Marie-Guillemine Benoist
Marie-Guillemine Benoist, née Marie-Guillemine Laville-Leroux le à Paris où elle est morte le , est une artiste peintre néoclassique française.
Naissance | |
---|---|
Décès |
(à 57 ans) Paris |
Période d'activité |
- |
Nom de naissance |
Marie-Guillemine Laville-Leroux |
Nationalité | |
Activité | |
Maître | |
Lieu de travail | |
Mouvement | |
Père | |
Fratrie | |
Conjoint | |
Enfants |
Prosper Désiré Benoist (d) Denis Benoist d'Azy |
Archives conservées par |
Archives nationales (161AQ/9) |
Biographie
modifierLe père de Marie-Guillemine de Laville-Leroux, René Delaville-Leroulx, est un fonctionnaire qui fut ministre des contributions en 1792[2]. Le , Marie-Guillemine de Laville-Leroux épouse Pierre-Vincent Benoist, banquier, dit Benoist d’Angers[3], dont elle eut trois enfants : Prosper Désiré Benoist, né le à Paris[4], Denys Aimé René Emmanuel Benoist, né le à Paris[5], et Augustine Benoist, née le à Versailles[6].
Formation
modifierMarie-Guillemine Benoist est formée par Élisabeth Vigée Le Brun à partir de 1781. En 1784, elle rencontre le poète Charles-Albert Demoustier, qui s’inspirera d’elle pour son personnage d’Émilie dans ses Lettres à Émilie sur la mythologie[7] (1801) ; cette même année, elle peint le portrait de son père, exposé au Salon de la jeunesse de 1784. Elle entre en 1786, comme sa sœur Marie-Élisabeth Laville-Leroux, à l’atelier de Jacques-Louis David[8], qui, sous l'empire, sera investi dans la fonction de « Premier peintre » par Napoléon Ier.
Une artiste peintre au tournant du XVIIIe siècle
modifierLe tableau L'Innocence entre le Vice et la Vertu, peint en 1790[9], sous le couvert d’un sujet mythologique reflète ses convictions féministes, le Vice y étant représenté sous les traits d’un homme alors qu’il l’est traditionnellement sous ceux d’une femme. Marie-Guillemine Benoist expose pour la première fois au Salon en 1791 un tableau inspiré de la mythologie Psyché faisant ses adieux à sa famille, réalisé à la même époque que le précédent.
Vers 1795, elle abandonne les sujets classiques pour la peinture de genre, après de rudes attaques[10] et se libère progressivement de l’influence de David. Elle continue sa carrière de peintre avec succès et expose au Salon de 1800 le Portrait présumé de Madeleine, qui assoit immédiatement sa réputation. Peint seulement six ans après l’abolition de l’esclavage, ce tableau est considéré comme son chef-d'œuvre et comme un manifeste de l’émancipation des esclaves[11] et du féminisme. Ce portrait, qui représenterait une domestique ramenée des îles par le beau-frère de l’artiste, sera acheté par Louis XVIII pour l’État français en 1818[12].
Marie-Guillemine Benoist remporte une médaille d’or au Salon de 1804 et obtient une pension du gouvernement. Elle ouvre à cette époque un studio réservé exclusivement aux femmes à qui elle enseigne la peinture. Elle reçoit une commission de Napoléon Bonaparte, alors Premier consul, pour réaliser son portrait à l’intention de la Ville de Gand et réalisera un portrait d’Élisa Bonaparte, sœur de l’empereur et duchesse de Lucques en 1805.
Au salon de 1806, elle expose deux tableaux, celui de Deux jeunes Enfans, avec un nid d'oiseau, et Le Sommeil de l'Enfance, et celui de la Vieillesse[13],[14]. Sous l'Empire, elle peint différents portraits pour la famille Bonaparte.
L'artiste a aussi eu quelques élèves de sexe féminin. Dans une lettre adressée à son conjoint du , elle rend compte des progrès réalisés par la fille de Félix Lepeletier[15] dans son atelier[16]. Alexandrine-Adélaïde Delon, qui expose au Salon de 1802 à 1812[17], s'affiche comme « élève de Mme Benoist » dans le livret du Salon de 1810[18].
À la Restauration, elle est priée de renoncer à exposer afin de ne pas nuire à la carrière de son époux, Pierre-Vincent Benoist, devenu conseiller d’État. Elle cède — « la pensée que je serais un obstacle à votre avancement dans votre carrière serait pour moi un coup bien acéré[19]. » — et cesse d’exposer ses tableaux en public[20],[21], alors qu’elle est au sommet de sa carrière, son mari occupant différents postes importants sous la Restauration.
Elle est enterrée au cimetière du Mont-Valérien (Suresnes) avec son époux et leur fille Augustine, épouse Cochin[22]. Les Benoist d’Azy sont leurs descendants directs.
Œuvres dans les collections publiques
modifier- Allemagne
- Karlsruhe, Staatliche Kunsthalle : Autoportrait copiant le Bélisaire et l’enfant à mi-corps de David, 1786[1].
- Belgique
- Gand, hôtel de ville : Bonaparte, Premier Consul, huile sur toile, 1804.
- États-Unis
- Cambridge, Fogg Art Museum, Harvard Art Museums : Portrait de Mademoiselle Carnot, vers 1800, miniature au crayon noir[23] ;
- New York, Metropolitan Museum of Art : Madame Philippe Panon Desbassayns de Richemont (Jeanne Eglé Mourgue) et son fils Eugène, 1802[24] ;
- San Diego, San Diego Museum of Art : Portrait d'une dame (autrefois considéré comme un portrait de Mme Tallien), attribution, peut-être le tableau présenté au salon de 1799[25] ;
- San Francisco, Fine Arts Museums of San Francisco : Les Adieux de Psyché à sa famille, 1791[26],[27]
- France
- Angers, musée des Beaux-Arts d'Angers :
- Bayeux, musée Baron Gérard : Portrait de Raphaël de Casabianca, 1807.
- Beaune, musée des beaux-arts : Madame Grassini (attribution), huile sur toile.
- Fontainebleau, château de Fontainebleau :
- Portrait de Pauline Bonaparte, duchesse de Guastalla, princesse Borghese, 1808 (dépôt du musée national des Châteaux de Versailles et de Trianon)[30] ;
- Portrait de Napoléone-Elisa Bacciochi, 1810 (dépôt du musée national des Châteaux de Versailles et de Trianon)[31].
- Louviers, musée municipal : La Lecture de la Bible, 1810.
- Paris
- musée du Louvre : Portrait d'une femme noire (titre alternatif : Portait présumé de Madeleine ; anciennement Portrait d'une négresse[32]), 1800, huile sur toile[33],[34].
- musée du Service de santé des armées (Val-de-Grâce)
- Portrait de Napoléon Bonaparte, huile sur toile, 1804 ou après[35]
- Portrait de Larrey
- Saintes, musée de l'Échevinage : La Consultation ou La Diseuse de bonne-aventure.
- Toulouse, musée des Augustins : Portrait du baron Larrey, Salon de 1804[36],[37];
- Italie
- Lucques, musée de la villa Guinigi : Portrait d'Élisa Bonaparte, grande duchesse de Toscane, vers 1805.
- Rome, Musée napoléonien : Portrait de Félix Baciocchi, 1806[38]
-
L'Innocence entre le Vice et la Vertu, 1790-1791, collection privée.
-
Portrait d'une dame (attribution, vers 1799), musée d'Art de San Diego.
-
Portrait de Madeleine (1800), Paris, musée du Louvre.
-
Portrait de Zoé Talon, comtesse du Cayla, 1801, collection privée.
-
Madame Philippe Panon Desbassayns de Richemont (Jeanne Eglé Mourgue, 1778–1855) et son fils Eugène (1800–1859), Salon de 1802, (New York, Metropolitan Museum of Art).
-
Une jeune fille portant deux pots de fleurs, Salon de 1802, collection privée.
-
Portrait du baron Larrey, Salon de 1804, musée des Augustins de Toulouse.
-
Portrait de Marie-Élise, grande duchesse de Toscane (vers 1805), musée de la villa Guinigi de Lucques.
-
Portrait de Félix Baciocchi, 1806 (Rome, Musée napoléonien).
-
Deux jeunes enfants avec un nid d'oiseaux (Salon de 1806), localisation inconnue. Portrait de ses deux fils Prosper et Denys Benoist d'Azy.
-
Le Sommeil de l'enfance et celui de la vieillesse, Salon de 1806.
-
Raphaël de Casabianca (1807), Bayeux, musée Baron Gérard.
-
La Lecture de la Bible ou les trois âges, 1810, Louviers, musée municipal.
-
Portrait de Napoleona Elisa Baciocchi (1806-1869) (1810), château de Fontainebleau.
-
La Diseuse de bonne aventure (1812), musée de l'Échevinage de Saintes.
Références
modifier- (de) « Selbstbildnis - Marie Guilhelmine Benoist (Anfang 1786) », notice de l'œuvre, sur Staatliche Kunsthalle Karlsruhe (consulté le ).
- À l’époque de la première retraite de Clavière, et lorsque Mourgue fut chargé par intérim de remplacer ce ministre des finances, le portefeuille en fut définitivement donné à Leroux de la Ville, qui le garda jusqu’au 10 août, date à laquelle il le rendit alors à Clavière (cf. Léonard Gallois, Dictionnaire historique de tous les ministres depuis la révolution jusqu'en 1827, Paris, Béchet, 1828, 502 p., p. 498).
- Archives de Paris, acte de mariage reconstitué, vues 9-11 / 42.
- « ARCHIVES PARIS », sur canadp-archivesenligne.paris.fr (consulté le ).
- « ARCHIVES PARIS », sur canadp-archivesenligne.paris.fr (consulté le ).
- « Visionneuse - Archives départementales des Yvelines », sur archives.yvelines.fr (consulté le ).
- Charles Albert Demoustier, Lettres à Émilie sur la mythologie : XVIIIe – XXIe siècle : 1760-1790, Paris, 1786-2002. (BNF 30322979), (Charle (1807) MAHB Musée d'art et d'histoire Baron Gérard - Bayeux.Albert Demoustier, notice de François-Joseph-Marie Fayolle, 1817), (BNF 30322989). L. Tenré, 1820, (BNF 35819455). L'ouvrage connaît des rééditions entre 1786 et 2002, (BNF 38832326).
- Société des études historiques, Journal. [Continued as] L'Investigateur, (lire en ligne).
- Lien archivé
- Kirstin Olsen, Chronology of women's history : -Xe-XXe siècle : 1650-1994, Paris, Greenwood Publishing Group, . (BNF 37475959).
- Inspiré par les œuvres de David, ce tableau est une étude du clair et du foncé : une femme noire — probablement rencontrée dans la maison de son beau-frère, officier de marine qui s'était marié à la Guadeloupe — portant un vêtement et un turban blanc, et placée sur un fond clair. Son portrait de Madame Philippe Desbassayns de Richemont (Salon de 1802) possède une même grâce dans la pose et les draperies. De tels portraits à la mode expliquent les nombreuses commandes napoléoniennes, dont le plus charmant exemple reste le Portrait en pied de la duchesse Napoleone Elisa, princesse de Piombino, avec son élégant costume. Dictionnaire de la SIEFAR, Vivian P. Cameron, traduction Sandrine Lely, « Benoist, Marie Guillemine [Le Roux de la Ville, La Ville, Le Roux] (1768-1826) », sur siefar.org, Siefar, (consulté le ).
- Marie-Guillemine Benoist.
- Le Pausanias français ; état des arts du dessin en France, à l'ouverture du XIXe siècle : Salon de 1806... publié par un observateur impartial, (lire en ligne).
- « Le sommeil de lenfance et celui de la vieillesse by Marie GuilhelmineBenoist », sur artnet.com (consulté le ).
- Fille naturelle de Félix Lepeletier et de Marie-Adélaïde Guénon, Felicité Émilie Guillemette Lepelletier de Saint-Fargeau (Paris, 1er avril 1791 - Paris 6e, 3 novembre 1861), épouse à Paris le 2 septembre 1815 Alexandre Gabriel Heim. Félix Lepeletier a commandé en 1807 à Marie-Guillemine Benoist son propre portrait et celui de son père, Michel-Étienne Le Peletier de Saint-Fargeau (1736-1778).
- Archives nationales de France, Fonds Benoist d'Azy, 161 AQ 9 (2), : « La fille de Pelletier est à l'atelier, elle m'étonne de progrès », cité par Reuter 2002, p. 94 et note 221. Aussi cité par Ballot 1914, p. 179.
- (en) « Delon, Alexandrine Adélaide », extrait de la notice dans le dictionnaire Bénézit , sur Oxford Art Online, (ISBN 9780199773787)
- « Mlle Delon », notice d'exposant, sur Salons et expositions de groupes, 1673-1914, Musée d’Orsay / Institut national d’histoire de l’art (consulté le ).
- Lettre à Pierre-Vincent Benoist du 1er octobre 1814, Archives nationales.
- (en) Jo Cochran, Donna Langston, Carolyn Woodward, Changing our power: an introduction to women studies, Dubuque, Kendall/Hunt, 1991, xxv, 414 p., (ISBN 978-0-84036-462-3), p. 392.
- (en) Frances Borzello, A world of our own : women as artists since the Renaissance, New York, Watson-Guptill, 2000, 224 p., (ISBN 978-0-82305-874-7), p. 110.
- Philippe Landru, « SURESNES (92) : cimetières anciens du Mont Valérien », landrucimetieres.fr, 20 septembre 2009.
- (en) Harvard, « Portrait of Mademoiselle Carnot », sur Harvard Art Museums’ collections (consulté le ).
- « Madame Philippe Panon Desbassayns de Richemont (Jeanne Eglé Mourgue, 1778–1855) and Her Son, Eugène (1800–1859) », notice de l'œuvre, sur Metropolitan Museum of Art (consulté le ).
- (en) « Portrait of a Lady », notice de l'œuvre, sur San Diego Museum of Art (consulté le ).
- (en) « Rare painting by groundbreaking French artist Marie-Guillemine Benoist acquired by the Fine Arts Museums of San Francisco », communiqué de presse, sur Fine Arts Museums of San Francisco, (consulté le ).
- (en-US) Sarah Cascone, « A Masterwork by the First Female History Painter to Show at a Paris Salon Is Headed to the Fine Arts Museums of San Francisco », sur Artnet News, (consulté le ).
- « Napoléon Ier », sur Musées d'Angers (consulté le ).
- « Autoportrait de Mme Benoist - Jeune femme portant une écharpe tricolore - Portrait d'une actrice - Miniature », sur Musées d'Angers (consulté le ).
- « Pauline Bonaparte, duchesse de Guastalla, princesse Borghese », notice de l'œuvre, sur Collections du château de Versailles (consulté le ).
- « Napoléone-Elisa Bacciochi », notice de l'œuvre, sur Collections du château de Versailles (consulté le ).
- « Portrait d'une femme noire », sur Collections - Musée du Louvre (consulté le ).
- Luce-Marie Albigès, « Portrait d'une négresse », sur Histoire par l'image, Réunion des musées nationaux en partenariat avec la Direction générale des patrimoines, (consulté le ).
- James Smalls, « Slavery is a Woman: "Race," Gender, and Visuality in Marie Benoist's Portrait d'une négresse (1800) », sur 19thc-artworldwide.org, Nineteenth-Century Art Worldwide, (consulté le ).
- Reuter 2002, no 38.
- « RO 339 Portrait du baron Larrey », sur Musée des Augustins (consulté le ).
- Oppenheimer 1996.
- (en) « Portrait of Felice Baciocchi - Marie-Guillemine Benoist », sur Google Arts & Culture (consulté le ).
Bibliographie
modifier- Marie-Juliette Ballot, Une élève de David. La Comtesse Benoist, l'Émilie de Demoustier, 1768-1826, Paris, Plon, (lire en ligne).
- Marie-Josèphe Bonnet, Liberté Égalité Exclusion, Femmes peintres en révolution- 1770-1804, Éditions Vendémiaire, 2012.
- François Champarnaud, « Madame Benoist, l'Emilie de Demoustier », Cahiers Roucher-André Chénier, vol. 17 « Poétesses et égéries de 1770 à 1830 », , p. 135-140 (ISSN 0290-5698).
- Marie-Claude Chaudonneret, Grove Art Online ((en) lire en ligne).
- Patrick Le Nouëne, « Pierre-Vincent Benoist et son épouse, Marie-Guillemine Laville-Leroulx, protecteurs de Pierre-Jean David (dit David d’Angers) », Archives d'Anjou : Mélanges d’histoire et d’archéologie angevine, Association des Amis des Archives d’Anjou, no 22, .
- Marianne Lévy, Marie-Guillemine Laville-Leroulx et les siens : une femme peintre de l'Ancien Régime à la Restauration (1768-1826), Paris, L'Harmattan, (ISBN 978-2-343-14056-8 et 2-343-14056-1, OCLC 1047524036).
- (de) Astrid Reuter, Marie-Guilhelmine Benoist : Gestaltungsräume einer Künstlerin um 1800, Berlin, Lukas, (ISBN 3-931836-86-X et 978-3-931836-86-3, OCLC 51654946).
- (en) Margaret A. Oppenheimer, « Three Newly Identified Paintings by Marie-Guillelmine Benoist », Metropolitan Museum Journal, vol. 31, , p. 143–150 (ISSN 0077-8958 et 2169-3072, DOI 10.2307/1512977, lire en ligne).
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierLiens externes
modifier- Analyse de l'œuvre Portrait d'une dame, sur la chaine YouTube du San Diego Museum of Art, par Lucy Eron
- Paris A. Spies-Gans, Marie-Guillemine Benoist, Revolutionary Painter, 18 décembre 2020
- Bases de données et dictionnaires
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- Ressource relative à la littérature :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :