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L'intrigue Et Les Actions Schéma Narratif COURS

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L’intrigue et les actions1 

La fiction est constituée de nombreuses actions effectuées par des personnages dans
un univers spatio-temporel déterminé. Et elle est véritablement (re)construite par le
lecteur à la fin de sa lecture.

A partir de ce constat, Vladimir Propp, dans Morphologie du conte2, a émis


l’hypothèse que ces actions pouvaient se réduire à un ensemble limité, commun à
toutes les histoires. Sur un corpus de contes merveilleux russes, il a isolé trente et une
fonctions qui constitueraient ce socle commun. Jugeant ce modèle difficilement
transférable à d’autres récits que le conte merveilleux, et les fonctions trop
nombreuses (certaines pouvant être regroupées en sous ensemble), des chercheurs,
dont Greimas et P. Larivaille, ont tenté de rendre compte d’un modèle plus simple.
Selon eux, tout récit serait fondé sur une super-structure ou schéma canonique du récit,
schéma quinaire3, plus simplement désigné par schéma narratif, composé de cinq
grandes étapes.

Le schéma narratif

*Un récit raconte une histoire, une suite d’actions ou d’événements qui se déroulent
selon un certain ordre logique ou chronologique.

*Il peut être défini comme un processus de transformation qui conduit d’une
situation initiale à une situation finale.

Le récit se définirait comme transformation d’un état en un autre état. Cette


transformation est constituée d’un élément qui enclenche le procès de
transformation, de la dynamique qui l’effectue (ou non) et d’un autre élément qui
clôt le procès de transformation4.

1
- Sources :
- LARIVAILLE P., L'analyse morpho-logique du récit, in Poétique n°19, 1974.
- REUTER Y., Introduction à l’analyse du roman, Dunod, 1996.
- JOUVE V., La poétique du roman, SEDES, 1997.
2
- PROPP V. Morphologie du conte, (1928), Seuil, Paris, 1965.
3
- REUTER Y., op.cit. p. 61.
4
- REUTER Y., ibid. p. 61.

1
Les récits se construisent généralement autour de cinq étapes fondamentales :

1- La situation initiale marque le début d’une histoire. Elle présente les éléments
nécessaires à la mise en route du récit et à la compréhension de celui-ci : la
présentation des personnages ou du personnage principal, la description de
leurs caractéristiques physiques et morales, à la détermination du cadre
spatio-temporel dans lequel se déroule l’action. Dans un récit au passé, les
verbes y sont souvent à l'imparfait. Le narrateur se contente de dresser l’état
initial. La situation des héros n’y évolue pas, elle reste stable. Elle correspond
en général à l’incipit du récit.

Exemple :
« C’était une de ces jolies et charmantes filles, nées, comme par une erreur du destin,
dans une famille d’employés. Elle n’avait pas de dot, pas d’espérances, aucun moyen
d’être connue, comprise, aimée, épousée par un homme riche et distingué ; et elle se
laissa marier avec un petit commis du ministère de l’Instruction publique ». (Guy de
Maupassant, « La Parure », 1884)

2- L'élément déclencheur ou élément perturbateur, est la situation qui engendre


les péripéties. Il rompt l'équilibre de l’histoire. Dans cette étape, le récit
introduit un événement ou fait intervenir un personnage qui vient perturber la
situation d’équilibre présentée dans la situation initiale. L’élément
perturbateur engendre souvent la mission du héros : En effet, c’est dans cette
étape que se déclenche la quête chez le personnage principal qui cherchera à
retrouver une situation d’équilibre ou à améliorer son état initial insatisfaisant.
Ainsi, il est déterminant pour la suite du récit : c’est par rapport à lui que se
définissent les actions ou les péripéties vécues par les personnages.

Exemple :

2
« Elle n’avait pas de toilettes, pas de bijoux, rien. Et elle n’aimait que cela ; elle se
sentait faite pour cela. Elle eût tant désiré plaire, être enviée, être séduisante et
recherchée. Elle avait une amie riche, une camarade de couvent qu’elle ne voulait
plus aller voir, tant elle souffrait en revenant. Et elle pleurait pendant des jours
entiers, de chagrin, de regret, de désespoir et de détresse. Or, un soir, son mari
rentra, l’air glorieux et tenant à la main une large enveloppe.
— Tiens, dit-il, voici quelque chose pour toi.
Elle déchira vivement le papier et en tira une carte qui portait ces mots : « Le ministre
de l’Instruction publique et Mme Georges Ramponneau prient M. et Mme Loisel de
leur faire l’honneur de venir passer la soirée à l’hôtel du ministère, le lundi 18
janvier. »
(Guy de Maupassant, « La Parure », 1884)

3- Les péripéties, les aventures (les actions) : ce sont les événements provoqués
par l’élément perturbateur et qui entraînent la ou les actions entreprises par
les héros pour atteindre leur but. C’est la partie la plus longue du récit
pendant laquelle les personnages vivent un certain nombre d’épreuves et
d’aventures qui leur permettent de poursuivre leur quête : les actions
décrivent les tentatives ou les moyens choisis par les personnages pour
parvenir à ce but final.

Exemple
— Cela m’ennuie de n’avoir pas un bijou, pas une pierre, rien à mettre sur moi.
J’aurai l’air misère comme tout. J’aimerais presque mieux ne pas aller à cette
soirée.
Il reprit :
— Tu mettras des fleurs naturelles. C’est très chic en cette saison-ci. Pour dix
francs tu auras deux ou trois roses magnifiques.
Elle n’était point convaincue.
— Non... il n’y a rien de plus humiliant que d’avoir l’air pauvre au milieu de
femmes riches.
Mais son mari s’écria :
— Que tu es bête ! Va trouver ton amie Mme Forestier et demande-lui de te prêter
des bijoux. Tu es bien assez liée avec elle pour faire cela.
Elle poussa un cri de joie.
— C’est vrai. Je n’y avais point pensé.
Le lendemain, elle se rendit chez son amie et lui conta sa détresse. Mme Forestier
alla vers son armoire à glace, prit un large coffret, l’apporta, l’ouvrit, et dit à Mme
Loisel :

3
— Choisis, ma chère.
Guy de Maupassant, « La Parure », 1884

Exemple :

Après la soirée Mme Loisel rentre chez elle avec son époux.
Elle ôta les vêtements dont elle s’était enveloppée les épaules, devant la glace, afin de
se voir encore une fois dans sa gloire. Mais soudain elle poussa un cri. Elle n’avait
plus sa rivière autour du cou !
Son mari, à moitié dévêtu déjà, demanda :
— Qu’est-ce que tu as ?
Elle se tourna vers lui, affolée :
— J’ai... j’ai... je n’ai plus la rivière de Mme Forestier.
Guy de Maupassant, « La Parure », 1884

4- Le dénouement ou élément de résolution : L’élément de résolution permet de


retrouver un équilibre. Le personnage principal réussit ou bien échoue dans sa
mission. Ce dernier n’est pas le même que dans la situation initiale. Il s’agit de
l’étape qui permet de constater si le héros a été capable d’atteindre ou non
l’objet de la quête : c’est l’étape de la résolution du problème. Elle met un
terme aux actions et conduit à la situation finale.

Exemple

Mme Loisel rachète une parure de diamants identique et la rend à son amie sans rien lui dire.
Elle met des années à rembourser cet achat.
Or, un dimanche, comme elle était allée faire un tour aux Champs-Élysées pour se
délasser des besognes de la semaine, elle aperçut tout à coup une femme qui
promenait un enfant. C’était Mme Forestier, toujours jeune, toujours belle, toujours
séduisante.
Mme Loisel se sentit émue. Allait-elle lui parler ? Oui, certes. Et maintenant qu’elle
avait payé, elle lui dirait tout.
Guy de Maupassant, « La Parure », 1884

5- La situation finale : Dans la situation finale, l’équilibre est retrouvé. Cette


dernière étape du récit indique quel est le sort des personnages, éventuellement

4
quel sera leur avenir. On parle aussi de l’étape de la résolution du problème. En
effet, c’est le moment où le personnage principal réussit ou bien échoue dans sa
mission. Il s’agit de l’étape qui permet de constater si le héros a été capable
d’améliorer sa situation initiale, d’atteindre ou non l’objet de la quête.

Exemple
— Tu te rappelles bien cette rivière de diamants que tu m’as prêtée pour aller à la
fête du ministère.
— Oui. Eh bien ?
— Eh bien, je l’ai perdue.
— Comment ! puisque tu me l’as rapportée.
— Je t’en ai rapporté une autre toute pareille. Et voilà dix ans que nous la payons.
Tu comprends que ça n’était pas aisé pour nous, qui n’avions rien... Enfin c’est
fini, et je suis rudement contente.
Mme Forestier s’était arrêtée.
— Tu dis que tu as acheté une rivière de diamants pour remplacer la mienne ?
— Oui. Tu ne t’en étais pas aperçue, hein ! Elles étaient bien pareilles. Et elle
souriait d’une joie orgueilleuse et naïve.
Mme Forestier, fort émue, lui prit les deux mains.
— Oh ! ma pauvre Mathilde ! Mais la mienne était fausse. Elle valait au plus cinq
cents francs !...
Guy de Maupassant, « La Parure », 1884

Application :
- « La Parure », 1884.
- Prosper Mérimée La Vénus d’Ille, 1837.
- Bel Ami de Maupassant, 1885.

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