Les élections communales à Gand (1921-2018).
Note de synthèse
Pascal Delwit
Centre d’étude de la vie politique
Université libre de Bruxelles (ULB)
1. L’avènement d’une grande métropole flamande
En 1976 interviennent les premières élections communales à Gand post-fusion. L’actuelle ville
de Gand est le résultat d’une fusion de communes qui s’est opérée en deux temps.
En 1964, Gand fusionne avec quatre communes frontalières : Desteldonk, Mendonk, Sint-KruisWinkel et Wondelgem.
Douze ans plus tard, Gand fusionne avec Afsnee, Drongen, Gentbrugge, Ledesberg, Mariakerke,
Oostakker, Sint-Amandsberg, Sint-Denijs-Westrem et Zwijnaarde (Figure 1).
Figure 1. Gand et les communes qui fusionneront avec elle
Avant ces deux fusions, Gand était déjà une des plus grandes communes de Belgique du point
de vue démographique. À la charnière des XIXe et XXe siècles, la ville affiche environ 150.000
habitants. La population de la ville croît encore jusqu’à la deuxième guerre mondiale pour
atteindre un peu plus de 170.000 résidents. Dans la deuxième moitié du XX e siècle, la commune
perd cependant des habitants et la dynamique se poursuit après les fusions de 1964 et 1976.
Depuis l’entrée dans le XXIe siècle, Gand connaît un nouveau boom démographique. En un peu
moins de 25 ans, la ville a crû d’environ 50.000 habitants : son nombre se fixe à environ 270.000
en 2024 (Tableau 2).
Gand est de longue date une ville clé en Flandre. En revanche, les communes avec lesquelles
elle fusionne dans le temps sont, pour la plupart, relativement mineures d’un point de
démographique. En 1961, Desteldonk fait état de 963 habitants, Mendonk de 368, Sint-KruisWinkel de 1.908 et Wondelgem de 6.518 (Tableau 1).
Tableau 1. Évolution de la population à Gand et dans les communes qui fusionneront avec elle
1880
1890
1900
1910
1920
1930
1947
1961
1970
131.431 148.729 160.133 166.445 167.042 170.358 166.096 157.811 148860
1.048
1.222
1.303
1.198
1.137
1.061
1.064
963
359
421
418
370
376
384
403
368
2.290
2.506
2.537
2.429
2.266
1.893
1.918
1.906
1.721
2100
2.738
4.007
2.543
3.831
5.603
6.518
293
300
346
444
439
516
1.070
1.141
4.772
5.006
5.226
5.529
5.298
5.804
6.943
7.799
9.120
Gand
Desteldonk
Mendonk
Sint-Kruis-Winkel
Wondelgem
Afsnee
Drongen
Gentbrugge
Ledesberg
Mariakerke
Oostakker
Sint-Amandsberg
Sint-Denijs-Westrem
Zwijnaarde
Total
4.298
8.262
10.857
13.724
14.573
16.349
17.728
22.222
22.214
10.124
1.574
3.986
7.429
12.362
1.741
4.773
10.836
14.230
2.067
4.406
13.226
13.999
2.757
5.241
16.260
13.417
2.845
5.044
16.913
12.897
3.575
5.798
18.976
12.244
4.659
7.475
21.352
11.232
7.163
8.333
24.359
10.338
8.822
8.886
25.071
1.721
1.953
2.140
2.311
2.405
2.540
3.084
4.040
5.305
2.424
2.766
3.267
3.629
3.522
3.901
4.884
5.566
6.062
173.470 202.977 222.894 238.343 237.820 247.883 253.453 259.350 245.819
En 1970, Afsnee atteint 1.141 habitants, Drongen 9.120, Mariakerke 8.822, Oostakker 8.886,
Sint-Denijs-Westrem 5.305 et Zwijnaarde 6.062. Seules trois communes font alors valoir plus de
10.000 résidents, dont deux plus de 20.000 : Gentbrugge : 22.214 ; Ledesberg : 10.338 et SintAmandsberg : 25.071 (Tableau 1).
Tableau 2. Évolution de la population à Anvers depuis la fusion
1981
1990
2000
2011
2024
239.256
230.543
224.180
243.366
269.597
Au moment de la fusion de 1976, l’« ancienne » commune de Gand représente plus de 60% de
la population de la « nouvelle » commune (Tableau 3).
Tableau 3. Proportion de la population dans la commune gantoise fusionnée (En pourcentage)
Gand
60,6
Afsnee
Drongen
Gentbrugge
Ledesberg
Mariakerke
Oostakker
0,5
3,7
9,0
4,2
3,6
3,6
Sint-Amandsberg
Sint-Denijs-Westrem
Zwijnaarde
10,2
2,2
2,5
2. Vie politique et électorale à Anvers au XXe siècle
Avant même la nouvelle loi communale de 1921, Gand donne à voir plusieurs dimensions
politiques originales. Contrairement à une grande partie du territoire flamand, le Parti
catholique n’y est pas hégémonique. L’implantation catholique est très forte mais pas
dominante. La présence des libéraux y est notable. Bien que divisé 1, le poids du libéralisme
gantois est indéniable.
Enfin, fait beaucoup plus singulier encore, il s’agit déjà d’un espace de pénétration socialiste
consistante. L’histoire du socialisme gantois a une longue histoire. C’est là qu’est né en 1877 le
Vlaams Socialistische Arbeider Partij (VSAP), en particulier sous l’impulsion Edouard Anseele et
Edmond Van Beveren. Le socialisme gantois s’appuie sur un mouvement coopératif précoce et
une Maison du Peuple imposante, le Vooruit2.
Dans ces conditions, lors des premières élections communales de l’entre-deux-guerres, aucune
formation ne décroche de majorité absolue en voix (Tableau 4), pas plus qu’en
sièges (Tableau 5). L’Union catholique (UCB-KVB) et Parti ouvrier (POB-BWP) sont au-coude-àcoude pour le statut de premier parti. Pourtant leur part, les libéraux font valoir près de 20%
des suffrages et peuvent s’imposer comme pivotaux, ce qui leur permet de s’emparer de la
mairie. Alfred Vander Stegen est bourgmestre de 1921 à 1940 (Tableau 8)
Dans les trois autres élections de l’entre-deux-guerres – 1926, 1932, 1938 –, l’observation n’est
pas substantiellement différente. Quelque peu affectés par la concurrence du FrontPartij puis
du Vlaams Nationaal Verbond (VNV) mais aussi partiellement de Rex, les catholiques se tassent.
Cela permet aux socialistes, pourtant concurrencés par le Parti communiste (PCB-KPB), de les
devancer. Pour ce qui concerne le Parti libéral, l’étiage passe à environ 15% des suffrages leur
permettant d’emporter six sièges (Tableau 5).
1
Peter Laroy, « Liberalisme en Vlaamse Beweging », Liberas, 2021.
Pascal Delwit, Le socialisme en Belgique (1885-2024). Origine, acteurs, développements, Bruxelles, Éditions de
l’Université de Bruxelles, 2024, p. 54 et suivantes.
2
Tableau 4. Évolution des résultats électoraux à Gand avant la deuxième fusion (en pourcentage)
PSC-CVP
PSB-BSP
PL-LP
VC/VU
KPB
Rex
FP/VNV
Classes moyennes
1921
1926
1932
1938
1946
1952
1958
1964
41,9
39,8
18,3
38,9
36,2
18,0
32,1
33,4
14,7
33,5
34,3
16,4
45,8
34,0
12,9
0,0
5,0
8,9
5,5
5,5
5,8
40,6
37,8
12,9
2,1
2,9
47,2
35,6
14,4
2,6
2,6
34,8
34,9
18,2
8,6
3,1
1,9
3,7
7,1
4,9
1970
27,7
32,1
23,5
11,9
3,2
Certains partis challengers voient le jour durant cette période. Occasionnellement, leur
trajectoire est éphémère. C’est notamment le cas de la liste des classes moyennes. En 1926,
elle enlève deux sièges mais c’est sans lendemain. De même, Rex atteint 5,5% et un siège en
1938 (Tableau 4).
Les formations nationalistes flamandes, le FrontPartij puis le Vlaams Nationaal Verbond,
concourent en 1926, 1932 et 1938 mais elles peinent à s’imposer à Gand. Le VNV ne glane
qu’un siège en 1938.
Enfin, le Parti communiste a une certaine saillance à Gand alors qu’il est insignifiant en Flandre,
à l’exception partielle d’Anvers et d’Alost3. En 1926, le KPB franchit la barre des 5% et grimpe
même à 8,9% des suffrages en 1932, décrochant par-là même trois sièges, une performance
qu’il ne rééditera jamais (Tableau 5).
Tableau 5. Évolution des résultats électoraux à Gand avant la deuxième fusion (en sièges)
PSC-CVP
PSB-BSP
PL-LP
VC/VU
KPB
Rex
FP/VNV
Classes moyennes
3
1921
17
1926
16
1932
14
1938
15
1946
20
1952
18
1958
20
1964
15
1970
12
16
6
15
7
14
6
15
6
14
4
0
1
3
1
14
5
0
0
15
7
2
0
15
10
4
0
0
0
2
1
1
1
16
5
0
0
Stefaan
Marteel,
« Links-radicalisme »,
Encyclopedie
https://encyclopedievlaamsebeweging.be/nl/links-radicalisme.
van
de
Vlaamse
Beweging,
Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, deux observations doivent être épinglées à
Gand :
-
-
D’abord, la dynamique des scrutins de 1932 et 1938 se durcit. Le Parti social chrétienChristelijke Volkspartij (PSC-CVP) et le Parti socialiste belge-Belgische Socialitische
Partij (PSB-BSP) captent l’essentiel des suffrages – 80% – et des sièges – 34 sur 39. En
contrepoint, le Parti libéral recule et n’atteint plus que 13% des voix. Alors qu’il est en
progrès partout ailleurs4, bien que de manière limitée en Flandre, le Parti communiste
reste stable et ne glane qu’un seul siège.
Ensuite, l’absence de concurrence de formations nationalistes flamandes ou
d’organisations issues du catholicisme profite au PSC-CVP dans un contexte
d’exacerbation sur le clivage philosophique autour de la question royale et des guerres
scolaires de 195 et 1955. De manière exceptionnelle, le CVP décroche la majorité
absolue en sièges aux élections communales de 1946 et de 1958.
L’adoption du pacte scolaire en 1959 et le réalignement libéral en 1961, qui donne naissance
au PLP-PVV, ouvrent une nouvelle ère. Catholiques et socialistes voient leurs performances
s’éroder. En 1964, les libéraux rebondissent à 18,2% et atteignent 23,5% en 1970. Sous les
couleurs de la Volksunie, le nationalisme flamand (re)devient un acteur saillant. La Volksunie
atteint 8,6% et 2 sièges en 1964 et 11,9% et 4 sièges en 1970.
Dans les autres localités de la future commune de Gand, la dynamique électorale et politique
est tout autre. Elle se donne essentiellement à voir sous la forme d’une domination, parfois
totale, de l’Union catholique puis du Katholieke Vlaamse Volkspartij (KVV), face aux socialistes
et, parfois, aux libéraux. Il n’est pas rare qu’il n’y ait tout simplement pas d’élections ou que les
scrutins soient des joutes entre listes catholiques. Parfois même, un cartel des socialistes,
libéraux et communistes est insuffisant pour devancer la liste catholique. C’est le cas en 1946 à
Gentubrugge et Ledeberg (Tableau 6).
4
Pascal Delwit, « The Communist Party of Belgium and the municipal elections of 24 November 1946: a deceptive
breakthrough », Journal of Belgian History, 2024, LIV (1), pp. 78-108.
Tableau 6. Évolution des résultats électoraux à Sint-Amandsberg, Gentubrugge et Ledeberg
(1926-1946-1970)
1926
1946
1970
SintSintSintGentbrugge Ledeberg
Gentbrugge Ledeberg
Gentbrugge Ledeberg
Amandsberg
Amandsberg
Amandsberg
PSC-CVP
46,7%
44,4%
41,6%
59,9%
50,6%
52,1%
35,6%
37,0%
41,8%
6
37,9%
6
41,8%
11
25,4%
8
7
PSB-BSP
8
28,7%
9
19,0%
8
28,9%
7
29,7%
5
10,8%
1
5
17,8%
2
6
16,7%
1
4
9,7%
0
5
0
4
19,5%
2
6
14,9%
2
5
13,9%
1
19,2%
3
10,4%
1
PL-LP
PCB-KPB
BSP-LP-KPB
FP
49,4%
47,9%
7
6
10,0%
1
VU
Dans les trois principales communes – Sint-Amansberg, Gentbrugge et Ledeberg –, les
catholiques décrochent des scores majeurs. Politiquement, ils sont occasionnellement
devancés par une courte majorité socialiste-libérale avant la deuxième guerre mondiale. Mais
après la deuxième guerre, la domination catholique est de mise. À Sint-Amandsberg, le maïorat
est catholique de 1921 à 1976 (Tableau 7).
Tableau 7. Couleurs politiques des bourgmestres de Sint-Amandsberg, Gentbrugge et Ledeberg
Sint-Amandsberg
Gentbrugge
Ledeberg
1921-26
Edgard Lagrange (KVB)
1921-26
Maurice Verdonck (KVB)
1921-26
Polydore De Visch (BWP)
1927-32
Edgard Lagrange (KVB)
1927-32
Robert Rinskopf (LP)
1927-32
Ernest Cardon (LP)
1933-37
Louis Cardon (KVB)
1937-38
Gustaaf Haemers (KVB)
1933-38
Emiel Van Sweden (BWP)
1933-38
Gaston Crommen (BWP)
1939-40
Gustaaf Haemers (KVV)
1939-40
Frans Toch (BWP)
1939-40
Gaston Crommen (BWP)
1947-51
Gustaaf Haemers (CVP)
1951-52
Robert Van Pottelbergh (CVP)
1947-52
Hippoliet Persoons (CVP)
1947-52
Achille Heyndrickx (CVP)
1953-58
Robert Van Pottelbergh (CVP) 1953-58
Raphaël Verhaest (CVP)
1953-58
Antoine Dhooghe (CVP)
1959-64
Robert Van Pottelbergh (CVP) 1959-64
Raphaël Verhaest (CVP)
1959-64
Antoine Dhooghe (CVP)
1965-70
Robert Van Pottelbergh (CVP) 1965-70
Raphaël Verhaest (CVP)
1965-70
Antoine Dhooghe (CVP)
1971-76
Jacques Monsaert (CVP)
Fernand Van Belle (CVP)
1971-76
Antoine Dhooghe (CVP)
1971-76
L’emprise politique sociale chrétienne ne se desserre qu’à partir du scrutin de 1964 avec la
progression de la sécularisation et la montée en puissance d’un nouvel acteur, la Volksunie.
Mais, pour l’essentiel, socialistes et libéraux sont absents des responsabilités dans ces
communes tout au long de la période et les sociaux chrétiens font valoir des maïorats au long
cours. L’exemple d’Étienne della Faille d’Huysse, bourgmestre de Zwijnaarde de 1921 à 1975,
est le plus emblématique.
3. Vie électorale et politique dans la commune fusionnée de Gand
Assez logiquement, lors du scrutin de 1976, le Christelijke Volkspartij (CVP) s’impose comme le
premier parti avec 32,5% des suffrages et 19 sièges. Bien qu’en recul, il conserve une dernière
fois ce statut en 1982.
À partir du scrutin municipal de 1988, le Socialistische Partij (SP) s’impose comme la première
formation de la ville de Gand. En 1994, il ne conserve le leadership que d’un souffle face aux
libéraux et aux sociaux chrétiens. La fin du XXe siècle témoigne cependant d’un déclin, qui paraît
inexorable, de la famille sociale chrétienne. En 2000, le CVP passe sous le seuil de 20% et en
2012, le CD&V qui lui a succédé sous celui de 10%.
Tableau 8. Évolution des résultats électoraux à Gand de 1976 à 2018
%
Sièges
%
Vooruit
Sièges
%
OpenVLD
Sièges
%
Vlaams Belang
Sièges
%
Groen
Sièges
%
PVDA
Sièges
%
N-VA
Sièges
%
VC/VU
Sièges
CD&V
1976
32,5
19
23,4
13
23,9
1982
29,0
17
25,8
15
19,4
1988
26,8
15
27,7
16
21,7
1994
21,6
12
21,8
13
21,7
2000
17,9
10
25,1
14
21,0
2006
*11,9
6
31,6
17
21,0
2012
9,1
4
**26,2
15
16,5
2018
8,8
4
**24,0
15
25,2
14
11
2,4
0
0,8
0,4
12
5,2
2
7,4
3
0,4
13
12,7
7
9,8
5
0,9
11
19,5
11
9,11
4
0,6
11
18,0
9
12,1
6
1,0
9
6,5
3
**19,2
11
2,9
15
7,8
4
**9,6
6
7,1
0
0
*4,0
2
0
17,1
9
3
12,1
6
0
13,8
13,5
8,0
4,0
4,0
7
11
3
1
1
2,7
1,5
0,6
%
KPB
0
0
0
Sièges
* Estimation : liste de cartel CD&V-N-VA ; ** Estimation : liste de cartel sp.a-Groen.
En parallèle, le SP – puis le sp.a – s’impose comme la principale formation de la ville. Gilbert
Temmerman, entre 1988 et 1994, Frank Beke enntre 1995 et 2006 puis Daniël Termont jusqu’en
2018 officient comme bourgmestre (Tableau 9). Un temps, Daniël Termont apparaît comme le
challenger principal de De Wever alors même que le socialisme flamand dévisse. Mais Termont
et les socialistes gantois sont atteint par « l’affaire Optima ». En cartel avec Groen en 2018, ils
abandonnent le maïorat à la tête de liste de l’OpenVLD, Mathias De Clercq.
Tableau 8. Bourgmestres et leur couleur politique à Gand (1921-2018)
1921-1926
1926-1932
1933-1938
1939-1940
1947-1952
1953-1958
1958-1964
1965-1970
1971-1976
1977-1982
1983-1988
1989-1994
1995-2000
2001-2006
2007-2012
2013-2018
2019-2024
Alfred Vander Stegen (PL-LP)
Alfred Vander Stegen (PL-LP)
Alfred Vander Stegen (PL-LP)
Alfred Vander Stegen (PL-LP)
Emile Claeys (PSC-CVP)
Laurent Merchiers (PL-LP)
Emile Claeys (PSC-CVP)
Emile Claeys (PSC-CVP)
Geeraard Van Den Daele (CVP)
Placide De Paepe (CVP)
Jacques Monsaert (CVP)
Gilbert Temmerman (SP)
Frank Beke (SP)
Frank Beke (SP)
Daniël Termont (sp.a)
Daniël Termont (sp.a)
Mathias De Clercq (OpenVLD)
La trajectoire du libéralisme flamand à Gand est somme toute assez stable. Le PVV puis le VLD
décroche aux alentours de 20% des suffrages tout au long de la période. Mais en 2018, profitant
de l’absence de Termont à la tête de la liste socialiste-écologiste et du trouble de l’affaire
Optima, les libéraux atteignent un quart de l’électorat et quinze sièges. Au terme de
négociations chahutées, nous l’avons dit, Mathias De Clercq, fils de la grande figure Willy De
Clercq, s’empare de l’hôtel de ville. Ce n’était plus arrivé à la famille libérale depuis 1940.
Depuis 1976, le paysage politique s’est aussi ouvert à Gand. Il faut d’abord mentionner le
développement de la Volksunie. En 1976, le parti nationaliste flamand glane près de 14% et
sept sièges. Mais dans les années 1980, la VU recule et lors du dernier scrutin auquel elle
participe, elle n’obtient plus qu’un siège. En 2012, la N-VA obtiendra un score probant, 17,1%,
mais ne pourra pérenniser ce résultat six ans plus tard. Dans la commune considérée comme la
plus libérale-culturelle de Flandre, le nationalisme et le conservatisme de la N-VA font moins
recette.
Il en va de même pour le Vlaams Belang – Vlaams Blok jusqu’en 2004. L’extrême droite
flamande atteindra certes près de 20% en 1994 et 2000 mais elle est depuis en déclin marqué
et est largement passée sous les 10% en 2012 et 2018.
A contrario, deux formations sont en dynamique à Gand.
Épinglons d’abord Groen – auparavant Agalev. Dans la compétition électorale depuis 1988, les
verts trouvent dans cette ville universitaire un public captif. En 2006, Groen atteint 12,1% et six
sièges. En 2012 et 2018, Groen a noué un partenariat avec le sp.a. S’il a été très porteur en
2012, les choses ont été électoralement et politiquement plus complexes en 2018. Et le cartel
est rompu. Les socialistes ont cette fois opté pour une alliance électorale avec l’OpenVLD.
Il convient ensuite de citer le Parti du travail-Partij van de Arbeid (PVDA). En 2018, la formation
de gauche radicale a réussi pour la première fois à décrocher des sièges – trois – au Conseil
communal.
4. Perspectives contemporaines
Depuis le dernier scrutin communal, six élections sont intervenues à Gand : les scrutins fédéral,
régional et européen de 2019 et 2024.
Le dernier en date offre, bien sûr, le plus d’indications pour le scrutin communal de 2024. Mais,
il importe de mentionner que les dynamiques à l’œuvre à un scrutin régional et fédéral diffèrent
partiellement de celles d’un scrutin local. Qui plus est, l’électorat n’est pas entièrement le
même. Aux élections fédérales, le score comprend le vote des Belges de l’étranger et aux
élections communales, les électeurs n’ayant pas la nationalité belge peuvent voter. Par ailleurs,
la participation ne sera plus obligatoire aux élections communales.
Quatre points méritent d’être épinglés
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5
Le premier est le niveau extrêmement faible du parti du bourgmestre. L’Open VLD se
fixe à 12% au scrutin législatif et à peine plus aux élections européennes. Son partenaire
de cartel, Vooruit, est aussi à un étiage particulièrement faible : 14,3% à la Chambre et
un peu plus de 15% à l’Europe. À l’échelle régionale, la liste atteint certes 20%. Mais il
importe de noter que la tête de liste, la Gantoise Freya Van den Bossche, fait à peine un
peu plus de la moitié des voix de préférence – 5.891 – que Conner Rousseau qui
poussait la liste – 10.468. Aussi, la liste libérale-socialiste – Voor Gent – est-elle
annoncée à un niveau extrêmement faible aux communales, autour de 20 à 21% des
voix5.
Le troisième parti historique, le CD&V, est au plus mal. Les chrétiens démocrates n’ont
décroché qu’un peu plus de 8% des suffrages à Gand est sont même annoncés en
dessous du seuil de 5% des suffrages.
En parallèle, il se confirme qu’avec Louvain, Gand est l’espace qui convient le mieux
socio-politiquement aux verts. Groen décroche entre 17 et 24% des voix aux trois
scrutins, s’imposant comme le premier parti de la ville aux élections législatives et
européennes. Dans les intentions de vote pour les élections communales, il titille même
de manière surprenante la liste Voor Gent (libérale et socialiste) pour le statut de
premier parti.
En parallèle, il se confirme que N-VA et Vlaams Belang ont un impact limité dans la ville.
La N-VA n’a enlevé aux mieux que 16,8% des voix et le Vlaams Belang 12,8%.
Enfin, la percée du PVDA en 2018 est corroborée. Le Parti du travail se situe à un étiage
de 12 à 14% des voix et pourrait jouer les trouble-fête pour la confection d’une majorité
communale (Tableau 13).
« De Grote peiling. In Gent telt vooral één vraag: met wie duikt De Clercq het bed in? Met links of met rechts? »,
Het Nieuwsblad, 13 septembre 2021.
Cette course, apriori (relativement) serrée, entre la liste Voor Gent et Groen pour le statut de
premier parti et une certaine fragmentation ouvrent l’hypothèse d’un maïorat vert. À ce stade,
les verts flamands n’ont qu’un bourgmestre, à Zwijndrecht, une commune engagée dans un
processus de fusion des communes. Compte tenu de la nouvelle loi communale – le premier
parti de la coalition décroche le poste de bourgmestre –, c’est une hypothèse plausible quand
bien même ce serait un coup de tonnerre électoral qu’à Gand, une liste libérale-socialiste ne
soit pas la première du scrutin.
Tableau 9. Résultats à Gand aux élections législatives, régionales et européennes de 2019 et
2024 (en pourcentage)
Vlaams Belang
Open Vld
PVDA
Vooruit
N-VA
Groen
CD&V
Voor U
BUB
BBB
GV
Partij Blanco
DierAnimal
de coöperatie
RP
Be.One
Volt Europa
Chambre
2024
2019
11,57%
11,72%
12,13%
19,34%
12,59%
10,19%
14,31%
12,80%
16,75%
15,96%
22,00%
20,39%
8,72%
7,81%
0,75%
0,10%
0,34%
Région
2024
2019
12,02% 12,15%
10,24% 16,00%
13,96% 11,32%
20,40% 12,91%
16,19% 16,18%
17,78% 20,77%
8,18%
8,59%
0,89%
Europe
2024
2019
11,99% 11,93%
10,87% 20,17%
12,64%
15,63% 11,84%
13,97% 13,83%
23,88% 25,29%
8,54%
8,18%
0,97%
0,34%
0,16%
0,92%
1,35%
1,10%
0,15%
0,13%
0,11%
0,73%
1,51%
0,68%