Chronique des activités archéologiques de
l’École française de Rome
Italie centrale | 2013
Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
Henri Duday, Carla Caldarini, Stefania Di Giannantonio, Giandomenico
Spinola, Leonardo Di Blasi et Monica Ricciardi
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/cefr/975
DOI : 10.4000/cefr.975
ISSN : 2282-5703
Éditeur
École française de Rome
Référence électronique
Henri Duday, Carla Caldarini, Stefania Di Giannantonio, Giandomenico Spinola, Leonardo Di Blasi et
Monica Ricciardi, « Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican) », Chronique des activités
archéologiques de l’École française de Rome [En ligne], Italie centrale, mis en ligne le 06 juin 2013,
consulté le 19 avril 2019. URL : http://journals.openedition.org/cefr/975 ; DOI : 10.4000/cefr.975
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© École française de Rome
Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du
Vatican)
Henri Duday, Carla Caldarini, Stefania Di Giannantonio, Giandomenico
Spinola, Leonardo Di Blasi et Monica Ricciardi
NOTE DE L’ÉDITEUR
Analyse anthropologique : H. Duday, C. Calderini et S. Di Giannantonio ; Analyse
archéologique : G. Spinola, L. Di Blasi et M. Ricciardi
1
La nécropole Santa Rosa est, en fait, une partie de la nécropole romaine qui longeait la
Via Trionfale. Elle a fait l’objet d’une intervention de fouilles préventives liée
l’aménagement d’un parking souterrain1. Si l’analyse des données archéologiques et
épigraphiques était largement avancée, il n’en était pas de même des investigations
anthropologiques relatives aux sépultures à crémation, pour lesquelles rien n’avait
encore été engagé. Afin de pallier cette carence, une convention quadripartite a été
signée au printemps 2012 entre la Direction des Musei Vaticani, l’École française de Rome,
l’Université de Bordeaux (UMR 5199) et la Soprintendenza speciale per i Beni archeologici di
Roma. H. Duday a effectué une première campagne d’évaluation (7-22 novembre 2011),
puis deux missions d’étude (11-24 avril et 12-26 septembre 2012) pour lesquelles il a
bénéficié de la collaboration de C. Caldarini et S. Di Giannantonio.
2
Il a été décidé que dans un premiers temps, l’étude porterait sur les urnes cinéraires
prises dans la maçonnerie des monuments funéraires. Ceux-ci ont été dégagés lors de la
fouille mais les restes osseux ont systématiquement été laissés en place à l’intérieur de
leur réceptacle, ce qui autorise une lecture fiable de la dynamique du dépôt2. Le contenu
des urnes a été démonté par passes consécutives de 2 cm à 2,5 cm d’épaisseur avec des
prises de vue zénithales à chaque décapage, l’analyse anthropologique (identification,
décompte et pesée des fragments en fonction de leur origine anatomique) a été réalisée in
situ (fig. 1).
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Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
Fig. 1 - Cité du Vatican, Nécropole Santa Rosa. Vue de l’aire de travail au sein même de la
nécropole.
Photographie H. Duday.
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Le programme prévoit la fouille et l’étude ultérieures de quelques dépôts d’un type
différent, le réceptacle en céramique étant placé à l’intérieur d’une fosse creusée dans le
substrat naturel ; ces interventions resteront toutefois ponctuelles et seront conduites
avec parcimonie, car la partie conservée de la nécropole bénéficie d’un projet
muséologique qui est en passe d’être mené à terme (G. Spinola, L. Di Blasi et M. Ricciardi).
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Le premier monument étudié a été le mausolée XX. La stèle placée à gauche de la porte
indique qu’il a été érigé par Fabia Philtate en l’honneur de son époux Alcimus, un esclave
de l’empereur Néron qui exerçait les fonctions d’architecte de scène du théâtre de
Pompée (fig. 2).
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Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
Fig. 2 - Cité du Vatican, Nécropole Santa Rosa. Mausolée XX, la stèle d’Alcimus.
Photographie H. Duday.
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Il s’agit d’un édicule de plan carré de 1,50 m de côté (5 pieds sur 5) ; six urnes en
céramique (numérotées XX-1 à XX-6 dans le sens horaire à partir de l’urne située
immédiatement en arrière et à gauche de l’entrée) sont prises dans le mortier qui
constitue le sol de la chambre, au centre de laquelle s’ouvrent d’une part un tube à
libations cylindrique en céramique, et d’autre part un conduit formé de deux imbrices qui
mène à une petite chambre souterraine qui n’a pas encore été fouillée. Dans l’angle situé
au fond à gauche, une plaque de marbre présente un dispositif à libations original sous la
forme d’une dépression circulaire multiforée (fig. 3) qui, au moment de la découverte,
était couverte d’une coupelle en céramique sigillée retournée3.
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Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
Fig. 3 - Cité du Vatican, Nécropole Santa Rosa. Mausolée XX, la chambre funéraire au début de la
fouille.
Les urnes cinéraires n’ont pas encore été vidées de leur contenu. Au centre, le tube à libations et le
conduit vertical menant à une petite chambre souterraine. Au fond à gauche, une plaque carrée en
marbre avec son dispositif à libations.
Photographie H. Duday.
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Cette plaque ferme une dépression irrégulière qui a été aménagée aux dépens de la
maçonnerie (fig. 4), dans laquelle ont été placés des os brûlés (XX-8). Dans l’angle au fond
à droite, posée sur le sol, une urne en verre bleu (XX-7) contenait des os humains brûlés.
Enfin, un amas d’os humains brûlés a été trouvé sur le sol de la chambre (XX-US73).
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Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
Fig. 4 - Cité du Vatican, Nécropole Santa Rosa. Mausolée XX, la chambre funéraire en fin de fouille.
La plaque de marbre a été enlevée, elle recouvrait une fosse retaillée dans la maçonnerie, qui a
partiellement endommagé l’urne XX-3.
Photographie H. Duday.
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On pouvait penser que chaque urne devait contenir les restes d’un sujet : il y aurait donc
eu 7 sépultures au moins (6 urnes en terre cuite et une urne en verre), les incertitudes
concernant les deux dépôts plus tardifs (XX-8 et XX-US73). Cette vision a priori logique est
cependant très éloignée de la réalité que montrent les données anthropologiques. Seule
l’urne XX-2 contient les restes d’un seul et unique sujet (1489,5 g d’os brûlés), une femme
adulte de moins de 30 ans. L’urne XX-3 ne contient pratiquement que des cendres, avec
une quantité très faible de restes osseux (82,4 g). Dans l’urne XX-1, au-dessus d’un dépôt
de cendres placé au fond de l’urne, se trouvent les restes d’un enfant de 8 à 10 ans
(411,4 g, sujet principal), d’un adulte de sexe indéterminé (160,0 g) mais aussi deux
fragments jointifs d’un ischium (élément constitutif du bassin de l’enfant) qui se
rapportent à un enfant beaucoup plus jeune. L’urne XX-4, située au fond de la chambre,
en face de l’entrée, a livré une masse importante d’os brûlés (2135,6 g) qui correspondent
à trois adultes (un homme et deux sujets de sexe indéterminé) ; les os contenus dans
l’urne XX-5 (1701,6 g) correspondent à deux adultes de sexe indéterminé, ceux de l’urne
XX-6 (762,6 g) à deux adultes dont l’un était de sexe masculin. Comme dans l’urne XX-1, il
y avait un dépôt de cendres au fond de l’urne XX-6. La situation est plus complexe encore
dans l’urne en verre XX-7 : elle a livré les os d’un enfant de 3 à 6 ans (sujet principal,
295,2 g), mais aussi un os du tarse (talus droit) d’un enfant nettement plus grand et des os
qui se rapportent à deux adultes (37,8 g au total). L’addition des NMI (nombre minimal
d’individu) estimés pour chacun des réceptacles donne donc un effectif très important
(15) qui est en réalité très surestimé. La recherche systématique de liaisons ostéologiques
(collage de fragments jointifs, appariement par symétrie, relations de contiguïté
articulaire) donne en effet des résultats surprenants : ce sont les mêmes enfants que l’on
trouve dans les urnes XX-1 et XX-7 mais dans des proportions inverses, et l’un des deux
adultes présents dans la même urne en verre XX-7 se retrouve en XX-6. De la même
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Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
manière, de multiples raccords ont été trouvés pour XX-3 avec les urnes XX-4 et XX-6,
pour XX-4 avec XX-3, XX-5 et XX-6, pour XX-5 avec XX-1 (le sujet adulte), XX-4 et XX-6,
pour XX-6 avec XX-3, XX-4, XX-5 et XX-7 ! Il est donc plausible que l’ensemble ne
corresponde qu’à 4 adultes (une femme, un homme et deux sujets de sexe indéterminé) et
deux enfants.
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En revanche, aucune liaison n’a pu être établie entre les deux autres dépôts et les défunts
dont les restes ont été placés dans les urnes : ces sépultures manifestement plus tardives
semblent échapper au « jeu » des permutations croisées. La fosse XX-8 a livré les restes
d’un adulte de sexe indéterminé (1268,2 g), avec néanmoins deux fragments qui
appartiennent à un autre sujet. L’amas XX-US73 correspond à un grand enfant mort à un
âge compris entre 10 et 13 ans, mais il y a ici encore deux fragments incompatibles avec
ce sujet puisqu’ils se rapportent à un adulte. Parmi ces os surnuméraires, certains sont
absolument incompatibles avec chacun des dépôts contenus dans les urnes. On retrouve
ici une situation beaucoup plus banale dans l’étude des sépultures secondaires à
crémation, la présence d’os surnuméraires – qui ne représentent qu’une très faible part
du dépôt – s’expliquant probablement par une « erreur » lors de la collecte des os brûlés
sur une aire de crémation ; il s’agirait de vestiges résiduels appartenant à un défunt dont
le bûcher aurait antérieurement été érigé au même emplacement.
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Il est tout à fait possible que la femme dont les restes sont contenus dans l’urne XX-2 soit
Fabia Philtate, qui se serait « réservé » une urne dans le monument qu’elle a fait bâtir pour
son conjoint Alcimus. Rien ne permet en revanche de désigner celui-ci parmi les trois
autres adultes dont les os sont répartis à l’intérieur des six autres urnes ; la masse totale
(4879,0 g) est parfaitement compatible avec la présence de trois sujets. Il est néanmoins
certain que les « mélanges » observés ne sauraient être fortuits, et cela vaut également
pour les deux enfants (urnes XX-1 et XX-7).
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L’hypothèse qui nous semble la plus vraisemblable est qu’au décès de son époux, Fabia
Philtate a fait ériger un monument dans lequel elle aurait fait transférer les restes de
membres de la famille décédés antérieurement. Rien ne permet toutefois d’expliquer la
volonté de répartir les os de chacun des défunts dans plusieurs récipients…
11
Le programme s’est poursuivi par l’étude du monument XXXV dont l’épitaphe nous
apprend qu’il était destiné à une jeune femme du nom d’Erotis, morte à l’âge de 14 ans,
9 mois et 21 jours (fig. 5).
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Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
Fig. 5 - Cité du Vatican, Nécropole Santa Rosa. Mausolée XXXV, l’épitaphe d’Erotis.
Photographie H. Duday.
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Le petit mausolée a été ultérieurement ennoyé par un glissement de terrain et la fosse
d’une sépulture à crémation plus tardive a malencontreusement détruit une partie de la
voûte. Trois urnes étaient prises dans la maçonnerie et comme pour le mausolée XX, nous
avons initialement pensé que chacune était le réceptacle funéraire d’un individu. De fait,
une seule urne (XXXV-1) a livré des os et encore en quantité infime : à peine 5,5 g au
total ! Il s’agit de fragments diaphysaires qui ne sont guère favorables à une estimation de
l’âge au décès, encore moins à une détermination sexuelle. La minceur des corticales
osseuses permet seulement de dire qu’ils ne sont pas incompatibles avec un sujet gracile
et immature. Les deux autres urnes ne contenaient que des dépôts de mobilier (lampe,
balsamaires, fragments de cruches).
13
Comme pour Alcimus, on doit se demander où sont les restes d’Erotis. Un tube en
céramique d’assez fort calibre s’ouvre au centre de la chambre, il est possible qu’il
conduise également à une chambre souterraine.
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L’interprétation complète de ces deux ensembles ne pourra être tentée que lorsque le
compartiment « inférieur » des monuments (dont la présence est avérée pour le
mausolée XX, simplement supposée pour le mausolée XXXV) aura été fouillé. Quoi qu’il en
soit, il est acquis que la relation « une urne – un défunt » ne peut être retenue ici, alors
qu’elle se vérifie dans de nombreux ensemble funéraires et notamment pour la plupart
des tombes récemment étudiées à Pompéi.
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BIBLIOGRAPHIE
Liverani – Spinola 2006 = P. Liverani et G. Spinola, La Necropoli Vaticana lungo la Via Trionfale,
Rome, 2006, 116 p., 132 fig.
Van Andringa et al. 2013 = W. Van Andringa, H. Duday, S. Lepetz et alii, Mourir à Pompéi : fouille d’un
quartier funéraire de la nécropole romaine de Porta Nocera (2003-2007), Rome, 2013 (Collection de l’École
française de Rome, 468), 2 vol. , 1451 p.
NOTES
1. Liverani – Spinola 2006.
2. Les protocoles de fouille et d’étude des sépultures secondaires à crémation sont décrits de
manière détaillée dans l’ouvrage consacré à la nécropole de la Porta Nocera à Pompéi (Van
Andringa et al. 2013), p. 5-16.
3. Liverani – Spinola 2006, fig. 87.
INDEX
institutions École française de Rome, Musei Vaticani, Université de Bordeaux (UMR 5199),
Soprintendenza speciale per i Beni archeologici di Roma
Mots-clés : nécropole romaine, crémation, anthropologie, épitaphes
AUTEURS
HENRI DUDAY
Université Bordeaux 1, PACEA (UMR 5199) – henri.duday[at]u-bordeaux1.fr
CARLA CALDARINI
Service d'anthropologie, Soprintendenza speciale per i Beni archeologici di Roma
STEFANIA DI GIANNANTONIO
Service d'anthropologie, Soprintendenza speciale per i Beni archeologici di Roma
GIANDOMENICO SPINOLA
Musei Vaticani – aca.musei[at]scv.va
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Nécropole Santa Rosa (Rome, Cité du Vatican)
LEONARDO DI BLASI
Musei Vaticani – ac3.musei[at]scv.va
MONICA RICCIARDI
Archéologue
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