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Le Colonel Chabert

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Le Colonel Chabert
Image illustrative de l’article Le Colonel Chabert
« Sur la table vermoulue, les Bulletins de la Grande Armée étaient ouverts et paraissaient être la lecture du colonel. »

Auteur Honoré de Balzac
Pays Drapeau de la France France
Genre Étude de mœurs
Éditeur Mame-Delaunay
Collection La Comédie humaine
Lieu de parution Paris
Date de parution 1832
Illustrateur Édouard Toudouze
Chronologie
Série Scènes de la vie privée

Le Colonel Chabert est un roman court d’Honoré de Balzac, paru d'abord en 1832, puis sous sa forme définitive en 1844[1].

Hyacinthe Chabert est un colonel de l'armée impériale de Napoléon Ier laissé pour mort à la bataille d'Eylau en 1807. Sa veuve Rose Chapotel hérite de sa fortune puis se remarie avec le comte Ferraud, aristocrate émigré qui ambitionne une carrière politique une fois la monarchie restaurée.

Or en 1817, dix ans après son supposé décès, Chabert réapparaît, révélant qu'il a survécu à la bataille. Par l'entremise d'un juriste, maître Derville, il réclame son dû, ce qui place la comtesse Ferraud face à un dilemme : accepter que soit rendue publique la résurrection de son premier mari, au risque de devoir renoncer à sa fortune, sa nouvelle famille et son nouveau rang, ou tout faire pour maintenir la chose secrète, sachant que le retour d'un ancien officier de l'Empire n'est guère bienvenu dans le climat politique de la Restauration.

Résumé détaillé

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L’histoire commence dans une étude d’avoué où des clercs font des plaisanteries pendant qu’ils travaillent. Arrive un vieil homme : tous se moquent de lui, car il porte des vêtements usés et très démodés. Le vieil homme demande à parler au patron de l'étude, maître Derville, mais les clercs l'informent que celui-ci ne reçoit ses clients qu’à minuit. En réponse à la question d'un saute-ruisseau, le vieil homme, avant de sortir, déclare être le colonel Chabert, mort à la bataille d’Eylau. Il revient le soir même et maître Derville lui accorde une entrevue. Le colonel Chabert raconte alors son histoire.

Hyacinthe Chabert, enfant trouvé, a gagné ses galons de colonel dans la Garde impériale en participant à l’expédition d’Égypte de Napoléon Ier. Il a épousé Rose Chapotel, une fille de joie, qu’il a installée dans un luxueux hôtel particulier. Pendant la bataille d'Eylau, en 1807, il a été blessé en participant à la charge monumentale donnée par Joachim Murat — et qui a forcé l’ennemi à la retraite —, puis déclaré mort. En réalité, enfoui sous un monceau de cadavres, il est resté en vie. Dix ans plus tard, ayant réussi à faire reconnaître son identité outre-Rhin, il est revenu après de longs détours à Paris, pour découvrir que Rose Chapotel, désormais « comtesse Ferraud », s'était remariée à un homme ambitieux dont elle avait deux enfants.

Rose avait liquidé tous les biens de son premier mari en minimisant sa succession ; en outre, la fortune du colonel devant être partagée entre sa femme, le fisc et les hospices de Paris, Napoléon avait rendu la part du fisc à Rose. C'est ce qui a permis à la jeune femme de commencer une nouvelle vie sous la Restauration et d'atteindre une position sociale élevée. En effet, c'est pour sa fortune que le comte Ferraud, de vieille noblesse, émigré pendant la Terreur puis rentré en France sans le sou en 1808, l'a épousée. Refusant de servir Napoléon, il a ensuite, au moment de la Restauration, retrouvé son rang et la pairie.

« — Ne me touchez pas ! s'écria le colonel. »

Malgré le caractère invraisemblable de son affaire, maître Derville accepte de s’occuper du « vieux carrick » (sobriquet donné à Chabert par les clercs de l’étude, du nom de l'ample redingote usagée qu'il porte).

Chabert voudrait retrouver sa femme, ses biens, son rang ; Rose Chapotel-Ferraud redoute de perdre son rang, l'énorme fortune qu'elle a tirée de la disparition de son premier mari, son nouveau mari, dont elle est d'ailleurs sincèrement éprise, et ses enfants. Elle n’a jamais répondu aux lettres de Chabert et, lorsqu'elle apprend qu'il est vivant, refuse de le reconnaître, l'accusant d'être un imposteur, jusqu'à ce qu'elle le rencontre dans l'étude de maître Derville.

« J’ai été enterré sous les morts ; mais, maintenant, je suis enterré sous des vivants, sous des actes, sous des faits, sous la société tout entière, qui veut me faire rentrer sous terre ! »

— Balzac, Le Colonel Chabert chapitre 1

L'avoué conseille à Chabert de ne pas saisir la justice et d’accepter une transaction, que le vieil homme est finalement disposé à accepter car la comtesse a su gagner sa confiance en le cajolant honteusement et en jouant même encore sur la séduction avec lui. Elle l'envoie chez elle avec son intendant, Delbecq, signer un acte où il reconnaîtrait être un intrigant. C'est alors que Chabert, surprenant une discussion entre Delbecq et Rose, se rend compte qu’il a été berné : il déclare à sa femme qu’il la méprise et qu'il renonce à lui réclamer quoi que ce soit.

Chabert disparaît pour se réfugier à l’hospice de Bicêtre, où il devient l’anonyme no 164. Le rencontrant quelques années après, détruit par la misère, Derville s’écrie : « Quelle destinée ! Sorti de l'hospice des "Enfants trouvés”, il revient mourir à l’hospice de la "Vieillesse”, après avoir, dans l’intervalle, aidé Napoléon à conquérir l’Égypte et l’Europe. » L'avoué a décidé de quitter Paris, horrifié par les turpitudes auxquelles conduisent l'argent et la cupidité.

Les personnages

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  • Hyacinthe Chabert : personnage principal, éponyme, colonel d'Empire officiellement mort à la bataille d'Eylau.
  • Rose Ferraud, née Chapotel : ancienne fille de joie, épouse du colonel Chabert, remariée au comte Ferraud après sa mort présumée.
  • Derville, avoué de Rose Ferraud qui n'en soutient pas moins le colonel Chabert, d'où son insistance à trouver un compromis entre les deux parties, plutôt qu'un procès.
  • Delbecq, ancien avoué ruiné, secrétaire du comte Ferraud, il assiste la comtesse dans ses affaires.
  • Simonnin, Godeschal : deux clercs de l'étude de Derville.
  • Boucard : maître clerc.
  • Le comte Ferraud : second mari de Rose Chapotel.

Autour du roman

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Histoire du texte

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En 1832, sous le titre La Transaction, une première version du texte, vraisemblablement écrite rapidement au fur et à mesure des livraisons, paraît en feuilleton dans la revue L'Artiste — numéros des 19 et 26 février puis des 5 et 12 mars[2].

En 1835, le récit est rebaptisé La Comtesse à deux maris, avant de trouver son titre définitif en 1844, lorsque son auteur le rattache aux Scènes de la vie parisienne de La Comédie humaine[3] et le dédie à son admiratrice Ida du Chasteler, qui a dessiné pour lui les blasons imaginaires des familles de sa saga[4].

Transféré en 1845 dans les Scènes de la vie privée[5], l'œuvre fait l'objet en 1847 d'une nouvelle publication en feuilleton dans le supplément littéraire du Constitutionnel.

Inspirations

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Balzac s'inspire d'histoires réelles de certains officiers de Napoléon Ier : prenant comme modèle pour Chabert le général Jean d'Hautpoul, mortellement blessé à Eylau, il exploite en même temps l'histoire de son parent Alphonse Henri d'Hautpoul, laissé pour mort à la bataille des Arapiles[6].

Le personnage de Hyacinthe Chabert lui-même ne sera à nouveau mentionné qu'une seule fois dans La Comédie humaine : dans La Rabouilleuse, où l'ancien lieutenant-colonel Philippe Bridau évoque la charge glorieuse du colonel Chabert à la bataille d'Eylau.

Il n'en va pas de même de l'avoué maître Derville, personnage récurrent de la saga balzacienne connu pour son honnêteté et son humanité[a]. S'il accepte ici d'aider judiciairement et financièrement Hyacinthe Chabert à retrouver son identité et ses droits, le fait qu'il soit en même temps l'avoué de sa femme explique qu'il conseille une transaction pour éviter un procès.

Adaptations

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Au théâtre

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À la télévision

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  • 1956 : Le Colonel Chabert (Oberst Chabert). République Fédérale allemande. Réalisation : Volker Von Collande.

Notes et références

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  1. Dans Gobseck il rétablit la fortune de Mme de Grandlieu, dans Le Père Goriot il aide les filles de celui-ci à sauver leurs fortunes, dans Splendeurs et misères des courtisanes il est l’exécuteur testamentaire de l'usurier Gobseck pour sa nièce Esther, etc.

Références

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  1. Stéphane Vachon, Le Colonel Chabert : « L'œuvre prend son titre définitif, la division en chapitres a disparu » (voir texte).
  2. Nadine Satiat, Introduction au Colonel Chabert, édition GF - Flammarion, 1992, p. 4-5.
  3. Nadine Satiat, Introduction au Colonel Chabert, édition GF - Flammarion, 1992, p. 25.
  4. Nadine Satiat, Notes du Colonel Chabert, édition GF - Flammarion, 1992, p. 207.
  5. Nadine Satiat, Introduction au Colonel Chabert, édition GF - Flammarion, 1992, p. 46-47.
  6. Jean-Paul Kauffmann, Outre-terre : Le voyage à Eylau, Des Equateurs, , 279 p. (ISBN 9782849904367, lire en ligne)

Bibliographie

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  • Max Andréoli, « Lecture et cinéma : à propos du film Le Colonel Chabert », L'Année balzacienne, 1996, no 17, p. 13-22.
  • Max Andréoli, « Littérature et cinéma : la troisième mort d’Hyacinthe Chabert », L’Année balzacienne, 1997, no 18, p. 325-357.
  • (pt) Silvana Vieira da Silva Amorim, « As Covas de Chabert », Itinerários, 1998, no 12, p. 365-372.
  • Anne-Marie Baron, « Balzac au cinéma : Le Colonel Chabert d’Yves Angelo », L’Année balzacienne, 1994, no 15, p. 512-514.
  • Patrick Berthier, « Folbert, Chabert, Falbert ? », L’Année balzacienne, 1987, no 8, p. 394-398.
  • (en) Peter Brooks, « Narrative Transaction and Transference (Unburying Le Colonel Chabert) », Novel, hiver 1982, no 15, vol. 2, p. 101-110.
  • Jacques Cardinal, « Balzac, le nom légal. Reconnaissance et représentation : Le Colonel Chabert, dans Aspects du nom propre. Balzac, Loti, Proust, Hermann Éditeurs, coll. « Savoir lettres », 2022, p. 11-90.
  • (en) R. C. Dale, « Le Colonel Chabert between Gothicism and Naturalism », L’Esprit créateur, printemps 1967, no 7, p. 11-16.
  • Jean-Louis Dega : « Réminiscences tarnaises dans Le colonel Chabert : Balzac et les Hautpoul », dans Revue du Tarn, no 155, automne 1994, p. 455-464.
  • Aude Déruelle commente Le Colonel Chabert, Gallimard, coll. « Foliothèque », 2007.
  • Isabelle Durand-Le Guern, « Trois romantiques face à l’histoire : Stendhal, Dumas, Balzac », Stendhal, Balzac, Dumas. Un récit romantique ?, Toulouse, PU du Mirail, 2006, p. 251-264.
  • Caroline Eades, « Le Colonel Chabert : récit romanesque et récits filmiques », L’Année balzacienne, 1995, no 16, p. 331-348.
  • Jacques-David Ebguy, « ‘‘Rien n’est complet que le malheur’’. (Im)puissance du malheureux dans trois récits balzaciens », Études françaises, vol. 58, no 2,‎ , p. 45-65 (lire en ligne).
  • (en) Alexander Fischler, « Fortune in Le Colonel Chabert », Studies in Romanticism, 1969, no 8, p. 65-77.
  • (en) Graham Good, « Le Colonel Chabert: A Masquerade with Documents », French Review, , no 42, vol. 6, p. 846-856.
  • (de) Joachim Küpper, Balzac und der Effet de Réel: Eine Untersuchung anhand der Textstufen des « Colonel Chabert » und des « Curé de village », Amsterdam, B.R. Grüner, 1986 (ISBN 978-90-6032-213-0).
  • J. H. Mazaheri, « La vision de la guerre dans Le Colonel Chabert », Romance Notes, printemps 2004, no 44, vol. 3, p. 317-325.
  • (en) Michael Lastinger, « The CAPital Letter: Balzac’s Le Colonel Chabert and the Names of a Rose », Nineteenth-Century French Studies, automne 2001-hiver 2002, no 30, vol. 1-2, p. 39-57.
  • (en) Alice J. Strange, « The Cinematic Survival of Balzac’s Colonel Chabert », Publications of the Missouri Philological Association, 1996, no 21, p. 32-37.
  • (en) Sandy Petrey, « The Reality of Representation: Between Marx and Balzac », Critical Inquiry, printemps 1988, no 14, vol. 3, p. 448-468.
  • Lè-Hòng Sâm, « Chabert, miroir possible de tous les temps et de tous les pays », Genèses du roman. Balzac et Sand, Amsterdam, Rodopi, 2004, p. 119-129.
  • (en) Eileen B. Sivert, « Who’s Who: Non-Characters in Le Colonel Chabert », French Forum, , no 13, vol. 2, p. 217-228.
  • (en) Edward C. Smith, « The “Case” of Honoré de Balzac’s Le Colonel Chabert: Vagrancy and National Amnesia as Depicted in Le Hénaff’s 1943 Film », III, The Image of the Hero in Literature, Media, and Society, Pueblo, Colorado State University, 2004, p. 32-35.
  • (en) Ginette Vincendeau, « Unsettling Memories », Sight and Sound, , no 5, vol. 7, p. 30-32.

Entrées liées

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