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265 Implication Citoyenne Nature en Ville

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La collection « Connaissances » du Cerema

Cette collection présente l’état des connaissances à un moment donné et délivre de l’information sur un sujet,
sans pour autant prétendre à l’exhaustivité. Elle offre une mise à jour des savoirs et pratiques professionnelles
incluant de nouvelles approches techniques ou méthodologiques. Elle s’adresse à des professionnels souhaitant
Implication citoyenne et nature en ville
maintenir et approfondir leurs connaissances sur des domaines techniques en évolution constante. Les éléments
présentés peuvent être considérés comme des préconisations, sans avoir le statut de références validées.
Premiers enseignements issus
de sept études de cas en France
Implication citoyenne et nature en ville
Premiers enseignements issus de sept études de cas en France
Cet ouvrage regroupe sept retours d’expériences françaises (Lyon (3), Villeurbanne, Montpellier, Strasbourg,
Saint-Ouen) illustrant l’intérêt d’impliquer les citoyens dans les projets d’intégration de la nature en ville, et
propose quelques enseignements issus de ces démarches.
Leur analyse montre une grande diversité de moyens pour impliquer les citoyens. En effet, les démarches

Implication citoyenne et nature en ville Premiers enseignements issus de sept études de cas en France
peuvent être descendantes lorsque c’est la collectivité qui les sollicite, ou ascendantes lorsque ce sont eux
qui se mobilisent pour promouvoir des projets de nature sur l’espace public. Elles peuvent être facultatives
ou bien obligatoires au regard du Code de l’urbanisme, se situer en amont ou en aval d’une décision, etc.
Dans tous les cas, ces pratiques impliquent une circulation de l’information entre le maître d’ouvrage,
les partenaires et le public.
En se basant sur l’hypothèse que l’implication citoyenne sur les espaces publics de nature contribue à une
meilleure cohabitation des citadins et de la nature, les enseignements proposés dans le cadre de cet ouvrage
ont pour vocation d’aider les maîtres d’ouvrage et aménageurs à faciliter les conditions d’appropriation et
de compréhension des aménagements en faveur de la nature en ville.

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Fiche n°1 : La nature comme élément du projet Pour des espaces verts durables
d’aménagement urbain* 2011
2015
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Accessibilité pour les personnes à mobilité réduite Série de fiches 1 à 4*
APMR : de belles pratiques 2009
Fiche n°4 : Des espaces naturels accessibles à tous*
2015 La demande sociale de nature en ville
Enquête auprès des habitants de l’agglomération
Milieux humides et aménagement urbain lyonnaise
Dix expériences innovantes 2005
2015

* En téléchargement gratuit sur catalogue.territoires-ville.cerema.fr

Aménagement et développement des territoires, égalité des territoires - Villes et stratégies urbaines - Transition énergétique et
changement climatique - Gestion des ressources naturelles et respect de l’environnement - Prévention des risques - Bien-être et réduction
des nuisances - Mobilité et transport - Gestion, optimisation, modernisation et conception des infrastructures - Habitat et bâtiment

ISSN : 2417-9701
ISBN : 978-2-37180-114-1
Prix : 45 Euros

Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement - www.cerema.fr
Territoires et ville - 2 rue Antoine Charial - CS 33927 - 69426 Lyon cedex 03 - Tél. +33 (0)4 72 74 58 00
Siège social : Cité des mobilités - 25, avenue François Mitterrand - CS 92 803 - F-69674 Bron Cedex - Tél. +33 (0)4 72 14 30 30
Collection | Connaissances
Implication citoyenne
et nature en ville
Premiers enseignements issus
de sept études de cas en France

Cerema
Direction technique Territoires et ville
2, rue Antoine Charial 69003 Lyon
www.cerema.fr
Collection Connaissances

Cette collection présente l’état des connaissances à un moment donné et délivre de l’information sur
un sujet, sans pour autant prétendre à l’exhaustivité. Elle offre une mise à jour des savoirs et pratiques
professionnelles incluant de nouvelles approches techniques ou méthodologiques. Elle s’adresse à
des professionnels souhaitant maintenir et approfondir leurs connaissances sur des domaines
techniques en évolution constante. Les éléments présentés peuvent être considérés comme des
préconisations, sans avoir le statut de références validées.

Étude confiée au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et
l’aménagement (Cerema) par la Direction Générale de l’Aménagement, du Logement et de la Nature
(DGALN), bureau de l’Aménagement opérationnel durable et des ÉcoQuartiers, du Ministère du
Logement et de l’Habitat Durable, associant le Commissariat général au développement durable
(CGDD), avec la participation de Plante & Cité.

C’est un ouvrage collectif du Cerema : Céline Menétrieux (Cerema Centre-Est) a piloté la rédaction du
document, avec l’appui de Magali Poudevigne (Cerema Centre-Est).

Le travail de coordination de l’ouvrage a été assuré par Roland Cotte (Cerema Territoires et ville).

Les contributeurs sont :


- Cerema Centre-Est : Hélène Balazard, Céline Menétrieux, Magali Poudevigne, Cyril Pouvesle.
- Cerema Île-de-France : Nathalie Berthier.
- Cerema Méditerranée : Émilie Correa.

Nous remercions les membres du comité de pilotage ayant œuvré pour garantir la qualité de cet ouvrage.
La composition de ce comité de pilotage animé par le Cerema (Roland Cotte) et la DGALN (Florent
Chappel) était constituée de Marie-Christine Bagnati (CGDD) et Damien Provendier (Plante & Cité).

Cette étude n’aurait pas été possible sans l’ensemble des maîtres d’ouvrage des projets qui ont servi
d’études de cas : la Métropole de Lyon, la ville de Lyon, la ville de Villeurbanne, la ville de Montpellier,
la ville de Strasbourg, la ville de Saint-Ouen, ainsi que tous les autres interviewés (maîtres d’œuvres,
gestionnaires, associations, habitants,...). Qu’ils en soient tous vivement remerciés.

Enfin nous remercions également Marie-Christine Bagnati (CGDD), Florent Chappel (MLHD), Clarisse
Paillard (Nantes Métropole), Anthony Perrin (Ville de La Motte-Servolex), Damien Provendier (Plante &
Cité) ainsi que Cyril Pouvesle, Cecile Vo Van, Nicolas Wiplier (Cerema Territoires et ville) pour leurs
conseils avisés tout au long de la construction du document et/ou lors de sa relecture finale.

Les schémas, cartographies, photos sont issues des concepteurs de projets, des collectivités, des
associations et du Cerema.

Crédits photos
Page de couverture :
- Photo prise lors d’un débat public (main levée) : © Laurent Mignaux / MEDDE - MLETR
- Autres photos : © Cerema
Page 7 :
- La place Bellecour à Lyon végétalisée lors de l’animation Nature Capitale, du 17 au 19 juin 2011 : Bruno Daval
3

Sommaire

Introduction 5

Avant-propos 7
1. De quoi parle-t-on 8
2. Le choix des terrains d’étude 12

PREMIÈRE PARTIE
Impliquer les citoyens autour du sujet de la nature
en ville  : premiers enseignements 14
1. La sensibilisation à la biodiversité 16
2. L’implication des citoyens dans l’intégration de la nature au sein
d’un projet d’aménagement de l’espace public 23
3. La participation des citoyens au chantier et à la gestion
d’un espace public végétalisé 31
4. Éléments de conclusion et perspectives 40

DEUXIÈME PARTIE
Retours d’expériences 42
1. Parc Blandan à Lyon 44
2. Jardins collectifs à Saint-Ouen 58
3. Parc du Vallon à Lyon 72
4. Jardin Demain à Montpellier 86
5. Aménagements pour la biodiversité à Champvert à Lyon 100
6. Jardin Vaclav Havel à Villeurbanne 110
7. Végétalisation et gestion d’espaces désimperméabilisés
à Strasbourg 122

Glossaire 135
Bibliographie 137
Table des matières 139
5

Introduction

À l’heure où la démocratie participative devient une Ce document, se fondant sur des expériences
pratique largement expérimentée, les collectivités et diverses et en nombre encore relativement restreint,
maîtres d’ouvrages publics prennent conscience du ne prétend pas conclure de façon certaine à des
rôle des citoyens dans les décisions et actions muni- généralités. Il propose d’apporter des éléments de
cipales : celui de garantir l’adhésion du plus grand compréhension sur trois formes d’implication
nombre, et de permettre un ancrage dans la réalité citoyenne dans un projet de nature en ville identi-
au plus près des besoins des citoyens. Les espaces fiées au cours de l’analyse, à savoir :
publics, qui par définition sont des espaces acces- • la sensibilisation à la nature en ville et notamment
sibles à tous, sont particulièrement visés par cette aux enjeux relatifs à la biodiversité ;
nécessité d’associer les citoyens à leur devenir. • l’engagement des citoyens pour l’intégration de la
Ainsi, le maître d’ouvrage public, même s’il reste le nature au sein d’un projet d’aménagement de
décideur final quant à l’intégration de la nature sur l’espace public ;
les espaces publics, peut sensibiliser aux enjeux de • la participation des citoyens au chantier ou à la
biodiversité, informer sur la nature préexistante, gestion d’un espace public végétalisé.
écouter les attentes des citoyens, chercher à
comprendre les intérêts de chacun, et mettre à Les sept études de cas sur lesquelles sont basées les
profit l’expertise de chacun pour construire un réflexions concernent :
projet qui emporte l’adhésion de la majorité. • le parc Blandan à Lyon,
Les citoyens, quant à eux, ne sont pas seulement • le jardin Vaclav Havel à Villeurbanne,
bénéficiaires de la nature en ville mais se sentent • les aménagements pour la biodiversité à
aussi devenir acteurs du projet urbain. Leurs motiva- Champvert à Lyon,
tions s’intensifient pour réaliser des jardins partagés, • le parc du Vallon à Lyon,
participer aux décisions liées aux parcs, consommer • le jardin Demain à Montpellier,
des produits locaux, etc. Leur implication leur • la végétalisation et la gestion d’espaces publics
permet de prendre conscience des enjeux de biodi- désimperméabilisés à Strasbourg,
versité, mais également des divers usages de la ville, • les jardins collectifs à Saint-Ouen.
de la nécessité de faire des compromis, ainsi que des
contraintes techniques et administratives. Le présent document est organisé en deux parties.
La première est consacrée aux premiers enseigne-
À travers l’analyse de sept expériences d’implication ments sur l’implication citoyenne et la nature en
citoyenne, l’objectif de cet ouvrage est d’en commu- ville, qui portent aussi bien sur l’intérêt pour les
niquer les premiers enseignements aux maîtres différents acteurs de mettre en place une telle
d’ouvrage et aménageurs, afin de faciliter les condi- démarche que sur la manière de la développer.
tions d’appropriation et de compréhension La seconde comprend les différentes études de cas,
des aménagements en faveur de la nature en ville. présentées sous forme de fiches. Préalablement
De façon parallèle, l’ouvrage fournit des enseigne- à ces deux parties, un avant-propos présente une
ments méthodologiques et des outils susceptibles clarification sémantique et un descriptif de
d’être utilisés pour favoriser l’implication citoyenne la méthode employée, notamment à travers une
dans d’autres démarches de politique publique. explication du choix des sites étudiés.
Avant-propos
8 AVA N T- P R O P O S

De quoi parle-t-on ?

La nature en ville des espaces verts est plus appréciée par les ménages
que celle qu’apportent la proximité des commerces
Un espace de fraîcheur pendant la canicule, une ou l’accessibilité des transports en commun.
ambiance paysagère bucolique, des espaces de
loisirs en plein air, un cadre de vie sain, une gestion Les espaces de nature au sein de la ville occupent
efficace des eaux pluviales, ou encore la préserva- aussi bien le domaine public que le domaine privé.
tion voire un accroissement de la biodiversité... Dans le cadre de cet ouvrage, seuls les espaces
l’ensemble des services écosystémiques apporté par de nature publics sont traités. Ils sont ici consi-
la nature en ville est progressivement reconnu. Bien dérés dans toute leur diversité : composantes verte
souvent, les citadins demandent qu’une place accrue et bleue, présence d’une biodiversité remarquable
soit accordée à la nature en ville pour bénéficier de et/ou ordinaire, surface réduite ou importante, etc.
ces services1. Une enquête de l’Union nationale des Ainsi, les plantes grimpantes sur les trottoirs, les
entrepreneurs de paysage (UNEP), réalisée en janvier pieds d’arbres végétalisés, les ruisseaux accompa-
et février 2016, a révélé que plus de 8 français sur gnés d’un cheminement doux arboré, ou encore les
10 accordent une importance particulière à la squares et les parcs urbains, constituent autant
présence d’espaces verts à proximité de leur rési- d’éléments de nature contribuant à la qualité de vie,
dence. Cette même enquête indique que pour 6 et de milieux favorables pour une biodiversité
français sur 10 la création de nouveaux espaces urbaine.
verts doit être la priorité n°1 des municipalités. Une
étude de 20122 du CGDD, basée sur une enquête
logement de l’INSEE de 2006, souligne aussi que la
qualité du cadre de vie liée à la proximité et à l’état

1 Boutefeu E., La demande


sociale de nature en ville.
Enquête auprès des
habitants de
l’agglomération lyonnaise,
Editions PUCA-CERTU,
2005, 85 pages ;
Bourdeau-Lepage L.,
Vidal R., Nature en ville :
attentes citadines et
actions publiques, Editions
Editopics, novembre 2014.

2 Dron D., Blaudin-de-Thé C.,


CGDD, SEEIDD, Type
d’habitat et bien-être des
ménages, Collection
Etudes et documents,
n° 63, janvier 2012.

Jardin Demain à Montpellier ©Cerema


AVA N T- P R O P O S 9

Les espaces de nature apportent un ensemble de services écosystémiques à la population.


Jardins partagés à Saint-Ouen – Parc Blandan à Lyon ©Cerema

Toutefois, l’homme et les espèces animales et végé- habitudes et les représentations. Quelques-uns
tales ne cohabitent pas toujours sans heurts. Même si peuvent avoir l’impression que l’espace n’est pas
les citoyens sont en attente de davantage de nature géré, pas entretenu, qu’on « ne s’occupe pas » d’eux...
en ville, cela ne signifie pas que tous sont prêts à De la même manière, un projet de création de zones
accepter n’importe quelle esthétique ou n’importe humides en milieu urbain peut se heurter à certaines
quelle espèce animale ou végétale autour d’eux. réticences associées aux risques d’odeurs ou de
Par exemple, les pratiques des gestionnaires prolifération d’insectes, notamment des moustiques.
d’espaces verts (suppression des produits Notons que ces réticences peuvent être relativisées
phytosanitaires, gestion différenciée, arrosage car de plus en plus d’études montrent que les cita-
limité...) ne sont pas toujours comprises ni acceptées dins sont demandeurs d’espaces verts ayant un
par certains citadins davantage habitués à voir une aspect naturel (Özgüner and Kendle (2006), Muratet
nature horticole et maîtrisée. Ces pratiques (2015)). Il ne faut donc pas hésiter au sein des
induisent, en effet, des changements dans le projets à laisser des espaces où l’intervention de
paysage et parfois l’apparition de plantes jusqu’alors l’homme est minimale et où la végétation spon-
bannies (espèces spontanées communément tanée peut se développer.
appelées « mauvaises herbes » par ceux qui
fréquentent les espaces verts), qui bousculent les
10 AVA N T- P R O P O S

Rappelons aussi que la stratégie nationale de transi- Cette étude s’appuie sur l’hypothèse de départ selon
tion écologique vers un développement durable 2015- laquelle l’implication des citoyens pour les espaces
2020 engage les collectivités dans une démarche de publics de nature est un levier fort pour assurer le
meilleure prise en compte de la biodiversité en ville. développement de leurs connaissances sur la biodi-
versité, la concordance de l’espace avec leurs
La pérennité des espaces de nature en ville attentes, le sentiment de responsabilité qu’ils
dépend en grande partie de leur acceptation par peuvent éprouver concernant cet espace, etc. Cette
les citoyens. Rechercher l’adhésion de ces derniers hypothèse est d’ailleurs déjà largement plébiscitée
est donc essentiel, afin d’éviter les problèmes d’usage par de nombreux professionnels de l’urbanisme4 et
et d’appropriation des espaces publics pouvant se chercheurs5. Lier l’implication citoyenne et la nature
traduire par un coût social, économique et symbo- en ville est aussi un moyen de développer les
lique important pour une collectivité, voire une nombreux services écosystémiques associés aux
remise en question de la qualité du service rendu3. espaces publics végétalisés : activités récréatives,
activités pédagogiques, amélioration du cadre de
Dans ce contexte, la recherche d’une conciliation vie, bien-être des habitants, amélioration des rela-
entre les habitants et la nature en ville est devenue tions sociales, etc.
d’autant plus cruciale.
L’implication citoyenne pour la nature en ville
L’implication citoyenne pourra être :
et la nature en ville -initiée par une collectivité ou un maître
d’ouvrage public associant d’autres acteurs
Au sein de la ville, deux principales catégories de (institutions partenaires, habitants, associations,
citoyens sont à considérer, dans la mesure où leurs tissu économique, usagers...) dans les démarches
attentes peuvent être complémentaires ou de mise en place de la nature dans la ville, voire
contraires. Tout d’abord les usagers sont les dans la gestion de ces espaces ;
personnes qui utilisent l’espace de nature considéré. -à l’initiative des citoyens eux-mêmes, qui
Les habitants riverains, quant à eux, logent à demandent alors à la collectivité ou au maître
proximité de cet espace. Ces derniers peuvent être d’ouvrage public à être associés.
des usagers de l’espace de nature de proximité ou
d’un autre espace de nature ou ne pas l’être.

3 Zetlaoui-Léger J.,
L’implication des habitants
dans des micro-projets
urbains : enjeux politiques
et propositions pratiques,
IUP, Laboratoire Créteil,
2005.

4 « 88 % des collectivités ont


le sentiment qu’au cours
du dernier mandat, la
participation citoyenne a
permis d’accroître
l’acceptation des projets ».
Cf. Res publica, Gazette
des communes, Courrier
des Maires, Baromètre de
la participation dans les
collectivités locales, 1ère
édition, novembre 2013.

5 Schaeffer V., Ruegg J.,


Litzistorf-Spina N.,
Quartiers durables en
Europe : enjeux sociaux et
processuels, in Urbanisme,
Le Parc Blandan à Lyon a été créé suite à une forte mobilisation de riverains pour transformer
n° 371, 2010, p. 27-32. une friche militaire en un parc urbain ©Cerema
AVA N T- P R O P O S 11

L’implication citoyenne dans le domaine de la


nature en ville peut prendre différentes formes
et intervenir à différentes étapes de la vie d’un
projet. Dans le cadre de cet ouvrage, trois
démarches sont étudiées :

• la sensibilisation à la nature en ville et notamment


aux enjeux relatifs à la biodiversité : animations
pédagogiques, mise en place de panneaux
informatifs au sein des espaces... Ce type de
démarche « top down », initiée par le gestionnaire
de l’espace, le milieu associatif ou encore le
concepteur, engage peu les citoyens. Elle est
souvent le préalable pour créer une culture
commune et engager des actions plus
participatives.

• l’implication des citoyens dans la démarche


d’intégration de la nature lors d’un projet
d’aménagement de l’espace public, que ce soit
par de l’information (réunions publiques, visites de
sites...), par de la concertation (ateliers participatifs
avec recueil d’avis...) ou par de la coproduction.

• l’implication des citoyens dans la construction


ou la gestion d’un espace végétalisé ouvert au
public, lors de chantiers participatifs ou de l’en-
tretien collectif des espaces publics végétalisés.

Ainsi les citoyens sensibilisés peuvent s’impliquer


sur ce sujet à la fois en amont d’un projet d’espace
végétalisé (recueil d’informations, communication
de leurs attentes), mais également lors de la phase
de conception (avis sur les propositions d’aménage- Signalétique à Strasbourg ©Cerema
ments), lors de la construction de l’espace (partici-
pation au chantier), et lors de la vie de l’espace
(participation à la gestion, recueil d’informations
par des ateliers pédagogiques).
12 AVA N T- P R O P O S

Le choix des terrains d’étude

Afin de tirer des enseignements pertinents Ces études de cas ont été réalisées sur le territoire
concernant l’implication citoyenne dans les projets de l’agglomération lyonnaise, mais également à
de nature en ville, le choix a été fait de retenir sept Montpellier, à Strasbourg et à Saint-Ouen en Île-de-
espaces de nature en France dans des agglomérations France : le parc Blandan à Lyon, le jardin Vaclav
importantes. Ce panel a été constitué en recherchant Havel à Villeurbanne, les aménagements en faveur
une variété dans la répartition géographique sur le de la biodiversité à Champvert à Lyon, le parc du
territoire national (4 régions différentes), mais aussi Vallon à Lyon, puis le jardin Demain à Montpellier,
une représentativité quant à la taille des espaces de les espaces désimperméabilisés à Strasbourg, et les
nature (de 2 m² à 17 ha) et à leurs modes de jardins partagés des Docks à Saint-Ouen.
conception, tout en veillant à ce que chacun d’entre
eux présente une véritable prise en compte de
l’enjeu de biodiversité. L’ensemble des sites balaye
par ailleurs les trois formes de participation
citoyenne distinguées en introduction.

Parc Blandan Jardins collectifs Parc du Vallon Jardin Demain Champvert Jardin Vaclav Espaces désim-
des Docks Havel perméabilisés

Localisation Lyon Saint-Ouen Lyon Montpellier Lyon Villeurbanne Strasbourg

Surface 17 ha 5 000 m² 11 ha 1 200 m² 4 ha 2850 m² De 2 à 150 m²

Construction Petit jardin en


Réhabilitation
Parc urbain créé Jardin coproduit d'équipements milieu urbain Petits espaces
Jardins collectifs d'un parc avec
Description avec une forte avec les habitants faunistiques avec dense, où une éparpillés dans la
situés dans un parc recueil des avis
du projet mobilisation des sur un ancien des habitants sur concertation a été ville et gérés par
d'un quartier récent des habitants à
riverains parking un espace vert menée avec les les habitants
toutes les étapes
préexistant habitants

Sensibilisation X X X X X X X
Implication des X
habitants dans (projets parfois
X X X X X
l'élaboration à l’initiative des
du projet habitants)
Implication des
habitants dans
X X X X
la construction
et/ou la gestion
AVA N T- P R O P O S 13

Des visites de terrain, des observations, des nécessaires pour proposer une analyse de
micros-trottoirs sur place, ainsi que des chaque cas. La comparaison de ces études
entretiens spécifiques avec des acteurs clés de cas a permis de tirer des enseignements
(maître d’ouvrage, maître d’œuvre, présentés dans la première partie du
gestionnaire, partenaire, usager...) ont été document.

Localisation des 7 études de cas

Zoom sur les 4 sites de Lyon et Villeurbanne

© Géoportail
P R E M I È R E P A R T I E
Impliquer les citoyens autour
du sujet de la nature en ville :
premiers enseignements
16 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

1 La sensibilisation à la biodiversité
Les attentes des citoyens sur le thème de la nature en 1.1 Sensibilisation :
ville sont multiples : ils envisagent les espaces de de l’information à l’appel
nature comme des lieux de détente, de promenade, de à l’action
loisirs, de rencontres, de bien-être spirituel, mais aussi
comme des espaces de rafraîchissement lors des cani- Afin de sensibiliser les citoyens à la nature en ville et
cules, de refuge pour la biodiversité, etc. à la biodiversité, différents moyens existent, de la
Cependant, la connaissance des bienfaits produits par simple transmission d’informations à des démarches
la présence de la nature en ville peut encore progresser induisant une plus forte implication des citoyens
et être partagée par tous. La biodiversité, entre (ateliers pédagogiques, sciences participatives, etc.).
autres, est très peu connue. De plus, elle est
souvent une préoccupation secondaire pour les Dans un premier temps, la transmission d’informa-
citoyens, face à des enjeux environnementaux tions est essentielle pour donner aux citoyens des
plus globaux6. éléments de connaissance et de compréhension des
enjeux liés à la nature en ville et à la biodiversité.
Or la biodiversité est particulièrement mise à l’épreuve Cependant, bien qu’elle puisse susciter une prise de
en milieu urbain : mise en place de surfaces imper- conscience, cette démarche n’a généralement pas
méables, construction de clôtures et de voiries en vocation à ouvrir des pistes pour faire évoluer l’état
ignorant les déplacements de la faune, assèchement actuel. Elle se limite souvent à une simple mise à
de zones humides (mares, etc.), suppression des tas de disposition de connaissances. Aussi, pour aller
bois mort ou de feuilles mortes, chasse des espèces au-delà, il est important de développer des
indésirables (insectes, rongeurs). démarches de sensibilisation visant à favoriser
une prise de conscience collective des enjeux, et
Actuellement, les collectivités et les entreprises de ensuite à promouvoir des solutions. Pour cela, il
paysage et d’espace vert sont progressivement formées est possible de mobiliser les citoyens par le jeu, par
et sensibilisées à la biodiversité pour intégrer la nature la visite, par la parole, par la pratique... Il s’agit
aux projets urbains, et gérer de manière écologique d’amener les participants à faire évoluer directement
les espaces publics. Cependant, les particuliers, qui leurs comportements quotidiens, de susciter une
sont à la fois des usagers des espaces publics et des ouverture d’esprit, d’apporter des connaissances
gestionnaires des espaces privés, n’ont pas toujours nécessaires avant une participation encore plus
connaissance des enjeux liés à la présence de la nature forte. En effet, la réussite d’une mobilisation est liée
en ville, et notamment la biodiversité. La sensibilisa- au travail de sensibilisation qui l’a précédée ou qui
tion de l’ensemble des citoyens peut contribuer lui est associée.
à faciliter l’émergence de nouveaux modèles
d’aménagement de la ville donnant satisfaction à
la demande de nature et assurant la préservation
de la biodiversité.

6 Cormier L., Joliet F.,


Carcaud N., La biodiversité
est-elle un enjeu pour les
habitants ?, in
Développement durable et
territoires, vol. 3, n° 2,
juillet 2012, mis en ligne
le 12 juillet 2012.
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 17

La vision de la Métropole de Lyon...


« Le sujet de la biodiversité est émergent. Si les cette matière intellectuelle, des discussions et
réunions d’information sur ce sujet fonctionnent, réflexions sur le sujet se développent. Le dispositif de
c’est que les gens sont preneurs de matière intellec- sensibilisation mis en place est donc important.
tuelle sur le sujet. À partir du moment où on apporte Il faut démocratiser le sujet, le rendre ludique. »

1.2 Quels objectifs peut-on


donner à la sensibilisation
à la biodiversité ?
Pour le maître d’ouvrage Pour les citoyens
• améliorer l’acceptation de la gestion écologique • acquérir des connaissances
• améliorer la compréhension des particuliers concernant • bénéficier d’une meilleure compréhension de leur
les aménagements réalisés en faveur de la biodiversité environnement
OBJECTIFS

• susciter l’intérêt pour la biodiversité environnante • mieux gérer leurs espaces privés
• engager des changements comportementaux • avoir plus de plaisir dans leur pratique des espaces de nature
• rendre le sujet accessible à tous
• susciter une implication accrue dans la co-construction
et la gestion participative des espaces
• sensibiliser ses propres agents

“ Témoignage d’une habitante à Champvert


« Je suis venue à cette balade naturaliste pour découvrir la forêt dans la ville. J’ai appris plein de choses.
J’ai découvert avant tout cette nature que j’ignorais si près. »

1.3 L’espace de nature en ville,


lieu privilégié de sensibilisation
à la biodiversité
Un espace public qui héberge une diversité signifi-
cative d’espèces est un lieu privilégié pour des acti-
vités de sensibilisation. En effet, l’espace donne à
voir ce qu’est la biodiversité : par exemple les
panneaux informatifs ou les balades naturalistes
facilitent la prise de conscience de la présence de la
nature environnante, et permettent de lancer des
discussions autour du sujet.

Le parc Blandan à Lyon donne à voir ce qu’est


la nature spontanée, et les panneaux informatifs
sur le site sont un des vecteurs de sensibilisation
des usagers à l’intérêt des espèces spontanées,
et d’enseignement en donnant des éléments
pour identifier les espèces présentes.
©Cerema
18 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

1.4 Des enseignements des écosystèmes (cycle de l’eau, réseaux trophiques,


méthodologiques continuités écologiques...), ainsi que sur les enjeux
de la biodiversité et les menaces qui pèsent sur elle.
• Les sujets abordés D’autre part, elles peuvent apporter des propositions
de pratiques en faveur d’une préservation et
Pour permettre une prise de conscience par les d’une valorisation de la biodiversité, comme
citoyens des enjeux de la biodiversité, les activités de l’entretien des espaces végétalisés (pratiques de
sensibilisation peuvent apporter des connaissances jardinage écologique), le compostage, ou encore la
naturalistes sur quelques espèces (reconnaissance création d’équipements pour la faune (nichoirs,
d’espèces, cycle de vie...) et sur le fonctionnement hôtels à insectes, mares...).

À Champvert, dans le 5e arrondissement de Lyon...


À Champvert, la sensibilisation des habitants à la biodiversité s’est faite sur différents sujets et sous différentes formes :
• balades naturalistes (abeilles sauvages, capture nocturne d’insectes, etc.) ;
• construction de gîte à insectes dans le cadre du forum des associations ;
• conférence naturaliste sur les inventaires « faune-flore » réalisés sur le site ;
• mise en place d’un parcours pédagogique sur le site.

Une sensibilisation en profondeur est visée :


vulgarisation de la notion de trame verte et bleue
urbaine, apport de données naturalistes sur les
espèces pour lesquelles des équipements sont
créés (création de gîtes à insectes et nichoirs à
hirondelles encadrées respectivement par
Arthropologia et la LPO Rhône...), possibilité pour
les habitants d’avoir un nouveau regard sur leur
environnement quotidien et de proximité.

Aménagement d’une mare ©Cerema

• Gouvernance Les activités déployées s’appuient souvent sur des


activités déjà mises en place par d’autres organismes
Les collectivités sont généralement porteuses de la et notamment les associations de sensibilisation
démarche pédagogique. Selon leur organisation et à l’environnement. Ceci est généralement le cas
leur stratégie, elles peuvent intégrer des parte- pour les sciences participatives : les collectivités
naires à leur projet comme des associations natura- s’appuient souvent sur des programmes déjà
listes, des associations d’éducation à l’environne- élaborés, par exemple par le MNHN (Muséum
ment, des bureaux d’étude en communication. Les national d’histoire naturelle). Parmi ceux-ci, citons
personnels des services des espaces verts sont Vigie-Nature (http://vigienature.mnhn.fr/) : le
aussi des vecteurs de communication importants programme consiste à suivre les espèces communes
pour porter les messages pédagogiques adaptés. de la faune et de la flore (papillons, oiseaux, plantes
Leurs discours sont d’autant plus convaincants sauvages, etc.) à l’échelle nationale, grâce à des
qu’ils sont eux-mêmes formés et conscients des réseaux d’observateurs volontaires.
enjeux.
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 19

Enfin, certains citoyens peuvent devenir des sensibilisation des habitants à l’environnement en
acteurs relais qui diffusent de l’information à expliquant les pratiques de jardinage écologiques, et
leurs concitoyens. Par exemple, à Strasbourg, les en organisant des observations naturalistes avec
associations d’habitants en charge de la gestion l’aide d’habitants investis sur certains sujets (oiseaux
d’un espace public participent activement à la ou chauves-souris par exemple).

À Montpellier...
Une association d’éducation à l’environnement a été associée au
projet de transformation d’un parking en jardin. Cette association,
l’Atelier permanent d’initiation à l’environnement urbain (APIEU),
est intervenue en amont du projet pour créer et animer des micro-
débats, notamment sur la place de la nature et les jardins collectifs.
Elle est également intervenue en aval du projet, pour l’animation
d’ateliers autour du jardinage écologique sur le site.

Bac de jardinage ©Cerema

• Les outils Notons que les enfants sont une des cibles à
privilégier dans la mesure où ils sont les acteurs de
Les modalités peuvent être multiples et demain. Par ailleurs, ils sont généralement très
complémentaires : de la communication écrite, des curieux et réceptifs aux messages environnementaux.
animations pédagogiques, des conférences Il est donc important qu’ils acquièrent dès leur plus
naturalistes, des concours photographiques, etc. jeune âge des connaissances et qu’ils développent
Les outils cités ci-après montrent un panel des perceptions et une conscience écologique.
représentatif de ce qui a pu être constaté sur les
différents sites. Ils sont classés de manière
progressive, des démarches informatives aux
démarches exigeant plus d’implication de la part des
citoyens. Ces outils sont, bien entendu, à mobiliser À Strasbourg...
de façon adaptée aux objectifs poursuivis, aux Des panneaux pédagogiques ont été intégrés au
acteurs en présence, à la population cible. Le choix parc ponctuellement (14 sur la totalité du parc
des outils peut également être dépendant du coût de 11 ha). Demandés par les habitants lors de la
qu’ils représentent. Ce coût varie selon les moyens concertation, ils ont pour objectif d’informer sur
nécessaires à leur mise en œuvre : mobilisation des éléments de composition du parc ou sur sa
de personnels de la collectivité, recours à des gestion. En effet, ils évoquent notamment le
prestataires... cycle de l’eau, la réouverture du ruisseau, la
présence d’une chênaie et la gestion écologique
mise en place sur le parc.
20 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

Panel représentatif d’outils mobilisés pour la sensibilisation


Outils Objectifs Quelques conditions de réussite
Articles dans un journal Apporter de manière régulière des informations sur la nature Être pédagogique et accessible sur les données
local qui entoure les habitants. naturalistes présentées.
Diffuser largement le journal aux riverains.

Plaquette, manuel, guide Porter à connaissance des pratiques en faveur de la Être pédagogique et accessible sur les données
sur des pratiques biodiversité. naturalistes présentées.
Diffuser largement et gratuitement.

Articles sur un site Apporter de manière régulière des informations sur la nature Être pédagogique et accessible sur les données
internet qui entoure les habitants. naturalistes présentées.
Mettre à disposition des documents de communication et/ou Mettre à jour les informations, créer de nouveaux
de compréhension. articles régulièrement.
Expositions Donner un éclairage scientifique ou artistique sur une Rendre accessible l’exposition : lieu passant, souplesse
thématique liée à la nature. des horaires d’ouverture, etc.
Donner des éléments de connaissance variés : de
l’initiation aux propos scientifiques.
Panneaux informatifs et Apporter des éléments de connaissance sur ce qui est Entretenir les panneaux.
parcours pédagogiques directement visible. Proposer une signalisation avec un visuel accrocheur
Permettre une meilleure compréhension des aménagements pour inciter les habitants à lire.
réalisés en faveur de la biodiversité sur un site. Être pédagogique et accessible sur les données
SENSIBILISATION

naturalistes présentées.
Ateliers pédagogiques Mettre en pratique des connaissances. Créer une instance Proposer des horaires adaptés à un maximum de
d’échanges en petit groupe : associer un moment convivial à citoyens et communiquer sur la tenue de l’événement.
une activité liée à la biodiversité.
Balades et observations Apporter des éléments de connaissances naturalistes. Proposer des observations d’espèces populaires
naturalistes Éveiller le regard des citoyens aux espèces qui les entourent. (hérisson, papillons...), qui attirent une population
variée.
Susciter leur intérêt pour les espèces et milieux pour ensuite
les préserver.
Stands de sensibilisation Être en interaction directe avec les citoyens, pour leur Installer le stand lors d’événements festifs locaux.
apporter des connaissances et des réponses à leurs
questionnements.
Conférence naturaliste Apporter des éléments de connaissances naturalistes. Proposer des horaires adaptés à un maximum de
Être en interaction directe avec les citoyens pour créer du citoyens et communiquer sur la tenue de l’événement.
débat et répondre aux questions. Proposer un sujet d’intervention qui soit destiné au
grand public non naturaliste.
Sciences participatives Apporter des éléments de connaissances naturalistes. Mettre à disposition un protocole facilement
Faire participer les habitants à la montée en connaissances appropriable par des non-naturalistes.
sur les espèces présentes sur leur territoire. Accompagner les citoyens dans leurs observations par
Susciter leur intérêt pour les espèces concernées pour de la pédagogie préalable et en continu.
ensuite les préserver.
Réunions publiques Sensibiliser les citoyens aux enjeux de biodiversité globaux, Proposer des horaires adaptés à un maximum de
d’information préalables pour les éveiller aux enjeux liés au projet. citoyens et communiquer sur la tenue de l’événement.
à un projet Lancer des débats sur l’intégration de ces enjeux dans le
projet.

Pour aller plus loin : la galerie Acceptaflore, créée


par Plante & Cité, cite et illustre plus de 280 outils
portant notamment sur l’arrêt des pesticides et
les enjeux de nature en vie.
http://www.ecophytozna-pro.fr
Ces différents outils peuvent être triés par type
(exposition, brochure, animation de terrain, etc.).
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 21

Au Parc du Vallon à Lyon...


Des panneaux pédagogiques ont été intégrés au parc
ponctuellement (14 sur la totalité du parc de 11 ha).
Demandés par les habitants lors de la concertation, ils ont
pour objectif d’informer sur des éléments de composition
du parc ou sur sa gestion. En effet, ils évoquent notamment
le cycle de l’eau, la réouverture du ruisseau, la présence
d’une chênaie et la gestion écologique mise en place sur
le parc.

©Cerema

Près des jardins partagés à Saint-Ouen...


La mairie met en place des actions pédagogiques et
collectives autour du jardinage et de l’environnement à
proximité immédiate des jardins partagés, dans une serre
dédiée à cet effet.
Ainsi, lors de la fête de la Nature, un atelier photo sur le
thème de la biodiversité a eu lieu. Autre exemple : lors de
l’événement des 24 heures de la biodiversité, les citoyens
ont été sollicités pour inventorier les papillons présents sur
le parc, dans le cadre du programme de sciences
participatives nommé Vigie Nature.
http://vigienature.mnhn.fr/
Enfin, des ateliers menés par la mairie ont régulièrement
lieu : un atelier sur la connaissance des plantes sauvages Serre pédagogique ©Cerema
en ville, ou encore un autre sur la cueillette de fleurs dans
le cadre de la fabrication de cosmétiques.

Les sciences participatives


Un programme de science participative est un programme conduit en partenariat entre des observateurs
(citoyens) et un laboratoire ou une structure à vocation scientifique, visant à observer un phénomène dans le
cadre d’un protocole bien défini. Les citoyens sont ainsi mis à contribution pour collecter des données difficiles
à obtenir par d’autres moyens. En contrepartie de leur implication dans les programmes de science participative,
les citoyens sont accompagnés dans leurs interrogations sur les enjeux des phénomènes qu’ils contribuent à
mettre en évidence.
22 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

•U
 ne démarche qui prend du sens - lors d’événements festifs ponctuels, qu’ils
à tout moment de la vie de la cité soient liés à la biodiversité (24 heures de la biodi-
versité, fête de la Nature...) ou liés à la vie de
Il est judicieux de sensibiliser les citoyens à la nature quartier (forum des associations, fête locale...),
en ville : pour susciter leur intérêt.
- en amont et pendant un projet d’aménage-
ment lié à la nature, pour les informer sur les
enjeux locaux de biodiversité et ainsi mieux les
prendre en compte dans le projet ;
- de manière continue, pour les informer sur ce
qu’ils peuvent observer, sur le fonctionnement des
milieux présents, sur la gestion réalisée sur les
espaces végétalisés existants, ou encore sur leur
rôle en tant qu’acteurs de cette biodiversité ;

À Champvert, dans le 5e arrondissement de Lyon...


Des activités ont été organisées une fois par mois d’avril à octobre 2013 : balades naturalistes, construction d’abris
à insectes, fabrication de gîtes à chauves-souris, conférence naturaliste... en lien avec les associations de
sensibilisation à l’environnement (FRAPNA, LPO…). Cette programmation continue d’activités, prévues en soirée
ou lors des week-ends, a été l’occasion de sensibiliser un maximum d’habitants.
L’expérience a toutefois montré que la participation des habitants à ces ateliers a été plus forte lorsqu’ils ont été
menés lors d’un événement communal élargi (le forum des associations).
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 23

L’implication des citoyens dans l’intégration 2


de la nature au sein d’un projet
d’aménagement de l’espace public
La loi dite Voynet sur l’environnement (1999), la loi 2.1 La concertation :
«Solidarité et Renouvellement Urbain» (2000), la loi ni une consultation,
relative à la démocratie de proximité (2002) ainsi que ni une codécision
la charte de l’environnement de 2005, préconisent en
France l’implication systématique et le plus en Lors de l’élaboration d’un projet, le décideur peut
amont possible des citoyens et des associations associer les citoyens à la démarche selon plusieurs
dans l’élaboration des projets qui concernent leur niveaux d’implication7 :
cadre de vie. Ces textes n’évoquent plus seulement le • l’information : le décideur communique sur les
devoir d’information et de consultation de la popula- aspects nécessaires à la compréhension du projet ;
tion, mais font à présent référence à des nécessités de • la consultation : le décideur sonde l’avis des
concertation, voire de participation. Il s’agit donc citoyens sur un projet déjà largement défini ;
d’une implication plus conséquente des citoyens, • la concertation : un dialogue dynamique est établi
avec un engagement dans le temps pour participer à avec les citoyens, pour faire évoluer le projet en
l’élaboration du projet. fonction de leurs avis et de leur attentes ;
• et la co-élaboration : elle offre la possibilité aux
L’implication des citoyens au moment d’élaborer un citoyens de prendre part à la construction d’un
projet sur l’espace public permet de recueillir leurs projet.
attentes en amont, et de solliciter leurs avis sur le
projet lors de la conception. C’est un moyen de les La concertation n’est donc ni une information, ni une
faire participer à la mise en place de la nature dans consultation, ni une co-élaboration, mais bien un
leur ville. dialogue et une sollicitation d’avis auprès des citoyens
pour faire évoluer le projet.

D’après les articles L.300-2, L.103-2 et R.300-1 du Code


de l’urbanisme, sont obligatoirement soumis à la concer-
tation les projets urbains correspondant à :
- la création d’une zone d’aménagement concerté ;
- les projets et opérations d’aménagement ou de
construction ayant pour effet de modifier de façon
substantielle le cadre de vie, notamment ceux
susceptibles d’affecter l’environnement ou l’activité
économique, dont la liste est arrêtée par décret en
Conseil d’État ;
- les projets de renouvellement urbain.

Arnstein S., A Ladder of Citizen 7


Participation, in Journal of the
American Institute of Planners,
vol. 35, n° 4, juillet 1969,
p. 216-224.
24 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

Autogestion Ci-contre une des représentations de l’échelle


d’Arnstein, illustrant les différents niveaux d’impli-
cation possibles des habitants ou usagers dans la
Codécision ou cogestion avec réalisation d’un projet8.
les instances politiques
Coproduction à l’éloboration des projets
avec l’instance opérationnelle
Participation

Concertation éventuellement élargie


aux habitants-usagers

Consultation
Information

Les riverains du jardin Vaclav Havel ont fait


remonter lors de la concertation leur souhait de
conserver les arbres existants du site. Au final, les
arbres sains ont été conservés et valorisés.
©Cerema
2.2 Quels objectifs peut-on donner
à la concertation ?
La concertation présente plusieurs valeurs ajoutées
illustrées dans le tableau suivant :

Pour le maître d’ouvrage Pour les particuliers


• recueillir les attentes et avis des habitants pour une meilleure • faire valoir leurs attentes et leurs intérêts ;
appropriation finale de l’espace ; • mieux connaître les rouages d’un projet, et l’intégration
• définir un projet pertinent, concilier les enjeux de biodiversité de la nature en ville dans la conception d’un projet ;
avec ceux des usages et de la sécurité soulevés par les • s’approprier l’espace et s’impliquer dans la vie de la cité.
OBJECTIFS

habitants ;
• informer et sensibiliser autour des enjeux de biodiversité ;
• susciter l’implication et l’intérêt des habitants sur ce sujet,
susciter la mobilisation des habitants pour la future gestion ;
• permettre aux habitants de mieux comprendre les
aménagements réalisés et notamment ceux qui ne sont pas
accessibles au public pour des raisons environnementales.

8 Zetlaoui-Léger J.,
L’implication des habitants
dans des micro-projets
“ Témoignage d’une habitante du quartier de la Duchère à Lyon,
riveraine du parc du Vallon
« Je me suis inscrite dès le premier atelier pour faire entendre ma voix. Nous devions faire des propositions pour
l’avenir du parc. L’animateur donnait la parole à chacun, c’était convivial. J’ai appris beaucoup de choses sur
urbains : enjeux politiques
et propositions pratiques, l’aménagement urbain et paysager. C’est notre environnement pour demain qui se décide dans la concertation,
in Les cahiers de l’école
d’architecture de alors c’est important de participer. »
La Cambre, Bruxelles,
janvier 2005.
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 25

Le recueil des attentes des habitants concernant la nature en ville... quels résultats ?
À partir des sept retours d’expérience étudiés, les attentes des habitants concernant la nature peuvent être
rassemblées en cinq catégories. En effet, les habitants recherchent :
- une nature support d’usages : jardinage, sport, promenades canines, détente, promenade, pique-nique ;
- une ambiance « sauvage », dans une acception davantage anglo-saxonne, c’est-à-dire sans ordonnancement
rigide des végétaux ;
- un contact sensoriel avec la nature (voir, sentir, entendre, toucher) ;
- la présence perceptible d’animaux et de plantes locales ;
- la préservation du patrimoine végétal déjà présent (vieux arbres, anciens massifs...).

Le cas du jardin Vaclav Havel à Villeurbanne...


Dès la concertation, les habitants remarquent la difficulté de concilier les usages souhaités avec la préservation
des espèces présentes sur le site, puisque le jardin ne représente que 2500 m².
Toutefois un espace dédié à la biodiversité a été créé en plein centre du jardin, entouré par des espaces de jeux
et de détente. Cet espace n’étant pas clôturé, et le jardin étant de petite taille pour une demande forte d’espace
vert (milieu urbain très dense), les jeux et autres activités se répandent sur ce lieu de préservation. Les plantes
souffrent alors du piétinement, et la qualité écologique de l’espace est compromise.
L’écoute des attentes concernant les usages est donc importante (auprès de l’ensemble de la population,
notamment les assistantes maternelles ou les jeunes) pour concilier les futurs usages avec les objectifs de
biodiversité, au même titre que la sensibilisation à la biodiversité, qui peut faire prendre conscience aux usagers
du jardin de la nécessité de préserver l’espace.

« Les gens aiment le côté plus naturel mais c’est aussi plus riche écologiquement et plus économe, mais ça ils ne
le voient pas forcément » (propos du maître d’œuvre du jardin Vaclav Havel).

2.3 Des enseignements Une fois qu’il est désigné, le maître d’œuvre peut
méthodologiques également avoir un rôle important dans l’animation
de la démarche de concertation : écouter les attentes
• Les acteurs de la démarche des citoyens, expliquer les contraintes et les enjeux
d’intégrer les retours à la réalisation du projet.
L’implication des citoyens dans un projet n’est pas
possible sans une volonté forte du maître d’ouvrage, De même, le ou les gestionnaires ont vocation à
notamment des élus décideurs, qui doivent prendre en être associés à la démarche : leur intervention dès
compte l’avis de la population sur un projet avant qu’il l’amont d’un projet permet d’anticiper la gestion,
ne soit finalisé. Pour cela le maître d’ouvrage engage le notamment grâce à leurs conseils concernant le choix
dialogue, écoute et recueille les propos de la popula- des plantations, la localisation des espaces végétalisés,
tion, mais reste toutefois libre de ses décisions. Il peut, ou encore grâce à leur pratique de terrain, leur
par exemple, répondre négativement à des demandes, connaissance de la végétation locale et des sols, leur
dans l’objectif de respecter des contraintes notamment contact direct avec les citoyens et leur observation
techniques ou financières, voire en faveur d’aménage- des usages. Ils peuvent aussi souligner des problèmes
ments minimalistes. Ces choix doivent nécessaire- associés à la gestion des nouveaux espaces de nature
ment faire l’objet d’une explication et d’une en ville (charge de travail supplémentaire, connais-
communication à l’attention des citoyens et plus sances insuffisantes sur certains végétaux, etc.).
particulièrement de ceux qui se sont exprimés.
26 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

Des formations spécifiques pour certains agents niques de projet, afin de rendre le propos appropriable
peuvent s’avérer utiles. par les habitants, et dans le choix d’outils adaptés aux
personnes cibles et aux objectifs.
En complément de la présence du gestionnaire et en
fonction des besoins, le porteur de projet peut Enfin, les citoyens sont les acteurs primordiaux
s’entourer d’une expertise pointue (agents de la dans une telle démarche. Ils peuvent être sollicités
ville, associations naturalistes, bureaux d’études, etc.). par le maître d’ouvrage, ou peuvent faire valoir leur
En effet, des nuisances liées à un espace mal conçu ou intérêt à participer d’eux-mêmes. Outre les habitants
mal entretenu peuvent rapidement conduire à donner riverains, cela peut concerner les futurs usagers. Les
une mauvaise image de la nature en ville aux citoyens associations de citoyens sont privilégiées dans ce type
(voire à intensifier l’entretien de l’espace et ainsi nuire de démarche, car elles jouent un rôle important pour
à la biodiversité créée). le lien social, et représentent en général des intérêts
et des points de vue différents : associations de loca-
Par ailleurs, lors des rencontres de concertation, le taires, associations ou comités de quartiers, associa-
maître d’ouvrage peut se faire assister par des tions de parents d’élèves ou d’assistantes maternelles,
bureaux d’études ou des agences spécialisées de personnes handicapées, de commerçants ou d’en-
dans l’accompagnement des acteurs publics treprises, centres sociaux et maisons pour tous.
(évaluation, conception et/ou animation des Pour permettre la participation de l’ensemble des
démarches participatives). Médiateurs, ces interve- citoyens, des organisations logistiques particu-
nants peuvent à la fois avoir un regard extérieur sur lières peuvent être prévues : salles de réunion
les débats, mais aussi représenter potentiellement une accessibles à tout public, gardes d’enfants, horaires
aide précieuse dans la formulation des éléments tech- des activités en soirée ou pendant les week-ends, etc.

Au parc du Vallon à Lyon...


L’accueil et la garde des enfants ont été mis en place lors des ateliers de concertation, pour permettre aux parents
de participer plus facilement.

• Les outils

La participation des citoyens à l’élaboration d’un l’aménagement du territoire, de l’environnement, et


projet de nature en ville nécessite préalablement de également dans celui des méthodes de participation.
fournir à la population les éléments essentiels à la Une fois cette étape réalisée, l’implication en tant que
connaissance du site ainsi qu’à la compréhension du telle peut se réaliser avec toute la pertinence et l’ou-
projet et de ses enjeux. Elle implique aussi qu’ils verture d’esprit que cela nécessite pour que le
acquièrent des connaissances dans le domaine de dialogue soit constructif.
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 27

Outils Objectifs Quelques conditions de réussite


Conférences Sensibiliser les citoyens aux problématiques « nature Proposer des horaires adaptés à un maximum
et réunions en ville » du projet et aux autres enjeux locaux. de citoyens et communiquer sur la tenue de
publiques Ouvrir le débat sur la nature en ville. l’événement.
Susciter l’intérêt et l’envie de continuer à participer. Porter à connaissance des éléments de base sur la
nature en ville, et lancer des débats.

Visites de site Sensibiliser les citoyens aux problématiques « nature Proposer des horaires adaptés à un maximum de
en ville » du projet. citoyens.
Permettre un dialogue appuyé sur des illustrations Cibler une visite sur la nature en ville
concrètes de terrain. spécifiquement.
PARTICIPATION À L’ELABORATION D’UN PROJET

Enquêtes auprès Donner des éléments de programmation et Donner des éléments de connaissance sur la
des citoyens d’explication des enjeux locaux aux interviewés. nature en préalable aux questions.
Recenser les attentes des interviewés pour le projet. Faire un retour des résultats aux citoyens.

Diagnostics en Sensibiliser les citoyens aux problématiques « nature Horaires en soirée ou week-end.
marchant en ville » du projet. Choisir le parcours de manière à observer
Recenser les avis sur l’espace préexistant, et les différents lieux, aux problématiques de nature en
attentes d’aménagement de la nature. ville variées.
Faire un retour des résultats aux citoyens.
Ateliers Recueillir les attentes des citoyens avant la Horaires en soirée ou week-end.
programmation concernant la présence de nature. Prévoir un temps pédagogique pour expliquer le
Instaurer un dialogue, et expliquer les choix fonctionnement de l’atelier.
de conception ou de future gestion, et les Avoir des participants impliqués dans la durée
conséquences paysagères. (plusieurs ateliers).
Faire un retour des résultats aux participants.

Forum internet Recenser les plaintes et attentes par rapport au Diffuser largement l’url du forum, voire le
projet et à la présence de la nature sur les espaces combiner avec un site de la collectivité.
publics. Répondre aux questions déposées sur le forum.

Registres ouverts Recenser les plaintes et attentes par rapport au Informer les citoyens sur la présence des registres
en mairie projet et à la présence de la nature sur les espaces (bouche à oreille, articles dans les journaux...).
publics. Proposer un accès aux registres en soirée ou en
week-end.

Un diagnostic en marchant, c’est quoi ?


C’est une méthode d’observation d’un territoire (quartier, commune...), qui fait participer les citoyens, techniciens,
élus et autres acteurs du territoire, sous forme d’une balade pendant laquelle les éléments positifs et négatifs,
mais également les enjeux et problématiques du territoire sont pointés et discutés.
C’est donc un moment d’échange, où les habitants ont l’occasion de poser des questions aux techniciens, bailleurs
ou élus, d’où l’importance de la présence des différentes institutions identifiées sur le quartier. L’accompagnateur
est chargé pendant la balade de recueillir les ressentis des participants, et ensuite d’organiser un débriefing avec
l’ensemble des participants pour synthétiser ce qui s’est dit et aborder les thèmes non évoqués.

Dans le quartier de la
Duchère à Lyon, où se
situe le parc du Vallon,
un diagnostic en
marchant a été réalisé
par la collectivité.
©Cerema
28 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

Une enquête marketing territoriale pour l’élaboration du parc Blandan à Lyon...


Concernant le parc Blandan, il n’y avait pas d’usages préalables puisque le site n’était pas ouvert au public.
Il s’agissait en effet d’un site militaire interdit d’accès au public. Il n’était donc pas possible au maître d’ouvrage
de réaliser une étude sociologique des usages.
Pour pallier ce manque, il a mis en place une enquête marketing territoriale pour recueillir les attentes de la
population concernant un « parc urbain de loisirs ». Quatre catégories de la population ont fait l’objet d’enquêtes :
des familles, des seniors, des sportifs, et des jeunes. Cela a permis de croiser les attentes de chaque population
sur les usages et les types de nature souhaitée. Cette enquête a nourri les débats de la concertation, en apportant
de la matière mais aussi du recul par rapport aux intérêts particuliers.

Un ensemble d’outils de concertation déployés en amont du réaménagement


du parc du Vallon à Lyon...
Le parc du Vallon fait partie du projet de rénovation urbaine du quartier de la Duchère. Projet de grande
envergure, il bénéficie d’une équipe de deux personnes dédiée à la mise en place de la concertation pour le projet
de rénovation, dont le réaménagement du parc. De nombreux outils de communication et de recueil d’attentes
ont été créés pour le projet Duchère : la maison du projet de la Duchère qui favorise l’information et le recueil
d’avis au sein du quartier, un forum internet dédié, un comité de suivi participatif composé d’habitants, des
enquêtes « Écoute Habitant », etc.

Le parc du Vallon, qui subissait également une opération de rénovation, a bénéficié de la concertation déployée
pour l’ensemble du quartier. Toutefois une concertation spécifique a été créée. Lancée en 2006 lors d’une réunion
publique, elle s’est déroulée tout au long de l’élaboration du projet de réaménagement du parc : dès l’amont lors
de la programmation, lors du choix du maître d’œuvre, et lors de l’élaboration des plans du parc. Pour cela, le
maître d’ouvrage a organisé de nombreux ateliers.

En phase de conception, cinq ateliers thématiques ont été organisés, dont l’un qui portait sur « la faune, la flore
et la végétation urbaine ». À partir des présentations du maître d’œuvre sur le sujet, les citoyens ont pu apporter
leur avis et contribuer à l’ajustement du projet.

• Une communication préalable gories populaires étaient nettement moins représen-


tées dans les statistiques issues des collectivités9.
Les participants à l’élaboration d’un projet sont, bien
souvent, toujours les mêmes personnes qui se mobi- L’implication d’un panel représentatif de la population
lisent pour la vie de la cité : le public est donc très peu dans l’élaboration d’un projet peut être grandement
varié. En effet, en 2013, 85 % des collectivités décla- facilitée par des outils de communication écrite, qui
raient que les personnes de plus de 60 ans étaient informeront l’ensemble des citoyens sur la tenue
fortement représentées dans ces processus, à l’instar d’une concertation : affichage sur l’espace public,
des hommes (80 % des collectivités), des responsables tracts dans les boîtes aux lettres, articles dans le
9 Res publica, Gazette des associatifs (79 %), et des personnes issues de catégo- journal municipal, communiqué de presse, réseaux
communes, Courrier des
Maires, Baromètre de la ries socioprofessionnelles supérieures (54 %). En sociaux.
participation dans les
collectivités locales, revanche, les jeunes de moins de 30 ans, les personnes
1ère édition,
novembre 2013. d’origines immigrées et les personnes issues de caté-
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 29

Les maîtres d’ouvrage peuvent également adresser La collectivité peut également lancer une campagne
des courriers d’invitation à certaines associations, d’information au niveau communal ou inter-
afin de les solliciter personnellement. Il s’agit par communal pour éveiller les consciences sur le sujet
exemple d’associations de locataires, de représentants de la nature en ville : le travail d’information et de
de personnes handicapées, de représentants d’entre- sensibilisation évoqué dans la partie ci-dessus est un
prises, de parents d’élèves. préalable qui peut générer un gain de temps et de
D’autres dispositifs tels que le porte-à-porte peuvent pertinence lors de la phase de concertation.
également contribuer à attirer un large panel de
public.

Le parc Blandan à Lyon...


La Métropole de Lyon a déployé différents outils de
communication pour amorcer la concertation :
- grands panneaux aux entrées du parc « dessinons
ensemble l’avenir du Parc Blandan »,
- distribution de flyers dans les boîtes aux lettres
des îlots situés autour du parc,
- encarts dans la presse,
- relais par les associations,
- informations sur les tableaux déroulants de la
ville,
- lettre d’invitation aux associations locales.

•P
 rendre le temps de faire moindres changements envisagés, et limitera ainsi
participer... tout au long les potentielles frustrations concernant les prises de
de l’élaboration du projet décision du maître d’ouvrage.
Notons aussi que la concertation en continu peut
La démarche d’implication des citoyens dans un faire surgir des contradictions avec les exigences et
projet demande du temps. Du temps pour commu- contingences des projets (délais, logique écono-
niquer au préalable et donc solliciter un maximum mique, etc.) et que cela justifie la nécessité d’en-
de personnes différentes, pour organiser et bien gager les réflexions sur l’implication citoyenne
préparer les séances de concertation, et enfin pour dès l’amont du projet. Sans cette précaution, les
intégrer les attentes et avis des citoyens au projet processus de maturation du projet risquent d’être
tout en leur montrant cette prise en compte. compromis malgré le temps consacré aux démarches
participatives.
Le recueil des attentes des citoyens est d’autant
plus judicieux qu’il débute le plus en amont possible
du projet, lors des études préalables. En effet, les
retours des citoyens peuvent ainsi être intégrés au
projet dès la programmation. Cette démarche peut
ensuite être poursuivie tout au long de l’élaboration
du projet, pour recueillir les avis des citoyens sur
les plans et propositions d’aménagement du
maître d’œuvre. Faire de la concertation en continu
tout au long du projet permettra un échange sur les
30 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

Le cas du jardin Demain à Montpellier...


La première étape de la concertation a consisté à présenter le projet de jardin, et à discuter avec les citoyens du
projet, notamment pour recueillir leurs envies, leurs attentes et leurs craintes.
Lors de la deuxième étape, les citoyens ont été sollicités pour créer des plans et maquettes modélisant le jardin
tel qu’ils le souhaitaient.
Dans un troisième temps, des photos et des images d’autres jardins existants ont été montrées aux habitants pour
enrichir leurs visions des jardins possibles.
In fine, ces différentes étapes ont abouti à la réalisation d’une proposition réalisée avec l’ensemble des
participants, déposée en mairie, et ensuite remise au maître d’œuvre. Celui-ci a travaillé à partir de cette
proposition et est revenu vers les habitants avec une maquette et un diaporama du futur jardin.

•C
 oncilier les approches des mieux les attentes de chaque acteur (service
différents acteurs, les contraintes technique des voiries, service gestionnaire des
techniques et financières espaces publics dont les espaces verts, élus,
citoyens...). Il devra expliciter de façon pédago-
Bien que l’objectif d’impliquer les citoyens dans gique à l’attention des citoyens les raisons qui
l’élaboration d’un projet soit de prendre en compte ont fondé la décision.
leurs avis et les intégrer au projet, l’ensemble des Dans certains cas, le choix peut se porter sur des
propositions émises par les citoyens ne sont pas principes d’aménagement simples voire « minima-
toujours compatibles avec les contraintes tech- listes10 », qui apportent des réponses en matière de
niques, financières et politiques du projet. Elles naturalité. Face à d’éventuelles réticences des
peuvent même parfois être contradictoires entre citoyens, le maître d’ouvrage sera alors amené à
elles. Le maître d’ouvrage a le rôle délicat de convaincre qu’un espace de ce type leur apportera
considérer l’ensemble des informations, et de des avantages tout en étant économe en investisse-
prendre la décision permettant de concilier au ment et en gestion.

Pour le parc du Vallon à Lyon...


Les maîtres d’ouvrage et d’œuvre étaient à
l’écoute des citoyens, afin de réaménager le parc
de manière à ce qu’il concorde au mieux avec
leurs attentes. Cependant le maître d’ouvrage
urbain avait quelques contraintes techniques et
politiques, annoncées dès le départ aux citoyens :
-la réalisation de deux bassins de rétention des
eaux de pluie pour les infiltrer vers les nappes,
- un budget arrêté,
À Strasbourg, les citoyens sont sollicités pour
- un parc sans édifice, donner leur avis au sujet des essences à planter
- pas d’accès motorisé sauf pour un accès sur les espaces publics désimperméabilisés, dans
la mesure où leur choix porte sur des arbustes et
service/sécurité.
plantes n’engendrant pas d’effet de masque
susceptible de gêner la visibilité de la chaussée
Ces contraintes ont été en partie discutées avec ou des panneaux de signalisation.
©Cerema
10 Comme par exemple ce les citoyens, qui ont fait évoluer le projet vers la
qui a été fait sur le parc de
Berlin-Tempelhof ou dans réalisation de trois bassins de rétention.
l’esprit de la notion de
« tiers-paysage » L’ensemble des contraintes a dans tous les cas
développée par Gilles
Clément. permis de cadrer les discussions.
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 31

La participation des citoyens au chantier et 3


à la gestion d’un espace public végétalisé

Offrir aux citoyens un chantier participatif ou une fréquentent pas ou n’apprécient pas certains espaces
gestion collaborative est un autre levier pour l’appro- publics du fait de l’entretien extensif de la végétation
priation et la compréhension des enjeux de biodiver- parfois considéré comme un défaut de « propreté ». En
sité en ville. La participation concrète des citoyens à effet, l’aspect sauvage des espaces publics, synonyme
l’aménagement ou la gestion d’un espace public de pour certains de « fouillis », « broussailles », et d’endroit
nature est l’occasion d’expliquer les enjeux de biodi- « délaissé » et « laid », peut rebuter. Même les petits
versité et d’enseigner les pratiques d’entretien écolo- espaces végétalisés et les pieds d’arbres sont soumis à
gique. Ceci a d’autant plus de sens que les espaces cette critique esthétique. Participer à un chantier
publics, accessibles et utilisables par tous, sont tout ou à la gestion d’un espace public végétalisé peut
particulièrement soumis au regard et à la critique des ainsi permettre aux citoyens de comprendre l’in-
habitants et usagers. Les espaces de nature seront térêt des différents espaces de nature. Cela peut
d’autant moins fréquentés qu’ils seront considérés aussi créer, de manière plus large, un engouement
comme non entretenus. Une partie des habitants ne pour les problématiques de nature en ville.

“ Les attentes des citoyens d’après la direction des Espaces verts de la ville
de Lyon...
« Ce qui pose souci aux usagers, c’est plutôt la propreté. Les gens, ce qu’ils veulent généralement dans un parc,
c’est trouver des aires de jeux, des espaces pour se détendre et pique-niquer, et qu’ils soient dans un environne-
ment vert et propre, et voilà, ça leur suffit. »

Au-delà de cette sensibilisation à l’environnement,


l’implication des habitants dans un chantier partici-
patif ou dans la gestion d’un espace public permet
surtout un attachement collectif autour de cet
espace. En effet, à travers leur participation active,
les habitants se sentent plus proches des lieux et
sont plus à même de les respecter. Par ailleurs, ces
actions participatives sont de véritables moments
d’échanges et de partages, qui créent du lien social
entre les citoyens. Le fait d’être actif et acteur du
projet ajoute aussi un sentiment de satisfaction.
32 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

Le cas des jardins collectifs sur l’espace public...


Les jardins collectifs urbains sont des formes de potagers gérés de manière collective par une communauté de
jardiniers, à des fins de partage, de rencontres conviviales, de loisirs, et parfois d’autoconsommation familiale, etc.
Sous des appellations, des statuts et des configurations variés, ces jardins sont en pleine expansion dans
de nombreux pays industrialisés et notamment en France.
Ceux situés sur l’espace public sont particulièrement concernés par la gestion participative, puisque des habitants
ou des associations entretiennent une partie de ces espaces.
Toutefois l’appropriation des espaces par ces jardiniers volontaires peut les transformer, avec le risque qu’ils
deviennent des espaces davantage privés que publics, notamment du fait de la présence de clôtures, à moins qu’ils
ne soient considérés comme des « équipements publics » entretenus par les jardiniers.
Un programme de recherche, le projet JASSUR (http://www6.inra.fr/jassur) cherche à identifier les modes d’action
nécessaires au maintien voire à la restauration, au développement ou à l’évolution de ces jardins associatifs sur
des territoires urbains confrontés aux défis de la durabilité.

Les jardins collectifs urbains de Saint-Ouen regroupent des populations variées de


la commune, qui jardinent ensemble 5 000 m² d’espace public. Ces jardins ont fait
l’objet d’une étude dans le cadre du projet JASSUR.
©Cerema
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3.1 Le chantier participatif Lors d’un chantier participatif, les citoyens s’im-
et la gestion collective pliquent dans la conception d’un espace. Ils parti-
cipent à la création du lieu, par des travaux manuels
Initiées par la ville ou demandées par les citoyens, les en plantant de la végétation, en construisant des bacs
actions collaboratives sur un espace public s’ap- de compost, en créant des tables de pique-nique, etc.
puient sur des volontés humaines fortes : celles Ils donnent vie à un projet, et voient concrètement le
des agents de la collectivité, et celles des résultat de leur implication.
citoyens. En effet, la collectivité prépare le chantier
ou la gestion, encadre et conseille les citoyens tout au Lors d’une gestion participative, les citoyens s’en-
long de leur implication, mais ce travail n’aboutira gagent à entretenir avec d’autres citoyens une surface
que s’il y a des citoyens moteurs. La collectivité est le définie de l’espace public. D’un pied d’arbre à une
facilitateur de la démarche, tandis qu’une réussite placette, en passant par un jardin de 100 m², les
pérenne est conditionnée par l’engagement des espaces à gérer collaborativement peuvent être variés.
citoyens dans la durée. Les citoyens, organisés ou non en association,
plantent, taillent, arrosent, désherbent, récoltent...
bref, jardinent cet espace.

3.2 Quels objectifs peut-on donner


au chantier participatif
ou à la gestion collaborative ?

Pour le maître d’ouvrage Pour les citoyens


• fédérer les acteurs autour d’un espace de nature en ville, • s’approprier l’espace ;
améliorer leur appropriation ; • jardiner en ville ;
• créer du lien social ; • rencontrer des personnes ;
OBJECTIFS

• faire passer des messages sur les enjeux de biodiversité ; • s’impliquer dans la vie de son quartier.
• sensibiliser les jardiniers aux pratiques de jardinage
écologique ;
• diminuer les coûts de gestion des espaces publics (gestion
participative uniquement).

“ Témoignage d’une citadine,


jardinière des espaces publics
de Strasbourg
« Le fait de jardiner sur l’espace public crée
effectivement du lien social, et même bien
au-delà de nos attentes. En 2009 j’habitais en
ville, maintenant j’ai l’impression d’habiter un
village. »

Espaces publics déminéralisés gérés par des associations d’habitants


à Strasbourg.
©Cerema
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3.3 Des enseignements Lors d’une initiative issue des citoyens, la collectivité
méthodologiques aura face à elle des citoyens déjà engagés et mobi-
lisés, souvent organisés en association, et prêts à
•U
 ne démarche différente de gérer leur action par eux-mêmes. Tandis que lorsque
la collectivité selon les acteurs c’est elle qui sollicite les habitants, son engagement
initiateurs de l’action en termes de moyens sera bien plus fort puisqu’il
faudra les informer, les motiver, organiser leur parti-
L’implication citoyenne peut être de deux cipation, etc.
sortes : soit spontanée de la part des citoyens, qui
se mobilisent alors ensemble autour d’un projet
commun de gestion d’un espace public ; soit
demandée par la collectivité, qui invite les habi-
tants à prendre part à un projet collectif.

Pour les citoyens

Chantier participatif à Prendre connaissance du projet d’aménagement de l’espace public porté par les habitants.
l’initiative des habitants
Les sensibiliser aux pratiques respectueuses de l’environnement et les accompagner
méthodologiquement : choix de la palette végétale, techniques d’entretien « zéro phyto », etc.

Échanger avec les citoyens sur leur projet et l’adapter avec eux aux contraintes techniques et financières.
Anticiper la gestion future, et les encourager à une gestion collective.

Réaliser en amont le gros œuvre, et organiser la logistique du chantier participatif (sécurité, outils,
plantations...).

Les accompagner et les conseiller lors du chantier participatif. Mettre à disposition les outils, matériaux et
plantations nécessaires.

Gestion participative à Inciter les citoyens intéressés à s’organiser en association, afin de faciliter l’administratif et de créer une
l’initiative des habitants plus grande responsabilisation des habitants.

Échanger avec les citoyens sur le type de gestion à déployer, et s’accorder sur une organisation et un
partage des tâches.

Créer des conventions à signer avec les citoyens pour les engager à porter leur projet dans la durée, et à
respecter les contraintes techniques.

Suivre les démarches des habitants dans la gestion de leur projet (information, réunions, gestion des
conflits, gestion du matériel collectif, trocs, festivités) et les accompagner au besoin dans leur montée en
compétences.

Exemple à Strasbourg d’une gestion participative à l’initiative des habitants...


Lors du réaménagement de la rue du Faubourg-de-Pierre à Strasbourg, les habitants ont manifesté leur souhait
de prendre en charge la gestion des pieds d’arbres. Fortement mobilisés, les habitants se sont organisés en
association. La ville a alors chargé l’association Envie de quartier de gérer une trentaine de pieds d’arbres de part
et d’autre de la rue.
Afin de définir leurs attentes et leur projet, les habitants sont amenés à s’organiser eux-mêmes : diffusion de
l’information pour impliquer de nouveaux habitants, organisation de réunions, gestion des éventuels désaccords,
etc. S’ils en ressentent le besoin, les agents de la ville peuvent ponctuellement leur fournir des conseils (choix de
plantes, agencement, etc.). Toutefois, il s’avère que les habitants s’investissant dans de tels projets ont
généralement de bonnes connaissances en jardinage et en flore, et les services de la ville sont assez peu sollicités.
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 35

Rôle de la collectivité

Chantier participatif Communiquer sur le projet d’espace public de nature : informer et motiver les citoyens à participer
à l’initiative de la à sa réalisation.
collectivité
Associer les citoyens dans l’élaboration du projet par de la concertation, afin qu’ils s’approprient le projet
et donnent leurs avis et leurs attentes concernant ce futur espace public.

Informer largement les habitants, notamment via le réseau associatif, de la tenue du chantier participatif.

Réaliser en amont le gros œuvre, et organiser la logistique du chantier (sécurité, outils, plantations...).

Accompagner et conseiller les participants lors du chantier. Mettre à disposition les outils, matériaux et
plantations nécessaires.

Organiser un moment convivial d’achèvement des travaux, et solliciter si besoin les habitants pour une
gestion collaborative.

Gestion participative Communiquer sur le projet d’espace public de nature : informer sur le projet, associer les citoyens
à l’initiative de la à la conception du projet dès l’amont en vue de les motiver à participer à sa gestion.
collectivité
Inciter les citoyens intéressés à s’organiser en association, afin de faciliter l’administratif et créer
une plus grande responsabilisation des habitants.

Échanger avec les citoyens sur le type de gestion à déployer, et s’accorder sur une organisation et
un partage des tâches.

Créer des conventions à signer avec les citoyens pour les engager à porter leur projet dans la durée,
et à respecter les contraintes techniques.

Suivre les démarches des habitants dans la gestion de leur projet (information, réunions, gestion des
conflits, gestion du matériel collectif, trocs, festivités...) et les accompagner au besoin.

Exemple à Montpellier d’une gestion participative à l’initiative de la collectivité...


La ville de Montpellier a souhaité transformer un ancien parking délaissé, situé en cœur de quartier, en un jardin
public (le jardin Demain). Ce projet a été dès le début envisagé avec une implication forte des habitants. Avec
le maître d’œuvre, il a été convenu d’élaborer ce projet en concertation avec les habitants, de les associer ensuite
à un chantier participatif durant un week-end, et de leur proposer ensuite la gestion de cet espace.
Initié donc par la ville, ce projet a fait l’objet d’un travail fort de mobilisation des habitants pour les faire adhérer
et leur déléguer certaines tâches.

Jardin Demain à Montpellier,


initiative de la Ville.
©Cerema
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•R
 assembler les citoyens autour des objectifs écologiques (pratiques de jardinage
d’un sens et d’objectifs partagés écologiques, suivis faunistiques...), des objectifs de
respect des contraintes techniques (plantation d’es-
Que le projet soit d’initiative citoyenne ou d’initia- sences végétales n’occultant pas les panneaux
tive publique, la collectivité a tout intérêt à signalétiques par exemple).
encadrer et accompagner l’action collective, et à
proposer un sens et des objectifs partagés pour que En rassemblant les citoyens autour de ces considéra-
l’action de chacun s’inscrive dans un projet commun. tions, l’objectif est bien de créer de la cohérence
entre les actions de chacun, et de permettre la réali-
Cette philosophie peut englober des éléments sation d’un projet porté et partagé par tous les
sociaux (ouverture aux autres, solidarité, partage), participants.

La philosophie partagée des jardins collectifs à Saint-Ouen...


Dans le courrier engageant les citoyens à jardiner les parcelles partagées, la ville a souhaité associer les
destinataires à des objectifs communs :
- ne pas utiliser de produit chimique dans les pratiques de jardinage ;
- mettre en commun le terrain, les savoir-faire, connaissances et compétences, et la cabane ;
- laisser l’accès de l’ensemble des parcelles aux promeneurs et visiteurs du grand parc dans lequel s’insèrent les
jardins partagés.

• L e « recrutement » des citoyens ciation, animent des réunions et rencontres, achètent


pour les actions collectives du matériel commun : ils deviennent responsables
de l’entretien d’un espace et assument les missions
Les citoyens s’investissant dans des actions collectives correspondantes.
telles que des chantiers ou de l’entretien de l’espace
public peuvent être « recrutés » de manières diverses. A contrario, la collectivité peut garder ses missions
d’animation et d’organisation citoyenne. C’est alors
Lorsque les citoyens se regroupent et créent une elle qui encadre directement le processus de partici-
association non professionnelle, celle-ci peut être pation des citoyens, à l’aide de salariés dédiés à la
autonome et s’autogérer. Rassemblés en association, gestion administrative et à l’animation. Elle s’occupe
les citoyens s’organisent entre eux pour gérer l’es- du recrutement des citoyens volontaires, et de la
pace, cherchent des nouveaux membres pour l’asso- répartition des parcelles s’il y a lieu.

Les jardins partagés


et les jardins ouvriers
de Saint-Ouen :
deux organisations
administratives bien
distinctes.
©Cerema
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Le recrutement des jardiniers et la répartition de la gestion à Saint-Ouen...


Sur le cas de « l’île des partages » dans le parc des Docks, deux situations clairement différentes sont observées
concernant la gestion des jardiniers :
- une association autonome pour les jardins ouvriers : cette association, qui regroupe les employés d’Alstom, gère entre
autres son budget et les attributions des parcelles, mais doit respecter le règlement des parcs et jardins de la ville ;
- une gestion directe par la mairie pour les jardins partagés avec des salariés dédiés à l’organisation des temps
collectifs, à la gestion administrative des jardiniers, à la gestion du matériel et des cabanons. La ville recrute
alors les jardiniers selon l’ordre d’arrivée de la demande en mairie. Une fois les attributions des tâches aux
citoyens réalisées par la mairie, ceux-ci s’organisent pour le jardinage et la récolte de leur parcelle.

•U
 ne communication nécessaire À l’inverse, la communication autour de l’entre-
pour associer un maximum de tien d’un espace public par les citoyens se réflé-
citoyens à la démarche chit davantage dans la durée. Dans ce cas, les
animations mises en place sur le site et surtout le
Dans toute démarche participative nécessitant un bouche à oreille de proximité jouent un rôle essen-
appel à la population pour qu’elle soit partie tiel. Un des objectifs est de rendre la démarche
prenante, la communication déployée est primor- ludique, accessible à tous, et non réservée à des
diale. Il s’agit d’informer les citoyens sur la tenue des experts. En combinant ces actions collectives avec
actions participatives, mais également et surtout de des moments de rencontre et de convivialité, mais
les motiver à venir participer. Bouche à oreille aussi en valorisant leur impact sur le cadre de vie
(notamment par les réseaux sociaux), porte-à-porte, (plus de verdure à leur porte, choix dans les espèces
articles dans des gazettes locales, affichage dans à planter...), l’action a davantage de chance d’attirer
les halls d’immeubles, repas d’échanges et d’infor- des participants diversifiés et novices sur le sujet de
mation : la communication sera d’autant plus l’écologie. La communication autour des nombreux
efficace qu’elle sera effectuée par des relais services écosystémiques associés à de telles
associatifs ou des personnes identifiées comme démarches est importante dans la mesure où les
moteurs dans un quartier. citoyens en bénéficient directement (amélioration
du cadre de vie, bien-être, amélioration des relations
Faire connaître un chantier participatif nécessite sociales, etc.)
de mettre en place une communication importante,
ponctuelle et à large diffusion.

À Montpellier...
Dans le quartier Lemasson où a été réalisé le jardin
Demain, le maître d’œuvre s’est associé au conseil
consultatif de quartier pour attirer un maximum
d’habitants dans la conception du jardin. Leur méthode a
consisté à programmer des réunions publiques, à faire de
l’affichage dans les entrées d’immeubles et à réaliser du
porte-à-porte. L’objectif était de susciter la création d’un
collectif d’habitants du quartier, destiné à s’engager dans
la création et la gestion du jardin. En tenant les réunions
publiques au club de l’Âge d’Or, c’était également l’occasion
de toucher les personnes âgées du quartier. Jardin potager ©Cerema
38 I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S

• L a formalisation des engagements généralement à titre gracieux, mais en contrepartie


des citoyens auprès de la d’engagements de la part du signataire.
collectivité (gestion participative
uniquement) En Île-de-France, la formalisation de l’utilisation des
parcelles pour du jardinage collectif est parfois
Afin de préciser aux citoyens les modalités de mise réalisée par simple courrier. Celui-ci, de la même
à disposition des espaces publics, la collectivité peut manière qu’une convention, explique à quoi s’en-
s’appuyer sur une convention. Cette dernière, gagent les jardiniers. Cependant sans valeur juri-
signée par les habitants désirant s’engager dans la dique, ce type de courrier a montré des limites dans
démarche de gestion ou par une association de le cas des jardins partagés de Saint-Ouen, où les
proximité, permet d’asseoir la démarche dans la jardiniers auraient tendance à se déresponsabiliser
durée. de la gestion du fait de l’absence d’engagement écrit
La convention constitue une autorisation d’occupa- de leur part.
tion du domaine public accordée au signataire,

La convention de végétalisation de l’espace public par les habitants


à Strasbourg...
Une convention, réalisée par la ville de Strasbourg et proposée à la signature aux associations gestionnaires, a été
créée afin d’expliciter les engagements de chacun. Elle tient compte des normes juridiques en vigueur et des
modalités d’intervention des services municipaux, et fait une large place aux recommandations pratiques
d’entretien. En effet, en signant la convention, l’association s’engage à respecter les principes suivants :
• Convivialité : organiser des moments de plantation en collectif ;
• Communication : afficher de manière lisible et visible les espaces plantés par l’association ;
• Fonctionnement : élaborer collectivement le projet de plantation ;
• Gestion du site : entretenir écologiquement les espaces tout au long de l’année ;
• Gestion partagée : maintenir une concertation entre l’association et les services de la Propreté urbaine et
des Espaces verts et de Nature pour une gestion harmonieuse de l’espace public.

• Des écueils potentiels à éviter Pour mobiliser les citoyens dans la durée, la collecti-
vité gagnera à être souple dans l’implication de
Les personnes s’impliquant dans une gestion collabo- chacun et à adapter sa demande et son accom-
rative montrent des motivations variées : s’occuper, pagnement selon les envies et les capacités de
garder la forme, rencontrer d’autres personnes, faire chacun. Le tout étant de fixer un minimum d’impli-
vivre le quartier, s’approprier l’espace public, apprendre cation atteignable pour la majorité des citoyens, et
des choses au contact d’autres jardiniers ou des tech- permettant la faisabilité de l’action. A Saint-Ouen,
niciens de la ville. Toutefois, même très motivés, les une parcelle de jardin partagé avec davantage d’es-
citoyens sont également très conscients de l’énergie pèces spontanées que de cultures est acceptée telle
nécessaire à la durabilité du projet et du temps que quelle, du moment que le citoyen jardinier vient
cela leur demande. Si la motivation ou le temps dispo- régulièrement s’en occuper (une fois par semaine
nible diminuent, notamment dans le cas où le dispo- par exemple).
sitif repose sur une personne clé, ou si des conflits
émergent avec d’autres citoyens impliqués sur le L’action ne peut perdurer si elle repose sur un
projet, la démobilisation peut être rapide. La pérennité groupe trop restreint de personnes. Si une ou
de ce type d’action, où le citoyen est la cheville deux personnes au sein du groupe se démobilisent,
ouvrière, est soumise aux aléas de sa mobilisation. l’action peut avoir du mal à continuer faute de
I M P L I Q U E R L E S C I T O Y E N S A U T O U R D U S U J E T D E L A N AT U R E E N V I L L E : P R E M I E R S E N S E I G N E M E N T S 39

moyens humains. Ainsi, plus le groupe de citoyens Enfin certaines actions peuvent être moins mobilisa-
impliqués sera important, plus l’action aura de trices pour les riverains que prévues. C’est par
chance d’être pérenne. exemple le cas lorsqu’elles portent sur des sujets
pointus. Les habitants ne perçoivent alors parfois
Il semble important de maintenir dans la durée un pas directement les bénéfices qu’ils peuvent en
aspect social et convivial. En combinant les retirer.
actions collectives avec des moments de rencontre
(animations, apéritifs, etc.), la démarche a alors plus
de chance de perdurer.

Chantier participatif de création de mares dans le quartier Champvert à Lyon. ©Cerema

• L a question de la responsabilité À Saint-Ouen, la convention entre l’association des


des collectivités jardins familiaux et la mairie exige également une
assurance couvrant les risques liés à l’activité de
La participation des citoyens à des chantiers ponc- jardinage, notamment concernant la responsabilité
tuels ou à l’entretien d’espaces publics pose la ques- civile, le vol et les dégradations.
tion des assurances associées à de telles démarches. Le dialogue avec une association présente, bien
Différentes situations ont pu être constatées dans souvent, des avantages pour les deux parties
les expériences étudiées. (interlocuteurs bien identifiés pour la collecti-
Au sein des aménagements de Champvert à Lyon, vité, pérennité et force d’un collectif pour les
lors des chantiers participatifs de construction de citoyens).
nichoirs, les associations de protection de la nature
ont, par exemple, permis aux citoyens d’utiliser
des outils potentiellement dangereux comme des
perceuses alors que le service des Espaces verts de
la ville ne le pouvait pas pour des questions
d’assurance.
À Strasbourg, la mise à la disposition des citoyens
d’espaces publics à végétaliser ne se fait que via une
association, qui doit fournir une assurance respon-
sabilité civile.
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4 Éléments de conclusion et perspectives


Nombre de porteurs de politiques publiques au dans la durée, l’écart est important en termes d’im-
niveau national comme à l’échelle locale ont à cœur plication. Quel que soit le type d’implication
de favoriser une implication citoyenne efficiente citoyenne mis en place, l’équilibre entre les usages et
dans les projets publics. Les retours d’expérience la préservation de la biodiversité reste souvent
présentés dans l’ouvrage, qu’ils soient inscrits dans délicat. De ce fait, la sensibilisation est un préalable
un cadre réglementé (concertation) ou non (initia- indispensable, notamment pour faire respecter les
tives spontanées), illustrent comment certaines espaces gérés le plus naturellement possible (inter-
démarches ont cherché à favoriser l’implication des vention humaine minimale, développement d’une
citoyens dans des projets de nature en ville dans une végétation spontanée).
optique renouvelée et en employant des méthodes
et outils adaptés. Il est important de souligner que Ce document valorise un ensemble d’actions menées
les petits espaces publics de quelques mètres carrés en ce sens sur le domaine publique, et montre la
peuvent susciter cette implication au même titre nécessité d’adapter la stratégie d’implication des
que les vastes parcs urbains. Dans tous les cas, envi- citoyens à l’échelle du projet. Socle de la réussite de
sagée comme un levier pour une adhésion aux la démarche, le sens partagé se construit dans le
espaces de nature, l’implication citoyenne apporte temps. La détermination conjointe des acteurs insti-
notamment aux habitants une vision plus appro- tutionnels et de la société civile garantira le succès
fondie de la notion de biodiversité sur l’espace des actions et sera un gage de la pérennité du projet.
public urbain. Plus largement, ce sont l’ensemble des
services écosystémiques associés aux espaces de Soulignons enfin que les collectivités peuvent aussi
nature qui peuvent être favorisés et ainsi bénéficier rechercher des actions potentielles, propices à l’im-
aux citoyens : activités récréatives, activités pédago- plication citoyenne et à la nature en ville, sur le
giques, amélioration du cadre de vie, bien-être, domaine privé. En effet, une gestion concertée des
amélioration des relations sociales, etc. espaces verts de copropriété ouverts au grand public
est possible par convention et dans le cadre d’un
Recouvrant les démarches de sensibilisation à la plan d’actions co-construit. Ce type de partenariat
biodiversité, d’implication dans l’élaboration d’un est potentiellement porteur d’une grande richesse
projet (concertation, co-construction, etc.) et de en termes de pédagogie et d’adhésion à la nature en
participation à des chantiers ou à des gestions colla- ville. Par ailleurs, ces espaces constituent, dans les
boratives, l’implication citoyenne pour la nature en communes urbaines et périurbaines, une surface
ville nécessite la mise en place d’une stratégie mobilisable très importante pour la nature en ville et
pensée en amont et déployée sur les différents les continuités écologiques.
temps du projet.

La collectivité voulant faire évoluer le regard des


citoyens vers une prise de conscience des bienfaits
de la biodiversité (y compris en ville, près de chez
soi) peut les solliciter de différentes manières, afin
d’être en adéquation avec leur aspiration à s’investir.
En effet, de la sensibilisation où le citoyen est spec-
tateur attentif, à la gestion participative où les
citoyens doivent s’organiser entre eux et s’engager
D E U X I È M E P A R T I E
Retours d’expériences

1. Parc Blandan à Lyon


Aménagement d’un grand parc urbain (17 ha) sur le site d’une ancienne caserne . . . . . . . . . . . . .p. 44
2. Jardins collectifs à Saint-Ouen
Environ 5 000 m2 de jardins familiaux, jardins partagés, serre pédagogique et ruches . . . . . . . . . . .p. 58
3. Parc du Vallon à Lyon
Réaménagement d’un grand parc existant de 11 ha . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 72
4. Jardin Demain à Montpellier
Création et gestion d’un jardin de 1 200 m2 sur un ancien parking imperméabilisé . . . . . . . . . . . . .p. 86
5. Aménagements pour la biodiversité à Champvert à Lyon
Développement d’un réseau d’espaces verts de 4 ha . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 100
6. Jardin Vaclav Havel à Villeurbanne
Création d’un parc d’environ 2 900 m2 en milieu dense sur un ancien jardin arboré . . . . . . . . . . . p. 110
7. Végétalisation et gestion d’espaces désimperméabilisés à Strasbourg
De petites surfaces mobilisées : pieds d’arbres, placettes, trottoirs, etc. . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 122
44 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N

1 Parc Blandan à Lyon


Aménagement d’un grand parc urbain (17 ha)
sur le site d’une ancienne caserne
Situation géographique Lyon (69)
Superficie 17 ha
Date de livraison 1ère tranche en septembre 2014
Porteur du projet Grand Lyon
Partenaires Ville de Lyon

1.1 Présentation du site Pour mener à bien ce projet, le Grand Lyon a travaillé
en partenariat avec la ville de Lyon, mais aussi avec
Le parc Blandan est un parc urbain récent, situé l’association de riverains qui réclamait depuis les
dans le centre de Lyon, à cheval sur les 3e, 7e et 8e années 1980 la réalisation d’un parc sur ce site.
arrondissements. Avant de devenir un parc, le site Ayant une forte volonté d’associer les habitants à l’éla-
était occupé par une caserne, dont certains bâti- boration du projet, le Grand Lyon a mené une démarche
ments ont été conservés dans le projet de transfor- de concertation sans entrave et constructive.
mation. Dès l’achat du site par le Grand Lyon en Ainsi, en accord avec les riverains, les objectifs pour
2007, l’objectif a été de le transformer en parc le site étaient qu’il devienne un parc intergénéra-
urbain de grande envergure (17 ha), afin d’offrir un tionnel, à l’aspect sauvage, avec des jeux, et qui
nouveau « poumon vert » aux Lyonnais. permette la rencontre entre les habitants.

Communication autour du projet ©Cerema Allée au sein du front forestier du parc ©Cerema
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N 45

Un parc intergénérationnel ©Cerema Des terrains de sport au sein du parc ©Cerema

 lan du site
1.1.1 P

Localisation du parc Blandan à Lyon ©OpenStreetMap Plan du projet (13/02/2013) réalisé


par l’agence BASE
46 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N

 hronologie du projet
1.1.2 C

PHASE 1
Réunion publique de lancement Réunion publique Réunion publique de
Ateliers et visites de présentation PHASE 2 présentation du projet
Conférence du programme Ateliers amendé

2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014


Démarches
Achat du
Études préalables administratives Conception du projet Travaux
terrain
de la MOA

 ocuments consultés
1.1.3 D - Décision communautaire « 2010/3121 - Parc Sergent
Blandan - Réalisation d’un parc urbain à Lyon 7e »
- Notice de présentation / études préliminaires, de - Documents de présentation utilisés lors des
l’agence BASE en 2011 réunions publiques
- Propositions pour l’aménagement du parc Sergent - Comptes-rendus des ateliers de concertation
Blandan, de l’ADPB, 2010 - Lettres-infos

Milieux secs et peupliers préexistants ©Cerema La place belle à la végétation spontanée ©Cerema
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N 47

1.2 L’implication citoyenne

 réation d’une association de


1.2.1 C
défense du parc Blandan en 1997

Dès les premières annonces concernant la cession


possible du terrain, des riverains se sont regroupés
en une association, nommée Association de la
défense du parc Blandan (ADPB). Cette association
avait pour but de défendre une reconversion de la
caserne en parc et non en quartier urbanisé.
©ADPB (Association de développement du Parc Blandan)

 lassement en zone UL au PLU


1.2.2 C  ébut de la concertation en 2008,
1.2.4 D
dès l’obtention du site, parallèlement
En 2001, l’association a sollicité les riverains dans le aux études préalables
cadre d’une pétition qui visait à changer la destina-
tion du site sur le PLU. 4 000 signatures ont été Le Grand Lyon a acheté le terrain en 2007, et a pris
récoltées, et c’est en 2003 que les parcelles du site possession du site en 2008. Il a engagé la concerta-
ont été classées en zone urbaine de loisirs sur le Plan tion dès ce moment, simultanément au lancement
Local d’Urbanisme, ce qui permet le développement des études préalables.
d’un parc de loisirs et la construction de bâti dédié
aux loisirs. L’idée de transformer le site en parc a 1.2.5 Communication réalisée pour susciter
rencontré un consensus politique parmi les élus, la participation citoyenne
d’une part parce que la demande sociale était forte
sur ce point, et d’autre part parce que le 7e arrondis- Le Grand Lyon a déployé différents outils de commu-
sement était très minéral, ce qui rendait nécessaire nication pour amorcer la concertation :
la création d’un espace de respiration. - grands panneaux aux entrées du parc « dessinons
En parallèle, en 2001, l’association a mené des ensemble l’avenir du Parc Blandan » ;
enquêtes auprès des riverains et des scolaires pour - distribution de flyers dans les boîtes aux lettres des
construire une argumentation solide sur la demande îlots situés autour du parc ;
d’un parc. À partir des attentes qui sont ressorties de - encarts dans la presse ;
cette enquête, l’association a réfléchi aux objectifs - relais par les associations ;
du parc et s’est orientée vers un parc aux finalités - informations sur les tableaux déroulants de la ville.
diverses : intergénérationnel, à l’aspect sauvage,
avec des jeux et aires de sport, et qui permette la Le Grand Lyon avait pour but d’attirer l’ADPB, les
rencontre entre les habitants. conseils de quartier, et les habitants n’appartenant à
aucune association.
 ise en place d’un avant-projet
1.2.3 M
sommaire par l’association  éroulement de la concertation
1.2.6 D

Entre 2004 et 2006, les membres de l’association se La concertation a été lancée par une réunion
sont alors mobilisés pour réaliser un avant-projet publique en septembre 2008. L’objectif du Grand
sommaire en interne. L’avant-projet a été ensuite Lyon était de partager la connaissance du site à
soumis aux élus du Grand Lyon en 2006. L’association partir des premières études préalables, et de recueillir
proposait de décomposer le site en trois zones : une les attentes des habitants. Plus de 300 personnes
zone minérale, une zone de sport, et une zone de sont venues.
détente/solarium.
48 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N

Ensuite, deux ateliers thématiques de présentation 1.2.7 Recueil des attentes de différentes
du projet ont été organisés, portant sur les sujets populations de Lyon par une enquête
suivants : histoire, biodiversité, diagnostic végétal, marketing territoriale
accessibilité, approche paysagère. Les ateliers se
déroulaient en soirée (19h-22h). Concernant le parc Blandan, il n’y avait pas d’usages
Parallèlement aux ateliers, des visites du site ont préalables puisque le site n’était pas ouvert au
permis aux habitants de le connaître. public. Il n’était pas possible pour le Grand Lyon de
réaliser une étude sociologique des usages. En 2007,
Deux autres ateliers thématiques ont ensuite été le Grand Lyon a mis en place une enquête marketing
menés pour recueillir les attentes, sur les mêmes territoriale pour recueillir les attentes de quatre
thèmes que ceux menés précédemment. types de populations concernant un « parc urbain de
Enfin, une conférence pédagogique sur la définition loisirs » : familles / seniors / sportifs / jeunes. Cela a
d’un parc urbain a été réalisée, pour présenter divers permis de croiser les attentes de chaque population
parcs urbains français ou européens, ainsi que les sur les usages et les types de nature souhaitée. Cette
résultats de l’enquête marketing 2007. enquête a permis de nourrir les débats de la concer-
tation, en apportant de la matière mais aussi du
Le Grand Lyon demandait à ce que les personnes recul par rapport aux intérêts particuliers.
impliquées dans la concertation s’inscrivent dans la
durée, s’engagent sur un cycle de concertation. 1.2.8 Les attentes initiales de la maîtrise
L’objectif était de garder les mêmes personnes, de d’ouvrage
préserver une cohérence au cours du projet. Il s’agis-
sait de pratiques mises en place depuis plus de cinq Les attentes du Grand Lyon et de la ville de Lyon étaient
ans par le Grand Lyon : les associations impliquées affichées en amont de la concertation. Il s’agissait entre
dans les démarches de concertation en connais- autres de créer un parc de nature au cœur d’un secteur
saient le principe, et y adhèraient. urbain dense, qui compose avec les spécificités du site :
histoire et origines, patrimoine bâti, nature et biodiver-
Usuellement les femmes et les jeunes sont peu sité. De plus, ce parc se devait d’être complémentaire
représentés dans les réunions de concertation. Pour des autres parcs urbains de l’agglomération.
ce projet, on constate une présence équilibrée des La concertation avait pour but de recueillir les
différentes catégories de population et notamment attentes des habitants qui pourraient être plus
la participation d’étudiants et d’actifs. spécifiques, mais non de remettre en cause les
objectifs préalables cités ci-dessus. De plus, le Grand
Lyon avait des contraintes techniques à respecter,


que les habitants ne pouvaient pas remettre en
Témoignage du Grand Lyon cause : la topographie, la conservation de certains
« Un projet de parc, c’est un projet qui crée de bâtiments, le réseau d’arrosage, les clôtures, etc.
l’adhésion. Ce n’est pas la réalisation d’une auto-
route. Il n’y a pas de conflit au départ, mais bien 1.2.9 Les attentes des habitants
de l’adhésion. Et cela a aidé à créer une ambiance concernant la nature pour le projet
très favorable autour du projet. »
Lors de la concertation, les habitants ont fait
ressortir leurs attentes vis-à-vis du parc. Ils souhai-
taient notamment « un parc écologique, qui joue
un rôle de poumon vert, végétalisé, qui laisse sa
place à la biodiversité, qui soit propice à l’édu-
cation à l’environnement » (Document diffusé lors
de la réunion de présentation du programme d’amé-
nagement du parc le 8 juillet 2010).
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N 49

Par ailleurs, lors d’un atelier dédié à la nature et Ainsi les attentes des habitants concernant la
intitulé « Quelle(s) nature(s) dans le Parc Blandan : ce nature ont porté spontanément sur des aspects
que j’aimerais y voir / n’aimerais pas y voir », les esthétiques et sensoriels, sur des usages asso-
habitants ont pu expliciter leurs attentes concernant ciés, et sauf quelques exceptions sur des enjeux
la composition paysagère et écologique du parc. écologiques.

“ Témoignage de l’association du
développement du parc Blandan
« On n’a pas été jusqu’à demander telle ou telle
espèce, que ce soient des marronniers ou des
“ Témoignage du Grand Lyon
« - La nature sauvage, ça allait de refaire la rose-
raie du parc de la Tête d’Or à la grande pelouse
qui sert aussi bien à jouer au foot qu’à pique-ni-
tulipes, ce n’était pas notre rôle et nous n’avions quer ! La nature, on n’y met pas tous la même
pas les compétences nécessaires. Nous avons chose dans le terme. Peut-être que les gens vont
seulement proposé un type de nature que nous réagir mais pour l’instant on n’a pas de retours.
aimerions y voir. » On est sur un parc où les gestionnaires n’utilisent
pas de produits phytosanitaires, on ne désherbe
plus les mauvaises herbes. Alors on a des zones
À partir du compte-rendu de cet atelier, nous où on a des ronciers par exemple. On a égale-
pouvons noter que la majorité voulait une nature ment des belles nappes de trèfles, et il y a dix ans
dite « sauvage ». Cette notion d’espace « sauvage » a on aurait tout désherbé. On essaie de faire
été définie par les habitants comme suit : « un espace accepter la nature spontanée.
sans intervention de l’homme (friche végétale - Cet aspect naturel était une volonté des gens
importante et variée), NON au trop superficiel / trop concertés ?
d’entretien, NON à la taille d’arbres trop artificielle, - Pas forcément. Pas tous. Ça a été surtout un
NON au jardin composé type «à la française», parvis échange, notamment avec le concepteur qui a
d’entrées trop dégarnis (entrée de parc vide), garder expliqué que sur cet espace, la gestion serait
la forêt existante ». changée, on ne serait pas dans le systématisme
du désherbage. C’était une attente du Grand
Parallèlement à cette demande de nature « sauvage », Lyon et de la ville dans la programmation, et la
des demandes spécifiques ont porté sur le végétal en concertation a été le lieu d’expliquer cette
lien avec une esthétique et des usages : une roseraie, manière de faire. »
un jardin des senteurs, des arbres fruitiers, des pelouses
soignées pour s’ébattre, un stade de foot, un laby-
rinthe végétal, des arbres taillés et ordonnancés, etc.
1.2.10 L a concertation en 2011 lors
Certains recherchaient également un contact de la conception
physique avec le végétal et les animaux, ou encore
un contact visuel : « des lieux pour observer les Une fois le concepteur désigné, la concertation a été
saisons, entendre la nature, des couleurs, des relancée. L’objectif était de vérifier que le projet
essences qui changent au cours de saisons ». correspondait aux attentes, et d’amender le projet.
À cette étape, les habitants ont montré une réelle
D’autres demandes ont appuyé l’envie d’une nature satisfaction concernant l’intégration de leurs
plus riche en biodiversité par l’installation d’essences demandes dans le projet. Ils ont ensuite ajusté des
locales, en évitant les arbres exotiques, par la plan- éléments comme la fermeture de l’esplanade la nuit,
tation « d’essences qui favorisent la faune », par un et le souhait d’une simplification et d’une clarifica-
« choix d’espèces adaptées aux conditions du site », tion du projet.
ou encore par la présence d’une « forêt où l’on ne
marche pas ou peu pour la préserver ».
50 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N

 ilan sur la concertation


1.2.11 B objectifs que la maîtrise d’ouvrage n’avait pas mis
sur le papier dès le début du projet. Toutefois, il s’est
Au final, le Grand Lyon et les habitants ont été avéré que ces objectifs concordaient avec les
globalement satisfaits du déroulement de la concer- attentes de la maîtrise d’ouvrage, d’où une concer-
tation, et de la prise en compte de l’avis de chacun tation au bilan très positif du point de vue des élus,
dans le projet. Certes, les habitants ont évoqué des des techniciens, des associations et des habitants.

“ Témoignage d’un conseiller municipal de Lyon et conseiller communautaire


du Grand Lyon
« Permettez-moi de rappeler que cela fait plus de dix ans que nous parlons de ce parc, et que c’est en partie grâce
à la mobilisation des habitants, et notamment de l’ADPB, ainsi que des conseils de quartier et des comités
d’intérêts locaux du 7e que ce projet a pu avancer. Merci à eux d’avoir toujours gardé la foi ! »

Le Grand Lyon envisage de réaliser une étude socio- achevé, afin d’obtenir des retours sur les pratiques
logique in situ, une fois le parc complètement des usagers, sur l’appropriation de l’espace, etc.

Extraits de propos tenus lors d’un micro-trottoir réalisé un vendredi après-midi pendant les grandes
vacances d’été (le 1er août 2014)

“ Témoignage d’une jeune retraitée qui promène son chien


« Je viens souvent ici, c’est agréable pour se promener et amener le chien dans l’espace réservé. Il manque juste
des bancs dans cet espace, et un peu d’ombre aussi.
Il y a des espaces qui sont un peu fouillis quand même... D’accord, la nature reprend ses droits, mais ça manque
tout de même d’entretien. Je ne demande pas que ce soit une pelouse rase, mais que ce soit organisé et un peu
plus entretenu. Et les buis sont par exemple tout secs, ils n’ont pas été arrosés... c’est du gâchis.
Mais attention, je dis ça, mais je ne me plains pas trop quand même, car ça fait longtemps qu’on attend ce parc,
et je suis très contente qu’il soit enfin réalisé ! »

“ Témoignage d’un couple, la


trentaine, avec un bébé
« C’est la première fois que nous venons. Vous
savez si l’aspect broussailleux du parc va rester ?
“ Témoignage d’une trentenaire,
avec deux jeunes enfants
Ce parc est magnifique ! Il y a beaucoup de jeux
pour les enfants, et ça compte beaucoup. Le parc
Parce qu’on aime bien, ça change du parc de la est grand sans être trop grand, on n’est pas les
Tête d’Or. C’est fouillis, sauvage, et ça fait du bien uns sur les autres et ça reste calme.
en plein centre ville. » J’attends avec impatience que les arbres poussent
un peu pour avoir davantage d’ombre ! Les prai-
ries sont belles, ça me fait penser à la campagne.
On voit des papillons, les enfants sont ravis. Je
trouve que c’est un parc simple, accessible à tous,
au contraire du parc de la Tête d’Or qui est très
réfléchi, très organisé et entretenu. Ce n’est pas
le même type de parc, et celui-ci me plaît mieux
au quotidien. »
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N 51

1.3 La nature en ville - s’appuyer sur les potentialités existantes in situ en
et la biodiversité conservant les arbres (sauf ceux détectés comme
malades ou trop vieux) et les entités végétales en
1.3.1 Les études préalables place ;
- installer une végétation peu consommatrice en
Puisque aucune information sur le terrain n’était eau ;
disponible au début du projet (site militaire inacces- - créer une continuité entre les milieux présents
sible), des études de base ont été nécessaires telles dans le parc et les relier aux milieux environnants
qu’une étude sur la topographie, sur la végétation de façon à enrichir la trame écologique existante ;
présente sur place, sur l’avifaune, etc. À noter que le - planter des essences qui pourront s’adapter au
site était entretenu de manière très horticole et très changement climatique ;
assidue du temps où il était un site militaire. Mais - favoriser la pédagogie sur la nature lors de la créa-
depuis une dizaine d’années, l’entretien avait beau- tion mais également lors de la gestion ultérieure.
coup diminué, et une friche était apparue avec une
végétation pionnière. 1.3.3 L a conception
Concernant les milieux naturels, plusieurs études
ont été réalisées : Le paysagiste concepteur était associé à une entre-
- un inventaire du patrimoine arboré et de la biodi- prise d’ingénierie pour réaliser la maîtrise d’œuvre
versité végétale par l’ONF en 2009 ; d’aménagement, notamment composée d’un
- une analyse environnementale, urbaine et patri- écologue qui a suivi le projet pendant toute la
moniale par SOBERCO Environnement en 2009 ; mission de maîtrise d’œuvre. Ainsi les aménage-
- des inventaires faune/flore par Biotope en 2010, ments paysagers ont été réalisés en accord entre le
notamment sur l’avifaune ; paysagiste et l’écologue, dans une logique de
- une étude pédologique par Sol Paysage en 2010. conserver au maximum l’existant et d’en garder
Cette étude a montré la présence de sols très l’esprit.
perméables où l’eau s’infiltre très facilement et qui Des plantes ont donc été sélectionnées en fonction
rendent le substrat végétal sec, d’où la présence de leur état de santé et de leur fonction dans l’équi-
d’une végétation de prairie sèche. Cette caracté- libre écologique des milieux. Les autres ont été
ristique, ainsi que la présence de remblais sur enlevées, tandis que de nouvelles essences ont été
certains espaces, ont été des éléments clés à apportées afin d’étoffer et diversifier les espèces. Les
prendre en compte dans la création du parc essences ont été choisies de manière à être adaptées
puisque c’étaient des contraintes fortes dans l’ins- aux milieux secs et relativement pauvres, surtout
tallation de la végétation. dans un contexte où l’arrosage serait limité voire
nul.
1.3.2 L es objectifs de biodiversité
pour le projet 1.3.4 L a gestion

À partir des études préalables, des préconisations Le plan de gestion, réalisé par le paysagiste en colla-
qu’ont pu donner les bureaux d’études lors des boration avec le service des Espaces verts, permet de
études préalables, de la concertation, des échanges différencier, selon les secteurs, le type d’arrosage, le
avec les futurs gestionnaires, et des objectifs poli- type de désherbage, le type de tonte.
tiques de la communauté urbaine, le Grand Lyon a Le service des Espaces verts a une politique de
dégagé un certain nombre d’objectifs concernant la gestion orientée vers la valorisation et la restaura-
biodiversité pour le Parc Blandan : tion de la biodiversité. D’ailleurs le service est certifié
- aménager les secteurs du parc selon un gradient ISO14001 depuis 2006, certification qui recouvre
de biodiversité varié ; notamment les pratiques sur les espaces verts : zéro
52 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N

phytosanitaire, arrosage raisonné, gestion différen- Selon le service des Espaces verts de la ville, les
ciée, tri des déchets. Les jardiniers suivent également usagers ne sont pas perturbés par la végétation
des formations, en volontariat, sur la reconnaissance spontanée. Ils n’attendent plus forcément des
des plantes locales, sur la biodiversité, etc. C’est dans massifs d’annuelles. Le tournant commence à être
cet esprit que sera géré le parc. opéré.

“ Témoignage du service des Espaces verts de la ville de Lyon


Le parc a été annoncé comme parc « nature », donc les gens ont été préparés. Ce qui leur pose souci, c’est plutôt
la propreté. Les gens, ce qu’ils veulent généralement dans un parc, c’est trouver des aires de jeux, des espaces pour
se détendre et pique-niquer, et qu’ils soient dans un environnement vert et propre, et voilà, ça leur suffit. »

Les branchages, déchets de tailles, sont laissés sur place et organisés en Sur certains secteurs, la végétation spontanée a toute
cheminements qui servent de refuge pour les hérissons ©Cerema sa place grâce à un entretien minimaliste ©Cerema
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N 53

1.3.5 L a communication sur les chaque numéro des éléments sur la biodiversité
aménagements en faveur présente dans le parc. Par exemple, on y trouve des
de la biodiversité explications sur le fait que les bois morts ne soient
pas évacués mais conservés sur place pour attirer les
Pour communiquer sur les aménagements en faveur insectes et les oiseaux.
de la biodiversité (espaces fermés au public pour
préserver les espèces, entretien non horticole, etc.) 3/ Les panneaux informatifs installés au sein même
et sensibiliser les habitants à la biodiversité, le Grand du parc : disposant d’une signalétique propre au
Lyon a mis en place divers outils de communication. parc, ces panneaux ont pour vocation d’orienter et
d’informer sur le règlement, mais aussi d’apporter
1/ La concertation : les réunions publiques d’infor- des éléments de compréhension sur les aménage-
mation et les ateliers ont été des lieux privilégiés ments réalisés, l’histoire du lieu et la nature présente.
pour des échanges sur ce sujet entre les habitants,
les aménageurs et la maîtrise d’ouvrage. 4/ Des visites du parc : le parc Blandan fera prochai-
nement partie des parcs urbains bénéficiant de
2/ La lettre-info dédiée au parc : elle paraît tous les visites pédagogiques (scolaires et grand public).
six mois, elle est distribuée et mise en ligne sur le site
du Grand Lyon. Cette lettre-info présente dans

Les panneaux informatifs expliquent la gestion des invasives réalisée sur les espaces laissés
volontairement en friches, et l’attrait de ces zones pour les insectes. ©Cerema
54 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N

1.4 Principaux enseignements • La « biodiversité », une notion demandée


de manière détournée
1.4.1 La concertation
Lorsque le Grand Lyon sollicite les habitants sur le
• Une forte implication d’une association sujet de la nature, la question est ainsi posée :
apolitique dans la durée en amont et tout au « Quelle(s) nature(s) dans le Parc Blandan : ce que
long du projet j’aimerais y voir / n’aimerais pas y voir ».
Les habitants ont répondu spontanément par de
Une des particularités du parc Blandan réside dans nombreux éléments qui relevaient essentiellement :
l’implication très soutenue de l’Association de - de l’ambiance (aspect « sauvage »),
défense du parc Blandan, qui s’est organisée pour - du contact sensoriel (entendre les oiseaux, toucher
mobiliser les riverains afin de réclamer la création les plantes...),
d’un parc sur le site. - des usages (sport, promenade...),
Se revendiquant apolitique, elle défend des intérêts - de l’écologie (accueillir la faune, mettre des plantes
collectifs, notamment grâce à des enquêtes/ locales...).
sondages qu’elle mène auprès d’un nombre impor-
tant de riverains. La biodiversité en tant que telle n’est pas abordée de
Son implication et son niveau de connaissance du manière directe, mais par des approches détournées.
site et du projet lui ont permis d’avoir de la crédibi- En effet, lorsque les habitants évoquent une nature
lité auprès du porteur de projet. Elle a donc été à l’aspect sauvage, cela correspond à la mise en
sollicitée et écoutée par le Grand Lyon. place de milieux de friches, de prairies, ou encore de
forêts. Préférant ces milieux aux pelouses rases, ils
• Une concertation à toutes les étapes (études sous-entendent qu’ils apprécient les milieux riches
préalables, programmation, conception) qui a en biodiversité, et en demandent.
permis de proposer aux personnes impliquées De plus, les habitants réclament la présence d’ani-
dans la concertation un niveau d’information maux ou encore de plantes locales. Même si le terme
poussé sur le site et sur la biodiversité, et de « biodiversité » n’est pas évoqué, et que les fonc-
d’ajuster les projet tionnalités écologiques ne sont pas appréhendées
par les habitants, leurs demandes s’orientent en
Une fois les terrains acquis, le Grand Lyon, en tant ce sens.
que maître d’ouvrage, a lancé un processus de
concertation de manière à présenter le site aux 1.4.2 La gestion participative
habitants, recueillir leurs attentes et informer sur le
projet. Cette concertation a eu lieu durant les • La gestion des espaces verts par les habitants :
études préalables pour dégager des objectifs de un sujet écarté
programmation, et durant la conception sur la base
du projet d’aménagement. L’intervention d’habitants dans la gestion a été
écartée, même dans un cadre tel que des jardins
• Les principales préoccupations des habitants partagés. Le maître d’ouvrage a en effet considéré
très éloignées du sujet de la biodiversité que ce type d’intervention des habitants n’était pas
approprié sur un espace de si grande envergure, qui
Si le sujet de la nature a été évoqué lors d’un atelier est par ailleurs fermé à certaines périodes de la
dédié, ce sujet n’est pas prioritaire ni évoqué spon- journée. Les habitants ont d’autre part insisté lors de
tanément par les habitants. Leurs préoccupations la concertation sur leur demande d’un parc public,
portent plutôt sur la vie future du parc : les usages, qui soit entretenu par les services publics.
la sécurité, l’ouverture, l’accessibilité, etc.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N 55

1.4.3 La sensibilisation aux enjeux • Un parc qui valorise la végétation spontanée,
de biodiversité depuis la conception jusqu’à la gestion

• Une communication forte sur la biodiversité L’agence BASE et CSD Ingénieurs ont proposé un
projet dans lequel la nature spontanée est majoritai-
Le Grand Lyon s’est donné les moyens de communi- rement conservée, et même préservée et valorisée
quer auprès des riverains sur la biodiversité présente sur certains espaces. Imaginé dès la conception du
dans le parc. En effet, d’abord une sensibilisation sur projet, ce parti pris est conservé lors de la gestion.
les enjeux lors des réunions publiques de concerta- Ceci est d’ailleurs valorisé dans le parc par un
tion, puis une signalétique dans le parc, qui apporte panneau signalétique spécifique à la « végétation
des informations sur la faune et la flore présentes spontanée ».
ainsi que sur l’intérêt des « mauvaises herbes », ont
été mis en place. 1.4.5 La biodiversité et les usages
De plus, le Grand Lyon distribue tous les six mois une
lettre-info dédiée au parc, qui consacre à chaque • Un parc de grande superficie, qui peut
fois une partie, voire plusieurs, à la biodiversité accueillir de nombreux usages tout en
présente, ou à des jeux autour de la nature. préservant des espaces
Enfin, le service des Espaces verts envisage de
réaliser des visites pédagogiques autour de la biodi- Le parc couvrira à terme 17 ha. De nombreux usages
versité pour le grand public. ont été demandés et projetés (sport, pique-nique,
rencontres, jeux pour enfants, promenade des
1.4.4 La biodiversité chiens). Tous n’ont pas été acceptés, pour cause de
budget et d’intérêt collectif, mais non par manque
• La biodiversité comme orientation de place. Comme l’ensemble des usages jugés perti-
de programmation nents a été pris en considération, le fait que certains
espaces soient interdits d’accès car réservés à la
Le Grand Lyon et les habitants impliqués dans la biodiversité ne dérange aucun usager. La surface à
concertation se sont mis d’accord sur des objectifs disposition est donc ici une opportunité pour limiter
de programmation. Ceux-ci portent sur des usages, l’accès aux espaces riches en biodiversité.
mais également sur la biodiversité : « Un parc écolo-
gique, qui joue un rôle de poumon vert, végétalisé, • Des plaintes sur le type de nature présente,
qui laisse sa place à la biodiversité, qui soit propice à à relativiser avec les autres plaintes
l’éducation à l’environnement ». La biodiversité a
donc été un objectif explicite de la programmation. Une fois la première tranche du parc achevée, le
Grand Lyon, la ville de Lyon et l’association ont
Pour la conception du projet, l’agence de paysage recueilli quelques retours de la part des usagers du
BASE s’est associée avec l’équipe CSD Ingénieurs, parc. Outre de nombreux retours positifs, des usagers
disposant ainsi des compétences d’un paysagiste et se sont plaints des « troncs d’arbres pourris » ou
d’un écologue. Cette compétence en écologie a encore des « mauvaises herbes ». Mais le nombre de
permis une bonne intégration des objectifs de biodi- plaintes portant sur la nature présente a été très
versité dans la conception. faible comparé au nombre des autres plaintes
portant sur le manque de bancs, le bruit, le manque
Ils ont proposé un projet d’aménagement qui a d’ombre (arbres encore trop petits) ou encore la
remporté l’adhésion de l’ensemble des habitants propreté.
impliqués dans la concertation, tout en prenant en
compte les objectifs de la MOA, les préconisations de
l’ONF et celles des bureaux d’étude en écologie.
56 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N

• La propreté avant tout

Selon la ville de Lyon, le premier motif de plainte des


habitants porte sur les questions de propreté. Or la
notion d’entretien des espaces verts est très liée avec
celle de la propreté : les gens acceptent la végétation
spontanée s’il n’y a pas de déchets.

Parc Blandan en 2014 ©Cerema


R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 1 . PA R C B L A N D A N À LY O N 57

À retenir :

• La présence d’une association de riverains très • Une communication forte sur la biodiversité a
investie en amont d’un projet peut, par les actions été mise en place, notamment pour faire prendre
engagées (enquête/sondage, etc.), favoriser la conscience aux habitants et usagers de l’intérêt
mobilisation des habitants et futurs usagers. des espaces fermés au public pour favoriser la
Sur le parc Blandan, l’association revendiquant la biodiversité.
création du parc s’est avérée un acteur crédible et
incontournable. • La grande taille des projets est particulièrement
favorable à la mise en place d’espaces en évolu-
• La concertation peut être menée tout au long tion naturelle (accès limité, moindre gestion).
du projet : études préalables, programmation, Les usages, notamment récréatifs, sont alors répartis
conception. sur les autres secteurs du projet.

• Le sujet de la nature et de la biodiversité n’est • La présence de mauvaises herbes reste souvent un
pas forcément évoqué de manière spontanée motif de plaintes, d’où l’intérêt d’expliquer aux
par les habitants, d’où l’intérêt de les solliciter habitants et usagers les enjeux associés à la
sur cette thématique pour obtenir leurs avis : gestion différenciée.
ateliers dédiés, etc.

• Une nature « sauvage » a été particulièrement


souhaitée par les citoyens participant à la concer-
tation, comme de plus en plus souvent sur ce type
de projet.
58 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N

2 Jardins collectifs à Saint-Ouen


Implication citoyenne dans les jardins collectifs du quartier
des Docks de Saint-Ouen.
Environ 5 000 m 2 de jardins familiaux, jardins partagés,
serre pédagogique et ruches.
Nota bene : Les travaux présentés ici ont été en partie réalisés dans le cadre d’un projet de recherche ANR JASSUR,
« Jardins ASSociatifs URbains : pratiques, fonctions et risques », qui se propose d’éclairer de façon interdisciplinaire
les fonctions, les usages, les modes de fonctionnement, les avantages ou les dangers potentiels qu’induisent les
jardins associatifs au sein de villes durables en émergence. Le projet JASSUR entend identifier les modes d’action
nécessaires au maintien voire à la restauration, au développement ou à l’évolution de ces jardins associatifs sur des
territoires urbains confrontés aux défis de la durabilité1.

Situation géographique Saint-Ouen (93)


Superficie 5 000 m²
Date de livraison 2014
Porteur du projet Ville de Saint-Ouen
Partenaires Communauté d’agglomération de Plaine Commune
Association d’habitants Association des jardins ouvriers de Saint-Ouen

2.1 Présentation du site Sont localisés et volontairement « mélangés » sur l’île


des partages deux types d’activité de jardinage,
Autrefois zone d’activités industrielles (production chacun ayant pourtant sa propre histoire, culture et
de piles et stockage d’hydrocarbures), le territoire organisation :
des Docks à Saint-Ouen fait l’objet d’un projet de - les jardins familiaux « historiques » : ils couvrent
renouvellement urbain, qui est par ailleurs engagé environ 2 000 m², et sont gérés par l’Association
dans la labellisation EcoQuartier 2013. La ville de des jardins ouvriers de Saint-Ouen, composée
Saint-Ouen a en effet entrepris d’y développer un d’une trentaine de jardiniers, les parcelles allant de
quartier de 100 hectares, soit le quart de la super- 60 m² à 100 m² par famille.
ficie de la commune, avec la volonté de relier le - les jardins partagés récents : ils sont divisés en de
centre-ville à la Seine grâce à un parc de 12 ha en multiples parcelles, couvrant au total près de
bord du fleuve. Sur les 12 ha de parc, une surface de 3 000 m² pour quelque cent-vingt jardiniers,
5 000 m² est dédiée au jardinage collectif. Ce quatorze associations diverses (AMAP, crèche, SEL,
secteur, nommé « l’île des partages », rassemble des association de quartier…), deux établissements
jardins familiaux, des jardins partagés, une serre médicaux et des élèves dans le cadre des leurs
pédagogique et des ruches, où plus de 150 personnes activités scolaires.
se côtoient régulièrement pour jardiner.

1 Le projet ANR Jassur est


coordonné par C. Schwartz
et J.N. Consalès, la tâche
sur la gouvernance par
Perrine Vandenbroucke et
Gil Melin.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N 59

Communication autour du projet ©Cerema Allée au sein du front forestier du parc ©Cerema

 lan du site
2.1.1 P

Plan du parc : le secteur de l’île des partages, rassemble des jardins partagés et des jardins familiaux/ouvriers ©Cerema DterIDF
60 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N

 hronologie de la démarche et participation citoyenne


2.1.2 C

Création
de l’association
des jardins Concertation
ouvriers «Atelier parc»
de Saint-Ouen 2008-2010

Création Réflexions sur


des jardins Cession Transfer la mise en place
ouvriers foncier foncier d’un comité
Alstom à Nexity à la ville des usagers

1928 2004 2007 2010 2011 2012 2013 2014 2015


2005
ÉtudeConception du projet Vie au
Travaux
du grand parc jardin

2.1.3 Documents consultés

- Règlement communautaire des parcs et jardins ;


- Modèle de courrier valant convention entre la mairie et le jardinier ;
- Convention de mise à disposition des terrains entre les jardins ouvriers et la mairie ;
- Courrier envoyé aux jardiniers dans le cadre d’une animation ponctuelle ;
- Lettre d’information de l’écoquartier des Docks de Saint-Ouen, juin 2012 ;
- Histoire du Grand parc, en ligne, http://fr.calameo.com/books/000855918ffa389f61a69 ;
- Résultat de la concertation citoyenne – pôle citoyen décembre 2007.
- Charte pour un écoquartier des Docks – Re-Sources / ADAGE / DAC, août 2009 ;
- Atelier parc n° 3 – avril 2009 /présentation et compte rendu.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N 61

2.2 L’implication citoyenne parc, au-cours desquels la question des jardins a été
ponctuellement traitée. Ces ateliers, réunissant
Comme étudié par Demailly (2014), les jardins l’aménageur, des élus et une quinzaine d’habitants,
partagés franciliens seraient « une collaboration ont fait suite à une première consultation citoyenne
entre les associatifs, les élus locaux et les riverains ». qui avait été réalisée en 2006 par les membres du
Il s’agit de voir comment s’organise cette collabora- Pôle Citoyen des Docks2.
tion sur l’île des partages, quelles sont les motiva-
tions des habitants à s’impliquer dans le jardinage De cette consultation était ressortie une volonté
collectif, et comment les jardiniers s’organisent des habitants et riverains de maintenir les jardins
entre eux pour pérenniser cette gestion collective ouvriers3 en tant que lieu pédagogique et
des espaces. d’animation. Volonté partagée par la collectivité et
reprise dans le programme : « Les jardins ouvriers
 n collectif de jardiniers se mobilise
2.2.1 U d’Alstom qui représentent une forte tradition
pour préserver « leurs jardins » seront relocalisés dans le parc et évolueront vers un
usage de jardins partagés. » Cette évolution
L’industrialisation au XIXe siècle a opéré en Seine- d’un jardin familial vers un jardin partagé ne
Saint-Denis une profonde mutation du territoire : la semble pas toutefois s’être déroulée sans
grande plaine maraîchère a cédé la place aux sites quelques difficultés, en témoignent les
industriels dotés de jardins ouvriers. Le site d’Alstom nombreuses discussions sur les barrières délimitant
en est le témoin, où les jardins ouvriers ont été créés les parcelles.
en 1928 : 108 parcelles de foncier privé, d’environ
100 m2 chacune, gérées par le comité d’entreprise. Au-delà de cette participation, le collectif Pôle
Citoyen regrette de ne pas avoir été associé au jury
Lors de la vente des terrains d’Alstom à Nexity, les de sélection du projet4. La mairie souhaite par
jardiniers se sont fortement mobilisés, notamment ailleurs créer un « comité des usagers du parc » qui
en se regroupant sous la forme de l’Association des rassemblerait élus, agents de la ville et de l’agglomé-
jardins ouvriers de Saint-Ouen, et en manifestant ration et usagers. Son but serait de communiquer
pour conserver « leurs » jardins. Finalement, lorsque sur les difficultés de gestion ou les changements
la mairie a racheté les terrains à Nexity, elle a pris le d’habitudes, afin de faciliter l’appropriation de ce
parti de soutenir et maintenir les jardins dans le nouveau fonctionnement. En attendant, l’équipe du
futur projet urbain, mettant en avant l’importance Grand parc et de la serre pédagogique souhaite
de préserver une trace du passé industriel du site, mettre en place, une fois par trimestre, un repas
tout en souhaitant faire évoluer les jardins ouvriers convivial afin d’échanger avec les usagers du parc.
vers un espace public ouvert à tous. L’implication du
collectif de jardiniers dans le processus de décision a  ne gestion administrative différente
2.2.3 U Dans le cadre de l’aménagement 2
plus large de l’écoquartier,
la municipalité en lien avec son
donc permis de faire évoluer le projet d’aménage- des jardins partagés et des jardins aménageur Sequano a mis
en place un Pôle Citoyen pour
ment initial (qui ne prévoyait pas le maintien des familiaux associer les citoyens et les
usagers au projet.
jardins), et de trouver des compromis pour satisfaire
« Maintien et préservation des 3
le plus grand nombre, permettant de passer de Dans le cas de l’île des partages, deux situations jardins avec une surface iden-
jardins de statut « privé » (foncier Alstom puis Nexity) clairement différentes sont observées concernant tique ou plus grande. Ils font
partie du parc dont ils sont un
à des jardins « publics » ouverts (foncier ville). l’autonomie et l’autogestion des jardiniers, dues élément caractéristique. Il faut
les mettre en valeur. Ils ont une
à l’histoire et à la surface importante de l’île des vocation pédagogique. Leur site
peut être un lieu d’animation
 ne participation « ponctuelle » des
2.2.2 U partages : dans le parc en relation avec la
demande d’abeilles (ruches),
habitants à la programmation du parc - une association autonome pour les jardins ouvriers, d’une ferme pédagogique, de
balades en poneys. Jardins
association non professionnelle qui gère entre séparés par des allées permet-
tant la promenade et l’ouverture
Lors de la programmation du parc en 2009, trois autres son budget et les attributions des parcelles, vers le public. », extrait consulta-
tion citoyenne, décembre 2007.
« ateliers parc » ont été menés pour définir les mais doit respecter le règlement des parcs et
http://acqso.typepad.fr/ 4
attentes de la population audonienne vis-à-vis du jardins de la ville ; lesdocksdeso/docks-la-charte/
62 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N

- une gestion directe par la mairie pour les jardins 2.2.5 L e partage des tâches dans l’entretien
partagés avec des salariés dédiés à l’animation, de l’île des partages
à la gestion administrative des jardiniers et des
associations, à l’entretien des espaces collectifs. L’entretien de l’île des partages relève d’une gestion
partagée entre les collectivités (mairie et commu-
Lors des études en amont de la réalisation du parc, nauté d’agglomération), l’association des jardins
l’Association des jardins ouvriers de Saint-Ouen n’a ouvriers, et les jardiniers des jardins partagés :
pas souhaité gérer administrativement l’ensemble - les parties communes, les plantations initialement
des parcelles de l’île des partages du fait du travail livrées avec les jardins (notamment les haies frui-
que cela nécessitait. Faute de la présence d’un tières qui séparent les parcelles) et les structures des
collectif moteur, la mairie a alors dû prendre en cabanes relèvent de la compétence des collectivités ;
gestion directe les jardins partagés en y dédiant des - la culture, l’entretien, la propreté des parcelles ainsi
agents. Le choix a été fait de ne pas établir de que le rangement des cabanes sont de la responsa-
convention entre les jardiniers et la mairie pour bilité des jardiniers et de l’association. Les jardiniers
limiter les contraintes de fonctionnement. Il semble contribuent ainsi à maintenir le site propre
ressortir, au bout de deux ans de fonctionnement, (nettoyage des tables, ramassage des papiers et des
que cette organisation administrative présente des mégots de cigarettes), en complément de l’interven-
limites. Elle aurait tendance à déresponsabiliser les tion de la collectivité qui met à disposition des
jardiniers sur les parcelles partagées, qui s’appuient usagers de nombreuses poubelles.
aujourd’hui fortement sur l’animatrice, très active, Ce partage de tâches va dans le sens des pistes iden-
du site, tandis que les jardiniers des jardins familiaux, tifiées par l’agenda 21 communautaire qui pour
réunis en association, sont plus autonomes. « accompagner l’appropriation citoyenne de la
nature en ville » (orientation 1) prévoit « d’encou-
2.2.4 L a démarche « d’attribution » des rager la gestion collective d’espaces publics » et « de
parcelles valoriser l’histoire maraîchère du territoire et les
savoir-faire6 ».
La gestion administrative étant différente entre les
jardins ouvriers et les jardins partagés, le recrutement 2.2.6 Une volonté municipale
des jardiniers l’est également selon le type de jardin. de créer de la rencontre par
- Pour les jardins ouvriers, étant donné que les le jardinage collectif
parcelles sont gérées par l’association, c’est elle qui
s’occupe de l’attribution des parcelles, aux ouvriers En proposant l’île des partages au centre du parc de
Alstom en priorité. l’écoquartier, la mairie souhaitait créer un espace de
- Pour les jardins partagés, c’est la mairie qui s’oc- rencontre. Par l’implication des citoyens dans le
cupe du recrutement et de la répartition des jardinage et l’entretien de cet espace, elle souhaitait
parcelles entre les jardiniers. Après un « appel à partager les tâches et faire se rencontrer les habi-
jardiniers » auprès des Audonniens dans le journal tants. En effet, dans la convention avec l’association
local et d’informations lors de diverses réunions, la des jardins ouvriers, elle stipule que « les parcelles
mairie attribue par simple courrier (sans valeur devront être cultivées » et que l’association devra
juridique) les parcelles directement aux jardiniers chercher à « accompagner les pratiques de partage
qui ne sont pas regroupés en association (organi- liées au jardinage ». L’objectif est davantage affiché
sation émergente en Ile-de-France5). L’attribution pour les jardins partagés, puisque des parcelles de
se fait sur la base de quatre éléments : 8 m2 sont mises à disposition d’un groupe de
5 Canavese Marine,
Jardins collectifs : • le fait de ne pas posséder de jardin potager en ville, personnes désignées par la mairie en fonction de
quelle gouvernance
en Ile-de-France ? • l’acceptation du fait de partager un espace avec leurs adresses postales, en séparant volontairement
janvier 2015.
d’autres personnes, les voisins.
6 Deux AMAP ont une
parcelle sur le site. Il serait • l’accord pour ne pas utiliser de produit chimique
intéressant d’étudier s’il
existe un réel lien entre les dans les pratiques de jardinage, À eux de décider comment ils veulent s’organiser
jardiniers amateurs et les
maraîchers professionnels. • l’ordre d’arrivée de la demande en mairie. pour le jardinage : en parcelles individuelles ou en
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N 63

partage. À eux de décider aussi comment organiser 2.2.7 Les motivations des habitants
les récoltes. Les jardins partagés sont conçus par la à jardiner et entretenir les parcelles
collectivité comme « un lieu de rencontre et de
partage... propice aux discussions et papotages
sur les légumes et la nature7 ». Le lien social souhaité Qu’ils soient jardiniers des jardins ouvriers ou des
par la mairie est également (ren)forcé par la réparti- jardins partagés, leurs attentes sont relativement
tion de l’espace, avec la juxtaposition des parcelles similaires. Les jardins sont principalement dédiés aux
de jardins ouvriers et de jardins partagés, et avec la loisirs, pour garder la forme, se faire plaisir, ou
disposition des tables de pique-nique au centre de encore pour rencontrer des gens : « Moi je viens pour
l’île des partages. m’amuser. Je fais les plants à la maison et je viens les
planter et les donner ici » (jardin partagé) ; « Nous,
Au final, on remarque qu’une grande partie des nous sommes âgés. Avant que les jardins soient
parcelles partagées sont redécoupées en parcelles transférés dans le parc, nous avions une parcelle plus
individuelles, ce qui rompt avec l’idée du partage grande. Maintenant c’est plus petit, 100 m², mais
telle qu’elle a pu être imaginée par la mairie ou le pour nous c’est assez puisqu’on est deux. Nous
concepteur : jardins avec des cheminements collec- venons davantage pour sortir, pour bouger un peu »
tifs, et parfois une « mini-parcelle » pouvant être (jardin familial).
gérée collectivement. Dix parcelles sont réservées Les jardins sont également plus ou moins cultivés
pour quatorze associations sur lesquelles le mélange pour une consommation personnelle, même si cet
semble plus facile. aspect alimentaire semble davantage marqué pour
les jardins ouvriers.

“ Témoignage d’un membre


de la ville
« Le jardinage est envisagé de plusieurs manières.
Une première entrée est une entrée sanitaire :
c’est-à-dire qu’une heure passée à jardiner est
mieux qu’une heure passée en salle de sport. Cela
vous maintient en forme, vous travaillez toutes
les parties de votre corps et de votre cerveau.
Ensuite vous avez une deuxième entrée, celle de
la production alimentaire : les seuls fruits et
légumes mangés sont ceux qui sont produits ici.
Pour des gens qui sont proches du seuil de
pauvreté, ce qui est le cas sur notre territoire,
c’est un avantage d’avoir un jardin pour leur
consommation personnelle. Ensuite vous avez
la dimension écologique, on est dans un parc
intégralement sans pesticides. Et la dernière
dimension c’est le lien social, le fait de jardiner
Juxtaposition des parcelles partagées ouvrières avec des gens qui ne vous «ressemblent» pas, qui
©Cerema peuvent avoir un âge différent, une place sociale
différente, un quartier différent, des centres
d’intérêts différents. »

Modèle de courrier valant 7


convention entre la mairie
et le jardinier.
64 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N

2.2.8 L es contraintes du jardinage dans Concernant la participation des jardiniers aux


le temps : une diversité de postures ateliers, au bout de deux ans de fonctionnement il
apparaît que les ateliers qui fonctionnent le mieux
Les différentes attitudes des jardiniers rencontrés sont ceux appelés « consommateurs » à la fin desquels
montre la diversité des postures vis-à-vis de l’effort, les jardiniers repartent avec du terreau et des
du temps de présence au jardin et de la difficulté ou boutures. De manière générale, il est difficile de
non d’entretenir une parcelle. mobiliser les jardiniers, qui cherchent davantage à
Pour l’un, cela demande « trop de travail » et il a être « tranquilles sur leurs parcelles, promener les
abandonné la parcelle. Un autre plante des fruits enfants, produire des légumes » qu’à participer à des
« qui poussent tout seuls » et ne vient que périodi- ateliers pour « apprendre à jardiner ».
quement, toutes les trois semaines. Un troisième se
lance dans la permaculture, « pour les feignants », Toutefois, au-delà de cette animation par la mairie,
mais pour laquelle la préparation de la parcelle est la présence même des jardiniers sur le site voire sur
« très fatigante ». De son côté, la collectivité est assez la même parcelle peut permettre d’échanger des
souple et admet que certaines parcelles partagées conseils de jardinage. Par exemple, les nouveaux
puissent être plus ou moins bien entretenues. arrivants de l’écoquartier souhaitant jardiner sont
accueillis par les anciens qui leur cèdent des plants
2.2.9 La vie au jardin de légumes.

L’organisation de la vie au jardin est assurée par les


animateurs salariés de la ville : organisation des
temps collectifs, gestion des conflits sur la taille des Retour d’un membre de la ville
parcelles par exemple, gestion du matériel, des caba- « Ce qui est intéressant c’est que certains jardi-
nons. Des animations sont organisées par la mairie niers ouvriers ont vu des dames sur les parcelles
dans la serre pédagogique avec des scolaires princi- partagées qui paillaient leurs plantations. Alors
palement, mais aussi avec des riverains qui le ils ont fait la même chose sur leurs parcelles. »
souhaitent. La serre est plutôt ouverte en journée, et
pas tous les jours, alors que les jardiniers viennent
plutôt en soirée s’occuper de leur jardin. Un déca-


lage entre les activités de la serre et celles des jardi-
niers ne permet donc pas des interactions optimales. Retour d’une habitante,
ancienne jardinière sur l’île
des partages


« En fait il y a beaucoup d’échanges entre les
Le ressenti d’un membre gens, surtout entre les jardiniers. Les gens qui
de la ville sur l’organisation se connaissent, qui sont les uns à côté des autres,
de la vie au jardin se refilent des plants. C’est bien parce qu’il y a
« Les jardiniers peuvent être très autonomes, mais beaucoup d’échanges, même avec les jardiniers
sans l’animatrice il n’y aurait pas de temps qui entretiennent le parc. »
collectifs. Les animateurs servent aussi à calmer
les tensions, à créer du lien entre jardiniers. Mais
ils représentent aussi l’institution donc «se font
taper dessus» aussi pour des problèmes divers,
comme une porte de cabane cassée, etc. »
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N 65

Échange entre jardiniers ©Cerema

 uelques échanges entre jardiniers


2.2.10 Q Par ailleurs, pour éviter la tentation pour les prome-
et promeneurs neurs de cueillir dans les parcelles des jardiniers,
comme cela a pu arriver, la mairie a aidé à lancer
Dans la lettre de convention avec les jardiniers, la une initiative consistant à mettre à disposition
mairie les encourage à échanger avec tous les gratuitement quelques fruits et légumes. Initiative
usagers du parc, en étant ouverts au dialogue afin qui semble selon la mairie commencer à bien
de contribuer à une bonne entente sur l’île des fonctionner9.
partages8. Au dire des jardiniers rencontrés, il
semblerait que ces échanges avec les usagers du  ropagation et accueil
2.2.11 P
parc s’établissent plus facilement avec les prome- d’expérimentations de jardinage
neurs qu’avec les nouveaux employés d’Alstom qui
prennent régulièrement leurs repas de midi sur les Au regard de ce qui se fait dans le parc, certains
tables au milieu des jardins. usagers souhaitent lancer de nouvelles initiatives de
jardinage, dans le parc ou hors du quartier. La collec-
tivité est alors présente pour accompagner les


personnes concernées. La mairie soutient par
Un jardinier des jardins exemple la mise en place de deux jardins en pied de
partagés cités, projet porté par des promeneurs du parc et qui
« Les personnes qui parlent c’est plutôt des sont en lien avec l’animatrice des jardins. L’objectif
Cf. le modèle de courrier valant 8
personnes qui sont en balade, mais ceux qui de la mairie est « d’aider toutes les personnes qui ont convention entre la mairie
et le jardinier.
pique-niquent (les gens qui travaillent dans les envie de jardiner, d’essaimer le jardinage et les
Dans un autre jardin, parisien, 9
bureaux voisins) ne nous parlent pas. Par exemple pratiques écologiques, de créer du lien entre les cette initiative a été refusée par
peur que les passants ne
un petit vieux qui ne sait pas quoi faire, il vient gens. ». se servent ensuite directement
dans les jardins. Ces différentes
jusque-là et il discute. Il peut entrer et moi ça ne attitudes posent la question, non
traitée, de savoir si ce message
me dérange pas. » est bien perçu, ou s’il ne crée
pas de la confusion pour
les promeneurs.
66 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N

2.3 La nature en ville anciens. Toutefois des études sur la faune locale et
et la biodiversité l’état phytosanitaire des arbres du site ont été
réalisées. Des « zones refuges » pour la faune, dont
2.3.1 L es objectifs de biodiversité l’efficacité reste à mesurer, ont été aménagées dans
dans la démarche le parc. Ces espaces ne sont pas clôturés, mais ils
sont d’accès compliqué afin de réduire la fréquenta-
La question de la biodiversité est prise en compte de tion humaine. Le système de gestion des eaux (inon-
manière différenciée selon l’échelle spatiale (Grand dation par débordement de cours d’eau et eaux
parc ou jardins collectifs) et temporelle (conception pluviales issues de l’écoquartier) à ciel ouvert (bassin,
du projet ou gestion) à laquelle on se situe. noues filtrantes) a été conçu, au-delà de ses fonc-
tions techniques, comme pouvant être support de
Au niveau du Grand parc : biodiversité « ordinaire ».
En phase de gestion, le gestionnaire adopte une
En phase de conception, les questions liées à la démarche « zéro phyto» sur l’ensemble du parc, ainsi
biodiversité ont été traitées mais n’ont pas été au qu’une gestion différenciée des espaces, mettant
centre du projet. Les principaux objectifs étaient de ainsi en place des zones de fauchage tardif favo-
répondre au déficit d’espaces verts de la ville, d’avoir rables notamment aux insectes. Ceci est également
un produit d’appel pour le reste de la ZAC des Docks accompagné de panneaux pédagogiques.
de Saint-Ouen, et de relier les quartiers nouveaux et

Système de gestion des eaux,


d’un coté les jardins, de l’autre
une prairie fleurie - Zone refuge
©Cerema

Gestion différenciée du parc ©Cerema


R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N 67

Au niveau de l’île aux partages : et troquer. Une équipe d’animation de cinq personnes
de la commune y est rattachée, et mène notamment
La serre pédagogique a pour ambition d’être un des actions pédagogiques autour des questions de la
centre de ressources documentaires et pédago- biodiversité. Comme vu précédemment, la mobilisa-
giques pour encourager les pratiques de jardinage tion des jardiniers est compliquée et des difficultés
au naturel, par la mise en place d’ateliers pour les apparaissent, liées à l’accessibilité de la serre par les
jardiniers et les usagers du parc qui le souhaitent. jardiniers qui souhaitent travailler sur leurs boutures
Elle est conçue pour que les jardiniers l’utilisent en dehors des heures d’ouverture.
pour réaliser leurs semis et boutures, pour échanger

Espace de bouturage dans la serre pédagogique Espace documentaire de la serre pédagogique


©Cerema ©Cerema

Au niveau des jardins potagers : (gracieusement et avec responsabilité) l’eau d’arro-


sage non potable, en privilégiant l’arrosage matinal
L’objectif de la création des jardins était de main- ou en fin de journée pour éviter l’évaporation, [ainsi
tenir l’activité des jardiniers déjà présents, qui qu’] à vérifier auprès du personnel du Grand parc
permet d’entretenir la mémoire ouvrière du site, et pour planter des arbustes afin d’éviter les espèces
de créer un espace « ouvert, accessible à tous » de allergènes, invasives ou non locales10. »
jardinage.
La question de la biodiversité y est principalement De l’eau non potable ainsi qu’un composteur
approchée en phase de « vie » des jardins par la commun sont mis à disposition des jardiniers qui
question des pratiques de jardinage, que ce soit doivent par ailleurs ne pas utiliser de produits
pour les jardins ouvriers ou partagés. La mairie phytosanitaires et participer, dans la mesure du
s’appuie sur le fait que les parcelles font partie possible, aux animations de la serre pédagogique. En
intégrante d’un écoquartier pour promouvoir réalité, des pratiques très variables selon les jardi-
des pratiques de jardinage respectueuses de niers sont observées malgré l’accompagnement des
l’environnement. animateurs. À titre d’exemple, sur une même
parcelle, deux jardiniers peuvent l’un travailler en
« Vous vous engagez aussi, dans le cadre de l’éco- permaculture, et l’autre mettre des produits anti-li-
quartier, à n’utiliser absolument aucun pesticide (ni maces. Dans ce cas précis, le dialogue est compliqué. Cf. le modèle de courrier 10
valant convention entre
insecticide ni engrais chimique). Et à utiliser Dans d’autres cas, la mixité des jardiniers voulue par la mairie et le jardinier.
68 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N

la mairie peut favoriser les échanges et l’apprentis-


sage mutuel des personnes concernées. Les jardiniers
du Grand parc et des jardins ouvriers sont parfois
sollicités par ceux des jardins partagés pour des
conseils en tant qu’« experts ».

Pour les jardiniers rencontrés, il ne semble pas y


avoir de lien entre l’entretien/la conception du parc,
l’écoquartier et les pratiques de jardinage.

“ Témoignage de jardiniers
du jardin ouvrier
« Nous jardinons de manière biologique. Si on
constate ou on voit que la personne a fait des
choses pas réglos, pas bios, on peut la radier de
l’association. C’est dans nos statuts, notre règle-
ment. On tolère la bouillie bordelaise pour les
tomates, et le purin d’orties. Rien que des trucs
naturels qu’on achète dans le commerce pour
chasser les limaces, pour chasser ceci celà. »

« On essaye de cultiver en biologique. Je n’aime


pas les graines qui poussent plus vite. Je n’en
veux pas. Il y en a qui le font mais moi non. »

« Parfois, les jardiniers des jardins partagés nous


demandent des conseils pour jardiner. Si on le sait, on
Pratiques de jardinage différenciées sur une même parcelle selon le dit parce que nous on ne sait pas tout non plus. »
les personnes ©Cerema

2.3.2 L a communication de la ville en


faveur de la biodiversité

La mairie, par l’intermédiaire de la serre pédago-


gique et du service « action environnement » de la
ville, met en place des actions de communication et
de pédagogie, et des moments collectifs autour du
jardinage et de l’environnement dans la serre et les
jardins.

Par exemple ont lieu une participation à la fête de la


Nature, un atelier photo/collage sur le thème de la
biodiversité, une journée dédiée aux jardiniers à
Affichage des activités sur le devant de la serre pédagogique l’occasion de la fête de Saint-Fiacre, patron des
©Cerema jardiniers. Sont aussi programmés en 2015 :
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N 69

• les 24 heures pour la biodiversité en partenariat 2.4.2 La gestion participative


avec le lancement du comptage des papillons sur
le Grand parc pour l’Observatoire des papillons des • Une participation des jardiniers centrée
jardins, dans le cadre du programme Vigie Nature sur leurs parcelles
du Muséum national d’histoire naturelle et dans la
démarche du Butterfly Conservatoire Europe ; L’hypothèse formulée par Demailly (2014), avançant
• un atelier connaissance des plantes sauvages dans que « les jardins partagés peuvent être appréhendés
le cadre du programme « sauvage de ma rue » ; comme vecteur de participation mais qu’au-delà de
• un atelier « Cueillette de fleurs et de calendula » la gestion du site (espace public), la participation à
dans le cadre de la fabrication de cosmétiques. la vie politique et le rôle des habitants dans les
processus de décision publique sont mineurs »,
Les informations sont affichées sur la serre, diffusées semble se vérifier dans le cas des jardins partagés de
sur le site internet de la ville, des courriers sont l’île aux partages. Les jardiniers sont surtout impli-
envoyés aux jardiniers pour les grandes manifestations. qués dans l’entretien de leurs parcelles (surtout pour
les jardins ouvriers) et dans la « vie au jardin » mais
n’ont participé que ponctuellement à la conception
2.4 Principaux enseignements et aux choix politiques.

2.4.1 La concertation Il est observé une différence de participation à la


gestion des jardins en fonction du statut des jardi-
• Une concertation à différentes phases, niers. D’un côté des jardiniers sont rassemblés en
sans toutefois être systématique, association et gèrent le volet administratif du jardin
avec une forte mobilisation des jardiniers (budget, attribution des parcelles, etc.). De l’autre
côté, des jardiniers plus ou moins autonomes sont
Deux principales phases de concertation peuvent en relation bilatérale avec la mairie. Tous ces jardi-
être identifiées. La première lorsqu’il s’est agi de niers assurant l’entretien de leurs parcelles.
conserver et maintenir les jardins ouvriers sur le site. Dans cette deuxième organisation (les jardins partagés),
Les jardiniers du jardin ouvrier se sont alors regroupés on voit la limite de l’implication citoyenne devant une
en association et se sont mobilisés pour modifier le tâche lourde de gestion des jardins (surface et nombre
projet d’aménagement initial de Nexity qui ne important de jardiniers concernés), et la limite de la
prévoyait pas le maintien des jardins. Ils se sont mobilisation d’un collectif de citoyens pour porter un
mobilisés et inclus dans le paysage politique pour projet communal de jardins partagés. La collectivité a
garder leurs jardins et non pour discuter de la fina- dû se substituer par défaut à une association. Il en
lité ou de l’organisation du parc. ressort que l’accompagnement fort de la collectivité
La deuxième phase, à venir et en cours d’organisa- par des agents dédiés (très marqué ici par rapport à
tion, prévoit de faire participer les usagers du parc d’autres jardins partagés) pose la question de la
aux décisions de gestion à travers la création d’un responsabilisation et de l’autogestion des jardiniers.
comité des usagers du parc.
• Une gestion participative favorable
Le projet de création des jardins partagés émanant à l’émergence de projets
de la ville de Saint-Ouen n’a pas été vraiment à
l’initiative des usagers, des futurs habitants de l’éco- Toutefois, cette organisation des jardins partagés
quartier ni des riverains, et n’a pas fait l’objet de permet de favoriser l’émergence de nouveaux projets
concertation particulière. Toutefois, au regard du de la part des habitants et/ou d’associations sur
nombre de personnes inscrites sur la liste d’attente, le territoire de la commune, ou d’initiatives dans
la mairie envisage d’agrandir la surface cultivable. l’île des partages (projet de jardin en pied d’im-
meuble avec les bailleurs, émergence des incroyables
comestibles...).
70 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N

Dans les jardins partagés, il ressort que très peu de • Des lieux favorables à la sensibilisation
parcelles sont vraiment « partagées » et que les et aux échanges
personnes se redistribuent des sous-parcelles pour
que chaque foyer ait une parcelle individuelle. Il La serre pédagogique est voulue comme un lieu
semblerait qu’à l’image des jardiniers ouvriers, les d’instruction, de « papotage » et de rencontre autour
jardiniers aient besoin de s’approprier un bout de du jardinage et de l’environnement en cours d’adap-
parcelle. Les parcelles sont en définitive peut être plus tation à la demande citoyenne : la forte implication
individualisées que « partagées », ce qui crée parfois des agents de la serre permet de la dynamiser et de
des tensions pour l’entretien collectif des haies, ou des promouvoir les enjeux liés à la préservation de la
conflits liés aux différences de pratiques entre le jardi- biodiversité surtout auprès des scolaires (de la
nier mettant des pesticides et celui qui prône un maternelle au collège), mais aussi des personnes
développement plus naturel du jardin. âgées et handicapées. Au regard des différentes et
nombreuses motivations des jardiniers pour venir au
• Des jardins collectifs à l’origine de nombreux jardin (besoin de loisir individuel ou collectif, besoin
services écosystémiques de sortir, ressource alimentaire, pédagogie pour les
enfants) et de la diversité de leurs profils (activité
Outre le besoin de s’approprier une parcelle, les professionnelle ou non, niveau d’instruction, exper-
jardiniers montrent un intérêt à profiter d’une tise ou non en jardinage), et malgré le dynamisme de
parcelle à jardiner pour « se faire plaisir », « garder la la collectivité, il est difficile de les mobiliser autour
forme », créer du contact, ou encore récolter des des ateliers.
fruits et légumes de saison. Les jardins collectifs ont
donc un réel intérêt social, procurant des services Pour la collectivité, le fait que les jardins collectifs
récréatifs, dans une moindre mesure alimentaires. Ils soient situés dans un écoquartier est un levier pour
jouent un rôle de sensibilisation écologique de justifier les pratiques écologiques de jardinage qui
manière bien plus marginale, les jardiniers étant très sont demandées aux jardiniers. Toutefois les jardi-
peu nombreux à venir aux ateliers pédagogiques niers semblent avoir des préoccupations très
organisés par la mairie. variables, allant de l’intérêt à l’indifférence pour leur
environnement urbain (écoquartier et écoparc,
2.4.3 L a sensibilisation aux enjeux gestion des eaux, usine d’incinération, trafic routier,
de biodiversité sols contaminés). Des entretiens complémentaires
seraient nécessaires pour conclure à ce sujet.
• La biodiversité : une priorité appréciée Toutefois, le lieu semble bien perçu par les jardiniers
différemment comme un lieu de rencontre, et notamment de
partage et d’échanges sur les pratiques de jardinage,
La biodiversité est prise en compte de manière diffé- en faveur d’une transmission des savoir-faire en
renciée selon l’échelle spatiale (du parc à la parcelle agriculture biologique ou en permaculture.
de jardinage) et temporelle (de la conception à la vie
au jardin) du projet. Au niveau du jardinage et pour • Une prise en compte encore limitée
la mairie, l’écoquartier se voudrait garant des du sol « ressource »
pratiques respectueuses de l’environnement11. Dans
les faits, cela se traduit principalement par des En définitive, l’activité de jardinage et d’entretien de
pratiques de culture variables selon les jardiniers et « parcelles publiques » par les citoyens pose la ques-
malheureusement pas toujours conformes aux tion, au-delà du « sol » foncier, du sol « ressource » et
pratiques souhaitées dans la convention. de la responsabilité de son entretien, de sa préserva-
tion comme un « bien commun », au même titre que
l’eau ou l’air.
11 Courrier valant
convention entre
la mairie et le jardinier.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 2 . J A R D I N S C O L L E C T I F S À S A I N T- O U E N 71

À retenir :

• La concertation, en permettant l’expression des • Suivant le type d’organisation des jardins collec-
attentes des habitants et usagers, peut signifi- tifs (présence ou non d’une association, niveau
cativement faire évoluer un projet. À Saint-Ouen, d’implication de la collectivité), l’implication
le projet initial a été abandonné pour satisfaire le citoyenne dans la gestion des jardins est plus ou
souhait des usagers de maintenir et développer les moins forte.
jardins collectifs. Cela semble une bonne décision au
regard du nombre de personnes inscrites sur la liste • La forte présence de la collectivité, si elle pose la
d’attente des jardins collectifs. question de la responsabilisation des jardiniers,
permet de favoriser l’émergence de nouveaux
• La mise en place d’un « comité des usagers du projets au sein du territoire communal ou d’initia-
parc », regroupant élus, agents de la ville et usagers tives au sein du secteur (projet de jardin en pied
peut permettre de faire participer les usagers du d’immeuble avec les bailleurs, émergence des
parc aux décisions de gestion et ainsi renforcer leur incroyables comestibles).
implication.
• Une serre pédagogique est particulièrement
• Les jardins collectifs procurent des services récréa- bien adaptée à la sensibilisation des enfants.
tifs et ont un réel intérêt social. Ils sont aussi À Saint-Ouen, elle a plus de mal à mobiliser les
perçus par les jardiniers comme un lieu favorable à adultes notamment en raison des horaires d’ouver-
la transmission de savoir-faire en agriculture ture ne correspondant pas aux moments où les gens
respectueuse de l’environnement (agriculture jardinent (surtout le soir). Ceci incite à être très
biologique, permaculture). vigilant sur les offres pédagogiques, afin qu’elles
soient en adéquation avec les usagers.
• Les jardiniers manifestent souvent le besoin de s’ap-
proprier un bout de parcelle. Cette individualisation
des parcelles peut conduire à les déresponsabiliser.
Afin d’éviter d’éventuels conflits, il paraît pertinent
de bien cadrer les exigences écologiques ainsi
que les modalités de gestion des espaces collec-
tifs dans une convention.
72 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N

3 Parc du Vallon
Réaménagement d’un grand parc existant de 11 ha

Situation géographique Lyon (69)


Superficie 11 ha
Date de livraison 2014
Porteur du projet Métropole de Lyon / Grand Lyon (maître d’ouvrage pour le volet hydraulique)
et SERL (aménageur pour la Métropole pour le volet aménagement)

3.1 Présentation du site Or ces dernières années la ville de Lyon, en tant que
gestionnaire, observait des dysfonctionnements :
Situé à la lisière du quartier de la Duchère, labellisé inondations de Vaise lors des fortes pluies, manque
EcoQuartier en 2013, le parc du Vallon est un espace de visibilité des accès au parc, certains chemine-
vert de 11 ha, représentant un poumon vert pour le ments peu accessibles. Il était nécessaire de réaliser
9e arrondissement de Lyon. Ce site existe depuis les de nouveaux aménagements : hydrauliques pour
années 1960, et a été aménagé dans les années 1970 améliorer la gestion des eaux pluviales et de ruissel-
en parc, reliant Ecully, Vaise et la Duchère. Ce premier lement, paysagers pour revaloriser le site et faire du
aménagement a notamment été l’occasion de buser parc du Vallon un grand parc urbain dans l’Ouest
le ruisseau des Gorges qui le traverse en long. lyonnais.

 lan du site
3.1.1 P

Le projet de rénovation du parc du Vallon (Source : Le parc du Vallon, les secrets du projet – Métropole de Lyon)
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N 73

Profitant du projet de renouvellement urbain du s’entretiennent et se renouvellent naturellement, de


quartier de la Duchère, la Métropole de Lyon a lancé la préservation de continuités entre les milieux
un projet de réaménagement du parc existant pour naturels (corridors écologiques).
le rendre plus fonctionnel, et l’adapter aux usages
attendus. C’est la direction de l’Eau de la Métropole  hronologie du projet
3.1.2 C
qui a piloté ce projet pour le volet hydraulique, et
SERL qui a piloté l’aménagement sous concession de Afin de choisir puis d’enrichir le projet de réaména-
la Métropole de Lyon.Le projet de rénovation du parc gement du parc du Vallon, une démarche de concer-
du Vallon. tation a été conduite entre 2006 et 2010 avec les
habitants et les futurs services gestionnaires. La
Les partis pris paysagers vont dans le sens de la concertation a réuni un groupe d’une quarantaine
valorisation des boisements existants, du maintien d’habitants volontaires.
de la biodiversité, de la création de paysages qui

Ateliers Ateliers Réunion publique


Réunion thématiques - thématiques - de présentation Inauguration
publique Phase 1 Phase 1 du projet final du parc

2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

Marché de définition
Conception du projet Travaux
pour le parc

 ocuments consultés
3.1.3 D

- Dossier de presse du parc du Vallon, juin 2014


- Parc du vallon, les secrets du projet, 2012
- Les carnets du projet Lyon La Duchère – Concertation. Le parc du Vallon, 2006
- Synthèse des ateliers de concertation du parc du Vallon de la phase 1 et de la phase 2
- Parc du Vallon, l’échappée belle... http://www.gpvlyonduchere.org/-Parc-du-Vallon,201-.html
- La concertation sur l’aménagement du parc du Vallon : http://www.gpvlyonduchere.org/-Parc-du-Vallon-.html
74 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N

3.2 L’implication citoyenne La mission GPV Lyon la Duchère dispose d’un espace
d’expositions et de dialogue dans le quartier de la
3.2.1 La communication sur le projet global Duchère, appelée la maison du projet la Duchère, qui
Lyon la Duchère reste l’endroit le plus adapté pour obtenir une infor-
mation fiable. Des expositions sont organisées pour
Forte d’une équipe de deux personnes dédiées à la présenter les avancées concrètes comme les premiers
concertation et la communication, la mission projets de reconstruction. Un cahier d’expression est
Duchère en charge du projet de renouvellement du également à la disposition des visiteurs ; les remarques
quartier a développé un large panel d’outils et de sont transmises aux élus et aux techniciens.
démarches pour informer les habitants et les asso-
cier à la transformation de leur quartier. Un travail 3.2.2 L a mise en place de la concertation
particulier avec le tissu social local a été mené, pour le parc du Vallon
afin de recueillir les retours d’expériences et de
recenser les attentes que les habitants pouvaient Les habitants ont eu plusieurs occasions pour inter-
déjà manifester. venir en préalable à la concertation : en s’engageant
À partir d’outils d’information tels qu’un journal dans le comité de suivi participatif qui vise à suivre
(Ville en vue), un site internet, une bande dessinée à les engagements des élus, lors d’un diagnostic en
destination des scolaires, la mission Duchère a marchant qui vise à repérer les dysfonctionnements
notamment pu solliciter les habitants pour les faire sur les espaces publics, ou encore dans les enquêtes
participer au projet. « écoute habitant » lors desquelles ils peuvent
exprimer leur perception du quartier.

• Le projet vu par la presse

« La plupart du temps, un dispositif de concer-


tation (c’est le cas pour le Vallon par exemple)
commence par une réunion publique où élus et
techniciens présentent le sujet soumis à
concertation. Les personnes intéressées
peuvent alors s’inscrire pour participer aux
ateliers de travail. L’investissement est certain
(environ une réunion par mois) mais c’est une
valeur ajoutée réelle pour le projet : grâce à ce
travail, celui-ci ressort plus riche et mieux
adapté aux attentes des habitants. »

Extrait du Journal du Projet Lyon La Duchère,


n° 11, mai-juin 2006.

Extrait de Journal du Projet Lyon


La Duchère, n° 10, mars-avril 2006

Communiqué de presse
du 13/01/2006 de la mission Lyon
La Duchère
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N 75

La concertation, lancée en 2006 lors d’une réunion  n premier recueil des attentes,
3.2.3 U
publique, s’est déroulée en deux grandes phases lors en amont du projet
de la programmation, puis lors de la conception.
La première phase de la concertation consistait à
Pour attirer un maximum de participants vers la réaliser avec les habitants un diagnostic spécifique
concertation, l’aménageur a informé les habitants d’usage. Ainsi, de février à avril 2006, les habitants
par des tracts dans les boîtes aux lettres, par des ont été sollicités pour décrire les usages actuels du
communiqués de presse, par des réunions publiques. parc, les usages qu’ils attendaient après réaménage-
Il constate « qu’on retrouve généralement les mêmes ment, et toutes les autres attentes concernant le
personnes tout au long de la concertation ». Et ceci projet. Il s’agissait donc de recueillir leurs attentes
malgré les efforts réalisés pour impliquer des pour le parc, bien en amont du projet, afin d’enrichir
représentants spécifiques, en les invitant particuliè- les éléments de programme de l’aménageur (SERL).
rement. Il s’agit par exemple d’associations de loca-
taires, de représentants de personnes handicapées, Trois ateliers de concertation ont structuré les
de représentants d’entreprises, de parents d’élèves. échanges, auxquels les trois équipes de paysagistes
« Afin d’attirer un maximum de personnes à ces assistaient afin d’ajuster leur proposition de
ateliers, des expositions tournantes dans les centres programme. En tant qu’utilisateurs du Vallon, les
sociaux ont été mises en place, ainsi qu’un accueil habitants ont pu faire valoir leur « expertise d’usage ».
d’enfants pour permettre aux mères de participer » C’est donc à partir de leurs perceptions et de leurs
(aménageur). attentes que les équipes de paysagistes ont été
chargées d’élaborer leurs propositions.

“ Témoignage d’une habitante ayant participé à la concertation


« Je me suis inscrite dès le premier atelier pour faire entendre ma voix. Nous devions faire des propositions pour
l’avenir du parc. L’animateur donnait la parole à chacun, c’était convivial. J’ai appris beaucoup de choses sur
l’aménagement urbain et paysager. C’est notre environnement pour demain qui se décide dans la concertation,
alors c’est important de participer. »

3.2.4 L es attentes des habitants lors de - « structurer un environnement écologique avec un


la première phase de concertation écosystème préservé » ;
- « insérer des essences végétales adaptées pour la
Durant les ateliers de concertation de 2006, les habi- faune (écureuils, oiseaux), des haies, des buissons
tants ont exprimé de nombreuses attentes, essen- pour reformer des habitats naturels, des arbres et
tiellement liées aux usages futurs : maintien des des fleurs, des jardins potagers, des espaces de
activités pratiquées au préalable, amélioration de la forêts à réaménager » ;
sécurité, mise en accessibilité pour les personnes à - « adapter l’éclairage pour la faune ».
mobilité réduite, possibilité de jouer au foot, rénova-
tion du lavoir, mise en place de gradins, aménage- Il est à noter que le parc étant déjà en place depuis
ment d’espaces dédiés aux déjections canines. plus de quarante ans, les habitants ont surtout
souligné leur envie de conserver le parc tel qu’il
Certains ont toutefois formuler des envies de : était, avec les usages déjà présents : « Les habitants
- «ne pas trop urbaniser ou sophistiquer le parc, aiment et utilisent le parc comme il est » (extrait du
laisser un côté sauvage et romantique » ; compte-rendu de concertation).
- « préserver les grands arbres (notamment les vieux
chênes) » ;
76 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N

Les trois équipes de paysagistes en marché de défi-  ne concertation prolongée jusqu’à


3.2.5 U
nition ont donc intégré ces attentes dans leurs l’étape de conception du parc, en
propositions de réaménagement du parc. Suite à partenariat avec l’équipe paysagiste,
cette phase de concertation, les trois équipes de
les élus et les techniciens
paysagistes sont venues tour à tour en octobre 2006
de la collectivité
pour présenter leurs projets aux habitants ayant
participé aux ateliers. Les habitants se sont ensuite
réunis pour échanger sur ces trois propositions et Dans la seconde phase, entre mars et septembre 2008,
préparer, à l’attention des élus, une note synthéti- les habitants ont été sollicités pour donner leur avis sur
sant les éléments intéressants relevés chez chaque les propositions d’aménagement de l’équipe lauréate
équipe. C’est ensuite en janvier 2007 que les élus ont (ILEX Paysages). Cinq ateliers thématiques ont eu lieu,
présenté le choix de l’équipe lauréate aux habitants au cours desquels la maîtrise d’ouvrage a pu présenter
lors d’une réunion publique. un début de projet, et demander l’avis et les attentes
Par ailleurs, une synthèse des ateliers a été réalisée des participants, tout en soulignant les contraintes
et largement diffusée au grand public par la non négociables du projet. Au cours de ces ateliers, les
Métropole de Lyon, reprenant ainsi l’ensemble des participants et l’équipe retenue ont finalisé le projet
éléments ressortis lors de la concertation, et présen- sur les sujets des entrées du parc, des jeux et équipe-
tant les trois propositions d’aménagement des ments techniques, de la faune et de la flore, de l’eau,
équipes de paysagistes. etc. La présence des gestionnaires lors des ateliers est
devenue indispensable, afin d’envisager dès l’amont la
faisabilité des propositions des habitants.

“ Témoignage de l’aménageur
« Dès le début de la concertation, nous sommes venus avec des schémas de composition, des plans masses...
Ainsi les habitants ont pu réagir à partir de propositions. Cependant rien n’était figé, et le paysagiste était présent
pour discuter et ajuster le projet. »

Ainsi lors de cette seconde phase, l’équipe de paysa-


gistes a proposé des schémas de composition, des
plans masses, et les habitants ont réagi à partir de
propositions.
“ Témoignage de l’aménageur
« Nous étions pour le parc du Vallon assistés d’un
médiateur. La mission Duchère lui présente le
projet, et celui-ci utilise un discours plus appro-
priable envers les habitants. Il s’agit d’un presta-
Durant cette phase, une exposition sur les jeux pour taire qui présente le projet, donne les objectifs et
enfants a tourné dans le quartier pendant plusieurs anime les ateliers. De plus, les habitants se sont
semaines afin que le choix se fasse en associant un formés progressivement à ces méthodes partici-
plus grand nombre de personnes. patives, en participant. »

Lors de ces ateliers, l’animation des débats a été


réalisée par une agence de communication spécia-
lisée dans l’accompagnement des acteurs publics.
Les métiers de cette agence sont en effet, entre
autres, d’évaluer, concevoir et animer des démarches
participatives.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N 77

En 2011, une réunion publique a permis de présenter Cinq ateliers de concertation ont structuré les
le projet final aux habitants. Des visites de chantier échanges, dont l’un sur la faune, la flore et la végé-
ont ensuite été organisées, et le parc a été inauguré tation urbaine, et un autre sur l’eau.
le 7 juin 2014, avec l’organisation de visites du L’aménageur et l’équipe lauréate ont présenté dans
parc. chaque atelier les éléments envisagés de conception
du parc, avec l’angle thématique de l’atelier. Ainsi,
 n recueil d’avis sur des propositions
3.2.6 U lors de l’atelier dédié à la faune, la flore et la végé-
d’aménagement tation urbaine, l’équipe paysagiste a présenté les
éléments de diagnostic faune/flore, et les différentes
Une fois l’équipe de paysagistes choisie, celle-ci s’est propositions d’aménagement (végétation en bord
attelée au travail de conception du parc. C’est d’eau, prairies, plantations, entretien envisagé, limi-
pendant cette phase que la deuxième étape de la tation des moustiques).
concertation a débuté. Les habitants ont en effet été Les habitants, en réponse à ces éléments, se sont
sollicités pour donner leur avis sur des éléments de focalisés sur la possibilité de promener son chien
conception. Ouverte à tous, la concertation a réuni dans le parc et sur la présence de canisites.
un groupe d’une quarantaine de volontaires, Concernant les éléments liés davantage à la biodi-
composé de Duchérois et d’Écullois. versité, les habitants ont peu réagi.

“ Témoignage de l’aménageur
« Les habitants se sont focalisés sur le sujet des chiens. Le reste a été évoqué : rivière, animaux nocturnes...
mais les habitants n’ont pas réagi, ils sont restés spectateurs de ces sujets. »

3.2.7 Le maître d’ouvrage à l’écoute des un espace de liberté pour les chiens. Ceci a été
habitants, mais décisionnaire final refusé, et seuls les chiens en laisse sont acceptés
dans le parc. Cette décision a été prise en raison
d’une volonté de respect des autres usagers du parc,
La Métropole de Lyon, la SERL et l’agence ILEX et correspond également à une homogénéisation
Paysage étaient à l’écoute des habitants, afin de des règlements de l’ensemble des parcs et jardins de
réaménager le parc de manière à ce qu’il concorde la ville de Lyon.
au mieux avec leurs attentes. Cependant le maître
d’ouvrage urbain avait quelques contraintes, annon- Un grand nombre d’attentes exprimées par les habi-
cées dès le départ aux habitants : tants lors des étapes de concertation ont été prises
- la réalisation de bassins de rétention des eaux de en compte. Par exemple, les chênes au fond du
pluie, Vallon ont été conservés par l’équipe paysagiste,
- un budget arrêté, comme les habitants le souhaitaient (première phase
- un parc avec espaces verts, sans édifice, de concertation : « préserver les grands arbres
- pas d’accès motorisé sauf pour un accès service/ (notamment les vieux chênes) »). Autre exemple : des
sécurité. pupitres informatifs ont été installés dans le parc,
suite à la demande des habitants.
Tous les habitants n’ayant pas les mêmes souhaits, le
maître d’ouvrage urbain a dû clore les débats en
arrêtant des choix. Par exemple, pour la place des
chiens : certains habitants voulaient que le parc soit
78 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N

“ Témoignage d’une riveraine


« Avant c’était moche et sale, je ne venais jamais. J’ai commencé à venir ici depuis qu’il est sous sa nouvelle forme.
C’est calme, je regarde les papillons, j’écoute les oiseaux, les feuilles des arbres qui bougent avec le vent, c’est
reposant. J’aime bien me promener sur les chemins qui sont au milieu des vieux arbres, c’est joli et à l’ombre. »

“ Témoignage d’une riveraine qui


promène son chien
« Ces espaces ouverts, près du ruisseau, c’est un
peu surprenant. Au final, je trouve ça joli, et on
“ Témoignage d’une riveraine
« Non, je n’ai pas remarqué une arrivée de mous-
tiques, pourtant j’habite juste au-dessus du parc.
Ni trop d’insectes : il y a des moucherons dans le
peut se promener au milieu des grandes herbes, bois en contrebas, mais c’est tout. »
on se croirait dans un champ. Mais c’est
dommage qu’on ne puisse pas laisser les chiens
en liberté, il [son chien] pourrait profiter de ces
grandes prairies. »

Espaces ouverts en creux, autour du ruisseau, gérés de manière extensive. ©Cerema


R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N 79

3.3 La nature en ville 3.3.2 L a conception


et la biodiversité
Le parc du Vallon a été réaménagé en trois parties :
3.3.1 L es objectifs de biodiversité le vallon jardiné, le vallon champêtre et le vallon
romantique.
Un diagnostic préalable au réaménagement a été Le vallon champêtre est organisé autour de grandes
fait sur le parc, dont certains inventaires faune/flore prairies et du ruisseau des Gorges : autrefois enterré,
qui ont révélé un patrimoine végétal à préserver et il est remis à ciel ouvert sur une distance de 400
à enrichir, ainsi que des espèces animales remar- mètres. Ainsi cette partie est composée des berges
quables (pics verts, insectes xylophages, reptiles, du ruisseau, traitées en prairies en pentes douces.
papillons). Les bassins qui ponctuent l’écoulement du ruisseau
Les objectifs étaient donc de conserver certaines sont la plupart du temps à sec, et ont été aménagés
plantations et de les enrichir en implantant davan- en grandes clairières pour accueillir les usagers du
tage d’espèces d’arbres, d’arbustes et de vivaces. parc en sécurité et offrir des terrains de jeux de plein
Pour favoriser la biodiversité, il a été également air. Ils se remplissent d’eau de pluie lors de fortes
choisi de supprimer les espèces exogènes et notam- averses.
ment les robiniers faux-acacias, afin de laisser les Le vallon romantique bénéficie quant à lui d’une
espèces endogènes se développer. Les espèces spon- végétation dense qui crée une ambiance intimiste
tanées sont également privilégiées, notamment de sous-bois.
dans les espaces de transition entre boisements et Les cerisiers, arbres fruitiers des vergers environ-
milieux ouverts. nants, sont réintroduits comme arbres embléma-
tiques du parc. Plantés à chaque entrée, ils agissent
La Métropole de Lyon avait par ailleurs pour objectif en tant que marqueurs des accroches du parc.
principal de rouvrir le ruisseau des Gorges (qui avait Six variétés ont été choisies de manière à enrichir
été enterré) en le remettant en surface et en créant la biodiversité.
des berges naturelles, et d’implanter des bassins de
rétention des eaux pluviales tout au long du ruis-


seau. Un objectif était de concilier ce projet hydrau-
lique avec le parc, en limitant notamment l’abattage Témoignage de la direction des
d’arbres et donc en implantant les bassins sur les Espaces verts de la ville de Lyon
milieux ouverts. Par la reconstitution de milieux « Les habitants sont heureux de voir l’aménage-
temporairement humides sur les berges du ruisseau ment qui a été réalisé sur ce parc, car il est passé
et l’implantation d’une végétation de berges, cet d’un état de friche délaissée à une amélioration
aménagement contribue aussi à créer de nouveaux qualitative importante. Même si des parties sont
refuges pour les espèces inféodées à ces milieux. Les fauchées tardivement et que cela ne plaît parfois
habitants se sont toutefois questionnés, lors de la pas aux habitants, l’amélioration de l’existant est
concertation, sur la potentielle présence de mous- quand même tellement grande que les habitants
tiques et de grenouilles. acceptent. »

“ Témoignage d’un habitant ayant


participé à la concertation
« Je suis heureux de constater qu’ils ont gardé les
arbres, développé la biodiversité, et installé un
éclairage économique. »
80 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N

3.3.3 L a gestion Les habitants ne sont pas sollicités pour participer à


la gestion du parc. Toutefois des jardins collectifs
Dès la conception, l’équipe de paysagistes en colla- existent à proximité immédiate du parc, où les habi-
boration avec la direction des Espaces verts de la tants peuvent s’engager dans leur gestion.
ville de Lyon, labellisée ISO14001 depuis 2005, a
envisagé une gestion écologique du parc. Outre 3.3.4 L a sensibilisation aux aménagements
l’absence de traitement herbicide, fongicide ou liés à la biodiversité
insecticide, des mesures alternatives sont proposées :
maturation du peuplement forestier, diversification Des panneaux pédagogiques ont été intégrés au
des milieux, fauchage tardif privilégié plutôt que parc ponctuellement (14 sur la totalité du parc,
tonte, interventions respectueuses de la nidification installés au fil de l’eau). Demandés par les habitants
des oiseaux, installation d’abris pour les insectes et lors de la concertation, ils ont pour objectif d’in-
les petits mammifères. Pour la gestion des bois former sur des éléments de composition du parc. Ils
morts, l’équipe paysagiste propose des mesures pour expliquent le patrimoine historique du lieu, sa faune
les mettre en sécurité et les maintenir le plus et sa flore, l’histoire de son aménagement, les
possible sur site, avec la mise en place de panneaux secrets du ruisseau, des barrages et du lavoir. Un
pédagogiques pour expliquer cette action. certain nombre de panneaux, situés à proximité du
La préoccupation environnementale se retrouve ruisseau et des bassins, expliquent notamment aux
également dans la gestion de l’éclairage public, qui visiteurs la gestion des eaux de pluie, la résurgence
est éteint de minuit à l’aube, sauf sur l’allée principale. du ruisseau et la conception des bassins.

Panneaux informatifs situés sur le parc ©Cerema


R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N 81

La direction des Espaces verts de la ville de Lyon, qui pour sensibiliser les enfants à la nature qui les
a repris la gestion en 2016, signale que des panneaux entoure. Peu d’animations sont toutefois réalisées
d’information, spécifiques à la faune, seront placés dans le parc du Vallon, mais la direction envisage de
dans le parc afin d’entrer davantage dans le détail de créer des partenariats avec des associations locales
la biodiversité présente sur le site. pour développer des animations sur le site. La MJC
locale organise par ailleurs des animations festives
Par ailleurs, la direction réalise des animations péda- afin que les habitants puissent s’approprier le parc
gogiques avec les écoles, dans les parcs de la ville,

Le vallon champêtre que le ruisseau traverse ©Cerema Conservation de certains arbres préexistants ©Cerema

Prairies fleuries du vallon champêtre ©Cerema

Le vallon jardiné ©Cerema Le vallon romantique, davantage boisé ©Cerema


82 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N

3.4 Principaux enseignements • Une forte implication des habitants dans


le réaménagement du parc, lors de la
3.4.1 L a concertation programmation et de la conception du projet

• Une démarche de concertation développée Assisté d’une agence de communication dans la


grâce au lien avec le projet de rénovation mise en place et l’animation des ateliers de concer-
urbaine du quartier de la Duchère tation, le maître d’ouvrage s’est entouré d’habitants
tout au long de l’élaboration du projet : dès l’amont
Le parc du Vallon fait partie du projet de rénovation lors de la programmation, lors du choix du maître
urbaine du quartier de la Duchère. Ce projet de d’œuvre, et lors de l’élaboration des plans du parc
grande envergure bénéficie d’une équipe pluridisci- sur de nombreux aspects spécifiques, dont la faune
plinaire dédiée au projet de renouvellement du et la flore.
quartier, au sein de laquelle deux personnes sont Les habitants émettent des retours positifs sur la
dédiées à la mise en place de la concertation concertation, mais également sur les résultats
pour le projet de rénovation, dont le réaména- observables actuellement. Les retours négatifs que
gement du parc. De plus, de nombreux outils de l’on peut recevoir de la part des habitants aujourd’hui
communication et de recueil d’attentes ont été mis font largement écho aux discussions qui ont eu lieu
en place pour le projet la Duchère dès le démarrage lors de la concertation : chiens en laisse, difficulté de
du projet : la maison du projet la Duchère, un site jouer à des jeux de ballon dans les espaces centraux
internet et un journal dédiés au projet de quartier, du parc par exemple. Le maître d’ouvrage a en effet
une bande dessinée destinée aux enfants, un comité écouté les habitants, répondu à leurs interrogations,
de suivi participatif composé d’habitants, des pris en compte certains éléments, mais aussi choisi
enquêtes Ecoute Habitant, etc. Ceci a permis d’ac- de ne pas répondre positivement à toutes les
compagner la concertation sur l’ensemble du projet, demandes. Son rôle de décisionnaire peut susciter
mais également celle plus spécifique au parc. des frustrations de la part de certains habitants.
Mais globalement, les retours positifs des habitants
• Des efforts particuliers pour attirer sur l’esthétique, les arbres, les animaux, l’aspect
un maximum de personnes lors sauvage, le calme, démontrent une bonne prise en
de la concertation compte des attentes initiales des habitants. L’absence
de détérioration confirme l’acceptation et le respect
Pour éviter d’avoir toujours les mêmes personnes général des aménagements.
lors de la concertation, un effort a été réalisé par la
mission Duchère pour informer spécifiquement des • Un projet de parc marqué par son passé
représentants d’associations, de parents d’élèves, ou de parc...
autres. Toute la communication qui entoure le
projet a également permis d’inviter l’ensemble des La particularité de ce projet repose sur le fait qu’il
habitants à ces séances de concertation (tracts dans s’agit d’une rénovation d’un parc existant, et non
les boîtes aux lettres, communiqués de presse, d’une création. Le parc existait déjà au préalable, et
articles dans les journaux locaux, etc.). Enfin, des il était déjà le support de pratiques de loisirs par les
expositions tournantes dans les centres sociaux ont riverains.
été mises en place, ainsi qu’un accueil d’enfants Les habitants qui ont participé à la concertation
pour permettre aux mères de participer. habitaient le quartier depuis plusieurs années. Ils
Ceci a eu toutefois des effets limités, puisque l’amé- avaient donc en tête les pratiques passées et les
nageur a constaté que les personnes venues parti- caractéristiques préalables du parc.
ciper ont été globalement les mêmes tout au long Or le parc était réellement apprécié par les habi-
de la concertation. tants : seuls des problèmes de sécurité les gênaient.
Mais l’esthétique de la nature leur plaisait puisqu’ils
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N 83

ont demandé de « laisser l’aspect sauvage et roman- • Une biodiversité renforcée, globalement bien
tique » du parc. Une appropriation du parc ayant accueillie par les habitants
déjà eu lieu, les habitants se sont particulièrement
battus pour défendre certains sujets (parc ouvert à Suite à des diagnostics écologiques, le maître d’ou-
tous, accessibilité, choix du nom du parc, etc.). vrage et le maître d’œuvre ont eu pour objectif de
renforcer la biodiversité, notamment en conservant
3.4.2 L a biodiversité un maximum d’arbres sains préexistants et en
renforçant cette strate arborée par une strate arbus-
• La biodiversité, un sujet qui préoccupe peu tive. Des plantations d’espèces locales et variées, de
les habitants végétation basse et moyenne, ont été réalisées sur le
site. Les habitants ont été en phase avec ces objec-
Lors des différentes étapes de concertation, la biodi- tifs, ayant eux-mêmes proposé ces actions en amont.
versité n’a pas été un sujet de débat pour les habi- Les débats restent toutefois ouverts quant à l’accep-
tants, bien que le sujet ait été présenté par le maître tation par les habitants des prairies fauchées en
d’ouvrage et l’équipe paysagiste. Les débats ont été fond de vallon, où s’écoule le ruisseau. Les surfaces
axés sur les pratiques à développer ou non dans le en prairies représentent de grandes superficies : les
parc, sur la conciliation des usages et sur la sécurité. habitants ont parfois du mal à en apprécier l’esthé-
Même lors de l’atelier dédié aux sujets de la flore, de tique, ou reprochent à ce type d’espace l’absence
la faune et de la végétation urbaine, les habitants ne d’usage bien défini (quid des jeux de ballon ?).
se sont pas approprié le sujet des écosystèmes et de
la biodiversité à installer, mais sont restés focalisés • Des efforts de communication sur les milieux,
sur l’accessibilité du parc aux chiens. la flore et la faune présents

L’hypothèse peut être faite que le parc étant déjà au Dans le parc du Vallon ont été installés des panneaux
préalable très végétalisé et d’aspect naturel, les d’information sur le cycle de l’eau, la réouverture du
habitants n’ont peut-être pas perçu d’enjeu particu- ruisseau et son intérêt hydraulique et écologique, les
lier dans le fait de favoriser davantage de biodiver- arbres, la biodiversité du parc, la gestion écologique.
sité, ceci échappant à leurs compétences. La dimen- De plus, un dossier de presse est paru en juin 2014,
sion esthétique et le contact sensoriel étant déjà où des éléments chiffrés sur les prairies, les fauches
présents (végétation, petite faune), leur priorité était ou encore les arbres ont été publiés.
de conserver la nature existante et de bénéficier de
pratiques renouvelées.
84 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N

À retenir :

• L’implication des citoyens peut avoir lieu, comme •


L’équilibre entre la biodiversité et les usages est
sur le parc du Vallon, en phase de programmation et délicat. Les choix des aménagements en faveur
en phase de conception. de la biodiversité, lorsqu’ils peuvent être
contraires à certains usages, doivent être parti-
• L’animation des ateliers de concertation peut s’ap- culièrement expliqués pour être compris et
puyer sur des agences spécialisées. acceptés par les citoyens.

• Le sujet de la biodiversité n’est pas forcément • Toutes les demandes des habitants ne peuvent être
maîtrisé par les citoyens. L’esthétique, l’aspect satisfaites. Le maître d’ouvrage, qui est le déci-
naturel leur parlent davantage. sionnaire final, doit expliquer et communiquer
sur la non prise en compte de ces attentes.
• Une importante communication sur les milieux,
la faune et la flore a été mise en place au sein
du parc suite à la demande des habitants.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 3 . PA R C D U VA L L O N 85

Panneaux informatifs parc du Vallon. ©Cerema


86 RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER

4 Jardin Demain à Montpellier


Création et gestion d’un jardin de 1 200 m 2
sur un ancien parking imperméabilisé
Situation géographique Quartier Croix d’Argent à Montpellier (34)
Superficie 1 200 m²
Date de livraison 2010
Porteur du projet Ville de Montpellier
Partenaires Coloco, APIEU

4.1 Présentation de la démarche mûriers platanes créant un micro-lieu de vie pour les
habitants du quartier. Le quartier Lemasson a été
Dans le cadre de ses actions en faveur de la biodi- construit dans les années soixante pour les rapatriés
versité, la ville de Montpellier a souhaité lancer d’Algérie. Aujourd’hui, même si les jeunes sont assez
l’opération « Jardin Demain ». Celle-ci a fait suite à nombreux et la délinquance bien présente, cette
l’étude des stratégies de gestion des délaissés de population est vieillissante et très attachée à son
Montpellier, menée entre août 2009 et septembre quartier (Pauline Scherer, 2012).
2010 par le paysagiste Gilles Clément et le collectif
d’architectes paysagistes Coloco. Cette étude s’est Un travail de concertation a permis de faire émerger
basée sur un repérage des friches situées dans les les attentes des habitants face à ce nouvel espace et
quartiers est de la ville, et visait à établir un plan de dessiner le projet. Suite à la désimperméabilisa-
d’action pour l’aménagement, la protection ou la tion du site, un grand chantier collectif a été orga-
gestion de ces espaces. Au travers de cette étude, a nisé pour la réalisation du jardin en 24 heures, les 8
été repéré le quartier Croix d’Argent, et plus particu- et 9 octobre 2010, transformant une cour minérale
lièrement la résidence Lemasson comme étant l’un de 1 200 m² en un jardin méditerranéen par les
des potentiels délaissés à aménager, ceci en milieu habitants : 2/3 de milieu sec et 1/3 de jardin partagé
contraint car très imperméabilisé. en bacs.
En parallèle, Jardin Demain s’inscrivait également Ce chantier collectif a réuni les habitants du quar-
dans deux autres démarches : le vaste programme tier, les jardiniers de la ville, Coloco et l’Atelier
de réhabilitation urbaine de la ville, et le « printemps permanent d’initiative pour l’environnement (APIEU).
de la démocratie » qui avait pour but de relancer des Il a ensuite été géré en collaboration par des habi-
formes d’actions collectives à l’échelle du quartier tants regroupés en association et le service des
en associant biodiversité et développement de la vie Espaces verts de la ville. Les habitants du quartier
sociale. ont ainsi été impliqués dans le projet de sa concep-
tion à sa gestion en passant par sa mise en œuvre.
Le site choisi était un parking à l’abandon dans le Le jardin Demain fait partie des dix-huit jardins
quartier Lemasson, situé sur un terrain appartenant partagés de Montpellier.
à la ville. On y trouvait des bancs à l’ombre de
RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER 87

 lan du site
4.1.1 P

Jardin Demain

Localisation du jardin Demain


Quartier Lemasson dans l’ouest
de Montpellier
(source : orthophoto50, 2012)

Plan schématique du jardin Demain (source : Coloco)


88 RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER

• Transformation du site • Phase chantier

Le chantier préparatoire au jardin a eu lieu en La création du jardin a eu lieu les 8 et 9 octobre


septembre 2010 avec les travaux de désimperméabi- 2010, sollicitant la ville de Montpellier et le collectif
lisation du parking en bas d’immeuble. Ce chantier Coloco entourés de bénévoles (étudiants, connais-
a été organisé par le service des Espaces verts de sances, etc.) et l’APIEU. Les citoyens ont été égale-
la ville. ment mobilisés au cours de ces deux journées pour
En parallèle, le bailleur social (ACM) a engagé des des ateliers thématiques (bacs, menuiserie, plantations).
travaux de rénovation de la façade de l’immeuble • le vendredi 8 avec les scolaires : quatre classes des
dans un contexte de modernisation du quartier. écoles voisines ont participé aux travaux.
• le samedi 9 : en présence des habitants du quartier
et de l’immeuble. La journée a été clôturée par un
buffet froid offert par la ville et l’intervention d’un
groupe de musique.

• Coûts

Au total, une somme de 61 500 € a été investie dans


la création du jardin Demain : démolition de l’ancien
parking, terrassements, apports de matériaux, pose
d’un compteur d’eau, fourniture de plantes, planta-
tions, et pose de clôtures. Ensuite, entre la livraison
du jardin en 2010 et l’année 2013, le coût des inter-
ventions techniques s’est élevé à 12 200 € (répara-
tion et installation d’équipements, replantations,
Désimperméabilisation du parking abandonné,
septembre 2010 (source : Coloco) paillage, nettoyage ponctuel). L’entretien annuel,
finalement mis en place pour assurer le bon état du
jardin, revient à 3 200 € (note de synthèse de la
ville, octobre 2013).

Création de Jardin Demain, 8 et 9 octobre 2010


(source : Coloco)
RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER 89

4.1.2 Chronologie du projet

Chantier
participatif

Création de l’association
Chantier gestionnaire Du Soleil à Clôture de la partie
préparatoire Lemasson jardin potager

7, 8
sept.
oct.

2009 2010 2011 2012 2013 2014


Étude stratégique pour la gestion des délaissés
Gestion du jardin
Concertation et
élaboration du projet

4.1.3 Documents consultés

INTERNET
http://www.capitale-biodiversite.fr/experiences/jardin-demain-desamenagement-dun-parking-la-cite-lemasson-et-creation-dun-jardin-avec
http://montpelliercroixdargent.blogs.midilibre.com/archive/2011/10/24/lemasson-jardin-de-demain-le-jardin-de-demain-fete-ses-un-an.html
http://www.montpellier.fr/3451-jardin-demain.htm
http://www.eskis.org/2010/11/03/jardin-demain/

PAPIER
• Pauline Scherer, La démarche de co-création artistique et sociale comme espace d’expérimentation politique et
comme mode de résistance : trois expériences à l’échelle du quartier, mémoire de stage de master 2, Université
Paul Valéry Montpellier 3, Septembre 2012.
• Coloco, Fertiles Mobiles, cultiver ensemble l’espace public, Éditions Tout Contre, juin 2012.
• Liste des végétaux par zone – Ville de Montpellier, service des Espaces verts.
90 RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER

4.2 L’implication citoyenne cement de Montpellier et priorités d’aménagement.


Parmi les sujets liés à la biodiversité, la question de
Jardin Demain est un projet qui a été décidé au la gestion et de la revalorisation des friches urbaines
niveau de la direction du Paysage et de la Biodiversité est abordée. Cependant les participants à l’atelier ne
de la ville. Il n’est pas né d’une intention participa- sont pas forcément du quartier, ou sont déjà très
tive mais d’une intention publique d’aménagement. investis dans la vie du quartier.
L’objectif était double : introduire la biodiversité en
milieu très contraint et sensibiliser les habitants au Printemps 2010 - Les micro-débats de quartiers –
projet. Il s’agit d’une démarche positive pour réflexion autour du thème du jardin
améliorer le cadre de vie des habitants en favorisant C’est ainsi qu’au printemps 2010, des micro-débats
la présence de la nature dans leur quartier. au sein du quartier sont organisés par la ville et
animés par l’APIEU. Cette association d’éducation à


l’environnement en milieu urbain est subventionnée
Témoignage de la ville à cette période par le conseil général et la ville. Elle
de Montpellier est, par ailleurs, très active dans le quartier et bien
« C’est un projet qui a été initié par la ville et qui connue des services de la ville.
est offert à la population locale. » Au préalable, un diagnostic général du quartier est
réalisé par un recueil des avis des habitants. Puis les
micro-débats viennent enrichir ce diagnostic. Ces
4.2.1 Des micro-débats préalables micro-débats se déroulent de manière régulière dans
aux réunions de concertation la maison de quartier, et s’appuient sur le réseau d’ha-
bitants du quartier Grand Croix d’Argent. La mairie
2009 - Le printemps de la démocratie propose notamment la thématique du jardin collectif
Dès 2009, la ville organise le « printemps de la comme sujet de réflexion. Un groupe de réflexion est
démocratie » dans différents quartiers de Montpellier alors formé d’habitants de la résidence Lemasson
dont le quartier Croix d’Argent. Dans le cadre de ces notamment des personnes âgées, de membres du
espaces d’échanges, les citoyens ont la possibilité de conseil consultatif de quartier, du réseau d’habitants,
s’exprimer auprès des responsables de la ville sur d’une animatrice de l’APIEU et de représentants du
plusieurs thèmes : biodiversité, plan local de dépla- service Démocratie de proximité de la ville.

La naissance du jardin Demain - réflexion autour du projet ©Cerema


RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER 91

Un appel aux habitants est lancé pour élaborer le


jardin Demain, à l’aide du bouche à oreille et du réseau
associatif du quartier. Au total, deux réunions partici-
patives sont organisées et animées par l’APIEU. Les
“ Témoignage du collectif Coloco
« Les attentes des habitants étaient très esquis-
sées au départ puis ensuite organisées. »

réunions ont lieu dans les locaux du club troisième


âge de Lemasson.
La première réunion de lancement permet à la ville de 4.2.2 L a mise en œuvre du jardin
présenter des éléments de contexte et ses objectifs en en un week-end
abordant la biodiversité et le lien social. La seconde est
une réunion de travail au cours de laquelle l’APIEU Le jardin est créé physiquement en un week-end : les
utilise deux valises pédagogiques afin que les habi- 8 et 9 octobre 2010 en 24 heures. Ce chantier mobi-
tants imaginent le jardin de leur rêve. Ces valises sont lise alors différents acteurs : les jardiniers et techni-
« l’outil ricochet » (jeu avec modules) et « urbaniste en ciens du service des Espaces verts de la ville et du
herbe » (à base d’éponges). Plusieurs groupes sont zoo de Montpellier, le collectif Coloco et des béné-
créés pour construire physiquement des maquettes du voles mobilisés par le collectif (une trentaine de
jardin. personnes au total) ainsi que des habitants ayant
Plusieurs scénarios du futur site sont proposés et un participé à la concertation ou non (une cinquan-
book de photos de toutes les essences souhaitées dans taine dont une vingtaine du quartier) et des scolaires
le jardin est créé. L’ensemble de ce travail est pris en (quatre classes de primaire).
photo et remis à la maison de la démocratie avec une
note écrite qui est alors transmise à Coloco. Le chantier est organisé par Coloco. Les citoyens
sont associés autour d’ateliers thématiques : les bacs
La mise en forme du projet Jardin Demain – potagers, la menuiserie, les plantes. Des animations
co-construction du projet sont également prévues durant ces deux jours avec
Au cours de cette dernière étape, Coloco prend le l’intervention d’artistes d’horizons différents, graf-
relais. Faute de financements de la ville, l’APIEU n’in- feurs, photographes, musiciens, et de masseurs.
tervient plus, mais reste intégrée à la réflexion par le La journée du vendredi est réservée aux scolaires.
biais d’une personne membre de l’association partici- Quant à celle du samedi, elle est ouverte à l’en-
pant en tant que citoyen volontaire. Des affiches dans semble des habitants du quartier.
le quartier invitent tous les habitants de la résidence à
participer à la phase de construction du jardin. Des
convocations sont aussi envoyées par le service
Démocratie locale de la ville de Montpellier. Au final,
une vingtaine de personnes se mobilisent au cours de
ces réunions.
Une première réunion est organisée par la ville. Coloco
est chargé de l’animation de la réunion, ainsi que de
prendre note des attentes, idées et questionnements
des citoyens et de formuler des propositions concrètes.
Les contraintes budgétaires viennent toutefois cadrer
le projet notamment sur la partie végétale, dont le Phase travaux dans le jardin (source : Coloco, Claudia Hernandez)
choix final sera conditionné par les plants proposés
par la pépinière municipale.
Une seconde réunion vient clôturer la phase de
concertation, où le projet final est présenté par
Coloco. Entre ces réunions, des échanges ont lieu pour
affiner le projet. Le choix des végétaux se fait ainsi sur
un aller-retour entre habitants, Coloco et la ville.
92 RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER

4.2.3 La gestion du jardin et l’animation Aucune contrainte de gestion n’est imposée.


Toutefois la charte des jardins partagés de
La ville a organisé des réunions d’accompagnement Montpellier indique des recommandations. Une
pour les habitants, de la conception du jardin à la charte spécifique au jardin Demain est également en
création de l’association Du Soleil au Lemasson cours de rédaction.
(DSL). Toutefois, il semblerait que ce passage de L’APIEU assiste l’association DSL par des animations
relais ait été fait trop rapidement. plus ou moins régulières auprès des scolaires mais
aussi des habitants dans l’enceinte du jardin. Elle
Jardin sec intervient par l’intermédiaire du dispositif
Dans le jardin sec ornemental, il était prévu que la « Montpellier main verte ! » qui propose des anima-
gestion soit cédée à la future association gérante du tions et des activités gratuites sur le thème des
jardin. Mais très rapidement, la ville s’est aperçue jardins. Les interventions concernant le jardin
que l’association ne pouvait pas tout assurer, et a Demain portent sur des conseils techniques de jardi-
décidé au printemps 2012 de prendre le relais de nage, le compostage (un composteur collectif a été
l’entretien du jardin sec. La gestion est actuellement installé), la biodiversité, les outils à utiliser, la sécu-
réalisée par une association mandatée par la ville. rité, les insectes, les plantes, la germination, etc. Un
bac de jardinage est également réservé aux enfants
Jardin potager de l’école du quartier. Ces interventions sont régu-
L’association DSL, créée en mars 2011, assure la lières et ont lieu les mercredis et samedis.
gestion du jardin potager. Elle est fortement portée En automne 2014, les habitants souhaitent fermer
par une personne, la présidente. Aucune convention une partie du site pour s’y sentir davantage chez
formalisée n’est passée entre la ville et l’association. eux. Certaines personnes, notamment les plus âgées,
La ville n’intervient qu’en cas de problème. Un avaient déjà formulé cette demande dès la réflexion
chargé de mission du service des Espaces verts de la sur le projet. Elles craignaient le vandalisme et le
ville a été désigné pour intervenir de manière ponc- non-respect des lieux, comme cela peut être le cas
tuelle si besoin (réparation de la clôture, installation dans le quartier. Ainsi des ganivelles (1,20 m de
d’une grande caisse à outils et d’un composteur, haut) viennent séparer le jardin potager du jardin
entretien de certains arbustes). Lorsque cela ne fait sec, renforcées par un portillon en bois. Les habitants
pas partie des prérogatives du service des Espaces s’y promènent, y jardinent, y discutent.
verts, c’est DSL qui fait les démarches. Par exemple,
l’association a sollicité un centre équestre pour La gestion de l’ensemble du site est financée par
récupérer le fumier qui sert à l’amendement des sols. la ville.

Jardin sec ©Cerema Jardin potager ©Cerema


RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER 93

4.3 La nature en ville 4.3.2 Les objectifs de biodiversité


et la biodiversité
Les objectifs étaient de végétaliser un site où la biodi-
4.3.1 Le contexte versité était peu présente voire inexistante. Une étude
sur le potentiel du milieu, réalisée par Coloco, a permis
Le site choisi est un ancien parking de 1 200 m² entiè- de cibler dans un premier temps le choix des espèces.
rement bétonné situé en bas d’une résidence HLM. L’objectif était également de connecter ce délaissé
Quelques mûriers platanes malades étaient présents avec d’autres quartiers de l’est de Montpellier en
ainsi que des bancs. Laissé à l’abandon, il servait de recréant des continuités écologiques.
lieu de rencontre entre les habitants de la résidence
Lemasson mais également de lieu de dépôt de déchets Le jardin méditerranéen sec permet de recréer un
encombrants. écosystème local adapté au climat. Le jardin potager
a pour objectif de cultiver fruits et légumes.

Visualisation à long terme des continuités écologiques possibles entre plusieurs quartiers – Septembre 2010
(Source : Coloco, Fabien David)
94 RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER

4.3.3 La conception 4.3.4 La gestion

Au vu des contraintes budgétaires imposées par la Le choix a été fait par les citoyens de laisser la nature
ville, une partie des plantes a été fournie par la se réapproprier l’espace en arrêtant le désherbage.
pépinière municipale. La liste des plantes n’ayant pas Cette initiative est venue des habitants eux-mêmes.
été imposée par la ville, le collectif Coloco a donc eu Les cultures des bacs peuvent ainsi déborder voire se
la liberté de formuler des propositions en fonction replanter ailleurs. La qualité du sol a été améliorée
de la demande des habitants et des espèces produites tout en étant préservée grâce à un bon amendement
par la pépinière. de terre apporté par le service des Espace verts de la
De nombreuses plantes méditerranéennes ont ainsi ville. L’association DSL récupère également du
été plantées sur le site du jardin Demain : des vivaces fumier dans un centre équestre proche.
résistantes à la sécheresse (immortelle, euphorbe,
thym, etc.), des arbustes méditerranéens (buddleia, En 2014, la ville a lancé un projet de promotion des
myrte commun, pistachier térébenthique, etc.), des légumes anciens pour les jardins partagés. L’objectif
arbres méditerranéens (albizia, érable de Montpellier, était de récupérer les graines produites par ces
ilex, etc.), des plantes grimpantes (jasmin), des légumes avec un objectif d’autosuffisance en les
vivaces pour potager (menthe, coriandre, rumex, resemant l’année suivante. Le jardin Demain fait
etc.) et de nombreux arbres fruitiers (pistachier, partie des sites où l’initiative a été expérimentée.
néflier, amandier, etc.). Beaucoup de plantes orne- Au-delà du maintien de la biodiversité, cette initia-
mentales ont été plantées. tive contribue au maintien de la motivation et de
l’implication des citoyens.

Jardin ©Cerema

Composteur ©Cerema
RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER 95

4.4 Principaux enseignements découverts lors du week-end de réalisation du


jardin, chacun ayant du mal à se les approprier – des
De manière générale, ce type d’action repose sur un aménagements posent d’ailleurs toujours question
équilibre fragile puisqu’il s’appuie sur des volontés actuellement pour certains habitants.
humaines. Un projet comme Jardin Demain ne fonc-
tionne que s’il y a des acteurs moteurs. La collecti- La démarche reste néanmoins intéressante
vité n’est ici que le facilitateur de la démarche, la puisqu’elle propose une réflexion à plusieurs acteurs :
suite étant conditionnée par l’engagement des la collectivité gestionnaire, un collectif de concep-
citoyens. teurs, une association d’éducation à l’environne-
ment, et les habitants. Jardin Demain s’inscrit dans
4.4.1 L a concertation la lignée des dispositifs de démocratie participative
de la ville (réunions d’échanges entre la ville, le
• Des points de vigilance maître d’œuvre et les habitants). Le bailleur social
n’a pas été associé à la démarche car il n’en a pas
Malgré la diversité des intervenants dans ce projet, exprimé l’envie.
la concertation a été le point sensible de la démarche,


constat largement partagé par tous les acteurs.
Témoignage du collectif Coloco
La synergie entre les quatre acteurs (collectivité, « L’essentiel à préserver, c’est l’énergie collective
collectif de concepteurs, association d’éducation à et la militance citoyenne commune. Qu’il y ait
l’environnement et habitants) tout au long de la des petits problèmes de gestion, il faut tout
démarche n’a pas toujours eu lieu. Chaque acteur a simplement pouvoir s’asseoir autour d’une table
été associé à un moment particulier du projet plutôt et en discuter. »
qu’avec les autres à chaque phase du projet.
L’APIEU, très présente en amont, n’a pas toujours été
associée à la démarche faute de crédits. Le fait que
l’association d’habitants gestionnaire de quartier ait 4.4.2 La gestion participative
été créée bien après la réalisation du jardin a laissé
une importante période de flottement. Les échanges • Une gestion participative encore
entre Coloco et la ville après la conception du projet sous assistance
n’ont pas eu lieu car le bureau d’études de la ville n’a
pas été missionné pour le suivi du jardin. Le projet de jardin a été pensé sans une volonté
initiale d’établir une gestion participative. Or l’ap-
Les étapes de concertation ont été menées précipi- propriation de ce lieu ne se fait pas de la même
tamment avec pour objectif prioritaire d’aménager manière suivant les habitants. Certains le perçoivent
rapidement le lieu. Il semble qu’il aurait été néces- comme un espace de travail, d’autres comme un
saire d’accorder davantage de temps en amont du espace d’échanges et de partage. Ainsi, de nombreux
chantier à l’organisation d’une concertation posée. petits problèmes de gestion subsistent, ce qui en fait
En effet, il apparaît que les habitants auraient un projet encore sous assistance de la ville. Celle-ci
préféré avoir plus de temps pour s’approprier le intervient sur l’entretien des végétaux et le rempla-
sujet, et être sollicités plus régulièrement afin cement de quelques sujets, le vidage des poubelles,
d’échanger avec les concepteurs tout au long de la réparation des clôtures et mobiliers ou leur
l’élaboration du projet et ainsi d’ajuster progressive- remplacement, de nouvelles installations selon la
ment les éléments de conception. demande (toit sur la pergola, boîte postale sur le
Certains aménagements ont été proposés par panneau d’information), et la livraison de terreau
Coloco au cours des débats sans que leurs designs pour les bacs ainsi que le renouvellement de chanvre
soient clairement définis. Les citoyens les ont alors en couvre-sol pour une partie du jardin sec.
96 RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER

Le jardin a été construit pour évoluer : les habitants


peuvent changer les végétaux des îlots, les bacs
peuvent être déplacés. L’ensemble est donc très
mobile et modifiable. Or, la principale difficulté pour
“ Témoignage de l’APIEU
« On est dans un objectif de biodiversité des
quartiers, en diversifiant la mixité sociale. »

les habitants est de s’approprier dans un premier


temps ce lieu et ensuite de vouloir son changement. Des habitants ont conscience de l’importance de la
nature pour améliorer leur quotidien. Le jardin deve-
• Mais une mobilisation qui se met en place nant un lieu d’aménité fort.
progressivement

L’engagement également très fort d’une seule


personne de l’association a pu en démobiliser
certains. L’association rencontre des difficultés
depuis le début du projet pour mobiliser les habi-
“ Témoignage d’habitantes de la
résidence Lemasson
« On s’y sent bien » (habitante retraitée).
« Elle a raté son cours de judo pour venir
tants et les garder. Le passage de relais à l’associa- jardiner » (habitante mère de famille).
tion DSL entre la création et la gestion du jardin a,
semble-t-il, été trop rapide malgré les réunions
d’accompagnement organisées par la ville. Peu de
personnes se sont investies dans la gestion du jardin, 4.4.4 L a biodiversité
principalement les quelques membres du groupe
associatif. La surface à entretenir est ainsi trop • Une évolution exponentielle de la biodiversité
importante pour l’association seule, vu le faible avec des améliorations possibles
nombre d’adhérents jardiniers actifs sur le jardin.
Néanmoins, l’association gestionnaire mobilise La biodiversité a été largement améliorée puisqu’elle
progressivement plus de citoyens et semble s’ancrer était quasiment inexistante : une ancienne cour
dans une forme de dynamisme. La prise de d’immeuble transformée en « dépotoir » est rede-
conscience collective du bien commun commence à venue un espace de nature. C’est l’une des réussites
émerger, évoluant en parallèle de la biodiversité qui de ce projet. Il a été ainsi observé une croissance
s’installe dans le jardin. La transformation de la immédiate des végétaux, puis une chute et enfin
nature et son évolution sont visibles, améliorant le une stabilisation de la biodiversité. Il y a moins de
cadre de vie. La production de ressources communes diversité que prévu mais les espèces sont plus
(fruits et légumes) l’est également. robustes et la biodiversité est stable.
Cependant, lors de la conception du projet, le plan
4.4.3 L a sensibilisation aux enjeux schématique du site a, semble-t-il, été trop simplifié :
de biodiversité l’étude de l’emplacement des espèces n’a pas été
suffisamment poussée (en fonction de l’exposition,
• Un enjeu fort pour le quartier bien perçu de la concurrence entre végétaux, etc.).
par les habitants Après le projet, en dehors des animations proposées
par l’APIEU, il n’y a pas eu de suivi de la biodiversité
Les citoyens du quartier partent avec un capital de à travers des micro-inventaires de la faune par
connaissances faible sur la thématique de la biodi- exemple.
versité. Leur cadre de vie est très minéral et beau-
coup ont grandi dans ce lieu qui est leur unique
repère. Le travail de l’APIEU est garant d’une éduca-
tion et d’une sensibilisation à la biodiversité avec 26
animations par an. L’objectif principal de leur action
sur ce site est de travailler sur la nature pour favo-
riser le vivre ensemble et pousser à l’échange.
RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER 97

4.4.5 L a biodiversité et les usages  es pistes d’amélioration pour mieux


4.4.6 D
intégrer le citoyen
• Un jardin support de services sociaux
et d’aménités, perçu différemment suivant La réussite de ce projet réside dans la réalisation
les habitants physique du jardin, en deux jours, en mobilisant une
grande diversité d’acteurs et de citoyens, avec un
D’un point de vue anthropocentrique, les services objectif atteint de reconquête de la biodiversité
rendus par cette biodiversité sont davantage des notamment végétale.
services récréatifs que des services d’approvisionne- Les principaux points faibles restent l’acceptation du
ment. Ce jardin n’a pas fonction à produire mais projet dès en amont et l’appropriation de ce lieu en
plutôt à servir de support à la médiation humaine et phase de gestion par les citoyens. Chaque acteur a
à favoriser le vivre ensemble. Le jardin potager ainsi formulé quelques pistes d’amélioration pour
n’ayant pas vocation à produire en continu, avec la ces deux phases :
certitude d’une récolte, il n’est donc pas toujours
facile de mobiliser les habitants. - En phase de concertation :
Avant même le lancement du projet, la ville avait la
Le bilan reste mitigé puisque la perception de volonté de reproduire l’expérience sur cinq autres
chacun n’est pas la même. Certains citoyens expri- sites, présentant le même profil de quartier (loge-
ment un mécontentement ou voient le jardin ments sociaux). L’objectif était d’en réaliser un
comme une contrainte. chaque année ou tous les deux ans. Mais faute de
Par ailleurs, les règles de partage sont encore à budget suffisant et suite à un changement d’équipe
comprendre et apprendre. Des incivilités persistent : au sein du service des Espaces verts, les projets n’ont
des mégots sont jetés par les fenêtres, tombant dans pas pu voir le jour. La ville avait pour objectif d’inté-
le jardin, et quelques plants ont été volés. grer davantage les associations, notamment dans la
phase amont.


L’APIEU a proposé de développer des réunions direc-
Témoignage de l’APIEU tement en bas d’immeuble, sur le site même du
« Le premier qui vient se sert même s’il n’a pas projet pour aller chercher les citoyens chez eux, dans
participé, ce qui crée des incompréhensions. » leur environnement. Les réunions ont eu lieu dans le
quartier mais dans des lieux parfois informels (club
de l’Age d’or par exemple). La phase de concertation
D’autres éprouvent au contraire un sentiment de pourrait démarrer par des enquêtes auprès des
détente et d’apaisement dans un quartier plutôt citoyens pour recueillir davantage d’informations et
sensible. de besoins. Même si le diagnostic réalisé en amont
des micro-débats a permis de recueillir des informa-


tions, le temps d’échange imparti a été plutôt court.
Témoignage de l’APIEU
« On vient avec les enfants, les familles, on a - En phase de gestion :
l’impression d’être à la campagne.[...] On est sûr La ville a organisé en présence de l’APIEU une
de produire mais pas sûr de récolter. Par contre, première réunion publique de présentation de la
ce qu’on récolte ici, ce qui est sûr c’est l’amitié. » démarche. Un courrier officiel en phase de gestion,
à chaque habitant de l’immeuble, expliquant
la démarche de la ville, les objectifs du jardin et
le rôle de l’association DSL aurait pu enrichir
la communication.
98 RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER

À retenir :

• Les différents acteurs mobilisés pour impliquer • La dés-imperméabilisation des sols permet de
les citoyens doivent particulièrement agir en créer des lieux plus naturels offrant davantage de
synergie, au risque de desservir la démarche. services écosystémiques aux citoyens (qualité paysa-
gère, ombrage en été, activités récréatives, etc.). Ces
•
La concertation nécessite du temps pour lieux deviennent aussi le support d’activités de
permettre aux citoyens de s’approprier les sujets. sensibilisation aux enjeux de la nature en ville
auprès des citoyens et du monde de l’éducation.
• L’implication des habitants peut se faire à diffé-
rents niveaux : concertation, co-construction, • La surface d’espace public confiée à la gestion
gestion. des habitants doit être compatible avec les
capacités de l’association concernée.
•
La conclusion d’un chantier collectif peut se
concevoir de manière conviviale pour notamment • Certaines initiatives portées de manière générale
renforcer les liens sociaux et l’implication citoyenne par la collectivité, comme la promotion des
(buffet offert par la ville, concert musical, etc.). légumes anciens pour les jardins collectifs à
Montpellier, peuvent contribuer au maintien de
la motivation et de l’implication des citoyens.
RETOURS D’EXPÉRIENCES - 4. JARDIN DEMAIN À MONTPELLIER 99

Jardin ©Cerema
100 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T

5 Aménagements pour la biodiversité


à Champvert
Développement d’un réseau d’espaces verts de 4 ha
Situation géographique Lyon (69)
Superficie Trame verte d'environ 4 ha
Date de livraison Aménagements pour la faune en 2013
Porteur du projet Direction des Espaces verts de la ville de Lyon
Partenaires Associations naturalistes locales

5.1 Présentation du site Le projet de liaisons vertes existe depuis 2002 à


Lyon. Il consiste en la mise en réseau de parcs exis-
Le site constitue un réseau d’espaces verts (parc de tants et en la création de liaisons vertes à partir
la mairie du 5e, parc de la Passerelle, parc Champvert, notamment d’une ancienne voie de chemin de fer.
parc de la Garde et groupe scolaire Champvert) À l’origine, le projet est essentiellement axé sur les
reliés par plus de 2,3 km de « voie verte » dans un modes doux et les usages piétons (éclairage, mobilier
environnement présentant un fort caractère naturel urbain). Depuis 2011, à l’occasion de l’appel à projets
ainsi qu’un relief marqué, sur Lyon 5e et 9e. La « Trame verte et bleue urbaine » lancé par le ministère
démarche étudiée porte sur la mise en place d’amé- de l’Ecologie, le projet prend en compte les enjeux de
nagements d’accueil de la faune (cinq mares, cinq continuité écologique à travers des aménagements
refuges servant à l’hibernation (hibernacula), un gîte spécifiques basés sur une connaissance fine des
à hérissons et chauves-souris et plusieurs nichoirs à espèces présentes.
chiroptères, trois hôtels à insectes, deux spirales à
plantes aromatiques, un écuroduc) et sur le lien fait
à cette occasion avec la population. Cette démarche
s’accompagne par ailleurs d’un réaménagement
partiel du parc Champvert dans une dynamique de
renaturation.

Mare créée le long de la trame verte ©Cerema Prairie fleurie ©Cerema


R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T 101

 lan du site
5.1.1 P

Plan de la trame verte de Champvert.


Les aménagements concernés par notre
étude concernent les aménagements
liés à la biodiversité (nichoirs, mares,
hôtels à insectes, spirale aromatique,
gîtes à chiroptères, écuroduc...) situés
sur la voie verte, le parc de Champvert,
le parc de la Garde, et le parc de la
mairie du 5e.

Vue aérienne de la voie verte


et des parcs qui la jouxtent
©Google maps

 hronologie du projet
5.1.2 C 2012 : réponse de la ville de Lyon à l’appel à projets
sur les trames vertes et bleues urbaines.
2002/2007 : premiers aménagements de la voie Octobre 2012 à octobre 2013 : mise en œuvre
verte dans la cadre du projet de liaisons vertes dans opérationnelle.
le 5e arrondissement. 2014 : ouverture du parc de la Passerelle et labelli-
2007 : inventaires entomologistes et de l’avifaune sation ECOJARDIN du « Quartier Nature Champvert ».
réalisés par la FRAPNA sur le site du Bois de la Garde.

JOURNÉES Forum des


ECO-VOLONTAIRES associations
Réponse à l’AAP Réunion Bilan à Présentations des résultats
du MEEDD publique mi-parcours d’inventaire avec les associations

Fin 2011 Janv. 2013 Juil. Sept. Oct. Janv. 2014 Juil. 2014
Travaux
Aménagement biodiversité Parc Travaux Parc de la Passerelle
Champvert
102 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T

5.2 L’implication citoyenne et à l’animation du projet. Elles ont pu ainsi faire valoir
leur implication locale (connaissance du terrain et des
5.2.1 L e contexte de l’implication dans habitants). Des écrasements d’écureuils
le cadre du développement ont notamment été relevés sur la plateforme collabo-
des liaisons vertes rative d’échanges de données naturalistes
www.faune-rhône.org, régie par la LPO Rhône.
Le projet de développement des liaisons vertes est un Le travail en amont avec les habitants sur les diffé-
projet plus global que celui de réaliser des aménage- rents projets d’aménagement a toutefois été peu
ments d’accueil de la biodiversité. Ce projet global a important. Les principaux aménagements réalisés
mobilisé les élus des 5ème et 9ème arrondissements ainsi dans ce cadre ont en effet privilégié l’expertise
que les conseils de quartier12 qui étaient déjà forces technique sur la biodiversité en n’impliquant pas les
de proposition sur la thématique des liaisons vertes. habitants dans le processus de conception et la loca-
Selon le journal municipal, les quatre conseils de lisation des différents équipements.
quartier concernés du 5ème, en lien avec leurs voisins
du 9ème arrondissement, ont notamment prôné « le 5.2.3 Information sur les aménagements
développement et la valorisation du patrimoine vert pour la biodiversité
de l’arrondissement […] et l’importance de la place de
la nature en ville […] ». Réunions publiques
Une première réunion publique13 au centre social
Ainsi, les démarches initiées sur le projet, liées à Champvert a permis la présentation des premiers
l’appel à projets « Trame verte et bleue urbaine », dont éléments du projet le 17 janvier 2013 par des élus et
la renaturation du parc Champvert ainsi que l’aména- les associations. Beaucoup d’habitants (70 à 80
gement du futur parc de la Passerelle, s’inscrivent personnes) ont répondu à l’invitation des mairies
dans une demande globale de nature de certains (publipostage dans le quartier). Au-delà de la présen-
habitants (ceux qui participent à une instance forma- tation des aménagements pour la biodiversité, cette
lisée de participation). La démarche de participation réunion a également été l’occasion de sensibiliser les
des habitants plus particulièrement étudiée ici habitants aux différentes problématiques de la biodi-
concerne la mise en place des aménagements d’ac- versité urbaine (distribution de mélanges de prairie
cueil de la biodiversité ainsi que les travaux de rena- fleurie, guide et livret d’informations, etc.).
turation du parc Champvert. De manière globale, la
démarche mise en place en matière de participation Une seconde réunion publique s’est tenue le 7 juillet
se traduit dans ces cas par l’information des habitants 2013, à la mairie du 5ème, pour présenter en détail les
sur les aménagements réalisés ainsi que la sensibilisa- projets de renaturation du parc Champvert et d’amé-
tion à travers des journées mises en place avec les nagement du futur parc de la Passerelle, ainsi que
citoyens. pour informer les habitants des avancements de réali-
sation des aménagements d’accueil de la biodiversité
5.2.2 L e travail en amont, en cours et inciter à la participation sur les journées
par les associations naturalistes écovolontaires.

Dans le cadre de la réponse à l’appel à projets « Trame Journées écovolontaires


verte et bleue urbaine » du ministère, la direction des Si la démarche n’intègre pas la population au choix
Espaces verts de la ville de Lyon a associé différentes des aménagements, il existe une forte volonté de faire
associations naturalistes impliquées sur le territoire : participer les citoyens à la démarche globale sur la
12 Article L2143-1 du Code Arthropologia, la Ligue de protection des oiseaux du nature en ville. Il s’agit à la fois de sensibiliser mais
général des collectivités
territoriales. Rhône, et la FRAPNA Rhône. Ces associations ont été aussi de donner des exemples de solutions possibles à
13 À noter que le dossier impliquées pour choisir un territoire pertinent d’inter- réaliser, afin de toucher les habitants qui ont des
de présentation du projet
a par ailleurs été transmis vention en fonction des données naturalistes d’es- balcons, des jardins, dans le but d’étoffer la trame
aux conseils de quartier
concernés. pèces remarquables, puis pour participer à l’expertise verte urbaine. C’est en effet l’occasion de proposer des
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T 103

solutions permettant d’agir sur la fonctionnalité


écologique de la trame dans les espaces privés (en
faisant émerger des initiatives privées).
La mise en place de ces journées est diffusée sur
internet via le site de la ville, via les sites des associa-
tions partenaires, via la revue municipale Lyon Citoyen,
et par une communication sur les panneaux lumineux
dans le 5ème arrondissement.

Journée écovolontaire ©Ville de Lyon

Autres activités organisées autour


de la biodiversité
D’autres journées sont mises en place en avril, mai,
juin 2013 sous la forme de balades naturalistes, le
Les différentes journées sont articulées de la manière samedi, le mercredi ou le soir pour attirer le plus de
suivantes : personnes possible.
• Une journée pour la création d’une mare en chan- • Samedi 27 avril : remplissage des hôtels à insectes
tier participatif, menée par la LPO Rhône. Les et balade naturaliste à la découverte des abeilles
quatre autres mares et hibernacula, les deux sauvages, encadrés par Arthropologia ;
spirales à aromatiques sont réalisées par des jardi- • Mardi 11 juin au soir : balade naturaliste nocturne,
niers du service des Espaces verts des différents organisée par la FRAPNA (découverte des chauves-
arrondissements de la ville de Lyon. C’est l’occa- souris et atelier de capture des insectes nocturnes).
sion pour les techniciens des espaces verts d’ap-
prendre à mettre en place ce type d’installation et
d’acquérir de nouvelles compétences (construc-
tion en pierres sèches par exemple).
• Deux journées autour de la création de gîtes à
insectes et de nichoirs à hirondelles, encadrées
respectivement par Arthropologia et la LPO Rhône.
L’objectif de ces journées est d’apprendre à
construire des nichoirs et des abris à insectes. Une
partie des équipements sont installés dans les
espaces verts du quartier, et chaque participant
peut repartir avec son nichoir s’il le souhaite. Sur
les deux demi-journées en mars 2013, une tren-
taine de personnes ont participé à ces ateliers,
dont des jardiniers de la ville, invités pour l’occa-
sion à se former aux techniques de construction
de ce type d’équipement.

Sur ces trois journées, les participants sont principa-


lement des « naturalistes amateurs » venus dans un
objectif de veille écologique, mais aussi quelques
habitants de proximité venus en famille lors de ces
“ Témoignage d’une habitante
lors d’une journée écovolontaire
« Je suis venue pour découvrir la forêt dans la
ville. J’ai appris plein de choses. J’ai découvert
ateliers. d’abord cette nature que j’ignorais si prêt. »
104 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T

Malgré l’intérêt de quelques participants, on 5.2.4 La pédagogie


constate finalement une très faible mobilisation des
habitants pour ces dernières journées. En complément, des actions pédagogiques sont
mises en place. Un parcours pédagogique a notam-
Forum des associations ment été réalisé qui, ponctué de panneaux sur des
Le samedi 5 septembre 2013, un atelier de construc- troncs d’arbres, donne des éléments d’informations
tion de gîte à insectes et de découverte des pollini- sur les aménagements réalisés (spirale aromatique,
sateurs sauvages ainsi qu’une balade naturaliste hôtels à insectes, mares...) et sur la faune et la flore
sont organisés dans le cadre du forum des associa- qui y sont liés. D’autres panneaux informatifs ont
tions au parc de la mairie du 5ème. Si le fait d’intégrer été placés afin d’éveiller l’attention des promeneurs
cet atelier au forum des associations est un concours sur la présence de refuges de biodiversité.
de circonstances, il apparaît que cela a contribué au D’autre part, une conférence naturaliste de restitu-
succès de l’événement. tion des inventaires a été organisée en octobre 2013,
en fin de projet, pour présenter aux habitants du


quartier les espèces faunistiques et floristiques rele-
Témoignage de la direction des vées par les associations naturalistes tout au long
Espaces verts de la ville de Lyon du projet.
« Le fait de coupler un événement lié à la nature à
un autre événement permet de toucher plus d’ha-
bitants. En effet, les habitants ne sont pas nécessai-
rement attirés par un événement autour de la seule
biodiversité qui peut, dans les représentations
collectives, rester un sujet réservé aux passionnés
alors qu’un événement grand public très trans-
versal peut permettre d’attirer plus de monde. Une Panneau indiquant un refuge de la biodiversité
fois sur place, le côté ludique et manuel des ateliers aménagé par les jardiniers. Il s’agit d’une mare.
de construction de gîtes et nichoirs peut permettre ©Cerema
d’intéresser les participants et être une occasion
prétexte pour sensibiliser. »
5.2.5 Présentation des résultats des travaux

En juillet 2013, le pôle développement durable de la


direction des Espaces verts de la ville de Lyon profite
de la présentation des aménagements dans le parc
Champvert et du projet du parc de la Passerelle pour
faire un bilan à mi-parcours sur les aménagements
en faveur de la biodiversité. Cette réunion, qui
présente les deux aménagements d’espaces verts,
mobilise fortement les habitants. Toutefois, peu de
réactions, hormis des inquiétudes quant au dévelop-
pement du moustique-tigre, sont à noter à l’occa-
sion de la présentation sur les aménagements d’ac-
cueil de la biodiversité, les projets d’aménagement
concentrant l’ensemble des réactions.
Troncs informatifs créés tout au long d’un
parcours pédagogique ©Ville de Lyon
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T 105

5.3 La nature en ville • Favoriser le développement et les échanges entre


et la biodiversité les populations d’alytes accoucheurs de Lyon 5ème
à travers la réalisation d’un réseau d’habitats
5.3.1 L e contexte favorables ;
• Favoriser le développement de l’avifaune grégaire
Le réseau d’espaces verts présente un caractère liée au bâti à travers le développement de sites de
naturel relativement marqué, avec différents milieux nidification spécifiques et par la sensibilisation des
(boisements, zones humides), et des modalités de riverains ;
gestion différenciées (classe 3 « espace à vivre » et • Créer un réseau dynamique et durable autour de la
classe 4 « espace naturel » sur le site). Plusieurs espèces trame verte à travers la sensibilisation des riverains
ont été repérées en amont, notamment grâce à un et des agents des espaces verts en les impliquant
inventaire en 2007. Les aménagements d’accueil pour dans la mise en place des aménagements. »
la faune visent principalement les amphibiens (alyte (extrait de la note de présentation du projet en réponse
accoucheur, triton alpestre), les reptiles (lézard des à l’appel à projets « Trame verte et bleue urbaine »)
murailles), les petits mammifères (écureuil roux,
hérisson), certains chiroptères, certains oiseaux
(rouge-queue à front blanc, hirondelle de fenêtre,
pigeon colombin), et certains insectes (coléoptères
saproxylophages, nombreux pollinisateurs).

5.3.2 Les objectifs du projet

Le projet présenté dans le cadre de l’appel à projets


« Trame verte et bleue urbaine » proposait la création
d’une continuité écologique à travers l’aménagement
de points d’eau et l’amélioration des habitats prairiaux
et forestiers sur un cheminement déjà existant et
aménagé pour des modes de circulation doux. Le
projet a été reconnu et financé pour partie par le
ministère de l’Ecologie. L’objectif était de favoriser la
biodiversité urbaine dans le cadre d’une trame verte
Aménagement d’une mare ©Cerema
urbaine multifonctionnelle.

Plus spécifiquement il s’agissait de : Les aménagements prévus ont donc été mis en
• « Améliorer la qualité des espaces verts du secteur œuvre : réaménagement partiel du parc Champvert et
par des travaux de re-végétalisation et par la réduc- travaux de végétalisation sur la liaison piétonne
tion des surfaces imperméabilisées ; Champvert, création d’équipements spécifiques le
• Améliorer les connaissances naturalistes des secteurs long de la liaison (cinq mares, cinq hibernacula, gîtes
concernés ; à chiroptère, à hérissons, hôtels à insectes, spirale à
• Favoriser le développement et les échanges entre les insectes, écuroduc).
populations d’insectes auxiliaires de Lyon 5ème à
travers la réalisation d’un réseau d’habitats favo-
rables et une réflexion sur les ressources alimentaires
(notamment floricoles), de refuge et de nidification ;
• Favoriser l’équilibre des espaces verts par une évolution
de pratiques (fleurissement, gestion tonte et fauchage,
gestion du bois mort...) à travers la rédaction et la mise
en place et l’entretien d’un plan de gestion ;
106 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T

5.3.3 Le lien avec les associations Il n’y a pas d’inventaire pour la flore au départ du
projet. Cet inventaire est réalisé depuis 2014, grâce
Des conventions avec les trois associations natura- au protocole d’inventaire participatif Florilèges,
listes (LPO, FRAPNA, et Arthropologia) ont été mises réalisé par les jardiniers municipaux.
en place dans le cadre de ce projet. Des subventions
ont été accordées à hauteur de 8 000 € par - la formation des jardiniers en interne
association, grâce à la subvention du ministère Les jardiniers et élagueurs de la ville de Lyon ont été
de l’Ecologie. formés par les associations naturalistes à la connais-
sance de trois milieux naturels (prairie / forêt /
Ces conventions portent sur deux volets, en plus du milieux aquatiques), aux sciences participatives, et à
volet sensibilisation mentionné dans la première la réalisation des aménagements d’accueil de la
partie : biodiversité (mares, hôtels à insectes, nichoirs15,
spirales aromatiques).
- l’inventaire naturaliste des populations (faune) Les formations sont ouvertes à l’ensemble des jardi-
Si des données sont disponibles dès 2007, l’appel à niers de la ville de Lyon dans le but de consolider
projets est l’occasion de les consolider en 2013. La leur formation et d’adapter les techniques de
FRAPNA est missionnée sur les mammifères (écureuil gestion. L’objectif est de pouvoir reproduire ce type
roux (écuroduc14), chauve-souris) et sur les insectes d’action dans d’autres arrondissements.
du bois mort. La LPO est missionnée sur les oiseaux En termes de résultats, ce sont cinq mares réalisées
et les batraciens. Arthropologia est missionnée sur en un an avec dix à quinze jardiniers, deux spirales et
les insectes pollinisateurs (abeilles sauvages et trois hôtels à insectes.
orthoptères).

14 Dans le suivi, un piège


photographique est mis
en place.

15 Certains nichoirs sont


équipés d’un système de
diffusion de chants pour
attirer les oiseaux. Spirale aromatique et hôtel à insectes ©Ville de Lyon
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T 107

5.4 Principaux enseignements • Et valoriser la nature en ville...

5.4.1 Concertation Mais la dynamique en faveur d’une intégration et


d’une valorisation de la nature dans la ville est
• Une mobilisation citoyenne réservée présente depuis quelques années et notamment à
aux « experts » de la biodiversité lors travers des aménagements favorisant la biodiversité
des décisions en matière d’aménagements (présentées ici), mais aussi des avancées dans les
pour la biodiversité pratiques de gestion des espaces verts et même une
certaine renaturation de ceux-ci. Or cette préserva-
La concertation sur les choix réalisés en matière tion de la biodiversité est également prônée par les
d’aménagements s’inscrit dans une démarche habitants d’un point de vue général.
assumée d’information des habitants et de recours à
l’expertise des membres d’associations naturalistes. • Pour incarner une démarche plus globale
La conception des aménagements plus spécifiques
en faveur de la biodiversité ne fait pas la part belle Le site de Champvert est donc finalement, grâce aux
à la participation du citoyen lambda. L’amont reste aménagements réalisés, un site qui donne à voir ce
du domaine de l’expertise. Toutefois, la mobilisation que peut être la nature en ville avec ses bienfaits. Les
associative permet à l’habitant « expert » de parti- différentes démarches de sensibilisation à travers les
ciper à travers les différents réseaux associatifs journées écovolontaires, les panneaux d’informa-
existants et la ville de Lyon a su s’entourer de cette tion, et plus globalement l’intégration de la théma-
expertise à l’occasion de ces aménagements. tique à des événements de portée plus générale
(forum des associations, journée du patrimoine)
5.4.2 Sensibilisation aux enjeux permettent de faire prendre conscience aux citoyens
de biodiversité : le couple ville/nature, de l’importance de la nature et de la biodiversité
un besoin d’incarnation pour même dans un contexte urbain. Par son état initial,
son ampleur (site de taille importante qui permet de
sensibiliser
limiter les conflits entre usages et fonctionnalité
• Faire venir la ville dans la « nature »... écologique), et la présence riche de biodiversité, il
semble que ce type de lieu soit le mieux à même de
La démarche mise en place dans le cadre des liaisons sensibiliser l’ensemble des citoyens aux objectifs de
vertes s’inscrit dans un contexte spécifique mais qui valorisation mais aussi de reconquête de la nature
paraît révélateur. En effet, l’environnement existant sur la ville. Il s’agit d’une première étape vers une
sur le site est déjà fortement vert et pour une participation plus effective en matière d’aménage-
certaine partie relativement naturel. Il s’agit princi- ments. Cette reconquête s’incarne ici dans certains
palement au départ de favoriser les liaisons pour les aménagements mais aussi et surtout dans les
piétons et les cyclistes au cœur de ce lieu et de faire « esprits ».
venir la « ville » et ses usages au cœur d’un site
« naturel16 ». Les élus, de même que les habitants, 5.4.3 Biodiversité et usages
comme ils l’expriment dans le cadre du conseil de
quartier, semblent avoir ce désir général de ville Les aménagements d’accueil de la biodiversité mettent
dans la nature avec des objectifs très anthropo-cen- en valeur le caractère naturel et génèrent ici peu de
trés : les usages sont mis en avant dans un premier conflits d’usages du fait notamment de la taille du
temps. Il s’agit de « relier », d’« accéder », de « favoriser site. La sécurité et la propreté demeurent toutefois des
les liaisons douces ». thèmes récurrents de conflit et les services gestion-
naires sont fortement impliqués sur ces thématiques
(les mares ont été clôturées par des ganivelles avec un
impact moindre en termes de visuel).
Même si le chemin principal est 16
situé sur l’ancienne voie ferrée.
108 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T

De manière plus globale, la dynamique des liaisons


vertes permet d’offrir aux habitants de nouveaux
usages. Il s’agit clairement d’une logique de couplage
d’une mobilité douce et d’une valorisation des
services écosystémiques de la trame verte (calme et
qualité paysagère notamment). Le cadre naturel de
ce site est apprécié par les habitants, et la démarche
de communication permet de souligner cette
dimension.

À retenir :

• Un projet exigeant une forte connaissance en • Il peut être intéressant, lors d’un projet qui s’y
biodiversité (liaison verte par exemple) peut prête particulièrement (caractère naturel
justifier une préférence accordée à l’expertise marqué, diversité des milieux, etc.) comme celui
technique (choix des sites, choix des aménage- de Champvert, de former les jardiniers de la
ments en faveur de la biodiversité) et donc une collectivité à la connaissance de milieux natu-
moindre concertation avec les habitants en phase rels spécifiques (prairies, etc. ), aux sciences parti-
de conception. cipatives et à la réalisation d’aménagements en
faveur de la biodiversité. Une diffusion de ces
• Une faible concertation en amont d’un projet savoirs et savoir-faire est ensuite possible sur
rend d’autant plus nécessaires les démarches de d’autres secteurs du territoire.
sensibilisation et d’information des citoyens
lorsque le projet est mis en œuvre : explication • Le fait de coupler un événement lié à la nature
des aménagements (réunions publiques, panneaux avec un autre événement de portée plus géné-
permanents sur le site, organisation de journées rale (forum des associations par exemple) permet
écovolontaires, etc.). potentiellement de toucher plus de citoyens.

• La sensibilisation des citoyens est un moyen de • Les sites présentant un caractère naturel et de
diffuser les bonnes pratiques écologiques sur le grande taille se prêtent particulièrement bien à
domaine privé. À Champvert, des solutions ont été la sensibilisation des citoyens aux enjeux de la
proposées aux habitants détenteurs de jardins ou de nature et de la biodiversité. Les projets de la
balcons, afin de développer la trame verte chez eux. collectivité développés sur d’autres sites peuvent
potentiellement être mieux compris par les citoyens
déjà sensibilisés.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 5 . A M É N A G E M E N T S P O U R L A B I O D I V E R S I T É À C H A M P V E R T 109

Parcours pédagogique jalonné de panneaux informatifs ©Cerema


110 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L

6 Jardin Vaclav Havel


Création d’un parc d’environ 2 900 m 2 en milieu dense
sur un ancien jardin bourgeois arboré
Situation géographique Villeurbanne (69)
Superficie 2 856 m²
Date de livraison 2013
Porteur du projet Direction Paysages et Nature de la ville de Villeurbanne

6.1 Présentation du site Acquis pour 1,2 millions €, le terrain a connu un


aménagement dont le coût atteint 600 000 € TTC.
Le jardin Vaclav Havel est un parc public récent,
ouvert en 2013. Le jardin Vaclav Havel a fait l’objet d’un appel d’offre
Il est situé au croisement de la rue Florian et du de la mairie de Villeurbanne.
cours Tolstoï à Villeurbanne. Il s’agit d’un espace de Cet appel a été remporté par l’atelier Vincent
proximité inséré dans un habitat très dense. Moineau à Lyon (appelé maintenant Trait d’union,
Connecteurs d’espaces) qui a associé l’artiste Philippe
Il a été aménagé sur le site d’une maison (démolie Morvan pour la partie réalisation artistique. L’une
en 2011) et de son jardin, d’une superficie de des interventions artistiques a fait l’objet d’un travail
2 856 m2. Le terrain était en réserve foncière depuis pédagogique et participatif avec des élèves de CAP
le précédent POS (années 80), et était destiné à du lycée Frédéric Faÿs à Villeurbanne. Il s’agit de la
l’aménagement d’un espace vert. La ville n’a pas conception et de la réalisation d’un mobile constitué
préempté mais était acquéreuse, en 2009, lorsque le d’une cinquantaine de fleurs métalliques.
terrain a été mis en vente.

Le terrain était en réserve foncière pour deux


raisons :
- terrain principalement arboré avec un sol originel ;
- quartier dense avec un besoin particulier en
espaces verts.

Jardin Vaclav Havel – carrefour des cheminements piétons ©Cerema Localisation du jardin ©OpenStreetMap
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L 111

 lan du site
6.1.1 P 44. Une « île des enfants » s’étend également sur
200 m2 de mulch. Une maison et des pontons en
11. Une « clairière » accessible de 350 m2, arborée, et bois permettent d’utiliser des jeux de hauteur.
qui permet la récupération des eaux de pluie ; 55. Une « île » pédagogique (potager) de 300 m2.
22. Une prairie inaccessible (l’« île écologique »), Une ancienne orangerie accueille des nichoirs à
une zone de 280 m2 fermée au public mais oiseaux et sert de local permettant le stockage
ouverte visuellement. Deux pontons en caillebotis des outils de jardin pour les écoles.
métallique permettent de s’approcher des espèces
végétales préservées, et des coquelicots métal-
liques, œuvre réalisée par Philippe Morvan en
collaboration avec l’atelier métallurgique du lycée
Frédéric Faÿs.
33. Une zone de rencontre (« parvis d’accueil ») de
150 m2, mise en valeur par une rocaille. Sur ce
secteur, on trouve également un banc multi-gé-
nérationnel avec des assises de différentes
hauteurs. Jardin Vaclav Havel – conservation d’arbres préexistants
dans le projet ©Cerema

3 5

5
3 4
1
2

2 1

Plan du site
©Ville de Villeurbanne
Photos
©Cerema
112 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L

 hronologie du projet
6.1.2 C Choix du concepteur par une commission
composée d’élus et des présidents des
conseils de quartier
Deux réunions de concertation
pour définir le programme Réunion publique de présentation
d’aménagement du projet retenu

2009 2010 2011 2012 2013


Démarches
Achat du terrain Études préalables administratives Conception du projet Travaux et Livraison
de la MOA

 ocuments consultés
6.1.3 D

- Projet Paysage et environnement, La nature et l’environnement à Villeurbanne, état des lieux, ville de Villeurbanne
- Compte rendu de la 1ère réunion de concertation autour de la définition du programme d’aménagement du jardin
Florian Tolstoï, mars 2011
- Compte-rendu de la 2ème réunion de concertation autour de la définition du programme d’aménagement du jardin
Florian Tolstoï, avril 2011
- Convention précaire d’usage d’une parcelle du jardin Vaclav Havel, 8 juillet 2013
- Classification des espaces verts de la ville de Villeurbanne

6.2 L’implication citoyenne La concertation a été animée directement par la


ville : il arrive que sur des projets plus conflictuels,
6.2.1 L a mise en place de la concertation l’animation de la concertation soit confiée à un tiers.
Afin d’attirer un large public varié, la ville a distribué
La ville, porteuse du projet de jardin, a souhaité des tracts dans les boîtes aux lettres, a invité les
associer les habitants au projet. Pour permettre conseils de quartier ainsi que des associations et des
cette participation, trois réunions ont été program- assistantes maternelles du quartier. Au final, les
mées dès l’amont du projet : deux réunions de habitants venus participer ont représenté une caté-
concertation, et une réunion publique d’information gorie de population homogène : « Comme d’habi-
sur le projet retenu. tude, la concertation est limitée en termes de public
mobilisé, il s’agit essentiellement de personnes de


plus de 60 ans. » Mais il y a eu également un groupe
Témoignage de la ville d’assistantes maternelles.
de Villeurbanne
« La concertation a été menée en parallèle des études Deux réunions de concertation ont eu lieu, avec une
préalables : on sait que si on veut vraiment faire de bonne participation des habitants : 64 participants à
la concertation, il faut la faire très en amont. » la première, et 41 personnes à la seconde.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L 113

 ne première réunion de concertation,


6.2.2 U 6.2.4 L es attentes en termes d’usages
lors de la programmation, pour du jardin
acculturer et définir ensemble
Lors des réunions de concertation, il était également
les grandes orientations
attendu que les participants expriment leurs besoins
L’objet de la première réunion de concertation a été en termes d’usages que pourrait permettre ce nouvel
de permettre de définir les orientations d’aménage- équipement municipal.
ment du futur espace vert. Il s’agissait de présenter
le projet de la municipalité et de permettre aux De nombreuses demandes ont été exprimées en
participants de se familiariser avec les probléma- termes de propreté, d’aires de jeux pour enfants, de
tiques d’aménagements et d’espaces verts telles que mobilier urbain, de sécurité, d’ouverture du jardin,
menées historiquement par la municipalité. de canisite, d’éclairage... mais également en termes
Lors de cette réunion, quasiment tous les riverains et de paysage, de patrimoine naturel, de jardinage, et
associations ont émis le souhait de conserver les de pédagogie sur la nature :
arbres. Les participants préférant favoriser les places - Est demandé un jardin très paysagé comportant
de stationnement ont été dissuadés de cette idée par beaucoup de végétation.
d’autres participants, et la ville n’a pas eu à intervenir. - Est souhaité un travail sur l’histoire du site, notam-
ment à travers la conservation des rocailles.


- La proposition de conserver des zones plus horti-
Témoignage de la ville coles pour le jardinage et la participation des
de Villeurbanne habitants sur ces jardinets de culture est formulée.
« La concertation a été un lieu d’échange contradic- En effet, l’aménagement de ce jardin devra inté-
toire sur les enjeux de nature en ville et ceux grer l’aménagement de petites parcelles potagères.
de stationnement. » Ces parcelles serviront de support à des pratiques
de jardinage dans le cadre d’animations auprès de
scolaires ou du grand public.
6.2.3 L’affirmation de la volonté d’aller - Un habitant souhaite un travail de pédagogie
vers « un jardin naturel » autour de la nature présente sur le site, et éven-
lors de la deuxième réunion tuellement un circuit botanique.
- Il est souhaité que ce lieu soit un lieu où l’idée de
Les participants pouvaient exprimer leurs attentes à nature est forte, où les ambiances paysagères
travers deux ateliers thématiques : « usages/fonc- renvoient à un vocabulaire de jardin naturel.
tions » et « développement durable » (où il a été


question de l’infiltration des eaux de pluie, des pesti-
cides, de la gestion différenciée...). Témoignage du Centre social
et familial de la Ferrandière
Les habitants ont identifié que l’ouverture du site « Je suis allé à deux réunions publiques. On rentre
était contradictoire avec la préservation des espèces, dans une foule de détails qu’apportent les habi-
faisant ainsi preuve d’une bonne appropriation des tants. Ils n’ont pas parlé de biodiversité, mais ils ont
enjeux de conservation. parlé de l’impact pour les riverains du projet, sur les
craintes envers les nuisances, sur les usages. Moi
Les riverains du parc ont exprimé leurs inquiétudes personnellement j’apprécie le retour à la nature
sur les nuisances sonores qu’allait générer le parc. sauvage. »
Mais la municipalité relativise ce type de problème,
souvent soulevé par des personnes âgées sur-repré-
sentées dans ces dispositifs de concertation par
rapport aux jeunes.
114 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L

6.2.5 Aucune concertation lors  ne sensibilisation aux enjeux de


6.2.7 U
de la conception biodiversité sur la commune, qui favorise
l’acceptation voire l’enthousiasme des
Une fois le concepteur retenu, il n’y a plus eu de habitants pour intégrer la biodiversité
réunion de concertation. Selon le concepteur : « Il y a au projet du jardin
eu beaucoup de communication et de réunions
publiques mais pas réellement de concertation dans La ville de Villeurbanne, en parallèle au projet du
la phase où je suis intervenu. C’est normal, la jardin Vaclav Havel, a déployé un projet de schéma
concertation doit avoir lieu en phase de program- directeur « Paysage et Environnement » qui fixe les
mation, en amont. Après ce n’est plus très opportun objectifs d’aménagement de l’espace public, princi-
et en plus c’est compliqué en phase de concours car palement en termes d’intégration de la biodiversité
on doit arriver avec un concept, donc s’il est remis sur ces espaces.
en cause par la concertation ça perd tout son sens. Une concertation spécifique à l’élaboration de ce
schéma a eu lieu, et ce fut l’occasion de sensibiliser
6.2.6 Une partie du jardin gérée les habitants aux enjeux de préservation de la biodi-
par une association d’habitants versité existante dans la ville. La plupart des partici-
pants de la concertation sur le jardin Vaclav Havel y
Le jardin pédagogique est actuellement géré par une avaient participé et étaient de ce fait déjà sensibi-
association locale (Vitamines et baskets) qui coor- lisés aux enjeux de la préservation de la biodiversité.
donne des actions avec d’autres acteurs comme les
assistantes maternelles, les écoles, des SESSAD et des
personnes retraitées. La mairie a passé une conven-
tion annuelle de mise à disposition de la parcelle du
terrain pédagogique, renouvelable tacitement, pour
que l’association soit responsable de l’animation et
coordonne les groupes d’utilisateurs.

Lors des deux réunions de concertation, une associa-


tion s’était en effet proposée pour assurer la coordi-
nation de l’utilisation de la parcelle à jardiner
demandée par les assistantes maternelles. Mais l’as-
sociation n’a pas réellement impulsé une gestion
participative du jardin pédagogique, qui reste relati-
vement peu utilisé.
Deux raisons semblent en être la cause : d’une part son
président, qui était très moteur, a eu moins de temps ©Ville de Villeurbanne
à consacrer à l’association qu’auparavant, d’autre part
la ville n’a pas accompagné l’association dans son Par ailleurs, la sensibilisation à la biodiversité est faci-
travail auprès des habitants et des autres associations litée par l’exemple du parc de la Feyssine, très naturel,
potentiellement intéressées par la parcelle. situé sur la commune : « On peut s’appuyer sur
l’exemple de ce parc très apprécié par les habitants. »
Ainsi, actuellement, les habitants ne se sont pas encore
approprié cet espace : « On ne sait pas trop si les assis- Les agents d’entretien du jardin, la ville, ainsi que le
tantes maternelles viennent » (ville de Villeurbanne). concepteur s’accordent sur le fait que les mentalités
La ville va donc travailler avec des personnes en service évoluent quant à la vision de la nature en ville :
civique pour essayer de relancer cette initiative, et • « Il y a encore des Villeurbannais avec une vision
« si ça ne marche pas, on pourra envisager de déployer traditionnelle de la nature, désireux d’une nature
des «animateurs nature» de la ville ». hygiéniste, mais la plupart ont fait leur évolution
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L 115

et souhaitent même voir se développer une personne s’est plainte de l’entretien, et une femme
«nature plus sauvage» » (cf. enquête réalisée pour nous a soutenus en disant : «Mais laissez les vivre
la certification ISO 9001 des espaces verts). ces mauvaises herbes !». »
• « Le côté «non entretenu» et sauvage, on s’aperçoit
que ça ne dérange pas plus que ça. Certains disent Dans le cas précis du jardin Vaclav Havel, la dimen-
que ce n’est pas propre mais ce n’est pas sion naturelle et la préservation de la biodiversité
majoritaire. À Villeurbanne, il n’y a que de la ont été facilitées par l’historique du lieu : cela revient
gestion différenciée, donc les gens sont habitués » à faire de la valorisation patrimoniale. « Au final, la
(concepteur). biodiversité dans le jardin consiste essentiellement à
• « La gestion écologique de la biodiversité peut être conserver des espèces déjà présentes donc l’accep-
dure à faire comprendre au public, surtout les plus tation est sûrement plus évidente. La nature est un
âgés, car on les a habitués à mettre du désherbant. sujet consensuel » (ville de Villeurbanne).
Maintenant ça commence à changer, on le voit
aux réactions des gens. Un jour par exemple, une

Micro-trottoir réalisé un mercredi pendant les


vacances d’été, en début de soirée (19h) : “ Témoignage de deux mères
de famille, la trentaine
« J’aime bien les arbres, la verdure, c’est calme, les
copeaux de bois dans les jeux c’est bien, c’est


naturel et ça amortit bien.
Témoignage de deux jeunes C’est bien c’est un mélange entre jeux pour
hommes de 20 et 24 ans enfants et la nature.
« Ce qui est bien c’est que c’est convivial, tran- C’est la nature au milieu de la ville, ça fait du bien.
quille, très naturel et du coup apaisant. Pour les adultes il y a la nature et pour les enfants
C’est bien cet univers naturel, les plantes tout ça, il y a les jeux c’est un bon mélange.
ce truc-là [ils désignent la rocaille]. C’est différent des autres parcs car plus d’élé-
C’est le parc de Villeurbanne que je préfère, fran- ments naturels, des arbres.
chement il est bien réussi. Ça [l’orangeraie] personne ne sait ce que c’est,
C’est tranquille avec ma copine on peut venir [J’explique que c’est un élément conservé de l’an-
faire des bisous tranquillement le soir. C’est bien cien jardin et que ça abrite des nichoirs]. Ah mais
il est ouvert tard. je pensais que c’était un local poubelle, c’est bête
[J’explique la rocaille] C’est bien en plus le parc il il faut le dire. Ça pourrait être intéressant que ça
a un petit côté historique ! soit expliqué.
On n’aime pas quand il ferme ! C’est bien que les jeux soient en bois.
Moi je n’aime pas les insectes. [L’autre le coupe :] C’est bien de développer des endroits plus natu-
Mais non c’est la nature c’est normal ! rels, c’est plus beau et c’est mieux, par exemple on
Les arbres ils sont un peu secs l’été. [L’autre le peut faire des pique-niques dans la verdure avec
coupe également :] Mais c’est ce qui fait la des enfants.
nature et quand il pleut ça va mieux. » Il est bien mais il est petit. »

“ Témoignage d’un père de famille d’environ 30 ans avec ses deux jeunes enfants
« J’habite à côté, ce jardin c’est un choix par défaut c’est le plus proche mais pour les enfants ce n’est pas le mieux :
il y a un seul toboggan, la trottinette ce n’est pas possible.
Sinon c’est bien quand même, un peu de «verdure» en ville, c’est un coin calme et tranquille, mais c’est un petit
parc. Je sais que c’est déjà pas mal mais je ne le trouve pas si grand que ça. Un peu de verdure c’est bien ça
change, [en désignant l’espace de préservation] ça ce n’est pas pratique pour les enfants avec les barrières, mais
c’est bien pour la végétation. »
116 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L

6.3 La nature en ville prairie centrale qui présentait des individus floris-
et la biodiversité tiques intéressants, et de maintenir et développer la
population d’oiseaux sur le site.
6.3.1 Un diagnostic préalable
de la biodiversité présente, pour 6.3.2 Des choix de conception pour assurer
déterminer les objectifs du projet des usages publics tout en préservant
la biodiversité
Plusieurs études ont alimenté la programmation :
une étude sur la biodiversité, une étude historique Suite aux études préalables, des espaces remar-
du jardin, et un diagnostic sur les arbres et les quables en termes de biodiversité étaient à conserver
milieux existants. dans le jardin. Toutefois, le jardin étant destiné à être
À partir des résultats de ces diagnostics préalables, ouvert au public, il était censé également accueillir
les objectifs programmatiques ont été de conserver les riverains et permettre des usages de jeux pour
au maximum les végétaux en place, de conserver la enfants, de détente, de promenade, etc.

“ Témoignage du concepteur
« Nous nous sommes associés avec un écologue spécialisé dans l’avifaune, et il s’est avéré que c’était un bon point
car sans que ce soit écrit dans le cahier des charges, la ville recherchait cette compétence. Sur l’espace central,
l’inventaire réalisé au préalable avait relevé la présence de trois orchidées sauvages, une présence végétale inté-
ressante notamment des plantations typiques des cultures du début du siècle dernier. Il y avait également
plusieurs arbres intéressants. La question alors était : comment concevoir un jardin accessible au public, mais avec
un espace de conservation de la flore au centre, qui, en plus, est une prairie et non un bosquet (tout de suite
moins accessible) ? »

En termes de conception, il a été alors choisi de


rendre inaccessible l’espace central mais de
permettre le passage sur cet espace grâce à une
passerelle en caillebotis métallique (perméable à
l’eau et la lumière), ce qui permettait de maintenir et
préserver la végétation existante. Afin de permettre
aux gens de profiter quand même d’une aire pour les
pique-niques, une prairie accessible a été réalisée à
côté de l’espace central. D’autre part, un gabion a
été ajouté pour développer la présence de la micro-
faune (granulométrie spécifique), et huit nichoirs
différents ont été aménagés dans l’ancienne oran-
geraie (fermée au public), où les oiseaux peuvent
Zone de préservation (« L’île écologique ») ©Cerema accéder grâce à une ouverture sous le toit.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L 117

6.3.3 L’entreprise de travaux, un acteur clé l’utilisation des produits phytosanitaires. Le jardin
Vaclav Havel est en catégorie 3 « horticole modéré »,
La bonne conduite du chantier est primordiale pour ce qui signifie un entretien régulier, tendant vers des
un espace comme ce jardin où l’objectif était de caractères naturels tout en permettant l’usage de
préserver au maximum les espèces déjà présentes. loisir des espaces.


6.3.5 Les usages et la biodiversité :
Témoignage du concepteur des conflits persistent...
« Il y avait déjà de beaux arbres, ça aide pour
avoir un projet qui est apprécié par les usagers Le jardin, petit espace vert dans une zone d’habitat
dès la livraison. Par contre, c’était plus compliqué très dense, est sur-fréquenté. Ainsi, au final, l’espace
pour l’espace central car il fallait qu’il reste inac- de préservation de la biodiversité n’est pas vraiment
cessible pour être préservé, et l’entreprise de préservé : malgré les installations qui limitent l’accès,
travaux ne devait pas y accéder. Les conducteurs des enfants viennent y jouer. En effet, il semble
de travaux sont des acteurs très importants, c’est qu’il est difficile de conjuguer préservation des
en fait eux qui conditionnent la bonne réalisa- espèces, petit espace et importante fréquenta-
tion du projet. » tion. Sa position en tant qu’espace central ne
semble pas non plus faciliter le non-usage de la
zone préservée.
6.3.4 Une gestion horticole modérée,


et sans produits phytosanitaires
Témoignage de la ville
La gestion du jardin a été confiée pendant un an « C’est une idée intéressante mais ça ne marche
après la livraison aux entreprises qui ont réalisé les pas, c’est trop petit comme jardin pour avoir un
travaux. Depuis, c’est le service des Espaces verts de sanctuaire, c’est petit et c’est dans un quartier
la ville qui prend en charge la gestion. très dense avec un manque d’espaces verts. Les
enfants sont en liberté et c’est tant mieux, mais
Le service des Espaces verts a une politique de du coup ils piétinent ces espaces où nous
gestion orientée vers la valorisation et la restaura- n’avons mis une barrière que symbolique. »
tion de la biodiversité. Par exemple, sur l’ensemble
des espaces publics dont il est gestionnaire, il a
adopté la gestion différenciée et a supprimé Le paysagiste concepteur est quant à lui d’avis de
laisser les usages se faire, même si c’est au détriment
de la biodiversité : « On a voulu laisser les bosses
plantées sans barrières pour que les gens s’appro-
prient les espaces, donc tant mieux si des enfants y
jouent et qu’il n’y a plus la végétation qu’on y avait
mis. Il ne faut pas trop cadrer les usages. »

La ville de Villeurbanne envisage une « remise à


niveau » de l’aménagement, après les premières
années de « test ». Cette remise à niveau porterait sur
les bosses qui servent de terrain de jeu BMX, sur les
espaces préservés qui ne fonctionnent pas, sur le
cheminement à revoir à certains endroits, ainsi que
sur les modalités d’entretien.
Bois mort laissé sur place en tant que refuge
pour la petite faune ©Cerema
118 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L

6.3.6 Une communication relativement 6.3.7 Un manque de recul sur l’évolution de
restreinte sur les espaces naturels la faune et de la flore dans le jardin
du jardin
Le jardin ne fait pas l’objet de suivis faune/flore, et
Comme évoqué précédemment, des milieux ont été aucun indicateur de la biodiversité n’est censé être
préservés par la conception même du projet (notam- suivi. Le manque de compétences des jardiniers sur
ment l’inaccessibilité de l’espace central), et d’autres ce point semble être la principale difficulté pour
habitats ont été créés. Un panneau informatif, situé mettre ce type de suivi en place.
à l’entrée du jardin, explique succinctement ces Ceci ne permet donc pas d’évaluer la végétation qui
aménagements et les habitats présents dans le a résisté aux travaux et aux usages intensifs, ni de
jardin. recenser de nouvelles espèces (animales ou végé-
tales) qui auraient pu s’installer grâce aux aménage-
ments prévus par le concepteur.

Panneau informatif à l’entrée du jardin qui cite l’ensemble des milieux naturels présents dans le jardin ©Cerema
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L 119

6.4 Principaux enseignements s’est pas faite. Peut-être le manque d’accompagne-


ment par la ville de cette association a-t-il été une
6.4.1 L a concertation faille. Peut-être la personne qui s’était engagée au
nom de l’association s’est-elle démotivée ou a-t-elle
• Des attentes envers la nature, relatives au manqué de temps. Peut-être l’association ne s’est-
ressenti, à l’esthétique et à l’identité patrimoniale elle pas assez ouverte aux autres habitants, dont les
souhaits potentiels de s’approprier le lieu n’ont donc
La concertation effectuée bien en amont de la pas été satisfaits.
programmation a permis d’associer les participants La gestion en autonomie par les habitants est en
à la définition du projet. Ils ont fait émerger, parmi tout cas vécue comme un fonctionnement fragile,
leurs attentes, celle de voir les espèces présentes sur qui peut échouer facilement.
le terrain conservées et valorisées, et celle d’un
espace vert « naturel ». Cependant, comme le 6.4.3 La sensibilisation aux enjeux
souligne Vincent Moineau, la sensibilisation à la de biodiversité
biodiversité est surtout liée à un ressenti et à l’es-
thétique et non au bon sens écologique et écono- • Une sensibilisation réalisée au niveau
mique. « Les gens aiment le côté plus naturel mais communal
c’est aussi plus riche écologiquement et plus
économe, mais ça ils ne le voient pas forcément. » Grâce au schéma directeur « Paysage et environne-
La préservation de la biodiversité a aussi été facilitée ment » de la ville, les Villeurbannais ont bénéficié
par l’aspect patrimonial de ce jardin et des espèces d’une communication et d’une sensibilisation sur les
déjà présentes (jardin construit à la place d’un jardin enjeux de la biodiversité. Des terrains représentatifs
bourgeois planté il y a cent ans). sont d’ailleurs ancrés dans l’esprit de ces habitants,
La biodiversité est favorisée indirectement par des comme le parc de la Feyssine. Ainsi les habitants de
attentes en matière d’usages et d’ambiance et une Villeurbanne sont de plus en plus sensibilisés aux
volonté de préserver un patrimoine naturel. enjeux de la préservation de la biodiversité et d’une
gestion « moins hygiéniste » de la nature.
• Une concertation peu représentative
de l’ensemble des usagers • Mais un manque de sensibilisation sur le lieu
du jardin
Les organisateurs ont été frustrés par le profil du
public : « Ce sont toujours les mêmes qui viennent, La concertation a été importante dans la phase de
on ne mobilise pas les futurs usagers. » programmation. Ensuite, la ville n’a pas sollicité les
« Moi je suis paysagiste, je n’ai pas les compétences habitants lors de la conception, et n’a pas mis en
en participation. Si on veut réussir à mobiliser les place de communication, une fois le jardin finalisé,
personnes qui ne viennent pas spontanément aux autour des aménagements réalisés en faveur de la
réunions, c’est un travail relationnel de fourmi biodiversité (orangeraie et ses nichoirs, prairie inac-
souvent négligé » (Vincent Moineau). cessible et ses espèces végétales remarquables, etc.).
Face aux incompréhensions des usagers, et à l’utili-
6.4.2 La gestion participative sation des zones de préservation par les enfants, l’on
se dit que les aménagements manquent de lisibilité,
• Un espace géré par une association et qu’il pourrait y avoir davantage de pédagogie et
d’habitants, au final laissé à l’abandon de communication (pourquoi la zone de préserva-
tion, à quoi sert l’orangeraie, d’où vient la rocaille).
Une convention a été passée entre la ville et une
association pour transférer la gestion des jardins
cultivés à cette association. Mais finalement, le lieu
est très peu utilisé : l’appropriation de cet espace ne
120 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L

6.4.4 L a biodiversité 6.4.5 La biodiversité et les usages

• Deux espaces de préservation • Un équilibre délicat entre appropriation par


de la biodiversité : au centre et en bordure les habitants et préservation de la biodiversité
du jardin
Le jardin Vaclav Havel illustre un équilibre délicat
Afin de conserver des espèces végétales remar- entre appropriation par les habitants de ce jardin et
quables des milieux urbains (espèces endémiques de préservation de la biodiversité. Certains usages
friches), il a été choisi d’aménager la zone centrale plébiscités vont à l’encontre d’une bonne gestion de
du jardin de manière à en limiter l’accès. Une passe- la biodiversité du jardin (enfants qui courent partout,
relle a été aménagée au-dessus de l’espace protégé, sur-fréquentation...). Mais l’appropriation du jardin
et des effets de relief mettent une barrière visuelle. se fait également à travers l’utilisation de la zone de
Un autre espace a été clôturé, en bordure du jardin, repos, pour se ressourcer dans un cadre « très
afin d’en limiter l’accès pour préserver la végétation. naturel » préservé, ou par le partage d’un espace de
Cet espace moins central est finalement moins jardinage (potager partagé). Les retours sont plutôt
utilisé par les usagers, et joue davantage son rôle de positifs de la part des usagers comme des jardiniers.
zone de préservation. Mais au final, sur un espace de cette taille (3 000 m²)
en zone dense, la priorité est donnée à l’usage et
• Des nichoirs dans une ancienne orangeraie non à la préservation de la biodiversité, bien que
celle-ci ait été une priorité lors de la conception.
Une ancienne orangeraie a été conservée, et le Forte de cette expérience, Mireille Maquaire pense
concepteur y a installé huit types de nichoirs diffé- que la surface minimale pour pouvoir réaliser dans
rents à l’aide d’un bureau d’étude spécialisé en un jardin public des espaces de préservation serait
avifaune. Aucun suivi n’est par contre réalisé sur la de 5 000 m².
fonctionnalité de ces nichoirs, et les usagers du
jardin n’en connaissent pas la présence. Ils vont
jusqu’à s’interroger sur l’utilité de cette orangeraie,
car aucune indication ne laisse transparaître cette
destination.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 6 . J A R D I N V A C L A V H A V E L 121

À retenir :

•
Les personnes participant aux concertations sur • Afin que les citoyens prennent conscience de
un projet d’aménagement d’une collectivité ne l’intérêt des différents aménagements en faveur
sont souvent pas totalement représentatives de de la biodiversité, il est important de développer
l’ensemble des citoyens. Un important travail une sensibilisation et une communication claires
relationnel doit donc être mis en œuvre pour et pédagogiques (réunions publiques présentant
mobiliser davantage de citoyens. les ouvrages réalisés, articles dans les journaux
locaux, ateliers de sensibilisation, panneaux d’affi-
• La sensibilisation des citoyens aux enjeux envi- chage permanents sur le site).
ronnementaux mise en place d’une manière
générale au niveau d’une collectivité crée un • Un suivi de l’évolution de la faune et de la flore
contexte favorisant la prise en compte de ces peut permettre de sensibiliser les habitants et
enjeux par les habitants et usagers lors d’un usagers, en justifiant concrètement l’intérêt des
nouveau projet d’aménagement. aménagements en faveur de la biodiversité.

• Un espace public de petite taille en milieu très • Une démarche de jardinage collectif sur un
dense est a priori moins favorable au dévelop- espace public ne doit si possible pas reposer sur
pement de secteurs végétalisés en évolution une seule personne, afin de ne pas mettre en péril
naturelle et en accès limité au public. La ques- sa pérennité.
tion de la pérennité de ce type d’aménagement se
pose en amont, notamment au regard de la fréquen- • Le suivi régulier, par la collectivité, des
tation attendue et des usages souhaités par la démarches de jardinage collectif peut permettre
population. L’écoute de leurs demandes est une mise en évidence de certains dysfonction-
primordiale. nements. La collectivité est alors plus à même de
réagir pour éviter une aggravation de la situation
(remobilisation des acteurs, campagne de communi-
cation, etc.).
122 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G

7 Végétalisation et gestion de l’espace public


par les habitants à Strasbourg
De petites surfaces mobilisées : pieds d’arbres, placettes, trottoirs, etc.
Situation géographique Strasbourg (67)
Superficie des espaces végétalisés Entre 10 et 250 m² (Pieds d’arbres, trottoirs, placettes, etc.)
Date de début de l'initiative 2010
Porteur du projet ville de Strasbourg

7.1 Présentation de la démarche La ville de Strasbourg et ses services s’engagent à


accompagner, soutenir, aider les associations d’habi-
La ville de Strasbourg propose à ses habitants la mise tants porteuses de chaque projet.
à disposition d’espaces publics en vue de les végéta-
liser et de les entretenir. Cette démarche s’inscrit 7.1.1 E
 xemples de sites
dans la volonté de requalification globale des espaces
publics strasbourgeois sur le plan du paysage, des Les Strasbourgeois ont d’ores et déjà investi des
usages et du cadre de vie. Elle s’intègre également pieds d’arbres, des trottoirs et des places au sein de
dans les ambitions de déminéralisation de la ville. la ville. En voici quelques exemples :

L’objectif est d’imaginer un espace public non plus RUE DU JEU-DE-PAUME


considéré uniquement à travers des critères esthé- Des habitants du quartier ont soumis à la ville leur
tiques tels que la propreté et la netteté mais plutôt souhait de jardiner sur un espace de nature situé à
comme un espace servant à l’environnement et au proximité de chez eux. Avec l’accord de la ville et
lien social dans l’optique d’une gestion durable des l’appui de l’association Ahbak17, les habitants sont
sites végétalisés et d’une meilleure appropriation de chargés de la gestion des végétaux qu’ils ont plantés
l’espace public par les riverains. Au-delà de l’embel- sur le trottoir ainsi que de la propreté du site.
lissement des quartiers, cette démarche offre aussi Les jardiniers citoyens ont sollicité la ville pour
une autre représentation de la flore spontanée, bien obtenir un nouvel espace à jardiner dans ce quartier,
trop souvent synonyme de manque d’entretien, et bien qu’ils soient moins nombreux à s’investir dans
prépare le regard au retour de la nature dans la ville. la démarche en raison de plusieurs déménagements.

17 www.ahbak.org

Trottoir végétalisé par des habitants de la rue du Jeu-de-Paume ©J. DORKEL/CUS


R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G 123

PLACE D’AUSTERLITZ
Lors du réaménagement de la place d’Austerlitz, les
habitants ont émis le souhait de gérer un petit
espace public déminéralisé et végétalisé.
La photo ci-contre a été prise avant les plantations
de printemps. Elle reflète donc le site tel qu’il était
en hiver. Ici, comme de manière générale sur la place
d’Austerlitz, les pesticides ne sont pas utilisés. Cela
se traduit de façon très visible par le retour de la
nature en ville : « herbes folles », pieds d’arbres végé-
talisés, etc. C’est une autre esthétique de la ville qui
mérite d’être expliquée, ce qui permettra de faire
Espace géré par les habitants au sein de la place d’Austerlitz, aménagée
évoluer les mentalités pour plus de tolérance face par Agnès Daval de l’agence DIGITALE Paysage (Plantations de printemps
aux espaces « non jardinés » et plus « sauvages ». non encore effectuées lors de la prise de vue) ©Cerema

PIEDS D’ARBRES DE LA RUE DU FAUBOURG-


DE-PIERRE
Lors du réaménagement de la rue du Faubourg-de-
Pierre, les habitants ont manifesté le souhait de
prendre en charge la gestion des pieds d’arbres.
L’association Envie de quartier18 gère ainsi avec les
habitants une trentaine de pieds d’arbres de part et
d’autre de la rue. Les séances de jardinage collectif
(1er dimanche du mois) sont suivies d’un apéritif
convivial entre voisins.
Les habitants ont également souhaité s’investir dans le
jardinage d’une placette située à proximité immédiate.

Pied d’arbre géré par les habitants


de la rue du Faubourg de Pierre ©Cerema

RUE DES ZOUAVES


À l’initiative de la ville, une partie de la rue des
Zouaves a été déminéralisée et végétalisée. Les habi-
tants ont été amenés à exprimer leurs attentes et
donner leur avis lors de réunions de concertation
organisées par la ville. L’emplacement central de
l’aménagement est une demande des habitants.
Le site est géré par le service des Espaces verts et de
nature de la ville.

Espace végétalisé de la rue des Zouaves élaboré


en concertation avec les habitants du quartier
©Cerema
124 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G

7.1.2 Chronologie de la démarche Cette démarche de déminéralisation et de végétali-


sation répond ainsi à plusieurs objectifs :
La ville et la communauté urbaine de Strasbourg - amélioration du cadre de vie en y intégrant davan-
(désormais Eurométropole de Strasbourg) se sont tage de surfaces vertes,
engagées en 2008 dans une démarche dite « Zéro - création de surfaces favorables à l’avifaune et aux
pesticide ». Grâce à une importante campagne de insectes,
sensibilisation, on ne parle plus ici de mauvaises - création de surfaces perméables optimisant la
herbes mais « d’herbes folles ». gestion des eaux pluviales,
Très rapidement, une démarche plus large en faveur - participation à l’atténuation des pollutions et à
de la biodiversité a été mise en place avec la création l’abaissement des températures en été pour un
d’un groupe de travail réunissant des agents de la meilleur confort,
ville et des experts des mondes associatif et univer- - réappropriation de l’espace public par la popula-
sitaire. Dans ce cadre, des réflexions ont été menées tion, avec si possible prise en charge de sa gestion.
sur la déminéralisation des espaces publics. L’intérêt
de faire participer les habitants à la gestion de petits Les premières opérations de déminéralisation ont eu
espaces publics végétalisés a très vite été identifié. lieu en 2010.
Afin de développer la démarche de déminéralisa-
tion-végétalisation, la ville de Strasbourg envisage
désormais de lancer un appel à projets citoyens.

2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015


Lancement de la Création d’un
Lancement des premières opérations de déminéralisation
démarche groupe de travail
et renouvellement de la démarche chaque année
Zéro pesticides Biodiversité

“ Témoignage du service Environnement de la ville de Strasbourg


« Les habitants souhaitent cette démarche de végétalisation. L’espace public est complètement transformé depuis
2008 à partir du moment où la ville a arrêté d’utiliser des produits phytosanitaires. Le végétal a repris ses droits.
La nature a été libérée ! Du coup, inciter les habitants à jardiner en ville augmente aussi leur tolérance à ce
végétal. Ça change leur regard.
Maintenant, on souhaiterait encore aller plus loin avec le lancement d’un appel à projets citoyens. Il faudra aussi
que les services de la ville continuent à s’adapter, pour être en mesure de répondre aux envies des habitants. »

7.1.3 D
 ocuments consultés

- Convention de végétalisation de l’espace public par les habitants - Ville de Strasbourg


- Pour plus de biodiversité, plantons local - Ville et Communauté urbaine de Strasbourg
- Dix actions pour plus de biodiversité, Gestionnaires d’espaces verts - Ville et communauté urbaine de Strasbourg
- Petit manuel du jardinage au naturel - Ville et communauté urbaine de Strasbourg
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7.2 L’implication citoyenne l’important réseau associatif présent à Strasbourg


participent pleinement à la communication autour
7.2.1 Lors du choix des sites de cette démarche de végétalisation. L’article dans la
gazette de la ville sur la rue Faubourg-de-Pierre, où
Les habitants désirant s’investir dans la gestion d’un une vingtaine de pieds d’arbres sont gérés par les
espace public (pieds d’arbres, trottoirs, placettes...) habitants, a également contribué à faire connaître la
peuvent en informer la ville, qui étudie la faisabilité démarche.
de leur projet. Si le projet est pertinent, le site
concerné pourra être intégré à la liste de sites 7.2.3 L a convention
proposés à l’élu thématique de la ville de Strasbourg,
qui retient les projets entrant dans l’enveloppe Afin de préciser les modalités de mise à disposition
budgétaire allouée à la démarche de déminéralisa- des espaces publics aux habitants, la ville de
tion-végétalisation. Parallèlement à ces sollicita- Strasbourg s’appuie sur une convention. Cette
tions spontanées, les habitants peuvent aussi dernière n’est pas directement signée par les habi-
émettre leur souhait de jardiner sur de petits tants désirant s’engager dans la démarche de
espaces publics lors de réaménagements de rues ou gestion, mais par une association de proximité de
de places prévus par la ville. leur choix, ce qui permet d’asseoir la démarche dans
la durée. La convention constitue une autorisation
Des projets de déminéralisation et végétalisation de d’occupation du domaine public accordée à l’asso-
l’espace public sont également proposés par la ville, ciation à titre gracieux pour partager avec elle une
dans le cadre de l’enveloppe budgétaire correspon- gestion commune, harmonieuse et écologique du
dante. Les critères de choix du service Ingénierie et territoire. Elle tient compte des normes juridiques en
conception d’espaces publics sont notamment : vigueur et des modalités d’intervention des services
- la faisabilité technique, notamment en lien avec municipaux concernés par les opérations de végéta-
les réseaux existants ; lisation, desquels les associations devront se rappro-
- le coût ; cher pour garantir la réussite de ces opérations.
- la continuité avec le tissu naturel urbain ; Au-delà du caractère prescripteur de ce document,
- l’implication des habitants dans la gestion future une large place est faite aux recommandations
du site. pratiques, afin d’aider les associations désireuses de
participer à cette opération à mettre en œuvre leur
Notons que les sites où un souhait de gestion par les projet dans les meilleures conditions sur le territoire
habitants est identifié sont souvent considérés en strasbourgeois.
priorité. En effet, la création de petites surfaces En signant la convention, l’association s’engage
végétalisées associées aux opérations de déminéra- notamment à respecter les principes suivants :
lisation entraîne un travail supplémentaire pour le - convivialité : organiser des moments de plantation
service gestionnaire des espaces verts. Les acteurs de en collectif ;
la ville de Strasbourg rencontrés soulignent que - communication : identifier de manière lisible et
sans l’implication des habitants dans la gestion de visible les espaces plantés par l’association ;
certains sites, cette démarche pourrait devenir trop fonctionnement : élaborer collectivement le projet
chronophage pour le service des Espaces verts. de plantation, qui devra être joint en annexe de la
convention ;
7.2.2 La communication - gestion du site : entretenir écologiquement les
espaces tout au long de l’année en respectant les
Le bouche à oreille explique en partie la bonne prescriptions de la convention ;
diffusion de l’information sur la possibilité offerte - gestion partagée : maintenir une concertation
aux Strasbourgeois de gérer des petits espaces entre l’association et les services de la Propreté
publics à proximité de chez eux. Les services urbaine et des Espaces verts et de nature pour une
de proximité de la ville, les conseils de quartier et gestion harmonieuse de l’espace public.
126 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G

7.2.4 La conception des projets

Projets à l’initiative des habitants


Lorsque les habitants sont à l’initiative d’un projet de
“ Témoignage d’une jardinière
citoyenne et membre du
collectif Envie de quartier
« Le projet de végétalisation de la rue est le
végétalisation de l’espace public, la conception du résultat d’un processus de démocratie participa-
site leur revient. Les citoyens sont très moteurs dans tive réussi entre la ville et le collectif Envie de
la démarche. C’est à eux de définir l’ambiance du quartier. Nous avons pu choisir les arbres qui ont
site, le choix des plantes et leur agencement. Ils sont été plantés (il y avait un désir des riverains de ne
libres et peuvent imaginer un espace qui répond pas avoir d’arbres créant trop d’ombre devant les
totalement à leurs attentes. Bien évidemment, en immeubles d’habitation), et nous sommes libres
raison de l’occupation de l’espace public, certaines dans notre choix de plantations. Nous avions
exigences de la ville doivent être respectées. Les exprimé dès le départ le vœu de favoriser au
plantations doivent, par exemple, être uniquement maximum la biodiversité en privilégiant des
composées de petits arbustes et de plantes annuelles, plantes indigènes persistantes et florifères ne
vivaces et bulbes de petit développement et n’en- demandant pas d’arrosage. »
gendrant pas d’effet de masque susceptible de gêner
la visibilité de la chaussée ou de panneaux de signa-
lisation. Des précautions sont également à prendre


vis-à-vis des enfants ou des personnes non infor-
mées des dangers potentiels de l’ingestion de Témoignage d’une jardinière
certaines plantes. Les plantes considérées comme citoyenne
toxiques sont proscrites. « La conception du jardin a été co-élaborée avec
les services de la ville.
Afin de définir leurs attentes et leur projet, les habi- Nous avons été plus qu’entendus : nous avons
tants sont amenés à s’organiser eux-mêmes : diffu- pu tenir le crayon. »
sion de l’information pour impliquer de nouveaux
habitants, organisation de réunions pour s’accorder
sur un projet, gestion des éventuels désaccords, etc.
S’ils en ressentent le besoin, les agents de la ville Projets à l’initiative de la ville
peuvent ponctuellement leur fournir des conseils Lorsque le futur site déminéralisé et végétalisé est
(choix de plantes, agencement, etc.). Toutefois, il identifié par la ville, les avant-projets sont générale-
s’avère que les habitants s’investissant dans de tels ment définis par son service Ingénierie et Conception
projets ont généralement de bonnes connaissances d’espaces publics. Afin que les habitants puissent
en jardinage et en flore, ce qui implique que les exprimer leurs attentes, des réunions de concerta-
services de la ville sont assez peu sollicités. Lorsque tion (sur site ou en salle dans le quartier) sont
le projet est défini, l’association d’habitants propose organisées avec l’appui du service proximité de la
à la ville un projet de plantations accompagné d’une ville. Les habitants sont généralement assez
liste de plantes. Le service des Espaces verts et de nombreux à y assister. Étant donné que plusieurs
nature est alors chargé de vérifier le respect des autres sujets peuvent être à l’ordre du jour, il est
critères généraux mentionnés dans la convention difficile d’attribuer cette participation à la seule
(cf. supra). démarche de déminéralisation. Il est toutefois
possible de préciser que les habitants réagissent
plutôt favorablement à ces opérations et qu’ils en
profitent pour donner leurs avis. À titre d’exemple, le
site de la rue des Zouaves est végétalisé au niveau
de l’espace central car les habitants ne souhaitaient
pas une végétalisation à proximité de leur façade.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G 127

Ces réunions de concertation sont aussi l’occasion crée d’une part des conditions favorables aux
pour la ville de proposer la gestion du site aux habi- échanges entre jardiniers. D’autre part, certains
tants. Notons que dans le cas de la rue des Zouaves, passants peuvent être surpris de voir des gens
citée ci-dessus, les habitants n’ont pas souhaité jardiner sur les trottoirs et s’arrêtent alors pour
s’investir dans la gestion du site, qui revient donc au découvrir cette démarche.
service des Espaces verts et de nature de la ville.
Afin de créer des moments de convivialité et/ou de
7.2.5 La participation au chantier initial faire connaître l’espace public géré par les habitants,
et aux premières plantations des apéritifs sont aussi organisés sur place. Ces sites
deviennent des lieux de rencontre très appréciés des
Que le site soit conçu par la ville de Strasbourg ou habitants. Une jardinière de la rue du Faubourg-de-
par les habitants, la première phase de préparation Pierre met en avant la convivialité de ces moments
est entièrement prise en charge par la ville : déminé- partagés et souligne qu’« il y a plus de monde à
ralisation, apport de terre, mise en place d’éven- l’apéro qu’au jardinage ! ».
tuelles bordures, etc. Les habitants peuvent ensuite
investir les lieux. Il leur revient alors de planter les Les sites gérés par les habitants sont identifiables
différentes plantes, qu’ils ont choisies de manière grâce à différents panneaux fournis par la ville.
totalement autonome. Certains sont ciblés sur la gestion citoyenne et
Cette étape est généralement un moment particulier d’autres sensibilisent les habitants à la gestion
pour les habitants car leur projet prend enfin forme. écologique sans pesticides.
Être actif et acteur dans l’espace est très valorisant
pour eux. Plusieurs jardiniers amateurs soulignent
leur sentiment de satisfaction.
À partir de cette étape, ils commencent à véritable-
ment s’approprier les lieux.

7.2.6 La gestion participative

La gestion et la propreté des espaces publics végéta-


lisés sont sous la responsabilité de l’association
ayant signé la convention. Chaque année, les jardi-
niers amateurs doivent ainsi se procurer les graines,
les plantes, et décider comment se feront les planta-
tions. Des trocs entre jardiniers de divers espaces
publics partagés se sont naturellement mis en place.
Les habitants gestionnaires doivent aussi veiller aux
outils et les renouveler si nécessaire. Dans tous les
cas, ils peuvent s’organiser selon leurs souhaits, ce
Panneau expliquant la démarche de gestion
qui induit une véritable appropriation du lieu. de l’espace public par les habitants
(rue du Faubourg-de-Pierre) ©J. DORKEL/CUS
Conformément à la convention, les habitants
doivent organiser des moments de plantation en
collectif. Au niveau de la rue du Faubourg-de-Pierre,
les jardiniers se retrouvent ainsi tous les premiers Malgré ces affichages, les habitants se heurtent
dimanches du mois. À cela s’ajoutent de multiples parfois au non-respect des sites qu’ils gèrent : déjec-
jardinages informels, chacun pouvant aller jardiner tions canines, mégots, déchets divers, stationnement
quand il le souhaite. La présence des jardiniers sur de véhicule sur les plantations. De fait, ils sont
l’espace public est générateur de liens sociaux. Cela amenés à sensibiliser les voisins et les passants, pour
128 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G

faire respecter ces lieux. Cela passe par la mise en Il est intéressant de souligner que certains habitants
place d’affichettes supplémentaires (précisant par n’intervenant pas dans la gestion des sites se
exemple que le site n’est pas un canisite) ou par des sentent aussi responsables du maintien en bon état
explications de vive voix lors de l’observation d’un de ces lieux et participent à la sensibilisation des
comportement inapproprié. passants, en faisant connaître la démarche.

Véhicules empiétant sur un pied d’arbres géré par les habitants Affichette mise en place par les habitants pour faire respecter
(rue du Faubourg-de-Pierre) ©Cerema la propreté (rue du Faubourg-de-Pierre) ©Cerema

“ Témoignage d’une jardinière citoyenne, membre du collectif Envie de quartier


« Cela crée effectivement du lien social, et même bien au-delà de nos attentes.
En 2009 j’habitais en ville, maintenant j’ai l’impression d’habiter un village.
Je connais dix fois plus de monde qu’avant, je me suis fait des amis (je n’en manquais pas), je parle avec des
inconnus avec qui je n’aurais a priori pas parlé : des personnes âgées qui s’arrêtent quand on jardine pour nous
encourager, des étudiants qui veulent écrire des articles sur nous, des personnes de passage qui s’étonnent
de nous voir jardiner dans la rue, etc.
En six ans, je n’ai jamais jardiné sans que quelqu’un s’arrête pour m’adresser la parole. »

“ Témoignage du service des


Espaces verts et de nature
de la ville de Strasbourg
« Nous avons un très bon retour des habitants
“ Témoignage d’une jardinière
citoyenne, membre de
l’association d’habitants Ahbak
« Les lieux de jardinage ne sont pas toujours
participant à la gestion des pieds d’arbres de la respectés mais il est intéressant de constater
rue du Faubourg-de-Pierre. Le site ne se vit plus qu’il y a parfois une surveillance sociale qui se
de la même manière. Les habitants ont l’impres- met en place. Des personnes prenant des temps
sion d’appartenir à un village. En participant à un de répit à proximité de sites jardinés ont indiqué
projet collectif, des liens se sont créés. » aux jardiniers qu’ils empêchaient parfois les gens
de piétiner les sites. Généralement ils les sensibi-
lisent et leurs expliquent le fonctionnement de la
démarche ».
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G 129

7.3 La nature en ville  es habitants aussi moteurs


7.3.2 D
et la biodiversité sur la thématique

7.3.1 Les objectifs de biodiversité Certains habitants ont aussi des attentes en matière
dans la démarche de biodiversité. Cela se retrouve notamment dans
leur mode de gestion des sites.
La démarche de déminéralisation et de végétalisa- Parmi les attentes d’habitants et les modes de
tion de l’espace public par les habitants s’inscrit gestion que nous avons pu recueillir :
pleinement dans les initiatives de la ville de - « Mettre des fleurs pour attirer insectes et oiseaux. »
Strasbourg en faveur de la biodiversité. Elle permet - « Favoriser au maximum la biodiversité, en privilé-
d’augmenter la part de nature en ville en s’appuyant giant les plantes indigènes persistantes et florifères
sur la plantation d’espèces locales gérées écologi- ne demandant pas d’arrosage. »
quement. Elle participe aussi à modifier la représen- - «On laisse beaucoup faire la nature. Parfois au
tation de l’herbe en ville, bien trop souvent syno- printemps, on aimerait avoir un peu plus d’aide,
nyme de saleté et de manque d’entretien, et prépare mais notre but n’est pas d’avoir une rue ripolinée,
le regard des habitants au retour de la nature dans c’est bien qu’elle garde son aspect un peu sauvage. »
la ville. -« Nous considérons qu’aucune plante n’est une
Le choix des sites à végétaliser vise également à mauvaise herbe : s’il n’y a rien sur le site, on la
améliorer la biodiversité. Parmi les critères, la ville laisse pousser. »
regarde particulièrement la continuité des sites avec
les autres espaces de nature (parcs, jardins, aligne-
ments d’arbres, etc.). La présence de trois strates de
végétation est également recherchée dans les
projets de la ville.

“ Témoignage d’une jardinière


citoyenne, membre de
l’association d’habitants Ahbak
« Lorsqu’on enrichit l’espace avec des variétés
“ Témoignage d’une jardinière
citoyenne, membre du collectif
Envie de quartier
« Notre collectif était déçu par la façon dont
nouvelles, les gens y sont sensibles. cette placette était végétalisée ; une moitié était
Des cardères, qui ressemblent à des chardons, plantée d’arbustes divers, et l’autre moitié d’ar-
ont été plantés sur le site de la place d’Austerlitz. bustes et de hautes graminées toutes identiques.
Il y a eu une nuée de petits oiseaux, des Nous étions d’avis que du point de vue de la
moineaux, des mésanges, qui sont venus. Les biodiversité, c’était très pauvre, et en plus assez
usagers de la place ont apprécié. L’année dernière, inesthétique. Nous en avons fait part à notre
du bouillon blanc a poussé spontanément et les interlocuteur de la ville lors de notre bilan
gens de la place ont trouvé ça beau. C’était inté- annuel, et comme la ville était satisfaite de notre
ressant de leur expliquer. » jardinage aux pieds des arbres, il a été décidé que
nous serions chargés du jardinage dans la moitié
de la placette qui ne nous plaisait pas.
Quand nous avons pu remplacer une partie des
graminées, nous avions trois objectifs :
1) faire de l’ombre (la place est torride à la belle
saison),
2) mettre des plantes à fruits,
3) mettre des fleurs pouvant attirer insectes et
oiseaux. »
130 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G

7.3.3 La démarche Zéro pesticide

Dans le cadre de la démarche Zéro pesticide, le


Service des Espaces verts et de nature a proscrit
toute utilisation de pesticides sur ses espaces. En
cohérence avec ce principe, l’utilisation des produits
phytosanitaires et des engrais chimiques est stricte-
ment interdite dans la démarche de gestion des
espaces publics par les habitants. Il y a lieu de
recourir à des méthodes douces qui respectent les
équilibres écologiques, en favorisant, par exemple,
l’existence des prédateurs de parasites et l’utilisation
de produits biologiques. La ville de Strasbourg
(Service des Espaces verts et de nature) peut apporter
tous les conseils nécessaires. Elle fournit aussi aux
jardiniers amateurs des panneaux permettant Panneau de sensibilisation à la démarche Zéro pesticide
d’identifier la démarche. ©Cerema

7.3.4 L a communication de la ville


en faveur de la biodiversité

Outre les conseils directs fournis aux jardiniers


amateurs dans le cadre de cette démarche, la ville et
l’Eurométropole de Strasbourg diffusent largement
différents guides et plaquettes de sensibilisation :
- plaquette Zéro pesticide,
- guide d’espèces à privilégier Plantons local,
- Petit manuel du jardinage au naturel,
- Dix actions pour plus de biodiversité - Gestionnaires
d’espaces verts.

D’une manière plus générale, de nombreuses mani-


festations en faveur du développement de la biodi-
versité sont régulièrement organisées au sein de la
ville et de l’Eurométropole de Strasbourg.
©Communauté urbaine de Strasbourg
7.3.5 L’apport des associations

Les associations signataires des conventions permet- Ces associations sont aussi souvent des acteurs de la
tant la végétalisation d’espaces publics pas les habi- sensibilisation à l’environnement : installation de
tants sont généralement fortement sensibilisées à la nichoirs, mise en place de composteurs par exemple.
biodiversité et aux questions environnementales Elles contribuent ainsi au développement de la prise
(collectif Envie de quartier, association Ahbak, etc.). en compte de la biodiversité et au changement des
Elles sont, si nécessaire, un appui de choix pour comportements en faveur de l’environnement.
les habitants désirant jardiner écologiquement.
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G 131

7.4 Principaux enseignements de s’affranchir des risques liés aux déménagements


ou à la démobilisation de certains habitants, qui
7.4.1 L a concertation pourraient mettre en péril la démarche.
(cas des projets initiés par la ville) La convention précise notamment le type de planta-
tions autorisé ainsi que les règles d’aménagement
• Une prise en compte des attentes des (accessibilité, pas d’effet de masque pour la circula-
habitants dans les projets initiés par la ville tion, etc.). Hormis ces quelques exigences à respecter,
les habitants sont très libres dans la conception
Lorsque les projets de déminéralisation-végétalisa- des sites.
tion sont proposés par la ville, la concertation avec
les habitants du quartier permet de prendre en 7.4.3 La gestion participative
compte leurs avis sur les différents projets pres-
sentis. Si la demande de biodiversité est rarement • Une démarche « gagnant-gagnant »
exprimée de manière directe, elle transparaît souvent
dans le souhait d’une ambiance plus naturelle. La démarche de déminéralisation et de végétalisa-
La participation des habitants aux réunions de tion des espaces publics augmente la part de végétal
concertation n’induit pas leur implication dans la au niveau de la ville et répond ainsi aux ambitions
gestion future du site, qui est généralement de la ville de Strasbourg et à la demande citoyenne.
proposée par la ville. L’implication des habitants dans la gestion de
certains de ces espaces constitue un avantage pour
7.4.2 L a conception des sites tous les acteurs. D’une part, les habitants peuvent
par les habitants (cas des sites assouvir leur besoin de plus de nature en jardinant.
proposés par les habitants) D’autre part, le service des Espaces verts n’est plus
chargé de gérer ces petits espaces pouvant devenir
• Une liberté de choix offerte aux habitants très chronophages.

En étant responsables de la conception des sites, les • Une priorité aux projets présentant une
habitants s’approprient directement les lieux. Ils demande de gestion par les habitants
s’investissent généralement pleinement dans ce
type de projet. La phase de conception est Lorsque la demande de végétalisation de l’espace
particulièrement riche en échanges : transfert de public vient directement des habitants, leur implica-
connaissances, moments de convivialité, etc. Elle est tion dans la gestion ultérieure du site se fait natu-
également très valorisante pour eux. rellement. Ces sites fonctionnent généralement bien.
Les habitants s’impliquant dans la gestion des petits À contrario, certains petits espaces déminéralisés et
espaces publics végétalisés sont généralement déjà végétalisés par la ville sont plus difficilement investis
sensibilisés à l’environnement. Cela se retrouve dans par les habitants, et ceci même si ces derniers ont
leurs projets de plantations et dans la gestion participé à des réunions de concertation lors de la
ultérieure des sites. conception des sites. Une priorité est donc donnée
aux projets pour lesquels une gestion par les habi-
• Une convention pour encadrer l’occupation tants est pressentie en amont.
de l’espace public par les habitants
• Une gestion en faveur de l’amélioration
La démarche de végétalisation des espaces publics du cadre de vie et du lien social
par les habitants a nécessité la mise en place d’une
convention entre les différents acteurs. Le fait de ne Les sites végétalisés dans le cadre de cette démarche
pas s’engager directement avec les habitants mais sont de petits espaces publics généralement situés
avec une association permet à la ville de Strasbourg à proximité immédiate des habitants les gérant.
132 R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G

Ils n’ont pas vocation à fournir des produits alimen- La biodiversité n’est pas le seul objectif visé dans
taires. Ces sites sont, en ce sens, complémentaires cette démarche de déminéralisation-végétalisation.
des autres espaces publics de plus grande ampleur L’accès à plus de nature génère des bienfaits pour la
proposés aux habitants : potagers urbains, jardins qualité de vie et le bien-être des citadins, particuliè-
ouvriers, etc. Les habitants participant à cette rement recherchés dans un contexte fortement
démarche considèrent généralement que l’apport de urbanisé. La présence de végétation améliore d’une
végétation et de nature dans leur quartier améliore part le cadre de vie des habitants. Elle est source
leur cadre de vie. Plusieurs d’entre eux soulignent d’agrément, de plaisirs esthétiques et d’apaisement.
que les citadins ont besoin de plus de nature à proxi- Par la déminéralisation de l’espace public, l’apport
mité de chez eux et que cette démarche y contribue. d’ombrage et l’évapotranspiration associée à la
Certains sites végétalisés sont devenus plus agréables végétation, cette démarche participe aussi à
et donc plus fréquentés : apport d’ombre améliorant l’atténuation des effets des îlots de chaleur urbains
le confort en été, présence de fleurs pouvant attirer et ainsi améliore le confort des citadins en été.
les oiseaux et les insectes, création d’une atmos- La végétation et plus particulièrement les arbres
phère naturelle particulièrement recherchée en peuvent également contribuer à l’atténuation des
milieu urbain. Les habitants mettent également en pollutions et à l’amélioration de la qualité de l’air
avant les moments de convivialité partagés lors du au niveau local. Enfin, l’implication des habitants
jardinage ou lors des apéritifs souvent organisés dans la gestion des espaces publics végétalisés
parallèlement. et l’organisation de moments de convivialité
permettent une réappropriation de l’espace public
• Attention à la démobilisation par la population et le développement des liens
sociaux dans les quartiers.
La gestion des sites repose généralement sur
quelques habitants du quartier. Toutefois, ces Parallèlement à tous ces bienfaits pour les citadins,
personnes peuvent être amenées à déménager ou la démarche de déminéralisation-végétalisation
bien à se démobiliser au cours du temps. Cela peut contribue aussi à une meilleure gestion des eaux
ainsi induire pour les jardiniers restant une augmen- pluviales (infiltration, diminution des volumes ruis-
tation significative du temps consacré pouvant selés et de leur charge en polluants, ralentissement
devenir pesante au quotidien. Les moments de des écoulements en surface, alimentation des
convivialité, les apéritifs sur les sites ainsi que le nappes souterraines).
soutien des associations sont autant de moyens
de faire connaître la démarche et de remobiliser • Sensibilisation à l’environnement
les habitants.
La démarche de végétalisation de l’espace public par
7.4.4 L a biodiversité les habitants favorise le développement des pratiques
respectueuses de l’environnement. D’une part, la
• Un objectif parmi d’autres convention oblige les jardiniers citoyens à gérer
écologiquement les sites mis à leur disposition (Zéro
La végétalisation de petits espaces publics contribue pesticide, espèces locales). D’autre part, la communi-
à augmenter la part de nature en ville. Les associa- cation autour de cette démarche, dans les médias ou
tions d’habitants sont souvent très motrices pour à travers les panneaux « Zéro pesticide », permet de
participer au développement de la biodiversité sur ces sensibiliser plus largement les habitants.
sites. Notons que la petitesse des espaces végétalisés
ne favorise pas la biodiversité. La possibilité de conti- Les associations signataires des conventions parti-
nuités écologiques avec d’autres espaces de nature cipent souvent activement à la sensibilisation des
existant au sein de la ville (parcs, jardins, alignements habitants à l’environnement. Elles contribuent à la
d’arbres) les rend d’autant plus intéressants. diffusion de pratiques de jardinage écologiques. Elles
organisent aussi parfois des observations naturalistes,
R E T O U R S D ’ E X P É R I E N C E S - 7 . V É G É T A L I S A T I O N E T G E S T I O N D ’ E S P A C E S D É S I M P E R M É A B I L I S É S À S T R A S B O U R G 133

grâce à des compétences en interne ou avec l’aide En termes de sécurité, tous les sites ne se prêtent pas
d’habitants investis sur certains sujets (oiseaux, à la sensibilisation des enfants à l’environnement.
chauves-souris, etc.). Par ailleurs, les sites végétalisés Jardiner dans la rue avec des enfants, à proximité de
dans le cadre de cette démarche peuvent s’accompa- la circulation routière, peut comporter des risques.
gner de la mise en place de composteurs permettant Ainsi, certains pieds d’arbres de la rue du
de sensibiliser les habitants à la gestion des déchets. Faubourg de Pierre ne sont plus entretenus par les
Les associations ont souvent des liens étroits avec les écoliers pour des raisons de sécurité. D’autres sites
écoles situées à proximité. plus éloignés de la circulation, sur des places par
exemple, sont par contre tout à fait appropriés pour
sensibiliser les enfants : jardinage écologique sans
pesticides, observation de la faune (insectes,
oiseaux...), compostage, etc.

À retenir :

• La désimperméabilisation et la végétalisation d’es- • La signature d’une convention permet de préciser
paces publics y compris de petite taille (pieds les règles d’aménagement mais aussi des exigences
d’arbres, trottoirs, placettes, etc.) permettent d’aug- écologiques (zéro phyto, etc.). Elle peut également
menter la présence de nature en ville et peuvent être un moyen de développer les liens sociaux en
ainsi contribuer à l’amélioration des continuités favorisant l’organisation de moments conviviaux
écologiques, tout en répondant aux attentes des (jardinage collectif, etc.).
habitants.
• L’implication citoyenne dans la gestion ultérieure
• La gestion de ces petits espaces végétalisés par le des sites a plus de chance d’aboutir lorsque les
service des Espaces verts pourrait devenir chrono- projets de végétalisation sont initiés par les
phage d’où l’intérêt partagé d’impliquer les citoyens ou lorsqu’elle est pressentie dès l’amont
citoyens, qui peuvent ainsi assouvir leur besoin de des projets issus de la collectivité. Ces projets
plus de nature en jardinant. sont alors à privilégier.

• S’engager avec une association et non pas direc-


tement avec les habitants permet d’asseoir la
démarche dans la durée, en évitant les problèmes
liés aux déménagements ou à la démobilisation de
certains habitants.
135

Glossaire

Biodiversité : ou diversité biologique. Il s’agit de la Gestion écologique : un espace vert peut être dit
diversité, naturelle ou non, des organismes vivants. géré écologiquement lorsqu’il fait l’objet d’un arro-
Elle s’apprécie en considérant la diversité des écosys- sage raisonné, d’une préservation de ses sols, d’une
tèmes, des espèces, et des gènes dans l’espace et gestion sans produits phytosanitaires, d’un recy-
dans le temps, ainsi que les interactions au sein de clage des déchets verts, d’un accroissement de la
ces niveaux d’organisation et entre eux. biodiversité, d’une réduction au maximum du bruit
et de la consommation d’énergie fossile. Des labels
Écosystème : en écologie, un écosystème est l’en- nationaux existent pour juger de cette gestion
semble formé par une association ou communauté écologique.
d’êtres vivants (ou biocénose) et son environnement
biologique, géologique, édaphique, hydrologique, Gestion horticole : une gestion horticole consiste à
climatique, etc. (le biotope). entretenir de manière intensive un espace vert par
une tonte fréquente, un désherbage intensif, une
Entretien extensif : l’entretien extensif des espaces taille soutenue...
verts consiste à entretenir ces espaces de manière
régulière mais non intensive, en réduisant la Services écosystémiques : ce sont les bénéfices
fréquence de fauche ou de tonte par exemple, ou en que les humains retirent des écosystèmes sans avoir
permettant la pousse d’espèces spontanées sans à agir pour les obtenir. Par exemple, il s’agit de
qu’elles fassent l’objet d’un désherbage. l’épuration naturelle des eaux par les zones humides,
de l’activité des insectes pollinisateurs dans les
Espèce spontanée : plante croissant naturellement, cultures, de la séquestration naturelle de carbone
sans intervention intentionnelle de l’homme. dans le bois, etc.
137

Bibliographie

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est-elle un enjeu pour les habitants ?, in Zetlaoui-Léger J., L’implication des habitants dans
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juillet 2012, mis en ligne le 12 juillet 2012 propositions pratiques, IUP, Laboratoire Créteil,
2005
Dron D., Blaudin-de-Thé C., CGDD, SEEIDD, Type
d’habitat et bien-être des ménages, Collection
Etudes et documents, n° 63, janvier 2012
139

Table des matières

Introduction 5

Avant-propos 7

1. De quoi parle-t-on 8
La nature en ville 8
L’implication citoyenne et la nature en ville 10

2. Le choix des terrains d’étude 12

PREMIÈRE PARTIE

Impliquer les citoyens autour du sujet de la nature en ville  : premiers enseignements 14

1. La sensibilisation à la biodiversité 16
1.1 Sensibilisation : de l’information à l’appel à l’action 16
1.2 Quels objectifs peut-on donner à la sensibilisation à la biodiversité ? 17
1.3 L’espace public végétalisé, lieu privilégié de sensibilisation à la biodiversité 17
1.4 Des enseignements méthodologiques 18
Les sujets abordés 18
Gouvernance 18
Les outils 19
Une démarche qui prend du sens à tout moment de la vie de la cité 22

2. L’implication des citoyens dans l’intégration de la nature au sein d’un projet d’aménagement de l’espace public 23
2.1 La concertation : ni une consultation, ni une codécision 23
2.2 Quels objectifs peut-on donner à la concertation ? 24
2.3 Des enseignements méthodologiques 25
Les acteurs de la démarche 25
Les outils 26
Une communication préalable 28
Prendre le temps de faire participer... tout au long de l’élaboration du projet 29
Concilier l’avis des citoyens, les contraintes techniques et financières, et les décisions politiques 30

3.La participation des citoyens au chantier et à la gestion d’un espace public végétalisé 31
3.1 Le chantier participatif et la gestion collective 33
3.2 Quels objectifs peut-on donner au chantier participatif ou à la gestion collaborative ? 33
3.3 Des enseignements méthodologiques 34
Une démarche différente de la collectivité selon les acteurs initiateurs de l’action 34
Rassembler les citoyens autour d’un sens et d’objectifs partagés 36
Le « recrutement » des citoyens pour les actions collectives 36
Une communication nécessaire pour associer un maximum de citoyens à la démarche 37
La formalisation des engagements des citoyens auprès de la collectivité (gestion participative uniquement) 38
Des écueils potentiels à éviter 38
La question de la responsabilité des collectivités 39

4. Éléments de conclusion et perspectives 40


140

DEUXIÈME PARTIE

Retours d’expériences 42
1.Parc Blandan à Lyon
Aménagement d’un grand parc urbain (17 ha) sur le site d’une ancienne caserne 44

2. J ardins collectifs à Saint-Ouen


Environ 5 000 m2 de jardins familiaux, jardins partagés, serre pédagogique et ruches 58

3. P arc du Vallon à Lyon


Réaménagement d’un grand parc existant de 11 ha 72

4. J ardin Demain à Montpellier


Création et gestion d’un jardin de 1 200 m2 sur un ancien parking imperméabilisé 86

5. Aménagements pour la biodiversité à Champvert à Lyon


Développement d’un réseau d’espaces verts de 4 ha 100

6. J ardin Vaclav Havel à Villeurbanne


Création d’un parc d’environ 2 900 m2 en milieu dense sur un ancien jardin arboré 110

7. Végétalisation et gestion d’espaces désimperméabilisés à Strasbourg


De petites surfaces mobilisées : pieds d’arbres, placettes, trottoirs, etc. 122

Glossaire 135

Bibliographie 137

Table des matières 139


142

Citizen involvement and urban nature


Initial lessons from seven case studies in France

This publication includes experience feedback from seven French cities (Lyon (3), Villeurbanne, Montpellier,
Strasbourg and Saint-Ouen) illustrating the benefits of involving citizens in projects to integrate nature within
towns, and puts forward lessons to be learnt from these initiatives.

Analysis of these lessons shows a wide variety of ways of involving citizens. The initiatives may be top-down when
it is the community that requests them, or bottom-up when it is the citizens who go into action to promote nature
projects in the public space. They may be optional or compulsory under the Urban Planning Code, be upstream or
downstream of a decision, etc. In all cases, they involve a flow of information between the contracting authority,
partners and the public.

Based on the assumption that citizen involvement in public nature spaces contributes to a better coexistence
of townspeople and nature, the lessons provided by this publication are intended to help contracting authorities
and developers to facilitate the conditions of appropriation and understanding of improvement work in favour
of urban nature.
143

Implicación ciudadana y naturaleza en la ciudad


Primeras enseñanzas fruto de los siete estudios de caso en Francia

Esta obra agrupa siete retornos de experiencias franceses (Lyon (3), Villeurbanne, Montpellier, Estrasburgo y
Saint-Ouen) que ilustran el interés de implicar a los ciudadanos en los proyectos de integración de la naturaleza
en la ciudad y propone algunas enseñanzas fruto de estas gestiones.

Su análisis muestra una gran diversidad de medios para implicar a los ciudadanos. En efecto, las gestiones pueden
ser descendentes cuando es la colectividad quien las solicita o ascendentes cuando son ellas las que se movilizan
para promover proyectos de naturaleza en el espacio público. Pueden ser facultativas u obligatorias respecto al
Código del urbanismo, situarse en fase previa o posterior de una decisión, etc. En todos los casos, estas prácticas
implican una circulación de la información entre el promotor, los socios y el público.

Basándose en la hipótesis de que la implantación ciudadana en los espacios públicos de naturaleza contribuye a una
mejor cohabitación de los ciudadanos y de la naturaleza, las enseñanzas propuestas dentro del marco de esta obra
tiene por vocación ayudar a los directores de obra y a los planificadores a facilitar las condiciones de apropiación
y de comprensión de los ordenamientos a favor de la naturaleza en la ciudad.
© 2016 - Cerema
Le Cerema, l’expertise publique pour le développement durable des territoires.
Le Cerema est un établissement public, créé en 2014, sous la tutelle conjointe du
ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer et du ministère du Logement
et de l’Habitat Durable. Il a pour mission d’apporter un appui scientifique et technique
renforcé dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques
de l’aménagement et du développement durables. Centre d’études et d’expertise, il a
pour vocation de diffuser des connaissances et savoirs scientifiques et techniques ainsi
que des solutions innovantes au cœur des projets territoriaux pour améliorer le cadre
de vie des citoyens. Alliant à la fois expertise et transversalité, il met à disposition des
méthodologies, outils et retours d’expérience auprès de tous les acteurs des territoires :
collectivités territoriales, organismes de l’État et partenaires scientifiques, associations
et particuliers, bureaux d’études et entreprises.
Toute reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement du Cerema est illicite
(loi du 11 mars 1957). Cette reproduction par quelque procédé que ce soit, constituerait
une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal.

Cet ouvrage a été imprimé sur du papier issu de forêts gérées durablement (norme
PEFC) et fabriqué proprement (norme ECF).
L’imprimerie Jouve est une installation classée pour la protection de l’environnement
et respecte les directives européennes en vigueur relatives à l’utilisation d’encres
végétales, le recyclage des rognures de papier, le traitement des déchets dangereux par
des filières agréées et la réduction des émissions de COV.

Impression : Jouve 01 44 76 54 40

Coordination : service éditions Cerema/Territoires et ville (P. Marchand)


Maquettage : www.laurentmathieu.fr
Réalisation du visuel de couverture : www.laurentmathieu.fr
Achevé d’imprimer : mai 2016
Dépôt légal : mai 2016
ISSN : 2417-9701
ISBN : 978-2-37180-114-1

Éditions du Cerema
Cité des mobilités
25, avenue François Mitterrand
CS 92803
69674 Bron Cedex

Bureau de vente - Cerema / Direction technique Territoires et ville


2, rue Antoine Charial
CS 33927
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La collection « Connaissances » du Cerema
Cette collection présente l’état des connaissances à un moment donné et délivre de l’information sur un sujet,
sans pour autant prétendre à l’exhaustivité. Elle offre une mise à jour des savoirs et pratiques professionnelles
incluant de nouvelles approches techniques ou méthodologiques. Elle s’adresse à des professionnels souhaitant
Implication citoyenne et nature en ville
maintenir et approfondir leurs connaissances sur des domaines techniques en évolution constante. Les éléments
présentés peuvent être considérés comme des préconisations, sans avoir le statut de références validées.
Premiers enseignements issus
de sept études de cas en France
Implication citoyenne et nature en ville
Premiers enseignements issus de sept études de cas en France
Cet ouvrage regroupe sept retours d’expériences françaises (Lyon (3), Villeurbanne, Montpellier, Strasbourg,
Saint-Ouen) illustrant l’intérêt d’impliquer les citoyens dans les projets d’intégration de la nature en ville, et
propose quelques enseignements issus de ces démarches.
Leur analyse montre une grande diversité de moyens pour impliquer les citoyens. En effet, les démarches

Implication citoyenne et nature en ville Premiers enseignements issus de sept études de cas en France
peuvent être descendantes lorsque c’est la collectivité qui les sollicite, ou ascendantes lorsque ce sont eux
qui se mobilisent pour promouvoir des projets de nature sur l’espace public. Elles peuvent être facultatives
ou bien obligatoires au regard du Code de l’urbanisme, se situer en amont ou en aval d’une décision, etc.
Dans tous les cas, ces pratiques impliquent une circulation de l’information entre le maître d’ouvrage,
les partenaires et le public.
En se basant sur l’hypothèse que l’implication citoyenne sur les espaces publics de nature contribue à une
meilleure cohabitation des citadins et de la nature, les enseignements proposés dans le cadre de cet ouvrage
ont pour vocation d’aider les maîtres d’ouvrage et aménageurs à faciliter les conditions d’appropriation et
de compréhension des aménagements en faveur de la nature en ville.

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* En téléchargement gratuit sur catalogue.territoires-ville.cerema.fr

Aménagement et développement des territoires, égalité des territoires - Villes et stratégies urbaines - Transition énergétique et
changement climatique - Gestion des ressources naturelles et respect de l’environnement - Prévention des risques - Bien-être et réduction
des nuisances - Mobilité et transport - Gestion, optimisation, modernisation et conception des infrastructures - Habitat et bâtiment

ISSN : 2417-9701
ISBN : 978-2-37180-114-1
Prix : 45 Euros

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