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A - Droits Humains Et Libertés Publiques - Cours 1, 2 Et 3

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Université Hassan premier- Settat

Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales

Cours : droits humains et libertés publiques


Droit en français, S4
Année 2019-2020

Professeur: Abdellatif BENBOUNOU

1
Bibliographie
Aron, Raymond, Essai sur les libertés, Paris, Calman Levy, 1965
Bailleux Nathalie, Droits de l’homme et non violence, Paris, Nathan, 1994
Najib Ba Mohamed, Les libertés publiques, Gaëtan morin éditeur
Maghreb, 1996
Turpin Dominique, Libertés publiques et droits fondamentaux, éd Seuil,
Paris, 2004
Ardant (P), Les textes sur les droits de l’homme, PUF, Que sais-je ? N 2538.
Delmas Marty (M.) et Lucas De Leyssac (C.), Libertés et droits
fondamentaux, éd du Seuil, « Points » 2002.
Roland (P.) et Tavernier (P.), La protection internationale des droits de
l’homme, Textes, PUF, Que sais-je, N 2461, 2éme éd., 1994.
Oberdorff Henri, Droits de l’homme et libertés fondamentales, Lextenso
éditions, Paris 2010.

2
Introduction générale
Définition du concept de liberté.
La liberté signifie absence de contrainte. Un être libre est
un être dégagé de toute contrainte, de toute domination.
C'est un être qui ne subit aucune action contraignante,
qui ne fait l'objet d'aucun asservissement. Etre libre c'est
pouvoir agir, ou ne pas agir, à sa guise. C'est pouvoir
exister, se maintenir ou se mouvoir sans subir aucune
pression, sans rencontrer aucun obstacle contraignant,
déterminant, dans un sens ou dans un autre, sous la seule
réserve du respect de la liberté des autres. Car la liberté
de chacun finit là où commence celle d'autrui. Mais la
liberté c'est aussi le droit de prendre part à la conduite
de la cité.

3
De fait, les libertés doivent se respecter
mutuellement. La frontière - difficile à
préciser et à maintenir - entre les libertés
des uns et des autres, ne constitue un
obstacle pour l'exercice d'aucune liberté
bien comprise. Le respect mutuel n'est une
contrainte pour « personne. La
participation de chacun aux affaires de
l'État sert l'intérêt de tous.

4
Néanmoins, des contraintes réelles existent et étouffent les libertés.
Ce peut être des contraintes d'ordre physique ou des contraintes
d'ordre psychologique.
- Les contraintes physiques : elles résultent soit d'une situation
économique ou sociale défavorable ; soit d'une présence militaire ou
policière.
- Les contraintes psychologiques : c'est le cas d'une pression émanant
d'une autorité supérieure ; c'est le cas aussi de la menace dont la mise
en œuvre entrainerait la perte d'une situation avantageuse qu'il
s'agisse de la "liberté - autonomie" ou de la "liberté-participation",
retenue de la démocratie antique, les libertés publiques ne sont
vécues que lorsque le groupe social peut agir et s'épanouir sans
contrainte, sans oppression, et que l'harmonie établie entre ses
membres, sous l'égide d'un pouvoir politique bienveillant, empêche
les uns de réduire et de détruire la sphère d'autonomie des autres. Ce
pouvoir doit être dégagé de la volonté générale. Il importe donc
d'exposer la théorie générale des libertés publiques, avant d'examiner
leurs modes d'application.

5
Les libertés publiques, du fait même de leur caractère public,
appellent, par conséquent, l'intervention des pouvoirs publics et
relèvent du droit positif.
Leurs régimes juridiques varient avec les systèmes politiques qui les
établissent et les protègent.
Cependant, il convient de retenir, au préalable, que les libertés
publiques reflètent, avant tout, les idéologies dont s'inspirent ou
prétendent s'inspirer les systèmes sociaux et les régimes politiques
concernés.
Il y a, par voie de conséquence, autant de conceptions de libertés
publiques que de systèmes sociaux.
La notion de libertés publiques à travers la pensée libérale a été la
plus amplement développée et depuis longtemps. C'est une
conception très riche et bien élaborée.
Les libertés publiques au sens libéral (occidental) du terme ont vu
le jour avec les déclarations révolutionnaires françaises parues
entre 1789 et 1794.

6
Les générations des droits humains
L’expression "générations" de droits souvent
utilisée par la doctrine, tend à déterminer une
progression linéaire des droits. Ceux de
la"1°génération" étant définitivement acquis,
apparaissent les droits de la "2°" puis de la "3°"
génération. Certains parlent parfois de la "4"
génération, ce qui relève d’une vision quelque peu
optimiste. Les droits considérés comme essentiels,
c'est à dire civils et politiques, étant complétés par
des droits économiques et sociaux, puis les droits
à un environnement sain au développement et à
la paix.
7
Droits civils et politiques 1ère génération Droits économiques et Droit de "solidarité" 3ème
sociaux 2ème génération génération

• Libertés • Droit à l'instruction • Droit à un


• égalité • Droit d'asile environnement sain
• sûreté individuelles • Droit au travail • Droit à la paix
• propriété • Égalité entre l'Homme et
la Femme
• Droit à la grève
• Droit de déterminer les
conditions de travail
• Protection de la famille et
de la santé

8
A-Les droits civils et politiques
L'affirmation la plus claire des Droits de la "1° génération" résulte de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Ils sont aussi
essentiels dans la Déclaration universelle des droits de l'homme
adoptée en 1948. On rappellera simplement que les droits affirmés
sont généraux, abstraits, universels et individuels en ce sens que la
personne est la seule destinataire de la proclamation. Liberté, égalité,
sûreté individuelle, propriété, sont des droits fondamentaux attachés à
la personne qui les détient par sa nature même et qui s'imposent aux
pouvoirs.
La résistance à l'oppression sanctionne la violation éventuelle de ces
prérogatives individuelles. La Déclaration évoque seulement quelques
concrétisations des principes affirmés, ainsi des libertés d'opinion et de
manifestation de la pensée, l'égalité devant l'impôt, devant les emplois
publics...Cette catégorie de droits qui suppose l'octroi de libertés de
faire aux individus hors de toute atteinte de la puissance publique est
également présente dans la Déclaration universelle des droits de
l'homme.

9
Sont notamment proclamés les droits attachés à la personne
humaine : droit à la vie, liberté, sûreté, inviolabilité du domicile et de
la correspondance, liberté d'aller et de venir. Il en est de même des
libertés publiques et politiques : de conscience, d'opinion,
d'expression, de réunion et d'association... Ces textes évoquent
donc, et de manière prioritaire dans la plus pure tradition libérale,
des droits susceptibles d'être rattachés à deux aspects fondamentaux
des droits de l'Homme, les libertés relatives aux conditions physiques
d'existence et celles relatives aux conditions intellectuelles
d'existence. Les premières apparaissent d'évidence comme condition
d'existence des secondes. En cela, les droits affirmés sont
incontestablement issus des principes du droit naturel.
Ces droits proclamés sont en parfaite conformité avec l'idée de plus
en plus présente, d’État de droit. On considère généralement que
l’État de droit se fonde sur deux critères principaux : l'encadrement
par les mêmes règles juridiques de tous les citoyens ; le recours au
juge pour faire sanctionner les atteintes aux droits et libertés. Il s'agit
de marquer une frontière que la puissance publique ne peut franchir.
Ces prérogatives, incontestables, ne sauraient remettre en cause
celles des individus.

10
Les droits sont des libertés de faire et non des créances. L’État
de droit est celui dans lequel un système de sanctions
appropriées permet de faire en sorte que la puissance
publique ne franchisse pas les bornes qui lui sont fixées. L'État
ne doit pas pénétrer dans la sphère d'action laissée aux
particuliers. Il ne doit pas remettre en cause les droits
naturels.

Relevant de la même logique, le Pacte international relatif aux


droits civils et politiques adopté en 1966 dans le cadre de
l'O.N.U., fournit un support juridique à ces droits, de même
que la Convention européenne des droits de l'homme.

11
En caricaturant quelque peu une réalité complexe, on
pourrait affirmer que ces droits sont reconnus contre l'État.
Liés à la nature même de l'homme ils sont absolus sous
réserve des limites prévues par la loi. Liberté et égalité sont
uniquement conçues dans une perspective juridique,
ignorant largement les conditions dans lesquelles les
individus peuvent les exercer. On comprend dès lors les
principes qui doivent régir les systèmes de protection des
libertés. Les sanctions juridiques prévues par la loi, mises en
œuvre par le juge sont suffisantes à assurer l'effectivité des
libertés en punissant les atteintes de la puissance publique
aux prérogatives protégées de la personne.

12
B- Les droits économiques et sociaux
Leur reconnaissance, qui confère une dimension
radicalement différente à la notion même de
liberté publique, résulte d'une lente évolution.
Ainsi la déclaration de 1793 évoquait-elle
l'organisation de l'assistance, le droit à
l'instruction. Le préambule de la constitution de
1848 semble renforcer l'idée de libertés plus
concrètes et surtout de la nécessaire intervention
de l'État pour l'épanouissement de la liberté, par
l'amorce de la reconnaissance d'un droit au travail.

13
Plusieurs éléments expliquent cette évolution. Les
périodes de guerre ou de crise ont ainsi conduit à un
accroissement des interventions publiques. Celui-ci n'a
pas seulement concerné le domaine économique. Se
développe l'idée d'une nécessaire intervention de l'État
au service des libertés. Comme le souligne G. Burdeau
(Le libéralisme, Seuil, 1979), le passage de l'État arbitre
à l'État protecteur a aussi été un moyen de remédier
aux excès d'un libéralisme pur et dur. Au nom de la
liberté, les plus forts ne doivent pas écraser les plus
faibles. Le caractère formel des droits civils et politiques
est dénoncé non seulement par le courant marxiste,
mais aussi par la pensée sociale chrétienne conduisant à
une remise en cause des principes de 1789.

14
On passe ainsi d'un État au rôle modeste à
un État présent sur tous les fronts, politique,
économique, social. Ce passage d'un État
«modeste » à un État « interventionniste »
place forcément l’État au centre de toutes les
attentes. Il doit agir pour permettre l'exercice
des droits et libertés.

15
Pour pouvoir s'exercer, les droits de l'Homme doivent
en effet alors être précisés concrètement. L'État ne
doit pas seulement s'abstenir, il doit intervenir au
profit des libertés. Il contient pourtant des éléments
forts originaux résultant des principes politiques
économiques et sociaux particulièrement nécessaires
à notre temps. Il affirme ainsi le droit d'asile, le droit
au travail, l'égalité de l'homme et de la femme, le
droit de grève, le droit de déterminer les conditions
de travail, la protection de la famille et de la santé,
l'égal accès à l'instruction.

16
Ces droits sont qualifiés de « droits-créances », parce
qu'ils impliquent non plus une abstention de l’État, mais
une action positive de sa part, au service des libertés. Les
citoyens auraient en quelque sorte une créance sur l’État
pour la réalisation concrète de certains droits et libertés,
comme, par exemple, en matière de protection sociale, en
matière de droit au travail ou en matière d'égalité
homme/femme. Ces droits économiques et sociaux sont
aussi inclus dans les textes internationaux : déclaration
universelle, Pacte international, Charte sociale
européenne...

17
C- Les "droits de la 3°génération"
Les droits de la troisième génération sont la conséquence
de certaines évolutions techniques et de l'existence de
nouvelles possibilités d'atteinte aux droits et libertés dues
à ces évolutions.
Certains droits dits de «solidarité» relèveraient d'une
conception plus communautaire des bénéficiaires des
droits, tel le droit à un environnement sain ou le droit à la
paix. La protection de la qualité de l'air, de la qualité de
l'eau par un État ou des États - qui devraient s'entendre
pour lutter contre le réchauffement de la planète -, cela
était inenvisageable il y a quelques décennies.

18
Outre les problèmes particulièrement délicats
qu'ils soulèvent notamment quant à leurs
titulaires, il suffira de souligner ici que ces
droits collectifs relèvent davantage d'une
vision prospective de la société internationale ;
en tout cas, dût-on le regretter ils ne font pas
l'objet, pour la plupart d'entre eux d'une réelle
protection juridique au niveau de la société
internationale, mais, au mieux, d'une tentative
de protection par une minorité d’États.

19
Les sources philosophiques et juridiques de ces types des droits humains et des
libertés publiques sont diverses. Il convient d'en exposer l'essentiel.
Chapitre I. Les sources philosophiques de la conception libérale des libertés.
Ces sources philosophiques se divisent en trois catégories, avec différents degrés
d'influence. Il s'agit :
de la pensée chrétienne
du droit naturel
de la philosophie des lumières.
Section 1.La pensée chrétienne
Il est admis, que l'influence de la pensée chrétienne sur la Révolution française
de 1789 est tout à fait indirecte et fort limitée
En effet, l'Etre suprême" préconisé par Robespierre constitue un rejet manifeste
du christianisme en tant que religion et non seulement en tant qu'Eglise.
En fait, la pensée chrétienne doit elle située dans le contexte de l'Antiquité.

20
L'époque antique a connu une certaine forme de liberté que
l'on peut qualifier de "liberté - participation". En effet dans la
démocratie grecque, le citoyen participait à l'élaboration de la
loi et au choix des représentants, étant entendu que pour être
citoyen il fallait remplir deux conditions : avoir une fortune
suffisante et ne pas exercer un métier manuel. Mais même ce
citoyen ainsi conçu ne disposait pas de l'autre forme de liberté
qui est la "liberté - autonomie". C'est dire que le citoyen dans
la démocratie Grecque n'avait aucune autonomie réelle. Seule
sa "liberté - participation" était effective et ne pouvait être
limitée que par la loi :
A Rome, l'homme n'était guère asservi par la loi, mais il ne
bénéficiait d'aucune liberté personnelle, d'aucun privilège.
C'est dans ce contexte que le christianisme enrichit la théorie
de la liberté en y apportant deux idées.
- Le christianisme insiste sur la valeur de la personne humaine.

21
Il s'agit d'affirmer le principe suivant : l'être
humain n'est pas un être quelconque. C'est, au
contraire, une créature privilège, distinguée et
favorisée par le Créateur. En effet, Dieu conféré
à l'être humain quelque chose dont se trouvent
démunies les autres créatures. Ce privilège dont
dispose l'homme comme un don divin c'est la
dignité. Cette dignité n'appartient qu'à l'être
humain, mais à tous les êtres humains.
En effet, la dignité humaine étant une
caractéristique naturelle, elle appartient, par
nature, à tous les hommes quelle que soit leur
situation sociale, quelque soit leur statut
juridique. La dignité est un privilège divin qui ne
tolère aucune discrimination. Elle est absolue et
inaliénable.
22
Le christianisme pose des limites au pouvoir
politique. Il opère une distinction entre deux
domaines : l'un pouvant être régi par l'Etat et
l'autre devant être préservé par l'homme. Ainsi,
l'Etat ne doit, selon cette conception, régir qu'un
domaine délimité, réservé; conçu comme relevant
de la vie publique. Quant à la vie privée, elle lui
échappe. Ainsi, l'homme garde une sphère
d'autonomie qu'il a le droit de défendre par tous
les moyens contre les empiètements du pouvoir
politique. Par voie de conséquence, l'homme est
autorisé à opposer une ferme résistance à la
domination démesurée de l'Etat.

23
Section 2. Le droit naturel
Les théoriciens du droit naturel estiment que la société politique
a été précédée par une autre société qualifiée de naturelle. Celle-
ci aurait été inorganisée, sans aucune sorte de discipline et,
partant sans aucune forme de contrainte. Autrement dit, c'était
une société caractérisée par la liberté. Les hommes y vivaient
librement. Ils y jouissaient même d'une liberté pleine et entière.
Le passage de la société naturelle à la société politique s'est
effectué par le biais d'un pacte social.
D'où le concept de "contrat social" constamment utilisé par les
théoriciens du droit naturel. Par ce contrat social les hommes ont
voulu avoir une société organisée. Mais, l'organisation implique
l'ordre et la discipline. Or le maintien de l'ordre et de la
discipline relève d'une autorité supérieure qui exige l'acceptation
de ses instructions par tous.

24
En d'autres termes la société organisée implique
la soumission a un pouvoir car le droit de jouir
de l'ordre signifie en même temps le devoir de
s’y soumettre.
Mais, en signant le contrat social, les hommes
ont-ils pris conscience des effets éventuels de
leurs engagements et les ont- ils acceptés
d'avance en connaissance de cause? Autrement
dit, les signataires du contrat social. ont-ils
consenti à renoncer à leur liberté? C'est ici que
les théoriciens du droit naturel se séparent. Il
s'agit de deux thèses fondamentales : celle de T.
Hobbes et celle de J. Locke.
25
1-La thèse de Thomas Hobbes : Elle est développée
dans son célèbre ouvrage «Léviathan" paru en 1651.
Selon Hobbes, "l'homme est un loup pour l'homme",
d'où la nécessité d'un pouvoir supérieur. L'Etat de
nature, sans autorité, sans discipline, était aussi une
société, certes libre, mais anarchique. La liberté était
absolue comme l'était l'égalité. D'où l'impossibilité
d'assurer une quelconque concorde sociale. C'était 'la
guerre de chacun contre chacun", écrit Hobbes. Ainsi,
selon cet auteur, la société naturelle était marquée
par la guerre et l'insécurité.

26
Un pouvoir absolu est apparu comme une nécessité
vitale. Sans lui, la sécurité restait impossible. Par
conséquent, pour mettre un terme à l'anarchie et au
désordre et créer une atmosphère de sécurité, les
hommes ont conclu un contrat social aux termes
duquel ils ont renoncé à tous les droits, à toutes les
libertés pour préserver un seul droit, le droit à la vie
qui ne peut exister sans sécurité. Or celle-ci nécessite
un pouvoir absolu, seul capable d'empêcher les
hommes de s'entretuer.

27
2- La thèse de John-Locke : Elle est développé dans
son important ouvrage intitulé "Essai sur le
gouvernement civil", paru en 1689.
Selon Locke, la société naturelle se caractérise par la
liberté et la paix.
C'est un état de parfaite liberté", écrit cet auteur qui
estime que la paix et donc la sécurité n'en étaient
pas moins effectives. Les hommes ne souffraient pas
de cette liberté car elle était limitée par la loi
naturelle.
Or celle-ci ne soumet personne à personne et ne fait
peser aucune menace sur qui que ce soit. Par
conséquent, l'égalité était également assurée dans
la société naturelle au même titre que la liberté et la
tranquillité. Mais alors pourquoi ce contrat social?
28
Selon Locke, l'Homme n'est jamais satisfait. Au
bien, il préfère le mieux. C'est pour cela qu'il
décida de remplacer la société naturelle, libre,
égalitaire, paisible, par la société politique
pensant et espérant qu'il y serait encore dans
de meilleures conditions.
Par conséquent, il ne renonça, aux termes du
contrat social, qu'aux seuls droits dont le
maintien serait contraire à la vie en
communauté il conserva les libertés qui font
l'objet des déclarations officielles des droits de
l'homme.

29
Section 3. La "philosophie des lumières".
Cette philosophie a exercé sur la Révolution française de 1789, une influence
certaine et directe. Il s'agit essentiellement de l'adhésion de certains grands
hommes de la Révolution dont Robespierre et ses amis, à la pensée de deux
auteurs importants qui sont Rousseau et Montesquieu.
1- La thèse de Jean Jacques Rousseau : Elle est développée dans son
célèbre ouvrage, intitulé "Du contrat social", publié en 1762.
"L'homme est né libre, et partout il est dans l’enfer", écrit Rousseau qui a
eu une énorme influence sur la Révolution de 1789, il prend appui sur les
postulats fondamentaux du droit naturel mais les dépasse. Contrairement à
Locke, Rousseau estime que par le contrat social, les hommes ont renoncé,
à titre individuel, à tous leurs droits, au profit de la communauté qui est le
seul souverain. Il écrit : "les clauses du contrat social, bien entendu se
réduisent toutes à une seule : l’aliénation totale de chaque associé avec tous
ses droits à toute la communauté. Apparemment, il se rapproche de
Hobbes, partisan du pouvoir absolu. Toutefois, en vérité, Rousseau estime
que l'abandon de la liberté se fait au profit non d'un Homme ou d'une
minorité, mais entre les mains de la communauté.

30
La liberté qui caractérise l'état de nature est
transférée intégralement et sans partage à la
communauté souveraine dans la société politique.
Dès lors, l'Homme passant de la société naturelle à la
société politique, retrouve dans la seconde l'entière
liberté dont il jouissait dans la première. Certes, elle
est aux mains de la communauté qui incarne le
pouvoir, mais ce pouvoir est conçu comme
insusceptible de devenir oppressif car incarnant la
volonté générale. Il ne peut par nature, porter
atteinte à la liberté des composantes de la volonté
générale. A celle - ci les hommes égaux ont remis tous
leurs droits. Ce sont ces droits mêmes qui constituent
l'assise du Pouvoir. Certes, par réalisme, Rousseau
n'assimile pas la volonté générale à l'unanimité. Il se
contente de la majorité, ce qui est le plus courant
dans la pratique politique.

31
La volonté générale n'est que la volonté de la
majorité. D'où le problème de la minorité. Celle-ci
ne risque- t- elle pas de sacrifier purement et
simplement sa liberté? Rousseau ne le pense pas.
Dès lors que tous ont délégué par le contrat social
leurs droits à la volonté générale, la minorité n'a
qu'à se rendre compte qu'en s'opposant à la
majorité en pratique, elle s'oppose en principe à
la volonté générale, c'est à dire qu'elle se trompe
dans un cas pratique déterminé. Elle n'a alors qu'à
corriger sa position erronée dans la conjoncture
considérée, en se conformant à la majorité pour
rester en parfaite concordance eu égard à sa
position de principe c'est à dire l'obéissance à la
volonté générale.
32
Il est vrai que Rousseau s'appuie sur l'idée que le nouveau régime
ainsi conçu produira un homme nouveau qui n'hésitera pas à
privilégier l'intérêt général et à obéir constamment à ce qui est
qualifié de volonté générale. C'est que, dans ces conditions, l'homme
est conscient d'une chose : le souverain c'est à dire la communauté
ne peut avoir d’intérêts contraires à ceux des particuliers. La
communauté ne peut agir contre l'Intérêt de ses membres, c'est à
dire les éléments dont elle se compose. La volonté générale ne peut
être que juste. Il devient donc incohérent et inacceptable que la
minorité doute de la majorité et s'oppose à elle, si ce n'est pas erreur
qu'il est impératif de rectifier. D'où cette affirmation de Rousseau.
"Par le fait même que je me situe dans la minorité, je montre, que je
n'ai pas une conscience claire de ce que veut la volonté générale et
que, par conséquent, je me suis trompé".
Malgré cela on estime que Rousseau qui a tenté de concilier pouvoir
social et liberté a largement influencé les révolutionnaires de 1789.
Cette influence a parfois été compensée on atténuée par celle
exercée par Montesquieu.

33
2- La pensée de Montesquieu : Elle est
développée dans son brillant ouvrage intitulé "De
l'Esprit des Lois", publié en 1748.
L'objectif de Montesquieu c'est la protection de la
liberté. Pour cette raison l'auteur manifeste une
méfiance remarquable à l'égard du pouvoir, Jugé
dangereux pour la liberté. Avant d'envisager les
moyens de contrôler le pouvoir en vue de protéger
la liberté, l'auteur définit celle-ci.
a- Définition de la liberté
Selon Montesquieu ; "la liberté ne peut consister
qu'à pouvoir faire ce que l'on doit vouloir, et n'être
point contraint de faire ce que l'on ne doit pas
vouloir".

34
Or la liberté, estime l'auteur, ne peut exister dans un
Etat, fut-ce une Démocratie, que lorsque cet Etat
n'abuse pas du pouvoir. L'auteur affirma : "C'est une
expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir
est porté à en abuser, il va jusqu'à ce qu'il trouve des
limites".
Mais alors, peut- on compter sur les seules qualités des
gouvernants pour éviter l'abus du pouvoir ?
Telle n'est pas la conception de Montesquieu qui se
méfie de la bonté naturelle de la spontanéité de
l’homme, ce bon sauvage qu'affectionne J.J. Rousseau
Montesquieu tient par dessus tout à la liberté qu’il
envisage nécessaire de protéger de l'abus du pouvoir et
notamment du pouvoir.

35
b- La protection de la liberté
Sans la liberté l'existence est insupportable. Et la liberté ne peut
exister et se maintenir qu'en étant protégée. Il convient, pour ce
faire, d'empêcher l'abus du pouvoir. Comment? "Pour qu’on ne
puisse abuser du pouvoir, estime Montesquieu, il faut que par la
disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir". C’est par
conséquent, un problème qui dépasse la simple affirmation de la
liberté pour envisager une organisation institutionnelle et
structurelle adéquate. La réside la réalité de la liberté. 'Une
constitution peut être telle que personne ne sera contraint de
faire les choses auxquelles la loi ne l’oblige pas et à ne point faire
celles que la loi lui permet.

36
Dans le chapitre VI de son Ouvrage, Montesquieu soutient
que dans chaque Etat on peut déceler « trois sortes de
pouvoirs la puissance législative, la puissance exécutrice des
choses qui dépendent du droit des gens, et la puissance
exécutrice de celles qui dépendent du droit civil ».
Ces Pouvoirs ne doivent pas être concentrés entre les
mains d'un 'seul homme ou au niveau d'un seul organe. Il
serait dangereux pour la liberté que l'homme qui élabore les
lois soit autorisé à en assurer l'interprétation, l'application
et l'exécution. Le législateur, le juge et l'exécutant ne
doivent pas se réunir en une seule personne ou une seule
institution sous peine de mettre en péril la liberté des
citoyens. D'où la nécessité de procéder à la séparation des
pouvoirs en trois organes : le pouvoir exécutif, le pouvoir
législatif et le pouvoir judiciaire, chacun étant incarné par
une (ou plusieurs) institution différente.

37
La collaboration et le contrôle mutuel qui caractérisent
ces pouvoirs sont la garantie de l'existence et du maintien
de la liberté. La notion clé de cet ensemble c'est la loi c'est
autour de la loi que pivote ce triangle et c'est la loi qui
protégé la liberté. C'est dire que Montesquieu croit en cet
équilibre ainsi établi et accorde sa confiance au pouvoir
législatif, émanation de la nation; qui donc ne peut voter
une loi dangereuse pour la liberté ; bien au contraire, c'est
à l'ombre de la loi que la liberté devra s’épanouir.
C'est ainsi que Montesquieu estime avoir trouvé le moyen
de garantir la liberté telle qu'il l'a lui même conçue et
définie. Après cet exposé sur les sources philosophiques de
la conception libérale des libertés, il convient d'en présenter
les sources juridiques. Ce sera l'objet du chapitre deuxième

38

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