Sans la lecture commune initiée par Gwen, je n'aurais sans doute jamais entendu parler de ce bouquin. Et ça aurait été vraiment dommage. Ce recueil de nouvelles est un véritable coup de coeur. C'est un ouvrage remarquable, brillant, un livre important.
Phil Klay a servi lors de la guerre en Irak. Il n'était pas dans une unité de combat mais a côtoyé de près des hommes qui ont vécu la guerre de façon directe. Avec ce recueil, Klay, qui a vu et entendu ces hommes, veut faire entendre leurs voix, essayer d'expliquer aux civils ce qu'est la guerre, ce qu'elle fait aux hommes qui la font. Pour cela, tout au long des récits, il va adopter des angles, des points de vue différents, esquissant par petites touches le portrait flou mais marquant de la guerre et de ses conséquences sur les hommes. Flou, parce que le langage est par nature toujours incomplet, certaines choses ne peuvent être vécues qu'intérieurement, aucun mot ne peut les retranscrire dans leur vérité absolue. Mais Klay s'approche de cette vérité totale.
Sur le fil de la lecture commune, Flaubauski soulignait avec justesse que ce livre était très éloigné d'un roman pacifiste tel « A l'ouest rien de nouveau » de Remarque. Elle remarquait que «
Fin de mission » était plus brut de décoffrage, plus sec. Je la rejoins totalement sur ce point. Selon moi, le roman de Remarque est imprégné d'espoir malgré les horreurs de la guerre dépeinte, un espoir en l'Homme. J'ai eu l'impression que «
Fin de mission » n'était pas imprégné de cet espoir. Les hommes qui font ici la guerre ne savent pas vraiment pourquoi ils la font, même s'ils ont choisi d'être là. Il n'y a pas vraiment d'idéologie ni d'idéal qui sous-tend leur engagement. Parfois simplement le sentiment de servir leur pays mais au final la plupart de ces hommes donnent l'impression d'être là pour rien. Il n'y a pas grand-chose d'autre que l'ennui et la violence, froide, clinique qui ne sert à rien et qui ne sert rien.
Pour autant, et c'est là une des grandes qualités de cet ouvrage, l'auteur ne fait pas preuve d'un pacifisme béat. Son propos n'est pas de s'interroger sur la nécessité de la guerre. le propos est plutôt de s'intéresser à la façon dont elle est faite et les répercussions qu'elle a sur les hommes qui la font, leurs proches, la société qui les voit revenir différents.
En général, dans un recueil de nouvelles, il y a du bon et du moins bon. Ici, on va du très bon à l'excellence. Il n'y a rien à jeter, chaque texte est une réussite, certains se hissant au niveau de petits chefs-d'oeuvre.
Je recommande plus que chaudement ce bijou de la littérature américaine. C'est intelligent, c'est stimulant, c'est bien écrit, c'est parfois drôle (si, si, je vous jure ! Un humour acide qui fait rire jaune mais qui fait rire), c'est émouvant, c'est riche, c'est profond. Formidable !