Vœu de pauvreté
Le vœu de pauvreté est une promesse solennelle et publique faite à Dieu de renonciation à la possession de biens matériels, en vue de se livrer plus entièrement à la recherche de Dieu et des biens spirituels qu’il peut accorder. Il est fortement lié au désir profond de mise en commun des biens économiques et culturels de la terre, entre tous les hommes et femmes.
Christianisme
modifierDans l'Église catholique
modifierDans l’Église catholique il prend la forme de se mettre à la suite du Christ (la sequela Christi) qui par choix personnel vécut dans le dénuement.
Ce voeu est inspirée de l’invitation de Jésus au jeune homme riche de renoncer à ses biens, suivi du « viens, et suis-moi » (Mt 19,17-21).
Il a été suivi par l'Église de Jérusalem tel que décrit dans le livre des Actes des Apôtres. Il y est mentionné que les chrétiens de Jérusalem vendaient leurs biens et mettaient leurs ressources en commun (Ac 2,45).
À partir du IVe siècle, avec les vœux de chasteté et d’obéissance, le vœu de pauvreté vint progressivement à caractériser l’engagement personnel et vital dans la vie religieuse. Plus tard l’Église catholique insistera pour que les instituts de vie religieuse obtiennent son approbation. Le vœu de pauvreté est l'un des trois vœux principaux que prononce un homme ou une femme qui, à la suite d'une période de probation (le noviciat), est admis dans un Ordre ou Congrégation religieuses[1]. Le texte du vœu prononcé en public est laissé à l’appréciation des instituts religieux particuliers. Ce qui permet de l’exprimer à l’intérieur d’un charisme religieux ou apostolique particulier.
Partage des biens
modifierLes pères conciliaires de Vatican II invitent et encouragent les congrégations religieuses à partager de leurs biens avec d'autres communautés plus pauvres, mais également avec « les indigents et les nécessiteux »[2],[C 1].
Selon l'Église catholique, il ne s’agit pas seulement de la mise en commun des biens économiques, mais aussi de services humanitaires, caritatif et éducatifs[C 2]. Les centres de secours lors des grandes famines au Moyen Âge en Europe étaient souvent des monastères. En France, la Trêve de Dieu, premier exercice de paix des armes imposée et organisée, est une initiative des moines clunisiens.
Promotion de la justice
modifierDepuis le concile Vatican II, l’idéal de partage des biens et attention aux personnes, articulé par le vœu religieux de pauvreté, s’ouvre de plus en plus à la dimension de la défense des droits de l'homme et promotion de la justice dans le monde[C 3],[C 4]. La pauvreté apostolique, permettant de se présenter « sans bagage ni ostentation » (le « ni or ni argent, ni besace » de Mt 10,9-10), permettrait de ne tenir personne à distance et d’entrer facilement en contact avec tout un chacun[3].
Simplicité de vie
modifierDans la culture et mentalité contemporaine la pauvreté est perçue comme un mal social ou économique. Cependant elle n'est pas à confondre avec l'indigence (le mal social et économique). Aussi le vœu de pauvreté est-il expliqué par des auteurs religieux contemporain comme un engagement à un style de vie radicalement simple[4],[5]. La pauvreté religieuse n’est pas une option pour l’indigence[6] ou la misère[C 3],[C 5]. Ce dépouillement permet une nouvelle relation avec la nature et les biens de la terre, ou (en langage théologique) un renouvellement du sens de communion à Dieu, au sein de sa Création[3].
Bouddhisme
modifierUn texte bouddhiste ancien dit :
« Celui qui dans sa sagesse a renoncé à tout avec joie, et qui demeure bienheureux dans une paix profonde, les dieux eux-mêmes l’envient, lui l’Éveillé, l’Inébranlable »
— Pierre Crepon (éd.), Les Fleurs de Bouddha : Une anthologie du bouddhisme[7].
Notes et références
modifier- Antoine-Henri de Bérault-Bercastel, « Histoire de l'église » (consulté le ) ; Ouvrage publié à Toulouse en 1809
- « Décret sur la rénovation et l'adaptation de la vie religieuse PERFECTAE CARITATE », sur Le Vatican, vatican.va (consulté le ), chapitre 13 : la pauvreté
- « Dans la pauvreté, il découvre les richesses de générosité, d’abnégation, de liberté intérieure lui permettant de se rendre dépendant de Celui qui, par amour, « bien que riche, s’est fait pauvre afin de nous enrichir de sa pauvreté » (2Co 8,9), et qui « s’est anéanti lui-même » (Ph 2,7) pour se mettre au service de ses frères et de ses sœurs. ... La pratique de la pauvreté évangélique est un acte d’espérance par lequel le Séculier reconnaissant ses limites personnelles, s’abandonne avec confiance à la bonté et à la fidélité de Dieu. » « Constitutions de l’Ordre Séculier », sur Le Carmel en France, carmel.asso.fr (consulté le ), paragraphe 14 : Vivre l’esprit du conseil évangélique de pauvreté
- Paul Lebeau, La Vie religieuse ; un chemin d’humanité, Namur, CDRR, Coll. Vie consacrée, 1992, p. 97 ss.
- « En réalité, avant même d'être un service des pauvres, la pauvreté évangélique est une valeur en soi, car elle évoque la première des Béatitudes par l'imitation du Christ pauvre. En effet, son sens primitif est de rendre témoignage à Dieu qui est la véritable richesse du cœur humain. C'est précisément pourquoi elle conteste avec force l'idolâtrie de Mammon, en se présentant comme un appel prophétique face à une société qui, dans de nombreuses parties du monde riche, risque de perdre le sens de la mesure et de la valeur même des choses. » Exhortation apostolique de Jean-Paul II, La vie consacrée et sa mission dans le monde, N°90.
- « La promesse de pauvreté est un appel à discerner le nécessaire du superflu, mais aussi à nous situer de manière juste vis-à-vis de toutes nos formes de richesse (intelligence, compétences, ...). C'est aussi un appel à prêter une attention particulière aux exclus et aux petits de ce monde, à tous ceux qui ont peu de moyens. » Cahier de formation de l'OCDS, Province Avignon-Aquitaine, France sud, 2012, Fiche A-2-1 Pauvreté, chasteté, obéissance, Page 33
- (textes choisis), Paris, Albin Michel, 1991, p. 84. D’autres textes pourraient être cités, provenant des écrits fondateurs d’autres traditions religieuses
« Catéchisme de l'Église Catholique », sur Vatican, vatican.va (consulté le ), p. 3e partie, 2e section, Chapitre 2, 7e commandement
- N°2403 et 2404 : « Le droit à la propriété privée, acquise ou reçue de manière juste, n’abolit pas la donation originelle de la terre à l’ensemble de l’humanité. La destination universelle des biens demeure primordiale, même si la promotion du bien commun exige le respect de la propriété privée, de son droit et de son exercice. » et « "L’homme, dans l’usage qu’il en fait, ne doit jamais tenir les choses qu’il possède légitimement comme n’appartenant qu’à lui, mais les regarder aussi comme communes : en ce sens qu’elles puissent profiter non seulement à lui, mais aux autres " (GS 69, § 1). La propriété d’un bien fait de son détenteur un administrateur de la Providence pour le faire fructifier et en communiquer les bienfaits à autrui, et d’abord à ses proches. »
- N°2461
- Numéro 2401 : « Le septième commandement défend de prendre ou de retenir le bien du prochain injustement et de faire du tort au prochain en ses biens de quelque manière que ce soit. Il prescrit la justice et la charité dans la gestion des biens terrestres et des fruits du travail des hommes. Il demande en vue du bien commun le respect de la destination universelle des biens et du droit de propriété privée. La vie chrétienne s’efforce d’ordonner à Dieu et à la charité fraternelle les biens de ce monde. »
- N°2407, 2409, 2411, 2412, 2424, 2434, 2439, 2451, 2466.
- N°2505 : « Les biens de production – matériels ou immatériels – comme des terres ou des usines, des compétences ou des arts, requièrent les soins de leurs possesseurs pour que leur fécondité profite au plus grand nombre. Les détenteurs des biens d’usage et de consommation doivent en user avec tempérance, réservant la meilleure part à l’hôte, au malade, au pauvre. »