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Roland Clée

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Roland Clée
Roland Clée
Roland Clée en tenue de capitaine des Forces françaises de l'intérieur, en août 1944

Naissance
Les Andelys
Décès (à 68 ans)
Montpon-Ménestérol
Unité Armée secrète, Forces françaises de l'intérieur
Grade Commandant
Commandement Corps Franc Roland, 2e bataillon du 50e régiment d’infanterie
Conflits Seconde Guerre mondiale
Faits d'armes Libération de la Dordogne, Libération de l'île d'Oléron
Distinctions Chevalier de la Légion d'honneur, Croix de guerre 1939-1945, Médaille de la Résistance avec rosette

Roland Clée, né le 2 novembre 1920 aux Andelys (Eure) et mort le 22 avril 1989 à Montpon-Ménestérol (Dordogne), est un militaire français, résistant à l'occupation allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Il s'est notamment distingué dans le maquis en Dordogne sous le nom de « Roland », puis lors des combats pour la libération de l’île d’Oléron.

Enfant de troupe

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En 1933, à peine âgé de 13 ans, Roland Clée devient « enfant de troupe » et suit son enseignement primaire supérieur à l’école militaire préparatoire des Andelys (Eure). En 1938, il rejoint le Prytanée militaire de la Flèche (Sarthe), replié en 1940 en zone libre à Valence (Drôme), où il présente le concours d’entrée à Saint-Cyr.

En novembre 1941, après avoir réussi le concours d’entrée, Roland Clée arrive à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) où est repliée l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr. Parmi les instructeurs, le capitaine Jean Craplet, les lieutenants René Gentgen et Théodose Morel, tous de futures figures de la Résistance, sont déterminés à préparer les élèves-officiers à la revanche. Ils les incitent quoi qu’il arrive à ne pas arrêter le combat.

Le 1er août 1942, sa promotion est baptisée du nom de « Charles de Foucauld ». Le 27 novembre 1942, durant l’invasion de la zone Sud, les Allemands investissent la caserne Miollis d’Aix-en-Provence. Les saint-cyriens baptisent à la hâte la promotion suivante qui prend pour nom « Croix de Provence » et quittent définitivement l’école le 5 décembre en défilant, sabre à la main[1].

Premières armes dans la Résistance

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Toujours militaire mais placé en position de non-activité, Roland Clée devient étudiant en droit à Paris. Dans les faits, il recueille du renseignement sur l’occupant à Paris et en Normandie pour le compte de l’Organisation de résistance de l’armée.

En juillet 1943, ses activités ayant éveillé l’attention des Allemands, il décide de s’éloigner de Paris et demande officiellement à rejoindre les Chantiers de jeunesse. Affecté au groupement 38 à Nontron (Dordogne), il « déserte » aussitôt et rejoint l’Armée secrète par l’intermédiaire de Charles Serre (alias Yvette) et Raymond Boucharel (alias Rebecca), deux notables de la région. Le commandement d’un groupe d’une quarantaine d’hommes, réfractaires au service du travail obligatoire, lui est confié dans la région de Dournazac (Haute-Vienne). Il se place ensuite sous les ordres de Mojzesz Goldman (alias Mireille), premier chef de maquis en Dordogne au titre de l’Armée secrète, et le rejoint au lieu-dit « Durestal » situé à proximité des communes de Sainte-Alvère et de Cendrieux [2].

Roland Clée est un des rares militaires d’active du groupe Mireille et même si son expérience se limite à Saint-Cyr, il met immédiatement en œuvre ce qu’il a appris en école. Il commence à enchaîner les coups de main à la tête d’une petite équipe. Les débuts sont modestes car les maquisards manquent de tout. Les opérations se limitent dans un premier temps à de la récupération d’armement, de véhicules, de vêtements et de cartes d’alimentation[3].

Pourchassé par les groupes mobiles de réserve vichystes, et alors que les effectifs augmentent, le groupe Mireille est obligé de se disperser dans plusieurs zones du centre de la Dordogne : Vergt, Jaure, Issac, Ribérac. Un groupe plus important s’installe au Maine-du-Puy (commune de Saint-Vincent de Connezac). Les coups durs vont cependant s’enchaîner : Mireille est capturé le 30 octobre 1943 à Périgueux alors qu’il a un rendez-vous avec un officier géorgien de l’Ost Bataillon 799, désireux de prendre le maquis avec une partie de ses hommes[4]. Le 3 novembre 1943, le camp du Maine-du-Puy est assiégé par les groupes mobiles de réserve : 2 maquisards sont tués et 37 autres sont capturés puis seront déportés. Roland Clée échappe à la capture et cet épisode marque pour lui un changement fondamental. Il ne fait désormais plus de distinction entre les Allemands et les Français de Vichy : « Quiconque portera les armes contre nous sera, s’il est Français, considéré comme un traître », déclare-t-il à ses hommes[5].

Le groupe Mireille décimé, Roland Clée fonde son propre groupe et au sein de celui-ci le Corps Franc Roland, une dizaine de maquisards triés sur le volet et déjà aguerris. Un service de renseignement se met au service du groupe. Animé par Charles Mangold (alias Vernois), résistant périgourdin qui vient de prendre le maquis pour échapper à la capture et par Jean Constantin (alias Jean Bart), ce service planifie également les opérations du corps franc[6], qui devient un outil de combat d’une redoutable efficacité.

Le Corps Franc Roland

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A partir de janvier 1944 et pendant près de 6 mois vont se succéder opérations de ravitaillement, embuscades, sabotages et éliminations de collaborateurs notoires de la région. Un temps d’arrêt est cependant marqué fin mars-début avril car la division Brehmer de la Wehrmacht se lance dans une violente campagne de répression[7]. Plusieurs dizaines de personnes sont exécutées sommairement, des villages sont incendiés. Les maquisards se dispersent pour ne pas provoquer davantage de dégâts. Une fois leur forfait accompli, les Allemands quittent le Périgord et poursuivent leur périple meurtrier en Limousin. Le Corps Franc Roland peut alors reprendre ses activités. Au 6 juin 1944, 80 missions ont déjà été effectuées sans aucune perte dans les rangs du corps franc. Pour autant, les opérations alliées en Normandie ne mettent pas un terme aux combats en Périgord et les sabotages se multiplient pour perturber les lignes de communication allemandes.

Le Corps Franc Roland, début 1944 : Jacques (Périn), Roland (Clée), Michel (Lestang), Marius (Tobias), Jeannot (Lestang), Coco (Sabater), Christian (Dormeaux). Manquent Chtimi (Chatelain), Julot (Barzin), Hubert (Andrieux) .

La Libération de la Dordogne

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Les renforts affluent et le groupe Roland devient désormais le bataillon Roland, fort d’environ 300 hommes. Le bataillon est subordonné à l’état-major des Forces françaises de l’intérieur créé quelques semaines plus tôt et commandé par le lieutenant-colonel André Gaucher (alias Martial).

Le 22 juin 1944, le camp de base du bataillon, situé au château de La Feuillade (commune de Coursac), est attaqué par les Allemands. Le retrait, malgré des pertes humaines et matérielles conséquentes, se fait en bon ordre mais le bataillon est contraint de se disperser pour être moins vulnérable.

Le 14 juillet 1944, un largage massif de matériel est organisé par les Alliés dans la région du Moustoulat (commune de Monceaux-sur-Dordogne) en Corrèze (opération Cadillac). Plusieurs groupes sont mobilisés, dont le bataillon Roland, qui rapporte 18 tonnes d'armement et de munitions en Dordogne[8].

Le 26 juillet 1944, Roland et ses hommes participent au plus grand braquage du XXe siècle. Un train réquisitionné par la Banque de France et emportant plus de 2 milliards de francs est attaqué en gare de Neuvic, sans qu’aucune perte ne soit à déplorer. Un bon de réquisition est tout de même remis aux représentants de la Banque de France présents dans le train. L’argent est ensuite convoyé jusqu’à la commune de Vergt, proclamée capitale du maquis, puis dispersé afin de financer les opérations de différents groupes de résistants[9].

Le 12 août 1944, alors qu’il vient juste d’être nommé capitaine, Roland et trois de ses camarades forcent en véhicule un barrage allemand dans la région de Coursac. Roland, blessé par balle à une jambe, et l’un des maquisards parviennent à s’exfiltrer, tandis que les deux autres passagers, Gérard Talaucher et Jean Ponceau sont faits prisonniers. Talaucher est fusillé le jour même à Périgueux, en compagnie de Charles Mangold (alias Vernois), capturé la semaine précédente. Ponceau est fusillé le 14 août[10].

Roland Clée, entouré de Gilbert Boissière et Roger Rougier. Ces deux derniers, déguisés en ecclésiastiques, viennent de dérober 3000 litres de benzol au nez et à la barbe des Allemands. La photo sera vendue à Périgueux à la Libération et les bénéfices seront reversés aux familles de Talaucher et Ponceau[11].

Roland blessé, c’est le lieutenant Raoul Christophe (alias Krikri), son adjoint, qui prend temporairement le commandement. Le 20 août, le bataillon participe aux combats pour la libération de Saint-Astier[12] avant de défiler victorieusement le 22 dans la ville de Périgueux, libérée 3 jours plus tôt. Au cours de ces deux mois de combats, le bataillon a perdu 24 hommes.

Le front de l’Atlantique

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Après quelques jours de réorganisation, le bataillon Roland devenu 11e bataillon des Forces françaises de l'intérieur, entreprend sa marche vers l’Ouest, en direction des poches de l’Atlantique encore tenues par les Allemands. Le 9 septembre 1944, la ville de Marennes (Charente-Maritime) est atteinte et Roland Clée, rétabli, reprend le commandement du bataillon. Il arbore ses nouveaux galons de commandant.

Le 12 septembre 1944, les Allemands du fort du Chapus sont obligés après un dur combat de se replier sur l’île d’Oléron. L’encerclement de Royan est désormais complet. Le bataillon y maintient ses positions et renforcé du groupe Roger et du groupe Vézère, il devient le 1er décembre 1944 le 2e bataillon du 50e régiment d’infanterie[13]. Roland Clée est alors placé sous les ordres du lieutenant-colonel Rodolphe Cézard (alias Rac), commandant le régiment et du général Henri Adeline, commandant les forces françaises du Sud-Ouest. Le siège de Royan se poursuit pendant de longs mois, prélude aux combats du 14 au 17 avril qui conduisent à la libération de la ville[14].

Enfin, le 30 avril 1945, l’opération Jupiter visant à libérer l’île d’Oléron est lancée[15]. Le bataillon Roland débarque dans la première vague d’assaut. L’adjudant Gaston Houpert et le soldat Sylvain Cassou sont parmi les premiers à tomber au combat. Le 1er mai 1945, un 3e soldat du bataillon, Marcel Normandin, est fauché à son tour. Dans l’après-midi, la garnison allemande se rend. L’ensemble du territoire français est désormais libéré.

Après-guerre

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A la fin de la guerre, Roland Clée est tenu d’abandonner ses galons gagnés au feu et redevient lieutenant. Affecté en Allemagne comme officier traitant à l’état-major de la subdivision de la Sarre, il démissionne de l’Armée en 1947 et s’installe à Montpon-sur-l’Isle où il ouvre un commerce avec sa jeune épouse. Il reste cependant impliqué dans la réserve militaire opérationnelle, au sein de laquelle il retrouve ses galons de commandant en 1958. Il s’éteint le 22 avril 1989 des suites d’une maladie.

Stèle inaugurée le 8 mai 2024 à Montpon-Ménestérol, en mémoire du commandant Roland Clée et des soldats de son bataillon.

Décorations

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Bibliographie

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  • Album de la promotion Charles de Foucauld - Collectif - Éditions C.L.D
  • Historique des unités combattantes de la Résistance (1940-1944) / Dordogne - Général de la Barre de Nanteuil - État-major de l’armée de Terre / Service historique
  • La Libération du Sud-Ouest - Général Adeline
  • Résistants du Périgord - Jean-Jacques Gillot et Michel Maureau - Éditions Sud-Ouest
  • Histoire de la Résistance en Périgord - Guy Penaud - Éditions Sud-Ouest
  • 1944 en Dordogne - Jacques Lagrange - Éditions Pilote 24 Périgueux
  • La Résistance en Dordogne - ANACR Dordogne
  • Résistances - Pierre Cadroas - Éditions Les Presses de la Double
  • Le Périgord dans la Seconde Guerre mondiale - Patrice Rolli - Éditions L’Histoire en partage
  • La Dordogne dans la Seconde Guerre mondiale - Anne-Marie Cocula et Bernard Lachaise - Éditions Fanlac
  • Mojzesz Goldman dit « Mireille » - Sylvain Le Bail - Éditions Le Chêne Vert
  • Charles Mangold - Richard Seiler - Éditions L’Harmattan
  • Histoire d’un groupe franc du maquis de Dordogne - Jean Bart - Éditions Pierre Fanlac
  • Maquisard à 17 ans - André Goineaud-Bérard - Éditions La Lauze

Notes et références

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  1. Album de la promotion Charles de Foucauld, pages 111 à 113
  2. Service historique de la défense : dossier individuel du bureau Résistance (GR16P 132 789) et dossier d’homologation du groupe Roland (GR19P 32/6)
  3. Mémoires de Résistances - un site du département de la Dordogne, « S'organiser : naissance du groupe AS Roland »
  4. Sylvain Le Bail, Mojzesz Goldman dit « Mireille », Éditions Le Chêne Vert, pages 231 à 235
  5. Patrice Rolli, Le Périgord dans la Seconde Guerre mondiale, Éditions L'Histoire en partage, page 188
  6. Général de la Barre de Nanteuil, Historique des unités combattantes de la Résistance (1940-1944) / Dordogne, Etat-major de l’armée de Terre / Service historique, page 188
  7. Patrice Rolli, Le Périgord dans la Seconde Guerre mondiale, Éditions L’Histoire en partage, pages 264 à 273
  8. Pierre Cadroas, Résistances, Éditions Les Presses de la Double, pages 273 et 276
  9. Podcast France Culture, « Le casse du siècle »
  10. Le Maitron, « Dictionnaire biographique Fusillés, Guillotinés, Exécutés, massacrés, 1940-1944 - Périgueux (Dordogne), Caserne Daumesnil, 5 juin-17 août 1944 »
  11. Jacques Lagrange, 1944 en Dordogne, Éditions Pilote 24 Périgueux, page 382
  12. ANACR Dordogne, La Résistance en Dordogne, page 407
  13. Général de la Barre de Nanteuil, Historique des unités combattantes de la Résistance (1940-1944) / Dordogne, État-major de l’armée de Terre / Service historique, page 189
  14. Marie-Anne Bouchet-Roy et Éric Renoux, « La poche de Royan »
  15. Chemins de mémoire, « Libération de la poche de l'île d'Oléron »
  16. Musée de l'ordre de la Libération, « Les femmes et les hommes médaillés de la Résistance françaises »