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Judit Reigl

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Judit Reigl
Judit Reigl dans son atelier de Marcoussis (février 2012).
Naissance
Décès
(à 97 ans)
MarcoussisVoir et modifier les données sur Wikidata
Période d'activité
Nom de naissance
Marianna Judith ReiglVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
Activités
Formation
Lieu de travail
Distinctions
Site web

Judit Reigl, née le à Kapuvár (Hongrie) et morte le à Marcoussis[1], est une artiste peintre française d'origine hongroise. Son parcours artistique, entre abstraction et figuration, est d'abord marquée par le surréalisme avant d'évoluer vers une approche personnelle qui fait une large part à la spontanéité et à la gestuelle.

Judit Reigl est née le 1er mai 1923 à Kapuvár, en Hongrie[2]. Elle est la fille de Antal Reigl et Julianna Kollar. À la mort de son père alors qu'elle a trois ans, sa mère s'installe à Budapest, puis se remarie et la famille s'installe alors à Szeged où Judit Reigl suit des cours d'art dans une école expérimentale[3].

Elle suit ensuite les cours de l'académie des beaux-arts de Budapest de 1941 à 1946 où elle est l'élève du peintre István Szőnyi. Bénéficiant d'une bourse d'études, elle quitte Budapest au mois de pour Rome où elle réside jusqu'en [4]. Elle y rencontre Betty Anderson qui sera sa compagne plus tard[3].

En 1950, lorsque le rideau de fer sépare la Hongrie de l'Europe occidentale, Judit Reigl essaie à huit reprises de quitter le pays et y parvient le [5]. Elle explique qu'en Hongrie, elle ne pouvait peindre que des portraits de dirigeants communistes et que sa fuite était nécessaire pour préserver sa liberté artistique[6]. Arrêtée en Autriche, dans la zone occupée par les Britanniques, elle est emprisonnée deux semaines dans un camp d'où elle s'enfuit. Après un voyage le plus souvent effectué à pied, en passant par Munich, Bruxelles et Lille, elle arrive à Paris le , où elle est accueillie par son compatriote Simon Hantaï, qui lui présente André Breton[5].

Elle rencontre ainsi le groupe surréaliste parisien en 1950. Ses premières œuvres montrent l'influence de ce mouvement. En 1954, sa première exposition est organisée à la galerie L'Étoile scellée. La préface du catalogue est écrite par André Breton, qui la reprendra dans l'édition de 1965 de son ouvrage Le Surréalisme et la peinture. En 1956, elle fait partie, avec Jean Degottex, Simon Hantaï et Claude Viseux, de l'exposition Tensions à la galerie René Drouin.

Judit Reigl, passionnée par l'écriture automatique, s'éloigne du surréalisme et se tourne vers l'abstraction lyrique et un art plus gestuel. Elle s'intéresse notamment au travail de Georges Mathieu. Elle privilégie alors la vitesse d’exécution et l’éclatement des formes. Elle peint en appliquant plusieurs couches de couleurs vives, saturées, souvent à mains nues[6],[7],[8].

De 1958 à 1965, elle développe la série des Guano, réutilisant des toiles ratées posées sur le parquet et sur lesquelles elle « [a] travaillé, marché, déversé de la matière picturale qui coulait, imbibait, s'écrasait sous [mes] pieds », faisant ainsi intervenir le « hasard objectif » cher à Breton[6].

En 1963, elle s'installe avec sa compagne Betty Anderson, à Marcoussis, près de Paris, dans un atelier qui lui permet de peindre de grands formats[8].

En 1966, elle commence la série figurative Homme, de torses humains en lévitation[8],[7]. Puis, à partir de 1973, influencée par la musique, elle aligne des taches de couleur sur différents fonds en marchant le long d'une toile non tendue, dans la série intitulée Déroulements[8],[6]. Dans cette série, comme dans la série suivante Entrée-Sortie (1986-1988), le procédé original entraîne une diffusion des couleurs à travers les fibres de la toile qui produit un effet moiré par transparence.

Elle produit de nouvelles séries chaque année et travaille près de six ans sur New York, 11 septembre 2001[3].

Toute sa vie, Judit Reigl explore de nouvelles techniques de peinture, ne faisant pas de distinction entre art figuratif et art abstrait. Pour elle, le processus physique de peindre, est aussi important que la technique. Son œuvre est une contribution importante à la peinture de la seconde moitié du XXe siècle[8],[5]. L'écrivain et critique d'art Marcelin Pleynet relève l'ambiguïté de genre entretenue par Judit Reigl. Sarah Wolf voit aussi un élément de genre dans la façon dont judit Reigl revisite la gestuelle macho de Jackson Pollock[3].

Elle réalise également des séries de dessins en 1958-1959, 1965-1966 et 2009-2010. Pour la première série qui porte le titre Présence, elle souffre de tendinite et se consacre pendant un an à des petits formats 21 x 27 cm sur papier à l'encre de Chine. Elle s'inspire des musiciens tels Bach, Luciano Berio, Mozart. Dans la troisième série, elle dessine des grands formats où le noir et le blanc ont une valeur égale. Elle réalise tel un musicien une partition rythmée de vide et de plein. Elle déploie à même le sol de son atelier de longs rouleaux de papier de 70 cm de large, sur une longueur de 7 à 10 m. Elle engage un combat avec tout son corps, une grande liberté de gestes. Son œuvre terminée, elle découpe la bande de papier pour cadrer les dessins réalisés[9].

Elle décède le 6 août 2020 à Marcoussis où elle s'est installée dès 1963[10].

Longtemps méconnue, son œuvre est redécouverte depuis 2005 et fait l'objet de plusieurs rétrospectives[6]. En 2023, la Neue Nationalgalerie à Berlin lui consacre sa première exposition individuelle muséale[11].

Décorations

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Ses œuvres sont conservées au Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou (Paris)[15],[16], au Museum of Modern Art (New York)[17], au Metropolitan Museum of Art (New York), à la Tate Modern (Londres), au musée d'art moderne de la ville de Paris[18], au musée des beaux-arts de Budapest.

Quelques œuvres

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  • Flambeau des noces chimiques, 1954[22]
  • Ils ont soif insatiable de l'infini[23], 1954, d'après une phrase de Lautréamont[24]
  • Lueurs de fièvre, 1954[25]
  • Centre de dominance, 1958, huile sur toile, 148 × 180 cm[26]
  • Guano, 1958-1965, série
  • Déroulements, 1973, série
    • Strette, de la série Déroulements, 1978, huile sur toile, signé et daté au dos, 195 × 300 cm, musée d'Évreux
  • Entrée-Sortie, 1986-88, série[27]
  • Déroulement, 1978, acrylique et huile sur toile, 195,5 x 200,5 cm, musée national des Beaux-Arts du Québec[28]
  • Espace entre deux mouvements, 1980, huile et glycérophtalique sur toile, 195,8 x 300,7 cm, musée national des Beaux-Arts du Québec[29]
  • Porta dolente, 1988, technique mixte sur toile, 220 × 195 cm[30]
  • Face à…, série, 1989, technique mixte sur toiles[30]

Expositions

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Notes et références

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  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. Cf. Brochure du musée des beaux-arts de Nantes pour l'exposition « Depuis 1950, le déroulement de la peinture », du 9 octobre 2010 au 2 janvier 2011.
  3. a b c d et e (en) Sarah Wilson, « Judit Reigl Obituary », The Guardian,‎ (lire en ligne)
  4. (en) Denise Birkhofer, Judit Reigl : Body of Music, Allen Memorial Art Museum, Oberlin College, , 176 p. (ISBN 978-0-692-57954-1)
  5. a b et c (en-US) « Judit Reigl », sur AWARE Women artists / Femmes artistes (consulté le )
  6. a b c d e et f Harry Bellet, « La peintre abstraite Judit Reigl est morte », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  7. a et b GAYA-La nouvelle agence, « Judit Reigl », sur www.mam.paris.fr, (consulté le )
  8. a b c d et e Judit Reigl: Kraftfelder, catalogue d'exposition, Neue Nationalgalerie, 2023
  9. Michel Bohbot, « L'écriture peinture de Judith Reigl », Art absolument, no 38,‎ .
  10. « Judith Reigl (1923 - 2020) », sur Le Journal Des Arts (consulté le )
  11. a et b (de) Felix Müller, « Judit Reigl in der Neuen Nationalgalerie », sur www.morgenpost.de, (consulté le )
  12. Arrêté du 10 février 2016 portant nomination et promotion dans l'ordre des Arts et des Lettres.
  13. « Nomination ou promotion dans l'ordre des Arts et des Lettres janvier 2011 »
  14. Décret du 15 novembre 2018 portant promotion et nomination.
  15. Voir sur le site du Centre Pompidou.
  16. Œuvres de Judit Reigl dans la collection du MNAM, site du Centre Pompidou.
  17. Voir sur le site du MoMA.
  18. Œuvres de Judit Reigl dans la collection du MAMVP
  19. (hu) « Reigl Judit festőművész átvette a Kossuth-díjat » sur kultura.hu.
  20. a b et c « Disparition de la peintre hongroise Judit Reigl », sur Connaissance des Arts, (consulté le )
  21. « Revue Art Absolument - Les expositions : prix AWARE 2018 », sur artabsolument.com (consulté le ).
  22. Cité dans Adam Biro et René Passeron, Dictionnaire général du surréalisme et de ses environs, Office du Livre, Fribourg, Suisse et Presses universitaires de France, Paris, 1982, p. 354.
  23. Voir sur andrebreton.fr.
  24. Cité dans Beaux arts magazine no 74, décembre 1989, p. 117.
  25. A. Biro et R. Passeron, op. cit., p. 354.
  26. Kalman Maklary fine arts, Budapest. Reproduction dans Connaissance des arts, no 707, p. 90.
  27. Cité dans Beaux arts magazine, no 74, décembre 1989, p. 116.
  28. « Déroulement | Collection musée national des Beaux-Arts du Québec », sur collections.mnbaq.org (consulté le ).
  29. « Espace entre deux mouvements | Collection musée national des Beaux-Arts du Québec », sur collections.mnbaq.org (consulté le ).
  30. a et b Reproduction dans Beaux arts magazine, no 74, décembre 1989, p. 116.
  31. Voir sur le site du musée de Nantes.
  32. Du au .

Bibliographie

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Ouvrage général

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Ouvrages consacrés à Judit Reigl

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Expositions, interviews, analyses et apparitions à la télévision.

Liens externes

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