Cette contribution à un ouvrage collectif portant sur l’histoire du marxisme en France propose une présentation synthétique de la longue histoire des tentatives d’hybridation entre phénoménologie et marxisme en France.

Michel Foucault, Colin Gordon and Paul Patton (A. Beaulieu ed.) «Considérations sur le marxisme, la phénoménologie et le pouvoir» réalisé en 1978 par C. Gordon et P. Patton, Cités, No. 52, Déc. 2012, p. 103-126.

Cet article vise à étudier la lecture des Mystères de Paris par Karl Marx, à partir des chapitres V et VIII de La Sainte Famille (1845). Il s'agit d'analyser les mécanismes relevant du commentaire idéologique dans ce texte : le but de Marx est ici de démontrer que le socialisme dont se revendique Eugène Sue n'est dans son roman qu'une forme de paternalisme qui reconduit la morale bourgeoise. Cependant, au-delà de l'intention affichée par Marx, ces chapitres donnent à voir l'investissement du futur auteur du Capital dans l'histoire racontée et son attachement aux personnages. C'est l'articulation entre l'intérêt cognitif et la dimension affective de la lecture marxienne qui sera plus particulièrement l'objet de cette étude.

Les similitudes entre le thomisme et le marxisme-léninisme sont nombreuses et parfois très frappantes. Il n'est peut-être pas exagéré d'affirmer que parmi les écoles philosophiques contemporaines, ce sont les deux qui ont le plus en commun. Ceci est bien sûr nié par la plupart des marxistes-léninistes. On est aisément convaincu que cette similitude n'est pas juste superficielle en jetant un coup d'oeil sur la liste des doctrines majeures soutenues par ces deux écoles.

La philosophie de Merleau-Ponty cherche à penser l'inscription du sujet vivant dans le monde, à comprendre la façon dont l'être vivant existe en tant qu'il habite un environnement spécifique. Car le vivant, en effet, a ceci de particulier qu'il habite un monde par le milieu ; il se creuse un espace au sein duquel prennent sens les objets qu'il parvient à remarquer. Aussi, chaque être vivant, en tant qu'il possède un corps, ne peut entrer en contact avec son environnement que d'après un nombre limité de combinaisons possibles. L'objectif de la philosophie mise en œuvre par Merleau-Ponty est de retrouver le sol originaire de notre incarnation au monde, ceci en procédant à l'unification des perspectives que les sciences nous livrent à son propos. Chaque science nous informe à leur manière – selon une approche singulière – à propos de ce même objet qu’est le sol originaire sur lequel s'enracinent tous les êtres vivants. Mobilisant la pluralité méthodologique et analytique qu’offrent les sciences, Merleau-Ponty va rompre avec le dualisme cartésien, en réhabilitant notamment la place du corps dans la connaissance que nous nous faisons du monde, l'homme n'étant pas un esprit et un corps, mais un corps par où émerge une conscience. Dans cette optique, l'activité perceptive doit être rattachée au corps, du fait que c'est à partir de notre enracinement au monde, à partir de notre corps, que nous édifions un monde autour de nous qui nous est propre, un monde à notre image. Il est donc indispensable de réunir les sciences et le point de vue particulier qu'elles posent sur le monde, afin de retrouver ce contact originaire duquel émerge le vivant. Or, selon Merleau-Ponty, la façon dont l'organisme habite son monde est induite par la manière dont il perçoit son environnement. Ce contact originaire, la perception l'initie et l'élargi à la sphère de l'être : la perception constitue l'éveil du sujet au monde, elle est le fil conducteur qui mène de la présence à soi jusqu'à la présence des autres, laquelle permet la compréhension générale du mode d'être des autres vivants.