Terre D'émeraude: Daniel Meurois & Anne Givaudan
Terre D'émeraude: Daniel Meurois & Anne Givaudan
Terre D'émeraude: Daniel Meurois & Anne Givaudan
&
Anne Givaudan
Terre d’Émeraude
Témoignages d’outre-corps
ÉDITIONS S.O.I.S.
SOMMAIRE
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témoignage. Qui dit témoignage, dit évidemment expé-
rience vécue ; et c’est bien de cela dont il s’agit ici, au sens
plein des termes. Pour pouvoir parler de la mort et de ce qui
existe au-delà de ses portes, il faut, nous semble-t-il, avoir
vécu cette mort en question.
Pourrions-nous avec honnêteté parler d’une contrée éloi-
gnée sans l’avoir même visitée ? Ce serait se perdre en sup-
positions et en affirmations indignes de foi.
Avons-nous donc été victimes d’un terrible accident ?
Avons-nous été plongés dans un profond coma ? Avons-
nous enfin été malencontreusement amenés jusqu’au seuil
ultime de la vie pour pouvoir parler d’un hypothétique au-
delà ? Rien de tout cela, et c’est ici sans doute que réside un
des points capitaux de notre témoignage.
Spiritisme, alors ! penserez-vous !
Non plus !
Et pourtant, il s’agit d’une technique, d’un procédé vieux
comme le monde et enseigné régulièrement à quelques pri-
vilégiés, quelques initiés, dirons-nous.
Allons-nous, ici, trahir les secrets de quelque secte mys-
térieuse, bizarre et malsaine ? Rien de tout cela non plus ! Il
n’y a d’ailleurs pas de secret, et encore moins de secte.
Il n’y a, répétons-le, qu’une technique parfaitement natu-
relle, et nous insisterons tout spécialement sur ce mot :
naturelle. Aucune drogue, quelle qu’elle soit, n’a jamais été
absorbée par les auteurs.
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Nous croyons cette précision importante car le récit
constitué par les chapitres qui suivent est parfois d’une
nature telle que certains lecteurs pourraient être amenés à
émettre des opinions erronées.
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auraient parlé de téléphone et d’ondes radio au siècle der-
nier auraient été pris pour de doux fantaisistes ou des illu-
minés.
Bien des choses autrefois reléguées du côté de la
science-fiction sont aujourd’hui courantes.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, c’est à la
raison vraie que nous désirons nous adresser au travers de
cet ouvrage, à celle qui accepte — au nom de la curiosité
constructive, de l’absence de préjugés et de la volonté de
progresser — la remise en cause d’un grand nombre de
conceptions.
Nous ne désirons pas convaincre mais, nous l’avons dit,
simplement témoigner, offrir une sorte de reportage totale-
ment authentique sur un phénomène capable de proposer
une autre vision du monde et de la vie. En effet, au-delà du
problème de la mort, ce sera celui de la Vie et de quelques-
uns de ses mystères qui dominera.
Nous citions précédemment Platon qui parlait d’âme. Ce
terme nous a gênés en fonction des connotations religieu-
ses qu’il apporte avec lui. En entreprenant ce travail, nous
avons désiré nous extraire de tout parti pris religieux ou
athée. Si, par conséquent, quelques termes de ce type sont
relevés, ce sera en raison de leur côté pratique.
Le sujet que nous allons traiter a déjà été, nous le savons,
abordé plus ou moins précisément par certains ésotéristes.
Nous ne désirons cependant pas ajouter notre travail au
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leur, espérant nous adresser non pas à une minorité d’êtres
sensibilisés à des faits particuliers, mais à un maximum
d’hommes et de femmes qui ne sont pas ligotés par la
somme de ce qui est officiellement proclamé et quantifié.
Tout y est dit tel quel, sans souci d’embellir les faits ou
de les romancer.
Comme toute chose vécue, pourtant, ce livre ne saurait
avoir la sécheresse d’un exposé… le cœur saura donc y
parler.
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CHAPITRE I
Première aube
Il est des jours et des nuits qui comptent plus que mille
autres.
Il est des secondes qui vivent et s’étirent plus que des
heures entières.
Presque dix ans, déjà…
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Comme tous les soirs vers vingt-deux heures, je m’étais
mis au lit. Une faible lumière éclairait encore la petite pièce
où j’avais élu domicile pour une année. Des pensées désor-
données et sans grande importance occupaient mon atten-
tion tandis qu’une légère torpeur commençait à m’envahir.
C’est alors que, soudain, tout a basculé. Je me suis senti
projeté hors de moi-même, plaqué contre le plafond de ma
chambre ! Un froid intense m’avait aussitôt saisi, un froid
qui venait du dedans.
Simultanément, j’eus la sensation de me redresser, de me
retourner, je ne sais plus au juste, et je me suis vu… Je me
suis vu, réellement vu, du dehors, en chair et en os comme
on voit quiconque n’est pas soi-même, un ami, un étranger.
Mes yeux étaient là, au plafond, vers le haut de la petite
armoire où je rangeais mes livres ; ils étaient là et contem-
plaient mon corps qui gisait deux mètres plus bas, inerte,
comme une enveloppe vide.
Mes yeux et ma conscience ! Car, pas de doute, c’était
bien moi aussi qui pensais et me contemplais. J’étais
« deux », simplement et extraordinairement « deux ».
Était-ce cela, la mort ?
En cette fraîche soirée d’avril, venais-je tristement et
banalement de franchir la Grande Porte ? Un moment, je
crus que tout n’était qu’un rêve ; mais non… mon esprit
était trop clair, trop lucide. Pendant quelques instants, je
n’ai pu détacher mon regard de cet autre moi abandonné
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nonchalamment et pas trop esthétiquement sous les cou-
vertures.
Une curieuse impression est venue troubler l’attention
que je portais à l’étranger que je me sentais être à moi-
même : je m'aperçus que je ne demeurais pas à une place
fixe. Je, mes yeux, ou ma conscience, ou tout à la fois peut-
être, voguaient de droite à gauche comme un être miséra-
blement ivre, ne sachant à quoi s’agripper. L’espace d’une
seconde, je crus que j’allais me heurter contre l’arête de
l’armoire.
Je mis ma main en avant, là, près de mon front pour
amortir le choc. Ma main ! J’avais une main !
Et j’ai vu ma main s’enfoncer dans le bois, et j’ai senti
mes yeux pénétrer dans l’armoire pour venir caresser des
livres épars et des cahiers empilés. Une vague de calme
profond est alors tombée sur moi comme si une paume
apaisante venait se poser sur le sommet de mon crâne.
J’ai glissé le long des rayonnages et de nouveau, je fus
devant cet autre moi inerte.
C’est à ce moment que je pris pleinement conscience que
dans l’état où je me trouvais, j’avais un corps…
J’étais un corps flottant de-ci de-là, un corps nu, un corps
étrangement blanc, étrangement lumineux, bouillonnant
d’une vie mystérieuse.
Puis, brutalement, ce fut tout. Je ressentis une petite dou-
leur au niveau de l’estomac; il y eut comme un éclair intérieur
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et je me retrouvai emprisonné sous les couvertures, dans ce
corps que j’avais trouvé gauche l’instant d’avant. Tout était
fini.
Alors, la nuit entière j’ai cherché. J’ai cherché à com-
prendre pourquoi et comment ; mais cette nuit-là ne délivra
plus aucun secret.
Les semaines qui suivirent cette expérience, bien invo-
lontaire, restèrent également muettes. Rien ne semblait
vouloir provoquer à nouveau le phénomène que je ne m’ex-
pliquais pas.
J’en vins à me dire que si la réponse ne parvenait pas à
jaillir de mes réflexions, il se pouvait qu’elle dorme quel-
que part entre les pages d’un livre.
Parcourir les librairies, les bibliothèques, feuilleter les
ouvrages, voilà donc quelle serait la ligne de conduite à sui-
vre si je voulais sortir de l’impasse. Des mois s’écoulèrent
ainsi. En vain. Découragé, je décidai finalement d’aban-
donner ma quête.
Il est, paraît-il, des langues où la notion de hasard
n’existe pas. Aujourd’hui plus que jamais, je comprends le
pourquoi de ce fait et je me remémore cette pensée de
Satprem :
« Le hasard, ça veut dire qu’on ne connaît pas la loi des
choses. »
Le hasard, donc, fit bien les choses, en me mettant en
présence d’un ouvrage consacré à un phénomène étrange et
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pourtant bien réel appelé sortie astrale. Cet ouvrage,
comme j’eus l’occasion de m’en rendre compte par la suite,
était loin d’être le seul à traiter du sujet. Ainsi, d’autres
êtres avaient vécu une expérience identique à la mienne !
Je retrouvais sous la plume de l’auteur les sensations qui,
quelques mois auparavant, avaient été miennes. Les moda-
lités mêmes de l’expérience y étaient enseignées. Dire que
tout était résolu serait faux, mais, dès cet instant, j’ai su que
j’avais une clé et peut-être la clé. Non, mon expérience
n’était pas unique ! L’auteur, dont je « dévorais » le récit,
affirmait qu’elle était pratiquée par d’autres personnes en
divers points du globe.
Il enseignait, à proprement parler, une technique avec
tout ce que cela sous-entend, c’est-à-dire une méthode pro-
cédant par différents stades de progression. Apparemment,
rien ne me manquait qui puisse m’empêcher de provoquer
à nouveau cette espèce de dédoublement étrange qui
m’avait tant troublé. Troublé est en fait peu dire car au fil
des mois, toute ma pensée, toute mon énergie avaient été
canalisées vers ce seul but.
Rien, effectivement, ne me manquait si ce n’est deux
qualités que je n’allais pas tarder à découvrir en l’espace de
quelques semaines : la patience et la volonté ; l’une étant
étroitement dépendante de l’autre. Je dis deux qualités mais
je m’aperçois aujourd’hui avec le recul donné par le temps,
que cela est schématique. En fait, en dehors de la méthode
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à suivre, une seule et unique pensée était indispensable :
avoir la conviction absolue que ce qui était tenté était par-
faitement réalisable et serait, quoi qu’il arrive, réalisé. Ce
type de conviction très profonde est une sorte d’autosug-
gestion ; tout ce qui s’entreprend selon ce procédé s’accom-
plit inévitablement.
Vouloir, c’est pouvoir, entend-on couramment. En effet,
rien n’est plus vrai.
Avant d’aller plus loin, j’aimerais préciser encore une
chose : il est inutile de tenter une sortie astrale simplement
pour voir, je veux dire pour voir si cela est bel et bien réel.
Se diriger honnêtement vers ce type d’expérience signifie
qu’il est hors de question de cultiver un esprit de collection-
neur de sensations. Aborder une sortie astrale ne saurait
être un passe-temps ou un jeu quelconque. Cela nécessite
calme, lucidité, sincérité.
Tout cela donnera certainement au lecteur l’impression
de n’être que paroles; cependant ces paroles, nous en sommes
certains, acquerront leur valeur tout au long de cet ouvrage.
Je me mis donc au travail avec une joie profonde et silen-
cieuse, convaincu de ma victoire finale. Personne ne devait
être au courant de ma quête ; je me trouvais d’ailleurs dans
l’incapacité totale d’expliquer le but de ma recherche, son
sens et les conséquences qui en découleraient.
C’est par un banal après-midi d’octobre, dans une vaste
et froide chambre fermée à double tour, que l’incroyable se
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reproduisit. Au plus profond de mon être, cela prit le visage
d’une explosion. D’une explosion ! Quel pauvre mot ! D’un
Himalaya de Lumière et de splendeurs, devrais-je dire.
Plus que la première fois, je vis et compris ce qui venait
de se produire. Oui, j’étais un corps flasque abandonné sur
un lit. Oui, sans doute avais-je l’air un peu stupide, ainsi.
Mais oui, cent fois oui aussi, j’étais un corps lumineux,
capable de flotter ça et là ou de voler, je ne savais trop, et
de contempler une autre facette du monde.
Je ressentis une profonde agitation intérieure et me vis
ballotté de haut en bas, de droite à gauche, comme un être
ivre et sans volonté.
Vous pouvez vous stabiliser, il vous suffira de le désirer
et de vous y entraîner.
Les conseils de l’auteur du fameux traité me revenaient
en mémoire. Je l’avoue, ce jour-là je ne fis que peu de pro-
grès en ce qui concerne la stabilité. Ce n’est qu’à l’usage,
si l’expression m’est permise, que je parvins à me perfec-
tionner en ce domaine.
Les semaines se succédèrent et me virent répéter un cer-
tain nombre de fois le dédoublement astral. Au fur et à
mesure que je me familiarisais avec la technique, je me ren-
dais compte de l’étendue des possibilités qu’elle offrait.
Lors de mes premières recherches, je n’avais fait que pres-
sentir confusément tout ce que ma découverte pouvait
m’apporter. Maintenant, les choses se précisaient. Me
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