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VASES À PARFUM DE LA FIN DE L’ÉPOQUE CLASSIQUE MIS AU JOUR À APOLLONIA DE CYRÉNAÏQUE : LES ANALYSES DE CONTENUS

VASES À PARFUM DE LA FIN DE L’ÉPOQUE CLASSIQUE MIS AU JOUR À APOLLONIA DE CYRÉNAÏQUE : LES ANALYSES DE CONTENUS par Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet Perfume vessels of the end of Classical Period brought to light in Apollonia of Cyrenaica: analyses of content Résumé. – Les analyses chimiques de contenus organiques ne sont pas encore systématiques, mais sont de plus en plus sollicitées dans le cadre de problématiques liées aux activités de production, de transformation de matières premières, aux méthodes et pratiques de stockage, de transport, de conservation, de consommation, et aux rituels d’offrandes faites aux divinités et aux défunts. Une campagne de prélèvements a eu lieu à Apollonia de Cyrénaïque en 2008 dans le cadre de la Mission archéologique française en Libye, alors dirigée par André Laronde. Un peu plus d’une douzaine de vases à parfum de la in de l’époque classique et du début de l’époque hellénistique ont été sélectionnés ain de procéder à l’analyse chimique de leurs contenus organiques. Cet article présente les résultats de ces analyses et leurs interprétations botaniques et archéologiques. Il en ressort que les contenus des vases en céramique se différencient de ceux en albâtre et sont composés de substances grasses aromatiques à dimension cosmétique et médicinale, avec des matériaux d’origine végétale mais aussi animale. Abstract. – Analyses of organic contents are not yet systematic but are increasingly used in order to document the production, transformation, transportation, conservation and consumption, especially funerary offerings and rituals, practices of antique organic materials. A sampling campaign took place at Apollonia in Cyrenaica in 2008 as part of the French archaeological mission in Libya, at that time led by A. Laronde. A little over a dozen perfume vases dating of the end of the Classical era and the beginning of the Hellenistic period were selected to make a chemical analysis of their organic content. This article presents the results of these analyses and their botanical and archaeological interpretations. It appears that the contents of ceramic vessels differ from those of alabaster. They are composed of fatty aromatic substances of cosmetic and medicinal dimension with plant but also animal materials. Key-words. – Greek World. Apollonia of Cyrenaica. Necropolis. Perfume vases. Organic contents. End of the Classical period-beginning of the Hellenistic period. Mots clés. – Monde grec. Apollonia de Cyrénaïque. Nécropole. Vases à parfum. Analyses organiques. Fin époque classique-début époque hellénistique. Des excavations menées en profondeur au cours de l’année 2000, pour mettre en place les fondations d’un hôtel à l’ouest du rempart d’Apollonia, ont entraîné la découverte d’une vingtaine de tombes à ciste. Elles furent malheureusement malmenées par des moyens mécaniques, mais la plus grande partie du matériel (presque exclusivement céramique, avec environ 150 unités) fut sauvée, sans que soient toutefois sauvegardées les associations d’offrandes funéraires. Un sarcophage en marbre riche d’une quinzaine de vases fut aussi découvert la même année, plus à l’ouest, alors que d’autres tombes de la nécropole occidentale avaient déjà été plusieurs fois mises au jour REV. ARCH. 1/2013, p. 57-80. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 57 02/07/2013 15:1 58 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet fortuitement et leur matériel soigneusement récupéré par les responsables du site1. Parmi ce matériel funéraire, qui date surtout du IVe s. av. J.-C., avec quelques rares pièces remontant au Ve s.2, il y a plusieurs vases qui sont incontestablement des vases à parfum (lécythes, alabastres, amphoriskoi, askoi…). C’est sur quelques-uns de ces derniers que nous voudrions attirer l’attention, notamment sur ceux qui ont fait l’objet de prélèvements en vue de déterminer leurs contenus, grâce à des analyses chimiques réalisées dans le cadre d’un programme de l’ANR. Nous laisserons de côté les vases à parfum en albâtre qui ont, de même, fait l’objet d’analyses de contenus, mais qui demandent une étude particulière que nous n’avons pas encore eu le temps de mener à terme. La vingtaine de vases à parfum attiques connus à ce jour à Apollonia n’a rien d’exceptionnel ; elle prend place dans la moyenne de ce que l’on trouve d’ordinaire dans des tombes de nécropoles de la in de l’époque classique, aussi bien en Grèce même, par exemple à Pella3, que dans des cités coloniales ou des comptoirs lointains, notamment en Étrurie padane et sur les rives de la mer Noire4. A. Hermary, dans son ouvrage sur la nécropole de Kalfata d’Apollonia du Pont, s’interroge sur la nature des huiles parfumées conditionnées dans ces petits lécythes aryballisques attiques qui sont si communs, ayant fait l’objet d’une production massive et d’une ample exportation, et souhaite que puisse avoir lieu une analyse de leurs contenus5. Il existe en effet une méthode par séries d’analyses de chimie organique permettant d’identiier, même en l’absence de restes visibles, les marqueurs de matériaux organiques et de produits biologiques qui ont pu être piégés à l’intérieur des vases par imprégnation des pâtes céramiques. Cette approche analytique non destructive peut révéler non seulement des composants d’un mélange (même complexe), mais aussi certains procédés techniques de fabrication. Le potentiel offert aux archéologues est donc fort intéressant mais les résultats ne répondent pas toujours à leurs attentes. Il est par exemple impossible de retrouver, comme le voudraient nombre de nos collègues, une recette d’huile parfumée ou médicinale, seuls quelques marqueurs chimiques de ses composants ayant survécu aux différentes opérations de fabrication (broyage, enleurage, cuisson…) et à une dégradation inéluctable, lente ou rapide selon les circonstances, et sélective (certains marqueurs se conservant mieux que d’autres comme ceux des cires épicuticulaires, des huiles végétales, des cires et matières grasses animales). Malgré ces réserves, la chimie organique se révèle particulièrement bien adaptée à l’étude des parfums antiques, d’une part car les vases de forme fermée comme les lécythes, les aryballes et les askoi sont mieux à même de conserver l’information organique et, d’autre part, car ces parfums sont des matières grasses parfumées qui se prêtent bien à ce type d’analyses6. Un programme 1. L’importante découverte faite en 2000 a déjà plusieurs fois été signalée et sommairement commentée : voir MAFFRE 2001, p. 1065-1079 (première mention de cette trouvaille et présentation de quelques-unes des pièces) ; 2006, p. 221-230 (quelques compléments par rapport à l’article précédent) ; 2007, p. 105-125 (rappel de quelques-unes de ces trouvailles) ; 2010, p. 169-174. J.-J. Maffre remercie encore une fois ceux qui lui ont permis d’avoir accès au matériel céramique alors mis au jour, ainsi qu’à celui qui était conservé dans les réserves du musée d’Apollonia, et de l’étudier en vue d’une publication : A. El Khadoury, alors président du Département des Antiquités de Libye, feu A. Mzeini, alors contrôleur des Antiquités à Shahat (Cyrène), feu H. Fadlallah Abdussalam, alors directeur du site d’Apollonia, et son successeur, Br. Kwinin, alors inspecteur des Antiquités chargé du sauvetage des objets archéologiques revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 58 mis au jour par hasard à Apollonia. Enin, il ne peut que souligner l’immense dette due à son regretté collègue et ami A. Laronde, directeur de la Mission archéologique française en Libye, qui n’a pas peu fait pour qu’il soit associé à l’étude et à la publication de ces objets. 2. L’ensemble de ces trouvailles sera publié par les soins de J.-J. Maffre, à la suite des travaux de nettoyage et de restauration que nécessitent beaucoup de ces vases, et de l’achèvement des dessins de proils et des photographies de toutes les pièces. 3. AKAMATIS 2008. 4. On pourrait citer de nombreuses publications, par ex. celles d’Olynthe ou d’Istria. Pour se limiter à deux ouvrages récents, à l’abondante bibliographie, on renverra au livre d’HERMARY et al. 2010 et à celui de MUGGIA 2004. 5. HERMARY et al. 2010, p. 181 et suivantes. 6. Voir GARNIER, FRÈRE 2008 ; GARNIER 2008 et 2012. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 59 d’analyses chimiques et génétiques, piloté par l’UMR 8546 (AOROC, ENS Ulm), lauréat 2007 de l’ANR, a ainsi permis de faire l’étude pluridisciplinaire (contenants et contenus) de 230 vases à parfum en verre, en céramique, en albâtre et en faïence7, de la période archaïque jusqu’au début de l’Empire romain. C’est dans ce contexte qu’a été organisée en 2008 une campagne de prélèvements à Apollonia de Cyrénaïque. Parmi les vases sélectionnés pour analyse de leurs contenus igurent deux lécythes attiques à igures rouges, trois vases attiques à décor en partie surpeint (deux alabastres, un amphoriskos), une pièce attique à vernis noir d’un type plus rare (un askos en forme d’astragale), un petit vase attique à vernis noir d’un type extrêmement commun (une petite olpè), un guttus italiote à protomé de lion et, enin, deux lécythes de facture locale ou régionale. C ATA L O GU E D E S C É RA M I QU ES S O UM IS ES À L’ EXA M EN DE LEUR S CO NT ENUS LÉCYTHES ARYBALLISQUES ATTIQUES À FIGURES ROUGES8 1. Inv. 1004/1 (anciennement 969)9 (ig. 1) Intact, mais avec des éralures en surface. Argile beige à gris-beige. Surface beige foncé. Vernis noir brillant, profond, localement écaillé (sur le col et l’embouchure). Dimensions en cm : h 7,4 ; diam. ext. de l’embouchure 2,8 ; diam. ext. du col 1,3 ; diam. int. du col 0,8 ; diam. de la panse 5,8 ; diam. du pied 5,2 ; h de l’anse 2,4 ; section de l’anse 1 x 0,35. Décor : l’extérieur du vase était noir, y compris le plat et l’intérieur de l’embouchure (maintenant écaillé), excepté la tranche du pied et (du côté opposé à l’anse) un ilet réservé (long. 4,5 ; h 0,3) et la igure qui se proile au-dessus de lui vers la g. : tête masculine imberbe aux cheveux courts, coiffée d’un pétase. La surface de pose du pied et le dessous du vase, plat, sont réservés. Dessin rapide, quelque peu négligé (visage laid, au menton fuyant vers l’arrière), mais présence nette de traits et de lignes de contour. Ces petits lécythes aryballisques, décorés d’une tête coiffée d’un pétase, qui renvoie peut-être au dieu Hermès, surtout lorsque ce pétase est ailé, sont relativement fréquents dès la 2nde moitié du Ve s.10 Ils sont en général attiques. Celui-ci doit plutôt dater de la 1re moitié du IVe s. 2. Inv. 1131/1 (ig. 2) Intact, mais avec quelques éralures en surface. Embouchure ébréchée. Argile beige à grisbeige. Surface beige clair. Vernis noir plutôt terne, largement écaillé sur le col et le dessus de la palmette, localement viré au brun chocolat (sur le haut du col). 7. Programme Perhamo (Parfums et résidus huileux archéologiques de la Méditerranée occidentale). Voir FRÈRE 2008 ; FRÈRE, GRAN AYMERICH 2010. 8. Pour des remarques générales et une mise au point récente sur les lécythes aryballisques dans les nécropoles de la in de l’époque classique, voir HERMARY 2010, p. 181-188. 9. MAFFRE 2010a, p. 170-171, ig. 4, à dr. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 59 10. Voir par ex. l’exemplaire du musée Dobrée de Nantes, daté vers 420-390 par FRÈRE 1997, pl. 26, 2-3 (avec bibliogr.). Un autre exemplaire, conservé au musée de Ferrare (inv. 22050) et provenant de la tombe 391 de la nécropole de Valle Trebba à Spina, montre une tête qui renvoie sans aucun doute à Hermès, puisque le pétase est ailé ; il est daté d’env. 430 : voir MUGGIA 2004, p. 75-76, ig. 264. 02/07/2013 15:1 60 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet 1. Lécythe aryballisque attique à figures rouges ; h 7,4 cm ; inv. 1004/1. © Dessin D. Frère, photographie J.-S. Caillou. 2. Lécythe aryballisque attique à figures rouges ; h 12,1 cm ; inv. 1131/1. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 60 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 61 Dimensions : h 12,1 ; diam. ext. de l’embouchure 3,8 ; diam. ext. du col 1,6 ; diam. int. du col 0,6 ; diam. de la panse 6,3 ; diam. du pied 5,1 ; h de l’anse 3,2 ; section de l’anse 1,3 x 0,6. Décor : l’extérieur du vase était noir, y compris le plat de l’embouchure (maintenant écaillé) et la tranche du pied, excepté (du côté opposé à l’anse) un ilet réservé surmonté d’une palmette à 14 pétales entourés d’un ilet réservé et accostée de chaque côté d’un motif réservé plus ou moins triangulaire. La surface de pose du pied et le dessous du vase, légèrement convexe, sont réservés. Ce lécythe ayballisque à palmette, très probablement attique dans le contexte de la Cyrénaïque, s’ajoute à d’innombrables exemplaires attestés sur de nombreux sites archéologiques11 et dans divers musées12. Une datation au IVe s. av. J.-C. (2e ou 3e quart) s’impose. ALABASTRES ATTIQUES À DÉCOR RÉTICULÉ Presque complets, à part quelques ébréchures à l’embouchure et quelques éralures sur l’épiderme, les deux vases sont très proches l’un de l’autre. Ils ont des caractéristiques matérielles très voisines : forme identique, argile orangée, surface beige orangé clair, vernis noir assez brillant, viré localement au brun-rouge (dans la partie basse de l’exemplaire no inv. 1021 et vers le haut de l’autre). Le décor est semblable (en partie réticulé, en partie noir, avec des motifs surpeints en blanc — partiellement effacés), réparti de la même façon sur les deux vases, à quelques légères variantes près : plat et intérieur de l’embouchure réservés, avec juste un épais ilet noir pour souligner la tranche ; col réservé ; paroi divisée en plusieurs zones superposées, de haut en bas (zone noire, ornée de trois palmettes élancées et de trois rosettes de points blanches) ; ilet réservé ; ilet noir ; zone réservée, ornée d’un quadrillage en losange dans lequel s’insère d’une façon irrégulière un semis de points blancs ; bande noire ornée de motifs blancs (croix accostées de points et de rosettes de points) et de deux ilets brun rouge ; bande réservée ; bas du vase noir, avec traces de motifs blancs. Chacun des deux alabastres devait être posé sur un petit support creux dans lequel il s’emboîtait ; ces supports sont conservés, no inv. 1054 (anciennement 1019) et 1055 (anciennement 1020). Seules diffèrent légèrement les dimensions des deux vases. 3. Inv. 1021 (anciennement 986)13 (ig. 3) Dimensions : h 12,9 ; diam. max. de l’embouchure 3,3 ; diam. ext. du col 1,5 ; diam. int. du goulot 0,8 ; diam. max. du vase 3,7 ; h des différentes zones de la paroi : zone supérieure noire 11. La nécropole de Kalfata, à Apollonia Pontica, en a récemment livré 12 exemplaires, datés du 2e ou du 3e quart du IVe s. av. J.-C. et considérés les uns comme attiques, les autres comme des imitations locales : HERMARY et al. 2010, p. 186-187, CP 15 à CP 26 (tous illustrés, sauf un). Un exemplaire au moins a déjà été trouvé à Apollonia de Cyrénaïque : WHITE, PHILLIPS 1976, p. 125 (inv. 65-211), pl. 25, d-e. Au moins un autre exemplaire, revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 61 daté du 2e quart du IVe s., est attesté à Cyrène : ELRASHEDY 2002, p. 59-60, no 73 (avec bibliogr.), pl. 57, 1.s. 12. Un exemple parmi bien d’autres : l’exemplaire du Palais des Beaux-Arts de Lille, récemment publié et daté du milieu du IVe s. par TALLEUX 2005, pl. 21, 4-5. 13. MAFFRE 2010a, p. 173, ig. 16, à g. 02/07/2013 15:1 62 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet 3. Alabastre attique à décor réticulé ; h 12,9 cm ; inv. 1021. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. 4. Alabastre attique à décor réticulé ; h 12,3 cm ; inv. 1022. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. 2/2,3 ; zone à décor réticulé 3,8/3,9 ; zone réservée inférieure (partagée en deux parties superposées par un ilet noir horizontal) 2,4. 4. Inv. 1022 (anciennement 987)14 (ig. 4) Dimensions : h 12,3 ; diam. max. de l’embouchure 3,4 ; diam. ext. du col 1,35 ; diam. int. du goulot 0,75 ; diam. max. du vase 3,7 ; h des différentes zones de la paroi : zone supérieure noire 1,5 ; zone à décor réticulé 3,8/3,9 ; zone réservée inférieure 1,6/1,7. Ces alabastres à décor réticulé sont bien attestés dans des tombes du IVe s., comme l’atteste par exemple un exemplaire du musée de Ferrare (inv. 26930) publié récemment et daté du 2e quart du IVe s.15. D’autres exemplaires remontent au Ve s.16 mais ceux d’Apollonia proviennent d’un contexte qui invite à les placer au IVe s. 14. MAFFRE 2010a, p. 173, ig. 16, à dr. 15. Alabastre attique provenant de la tombe 391 de la nécropole de Valle Trebba à Spina, daté d’env. 375-350 : MUGGIA 2004, p. 137 et 139, ig. 75 (à dr.). revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 62 16. Par ex. les alabastres de l’Ashmolean Museum, 1934.67 et du British Museum, 64.10-7.1899, cités, datés (respectivement du 2e/3e quarts du Ve s. et 1re moitié du Ve s.) et illustrés par KURTZ 1975, p. 232, pl. 72,5-6. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 63 AMPHORISKOS ATTIQUE À DÉCOR RÉTICULÉ17 5. Inv. 931 (ig. 5) Intact, mais encore partiellement couvert de concrétions. Argile orangée. Surface beige orangé foncé. Vernis noir brillant, profond. Dimensions : h 14,2 ; diam. max. de l’embouchure 3,4 ; diam. ext. du col 1,7 ; diam. int. du goulot 0,7 ; diam. max. du vase 6,9 ; diam. du pied 2,4 ; h des anses 2,8 ; section des anses 0,5 x 0,6. Décor : embouchure, col et anses noirs ; épaule réservée, ornée de couples de traits noirs alternant avec des godrons blancs ; sur la panse, de haut en bas, tout autour du vase : bande noire (h 1,7) ornée de palmettes et de tiges (lotus ?) blanches ; mince bande réservée (h 2,8) parcourue horizontalement par un ilet blanc ; zone réservée (h 2,4) ornée d’un motif réticulé formant des losanges dont chacun contient un point blanc ; mince bande noire (h 0,5/0,8) ; mince bande 5. Amphoriskos attique à décor réticulé ; h 14,2 cm ; inv. 931. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. 17. Sur les amphoriskoi, voir par ex. SPARKES, TALCOTT 1970, p. 155-156, ig. 11, pl. 39, no 1147-1161. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 63 02/07/2013 15:1 64 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet 6. Askos attique en forme d’astragale ; h max. 8,3 cm ; inv. 1003. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. réservée (h 1,1/1,2) en partie colorée en blanc ; bande noire ; pied mouluré en partie réservé, en partie noir ; surface de pose et intérieur du pied, creux, réservés. Le vase doit dater du milieu ou du 3e quart du IVe s. av. J.-C. ASKOS ATTIQUE EN FORME D’ASTRAGALE18 6. Inv. 1003 (ig. 6) Intact, malgré quelques éralures sur le réservoir et une issure à la jonction entre celui-ci et la partie sup. du vase (d’une part goulot, d’autre part anse). Argile brun orangé. Vernis noir plus ou moins épais, dans l’ensemble mat mais avec quelques secteurs brillants. Dimensions : longueur max. 8,3 ; largeur max. 4,8 ; larg. min. 4,1 ; h max. 8,3 ; diam. de l’embouchure 3,6 ; diam. min. du goulot 1,8 ; larg. max. de l’anse (à l’emplacement du nœud) 2,1. La morphologie de ce type d’askoi présente deux particularités principales qui se retrouvent d’un exemplaire à un autre avec simplement quelques variantes de détail : le réservoir a la forme d’un osselet, plus ou moins régulier, et l’anse, faite de deux tiges accolées, se divise en deux dans sa partie supérieure pour former un nœud (dit « nœud d’Héraclès »). Ces vases sont attestés dans la production attique par quelques exemplaires à igures rouges du Ve s. et dans les productions attique et italiote par davantage d’exemplaires à vernis noir du IVe s. Celui qui est présenté ici est très probablement attique étant donné les caractéristiques du vernis. Ces différents types de vases attiques (lécythe aryballisque, alabastre, amphoriskos, askos) sont unanimement considérés comme des vases à huile parfumée19. Ce sont la nature et le statut de 18. Sur cette variété pittoresque d’askoi, on se reportera à deux articles récents qui en publient quelques-uns de nouveaux (un en Angleterre, trois en Bulgarie, très probablement revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 64 attiques) et font le point sur cette sorte de vases : ARAFAT 2006, p. 139-140, no 36 ; PANAYOTOVA 2008. 19. ALGRAIN, BRISART, JUBIER-GALINIER 2008. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 65 ce parfum qui divisent les spécialistes : certains pensent qu’il s’agit d’un produit coûteux, voire luxueux, et d’autres au contraire d’un produit très abordable à la portée de différentes classes sociales, ce qui expliquerait en partie le succès des ateliers attiques et celui des ateliers corinthiens quelques générations auparavant. Les boutiques de parfumerie de l’agora d’Athènes à l’époque classique sont connues grâce aux sources littéraires et iconographiques ; le marché aux parfums, amplement fréquenté par les citoyens malgré les condamnations de certains moralistes, est « un endroit bien en vue, où l’on aime à sentir les produits de luxe et où les parfums exotiques font rêver… »20. Les vases importés à Apollonia pouvaient-ils contenir les créations de certains myropolai célèbres de l’agora d’Athènes, ou servaient-ils à conditionner et à exporter des huiles parfumées beaucoup plus simples et modestes ? Les analyses des contenus de ces différentes formes de vases attiques de la in de la période classique visent d’une part à cerner les caractéristiques techniques de leurs huiles parfumées (matières premières employées, méthodes de fabrication), d’autre part à résoudre la problématique du statut et de la valeur de ces parfums et, enin, à savoir s’il existe un rapport direct entre la forme du vase et son contenu. OLPÈ ATTIQUE À VERNIS NOIR 7. Inv. 1009 (ig. 7) Intact, malgré quelques légères éralures sur la panse et surtout sur l’anse. Argile orange clair. Vernis noir assez épais brillant dans l’ensemble. Dimensions : h max. (anse comprise) 11,2 ; h embouchure 7,6 ; diam. de l’embouchure 3,4 ; diam. de la panse 4,8 ; diam. du pied 3,9. Anse coudée haute à section circulaire dépassant largement de l’embouchure ronde ; panse ovoïde se rétrécissant pour former le col haut et assez large ; pied annulaire in. Le vernis recouvre l’ensemble de la partie externe du vase, excepté la base qui est réservée. Ce type de petite olpè, extrêmement fréquent à Apollonia (plusieurs dizaines d’exemplaires, voir la ig. 7 qui en présente quatre), a fait l’objet d’une production importante à Athènes durant tout le Ve et une partie du IVe s., avec une grande homogénéité de forme et de dimensions21. La longévité de ce type de vase et le respect de certains critères morphologiques (comme une capacité volumétrique relativement standardisée et l’anse coudée haute permettant une prise entre l’index et le pouce) sont sans aucun doute dus à une fonction de récipient doseur comme l’attestent certaines inscriptions22. L’olpè est souvent considérée comme un ustensile du banquet, toutefois B. A. Sparkes et L. Talcott relativisent cet usage : « The conventional name has been retained, although it is now known that its application to a wine-jug is a limitation of its ancient meaning. »23 Dans l’article « Olpè ou Olpis » du DAGR, Ed. Pottier souligne bien le fait que dans les textes le terme désigne parfois un vase à puiser ou à verser le vin et, parfois, une iole à huile ou à parfum24. Les analyses de contenus de l’exemplaire inv. 1009 d’Apollonia permettent de valider l’hypothèse de la fonction de récipient doseur dans la production d’huiles parfumées ou, plus assurément, d’huiles médicinales. 20. LALLEMAND 2008, p. 178. Pour les sources littéraires, voir en dernier lieu, avec bibliogr. antérieure : LALLEMAND 2008 ; SQUILLACE 2010 ; 2012, p. 235-237. Pour les sources iconographiques, voir en dernier lieu, avec bibliogr. antérieure : CHATZIDIMITRIOU 2008 et MAFFRE 2010b. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 65 21. 22. 23. 24. SPARKES, TALCOTT 1970, p. 78-79. SPARKES, TALCOTT 1970, p. 78. SPARKES, TALCOTT 1970, p. 76. E. POTTIER, « Olpè ou Olpis », DAGR, 4, p. 172. 02/07/2013 15:1 66 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet 7. Olpès attiques à vernis noir ; h max. (anse comprise) 11,2 cm ; inv. 1009. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. GUTTUS ITALIOTE À VERNIS NOIR 8. Inv. 1003 (ig. 8) Bon état général, malgré quelques légères éralures et une issure sous le pied. Concrétions au niveau du pied et du versoir. Argile orange très clair. Vernis noir mat peu épais virant au brunmarron par endroits. Dimensions : h max. (anse comprise) 6,05 ; h panse 4,2 ; diam. du médaillon 3,1 ; diam. de la panse 8,4 ; diam. du pied 5,2. Vase à paroi bombée, cannelée ; versoir en forme de tête de lion ; anse large en anneau ; pied haut mouluré ; oriice de remplissage à iltre (cinq petits oriices à l’intérieur d’un cercle en relief). Le vernis recouvre l’ensemble de la partie externe du vase, excepté le dessous du pied qui est réservé. Ce beau guttus à vernis noir à protomé de lion est de l’espèce 8160 de la typologie de J.-P. Morel25. Il s’agit d’une production d’Italie méridionale et de Sicile attestée au IVe s. La forme du guttus apparut en céramique attique à igures rouges dans la in du Ve s. et fut adaptée en Italie avec un léger décalage26 ; nombre d’archéologues considèrent qu’elle fait fonction de burette pour emplir en particulier les lampes à huile, hypothèse à rejeter selon L. Villard27. M.-O. Jentel, dans un paragraphe intitulé « Nom antique et usage des gutti et des askoi » de son ouvrage consacré à ces vases en Étrurie et Apulie propose une synthèse des différentes interprétations relatives à leurs fonctions et favorise l’hypothèse de vase à parfum28. B. A. Sparkes et L. Talcott résument en une phrase les possibilités concernant leurs contenus : « Their small size, their spout, and their handle for pouring, indicate a vessel from which small amounts of liquid are to be poured drop 25. MOREL 1981, p. 423-424, pl. 210. 26. RICHTER 1959, p. 242-243. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 66 27. BLONDÉ, VILLARD 1992, p. 116. 28. JENTEL 1976, p. 28-30. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 67 8. Guttus italiote à vernis noir ; h max. (anse comprise) 6,05 cm ; inv. 1003. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. by drop: oil, perfume or honey »29. Notons que l’exemplaire d’Apollonia est pourvu d’une bille en céramique emprisonnée dans sa vasque, qui ne pouvait avoir pour fonction que celle habituellement dévolue aux tiges à parfum, inutilisables dans ce type de vase : elle témoigne donc de la nature d’un contenu hétérogène qu’il était nécessaire de mélanger avant usage. Les analyses de contenus permettent d’apporter d’utiles précisions sur ce produit composite. LÉCYTHES CYRÉNÉENS 9. Sans no inv. (ig. 9) Anse manquante, n’en subsistent que les attaches. Quelques concrétions sur la panse. Argile rose-orange tendre. Vernis brun orange mat, très peu épais. Dimensions : h 12,45 ; diam. emb. 2,9 ; diam. de la panse 4,4 ; diam. du pied 4,1. Panse haute efilée, diam. maximal dans la partie inférieure, se resserrant pour former le col étroit ; embouchure tronconique ; pied haut épais tronconique. Le pied est vernissé hormis un ilet réservé dans la partie inférieure et deux bandes de vernis ornent la partie supérieure de la panse. 10. Sans no inv. (ig. 10) Le col et l’anse, brisés, ont été recollés. Concrétions blanchâtres sur une partie de la panse. Pied déformé. Argile orange clair tendre avec de nombreux grains de chamotte rougeâtres. Pas de vernis. Dimensions : h 14,1 ; diam. emb. 4,8 ; diam. de la panse 8,9 ; diam. du pied 5,2. Panse large à diam. maximal au centre ; embouchure large et haute en cupule ; anse en coude ; pied bas, mince, annulaire. Ces deux lécythes sont des productions typiques de la Cyrénaïque, le premier du début du IVe s.30 et le second sans doute un peu plus tardif, du 2e quart de ce siècle31. De facture plus grossière que leurs homologues de l’Attique, ils se caractérisent par une pâte céramique tendre et par l’absence d’un vernis 29. SPARKES, TALCOTT 1970, p. 157. 30. COPLAND 2005, ig. 358, 704 et 704. « Red Painted », type 126, shape I, p. 625-626. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 67 31. COPLAND 2005, « Undecorated ware », type 196, ig. 426, 1322, p. 640. 02/07/2013 15:1 68 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet 9. Lécythe cyrénéen ; h 12,45 cm ; sans no inv. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. recouvrant leur surface, deux critères techniques importants concernant l’étanchéité de vases censés contenir une huile32. Toutefois, les caractéristiques morphologiques de leurs embouchures conirment leur fonction de vases à huile parfumée33. Les analyses de leurs contenus ont pour objectif de déceler une différence entre les huiles parfumées importées de Grèce et d’Italie du Sud et les huiles parfumées fabriquées sur place et de révéler l’utilisation éventuelle de matières premières locales. A N A LYS E S E T I N TE RP RÉ TAT IO NS MÉTHODES ET PROTOCOLES D’ANALYSES Comme il a été dit dans l’introduction, l’archéologie biomoléculaire offre la possibilité de retrouver les marqueurs chimiques de matériaux d’origine animale et végétale qui composaient 32. Des tests de porosité de la paroi céramique des vases à huile parfumée ont été faits à partir d’unguentaria hellénistiques (ANDERSON-STOJANOVIC 1987, p. 116), d’aryballes et alabastres corinthiens et étrusques et de lécythes attiques (ALGRAIN, FRÈRE sous presse). Les qualités intrinsèques de revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 68 l’argile, des critères techniques tels que la température de cuisson et le polissage de la surface du vase (ou la présence d’un vernis) permettent une bonne étanchéité de certains vases, en particulier ceux de l’Attique. 33. ALGRAIN, FRÈRE sous presse. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 69 10. Lécythe cyrénéen ; h 14,1 cm ; sans no inv. © Dessin D. F., photographie J.-S. C. les huiles parfumées contenues dans les récipients en céramique34. La céramique offre en effet la particularité de pouvoir s’imprégner des matières grasses avec lesquelles elle est en contact. La quantité de matière organique conservée dans les pores de la céramique est d’autant plus grande que le contenu est luide et pénétrant et qu’il a séjourné longtemps dans le vase, laissant le temps aux constituants chimiques de diffuser au travers des parois. C’est bien évidemment le cas des huiles, des graisses ou des cires aromatisées par enleurage à chaud ou à froid, des préparations odorantes de type macération ou décoctions, conditionnées pour un laps de temps plus ou moins long dans l’emballage qu’est l’alabastre, le lécythe, le guttus ou l’askos… Mais aux transformations par broyage, pressage, iltrage, chauffage des matières premières d’origine, s’ajoute les événements rituels et post-dépositionnels qui peuvent changer la nature du contenu : des mélanges avec les contenus d’autres vases, des pollutions par d’autres substances organiques comme les offrandes végétales et animales en décomposition dans la tombe, l’iniltration de sédiments eux-mêmes riches en matières organiques, le lessivage par les eaux de ruissellement, 34. REGERT 2007. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 69 02/07/2013 15:1 70 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet l’intrusion d’animaux fouisseurs comme les vers de terre particulièrement attirés par la richesse organique du contenu et le processus d’altération inéluctable des matériaux organiques. Ces différents phénomènes anthropiques et naturels impliquent que les marqueurs chimiques identiiés dans une céramique archéologique ne sont évidemment pas ceux que l’on trouverait dans une huile parfumée récemment fabriquée. L’ampleur et la iabilité des résultats dépendent donc de nombreux facteurs que les archéologues comme les chimistes ne peuvent contrôler. Certaines céramiques présentent ainsi un éventail de plusieurs marqueurs chimiques, tandis que d’autres du même site n’ont guère gardé de traces de leur contenu d’origine. Ain d’identiier les éventuelles traces conservées, les parois ont été grattées à l’aide d’un scalpel propre et la poudre recueillie extraite par des solvants organiques. Après puriication, l’extrait organique est analysé par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (GC-MS). Les méthodes d’analyse séparative et structurale permettent de séparer les molécules une à une à partir d’un mélange complexe extrait. Par couplage, chaque marqueur séparé est directement injecté dans le spectromètre de masse. Son spectre, considéré comme une carte d’identité propre à chaque molécule, permet de reconstituer sa structure. En déinissant des associations de molécules ainsi identiiées, certaines sources biologiques peuvent être proposées. Les marqueurs identiiés sont ensuite regroupés en associations. Suivant la spéciicité de chaque association déinie, il est parfois possible de discriminer des sources végétales et animales ou de cibler une espèce végétale (mais beaucoup plus rarement un genre). Ce travail d’interprétation des données brutes fournies par l’analyse chimique ne peut se faire que dans un cadre pluridisciplinaire en collaboration étroite avec des archéobotanistes, des ethnobotanistes et des historiens de la botanique. Sur les 10 vases d’Apollonia qui ont fait l’objet d’analyses, 2 offrent des résultats pouvant donner lieu à une étude botanique. Les résultats des autres vases, bien que plus modestes, permettent néanmoins une interprétation archéologique qui sera développée plus tard. L’ENQUÊTE BOTANIQUE Les deux vases les plus remarquables sont la petite olpè attique no 7 et le lécythe cyrénéen n 10. En ce qui concerne le lécythe (tabl. 1), l’extrait lipidique est dominé par des triterpènes (molécules à 30 atomes de carbones spéciiques des végétaux), fait assez rare pour être remarqué. Les acides gras, assez peu présents, révèlent une huile végétale fortement oxydée, non par cuisson (absence de cétones impaires à longue chaîne) mais par oxydation lente et naturelle (hydroxyacides en C16 et C18). L’analyse se heurte au problème du référencement car le composé principal est un triterpène dont le spectre n’est pas référencé dans les bases de données et n’est donc pas identiiable. La seule information disponible ne peut provenir que des autres triterpènes identiiés : a- et b- amyrines (ubiquistes dans le règne végétal), le simiarénol, la friedeline, le lupéol et l’acétate d’oléan-12-ènol. L’association des stérols (b-sitostérol, stigmastérol, campestérol) conirme la présence d’huile végétale. La préparation est donc probablement une huile végétale dans laquelle ont été mises à infuser des plantes dont les marqueurs ont été détectés, mais ne peuvent être totalement interprétés à ce jour. La recherche doit donc se concentrer en priorité sur des composés moins ubiquistes dans le monde végétal comme le simiarénol. Le simiarénol, après une analyse de la littérature phytochimique, s’avère présent dans diverses armoises et des rhododendrons. Les plantes du continent américain étant évidemment exclues, nous avons exploré la o revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 70 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 71 piste des Maytenus africains, dans la mesure où le composant semble un marqueur du genre, avec la friedeline, le lupéol et la b-amyrine. Certaines des espèces sont répertoriées avec des usages médicinaux en Afrique subsaharienne, mais il s’agit essentiellement d’usages localisés et aucune des plantes concernées n’a été citée, à notre connaissance, dans les identiications de plantes à parfum ou médicinales antiques. Une rapide analyse des genres africains ou indiens de la famille des Célastracées, au sein de laquelle le composé se retrouve assez fréquemment, ne donne pas non plus de candidat cité dans les interprétations de la littérature antique. Le simiarénol est également présent dans quelques espèces européennes ou d’Asie Mineure : une euphorbe au latex toxique, Euphorbia lathyris L., et un rhododendron, Rhododendron ponticum L. Leur toxicité et l’absence de citation comme plante à parfum ou médicinale conduisent également à éliminer ces sources. Une autre source de simiarénol mériterait cependant un approfondissement, celle des cires épicuticulaires (les cires présentes à la surface des fruits, feuilles, leurs ou rameaux) de certaines Graminées. À cette piste des Graminées s’ajoute celle, très intéressante, d’armoises nord-africaines pour lesquelles, hélas, les analyses pharmacologiques ne sont pas disponibles. Ces deux pistes seront défrichées dans un futur proche par comparaison avec les résultats d’analyses d’échantillons modernes d’armoises et de graminées odorantes. Le second vase, la petite olpè attique (tabl. 1), montre une teneur beaucoup plus riche en acides gras, dont le proil indique un produit laitier. Le cholestérol abondant vient conirmer l’origine animale. Une association de diterpènes (composés à 20 atomes de carbone caractéristiques des conifères) indique la présence d’une résine de conifère. La forte proportion d’acide abiétique permet d’écarter les espèces de pin, Pinus sp., et orienterait plutôt vers des espèces de type sapin (Abies sp.). L’acide benzoïque et la vanilline sont présents, séparément et ensemble (notamment dans la résine de liquidambar et dans du styrax), dans un grand nombre de substances aromatiques d’origine végétale. On trouve ainsi l’acide benzoïque dans l’iris, le fenouil, l’anis, la menthe poivrée, la résine de pin d’Alep… mais aussi dans les espèces exotiques comme les benjoins et les cannelles. Mais le fait le plus original de ce proil est la grande proportion de produits soufrés de faible poids moléculaire. Ces composés, des sulfures ou des thiols, sont assez dificiles à identiier correctement par leur spectre de masse, car les bases de données sont, là aussi, lacunaires. Certains des composés peuvent être identiiés mais ne peuvent être reliés à une origine végétale. Les composés sulfurés peuvent être le signe de la présence de plantes du type oignon, ail35 ou poireau, de plantes de la famille des Brassicacées36 (comme la moutarde) ou des Capparidacées (la famille du Câprier). Ils peuvent également signaler l’utilisation 35. Le genre Allium présente des composés secondaires soufrés : thiosulides et disulides. Ceux-ci sont connus et ont fait l’objet de multiples travaux, avec des composés prépondérants différents selon les espèces, mais dans des proportions variables au sein d’une même espèce selon les organes impliqués, les variétés et les stades phénologiques. Cependant, ces composés sont très sensibles à l’oxydation (on le constate concrètement en cuisine, car un jus d’ail ou d’oignon vire assez vite), et les sulfures s’oxydent vite en sulfoxydes par exemple. Dès que les parois cellulaires sont cassées (donc dans toute trituration), une hydrolyse se produit et les composés résultants évoluent très vite. Des recherches revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 71 additionnelles sont nécessaires sur le sujet et sur l’évolution dans le temps de ces composés. 36. La famille des Brassicacées présente effectivement des glucosinolates ou « thioglucosides » (comportant un glucose ou sucre, un groupe sulfate et une génine, c’est-à-dire le groupement non-glucidique d’un hétéroside). Cependant, les Brassicacées, particulièrement les choux et les moutardes, sont caractérisées par la présence de quantités importantes d’acide érucique et, dans une moindre proportion, d’acide arachique qui, normalement, restent détectables dans les résidus (SERPICO, WHITE 2000a, p. 414) et sont, en l’occurrence, absents dans les analyses réalisées pour ce contenant. 02/07/2013 15:1 72 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet de gommo-oléo-résines d’Ombellifères37 médicinales et aromatiques, dont beaucoup d’espèces présentent des composés sulfurés38. C’est, par exemple, le cas dans les Férules (le genre source du galbanum), de l’ase fétide attestée dans la littérature antique tardive sous le nom de silphion oriental39. Compte tenu de la localisation d’Apollonia, le cas des Ombellifères doit être soigneusement étudié, car la région est à la fois proche de la zone de production du silphion et apparaît dans les sources antiques comme une des zones d’approvisionnement de la gomme ammoniaque et du silphion oriental, qui lui a été en partie substitué40. L’utilisation d’une ombellifère pourrait justiier de composants diterpéniques et des sucres (pour la fraction gomme), de l’acide benzoïque et des composés sulfurés selon l’espèce. Les dificultés d’identiication des espèces végétales tiennent à trois facteurs : d’une part, il est dificile de déterminer si l’on a affaire à une composition (les marqueurs identiiés renvoient à plusieurs plantes en mélange) ou à une seule plante-source dont les marqueurs identiiés seraient la signature chimique (cependant, surtout pour les présumés parfums ou compositions médicinales, la première hypothèse doit être considérée comme la plus fréquente) ; d’autre part, certains des composants identiiés se retrouvent chez de très nombreuses espèces et familles dans le règne végétal (donc un composant donné ne se rapporte pas à une seule plante) ; enin, les bases de comparaison issues de disciplines connexes, le plus souvent à visées pharmaceutiques, sont incomplètes ou partiellement inadéquates41. Comme nous le constatons, les incertitudes demeurent nombreuses et l’enquête botanique se heurte à de multiples obstacles dont certains pourront être franchis dans un futur proche, grâce surtout à l’enrichissement de la bibliothèque de référence d’échantillons des espèces végétales candidates42. 37. Il est à noter que les Ombellifères, bien qu’encore peu étudiées dans les analyses de résidus, présentent de l’ombelliférone, de l’acide férulique (pour les férules et l’opoponax), des gommes polysaccharides (souvent peu conservées dans les résidus archéologiques) et des acides phénoliques, tous composants qui, dans la durée, ont tendance à la polymérisation, rendant dificile l’identiication des marqueurs caractéristiques (SERPICO, WHITE 2000b, p. 450). En outre, les composés caractéristiques des genres (et des espèces) se situent souvent dans les monoterpènes, rarement conservés dans les résidus anciens. Enin, les Ombellifères se caractérisent, comme beaucoup de gommo-oléo-résines par une très grande variabilité selon les conditions environnementales, les localisations et les conditions de récolte. Cependant de l’acide férulique a été détecté à l’analyse dans un pot à onguent égyptien du Moyen Empire (MATHE, HOVANEISSIAN, ARCHIER, VIELLESCAZES 2005) et semble donc pouvoir être conservé au moins dans certaines conditions. Dans le cas de l’olpè, ce type de composant est absent et conduit plutôt à exclure une source de type férule ou opoponax. Pour le genre Dorema — genre centre-asiatique et africain, source de la gomme ammoniaque —, la composition de la résine elle-même est moins bien connue, les analyses disponibles portant sur l’huile essentielle. Il est dificile, en l’état, de savoir quels composants pourraient être conservés et comment. 38. Toutefois, la plupart des drogues à composés soufrés susceptibles d’avoir été utilisées (certaines Ombellifères comme l’ase revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 72 fétide, ferula assa-foetida, l’opoponax ou la gomme ammoniaque, Dorema sp., des Alliacées comme l’oignon, le poireau ou l’ail, des Brassicacées, la famille du chou, dont certains genres comme la moutarde, sinapis sp., le chou, brassica sp., le radis, raphanus sp. ont pu être utilisés en huiles…) ne répondent pas à la même signature que l’empreinte moléculaire détectée dans le vase. 39. AMIGUES 2004, p. 195. 40. AMIGUES 2004. 41. D’une part les analyses sont souvent fondées sur les huiles essentielles alors que les modes d’extraction antiques utilisaient plutôt des enleurages, décoctions ou produits bruts ; d’autre part, elles sont focalisées sur les molécules à intérêt pharmaceutique et ne donnent que rarement la composition intégrale de la plante étudiée. 42. Les bases de référence sont en effet incomplètes et il est possible par ex. que le simiarénol soit présent dans les feuilles d’autres graminées qui auraient pu être employées dans les parfums antiques, par ex. le schoenus (schoinos) cité par Dioscoride (I, 15, gr. 1,17 et 4, 49, gr. 4, 52), diversement interprété comme un jonc ou un Cymbopogon (le genre source du vétiver, de l’herbe-à-chameaux, cf. ANDRÉ 1985, p. 229). Certes, les Cymbopogon ont été relativement bien étudiés, sans que les composants de l’analyse y aient été identiiés, mais les analyses modernes ont porté principalement sur les huiles essentielles, ce qui peut déformer les résultats par rapport aux produits en circulation dans l’Antiquité. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 73 No Vases Résultats des analyses chimiques 1 Lécythe aryballisque attique 1004, ig. 1 Graisses animales et huiles végétales dont sans doute de l’huile d’olive 2 Lécythe aryballisque attique 1131, ig. 2 Produits laitiers, cires épicuticulaires, résine de pinacée en faible dose. Chauffage prolongé du produit 3 Alabastre attique 1021, ig. 3 Produits laitiers, huiles végétales dont sans doute de l’huile d’olive 4 Alabastre attique 1022, ig. 4 Graisses animales, produits laitiers, huiles végétales dont sans doute de l’huile d’olive. Le mélange a été fortement chauffé 5 Amphoriskos attique 931, ig. 5 Graisses animales, produits laitiers, huiles végétales 6 Askos/astragale attique 1003, ig. 6 Graisses animales en faible quantité, cires épicuticulaires 7 Olpè attique 1009, ig. 7 Graisses animales, produits laitiers, huiles végétales, cire d’abeille, résine de pinacée ou d’apiacée, acide benzoïque, vanilline, composants soufrés provenant de plantes. Chauffage prolongé du produit 8 Guttus italiote 1003, ig. 8 Produits laitiers, huile d’olive, huile riche en campestérol (lin...), acide benzoïque, vanilline 9 Lécythe cyrénéen sans no d’inv., ig. 9 Produits laitiers, huiles végétales dont sans doute de l’huile d’olive 10 Lécythe cyrénéen sans no d’inv., ig. 10 Produits laitiers, cires épicuticulaires, acide mandélique, friedeline, simiarénol Tableau 1. Résultats des analyses chimiques. SYNTHÈSE DES RÉSULTATS Les matériaux organiques les plus communs identiiés dans le cadre de notre programme de recherche Perhamo sont, d’une part, les produits issus du monde animal (matières grasses animales, produits laitiers et cire d’abeille) et, d’autre part, ceux issus du monde végétal (huiles végétales, cires épicuticulaires, oléo-résines et poix). Dans certains cas sont détectables des marqueurs de substances fortement aromatiques (acide benzoïque et vanilline) qui peuvent témoigner de l’utilisation de composants exotiques (tirés du storax, du liquidambar, du benjoin, de la cannelle...) ou de composants plus communs comme le fenouil, l’anis ou l’iris... Parmi toutes les hypothèses, celle de l’iris est intéressante, d’une part car les textes antiques nous parlent de l’huile d’iris très recherchée pour les parfums et, d’autre part, un lécythe attique porte sur son embouchure une inscription mentionnant cette plante (HIPINON)43. Enin, dans des cas beaucoup plus rares sont exceptionnellement conservés d’autres 43. Athènes, Musée National, 12271 : HASPELS 1936, p. 124-125 et 235, no 66, pl. 37, 2 ; KURTZ 1975, pl. 69, 1. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 73 02/07/2013 15:1 74 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet biomarqueurs, comme ceux des vases nos 7 et 10 du catalogue, mais souvent d’interprétation dificile. Les 10 vases d’Apollonia qui ont fait l’objet de prélèvements révèlent donc la gamme de matériaux organiques que nous sommes habitués à déceler dans des vases à parfum en céramique44. Le tableau 2 offre une synthèse des récurrences de ces différents composants et ce sont les produits d’origine animale qui s’avèrent les plus fréquents sous la forme de matières grasses (dont des produits laitiers) (tabl. 2). La présence de matières grasses animales et de produits laitiers dans des vases à parfum grecs ou de type grec peut légitimement surprendre. Ainsi, dans un article récent, M. Regert pense que l’existence de biomarqueurs de graisses animales témoigne de la fonction culinaire des vases étudiés45, une interprétation qui ne peut évidemment être retenue dans le cas de lécythes, alabastres et autres petits vases à parfum fermés. Les graisses peuvent être rattachées au processus de fabrication des parfums (enleurage à froid ou à chaud) ou peuvent représenter le composant même d’un parfum. Les deux hypothèses posent problème car elles sont peu compatibles avec les techniques de parfumerie attestées dans le monde grec, comme le résume R. Touzé: « Les sources littéraires, de Théophraste à Pline, suggèrent que les excipients n’ont d’origine que végétale »46. L’emploi de matières grasses animales (graisse d’oie, de bovin…) dans la fabrication de parfums est, par contre, bien attesté en Égypte d’après les données des textes, mais aussi celles des analyses47. Il est à noter que nombre de recettes égyptiennes employant ces matériaux d’origine animale sont des « exemples d’association de la cosmétologie et de la médecine »48. Cette remarque nous permet de formuler une troisième hypothèse qui pourrait expliquer la présence dominante et concomitante de graisses animales et de lait dans les vases à parfum de type grec : il pourrait s’agir d’ingrédients de recettes d’huiles médicinales où, selon les textes (en particulier le corpus hippocratique), les composants d’origine animale sont nombreux, adaptés aux différentes affections dont souffrent les malades49. Notons qu’il est très dificile d’avoir des précisions sur l’origine (espèce animale) et la nature des graisses animales et des produits laitiers, hormis dans quelques cas où il est possible de savoir qu’il s’agit de graisse de ruminant. Enin, dernier produit d’origine animale déterminé par les analyses, la cire d’abeille témoigne de l’utilisation de cire ou/et de miel50, tous deux amplement attestés dans les compositions d’huiles médicinales, d’huiles parfumées et de cosmétiques. Les composants d’origine végétale identiiés peuvent être rattachés aux éléments principaux qui composent les parfums51, à savoir l’huile végétale pour l’excipient52, les oléo-résines de pinacées qui peuvent faire ofice de ixateur et de conservateur mais aussi d’essence, et différents biomarqueurs tels que la vanilline et l’acide benzoïque, qui attestent l’exploitation de plantes aromatiques (voir supra). Les cires épicuticulaires correspondent à l’enveloppe protectrice qui recouvre la cuticule des plantes et proviennent des tiges, des feuilles, des leurs et des fruits. Leur présence ne nous permet donc pas de connaître l’origine et les parties des plantes exploitées. Notons que nous n’avons identiié aucun composant d’origine minérale, à la différence de certains aryballes et alabastres de l’époque archaïque53. En ce qui concerne les techniques de fabrication, les analyses nous apportent quelques informations concrètes. Nous avons pour trois vases (lécythe no 2, alabastre no 4 et olpè no 7) 44. Les résultats peuvent être très différents dans des vases en faïence et des vases en albâtre : voir FRÈRE, DODINET, GARNIER sous presse. 45. VIEUGUÉ, MIRABAUD, REGERT 2008, p. 108. 46. TOUZÉ 2008, p. 47. 47. MARTINETTO, WALTER, TSOUCARIS, LEVÊQUE 2003, p. 125-126 et MOHEN 2003, p. 100. 48. MARTINETTO, WALTER, TSOUCARIS, LEVÊQUE 2003, p. 125. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 74 49. BODIOU, FRÈRE 2010. 50. Miel dans ce cas mal iltré, avec de nombreux résidus de cire. 51. AMOURETTI 1986, p. 186-187. 52. L’huile peut être aromatique et sert à la fois d’excipient et d’essence. 53. FRÈRE 2007. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 1 Produit laitier Graisse animale X Huile végétale X 2 3 4 5 X X X X X X X X X 6 X 7 8 9 10 X X X X X X X X Cire d’abeille 75 X Oléo-résine X X Acide benzoïque X X Vanilline X X Cires épicuticulaires X Composants soufrés X X X Tableau 2. Récurrences des matériaux organiques. l’attestation d’un chauffage intense et prolongé du produit. Il s’agit sans aucun doute du témoignage de l’emploi de la technique de l’enleurage (ou épuisement) à chaud : « Les leurs54 sont mises dans l’huile très chaude, 60 à 70° C ; on remue constamment, cela douze à quarante-huit heures, en renouvelant régulièrement, l’huile étant retirée du feu »55. La récurrence de la présence de produits laitiers (8 vases sur 10) peut s’expliquer56 par le recours à une autre technique, celle de l’enleurage à froid dans du lait. Les substances aromatiques étaient mises à macérer, selon Théophraste (De od., 58), dans un mélange de lait et de miel ou de lait, de vin et de miel57. Notons que l’emploi concomitant des deux techniques de l’enleurage à chaud et à froid pour la fabrication d’une même huile parfumée n’aurait rien de surprenant. Ces produits sont en effet des mélanges provenant de l’exploitation des essences de végétaux très différents : certains de ces végétaux sont fragiles et l’on ne peut en extraire leurs matières odorantes très ines que par des procédés doux, tandis que d’autres végétaux beaucoup plus résistants peuvent, sans risque pour l’intégrité de leurs substances aromatiques, être soumis durant plusieurs heures à une température élevée. Enin, soulignons le fait, important pour notre problématique, que les résultats d’analyses obtenus à partir de prélèvements faits dans des vases en céramique sont fondamentalement différents de ceux tirés de prélèvements dans des vases en albâtre. C’est le cas pour les trois alabastres en albâtre d’Apollonia qui feront l’objet d’une publication particulière et d’un alabastre hellénistique mis au jour dans la cité étrusque de Chiusi. Le contenu de ce dernier a livré des traces d’huile de ben, de deux résines triterpéniques (dont l’une est du mastic de pistachier lentisque, l’autre n’étant pas identiiée), d’une résine de pinacée, de cires végétales et de graisses 54. En fait, selon les espèces, on utilise différentes parties des plantes, et pas seulement les leurs. 55. AMOURETTI 1986, p. 186. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 75 56. Cette explication n’est d’ailleurs pas en contradiction avec celle présentée supra. La cire d’abeille et le miel peuvent intervenir à différents moments de la fabrication du parfum. 57. SQUILLACE 2012, p. 235. 02/07/2013 15:1 76 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet animales58. Comme nous le constatons, cet alabastre fait d’un matériau noble contenait une huile parfumée à la recette plus complexe et plus rafinée que celle des vases en céramique. Théophraste note bien que pour garantir au parfum une bonne conservation, il était nécessaire de le conserver dans des lieux frais non exposés à la lumière solaire et dans des contenants de plomb ou d’albâtre (De od., 40-41)59. À partir de ce texte et de nos résultats d’analyses, nous pouvons postuler que les parfums précieux étaient bien contenus dans des vases en métal ou en pierre, tandis que les vases en céramique servaient à conditionner des huiles parfumées (et sans doute médicinales) bien plus modestes, mettant en œuvre des matières premières peu coûteuses. Ainsi, les alabastres, les lécythes, l’askos et l’amphoriskos attiques d’Apollonia sont caractérisés par le même type de contenu qui devait être de faible coût, étant composé de matières premières communes : une huile végétale qui est sans doute de l’huile d’olive (comme l’attestent les nos 1, 3 et 4), de la résine de pinacées que l’on obtient par simple procédé de gemmage, une ou plusieurs plantes aromatiques qui ne semblent pas être d’origine exotique, des matières grasses animales qui semblent nous orienter plus dans le domaine de la thérapeutique que dans celui de la parfumerie, et des produits laitiers qui peuvent faire partie d’une recette médicinale ou avoir été utilisés pour la technique de l’enleurage à froid (il en est de même du miel ou de la cire d’abeille)60. La petite olpè (no 7) se distingue par un contenu à la recette plus complexe, dont des composants soufrés d’origine végétale qui peuvent témoigner de l’utilisation d’ombellifères médicinales et aromatiques d’origine régionale. À la différence des autres vases attiques d’Apollonia ayant fait l’objet d’analyses, ce type de petit vase n’était pas livré plein et bouché et pouvait être utilisé pour doser et verser (voir supra) différents composants liquides d’une huile médicinale et/ou parfumée. Sur les deux lécythes cyrénéens, l’un présente un contenu semblable à celui des vases attiques (dont sans doute de l’huile d’olive, ce qui n’a rien d’étonnant en Cyrénaïque du IVe s.) et l’autre un contenu plus complexe, riche de marqueurs d’espèces végétales sans doute régionales, comme certaines graminées et armoises d’Afrique du Nord. Enin, le guttus à protomé de lion représente la seule importation d’Italie ayant fait l’objet d’une analyse de contenus. Il révèle la combinaison d’au moins deux huiles végétales (dont sans doute une huile d’olive) et l’emploi d’un matériau végétal fortement aromatique mis en lumière par l’acide benzoïque et la vanilline (voir supra). Il s’agit manifestement d’une huile parfumée fabriquée comme un produit composite qu’il fallait mélanger (bille en céramique à l’intérieur de la vasque), mettant en œuvre deux huiles ines et des substances fortement aromatiques et fragiles (hypothèse de la méthode de l’enleurage à froid révélée par le produit laitier). C ON C L U S I O N Les vases mis au jour aux portes de la cité d’Apollonia de Cyrénaïque nous ont offert l’opportunité d’étudier les huiles parfumées laissées aux morts à la in de la période classique et au début de l’époque hellénistique : dix céramiques ont été sélectionnées pour donner lieu à des analyses chimiques 58. GIACHI, RIBECHINI, COLOMBINI, GARNIER 2012. La présence de graisses animales s’explique par le fait qu’il s’agit d’un vase importé d’Égypte. 59. SQUILLACE 2012, p. 237. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 76 60. Notons que nous ne pouvons tirer aucune conclusion du nombre de composants identiiés au sein de chaque échantillon, sachant que certains marqueurs chimiques ont pu se dégrader plus que d’autres et ne laissent dès lors plus de trace de leur présence. 02/07/2013 15:1 Vases à parfum de la fin de l’époque classique mis au jour à Apollonia de Cyrénaïque 77 de leurs contenus. Les résultats font intervenir un groupe de molécules que nous pouvons le plus souvent interpréter comme un mélange complexe de substances grasses et aromatiques à usage cosmétique ou médicinal, pouvant correspondre à des recettes attestées par les sources écrites. Nous pouvons identiier quelques-unes de ces substances avec plus ou moins de précision. Certaines d’entre elles entrent très logiquement dans la composition de matières grasses parfumées comme l’huile d’olive, la résine de conifère, les cires végétales… tandis que d’autres posent plus de problèmes quant à la raison de leur utilisation. Il s’agit en particulier des composants d’origine animale (produits laitiers, matières grasses animales sous-cutanées et cire d’abeille). La confrontation entre contenus de céramiques d’importation et contenus de céramiques de production locale nous apprend que les techniques de fabrication des matières grasses aromatisées sont les mêmes et appartiennent plus au domaine de la cuisine qu’à celui de la parfumerie. Les véritables parfums, résultats de la mise en œuvre de procédés et de recettes complexes avec l’utilisation de produits coûteux, sont transportés et conservés dans des vases en matériau noble comme le métal et l’albâtre. Si, pour les matières grasses aromatisées contenues dans les céramiques, les techniques et les matériaux de base sont les mêmes, on exploite les ressources végétales tirées du milieu naturel environnant plus que les composants exotiques. L’huile d’olive représente l’excipient principal en Attique, en Cyrénaïque et en Italie du Sud, mais les plantes aromatiques exploitées semblent différentes d’une région à l’autre et peuvent être liées à des usages thérapeutiques. Cette dimension médicinale trouve une conirmation avec les graisses animales dont la présence quasi récurrente peut témoigner de recettes pharmaceutiques sans doute assez proches de celles que l’on retrouve dans le corpus hippocratique, contemporain des vases analysés. En ce qui concerne l’enquête botanique, nous n’en sommes pas encore au stade des conclusions préliminaires mais, plus modestement, à la deuxième étape d’un processus d’identiication qui devrait conduire, par comparaisons et éliminations, à rejeter certaines hypothèses et à en valider d’autres. Les séries d’analyses faites dans le cadre d’une problématique bien déinie, comme celle des matières premières utilisées dans la fabrication de produits biologiques liés à la beauté et à l’entretien du corps en Méditerranée, apportent aux chercheurs un grand nombre de résultats qui sont comparés les uns aux autres61 et font l’objet d’un traitement statistique. Dans ce contexte, les contenus des vases attiques d’Apollonia de Cyrénaïque offrent des proils semblables à ceux des lécythes et amphorisques attiques découverts en Étrurie62, ce qui montre que ces céramiques ont sans doute été déposées dans les tombes avec leurs contenus d’origine. Jean-Jacques MAFFRE, Émérite de l’Université Paris-Sorbonne (Paris IV), Institut de grec, 16, rue de la Sorbonne, 75005 Paris. jean-jacques.maffre@paris-sorbonne.fr Nicolas GARNIER, Chimiste, chercheur associé à l’UMR 8546 (AOROC), École normale supérieure, 45, rue d’Ulm, 75230 Paris Cedex 05. labo.nicolasgarnier@free.fr 61. Les études se font par lieu de provenance mais aussi par type de vases. revue_archeologique_no_1-2013_2.indd 77 Dominique FRÈRE, Maître de conférences, Université de Bretagne Sud, UMR 6258, Maison de la recherche, 4, rue Jean-Zay, 56321 Lorient. frere@univ-ubs.fr Elisabeth DODINET, Archéobotaniste, chercheur associé à l’UMR 8546 (AOROC), École normale supérieure, 45, rue d’Ulm, 75230 Paris Cedex 05. e.dodinet@wanadoo.fr 62. Voir ALGRAIN, FRÈRE sous presse. La base de données de l’ensemble des résultats du programme Perhamo sera présentée sur le site internet d’AOROC, UMR 8546. 02/07/2013 15:1 78 Jean-Jacques Maffre, Dominique Frère, Nicolas Garnier, Elisabeth Dodinet ABRÉVIATIONS BIBLIOGRAPHIQUES N. AKAMATIS, « Céramiques à igures rouges de Pella », ArchEph, 147, p. 1-78. I. ALGRAIN, « L’alabastre attique. Distribution et usages en Méditerranée occidentale », Les huiles parfumées 2012, p. 123-130. ALGRAIN, BRISART, I. ALGRAIN, Th. BRISART et C. JUBIER-GALINIER, « Les vases à parfum à Athènes JUBIER-GALINIER 2008 aux époques archaïque et classique », La rose et l’encens 2008, p. 145-164. ALGRAIN, FRÈRE sous presse I. ALGRAIN, D. FRÈRE, « Aryballes, alabastres et lécythes aux époques archaïque et classique : la problématique de leurs contenus », F. COUDÉ (dir.), Le vase miroir. Céramique et expression de soi dans l’Antiquité (Revue d’Etudes Roussillonnaises, 28). AMIGUES 2004 S. 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