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PLÉIADE

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PLÉIADE

La Pléiade offre le premier exemple de ce qui deviendra un phénomène spécifiquement français: l’émergence périodique d’une école littéraire qui, pour un temps, polarise les forces vives de l’intelligence et de la création. Comme les historiens du XIXe siècle raffolaient de ce genre de périodisation, on peut se demander si la Pléiade considérée en tant qu’école littéraire a existé ailleurs que dans l’imagination de ces classificateurs. Est-il bien sûr, après tout, que Pontus de Tyard, Baïf et Jodelle aient eu le sentiment d’appartenir à une école de pensée qui se nommerait la «Pléiade»? C’est douteux pour les deux premiers et certainement faux pour le troisième. Ronsard a bien parlé à plusieurs reprises de «nouvelle Pléiade», mais les listes de noms qui suivent ne coïncident jamais. Si l’on additionne les noms des élus, on trouve au total une quinzaine de personnalités très diverses, dont certaines ne se sont même pas rencontrées. Elles n’ont qu’une chose en commun: leur admiration pour Ronsard. Quand le maître les apostrophe en leur disant, avec sa modestie habituelle: «Vous êtes tous issus de la grandeur de moi», il ne fait qu’exprimer un sentiment commun, et c’est un fait que même les ralliés tardifs, même les renégats qui cracheront sur lui au moment des guerres de Religion, tous avoueront qu’ils lui doivent leur instrument verbal.

Du centre à la périphérie

Ce qui brouille les pistes, c’est le chiffre sept qui ne correspond qu’à un symbole. En regardant de près la structure et le fonctionnement de cette microsociété, on s’aperçoit qu’il existe en son centre un noyau dur, irréductible à tous les changements, et formé de ceux que Claude Binet, après la mort de Ronsard, désigne sous le nom d’«heureux triumvirat»: Ronsard, Baïf et Du Bellay. Ceux-là forment vraiment un groupe homogène. Ce sont des hommes de l’Ouest, originaires d’un territoire exigu, compris entre le Maine et la vallée du Loir. Ils ont tous les trois fait leurs études au collège Coqueret où ils ont été formés par Jean Daurat, et proviennent de la même classe sociale de petits hobereaux de province progressivement ruinés par une inflation qui commence à se faire sentir à partir des années 1540, et qui ne cessera de s’accélérer par la suite. Enfin, tous les trois ont choisi Paris pour point d’ancrage, même si l’exil romain a éloigné Du Bellay pendant quelques années.

Autour de ce noyau premier, on dénombre plusieurs cercles concentriques dont les rapports avec le centre sont de nature différente. Et d’abord le premier cercle, le collège Coqueret qui représente pour nos trois jeunes provinciaux un lieu d’inspiration et d’émulation grâce à l’extraordinaire pédagogue que sut être Daurat, dont la personnalité charismatique les a tous marqués. Il faut relire le témoignage étonnant qu’est Le Folâtrissime Voyage d’Arcueil pour se rendre compte de ce que pouvaient être à cette époque la familiarité avec le maître et l’incitation à l’improvisation poétique. Parmi les camarades de collège de l’heureux triumvirat, il y en a au moins un, Nicolas Denisot, qui restera quelques temps dans les eaux de la Pléiade. Mais il n’écrira que des poésies religieuses et se consacrera, finalement, à la peinture. D’autres, tels le gentilhomme breton René d’Urvoy, Claude de Lignerie, Berger de Montembeuf, et le médecin Des Mireurs, ne sont pas des écrivains mais resteront des camarades, des lecteurs et d’utiles relations.

J’appellerai le second cercle celui des compagnons de route de l’heureux triumvirat. S’ils jouèrent un rôle non négligeable pendant un certain temps, ils ne sont pas passés par le collège Coqueret, ils ont dû quitter Paris et renoncer pour différentes raisons à la création littéraire. Le premier de ces compagnons est Peletier du Mans, dont l’influence a été véritablement séminale. Secrétaire de René du Bellay, évêque de Mans, il a écrit, quatre ans avant la Deffence et illustration , un premier manifeste: la Préface de son édition française de l’Art poétique d’Horace, publiée en 1545. C’est lui qui a convaincu Ronsard et Du Bellay de la nécessité de faire revivre en français les genres antiques tels que l’ode, l’épître, l’élégie, la satire, la comédie, la tragédie. De sept ans plus âgé que le jeune Ronsard, Peletier du Mans semble s’être montré un parfait agent de liaison. Après avoir été principal du collège de Bayeux, il décida d’aller en province de ville en ville, et se spécialisa dans la publication de livres de vulgarisation mathématique. Marc-Antoine Muret a été, lui aussi, un compagnon de route pour un temps. Humaniste érudit, il a beaucoup fraternisé avec la brigade du Coqueret avant de poursuivre en province, puis à Rome, une vie entièrement consacrée à l’enseignement. Dans Les Îles Fortunées , Ronsard embarque Muret dans la nef imaginaire qui les conduira tous dans le monde de l’âge d’or. Faut-il le compter pour autant parmi les membres de la Pléiade?

Quant à Jodelle, les travaux d’Énéas Balmas ont montré que ses liens avec la Pléiade étaient presque inexistants. Certes il a suivi les directives de Peletier du Mans en écrivant la première tragédie en langue française, certes Ronsard lui a fait, au vu du succès des premières représentations, des avances qui ne semblent pas avoir été payées de retour. Mais il n’a subi ni la fascination de Daurat ni celle de Ronsard, et quand les malheurs s’abattront sur lui, il restera «the odd man out». Sa tragédie n’a pour nous qu’une importance historique, ses sonnets, par contre, sont d’un grand poète injustement sous-estimé, mais ils ont aussi peu de rapport avec ceux de la Pléiade que les poésies de John Donne avec les sonnets de Shakespeare.

Après le cercle des compagnons de route, vient celui des ralliés . Ce sont des tard-venus, provinciaux situés dans la mouvance de l’école lyonnaise, et qui subirent l’influence de Maurice Scève et du néoplatonisme italien. S’ils ont d’abord éprouvé un mouvement de recul devant les déclarations fracassantes de la Deffence et illustration , Pontus de Tyard et son jeune cousin Guillaume Des Autels n’hésiteront plus, après de courtes années de réflexion, à voler au secours de la victoire. La contribution personnelle de Pontus est de grande importance: il précise le rôle de vulgarisateur du néoplatonisme italien qu’avait déjà affirmé au début du siècle Symphorien Champier, et cela non seulement par des écrits théoriques tels que ses deux Solitaires , mais par des recueils de sonnets tels que les Erreurs amoureuses (1549) qui ont frayé la route à Du Bellay, grand admirateur dans sa jeunesse de ce pétrarquisme quintessencié. Quant à Guillaume Des Autels, son apport est moins important. Mais il se liera de plus en plus étroitement avec Ronsard après 1560, au moment de la mobilisation des forces morales catholiques contre les huguenots.

Passons maintenant au quatrième et dernier cercle, le cercle des disciples. La plupart d’entre eux n’ont que cinq ou dix ans de moins que Ronsard, mais ce court intervalle a suffi pour leur épargner le moment d’hésitation qui a suivi la publication de la Deffence . Rémy Belleau va même devenir l’ami de cœur et le confident de Ronsard, et son apport est loin d’être négligeable puisqu’il a introduit Anacréon et la poésie légère dans un cénacle qu’on aurait pu croire peu disposé à les recevoir. D’autres charmants poètes suivent, eux aussi, le sillage de l’heureux triumvirat: Olivier de Magny, compagnon d’exil de Du Bellay en Italie et auteur d’un beau recueil de sonnets romains, très injustement méconnu. Quant à Maclou de La Haye, Tahureau, La Péruse qui promettaient beaucoup, ils sont morts trop jeunes (28 et 25 ans pour les deux derniers) pour avoir pu donner leur mesure.

Une poétique commune

Si hétérogène que soit ce groupe d’une quinzaine de personnes, il n’en garde pas moins une certaine unité. Elle est due à l’adhésion, tantôt explicite tantôt implicite, à un projet commun que Peletier du Mans, Du Bellay, Pontus de Tyard et Ronsard ont essayé de définir.

Le premier article de foi réside en la croyance qu’une nouvelle littérature française est possible: très différente de l’ancienne, elle ferait revivre en français le ton et les genres littéraires de l’Antiquité, auxquels on ajouterait le sonnet à qui Pétrarque, père commun de tous les humanistes, avait conféré un cachet de classicisme. Ce culte inconditionnel de formes littéraires mortes depuis longtemps, joint à l’excommunication du passé culturel français, n’a pas été sans résistance, et aujourd’hui encore il n’est pas interprété comme il le devrait. On a trop perdu contact avec les penseurs de la Renaissance pour garder présent à l’esprit leur postulat touchant à l’éternité des formes qui, pour des esprits imprégnés de néoplatonisme italien, ne faisait pas de doute. Bembo, l’un des Italiens les plus admirés par Ronsard, précisait cette croyance dans une lettre adressée à Pic de la Mirandole : «De même qu’il y a en Dieu une certaine forme divine de la justice, de la tempérance et des autres vertus, il s’y trouve aussi une certaine forme divine du style accompli, un modèle absolument parfait qu’avaient en vue, autant qu’ils le pouvaient par la pensée, Xénophon, Démosthène, Platon surtout et Cicéron quand ils composaient les uns et les autres. À cette image conçue dans leur esprit ils rapportaient leur génie et leur style. J’estime que nous devons faire comme eux: tâcher de nous rapprocher de notre mieux et le plus près possible de cette image de la Beauté.» Nous voilà bien loin de l’interprétation scolaire de la théorie de l’imitation. Imiter les Anciens, pour les hommes de la Pléiade, ne consiste pas à les répéter, mais à s’appuyer sur eux pour retrouver des formes éternelles qu’ils avaient été les premiers à entrevoir.

Second article du projet: la création d’une langue poétique spécifique, aussi différente de la langue parlée courante que le latin humaniste pouvait l’être de celui des hommes d’Église et des juristes. Là encore il faut se reporter aux présupposés humanistes sur le langage pour comprendre cette position. Pour Budé comme pour Valla, la pensée n’existe pas en dehors du langage. En conséquence, aucune pensée correcte ne peut se faire jour à travers une langue infirme et polluée. Pour eux, un philosophe ne peut véritablement penser avec ces instruments dégradés que sont les langues populaires: il lui faut un latin raffiné, nettoyé de ses impuretés, et qui permette de continuer le travail de Cicéron qui voulait enrichir sa langue en transvasant dans le latin l’essentiel du génie de la langue grecque.

Pour un poète, le problème se pose de façon différente, mais les présupposés demeurent les mêmes. Puisque les poètes contemporains ne parviendront pas à égaler les Anciens dans leurs langues, autant faire comme les Italiens Dante et Pétrarque, c’est-à-dire créer une langue poétique française à l’écart des «mots de la tribu», et capable de médiatiser l’inspiration poétique. Un tel travail ne se fera pas en un jour. Car la découverte des «formes éternelles» à travers les textes anciens représente le travail d’une vie et, précise Du Bellay dans La Deffence , d’une vie d’ascète: «Qui veut voler par les mains et bouches des hommes doit longuement demeurer en sa chambre, et qui désire vivre en la mémoire de la postérité doit comme mort en soi-même suer et trembler mainte-fois, et autant que nos poëtes courtisans boivent, mangent et dorment à leur aise, endurer de faim, de soif et de longues vigiles.»

Ce programme de vie et de travail pourrait laisser croire que l’écrivain de la Pléiade, tout à la création d’une langue orientée vers la fonctionnalité poétique et non vers la communication des idées, va perdre contact avec l’univers de la prose. Or il n’en est rien, et pour comprendre ce paradoxe il faut, ici encore, se reporter à un autre postulat des penseurs de la Renaissance. Pour eux la poétique est l’une des branches de la rhétorique, le parallèle entre le poète et l’orateur étant l’un des lieux communs de l’époque. La poétique est donc une «seconde rhétorique», et Peletier du Mans les différencie par un cadrage temporel: l’orateur ne dispose que d’un temps limité et d’un sujet limité lui aussi, alors que le poète a l’éternité devant lui, un auditoire échappant aux prévisions; de plus, il atteint l’essence des choses et non les accidents. L’un relève du court terme et l’autre du long terme, mais l’un et l’autre communiquent avec des mots et doivent tenir compte des lois éternelles de la rhétorique, qui ne sont autres que les lois naturelles du langage qui gouvernent la pensée. C’est ce qui conduit Peletier du Mans à faire la part de la Nature et celle de l’art de la façon suivante: «Il faut donc que le poète soit imitateur de la Nature et qu’il ait ses saisons. Son étude sera son hiver, son invention sera son printemps, la composition son été, sa réputation son automne, et chacun toute l’année. Ainsi Nature sera diffusée par tout son ouvrage, et l’Art mêlé par toute sa Nature.»

Pour Peletier comme pour Du Bellay, l’hiver du poète est nécessairement long et pénible, et cette insistance sur le métier aurait peut-être fait basculer la Pléiade dans le camp des rhétoriqueurs si une autre composante de la doctrine commune n’avait rétabli l’équilibre, à savoir la place donnée à l’inspiration et à la théorie des «fureurs ». Horace avait déjà familiarisé ses lecteurs avec le mythe d’Orphée poète et prophète, prêtre, interprète et civilisateur. Mais la lecture d’Ion et de Phèdre dans la version de Marsile Ficin, les essais de Symphorien Champier et de Pontus de Tyard vont permettre d’insérer la notion d’inspiration poétique dans ce qui manquait le plus aux jeunes gens de la Brigade: un cadre de référence philosophique. Ce n’est pas le hasard qui a fait paraître le Solitaire premier la même année que l’Ode à Michel de L’Hospital , chantre de la fureur poétique. Mais Pontus de Tyard situe dans un ensemble hiérarchisé les quatre fureurs: la fureur poétique calmée par les Muses est au niveau terrestre et sous le signe de la Nature; elle peut amener à la fureur bacchique, révélatrice des mystères religieux et sous le signe de l’Opinion, qui conduit à son tour à la fureur apollinienne, maîtresse de la divination et sous le signe de la Raison intellectuelle. Au sommet de tout, on trouve la fureur vénusienne (il s’agit ici de la Vénus céleste, distinguée de l’ordinaire Vénus terrestre), placée sous le signe de l’entendement angélique, et seule capable de conférer la vision directe du Vrai. On trouvera, éparses dans l’œuvre de Ronsard, des allusions répétées à cette étrange mythologie qui se présente comme un système de représentation typique de la Renaissance.

Cette clé universelle que leur donnaient les différents modes de la pensée analogique, les hommes de la Pléiade, à commencer par leur maître à penser Daurat, n’ont pas craint de l’appliquer à l’herméneutique. Quand on examine de près leur lecture des textes antiques, on y trouve côte à côte la symbolique néoplatonicienne et l’interprétation médiévale des textes bibliques avec sa distinction des trois niveaux: littéral, moral et mystique. Le témoignage d’un des anciens élèves du collège Coqueret, Guillaume Cantor, permet de reconstituer l’interprétation de L’Odyssée par Daurat. Au-delà de l’histoire troyenne, il voyait le mythe de la quête de la Sagesse (représentée par Ithaque et Pénélope). Après des épreuves initiatiques, marquées par la disparition successive des compagnons de route, Ulysse meurt (son sommeil, lors de son arrivée chez les Phéaciens et à Ithaque, symbolise cette mort). Entre les deux sommeils, les rites funéraires marquent son entrée dans la vie éternelle enfin conquise. L’Odyssée est ainsi convertie en mythe chrétien. Vue à la lumière de cette lanterne magique, l’Antiquité devenait une prodigieuse caverne gorgée des trésors de la sagesse humaine.

Une nouvelle idée de la littérature

Avec la Pléiade, un nouveau type de littérature est né, une littérature de lettrés sans contact avec le peuple et ne désirant que rester entre eux, quitte à élargir leur public par la communication du savoir et des lumières. Car, dès ce moment, la métaphore des lumières est utilisée, en opposition avec les ténèbres de l’ignorance. Il ne peut plus s’agir de s’abaisser au niveau du public, mais de hausser le public jusqu’à soi. La Pléiade va donc donner le premier exemple d’une littérature d’avant-garde. Là encore, on retrouve l’image chez Ronsard, dans sa Préface de 1560 qui parle de «s’acheminer par un sentier inconnu», et surtout chez Baïf, dans son Épître à Charles IX qui évoque le «nouveau sentier», le «passage inconnu» que les jeunes explorateurs ont ouvert à travers un paysage de friches, «tout de halliers et de buissons couvert».

Comme la plupart des avant-gardes qui lui succéderont au cours des siècles suivants, la Pléiade ne sera pas suivie par une grande armée. Si l’on veut s’en tenir aux métaphores militaires, celle de patrouille de reconnaissance serait moins infidèle. Encore ne faut-il pas sous-estimer les efforts des hommes de la Pléiade pour hausser jusqu’à leur niveau un plus large auditoire. Le supplément musical de 1552 avait déjà fait des Amours de Ronsard un chansonnier, comme l’avait été, vingt ans plus tôt, l’Adolescence clémentine de Marot; et la réédition de 1553 est augmentée d’un commentaire de Muret qui élucide les difficultés de lecture, les allusions mythologiques, les références italiennes. Pour le moindre gentilhomme sans lettres, sachant tout juste lire et écrire, Muret faisait ainsi de la lecture des Amours une initiation sans larmes à l’univers mental de la culture nouvelle. Pontus de Tyard, de son côté, faisait œuvre de vulgarisateur philosophique et scientifique dans ses Solitaires (1552 et 1555), ses Curieux et L’Univers, ou Discours des parties et de la nature du monde (1557).

Ajoutons qu’à partir du moment où le complot d’Amboise (1560) met au grand jour la transformation du parti huguenot en armée clandestine encadrée par des princes de sang candidats au pouvoir, l’union sacrée contre l’ennemi commun se réalise entre gallicans et ultramontains jusqu’alors adversaires. C’est Ronsard, assisté par le Lyonnais Guillaume des Autels, qui prendra en main les relations publiques de la nouvelle coalition. Il va devenir le porte-parole du pouvoir aux prises avec la guerre civile tandis que Baïf, comme l’a montré Frances Yates, s’efforce de faire de son Académie de musique et de poésie une école de cadres de jeunes nobles. Il faudra l’action conjuguée du Parlement et de l’Université pour saborder l’entreprise, en dépit du soutien royal.

Plus on suit de près la courbe de carrière des complices de Ronsard, plus s’efface le stéréotype de la Pléiade-tour d’ivoire. Les métaphores d’exploration, de guerre, de conquête que ces poètes affectionnaient pour exprimer leur action traduisent une réalité d’autant plus importante qu’elle n’est pas immédiatement perceptible. Ces intellectuels remuants à l’affût de la gloire et de l’influence, et pas seulement de prébendes, qui ont joué des rôles et laissé des traces, annoncent une phénomène qui marquera désormais la vie française: la présence d’un pouvoir intellectuel.

pléiade [ plejad ] n. f.
pliades plur. 1230; gr. pleias, ados « constellation de sept étoiles »
1Astron. (avec la majuscule) Chacune des six étoiles visibles à l'œil nu (les Anciens en comptaient sept) qui forment un groupe dans la constellation du Taureau. « les sept feux des Pléiades, dont notre père nous avait fait apprendre par cœur les noms » (Le Clézio).
La Pléiade : le groupe des Pléiades.
2(1556) Hist. littér. Nom donné à sept poètes anciens d'Alexandrie, qui vivaient au IIIe s. av. J.-C.
Groupe de sept grands poètes français de la Renaissance (d'ab. appelés au XVIe s. la Brigade). Ronsard, du Bellay, grands poètes de la Pléiade.
3(1867) Groupe de personnes jugées remarquables. « Une pléiade de compositeurs » (Gautier). « Toute une pléiade de jeunes hommes » (Benda).

pléiade nom féminin (de Pléiade, nom propre) Grand nombre de personnes, généralement remarquables : Maître entouré d'une pléiade de disciples.pléiade (difficultés) nom féminin (de Pléiade, nom propre) Orthographe Pas de tréma sur le i ; avec ou sans majuscule initiale, selon le sens. 1. La Pléiade = groupe d'étoiles de la constellation du Taureau (les Anciens, par tradition, en comptaient sept) appelé aujourd'hui les Pléiades par les astronomes (amas d'environ 3000 étoiles). Avec une majuscule. 2. La Pléiade = groupe de sept poètes grecs d'Alexandrie ; groupe de sept poètes français de la Renaissance. Avec une majuscule. 3. Une pléiade = un grand nombre (de personnes remarquables). Une pléiade de hauts fonctionnaires est sortie de cette école. Avec une minuscule. Remarque Cet emploi était naguère critiqué comme non conforme à l'étymologie qui voudrait qu'une pléiade ne compte qu'un petit nombre de membres (sept, en toute rigueur). Il est aujourd'hui passé dans l'usage. ● pléiade (synonymes) nom féminin (de Pléiade, nom propre) Grand nombre de personnes, généralement remarquables
Synonymes :
- aréopage
- flopée (familier)
- ribambelle (familier)
- tas
- tripotée

pléiade
n. f.
d1./d Les Pléiades: dans la myth. gr., les sept filles d'Atlas et de Pléioné, métamorphosées en étoiles.
d2./d ASTRO Les Pléiades: groupe de sept étoiles dans la constellation du Taureau.
d3./d LITTER La Pléiade: groupe de sept poètes grecs d'Alexandrie (IIIe s. av. J.-C.).
Groupe de sept poètes français de la Renaissance qui réunissait, autour de Ronsard et de J. du Bellay, J. Peletier, puis, à sa mort, Dorat, J.A. de Baïf, Pontus de Tyard, é. Jodelle, R. Belleau.
d4./d Groupe de personnes illustres ou remarquables. Une pléiade de vedettes.

⇒PLÉIADE, subst. fém.
A.ASTRON. Chacune des sept étoiles qui constitue un groupe de la constellation du Taureau. C'était à l'équinoxe du printems que les hyperboréens (...) fêtaient le retour du soleil au signe de l'agneau, et ils prolongeaient ces fêtes jusqu'au lever des pléiades (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p.361). Hésiode chante les pléiades dirigeant les travaux de l'année (FLAMMARION, Astron. pop., 1880, p.719):
♦ D'un geste de tête, il me montra au firmament une constellation clignotante. —Les pléiades, —murmurai-je à Morhange, lui désignant les sept pâles étoiles...
BENOIT, Atlant., 1919, p.112.
Empl. subst. fém. sing. à valeur de coll. Le groupe des Pléiades. La Pléiade céleste (Ac. 1798-1935).
B.P. anal., HIST. LITTÉR. (le plus souvent avec une majuscule)
1. Groupe de sept poètes d'Alexandrie qui vivaient au IIIes. avant Jésus-Christ. M. Becq de Fouqières fréquenta (...) Homère et Virgile, les élégiaques latins, la pléiade alexandrine (A. FRANCE, Vie littér., 1888, p.304).
2. Groupe de sept poètes français du XVI (comprenant Ronsard, Du Bellay, Baïf, Belleau, Jodelle, Pontus du Tyard et Pelletier du Mans remplacé à sa mort par Dorat). Enthousiasme désordonné, qui me faisait passer tout d'un coup, d'un sonnet de la Pléïade à un conte de Voltaire ou à un chapitre de Michelet (LACRETELLE, Silbermann, 1922, p.73).
C. —Groupe de personnes considérées généralement comme illustres ou remarquables. Cette arme d'avant-garde [les hussards] (...) qui (...) a déjà sa pléiade nouvelle, les Murat, les Kellermann (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundi, t.11, 1868, p.253). Il serait utile de connaître les détails du mode de vie (...) du milieu intellectuel, moral, esthétique et religieux des époques qui ont immédiatement précédé l'apparition des pléiades de grands hommes (CARREL, L'Homme, 1935, p.58).
P. ext. Un groupe nombreux de. La levée de boucliers de toute une pléiade de jeunes hommes, qui se disaient relever de la vie de l'esprit (BENDA, Trahis. clercs, 1927, p.65).
D. MÉD. Pléiade ganglionnaire. ,,Goupe de ganglions augmentés de volume`` (GARNIER-DEL. 1972).
Prononc. et Orth.:[plejad]. Ac. 1694 et 1718: pleiades ,,on dit aussi quelquefois au singulier, La Pleiade celeste``; 1740: pléiades (même rem. que 1694 et 1718); 1762: pléïades (même rem. que 1694 et 1718); 1798-1878: pléiades (même rem. que 1694 et 1718); 1935: pléiade. LITTRÉ: au plur.; ROB., Lar. Lang. fr.:au sing. Souvent avec majuscule pour le terme d'astron. (Ac., ROB.). Étymol. et Hist. 1. Déb. XIIIes. astron. pliades (La Petite philos., éd. W. H. Trethewey, 2409), forme encore att. en 1486 (CORBICHON ds GDF. Compl.); 1547 Pleiades (J. MARTIN, Architecture de Vitruve, F10 ro); 2. 1563 (FLORENT CHRESTIEN, Sonnet ds RONSARD, OEuvres, éd. P. Laumonier, t.12, p.20, 376); 1566 (ESTIENNE, Apol. Herod., ch. 6 —I, 110 —ds HUG., s.v. pleiadizer: contrepéter le language de messieurs les poëtes de la Pleïade); 1845-46 (BESCH.: Pléiade. Nom donné, par allusion aux sept étoiles de ce nom, à un groupe ou à une réunion de sept personnes célèbres); 1853 «groupe» (ARAGO ds GUÉRIN 1892); 1878 anat. (Lar. 19e Suppl.: Pléiade ganglionnaire, Assemblage de glandes ou de ganglions lymphatiques). Empr. au lat. Pleiades, Pliades, -um dénom. d'une constellation de sept étoiles, du nom des sept filles d'Atlas et de Pléioné, gr. , «id.» empl. ensuite au sing. pour désigner cette constellation et le groupe des sept grands poètes alexandrins. Au sens 2, le terme, empl. d'abord métaphoriquement par Ronsard (1556, Elegie ds OEuvres, éd. P. Laumonier, t.8, p.354, 46) a été répandu par les poètes huguenots ennemis de Ronsard (v. P. LAUMONIER ds Introd. du t.12 des OEuvres de Ronsard, pp.V-VI), alors que Ronsard, pour qualifier ce groupe de poètes, utilise brigade (1556, Elegie, ibid., 45), v. aussi P. LAUMONIER, Vie de P. de Ronsard de Claude Binet, thèse, pp.219-225. Fréq. abs. littér.:138.

pléiade [plejad] n. f.
ÉTYM. 1230, Pliades, astron., au plur.; grpleias, -ados, nom mythologique des filles d'Atlas, appelées aussi Atlantides (Atlandide, 2.), sœurs atlantiques (III.).
1 Astron. (Avec la majuscule). Chacune des six étoiles (les Anciens en comptaient sept) qui forment un groupe dans la constellation du Taureau. || Le lever, le coucher des Pléiades.Myth. || Les Pléiades, nom des sept filles d'Atlas et de Pléione, qui furent métamorphosées en étoiles.
1 D'autres étoiles se montrent, les brillantes Pléiades, serrées comme un essaim d'abeilles (…)
Alain, Propos, 6 oct. 1909, Les marmottes.
(Collectif). || La Pléiade : le groupe des Pléiades.
2 (1556). Hist. littér. Nom donné à sept poètes anciens d'Alexandrie qui vivaient à la même époque (IIIe siècle av. J.-C.).
Groupe de sept grands poètes français de la Renaissance : Ronsard, Du Bellay, Baïf, Belleau, Jodelle, Dorat, Pontus de Tyard. Brigade (vx).
2 Il me souvient d'avoir autrefois accomparé (comparé) sept poètes de mon temps à la splendeur des sept étoiles de la Pléiade, comme autrefois on avait fait des sept excellents poètes grecs qui fleurissaient presque d'un même temps.
Ronsard, Œuvres en prose, Épître au lecteur, 1564.
3 L'effort poétique de la France était grand et divers, mais aberrant; les hommes de la Pléiade l'ont relié à la tradition des civilisations méditerranéennes. Ils l'ont ramené dans l'obédience d'une discipline magnifique.
G. Duhamel, Refuges de la lecture, VIII.
3 (1867). Groupe de personnes (généralement remarquables). Aréopage. || Une pléiade de compositeurs (→ Grouper, cit. 4). || Toute une pléiade de jeunes hommes (→ Exclusif, cit. 8).
4 Cette noble pléiade historique qui, de 1820 à 1830, jette un si grand éclat, MM. de Barante, Guizot, Mignet, Thiers, Augustin Thierry, envisagea l'histoire par des points de vue spéciaux et divers.
Michelet, Hist. de France, Préface de 1869.
Par ext. (Littér.). Groupe important. || « L'horrible visite d'une pléiade de chenilles grises » (Loti, in G. L. L. F.).

Encyclopédie Universelle. 2012.

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  • Pléiade — [plā yȧd′] n. 〚Fr: see PLEIADES the〛 1. a group of seven French poets of the 16th cent. who favored the use of classical forms 2. a small group, usually seven, of brilliant persons: also pleiad or PLEIAD …   Universalium

  • Pléiade —    Pléiade is the name given in literary history to the groups of seven poets who were considered poetic constellations, by allusion to the seven sons of Atlas (the Pleiades). This designation was applied for the first time to the seven great… …   France. A reference guide from Renaissance to the Present

  • plêiade — s. f. 1. Grupo ou reunião de homens célebres pelo talento. 2. Cada uma das estrelas da constelação das Plêiades. • plêiades s. f. pl. 3. Sete Estrelo (constelação). [Nas duas últimas acepções, grafa se com inicial maiúscula.] • Sinônimo geral:… …   Dicionário da Língua Portuguesa

  • Pléiade — [plā yȧd′] n. [Fr: see PLEIADES the] 1. a group of seven French poets of the 16th cent. who favored the use of classical forms 2. a small group, usually seven, of brilliant persons: also pleiad or PLEIAD …   English World dictionary

  • Pléiade — La Pléiade (ursprünglich La Brigade) war eine Gruppe von sieben französischen Dichtern des 16. Jahrhunderts, die sich um Pierre de Ronsard bildete. Sie nannten sich nach einer Gruppe von sieben hellenistischen Dichtern aus dem Alexandria des 3.… …   Deutsch Wikipedia

  • Pléiade — Cette page d’homonymie répertorie les différents sujets et articles partageant un même nom. Pléiade Pléiade tragique, liste fixée dans le Canon alexandrin : Alexandre l Étolien, Philiscos de Corcyre, Sosithée, Homère le Jeune, Éantide,… …   Wikipédia en Français

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