t-il,
fut le vol de Puerto Rico par une atta- devenu démocrate. « pourrais-je devenir protestant, quand
gue à main armée, menée à bout aveç Après tout, les démocrates eux- je ne crois même pas à la religion ca-
un cynisme tout darwinien par les mêmes, que pouvaient-ils être sinon tholique qui est la seule vraie ? »
16
AGRICULTURE
ET DEVELOPPEMENT RURAL EN
ASIE DU SUD:
mythes et réalités de la révolution verte
PAR JACQUES LOUP (62)
L
sente sans doute la plus grande 'histoire du développement
Si on analyse la croissance de la pro-
concentration de pauvreté dans le agricole de la région depuis les
duction depuis 1960, un tournant appa-
monde et l'avenir de cet ensemble géo- indépendances de la fin des
raît vers les années 1965-67. Un taux de
graphique est un des problèmes majeurs années quarante apparaît comme
croissance annuelle relativement bas
du développement du Tiers Monde. une lutte permanente pour main-
tenir un ·taux d'accroissement de la pro- (0,32 %) de 1960 à 1965 a été suivi par
L'économie de l'Asie du Sud reste es- un taux beaucoup plus rapide (3,70 %)
sentiellement agricole. L'agriculture est duction agricole et alimentaire à tout le
moins égal à celui de la popl,llation ; de 1965 à 1974. Cette accélération de la
à l'origine de près de la moitié du pro- croissance est particulièrement marquée
duit intérieur brut de la région et four- c'est ce que on a appelé la course entre
la cigogne et la charrue. Après trois dé- pour le blé (de 1,85 % à 10,52 %).
nit 70 % des emplois ; quatre habitants Jusqu'à 1965, l'accroissement de la
sur cinq vivent dans les campagnes. Le cennies d'effort, l'issue de la course pa-
raît malheureusement toujours incer- production fut essentiellement dO. à
développement économique du sous- l'application de mêthodes traditionnel-
continent doit donc passer par l'amélio- taine. De 1960 à 1974, par exemple, la
production céréalière a augmenté d'en- les : accroissement des zones cultivées
ration de la productivité de son secteur (de manière limitée, cependant, car les
viron 40 9b mais la population s'est ac-
agricole. Le développement de l'agricul- possibilités sont réduites), développe-
ture et la situation alimentaire de la ré- crue dans la même proportion.
ment de l'irrigation, premières utilisa-
gion ont, par ailleurs, des implications Clairement la production par tête n'a tions des engrais sur des variétés locales
qui dépassent les limites du sous-conti- pratiquement pas bougé dans les deux de céréales. En 1965-66 et 1966-67, une
nent. On a vu dans le passé (1966-67, dernières décennies et la consommation succession dé deux moussons insuffi-
1972-74) que des récoltes céréalières ex- reste aussi à un niveau déplorablement santes causèrent une chute des récoltes
ceptionnellement mauvaises dues à des bas. La consommation journalière céréalières, particulièrement en Inde.
moussons insuffisantes, avaient des ré- moyenne dans la région est d'environ Seules les importations massives de blés
percussions importantes sur les exporta- 430 grammes de grains (surtout blé, riz, américains permirent à ce pays d'échap-
tions de grains· des pays à surplus et sur maïs ou mil) qui constituent l'essentiel per à la famine. Catastrophe économi-
les réserves alimentaires mondiales. Le de l'alimentation de la grande majorité. que et humaine, la sécheresse eut ce-
développement rural dans le sous-conti- Les céréales constituent 65 % de l'ap- pendant le résultat de forcer les
nent concerne donc directement le cin- port calorique de la ration alimentaire gouvernements à prendre conscience de
quième le plus pauvre de l'humanité ; moyenne en Inde et au Pakistan et plus la nécessité de développer leurs agricul-
indirectement il affectera la situation de 80 % au Bangladesh et au Népal. tures. Par coïncidence, cette prise de
alimentaire du reste du monde. Dans plusieurs pays (Inde, Bangladesh, conscience s'effectuait au moment où 17
INDONËSIE, RËGION DE BANDUNG,
UNESCO/DAVID DAVIES
18
des progrès récents des techniques agri- Ceci n'est pas dire que la situation se d'abondance ont été rudement secoués
coles allaient permettre un accroisse- soit améliorée pour l'ensemble des par les sécheresses et les déficits céréa-
ment sans précédent de la production masses rurales dans la région. Bien que liers du début des années soixante-dix.
alimentaire : la (( révolution verte » dé- les statistiques soient notoirement peu Aujourd'hui grâce à plusieurs bonnes
butait. sûres, il semble que le nombre et la pro- moussons successives, la crise des
A l'origine de la révolution verte se portion des travailleurs sans terre dans années 1972-74 est heureusement der-
trouvent les nouvelles variétés de céréa- l'ensemble des cultivateurs aient aug- rière nous, mais il ne nous est plus pos-
les déveloi)pées, au Mexique pour le menté. En Inde, par exemple, cette pro- sible d'ignorer les limitations de la ré-
blé, aux Philippines pour le riz. Ces portion s'est accrue, atteignant 20 % en volution verte. En particulier, il est
« variétés miracles » permettent des ren- 1971 ; au Bangladesh le pourcentage devenu évident que, contrairement aux
dements doubles ou triples de ceux des correspondant passait de 22 à 38 % espoirs de ses zélateurs, et en dépit de
variétés traditionnelles. A la différence entre 1961 et 1973. Dans l'ensemble, un succès peu contestables, la nouvelle
de celles-ci, cependant, elles demandent consensus existe que la pauvreté rurale technologie n'a pas créé une améliora-
des doses importantes d'engrais, et une a empiré dans les dix dernières années. tion générale du niveau de vie.
irrigation contrôlée et régulière. La ré- Toutefois cette détérioration doit sans .Les échecs partiels de la révolution
volution verte a particulièrement mar- doute bien plus à la présente explosion verte ne sont peut-être pas l'aspect le
qué la production de blé et transformé démographique qu'à la révolution verte. plus troublant. Certains signes donnent
l'économie rurale des deux Punj abs à penser que la nouvelle technologie a
La pauvreté rurale est liée à la ques-
(Inde et Pakistan) et de l'état de Ha- peut-être donné le meilleur de ses possi-
tion de la dimension des exploitations
ryana en Inde. Dans les autres zones bilités et que les futurs accroissements
agricoles et de leur distributiori. Dans
productrices, son avance a toutefois été de la production resteront plus limités.
l'ensemble du sous-continent, la surface
limitée par l'absence de moyens d'irri- Les taux d'accroissement de la produc-
moyenne des fermes apparait extrême-
gation. tion de blé et de riz ont été pour la pé-
ment réduite. En Inde la moitié des ex-
En comparaison, la révolution verte riode 1969-74 inférieurs à ceux de lapé-
ploitations ont moins d'un hectare ; au
semble avoir peu touché la production riode 1960-74 dans son ensemble. Pour
Bangladesh cette proportion est de
rizicole. De 1964-65 à 1970-71, la pro- partie, ces résultats décevants ont été
deux tiers. Qui plus est, dans ces deux
duction indienne de blé augmentait de causés par la crise de l'énergie des
pays, la proportion des exploitations
plus de 90 %, celle de riz augmentait de années 1973-74. L'essence nécessaire
dans cette catégorie s'est accrue consi-
moins de 8 %. Malgré l'introduction de aux tracteurs et aux pol'npes des puits,
dérablement dans les dix dernières
variétés à hauts rendements, les rende- années. En Inde et au Pakistan, on les engrais à base d'azote (et de phos-
ments en Asie du Sud restent bien infé- phate) ont soudain vu leurs prix monter
trouve une large concentration de la
rieurs à ceux de l'Asie de l'Est et du en flèche ; dans de nombreuses régions
terre dans quelques grandes exploita-
Sud-Est. ces produits disparurent même du mar-
tions. En Inde, par exemple, les fermes
ché. Le fléchissement résultant dans la
Le développement de nouvelles varié- de plus de dix hectares representent 4 %
production agricole montra clairement
tés de blé et de riz ne s'est malheureuse- du total mais couvrent 31 % des terres.
combien la nouvelle agriculture dépen-
ment pas accompagné de découvertes Les programmes de réforme agraire dait du secteur moderne pour son ap-
analogues dans le cas des autres céréa- ont généralement fait partie des mani- provisionnement en «inputs». Il indi-
les. Par ailleurs, à cause des exigences festes politiques ou des déclarations qua aussi que les futurs progrès de la
des nouvelles semences, la révolution d'intention des gouvernements ; ils ont révolution verte seraient largement liés
verte n'a pas affecté les fermiers dé- toutefois été rarement exécutés. Dans à l'avenir du marché de l'énergie.
pourvus d'irrigation. Ses limites appa- les seize états indiens qui, entre 1958 et
raissent clairement quand on sait que Ces indications alarmantes quant aux
1971, ont passé des législations impo- futures posssibilités de la nouvelle agri-
80 % des terres cultivées en Inde, 90 % sant un plafond sur la dimension des
au Bangladesh, manquent de tout culture sont d'autant plus inquiétantes
exploitations, environ un million d'hec- que l'explosion démographique ne
moyen d'irrigation ! tares avaient été déclarés en excès en donne pas grand signe de ralentisse-
On a accu.sé la révolution verte d'en- 1971, soit 0,7 % de la superficie cultivée ment. Les statisticiens de l'ONU projet-
richir les riches et d'appauvrir les pau- nette cette année ; moins de la moitié tent pour la région une population de
vres. Bien sür, la possibilité d'utiliser la en a été redistribuée à des ferÎniers pau- 1050 millions en 1985, 1450 millions en
nouvelle technologie ne dépend pas de vres. A l'exception de Sri Lanka, les ré- l'an 2000. Dans ces conditions, il est à
la dimension des exploitations, et tout formes agraires dans la région ont lar- craindre que la cigogne dépasse la char-
fermier ayant à sa disposition engrais, gement avorté parce que les rue. La Banque Asiatique de Dévelop-
semences et le contrôle de l'eau, peut en gouvernements n'avaient ni la volonté pement prévoit pour 1985 un déficit
profiter. En pratique toutefois, l'irriga- politique, ni la capacité adminiStrative entre 7 et 22 millions de tonnes de cé-
tion est plus facile à organiser sur une de les exécuter. réales dans la région. Plus pessimiste la
grande exploitation que sur une my- Banque Mondiale prévoit pour cette
riade de petites fermes, et les grands L'AVENIR date un déficit de quelque 23 millions
fermiers ont plus facilement accès aux DE LA RÉVOLUTION VERTE de tonnes, représentant une valeur de
ressources financières nécessaires pour près de trois milliards de dollars (en
construire un puits ou acheter semences u vu des maigres résultats ob-
dollars constants 1973).
et engrais. On l'a vu au Punjab où les tenus jusqu'à présent, il paraît
grandes fermes ont été les premières à difficile de se montrer opti- Vu la situation actuelle et projetée
utiliser les nouvelles semences. Il est miste sur l'avenir des masses des balances des paiements de ces pays,
toutefois trop rapide de conclure que la rurales dans le sous-continent. il paraît douteux qu'ils puissent finan-
révolution verte n'a profité qu'aux Pour partie, ce pessimisme est dû à une cer la totalité des importations nécessai-
riches. La nouvelle technologie réclame certaine désillusion après les espoirs res sur leurs propres ressources. Il pa-
plus de travail pour la préparation des suscités par la révolution verte. La fin raît aussi peu vraisemblable que
sols, l'application des engrais et la des années soixante fut marquée par l'assistance alimentaire des pays à sur-
moisson. Toujours au Punjab, l'utilisa- une confiance parfois e;i;:ubérante dans plus céréaliers (Amérique du Nord es-
tion des nouvelles variétés a augmenté les promesses de la nouvelle technolo- sentiellement) puisse suffire à satisfaire
la demande de main d'œuvre, par là gie. Pour leurs partisans, les semences ces besoins: pour l'ensemble du Tiers
causant une augmentation des salaires miracles promettaient une prospérité Monde, le déficit céréalier devrait dé-
des travailleurs agricoles. générale à moyen terme. Ces rêves passer cent millions de tonnes dans les 19
années quatre-vingt. On voit donc se termes de l'échange entre la ville et la pour obtenir un prêt, se procurer des
dessiner une situation où l'Asie du Sud campagne soient redressés en faveur des engrais ou s'assurer les conseils d'un
aurait à rivaliser, pour l'assistance ali- cultivateurs. agent de vulgariSation agricole, les fer-
mentaire nord-américaine, avec un Jusqu'à maintenant, seuls les cultiva- miers les plus pauvres so.gt toujours dé-
grand nombre d'autres pays sous-déve- teurs de blé et de riz disposant d'un savantagés par rapport aux riches pro-
loppés. Finalement, même si la région bon contrôle de l'eau ont pu bénéficier priétaires. Seuls des programmes
pouvait obtenir, grâce à des achats ou de la révolution verte. Les autres récol- destinés spécifiquement aux plus défa-
des dons, les grains nécessaires à tes attendent toujours une percée de la vorisés seront à même de les atteindre
combler son déficit, les appareils de dis- recherche agricole similaire aux succès effectivement. Pour cela les bénéficiai-
tribution existants ne paraissent pas à obtenus pour ces deux céréales. Les tra- res doivent être soigneusement identi-
la mesure des pr_oblèmes logistiques for- vaux des chercheurs doivent maintenant fiés et les institutions, organisations et
midables posés par l'acheminement et porter sur ces autres plantes (maïs, mil, services destinés à les encadrer doivent
la distribution, dans les campagnes les sorgho, légumineuses et tubercules) et être évalués sous cet angle particulier.
plus reculées, de telles quantités de cé- sur le développement de nouvelles va- Pour arrêter la dégradation de l'em-
réales. riétés de blé et de riz adaptées aux ploi rural et améliorer la condition des
L'ampleur même du problème crée ce conditions de la majorité des fermiers. travailleurs sans terre, le développement
qui est peut-être, en fait, la seule raison La nécessité de faire bénéficier les agricole doit être accompagné par des
d'espérer : la prise de conscience gran- petits fermiers du potentiel de la nou- programmes de création d'emplois non
dissante des responsables. Aiguillonnés velle technologie constitue un impératif agricoles. Ces programmes doivent in-
par la crise alimentaire de 1972-74, les économique et social. Économique puis- clure des travaux ruraux à haut cœffi-
organismes d'aide multilatéraux et la que une augmentation de la production cient de main d'œuvre (construction
majorité des donneurs d'aide ont radi- demande une amélioration de la pro- d'infrastructure agricole et sociale, dé-
calement changé leur attitude et don- ductivité des petits cultivateurs. Social veloppement du réseau de transport,
nent maintenant une importance crois- puisque ces cultivateurs ont, dans l'en- etc.). Jusqu'à maintenant, les program-
sante à l'agriculture et au déve- semble, moins bénéficié de la nouvelle mes de travaux ruraux dans la région
loppement rural (ainsi qu'au contrôle technologie que les riches propriétaires ont eu un impact limité, mais presque
des naissances, sujet plus controversé). terriens. Les deux objectifs, social et toujours les échecs passés peuvent être
De manière plus importante, les gou- économique, ne sont pas nécessaire- attribués à des insuffisances dans leur
vernements de la région ont aussi modi- ment contradictoires. L'exemple d'au- organisation et administration. Un
fié leurs politiques et donnent mainte- tres pays asiatiques (Japon, Formose, autre volet de ces programmes d'em-
nant la priorité, dans leurs politiques Corée du Sud) montre que la producti- plois ruraux consiste dans la création
économiques, au développement agri- vité des petites exploitations peut rivali- de petites industries villageoises utili-
cole et rural. ser avec celle des grandes fermes si elles sant les matières premières locales.
reçoivent le support nécessaire. Une ·po- La décennie écoulée depuis les gran-
ËLËMENTS D'UNE STRATËGIE litique de développement rural orientée des sécheresses de 1965 et 1966 a mon-
vers les classes les plus pauvres devrait tré le potentiel mais aussi les limitations
es succès initiaux de la révo- comprendre une réforme agraire, des de la révolution verte. Annoncée dans
20
QUEL AVENIR POUR
LE SAHEL
7
Ill
22
jours utilisé pour la cuisson des ali- e recensement des potentialités production et celle-ci doit être mise en
ments avec des méthodes très primitives
et des rendements très faibles. Avec
l'accroissement de la population, la
L du Sahel contraste singulière-
ment avec ce ·diagnostic plutôt
sombre. Il existe dans la zone des
terres qui sont encore peu ou pas
œuvre, sous peine de crise aigüe, avant
la fin du siècle.
.
consommation de bois est devenue très
supérieure au croît naturel des arbres et exploitées et qui pourraient être mises
le Sahel connaît une déforestation dont en valeur. Le rendement des terres cul-
on commence seulement à mesurer tivées est très faible et pourrait être
accru dans des proportiens importan- ette mutation est-elle réalisable?
C
l'ampleur et la gravité, déforestation
qui, à terme, ne peut rester sans consé- tes. L'élevage, actuellement concentré Cette réalisation se heurte à
quences sur le climat et sur la fertilité dans les zones les moins arrosées qui trois sortes de problèmes : des
des sols. jouxtent le Sahara pourrait être déve- problèmes techniques, des pro-
- déséquilibre économique enfin, en ce loppé et rendu plus productif dans les blèmes de gestion et des problè-
sens que le système des prix n'incite zones plus arrosées du sud Sahel. Les me~ iJOlitiques.
guère les paysans à accroître la produc- côtes du Sénégal et de la Mauritanie Les problèmes techniques ne sont pas
tivité de leurs cultures vivrières. Les comptent parmi les plus poissonneuses les plus redoutables. Les potentialités
prix d'achat des céréales sont tels que le du monde. Les pêches maritimes pour- existent. Les techniques pour les mettre
cultivateur n'a guère intérêt à intensifier raient donc contribuer de façon impor- en valeur de façon plus efficace sont à
sa production en employant des en- tante à l'alimentation des populations peu près connues. Certes, un effort de
grais, des pesticides et d'une façon gé- sahéliennes. Il en est de même de la recherche important pour mettre au
nérale des techniques modernes de cul- pêche dans les fleuves et les lacs. point des techniques spécialement
ture. Depuis une vingtaine d'années, adaptées aux conditions particulières du
Au total, même si les conditions cli- Sahel, reste à faire. La recherche agro-
alors que le revenu des populations ur- matiques du Sahel sont sévères, même
baines croissait un peu partout dans le nomique, par exemple, s'est jusqu'à pré-
si les sols y sont fragiles et si les rende- sent beaucoup plus attachée aux cultu-
Sahel, et parfois de façon assez impor- ments des cultures et des pâturages ne
tante, le revenu des populations rurales res de rente qu'aux cultures vivrières
peuvent être accrus sans précautions, pourtant essentielles pour la survie des
a diminué. Aussi le monde paysan a-t-il les potentialités de la région semblent
le sentiment d'être laissé à l'écart du pays sahéliens.
telles que nourrir les 50 millions d'habi- Un effort de recherche encore plus
progrès et a-t-il tendance à se replier tants prévisibles pour l'an 2000 et met-
sur lui-même, ne produisant que les cé- important reste aussi à faire en ce qui
tre en place les bases pour un dévelop- concerne la combinaison des techni-
réales nécessaires pour ses propres be- pement autonome est un objectif
soins et comptant pour ses revenus mo- ques, adaptée aux conditions écologi-
réaliste pour les pays sahéliens. ques, économiques et sociologiques,
nétaires sur quelques cultures
Mais, si les productions sont accrues, qu'il convient de promouvoir au niveau
d'araclùde et de coton. Production et
ne resteront-elles pas vulnérables lors de chaque exploitation, qu'il s'agisse
productivité stagnent alors que l'urbani-
de périodes de sécheresse prolongée? d'agriculture, d'élevage ou de l'associa-
satîon croissante crée des besoins nou-
Cette vulnérabilité ne sera-t-elle pas ac- tion agriculture-élevage, non tradition-
veaux en produits vivriers qui ne peu-
crue? Des réponses existent à ces ques- nelle dans le Sahel et qui est sans doute
vent être totalement satisfaits que par
tions. On peut d'abord mettre au point une des clés de la mutation du système.
des importations ou le recours à l'aide des variétés à cycle végétatif court et
alimentaire. Les problèmes de gestion sont plus
donc moins sensibles à une saison des difficiles. Il s'agit de faire évoluer un
Ainsi le Sahel s'est-il engagé dans pluies écourtée. Mais surtout, on cons-
une voie qui ne peut conduire qu'à une système complexe dont tous les élé-
tate que, à l'heure actuelle, à peine ments agissent les uns sur les autres de
dépendance accrue vis-à-vis de l'exté- 100 000 hectares sont irriguées dans le
rieur et à une situation catastrophique façon parfois inattendue. Il faut atta-
Sahel, alors que au moins 1 500 000 quer sur tous les fronts. Une des rai-
lors de la venue de nouvelles périodes hectares sont irrigables dans les seules
de sécheresse. sons des échecs passés et de la situation
vallées des fleuves Sénégal et Niger, actuelle est certainement que les problè-
dans les vallées des Voltas et dans le mes ont été attaqués de façon beaucoup
bassin Tchad-Logone-Chari. La mise en trop partielle tant par les sources d'aide
irrigation de ces surfaces apporterait au que par les Gouvernements sahéliens.
Sahel non seulement une production ac- Certaines actions, comme le forage des
crue de céréales, de fourrage, de sucre, puits en zone pastorale, ont même fini
etc... mais encore une production très par se retourner contre les objectifs
peu vulnérable à la sécheresse. Et, si on poursuivis par leurs promoteurs, faute
ajoute à la sécurité ainsi acquise, celle d'une analyse suffisante du tissu de re-
apportée par la constitution de quel- lations dans lesquelles elles venaient
ques stocks interannuels, on peut dire s'insérer.
que le Sahel a les moyens de nourrir sa Le Club du Sahel s'est efforcé de
population de l'an 2000 mais aussi de mettre sur pied une stratégie d'ensem-
franchir les périodes difficiles qui pour- ble qui inclut aussi bien les actions de
raient se présenter. développement des productions que des
Le Sahel ne manque donc à propre- actions d'accompagnement: formation
ment parler ni de terres, ni d'eau. En des hommes à la technique et à la ges-
revanche, il manque d'un système effi- tion, recherche technique, équilibres
cace pour les exploiter et satisfaire ses écologiques, politiques de prix, de
besoins actuels. Le système traditionnel commercialisation et de stockage, déve-
a été bouleversé par l'impact du monde loppement des infrastructures, politique
industrialisé et l'explosion démographi- énergétique, etc ... et qui tient compte
que qui en est résultée. Le système ac- des interrelations entre tous ces élé-
tuelest tragiquement insuffisant pour ments. Mais, des progrès importants
faire face aux besoins croissants du restent encore à faire dans la compré-
Sahel d'aujourd'hui. Une seule solution hension du système sahélien, si l'on
est possible : la mutation du système de vent éviter à l'avenir les déconvenues. 23
Les problèmes de gestion se situent pasteurs ont en main la clé du Sahel de est possible et le Sahel peut, en quelque
aussi du côté des choix et des priorités demain. Encore faut-il qu'ils soient in- sorte, constituer au cours des deux dé-
à donner aux différentes actions. On formés, motivés, guidés et aidés à aller cennies à venir un test de la réalité de
peut se demander à ce propos si le cal- dans la bonne voie. la solidarité entre pays riches et pays
cul économique classique et l'évaluation pauvres. En effet et malgré certaines
de la rentabilité telle qu'elle est courant- Mais les problèmes se situent aussi apparences, sortir le Sahel du sous-
ment pratiquée, en particulier par les du côté de la Communauté internatio- développement est à notre portée. Le
organismes de financement, sont des nale. Vu l'état actuel du Sahel et son Sahel avait développé une civilisation
outils bien adaptés au cas du Sahel : les dénuement, il est bien évident que toute originale et attachante qui avait ré-
projets de reforestation par exemple mutation est inconcevable sans un ap- pondu au défi lancé par des conditions
n'ont qu'une rentabilité médiocre aux port extérieur important de savoir-faire climatiques difficiles. Il faut aujour-
yeux des économistes ; ils sont pourtant et de capitaux. Les pays industrialisés d'hui l'épauler pour l'aider à sortir
essentiels pour l'avenir de la région. et les détenteurs de pétro-dollars au- de l'impasse dans laquelle il s'est four-
Restent les problèmes politiques qui ront-ils la volonté d'aider le Sahel à réa- voyé. Les potentiels existent, les techni-
sont essentiels. liser au cours des vingt prochaines ques aussi. Le Sahel n'est point de ces
Ils se. situent d'abord du côté des années la mutation nécessaire à sa sur- pays où le pullulement des hommes
Gouvernements sahéliens. Rien ne se vie? semble décourager d'avance tout effort
fera et toute mutation du sYstème ac- Ou bien le Sahel deviendra un pays d'aide extérieure. La réforme agraire
tuel est illusoire s'il n'existe pas une vé- assisté de façon permanente et la pro- n'y est point, comme dans d'autres ré-
ritable volonté de changement, une vo- chaine grande sécheresse s'abattra de gions du monde, un préalable au déve-
lonté de sortir le monde paysan de façon catastrophique sur la région. Ou loppement. Les conditions semblent
l'isolement et de la stagnation dans les- bien le Sahel, avec l'aide extérieure, réunies pour qu'une coop_ération effi-
quels il se trouve et de le faire partici- conquerra peu à peu son autonomie et cace soit mise en œuvre. Aurons-nous
per au développement. Cultivateurs et diminuera sa vulnérabilité. Cette voie la volonté de la mener à bien?
14
QUELQUES OBSTACLES
AU DEVELOPPEME
DU TIERS MONDE
et leurs remèdes
27
La maitrise niveau de vie nécessaire pour faire pro- taine indépendance économique devrait
du mouvement démographique gresser la demande intérieure et être recherchée pour satisfaire les be-
conduire à une expansion du marché de soins essentiels (nourriture, logement. ..).
Ainsi, comme nous l'avons vu, la pro- l'industrie surtout que, dans la majorité Les pays du Tiers Monde doivent refu-
gression démographique pose de graves des pays du Tiers Monde, la population ser d'être essentiellement un marché et
problèmes au Tiers Monde. Il faut bien rurale représente une large partie de la un lieu de tourisme pour les pays déve-
préciser que c'est le rythme trop rapide population totale. loppés. Ils doivent essayer d'assimiler et
de la progression démographique qui de maîtriser les moyens technico-indus-
menace le développement et non le triels nécessaires pour surmonter l'obs-
chiffre absolu de pope.lation qu'il en- Protection du marché national
tacle créé par la complexité de la tech-
traîne. Il s'agit alors de prendre des me- Toute création d'industrie dans url nique actuelle, afin de faciliter le
sures visant la limitation des naissances, pays du Tiers Monde doit s'accompa- processus d'industrialisation. Ces choix
en tenant compte des aspects psycholo- gner d'une protection efficace. En effet, économiques ne doivent pas faire ou-
giques du problème. Car la baisse du étant donné l'écart important existant blier que le développement ne dépend
taux de natalité est liée à toute une entre le niveau de développement des que partiellement des transformations
transformation des mentalités et des pays industriels et celui des pays non- économiques. Les transformations des
comportements, sans laquelle on risque industriels, et le faible coO:t des moyens mentalités et des comportements sont
d'aboutir à des échecs. de transport (au début de la révolution aussi importantes.
industrielle le coût élevé des transports Mais l'idée fondamentale dans toute
représentait une protection naturelle ef- recherche sur les problèmes de dévelop-
Développement temporaire ficace) un processus d'industrialisation pement est que chaque pays doit comp-
en cours dans le Tiers Monde n'aura de ter avant tout sur lui-même. Il doit faire
du secteur agricole
chance de se réaliser qu'à l'abri des pro- une analyse de ses problèmes et bien
Si l'industrialisation représente l'ob- tections douanières. Protections doua- définir ses objectifs. Le développement
jectif de toute politique visant un déve- nières qui doivent être complétées par ne peut être imposé ou réalisé de l'exté-
loppement rapide, il ne faut pas perdre des limitations d'importations et sur- rieur.
de vue que dans un pays où une grande tout les importations concernant les L'organisation des pays du Tiers
partie de la population est rurale - et biens dont il existe une production lo- Monde en unités économico-politiques
c'est le cas de la majorité des pays du cale. peut leur permettre de réduire leur forte
Tiers Monde - l'agriculture joue un Ces priorités impératives étant défi- dépendance vis-à-vis des pays dévelop-
rôle décisif dans le processus de déve- nies, il existe d'autres options suscepti- pés. Aussi la coopération internationale
loppement économique et social. Etant bles de favoriser le développement. Il peut faciliter la tâche des gouverne-
donné l'ampleur de la croissance démo- n'est pas possible d'examiner tous les ments des pays du Tiers Monde, à
graphique, la production alimentaire types de choix qui se présentent en res- condition que cette coopération s'ins-
doit être très importante. D'autre part, tant dans un cadre général. Chaque crive dans le cadre d'une politique de
le développement de l'agriculture peut pays a ses propres problèmes ; les choix véritable coopération, non d'une politi-
entraîner l'élévation du niveau de vie varient suivant les situations des diffé- que d'exploitation ou de coopération
des populations rurales. Elévation du rents pays. Mais en général, une cer- ambigüe.
28
PAYS
EN DEVELOPPEMENT:
pour une nouvelle problématique
L'interrogation sur le développement des pays du Tiers-Monde a donné lieu depuis une trentaine
d'années à·un volume croissant de contributions, et à une littérature qui, maintenant est considérable.
Aussi paraît-il nécessaire, avant même de tenter une nouvelle contribution, de se retrouver dans cet
ensemble - et donc de réfléchir sur cette réflexion.
La présente note propose une structuration, sinon de l'ensemble, du moins d'une partie de cette
littérature sur le développement économique ; en ce sens une « thèse» est présentée : elle peut être
contestée - mais notre ambition n'est pas tant de présenter cette thèse que de montrer la nécessité
d'avoir une thèse - tant il est vrai que «la vérité émerge plus facilement de l'erreur que de la
confusion)) (F. Bacon).
u côté des pays eux mêmes, dence ; ceci dans un but moral : pour
A
mais à l'inverse être des stratégies auto- œuvre par les Responsables Politiques vère : une masse importante de
nomes (concept de self-reliance); des pays du Tiers-Monde, l'analyse des travaux théoriques, de métho-
- si les mécanismes à l'œuvre sont non ambitions initiales, des succès et des dologies, d'approches préconi-
des mécanismes d'équilibre, comme le échecs que nous pourrons avancer dans sées - en particulier par de
veut la théorie néo-classique, mais des la connaissance et dans la maîtrise des grandes organisations internationales -
mécanismes de déséquilibre rendant problèmes de développement. parait inadéquate aux problèmes posés
plus forts les forts et plus faibles les fai- Plus précisément, il nous semble que par le développement des économies du
bles - il y a lieu de faire du problème la crise que connaît actuellement l'éco- Tiers-Monde ; notre rôle, confortable,
de l'intervention de l'État national non nomie du développement peut être dé- de grands experts, de maîtres à penser,
un problème annexe, mais un problème passée par: est mis à l'épreuve, contesté, critiqué.
central. - l'étude des politiques de développe- C'est vrai, le temps des grandes certi-
La planification n'est plus alors une ment mises en œuvre dans certains pays tudes est passé et les faits nous pressent
·vague étude de marché destinée à éclai- du Tiers-Monde, l'étude des procédures à plus d'humilité.
rer les entrepreneurs sur leurs marchés : de planification, l'étude des méthodes Mais, après tout, ce problème du dé-
elle est le moyen essentiel, autour du- de choix des investissements et des dé- veloppement économique est aussi le
quel les mesures doivent être articulées, cisions publiques ; nôtre ; nous nous y heurtons, nous en
d'atteindre les objectifs d'indépendance - l'étude des stratégies proposées - savons, nous en vivons les difficultés.
économique. qu'il s'agissse de la « self-reliance », des Et si, en définitive, l'histoire conduit
Sur le plan théorique, alors, une autre (( besoins essentiels l} ou du «nouvel à juger sévèrement nos thèses et nos at-
conséquence est claire : il faut cesser de ordre économique mondial». titudes passées .,_. les pays pauvres et la
croire que l'on pourra, en aménageant La prise en compte de ces pratiques charité, les pays en retard et l'assistance
encore les méthodes néo-classiques, ré- et des stratégies préconisées par ces - il nous reste le travail en commun, la
pondre aux problèmes de développe- Responsables des pays du Tiers-Monde réflexion commune - la solidarité.
ment posés par les pays du Tiers- permet aussi de dégager le terrain et de Ce n'est pas plus mal.
31
LES TRAVAUX DE
'ECONOMIE &HUMANISME'
SUR LE DEVELOPPEMENT
ceux qui les soutenaient si longtemps cette fin, elle ne peut plus demeurer Aussitôt après, chaque groupe doit
prophètes solitaires. l'objectif de développement primordial, reprendre la plume pour formuler à son
mais elle doit être remodelée et adaptée tour des propositions concrètes. De la
Aujourd'hui, le développement est re-
de manière à assurer la réalisation de ce part de l'équipe actuelle d'Économie et
connu d'universelle nécessité. Des cen-
but ultime». (6) Humanisme elles sont centrées sur «un
taines de définitions tentent d'en cerner
De même, à propos de la priorité à nouvel ordre mondial J> à instaurer et
les dimensions ; à son sujet, des milliers
reconnaître aux plus défavorisés : sont rassemblées en un texte pratique,
d'experts travaillent dans le monde en-
«Dans le Tiers Monde, des program- simple guide de réflexion et d'action (8)
tier. L'équipe qui, par vocation et ·dans
mes concrets doivent être mis en œuvre qu'accompagnaient, à quelques mois
la limite de ses capacités, entend conti-
de toute urgence pour satisfaire les be- d'intervalles, plusieurs livraisons de la
nuer à apporter une contribution en ce
soins élémentaires. Ils impliquent des revue (9).
domaine, a donc d'abord à se situer par
objectifs précis définis en fonction de
rapport à un contexte vaste et multiple (6) Coopération pour Je développement :
groupes sociaux spécifiques, en premier
et son prenùer souci est de choisir, p. 77, CAD 1975 OCDE
lieu les groupes les plus pauvres ou
parmi les thèses en· vue, celles qui lui (7) Rapport Dag Hammar Skjôld 1975,
dont la situation est la plus critique : Upsala
paraissent les plus exactement confor-
enfants en bas âges dont le développe- (8) « Construire un nouvel ordre Mon-
mes à ses propres options.
ment est menacé par la malnutrition, dial» Ed. EH Ed. Ouvrières 1976
Tel, pour Économie et Humanisme, paysans sans terre, petits paysans, chô- (9) «EH N° 216 Mars/Avril 1974« Le
par exemple, ce rapport de l'OCDE, meurs et sous-employés urbains. Ces Tiers Monde accuse »
sous la plume de M. M.J. Williams: programmes auraient pour objectifs EH N° 228 Mars/Avril 1976 ((Vers un nouvel
<iAu moins du point de vue de l'aide, l'élimination, dans un laps de temps ordre économique international'?
fixé à l'avance, de la pauvreté en des- EH N° 240 Mars/Avril 1978 «Lutter en
la croissance économique n'est pas une
France pour un autre développement mon-
fin en soi, mais un moyen d'arriver à sous d'un niveau de vie minimum défini dial))
une fin qui est l'élévation du niveau de dans chaque pays et pour chaque pé- ainsi que l'ensemble des volumes parus dans
vie de la population. Si la croissance riode comme le «seuil de pauvreté». une collection spécialisée <t développement et
34 économique n'a pas permis d'atteindre (7) civilisations 1)
Dans ses propositions, Économie et treindraient exagérément les initiatives résultante d'un multidéveloppement
Hu1nanisme maintient, bien entendu, locales ? Économie et Humanisme aux branches innombrables, chacune
certaines idées déjà anciennes. Elles y plaide pour que ne soit ni oublié, ni douée d'une originalité spécifique. dé-
ont été reprises parce qu'à leur sujet les sous-estimé, ni a fortiori exclu le <1 s'ai- èouverte et éprouvée dans des expérien-
investigations sont loin d'être terminées der soi-même, se développer par ses ces vécues à la base.
et que beaucoup de questions y restent propres efforts et non pas être déve-
Le développement est un tout, c'est
encore sans réponse. Au-delà de nou- loppé » qui devient la toile de fond des un processus culturel intégral. .. La di-
velles interrogations s'ouvrent vers rencontres internationales entre pays du
versité dans les voies de développement
l'avenir. Tiers-Monde et résume d'ailleurs ce que
répond à la spécificité des situations
Par exemple, quant à l'industrialisa- contenait une déclaration solennelle : culturelles ou naturelles, il n'y a pas de
tion, comment, dans quels délais, avec «Si le développement est le dévelop-
formule universelle. (12)
quelle participation des autochtones, pement de l'homme, en tant qu'individu
et être social, tendant à sa libération et Certes, les Gouvernements ne 'sont
peut-on, sans périfs, transférer des tech- pas toujours enclins à s'intéresser aux
nologies industrielles de pays haute- à son épanouissement, il ne peut de fait
surgir que du for intérieur de chaque essais expérimentaux de petite taille,
ment industrialisés vers des pays qui le préoccupés qu'ils sont d'aide et d'assis-
sont moins? Et si l'industrialisation est société. Il prend appui sur ce dont un
groupe humain dispose : son environne- tance massives. Il faut donc particuliè-
reconnue tendance irréversible, néces- rement détecter, encourager, accompa-
saire même, ne véhicule-t-elle pas, trop ment naturel, son héritage culturel, la
créativité des hommes et des femmes gner, analyser les essais spontanés de
souvent, des mécanismes de domination micro-structures, où ceux qui en pren-
technique, économique et, par là, politi- qui le constituent, enrichis par
l'échange avec d'autres groupes. Il en- nent . l'initiative découvrent d'ailleurs,
que qu'elle consolide ou même accen- presque toujours, quels liens humains
tue? Économie et Humanisme a peut- traîne la définition autonome de styles
de développement endogène et «self re- de solidarité se nouent lors d'une créa-
être sous-estimé naguère l'impact des tion commune.
techniques sur le type de civilisation liant» (li).
que vit un peuple ; n'avons-nous pas à Les prises de position à cet égard Mais la participation aux tâches du
reprendre ce sujet et le réexaminer jus- doivent être rigoureuses et obstinées développen1ent ne peut être limitée aux
qu'à imaginer d'autres modes de pro- pour que ce «droit de chacun» soit ef- seuls expérimentateurs, non plus qu'aux
duction? ... Produire, oui. Industrielle- fectivement reconnu dans les faits. seuls experts spécialisés. Si le dévelop-
ment, oui, Mais dans quels rapports pement, en effet, est « pour tous les
entre les hommes au travail? Ne faut-il LE DÉVELOPPEMENT, hommes et pour tout l'homme » il doit
pas également mieux scruter quelle AFFAIRE DE TOUS LES HOMMES être aussi (( de tout homme )}, comme
place ces mêmes hommes, producteurs, l'exprime excellemment Bernard Car-
Avant d'en terminer, pouvons-nous rère dans un petit livre suggestif (13):
entendent désormais accorder à leur laisser notre réflexion s'attarder un ins-
travail dans l'équilibre général de leur « chaque société, chaque homme, est
tant à quelques généralités, presque évi- personnellement concerné par ce que
vie, au milieu des diverses motivations dentes, qui conditionnent notre plan de
qui la dynamisent? sera le Nouvel Ordre Économique In-
travail actuel. ternational ... Toute absence du citoyen
Autres préoccupations, concernant Dans la gigantesque entreprise qu'est
les méthodes, par exemple quant à l'in- dans les grands sujets collectifs, toute
la construction d'un ordre nouveau à délégation abusive se paient... par des
suffisance des moyens d'appréciation l'échelle du monde, une valeur irrem-
du développement et de ses variations. choix défectueux », ce qui souligne, en
plaçable est à reconnaître aux expéri- outre, et fort justement, que le plan des
Des données quantitatives, surtout ra- mentations à la base, longuement
menées à des tableaux de moyennes idées, à lui seul, ne suffit pas. Le succès
mûries, patiemment poursuivies. Inno- des discours, fut-il spectaculaire, reste-
(comme par exemple le PNB/ habitant) ver, confirmer la validité de processus
ne suffisent pas à définir complètement rait en effet gravement incomplet si les
déjà existants: partout où des réalisa- comportements n'accompagnaient pas
un niveau de développement. Que pen- tions concrètes peuvent être amorcées,
ser d'un «Indicateur Général du Déve- les propor, tant personnels que collec-
devraient surgir des essais aptes à servir
loppement» tel que l'étudie l'INSTI- tifs. Autrement dit, si des actes ne
de matériaux à l'intention de ceux qui concrétisaient pas des théories, dans des
TUT DE RECHERCHE DES ont à réfléchir et à organiser l'avenir.
NATIONS UNIES (CIRNU) (10)? faits réellement vécus.
Essais d'une extrême diversité résultant
Quant aux perspectives d'un nouvel de situations géographiques différentes, Rappe.ler de telles évidences, pour
ordre mondial, y réserve-t-on une place de la variété des ethnies, de l'inégale ef- étendre la participation au plus grand
suffisante aux participations venant de ficacité des moyens employés. Autant non1bre possible, est une tâche de diffu-
la base? N'a-t-on pas toujours à crain- d'enrichissements pour la construction sion à poursuivre, elle aussi, en perma-
dre des schémas trop directifs, qui res- d'un ordre mondial, à concevoir comme nence.
35
---------------------------------------------------------'~',!"'~>"
r INDUSTRIALISATION
DU
Tl S MONDE:
conséquences pour l"'économie francaise
PAR YVES BERTHELOT ( 58)
L'emploi et la croissance en France sont-ils menacés par la Ce fait est d'autant plus remarquable que pendant la même
concurrence des produits industrialisés en provenance des période, l'emploi industriel a pratiquement stagné, n'augmen-
pays en développement? Les échanges avec ces pays sont-ils tant que de 17 000 unités.
au contraire un des moteurs de l'activité économique natio- Les études faites dans différents pays européens conduisent
nale? aux mêmes conclusions. Dans l'ensemble de la zone OCDE
La présentation de faits observés depuis 1970 et d'hypothè- l'évolution de l'emploi s'explique par celle de la demande in-
ses pour l'avenir conduira à quelques réflexions pour l'action. térieure, par les changements structurels et par les gains de
Les chiffres et les idées exposés ici sont pour une grande part productivité. Les échanges et notamment ceux avec le Tiers
empruntés au rapport d'un groupe de travail du Commissa- Monde ont eu un impact positif. Pour situer les ordres de
riat du Plan auquel 'auteur a participé. (1) grandeur, environ 6 000 000 de personnes ont changé d'em-
ploi en Allemagne Fédérale entre 1963 et 1973, 200 000 chan-
1 - QUELQUES FAITS gements seulement ont été dus aux échanges avec le Tiers
Monde.
Si l'on traduit en nombre d'emplois nécessaires à leur pro- Cette analyse est globale; si l'on s'attache à certains pro-
duction, les échanges de biens industriels, on constate qu'en- duits spécifiques et au cas de certaines régions, l'impact des
tre 1970 et 1976 l'augmentation des exportations vers les pays échanges avec les pays du Tiers Monde devient beaucoup
du Tiers Monde a {(créé» plus d'emplois que l'augmentation plus significatif. Pour quelques produits, les exportations vers
des importations en provenance de ces pays n'en a fait « per- les pays en développement jouent un rôle décisif car elles as-
dre». Le solde correspond à la création nette d'environ surent un débouché à une part importante de la production.
100 000 emplois.
TABLEAU2
Quelques productions, particulièrement concernées
TABLEAU!
par l'exportation
Emplois industriels et échanges avec le Tiers Monde
vers les pays du Tiers Monde (1976) (2)
39
Vis-à-vis du Tiers Monde le protectionnisme empêcherait leurs, pour certaines productions de base, comme la sidérur-
que puisse se réaliser un scénario envisagé par ceux qui voient gie, la pétrochimie ou certains équipements comme la
dans le développement accéléré du Tiers Monde un support à construction navale, les risques d'excès durables de capacité
la croissance économique des pays industrialisés. Selon ce vont obliger à une concertation voire à une organisation des
scénario, des transferts massifs vers les pays en développe- 1narchés.
ment non producteurs de pétrole stimuleraient leur expansion La deuxième considération vise l'ajustement à moyen
et leur demande et par là même la production des pays indus- terme. Quelles restructurations préconiser, qui doit prendre
trialisés. les décisions? ... Autant il est probable que certains pays en
Dans le cas particulier de la France, il est clair que le pro- développement produisent prochainement des biens très so-
tectionnisme unilatéral l'exposerait à des représailles dont les phistiqués, autant il est sûr que les pays industrialisés n'aban-
effets seraient sans commune mesure avec les avantages at- donneront pas des secteurs entiers d'activité. Les progrès
tendus de la fermeture des frontières. En effet, dans nombre technologiques et la spécificité des marchés y pousseront.
de pays en développement, l'Etat contrôle en partie les cou- L'histoire des dernières années est pleine d'exemples de pro-
rants d'importation. L'Algérie où la part du marché tenue par ductions qui se sont déplacées des Etats-Unis à l'Europe, de
la France est passée de 55 % en 1970 à 34 % en 1976 et à l'Europe au Tiers Monde pour revenir en Europe ou aux
nloins de 10 % des commandes industrielles en 1977, fournit Etats-Unis. L'expansion de la productîon textile allemande,
un exemple d'évolution défavorable très rapide due à un ob- indépendamment des phénomènes de sous-traitance, en est
jectif de diversification des approvisionnements mais aussi à une illustration.
une volonté de tirer les conséquences du déséquilibre des
La conséquence en est que l'Etat ne peut définir les choix
échanges avec la France imputé à la faiblesse des achats de
de production d'une politique d'ajustement en dehors des
pétrole brut algérien par celle-ci.
grands secteurs évoqués plus haut (acier, construction na-
Si la leçon globale tirée du passé, des perspectives et des
vale, ... ) Seule l'entreprise peut disposer d'une information suf-
considérations ci-dessus est claire, le protectionnisme est dan-
fisamment détaillée sur les marchés, les technologies, les coûts
gereux pour la France, comment faire face aux difficultés
de production.
qu'entraine dans certains secteurs et pour certaines régions la
concurrence industrielle du Tiers Monde. Deux considéra- Sans doute la disponibilité et l'exploitation de l'information
tions peuvent guider la recherche de solutions. des projets, des réalisations et des marchés étrangers sont un
Tout d'abord l'importance croissante des partenaires du des points faibles; le réseau d'échanges d'information état-
Tiers Monde impose de négocier avec eux et d'établir des entreprise en A11emagne et au Japon est un des facteurs de la
règles régissant les échanges et des procédures pour arbitrer capacité d'ajustement de ces économies.
les conflits. Règles et procédures d'arbitrage doivent viser Le poids industriel d'un certain nombre de pays du Tiers
d'une part à éviter qu'un accroissement massif et brutal des Monde est déjà important, il le sera de plus en plus. Jusqu'à
importations ne vienne sans préparation mettre en péril une présent les conséquences de cette industrialisation ont été bé-
activité, d'autre part que les mesures prises pour <1 étaler la néfiques à l'équilibre de la balance des paiements et à l'em-
vague 1> ne soient pas un prétexte à un protectionnisme dura- ploi. A l'avenir, les conséquences pour la balance des paie-
ble qui retarde les efforts d'adaptation. L'accord multifibre, ments resteront très favorables alors que les implications pour
dans la mesure où il prévoit l'augmentation progressive des l'emploi risquent de devenir négatives. Mais l'es pressions sur
importations, en provenance du Tiers Monde répond à un l'emploi seront très inférieures à celles qu'exercent tous les
objectif, mais il ne répond pas à l'autre, dans la mesure où la autres facteurs et surtout moins fortes que celles qui résulte-
décision de faire jouer les clauses de sauvegarde est unilaté- raient de mesures protectionnistes (l'étude a été faite pour
rale et qu'il n'y a pas de durée limite aux restrictions. Par ail- l'Allemagne).
40
L-EXPERTISE DE
•LEONTIEF
vers un nouvel ordre international l
L
qui est l'instrument le plus actif d'une
sont aujourd'hui remis en cause civilisation raffinée s'épuise graduelle-
par la croissance démographi- ment et se consomme avec une rapidité
que ; pour deux générations au d'autant plus grande que la civilisation
moins la population déterminera et l'industrie font plus de progrès, il
l'avenir de la civilisation occidentale, la semble que cet épuisement graduel soit
paix et la survie même de l'humanité. le danger le plus menaçant dans l'avenir
Longtemps négligée sinon par la pour la civilisation même. ». (2).
science, du moins par la politique éco-
nomique, cette réalité primordiale ob- Au milieu du XIX~ siècle Stuart Mill
sède à présent les instances internatio- croyait à l'imminence de «l'état sta-
nales. tionnaire » ; mais en 1925 A. Marshall
Depuis qu'en 1798 Th. R. Malthus supputait dans ses « Mémoires » que le
publiait le fameux «Principe de Popu- monde ne parviendrait pas à un tel état
lation», et qu'en six éditions successi- peuples et les civilisations périssent, avant un siècle : {i Les vues de Stuart
ves ce pasteur, qui craignait que toute Mill pourraient bien apparaître plus ac-
mais en Saint-Simonien convaincu, il
l'humanité ((n'aille s'échouer sur les bas notait que la population paraît sura- tuelles dans un siècle qu'aujourd'hui,
fonds de la misère», amplifiait son cri écrivait-il, car au taux actuel de la po-
bondante parce que, à cause de l'impré-
d'<llarme, les tentatives de vision glo- voyance sociale, à cause de la vicieuse pulation mondiale, la terre pourrait se
bale de l'avenir de l'humanité se sont trouver complètement peuplée avant
organisation de l'industrie, à cause de
tour à tour opposées. Déjà Petty, Can- l'imperfection des règles qui gouvernent que beaucoup de générations ne soient
tillon et Turgot avaient cru à la même les rçlations internationales, prospérité passées»
loi de multiplication de l'espèce jusqu'à et crise se succèdent dans les ateliers l}. C'est le progrès technique, mais aussi
la limitation physiologique des subsis- (1) Claude Bernard et Pasteur qui ont
tances ; mais Ricardo, comme Malthus A. Cournot trente ans plus tard, sem- permis la prolifération de l'espèce. Les
d'ailleurs, observait qu'il incombait aux blait attacher plus d'importance à la ra- économistes ne s'en sont avisés que tar-
gouvernants d'aider à transforffier ce réfaction des matières premières, pénu- divement, plus précisement depuis 1960
minimum vital en minimum social. ries susceptibles de compromettre la environ. Auparavant les thèses sur les
Ainsi était notée, dès l'analyse classi- survie des civilisations «raffinées». économies de maturité (3) et sur la sta-
que, l'importance du politique et du so- «En meme temps que l'industrie hu- gnation séculaire par suite de la réduc-
cial. maine s'organise et se perfectionne, tion des propensions à investir, et sur-
En 1838, trois ans après la mort de écrivait-il, les emprunts qu'elle fait au tout en raison du fléchissement
Malthus, Michel Chevalier, jeune poly- sol, au règne inorganique, acquièrent démographique alors observé dans les
technicien enthousiasmé par les pers- plus d'importance. les matériaux en gé- sociétés occidentales, étaient brillam-
pectives du progrès niait ardemment le néral deviennent les instruments indis- ment soutenues dans les universités
fatalisme du paupérisme prédit par le pensables d'une industrie perfectionnée. américaines les plus prestigieuses. A.
pasteur. En écrivant «Tout homme Hansen, Higgins, Paul Sweezy, sa
aura de plus en plus sa part de loisir et (l) article Population par M. Chevalier, femme et son frère Allan, le monéta-
d'indépendance matérielle... Rien n'est tome 44 du {(Répertoire des connaissances riste Musgrave, Paul Samuelson et leurs
usuelles>), Editions Belin-Mandar, Paris 1838. nombreux disciples prêchaient le déclin
moins certain que cette multiplication
(2) A. Cournot, «Traité de l'enchaînement
indéfinie de l'espèce dont on nous fait du progrès. dans le style de «l'ère du
des idées fondamentales dans les sciences et
peur», il calculait que la terre pouvait dans l'histoire l> tome IV, chapitre XIV monde fini commence)). Les statisti-
héberger douze milliards d'hommes (3) cf. J. Duvaux <t La théorie de la matu- ques démographiques des vingt années
(deux fois plus qu'elle n'en comptera en rité économique ou de la stagnation séculaire précédentes semblaient justifier leurs
l'an 2000). Certes il rappelait que «les aux Etats-Unis l) Sedes Paris 1958. propos ainsi que les destructions du 41
conflit mondial de ce début des années ment des Pays-Bas associé à la Fonda- On ne peut que résumer très sommai-
quarante. tion Ford et à la Fondation Nationale rement ici les caractéristiques des cal-
Ce dernier conflit apparaît depuis des Sciences des Etats-Unis, d'accorder culs effectués (5) en rappelant que ce
lors avoir été le grand accoucheur d'un en 1973 une dotation spéciale à l'ONU modèle repose sur le partage du monde
monde désormais solidaire, autant par pour financer un programme de recher- en 15 ensembles économiques (recou-
la menace atomique que par celle des che du CDPPP (Centre des Nations vrant 170 pays et territoires), dont les
pénuries mortelles. L'explosion démo- Unies pour les Projections et les Politi- comportements sont déterminés par le
graphique, la pollution destructrice de ques de Développement) portant sur les jeu des tableaux ((input-output » régio-
la vie, la gestion déraisonnable des ré- interactions entre populations, ressour- naux associés aux flux financiers et
serves naturelles connues ou probables ces, environnement et développement. commerciaux rendant compte des
ont suscité depuis peu recherches et Les Nations Unies ayant demandé à W. échanges internationaux. Dans ses
propositions de remise en ordre. En LEONTIEF d'étudier les cheminements grandes lignes ce découpage correspond
outre, « informés i> par les moyens de aboutissant à une réduction de l'éven- aux régions des Nations Unies, mais
communication de masse, les aspects tail des revenus entre pays riches et pour préserver une certaine homogé-
grégaires de l'existence, en se générali- pauvres, accélérant la croissance des néité économique, il distingue les éco-
sant, ont éloigné les comportements dernières sans réduire le niveau de vie nomies de marché ( 12 régions : 6 déve-
économiques réels de l'individualisme des premiers, le projet s'est traduit par loppées et 6 en développement) des
Parétien et ont rendu caducs les acquis la réalisation en trois ans d'un modèle économies socialistes (3 régions : 2 dé-
des marginalistes. A mesure que les be- mondial dont les résultats constituent veloppées et 1 en développement), les 7
soins s'étendent et s'intensifient, les aujourd'hui la référence explicite des régions en développement se partageant
biens collectifs se multiplient, et dans le objectifs des deux prochaines «décen- en deux groupes : celles qui disposent
même temps les privilèges des peuples nies du développement» des Nations d'importantes réserves minérales et
nantis sont apparus comme un scandale Unies, c'est assez dire son importance. énergétiques (groupe 1 : 3 régions) et le
du développement. Les classes deshéri- reste du monde (groupe II : les 4 autres
tées, les peuples pauvres, les quatre cin- régions) (6). Ainsi la structure fonda-
quièmes des pays membres de l'ONU - Le modèle de W. Leontief. mentale du modèle peut-elle prétendre
revendiquent, et leurs griefs se multi- Contrairement aux études antérieures rendre compte de l'extrême diversité
plient et s'exacerbent à mesure que se où les auteurs examinaient les consé- des situations présentes : 30 % de la po-
creusent les écarts entre les niveaux de quences à terme de conditions initiales pulation du globe produisent actuelle-
vie. L'appel à moins d'injustice devient déterminées, c'est la démarche inverse ment dans les 8 régions développées
pour le monde synonyme de condition qu'ont suivi W. Leontief et ses collabo- plus de 85 % des richesses mondiales,
de survie, alors que depuis un quart de rateurs A.P. Carter et P. Petri: partant les 3 régions en développement dotées
siècle est posée dans les assemblées in- du résultat souhaité et remontant les de réserves naturelles (groupe I), soit
ternationales la question de combler le chaînes causales, ils ont cherché ici à IO % de la population mondiale, four-
fossé entre nations riches et pauvres. identifier les modifications qu'il serait nissant un peu plus de 3 % du produit
Tour à tour, les années 60 et 70 ont été dès à présent nécessaire d'apporter au mondial, tandis que les 4 régions du
proclamées première puis seconde <t dé- fonctionnement des échanges mon- reste du monde (groupe II) représentant
cennies du développement)). L'insuffi- diaux. plus de 60 % de la population mondiale
sance de leurs acquis a fait prévaloir la Appréhender quantitativement l'éco- ne se partagent pas 12 % de l'ensemble
nécessité d'un «Nouvel Ordre Interna- non1ie mondiale dans tous les facteurs des richesses produites. Les 15 régions
tional » qui devrait surgir d'une vérita- fonda1nentaux dont dépendent les ni- du modèle se répartissent en outre en 3
ble mutation des comportements natio- veaux de vie, intégrer au schéma de catégories selon que le revenu par tête y
naux : «Sur 144 nations membres de l'ensemble les moteurs dont devra pro- est supérieur à 2 000 US$ (1970) (hauts
l'ONU, écrivait récemment un membre céder le mouvement espéré, restituer revenus), inférieurs à 500 US $ (bas re-
de Club de Rome (4) 30 constituent en une dynamique cohérente commandant venus), ou intermédiaires (revenus
droit ou en fait 5 grandes communautés l'avenir de tous les pays en développe- moyens).
politico-économiques; ce sont les 5 n1ent et en dégager les conditions d'une L'économie de chacune de ces 15 ré-
géants: l'Amérique du Nord, l'Europe réduction des écarts de revenus, une gions est éclatée en 49 secteurs d'acti-
Occidentale, l'URSS et l'Europe de telle entreprise est évidemment im- vité : 7 productions agricoles et alimen-
l'Est, le Japon, la Chine. A eux seuls, n1ense et fort audacieuse. L'équipe des taires (dont: élevage, oléagineux,
ces 5 géants - soit la moitié de la po- universités d'Harvard et de Brandeis céréales, racines alimentaires), 12 activi-
pulation du globe - produisent et animée par W. Leontief semble pour- tés d'extraction et de traitement des ré-
consomment 90 % du produit mondial tant bien avoir été jusqu'aux limites du serves naturelles (dont: cuivre, bauxite,
brut - PMB - De leur côté les 114 possible pour avancer une estimation nickel, zinc, plomb, fer, pétrole, gaz,
autres nations - le Tiers-Monde - ne suffisamment étayée des possibilités de charbon), 19 productions manufactu-
produisent pas IO % du PMB, alors transformation du monde à l'échéance rées, 6 productions non manufacturées
qu'elles représentent l'autre moitié de de vingt-cinq ans. et 5 activités de traitement des pollu-
l'effectif mondial. Puisque cette situation tions (élimination des poussières, épura-
de grand déséquilibre. est née spontané- tion des eaux, destruction des déchets
nient, il est donc nécessaire qu'un nouvel urbains).
ordre soit instauré par une politique vo- (4) M. Guernier: «Cinq géants et cent
quatorze nations.)>, Le Monde 18-Xl-1977 Diverses catégories d'échanges relient
lontariste fondée sur une stratégie plané- entre eux les systèmes régionaux parmi
taire. » (5) Une description plus détaillée, suivie
d'une discussion technique du modèle de lesquels le modèle n'étudie explicite-
C'est à ce mot d'ordre que répondent Leontief a été présentée dans notre article: ment que les flux commerciaux et fi-
rapports, commissions, projets et réu- «L'économie mondiale et l'expertise de W. nanciers : les balances commerciales
nions internationales qui se multiplient Léonteif », Revue Population 1978 N° 4-5, pp. sont constituées par les flux des pro-
depuis peu (Rapport RIO du Pr. J. Tin- 884-935. duits importés et exportés, les termes de
(6) Les pays exportateurs de pétrole
bergen, Conférence Nord-Sud, Projet d'Afrique et du Moyen Orient ont été regrou-
l'échange étant fournis par la résolution
200 de l'ONU, Projet Interfutur de pés en 1 seule région (Moyen-Orient), ceux de du système des prix mondiaux ; les flux
l'OCDE, sessions de la CNUCED ces deux continents connaissant des sécheres- financiers interrégionaux concernent les
etc.); et c'est dans ce contexte que ses chroniques importantes constituant une services et les invisibles ainsi que les
42 prend place l'initiative du gouverne- autre région (Afrique aride). placements internationaux et les mou-
vements de capitaux à long terme. Ces regton. Ce sont précisément ces varia- Les conséquences de l'inflation géné-
flux constituent avec les balances bles qui feront l'objet des scénarios re- ralisée dans les économies avides
commerciales et les services de la dette tenus pour l'expertise ; c'est dire le d'équipements et de surconsommations
intégrant les intérêts des déficits ou ex- grand nombre des cheminements sus- n'ont pas de prolongements dans les dé-
cédents, les balances des paiements des ceptibles d'être empruntés. Malgré cennies d'intense effort d'épargne et
15 régions, variables cruciales du modèle l'énormité du dispositif, la place réser- d'investissements mondiaux explorées
de Léontief La complexité des réseaux vée ici à la variable démographique pa- par le modèle. Ainsi commence la ré-
des échanges internationaux a été élu- raît cependant bien modeste si l'on ob- flexion critique sur le degré de réalisme
dée par la fiction classique d'un marché serve que dans nombre de pays en et de fiabilité de cette première exper-
international unique ou (i pool » d'ex- développement qui se modernisent, tise, laquelle nous place devant le di-
portation ou d'importation transparent s'urbanisent, s'industrialisent, donc se len1me: réussir ou périr.
et équilibré soumis exclusivement au (( salarisent 1> rapidement, la population
jeu des forces économiques; chaque ré- est assurée de doubler avant la fin du
gion est censée y exporter ses produits siècle.
- Principaux résultats et conditions du
et capitaux et en retirer les biens et les Les scénarios retenus par Leontief
Nouvel Ordre pour l'an 2 000.
flux financiers qui lui sont nécessaires. pour l'expertise destinée à l'ONU ré- Répondant aux soucis prioritaires des
Sous certaines réserves comptables, les pondent à une série d'objectifs définis en agences des Nations Unies, W. Leontief
balances commerciales doivent évidem- tertne de produits par tête tels qu'ils ré-
concentre son analyse sur trois thèmes
ment s'équilibrer physiquement à duisent environ de moitié en trente ans particuliers : les problèmes alimentaires,
l'échelle mondiale, ainsi que les balan- l'écart des revenus par tête entre les l'épuisement des gisements, le coût de
ces des paiements en termes financiers. pays développés et le reste du monde (7 la lutie contre la pollution.
à 1 contre 12 à 1 aujourd'hui), ce résul-
Les besoins en importation d'une ré- Les divers scénarios rapprochent plus
tat progressivement atteint en l'an 2 OO
gion sont obtenus par l'emploi d'un en- ou moins vite le régime alimentaire
serait prolongé de façon à combler
semble de propensions sectorielles à im- moyen des pays en développement
complètement cet écart vers le milieu
porter, l'ensemble des besoins (2 200 calories et 55 grammes de protéi-
du siècle prochain. Huit scénarios ont
régionaux en importations déterminant nes par personne et par jour en 1970)
été élaborés pour serrer plus ou moins
alors les dimensions du marché de celui des pays industriels (plus de
les hypothèses contraignantes des Na-
commercial international. Cette mé- 3 000 calories et 100 grammes de pro-
tions-Unies.
thode keynésienne assise sur la de- Toujours supposé dans ce 1nodè/e gé-
téines). Il s'agit ainsi avant la fin du siè-
mande présume que le marché mondial néré par la seule éconon1ie nord-améri- cle, compte tenu de la croissance démo-
saura toujours s'adapter dans les délais caine, le système des prix mondiaux graphique de tripler au minimu1n les
requis à la demande internationale ; elle (qui commande les termes de l'échange) rendentents agricoles tout en accroissant
élude directement du moins, les effets de 30 à 50 % les siufaces cultivées. Tâche
est déterminé par la résolution du dual
d'éventuelles tensions voire pénuries. du système de production de cette ré- gigantesque quand on connait la multi-
(7) Pour assurer l'équilibre de ce mar-
gion en partant de valeurs ajoutées (trai- plicité des obstacles technologiques et
ché on attribue à chaque région une tements, salaires, profits et revenus de sociologiques que le progrès agricole a
«part » donnée du total d'exportations toute nature) données exogènement. On
toujours suscité sous toutes les latitu-
de chaque produit en introduisant de mesure alors combien, dans cette exper- des. quelque soit le niveau de moderni-
manière exogène des séries de taux secto- sation des populations rurales l Ainsi le
tise, demeure implicitement dominé jus-
riels régionaux d'exportation censées re- déficit alimentaire est-il particulière-
qu'en l'an 2 000 par l'économie anglo-
fléter l'évolution des poids relatifs des ment dramatique pour les pays asiati-
saxonne le système des échanges inter-
économies régionales dans le monde. A nationaux d'où procèdent par le jeu des ques à faibles revenus ; même aux
l'inverse des flux commerciaux, les flux balances des paiements les chemine- conditions favorables du scénario prin-
financiers (aides, subventions, trans- ments régionaux. Il serait nécessaire cipal il ne saurait être entièrement ré-
ferts) reposent sur la constitution d'un d'expliciter les conséquences des simpli- sorbé avant la fin du siècle: le surcroît
((programme d'aide internationale » ali- fications inévitables des réalités poli- d'efforts que cette région devrait ac-
menté par des sorties brutes d'aide en tico-économiques qui en fait président complir pour acquérir dès 1980 son in-
proportions données des PIB régionaux. au développement des peuples : les per- dépendance alimentaire nécessiterait de
En retour les régions accèdent selon un turbations induites par le système mo- réaliser avant cette date le doublement
systè1ne de ((parts» fixées de n1anière nétaire international sur les flux des investissements agricoles et des sur-
exogène à ce n1arché international des commerciaux sont ignorées du modèle, faces irriguées, tout en accroissant tous
capitaux. ainsi sont éludés les problèmes si déli- les ans de plus de 3 % les importations
En résumé, chacun des sous-modèles cats des évolutions à long terme des li- d'engrais et de pesticides, et de plus de
« input-output » régionaux comporte 4 % la capitalisation agricole. Même au
quidités internationales et les difficultés
175 équations (contraintes) reliant 269 du «recyclage » des pétro-devises. Ni prix d'un tel effort le déficit commercial
variables dont 229 variables spécifique- les structures réelles des pouvoirs, ni les de cette région prévu en 1980 ne serait
ment régionales (parmi lesquelles 3 mécanismes des centres de décision qui pas réduit du quart!
macro-variables démographiques seule- déterminent les comportements des Par ailleurs le développement accé-
ment : la population, la population ur- agents économiques internationaux (et léré du Tiers-Monde entraînera d'ici
baine et l'emploi), et 40 variables inter- par conséquent l'avènement du Nouvel l'an 2 000, sinon l'épuisement des res-
régionales. Au total l'expertise de W. Ordre), ni les effets des décisions finan- sources, du moins l'accroissement des
Leontief repose donc sur les inter-ac- cières économiques ou sociales émanant coûts d'extraction corrélatifs à leur ra-
tions de 3 475 variables dont seules 45 des pouvoirs nationaux ou des entités réfaction; Leontief n'omet pourtant
macro-variables démographiques liées multinationales ne trouvent évidem- pas de tenir compte des progrès techni-
par 2 625 équations. A priori ce modèle ment place dans l'approximation de ques ni des procédés de recyclage et de
présente donc plus de 800 degrés de li- Leontief. récupération. On peut noter que le scé-
berté, mais un grand nombre de varia- nario X prévoit une croissance annuelle
bles devant par nature être considérées de 3 - 4 % des consommations occi-
(7) seules les pénuries de certaines matiè-
comme exogènes ou données à priori, le res premières sont directement prises en dentales en ferreux et non ferreux (donc
nombre de ses variables instrumentales compte, mais aucune place n'est laissée aux moindre que les taux européens des 20
est en réalité réduit à quelques centai- ruptures éventuelles des stocks mondiaux des dernières années), des rythmes de 7 -
nes, soit quelques dizaines pour chaque céréales par exemple. 8 % étant annoncés pour les pays en dé- 43
veloppement qui portant sur les 2/3 de Part (en %) des économies de marché
l'humanité, ne visent cependant pas le développées et en développement
quart du revenu mondial, les besoins en dans l'ensemble de la production industrielle mondiale
énergie de ces régions doublant néan-
moins tous les 7 ans. Parmi les matîères
premières étudiées, seules les réserves
Économies Économies
de plomb, zinc, nickel et peut-être de
de marché de marchés
cuivre p<;.iraissent susceptibles d'épuise-
développées en développement
n1ent physique réel avant la fin du siè-
cle. Surgissent aussitôt de nombreuses
questions sans réponses : quelle est 1970 2000 1970 2000
l'importance du cuivre ou d'autres ma-
tériaux à l'ère de l'électronique? Quel Industries légères 66 45 9 22
serait l'impact de telles pénuries sur les Outillage et équipement 73 52 3 13
modes de production ? Quels pourraient Matériaux et Industries lourdes 71 48 5 19
être les effets d'entraînement de la Ensemble de l'industrie 70 49 6 18
hausse rapide des prix des non-ferreux
en voie de raréfaction, et ceux des anti-
cipations et comportements spéculatifs
qu'elle ne manquerait pas de déclencher Selon ce scénario, le volume physique l'aide publique internationale décuplant
sur l'emploi, les autres prix, l'attitude du commerce international devrait pres- dans la même période, et l'accès des ré-
des producteurs, des consommateurs, que sextupler dans son ensemble avant gions en développement aux capacités
celle des Etats ? la fin du siècle, celui des échanges indus- internationales de financement s'élargis-
Contrairement aux précédentes alar- triels décuplant, tandis que quadruple- sant de 19 à 57 % du total annuel des
n1es lancées par le Club de Rome, les rait le produit mondial global dans la investissements internationaux. Alors,
conclusions de l'expertise paraissent op- 1nême période. Les exigences d'une telle de troublantes interrogations sur les
ti1nistes pour ce qui est des pollutions : croissance conduiraient les pays en dé- conditions de l'avènement du <t Nouvel
les cinq types d'activités d'élimination veloppement à réclamer, tout en main- Ordre » ne manquent pas de s'imposer
ne sauraient concerner selon Leontief tenant globalement leur place sur les quand on sait que dans nombre d'éco-
plus de 4 % des stocks de capitaux, le marchés d'exportations, un doublement nomies en développement les revenus
coût actualisé d'une telle immobilisa- de leur part dans l'ense1nble des impor- nets qui rémunèrent actuellement les
tion demeurant toujours inférieur à l % tations mondiales représentant ainsi à placements étrangers ne sont pas même
du P.I.B. On doit cependant ajouter la fin du siècle plus de 30 % du marché couverts par les entrées des capitaux in-
que les activités prises ici en compte re- mondial (9). ternationaux, qu'en 1975, selon la Ban-
présentent à peine la moitié des traite-
ments mis en oeuvre aux Etats-Unis.
Réduire de près de la moitié l'écart
des revenus moyens par tête nécessite-
rait d'assurer jusqu'à la fin du siècle (9) Évolution de la place des économies de marché
aux économies du Tiers-Monde des en développement sur les marchés internationaux
rythmes de croissance de 6 à 9 % l'an
(8). Ainsi les revenus par tête pour-
raient dans ces régions doubler, tripler,
voire quadrupler d'ici à l'an 2 000, % mondial % mondial
tandis que les consommations par tête des exportations des importations
doubleraient ou tripleraient à la condi-
tion implicite que les dépenses publi-
1970 2000 1970 2000
ques improductives (armements par
exemple) ne dépassent pas 12 % des
emplois intérieurs. Les structures de ces Agriculture 33 32 15 39
éconon1ies se rapprocheraient alors ra- Ressources minérales 39 75 Il 19
pidement de celles des pays industriali- Outillage, équipement 2 3 19 34
sés: le secteur primaire étant ramené à Matériaux et Industrie lourde 5 7 20 40
moins de 10 % du P.N.B., le secondaire Ensemble des secteurs 16 17 16 31
croîssant vers 50 % et le tertiaire vers
40 %.
Cette métamorphose ne saurait se réali-
ser sans redistributî'bn des productions
industrielles ni sans bouleversements
des échanges mondiaux •. qui hnpliquent Selon l'expertise, le financement de que Mondiale, l'endettement global des
à tenne la mise en question des rapports cette immense mutation reposerait pres- pays latino-américains excédait l'ensem-
de force et des positions éco11on1iques do- qu'exclusivement sur les capitaux des ble de leurs exportations de l'année,
nlinantes au profit des régions en déve- économies de marché développées, du celui des pays de l'Asie du Sud ne pou-
loppement, comme l'illustrent les résul- moîns pour assurer les investissements vant être couvert par deux ans et demi
tats suivants du scénario X: industriels ; toutefois certains scénarios d'exportations, lorsque l'on rapproche
prévoient une réduction à la fin du siè- ces prévisions des statistiques du F.M.I.
(8) Le scénario X va même jusqu'à impliquer cle de la part des financements étran- selon lesquelles l'endettement des PVD
d'ici l'an 2 000 des taux de croissance an- gers dans certaines régions. D'ailleurs à l'égard des banques commerciales pri-
nuelle de 16 et 17,5 % des produits d'équipe- les scénarios du «Nouvel Ordre» im- vées était en 1976 proche de 70 mil-
ment et de l'industrie lourde des pays pétro- pliquent une explosion du marché des liards de $ dont 50 milliards auprès des
liers, soit un doublement tous les 5 ans ou en capitaux qui en terme constant septu- seules banques américaines, soit 30 % de
30 ans une multiplication de ces productions plerait avant la fin du siècle, les volu- la dette extérieure publique du Tiers-
44 par un facteur supérieure à 60 ! mes des prêts gouvernementaux et de Monde !
En outre le modèle incorpore les dis- Dans quelles dépendances que les déplacements des termes de
torsions des prix relatifs de sorte que
sur 30 ans, le scénario X prévoit que re-
lativen1ent aux prix moyens des biens
n1anufacturés, celui des matières premiè-
res serait triplé, et celui des produits
agricoles accru de 20 % (seulement !),
les effets de ces distorsions pénalisant
D pour cette période de transfor-
mation? Selon quelles discipli-
nes courageuses pour l'Occi-
dent? Avec quel concours
volontaire des pays socialistes? Dans
quelle atmosphère pacifique, et par
quels organes de décision pour cette
l'échange. Aussi les scénarios retenus ici
pour les Nations Unies ne rendent-ils
pas compte de la réalité présente du
système des flux internationaux dominé
pour la décennie à venir par une straté-
gie d'échanges triangulaires: équipe-
ments - matières premières et énergie
particulièrement l'Europe occidentale et œuvre de mondialisation des relations - denrées alimentaires, (sans mention-
le Japon.D'ailleurs pour rétablir dura- pacifiques ? La liste des questions préa- ner même les aléas du système moné-
blement leurs équilibres extérieurs, les lables à ce grand oeuvre de construc- taire international, le rôle des marchés
pays en développement doivent s'effor- tion d'une humanité nouvelle est loin d'armements, ni les politiques des mul-
cer d'élargir leur place sur les marchés d'être close. Cependant, quels que tinationales.).
d'exportation tout en réduisant leurs soient les obstacles, il n'y a pas d'alter-
dépendances économiques par une poli- native autre que le mouvement dans Le réalisme, devant une oeuvre indis-
tique de substitution systématique de cette voie, si l'on veut éviter des crises pensable, commande pourtant d'entre-
produits nationaux à leurs importa- d'ampleur encore inconnue. prendre l'action. La réduction finale des
tions; c'est là l'objet d'un scénario M écarts de revenu suivra sans doute des
qui rééquilibre leurs échanges au détri- En fait nous savons que ce sont des voies plus ou moins éloignées de celles
ment quasi exclusif de l'Europe occiden- facteurs politiques (politique étrangère, qu'une prospective rationnelle nous
tale (et à moindre titre, du Japon) tout politique commerciale, politique moné- propose aujourd'hui. En toute certitude
en préservant les nionstrueux excédents taire, stratégie militaire ...) qui condi- on peut prédire que les styles de vie eu-
des pays pétroliers, comme l'illustre le tionnent les scénarios réellement possi- ropéens changeront. Le meilleur espoir
tableau des balances des paiements de bles ; si décisifs qu'ils soient ces pour le bonheur des générations nou-
l'an 2 000. facteurs restent de par leur nature hors velles demeure dans cette simple consi-
Si cependant le scénario X s'avérait du champ de l'étude, alors qu'ils déter- dération : que les changements néces-
réalisé, le Tiers Monde n'aurait pas en- minent stratégie des investissements, saires ne soient pas imposés mais
core dans son ensemble rejoint en l'an flux et diversification des aides et prêts consentis, donc rationnellement prépa-
2 000 les structures économiques occi- publics, places des pays sur les marchés rés. Le bonheur, comme la paix, est
dentales, mais on peut supputer qu'à ce d'exportation, distorsions des prix rela- dans sa nature profonde psychologique
prix, le cap le plus dangereux aurait été tifs consécutifs aux pratiques commer- et sociologique. Mais la raison doit en
doublé. ciales et politiques de subvention, ainsi être l'architecte.
45
[EVOLUTION A NG TERME
DES RELATIONS ENTRE
PAYS EN DEVELOPPEMENT
ET
PAYS INDUSTRIALISES
48
R.A.U. EGYPTE, ABOU SIMBEL,
CAMPAGNE INTERNATIONALE POUR LA SAUVEGARDE DES MO-
NUMENTS DE NUBIE
UNESCO/NENADOVIC.
49
LE NOUVEL ORDRE ECONOMIQUE
INTERNATIONAL=
mythe ou réalité ?
53
les institutions
LA COOPERATION
AVEC
LE TIERS MONDE:
réalités et perspectives
â
0
58
En troisiè1ne lieu, grâce à sa position Dès sa création, la Banque a donc été de 1nême, elle inclut souvent dans ses
panni les institutions d'aide, la Banque conduite à développer ses moyens pro- concours des provisions pour la forma-
peut jouer un rôle particulier de cataly- pres d'évaluation. Elle dispose mainte- tion des responsables ou des utilisateurs
seur de flux financiers. Reconnaissant nant de très importants services d'étu- futurs.
la qualité de l'évaluation et de la super- des. Ceux-ci sont articulés en six vice- Après cette évaluation approfondie et
vision de ses projets, des organismes présidences régionales, chargées de la une fois prise la décision de finance-
nationaux ou 1nultilatéraux d'assistance, préparation des projets et de la mise en 1nent, la Banque ne cesse pas de s'inté-
des banques co1nn1erciales ou des orga- place des prêts, et en un service central resser au projet. Les versements des
nismes de crédit à l'exportation accep- des projets, qui joue le rôle de conseiller fonds ne sont en effet effectués qu'au
tent souvent d'apporter des concours technique des départements géographi- fur et à n1esure de la réalisation des dé-
directs à côté des prêts de la BIRD ou ques. Les services opérationnels regrou- penses. La Banque assure une supervi-
des crédits de l'AID. Ces financements pent les deux tiers environ des cadres sion continue, demandant aux pays des
conjoints, ou cofinancements, attei- employés par la Banque Mondiale. Au con1pte rendus réguliers de l'exécution
gnent maintenant des montants consi- non1bre de 2 400, ceux-ci ont toujours des travaux, envoyant des missions sur
dérables. A titre d'exemple, pour l'exer- une formation supérieure très élevée place, contrôlant un certain non1bre
cice 1977-78, parallèlement aux 8,4 (doctorat le plus souvent) et une expé- d'opérations, notamn1ent la régularité
milliards de dollars d'engagements nou- rience professionnelle généralement lon- de la passation des marchés. En ce der-
veaux de la BIRD et de l'AID concer- gue. Ils sont recrutés dans les pays nier domaine, pour parvenir à une exé-
nant 236 projets, des ressources d'un n1embres, les Français, au nombre de cution du projet dans les conditions les
montant de 2,8 milliards ont été appor- 145 (soit 6 %) venant au 3" rang des plus économiques et pour atteindre
tés par des organismes divers, pour 81 groupes nationaux. ainsi la meilleure utilisation des res-
projets. Fréquemment, c'est la Banque Les projets soumis à la Banque font sources prêtées, la Banque den1ande à
qui recherche ces cofinancements, l'objet d'une étude détaillée, qui dure ses en1prunteurs de procéder à des
d'elle-même ou à la demande du pays de 6 à 18 mois et qui comprend plu- appels d'offres internationaux et de
intéressé. Par la pratique des cofinance- sieurs phases. Après une identification confier le marché aux entreprises les
ments, la Banque agit ainsi sur le vo- sur place, une évaluation est effectuée n1oins disantes.
lume et l'orientation des flux financiers par une équipe d'économistes, de finan- Le cycle de réalisation des projets se
en direction des pays en développement tern1ine par un rapport d'évaluation a
ciers et d'experts du secteur concerné.
et pour parvenir à une meilleure utilisa- postériori, préparé par un département
Au vu du rapport d'évaluation, une dé-
tion de ses ressources, malgré tout limi- spécial de la Banque, distinct des servi-
cision interne est prise par la Direction
tées. ces opérationnels et dépendant directe-
Générale qui négocie ensuite avec les
1nent du Président et du Conseil d'Ad-
représentants du pays les conditions
111inistration. Dans cette dernière phase,
Il. LA BANQUE MONDIALE, particulières du prêt ou du crédit. Cha-
la Banque s'assure que les principaux
PROMOTEUR DU DÉVELOPPE- cun de ceux-ci est enfin soumis au
Conseil d'Administration, qui prend la objectifs ont été atteints et elle essaie de
MENT vérifier si le taux effectif de rentabilité
décision finale, à la majorité des voix,
Depuis sa création, la Banque s'est chaque administrateur disposant d'un êconon1ique est conforme aux prévi-
attachée à ne pas être seulement une nombre de voix fonction de la contribu- sions. Ces rapports d'évaluation a pos-
institution financière soucieuse d'une tion du ou des pays qu'il représente, au tériori sont égale1nent l'occasion de
bonne utilisation de ses fonds et de ga- capital de la BIRD ou aux ressources tirer des leçons utiles sur les choix tech-
ranties suffisantes de remboursement. de l'AID. niques, les modes d'organisation, etc.
Elle s'est également attachée à être un La rigueur de la préparation et de
L'évaluation d'un projet porte sur
promoteur actîf du développement, en l'évaluation des projets, le souci continu
tous ses aspects. La Banque veille en
cherchant à agir, à travers les projets de la bonne utilisation des ressources
pre111ier lieu à sa qualité technique et à
qu'elle soutient, sur les programmes et tout au long de leur réalisation, les cri-
sa cohérence avec le programme général
les orientations économiques de ses em- tères progressivement mis au point ont
de développement du pays. Elle exa-
prunteurs. fondé et fondent encore la réputation
n1ine en second lieu la capacité techni-
de la Banque Mondiale. Ses méthodes
que. administrative et financière de
ont fréque1n1nent servi d'exemple, tant
l'en1prunteur. Elle s'attache également à
L'EXPERTISE TECHNIQUE aux autres institutions internationales,
apprécier l'utilité du projet, en détermi-
AU SERVICE DU DÉVELOPPE- notan1n1ent aux banques régionales de
nant son taux de rentabilité économi-
MENT dCveloppen1ent qu'à des organismes bi-
que. Celui-ci est calculé en tenant
latéraux d'assistance ou à des services
D'après ses statuts, la BIRD doit con1pte des produits marchands et
chargés. dans les administrations des
consentir ses concours pour des projets aussi, depuis quelques années, de cer-
pays receveurs, de la programmation,
susceptibles de contribuer au dévelop- tains élén1ents non 1narchands mais
de la préparation ou de la réalisation
pement des capacités de production, à quantifiables, comme les gains de
des investissements. La Banque orga-
l'augmentation de la productivité et à te1nps, pour des investissements dans le
nise d'ailleurs des cours à l'intention
l'amélioration du niveau de vie. Elle secteur des transports, par exemple. Gé-
des responsables de tels services et est
doit en outre prendre ses décisions ex- nérale1nent, les projets aidés par la Ban-
que ont un taux de rentabilité au moins souvent appelée par des pays emprun-
clusivement en fonction de considéra- teurs à les aider à former et à organiser
tions économiques. La Banque a tiré égal à 12 % et souvent nettement plus
élevé. des institutions qui aient le n1ême souci
deux séries de conséquences de ces d'efficacité.
principes : d'une part, elle réserve ses Durant la préparation, la Banque
concours au financement de projets et étudie en outre les reton1bées possibles
n'intervient pas pour couvrir des frais des projets. Dans la mesure du possible, La Banque
de fonctionnement, des déficits budgé- elle cherche à ce qu'ils puissent être ai- et la conception
taires ou d'éventuelles difficultés de ba- sé1nent reproduits dans d'autres parties du développement
lance des paiements; d'autre part, elle du n1ême pays ou dans d'autres pays ;
est particulièrement attentive à l'utilité elle souhaite également qu'ils puissent Par la part qu'elle prend au finance-
économique des projets qui lui sont contribuer au renforcement, voire à la n1ent des budgets d'investissements des
soumis et à leur impact sur le dévelop- création, d'institutions capables de les pays receveurs, par le choix des projets
pement du pays. réaliser, puis de les gérer efficacement; auxquels elle accepte de contribuer, par 59
les n1éthodes administratives et techni- sée à la qualité de cette croissance et En troisième lieu, la Banque oriente
ques qu'elle recommande, enfin par les elle a pris conscience de la nécessité de une part croissante de ses concours vers
relations continues qu'elle entretient veiller à un progrès simultané des divers les pays les plus pauvres. C'est ainsi
avec les pays e111prunteurs, la Banque secteurs, et plus spécialement de l'agri- que les pays dont le revenu par tête
Mondiale est en n1esure d'exercer une culture. Ensuite, elle a décidé de prêter était inférieur à 280 dollars en 1975, ont
influence non négligeable sur leurs déci- une attention particulière aux consé- reçu 90 % des crédits de l'AID entre
sions économiques et sur l'orientation quences des projets sur la distribution 1974 et 1978, contre 82 % entre 1964 et
Ce leur développen1ent. de revenus et de chercher à ce que la 1968. De même, la plus grande partie
Au cours de ses trente-deux ans de partie la moins favorisée de la popula- des prêts de la BIRD va désormais aux
fonctionnement, la Banque a profondé- tiot'i. bénéficie par priorité des avantages pays à revenu bas ou moyen, les pays à
ment renouvelé et élargi ses propres provenant de ses interventions. Cette revenu supérieur à 1 135 dollars par
conceptions. Pendant ses quinze pre- volonté de s'intéresser aux plus pauvres tête ne recevant plus que 27 % des
mières années, elle a essentiellement fi- et d'essayer de satisfaire leurs besoins concours accordés entre 1974 et 1978,
nancé des projets d'infrastructure. Ainsi essentiels (nourriture, vêtements, soins, contre 51%entre1964 et 1968.
32 % des financements accordés de logement, éducation) a été exprimée Cette évolution des activités de la
1947 à 1963 concernaient le secteur des tout particulièrement par M. Mc Na- Banque a eu une très grande influence.
transports (routes, voies ferrées, ports, mara dans le discours qu'il a prononcé En effet, les investissements qu'elle
aéroports, oléoducs, etc.), 31 %, la pro- à Nairobi en septembre 1973. contribue à financer concernent désor-
duction et la distribution d'électricité et Il est résulté de ces réflexions une tri- mais un nombre considérable d'habi-
13 % l'industrie (directement ou par ple réorientation des activités. La tants des villes ou des campagnes (les
l'intermédiaire de sociétés financières conception même des projets a d'abord projets de développement rural approu-
de développen1ent). En revanche, les évolué. Jusqu'à la fin des années 1960, vés en 1977-1978 devraient par exemple
projets agricoles ne représentaient que la Banque a essentiellement financé des toucher 28 millions de ruraux parmi les
6 % et aucune opération ou presque équipements lourds, bien individualisés, plus pauvres du monde). Son action
n"était faite dans le domaine de l'urba- faisant largement appel, pour leur contribue de plus à attirer l'attention
nisme, de l'alimentation en eau ou de conception, leur réalisation ou leur ges- des gouvernements des pays receveurs
l'éducation. Durant cette première pé- tion, à des techniques et à des experts et des organisations nationales ou inter-
riode, la Banque s'attachait surtout à étrangers. Elle cherche maintenant sur- nationales d'aide sur la nécessité d'en-
créer les investissements de base néces- tout à faciliter la réalisation d'opéra- courager un développement qui profite
saires au décollage et à la croissance tions intéressant une population rurale à ceux qui en ont vraiment besoin.
économique. ou urbaine suffisamment nombreuse, Cette évolutîon rencontre inévitable-
comprenant souvent des composantes n1ent des lin1ites, provenant aussi bien
Au cours des années 1960, les limites très variées, d'un coût unitaire limité, et
de cette orientation initiale sont appa- de la disponibilité insuffisante d'experts
susceptibles d'être réalisées en faisant capables de travailler sur les projets
rues, tant aux pays receveurs qu'à l'ins- appel à la main d'œuvre et aux techni-
titution elle-même. Pour assurer le bon « nouveau style » que de réticences de
ques locales. Elle veille également à ce classes favorisées des pays emprunteurs
fonctionnement des infrastructures nou- que l'économie du projet soit telle que
velles, les organismes locaux responsa- ou de la capacité technique et adrninis
les bénéfices en reviennent autant que trative réduite de ces pays.
bles devaient pouvoir trouver un per- possible aux plus pauvres. A titre
sonnel disposant d'une formation, d'exemple, la Banque propose aux pays
d'une nourriture et de soins convena- receveurs, dans le cas de projets d'ali-
bles. De même, la rentabilité économi- 'accès à un volume suffisant de
mentation en eau, d'adopter un système ressources financières ne saurait
que des projets impliquait l'existence de tarification qui fasse supporter la to-
d'une demande suffisante. Elle suppo- certes être une solution suffisante
talité ou la plus grande partie du coût au développement des pays les
sait par exemple, qu'il y ait assez de par les catégories favorisées, les habi-
marchandises à transporter, dans le cas plus pauvres. Ceux-ci ont certai-
tants des quartiers pauvres des villes ou nement besoin de mesures dans bien
de projets ferroviaires ou, dans celui de des zones rurales déshéritées disposant
constructions de centrales électriques, d'autres domaines.
en revanche d'une alimentation gra-
qu'une part suffisante de la population tuite. Cependant des prêts, des crédits ou
dispose de revenus assez élevés pour En deuxième lieu, la Banque a consi- des dons demeurent nécessaires pour
payer leur consommation. En outre la dérablement développé son action dans pallier l'insuffisance de leurs ressources
Banque a été critiquée pour ne pas des secteurs où elle n'intervenait pas, en devises et pour assurer le paiement
s'être assez intéressée à la répartition ou peu, auparavant. C'est ainsi que deS biens d'équipement ou des techni-
des revenus nouveaux résultant des pro- l'agriculture et le développement rural ques qu'ils doivent importer. De même,
jets qu'elle finançait. On a en effet pu sont devenus le premier domaine d'acti- en raison des limites de leurs capacités
observer que les ressources supplémen- vité de la Banque, représentant 30 % techniques et administratives, il leur fait
taires dégagées profitaient parfois da- des concours totaux entre 1974 et 1978 trouver une assistance à la conception
vantage aux catégories privilégiées des (soit 10,9 milliards de dollars), contre et à la réalisation de leurs programmes
pays en développement, qu'aux classes 20 % entre 1969 et 1973 (4,4 milliards) d'investissements.
les plus pauvres. et 11 % entre 1964 et 1968 (1,8 mil- En ces domaines et en dépit des limi-
La Banque a donc été conduite à liards). De même, les projets d'éduca- tes rencontrées, la Banque a pris des
élargir ses propres conceptions dans tion représentent-ils désormais 4 % des initiatives et a acquis une expérience et
deux directions. D'abord, tout en re- concours (1 475 millions entre 1974 et une réputation qui font désormais d'elle
connaissant la nécessité de continuer à 1978). les projets urbains. 2 % (861 mil- un centre collectif de réflexion et d'ac-
encourager la croissance économique lions), les projets d'adduction d'eau, tion en faveur du développement qui
des pays emprunteurs, elle s'est intéres- 4 % (1516 millions). n'a pas d'équivalent.
60
TEC IGUES DlRRIGATION
POUR LES PAYS EN VOIE DE
DEVELOPPEMENT
62
main d'œuvre: «Augmenter les rende- quement tous les équipements d'arro- péenne a consenti dans ce domaine un
ments de maïs? D'accord! Mais pas sage du marché mondial. L'industrie effort particulier pour le choix de la
question de déplacer des rampes d'as- hongroise s'est engagée dans la fabrica- n1atière première, effort qui a été relayé
perseurs. ni n1ême des asperseurs seuls tion de rampes montées sur roues et de par des essais en vraie grandeur de la
(l), les Portugais eux-mêmes n'en veu- rampes tractées à moyenne pression recherche universitaire (Ëcole Supé·
lent plus, alors vous comprenez ... )). (fig. 4) qui représentent des solutions rieure Technique de Hanovre). Les ré·
La première réaction des vendeurs de très économes et peu sophistiquées bien sultats de ces essais permettent de pen·
n1atériel d'irrigation par aspersion cons- connues dans l'ouest des f:tats-Unis. ser que l'on dispose actuellement d'un
cients de cette évolution, a été d'impor- Des équipements d'un type voisin polyéthylène suffisamn1ent souple pour
ter puis de fabriquer en France des (rampes en polyéthylène montées sur cette utilisation et d'une méthode vala-
équipements utilisés à l'étranger. roues) sont très répandues en Israël. La ble de contrôle du produit fini qu'il
L'exemple typique est celui des rampes position de l'Union Soviétique ne paraît conviendrait de n1ettre en œuvre pour
pivotantes qui ont connu un développe- pas très différente (rampes pivotantes, protéger le tnarché français des tuyaux
ment considérable aux États-Unis ces rampes sur roues ... ) avec certains équi- de 1nauvaise qualité.
15 dernières années . pements originaux tels que les rampes Il existe des appareils d'un modèle
Les structures foncières françaises arrosant en se déplaçant le long d'un voisin. dotés d'un tuyau d'alimentation
ont vite marqué les limites d'un tel dé- canal. du type pompier et d'un canon d'arro-
veloppement qui est surtout cantonné Ce bref tableau des techniques mo- sage monté sur un chariot mobile se ti-
dans le massif forestier landais et impo- dernes d'arrosage par aspersion serait rant sur un câble. Ces appareils
sait jusqu'à présent un arrosage en cer- incomplet sans les systèmes dits connaissent un grand développement
cles. «fixes)) c'est-à~dire constitués de aux États-Unis et sont également fabri-
Une amélioration technologique vient canons d'arrosage ou de rampes d'as- qués en France.
d'être introduite aux États-Unis pour perseurs à poste fixe équipés de vannes Ces systèn1es constituent une nou-
l'arrosage des· coins. D'autres équipe- automatiques (fig. 6). La France a été velle étape dans la simplification du
ments que l'on appelle des arroseurs également à l'origine des arroseurs travail de l'irrigant. Correctement utili-
géants, ont connu aussi un certain déve- robots constitués par un canon se dé- sés, ils permettent de réaliser des arro~
loppement et continuent d'avoir la fa- plaçant automatiquement d'une bouche sages nettement plus fréquents que per-
veur des utilisateurs qui ne peuvent uti- à l'autre en se guidant sur un réseau de n1ettent aussi les rampes pivotantes et
liser des rampes pivotantes sur leur conduites superficielles (fig. 7). d'atteindre ainsi les rendements maxi-
parcellaire. Ce type d'appareil, que l'on appelle n1un1 ainsi qu'une certaine économie
L'utilisation ancienne de rampes couran1ment un enrouleur a été simul- d'eau et d'énergie par une meilleure uti-
d'asperseurs en polyéthylène enroulées tané1nent mis au point en Allemagne et lisation des pluies naturelles.
sur tambour et la recherche d'une éco- a connu en France un succès immédiat, Nous avons déjà mentionné l'irriga-
nomie de main d'ceuvre a conduit la sous de non1breuses variantes. L'en- tion gravitaire. Ajoutons que si l'irriga-
France à développer à partir de 1971 gouen1ent a été porté à son comble par tion gravitaire est actuellement nette-
des canons d'arrosage automoteurs. Ces la sécheresse de 1976, avec certains ment en tête pour les surfaces arrosées,
appareils utilisent l'énergie motrice d'un excès dont les printemps pluvieux de elle ne peut se pratiquer n'importe où et
vérin ou d'une turbine branchés sur 1977 et 1978 ont aggravé les conséquen- exige dans la plupart des cas des tra-
l'alimentation en eau pour enrouler sur ces pour les fabricants de matériels. vaux de terrassement importants pour
un tambour le tuyau en polyéthylène de Certains pays de l'Europe de l'Ouest être n1ise en ceuvre sur des parcelles de
200 à 300 m de long (fig. 2 et 3). et du Nord soumettent depuis plusieurs taille norn1ale.
La France dispose d'un banc d'essais années les appareils vendus sur leur Le paradoxe déjà évoqué de l'irriga-
des asperseurs et des canons d'arrosage marché à des essais officiels. Il en est tion gravitaire consiste en ce qu'elle
unique en Europe et a développé ré- ainsi en Allemagne Fédérale, en Hol- rencontre au niveau de la mise en
cemment des techniques de traitement lande, au Danemark et en Suède. La ceuvre beaucoup de difficultés pour la
des résultats sur ordinateur pour en dé- Suède constitue un bon exemple du rôle fonnation des agriculteurs non instruits
duire les performances des canons auto- que la mécanisation des arrosages peut par la tradition, ce qui la rend extrême-
moteurs. Les possibilités qui s'offrent jouer dans le développement des irriga- n1ent difficile à moderniser dans les
pour réaliser des essais au vent dans les tions dans un pays industrialisé. Les zones d'irrigation traditionnelle. Il se-
grands espaces cultivés et exposés au essais officiels très poussés réalisés dans rait donc dangereux, comme certains
vent du Sud-Ouest permettraient d'étu- ce pays et en particulier les essais de <1 écologistes » auraient tendance à le
dier un problème important pour les turbine, constituent un encouragement faire, de lui décerner par avance un bre·
appareils de ce type. Cet ensemble de indéniable à la fabrication et à la vente vet de <{ technologie douce )) sans faire
moyens d'essais pourrait être utilisé à locale d'équipements de qualité. l'effort d'aller voir sur place de quoi i1
l'échelle européenne, comme il est vrai- L'attention des pouvoirs publics s'est retourne. Avec leur empirisme habituel,
semblable que le seront dans l'avenir les portée en France sur le problème du les A1néricains ont d'ailleurs largement
moyens d'essais de tuyaux en polyéthy- tuyau en polyéthylène soumis sur ces développé, ces dernières années, les sys-
lène de l'Université Technique de Ha- appareils, à des efforts inhabituels que tèn1es d'irrigation gravitaire par tuyaux
novre. le niatériau courant ne permettait pas à vannettes plus ou moins automatisés
d'encaisser. L'industrie chimique euro· et poursuivent leurs recherches dans
Il serait inexact de limiter aux
rampes pivotantes, aux arroseurs géants plusieurs directions (télécommande de
et aux canons automoteurs le phéno- (1) - Une rampe d'asperseurs est consti·
vannes superficielles en arrosage par
mène récent de la mécanisation des ar- tuée par des tuyaux en aluminium, en acier grands bassins à fond plat, adduction
rosages dans les pays industrialisés. ou en plastique à raccords rapides sur laquelle gravitaire par conduites enterrées en
L'exemple de la Hongrie est très signifi- sont branchés des asperseurs rotatifs (tous les vergers et piquages sans pression au ni-
catif car ce pays connaît les mêmes pro- l l, 18 ou 24 m) On n'irrigue qu'une partie du veau de chaque arbre etc.).
blèmes de main d'œuvre agricole bien champ avec ce matériel mobile, faisant « tour- Il faut enfin mentionner l'irrigation
ner» la rampe en 8 à 10 jours entre deux ar·
que régi par une économie planifiée. rosages successifs au même endroit. Il existe au goutte à goutte, appelée aussi micro-
Une part du marché hongrois a été ré· bien entendu beaucoup de variantes à ce irrigation, dans laquelle le système d'ar-
servée aux importations de matériels schéma de principe, l'une d'entre elles utili- rosage est fixe, l'eau étant apportée aux
d'irrigation, ce qui a permis aux techni- sant une <1 couverture totale i> de conduites en cultures par l'intermédiaire de rampes
ciens de l'irrigation d'étudier systémati- P.V.C. avec des asperseurs déplaçables. en charge (environ 1 bar) et de gout- 63
teurs à faible espacement et à débit li- s'il n'est pas certain du succès. La plu- micro-irrigation appelée couramment ir-
mité (de 2 à 10 l/h en général). La mise part du temps, il serait donc indispen- rigation au goutte à goutte, dont la
au point de cette technologie vers 1970 sable d'essayer certains systèmes à technologie fait largement appel à l'au-
doit beaucoup à Israël et à l'Australie. l'échelle d'exploitations pilotes créées tomatisation. Des développements plus
Les systèmes de goutteurs et de vannes sur place pour tester la mise en œuvre récents de l'irrigation par aspersion et
automatiques connaissent maintenant et l'entretien des équipements ainsi que de l'irrigation gravitaire possèdent en
de très nombreuses variantes à l'échelle le programme de cultures du périmètre commun avec la micro-irrigation, la ca-
mondiale. dans des conditions proches de l'exploi- ractéristique de permettre des arrosages
tation ultérieure. Cette exploitation à à intervalles rapprochés.
La nlicro-irrigation exige toutefois
une échelle plus vaste devrait faire elle- La France contribue au développe-
une très bonne filtration et a vu jusqu'à
même l'objet d'un suivi permanent par ment en cours tant par l'extension des
présent son développen1ent limité aux
des techniciens locaux afin d'aider aux irrigations, notamment sur le maïs, que
cultures maraîchères et fruitières auprès
adaptations techniques nécessaires. par l'exportation d'équipements et l'as-
d'agriculteurs suffisamment avertis pour
D'autres aspects du développement sistance technique outre-mer. Étant
utiliser des équipements sophjstiqués et
donné la part relativement modeste de
valoriser un investissement important des irrigations comme celui du pom-
l'irrigation dans l'agriculture française,
par des rendements élevés. Dans la me- page solaire ou celui de l'irrigation fer-
il paraît nécessaire que les pouvoirs pu-
sure où ces conditions d'emploi sont tilisante pourraient être intégrés dans
blics chargés d'engager ou de favoriser
réunies, cette méthode présente d'incon- de telles opérations de développement
des opérations de ce genre dans les
testables avantages sur l'irrigation gra- en fonction des conditions locales.
pays en voie de développement, dispo-
vitaire et l'irrigation par aspersion :
Au terme de cet exposé, on convien- sent d'un système permanent d'infor-
économie de main d'œuvre, souplesse
dra que le problème millénaire de la va- mation sur le développement des tech-
d'emploi, bonne adaptation à l'utilisa-
lorisation de l'eau pour la production niques d'irrigation dans le monde. Un
tion d'eaux salées, économies d'eau et
agricole a donné lieu dans les 60 derniè- tel dispositif d'information pourrait
d'énergie. La France a sa part dans le
res années, à un prodigieux développe- également rendre des services à l'indus-
développement de cette technique et
ment des techniques d'irrigation dans trie. Il pourrait d'autre part s'avérer
contribue actuellement au développe-
les pa:vs industrialisés en débordant le utile de mettre à contribution dans cer-
ment de certains systèmes. Il paraît
chan1r d'application de l'irrigation gra- tains cas des moyens techniques spécia-
souhaitable d'évaluer et d'étendre l'ex-
vitaire traditionnelle sous la pression de lisés qui interviendraient au stade des
périence acquise sur les systèmes d'irri-
l'évolution sociale et technique du études préliminaires et du suivi des opé-
gation au goutte à goutte en France, en
monde agricole. La recherche de techni- rations comme le font déjà en France,
particulier pour ce qui concerne la mise
ques pouvant s'affranchir d'une topo- depuis une dizaine d'années, quelques
en œuvre.
graphie irrégulière ou de sols trop légers unités de 1' Administration au titre de
Nous voici maintenant revenus au ainsi que les problèmes de disponibilité l'appui technique qu'elles apportent sur
point de départ : à quoi tout cela peut- en main d'œuvre ont permis à l'irriga- demande des Services Extérieurs, à des
il être bon pour le développement des tion par aspersion de connaître un dé- réalisations d'Hydraulique Agricole et
pays du Tiers Monde? Il est clair que veloppement spectaculaire qu'illustrent de Génie Rural. L'État pourrait ainsi
compte tenu de la variété des techni- les techniques très variées d'arrosage exercer un contrôle technique, en ap-
ques actuelles d'irrigation dans le mécanisé. La recherche d'un contrôle portant dès le départ sa propre contri-
monde, aucun pays développé ne peut plus étroit des apports d'eau sur des bution à des opérations de mise en va-
se permettre de répandre une technique cultures riches a conduit, il y a une di- leur qui mettent en jeu des fonds
dans un pays en voie de développement zaine d'années, à l'introduction de la publics.
64
LA DESERTIFICATION
ET
SES REMEDES
« Le poisson pris dans la nasse
commence à réfléchir »
(proverbe africain)
Parmi les raisonnements économi- geants et créateurs d'opinion d'un peu un moyen de satisfaire les besoins fon-
ques discutables, il y a ceux fondés sur partout, il leur faudra abandonner... damentaux de l'homme» (15).
le P.N.B. et ses éléments constituants. l'idée absurde et fausse que la crois- Une première étape consiste, pour
Si une marchandise subit beaucoup de sance de la prospérité de quelques-uns nous habitants des pays tempérés et in-
déplacements, donc de frais de trans- entraîne ... celle de tous. Généralement, dustrialisés, à reconnaître qu'il s'agit
ports et autres services, ... le P.N.B. a elle entraîne au contraire.... la dégrada- d'une lutte complexe et diverse et que
augmenté et pourtant il n'y a pas plus tion des conditions de vie du plus grand les solutions ne résulteront pas d'une
de biens à partager. Le paysan des Ii.ombre. La croissance du p.n.b., no- «science simpliste».
zones sèches, pauvres et à risque de dé- tamment, n'est la preuve d'aucune amé- Au Rajas than la pluviovisté varie, le
sertification se voit proposer un prix lioration du niveau de vie des masses plus souvent, entre 310 et 390 mm.
très bas pour ses produits (c'est-à-dire laborieuses. C'est ce qu'a très bien Dans ce \ quasi-désert vivent, sur
pour son travail). Par contre, tout le compris, et répète à satiété un analyste 150 000 km', 46 hab./km'. les études
système est organisé pour que, à ce économique et financier aussi averti que de l'institut des zones arides de Jodhpur
prix, viennent se rajouter les prix des Mac N amara i>. (16) ouvrent des voies à l'espoir... mais
divers services, eux à des niveaux très que de conditions à réunir concernant
comparables (ou supérieurs !) à ceux 7. UNE LUTIE COMPLEXE l'homme, les techniques ... et le finance-
que l'on aurait en pays industrialisés. - Et maintenant, ayant tenté de pren- ment!
Ainsi en pays pauvres on trouvera une dre conscience des causes, sait-on ce LeS études et programmes expéri-
masse de gens vendant à un prix très qu'il faudrait faire? mentaux montrent la nécessité « de
bas leur travail (et ayant de très faibles Lors de la conférence de Nairobi sur mieux comprendre les conditions loca-
moyens de pression sur l'Etat) et un ce sujet en 1977, il est apparu claire- les» (17) ... , «de ne jamais oublier que
autre groupe, assurant les services (ad- ment que « le Plan d' Action » est à la réalité est une, avec des interactions
ministration, commerce) et vendant son mettre en œuvre non comme une simple entre ses aspects à première vue les plus
travail à des taux s'apparentant à ceux campagne contre la désertification ... éloignés, ce qui suppose une relation
pratiqués ici. C'est ce que Pierre Garri- mais comme un élément essentiel du constante entre les divers spécialistes. »
gues rappelait (14): «Quant aux diri- processus général de développement et (18) 67
Les projecteurs ont besoin d'une stra- 8 .... A MAITRISER PAR LES HABI- Touaregs de Tchirozerine. Après la ré-
tégie cohérente d'action. Pour cela, TANTS. colte dérisoire de 1975, un vieux avait
voici des critères inspirés d'un texte de osé dire : <J Ou bien nous nous exilons
Jacques Chonchol (19) : - Puisque cette lutte est complexe, elle au Nigeria ou bien nous mourons de
- donner une priorité considérable aux doit être maîtrisée par les habitants fain1, ... à moins que... ! » Encouragés
cultures vivrières. eux-mêmes. A partir de 1973, au Niger par un jeune agriculteur ardéchois, ils
- appuyer le type d'industrie et d'artisa- et au Mali, des tribus nomades ont pro- ont réalisés dès 1976 et 1977 des petits
nat qui confortera ce vivrier, posé des ensembles de mesures pour barrages dans le lit et des banquettes
- veiller au respect du droit d'accès à la prévenir de telles catastrophes : par antiérosives sur les versants, sans
terre, exemple, gestion des pâturages pour engins. grâce à leur courage et à un fi-
- développer les équipements utiles au éviter la sur-exploitation, sous la res- nancement des journées de travail par
monde rural, (stockage et conservation ponsabilité des tribus (qui en avaient un organisme extérieur.
des produits notamment) ... les plus dé- été dépossédées à l'époque coloniale), La formation et l'information joue-
centralisés possibles, réensemencements en variétés dispa- ront un rôle essentiel visant en priorité
- veiller qu'une juste part des surplus, rues, à l'aide de graines récoltées à les jeunes adultes des deux sexes, recou-
dégagés le long des flux commerciaux d'autres endroits ... rant aux langues locales, s'accrochant
de produits, fasse retollr aux régions aux thèmes de la vie quotidienne. Au
productives, pour améliorer la vie des Sénégal, «l'enseignement moyen prati-
ruraux, 9. QUELLE AIDE ? que » est une expérience bien intéres-
- développer des recherches agronomi- sante. En Haute-Volta, avec les groupe-
ques et industrielles auto-centrées, pour - L'aide (mot bien ambigu) devra conti- ments <i Nam», une structure sociale
les besoins des populations rurales, et nuer, non pas l'aide qui sait (eux ne sa- traditionnelle devient la base d'un en-
non copiées de l'étranger. vent pas !), ni l'aide qui fait grand (ou- seignement rural renové, repensé par les
- accélérer la formation de cadres et de vrages selon nos normes et nos Voltaïques, ... et ce dans une région dif-
chercheurs pour une agriculture alimen- technologies), ni l'aide qui impose ses ficile où jusqu'à 70 % des jeunes
taire, projets ... mais l'aide appuyant, sans la hommes de certains villages émigrent
- développer le niveau cuturel et techni- défigurer, l'initiative méthodique locale. vers le sud du pays ou la Côte d'I voire.
que des ruraux. A Ouriamija au Niger (20), les gens La désertification c'est le fruit amer
- obtenir des «aides » qu'elles adoptent avaient entendu parler de l'aménage- issu de l'absurdité d'un monde gaspil-
ces critères. ment de leurs koris (vallées) par les leur.... à changer là-bas ... et ici !
OUVRAGES CITÉS
STAGES
Accueil de stagiaires, étudiants de niveaux et formations
variés, généralement de mai à septembre. Les
demandes doivent êtres adressées de préférence
plusieurs mois à l'avance.
RECRUTEMENT
Le développement des activités, notamment dans le
secteur exploration-production, ouvre des
perspective.s d'emploi. Des postes peuvent être
proposés à des ingénieurs ou cadres comme à des
agents de maîtrise et techniciens, dans les familles
professionnelles suivantes : forage, production,
services généraux, construction, administration. Tous les
postes à pourvoir impliquent la disponibilité à
l'expatriation et exigent la connaissance de la langue
anglaise. S'adresser au Service de Recrutement de la
Compagnie Française des Pétroles,
5, rue Michel-Ange,
75781PARISCédex16.
LE DEVELOPPEMENT
D-UNE TECHNOLOGIE ADAPTEE
AU TIERS MONDE=
une nécessité inéluctable
L
ment est dominée par un phéno- comme exemple à 1' ensemble du
mène de fond, d'ordre mondial, monde, avec la force d'une valeur cultu-
maintenant reconnu : les écarts, relle dominante, diffusée et favorisée
les disparités entre les nations, par les progrès des moyens de commu-
entre les peuples et entre les hommes, nication et d'information, parce qu'il
ne font que s'accroître. Estimé égal à est le seul existant aujourd'hui qui soit
six au début de ce siècle, le rapport techniquement avancé (c'est-à-dire inté-
entre le revenu moyen par habitant des' grant les acquis de la connaissance
régions industrialisées et celui des ré- scientifique universelle) et qui ait fait la
gions en développement était, il y a preuve à une échelle régionale (où il
quelques années, de quatorze. A l'ex- commence d'ailleurs à être discrètement
ception des quelques producteurs de pé- remis en question) d'une indéniable
trole, pour la centaine de pays en déve- réussite.
loppement la crise économique mon- * Président d'Innovation-Tiers Monde Au reste, s'engager dans une autre voie
diale a encore. accentué ce processus, (l.T.M.) suppose de pouvoir le faire et de dispo-
qui s'accompagne pour les .plus dés- par l'absurde, suggère : en supposant, ser de moyens inaccessibles à ceux qui
hérités et les plus démunis d'une pau- hypothèse en soi doublement utopique en auraient le plus besoin (les PVD
périsation croissante (le nombre des et invraisemblable, que la tendance soit consacrent à la R et D des sommes, de
hommes analphabètes, ou souffrant de renversée et, qu'alors que le taux d'ac- l'ordre de 0,1 % de leur PNB, en valeur
malnutrition, est en augmentation ; le croissement de leur population atteint absolue insignifiantes). Cela suppose
«noyau dur )) des PVD, encore récem- actuellement 2,4 % (soit un doublement même avant tout de savoir qu'une telle
ment au nombre de 25, dépasse au- à chaque génération), le taux de crois- entreprise est possible, alors que l'idée
jourd'hui la quarantaine, ...). La pour- sance du revenu par habitant des PVD est encore largement répandue que le
suite naturelle de cette tendance ne dépasse de un point celui des ipays in- progrès technique est \e fait du hasard
peut conduire, comme nous le consta- dustrialisés, il faudrait néanmoins théo- et de la nécessité et est un et indivisible,
tons, qu'à une aggravation des tensions, riquement un temps considérable (près ce qui était peut être encore vrai au siè-
se résorbant éventuellement en recours de 3 siècles) pour que l'écart existant cle dernier mais ne l'est absolument
à la violence et en conflits, certaine- soit compensé. Bien auparavant, la pro- plus du tout aujourd'hui où le champ
ment en d'innombrables souffrances duction, qui aurait visé un niveau mon- du faisable et du réalisable est considé-
humaines, et devant -laquelle un pays dial cent fois supérieur à ce qu'il est au- rable.
comme le nôtre ne peut que se sentir jourd'hui, se serait inévitablement Dans le même esprit, alors que le
pleinement concerné tant par devoir de heurtée aux contraintes naturelles de li- problème est d'ordre qualitatif, on peut
solidarité que dans son intérêt à terme mitation des ressources et de pollution s'interroger sur l'efficacité des « aides »
bien compris. de l'environnement. Notre technologie existantes et notamment des mesures
En termes stricts de croissance, c'est n'est pas « universalisable » et n'est pas envisagées dans le cadre du .Nouvel
à-dire dans le cadre du type de dévelop- en mesure ménze à ter1ne de répondre Ordre Economique International, qui
pement et de la technologie des pays dans l'ensemble aux besoins des pays en ont toutes pour but essentiel d'augmen-
avancés, ces écarts apparaissent être développen-1ent. ter quantitativement les moyens et les
dans l'ensemble totalement irratrapa- Il u'existe aucun avenir possible dans ressources dont peuvent disposer ces
bles, voire même irréductibles. C'est ce cette voie. C'est pourtant celle qu'ont pays, mais ne remettent pas en cause
que confirment en définitive les nom- choisie jusqu'à présent la quasi-totalité l'engagement dans un type de dévelop-
_breux modèles d'économie mondiale des nations du globe, en faisant appel à pement .dont nous savons dans l'ensem-
!llis au point ou à l'étude depuis le la technologie occidentale. ble qu'il est inadéquat. Le principal
coupd'éclat du Club de Rome en 1972 Le modèle de développement occiden- danger de ces mesures est qu'elles lais-
et qu'un raisonnement très simpliste, tal, avec ses standards de consomma- sent à penser qu'elles pourraient consti- 73
tuer en soi une solution, qu'elles don- ques d'obsolescence, à ce qu'on a ap- R et D associés) devra découler de la
nent bonne conscience et ne soient pelé «la stratégie du désir», notre tech- confrontation entre un champ de be-
qu'un faux remède, alors que, si elles nologie est, par ailleurs, par nature peu soins exprimés et des possibilités de
sont sans aucun doute souhaitables, réductrice d'inégalités et s'attache en réalisation concrétisées par des études
certainement nécessaires, elles ne sont réalité fréquemment à· créer plus de be- de faisabilité et d'analyse de la valeur
assurément pas suffisantes. soins qu'elle n'en satisfait. Son exis- au sein d'un dialogue le plus étroit
D'ailleurs, même à court terme, la tence non remise en question, par sim- entre utilisateurs et équipes pluridisci-
technologie des pays industrialisés ple «effet de démonstration », tend plinaires.
convient mal aux pays en développe- souvent dans les pays pauvres où les Les effets indu'its et les implications
ment. Elle est souvent difficilement besoins fondamentaux ne sont pas sa- de tous ordres (au plan économique, so-
«transférable ». tisfaits, à entretenir, voire à aggraver, cial, culturel, écologique, etc.) feront
Dans le secteur industriel les procé- l'accroissement séculaire constaté des l'objet d'une évaluation exhaustive qui
dés de production sont conçus dans les inégalités et des disparités. Contraire- devra être prise en compte lors des
pays avancés pour de grandes séries. ment à une opinion répandue, .dans ces choix qui s'avèreront nécessaires. En
Pour économiser la main-d'oeuvre, ils pays les effets sur l'environnement peu- aval, c'est dans les résultats, la diffusion
sont très largement mécanisés. Ils ré- vent être non-négligeables, même quel- locale des techniques, que devront être
pondent mal, ou souvent pas du tout, à quefois désastreux (désertüication, par mesurés et jugés, sans complaisance, les
la demande des pays en voie de déve- exemple). On citera également les efforts effectués . La réussite est égale-
loppement en moyens de production de exemples de conditions de travail in- ment conditionnée et liée à une action
petites séries, peu exigeants en capital, dustriel inacceptables (le Bureau Inter- générale de soutien, de suivi et de pro-
mais fortement créateurs d'emplois peu national du Travail regorge de dossiers motion de la Science et de la Techni-
qualifiés. à ce sujet) ; etc. que, dans ces pays, en matière d'ensei-
Les biens d'équipements et les pro- Notre technologie apparaît ainsi dans gnement, de formation, d'information,
duits de consommation durables dans l'ensemble inadéquate : à terme inopé- de documentation, de création de cen-
les pays avancés ont un niveau extrême- rante, quelquefois nuisible, dans tous tres de recherche, etc.
ment élévé de performances, mais ils ne les cas insuffisamment efficiente. On peut résolument être optimiste
sont pas prévus pour répondre à des sur cette voie d'approche, pour deux
conditions particulièrement sévères raisons essentielles. La première est que
d'utilisation. C'est tout le contraire qui le niveau qu'ont atteint la connaissance
est demandé dans les pays en voie de scientifique générale et les techniques
ne technologie adaptée, appro-
U
développement : exigences en perfor- de base est tel qu'à ce jour il a très par-
mances limitées, mais par contre impé- priée à ces pays, «sur mesu- tiellement été exploité. La seconde est
ratifs de faible consommation en éner- res)}, est à développer, d'une que les méthodes systématiques d'ex-
gie (celle-ci est peu disponible), de façon générale satisfaisant ploitation existent et ont déjà été mises
durée de vie et de fiabilité élevées et avant tout les besoins essen- au point. Le débarquement sur la Lune,
d'installation et de maintenance aisées. tiels et de base locaux, à fort coefficient vieux rêve réalisé de l'Homme, en a
Dans un autre domaine, celui du mi- de main-d'oeuvre, demandant peu de fourni une preuve éclatante en 1969.
lieu rural où vivent la majorité des ha- capital, transformant les matières et les L'enjeu à terme est lui aussi considé-
bitants de ces pays, il existe, dans de produits locaux, et conduisant à des rable. Il s'agit d'apporter toute notre
très nombreux cas, une immense de- équipements aux performances non su- aide aux pays en voie de développe-
mande non satisfaite pour une techno- rabondantes, consommant peu d'éner- ment pour leur permettre, à partir de la
logie «intermédiaire l), facilement ac- gie et ayant une maintenabilité, une du- connaissance scientifique universelle qui
cessible mais la plus moderne, rabilité et une fiabilité élevées. est le bien et l'héritage de toute l'huma-
permettant simplement à partir des ma- Une telle technologie, essentiellement nité, de définir leur propre technologie
tières premières et de la main-d'oeuvre parce qu'elle «colle aux besoins», mo- qui réponde à leurs propres besoins, à
locales de fabriquer les objets de bilise moins de ressources, est moins leurs propres aspirations et à leur pro-
consommation de la vie courante. Une « chère ». Elle doit permettre à ces pays pre culture, et cela de façon autonome
telle «micro-technologie )) n'est pas dis- de se développer non seulement mieux et indépendante. Il s'agit finalement de
ponible chez les pays avancés, évidem- mais plus rapidement. les aider à définir et à réaliser pleine-
ment parce qu'elle n'a pas lieu d'être. L'entreprise est considérable. Les ment leur destin.
pays en développement, qui sont évi-
Enfin le transfert «mimétique » de demment avant tout concernés, n'ont ôt ou tard, la nécessité d'un tel
notre technologie, même dans les cas a pas eux-mêmes dans l'ensemble, au- dessein apparaîtra inéluctable.
priori les plus bénéfiques, s'accompagne jourd'hui et de loin, l'infrastructure Il est du devoir et de l'intérêt
toujours à des degrés divers d'effets se- scientüique et technique nécessaire de notre pays, qui est ajourd'hui
condaires pervers, quelquefois tels que pour s'y consacrer. confronté avec acuité au pro-
le bilan global apparaît négatif. Mais il s'agit, comme nous l'avons blème de la meilleure insertion de son
L'« inflation technique 1>, c'est-à-dire vu, d'une entreprise urgente et qui appareil productif dans le contexte in-
la mise en oeuvre de projets surabon- concerne également les autres pays. 'ternational, de s'y engager le plus tôt
dants et mal utilisés, favorisée par des Elle relève ainsi spécifiquement de la possible.
causes multiples et génératrice de gas- coopération internationale et de la res- Face à l'immense demande poten-
pillages des ressources, est l'un des plus ponsabilité de pays comme le nôtre, qui tielle, qui ne fera que s'à.ffirmer, pour
fréquents. Au plan humain, les consé- en mettant à disposition à cet effet de nouveaux produits et de nouveaux
quences indirectes de l'apport de ces leurs propres moyens de R et D et d'in- procédés répondants et adaptés aux be-
techniques, répertoriées sous le vocable génierie, peuvent apporter une forme soins réels de ces pays, la France est
de « choc technologique » peuvent aller d'aide des plus efficaces. certainement l'une des nations les
de simples phénomènes de « stratifica- Dans le même souci d'efficacité né- mieux placées pour tenter d'y répondre.
tion sociale» jusqu'à des ruptures, voire cessaire, une stratégie de mise la plus Son potentiel scientüique et technique
la destruction des structures sociales ou directe de ia Science et de la Technique est indéniable et actuellement sous-em-
culturelles locales existantes. Se renou- au service de ces pays doit, à cette occa- ployé. Sa position politique, de puis-
velant le plus souvent par l'écrémage sion, être pratiquée. sance moyenne ouverte vers les pays en
des marchés et faisant un appel massü Dans tout projet, la conception (et la développement, la privilégie. Engager
74 aux méthodes publicitaires, aux politi- définition d'e programmes éventuels de dans une telle tâche une action signifi-
cative, en lui consacrant, affectée d'un Cette entreprise faciliterait pour d'économiser l'énergie et les matières
haut degré de priorité, une part corres- nous-mêmes, l'instauration de cette premières, de limiter la pollution et de
pondante des efforts nationaux d'aide « autre croissance)} à laquelle aspirent protéger l'environnement, d'améliorer
et de recherche, permettrait, entre nos sociétés industrielles, c'est-à-dire en l'emploi et les conditions de travail.
autres, à notre pays de bénéficier rapi- fait la mise en oeuvre également d'une Elle permettrait d'ouvrir la voie à un
dement d'un accroissement de ses ex- autre techndlogie plus efficiente et ré- progrès technique qualitativement da-
portations et d'une amélioration de pondant mieux à des exigences qui ap- vantage au service de tous les hommes
l'emploi. paraissent être primordiales, comme et porteur de plus de <ijustice ».
SÉNÉGAL, DAKAR,
UNESCO/PA PITTET.
75
COOPER ION
EXPORTATION
QUELQUES ADRESSES UTILES :
MINISTÈRE DU BUDGET
Direction Générale des Douanes et Droits Indirects
93, rue de Rivoli - 75001 PARIS 260.33.00
MINISTÈRE DE LA COOPËRATION
20, rue Monsieur - 75007 PARIS 567.55.90
MINISTÈRE DE L'ËCONOMIE
Direction du Trésor (Affaires internationales)
93, rue de Rivoli - 75001 PARIS 260.33.00
Direction du Trésor (Investissements Etrangers)
42, rue de Clichy - 75009 PARIS 874.05.72
76
l i
AVIONIQUE RADIO-
DÉTECTION COMMUNICATIONS
TRANSMISSION
SYSTÈMES
DIFFUSION
COMMUTATION
INFORMATIQUE
TÉLÉPHONIQUE
INSTRUMENTATION
SCIENTIFIQUE
COMPOSANTS
,
•
foUIPEMENTS
ET TUBES ELECTRO-HYDRAULIQUES
ÉLECTRONIQUES •
FORMATION DU PERSONNEL
DES CLIENTS
THOMSON-CSF
•
LMT- Le Matériel Téléphonique
•
LTT - Lignes Télégraphiques et Téléphoniques
•
SOCIETE DES TELEPHONES STE (THOMSON-ERICSSON)
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78
Carnet professionnel
Alfred Sauvy (20 S), a été nommé nommé Président de la BFIC (Ban- Christian Stoffaës (66), a reçu le
Président du Conseil scientifique de que· de Financement pour l'industrie prix de la fondation HEC pour son
l'Institut National d'Études démogra- et le Commerce). livre « La grande menace indus-
phiques. Richard Armand (57), ingénieur trielle n.
Pierre Cintrat (33), a été élu Prési- des Mines devient Directeur des Af-
dent de l'Union des Ports autono: faires sociales de PUK.
mes et des Chambres de commerce Jacques Darmon (59), quitte ses LE BUREAU
et d'industries maritîmes. fonctions de Directeur du Cabinet DES CARRIÈRES DE L'A.X.
Clàude Cans (41), Président Direc- du Ministre de !'Environnement et 12, rue de Poitiers
teur général de la CGEA (Compa- devient Directeur général du groupe 75007 PARIS
gnie Générale d'Entreprises Auto- Agache-Willot. 548.41.94
mobiles) a été élu Président de la Christian de Fenoyl (59), ingé- Le Général Kelm (X 33)
Chambre Syndicale Nationale des nieur des Ponts et Chaussées a été a été doté de moyens nouveaux
loueurs de Véhicules industriels. nommé adjoint au Directeur général Mals li lui faut toujours plus d'
Raymond Lévy (46) et Giibert des Postes. OFFRES D'EMPLOI
Rutman (47), dans le cadre de la Bernard Joseph (59), Président Pour des polytechniciens
réorganisation du groupe Elf-Aqui- du Directoire du groupement Fran- de tous Ages
taîne, assureront tous deux des çais d'Informatique va succéder à Les CAMARADES QUI PAR LEUR
fonctions de Vice-Président Direc- Alain Schlumberger (48) à la Prési- SITUATION PEUVENT DISPOSER
teur général. dence de la SERTI. DE TELS POSTES doivent les
Claude Janssen (50), a été Jean-Pierre Capron (62), Direc- faire parvenir au BUREAU DES
nommé Directeur général de la Ban- teur des Hydrocarbures au Ministère CARRIÈRES.
que Worms. de l'industrie a été nommé Commis- La solidarité polytechnlclenne
Claude Bébéar (55), Directeur gé- saire du Gouvernement adjoint doit jouer pour nos chômeurs.
néral des Mutuelles Unies, a été auprès de Gaz de France. 79
Informations diverses
Les économies
de matières premières
Ce mois-ci paraît un numéro des Prix
Annales dos Mines entièrement de la Société Générale
consacré aux économies de matiè- pour !'énergie
res premières. Sa préparation a été
coordonnée par M. Michel Clamen Les candidatures pour le Prix
(57) (direction générale de l'Énergie 1979 peuvent être adressées dès à
et des Matières premières, Ministère présent au Secrétariat du Prix, où
de l'industrie). elles seront reçues jusqu'au 15
Ce numéro, d'un intérêt excep- avril 1979.
tionnel, est à commander à GEDIM, Gala des Grandes Écoles D'un montant annuel de
19, rue du Grand Moulin, 42029 St- 250 000 francs, le Prix pour !'Énergie
Etienne Cédex (30 F l'unité pour les Cette Mnée, l'X présentera, au 3' est décerné chaque année par un
quatre premiers, 23 F pour les sui- Gala des Grandes Écoles qui aura Jury présidé par le Professeur Louis
vants). lieu les 1" et 2 mars 1979, au Neel, Prix Nobel, en vue de récom-
chapiteau Jean Richard (Porte de penser la meilleure initiative ayant
Colloque Gay-Lussac Pantin), un numéro de Cape et pour effet d'améliorer la situation
d'Epée. Nos camarades seront en- énergétique de notre Pays.
Le colloque organisé à l'occasion traînés par le maître d'armes de En plus du Prix principal, peuvent
du bicentenaire de la naissance du l'École. être décernés des Prix d'encourage-
chimiste Gay-Lussac, que nous Ce spectacle, qui réunira 300 étu- ment d'un montant global annuel de
avions annoncé dans la Jaune et la diants de plusieurs Grandes Écoles, 25 000 francs.
Rouge du mois de septembre se déroulera sans doute dans une Ouvert à tous, individus ou équi-
(n° 333) a eu lieu les 11, 12 et 13 dé- ambiance de fête extraordinaire. Ce pes, de toute appartenance, ce
cembre derniers. Le lieu choisi pour qui fit écrire à Jacqueline Cartier concours vise à encourager tous
cette célébration était l'École Poly- (dans France-Soir), au lendemain du ceux qui s'attachent à réaliser l'ob-
technique, à laquelle le savant fut 2° Gala : <1 Formidable ! ». jectif visé ci-dessus.
étroitement lié pendant ,43 ans, de Venez nombreux (prix des places: Tous renseignements seront
1797 à 1840, comme élève, comme 60, 90, 120 F). Pour tout renseigne- communiqués sur simple demande
répétitelj]r., et.comme professeur. ment, s'adresser à !'Association du au Secrétariat du Prix de la Société
Précédé d'une conférence de M. Gala des Grandes Écoles, 8, rue de Générale pour !'Energie, 29 boule-
Fétizon, Professeur de chimie à Lota, 75016 Paris. Téléphone vard Haussmann, 75009 Paris - tél :
l'École, le colloque a été présenté 504.97.29 266.54.00, poste 36.23.
par M. Pierre Aigrain, secrétaire
d'État à la Recherche, et s'est pour-
suivi par une série d'exposés et de
conférences des Professeurs Cross- AU SERVICE DU TRANSPORT INTERNATIONAL
land, G.reenaway, Knight (Grande-
Bretagne), Mandelbaum (États-Unis), FRANSMER S.A.
Guedon, T.H. Levere (Canada), Ler-
vig (Danemark), Jacques, Fétizon,
Transport International : Usines clés en mains. Société de Transports
Morazé, Theodorides, Talon, The- et de Transit dont le siège est à PARIS
pot, Todericiu, Rosmorduc, Hurwic, 74, rue de Rome - 75008 Parî,s.
de Mme Sadoun Goupil, de MM. Tél.: 292-26-01 - Télex: 280802
Fauconnier et J.P. Callot (France).
Une intéressante exposition de Agence Portuaire: 1, rue du Rempart - 59375 Dunkerque.
manuscrits, documents et appareils Tél.: (20) 66-19-95.
avait été organisée par la bibliothè-
Bureaux de liaison : à Grenoble (Isère) - Nouméa (Nouvelle Calédo-
que de l'École. Les participants fu-
nie) et Mani1le (Philippines).
rent réunis au cocktail offert par le
Général Saunier, Directeur général Nombreux correspondants dans le monde.
80 de l'École Polytechnique.
supérieur
TARIF ABONNEMENTS
10 NUMEROS/AN
Pour tous renseignen1ents :
ALLEMAGNE
BELGIQUE
CANADA
DOM-TOM
DM
FB
$C
FF
C.N.C.E
FRANCE
GRANDE BRETAGNE
PAYS BAS
SUEDE
FF
L
FL
KR
20, rue Treilhard
SUISSE
U.S.A.
Autres Pays
F$
$
FF 500 ou $120
75008PARIS
l.C.A. PUBLIE PLUS D"OFFRES
Tél 563.33.50
DE PLUS HAUT NIVEAU QUE
TOUT AUTRE ORGANISME.
81
1
Crédit X - Mines vous permet d'obte- 2. Prêts personnels à M.T. (2 à des éventuels prêts antérieurs, ne
nir des Prêts personnels à 14,25 %, 5 ans) doit pas dépasser en principe 30 %
et Immobiliers à partir de 11,25 % - Pour frais familiaux exceptionnels, de ses ressources.
(7 ans), 12,75 % (20 ans), assurance départ à la retraite, équipement im- - Assurance - Tous les prêts sont
comprise. mobilier. assortis d'une assurance décès in-
validité.
A. Crédit X • Mines
- Association créée en 1968 avec 3. Prêts immobiliers à M.T.
l'aide de l'A.X., sous la dénomination (3/7 ans) ou L.T. (10/20 ans):
du Crédit X, pour faciliter aux an- - Pour le financement de terrains à
Renseignements
ciens élèves de !'École Polytechni- bâtir, résidence principale (ou de fu-
et établissements
que, ainsi qu'aux veuves et orphe- ture retraite), résidences secondai-
des dossiers.
lins de camarades, l'obtention de res, travaux immobiliers importants
prêts destinés à faciliter la résolution dans résidence principale. Tous les renseignements néces-
de leurs problèmes. saires à l'établissement des dos-
- Apporte sa caution aux prêts solli- siers, ainsi que la préparation de
cités auprès des 4 organismes ban- ceux-ci peuvent être obtenus à :
caires (mentionnés en D ci-après) C. Règles générales applicables - Secrétariat de Crédit X - Mines,
avec lesquels l'Association est en à tous les prêts 12, rue de Poitiers, 75007 Paris, télé-
rapport. En retour, les banques inté- La garantie de Crédit X - Mines phone 222.76.27. responsable: M.
ressées consentent aux membres de est uniquement délivrée pour te Baudrimont (35) (ouvert aux heures
l'association un tarif préférentiel, compte de ses sociétaires: cotisa- habituelles de bureau, du lundi au
unique pour les quatre banques, tion annuelle de F. 25, - à F. 1 OO - vendredi inclus, sauf les mercredi et
dont les taux sont inférieurs à ceux selon la nature du prêt. vendredi après-midi).
qu'elles pratiquent avec leurs clients - 'Fonds de Garantie - La caution - Caisse Centrale des Banques Po-
ordinaires. donnée aux banques est appuyée pulaires (C.C.B.P.), 115, rue Mont-
L'Assemblée générale extraordi- sur un Fonds de Garantie constitué martre, 75002 Paris. Tél.: 296.15.15,
naire du 5 juillet 1978 a décidé d'ad- par prélèvement sur les sommes em- responsable : Mlle Contri (poste
mettre également comme bénéficiai- pruntées (1 % pour les prêts hypo- 504). (On peut aussi s'adresser dans
res des interventions de Crédit X les thécaires par exemple). Ce prélève- chacune des (21) Banques Populai-
anciens élèves des trois écoles des ment est restitué, à sa valeur res).
Mines, de Paris, de Saint-Étienne et nominale, lorsque le prêt est amorti, - Crédit Lyonnais, Agence T 420 -
Nancy. De ce fait, depuis cette date, cette restitution ne pouvant interve- 58, Boulevard Saint-germain, 75005
Crédit X est devenu Crédit X-Mines. nir que lorsque les comptes de l'an- Paris, Tél. : 633.02.30, responsable :
née N pendant laquelle a eu lieu M. Leroy (On peut aussi s'adresser à
B. Prêts consentis l'amortissement ont été approuvés chacune des Agences).
1. Prêts à C. T. (durée maximum : par l'Assemblée générale de l'année - Banque industrielle et Mobilière
2 ans): N + 1. Privée (B.l.M.P.) 37 /39, rue d'Anjou,
- achat de biens mobiliers : voitures - Montant maximum des mensuali- 75008 Paris, Tél. : 266.91.52, respon-
automobiles, équipement ménager, tés sable : M. Fleurat.
bateaux de plaisance ... L'ensemble des charges suppor- - Banque de financement immobilier
- relais dans l'attente de la vente tées par le candidat emprunteur du Sovac, 75008 Paris. Tél.: 292.12.12,
d'un bien immobilier. fait du, ou des prêts sollicités, ou Responsable : M. Barret.
82
-------------------------------·«·---------
11
a vie de l'association
Suite
au déjeuner
des Présidents
Le problème des relations entre Général Commandant, exposant les efficaces quoiqu'informels avec les
I' A.X. et les élèves ayant été, au vœux des élèves en certains domai- représentants des élèves.
cours du débat qui a suivi le déjeu- nes, et en particulier en matière La tâche n'est pas facile car ceux-
ner, évoqué par un camarade d'une d'enseignement à l'École. ci ont très souvent des préoccupa-
jeune promotion, nous avons reçu Les événements de 1968 ont inter- tions immédiates absorbantes.
une lettre d'un ancien ayant fait par- rompu la poursuite de ces contacts En conclusion, !'A.X. poursuit,
tie du Conseil de l'A.X. entre les qui, repris seulement en 1972, à l'ini- depuis plus de vingt ans, une politi-
années 60 et 75, lettre qui précise tiative du Président Jean Gautier, que de contacts permanents avec
quelques faits : ont été maintenus par la suite. les jeunes, et elle souhaite très vive-
Dès 1961, une commission de Notre camarade Gresse et notre ment que les manifestations de cette
cinq membres organisait trois ou Délégué général s'efforcent, malgré solidarité débordent le cadre utili-
quatre réunions réunions par an, les difficultés résultant de la coupure taire des demandes de prêts d'hon-
avec des élèves de deuxième année. créée par le service militaire avant neur ou d'aval de Crédit X ou d'in-
Un rapport annuel était adressé au l'entrée à l'École, d'établir des liens tervention du Bureau des Carrières.
COTISATIONS 79
Le Trésorier :
83
X - BREVETS ET LICENCE
Groupes X APPEL Convocations
AUX CAMARADES CONCERNËS
PAR L'INNOVATION de
Promotions
X-MUSIQUE
Créé en 1973, le Groupe, s'est
La prochaine réunion du groupe donné pour mission de rassembler
1919Sp
aura lieu le dimanche 18 mars tous les Camarades dont l'activité
1979, à 15 heuras, chez J.-F. Guil- professionnelle est concernée par la Déjeuner avec épouses, - jeudi
bert (66) 29, rue du Général-Deles- Propriété Industrielle et plus spécia- 15 mars, à 12 h 45 à la Maison des
traint, Paris 16"' lement par les Brevets d'invention. A X. Adhésions à BABINET, 41, rue de
ce titre, le Groupe constitue un point Villiers, 92200 Neuilly-sur-Seine. Té-
Création de rencontre pour les camarades de léphone 758.11.62
d'un groupe X CHINE la fonction publique (INPI, OEB, no-
tamment), les directeurs des servi- 1923
Au moment où la Chine s'ouvre ces Propriété industrielle des gran- Déjeuner le jeudi 22 février, à
plus largement à notre pays, la créa- des entreprises, les Conseils en 12 h 45, Maison des X.
tion d'un groupe X Chine me semble Brevets, les Spécialistes en conces-
s'imposer. sion de licences et transferts de
Sur le plan des affaires comme Technologie. 1924
sur le plan du tourisme culturel, les Depuis sa création, le Groupe Le prochain repas de ménages
contacts se multiplient, les visites s'est réuni régulièrement, en aura lieu le mardi 13 février, 12 rue
deviennent nombreuses et, par voie moyenne trois fois par an, tout en de Poitiers. Déjeuner à partir de
de conséquence, le volume d'infor- appliquant des Statuts très simples 12 h 30.
mations recueillies devient sans consistant à désigner chaque année
commune mesure avec ce qu'on un Président et un Vice-Président 1929
parvenait hier à savoir. qui sont ainsi permutés chaque Le déjeuner de promodu 50' an•
Des échanges d'informations année, ce qui est un gage de renou- niversaire aura lieu à Palaiseau, le
entre nous deviennent possibles, vellement des idées et de dyna- samedi 19mai1979, à 12 h 30.,
des réflexions aussi car l'événe• misme. Il sera précédé d'une messe célé-
ment est gros de conséquences. Cependant, un nombre croissant brée à 11 heures, à l'École.
Nous buts seraient autant cultu- de Camarades dont les activités pro- Une criculaire sera adressée en
rels qu'économiques, et la politique fessionnelles concernent l'INNOVA- temps utile, avec toutes précisions
en serait absente. TION (Responsables de Recherches nécessaires.
Je souhaite que de nombreux ca- ou Directeurs Techniques notam-
marades acceptent de coopérer à la ment) prennent part aux Réunions 1932 - 1933 - 1934
naissance d'un Groupe X Chine et du Groupe.
veuillent bien me l'écrire: Paul Borel Pot de l'amitié, le mardi 20 fé-
Les deux dernières Réunions ont
(26) Président d'honneur Fondateur vrier, à la Maison des X, à 18 h 30.
traité deux sujets d'actualité pour
de l'Association E.C.T.I. Inscriptions Roth Meyer (32) Deu-
!'Innovation :
bel (33) Aubert (34).
J. Delorme ( 48) « Le déposant
français face au brevet européen »
G. Maire (40) «La rémunération 1932
X-IRAN des inventions des salariés » Le prochain dîner « promo-ménages
A l'heure où les Pouvoirs Publics, X 32 ,, aura lieu le jeudi 22 mars, à
N19us .. avons reçu de nos camara- notamment sous l'impulsion d'André 19 h 30, à la Maison des X.
des du groupe X-Iran la lettre sui- Giraud (1944) engagent une relance
vante: active de !'innovation en France, et Inscriptions à Roth-Meyer.
où concurremment les législations
(( Le Groupe X-Iran s'est réuni pour
de brevets tant en France qu'inter- 1933
son magnan trimestriel, à l'Hôtel
nationalement (Brevet européen, Déjeuner de promo, entre Cama-
Crown-Hyatt de Téhéran, le jeudi 30
PCT) connaissent une évolution .rades, le samedi 24 mars, à la Mai-
Novembre 1978, avec les épouses. sans précédent, il semble particuliè-
Étalent présents (en dépit des cir- son des X, à 12 h 30. Inscriptions
rement soÙhaitable que le plus Deubel, 14 rue Angélique-Vérien,
constances) : Riahi (30) Pirnia (35),
grand nombre de camarades 92200 Neuilly-sur-Seine. Téléphone
Desvallées (44), Vidalenche ( 45),
concernés par l'innovation soient à 722.89.13.
Jolly (51 ), Rocroi (54), Parent (61 ),
même de profiter des activités du
Leservot (63), Voyer (63), Brugerolle
Groupe.
(64), Schreiber (64), Madjedi (64),
Ainsi, le Groupe pourra-t-il consti-
Baudiffier (66), Dorbec (66), Délivré
tuer un forum élargi où seront dé-
(67), Land rot (71 ), Régnier (71) -
battus les problèmes conditionnant
S'étalent excusés (en raison des
pour une bonne part l'avenir de la
circonstances) Hassibi (30), Zirakza-
France.
deh (30), Asfia (34), Aalam (37) Ferry
Tous les Camarades intéressés à
(46), Bernard (52), Soudavar (65);
recevoir les convocations pour les
Saleh (69).
réunions, sont donc priés de se faire
Vu les circonstances, l'ambiance connaître auprès de René Larguier
allait d'un optimisme modéré à un (ALPHACOUSTIC, Tour Nobel
pessimisme raisonné ... Bien cordia- Cedex n• 3 - 92080 Puteaux - Tél.
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cc SOIREE dansante :au Styx de la Maison des X, le mardi 27 février à 20 h 30: Soirée Chandeleur.
Participation aux frais : 15 F (inscription au secrétariat).
Diners.. Débats: le G.P.X. accueillera très prochainement: Yves Montand et notre camarade André Carrus
(16) qui nous parlera du tiercé dont il est le " père » et du monde des courses.
Cours de danse: la deuxième série de cours de danse reprendra le 21 Février. Inscription au sécrétariat.
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Carnet polytechnicien
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Le général Keim (33) est à la disposition des employeurs pour toute offre pouvant intéresser les polytechniciens. Les camarades à la
recherche d'une situation, même si cela n'a pas un caractère d'urgence, ont toujours intérêt à se faire connaitre, en écrivant ou en
téléphonant au Bureau des Carrières. S'ils le souhaitent, ils peuvent recevoir directement, et sans tenir compte des délais de publica-
tion, la liste des offres récentes disponibles au Bureau des Carrières.
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Secrétariat général de I' A.X.
1 7, rue Descartes,
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ment par chèque bancaire ou virement postal à l'ordre de l'A.X. (C.C.P. 21 39 F Paris). Quand les réponses doivent
transiter par l'A.X. joindre, à la demande d'insertion, des timbres pour les retransmissions. Prière de rédiger sur des
feullles séparées les annonces destinées à passer dans des rubriques différentes. Les petites annonces sont reçues
chaque mois jusqu'au 8 pour parution le mois suivant. Passé ce délai, nous ne pouvons plus garantir une insertion
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NORD », LE BLANC-MESNIL, RUEIL-MALMAISON, SAINT-QUENTIN-EN-
YVELINES, «VELIZY-VILLACOUBLAY».
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Bureaux de représentation :
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YORK, SAO PAULO, TEHERAN.
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legPé111ont
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CO.TE.BA et ses filiales:
CO.TE.BA Conseil et CO.TE.BA International
ont réalisé plus de trois millions de mètres carrés
de plancher dans dix pays.