C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
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Ce document : 2000 IIJCan 3 (QC T.D.P.)
Référence : C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval, 2000 IIJCan 3 (QC T.D.P.)
Date : 2000-08-02
Greffe : 200-53-000013-982
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE QUÉBEC
TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE
Dossier : 200-53-000013-982
SOUS LA PRÉSIDENCE DE :
L'HONORABLE MICHÈLE RIVET
AVEC L'ASSISTANCE DES ASSESSEURS
Me Diane Demers
Me François LeComte
DATE : 20000802
COMMISSION DES DROITS DE LA PERSONNE ET DES DROITS DE LA JEUNESSE
agissant en faveur de MONIQUE RHÉAUME ET AUTRES
Représenté par Me Béatrice Vizkelety
Partie demanderesse
c.
UNIVERSITÉ LAVAL
Représentée par Me Me Bruno Lepage et Me Anne-Marie Laflamme
Beauvais, Truchon et associés
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Parties défenderesses
et
SYNDICAT DES EMPLOYÉES ET EMPLOYÉS DE L'UNIVERSITÉ LAVAL
Représentée par Me Johanne Dumont
Syndicat canadien de la fonction publique
Partie intéressée
Audience tenue à Québec, les 6, 7, 8, 14, 15, et 16 décembre 1999.
Jugement
1. Les faits tels que mis en preuve
1.1 L'opération équité salariale
1.1.1 La première phase de l'opération d'équité
salariale
1.1.2 La convention collective de 1991
1.2 La situation en 1996
1.2.1 L'évaluation des fonctions, l'établissement
des classes et la classification des fonctions
1.2.2 La comparaison salariale des fonctions selon
le sexe
1.2.3 L'établissement des taux de salaire et des
modes de rémunération
1.2.4 La négociation de l'entente du 10 juillet 1996
1.2.5 Les effets et conséquences de l'entente du 10
juillet 1996
2. Le droit applicable
2.1 Le droit international
2.1.1 Le principe d'un salaire égal pour un travail
égal
2.1.1.1 La Convention concernant l'égalité de
rémunérationentre la main-d'oeuvre masculine et la maind'oeuvreféminine pour un travail de valeur égale
2.1.1.2 La Recommandation no 90 sur l'égalité
derémunération
Paragraphe
1
26
27
27
38
56
56
65
71
83
93
109
111
112
117
123
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Le principe d'un salaire égal pour un travail
équivalent
2.1.2.1 La Convention concernant la
discrimination (emploi et profession)
2.1.2.2 Le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels
2.1.2.3 La Déclaration sur l'élimination de toutes
les formes de Discrimination à l'égard des femmes
2.2 Le droit interne
2.2.1 L'objectif poursuivi par le législateur:
l'éradication de toute forme de discrimination
2.2.2 Le droit à l'égalité dans l'établissement de
catégories ou de classifications d'emploi
2.2.2.1 Les catégories d'emploi
2.2.2.2 Les classifications d'emploi
2.2.3 Le droit à un traitement ou à un salaire égal
pour un travail équivalent
2.2.4 Les dommages moraux
3. L'application du droit aux faits
3.1 Les expertises
3.2 La classification et l'évaluation des emplois: la
conformité de la démarche
3.3 La comparaison salariale et le mode de
rémunération: la discrimination exercée par l'Université
Laval
3.4 Les dommages moraux
4. Le dispositif
128
128
131
133
142
143
158
164
169
179
212
226
228
258
273
299
308
JUGEMENT
[1]
Le Tribunal des droits de la personne (ci-après Le Tribunal) est saisi d'une
demande présentée par la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse (ci-après la Commission) à l'effet que suite à l'implantation d'un système
d'équité salariale reconnaissant que le travail effectué par les employés du Groupe
Bureau est équivalent au travail effectué par les employées du Groupe Métiers et
services, l'Université Laval (ci-après l'Université), a appliqué, avec l'accord du Syndicat
des employées et employés de l'Université Laval (ci-après le Syndicat), un système de
rémunération comportant des effets discriminatoires fondés sur le sexe à l'égard du
Groupe Bureau. Plus précisément, alors que les employés du Groupe Bureau, à
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prédominance féminine, payés suivant une structure salariale à échelons, ont été
intégrés à l'échelon dont le salaire est immédiatement supérieur à celui obtenu avant le
1er décembre 1995, les employés du Groupe Métiers et services, à prédominance
masculine, bénéficient d'une structure salariale à taux unique et reçoivent
automatiquement le maximum de l'échelle salariale.
[2]
La Commission prétend que ce système de rémunération, qui a pour effet de
maintenir un écart salarial entre le Groupe Métiers et services, à prédominance
masculine, et le Groupe Bureau, à prédominance féminine, malgré un travail équivalent,
compromet le droit des employés du Groupe Bureau à la reconnaissance et à l'exercice
en pleine égalité de leur droit à la non-discrimination notamment dans les conditions de
travail et la rémunération sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur le sexe,
contrairement aux articles 10, 16 et 19 de la Charte des droits et libertés de la personne
(L.R.Q., c. C-12) (ci-après la Charte).
[3]
Dans sa demande introductive d'instance initiale, signifiée le 24 novembre 1998,
la Commission requérait les conclusions suivantes:
ORDONNER à la partie défenderesse et à la partie intéressée de CESSER
d'utiliser le système de rémunération comportant des effets discriminatoires à
l'égard des employé(e)s du Groupe Bureau;
ORDONNER à l'université défenderesse de CORRIGER rétroactivement au
1er décembre 1995 le préjudice subi par les personnes concernées, dans le
Groupe Bureau, en raison de l'application du système de rémunération
discriminatoire et, plus particulièrement, de VERSER aux employées et
employés plaignant(e)s du Groupe Bureau un montant global de 928 426 $
(neuf cent vingt-huit mille quatre cent vingt-six dollars) sauf à parfaire, réparti
comme suit: (suivent 67 noms).
[4]
Le 26 novembre 1999, la Commission signifiait une requête pour amendement à
la demande introductive d'instance puisque depuis le dépôt de sa demande d'autres
employées indique-t-elle, faisant partie du Groupe Bureau, se sont adressées à la
Commission se disant avoir été affectées.
La Commission demande donc les conclusions suivantes1:
ORDONNER à la partie défenderesse et à la partie intéressée de CESSER
d'utiliser le système de rémunération comportant des effets discriminatoires à
l'égard des employé(e)s du Groupe Bureau;
ORDONNER à l'Université défenderesse de CORRIGER rétroactivement au
1er décembre 1995 le préjudice subi par les personnes concernées, dans le
Groupe Bureau, en raison de l'application du système de rémunération
discriminatoire et, plus spécifiquement :
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de RECONNAÎTRE rétroactivement aux personnes dont les noms paraissent à
l'annexe 1, tous les droits, avantages et privilèges, présents et futurs, auxquels
elles auraient eu droit n'eut été l'application du système de rémunération
discriminatoire;
de VERSER aux personnes dont les noms paraissent à l'annexe 1, les
sommes pour compenser les pertes subies depuis le 1er décembre 1995 en
raison de l'application du système de rémunération discriminatoire, auxquelles
elles auraient eu droit si l'Université défenderesse avait à cette date appliqué
aux membres du Groupe Bureau la structure salariale à taux unique, qu'elle a
appliquée aux employés du Groupe Métiers et services.
ORDONNER à l'Université défenderesse de verser aux employé(e)s du
Groupe Bureau ayant porté plainte, et dont le nom paraît à l'annexe 1(A), des
dommages moraux au montant de 10 000 $ chacun pour insulte, humiliation,
atteinte à la dignité et à son droit à la reconnaissance et à l'exercice de ses
droits fondamentaux en toute égalité, sans discrimination fondée sur le sexe.
LE TOUT avec intérêts depuis la signification de la proposition des mesures de
redressement, soit le 11 novembre 1998, au taux fixé suivant l'article 28 de la
Loi sur le ministère du Revenu (L.R.Q. c. M-31), tel que le permet l'article 1619
C.C.Q. et les dépens.
[5]
Sont déposées en Annexe 1 de cette demande introductive deux listes de
personnes, une liste A comprenant 67 noms déjà produite lors de la demande
introductive d'instance originaire et une liste B, comprenant 71 nouveaux noms.
[6]
Le 6 décembre 1999, lors de la première journée d'audience, la Commission
dépose une requête pour réamender sa demande introductive d'instance afin de
préciser le contenu de l'ordonnance pour la cessation de l'acte reproché et afin de
préciser et mettre à jour les montants de base réclamés pour pertes salariales jusqu'au
1er novembre 1999 et enfin, pour préciser les ajustements demandés à ces montants y
compris les ajustements relatifs aux pertes salariales que les membres du Groupe
Bureau continueront à subir après le 1er novembre 1999 jusqu'à la date du jugement.
Enfin, les conclusions recherchées sont les suivantes2:
ORDONNER à la partie défenderesse et à la partie intéressée de CESSER
d'utiliser le système de rémunération comportant des effets discriminatoires à
l'égard des employé(e)s du Groupe Bureau en appliquant aux employé(e)s du
Groupe Bureau la même structure de rémunération, à taux unique, que celle
appliquée aux employées du Groupe Métiers et services faisant un travail
équivalent dans les classes 2 à 10.
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ORDONNER à l'Université défenderesse et à la partie intéressée de
RECONNAÎTRE qu'en ce qui concerne les fonctions du Groupe Bureau,
devant ainsi être payées à taux unique comme les fonctions du Groupe Métiers
et services, c'est le dernier échelon de l'échelle de classification appropriée qui
est considéré comme étant l'échelon correspondant à ce taux unique;
ORDONNER à l'université défenderesse de CORRIGER rétroactivement au
1er décembre 1995 le préjudice subi par les personnes concernées, dans le
Groupe Bureau, en raison de l'application du système de rémunération
discriminatoire et, plus spécifiquement:
DE RECONNAÎTRE rétroactivement aux personnes dont les noms paraissent
à l'annexe 1, tous les droits, avantages et privilèges, présents et futurs,
auxquels elles auraient eu droit n'eut été l'application du système de
rémunération discriminatoire;
DE VERSER aux personnes dont les noms paraissent à l'annexe 1, les
sommes pour compenser les pertes subies depuis le 1er décembre 1995 en
raison de l'application du système de rémunération discriminatoire, auxquelles
elles auraient eu droit si l'université défenderesse avait à cette date appliquée
aux membres du Groupe Bureau la structure salariale à taux unique, qu'elle a
appliquée aux employés du Groupe Métiers et services et ce, suivant les
montants paraissant aux annexes 2 et 3.
DE VERSER en plus, aux personnes dont les noms apparaissent à l'annexe 1,
les montants appropriés pour tenir compte du temps supplémentaire travaillé
depuis le 1er décembre 1995, des avancements d'échelon en cours d'année,
de soldes de banques de congés de maladie payés, des primes d'affectation
temporaire, de toute promotion obtenue depuis cette date dans une fonction du
Groupe Bureau et des augmentations salariales du 1er juin1998 et du 1er juin
1999, et
DE VERSER aux personnes dont les noms apparaissent à l'annexe 1, suivant
ces mêmes bases de calculs, les sommes additionnelles pour compenser les
pertes salariales subies depuis le 1er novembre 1999 jusqu'à la date du
présent jugement.
ORDONNER à l'Université défenderesse de verser aux employé(e)s du
Groupe Bureau ayant porté plainte, et dont le nom paraît à l'annexe 1(A), des
dommages moraux au montant de 10 000 $ chacun pour insulte, humiliation,
atteinte à la dignité et à son droit à la reconnaissance et à l'exercice de ses
droits fondamentaux en toute égalité, sans discrimination fondée sur le sexe.
LE TOUT avec intérêts depuis la signification de la proposition des mesures de
redressement, soit le 11 novembre 1998, au taux fixé suivant l'article 28 de la
Loi sur le ministère du Revenu (L.R.Q. c. M-31), tel que le permet l'article 1619
C.C.Q. et les dépens.
[7]
Pour sa part l'Université conteste l'ensemble des conclusions recherchées par la
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Commission. De plus l'Université appelle en garantie le Syndicat des employés de
l'Université (SCFP local 2500 FTQ CTC) et demande au Tribunal que si tant est qu'il
accueille les prétentions de la Commission, que le Syndicat soit condamné à part égale
avec l'Université.
[8]
Lors du procès les procureurs ont déposé, d'un commun accord, les Pièces P
14A et P 14 B qui détaillent les sommes dues jusqu'au 31 octobre 1999 aux plaignantes
et aux victimes, au chapitre des dommages matériels, dans l'éventualité ou le Tribunal
en arriverait à la conclusion qu'il y a discrimination.
[9]
Avant de regarder les faits tels que mis en preuve, disposons d'abord des
demandes d'amendement.
[10]
Les amendements demandés par la Commission visent donc, d'une part, à
ajouter d'autres employées faisant partie du Groupe Bureau qui se sont adressées à la
Commission se disant avoir été affectées par le système de rémunération faisant l'objet
du litige. Les amendements visent aussi d'autre part à préciser les mesures de
redressement requises ainsi que certains calculs salariaux.
[11]
Les amendements demandés par la Commission sont-ils recevables?
[12]
C'est à l'automne 1996 qu'une plainte est déposée à la Commission par 67
personnes, 63 femmes et 4 hommes, à l'effet que l'entente portant sur l'opération
d'équité salariale conclue en juillet 1996 est discriminatoire à l'endroit des employés du
Groupe Bureau.
[13]
La lecture du dossier nous indique que suite à cette enquête, la Commission a
adopté une résolution recommandant les mesures de redressement à l'Université et au
Syndicat avec les conclusions suivantes qu'il convient ici de citer.
(...)
DE RECONNAÎTRE que le système de rémunération appliqué au Groupe
Bureau comporte discrimination fondée sur les articles 10 16 et 19 de la Charte;
DE S'ENGAGER à modifier le système de rémunération appliqué au Groupe
Bureau pour le rendre conforme à celui du Groupe Métiers et services, payé
selon un système de rémunération à taux unique.
(...)
DE CORRIGER rétroactivement au mois de décembre 1995 le préjudice subi
par les personnes concernées, dans le Groupe Bureau, en raison de
l'application du système de rémunération discriminatoire et, plus
particulièrement,
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DE VERSER aux employées et employés du groupe plaignant
un montant global de
940 262 $ (neuf cent quarante mille deux cent soixante-deux dollars) sauf à
parfaire, réparti comme suit: (suit les noms et montants réclamés pour chacune
de ces personnes3.
[14]
Par la suite, d'autres personnes, toujours du Groupe Bureau sur lequel la
Commission a fait enquête, se sont jointes à la demande introductive d'instance
déposée le 18 novembre 1999.
[15]
Lors de l'audience, la Commission, l'Université et le Syndicat ont étudié les deux
listes de personnes, soit celle de la demande initiale produite originalement sous 1-A, et
celle des personnes qui demandent à être ajoutées à la demande soit la liste 1-B et ont
produit les admissions suivantes:
Les plaintes des personnes dont le nom apparaît à l'annexe 1(B) ont été
reçues le ou vers le 20 janvier 1999 ou au plus tard en mai 1999, à l'exception
des personnes suivantes: Louis Baril, Hélène Delisle, Lyne Girard, Michel
Raymond, Diane Robert. Pour ces personnes, les parties conviennent que la
date du consentement, soit le 3 novembre 1999, tient lieu de date de réception
de la plainte. Toutes les plaintes ont fait l'objet de consentement à l'exception
de celles de: Gaston Quirion et Monique Côté; Les parties admettent
également que la plainte de Huguette Côté a été reçue le ou vers le 20 janvier.
[16]
Afin de disposer de la question de la recevabilité des amendements, il faut tout
d'abord dire que la Commission avait le pouvoir de faire enquête sur cette situation de
discrimination salariale et ce avec l'entrée en vigueur de la Loi sur l'équité salariale.
Cette loi prévoit à son article 128 les mesures transitoires suivantes:
Les plaintes pendantes à la Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse relatives à la violation de l'article 19 de la Charte des
droits et libertés de la personne pour le motif de discrimination salariale fondée
sur le sexe avant le 21 novembre 1997 sont étudiées et réglées conformément
aux dispositions alors applicables de cette Charte;
[17]
Au 21 novembre 1997 était donc pendante devant la Commission, la plainte
alléguant que le système de rémunération appliqué au Groupe Bureau de l'Université
comporte une discrimination fondée sur les articles 10, 16 et 19 de la Charte.
[18]
C'est sur cette « situation » de discrimination pour le Groupe Bureau qu'a
enquêté la Commission et elle avait compétence pour ce faire4.
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[19]
La Commission, comme sa résolution en témoigne, a donc enquêté sur la
rémunération de l'ensemble des personnes du Groupe Bureau. C'était là la plainte
pendante lors de l'entrée en vigueur de la Loi sur l'équité salariale.
[20]
Une fois indiqué que le groupe de personnes qui se sont jointes à la plainte
initiale sont couvertes par l'article 128 de la Loi sur l'équité salariale, reste à déterminer
s'il s'agit d'un amendement que le Tribunal peut recevoir.
[21]
L'article 113 de la Charte énonce que le Tribunal peut rendre les décisions et
ordonnances de procédure et de pratique nécessaires à l'exercice de ses fonctions.
[22]
Toutefois, comme les règles édictées5 ne font aucune mention d'amendement, il
convient de regarder ici les règles applicables telles qu'énoncées par le Code de
procédure civile.
[23]
Il est de jurisprudence constante que l'amendement doit être permis à moins
qu'il ne soit contraire aux intérêts de la justice et qu'il n'en résulte, comme le dit l'article
203 du Code de procédure civile, « une demande entièrement nouvelle n'ayant aucun
rapport avec la demande originaire » .
[24]
La règle consiste donc à permettre les amendements et l'exception à les
refuser. La Cour d'appel a d'ailleurs déjà indiqué que l'article 203 du Code de procédure
civile doit être interprété de façon large et libérale6.
[25]
Nous concluons donc ici que les amendements à ce stade sont recevables et
qu'il conviendra d'en disposer au fond. En effet, l'ajout de parties à la demande ne
modifie en rien la nature de l'action et n'en fait d'aucune manière une demande
entièrement nouvelle n'ayant aucun rapport avec la demande originaire au contraire,
l'ajout de la partie demanderesse ne change pas la nature de la preuve à faire sur la
situation de discrimination qui aurait découlé du système d'équité salariale implanté à
l'été 1996.
1.
Les faits tels que mis en preuve
[26]
Le vaste exercice d'équité salariale à l'Université s'est déroulé en deux phases
distinctes. La première phase couvre la période 1991-1995 alors que la seconde phase
s'échelonne principalement de la fin de l'année 1995 à la première moitié de l'année
1996. L'objet du présent litige porte principalement sur les résultats de la deuxième et
dernière phase consignée dans l'entente du 10 juillet 1996. Pour une meilleure
compréhension, il est nécessaire de relater les faits qui se sont déroulés entre 1991 et
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1995.
1.1
L'opération équité salariale et ses résultats
1.1.1
La première phase de l'opération équité salariale
[27]
La première phase de l'opération équité salariale débute le 26 février 1991, au
moment où l'Université et le Syndicat signent une lettre d'entente dans le but de corriger
les iniquités salariales eu égard au sexe et de franchir les diverses étapes conduisant à
l'implantation et au maintien par la suite de l'équité salariale (Pièce P-2). En vertu de
cette entente, un comité conjoint composé de représentants des deux parties est mis
sur pied.
[28]
Le mandat du comité porte tant sur les fonctions visant la réalisation des
objectifs que sur les engagements nécessaires pour y parvenir. Il prévoit l'analyse et
l'adaptation, le cas échéant, du plan d'évaluation sans égard au sexe élaboré
conjointement par la FTQ, le Conseil du trésor et ses partenaires (ci-après Plan
d'évaluation à 16 facteurs); l'identification d'un échantillonnage des fonctions
nécessaires à la validation de ce plan; la cueillette des données résultant de la
description des fonctions actuelles et des questionnaires d'analyse de fonction;
l'analyse des résultats; l'identification et l'évaluation de fonctions repères dans l'unité de
négociation puis l'évaluation de l'ensemble des fonctions.
[29]
L'entente comporte également au chapitre des dispositions générales un
engagement à l'effet suivant:
Aucune personne salariée au moment de l'implantation de l'équité salariale ne
subira ni de baisse ni de gel de salaire à cause de cette implantation.
Cependant, cette disposition n'est pas applicable aux personnes salariées
embauchées à l'Université après la date d'implantation de l'équité salariale.
(Pièce P-2; p. 185)
[30]
Parallèlement aux travaux de ce comité conjoint local, l'Université et le Syndicat
décident, en 1992, de se joindre à une table universitaire intersectorielle visant à
examiner la question de l'équité salariale au sein du personnel de bureau, du personnel
de métiers et services et du personnel technique représentés par le Syndicat canadien
de la fonction publique (ci-après le SCFP). Cette table sectorielle regroupe une
douzaine d'universités ou constituantes universitaires qui, pour l'essentiel, comprennent
des groupes d'emplois similaires.
[31]
Selon les témoignages de madame Parent, adjointe à la direction des
ressources humaines de Laval, et de madame Jones, conseillère en évaluation des
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emplois auprès du SCFP, la table sectorielle a développé l'analyse des emplois à partir
du Plan d'évaluation à 16 facteurs; elle a conduit à l'identification des emplois repères
aux fins de la comparaison des emplois. Les travaux de la table sectorielle ont donné
lieu, en 1994, à une période intensive de négociation dans chaque établissement qui a
abouti à la signature d'une entente pour certains participants, dont l'Université de
Montréal, et à un constat d'échec pour d'autres, dont l'Université.
[32]
Devant l'échec de la négociation sectorielle, tout est ramené au niveau local.
L'Université propose alors de reprendre l'exercice d'évaluation et de comparaison
d'emplois à partir d'un plan d'évaluation portant sur 12 plutôt que 16 facteurs. Cette
proposition conduit l'Université et le Syndicat à conclure un nouveau protocole d'entente
en novembre 1995. Outre les dispositions relatives à ce deuxième exercice d'équité
salariale au niveau local, ce protocole prévoit le versement d'un montant forfaitaire,
couvrant la période de 1989 à 1995, aux salariées occupant une fonction réévaluée en
vertu de l'exercice précédent. (Pièce P-3, section intitulée: Protocole d'entente sur
l'équité salariale).
[33]
La détermination des sommes forfaitaires repose sur une première évaluation
des fonctions réalisées à l'aide du Plan d'évaluation de 16 facteurs développé par le
comité inter-sectoriel et utilisé par toutes les universités dans le cadre de la première
phase. Une fois cet exercice complété, le comité local a fait parvenir à chaque salarié
un avis indiquant qu'il effectuait, en date du 30 novembre 1995, un travail
correspondant à une fonction nommément désignée selon la nouvelle nomenclature.
C'est ce que les parties ont appelé « l'exercice d'assignation » . On trouve la lettre type
de cet avis d'assignation en première page de la Pièce P-3.
[34]
Conformément au protocole d'entente, chaque salarié avait 12 jours pour
contester son assignation, c'est-à-dire pour contester la fonction qu'il se voyait reconnu;
toutefois et malgré cette possibilité, le montant forfaitaire était calculé sur la base de
cette assignation en attendant la classification définitive.
[35]
L'entente prévoyait aussi l'adoption d'un « Manuel d'évaluation des fonctions »
visant à fixer le cadre du nouvel exercice, le mandat du comité conjoint ainsi que les
paramètres d'évaluation et comparaison régissant l'établissement des regroupements
de fonctions et leur classification (Pièces P-3 et P-4).
[36]
Tel que déposé devant le Tribunal (Pièce P-3), le Protocole d'entente sur
l'équité salariale forme un tout avec le Manuel d'évaluation. Les points 4 et 5 du
protocole viennent fixer les paramètres de base de l'élaboration de la nouvelle structure
salariale et, directement ou par voie de conséquence, l'établissement des échelles de
salaire, des taux applicables et des mécanismes d'intégration à être négociés et
appliqués à la fin de l'exercice d'évaluation et de comparaison d'emplois (Pièce P-3,
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section intitulée: Protocole d'entente sur l'équité salariale).
[37]
À ce stade de la relation des faits, le Tribunal tient à souligner que la preuve qui
lui a été soumise démontre le sérieux avec lequel l'exercice d'évaluation des fonctions,
auquel se sont livrés l'Université et le Syndicat, a été réalisé. Il s'agit d'un exercice
remarquable tant par l'énergie investie que par la rigueur avec laquelle les parties ont
procédé. Les résultats de cet exercice ne sont pas contestés.
2.
La convention collective de 1991
[38]
En 1991, au moment où débute l'exercice visant à réaliser l'équité salariale, les
parties sont régies par une convention collective7 qui détermine non seulement le
salaire applicable à un poste donné mais également les regroupements et les
classifications des emplois qui, selon la terminologie en usage dans le milieu, sont
plutôt désignés sous le terme de fonction. Trois grandes catégories de fonctions
existent, ce sont les: a) Groupe « Métiers et services » ; b) Groupe « Bureau » ; c)
Groupe « Technique » .
[39]
On retrouve dans le corps général de la convention certaines dispositions
salariales distinctes pour chacun de ces groupes. C'est l'article 19 de la convention
collective qui traite des salaires. D'une part, on réfère les salariés aux annexes C, D et
E pour tout ce qui concerne les taux et échelles de salaire applicables à chacun.
D'autre part, on présente aux alinéas 19.06 (promotion) et 19.07 (mutation) les
modalités d'intégration salariale, particulières à chaque groupe de fonctions, advenant
un changement de poste pour un salarié.
[40]
Dans le cas du Groupe « Métiers et services » , la personne promue ou mutée
reçoit le taux unique de salaire horaire prévu pour la nouvelle fonction.
[41]
Dans le cas du Groupe « Bureau » , les dispositions prévoient que la personne
mutée ne voit pas son taux de salaire changé à moins que le poste ne comporte des
échelons salariaux différents, auquel cas elle est traitée comme une personne promue
et reçoit le salaire de la nouvelle échelle immédiatement supérieur à celui qu'elle
gagnait.
[42]
Les salariés du Groupe « Technique » sont plutôt régis par un système de
classe. Une mutation n'entraîne généralement pas de modification salariale à moins
que le poste auquel le salarié est muté ne comporte pas d'échelon équivalent; dans un
tel cas, le salarié se voit appliquer les règles de promotion. Celles-ci stipulent
l'intégration du salarié à l'échelon comportant un salaire immédiatement supérieur dans
l'échelle de la classe applicable à la nouvelle fonction.
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[43]
L'annexe « B » de cette convention énumère les quelque 238 fonctions existant
à l'Université qui ont fait l'objet de regroupements et de reclassification dans le cadre de
l'exercice d'équité salariale. À noter que dans cette annexe, les fonctions sont
regroupées non pas en terme de catégorie de fonctions mais plutôt selon l'horaire
hebdomadaire qui leur est applicable; à l'évidence, ce mode de regroupement ne
s'appuie sur aucune caractéristique propre à un groupe ou à l'autre.
[44]
L'annexe « C » couvre le Groupe Métiers et services; elle comprend 4 parties: C1, mécanismes de rémunération; C-2, dispositions particulières relatives à
l'apprentissage; C-3, taux de rangement et rémunération; C-4, qualifications requises. Il
ressort de cette annexe que les salariés sont rémunérés à taux unique déterminé par le
rangement de la fonction. Il existe vingt-quatre (24) niveaux de rangement ou taux de
salaire possibles allant de 11.97 $ à 17.88 $. La section C-4 présente les qualifications
requises en terme de scolarité, expérience ou exigence particulière; il ressort de ce
tableau qu'à l'exception de quatre (4) des cinquante-neuf (59) fonctions, le diplôme du
secondaire n'est pas requis; moins de la moitié des fonctions (28 sur 59) requièrent de
l'expérience et seulement quelque 15 fonctions correspondent véritablement à des
Métiers pour lesquels on exige une carte de compétence en vertu des lois et
règlements régissant l'industrie de la construction.
[45]
Enfin, la section C-4 permet de constater qu'il est effectivement possible de
progresser d'un rangement salarial à un autre dans le cas des fonctions de « service » ,
simplement en posant sa candidature sur un poste vacant et ce, du fait de l'absence de
qualifications spécifiques requises pour la majorité de ces fonctions. Ainsi, à l'exception
des fonctions « Métiers » (15 des 59 du Groupe Métiers et services) requérant une
carte de compétence et de celles requérant une formation professionnelle de base (8
sur 59), toutes les autres fonctions de ce groupe sont accessibles à l'ensemble des
salariés de l'Université ou de toute personne provenant de l'extérieur, le cas échéant.
[46]
L'annexe « D » couvre les fonctions de Bureau; elle comprend: D-1,
mécanismes de rémunération; D-2, plan d'évaluation; D-3, liste de fonctions; D-4,
échelle de salaire. La section D-2 montre que les fonctions de bureau étaient l'objet
d'un classement selon la valeur cumulative de 7 facteurs; le pointage obtenu par
chacune des fonctions déterminait son rangement dans l'une ou l'autre des 10 classes
existantes. La section D-3 présente les quelques 114 fonctions du groupe Bureau
regroupées par pointage obtenu à l'intérieur de 9 des 10 classes de fonctions possibles
alors que la section D-4 présente les échelles applicables à chacune de ces classes.
[47]
Ces échelles salariales ne comprennent pas le même nombre d'échelons. Ainsi
la classe 1 comprend 2 échelons; la classe 2: 4 échelons; les classes 3 et 4: 5
échelons; et les classes 5 et suivantes comprennent 7 échelons. Toutefois, l'écart interéchelon est constant pour les dix classes; il est de 0,32 $ pour les quatre premières
classes et croit de quelque 0,02 $ par classe pour les classes six à dix.
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[48]
Pour parler en termes similaires à l'annexe C du Groupe « Métiers et services »
les fonctions du Groupe « Bureau » comprennent 59 niveaux de rémunération ou taux
de salaire possibles applicables à 10 classes. Les salaires sont échelonnés de 11,17 $
à 17,52 $. Le Groupe « Métiers et services » comprend 24 niveaux de rémunération ou
taux de salaire possibles applicables aux 24 rangements possibles. Les salaires sont
échelonnés de 11.97 $ à 17.88 $.
[49]
Contrairement aux fonctions du Groupe Métiers et services, il n'existe pas de
tableau des qualifications requises pour chaque fonction. Ici, c'est plutôt la description
des tâches composant une fonction, analysée à l'aide du plan d'évaluation, qui permet
d'en établir la valeur et le classement relatif. Individuellement, on procède par «
assignation » , ce qui signifie: la « reconnaissance que les tâches exécutées par une
personne salariée affectée à un poste correspondent à l'une des descriptions de
fonction dont la liste (classe et titre) apparaît en annexe D-3 » (Pièce D-1, page 136).
[50]
L'annexe « E » couvre le Groupe Technique. Elle comprend: E-1, mécanismes
de rémunération; E-2, plan de carrière; E-3, titre de fonction; et E-4, échelle de salaire.
Ce qui caractérise les mécanismes de rémunération de ce Groupe, c'est l'importance
que prend la notion de plan de carrière dans l'élaboration des catégorisations de
fonctions. Selon les termes même de la convention, ce groupe comprend l'ensemble
des différentes fonctions, à l'exception des aides techniques, dont les exigences
requises pour l'exécution des tâches nécessitent des connaissances préalablement
acquises par l'obtention d'un diplôme terminal d'études collégiales (Pièce D-1, page
164).
[51]
À cette période, il existe 4 catégories de techniciens et deux classes salariales
pour chacune de ces catégories selon le niveau de complexité des travaux exécutés ou
des responsabilités assumées. L'accès à la classe I est réservé à la personne ayant
cumulé une expérience de 10 années pertinente au poste occupé ou qui a atteint le 11e
échelon de la classe II. Le classement à l'échelon correspond soit à l'expérience
reconnue ou à la scolarité acquise en surcroît des exigences de base. Il existe
également un regroupement de trois catégories d'aide technique qui recoupe plusieurs
fonctions ne nécessitant pas d'exigences de base et, par conséquent, ne comprenant
qu'une seule classe.
[52]
L'annexe E-3 présente la nomenclature des 45 fonctions de techniciens
regroupées en 4 catégories et les 7 fonctions d'aide techniques regroupées en 3
catégories. Suit, à l'annexe E-4, la présentation des échelles de salaire applicables à
chacune de ces catégories. Dans le cas des techniciens, les 4 catégories comprennent
12 échelons en classe II et trois en classe I. Compte tenu des mécanismes de passage
à la classe I, il existe, pour les quatre catégories de techniciens, 14 niveaux de
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rémunération ou taux de salaire possibles échelonnés de 12,74 $ à 21,07 $, pour la
catégorie à rémunération la plus basse, à 14,22 $ à 23,07 $, pour la catégorie à
rémunération la plus élevée.
[53]
Tant le passage d'une catégorie à l'autre que le passage d'une fonction à l'autre
ne s'avère possible dans le cas du groupe Technique vu les exigences de base
requises concernant la diplômation. Seule la personne qui aurait complété un nouveau
programme d'études pourrait accéder à une autre fonction requérant cette formation.
[54]
Quant à la lettre d'entente no 6, datée du 26 février 1991 portant sur l'équité
salariale, et dont il a été question précédemment (Pièce P-1, p. 184-186; Pièce P-2) elle
détermine la constitution et le mandat du comité d'équité salariale et comprend des
règles générales qui visent à préserver les droits des salariés relativement au salaire et
aux demandes de révision concernant les descriptions, l'évaluation et les classifications
des fonctions. La garantie salariale stipule que les personnes en place ne subiront ni
baisse ni gel de salaire à cause de l'implantation de l'équité salariale. C'est en vertu de
cette entente que s'est déroulée la première phase de l'exercice d'équité salariale. La
deuxième phase découle du Protocole convenu en 1995 et déposé sous la cote P-3.
[55]
Ce document, paraphé en cours de négociations, comprend le Manuel
d'évaluation des fonctions et le Protocole d'entente sur l'équité salariale; celui-ci annule
et remplace la lettre d'entente no 6 de la convention collective 1989-19928.
Mentionnons simplement que la garantie salariale individuelle y est maintenue et
précisée à l'alinéa 5 a), alors que l'alinéa 4e) fixe les balises de la rémunération globale
pour les groupes aux fins de la négociation salariale qui suivra l'évaluation des
fonctions.
1.2
La situation en 1996
1.2.1
L'évaluation des fonctions, l'établissement des classes et la
classification des fonctions
[56]
Le protocole d'entente du mois de janvier 1996 (Pièce P-3) prévoit une première
étape d'évaluation des fonctions par un Comité conjoint ainsi que l'établissement de
fonctions génériques. Tel que l'explique madame Parent lors de son témoignage, le
Protocole d'entente prévoit à l'article 4 que le comité conjoint doit
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réécrire complètement des descriptions de fonction sous forme générique que
les parties conviennent de compléter au plus tard le 23 février 1996 à partir
d'un projet déposé par la partie patronale. Pour ce faire, les parties
conviennent de travailler exclusivement en comité conjoint et d'enquêter
conjointement ces nouvelles descriptions uniquement à partir d'échantillons
aléatoires des personnes visées. Une liste sommaire des assignations
potentielles sera fournie par l'Employeur. De plus, les parties conviennent que
cette opération permettra de réduire le nombre de descriptions de fonctions en
usage à l'Université Laval;
évaluer ces descriptions de fonction à partir du plan en 12 facteurs du SCFP
apparaissant au manuel, lequel fera par la suite partie de la convention
collective;
déterminer les assignations.
[57]
Cette dernière attribution consiste à établir pour chaque salarié la fonction à
laquelle son poste est dorénavant assimilé de même que le classement de cette
fonction selon la valeur déterminée conformément au Manuel d'évaluation des fonctions.
[58]
Mesdames Jones et Parent expliquent que dans le cadre des travaux du comité
conjoint, les parties ont examiné les 238 fonctions existantes et ont réduit le tout à
quelque 73 fonctions génériques (Pièce P-5). Un exercice qui a impliqué la réécriture
des descriptions de l'ensemble des fonctions sous forme générique pour ensuite en
établir la valeur.
[59]
Les fonctions sont évaluées selon un plan comportant 12 facteurs. Les facteurs
utilisés sont les suivants: formation, expérience, coordination musculaire, autonomiejugement, complexité, effort mental, effort physique, communications, résultats,
surveillance, milieu de travail et rythme. À chaque facteur correspond un nombre de
points. Tous les facteurs ne sont pas d'importance égale, certains ayant un nombre de
points plus élevé:
LISTE ET VALEURS DES FACTEURS
FACTEURS
nom
1 formation
NIVEAUX
1 2 3 4
5
6
7
19 37 56 74 93 111 130
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2 expérience
26 52 78 104 130
3 coord. musculaire
12 24 36 48 60
4 autonomie-jugement 18 36 54 72 90
5 complexité
18 36 54 72 90
6 effort mental
12 24 36 48 60
7 effort physique
12 24 36 48 60
8 communications
24 48 72 96 120
9 résultats
24 40 60 80 100
10 surveillance
9 17 26 34 43 51 60
11 milieu de travail
10 20 30 40 50
12 rythme
13 25 38 50
[60]
Madame Jones explique que l'étape suivante consistait à déterminer la valeur
des fonctions. À cet égard, l'article 2.7 du Manuel d'évaluation des fonctions (Pièce P-4)
stipule que « lors de l'évaluation d'une fonction, l'évaluation totale est déterminée en
additionnant les points obtenus à chacun des sous-facteurs » . Une fois l'exercice
d'évaluation des fonctions complété, le comité conjoint a délimité les classes de
fonctions et établi la classification de chacune de ces fonctions selon ces classes. Les
parties ont fait l'exercice de regrouper toutes les fonctions équivalentes, selon le
pointage obtenu, dans les classes 1 à 17.
[61]
L'article 2.7 indique que le classement des fonctions est établi selon une table
de conversion qui prévoit l'établissement de 17 classes pour lesquelles, à l'exception de
la première et de la dernière, un écart de 26 points détermine les seuils de passage.
L'écart de la classe 1 est de 45 points et celui de la classe 17 va de 644 à 999 points,
marquant ainsi la classe maximale, quelque soit le pointage obtenu.
[62]
Madame Jones explique qu'à deux exceptions près, tous les emplois du Groupe
Bureau et du Groupe Métiers et services se retrouvent dans les classes 2 à 10. En
outre, aucune fonction ne se retrouve en classe 1 puisque aucune fonction n'obtenait
un total de points inférieur à la classe 2; il n'y en a pas non plus en classe 15 ou 16. Tel
qu'indiqué par madame Parent, cette dernière situation résulte du fait que le pointage
de la classe 17 correspond aux fonctions du technicien dont la complexité des tâches
ou les responsabilités justifiaient antérieurement la classe I. Ainsi, ce pointage qui est
de plus de 78 points supérieurs à celui de la classe 14 nécessitait la création de deux
classes intercalées entre la classe la plus élevée des techniciens et celle du super
technicien pour éviter la rupture du modèle de classification des fonctions. Pour leur
part, les emplois du Groupe Technique se retrouvent essentiellement dans les classes
supérieures à 10.
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[63]
La Pièce P-5 présente les 73 fonctions génériques ainsi que la classe à laquelle
l'exercice d'évaluation de chacune de ces fonctions a conduit. Cette information se
trouve colligée aux deux premières colonnes. Les colonnes 3 et 4 réfèrent aux 238
titres de fonctions antérieures qui ont été regroupées à l'intérieur des nouvelles
fonctions génériques et le salaire appliqué alors à ces fonctions. Le salaire indiqué
correspond, dans le cas du Groupe Bureau, à l'échelon maximal des échelles de salaire
alors que celui des employés du Groupe Métiers et services, correspond au taux unique
applicable. Finalement, la dernière colonne présente la répartition des salariés occupant
ces postes en fonction de leur sexe.
[64]
Cette pièce marque la fin de la première étape de l'opération équité salariale qui
vise à établir la classification des fonctions selon la valeur des emplois. À ce point de
son mandat, le comité conjoint doit procéder à la comparaison des salaires attribués
aux diverses fonctions jugées équivalentes et ce, en regard du sexe pour déterminer s'il
y a atteinte au droit à l'égalité des personnes concernées relativement au salaire qui
leur est versé et, le cas échéant, à établir le salaire exempt de discrimination.
1.2.2
La comparaison salariale des fonctions selon le sexe
[65]
Dans son témoignage, madame Parent explique que la démarche suivie
consistait à comparer, à l'intérieur d'une même classe, le salaire des fonctions
majoritairement exercées par les femmes à la fonction la mieux rémunérée occupée par
le plus grand nombre d'hommes. Ainsi, lorsqu'une fonction mieux rémunérée existait
mais qu'elle ne constituait pas celle où se retrouvait le plus grand nombre d'hommes,
elle était écartée au profit de celle où le nombre d'hommes était le plus élevé.
[66]
Madame Parent a illustré cette étape de l'exercice d'équité salariale en utilisant
la Pièce P-5. Ainsi, la classe 2 regroupait quelques emplois à majorité masculine tels
que: aide générale (4 H; 13,78 $), assistant magasinier (7 H; 13,78 $), chauffeur (3 H;
14,87 $) et préposé au ménage (60 H; 13,01 $). C'est le salaire de cette dernière
fonction qui a été retenu aux fins de la comparaison salariale puisqu'elle regroupait le
nombre le plus élevé d'hommes, soit 60. Les fonctions à majorité féminine de cette
classe comportaient des salaires inférieurs, égaux ou supérieurs à ce taux de 13,01 $.
Cela signifie que pour les quelque 118 personnes visées au moment d'établir le
nouveau taux de salaire de cette classe à 13,01 $, 9 hommes et 12 femmes étaient
susceptibles d'être classés « hors échelle » , que 60 hommes et 2 femmes conservaient
le même salaire et que 30 femmes et 5 hommes voyaient leur salaire majoré.
[67]
Tant madame Parent que madame Jones diront que ce résultat découle, pour
partie, des paramètres préalables établis par le protocole d'entente. Ces paramètres
influencent nécessairement l'établissement du taux de salaire de chaque classe en
fixant la masse salariale totale ainsi qu'un nombre maximum de salariés devant être
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classés hors échelle à la fin de l'exercice. C'est ce qui explique le choix qui a été fait de
ne pas retenir le plus haut taux de salaire des fonctions à majorité masculine pour
rétablir le taux de salaire de l'ensemble des fonctions déterminées équivalentes suite à
l'évaluation.
[68]
Toutefois, à ce stade de l'exercice de comparaison salariale des fonctions, le
Comité conjoint travaille à partir des valeurs maximales applicables, sans tenir compte
de la garantie salariale individuelle. Cette approche permet d'établir un taux salarial
fondé sur la valeur attribuée aux fonctions jugées équivalentes à l'intérieur d'une même
classe. En d'autres termes, cela permet d'éliminer les distinctions salariales antérieures
pour des emplois de même valeur.
[69]
En l'espèce, la valeur attribuée à chaque fonction n'est pas contestée pas plus
que la classification qui en découle. Qui plus est, le taux salarial fixé à ce stade pour
chaque classe de fonctions n'est pas non plus contesté.
[70]
Mais qu'en est-il du résultat final de l'établissement des taux de salaire et des
modes de rémunération pour les groupes « Bureau » et « Métiers et services » ?
1.2.3
L'établissement des taux de salaire et des modes de rémunération
[71]
Comme l'indique madame Parent, l'établissement des taux de salaire s'est fait à
partir de ce qui existait déjà en termes de mode de rémunération. Les trois structures
salariales existantes furent fondues en un seul système de rémunération. C'est
d'ailleurs ce qui ressort de l'examen du tableau salarial (Annexe B5); les 10 premières
classes reproduisent essentiellement le mode de rémunération du Groupe Bureau alors
que les 7 classes suivantes reproduisent celui du Groupe Technique.
[72]
En première partie, l'écart inter-échelon des 10 premières classes est, à
l'exception de quelques ajustements requis, constitué d'un taux fixe et égal de 0,32" de
l'heure du premier au dernier échelon de chaque échelle de chacune de ces classes.
En deuxième partie, la progression inter-échelon des 7 classes supérieures correspond
à celle que l'on retrouve dans les échelles d'emplois similaires de la fonction publique
pour les détenteurs de diplôme collégial, soit un écart inter-échelon croissant tout au
long de l'échelle et équivalant à 3% du taux de salaire de chaque échelon.
[73]
Cette façon de faire est conforme, par ailleurs, au troisième alinéa de l'article 4
e) du protocole d'entente qui stipule:
Pour le groupe technique, les taux de salaire ne pourront être inférieurs à ceux
en vigueur dans les secteurs public et parapublic pour des fonctions
comparables.
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[74]
L'établissement des taux de salaire devait également tenir compte des balises
financières énoncées au protocole d'entente signé en janvier 1996 (Pièce P-3). L'article
4e) du protocole d'entente stipule expressément que l'élaboration de la nouvelle
structure salariale doit générer « des coûts totaux d'implantation récurrents
correspondant à 120% des coûts récurrents qui auraient été générés par l'implantation
à l'Université de la structure salariale utilisée à l'Université de Montréal dans le cadre de
l'entente sur l'équité salariale » . En d'autres termes, cette clause fixe le coût global de
l'opération équité salariale pour l'exercice que les parties s'apprêtent à faire.
[75]
De plus, le résultat final devait tenir compte de la garantie salariale individuelle.
À cet égard, l'article 5a) du protocole d'entente (Pièce P-3) assurait à toute personne
concernée qu'elle ne subirait pas de baisse salariale à cause de l'implantation du
nouveau système de rémunération. Les parties avaient donc prévu qu'il pourrait y avoir
des « cercles rouges » , c'est-à-dire des personnes dont le salaire est plus élevé que le
maximum de leur échelle; toutefois, le même protocole en limite le nombre à 12 % dans
le Groupe Bureau et à 21 % dans le Groupe Métiers et services.
[76]
Le second alinéa de l'article 2.8 du même document précise que les échelles de
classification prévues à l'Annexe B5 s'appliquent à l'ensemble des fonctions. Les
parties exprimaient ainsi leur volonté d'en arriver à une échelle salariale intégrative pour
les trois groupes d'emplois concernés. Cette annexe B5, tel que consignée dans le
document final, est la suivante:
Classes
1
9
10
1
12,45
2
3
4
5
6
7
2
3
12,69
12,85
13,01
13,17
13,49
4
13,16
13,48
13,80
14,12
5
13,52
13,84
14,16
14,48
14,80
6
13,59
13,91
14,23
14,55
14,87
15,19
7
13,66
13,98
14,30
14,62
14,94
15,26
15,58
8
13,69
14,01
14,33
14,65
14,97
15,29
15,61
8
15,93
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
9
14,16
14,48
16,72
10
14,67
14,99
17,23 17,55
11
14,68
14,86
19,03
19,79
12
14,70
15,05
19,51
20,29
13
14,87
15,22
19,68
20,46
14
15,88
16,41
21,02
21,79
15
16,15
16,68
21,29
22,06
16
16,44
16,97
21,58
22,35
17
16,74
17,27
21,86
22,65
14,80
15,12
15,44
15,76
16,08
16,40
15,31
15,63
15,95
16,27
16,59
16,9
15,30
15,89
16,42
17,08
17,71
18,37
15,60
16,21
16,86
17,49
18,15
18,80
15,77
16,38
17,03
17,66
18,32
18,97
16,99
17,63
18,22
18,92
19,53
20,27
17,26
17,90
18,49
19,19
19,80
20,54
17,55
18,19
18,78
19,48
20,09
20,83
17,85
18,49
19,08
19,78
20,39
21,10
[77]
Ainsi, à l'exception de la classe 1 à laquelle aucune fonction ne correspond, ce
tableau présente une structure de rémunération fondée sur des échelles de salaire et
non sur un système à taux unique.
[78]
C'est pourquoi le protocole d'entente prévoit à l'article 4 f) (Pièce P-3) que le
comité conjoint doit:
« déterminer les mécanismes d'intégration au nouveau système de
rémunération en tenant compte que la personne salariée sera intégrée à
l'échelon assurant un taux de salaire égal ou immédiatement supérieur à celui
qu'elle reçoit, auquel on a préalablement ajouté la valeur de l'écart obtenu, au
30 novembre 1995, par application du paragraphe b) de l'article 1 » .
[79]
L'intégration des salariés dans les échelles salariales s'est faite de façon à leur
garantir un salaire égal ou supérieur à celui qui leur était reconnu au 30 novembre 1995.
[80]
Toutefois et malgré les termes de l'article 2.8 du Protocole d'entente sur l'équité
salariale, le 10 juillet 1996, l'Université et le Syndicat concluent une « Entente relative à
l'implantation du nouveau système de rémunération dans le cadre de l'opération équité
salariale » (Pièce P-7) qui stipule à son article VII, intitulé « Règles d'intégration » que:
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
La personne salariée sera intégrée à l'échelon assurant un taux de salaire égal
ou immédiatement supérieur à celui qu'elle reçoit, auquel on a préalablement
ajouté la valeur de l'écart obtenu, au 30 novembre 1995, pour le rappel de
salaire sans toutefois dépasser le maximum du taux associé à la fonction
assignée.
Les fonctions du Groupe Métiers et services sont à taux unique; le dernier
échelon de l'échelle de classification appropriée est considéré comme étant
l'échelon correspondant à ce taux unique.
[81]
Ainsi, en conclusion de l'opération équité salariale, l'Université et le Syndicat
signaient une entente qui prévoit deux modes de rémunération distincts: un mode de
rémunération à échelle pour les fonctions du Groupe Bureau et un mode à taux unique
pour les fonctions du Groupe Métiers et services.
[82]
Les salariées du Groupe Bureau se sont donc retrouvées dans l'un des
échelons de l'échelle de salaire de leur classe respective. Leurs collègues du Groupe
Métiers et services se sont, pour leur part, retrouvés au dernier échelon de ces mêmes
échelles étant donné que le taux unique s'appliquait toujours à leurs fonctions.
1.2.4
La négociation de l'entente du 10 juillet 1996
[83]
En ce qui concerne l'implantation des modes de rémunération, madame Parent
affirme avoir déposé une demande au Syndicat afin que tous les groupes d'emploi, y
compris le Groupe Métiers et services, soient assujettis à des échelons.
[84]
Madame Parent a expliqué au Tribunal que l'Université recherchait cette
solution pour deux raisons. La première est à l'effet que l'équité justifiait qu'il en soit
ainsi. L'Université voulait un système uniforme où tous les salariés seraient assujettis à
des échelons et non pas un système multiforme comportant deux groupes assujettis à
des échelons et un groupe à taux unique.
[85]
La seconde tient, selon elle, à l'effet que la structure de rémunération à
échelons reflète de manière plus adéquate l'expérience institutionnelle acquise en cours
d'emploi. Comme cette logique vaut pour tout type d'emploi, madame Parent a affirmé
que l'Université souhaitait que les salariés du Groupe Métiers et services soient eux
aussi assujettis à ce système.
[86]
Madame Parent a affirmé qu'elle s'est butée à une opposition syndicale ferme;
malgré tout et compte tenu du résultat global de l'opération équité salariale qui se
soldait par une amélioration appréciable de la situation des femmes, l'Université a cédé
et accepté le maintien d'un taux unique pour le Groupe Métiers et services. Le résultat
net révélait un écart en faveur des femmes justifiant, pour madame Parent, le maintien,
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
par ailleurs non souhaité, des taux uniques pour le Groupe Métiers et services.
L'objectif ultime de l'opération équité salariale, dans sa dimension rattrapage salarial, se
trouvait atteint.
[87]
De son côté, madame Jones, du SCFP, a confirmé lors de son témoignage que
le Syndicat avait toujours refusé la demande d'échelons pour le Groupe Métiers et
services. Le Syndicat désirait plutôt que toutes les fonctions, y compris celles du
Groupe Bureau, soient à taux unique, c'est-à-dire le taux maximum de l'échelle. Cette
demande a toujours été refusée par l'Université.
[88]
Madame Jones a expliqué que la position du Syndicat repose d'abord et avant
tout sur une question de principe par rapport aux échelons. Selon le Syndicat, la valeur
d'un emploi correspond au taux maximum d'une échelle. Ainsi, jusqu'à ce que le salarié
obtienne le « vrai » salaire de l'emploi, l'employeur fait des économies. Les salariés
seraient ainsi « sous-payés » tant qu'ils n'ont pas atteint le maximum de leur échelle. À
la lumière de cette position de principe, le Syndicat aurait voulu que les salariés de tous
les groupes soient assujettis à des taux uniques.
[89]
Par ailleurs, en ce qui concerne plus précisément la négociation ayant donné
lieu à l'entente du 10 juillet 1996 (Pièce P-7), madame Jones confirme le refus du
Syndicat et ce même si, dans les faits, aucun salarié du Groupe Métiers et services
n'aurait subi de baisse de salaire en raison des garanties salariales individuelles dont
était assortie l'opération équité salariale. Selon ses mots, il aurait été « suicidaire » pour
le Syndicat d'acquiescer à une telle demande.
[90]
Elle a indiqué que le Syndicat n'avait pas consulté de nouveau les salariés du
Groupe Métiers et services pour leur demander leur avis sur la question du mode de
rémunération durant la période de négociation 1995-1996. La position du Syndicat, sur
cette question, était claire et ce, depuis 1992. Lors d'une consultation menée au
moment de la négociation sectorielle universitaire, il avait été exclu d'envisager
l'assujettissement des salariés des groupes Métiers et services à des échelons compte
tenu de la tradition salariale tant publique que privée à cet égard. Cette situation est
d'ailleurs confirmée par l'expert Larouche de l'Université.
[91]
De plus, madame Jones a mentionné que, si on avait annoncé aux salariés du
Groupe Métiers et services qu'ils seraient dorénavant assujettis à des échelons, ils
auraient pu conclure à une mauvaise représentation syndicale car, à tout le moins sur le
plan des principes, le système d'échelons représente un recul et entraîne une
dévaluation psychologique, sociale et culturelle de l'emploi. En d'autres termes, selon le
témoin, un système à échelons a pour effet de dévaluer l'emploi même s'il n'en résulte
aucune conséquence salariale immédiate pour un salarié concerné.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[92]
Enfin, madame Jones a précisé qu'un représentant du Groupe Métiers et
services était membre du comité d'évaluation des emplois et qu'il était le porte-parole
de son groupe dans le cadre de la négociation et de la conclusion de l'entente du 10
juillet 1996, laissant entendre que ce groupe de membres était par le fait même
consulté en tout temps et partie prenante des décisions syndicales.
5.
Les effets et conséquences de l'entente du 10 juillet 1996
[93]
Le Tribunal a entendu en témoignage quelques-unes des salariées plaignantes
du Groupe Bureau.
[94]
Madame Ferland Pépin travaille pour l'Université depuis 1974; en 1989, elle
occupe une fonction de commis du Groupe Bureau. Cette fonction appartient alors à la
classe 6 et elle occupe l'échelon 7, soit le taux maximum de son échelle. Après
évaluation, sa fonction est intégrée à la classe 9; toutefois, elle se voit classée au 5e
échelon de cette classe 9 du fait du maintien du mode de rémunération à échelons pour
le Groupe Bureau et d'un processus d'intégration qui ne prend pas en compte son
expérience réelle mais le salaire précédemment touché. Dans le cadre de ce même
exercice d'évaluation et de réassignation, son conjoint qui occupe la fonction de
ferblantier, appartenant au Groupe Métiers et services, se voit classé au 9e échelon de
la même classe 9, sa fonction étant visée par la rémunération à taux unique (Pièce P15). Madame Ferland Pépin nous dira avec beaucoup d'émotion que l'équité salariale
est un sujet tabou à son domicile depuis cette date.
[95]
Madame Paradis a occupé une fonction de secrétaire au service des
communications pendant plus de 10 ans. Cette fonction de la classe 4 a été réévaluée
et intégrée en classe 9. Avec ses 10 ans de travail, madame Paradis avait atteint
l'échelon maximal de la classe 4; toutefois appartenant au Groupe Bureau, elle a été
intégrée au 3e échelon de la Classe 9 (Pièce P-12).
[96]
Au moment de son témoignage, madame Gagnon exécute le même travail
depuis 25 ans à l'École de service social; elle coordonne les stages. Cette fonction du
Groupe Bureau a été reclassifiée de la classe 6 à la classe 9; après avoir été au
maximum de son échelle depuis 1981, madame Gagnon s'est vue intégrée à l'échelon
7 (sur 9 échelons), compte tenu qu'il s'agit d'un emploi du Groupe Bureau et que le taux
unique ne s'applique pas (Pièce P-13). Bien que la reclassification n'ait rien changé aux
tâches qu'elle doit exécuter, madame Gagnon note qu'elle doit accumuler de nouveau
des années d'expérience pour obtenir le maximum de l'échelle salariale de la classe 9.
Elle indique ne pas comprendre que l'on puisse prétendre qu'elle n'a pas acquis toutes
les connaissances requises par sa fonction contrairement aux employés du Groupe
Métiers et services.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[97]
Pour sa part, madame Rhéaume occupait un poste de commis-secrétaire de
classe 4 et avait atteint le 6ème échelon de cette classe en 1989. En 1990, elle a atteint
le 7ème et dernier échelon de la classe 4. Au 30 novembre 1995, elle occupait toujours
cette fonction et gagnait un taux horaire de 14,12 $.
[98]
En janvier 1996, dans le cadre de l'exercice d'assignation marquant le début de
la phase 2 de l'opération équité salariale, madame Rhéaume reçoit un avis lui indiquant
que sa fonction est dorénavant celle de secrétaire de gestion, un poste de classe 8, et
qu'on l'assigne à l'échelon 5 lui donnant droit à un taux horaire de 14,97. La classe 8
comporte 8 échelons. Elle reçoit donc une somme forfaitaire couvrant la période du 1er
décembre 1989 au 30 novembre 1995, conformément au protocole d'entente sur
l'équité salariale (Pièce P-3).
[99]
Le 27 juin 1996, conjointement, l'université et le Syndicat lui font parvenir un
avis, signé par un représentant de chacune des parties à la négociation, faisant état de
son « assignation définitive au 1er décembre 1995 » . On lui confirme qu'elle occupe la
fonction de secrétaire de gestion dont l'évaluation correspond à la classe 8.
[100]
Au cours du mois d'août 1996, madame Rhéaume prend connaissance de
l'entente du 10 juillet 1996 (Pièce P-7) adoptée le 2 juillet précédent, par les membres
du Syndicat réunis en assemblée générale.
[101]
À la lecture de l'article VII de l'entente du 10 juillet 1996 (Pièce P-7), madame
Rhéaume déclare avoir constaté que ses collègues du Groupe Métiers et services se
voyaient intégrés à la nouvelle structure de rémunération en fonction d'un taux unique
correspondant à l'échelon maximal de leur classe d'emploi.
[102]
À l'aide des documents dont elle disposait relativement à la composition des
groupes d'emploi, elle confectionne deux documents, soit les annexes B1 et B2 qu'on
retrouve en liasse à la Pièce P-4.
[103]
L'annexe B1 comprend la liste des 30 fonctions du Groupe Métiers et services
et indique, à l'égard de chacune d'elles, combien d'hommes et combien de femmes les
occupent. Il ressort de ce document que sur les 329 salariés du Groupe Métiers et
services exerçant l'une ou l'autre des 30 fonctions comprises dans ce groupe, 275 sont
des hommes et 54 sont des femmes. Traduit en pourcentage, cela signifie que 83,65 %
des membres du Groupe Métiers et services sont des hommes.
[104]
L'annexe B2 reprend le même exercice pour le Groupe Bureau. Sur 1 018
salariés exerçant l'une ou l'autre des 21 fonctions qu'on retrouve dans ce groupe, 875
sont des femmes et 143 sont des hommes. Autrement dit, le Groupe Bureau est
composé de femmes dans une proportion de 86 %.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[105]
Après avoir constaté que l'opération équité salariale se terminait par
l'intégration, d'une part, des membres du Groupe Bureau, composé de femmes à 86 %,
dans des échelons et, d'autre part, des membres du Groupe Métiers et services,
composé d'hommes à 83,65 %, dans des taux uniques équivalant au maximum de la
classe d'emploi concernée, madame Rhéaume porte plainte à la Commission vu ce
qu'elle considérait être un traitement discriminatoire réservé aux femmes du Groupe
Bureau.
[106]
D'autres salariées se sont jointes à elle dans cette démarche et, peu après,
elles ont déposé les plaintes ayant donné lieu au présent recours.
[107]
Le 13 septembre 1996, un « avis d'implantation de l'équité salariale » (Pièce P8) est émis par le vice-rectorat aux ressources humaines. Ce document fait état du
nouveau traitement de madame Rhéaume, soit un taux horaire de 14,97 $
correspondant au cinquième des huit échelons de sa classe d'emploi. Le classement à
cet échelon fut déterminé par application des règles d'intégration prévues à l'entente du
10 juillet 1996 (Pièce P-7).
[108]
Madame Rhéaume nous indique qu'elle n'a atteint le dernier échelon de la
classe 8 que le 20 novembre 1998. Or, explique-t-elle, si sa fonction avait fait partie du
Groupe Métiers et services, elle aurait reçu le taux de salaire équivalant au dernier
échelon de la classe 8 à titre de taux unique applicable à ce groupe et aurait reçu le
salaire afférent à une telle classification de façon rétroactive au 1er décembre 1995.
2.
Le droit applicable
[109]
Le droit à l'égalité en emploi sans discrimination fondée sur le sexe est inscrit
dans la Charte des droits et libertés de la personne depuis 1975. Cette protection est
énoncée aux articles 16 et 19 de la Charte: l'article 16 énonce l'interdiction de
discriminer relativement à diverses étapes de la relation d'emploi et aux conditions de
travail alors que l'article 19 reconnaît le principe d'un salaire égal pour un travail
équivalent. L'insertion de ces droits dans la Charte participe d'une volonté, maintes fois
exprimée sur la scène internationale depuis 1919, de mettre un terme aux pratiques
discriminatoires en matière de conditions d'emploi tout particulièrement envers les
femmes.
[110]
Avant d'examiner la portée des articles 16 et 19 de la Charte, deux dispositions
qui sont demeurées en marge d'une interprétation judiciaire significative par les
tribunaux, il apparaît utile de faire un survol des normes internationales d'égalité car la
garantie d'égalité en matière de rémunération, énoncée dans la Charte, s'inscrit dans la
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
foulée des principes adoptés dans les instruments internationaux ratifiés par le Québec.
2.1
Le droit international
[111]
Le droit à l'égalité de rémunération sans discrimination fondée sur le sexe
s'inscrit dans un grand nombre d'instruments internationaux de l'Organisation des
Nations unies (ONU) de même que de l'Organisation internationale du travail (OIT),
devenue organisation spécialisée de l'ONU en 1946. Un examen de ces différents
instruments permet de constater que cette garantie d'égalité a connu, au fil des ans,
des transformations significatives qui traduisent une volonté de rendre effectif ce
principe hissé au rang des droits fondamentaux il y a près de cinquante ans.
1.
Le principe d'un salaire égal pour un travail égal
[112]
La Déclaration universelle des droits de l'homme9 adoptée par l'Assemblée
des Nations Unies en 1948 inscrit le principe d'égalité salariale dans l'article 23
consacré à l'égalité en emploi:
1.
Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions
équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage.
2.
Tous ont droit, sans aucune discrimination, à un salaire égal pour un travail égal.
3.
Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante lui
assurant ainsi qu'à sa famille une existence conforme à la dignité humaine et
complétée, s'il y a lieu, par tous autres moyens de protection sociale.
4.
Toute personne a le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à
des syndicats pour la défense de ses intérêts. (Nous soulignons)
[113]
La reconnaissance du droit à l'égalité en matière de rémunération de l'article
23, consacre cette garantie comme « idéal commun à atteindre par tous les peuples et
toutes les nations » 10. La présence de ce principe dans cet instrument fondamental de
référence en matière de reconnaissance et de protection des droits de la personne
trace la voie à l'adoption de conventions et de pactes de portée spécifique.
[114]
La reconnaissance du principe d'égalité salariale pour un travail égal entre les
hommes et les femmes avait déjà fait l'objet d'une reconnaissance internationale avant
1948. Il s'agit d'un objectif de l'OIT depuis sa fondation en 191911.
[115]
Apparaissant d'abord dans le Préambule de la Constitution de l'OIT, l'égalité
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
de rémunération est réaffirmée en 1944 dans la Déclaration de Philadelphie12 comme
un droit qui ne peut se faire en marge des femmes. Annexée à la Constitution de
l'Organisation, la Déclaration de Philadelphie expose les buts et objectifs poursuivis par
l'OIT ainsi que les principes qui doivent guider la politique interne des pays membres
dont le Canada.
[116]
Tant dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme que dans la
Constitution de l'OIT, la formule d'égalité salariale qui s'énonce alors en terme de travail
égal n'offre qu'une réponse parcellaire aux problèmes de discrimination salariale que
vivent les femmes sur le marché du travail. Seules les femmes qui exécutent un travail
identique à celui qu'effectuent les hommes peuvent bénéficier du droit à l'égalité
salariale, de telle sorte qu'une protection qui ne prend pas en compte la ségrégation
professionnelle, déjà bien ancrée sur le marché du travail, demeure essentiellement de
nature déclaratoire.
1.
La Convention concernant l'égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre
masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur égale
[117]
En 1951, les pays membres de l'OIT, conscients des limites du droit ainsi
formulé, décident d'élargir le principe d'égalité salariale afin de tenir compte de cette
réalité du marché du travail. Ces pays adoptent la Convention concernant l'égalité de
rémunération entre la main-d'oeuvre masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un
travail de valeur égale 13(Convention no 100), entrée en vigueur au Canada en 197314.
[118]
Comme l'indique son titre, la Convention no 100 s'adresse spécifiquement au
problème des disparités salariales dues à la discrimination fondée sur le sexe:
Article 1
(...)
b) l'expression « égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre masculine et
la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur égale » se réfère aux taux
de rémunération fixés sans discrimination fondée sur le sexe.
Article 2
Chaque membre devra, par des moyens adaptés aux méthodes en vigueur
pour la fixation des taux de rémunération, encourager et, dans la mesure où
ceci est compatible avec lesdites méthodes, assurer l'application à tous les
travailleurs du principe de l'égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre
masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur égale.
[119]
En vertu de la Convention no 100, le principe d'égalité salariale s'articule
désormais autour de la formule « salaire égal pour un travail de valeur égale entre la
main-d'oeuvre féminine et la main-d'oeuvre masculine » .
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[120]
Cette formule innove sous deux aspects. En premier lieu, le principe d'égalité
en matière de rémunération s'adresse spécifiquement à la problématique de la
discrimination fondée sur le sexe. En second lieu, tel qu'énoncé, le principe d'égalité
salariale s'incarne dans la réalité du marché du travail. L'égalité n'est plus restreinte à
une équation identitaire soit celle d'un salaire égal pour un même travail.
[121]
L'égalité s'inscrit désormais dans une formule égalitaire soit celle d'un salaire
égal pour des emplois différents qui ont une valeur égale. Pour la première fois, sur la
scène internationale, des pays s'engagent à prendre des moyens adaptés pour
s'attaquer aux disparités salariales entre hommes et femmes qui n'occupent pas
nécessairement un emploi identique.
[122]
L'adoption de ce principe pose les bases de l'égalité entre hommes et femmes
et permet de s'attaquer au problème des emplois sous-évalués parce que
traditionnellement dévolus aux femmes.
2.1.1.2
La Recommandation no 90 sur l'égalité de rémunération
[123]
Parallèlement à l'adoption de la Convention no 100, la Recommandation no 90
sur l'égalité de rémunération15 expose certaines modalités pour une application
progressive des principes généraux énoncés dans la Convention no 100. Non ouvertes
à la ratification par les États, les recommandations contiennent des principes directeurs
détaillés qui complètent les principes consacrés dans les conventions.
[124]
La Recommandation no 90 se présente donc comme un plan d'action visant à
réaliser l'égalité salariale entre les hommes et les femmes dans tous les secteurs
d'activités des pays signataires de la Convention no 100. Entre autres mesures, la
Recommandation no 90 propose de mettre un terme aux distinctions fondées sur le
sexe dans la détermination de salaire minimum et dans la formation professionnelle. En
outre, l'article 5 précise:
Art. 5. Si cela est approprié en vue de faciliter l'établissement de taux de
rémunération conformément au principe de l'égalité de rémunération entre la
main-d'oeuvre masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur
égale, chaque Membre devrait, en accord avec les organisations d'employeurs
et de travailleurs intéressées, établir des méthodes permettant d'évaluer
objectivement, soit par une analyse du travail, soit par d'autres moyens, les
travaux que comportent les divers emplois ou favoriser l'établissement de
telles méthodes, en vue d'une classification des emplois sans considération de
sexe; lesdites méthodes devraient être appliquées conformément aux
dispositions de l'article 2 de la convention. (Nous soulignons)
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[125]
Pour la Conférence internationale du travail, la juste classification des emplois
constitue un facteur essentiel dans l'établissement de taux de rémunération conformes
au principe d'égalité édicté dans la Convention no 100. Une telle classification se fait à
partir de méthodes permettant d'évaluer objectivement les tâches que comportent les
divers emplois.
[126]
La Convention no 100 et la Recommandation no 90 marquent un tournant
dans la reconnaissance des causes de la discrimination dont sont victimes les femmes
en matière de rémunération. En substituant le principe de « salaire égal pour un travail
de valeur égale » à celui plus étroit de « salaire égal pour un travail égal » l'OIT
reconnaît le fondement systémique de la discrimination salariale qui émerge des
diverses composantes des systèmes de rémunération.
[127]
Ces disparités salariales, pour une large part, sont l'expression des
stéréotypes et préjugés sociaux vis-à-vis la valeur du travail effectué par les femmes.
C'est d'ailleurs conscients du poids de ces préjugés que les rédacteurs de la
Recommandation no 90 requièrent des pays signataires à l'article 7:
(...) de faire tous efforts afin de développer dans l'opinion publique la
conscience des motifs pour lesquels devrait être appliqué le principe de
l'égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre masculine et la main-d'oeuvre
féminine pour un travail de valeur égale.
2.1.2
Le principe d'un salaire égal pour un travail équivalent
2.1.2.1
La Convention concernant la discrimination (emploi et
profession)
[128]
En 1958, un nouvel instrument est adopté par la Conférence internationale du
travail. LaConvention no 111 concernant la discrimination (emploi et profession)
16engage les pays signataires à formuler et appliquer une politique nationale visant à
promouvoir l'égalité des chances et de traitement en matière d'emploi et de profession,
afin d'éliminer toute discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion,
l'opinion politique, l'ascendance nationale ou l'origine sociale. De portée plus large que
la Convention no 100, ce nouvel instrument garantit l'égalité entre autres en matière
d'accès à l'emploi et aux différentes professions, à la formation professionnelle, et aux
conditions d'emploi. Le Canada ratifie la Convention no 111 le 26 novembre 1964.
[129]
La Recommandation no 111 concernant la discrimination (emploi et profession)
qui complète la Convention no 111 rappelle comme principe directeur en matière
d'égalité en emploi le droit des femmes d'obtenir une rémunération égale à celle des
hommes pour un travail de valeur égale.18
17
[130]
En 1966, l'adoption d'un principe d'égalité de rémunération s'inscrit aussi à
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l'ordre du jour de l'Assemblée générale des Nations Unies.
2.1.2.2
Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et
culturels
[131]
Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels19
ouvert à la ratification des États en 1966, affirme à son article 7 la reconnaissance du
droit à l'égalité salariale pour un travail de valeur égal:
Article 7
Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit qu'a toute personne
de jouir de conditions de travail justes et favorables, qui assurent notamment:
a)
La rémunération qui procure, au minimum, à tous les travailleurs:
i)
Un salaire équitable et une rémunération égale pour un travail de valeur
égale sans distinction aucune; en particulier les femmes doivent avoir la
garantie que les conditions de travail qui leur sont accordées ne sont pas
inférieures à celles dont bénéficient les hommes et recevoir la même
rémunération qu'eux pour un même travail; (nous soulignons)
[132]
Le Pacte précise et complète la Déclaration universelle. Il engage les états
signataires, dont le Canada, à prendre tous les moyens appropriés y compris l'adoption
de mesures législatives pour garantir le plein exercice des droits qui y sont reconnus20,
droits qui découlent de la dignité inhérente à la personne humaine, comme le précise le
Préambule. Le Québec ratifie le Pacte le 21 avril 1976 et le Canada y adhère le 19 mai
1976.
2.1.2.3
La Déclaration sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination à
l'égard des femmes
[133]
Parallèlement à cette activité conventionnelle, la Commission sur le statut de la
femme des Nations Unies, créée en 1946, propose l'adoption d'un traité spécifique sur
l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Bien que divers instruments
garantissent le droit à l'égalité à tous les être humains, l'adoption d'un tel traité apparaît
essentiel compte tenu de l'ampleur des discriminations dont font toujours l'objet les
femmes. Les efforts de la Commission débouchent d'abord sur l'adoption d'une
Déclaration sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes21, en 1967 puis
sur l'adoption, en 1979, de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les
formes de discrimination à l'égard des femmes22 ratifiée par le Canada et le Québec en
198123.
[134]
La Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination à l'égard des femmes requiert des autorités législatives compétentes
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qu'elles inscrivent dans leurs législations le principe d'égalité entre les hommes et les
femmes principe qui en matière de rémunération s'articule en terme de salaire égal
pour un travail de valeur égale tel qu'énoncé aux articles 1 et 11(1)d):
Article 1
Aux fins de la présente Convention, l'expression « discrimination à l'égard des
femmes » vise toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui
a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la
jouissance ou l'exercice par les femmes, quel que soit leur état matrimonial,
sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, des droits de l'homme et
des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social
culturel et civil ou dans tout autre domaine.
Article 11
1.
Les États parties, s'engagent à prendre toutes les mesures appropriées
pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans le domaine de
l'emploi, afin d'assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, les
mêmes droits, et en particulier:
(...)
d)
Le droit à l'égalité de rémunération, y compris de prestations, à l'égalité
de traitement pour un travail d'égale valeur aussi bien qu'à l'égalité de
traitement en ce qui concerne l'évaluation de la qualité du travail.
[135]
L'intérêt de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes
de discrimination à l'égard des femmes réside dans le fait que l'article 5a) requiert des
états signataires qu'ils prennent des mesures appropriées pour modifier les schémas et
modèles de comportement socioculturels de l'homme et de la femme en vue de
parvenir à l'élimination des préjugés et des pratiques coutumières, ou de tout autre
type, qui sont fondés sur l'idée de l'infériorité ou de la supériorité de l'un ou l'autre sexe
ou d'un rôle stéréotypé des hommes et des femmes.
[136]
L'élimination de la discrimination à l'égard des femmes s'inscrit dans une
perspective systémique, lecture qui se retrouve dans l'énoncé du principe d'égalité en
matière de rémunération tel qu'édicté à l'article 11 de la Convention. Les précisions qui
y sont faites illustrent les difficultés auxquelles se heurte la mise en oeuvre de telles
mesures. L'égalité salariale ne peut se faire sans une réévaluation du travail exempte
de discrimination fondée sur le sexe des travailleurs. Plus encore, l'article 11 (1)d) de la
Convention invite à procéder à un réexamen qui se fonde sur une égalité effective.
[137]
Au moment de la ratification de la Convention, le Canada déclarait que les
autorités législatives compétentes du Canada avaient mis en pratique le concept de
l'égalité de rémunération tel qu'envisagé à l'alinéa d) du paragraphe (1) de l'article 11
en adoptant des législations assurant la fixation de taux de rémunération sans
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discrimination fondée sur le sexe.24
[138]
L'importance de réaliser l'égalité en matière salariale fut de nouveau réitérée
lors de la Quatrième conférence mondiale sur les femmes qui s'est tenue à Beijing en
1995 et qui a donné lieu à la Déclaration de Beijing. La Déclaration de Beijing25
réaffirme les principes énoncés dans la Convention internationale sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes26 et initie des stratégies
d'implantation27. L'égalité salariale figure toujours parmi les moyens d'action pour
garantir aux femmes leurs droits économiques et leur indépendance28.
[139]
Quant à l'OIT, le caractère fondamental des principes énoncés dans la
Convention no 100 et la Convention no 111 fut réaffirmé en 1998 dans la Déclaration de
l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi, adoptée par la
Conférence internationale du travail. L'élimination de la discrimination dans l'emploi et la
profession constitue l'un des quatre principes et droits fondamentaux que l'ensemble
des membres de l'organisation s'engage à respecter, promouvoir et réaliser. Les
Conventions no 100 et 111 s'en trouvent érigées au nombre des huit conventions
fondamentales de l'OIT, de telle sorte que l'égalité de rémunération constitue une
priorité à réaliser dans les 174 pays membres de l'OIT.
[140]
Le Tribunal constate que le droit international en matière d'égalité salariale a
évolué de manière telle qu'il est maintenant incontournable pour les états d'assurer
l'effectivité du droit d'obtenir une rémunération exempte de discrimination pour les
femmes occupant un emploi sur le marché du travail. L'adoption d'une définition
permettant la comparaison entre les emplois de valeur équivalente occupés par les
hommes et ceux occupés par les femmes témoigne d'une volonté générale de
s'attaquer aux inégalités structurelles en cette matière.
[141]
Les ratifications par le Canada des Conventions no 100 et 111, du Pacte
international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de la Déclaration sur
l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes sont autant d'indications claires
de la volonté du législateur d'adopter des principes en conformité avec ces textes. Une
intention qui se dégage également des engagements du Québec sur la scène
internationale.
2.1
Le droit interne
[142]
C'est dans la foulée de ses engagements, que le Québec adoptait la Charte
des droits et libertés de la personne en 1975. Le législateur québécois a choisi de
s'attaquer au problème des fondements de la discrimination en matière salariale dans le
cadre de deux articles distincts. Avant d'aborder la portée respective de la garantie
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d'égalité de ces articles, il importe d'examiner la problématique visée par le droit à
l'égalité en matière de rémunération.
2.2.1
L'objectif poursuivi par le législateur: l'éradication de toute forme de
discrimination
[143]
La Charte vise essentiellement à garantir la reconnaissance pleine et entière
du droit à l'égalité et à la dignité inhérent à tout être humain. Plus qu'une simple
déclaration de principes, la Charte accorde une protection effective contre les diverses
formes de discrimination fondée sur un des motifs illicites tel que ceux énumérés à
l'article 10.
[144]
Le droit à l'égalité en emploi énoncé aux articles 10 à 19 garantit à tous et à
toutes le respect de leur droit individuel à l'égalité. Tel que le notent les juges Cory et
Iacobucci, il s'agit d'une promesse qui reflète les rêves les plus chers et les espérances
les plus élevées de notre société.
Presque intuitivement, tous comprennent la notion et le principe de l'égalité et
y sont attachés. Il est facile de louer (sic) l'égalité comme fondement d'une
société juste qui permet à chacun de vivre dans la dignité et l'harmonie au sein
de la collectivité. La difficulté consiste à la réaliser concrètement.29
[145]
L'interprétation des dispositions accordant une protection aux individus doit
tendre à donner une véritable portée à ce droit de vivre et de travailler sans que des
considérations personnelles ou des préjugés et stéréotypes rattachés à des groupes de
personnes ne viennent l'anéantir. Aussi, la réalisation de l'objectif visé par la Charte
passe par une interprétation large et libérale de ses dispositions. Dans l'affaire C.B. (P.
S. Empl. Rel. Comm.) c. BCGSEU30 le juge McLachlin rappelle d'ailleurs les dangers
d'adopter toute autre interprétation:
Interpréter les lois sur les droits de la personne principalement en fonction de
l'égalité formelle mine la promesse d'égalité réelle qu'elles comportent et
empêche l'examen des effets de la discrimination systémique comme notre
Cour l'a reconnu dans Action Travail des Femmes.31
[146]
La Cour suprême du Canada a rappelé à de nombreuses reprises que les lois
sur les droits de la personne doivent recevoir une interprétation large et libérale qui
favorise la réalisation de l'objet visé par ces lois32. Il appartient aux tribunaux d'évaluer
dans quelle mesure l'individu ou le groupe d'individu qui fait l'objet de discrimination
bénéficie de la même protection que ceux qui ne sont pas visés par la norme
discriminatoire et ce, qu'elle que soit la forme que revêt la discrimination33. Les motifs
du juge l'Heureux-Dubé, dans l'arrêt Québec (Commission des droits de la personne et
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des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville de)34vont dans le même sens. Elle rappelle
que dans le domaine de l'emploi, la protection qu'accorde la Charte contre la
discrimination doit permettre de « mettre fin aux exclusions arbitraires basées sur des
idées préconçues à l'égard de caractéristiques personnelles » 35.
[147]
Ainsi, le droit à l'égalité, tel que garanti aux articles 16 et 19 de la Charte doit
permettre de s'attaquer non seulement aux effets directs de la discrimination mais aussi
aux effets indirects et systémiques.
[148]
Dans l'arrêt Action travail des femmes, la Cour suprême définit ainsi le concept
de la discrimination systémique en matière d'emploi:
... c'est la discrimination qui résulte simplement de l'application des méthodes
établies de recrutement, d'embauche et de promotion, dont ni l'un ni l'autre n'a
été nécessairement conçu pour promouvoir la discrimination. La discrimination
est alors renforcée par l'exclusion même du groupe désavantagé, du fait que
l'exclusion favorise la conviction, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du groupe,
qu'elle résulte de forces « naturelles » , par exemple que les femmes « ne
peuvent tout simplement pas faire le travail » (...). Pour combattre la
discrimination systémique, il est essentiel de créer un climat dans lequel tant
les pratiques que les attitudes négatives peuvent être contestées et
découragées.36
[149]
La discrimination systémique repose sur des pratiques d'exclusion, de
distinction ou de préférence complexes qui sont, par ce fait même, difficilement
identifiables. Ce type de discrimination s'immisce dans les pratiques de rémunération
pour devenir, avec le temps, une composante « normale » des systèmes d'évaluation
des emplois et des modes de rémunération.
[150]
Les dispositions garantissant l'égalité de rémunération pour un travail de valeur
égale ont fait l'objet d'un certain nombre d'observations de la part des tribunaux
canadiens. Dans l'ensemble, ces décisions examinent l'interdit de discrimination en
matière de rémunération dans le cadre de l'article 11 de la Loi canadienne des droits de
la personne37 (ci-après LCDP) et offrent des repères utiles pour cerner l'interdit de
discriminer en matière salariale tel qu'énoncé dans la Charte.
[151]
Dans l'affaire Alliance de la fonction publique du Canada c. Le Ministère de la
défense nationale38 la Cour d'appel fédérale se penche pour la première fois sur la
portée du principe d'égalité salariale pour des fonctions équivalentes tel qu'énoncé dans
la LCDP. Dans cette affaire, l'employeur avait admis que les écarts salariaux entre
certains employés de sexe féminin effectuant un travail équivalent à certains employés
de sexe masculin était de nature systémique. Plus précisément, l'employeur admettait
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que le système de classification des emplois était à la base de l'inégalité salariale entre
les hommes et les femmes. Le débat portait uniquement sur la question de savoir si le
caractère systémique de la discrimination donnait ouverture à des rajustements
salariaux antérieurs à la date du dépôt de la plainte des victimes.
[152]
Dans ses motifs, le juge Hugessen considère la notion de discrimination
systémique dans le contexte spécifique de l'égalité salariale. Citant les remarques d'un
Tribunal canadien des droits de la personne39, il situe la problématique des disparités
salariales fondées sur le sexe dans l'espace de la discrimination systémique:
(...) le concept de la discrimination systémique est axé sur les formes de
discrimination les plus subtiles, comme l'a dit le juge en chef Dickson dans CN
c. Canada (Commission des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1114 aux
pages 1138 et 1139. Il est fondé sur la reconnaissance du fait que les moeurs
sociales et culturelles de longue date transmettent des présomptions de valeur
qui contribuent à créer de la discrimination sous des formes totalement ou
presque entièrement voilées et inconscientes. Ainsi, la tendance traditionnelle
à sous-évaluer le travail des femmes peut être perpétuée par des
présomptions selon lesquelles certains types de tâches habituellement
confiées dans le passé aux femmes ont naturellement moins de valeur que
certains types de tâches traditionnellement accomplies par les hommes.40
(nous soulignons)
[153]
Le principe d'égalité salariale vise essentiellement à s'attaquer à ces
présomptions selon lesquelles certains types de tâches, traditionnellement confiées aux
femmes, ont naturellement moins de valeur. Des perceptions qui contribuent à la sousvalorisation du travail des femmes. Rappelons que ce ne sont pas tous les écarts
salariaux qui sont, en soi, discriminatoires: seules les disparités salariales fondées sur
un motif illicite, dont le sexe, sont visées par l'interdiction de discriminer énoncée dans
les diverses législations garantissant l'égalité salariale. Le juge Hugessen note que ces
diverses dispositions visent essentiellement à remédier à la discrimination
systémique41. Il cite à cet égard les auteurs Weiner et Gunderson:
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[traduction] Peu importe la terminologie utilisée, l'équité salariale est conçue
pour corriger une forme de discrimination systémique. La discrimination
systémique est fondée sur les pratiques d'emploi. C'est un sous-produit
involontaire de pratiques et politiques en apparence neutres. Toutefois, ces
pratiques et politiques peuvent très bien avoir un impact défavorable ou
différent sur un groupe par rapport à un autre (p. ex., sur les femmes par
rapport aux hommes). Elle se distingue de la discrimination interpersonnelle où
une personne agit de façon discriminatoire envers une autre. L'équité salariale
exige des changements dans les systèmes de rémunération de façon à
garantir que les postes occupés par des femmes ne seront pas sous-évalués.42
[154]
Le juge Evans de la Cour fédérale en vient à la même conclusion dans l'affaire
Canada c. Alliance de la Fonction publique du Canada, décision rendue en 1999.43
... la politique qui a motivé l'adoption du principe de l'égalité de rémunération
pour fonctions équivalentes est l'élimination de la discrimination salariale
fondée sur le sexe en milieu d'emploi. La discrimination en cause en l'espèce
est de nature systémique, c'est-à-dire qu'elle résulte de l'application au fil du
temps de politiques et de pratiques salariales qui tendaient soit à ignorer, soit à
sous-évaluer les fonctions généralement exécutées par les femmes.
Pour comprendre l'importance d'une telle discrimination dans un contexte
d'emploi particulier, il est important de pouvoir examiner de la façon la plus
détaillée possible l'incidence, sur le salaire des hommes et sur celui des
femmes, des pratiques et politiques de l'employeur en matière de rémunération.
[155]
Le droit à l'égalité en matière de rémunération vise essentiellement à corriger
les biais sexistes qui grèvent une juste appréciation du travail des femmes sans
discrimination systémique. Dans une telle perspective, l'analyse des diverses facettes
de l'évaluation des emplois et de la détermination des salaires doit se faire en tenant
compte du but poursuivi par la garantie d'égalité en matière de rémunération inscrite
dans la Charte, soit de débusquer les biais discriminatoires qui génèrent la sousvalorisation des emplois occupés par les femmes.
[156]
Le principe établissant le droit à un salaire égal pour un travail équivalent
suppose la mise en place d'un processus de comparaison des emplois permettant de
déceler les inégalités salariales. Ce sont les emplois équivalents qui doivent recevoir un
salaire égal. Aussi, dans un premier temps, faut-il établir l'équivalence des emplois.
C'est la valeur attribuée aux emplois qui servira de base à l'exercice de comparaison.
Dans certaines législations, les critères communs à l'évaluation des emplois sont
énoncés dans la disposition interdisant la discrimination en matière de rémunération.
Comme l'expose la professeure Eliane Vogel-Polsky:
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En général, si on examine les systèmes d'évaluation des emplois, un certain
nombre de lois sur l'égalité des salaires pour un travail de valeur égale
prévoient non seulement différents éléments composant la rémunération mais
aussi les catégories et critères de classification et de promotion
professionnelle, ainsi que toutes les autres bases de calcul de la rémunération
(notamment les modes d'évaluation des emplois) doivent être communs aux
travailleurs des deux sexes.44
[157]
Force est toutefois de constater que la Charte québécoise est différente. Le
législateur a choisi de scinder le processus d'établissement de catégories d'emploi et de
classifications d'emploi et le principe d'égalité salariale en deux dispositions distinctes et
en fonction de responsabilités différentes. Les méthodes et systèmes d'évaluation des
emplois menant à l'attribution d'une valeur sont visés par l'article 16 de la Charte alors
que le droit à l'égalité salariale est inscrit à l'article 19.
2.
Le droit à l'égalité dans l'établissement de catégories ou de classifications
d'emploi
[158]
La Charte à son article 16 garantit à tous le droit à l'égalité en matière d'emploi.
Cette disposition prohibe la discrimination pour l'un des motifs énumérés à l'article 10
de la Charte à toutes les phases de l'emploi de même que dans les conditions de travail
s'y rattachant.
[159]
Les articles 10 et 16 se lisent ainsi:
10. Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine
égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou
préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation
sexuelle, l'état civil, l'âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les
convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition
sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap.
Il y a discrimination lorsqu'une telle distinction, exclusion ou préférence a pour
effet de détruire ou de compromettre ce droit.
16. Nul ne peut exercer de discrimination dans l'embauche, l'apprentissage, la
durée de la période de probation, la formation professionnelle, la promotion, la
mutation, le déplacement, la mise à pied, la suspension, le renvoi ou les
conditions de travail d'une personne ainsi que dans l'établissement de
catégories ou de classifications d'emploi.
[160]
Plutôt que d'opter pour un énoncé général, le législateur a adopté une
protection contre la discrimination en matière d'emploi qui repose sur l'énumération des
différents champs de la relation d'emploi.
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[161]
En fait, un tel énoncé n'est pas sans rappeler la protection qui était accordée
dans la Loi sur la discrimination dans l'emploi45 adoptée en 1964 et qui fut abrogée lors
de l'adoption de la Charte.
[162]
En 1975, le législateur a, en outre, jugé nécessaire d'étendre la portée de cette
protection notamment à l'établissement de catégories et de classifications d'emploi
pertinents en l'espèce.
[163]
Ces deux concepts renvoient à l'idée générale de regroupement et de
rangement. Toutefois, c'est dans le contexte spécifique de l'article 16 de la Charte, qui
garantit l'égalité en matière d'emploi, qu'il convient d'examiner la portée de ces deux
notions. De plus et bien que l'acception générale de ces termes puisse avoir une
certaine utilité, il apparaît plus judicieux de se tourner vers les définitions qui en sont
données dans la sphère des relations de travail.
2.2.2.1
Les catégories d'emploi
[164]
Le Dictionnaire canadien des relations de travail46 ne retient pas comme telle
l'expression catégories d'emploi; il propose plutôt une définition de « catégories
professionnelles »
[C]atégorie sociale, objective et réelle, formée d'une collectivité de personnes
qui s'adonnent au même travail, exercent la même profession. La profession
peut s'entendre d'une activité laborieuse particulière (la pratique du droit, de
l'enseignement, la mécanique, etc.) ou d'un regroupement d'activités
laborieuses similaires concourant à la production de biens ou de services.
Chaque catégorie professionnelle situe cette collectivité par rapport aux autres
catégories professionnelles et par rapport à la société globale. La
caractéristique commune possédée par les personnes rassemblées dans une
catégorie professionnelle crée entre ces personnes des rapports, voire des
liens d'intérêt et de solidarité. Ces liens peuvent être ou non perçus par les
personnes, et lorsqu'ils sont perçus, ils peuvent donner lieu à une action
commune, à une organisation formelle de la catégorie en groupement Syn.:
Niveau de poste, échelon d'un poste, métier, état47.
[165]
On retrouve également l'utilisation de cette notion dans la Loi sur l'équité
salariale.48 Malgré le fait que la portée de cette législation soit plus restreinte que celle
de la Charte, il est tout de même intéressant d'examiner le sens que le législateur a
donné à cette notion dans le contexte spécifique de l'équité en matière de rémunération.
[166]
Le législateur a choisi de ne pas définir cette notion. Il en traite plutôt sous
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l'angle d'une démarche préliminaire, d'un processus à compléter avant d'entreprendre
la comparaison salariale entre catégories à prédominance féminine ou masculine. Il
spécifie qu'aux fins d'identifier les catégories d'emploi, les emplois doivent être
regroupés en fonction de caractéristiques communes relatives aux fonctions ou
responsabilités semblables, à des qualifications semblables ou encore en fonction
d'une rémunération similaire49. Sans aller plus avant dans l'élaboration du processus,
cette loi, fondée sur la négociation de l'équité ou sur la responsabilité de l'employeur, en
matière d'équité, fait place à une grande latitude dans la détermination de ces
catégories.
[167]
Il ressort de ce qui précède que la notion de catégorie d'emplois réfère
essentiellement à l'action de regrouper des personnes qui s'adonnent au même genre
de travail ou qui exercent des activités professionnelles ou laborieuses semblables ou
similaires. L'intérêt d'une telle démarche est de regrouper des emplois qui, au-delà des
titres et des appellations, partagent un nombre significatif de caractéristiques
communes. C'est généralement à la lumière des fonctions effectuées dans le cadre
d'un emploi, des qualifications requises ou des responsabilités matérielles,
fonctionnelles ou organisationnelles auxquelles peuvent s'ajouter d'autres critères que
s'établissent de telles catégories. Il ne s'agit pas d'un exercice visant à établir la valeur
des emplois mais plutôt d'une démarche permettant de regrouper les emplois qui sont
de nature semblable. L'établissement de catégories d'emploi s'inscrit généralement
dans un objectif d'organisation du travail au sein d'une entreprise.
[168]
Ainsi, il est possible de dire, sans prétendre à l'exhaustivité d'énumération, que
des facteurs tels que la formation requise, les qualifications nécessaires ou l'expérience
exigée en regard de la complexité des tâches, l'autonomie, le niveau de surveillance, la
communication participent du processus de regroupement des emplois aux fins de
l'établissement de catégories.
2.
Les classifications d'emploi
[169]
Le terme classification est d'abord défini par Dion comme étant une
[d]istribution par classes ou catégories. En d'autres termes, la classification
détermine les normes permettant de procéder au classement effectif de
personnes ou d'objets.50 (Nous soulignons)
[170]
Et la classification des emplois, à proprement parler, est définie comme la
Distribution des postes de travail par classe.
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Syn.- Classification des postes de travail; classification des tâches;
classification des fonctions; classification fonctionnelle.51
[171]
La classification d'emploi réfère donc à l'idée d'une démarche d'évaluation et
de distribution systématique des emplois selon un ordonnancement régressif de leur
valeur respective. La classification des emplois repose d'abord sur l'élaboration et
l'adoption de normes, facteurs ou critères tels l'effort physique ou mental, la
coordination musculaire, la dextérité, le jugement et autres, puis sur l'évaluation de ces
emplois ou catégories d'emplois en fonction de ces normes, facteurs ou critères et des
paramètres quantitatifs qui leur sont attribués.
[172]
Le recours à une telle méthode permet une hiérarchisation des emplois selon
leur valeur relative qui peut ultimement constituer l'assise de la détermination des
salaires. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour laquelle cette méthode est fréquemment
associée au principe d'égalité de rémunération pour un travail équivalent.
[173]
La Directive 75/117/CEE52 du Conseil des communautés européennes en
constitue un bon exemple. Elle établit cette relation à son article 1(2):
Art. 1(2) . En particulier, lorsqu'un système de classification professionnelle est
utilisé pour la détermination des rémunérations, ce système doit être basé sur
des critères communs aux travailleurs masculins et féminins et établi de
manière à exclure les discriminations fondées sur le sexe.53 (Nous soulignons).
[174]
Cette disposition s'inscrit dans la foulée de l'article 5 de la Recommandation no
90 de l'OIT qui invite les États à souscrire à l'établissement de méthodes objectives et
exemptes de discrimination dans le processus d'évaluation des emplois:
Art.5. Si cela est approprié en vue de faciliter l'établissement de taux de
rémunération conformément au principe de l'égalité de rémunération entre la
main-d'oeuvre masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur
égale, chaque Membre devrait, en accord avec les organisations d'employeurs
et de travailleurs intéressées, établir des méthodes permettant d'évaluer
objectivement, soit par une analyse du travail, soit par d'autres moyens, les
travaux que comportent les divers emplois ou favoriser l'établissement de
telles méthodes, en vue d'une classification des emplois sans considération de
sexe; lesdites méthodes devraient être appliquées conformément aux
dispositions de l'article 2 de la convention.
[175]
Bien qu'un système de classification des emplois n'a pas nécessairement pour
finalité la détermination des salaires, il en constitue forcément l'une des étapes
cruciales comme en témoignent ces dispositions inscrites dans des instruments visant
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l'égalité de rémunération pour un travail équivalent.
[176]
Au Québec, l'obligation d'égalité en matière d'établissement de catégories
d'emploi et de classifications d'emploi n'est pas restreinte au seul champ de l'égalité de
rémunération. Sans égard à la finalité de l'exercice, tout regroupement des emplois en
catégories ou par classe doit se faire sans discrimination. Ceci implique que tant dans
le choix des critères que dans la valeur qui leur est attribuée, de tels systèmes doivent
être exempts de discrimination.
[177]
Il importe que les responsables de l'établissement de catégories et de
classifications d'emplois adoptent une démarche qui écarte ou met fin aux préjugés et
aux stéréotypes sexistes. Un système de classification ne sera considéré conforme à
l'article 16 de la Charte que si, tant dans sa conception que dans son application, il n'est
pas fondé sur des considérations ni susceptible de produire des effets discriminatoires.
[178]
Qu'il soit le fruit d'une décision de l'employeur ou qu'il découle d'une
négociation avec le Syndicat, tout système d'évaluation ou de classification d'emplois
doit répondre à l'exigence d'égalité sous peine d'être jugé non conforme à la Charte. En
vertu de l'article 16 de la Charte, il incombe à tous de s'assurer que le résultat d'une
telle démarche soit conforme à la garantie d'égalité.
2.
Le droit à un traitement ou à un salaire égal pour un travail équivalent
[179]
La Charte énonce distinctement le droit à l'égalité en emploi et le droit à
l'égalité de rémunération pour un travail équivalent sans discrimination fondée, entre
autres, sur le sexe. L'article 19 de la Charte stipule que:
19.Tout employeur doit, sans discrimination, accorder un traitement ou un
salaire égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail
équivalent au même endroit.
Il n'y a pas de discrimination si une différence de traitement ou de salaire est
fondée sur l'expérience, l'ancienneté, la durée du service, l'évaluation au
mérite, la quantité de production ou le temps supplémentaire, si ces critères
sont communs à tous les membres du personnel.
[180]
En 1997, au moment de l'adoption de la Loi sur l'équité salariale, s'ajoute un
nouvel alinéa à l'article 19 qui ne trouve pas cependant application dans le présent litige:
Les ajustements salariaux ainsi qu'un programme d'équité salariale sont, eu
égard à la discrimination fondée sur le sexe, réputés non discriminatoires, s'ils
sont établis conformément à la Loi sur l'équité salariale. (chapitre E-12.001)
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[181]
L'article 128 de la Loi sur l'équité salariale aborde la question des plaintes
fondées sur l'article 19 de la Charte et déposées à la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse avant le 21 novembre 1997.
Article 128 Les plaintes pendantes à la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse relatives à la violation de l'article 19 de la Charte
des droits et libertés de la personne (chapitre C-12) pour le motif de
discrimination salariale fondée sur le sexe avant le 21 novembre 1997 sont
étudiées et réglées conformément aux dispositions alors applicables de cette
Charte.
[182]
Le Législateur a clairement indiqué qu'il revient à la Commission de continuer
d'étudier les plaintes fondées sur l'article 19 de la Charte, lorsque celles-ci ont été
déposées avant l'entrée en vigueur de la Loi sur l'équité salariale. Dans l'éventualité où
la Commission décide de s'adresser au Tribunal pour obtenir une mesure de
redressement conformément aux dispositions de la Charte, le Tribunal a juridiction pour
entendre pareil litige et ce indépendamment de la Loi sur l'équité salariale.
[183]
Enfin, l'alinéa 56 (2) de la Charte précise que les termes traitement et salaire «
incluent les compensations ou avantages à valeur pécuniaire se rapportant à l'emploi »
54.
[184]
Ce sont là les dispositions de la Charte qui traitent de l'égalité en matière
salariale.
[185]
Ainsi, l'article 19 de la Charte garantit expressément l'égalité de traitement ou
de salaire pour un travail équivalent. Cette disposition interdit à un employeur de verser
un salaire ou d'accorder un traitement différent aux membres de son personnel qui
accomplissent un travail équivalent et ce en raison de l'un des motifs énumérés à
l'article 10 de la Charte. Cette disposition établit essentiellement le principe de l'égalité
de rémunération pour les hommes et les femmes qui exercent un travail équivalent.
[186]
Il importe d'insister sur le terme équivalent qui se trouve à l'article 19 de la
Charte. Une telle spécification donne à cette disposition une portée large qui permet de
s'attaquer aux causes réelles de la discrimination salariale. Elle détermine aussi les
paramètres de l'exercice comparatif sur lequel repose la garantie d'égalité salariale et
sur la portée des résultats.
[187]
Le législateur reconnaît certaines exceptions au principe de salaire égal pour
un travail équivalent dans la mesure où tous les salariés sont soumis de la même
manière à ces exceptions. En vertu de cette disposition, les pratiques salariales
engendrant des disparités salariales entre hommes et femmes sont discriminatoires à
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moins d'être justifiées par l'expérience, l'ancienneté, la durée du service, l'évaluation au
mérite, la quantité de production ou le temps supplémentaire et que ces critères sont
communs à tous les membres du personnel. Dans la présente affaire, il n'est cependant
pas nécessaire de se pencher sur la portée de ce second alinéa, les parties n'ayant pas
soulevé cette justification.
[188]
Le droit de recevoir un salaire égal pour un travail équivalent sans
discrimination fondée sur le sexe fait partie de la Charte depuis vingt cinq ans. Malgré
cela, cette disposition n'a pas donné lieu à une jurisprudence abondante et encore
moins à un examen approfondi de la portée de cette disposition.
[189]
Dans l'affaire Québec (Ville de) c. Commission des droits de la personne du
Québec55, la majorité de la Cour d'appel situe ainsi l'objet de cette disposition:
Lorsque l'article 19 parle de salaire égal pour un travail équivalent, il énonce un
des droits que la charte entend garantir. Ce droit s'inscrit dans le courant de la
lutte pour l'égalité de rémunération au travail qui elle-même est partie
constituante de la lutte plus générale pour l'égalité sociale et économique.
[190]
Cette remarque du juge Nichols évoque le contexte qui a présidé à la rédaction
de la Charte: l'adoption de cet instrument précède de quelques mois la ratification par le
Québec du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui
vise justement à s'attaquer aux inégalités sociales, économiques et culturelles.
[191]
En privilégiant le principe d'égalité salariale pour un travail équivalent à la
place d'une formule plus restrictive, le Québec est cohérent avec l'engagement
international qu'il s'apprête alors à prendre, considérant que le Pacte reconnaît, à
l'article 7, le droit des femmes d'obtenir un salaire égal pour un travail de valeur égale
sans discrimination. Cette formule permet notamment de prendre en considération le
clivage historique entre les emplois féminins et masculins sur le marché du travail. La
matérialisation de ce droit s'avérant essentielle à l'effectivité du droit à l'égalité,
l'adoption de l'article 19 se présente comme un moyen d'en assurer le plein exercice.
Car tout comme l'article 7 du Pacte de même que l'article 11 de la Convention
internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des
femmes56 l'article 19 de la Charte repose sur le caractère exhaustif de l'exercice de
l'évaluation des emplois et sur le droit de recevoir un salaire égal pour un travail
équivalent comme finalité.
[192]
En effet, le droit à l'égalité énoncé à l'article 19 repose sur le modèle de
l'égalité substantive plutôt que sur celui plus réducteur de l'égalité formelle. C'est la
présence du concept d'équivalence qui impose pareille analyse. Tel que l'indiquera la
Cour suprême du Canada dans l'affaire Andrews57, plus de dix ans plus tard, le
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caractère substantif de l'égalité commande que ce principe dépasse l'identité de
traitement.
C'est un concept comparatif dont la matérialisation ne peut être atteinte ou
perçue que par comparaison avec la situation des autres dans le contexte
socio-politique où la question est soulevée. Il faut cependant reconnaître dès le
départ que toute différence de traitement entre des individus dans la loi ne
produira pas forcément une inégalité et, aussi, qu'un traitement identique peut
fréquemment engendrer de graves inégalités. Cette proposition a souvent été
exprimée dans la documentation sur le sujet mais, comme je l'ai déjà souligné
à une autre occasion, nulle part n'a-t-elle été formulée plus justement que dans
la fameuse phrase du juge Frankfurter dans l'arrêt Dennis v. United States,
339 U.S. 162 (1950), à la p. 184:
[TRADUCTION] C'était un homme sage celui qui a dit qu'il n'y avait pas de
plus grande inégalité que l'égalité de traitement entre individus inégaux.
[193]
Le droit à l'égalité salariale inscrit à l'article 19 va au-delà de l'égalité formelle.
Il suppose davantage que la simple interdiction de payer un salaire inférieur pour des
fonctions identiques. Ainsi, en fondant le droit à l'égalité sur l'équivalence plutôt que sur
l'identité des fonctions ou du travail, le législateur québécois inscrit l'interdiction de
discrimination dans un processus d'évaluation-comparaison d'emplois édifié sur le
principe de l'équivalence de valeur. De surcroît, une telle formule remet en cause le
phénomène de ségrégation professionnelle qui fait en sorte que les hommes et les
femmes se concentrent dans des emplois différents et que le travail des femmes est de
manière générale sous-évalué par rapport à celui des hommes.
[194]
L'interprétation large à laquelle convient les dispositions garantissant l'égalité
salariale fut évoquée par le juge L'Heureux-Dubé dans l'affaire Syndicat des employés
de production du Québec et de l'Acadie c. Canada (Commission canadienne des droits
de la personne).58 Précisons que la question en litige devant la Cour suprême consistait
à déterminer si le rejet d'une plainte fondée sur l'alinéa 36(3)b de la Loi canadienne sur
les droits de la personne par la Commission canadienne des droits de la personne
pouvait faire l'objet d'un examen par la Cour d'appel fédérale. La majorité de la Cour
suprême a décidé qu'une décision de la Commission canadienne ne donnait pas lieu à
un examen par la Cour d'appel fédérale et a arrêté là l'examen.
[195]
Madame le juge L'Heureux-Dubé (dissidente sur la question du pouvoir
d'examen de la Cour d'appel fédérale) élabore sur le concept d'égalité salariale. Elle
constate que la mise en oeuvre du droit à l'égalité de rémunération pour fonctions
équivalentes comporte de nombreuses difficultés. À cet égard, la définition du concept
de valeur peut s'avérer particulièrement complexe de constater le juge L'HeureuxDubé59. Elle signale également le caractère particulier du droit à l'égalité de
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rémunération.
(...) L'article 11, cependant, diffère des art. 7 et 10. La portée de sa protection
est en effet délimitée par le concept d' « équivalence » : cette disposition
n'empêche pas un employeur de rémunérer différemment des emplois non
équivalents. Dans le cadre particulier de cette disposition, la discrimination
salariale présuppose l'équivalence, dans le même établissement, des fonctions
exécutées par des femmes et des hommes. En conséquence pour que soit
accueillie une plainte fondée sur l'article 11, il faut établir l'équivalence des
fonctions à l'égard desquelles est alléguée une situation de disparité salariale
discriminatoire. 60
[196]
Ces remarques du juge l'Heureux-Dubé s'inscrivent dans le cadre de l'article
11 de la LCDP. Cette disposition se distingue à certains égards de l'article 19. Malgré
tout, les remarques qu'elle formule n'en demeurent pas moins pertinentes dans le
contexte de la Charte.
[197]
Les difficultés peuvent, en effet, se multiplier lors de l'élaboration et de la mise
en oeuvre d'un exercice visant à réaliser l'égalité salariale. Le droit en cause requiert le
respect du principe de non-discrimination dans l'ensemble des méthodes et pratiques
d'évaluation tout autant que des effets et conséquences des systèmes de rémunération.
L'évaluation des emplois de même que leur rangement aux fins de comparaison
salariale constituent des étapes décisives qui permettent d'identifier l'existence ou non
d'écarts salariaux entre les emplois occupés par les femmes et ceux occupés par les
hommes.
[198]
À cet égard, le droit à une rémunération exempte de discrimination repose
d'abord sur une évaluation qui n'occulte pas les caractéristiques essentielles du travail
des femmes et qui leur attribue une valeur exempte de préjugés sexistes. Par ailleurs,
comme le notait le juge Nichols dans l'affaire de la Ville de Québec, « il n'y aura atteinte
au droit garanti que s'il (l'employeur) le fait par discrimination » 61.
[199]
Et il ajoute, quant à la portée de la protection qu'accorde l'article 19 de la
Charte,
... il faut bien se garder de sauter immédiatement à la conclusion qu'il y aura
discrimination chaque fois que chez un même employeur des membres de son
personnel accomplissant un travail équivalent ne recevront pas un salaire égal.
Pour conclure que l'inégalité constitue une discrimination il faut franchir une
étape de plus.
En effet l'article 19 commence par les mots: « Tout employeur doit, sans
discrimination, accorder un salaire égal... » (Les italiques sont du soussigné).
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Si un employeur n'accorde pas un salaire égal pour un travail équivalent, il n'y
aura atteinte au droit garanti que s'il le fait par discrimination.62
[200]
L'article 19 de la Charte vise, entre autres, à remédier à la discrimination
systémique sans y être restreint. Ainsi, une femme qui est payée un salaire moindre
que son confrère masculin tout en exécutant un travail identique peut invoquer l'article
19 de la Charte pour que cesse cette situation. Mais la portée de l'article 19 permet
également de s'attaquer à des situations de discrimination plus subtiles, moins visibles.
[201]
L'article 19 de la Charte, tout en étant muet sur les méthodes permettant
d'établir cette équivalence, présuppose une évaluation de la valeur des emplois et une
comparaison salariale entre emplois de même valeur. Il se distingue de l'article 11 de la
Loi canadienne qui précise à son alinéa (2) que l'équivalence des fonctions repose sur
quatre facteurs soient la qualification, l'effort, la responsabilité et les conditions de
travail. En fait, le droit qu'énonce l'article 19 de la Charte est celui d'obtenir un salaire
qui ne soit pas entaché de préjugés et de stéréotypes ayant pour effet de discriminer en
sous-évaluant la valeur du travail effectué par les femmes et ce, quels que soient les
facteurs utilisés pour en déterminer la valeur.
[202]
L'exercice de comparaison qui conclut à l'équivalence des emplois doit
permettre aux employés visés d'obtenir des salaires égaux. Toute pratique salariale ou
système de rémunération qui engendrerait des disparités salariales entre les employés
occupant de tels emplois va nécessairement à l'encontre de l'article 19. En somme, le
résultat final de l'exercice doit conduire à écarter les pratiques ou structures, négociées
ou non, qui reposent sur des moeurs sociales et culturelles qui contribuent à créer de la
discrimination.
[203]
L'article 19 vise essentiellement à corriger les écarts salariaux dus à la
discrimination systémique entre, notamment, les hommes et les femmes. Cette forme
de discrimination repose sur des pratiques et des systèmes qui, sans avoir été mis en
place pour avoir un impact défavorable sur le salaire versé aux femmes par rapport au
salaire versé aux hommes, ont produit cet effet et ce, de longue date. L'égalité salariale
sans discrimination fondée sur le sexe requiert donc que chacune des pratiques ayant
un effet défavorable sur le salaire des femmes soit remplacées à défaut de quoi la
discrimination perdure.
[204]
La Charte laisse une grande discrétion à l'employeur quant au choix de la
méthode permettant d'établir la valeur des emplois. Un employeur peut privilégier un
plan d'évaluation des emplois fondé sur l'établissement de catégories d'emploi et sur la
classification de ces emplois au sens de l'article 16 ou préférer des méthodes moins
formelles. Dans l'une ou l'autre circonstance, il doit s'assurer que chaque étape du
processus d'évaluation et de comparaison des emplois est exempte de discrimination et
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qu'en bout de ligne le salaire versé aux employés occupant des emplois équivalents
soit égal.
[205]
L'article 19 de la Charte impose en effet ce résultat: pour un travail équivalent,
les femmes doivent recevoir un salaire égal à celui des hommes. De telle sorte qu'au
terme d'un exercice d'évaluation et de comparaison d'emplois exempt de discrimination,
l'employeur qui continuerait d'appliquer un système de rémunération ou d'administration
des salaires qui engendre des effets discriminatoires en raison du sexe des employés
contreviendrait à l'article 19 de la Charte.
[206]
Cela vaut pour l'ensemble des étapes relatives au système de rémunération.
En d'autres termes, cela comprend tant les étapes de détermination des salaires par
emploi ou catégories d'emploi que le mode de rémunération, l'assignation d'une
rémunération spécifique individuelle ou le mode de progression salariale des individus
au sein d'une organisation.
[207]
Le recours à des modes de rémunération qui génèrent des salaires inégaux
pour les hommes et les femmes exerçant des emplois équivalents irait à l'encontre de
l'article 19 et ce même si l'employeur n'a pas l'intention de discriminer. Il serait, en effet,
difficile de conclure que deux emplois sont payés également si durant quelques années,
les titulaires des emplois équivalents ne reçoivent pas le même salaire.
[208]
À ce stade, il importe de rappeler que la négociation entre un syndicat et un
employeur aux différentes étapes de la démarche menant à l'égalité salariale ne peut
se faire de manière discriminatoire. Une entente qui entérine une pratique
discriminatoire ne peut être considérée justifiée du seul fait que les parties à la
convention ou à l'entente en ont décidé ainsi. Comme le rappelle la Cour suprême dans
l'affaire Renaud, que ce soit par contrat ou par convention collective, les ententes
doivent se faire en respect avec les exigences des lois:
... quiconque fait preuve de discrimination s'expose aux peines que la Loi
prévoit. Par définition, le syndicat est une personne (art 1). En conséquence, le
syndicat qui est à l'origine de l'effet discriminatoire ou qui y contribue encourt
une responsabilité.63
[209]
Toutefois, la responsabilité d'un syndicat ne pourra être engagée que si la
disposition impose une obligation similaire à l'employeur et au syndicat. Tel n'est pas le
cas de l'article 19 de la Charte. Dans le cadre de cette disposition, seul l'employeur peut
être tenu responsable des écarts salariaux discriminatoires. Dans l'affaire Bell Canada
c. SCEP64, le juge Décary de la Cour d'appel fédérale examine cette question dans le
cadre de l'article 11 de la Loi canadienne.
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... Pour des motifs qui lui sont propres, le législateur a choisi, dans l'article 11,
de ne tenir uniquement l'employeur responsable des disparités salariales
relativement au travail de valeur égale. Conclure à la responsabilité à part
égale des syndicats. soit implicitement en vertu de l'article 11 soit
indirectement au moyen de dispositions comme l'article 10, pour avoir participé
à la fixation de salaires différents relativement à un travail de valeur égale irait
carrément à l'encontre du texte clair de la Loi et de l'intention évidente du
législateur.65
[210]
De même, l'article 19 de la Charte impose à l'employeur seulement l'obligation
d'accorder un salaire égal aux employés exerçant un travail équivalent. Ainsi, il relève
de la seule responsabilité de l'employeur de s'assurer, aux termes de cette disposition,
que les hommes et les femmes qui occupent des emplois jugés équivalents reçoivent
un salaire égal à moins que l'écart salarial ne soit dû à l'une des exceptions énoncées
au second alinéa de l'article 19.
[211]
Il en va différemment de l'établissement des catégories d'emploi et des
classifications d'emploi inscrit à l'article 16 de la Charte. En vertu de cette disposition, le
législateur impose à tous l'obligation de respecter le droit à l'égalité sans discrimination
dans les démarches ou conditions d'emploi qui y sont énumérées.
3.
Les dommages moraux
[212]
La Commission réclame l'octroie de dommages moraux pour l'atteinte au droit
à l'égalité qu'ont subie chacune des plaignantes et victimes.
[213]
L'article 49 de la Charte prévoit :
49. Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente
Charte confère à la victime le droit d'obtenir la cessation de cette atteinte et la
réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.
En cas d'atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner
son auteur à des dommages-intérêts punitifs.
[214]
Trois types de dommages peuvent conséquemment être demandés :
matériels, moraux ou punitifs. L'article 49 de la Charte reconnaît, à toute personne
victime d'une atteinte illicite à un droit ou une liberté fondamentale, le droit à la
réparation totale du tort qui lui a été causé. Ainsi, les dommages accordés à la suite
d'une violation d'un droit reconnu par la Charte sont de nature strictement
compensatoire et il n'en va pas autrement des dommages moraux. Le préjudice allégué
en demande doit conséquemment être prouvé.
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[215]
Dans l'arrêt Aubry c. Vice-Versa66 les juges l'Heureux-Dubé et Bastarache
rappellent cette obligation qui incombe à la partie demanderesse.
Il fallait, néanmoins, que l'intimée établisse qu'elle a subi un préjudice. Ce
préjudicie peut être extrapatrimonial, patrimonial, ou les deux.
En ce qui concerne les dommages extrapatrimoniaux, nous croyons, tout
comme le juge Baudouin, que l'on ne saurait imputer des dommages du seul
fait qu'il y a eu atteinte à un droit garanti par la Charte québécoise. (...).67
[216]
Bien que dissident sur l'issue du pourvoi, le juge Lamer, alors juge en chef,
souscrit à ce principe. Il précise que la seule infraction à un droit reconnu par la Charte
ne peut donner lieu automatiquement à une compensation68.
[217]
Force est donc de constater que la seule allégation de l'atteinte à un droit ou
de la négation de l'exercice d'un droit en pleine égalité est en soi insuffisante pour
prouver l'existence d'un préjudice moral. La règle exige la démonstration d'un préjudice
réel et personnel.
[218]
Toutefois, la question se pose à l'égard du litige résultant de pratiques
discriminatoires de nature systémique : en quoi doit donc consister la preuve du
préjudice moral? Plus simplement, la partie en demande doit-elle faire témoigner la
totalité des personnes alléguant des dommages moraux pour faire la preuve du
préjudice subi individuellement par les victimes réclamant une compensation?
[219]
Dans l'affaire Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de
l'hôpital St-Ferdinand69, la Cour suprême se penche sur les conditions requises pour
l'octroi de dommages moraux. Le Syndicat alléguait que les bénéficiaires de l'hôpital StFerdinand ne pouvaient recevoir la réparation pour préjudice moral accordée par le juge
de première instance puisqu'en raison de leur condition mentale, ils n'étaient pas en
mesure d'éprouver satisfaction ou insatisfaction. La Cour suprême a rejeté pareille
supputation.
[220]
S'interrogeant sur la nature des dommages moraux dans les motifs qu'elle
rédige pour la Cour, le juge l'Heureux-Dubé écarte une conception purement subjective
tant au chapitre de la justification au droit à une compensation en matière de
dommages moraux qu'au chapitre du calcul de ce type de dommage. La Cour privilégie
plutôt une appréciation qui repose sur la matérialité du préjudice.
[221]
Le juge L'Heureux-Dubé précise qu'une telle conception n'exclut pas la notion
subjective du préjudice moral. Citant le professeur J. D.Jutras, le juge dispose de la
question en déclarant que l'aspect essentiel de l'analyse retenue
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
...c'est la reconnaissance de l'existence d'un préjudice extrapatrimonial objectif
et indépendant de la souffrance ou de la perte de jouissance de la vie
ressentie par la victime. Dans cette perspective, le préjudice est constitué non
seulement de la perception que la victime a de son état, mais aussi de cet état
lui-même.70
[222]
Quant au calcul des dommages moraux, la Cour suprême spécifie que les
tribunaux doivent tenir compte de la valeur du dommage pour la victime (subjectif) ainsi
que de la valeur purement objective de l'atteinte au droit garanti par la charte.
L'évaluation de la compensation doit aussi permettre l'amélioration de la situation de la
victime compte tenu de son état (méthode fonctionnelle).
[223]
Au terme de l'analyse de la Cour suprême, il ressort clairement que la preuve
de dommage moral n'est pas restreinte à la seule appréciation que se font les victimes
du préjudice moral découlant de l'atteinte à leur droit. Une preuve reposant sur les faits
générateurs et sur le caractère tangible et visible en résultant pourra donner lieu à
l'octroi d'une compensation pour le dommage moral qui en découle. D'ailleurs, dans
l'affaire hôpital St-Ferdinand, la preuve ne reposait pas sur le témoignage des
bénéficiaires. Les principaux éléments de preuve devant le juge de première instance
provenaient du témoignage des personnes qui ont remplacé les employés en grève
ainsi que sur celui de témoins experts.
[224]
À la lumière de cette décision de la Cour Suprême, il est manifeste que lorsque
les effets et conséquences d'une atteinte au droit à l'égalité affectent de nombreuses
victimes de manière similaire, une preuve par démonstration et analyse de ses effets et
conséquences peut être reçue sans pour autant qu'il soit requis que ce soit les victimes
elles-mêmes qui doivent en témoigner.
[225]
L'analyse de la détermination des dommages moraux résultant de pratiques
discriminatoires ayant un caractère systémique pourrait faire l'objet d'une preuve
d'experts exposant l'impact de telles pratiques sur les victimes. Certes, pareille preuve
doit toujours avoir un caractère personnel probant pour donner lieu à l'octroi d'une
compensation. Une preuve impressionniste ne serait pas suffisante pour convaincre un
tribunal des effets néfastes de pratiques discriminatoires sur un groupe donné. L'octroi
de dommages moraux vise à compenser la dépréciation, l'humiliation, le sentiment de
rejet, de trahison ou de frustration vécus par les victimes d'actes discriminatoires. Qu'il
s'agisse d'une preuve d'expert, de tiers ou des victimes elles-mêmes, un Tribunal
n'accordera pareil dommage que si l'humiliation ou tout autre sentiment néfaste
résultant de la discrimination lui est clairement démontré.
2.
L'application du droit aux faits
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[226]
La présente affaire soulève deux questions:
1.
L'Université Laval a-t-elle exercé de la discrimination à l'égard de ses employées
du Groupe Bureau dans le cadre de l'opération équité salariale tenue en 1995-1996
dans l'établissement de catégories ou de classifications d'emploi en contravention de
l'article 16 de la Charte? Si oui, le Syndicat peut-il être tenu responsable de cette
discrimination?
2.
L'Université Laval a-t-elle exercé de la discrimination à l'égard de ses employées
du Groupe Bureau dans le cadre de l'opération équité salariale tenue en 1995-1996
dans la comparaison salariale et la détermination du mode de rémunération en
contravention de l'article 19 de la Charte? Si oui, le Syndicat peut-il être tenu
responsable de cette discrimination?
[227]
Avant de répondre à ces questions, il convient de présenter et de disposer des
expertises que les parties ont soumises au Tribunal.
3.1
Les expertises
[228]
Le Tribunal a reçu les rapports et entendu les témoignages des experts MarieThérèse Chicha, professeure à l'École des relations industrielles de l'Université de
Montréal et de Léopold Larouche, expert-conseil en gestion de Gestion-conseil LORAN
Inc.
[229]
Madame Chicha a concentré son expertise sur l'analyse de la double structure
salariale et sur ses effets en terme d'équité salariale. Elle formule ainsi la question: Estce que la double structure salariale présentée ci-dessus permet d'assurer un salaire
égal entre les emplois à prédominance féminine du Groupe Bureau et les emplois
équivalents à prédominance masculine du Groupe Métiers et services ?
[230]
Elle explique que pour répondre à cette question, il faut d'abord voir qu'une
politique de rémunération peut reposer sur deux éléments distincts, soit le contenu de
l'emploi, soit les caractéristiques individuelles des titulaires. Une structure ou un mode
de rémunération à taux unique ne repose que sur la valeur de l'emploi alors que la
structure de rémunération à échelles tient compte des caractéristiques personnelles des
titulaires.
[231]
Or, selon son analyse en l'espèce, l'évaluation-comparaison d'emplois avait
pour but d'établir la valeur de chaque emploi ou fonction indépendamment des
caractéristiques individuelles des salariés concernés. Elle a procédé à un examen des
facteurs utilisés dans l'évaluation des emplois pour conclure que, telles qu'énoncées,
les descriptions des fonctions permettent de dire que tant l'expérience, la formation
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
requise que la complexité des fonctions font partie intégrante de l'exercice réalisé. Elle
soumet, par ailleurs, que son analyse l'amène à constater qu'à l'étape de la
détermination du mode de rémunération, les parties ont fait intervenir, dans le cas des
employées féminins du Groupe Bureau, une caractéristique individuelle, qu'elle identifie
à l'ancienneté. Ceci explique, selon elle, qu'on retienne un mode de rémunération à
échelle selon lequel une personne obtient le salaire réel de la fonction après un certain
nombre d'années de service.
[232]
Pour elle, l'hypothèse d'explication la plus plausible de ce choix serait que les
titulaires auraient à s'ajuster graduellement aux exigences spécifiques du milieu
organisationnel. Les procédures, les règles et les pratiques spécifiques au milieu
universitaire nécessiteraient une adaptation de quelques années. Cependant, elle note
qu'il en irait de même pour les employés du Groupe Métiers et services.
[233]
Elle conclut de son analyse que « dans le cas sous examen, la double
structure salariale ne permet pas d'assurer un salaire égal entre emplois à
prédominance féminine et emplois équivalents à prédominance masculine » .
[234]
Le Tribunal retient de l'expertise de madame Chicha que, pour les fins de
déterminer le salaire exempt de discrimination au sens de l'article 19 de la Charte,
l'employeur doit choisir un mode de rémunération conforme aux critères de l'évaluation
- comparaison d'emploi ayant permis d'établir l'équivalence des emplois et l'appliquer
tant au Groupe Bureau qu'au Groupe Métiers et services.
[235]
L'expertise présentée par monsieur Larouche se veut plus axée sur l'ensemble
de l'exercice d'équité salariale à la lumière de la plainte logée auprès de la Commission.
Il a examiné la situation antérieure à l'aide de la convention collective pour ensuite
donner son opinion sur trois points: la règle d'intégration salariale; la double structure; le
caractère vexatoire.
[236]
Les derniers chapitres de l'expertise présentent une analyse, appuyée
d'annexes, des différentes phases d'un exercice d'équité salariale. Monsieur Larouche
propose au Tribunal d'analyser le tout à l'aide des lois et règlements ontariens et
québécois sur l'équité salariale. Le Tribunal ne retient donc pas cette partie de
l'expertise puisqu'il ne lui appartient pas de vérifier, contrôler ou même examiner la
conformité de l'exercice en cause ici à la lumière de ces lois ou règlements. Il n'en voit
pas, non plus, la pertinence puisqu'il s'agit en l'espèce de déterminer s'il y a eu atteinte
au droit à l'égalité des plaignantes ou, en d'autres termes, si celles-ci ont fait l'objet d'un
traitement discriminatoire fondé sur le sexe.
[237]
Au chapitre 2 de son expertise, monsieur Larouche décrit les régimes salariaux
qui prévalent à l'Université avant et après l'exercice d'équité salariale et ce, pour les
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
groupes Métiers et services, Bureau et Techniques. Il explique la présence du Groupe
Technique à ce chapitre, d'une part, en raison des particularités de ce groupe sur le
plan de sa composition - prépondérance masculine, comme le Groupe Métiers et
services - et sur le plan de la structure salariale - système à échelons comme le Groupe
Bureau - et, d'autre part, en raison de l'impact éventuel que pourrait avoir sur cette
catégorie la décision du Tribunal.
[238]
Sur ce point, le Tribunal constate que, nulle part dans son rapport d'expertise
ou dans son témoignage, monsieur Larouche ne considère ces trois groupes d'emplois
de valeur équivalente. D'ailleurs, les annexes C et D71 permettent de conclure que le
Groupe Technique n'est pas de valeur équivalente aux deux autres: les fonctions du
Groupe Technique obtiennent tous des pointages entre 482 et 670 points alors que les
fonctions des groupes Bureau et Métiers et services se positionnent tous entre 239 et
481 points.
[239]
Aux termes de la Charte, l'exercice d'évaluation-comparaison salariale des
fonctions ne concerne que les fonctions jugées équivalentes soit, dans le cadre de
l'opération équité salariale de l'Université, les fonctions des groupes Bureau et Métiers
et services. En conséquence, le Tribunal ne voit pas comment une décision portant sur
les fonctions équivalentes des groupes Bureau et Métiers et services pourrait affecter le
Groupe Technique. D'ailleurs, et contrairement à ce qui ressort de son rapport, l'expert
Larouche a reconnu en témoignage que le but de l'exercice dans le cas du Groupe
Technique était plutôt l'appariement de ces fonctions avec des fonctions semblables
dans la Fonction publique québécoise. Le Tribunal ne retient donc pas cette approche
de l'expert.
[240]
Toujours au même chapitre monsieur Larouche note le maintien de différences
dans les systèmes et règles de détermination des salaires, malgré la reconnaissance
d'équivalences résultant d'un système unique d'évaluation des emplois. Il constate
qu'un système à échelons s'applique au Groupe Bureau et un système à taux unique
s'applique au Groupe Métiers et services, reconnu comme équivalent. Monsieur
Larouche reconnaît que l'entente perpétue la double structure dans le cas de ces deux
groupes.
[241]
Il signale toutefois la présence d'un changement dans la logique de la structure
salariale du Groupe Métiers et services, changement qu'il qualifie de significatif; il s'agit
de l'abolition du système d'apprentissage.
[242]
Monsieur Larouche explique qu'avant 1996, les salariés du Groupe Métiers et
services pouvaient recevoir une rémunération à taux réduit. À la lecture de l'Annexe C-2
intitulée « Dispositions particulières relatives à l'apprentissage » , le Tribunal constate
que la possibilité de rémunération à taux réduit était restreinte à la formation d'apprentis
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
et ne s'appliquait uniquement que pour la période durant laquelle le salarié complétait
un apprentissage dans le but d'acquérir les compétences liées au métier visé.
[243]
Tel qu'il ressort des dispositions pertinentes, il ne s'agissait pas d'échelons
mais bien de taux salariaux du métier concerné réduits d'un pourcentage déterminé
mais croissant de période en période jusqu'à atteindre 80 à 85 % du taux de salaire la
dernière année d'apprentissage. En fait, la réduction du taux salarial était due au fait
que les apprentis n'avaient pas les compétences requises pour occuper la fonction
visée par la formation. De plus, seuls les fonctions « métiers » et non les emplois «
services » de ce groupe pouvaient bénéficier de ce programme d'apprentissage.
[244]
Quoi qu'il en soit, cette possibilité n'est jamais intervenue d'aucune manière
dans le classement de la « fonction » pas plus que dans la détermination du rangement
salarial de celle-ci. De telle sorte que seule l'accession à la fonction elle-même est
pertinente ici puisqu'il s'agit de comparer des fonctions en plein exercice, des fonctions
pour lesquelles des exigences préalables sont requises.
[245]
Dans le cas des Métiers, que ce soit avant ou après l'entente sur l'équité
salariale, c'est la carte de compétence et, dans certain cas, l'expérience qui constituent
l'exigence ou les exigences requises pour obtenir un poste et exercer une fonction du
Groupe Métiers et services.
[246]
À la lumière des explications fournies par monsieur Larouche et des
informations comprises à l'annexe C-2, le Tribunal considère que la question du
système d'apprentissage n'est pas pertinente dans le présent débat.
[247]
En conclusion du chapitre 2, monsieur Larouche signale qu'aucune décision
résultant de l'entente de 1996 ne réfère au sexe comme caractère distinctif. En
témoignage, il explique qu'une décision suppose un changement ou une modification
du système antérieur. Dans le cas présent, la coexistence de structures salariales à
taux unique et à échelons n'ayant pas fait l'objet de modifications, monsieur Larouche
reconnaît qu'il n'a pas abordé l'impact discriminatoire ni considéré l'effet que pourrait
générer la conservation d'une double structure salariale. Cette conclusion du rapport
d'expertise ne s'applique donc pas aux questions soumises au Tribunal.
[248]
Le chapitre 3 de l'expertise de monsieur Larouche est consacré à l'examen des
problématiques soulevées par la plainte. Selon monsieur Larouche, la plainte faite à la
Commission porterait essentiellement sur les règles d'intégration ce qui, pour lui,
constitue un procédé normal d'insertion dans les échelles salariales et, par conséquent,
exempt de biais sexiste. À son avis, ce ne sont que des mesures transitoires entre
l'ancien régime et le nouveau, un procédé administratif nécessaire qui n'entraîne qu'un
désavantage ponctuel pour les salariés assujettis à un système à échelons face aux
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
salariés ayant un taux unique.
[249]
Monsieur Larouche insiste sur le caractère ponctuel et non récurrent des effets
indésirables d'une règle d'intégration qui repose, comme à l'Université Laval, sur une
double structure; les écarts salariaux durent le temps qu'il faut pour atteindre le
maximum de l'échelle salariale et ce tant lors de la reclassification qu'en matière de
promotion des employés du Groupe Bureau. Tel qu'il le notera durant son témoignage,
la présence d'une structure à échelons est toutefois une condition essentielle pour que
la règle d'intégration ait des effets indésirables. Il précise d'ailleurs qu'aucun des
employés du Groupe Métiers et services n'a souffert des effets indésirables de la règle
d'intégration contrairement aux employés du Groupe Bureau.
[250]
Le Tribunal remarque que, dans son appréciation du fondement de la plainte,
monsieur Larouche fait abstraction du fait que c'est exclusivement par la disposition VII
du Protocole d'entente sur l'implantation du nouveau système de rémunération dans le
cadre de l'opération d'équité salariale intitulée « Règles d'intégration » que les parties
ont manifesté leur choix de maintenir la double structure de rémunération. Nulle part
ailleurs dans l'ensemble des documents relatifs à l'opération équité salariale, les parties
n'ont traité, prévu ou stipulé le maintien du mode de rémunération à taux unique pour le
Groupe Métiers et services et à échelles salariales pour le Groupe Bureau.
[251]
De telle sorte que les plaignantes n'ont connu les effets et conséquences de
l'opération équité salariale qu'à travers l'application de cette règle qui, de ce fait, s'avère
être beaucoup plus qu'une simple règle administrative, transitoire ou de gestion
salariale. Le Tribunal rejette donc la position de monsieur Larouche sur ce point.
[252]
Au chapitre 4, monsieur Larouche se penche sur la double configuration des
structures salariales. Requis de se prononcer sur la raison d'être d'une structure
salariale à échelons, monsieur Larouche indique qu'une telle pratique repose sur la
reconnaissance de l'expérience et non sur l'ancienneté. Dans le cadre de l'opération
équité salariale, monsieur Larouche reconnaît toutefois que l'expérience évaluée par le
système d'évaluation des emplois était l'expérience requise pour exercer les fonctions
de l'emploi. De telle sorte qu'en l'espèce, nous dira monsieur Larouche, le système
d'évaluation retenu n'est pas compatible avec un système à échelons.
[253]
Il note que, pour être compatible avec un système à échelons, le système
d'évaluation aurait dû considérer l'expérience comme un facteur évolutif dans le temps
jusqu'à la somme requise pour arriver à maturité. Mais tel ne fut pas le cas. Comme le
constate monsieur Larouche, tous les emplois furent évalués à maturité. L'expérience,
au même titre que la formation requise, constitue l'un des facteurs déjà mesuré lors de
l'évaluation de la valeur des fonctions. Ce qui l'amène à dire que le système retenu ne
peut justifier une double structure.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[254]
De surcroît, en aucun moment dans son expertise, monsieur Larouche ne
s'interroge sur le bien-fondé de la double structure salariale. Il constate tout au plus qu'il
s'agit de pratiques salariales traditionnelles établies depuis de nombreuses années et
ce, à travers tous les secteurs d'activités du monde du travail. Il soumet que l'abolition
de l'une ou l'autre pratique, en vertu du droit à l'égalité, entraînerait des conséquences
importantes pour la gestion des salaires.
[255]
Malgré cela, en conclusion du rapport, monsieur Larouche privilégie la
généralisation d'une structure à échelons: toute autre solution menant à des
conséquences qu'il qualifie de démesurées, dysfonctionnelles et exagérément
coûteuses. La généralisation du système à échelons au Groupe Métiers et services
apparaît à l'expert Larouche la solution la mieux adaptée à la réalité des emplois de
métier en milieu institutionnel.
[256]
Quant à son appréciation de ce qu'il qualifie de « caractère vexatoire » de la
règle d'intégration dénoncée dans la plainte à la Commission, le Tribunal ne peut que
constater qu'il semble clairement ignorer que l'objet du recours n'est pas la pertinence
des mécanismes administratifs à des fins administratives mais le droit à un traitement
exempt de discrimination fondée sur le sexe.
[257]
En somme, les expertises ont permis au Tribunal de mieux apprécier le
contexte de l'exercice d'équité salariale de même que certains aspects plus
administratifs de l'application de ces principes à la situation en cause. Cependant, pour
ce qui est des faits précis de la cause devant lui, il s'en remet davantage à la preuve
soumise par les parties et à son étude directe de cette preuve.
3.2
La classification et l'évaluation des emplois: la conformité de la
démarche
[258]
Afin d'assurer l'égalité salariale aux personnes occupant des emplois de valeur
égale, plusieurs opérations sont nécessaires. Il faut d'abord établir la valeur des
emplois, les regrouper et les classer selon cette valeur et ce, dans le respect de l'article
16 de la Charte; puis, il s'agit de comparer les salaires effectivement attribués à ces
emplois en tenant compte des personnes qui les occupent. C'est dans cette dernière
opération qu'intervient l'article 19 de la Charte.
[259]
Le Tribunal retient que l'établissement de catégories d'emploi n'est pas
toujours essentiel à l'exercice d'égalité salariale mais il peut s'avérer utile aux fins de
reconnaître les caractéristiques particulières à la base du regroupement qui permettront
d'identifier certains facteurs d'évaluation. Ainsi, des emplois regroupés du fait qu'ils sont
qualifiés de manuels peuvent comprendre des conditions de travail qui nécessitent, par
exemple, une coordination musculaire ou supposent des efforts physiques alors que
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
des emplois qualifiés de cléricaux pourraient requérir plutôt, toujours à titre d'exemple,
de la dextérité et exiger des efforts mentaux.
[260]
Ainsi, lorsqu'un employeur, seul ou en accord avec les représentants des
travailleurs, décide de regrouper des emplois en établissant des catégories, il doit
s'assurer qu'aucun des éléments retenus n'est porteur de discrimination ou ne produit
des effets discriminatoires. Qu'il s'agisse de catégories d'emploi fondées sur une ou des
caractéristiques reliées à l'organisation du travail, le type d'activités, les qualifications
requises ou le niveau de responsabilités, ces regroupements ne peuvent avoir pour
effet de porter atteinte au droit à l'égalité des personnes qui les occupent.
[261]
En l'espèce, l'Université et le Syndicat n'ont pas procédé à l'établissement de
catégories d'emploi. Ils ont choisi d'entreprendre l'opération équité salariale à partir des
catégories déjà existantes. Ces trois catégories sont celles apparaissant à la convention
collective soit le « Groupe Bureau » , le « Groupe Métiers et services » et le « Groupe
Technique » .
[262]
Lorsqu'on examine ces catégories à la lumière de la définition du Dictionnaire
canadien, il est plutôt difficile d'identifier une caractéristique commune pour l'ensemble
des fonctions incluses dans le « Groupe Métiers et services » au-delà du fait qu'il s'agit
essentiellement de fonctions manuelles. En fait, une quinzaine seulement de fonctions
correspond à des métiers de la construction; pour le reste, soit les trois quarts de ces
emplois, on est en présence d'un éventail de tâches diverses s'exerçant un peu de
manière indéterminée sur tout le campus de l'Université et ne requérant, sauf quelques
exceptions, aucune formation particulière. De même, le « Groupe Bureau » rassemble
un ensemble de fonctions relativement disparates dont le dénominateur commun est de
n'être pas manuelles au sens que l'on donne traditionnellement à cette expression. Les
postes correspondant à ces fonctions sont rattachés et localisés dans des unités ou
services administratifs et comprennent les tâches requises par ces unités ou services.
En somme, seul le « Groupe Technique » constitue une catégorie fondée sur une
caractéristique commune, soit l'exigence requise des techniciens d'avoir complété une
formation spécialisée propre à la fonction occupée.
[263]
Le Tribunal ne peut que constater que les deux premières catégories ne font
que reproduire la ségrégation historique entre les emplois manuels traditionnellement
occupés par les hommes et ceux reliés au soutien de l'administration occupés par les
femmes. En effet, la preuve le démontre, les premiers sont occupés à 83,65 % par les
hommes et les seconds à 86% par des femmes. Toutefois, et dans la mesure où il ne
s'agit pas d'un regroupement qui, en lui-même, crée des barrières discriminatoires entre
les hommes et les femmes, le Tribunal prend acte de l'existence de ces catégories et
constate qu'elles peuvent éventuellement servir de fondement à l'opération de
comparaison salariale visée par l'article 19.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[264]
Cette seule étape ne saurait, cependant, être suffisante pour établir qu'il s'agit
d'emplois équivalents au sens de l'article 19. En fait, l'établissement de catégories
d'emploi ne suppose aucun exercice d'évaluation des emplois, ni de classification selon
une valeur déterminée. C'est plutôt à l'opération de classification des emplois que se
rattache la détermination de la valeur des emplois et leur éventuel ordonnancement
selon la valeur obtenue. C'est donc par l'établissement de la classification que prend
forme l'opération concluante dans la détermination des emplois équivalents.
[265]
Cette opération nécessite plusieurs étapes, toutes aussi importantes les unes
que les autres. La première comprend l'élaboration d'un protocole d'évaluation incluant
une liste de facteurs exempts de discrimination tant dans leur énumération que dans la
valeur et la pondération qui l'accompagnent. Le protocole doit également inclure un
processus d'examen des emplois et des tâches qui les composent également attentif au
droit à l'égalité, c'est-à-dire qui ne reproduit pas les préjugés ou les stéréotypes
socioculturels implantés structurellement dans l'organisation du marché du travail,
l'organisation du travail lui-même et la répartition des emplois entre hommes et
femmes. Ce processus aboutit généralement à une description de l'emploi comprenant
les éléments requis pour permettre l'évaluation selon les facteurs retenus.
[266]
Une fois complétée l'évaluation de chaque emploi, il faut les ordonnancer selon
la valeur obtenue puis déterminer les emplois équivalents en fixant le pointage
minimum et maximum de chaque niveau ou classe et cela toujours dans le respect des
prescriptions de l'article 16 de la Charte.
[267]
En l'espèce, l'Université et le Syndicat ont convenu de fixer l'écart de chaque
niveau à 26 points en partant du pointage minimum possible de 45 points en classe 1 et
établissant le seuil de la classe 17 à 644 points. Bien que certaines fonctions aient pu
être désavantagées par la détermination des seuils marquant le passage d'une classe à
l'autre, la preuve est à l'effet que les résultats en découlant pour la classification des
fonctions ne sont pas contestés.
[268]
Pour le Tribunal, l'Université et le Syndicat ont procédé avec sérieux à
l'établissement de la classification des fonctions dans le respect de l'article 16 de la
Charte.
[269]
Il ressort de la preuve que l'établissement de la classification des emplois du
Groupe Bureau a conduit à leur reconnaître des valeurs étalées selon le pointage
correspondant aux dix premières classes. Il en est de même, à une ou deux exceptions
près, de l'ensemble des emplois du Groupe Métiers et services. Sauf ces exceptions,
seuls les emplois du Groupe Technique se retrouvent dans les classes 11 à 17.
[270]
Ainsi, si l'on revient à une comparaison par catégorie plutôt que par emplois ou
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fonctions, la preuve établit l'équivalence entre les fonctions du Groupe Bureau et celles
du Groupe Métiers et services et distingue clairement les fonctions du Groupe
Technique. En aucun moment, les emplois de cette dernière catégorie n'ont constitué
un regroupement équivalent pour l'une ou l'autre des deux autres catégories.
[271]
En d'autres termes, que ce soit sur la base de la catégorie ou sur la base de la
classification des fonctions elles-mêmes, la preuve démontre qu'une équivalence a été
établie entre les emplois de la catégorie Bureau, à prédominance féminine, et celle des
Métiers et services, à prédominance masculine.
[272]
En conséquence le Tribunal conclut, relativement à la première question, que
l'Université n'a pas exercé de discrimination à l'égard de ses employés du Groupe
Bureau dans l'évaluation et l'établissement de la classification des fonctions.
3.3
La comparaison salariale et le mode de rémunération: la discrimination
exercée par l'Université Laval
[273]
Une fois établi que les emplois sont équivalents, l'article 19 peut trouver
application. Il s'agit de comparer les salaires effectivement payés pour ces emplois
équivalents. Dans le cas qui nous occupe, l'Université et le Syndicat ont procédé à cette
comparaison après avoir complété la classification des emplois.
[274]
Mesdames Parent et Jones ont indiqué que le comité a comparé les salaires
des fonctions à prédominance masculine et à prédominance féminine pour chaque
classe d'emplois et a fixé un salaire par classe. De surcroît, madame Parent a expliqué
que ce salaire a été établi à partir de celui payé pour la fonction de la classe exercée
par le plus grand nombre d'hommes. Tant madame Parent que madame Jones ont
déclaré que cette façon de faire répondait aux impératifs financiers que représentaient
la masse salariale totale et la garantie salariale individuelle assurant à toutes et à tous
qu'il n'y aurait pas de baisse ni de gel de salaire.
[275]
L'Université et le Syndicat avaient convenu que le salaire retenu aux fins de
comparaison était, pour les emplois du Groupe Bureau, celui du dernier échelon de
l'échelle applicable. L'opération comparaison salariale s'est faite, en effet, sur la base
du fait que le salaire comparable était celui du dernier échelon pour toutes les fonctions
du Groupe Bureau et celui du taux unique de chacune des fonctions du Groupe Métiers
et services, taux correspondant au dernier échelon.
[276]
Dès lors, l'Université reconnaissait que, pour des emplois de valeur
équivalente, le salaire comparable était le taux maximum de l'échelle. Au chapitre de
l'évaluation des emplois la preuve démontre que tant pour les fonctions du Groupe
Bureau que pour celles du Groupe Métiers et services les mêmes critères furent
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
retenus et appliqués. La formation, l'expérience requise de même que la complexité des
fonctions72 n'ont pas fait l'objet d'une évaluation différente selon la catégorie à laquelle
appartenait la fonction. L'Université a réalisé l'évaluation des fonctions à partir d'un seul
système d'évaluation.
[277]
Rien dans la preuve soumise ni dans les témoignages recueillis ne permet de
voir une différence, un tant soit peu significative, dans la description des fonctions qui
justifierait, pour le Groupe Métiers et services, la pleine reconnaissance salariale
immédiate et, pour le Groupe Bureau, une reconnaissance salariale progressive étalée
sur plusieurs années. Pourtant, c'est ce qu'a fait l'Université en maintenant une
structure salariale à échelons pour les salariés du Groupe Bureau et une structure
salariale à taux unique pour les employés du Groupe Métiers et services.
[278]
Le témoignage de madame Parent a plutôt concouru à démontrer au Tribunal
qu'un certain niveau de formation et de familiarisation en emploi est requis pour tous
avant qu'une personne ne puisse combler totalement une fonction. Il faut donc en
conclure qu'il ne s'agit pas là d'une situation qui expliquerait deux modes de
rémunération distincts. Au contraire, si la réalité ainsi décrite était à ce point significative
qu'elle justifierait une reconnaissance salariale progressive, il y aurait lieu, dans le
respect des résultats de l'évaluation-classification, de l'appliquer aux deux groupes de
fonctions.
[279]
D'ailleurs, il ressort clairement du témoignage de madame Parent que telle
était la visée de l'Université. Toutefois, devant l'opposition du Syndicat qui s'appuyait à
la fois sur une vision traditionnelle du mode de rémunération des métiers et services et
sur le principe que toute fonction mérite la pleine reconnaissance salariale immédiate,
l'Université a opté pour le statu quo en matière de mode de rémunération. Madame
Parent explique ce repli par le fait que même ainsi les femmes étaient gagnantes.
[280]
Or, l'obligation faite à l'employeur d'accorder, sans discrimination, un salaire
égal aux membres de son personnel qui accomplissent un travail équivalent, ne se
résume pas au constat d'une amélioration de la situation des femmes par rapport au
salaire qu'elles touchaient antérieurement. Aux fins de l'article 19 de la Charte, la
comparaison ne porte pas sur l'ancien et le nouveau salaire de la personne ayant fait
l'objet de discrimination mais bien sur le salaire accordé en fonction des emplois jugés
équivalents occupés par les hommes et les femmes.
[281]
Adopter la lecture que propose l'Université, du principe d'égalité, irait non
seulement à l'encontre de l'article 19 de la Charte mais contreviendrait au droit d'obtenir
un salaire égal pour un travail équivalent reconnu en droit international.
[282]
Déjà en 1953, la Recommandation no 90 considère que l'application de ce
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
principe signifie la disparition de tout écart entre le salaire minimum versé aux femmes
et celui versé aux hommes. Il en va de même du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels qui précise que le respect du principe d'égalité
salariale requiert le versement « d'une rémunération égale pour un travail de valeur
égale sans distinction aucune » . Quant aux principes énoncés dans la Convention
internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des
femmes, ils concourent à exclure toute interprétation qui permet que la persistance des
inégalités de faits entre hommes et femmes.
[283]
En fait, ces instruments internationaux rappellent qu'une application conforme
du principe d'égalité salariale passe par l'effectivité de ce droit.
[284]
L'issue d'un exercice d'égalité salariale conforme à l'article 19 de la Charte et
en droit international exige que les salariés occupant des emplois équivalents reçoivent
effectivement le même salaire et ce sans distinctions fondées sur le sexe. Toute
persistance d'écarts salariaux entre emplois équivalents, et ce même pour une durée
plus ou moins longue, ne peut être considérée conforme à l'article 19. Il serait en effet
difficile de conclure que deux emplois sont payés également si durant quelques années,
les titulaires des emplois équivalents ne reçoivent pas le même salaire.
[285]
La situation vécue par madame Ferland Pépin illustre bien cet état de fait. Au
terme de l'opération équité salariale de l'Université, la fonction occupée par madame
Ferland Pépin fut jugée équivalente à celle occupée par son conjoint. Malgré cette
reconnaissance, madame Ferland Pépin a continué de recevoir un salaire moindre que
celui de son conjoint. Pourtant au terme de l'article 19 une fois reconnue l'équivalence
entre les deux emplois, madame Ferland Pépin aurait dû recevoir une rémunération
égale à celle de son conjoint. À l'instar des travailleuses du Groupe Bureau, madame
Ferland Pépin a plutôt obtenu la reconnaissance de l'équivalence mais pas l'égalité
salariale qu'elle était en droit d'obtenir.
[286]
La persistance d'écarts salariaux entre les hommes et les femmes occupant
des emplois équivalents va à l'encontre de la garantie d'égalité qu'accorde l'article 19
de la Charte et ce même si ces distinctions sont appelées à disparaître au fur et à
mesure que les femmes se rapprochent du dernier échelon de leur classe. Une fois
reconnue l'existence d'écarts salariaux dus à la discrimination systémique, entre
emplois équivalents, le droit à l'égalité de rémunération exige une correction effective
des salaires.
[287]
Le second alinéa de l'article 19 permet certaines distinctions individuelles en
autant que les critères soient communs à tous les membres du personnel. Ainsi, une
distinction salariale fondée sur l'expérience ou l'ancienneté individuelle, ne constituera
pas de la discrimination si les mêmes critères s'appliquent à tous. Le deuxième alinéa
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
de l'article 19 vient renchérir sur le fait que l'adoption, en l'espèce, de deux modes de
rémunération différents pour des emplois jugés équivalents constitue une discrimination
illicite à l'égard des femmes. Dès l'instant où un employeur n'applique qu'aux femmes
les critères d'ancienneté, de durée de service ou d'expérience propre au poste occupé,
aux fins de déterminer les salaires, cette pratique contrevient à l'article 19 de la Charte.
[288]
L'Université a donc contrevenu à son obligation d'accorder un salaire égal aux
membres de son personnel qui exécutent des fonctions jugées équivalentes en
inscrivant dans l' « Entente relative à l'implantation du nouveau système de
rémunération dans le cadre de l'opération équité salariale » 73 l'article VII, intitulé «
Règles d'intégration » , qui stipule:
1. La personne salariée sera intégrée à l'échelon assurant un taux de salaire
égal ou immédiatement supérieur à celui qu'elle reçoit, auquel on a
préalablement ajouté la valeur de l'écart obtenu, au 30 novembre 1995, pour le
rappel de salaire sans toutefois dépasser le maximum du taux associé à la
fonction assignée.
2. Les fonctions du Groupe Métiers et services sont à taux unique; le dernier
échelon de l'échelle de classification appropriée est considéré comme étant
l'échelon correspondant à ce taux unique. (nos soulignés)
[289]
C'est par la signature de cette disposition que l'Université décidait d'appliquer
le mode de rémunération à échelle aux seules fonctions du Groupe Bureau et, de
surcroît, reconnaissait à ses employés du Groupe Métiers et services le droit au salaire
maximal de chaque échelle à titre de taux unique de salaire. Ce faisant, l'Université a
privilégié un système générant des effets discriminatoires à l'égard des femmes.
[290]
Il apparaît important de préciser que pas plus le mode de rémunération à
échelle que le mode de rémunération à taux fixe ne sont en soi porteurs de
discrimination. L'une et l'autre structure peuvent très bien se justifier pour des raisons
reliées à l'économie générale d'une politique salariale. Dans le cas présent, c'est le
maintien d'une double structure salariale qui est la cause de la discrimination.
[291]
Le Tribunal doit donc répondre affirmativement à la deuxième question
soulevée. L'Université a exercé de la discrimination à l'égard de ses employées du
Groupe Bureau dans le cadre de l'opération équité salariale tenue en 1995-1996 en leur
accordant un mode de rémunération distinct, le tout en contravention de l'article 19 de
la Charte.
[292]
Il nous reste à déterminer si dans le cadre de l'article 19 de la Charte, le
Syndicat peut être tenu responsable de l'inégalité salariale.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[293]
Aux termes de l'article 19 de la Charte, il est de la seule responsabilité de
l'employeur de voir à accorder un traitement ou un salaire égal aux membres de son
personnel qui accomplissent un travail équivalent. L'Université ne peut donc pas
invoquer la position syndicale, aussi catégorique fut-elle, pour justifier le traitement
salarial discriminatoire accordé à ses employés.
[294]
Il est vrai que la Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Renaud74 a reconnu
qu'un syndicat qui est à l'origine de la discrimination ou qui y contribue encourt une
responsabilité. Le juge Sopinka précise que la responsabilité du syndicat peut résulter
de sa participation à la formulation d'une règle de travail générant des effets
discriminatoires tant que des obstructions aux efforts raisonnables d'un employeur pour
supprimer la discrimination.
[295]
Ces remarques de la Cour suprême s'inscrivaient toutefois dans un contexte
législatif permettant de tenir solidairement responsables l'employeur et le syndicat. Tel
n'est pas le cas dans le cadre de l'article 19 de la Charte qui impute uniquement à
l'employeur la responsabilité d'accorder un salaire égal pour un travail équivalent.
[296]
Le Tribunal retient à l'instar du juge Décary de la Cour d'appel fédérale dans
l'affaire Bell Canada c. SCEP75, que
... [C]onclure à la responsabilité à part égale des syndicats. soit implicitement
(...) soit indirectement (...) pour avoir participé à la fixation de salaires différents
relativement à un travail de valeur égale irait carrément à l'encontre du texte
clair de la Loi et de l'intention évidente du législateur.76
[297]
Pour des raisons qui lui sont propres, le législateur a décidé qu'en vertu de
l'article 19 de la Charte, seul l'employeur peut être tenu responsable des inégalités
salariales. Conclure à la responsabilité du syndicat irait carrément à l'encontre de cette
disposition.
[298]
Le Tribunal en vient donc à la conclusion que seule l'Université est
responsable de la discrimination en matière de rémunération à l'égard des employés du
Groupe Bureau.
4.
Les dommages moraux
[299]
La Commission réclame pour les plaignantes et victimes dont les noms
apparaissent aux Annexes 2 et 3 de la demande introductive d'instance réamendée la
somme de 10 000,00 $ à payer à chacune d'entre elles à titre de dommages moraux,
notamment pour insulte, humiliation, atteinte à leur dignité.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[300]
La Commission a fait témoigner quatre travailleuses durant l'audience soit
mesdames Gagnon, Paradis, Ferland Pépin et Rhéaume. Chacune d'entre elles est
venue exprimer l'impact qu'a eu sur elle l'issue de l'opération équité salariale.
[301]
Madame Rhéaume a exprimé au Tribunal l'étonnement qu'elle a ressenti
lorsqu'elle a pris connaissance de l'entente de 1996 (Pièce P-7). Elle a indiqué qu'au
terme d'un examen de ce document et de la Pièce P-4, elle a pu constater que le
système de rémunération des employés de Métiers et services demeurait à taux unique
alors que les employés du Groupe Bureau étaient intégrés dans un système comportant
des échelons. Pour madame Rhéaume pareille entente était à sa face même
discriminatoire. Le Tribunal fut a même de constater la déception, l'humiliation et le
sentiment d'injustice que ressentait toujours madame Rhéaume vis-à-vis un exercice
d'équité salariale qui devait mener à une égalité salariale mais qui en fait n'a fait que
perpétuer les écarts salariaux tout en constatant l'équivalence des emplois.
[302]
Il en va de même de madame Gagnon qui soulignera avec dérision que le
résultat de l'opération équité salariale a impliqué qu'après 25 ans dans le même poste,
elle devait acquérir deux années d'expérience supplémentaires pour se classer au
dernier échelon de sa classe alors qu'un employé du Groupe Métiers et services
obtenait le taux maximum dès la première année. Madame Gagnon a fait état de son
sentiment d'incompréhension et d'équité devant pareil résultat.
[303]
Madame Ferland Pépin, dont le conjoint travaille aussi à l'Université a signalé
que les résultats de l'opération équité salariale ont perpétué durant quelques années
l'écart salarial qui existait entre elle et son conjoint et ce malgré qu'ils occupent des
emplois jugés équivalents. Elle indiquera au Tribunal qu'il s'agit là d'un sujet de
conversation tabou à la maison.
[304]
Madame Paradis a pour sa part signalé sa surprise de devoir attendre jusqu'en
2001 avant de pouvoir obtenir le même taux salarial que celui accordé aux employés du
Groupe Métiers et services au lendemain d'un exercice qui reconnaît pourtant
l'équivalence des emplois.
[305]
Le Tribunal fut à même de constater que pour chacune de ces femmes la
persistance des écarts salariaux, pour des périodes plus ou moins longues, fut
considérée comme une réelle injustice. Déception, exaspération et sentiment
d'humiliation ont ponctué leur témoignage, tout particulièrement devant l'assertion que
cette opération était exempte de discrimination.
[306]
Le Tribunal accorde un montant de 10 000,00 $ à titre de dommages moraux à
mesdames Monique Rhéaume, Marjolaine Ferland Pépin, Lise Gagnon et Marie-Josée
Paradis.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
[307]
Le Tribunal ne peut toutefois accorder pareille réparation à l'ensemble des
plaignantes et victimes sur ces seuls témoignages. Il appartenait à la Commission de
faire la preuve que les résultats de l'opération équité salariale ont eu des effets négatifs
sur les personnes occupant une fonction du Groupe Bureau. La perception négative
que peut générer la sous-valorisation du travail traditionnellement effectué par les
femmes aurait pu faire l'objet d'une preuve d'expert exposant l'impact de telles
pratiques sur les victimes. En l'absence d'une telle preuve, le Tribunal rejette la
demande de la Commission d'accorder à toutes les plaignantes et victimes des
dommages moraux.
4.
308.
Le dispositif
POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL
CONSIDÉRANT que le Tribunal des droits de la personne a juridiction sur les plaintes
en matière d'égalité salariale déposées à la Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse avant le 21 novembre 1997;
CONSIDÉRANT que dans l'éventualité où le Tribunal en viendrait à la conclusion qu'il y
a discrimination, les procureurs des différentes parties se sont entendus sur le calcul
des sommes à être versées aux parties plaignantes au chapitre des dommages
matériels tel qu'il appert de la Pièce P-14 A et aux parties victimes tel qu'il appert de la
Pièce P-14 B.
CONSIDÉRANT que le calcul de sommes apparaissant aux Pièces P-14A et P-14 B
s'arrête au 31 octobre 1999;
CONSTATE que l'Université Laval a porté atteinte au droit à l'égalité de ses employées
du Groupe Bureau en ne leur accordant pas un traitement ou un salaire égal à celui de
leurs collègues du Groupe Métiers et services alors qu'elles exercent des fonctions
équivalentes;
CONSTATE que dans le cadre de l'opération équité salariale qui s'est déroulée de 1991
à 1996, la coexistence d'un double système de rémunération s'appliquant aux employés
du Groupe Bureau et à ceux du Groupe Métiers et services engendre des effets
discriminatoires contraires à l'article 19 de la Charte.
CONSTATE qu'à travail équivalent, les employés du Groupe Bureau n'obtiennent pas
un salaire égal à celui des employés du Groupe Métiers et services;
DÉCLARE qu'en vertu de l'article 19 de la Charte, seule l'Université Laval est
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
responsable en tant qu'employeur d'accorder à ses employés un salaire égal pour des
emplois équivalents.
309.
EN CONSÉQUENCE, LE TRIBUNAL
ORDONNE à la partie défenderesse et à la partie intéressée DE CESSER d'utiliser le
système de rémunération comportant des effets discriminatoires à l'égard des employés
du Groupe Bureau en appliquant aux employés du Groupe Bureau la même structure
de rémunération, à taux unique, que celle appliquée aux employés du Groupe Métiers
et services faisant un travail équivalent dans les classes 2 à 10.
ORDONNE à l'Université défenderesse et à la partie intéressée DE RECONNAÎTRE
qu'en ce qui concerne les fonctions du Groupe Bureau, devant ainsi être payées à taux
unique comme les fonctions du Groupe Métiers et services, c'est le dernier échelon de
l'échelle de classification appropriée qui est considéré comme étant l'échelon
correspondant à ce taux unique.
ORDONNE à l'Université défenderesse DE RECONNAÎTRE rétroactivement au 1er
décembre 1995, aux personnes dont les noms apparaissent à l'annexe 1 de la
Demande introductive d'instance réamendée et signifiée le 26 novembre 1999, en
excluant les noms de Louis Baril, Hélène Delisle, Lyne Girard, Raymond Michel, Diane
Robert, Gaston Quirion et Monique Côté dont les demandes sont prescrites ou n'ont
pas été accompagnées du consentement requis par la Charte, tous les droits,
avantages, privilèges, présents et futurs, auxquels elles auraient eu droit n'eut été
l'application du système de rémunération discriminatoire;
ORDONNE à l'Université défenderesse DE VERSER aux personnes dont les noms
apparaissent à l'annexe 1 de la Demande introductive d'instance réamendée et signifiée
le 26 novembre 1999, en excluant les noms de Louis Baril, Hélène Delisle, Lyne Girard,
Raymond Michel, Diane Robert, Gaston Quirion et Monique Côté, les sommes pour
compenser les pertes subies depuis le 1er décembre 1995 ainsi que les montants
appropriés pour tenir compte du temps supplémentaire travaillé depuis le 1er décembre
1995, des avancements d'échelon en cours d'année, des soldes de banque de congés
de maladie payés, des primes d'affectation temporaire, de toute promotion obtenue
depuis cette date dans une fonction du Groupe Bureau et des augmentations salariales
du 1er juin 1998 et du 1er juin 1999, en raison de l'application du système de
rémunération discriminatoire, auxquelles elles auraient eu droit si l'Université
défenderesse avait à cette date appliqué aux membres du Groupe Bureau la structure
salariale à taux unique, qu'elle a appliquée aux employés du Groupe Métiers et services
soit:
Plaignantes:
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
Allard, Suzanne
4 993,14 $
Bédard, Louise
1 835,30 $
Béland, François
4 310,07 $
Bernatchez, Chantal
2 248,68 $
Blais, Annette
5 288,17 $
Blouin, Solange
899,72 $
Bourassa, Danielle
1 550,05 $
Bureau, Solange
4 580,28 $
Caron, Brigitte
4 808,11 $
Chabot, Colette
2 255,49 $
Chouinard, Jocelyne
1 573,53 $
Chouinard, Luce Drouin
4 257,94 $
Côté, Carole
1 734,88 $
Desbiens, Huguette L.
2 235,32 $
Doyon, Louise
1 569,53 $
Drolet, Marc-André
4 396,87 $
Duval, Céline
2 250,93 $
Ferland, Louise
4 048,90 $
Fortin, Claude
4 150,87 $
Fournier, Andrée
5 920,64 $
Fournier, Monique C.
3 273,36 $
Gagnon, Ginette
2 760,66 $
Gagnon, Lise
985,53 $
Gariépy, Marc
15 020,97 $
Garneau, Andrée
2 446,22 $
Gervais, Christine
4 796,61 $
Gingras, Marie-France
1 229,72 $
Gingras, Nicole
4 290,28 $
Godbout, Line
1 043,85 $
Gosselin, Anne
4 065,60 $
Grenier, Suzanne
2 213,82 $
Hallé, Diane
2 201,51 $
Jobin, Sylvie S.
4 343,09 $
Lachance, Bruno
4 134,18 $
Lacroix, Josée
3 795,45 $
Laflamme, Ginette
8 370,18 $
Lalancette, Nicole
2 095,21 $
Laliberté, Hélène
4 206,99 $
Landry, Lise
3 354,40 $
Landry, Louise
5 711,80 $
Lapierre, Louise
10 067,05 $
Lauzon, Suzanne
3 242,86 $
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
Leblanc, Claire
3 944,17 $
Lévesque, Lise
2 974,58 $
Manseau, Marcelle
5 637,42 $
Martineau, Sylvie
3 405,99 $
McFadden, Marjolaine
2 631,14 $
McKinnon, Marie
2 872,07 $
Meilleur, Danielle
2 655,77 $
Mercier, Louise
1 102,71 $
Michaud, Huguette
3 082,41 $
Morency, Diane
1 929,11 $
Nadeau, Diane
3 935,83 $
Ouellet, Lina
2 699,32 $
Paquet, Thérèse
2 630,58 $
Paradis Marie-Josée
9 654,40 $
Parent, Anita
3 098,92 $
Pelletier, Jacqueline
2 183,62 $
Pépin, Marjolaine F.
5 456,81 $
Pichette, Danielle
2 006,97 $
Plourde, Danielle
2 515,58 $
Rhéaume, Monique
2 894,11 $
Richard Carole
2 114,38 $
Roy, Céline
1 490,92 $
Savoie, Élise
3 355,28 $
St-Maur, Danielle R.
8 042,36 $
Vachon, Hélène G.
224,91 $
Victimes:
Allard, Diane
3 035,64 $
Arsenault-Roy, Claudette
470,32 $
Aubé, Michel
4 075,76 $
Barsalou, Mireille
4 511,92 $
Benoît, Diane
4 561,11 $
Bergeron, Lucie
4 049,67 $
Bernard, Ginette
528,25 $
Bernier, Michelle Boutin
3 652,64 $
Bisson, Réjean
5 828,39 $
Bouchard, Liliane
3 826,66 $
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
Bouchard, Martin
4 086,25 $
Bouchard, Roger
4 624,90 $
Bouchard, Sophie
895,72 $
Bouillon, Claude
3 951,83 $
Boulet, Francine M.
2 208,66 $
Bourdeau, Lynn
2 530,39 $
Breton, Denis
5 177,61 $
Caron R., Nicole
3 762,73 $
Charland, Réjeanne
5 727,04 $
Cloutier, Lise
1 509,42 $
Cloutier, Yves
5 553,24 $
Corneau, Claudine
849,80 $
Côté, Huguette
2 739,04 $
Couture Lessard, Ginette
5 050,49 $
Couture, Dorothée
4 083,38 $
Dauteuil, Michelyne
3 726,96 $
Dionne, André
5 304,90 $
Doyre, Denise
1 500,03 $
Du Berger, Robert
4 019,55 $
Ferland, Raynald
3 976,07 $
Fortier, Lorraine
1 646,68 $
Fréchette, Lucie
11 789,70 $
Gagné, Claire
5 231,42 $
Gagnon, Cécile
2 725,77 $
Gagnon, Chantale
5 597,20 $
Gagnon, Michèle
1 157,05 $
Gosselin, Lise
1 527,99 $
Gosselin, Louise
3 272,78 $
Habel, Normande
4 773,35 $
Hémond, Daniel
7 703,36 $
Hovington, France
2 752,43 $
Lafleur, Giselle
2 429,54 $
Lavoie, Micheline
1 603,56 $
Leclair, Louise Racette
100,10 $
Legendre, Cécile
3 918,24 $
Lemelin, Robert
4 378,99 $
Lévesque, Lise C.
2 821,93 $
Mazerolle, Donna
659,52 $
McCarthy, Pierrette
1 411,92 $
Michel, Jean
5 153,78 $
Morin, Francine
9 869,32 $
Nadeau, Louise
1 158,04 $
Parent, Gaétan
4 321,23 $
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
Parent, Yvette
1 393,06 $
Racine, Jacques G
4 836,75 $
Ratté, Linda
324,80 $
Robert, Andrée
724,50 $
Robichaud, Yvette
3 030,61 $
Robitaille, Claire
3 394,79 $
Robitaille, Martine
4 717,31 $
Rochette, Martine
3 750,52 $
Roy, Denys
4 403,68 $
Thibert, Céline
3 389,96 $
Vaillancourt, Viviane
8 119,51 $
ORDONNE à l'Université défenderesse de verser aux personnes dont les noms
apparaissent à l'annexe 1 de la Demande introductive d'instance réamendée et signifiée
le 26 novembre 1999, en excluant les noms de Louis Baril, Hélène Delisle, Lyne Girard,
Raymond Michel, Diane Robert, Gaston Quirion et Monique Côté, les sommes
additionnelles pour compenser les pertes salariales subies depuis le 1er novembre 1999
jusqu'à la date du présent jugement, suivant les mêmes bases de calculs utilisés dans
les Pièces P-14 A et P-14 B;
ORDONNE à l'Université défenderesse de verser à mesdames Monique Rhéaume,
Marjolaine Ferland Pépin, Lise Gagnon et Marie-Josée Paradis, des dommages moraux
au montant de 10 000,00 $ chacune pour insulte, humiliation, atteinte à la dignité et à
leur droit à la reconnaissance et à l'exercice de leurs droits fondamentaux en toute
égalité, sans discrimination fondée sur le sexe.
LE TOUT avec intérêts depuis la signification de la proposition des mesures de
redressement, soit le 11 novembre 1998, au taux fixé suivant l'article 28 de la Loi sur le
ministère du Revenu (L.R.Q. c. M-31), tel que le permet l'article 1619 C.C.Q. et les
dépens.
LA PRÉSIDENTE DU TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE
AUTORITÉS DE LA PARTIE DEMANDERESSE
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
telles que citées par la partie demanderesse
Législation
Charte des droits et libertés de la personne du Québec, L.R.Q. c. C-12.
Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, c. H-16.
Loi sur l'équité salariale de l'Ontario, L.R.O., c. P-7.
Loi sur l'équité salariale du Québec, L.Q., 1996, c. 43.
Traité instituant la Communauté européenne (Traité de Rome, 1957).
Equal Pay Act 1970 (GB).
Doctrine
ABELLA SILBERMAN, Rosalie, Égalité en matière d'emploi, Rapport d'une commission
royale, octobre 1984.
DUSSAULT, Ginette, À travail équivalent, salaire égal: Un droit difficile à appliquer?
Dans BLOUIN, Rodrigue, FERLAND, Gilles, LAFLAMME, Gilles, LAROCQUE, Alain,
RONDEAU, Claude, Les Cahiers des droits et les relations industrielles, (Québec: Les
Presses de l'Université Laval, 1988) 81.
DUSSAULT, Ginette, À travail équivalent, salaire égal: la portée de la revendication,
septembre 1987, Bulletin no 27, p. 68.
GARON, Muriel, Les conventions collectives: une piste pour l'analyse de la
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GUNDERSON, Morley et WEINER, Nan, Pay Equity, (Toronto: Butterworths 1990).
GUNDERSON, Morley, Gender Discrimination and Pay Equity Legislation, dans
CHRISTOFIDES, Grant et SWIDINSKY, Aspects of Labour Market Behaviour: Essays
in Honour of John Vanderkemp, (Toronto: University of Toronto Press, 1995).
McCRUDDEN, Christopher, Equality in law between men and women in the European
Community, (London: Martinus Nijhoff Publishers, 1994).
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
Jurisprudence
Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. BCGSEU,
Cour suprême du Canada, No. 26274, 22 février 1999.
C.S.R. de Chambly c. Bergevin, [1994] 2 R.C.S. 525.
C.N. c. Canada (Com. des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1115.
Comm. ont. des droits de la personne c. Simpsons-Sears, [1985] 2 R.C.S. 537.
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Bell Canada c. SCEP, [1991] 1 C.F. 113.
CUPE v. Gloucester (City) (No. 2 ), Tribunal Decisions, p. 51297.
Re Manitoba Council of Health Care Unions et al. V. Bethesda Hospital et al., 88 D. L.R.
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Darmouth (City) v. Nova Scotia (Pay Equity Commission), 119 D.L.R. (4th) 183.
Welland County General Hospital v. Service Employee International Union, Local 204,
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Canadian Union of Public Employees, Local 2974.1 (CUPE) v. County of Essex, Ontario
Pay and Employment Equity Guide 180-197. Tribunal Decisions p. 51719.
S.E.I.U. Local 204, v. Ontario (Attorney General), 151 D.L.R. (4th) 273.
C.N. c. Canada Com. des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1115.
Brooks v. Canada Safeway Ltd., [1989] 1 R.C.S. 1219.
National Capital Alliance on Race, 18 C.H.R.R. D/179.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
Commission scolaire St-Jean-sur-Richelieu c. Commission des droits de la personne du
Québec (C.A.) [1994] R.J.Q. 1227.
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Montréal (Ville
de), [1998] R.J.Q. 305 (T.D.P.Q.).
Nimz c. Fareie und Hansestadt Hamburg, 1991, C.J. I-297.
Sorbie v. Trust House Forte (E.A.T.) [1977] I C.R. 57.
AUTORITÉS DE LA PARTIE DEFENDERESSE
telles que citées par la partie défenderesse
Législation
Charte des droits et libertés de la personne (L.R.Q., c. C-12).
Loi sur l'équité salariale
Journal des débats, Étude détaillée du projet de loi no 35, Commission permanente des
affaires sociales, cahier no 47, 14 novembre 1996, pages I-36.
Jurisprudence
Alliance de la Capitale nationale sur les relations interraciales et Commission
canadienne des droits de la personne et al., 19 mars 1997, T.D.P. D.T. 3/97, Ref: 97T508.
Aubry c. Vice-versa, [1998] 1 R.C.S. 591.
Bantey c. Maron et al., [1976] C.A. 701, 2 juillet 1976, juges Rinfret, Bernier et Dubé.
Bigonesse et al. c. École secondaire du Mont-Bruno et al., 500-53-000018-950 (T.D.P.),
juge Rivet, 16 novembre 1995.
Central Okanagan School, district no 23 c. Renaud [1992] 2 R.C.S. 970.
Changtin c. Ville de Montréal et al, 2 octobre 1995, T.D.P. 500-53-000003-952, 95Tfile:///H|/GP-NORM/Legal%20Research/ILS%20in%20nati...ons/Canada/2%20aout%20200%20version%20française.htm (74 of 84)20/12/2004 16:39:49
C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
1329.
CN c. Canada (Commission des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1114.
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre hospitalier
Robert-Giffard et le Syndicat des employés du Centre hospitalier Robert-Giffard [1998]
R.J.Q. 651.
Commission des droits de la personne du Québec c. Commission scolaire régionale
Chauveau (T.D.P.Q.) [1993] R.J.Q. 929 et [1994] R.J.Q. 1196 (C.A.).
Commission des droits de la personne du Québec c. Commission scolaire de SaintJean-sur-Richelieu (T.D.P.Q.) [1991] R.J.Q. 3003 et [1994] R.J.Q. 1227 (C.A.).
Commission des droits de la personne du Québec c. Les Autobus Legault inc. et
Darquise Bédard [1994] R.J.Q. 3027.
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Résidences
Laurendeau, Légaré, Louvain, 9 juin 1999, T.D.P.Q. [1994] 500-53-000105-989, juge
Rivet.
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Société de
portefeuille du Groupe Desjardins. Assurances générales des Caisses Desjardins inc.,
[1997] R.J.Q. 2049 (T.D.P.Q.).
Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears [1985] 2 R.C.S.
436.
Dame Coupal c. Crispino [1965] B.R. 189, 4 juin 1964, juges Bissonnette, Taschereau
et Montgomery.
Dolbec c. Trailerville Park & Sales ltd., [1975] C.S. 582, 20 avril 1975, juge Prévost.
Droit de la famille -- 2702, [1997] R.J.Q. 1960.
Droit de la famille -- 3034, [1998] R.J.Q. 1706.
Kowarsky c. Procureur général du Québec et al., C.S. 500-05-013636-830, 17 février
1988, juge Chabot.
La Ville de Québec c. La Commission des droits de la personne [1998] R.J.Q. 831 (C.A.)
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Lessard et al., c. Centre de dépistage précoce du cancer de la prostate et al., C.S. 20005-006711-977, 25 mai 1998, juge Gendreau.
Munger c. Corporation municipale de St-David de Falardeau et al. [1981] C.A. 308, 10
avril 1981, juges Montgomery, Monet et Beauregard ET [1983] 1 R.C.S. 243.
Norwich Union Life Insurance Society c. Dame Faucher [1973] C.A. 288, 16 novembre
1972, juges Rivard, Crête et Gagnon.
Smart c. T. Eaton ltée, juge Michael Sheehan, président, Me Édouard Bridge et Me
Monique Rhéaume, assesseurs, T.D.P.Q. Mtl 500-53-000020-923, 1993-02-10.
Jugement no 93-446.
St-Lawrence Manufacturing Canada inc. et al. c.Warrington Products inc. et Canstar
Sports Group inc. [1993] R.D.J. 359, 21 janvier 1993, juges Chouinard, Gendreau et
Proulx.
The Board of Trustees of the ACME Village School District no 2296, of the Province of
Alberta c. Steele-Smith, [1993] S.C.R. 47.
The Law Society of British Columbia et al. c. Mark David Andrews et al, [1989] 1 R.C.S.
143.
Tremblay c. Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau,
section locale 57 et al. C.S. 500-05-015894-924, 13 mai 1996, juge Tellier. [1989] 1 R.C.
S. 143.
AUTORITÉS DU TRIBUNAL
autres que celles citées par les parties
Législation
Déclaration universelle des droits de l'homme, A.G. Rés. 217 A (III), Doc. N.U. A/810
(1948).
Constitution de l'Organisation internationale du travail (1948) 15 R.T.N.U. 194.
Convention concernant l'égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre masculine et la
main-d'oeuvre féminine, (1953) 165 R.T.N.U. 303.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
La Recommandation no 90 sur l'égalité de rémunération, (1951), B.O. 14, vol. XXXIV,
no 1. Pub. dans Les bulletins officiels. [ci-après: Recommandation no 20].
La Convention concernant la discrimination (emploi et profession), (1964) 521, R.T.N.U.
427.
La Recommandation no 111 concernant la discrimination (emploi et profession), (1958),
B.O. vol. XLI, no 2, 79.
Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, (1976) 993 R.
T.N.U. 3.
La Déclaration dur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, (1953) 165 R.
T.N.U. 303.
La Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à
l'égard des femmes (1981) 1249 R.T.N.U. 13.
Déclaration de Beijing, Plateforme pour l'action, Femmes et économie, Stratégie F5,
article 165.
Directive 75/117/CEE concernant le rapprochement des législations des États membres
relatives à l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs
masculins et les travailleurs féminins, JO L45 du 19.2.1975, p.19.
Doctrine
DION, Gérard, Dictionnaire canadien des relations de travail, 2e édition, PUL, 1986,
Québec, 293p
SCHABAS, William A. et TURP, Daniel, Droit international, canadien et québécois des
droits et libertés: Notes et Documents, 2e éd. Cowansville, Éditions Yvon Blais, 1998, p.
75.
VOGEL-POLSKY, Éliane, L'équité salariale et l'égalité des chances en Europe
occidentale - observations critiques dans Michel. BROSSARD, éd., Équité en matière
de salaire et d'emploi, Montréal, École de relations industrielles, Université de Montréal,
1989, p.16.
Jurisprudence
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, (1991) 14 C.H.R.R.
D/341 (Tribunal canadien des droits de la personne).
Alliance de la fonction publique du Canada c. Le Ministère de la défense nationale,
D/495.
Béliveau St-Jacques c. Fédération des employés et employés de services publics inc.,
[1996] 2 R.C.S. 345.
Bhinder c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, [1985] 2 R.C.S. 561.
Canada (P.G.) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554.
Gould c. Yukon Order of Pioneers, [1996] 1 R.C.S. 571, 635.
Insurance Corp of British Columbia c. Heerspink, [1982] 2 R.C.S. 145.
Mon Air Land Investment c. Southfort Investments Ltd., (1981) C.A. 607.
Promotions Taillon Ltée c. Elliott et Braun Inc., (1989) R.D.J. 240 (C.A.).
Robichaud c. Canada (Conseil du Trésor), [1987] 2 R.C.S. 84.
Vriend c. Alberta, [1998] 1 R.C.S. 493, 537.
Winnipeg School Division No 1 c. Craton, [1985] 2 R.C.S. 150.
Zurich Insurance Co. C. Ontario (Commission des droits de la personne), [1992] 2 R.C.
S. 321.
__________________
1
Demande introductive d'instance amendée est datée du 18 novembre 1999.
2
Demande introductive d'instance réamendée et datée du 2 décembre 1999, voir
procès-verbal.
3
Pièce P-9 Mesures de redressement décidées à la 329e séance du Comité des
plaintes tenue le mardi 13 octobre 1998 et reprise le mardi 27 octobre 1998, le comité
agissant en vertu de l'article 61 de la Charte des droits et libertés de la personne et
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
conformément au Règlement sur le traitement des plaintes et la procédure applicable
aux enquêtes de la Commission.
4
C'est ce qu'indique l'art. 71.1: « faire enquête sur un ... non contradictoire ... de sa
propre initiative lorqu'une plainte lui est adressée sur toute situation » . Les soulignés
sont nôtres.
5
Règles de procédure du Tribunal des droits de la personne, C-12, r. I.I.
6
Mon Air Land Investment c. Southfort Investments Ltd., (1981) C.A. 607;
Promotions Taillon Ltée c. Elliott et Braun Inc., (1989) R.D.J. 240 (C.A.).
7
Pièce D-1: Convention collective de travail intervenue entre Université Laval et Le
Syndicat des employés de l'Université Laval, SCFP, Local 2500 (F.T.Q. - C.T.C.),
février 1991 - novembre 1992.
8
La Commission a déposé deux pièces comportant le « Manuel d'évaluation des
fonctions » : les pièces P-3 et P-4. La première constitue le document paraphé en cours
de négociation (P-3) alors que le deuxième est le texte complété et intégré dans la
convention collective. Il s'agit du document final du Manuel d'évaluation tel qu'utilisé
dans l'exercice d'évaluation des fonctions (P-4).
9
A.G. Rés. 217 A (III), Doc. N.U. A/810 (1948).
10
Id., préambule.
11
Constitution de l'Organisation internationale du travail (1948) 15 R.T.N.U. 194.
12
Incluse dans la Constitution de l'OIT, supra, note 11.
13
(1953) 165 R.T.N.U. 303.
14
Depuis 1919, l'OIT a adopté plus de 180 Conventions. Seules une trentaine furent
ratifiées par le Canada. SCHABAS William A. et TURP, Daniel, Droit international
canadien et québécois des droits et libertés notes et documents, 1998, Cowansville,
Éditions Yvon Blais, 2e éd. p.115.
15
1951, B.O. 14, vol. XXXIV, no 1. Pub. Dans Les bulletins officiels. [ci-après:
Recommandation no 90].
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
16
(1964) 521, R.T.N.U. 427.
17
1958, B.O. vol. XLI, no 2, 79.
18
Recommandation no 111 art. 2 v).
19
(1976) 993 R.T.N.U. 3.
20
Id., art. 2.
21
(1953) 165 R.T.N.U. 303. [ci-après: Convention no 100].
22
(1981) 1249 R.T.N.U. 13.
23
Ratifié par le Canada le 10 décembre 1981, voir [1982] R.T. Can. no 31; Ratifié
par le Québec le 20 octobre 1981, voir R.E.I.Q. (1984-89), no (1981) (12) p.850.
24
Voir. SCHABAS, William A. et TURP, Daniel, Droit international, canadien et
québécois des droits et libertés: Notes et Documents, 2e éd. Cowansville, Éditions Yvon
Blais, 1998, p. 75, note 1.
25
A/CONF.177/20, chap. I, résolution 1, annexe I.
26
(1981) 1249 R.T.N.U. 13.
27
Il est fait référence à l'égalité salariale à la Stratégie 5 du chapitre Diagnostic sur
les femmes et l'économie.
28
Déclaration de Beijing, Plateforme pour l'action, Femmes et économie, Stratégie
F5, article 165.
29
Vriend c. Alberta, [1998] 1 R.C.S. 493, 537.
30
[1999] 3 R.C.S. 3, 27.
31
Id., para. 41.
32
Insurance Corp of British Columbia c. Heerspink, [1982] 2 R.C.S. 145; Winnipeg
School Division No 1 c. Craton, [1985] 2 R.C.S. 150; Commission ontarienne des droits
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
de la personne c. Simpsons-Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536; Bhinder c. Compagnie des
chemins de fer nationaux du Canada, [1985] 2 R.C.S. 561; Compagnie des chemins de
fer nationaux du Canada c. Canada (Commission ontarienne des droits de la
personne), [1987] 1 R.C.S. 1114 ( « Action Travail des Femmes » ); Robichaud c.
Canada (Conseil du Trésor), [1987] 2 R.C.S. 84; Zurich Insurance Co. C. Ontario
(Commission des droits de la personne), [1992] 2 R.C.S. 321; Canada (P.G.) c.
Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554; Gould c. Yukon Order of Pioneers, [1996] 1 R.C.S. 571,
635; Béliveau St-Jacques c. Fédération des employés et employés de services publics
inc., [1996] 2 R.C.S. 345, 402-403.
33
Id.,para. 31.
34
2000,CSC 27.
35
Id., para. 36.
36
C.N. c. Canada (Com. des droits de la personne), 1 R.C.S. 1114, 1139.
37
L.R.C. (1985) c. H-6.
38
[1996] 3 C.F. 789; 27 C.H.R.R. D/488.
39
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, (1991) 14 C.H.R.
R.D/341 (Tribunal canadien des droits de la personne).
40
Alliance de la fonction publique du Canada c. Le Ministère de la défense
nationale, précitée, note 38, D/495.
41
Ibidem.
42
Ibidem.
43
35 C.H.R.R. D/387, D/413.
44
Éliane VOGEL-POLSKY, L'équité salariale et l'égalité des chances en Europe
occidentale - observations critiques dans Michel. BROSSARD, ed., Équité en matière
de salaire et d'emploi, Montréal, École de relations industrielles, Université de Montréal,
1989, p.16.
45
Statuts refondus, 1964, chapitre 142.
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
46
DION, Gérard, Dictionnaire canadien des relations de travail, 2e édition, PUL,
1986, Québec, 293 p.
47
Id., p. 68.
48
L.R.Q., c. E-12.001.
49
Id., art. 54.
50
DION, Gérard, op. cit., note 46, p. 82.
51
Ibidem.
52
Directive 75/117/CEE concernant le rapprochement des législations des États
membres relatives à l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre les
travailleurs masculins et les travailleurs féminins, JO L45 du 19.2.1975, p.19. Cette
directive fut adoptée par le Conseil des communautés européennes le 10 février 1975.
53
Id., art. 1(2).
54
Charte, par. 56(2).
55
[1989] R.J.Q. 831, 839.
56
Précitée, note 22.
57
Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143, 163 et 164.
58
[1989] 2 R.C.S. 879, 926-927.
59
Id., 926-928.
60
Id., p. 925.
61
Québec (Ville de) c. Commission des droits de la personne du Québec, précitée
note 55, 839. Dans cette affaire, à l'exception du juge Jacques (dissident) qui voit dans
la pratique de rémunération de la Ville de Québec une situation de discrimination
systémique, la majorité de la Cour d'appel conclut que la municipalité n'a pas agi de
manière discriminatoire en payant les matrones un salaire moindre que les gardiens
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C.D.P.D.J. Rhéaume c. Université Laval
alors que tous deux exécutaient les mêmes tâches.
62
Ibidem.
63
Central Okanagan School District 23 c. Renaud, [1992] 2 R.C.S., 970, 988.
64
[1999] 1 C.F. 113,
65
Id., para. 56.
66
[1998] 1 R.C.S. 591.
67
Id., para. 68-69.
68
Id., para. 35.
69
[1996] 3 R.C.S. 211.
70
Id., para. 67.
71
C: « Pointages obtenus par emploi : par facteur, total et classe salariale » ; D: «
Table de conversion » .
72
Voir les Pièces P-3 et P-4.
73
Pièce P-7.
74
Précitée, note 63.
75
Précitée, note 64.
76
Id., para. 56.
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