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Tout avait probablement commencé après la mort de Lady.
Quand la louve avait été injustement exécutée, quand elle avait découvert cruellement toute l’étendue de l’injustice du monde, quand elle avait réalisé qu’être une noble et une Stark ne l’épargnerait pas de la douleur.
Quand l’horreur était entrée dans sa vie, sa soif en avait fait de même.
La soif de sang.
Une soif de sang bien difficile à assouvir, et qui lui faisait peur, une soif de tuer, de blesser, de détruire, qu’elle n’arrivait pas à comprendre.
Elle était Sansa Stark, elle était une dame.
Pourquoi rêvait-elle soudainement de meurtre et de vengeance ?
Quand son père était mort, elle avait dû retenir en elle cette autre partie d’elle-même qui commençait à grandir de plus en plus, et ce n’était pas parce que c’était mal, non.
Mais parce qu’elle était seule et sans ressources, incapable de mettre en œuvre ce qui grondait dans son ventre et dans son cœur.
Ce qui l’horrifiait, ce n’était pas ce qu’elle voulait faire, mais le fait de ne rien ressentir à cette idée.
Si elle avait pu avoir des crocs, elle s’en serait volontiers servi pour déchiqueter les gorges de Joffrey, de Cersei, de toutes les personnes qui lui avaient fait du mal à Port-Réal, elle aurait bu leur sang.
La Bête grandissait en elle, chaque jour un peu plus en colère et déterminée, et la rousse n’était pas sûre d’être capable de la retenir bien longtemps.
Elle n’était pas certaine de le vouloir vraiment à vrai dire.
§§§§
Elle avait tué Joffrey.
Une nuit, une dague à la main, elle lui avait tranché la gorge, pour lui faire payer ses souffrances, ses humiliations, toute cette douleur, ce désespoir, et quand elle avait vu son sang, elle l’avait bu, sans même réaliser ce qu’elle faisait.
Maudite.
Elle était maudite.
Il n’y avait pas d’autre explication, pensa-t-elle alors qu’elle fuyait le Donjon Rouge, l’odeur du sang flottant dans l’air, son goût s’attardant sur sa langue, tandis qu’elle se disait qu’elle en voulait plus, plus, plus.
Un monstre.
Elle était un monstre.
Et c’était probablement cela qui lui avait sauvé la vie.
Sang, sang, sang.
Le mot prenait place dans son esprit, de plus en plus, et elle se demanda combien de temps il se passerait avant que tout le monde ne découvre son vrai visage.
§§§§
Ramsay n’avait absolument rien vu venir.
Quand elle avait été retrouvée puis amenée de force à Winterfell, obligée d’épouser ce monstre, la louve aux dents désormais teintées de sang avait presque eu envie de sourire.
Elle avait appris à survivre, et pour cela, elle avait appris à tuer et à aimer tuer.
Au bout du compte, il ne restait presque plus rien de Sansa Stark.
Il n’y avait plus que la Bête, une tueuse, un monstre, une abomination.
Une survivante.
Elle l’avait étranglé, lisant la peur dans ses yeux, s’en délectant, puis elle l’avait déchiqueté, en mille morceaux, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien, elle avait bu son sang, teintant ses mains, sa robe et sa bouche de rouge, se sentant enfin vivante pour la première fois depuis une éternité.
Elle était libre.
En sécurité.
Elle était puissante.
Et plus personne ne pourrait plus jamais lui faire de mal.
Pas tant que la Bête serait là, et qu’elle se tiendrait entre elle et le reste du monde.
§§§§
Yara Greyjoy était un imprévu auquel elle ne s’attendait pas.
Que la fer-née vienne pour récupérer son petit frère, cela, la louve s’y attendait, et elle s’était attendue à devoir se battre aussi, à partir en guerre.
Pas à ce qu’une relation de confiance s’établisse entre elles, pas à ce qu’après la fin de la guerre des cinq rois, puis celle contre les marcheurs blancs, elle et la seiche ne commencent à se rapprocher, puis à tomber amoureuses.
La reine du Nord et la reine des Îles de Fer, du même côté et heureuses ensemble.
C’est ce que Sansa aurait voulu du moins.
Mais la Bête était toujours là, tapie en elle, contrôlée, certes, mais emplie de peur et de rage, envahie par une soif insatiable, impossible à étancher, et du sang, tellement de sang qu’il lui faudrait verser si elle voulait parvenir à l’empêcher de faire un carnage et de se déchaîner sur le monde.
Pour le moment, elle parvenait à la garder en cage.
Jusqu’au jour où ce ne serait plus le cas, où elle ne serait plus assez forte pour la retenir.
Jusqu’au jour où Yara finirait par découvrir sa véritable nature et où tout s’effondrerait entre elles.
Et oh comme elle craignait que ce jour qu’elle tentait tant d’empêcher n’arrive…