Rumination (zoologie)
Les ruminants sont des mammifères herbivores qui ont un estomac pluriloculaire (subdivisé en plusieurs compartiments) leur permettant de régurgiter de la nourriture afin de la remastiquer, autrement dit de pratiquer la rumination ou mérycisme, première étape de leur digestion. Par ruminants, on comprend essentiellement les animaux du sous-ordre des Ruminantia (Ruminants, avec une majuscule), mais d'autres animaux ont également un estomac pluriloculaire (mammifères dits polygastriques, par opposition aux monogastriques)[1], et l'estomac de certains a une structure très particulière qui permet la régurgitation et la remastication du bol alimentaire (pseudoruminants (en) tels que les Camélidés). La rumination de ces derniers est associée à une fermentation stomacale, mais l'anatomie de leur système digestif diffère de celle des ruminants sensu stricto. La rumination est ainsi un exemple de convergence évolutive[2].
Processus
modifierLa rumination est un processus de mastication différée. Phénomène cyclique réflexe, il comprend plusieurs étapes : régurgitation d'un bol mérycique, remastication (permettant l'accroissement des surfaces d'attaque[3] par les micro-organismes — bactéries, champignons — du microbiote ruminal qui possèdent un vaste répertoire d'enzymes agissant en synergie pour dégrader les fibres végétales[4]) accompagnée d'une nouvelle insalivation des aliments (la salive assurant un fort pouvoir tampon de l'écosystème microbien ruminal), déglutition[5].
Les cycles de la rumination sont étroitement liés à la motilité du rumen et durent approximativement une minute[6].
Effet
modifierLa digestion des ruminants a pour effet d'émettre du méthane[7] un des gaz à effet de serre (GES). L'élevage des ruminants domestiques, qui sont plus de 3,5 milliards[8], répond aux besoins croissants de la consommation de viande, de lait, laine et cuir par l’espèce humaine[9]. L'agriculture représente aujourd'hui environ 20 % des émissions nationales de GES en France. 40 % des émissions agricoles sont sous forme de méthane, dont près des trois quarts sont liés à la fermentation entérique des ruminants, principalement les bovins en France[10].
Reste à savoir quelle proportion de ce méthane ne provient pas de la simple transformation de l'herbe locale mangée par ces bovins, à préciser la quantité de méthane produite par les animaux présentant une fermentation cæcale (comme les chevaux) ou plus généralement entérique (cochons, près de 8 milliards d'hommes).
Notes et références
modifier- « L'existence d'un estomac pluriloculaire est rencontrée dans de nombreux groupes de Mammifères (Cétacés, Siréniens, Hippopotamidés, Rhinocéridés, de nombreux Rongeurs, quelques Marsupiaux et même certains Primates) mais le nombre, la forme et la structure des compartiments varient beaucoup d'un groupe à l'autre ». Cf Gérard Fonty, Frédérique Chaucheyras-Durand, Les écosystèmes digestifs, Lavoisier, , p. 76.
- Gérard Fonty, Annick Bernalier-Donadille, Evelyne Forano, Pascale Mosoni, Consommation et digestion des végétaux, Quæ, , p. 52.
- Cette remastication permet de réduire la taille des aliments et de multiplier les surfaces d'échange par un facteur qui peut atteindre 106. Cf (en) James B. Russell, Richard E. Muck & Paul J. Weimer, « Quantitative analysis of cellulose degradation and growth of cellulolytic bacteria in the rumen », FEMS Microbiology Ecology, vol. 17, no 2, , p. 183 (DOI 10.1111/j.1574-6941.2008.00633.x).
- Terme qui inclut les polyosides pariétaux (celluloses, hémicelluloses, pectines, lignines) et des glucides de réserve (gommes et mucilages). Les herbivores ne codent pas d'enzymes de dégradation des polyosides pariétaux. Plusieurs familles de micro-champignons dans le rumen, telles que les Neocallimastigaceae, exercent une action hydrolytique (activité lignocellulolytique) et mécanique à l'égard des structures végétales, qu'ils fragilisent à l'aide de leurs rhizoïdes qui pénètrent à l'intérieur des tissus végétaux. « En déstructurant les parois végétales, ces organismes facilitent l'accès des enzymes fongiques et bactériennes aux composants et jouent ainsi un rôle primordial qui les fait qualifier d'organismes ingénieurs ». Cf Gérard Fonty, Annick Bernalier-Donadille, Evelyne Forano, Pascale Mosoni, Consommation et digestion des végétaux. Rôles des microbiotes et fonctions essentielles à la biodiversité, Quæ, , p. 128.
- (en) Dyfed Lewis, Digestive Physiology and Nutrition of the Ruminant, 1961, butterworths, p. 59.
- Lauralee Sherwood, Hillar Klandorf, Paul H. Yancey, Physiologie animale, De Boeck Supérieur, , p. 707.
- La production de méthane d’origine digestive chez les ruminants et son impact sur le réchauffement climatique, sur cairn.info, consulté le 17 janvier 2016
- (en) T. J. Hackmann et J. N. Spain, « Invited review: Ruminant ecology and evolution: Perspectives useful to ruminant livestock research and production », Journal of Dairy Science, vol. 93, no 4, , p. 1320–1334 (ISSN 0022-0302, PMID 20338409, DOI 10.3168/jds.2009-2071, lire en ligne, consulté le )
- Dans le monde à l'horizon 2030 : Une population croissante génèrera des besoins alimentaires croissants, sur pleinchamp.com du 29 septembre 2010, consulté le 17 janvier 2017
- Réduire par l'aliment les émissions de méthane, améliorer le rendement de production et le profil nutritionnel de la viande bovine, fiche ADEME
Articles connexes
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