DE L A GUERRE À L A PAI X
E N M É DITE RR ANÉ E M É DIÉ VALE
Acteurs, propagande, défense et diplomatie
sous lA direction de
ÉlisABetH MAlAMut
et
MoHAMed ouerFelli
le temps de l’histoire
CouvGuerrepaix.indd 1
12/04/21 08:27
collection
LE TEMPS DE L’HISTOIRE
De la guerre à la paix
en Méditerranée médiévale
Acteurs, propagande, défense
et diplomatie
sous la direction de
Élisabeth MalaMut et MohaMed ouerfelli
2021
Presses Universitaires de Provence
© Presses
Universitaires de Provence
Aix-Marseille Université
29, avenue Robert-Schuman – F – 13621 Aix-en-Provence CEDEX 1
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L’ambassade florentine de 1422 et l’établissement
des relations commerciales avec les Mamelouks
Les premiers documents
Alessandro Rizzo
Université de Liège
Les fondements et les instruments
de la négociation entre les Mamelouks
et les pouvoirs chrétiens : un thème débattu
La question de la gestion des relations de paix et de guerre entre le monde
musulman et les pouvoirs non musulmans a fait récemment l’objet de travaux
qui ont examiné de façon critique un certain nombre de paradigmes historiographiques consolidés. Plus précisément, les recherches de ces dernières
années se proposent d’étudier sous un nouveau jour l’idée traditionnelle
de la division islamique du monde en plusieurs diyār, ou demeures 1. Selon
cette théorie, le monde serait divisé en deux blocs : le dār al-Islām (demeure
de l’Islam) et le dār al-ḥarb (demeure de la guerre 2). Cette répartition se
fonderait sur le principe que les territoires non musulmans, à savoir les États
où les fondements de la loi islamique ne sont pas en vigueur, doivent être
considérés comme ennemis, d’où l’emploi du mot ḥarb pour les désigner.
L’impossibilité de maintenir un état de conflit permanent et la nécessité, pour
des raisons différentes, d’entretenir des relations pacifiques avec les pays non
musulmans auraient donné naissance à une nouvelle catégorie juridique,
1
2
Deina Abdelkader, Nassef Manabilang Adiong, Raffaele Mauriello, dir., Islam and International
Relations. Contributions to Theory and Practice, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2016 ;
Giovanna Calasso, Giuliano Lancioni, dir., Dār al-Islām: territories, people, identities, Leyde,
Brill, 2017; Sarah Albrecht, Dār al Islām Revisited, Leyde, Brill 2018.
À propos de la traditionnelle division islamique du monde en plusieurs blocs et des
fondements juridiques de cette doctrine voir : Majid Khadduri, War and Peace in the law
of Islam, Baltimore, The Johns Hopkins Press, 1955 ; Labeeb Ahmed Bsoul, International treaties
(Muᶜāhadāt) in Islam: Theory and practice in the light of Islamic international law (siyar) according
to orthodox schools, Lanham, University Press of America, 2008.
225
Alessandro Rizzo
226
celle du dār al-ṣulḥ (demeure de la trêve) ou dār al-ᶜahd (demeure du traité, du
pacte 3). Ce troisième bloc comprend les territoires gouvernés par des souverains non musulmans avec lesquels les musulmans ont conclu des accords
de paix temporaires.
Les chercheurs qui se sont récemment intéressés à ces questions ont mis
l’accent sur un certain schématisme dans cette tripartition, en soulignant la
complexité et la pluralité spatiale et diachronique des rapports. Dans cette
optique, les études ont reconsidéré des concepts tels que dār ou jihād à travers
un nouvel examen des principes théoriques du droit islamique et de la
réinterprétation de ces normes dans la littérature historique 4.
L’archétype des trois diyār n’a pas épargné non plus les travaux qui ont
envisagé le thème des rapports entre le sultanat mamelouk et les pouvoirs
chrétiens au Bas Moyen Âge. Les accords ont longtemps été considérés comme
le résultat d’épisodes temporaires de ṣulḥ (paix, trêve) dans un contexte
conflictuel interprété souvent comme inexorable et naturel. Cette idée a
mené les historiens à employer des définitions imprécises comme « traités de
paix » ou « privilèges » pour désigner les documents émis par la chancellerie
mamelouke à la suite des négociations avec les puissances occidentales 5.
À une époque plus rapprochée, les chercheurs ont analysé le contenu
des instruments écrits de la diplomatie de façon plus méticuleuse, en identifiant d’abord une différence essentielle entre deux phases chronologiques
distinctes. Ils ont ainsi pu correctement conclure que dans une première
période (xiiie siècle), les sultans recoururent à des armistices (hudan en arabe,
du verbe hādana, « conclure un armistice avec quelqu’un ») pour régler
les rapports avec les États latins d’Orient et d’autres pouvoirs chrétiens 6.
Dans cette phase les conflits entre les Mamelouks et les Chrétiens furent
nombreux, pour des raisons différentes, comme les assauts de la piraterie
catalane au détriment du commerce égyptien ou plusieurs formes d’hostilités en Terre Sainte. Il est toutefois important de souligner que ces conflits
furent normalement provoqués par la rupture d’accords précédemment
conclus 7. Cela démontre que, même si les motivations de la guerre étaient
3
4
5
6
7
Maria Pia Pedani Fabris, La dimora della pace. Considerazioni sulle capitolazioni tra i Paesi Islamici
e l’Europa, dans Quaderni di Studi Arabi. Studi e testi 2, Venezia, p. 6-7.
Voir, parmi d’autres, le travail de Paul L. Heck, « “Jihād” revisited », Journal of Religious Ethics
32-1, 2004, p. 95-128.
Reginaldo Ruiz Orsatti, « Tratado de paz entre Alfonso V de Aragòn y el sultan de Egipto,
al-Mālik al-Ašraf Barsbāy », Al-Andalus 4, 1939, p. 333-389; John Wansbrough, « A Mamluk
commercial treaty concluded with the Republic of Florence 894/1489 », in Sámuel Miklós
Stern, dir., Documents from Islamic Chanceries, Oxford, Bruno Cassirer, 1965, p. 39-79 ; Id.,
« Venice and Florence in the Mamluk commercial privileges », Bulletin of Oriental and African
Studies 28, 1965, p. 483-523.
Voir les ouvrages de Peter Malcom Holt, Early Mamluk Diplomacy (1260-1290). Treaties
of Baybars and Qalawūn with Christian Rulers, Leyde, Brill, 1995 ; Michael Köhler, Alliances and
Treaties between Frankish and Muslim Rulers in the Middle East, Leyde, Brill, 2013, p. 277-319.
Peter Malcom Holt, op. cit., p. 11-23.
L’ambassade florentine de 1422…
souvent recherchées voire provoquées par les deux parties, d’un point de vue
théorique et juridique, la paix – plutôt que la lutte armée – était la condition
naturelle du dialogue.
Dans une seconde phase (xive-xvie siècles), la diplomatie mamelouke
employa en revanche d’autres types de documents pour s’accorder avec
les pouvoirs chrétiens. Les études récentes ont examiné sous des aspects
différents les instruments de chancellerie réglementant les échanges commerciaux avec les communautés de marchands européens actifs en territoire
mamelouk 8. Il faut toutefois noter que la recherche est encore loin d’avoir
épuisé le potentiel informatif des sources diplomatiques. Plusieurs aspects
restent à approfondir ou à reconsidérer. Pour citer un seul exemple, les accords
commerciaux ont longtemps été interprétés par les historiens – à l’instar des
trêves – comme provisoires. Les chercheurs ont en fait souvent insisté sur la
durée brève et prédéfinie des stipulations, en basant leurs conclusions sur la
théorie juridique plutôt que sur le contenu des documents. Un examen attentif
des témoignages diplomatiques démontre que ceux-ci ne spécifient presque
jamais la durée de validité des conditions négociées 9.
En termes généraux, les spécialistes de diplomatique mamelouke ont
récemment démontré que la meilleure façon de saisir la nature et la fonction
exactes des instruments écrits de la diplomatie est de retourner aux documents
par une approche analytique « globale 10 ». Seule une étude des caractéristiques intrinsèques et extrinsèques (quand cela est possible) ainsi que des
circonstances historiques dans lesquelles les documents furent produits
permet de restituer exhaustivement la valeur historique de ces témoignages.
Georg Christ, « Masked Cooperation with the Infidel? The Venetian Commercial Privileges,
Political Power, and Legal Culture in Mamluk Egypt », in Ausma Cimdina, Jonathan Osmond,
dir., Power and Culture: hegemony, interaction, and dissent, Pise, Plus, 2006, p. 33-51 ; Gladys
Frantz-Murphy, « Identity and Security in the Mediterranean World ca. AD 640-ca. 1517 »,
in Traianos Gagos, Adam Hyatt, dir., Proceedings of the Twenty-Fifth International Congress
of Papyrology, Ann Arbor, Scholarly Publishing Office, 2010, p. 253-264 ; Pierre Moukarzel,
« Venetian Merchants in Thirteenth-Century Alexandria and the Sultans of Egypt: an
Analysis of Treaties, Privileges and Intercultural Relations », Al-Masāq 28, 2016, p. 187-205.
9
C’est le cas, par exemple, du corpus de documents concernant les relations entre le sultanat
et Florence, qui ont fait l’objet de ma thèse de doctorat : Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion,
Diplomatie et échanges entre Florence et le sultanat mamelouk (début xve-début xvie s.), 3 vol.,
Thèse de doctorat inédite, Université de Liège et Aix-Marseille Université, 2017. Ce travail,
qui sera bientôt publié, présente une étude historique des échanges et une nouvelle édition,
traduction et analyse des documents publiés par Michele Amari et John Wansbrough, ainsi
que des documents inédits (Michele Amari, I diplomi arabi del R. Archivio fiorentino, Florence,
Le Monnier, 1863 ; Id., I diplomi arabi del R. Archivio fiorentino, Appendice, Florence, Le Monnier,
1867 ; John Wansbrough, A Mamluk commercial treaty, art. cit. ; Id., Venice and Florence,
art. cit. ; Id., « The Safe-Conduct in Muslim Chancery Practice », Bulletin of Oriental and African
Studies 34, 1971, p. 20-35). À propos de l’importance d’une nouvelle analyse de ce corpus de
documents voir aussi : Alessandro Rizzo, « Three Mamluk Letters concerning the Florentine
Trade in Egypt and Syria. A new interpretation », in Frédéric Bauden, Malika Dekkiche, dir.,
in Mamlūk Cairo: A Crossroad for Embassies, Leyde, Brill, 2019, p. 782-783.
10 Voir les travaux contenus dans le volume : Frédéric Bauden, Malika Dekkiche, dir., Mamlūk
Cairo, op. cit.
8
227
Alessandro Rizzo
Un cas exemplaire
228
En tenant compte de cet enseignement, le présent travail se focalise sur
un épisode concret de l’histoire des relations mamelouko-européennes.
Cette étude a pour objectif de faire la lumière sur les modalités par lesquelles
les sultans accordaient des droits commerciaux aux communautés marchandes
occidentales au début du xve siècle. À cette fin, nous étudions ici le corpus de
documents de chancellerie émis par le dīwān al-inshāᵓ à la suite de la première
ambassade florentine au Caire en 1422. On constatera que la stratégie diplomatique et « documentaire » adoptée à cette occasion par le gouvernement
mamelouk suivait une procédure très précise, qui avait été consolidée
dans les décennies précédentes et qui sera appliquée jusqu’à la fin de
l’époque mamelouke.
Florence établit des rapports diplomatiques avec le sultanat au cours de la
troisième décennie du xve siècle 11. Jusqu’à cette époque, les marchands de la
ville toscane avaient fréquenté les principaux marchés d’Égypte et de Syrie en
opérant sous la protection d’autres communautés marchandes européennes.
Les circonstances changèrent toutefois considérablement lorsque la Cité du Lys
conquit Pise (1406) et acheta les ports de Livourne et Porto Pisano 12 (1421).
Le gouvernement florentin obtint ainsi un débouché à la mer et une marine
grâce auxquels il put mettre en place un système de galères commerciales géré
par l’État 13. La première destination de la nouvelle flotte florentine fut justement le Proche Orient mamelouk. En 1422, la Signoria envoya ses premiers
ambassadeurs en Égypte, Carlo Federighi et Felice Brancacci, en se présentant
au sultan en tant qu’interlocutrice diplomatique directe 14. Cette ambassade
constitua la première étape d’une série d’échanges qui perdureront jusqu’à
la fin du régime mamelouk.
Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 1, p. 79-112.
À propos de l’importance politique et économique de la conquête de Pise et de ses ports, voir
le volume édité par Sergio Tognetti, dir., Firenze e Pisa dopo il 1406. La creazione di un nuovo
spazio regionale, Florence, Olschki, 2010.
13 Michael Mallett, The florentine Galleys in the fifteenth century, Oxford, The Clarendon Press,
1967, p. 21-61.
14 La première ambassade florentine au Caire a fait l’objet de plusieurs articles qui l’ont
analysée sous des aspects différents. Toutefois, aucune de ces études n’a examiné la nature
et le fonctionnement diplomatique des documents de chancellerie : Armando Sapori, « I primi
viaggi di Levante e di Ponente delle galee fiorentine », in Armando Sapori, Studi di
Storia economica, vol. 3, Florence, Sansoni, 1967, p. 3-21; Claudia Tripodi, « Viaggi di
ambasciatori tra Firenze e Il Cairo nel xv secolo », Mélanges de l’École française de Rome 122-2,
2010, p. 411-440 ; Cristian Caselli, « Strategies for Transcultural Trade Relations: Florentine
Attempts to Reproduce the Venetian Commercial System in the Mamluk Empire (First
Half of the 15th Century) », in Georg Christ, dir., Union in Separation Diasporic Groups
and Identities in the Eastern Mediterranean (1100-1800), Rome, Viella, 2015, p. 267-284 ;
Alessandro Rizzo, « Diplomatie sur le terrain : la première mission diplomatique florentine
en territoire mamelouk », in Frédéric Bauden, dir., Culture matérielle et contacts diplomatiques
entre l’Occident latin, Byzance et l’Orient islamique (xie-xvie siècle), Leyde, Brill, à paraître en 2021.
11
12
L’ambassade florentine de 1422…
La mission du 1422 est bien documentée par un corpus de sources qui
permettent de reconstituer les différentes phases du voyage de l’ambassade
florentine et des négociations qui eurent lieu au Caire. Outre les documents
émis par la chancellerie mamelouke (en exemplaires originaux ou en traduction), qu’on examinera ici, sont conservés la lettre d’instructions initiale
aux émissaires, le récit détaillé du voyage écrit par Brancacci et le compte
rendu final des ambassadeurs 15. En organisant cette ambassade ainsi que le
nouveau système commercial maritime, les autorités de la Cité du Lys s’inspirèrent des deux modèles de référence de Pise et de Venise, pour des raisons
aussi bien pratiques que symboliques. D’un côté, Florence se présentait au
sultan Barsbāy (1422-1438) en tant qu’héritière légitime de Pise, l’ancienne
puissance maritime récemment conquise. À cette fin, les émissaires furent
chargés de réclamer pour leurs concitoyens les droits dont les marchands
pisans avaient bénéficié précédemment 16. En même temps, les représentants
du gouvernement florentin requirent des conditions de commerce similaires
à celles des négociants vénitiens. À cette époque, en effet, le système de
commerce de la Sérénissime – comme la pratique des convois commerciaux
dont Florence s’était inspirée directement – représentait le grand modèle
pour les échanges en Méditerranée 17. Les marchands de la ville lagunaire
tiraient de grands profits du commerce des épices 18. Il faut en outre considérer qu’au cours de ces années, la Cité du Lys était en train de connaître
une phase d’expansion territoriale dans le but d’accroître son pouvoir dans
le centre de la péninsule italienne 19. Dans ce cadre, pour Florence le fait de
se présenter au niveau international en tant qu’héritière de l’ancienne ville
ennemie (Pise) ainsi que rivale directe de Venise, avait des finalités symboliques précises dans un processus plus général de renforcement politique.
À l’égard des Mamelouks cette stratégie se révéla efficace. La mission
de Brancacci et Federighi est couronnée de succès et le sultan concéda à Florence
les droits sollicités 20. Du point de vue légal, toutes les conditions de commerce
15
16
17
18
19
20
ASF, Signori, Legazioni e Commissarie, reg. 7, cc. 1r-3r ; Felice Brancacci, Diario di Felice Brancacci
ambasciatore con Carlo Federighi al Cairo per il Comune di Firenze, Dante Catellacci, éd.,
Archivio storico italiano 8, 1881, p. 157–88, 326–34 ; ASF, Signori, Rapporti e Relazioni di
oratori fiorentini, n. 2, c. 109r-v. Récemment est parue une traduction en anglais du journal
de Brancacci : Mahnaz Yousefzadeh, Florence’s Embassy to the Sultan of Egypt. An English
Translation of Felice Brancacci’s Diary, Londres, Palgrave Pivot, 2018.
ASF, Signori, Legazioni e Commissarie, reg. 7, c. 1v.
À ce propos, Cristian Caselli, art. cit. ; concernant le système de galères à Venise voir :
Doris Stöckly, Le système de l’Incanto des galées du marché à Venise (fin xiiie-milieu xve siècle),
Leyde, Brill, 1995 ; Claire Larivière, Naviguer, commercer, gouverner. Économie maritime et
pouvoirs à Venise (xve-xvie siècles), Leyde, Brill, 2008.
Sur les relations commerciales entre Venise et les Mamelouks voir, parmi d’autres,
Benjamin Arbel, « The Last Decades of Venice’s Trade with the Mamluks : Importations into
Egypt and Syria », Mamlūk Studies Review 8, 2004, p. 37-86 ; Francisco Apellániz, Pouvoir et
finance en Méditerranée pré-moderne : le deuxième État Mamelouk et le commerce de épices (1382-1517),
Barcelone, CSIC, 2009.
John M. Najemy, A History of Florence. 1200-1575, Oxford, Blackwell, 2006, p. 194.
Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 1, p. 108-112.
229
Alessandro Rizzo
230
furent rendues effectives par l’émission de la part de la chancellerie du Caire
d’une série de documents. Parmi ceux-ci, le seul exemplaire original conservé
est une lettre de Barsbāy adressée à la Commune (Kumūn) de Florence,
datée du 22 septembre 1422 21. Les autres sont des traductions en italien
de documents mamelouks contenues dans les registres de la chancellerie
florentine. Ce groupe de témoignages comprend la traduction de la lettre
mentionnée 22 et deux autres documents contenant des ordres du sultan daté
l’un du 22 septembre 1422 23 et l’autre du 25 septembre 1422 24.
L’analyse de la lettre de Barsbāy permet de préciser aussi la fonction de
tous les autres documents. La nature de cet écrit est explicitée dans son texte
même, où il est défini comme tel : mukātabah (lettre). Sur la base de la classification de ce type de documents proposée par les manuels de chancellerie
d’époque mamelouke – tel que celui d’al-Qalqashandī (m. 1418) – la lettre
relève de la catégorie des sulṭāniyyāt, à savoir les lettres émises au nom du
sultan (ou qui lui sont adressées 25). Cette mukātabah se présente comme une
réponse (al-jawāb, selon les traités de chancellerie) du souverain Barsbāy aux
requêtes qui lui furent soumises sous forme orale et écrite par les ambassadeurs de Florence 26.
Il est important de souligner que la lettre de 1422 représente l’un des
rares documents originaux émis par le dīwān al-inshāᵓ pour les pouvoirs
européens conservés jusqu’à aujourd’hui. Il s’agit en tout d’une quarantaine
de documents conservés dans les archives des villes qui commerçaient avec le
sultanat, comme Barcelone, Venise, Raguse, ainsi que Florence 27. Si on considère que la conquête du Caire par les Ottomans en 1517 provoqua la destruction d’une grande partie des archives centrales du sultanat, on comprend
bien que le matériel documentaire conservé dans les fonds européens revêt
un grand intérêt pour les études de diplomatique mamelouke 28.
21
22
23
24
25
26
27
28
ASF, Diplomatico, Varie IV, rouleau A.
ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici 3r-4r.
ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici, cc. 1r-2v.
ASF, Diplomatico, Cartaceo, Riformagioni Atti Pubblici, 25/9/1422, cc. 1r-2v.
Malika Dekkiche, Le Caire, Carrefour des ambassades, Thèse de doctorat inédite, Université
de Liège 2011, p. 280-281; Aḥmad Al-Qalqashandī, Ṣubḥ al-aᶜshā fī ṣināᶜat al-inshāᵓ, M. ᶜA.
al-R. Ibrāhīm, éd., Le Caire, Al-Muᵓassasah al-miṣriyyah al-ᶜāmmah li’l-taᶜlīf, 1963, vol. 8,
p. 359-366 ; À propos de la rédaction de lettres dans le monde islamique à l’époque
prémoderne voir Adrian Gully, The Culture of Letter-Writing in Pre-Modern Islamic Society,
Édinbourg, Edinburgh University Press, 2008.
Aḥmad Al-Qalqashandī, op. cit., vol. 6, p. 323-325.
Barcelone : Archivo de la Corona de Aragón (ACA), Colleciones, Cartas árabas. Dubrovnik
(Raguse) : Državni Arhiv u Dubrovniku. Venise : Archivio di Stato di Venezia, Documenti
Algeri, Egitto, Marocco ; Libri Commemoriali. Florence : Biblioteca Medicea Laurenziana,
Orientali ; Archivio di Stato di Firenze, Diplomatico, Varie IV ; Diplomatico, Cartaceo,
Riformagioni Atti Pubblici ; Signori, Carteggio, Missive, I Cancelleria.
Sur l’intérêt renouvelé pour l’étude des documents d’archives d’époque mamelouke et de
plusieurs questions que la discipline diplomatique pose à cet égard, voir, parmi d’autres :
Donald Little, « The Use of Documents for the Study of Mamluk History », Mamlūk
L’ambassade florentine de 1422…
La mukātabah de Barsbāy se présente sous la forme d’un rouleau (darj),
composé de douze feuilles de papier de production égyptienne. Le rouleau
était la forme typique de ce genre de documents. La dernière feuille est
coupée, mais on connaît le contenu intégral de la lettre grâce à la traduction
contemporaine mentionnée 29. Selon les règles diplomatiques exposées par
les auteurs des manuels de chancellerie, la préparation et la composition
des lettres de chancellerie dépendaient strictement du rang du destinataire.
Cet aspect influait sur la plupart des caractères extrinsèques et intrinsèques
du document 30. Le statut de celui auquel la mukātabah était adressée, déterminait d’abord son format (qaṭᶜ), à savoir la largeur du rouleau. À partir
d’une feuille de base, appelée al-baghdādī al-kāmil et mesurant une coudée
d’étoffe égyptienne (58,15 cm de largeur), toute une série d’autres formats
étaient calculés 31. Ceux-ci correspondaient à différentes catégories prédéfinies
de souverains ou dignitaires 32. Dans le cas de la lettre de Barsbāy, le destinataire, à savoir le gouvernement de Florence, rentre dans la catégorie des
souverains non musulmans. Ses feuilles ont une largeur moyenne de 18,5 cm.
Leur format correspond vraisemblablement au qaṭᶜ al-thulth, dont la largeur
était d’environ 19 cm, mais il faut considérer que la coupure des feuilles n’était
jamais parfaite. Ce format correspond à celui utilisé par les secrétaires du dīwān
al-inshāᵓ quand ils écrivaient aux représentants du gouvernement génois 33.
Le format déterminait aussi d’autres éléments, comme l’écriture ou les
espaces internes des documents. Plus particulièrement, les principes relatifs
aux espaces s’appliquaient à une série d’aspects tels que le nombre de feuilles
laissées vides au début du rouleau, la distance entre les lignes, l’ampleur de
la marge de droite, l’espace pour la signature du sultan 34, etc. Comme on
l’a remarqué, les normes diplomatiques relatives à la rédaction des lettres
29
30
31
32
33
34
Studies Review 1, 1997, p. 1-13 ; Lucian Reinfandt, « Mamlūk Documentary Studies »,
in Stephan Conermann, dir., Ubi sumus? Quo vademus? Mamluk Studies - State of Art,
Göttingen, Bonn University Press, 2013, p. 285-309 ; Frédéric Bauden, « Mamluk Era
Documentary Studies: The State of the Art », Mamlūk Studies Review 9, 2005, p. 15-60 ; Id.,
Mamluk Diplomatics: The Present State of Research, in Mamlūk Cairo, op. cit.
ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici 3r-4r.
Malika Dekkiche, Le Caire, op. cit., p. 287-291.
Le fait que le format al-baghdādī al-kāmil soit considéré celui de la feuille de papier complète,
sans découpe, ne signifie pas qu’il n’existait pas de formats de papier plus grands.
Al-Saḥmāwī, dans son manuel de chancellerie, parle du qaṭᶜ al-ṭūmār al-kāmil dont la largeur
mesurait une coudée et demie, à savoir 87,225 cm : Shams al-Dīn Muḥammad al-Saḥmāwī,
al-Thaghr al-Bāsim fī Ṣināᶜat al-Kātib wa-al-Kātim, Anas Ashraf Muḥammad, éd., Le Caire,
Dār al Kutub vol. 2, p. 549.
Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 6, p. 190-193 ; Shams al-Dīn Muḥammad al-Saḥmāwī,
op. cit., vol. 2, p. 548-549.
Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 8, p. 46 ; Michele Amari, « Dei titoli che usava la
cancelleria dei sultani di Egitto nel xiv secolo scrivendo ai reggitori di alcuni stati italiani »,
Atti della Reale Accademia dei Lincei, Memorie della classe di scienze morali, storiche e filologiche 12,
1883-1884, p. 525.
Malika Dekkiche, Le Caire, op. cit., p. 293-344.
231
Alessandro Rizzo
232
concernaient aussi les caractères intrinsèques des documents, comme la
structure et le contenu. Les lettres étaient constituées de trois parties principales : l’iftitāḥ (protocole introductif), le matn (le texte central) et les khawātim (le
protocole final ou eschatocole 35).
L’iftitāḥ comporte des éléments tels que le ᶜunwān (adresse), qui spécifie
le nom et les titres de l’émetteur (intitulatio), c’est-à-dire Barsbāy, et des
destinataires (inscriptio), à savoir les membres du gouvernement florentin 36.
Bien que le protocole initial présente normalement des formules religieuses,
al-Qalqashandī explique que parfois la basmalah ne figurait pas en tête des
lettres envoyées à des souverains non musulmans, car ceux-ci avaient pour
coutume de déchirer le début des lettres et de cracher sur celles-ci 37. C’est
le cas justement de la lettre de 1422 envoyée à Florence. L’iftitāḥ présente
toujours le bayt al-ᶜalāmah, l’espace pour la signature du sultan, même si dans
la mukātabah en question, cette section est vide parce que Barsbāy ne signa
pas : en fait, à cette époque, les normes du dīwān al-inshāᵓ ne prévoyaient pas
de signature pour les lettres adressées à des souverains non musulmans.
Le matn était la partie centrale de la mukātabah et spécifiait principalement
les circonstances et les raisons pour lesquelles la lettre était écrite (dans ce
cas, la mission de Brancacci et Federighi) ainsi que les décisions du sultan en
réponse aux requêtes reçues.
Enfin les khawātim comprenaient la datation et les formules religieuses
conclusives.
Nous prêtons ici une attention particulière à la dispositio du matn, à savoir
la section dans laquelle le souverain mamelouk énonce aux membres de
la Signoria les dispositions prises afin d’accorder des droits aux négociants
de Florence. Cet examen se révèle utile pour déchiffrer la nature de l’ensemble
des documents mamelouks émis à la suite de l’ambassade de Brancacci
et Federighi. Cette analyse permettra en outre de comprendre le système par
lequel les droits commerciaux furent octroyés. Dans le matn, le sultan communique aux membres du gouvernement florentin qu’il a exaucé les demandes
des deux ambassadeurs, en ordonnant l’émission d’une série de documents.
Il s’agit de deux muṭlaq-s « selon la requête exprimée par les représentants
de la Commune » et de deux amthilah, l’un pour le représentant du noble
pouvoir du sultan en Syrie (Kāfil al-salṭanah al-sharīfah bi-al-Shām al-maḥrūs) et
l’autre pour le gouverneur de la ville d’Alexandrie (naᵓīb al-salṭanah al-sharīfah
bi-thaghr al-Iskandariyya 38).
Concernant le premier couple de documents, on remarque que le
mot muṭlaq en arabe signifie aussi bien « absolu » que « ouvert ». Dans le
dictionnaire de Lane, on lit que l’expression ḥukm muṭlaq désigne « une
Ibid., p. 345-392.
Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 21-22.
37 Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 6, p. 223.
38 Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 23-24.
35
36
L’ambassade florentine de 1422…
décision judiciaire, ou une ordonnance ou encore une règle sans restrictions ou
absolue 39 ». Néanmoins, dans ce contexte, la deuxième signification est encore
plus significative. Dans son manuel de chancellerie, al-Qalqashandī écrit
que le mot muṭlaq se référait originairement à un instrument diplomatique « ouvert » adressé par le sultan aux autorités de l’empire pour leur
annoncer des ordres à caractère général 40. Ces ordres étaient communiqués
globalement sous la forme de lettres adressées à un groupe de plusieurs
destinataires 41. Ces documents, bien qu’ils aient la fonction de décréter des
ordres (le décret en arabe est le marsūm), pouvaient prendre la forme diplomatique de lettres. Pour cette raison, ils étaient appelés aussi mukātabah ᶜāmma.
Sur l’émission des deux autres documents annoncés par la lettre de Barsbāy,
le terme mithāl (pl. amthilah) dans le lexique diplomatique acquiert le sens
d’instruction écrite ou ordonnance royale 42. Les amthilah en question sont
donc des ordonnances envoyées par le sultan aux représentants de son
pouvoir pour leur communiquer ses décisions sur la manière de règlementer
les activités commerciales des Florentins à Alexandrie et en Syrie.
Comme on l’a mentionné, les registres des archives de Florence conservent,
outre la version en italien de la lettre de Barsbāy, les traductions dans la même
langue de deux autres documents émis par la chancellerie du Caire. Le texte
de ces documents spécifie que les traductions furent réalisées par le notaire
musulman « Zenedin » (Zīn al-Dīn), le juif Abraham, traducteur des Florentins
à Alexandrie, et le citoyen de Chypre, Tommaso Cardio de Nicosie 43.
Le premier document (par ordre chronologique) est dénommé « lettera »
(lettre) au début de son texte et « commandamento » (ordre, décret) à la fin 44.
Il précise que cet écrit fut donné aux ambassadeurs, mais son texte n’est pas
adressé directement aux Florentins 45. Il semble plutôt adressé à des autorités
du sultanat. Cet écrit est donc vraisemblablement la traduction de l’un
de deux muṭlaq-s, les ordonnances à caractère général émises pour les officiers
mandatés pour exercer le pouvoir dans les différentes régions de l’empire.
L’emploi des deux termes « lettera » et « commandamento », qui rappelle la
nature « hybride » de ce genre de document, confirmerait cette hypothèse 46.
39
40
41
42
43
44
45
46
Edward W. Lane, Arabic-English Lexicon, Londres, Williams and Norgate, 1863-1876, p. 1874 :
« Ḥukm muṭlaq means a judicial decision, or an ordinance or the like, or a rule, that is
unrestricted, or absolute ».
Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 7, p. 219-223.
Donald S. Richards, Mamluk Administrative Documents from St Catherine’s Monastery, LouvainParis-Walpole, Peeters, 2011, p. 18-19.
Donald S. Richards, « A mamlūk emir’s “square” decree », in Bulletin of the School of Oriental
and African Studies 54, vol. 1991, p. 63 ; Id., Mamluk Administrative Documents, op. cit., p. 17.
Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 275, 279, 281.
ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici, cc. 1r-2v ; Alessandro Rizzo,
Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 277, 279.
Ibid., p. 277.
À propos de la fonction étendue et « multiforme » des lettres dans la pratique diplomatique
mamelouke, voir – même si le contexte est différent – Malika Dekkiche, « Making peace
233
Alessandro Rizzo
234
Le deuxième document est appelé « commandamento » et écrit à l’attention
du gouverneur d’Alexandrie 47. Il s’agit selon toute probabilité de la traduction
de l’autre muṭlaq adressé dans ce cas à tous les officiers qui exerçaient l’autorité dans la ville portuaire égyptienne, soumis au pouvoir de son gouverneur.
Le fait que cet instrument diplomatique spécifie son destinataire, montre que
les muṭlaq-s remis aux Florentins furent très probablement réalisés sur la base
des amthilah, les ordonnances envoyées aux représentants du pouvoir sultanien
en Égypte et en Syrie. Pour cette raison, on suppose que le premier muṭlaq fût
rédigé sur la base du mithāl qui fut envoyé en Syrie, même s’il ne présente pas
des références explicites à ses destinataires.
La nature des deux documents en italien en question semblerait confirmée
par le passage de la lettre de Barsbāy, attestant que les diplomates florentins demandèrent expressément au sultan l’émission de deux muṭlaq-s, avec
toutes les conditions de commerce accordées par le souverain mamelouk.
Les deux muṭlaq-s originaux ne sont pas conservés, mais on peut supposer
qu’ils restèrent en Égypte, où ils furent probablement donnés au représentant
de la communauté des marchands florentins, le consul.
Un point sur lequel il est utile d’attirer l’attention, pour comprendre la
nature des accords entre le sultan et les ambassadeurs de Florence, est le terme
par lequel les conditions du commerce florentin sont désignées dans le texte
de la lettre de Barsbāy, à savoir shurūṭ (clauses 48). Ce mot indique un accord
conclu à la suite d’une négociation entre deux parties. Ce terme a longtemps
été traduit dans les langues européennes comme « privilège », vocable qui
risque toutefois de donner lieu à une interprétation erronée du résultat des
négociations 49. En fait, le terme « privilège » désigne un droit exclusif ou
exceptionnel, tandis qu’il n’y avait aucune exceptionnalité dans le fait qu’une
communauté de marchands étrangers puisse pratiquer le commerce en
territoire mamelouk selon des conditions déterminées et communes à celles
d’autres négociants européens.
L’ensemble des documents annoncé par la lettre de 1422 montre les
modalités par lesquelles les règles du commerce étaient définies, attestées
et entraient en vigueur. Une fois terminées les négociations sur la base des
requêtes présentées par les émissaires, le sultan ordonnait aux secrétaires de
la chancellerie de rédiger une lettre de réponse adressée aux représentants
du gouvernement étranger pour communiquer l’octroi des droits demandés.
Ce document faisait référence de manière générale aux principales questions
commerciales. Cette lettre était normalement assez brève et son contenu
within the Islamic world: Islamic tradition and the “Letter-Treaty” in Mamluk diplomacy »,
Zeitschrift für historische Forschung, 55, 2018, p. 127-155.
47 ASF, Diplomatico, Cartaceo, Riformagioni Atti Pubblici, 25/9/1422, cc. 1r-2v ; Alessandro Rizzo,
Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 281-284.
48 Ibid., p. 23-24.
49 Gladys Frantz-Murphy G., art. cit., p. 260.
L’ambassade florentine de 1422…
n’entrait jamais dans le détail des conditions du commerce. Les différents
droits étaient en revanche exposés en plusieurs clauses dans les lettres ou les
décrets que les scribes du dīwān al-inshāᵓ étaient chargés de rédiger pour les
représentants du pouvoir du sultan dans les villes et les provinces d’Égypte et
de Syrie (normalement les autorités d’Alexandrie et de Damas, les principaux
centres d’échanges entre les Mamelouks et les Européens). À partir de ces
écrits, les secrétaires réalisaient des copies ayant la valeur d’ordonnances
qui étaient signées par le sultan et ensuite remises aux ambassadeurs étrangers. Les exemplaires envoyés aux gouverneurs avaient pour objectif de les
informer des délibérations du sultan. Plus particulièrement, ils explicitaient
toutes les normes appliquées en matière commerciale à une communauté
étrangère que les officiers mamelouks devaient faire respecter. Par ailleurs,
les copies destinées aux gouvernements étrangers outre les renseigner à
propos de ces règles, avaient pour rôle de certifier d’un point de vue légal les
décisions du souverain du Caire. La validité de ces copies, qui étaient dans la
plupart des cas aussi traduites, était attestée par la lettre de réponse. Si cette
dernière, seule, ne suffisait pas à enregistrer les résultats de l’ambassade en
ne détaillant pas toutes les clauses, les seules copies des ordonnances ne
pouvaient pas avoir de validité diplomatique sans le message du sultan qui
en confirmait la légitimité. Tous ces écrits, avec les exemplaires envoyés aux
gouverneurs, constituaient donc une sorte de « réseau de documents » liés
les uns aux autres.
Un système efficace
La pratique diplomatique qu’on vient de décrire est attestée depuis l’année 1302,
quand le sultan al-Nāṣīr Muḥammad ibn Qalāwūn (1293-1341) répondit
à l’ambassade de l’émissaire vénitien Guido de Canali, en ordonnant la
rédaction d’une série de documents, dont les traductions sont conservées
dans les registres des archives de la ville lagunaire. Ceux-ci contiennent
des « conventiones et pacta » (stipulations et pactes) mentionnant les shurūṭ
négociés au Caire, un « praeceptum » (décret) incluant toutes les clauses
relatives aux accords conclus et la copie d’une lettre envoyée par le sultan au
gouverneur d’Alexandrie, pour l’informer des droits commerciaux octroyés
aux Vénitiens 50. Il s’agit, à notre connaissance, du premier témoignage de
la production par la chancellerie du Caire d’un ensemble de documents de
nature différente, mais liés entre eux du point de vue de la stratégie diplomatique, dont la finalité consistait à rendre effectives les décisions du sultan.
La présence de ce matériel documentaire dans les archives de la Sérénissime
démontre aussi l’importance pour les destinataires d’en conserver une copie,
non seulement pour une raison « informative », mais aussi diplomatique.
50
Riccardo Predelli, éd., Diplomatarium Veneto-Levantinum sive Acta et Diplomata Res Venetas
Graecas atque Levantis, a. 1300-1350, Venise, Sumptibus Societatis, 1880, p. 5-12.
235
Alessandro Rizzo
236
Jusqu’à la chute du dernier avant-poste croisé au Proche Orient (1291),
les Mamelouks avaient géré les relations avec les pouvoirs chrétiens par des
accords de trêve (hudan). Même si, comme on l’a remarqué, l’importance
du conflit a été souvent déformée par les historiens, il ne faut pas négliger
que dans la deuxième partie du xiiie siècle, les fréquents combats militaires
contre les Chrétiens influencèrent sensiblement les stratégies du dialogue
diplomatique et la nature de ses instruments écrits. Pour cette raison, à cette
époque, même les questions à caractère commercial trouvaient solution dans
des accords de trêve. Ceux-ci prévoyaient une procédure de négociation
différente par rapport à celle adoptée par la suite 51.
Une fois la ville d’Acre conquise, la diplomatie mamelouke adopta un
nouveau dispositif diplomatique pour réguler ses échanges avec les puissances
chrétiennes. L’ambassade vénitienne de 1302 nous démontre que déjà une
dizaine d’années après la disparition des États latins, le système du « réseau
de lettres et décrets » fut employé de façon efficace. Au fil du temps il devint
de plus en plus élaboré et complexe. L’année même de la première mission
diplomatique florentine au Caire (1422), le sultan Barsbāy répliqua à une ambassade vénitienne par une lettre qui annonçait au doge Tommaso Mocenigo la
rédaction de dix-sept documents. Ceux-ci comprenaient un décret adressé
à Venise et une série de décrets destinés aux gouverneurs des différentes villes
du sultanat, parmi lesquelles Alexandrie, Damas, Jérusalem, Alep, Amman,
Tripoli et Damiette 52. Ce nombre important de documents émis par la chancellerie implique certainement une bonne connaissance par les cadres de l’administration mamelouke de la diffusion des activités commerciales vénitiennes
et plus généralement européennes en territoire mamelouk.
Les sources diplomatiques conservées montrent que le système adopté par
la chancellerie du Caire dans l’octroi de droits commerciaux aux marchands
occidentaux continua à être employé jusqu’à la fin de l’époque mamelouke.
Au début du xvie siècle, par exemple, les négociations entre Florence et le
souverain Qānṣawh al-Ghawrī (1501-1516) se conclurent positivement par
l’émission par la chancellerie du Caire d’une lettre au gouvernement florentin,
ainsi que d’un décret adressé aux autorités d’Alexandrie, dont une copie originale en langue arabe est conservée aujourd’hui dans les archives de Florence 53.
Si la pratique du « réseau de documents » mérite sans doute d’être approfondie 54, le cas et les résultats de la première ambassade florentine au Caire
Peter Malcom Holt, op. cit., p. 6-11.
Riccardo Predelli, op. cit., p. 328-331.
53 ASF, Diplomatico, Varie IV, r. E et G ; les Archives de Florence conservent aussi les deux
traductions italiennes contemporaines de ces deux documents : ASF, Diplomatico, Cartaceo,
1509/07/02, Riformagioni Atti Pubblici, cc. 1v-2v ; ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1509/07/02 (B),
Riformagioni Atti pubblici, cc. 3.
54 Je suis actuellement en train de travailler sur cette question, notamment à travers un projet
intitulé « À travers et au-delà du voile de la rhétorique : la fonction du langage diplomatique
mamelouk dans les relations avec les pouvoirs chrétiens » (FNRS, Université de Liège).
51
52
L’ambassade florentine de 1422…
montrent clairement comment ce système se révéla très efficace pour établir
et garantir aux marchands de Florence des échanges commerciaux réguliers
jusqu’à la chute du sultanat.
Résumé :
Cet article est consacré aux documents émis par la chancellerie mamelouke à l’occasion de
la première ambassade florentine au Caire en 1422. Après avoir identifié deux phases principales marquant la gestion par le gouvernement mamelouk des relations internationales avec
les puissances chrétiennes (avant et après la chute d’Acre, 1291), l’auteur examine le cas
spécifique de l’établissement de contacts diplomatiques avec la République de Florence, au
début du xve siècle.
Par l’analyse d’un corpus de sources diplomatiques conservées à Florence et de leurs
références à d’autres documents qui n’ont pas survécu, l’article reconstitue le réseau
documentaire adopté par le gouvernement du Caire pour accorder des droits commerciaux
aux marchands florentins. Ce système se basait sur l’émission d’une première lettre envoyée
aux autorités étrangères, qui octroyait et résumait les différents droits. Toutes les stipulations étaient exposées dans le détail dans des décrets rédigés pour les représentants de
l’autorité du sultan dans les provinces mameloukes. Des copies officielles de ces documents
étaient ensuite émises et envoyées aux gouvernements européens dans le but de garantir
les décisions du sultan. La comparaison de cette procédure avec les stratégies adoptées
avec d’autres pouvoirs révèle un efficace système par lequel les Mamelouks maintinrent des
relations pacifiques avec les États chrétiens jusqu’à la fin du sultanat (1517).
Mots clés : Relations mamelouko-florentines, diplomatique mamelouke, diplomatie mamelouke,
réseau de documents.
Abstract:
The article deals with the documents issued by the Mamluk chancery on the occasion of the
first Florentine embassy to Cairo, in 1422. After identifying two main stages characterizing
the Mamluk conduct of relations with Christian powers (before and after the fall of Acre,
in 1291), the author examines the specific case of the establishment of diplomatic contacts
with the Republic of Florence, at the beginning of the 15th century. Examining the nature
of a set of chancery sources kept in Florence and their references to other documents that
have not survived, the article reconstructs the documentary network adopted by the government of Cairo to grant commercial rights to the Florentine merchants. This system was based
on a first letter sent to the foreign authorities, granting and summarizing commercial rights.
The stipulations were then listed in detail in decrees drafted for the representatives of the
sultan’s authority in the provinces of the sultanate. Official copies of these documents were
then issued and sent to the European governments, with the aim of certifying the sultan’s
decisions.
The comparison of such a procedure with the diplomatic strategies employed with other
powers sheds light on an effective system by which the Mamluks maintained peaceful
relations with Christian States until the end of their sultanate (1517).
Keywords: Mamluk-Florentine relations; Mamluk Diplomatics; Mamluk Diplomacy; Network
of documents.
237
Les auteurs
Salah Abidi
Docteur en histoire médiévale et chercheur associé au LA3M-UMR 7298, Salah Abidi a
soutenu sa thèse de doctorat en cotutelle internationale (universités d’Aix-Marseille
et de Tunis) sur Le Maghreb et la mer : pratiques et perceptions en 2017.
Farid Bouchiba
Historien des sociétés islamiques pré-modernes, Farid Bouchiba est docteur en histoire
médiévale de l’Université de Nantes (2018) et diplômé de l’Institut National des Langues
et Civilisations Orientales (INALCO-Sorbonne Nouvelle). Il a par ailleurs été Fellow au
département d’histoire médiévale de l’Université d’Harvard. Ses recherches portent
sur les relations entre musulmans et non-musulmans dans leurs aspects historiques
et juridiques et s’étendent à l’étude du droit musulman. Il travaille actuellement à la
publication de sa thèse qui expose les discours normatifs entourant les non musulmans
dans l’œuvre d’Ibn Rušd al-ǧadd (m. 520/1126).
Bernard Doumerc
Professeur émérite d’histoire médiévale à l’université Toulouse 2 Jean-Jaurès,
Bernard Doumerc est spécialiste de l’histoire des pays riverains de la Méditerranée.
L’essentiel de ses recherches porte sur l’expansion de la république de Venise dans
le bassin méditerranéen pendant le Moyen Âge tardif. Il a notamment publié Venise
et l’émirat hafside de Tunis (1231-1535), Paris, l’Harmattan, 1999 ; Venise et son empire
en Méditerranée (xe-xve siècle), Paris, Ellipses, 2012. Il a collaboré au projet ANR sur les
croisades tardives et co-édité Les mondes méditerranéens au Moyen Âge (viie-xvie siècle),
Paris, Armand Colin, 2018.
Nicolas Drocourt
Maître de conférences en histoire médiévale à l’université de Nantes, Nicolas Drocourt
est membre du laboratoire CRHIA (EA 1163). Ses travaux portent principalement
sur la diplomatie byzantine. Il a notamment publié Diplomatie sur le Bosphore.
Les ambassadeurs étrangers dans l’Empire byzantin des années 640 à 1204, Louvain, 2015,
et a dirigé ou co-dirigé plusieurs ouvrages, parmi lesquels : La figure de l’ambassadeur
entre mondes éloignés. Ambassadeurs, envoyés officiels et représentations diplomatiques
entre Orient islamique, Occident latin et Orient chrétien (xie-xvie siècle), Rennes, PUR, 2015,
et, avec Élisabeth Malamut : La diplomatie byzantine, de l’Empire romain aux confins de
l’Europe (ve-xve siècle), Leyde-Boston, 2020.
Christine Gadrat-Ouerfelli
Archiviste-paléographe, docteur en histoire médiévale, Christine Gadrat-Ouerfelli est
chargée de recherche au CNRS. Elle est spécialiste des récits de voyages et des
descriptions du monde au Moyen Âge. Elle est l’auteur notamment d’Une image
de l’Orient au xive siècle : les Mirabilia descripta de Jordan Catala de Sévérac, préface
de Jean Richard, Paris, coll. « Mémoires et documents de l’École des Chartes », 2005
et de Lire Marco Polo au Moyen Âge : traduction, diffusion et réception du Devisement du
monde, Turnhout, Brepols (Terrarum orbis, 12), 2015.
267
De la guerre à la paix en Méditerranée médiévale
Élisabeth Malamut
Professeure émérite à l’Université d’Aix-Marseille, Élisabeth Malamut est spécialiste
des relations politiques et culturelles de Byzance. Elle a notamment coédité avec
Mohamed Ouerfelli Les échanges en Méditerranée médiévale. Marqueurs, réseaux, circulations,
contacts, Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire »), 2012, et Villes
méditerranéennes au Moyen Âge, Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire »),
2014, et avec Nicolas Drocourt, La diplomatie byzantine, de l’Empire romain aux confins de
l’Europe (ve-xve siècle), Leyde-Boston, 2020.
David Ollivier
Assistant-ingénieur au CNRS, David Ollivier est archéologue topographe, rattaché
au LA3M-UMR 7298 ; il travaille actuellement sur l’enceinte urbaine de la ville
d’Hyères.
Mohamed Ouerfelli
Maître de conférences en histoire médiévale à l’Université d’Aix-Marseille, Mohamed
Ouerfelli est spécialiste des échanges entre monde latin et pays d’Islam. Il a notamment
publié Le sucre : production, commercialisation et usages dans la Méditerranée médiévale,
Leyde-Boston, Brill (coll. « The Medieval Mediterranean, 71 »), 2008 ; il a coédité
avec Élise Voguet Le monde rural dans l’Occident musulman médiéval, numéro spécial de
la Revue des Mondes musulmans et de la Méditerranée, 126, 2009 ; avec Élisabeth Malamut,
Les échanges en Méditerranée médiévale. Marqueurs, réseaux, circulations, contacts,
Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire), 2012, et Villes méditerranéennes
au Moyen Âge, Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire), 2014 ; et avec
Sylvain Burri, Artisanat et métiers en Méditerranée médiévale et moderne, Aix-en-Provence
(coll. « Confluent des Sciences »), 2018.
268
Véronique Rinaducci
Ingénieure d’études au CNRS et rattachée au LA3M-UMR 7298, Véronique Rinalducci
est archéologue, responsable d’opérations de terrain. Elle coordonne actuellement la
publication monographique des fouilles du castrum de Montpaon (Fontvieille-13).
Alessandro Rizzo
Alessandro Rizzo est actuellement Chargé de Recherche (FNRS) à l’Université de Liège.
Après avoir terminé une thèse sur La diplomatie et échanges entre Florence et le sultanat
mamelouk, il a été chercheur postdoctoral au Annemarie Schimmel Kolleg (Université
de Bonn, 2017-2018) et à l’Institució Milà i Fontanals (IMF-CSIC, Barcelone, 2018-2020).
Georges Sidéris
Spécialiste de l’histoire de Byzance, Georges Sidéris est maître de conférences en
histoire médiévale à l’Institut National Supérieur du Professorat et de l’Éducation
(INSPÉ) – Sorbonne Université, et rattaché à l’UMR 8167 Orient & Méditerranée.
Ses recherches portent sur les eunuques, les sexes et genres à Byzance, l’histoire de la
médecine et de la santé, les épistémologies non-binaires, Queer et l’historiographie
byzantine. Il a publié « Pour une approche Queer de l’enseignement historique dans
l’éducation aux genres, sexualités et dans l’éducation à la santé. Les sexes et genres
à Byzance, un exemple historique autre de l’organisation sociale, culturelle et politique
des sexes et sexualités », https://doi.org/10.4000/rechercheseducations.6611
Table des matières
Élisabeth Malamut et Mohamed Ouerfelli
Introduction
5
Préparer et conduire la guerre
Christine Gadrat-Ouerfelli
Comment préparer une croisade ?
19
Renseignement, prédication et propagande avant la cinquième croisade
Farid Bouchiba
Le ǧihād à l’époque nasride selon la Tuḥfat al-anfus d’Ibn Huḏayl
(m. vers 812/1409)
33
Georges Sidéris
Eunuques de guerre à Byzance
Les origines, du ive siècle au règne de Justinien Ier
59
269
Défendre le littoral
Salah Abidi
Le rôle des ribāts dans la protection des ports
et des mouillages en Ifrīqiya au Moyen Âge
105
David Ollivier
La tour du Gapeau et la défense de la rade d’Hyères à la fin du Moyen Âge
L’exemple d’un partenariat « public-privé »
127
Véronique Rinalducci
La maison-tour de Giannoudi à Réthymnon (Crète)
Une expression architecturale éclectique en contexte de guerre de conquête
139
De la guerre à la négociation
Bernard Doumerc
Du combat à la négociation, le doge face au sultan
Venise, fin du Moyen Âge
165
Nicolas Drocourt
La diplomatie byzantine (ixe-xiie siècle)
Instrument pour la paix ou arme de guerre ?
183
Mohamed Ouerfelli
Les premiers contacts diplomatiques
entre l’Ifrīqiya et la commune de Pise au xiie siècle
207
Alessandro Rizzo
L’ambassade florentine de 1422 et l’établissement
des relations commerciales avec les Mamelouks
225
Les premiers documents
Élisabeth Malamut
Les cadeaux entre souverains byzantins
et étrangers aux xiie-xve siècles
Les auteurs
270
239
267
De la guerre à la paix
en MéDiterranée MéDiévale
acteurs, propaganDe, Défense et DiploMatie
le temps
de l’histoire
apporte
un éclairage
scientifique
sur tous
les passés,
privilégiant
la longue durée,
en territoire
méditerranéen et
au-delà.
En couverture
Ambassadeurs castillans
négociant une alliance
avec le calife almohade Abû
Hafs Umar al-Murtadâ, Madrid,
Bibliothèque du monastère
de l’Escorial, MS. T. I. 1, cantigas
de santa Maria, 181.
l’histoire de la Méditerranée médiévale ne se résume pas
à des affrontements perpétuels ; elle est aussi marquée par
des périodes de paix et d’échanges diplomatiques intenses.
un mince fil séparait la guerre et la paix. comment passaiton de la préparation, de l’organisation et de la conduite
de la guerre à des relations pacifiques ? cette thématique
s’inscrit dans un ensemble disparate, l’occident, Byzance et
l’islam, avec des sociétés et des idéologies distinctes, tout
en étant liées entre elles par les échanges, les contacts et les
communications multiples. l’ouvrage porte sur les transitions
entre la guerre et la paix, sur les croisés répondant à l’appel
de la propagande pontificale, les ġāzī mobilisés par le ǧihād,
les eunuques byzantins qui se retrouvaient sur tous les fronts.
la guerre signifiait aussi organiser la défense en temps
de paix. la Méditerranée et ses milliers de kilomètres de
côtes se sont hérissés de fortifications, de ribâts et de bases
navales. la question des négociations occupe le cœur du
volume. elle témoigne de l’intérêt de l’historiographie actuelle
pour l’étude de ce moment emblématique d’échanges
diplomatiques, comme entre venise et les ottomans.
à Byzance où prédominait l’idéologie de la paix comme
fondement chrétien de l’empire, la négociation n’avait parfois
d’autre issue que la guerre. pour magnifier le temps de paix
les cadeaux diplomatiques se répandaient dans toutes les
cours de la Méditerranée médiévale.
Élisabeth Malamut est professeur émérite à l’université d’Aix-Marseille.
Elle est spécialiste des relations politiques et culturelles de Byzance.
Mohamed Ouerfelli est maître de conférences en histoire médiévale
à l’université d’Aix-Marseille. Il est spécialiste des échanges diplomatiques
et commerciaux dans le monde méditerranéen médiéval.
26 €
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