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"L’ambassade florentine de 1422 et l’établissement des relations commerciales avec les Mamelouks: Les premiers documents”, in "De la guerre à la paix en Méditerranée médiévale”, edited by É. Malamut and M. Ouerfelli, PUP, 2021, pp. 225-237.

The article deals with the documents issued by the Mamluk chancery on the occasion of the first Florentine embassy to Cairo, in 1422. After identifying two main stages characterizing the Mamluk conduct of relations with Christian powers (before and after the fall of Acre, in 1291), the author examines the specific case of the establishment of diplomatic contacts with the Republic of Florence, at the beginning of the 15th century. Examining the nature of a set of chancery sources kept in Florence and their references to other documents that have not survived, the article reconstructs the documentary network adopted by the government of Cairo to grant commercial rights to the Florentine merchants. This system was based on a first letter sent to the foreign authorities, granting and summarizing commercial rights. The stipulations were then listed in detail in decrees drafted for the representatives of the sultan’s authority in the provinces of the sultanate. Official copies of these documents were then issued and sent to the European governments, with the aim of certifying the sultan’s decisions. The comparison of such a procedure with the diplomatic strategies employed with other powers sheds light on an effective system by which the Mamluks maintained peaceful relations with Christian states until the end of their sultanate. In fact, each mission led to the issuance of a network of documents that, from a diplomatic point of view, represented the authentication of the sultan’s decisions.

DE L A GUERRE À L A PAI X E N M É DITE RR ANÉ E M É DIÉ VALE Acteurs, propagande, défense et diplomatie sous lA direction de ÉlisABetH MAlAMut et MoHAMed ouerFelli le temps de l’histoire CouvGuerrepaix.indd 1 12/04/21 08:27 collection LE TEMPS DE L’HISTOIRE De la guerre à la paix en Méditerranée médiévale Acteurs, propagande, défense et diplomatie sous la direction de Élisabeth MalaMut et MohaMed ouerfelli 2021 Presses Universitaires de Provence © Presses Universitaires de Provence Aix-Marseille Université 29, avenue Robert-Schuman – F – 13621 Aix-en-Provence CEDEX 1 Tél. 33 (0)4 13 55 31 91 pup@univ-amu.fr – Catalogue complet sur presses-universitaires.univ-amu.fr/editeur/pup facebook DIFFUSION LIBRAIRIES : AFPU DIFFUSION – DISTRIBUTION SODIS L’ambassade florentine de 1422 et l’établissement des relations commerciales avec les Mamelouks Les premiers documents Alessandro Rizzo Université de Liège Les fondements et les instruments de la négociation entre les Mamelouks et les pouvoirs chrétiens : un thème débattu La question de la gestion des relations de paix et de guerre entre le monde musulman et les pouvoirs non musulmans a fait récemment l’objet de travaux qui ont examiné de façon critique un certain nombre de paradigmes historiographiques consolidés. Plus précisément, les recherches de ces dernières années se proposent d’étudier sous un nouveau jour l’idée traditionnelle de la division islamique du monde en plusieurs diyār, ou demeures 1. Selon cette théorie, le monde serait divisé en deux blocs : le dār al-Islām (demeure de l’Islam) et le dār al-ḥarb (demeure de la guerre 2). Cette répartition se fonderait sur le principe que les territoires non musulmans, à savoir les États où les fondements de la loi islamique ne sont pas en vigueur, doivent être considérés comme ennemis, d’où l’emploi du mot ḥarb pour les désigner. L’impossibilité de maintenir un état de conflit permanent et la nécessité, pour des raisons différentes, d’entretenir des relations pacifiques avec les pays non musulmans auraient donné naissance à une nouvelle catégorie juridique, 1 2 Deina Abdelkader, Nassef Manabilang Adiong, Raffaele Mauriello, dir., Islam and International Relations. Contributions to Theory and Practice, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2016 ; Giovanna Calasso, Giuliano Lancioni, dir., Dār al-Islām: territories, people, identities, Leyde, Brill, 2017; Sarah Albrecht, Dār al Islām Revisited, Leyde, Brill 2018. À propos de la traditionnelle division islamique du monde en plusieurs blocs et des fondements juridiques de cette doctrine voir : Majid Khadduri, War and Peace in the law of Islam, Baltimore, The Johns Hopkins Press, 1955 ; Labeeb Ahmed Bsoul, International treaties (Muᶜāhadāt) in Islam: Theory and practice in the light of Islamic international law (siyar) according to orthodox schools, Lanham, University Press of America, 2008. 225 Alessandro Rizzo 226 celle du dār al-ṣulḥ (demeure de la trêve) ou dār al-ᶜahd (demeure du traité, du pacte 3). Ce troisième bloc comprend les territoires gouvernés par des souverains non musulmans avec lesquels les musulmans ont conclu des accords de paix temporaires. Les chercheurs qui se sont récemment intéressés à ces questions ont mis l’accent sur un certain schématisme dans cette tripartition, en soulignant la complexité et la pluralité spatiale et diachronique des rapports. Dans cette optique, les études ont reconsidéré des concepts tels que dār ou jihād à travers un nouvel examen des principes théoriques du droit islamique et de la réinterprétation de ces normes dans la littérature historique 4. L’archétype des trois diyār n’a pas épargné non plus les travaux qui ont envisagé le thème des rapports entre le sultanat mamelouk et les pouvoirs chrétiens au Bas Moyen Âge. Les accords ont longtemps été considérés comme le résultat d’épisodes temporaires de ṣulḥ (paix, trêve) dans un contexte conflictuel interprété souvent comme inexorable et naturel. Cette idée a mené les historiens à employer des définitions imprécises comme « traités de paix » ou « privilèges » pour désigner les documents émis par la chancellerie mamelouke à la suite des négociations avec les puissances occidentales 5. À une époque plus rapprochée, les chercheurs ont analysé le contenu des instruments écrits de la diplomatie de façon plus méticuleuse, en identifiant d’abord une différence essentielle entre deux phases chronologiques distinctes. Ils ont ainsi pu correctement conclure que dans une première période (xiiie siècle), les sultans recoururent à des armistices (hudan en arabe, du verbe hādana, « conclure un armistice avec quelqu’un ») pour régler les rapports avec les États latins d’Orient et d’autres pouvoirs chrétiens 6. Dans cette phase les conflits entre les Mamelouks et les Chrétiens furent nombreux, pour des raisons différentes, comme les assauts de la piraterie catalane au détriment du commerce égyptien ou plusieurs formes d’hostilités en Terre Sainte. Il est toutefois important de souligner que ces conflits furent normalement provoqués par la rupture d’accords précédemment conclus 7. Cela démontre que, même si les motivations de la guerre étaient 3 4 5 6 7 Maria Pia Pedani Fabris, La dimora della pace. Considerazioni sulle capitolazioni tra i Paesi Islamici e l’Europa, dans Quaderni di Studi Arabi. Studi e testi 2, Venezia, p. 6-7. Voir, parmi d’autres, le travail de Paul L. Heck, « “Jihād” revisited », Journal of Religious Ethics 32-1, 2004, p. 95-128. Reginaldo Ruiz Orsatti, « Tratado de paz entre Alfonso V de Aragòn y el sultan de Egipto, al-Mālik al-Ašraf Barsbāy », Al-Andalus 4, 1939, p. 333-389; John Wansbrough, « A Mamluk commercial treaty concluded with the Republic of Florence 894/1489 », in Sámuel Miklós Stern, dir., Documents from Islamic Chanceries, Oxford, Bruno Cassirer, 1965, p. 39-79 ; Id., « Venice and Florence in the Mamluk commercial privileges », Bulletin of Oriental and African Studies 28, 1965, p. 483-523. Voir les ouvrages de Peter Malcom Holt, Early Mamluk Diplomacy (1260-1290). Treaties of Baybars and Qalawūn with Christian Rulers, Leyde, Brill, 1995 ; Michael Köhler, Alliances and Treaties between Frankish and Muslim Rulers in the Middle East, Leyde, Brill, 2013, p. 277-319. Peter Malcom Holt, op. cit., p. 11-23. L’ambassade florentine de 1422… souvent recherchées voire provoquées par les deux parties, d’un point de vue théorique et juridique, la paix – plutôt que la lutte armée – était la condition naturelle du dialogue. Dans une seconde phase (xive-xvie siècles), la diplomatie mamelouke employa en revanche d’autres types de documents pour s’accorder avec les pouvoirs chrétiens. Les études récentes ont examiné sous des aspects différents les instruments de chancellerie réglementant les échanges commerciaux avec les communautés de marchands européens actifs en territoire mamelouk 8. Il faut toutefois noter que la recherche est encore loin d’avoir épuisé le potentiel informatif des sources diplomatiques. Plusieurs aspects restent à approfondir ou à reconsidérer. Pour citer un seul exemple, les accords commerciaux ont longtemps été interprétés par les historiens – à l’instar des trêves – comme provisoires. Les chercheurs ont en fait souvent insisté sur la durée brève et prédéfinie des stipulations, en basant leurs conclusions sur la théorie juridique plutôt que sur le contenu des documents. Un examen attentif des témoignages diplomatiques démontre que ceux-ci ne spécifient presque jamais la durée de validité des conditions négociées 9. En termes généraux, les spécialistes de diplomatique mamelouke ont récemment démontré que la meilleure façon de saisir la nature et la fonction exactes des instruments écrits de la diplomatie est de retourner aux documents par une approche analytique « globale 10 ». Seule une étude des caractéristiques intrinsèques et extrinsèques (quand cela est possible) ainsi que des circonstances historiques dans lesquelles les documents furent produits permet de restituer exhaustivement la valeur historique de ces témoignages. Georg Christ, « Masked Cooperation with the Infidel? The Venetian Commercial Privileges, Political Power, and Legal Culture in Mamluk Egypt », in Ausma Cimdina, Jonathan Osmond, dir., Power and Culture: hegemony, interaction, and dissent, Pise, Plus, 2006, p. 33-51 ; Gladys Frantz-Murphy, « Identity and Security in the Mediterranean World ca. AD 640-ca. 1517 », in Traianos Gagos, Adam Hyatt, dir., Proceedings of the Twenty-Fifth International Congress of Papyrology, Ann Arbor, Scholarly Publishing Office, 2010, p. 253-264 ; Pierre Moukarzel, « Venetian Merchants in Thirteenth-Century Alexandria and the Sultans of Egypt: an Analysis of Treaties, Privileges and Intercultural Relations », Al-Masāq 28, 2016, p. 187-205. 9 C’est le cas, par exemple, du corpus de documents concernant les relations entre le sultanat et Florence, qui ont fait l’objet de ma thèse de doctorat : Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, Diplomatie et échanges entre Florence et le sultanat mamelouk (début xve-début xvie s.), 3 vol., Thèse de doctorat inédite, Université de Liège et Aix-Marseille Université, 2017. Ce travail, qui sera bientôt publié, présente une étude historique des échanges et une nouvelle édition, traduction et analyse des documents publiés par Michele Amari et John Wansbrough, ainsi que des documents inédits (Michele Amari, I diplomi arabi del R. Archivio fiorentino, Florence, Le Monnier, 1863 ; Id., I diplomi arabi del R. Archivio fiorentino, Appendice, Florence, Le Monnier, 1867 ; John Wansbrough, A Mamluk commercial treaty, art. cit. ; Id., Venice and Florence, art. cit. ; Id., « The Safe-Conduct in Muslim Chancery Practice », Bulletin of Oriental and African Studies 34, 1971, p. 20-35). À propos de l’importance d’une nouvelle analyse de ce corpus de documents voir aussi : Alessandro Rizzo, « Three Mamluk Letters concerning the Florentine Trade in Egypt and Syria. A new interpretation », in Frédéric Bauden, Malika Dekkiche, dir., in Mamlūk Cairo: A Crossroad for Embassies, Leyde, Brill, 2019, p. 782-783. 10 Voir les travaux contenus dans le volume : Frédéric Bauden, Malika Dekkiche, dir., Mamlūk Cairo, op. cit. 8 227 Alessandro Rizzo Un cas exemplaire 228 En tenant compte de cet enseignement, le présent travail se focalise sur un épisode concret de l’histoire des relations mamelouko-européennes. Cette étude a pour objectif de faire la lumière sur les modalités par lesquelles les sultans accordaient des droits commerciaux aux communautés marchandes occidentales au début du xve siècle. À cette fin, nous étudions ici le corpus de documents de chancellerie émis par le dīwān al-inshāᵓ à la suite de la première ambassade florentine au Caire en 1422. On constatera que la stratégie diplomatique et « documentaire » adoptée à cette occasion par le gouvernement mamelouk suivait une procédure très précise, qui avait été consolidée dans les décennies précédentes et qui sera appliquée jusqu’à la fin de l’époque mamelouke. Florence établit des rapports diplomatiques avec le sultanat au cours de la troisième décennie du xve siècle 11. Jusqu’à cette époque, les marchands de la ville toscane avaient fréquenté les principaux marchés d’Égypte et de Syrie en opérant sous la protection d’autres communautés marchandes européennes. Les circonstances changèrent toutefois considérablement lorsque la Cité du Lys conquit Pise (1406) et acheta les ports de Livourne et Porto Pisano 12 (1421). Le gouvernement florentin obtint ainsi un débouché à la mer et une marine grâce auxquels il put mettre en place un système de galères commerciales géré par l’État 13. La première destination de la nouvelle flotte florentine fut justement le Proche Orient mamelouk. En 1422, la Signoria envoya ses premiers ambassadeurs en Égypte, Carlo Federighi et Felice Brancacci, en se présentant au sultan en tant qu’interlocutrice diplomatique directe 14. Cette ambassade constitua la première étape d’une série d’échanges qui perdureront jusqu’à la fin du régime mamelouk. Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 1, p. 79-112. À propos de l’importance politique et économique de la conquête de Pise et de ses ports, voir le volume édité par Sergio Tognetti, dir., Firenze e Pisa dopo il 1406. La creazione di un nuovo spazio regionale, Florence, Olschki, 2010. 13 Michael Mallett, The florentine Galleys in the fifteenth century, Oxford, The Clarendon Press, 1967, p. 21-61. 14 La première ambassade florentine au Caire a fait l’objet de plusieurs articles qui l’ont analysée sous des aspects différents. Toutefois, aucune de ces études n’a examiné la nature et le fonctionnement diplomatique des documents de chancellerie : Armando Sapori, « I primi viaggi di Levante e di Ponente delle galee fiorentine », in Armando Sapori, Studi di Storia economica, vol. 3, Florence, Sansoni, 1967, p. 3-21; Claudia Tripodi, « Viaggi di ambasciatori tra Firenze e Il Cairo nel xv secolo », Mélanges de l’École française de Rome 122-2, 2010, p. 411-440 ; Cristian Caselli, « Strategies for Transcultural Trade Relations: Florentine Attempts to Reproduce the Venetian Commercial System in the Mamluk Empire (First Half of the 15th Century) », in Georg Christ, dir., Union in Separation Diasporic Groups and Identities in the Eastern Mediterranean (1100-1800), Rome, Viella, 2015, p. 267-284 ; Alessandro Rizzo, « Diplomatie sur le terrain : la première mission diplomatique florentine en territoire mamelouk », in Frédéric Bauden, dir., Culture matérielle et contacts diplomatiques entre l’Occident latin, Byzance et l’Orient islamique (xie-xvie siècle), Leyde, Brill, à paraître en 2021. 11 12 L’ambassade florentine de 1422… La mission du 1422 est bien documentée par un corpus de sources qui permettent de reconstituer les différentes phases du voyage de l’ambassade florentine et des négociations qui eurent lieu au Caire. Outre les documents émis par la chancellerie mamelouke (en exemplaires originaux ou en traduction), qu’on examinera ici, sont conservés la lettre d’instructions initiale aux émissaires, le récit détaillé du voyage écrit par Brancacci et le compte rendu final des ambassadeurs 15. En organisant cette ambassade ainsi que le nouveau système commercial maritime, les autorités de la Cité du Lys s’inspirèrent des deux modèles de référence de Pise et de Venise, pour des raisons aussi bien pratiques que symboliques. D’un côté, Florence se présentait au sultan Barsbāy (1422-1438) en tant qu’héritière légitime de Pise, l’ancienne puissance maritime récemment conquise. À cette fin, les émissaires furent chargés de réclamer pour leurs concitoyens les droits dont les marchands pisans avaient bénéficié précédemment 16. En même temps, les représentants du gouvernement florentin requirent des conditions de commerce similaires à celles des négociants vénitiens. À cette époque, en effet, le système de commerce de la Sérénissime – comme la pratique des convois commerciaux dont Florence s’était inspirée directement – représentait le grand modèle pour les échanges en Méditerranée 17. Les marchands de la ville lagunaire tiraient de grands profits du commerce des épices 18. Il faut en outre considérer qu’au cours de ces années, la Cité du Lys était en train de connaître une phase d’expansion territoriale dans le but d’accroître son pouvoir dans le centre de la péninsule italienne 19. Dans ce cadre, pour Florence le fait de se présenter au niveau international en tant qu’héritière de l’ancienne ville ennemie (Pise) ainsi que rivale directe de Venise, avait des finalités symboliques précises dans un processus plus général de renforcement politique. À l’égard des Mamelouks cette stratégie se révéla efficace. La mission de Brancacci et Federighi est couronnée de succès et le sultan concéda à Florence les droits sollicités 20. Du point de vue légal, toutes les conditions de commerce 15 16 17 18 19 20 ASF, Signori, Legazioni e Commissarie, reg. 7, cc. 1r-3r ; Felice Brancacci, Diario di Felice Brancacci ambasciatore con Carlo Federighi al Cairo per il Comune di Firenze, Dante Catellacci, éd., Archivio storico italiano 8, 1881, p. 157–88, 326–34 ; ASF, Signori, Rapporti e Relazioni di oratori fiorentini, n. 2, c. 109r-v. Récemment est parue une traduction en anglais du journal de Brancacci : Mahnaz Yousefzadeh, Florence’s Embassy to the Sultan of Egypt. An English Translation of Felice Brancacci’s Diary, Londres, Palgrave Pivot, 2018. ASF, Signori, Legazioni e Commissarie, reg. 7, c. 1v. À ce propos, Cristian Caselli, art. cit. ; concernant le système de galères à Venise voir : Doris Stöckly, Le système de l’Incanto des galées du marché à Venise (fin xiiie-milieu xve siècle), Leyde, Brill, 1995 ; Claire Larivière, Naviguer, commercer, gouverner. Économie maritime et pouvoirs à Venise (xve-xvie siècles), Leyde, Brill, 2008. Sur les relations commerciales entre Venise et les Mamelouks voir, parmi d’autres, Benjamin Arbel, « The Last Decades of Venice’s Trade with the Mamluks : Importations into Egypt and Syria », Mamlūk Studies Review 8, 2004, p. 37-86 ; Francisco Apellániz, Pouvoir et finance en Méditerranée pré-moderne : le deuxième État Mamelouk et le commerce de épices (1382-1517), Barcelone, CSIC, 2009. John M. Najemy, A History of Florence. 1200-1575, Oxford, Blackwell, 2006, p. 194. Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 1, p. 108-112. 229 Alessandro Rizzo 230 furent rendues effectives par l’émission de la part de la chancellerie du Caire d’une série de documents. Parmi ceux-ci, le seul exemplaire original conservé est une lettre de Barsbāy adressée à la Commune (Kumūn) de Florence, datée du 22 septembre 1422 21. Les autres sont des traductions en italien de documents mamelouks contenues dans les registres de la chancellerie florentine. Ce groupe de témoignages comprend la traduction de la lettre mentionnée 22 et deux autres documents contenant des ordres du sultan daté l’un du 22 septembre 1422 23 et l’autre du 25 septembre 1422 24. L’analyse de la lettre de Barsbāy permet de préciser aussi la fonction de tous les autres documents. La nature de cet écrit est explicitée dans son texte même, où il est défini comme tel : mukātabah (lettre). Sur la base de la classification de ce type de documents proposée par les manuels de chancellerie d’époque mamelouke – tel que celui d’al-Qalqashandī (m. 1418) – la lettre relève de la catégorie des sulṭāniyyāt, à savoir les lettres émises au nom du sultan (ou qui lui sont adressées 25). Cette mukātabah se présente comme une réponse (al-jawāb, selon les traités de chancellerie) du souverain Barsbāy aux requêtes qui lui furent soumises sous forme orale et écrite par les ambassadeurs de Florence 26. Il est important de souligner que la lettre de 1422 représente l’un des rares documents originaux émis par le dīwān al-inshāᵓ pour les pouvoirs européens conservés jusqu’à aujourd’hui. Il s’agit en tout d’une quarantaine de documents conservés dans les archives des villes qui commerçaient avec le sultanat, comme Barcelone, Venise, Raguse, ainsi que Florence 27. Si on considère que la conquête du Caire par les Ottomans en 1517 provoqua la destruction d’une grande partie des archives centrales du sultanat, on comprend bien que le matériel documentaire conservé dans les fonds européens revêt un grand intérêt pour les études de diplomatique mamelouke 28. 21 22 23 24 25 26 27 28 ASF, Diplomatico, Varie IV, rouleau A. ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici 3r-4r. ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici, cc. 1r-2v. ASF, Diplomatico, Cartaceo, Riformagioni Atti Pubblici, 25/9/1422, cc. 1r-2v. Malika Dekkiche, Le Caire, Carrefour des ambassades, Thèse de doctorat inédite, Université de Liège 2011, p. 280-281; Aḥmad Al-Qalqashandī, Ṣubḥ al-aᶜshā fī ṣināᶜat al-inshāᵓ, M. ᶜA. al-R. Ibrāhīm, éd., Le Caire, Al-Muᵓassasah al-miṣriyyah al-ᶜāmmah li’l-taᶜlīf, 1963, vol. 8, p. 359-366 ; À propos de la rédaction de lettres dans le monde islamique à l’époque prémoderne voir Adrian Gully, The Culture of Letter-Writing in Pre-Modern Islamic Society, Édinbourg, Edinburgh University Press, 2008. Aḥmad Al-Qalqashandī, op. cit., vol. 6, p. 323-325. Barcelone : Archivo de la Corona de Aragón (ACA), Colleciones, Cartas árabas. Dubrovnik (Raguse) : Državni Arhiv u Dubrovniku. Venise : Archivio di Stato di Venezia, Documenti Algeri, Egitto, Marocco ; Libri Commemoriali. Florence : Biblioteca Medicea Laurenziana, Orientali ; Archivio di Stato di Firenze, Diplomatico, Varie IV ; Diplomatico, Cartaceo, Riformagioni Atti Pubblici ; Signori, Carteggio, Missive, I Cancelleria. Sur l’intérêt renouvelé pour l’étude des documents d’archives d’époque mamelouke et de plusieurs questions que la discipline diplomatique pose à cet égard, voir, parmi d’autres : Donald Little, « The Use of Documents for the Study of Mamluk History », Mamlūk L’ambassade florentine de 1422… La mukātabah de Barsbāy se présente sous la forme d’un rouleau (darj), composé de douze feuilles de papier de production égyptienne. Le rouleau était la forme typique de ce genre de documents. La dernière feuille est coupée, mais on connaît le contenu intégral de la lettre grâce à la traduction contemporaine mentionnée 29. Selon les règles diplomatiques exposées par les auteurs des manuels de chancellerie, la préparation et la composition des lettres de chancellerie dépendaient strictement du rang du destinataire. Cet aspect influait sur la plupart des caractères extrinsèques et intrinsèques du document 30. Le statut de celui auquel la mukātabah était adressée, déterminait d’abord son format (qaṭᶜ), à savoir la largeur du rouleau. À partir d’une feuille de base, appelée al-baghdādī al-kāmil et mesurant une coudée d’étoffe égyptienne (58,15 cm de largeur), toute une série d’autres formats étaient calculés 31. Ceux-ci correspondaient à différentes catégories prédéfinies de souverains ou dignitaires 32. Dans le cas de la lettre de Barsbāy, le destinataire, à savoir le gouvernement de Florence, rentre dans la catégorie des souverains non musulmans. Ses feuilles ont une largeur moyenne de 18,5 cm. Leur format correspond vraisemblablement au qaṭᶜ al-thulth, dont la largeur était d’environ 19 cm, mais il faut considérer que la coupure des feuilles n’était jamais parfaite. Ce format correspond à celui utilisé par les secrétaires du dīwān al-inshāᵓ quand ils écrivaient aux représentants du gouvernement génois 33. Le format déterminait aussi d’autres éléments, comme l’écriture ou les espaces internes des documents. Plus particulièrement, les principes relatifs aux espaces s’appliquaient à une série d’aspects tels que le nombre de feuilles laissées vides au début du rouleau, la distance entre les lignes, l’ampleur de la marge de droite, l’espace pour la signature du sultan 34, etc. Comme on l’a remarqué, les normes diplomatiques relatives à la rédaction des lettres 29 30 31 32 33 34 Studies Review 1, 1997, p. 1-13 ; Lucian Reinfandt, « Mamlūk Documentary Studies », in Stephan Conermann, dir., Ubi sumus? Quo vademus? Mamluk Studies - State of Art, Göttingen, Bonn University Press, 2013, p. 285-309 ; Frédéric Bauden, « Mamluk Era Documentary Studies: The State of the Art », Mamlūk Studies Review 9, 2005, p. 15-60 ; Id., Mamluk Diplomatics: The Present State of Research, in Mamlūk Cairo, op. cit. ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici 3r-4r. Malika Dekkiche, Le Caire, op. cit., p. 287-291. Le fait que le format al-baghdādī al-kāmil soit considéré celui de la feuille de papier complète, sans découpe, ne signifie pas qu’il n’existait pas de formats de papier plus grands. Al-Saḥmāwī, dans son manuel de chancellerie, parle du qaṭᶜ al-ṭūmār al-kāmil dont la largeur mesurait une coudée et demie, à savoir 87,225 cm : Shams al-Dīn Muḥammad al-Saḥmāwī, al-Thaghr al-Bāsim fī Ṣināᶜat al-Kātib wa-al-Kātim, Anas Ashraf Muḥammad, éd., Le Caire, Dār al Kutub vol. 2, p. 549. Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 6, p. 190-193 ; Shams al-Dīn Muḥammad al-Saḥmāwī, op. cit., vol. 2, p. 548-549. Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 8, p. 46 ; Michele Amari, « Dei titoli che usava la cancelleria dei sultani di Egitto nel xiv secolo scrivendo ai reggitori di alcuni stati italiani », Atti della Reale Accademia dei Lincei, Memorie della classe di scienze morali, storiche e filologiche 12, 1883-1884, p. 525. Malika Dekkiche, Le Caire, op. cit., p. 293-344. 231 Alessandro Rizzo 232 concernaient aussi les caractères intrinsèques des documents, comme la structure et le contenu. Les lettres étaient constituées de trois parties principales : l’iftitāḥ (protocole introductif), le matn (le texte central) et les khawātim (le protocole final ou eschatocole 35). L’iftitāḥ comporte des éléments tels que le ᶜunwān (adresse), qui spécifie le nom et les titres de l’émetteur (intitulatio), c’est-à-dire Barsbāy, et des destinataires (inscriptio), à savoir les membres du gouvernement florentin 36. Bien que le protocole initial présente normalement des formules religieuses, al-Qalqashandī explique que parfois la basmalah ne figurait pas en tête des lettres envoyées à des souverains non musulmans, car ceux-ci avaient pour coutume de déchirer le début des lettres et de cracher sur celles-ci 37. C’est le cas justement de la lettre de 1422 envoyée à Florence. L’iftitāḥ présente toujours le bayt al-ᶜalāmah, l’espace pour la signature du sultan, même si dans la mukātabah en question, cette section est vide parce que Barsbāy ne signa pas : en fait, à cette époque, les normes du dīwān al-inshāᵓ ne prévoyaient pas de signature pour les lettres adressées à des souverains non musulmans. Le matn était la partie centrale de la mukātabah et spécifiait principalement les circonstances et les raisons pour lesquelles la lettre était écrite (dans ce cas, la mission de Brancacci et Federighi) ainsi que les décisions du sultan en réponse aux requêtes reçues. Enfin les khawātim comprenaient la datation et les formules religieuses conclusives. Nous prêtons ici une attention particulière à la dispositio du matn, à savoir la section dans laquelle le souverain mamelouk énonce aux membres de la Signoria les dispositions prises afin d’accorder des droits aux négociants de Florence. Cet examen se révèle utile pour déchiffrer la nature de l’ensemble des documents mamelouks émis à la suite de l’ambassade de Brancacci et Federighi. Cette analyse permettra en outre de comprendre le système par lequel les droits commerciaux furent octroyés. Dans le matn, le sultan communique aux membres du gouvernement florentin qu’il a exaucé les demandes des deux ambassadeurs, en ordonnant l’émission d’une série de documents. Il s’agit de deux muṭlaq-s « selon la requête exprimée par les représentants de la Commune » et de deux amthilah, l’un pour le représentant du noble pouvoir du sultan en Syrie (Kāfil al-salṭanah al-sharīfah bi-al-Shām al-maḥrūs) et l’autre pour le gouverneur de la ville d’Alexandrie (naᵓīb al-salṭanah al-sharīfah bi-thaghr al-Iskandariyya 38). Concernant le premier couple de documents, on remarque que le mot muṭlaq en arabe signifie aussi bien « absolu » que « ouvert ». Dans le dictionnaire de Lane, on lit que l’expression ḥukm muṭlaq désigne « une Ibid., p. 345-392. Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 21-22. 37 Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 6, p. 223. 38 Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 23-24. 35 36 L’ambassade florentine de 1422… décision judiciaire, ou une ordonnance ou encore une règle sans restrictions ou absolue 39 ». Néanmoins, dans ce contexte, la deuxième signification est encore plus significative. Dans son manuel de chancellerie, al-Qalqashandī écrit que le mot muṭlaq se référait originairement à un instrument diplomatique « ouvert » adressé par le sultan aux autorités de l’empire pour leur annoncer des ordres à caractère général 40. Ces ordres étaient communiqués globalement sous la forme de lettres adressées à un groupe de plusieurs destinataires 41. Ces documents, bien qu’ils aient la fonction de décréter des ordres (le décret en arabe est le marsūm), pouvaient prendre la forme diplomatique de lettres. Pour cette raison, ils étaient appelés aussi mukātabah ᶜāmma. Sur l’émission des deux autres documents annoncés par la lettre de Barsbāy, le terme mithāl (pl. amthilah) dans le lexique diplomatique acquiert le sens d’instruction écrite ou ordonnance royale 42. Les amthilah en question sont donc des ordonnances envoyées par le sultan aux représentants de son pouvoir pour leur communiquer ses décisions sur la manière de règlementer les activités commerciales des Florentins à Alexandrie et en Syrie. Comme on l’a mentionné, les registres des archives de Florence conservent, outre la version en italien de la lettre de Barsbāy, les traductions dans la même langue de deux autres documents émis par la chancellerie du Caire. Le texte de ces documents spécifie que les traductions furent réalisées par le notaire musulman « Zenedin » (Zīn al-Dīn), le juif Abraham, traducteur des Florentins à Alexandrie, et le citoyen de Chypre, Tommaso Cardio de Nicosie 43. Le premier document (par ordre chronologique) est dénommé « lettera » (lettre) au début de son texte et « commandamento » (ordre, décret) à la fin 44. Il précise que cet écrit fut donné aux ambassadeurs, mais son texte n’est pas adressé directement aux Florentins 45. Il semble plutôt adressé à des autorités du sultanat. Cet écrit est donc vraisemblablement la traduction de l’un de deux muṭlaq-s, les ordonnances à caractère général émises pour les officiers mandatés pour exercer le pouvoir dans les différentes régions de l’empire. L’emploi des deux termes « lettera » et « commandamento », qui rappelle la nature « hybride » de ce genre de document, confirmerait cette hypothèse 46. 39 40 41 42 43 44 45 46 Edward W. Lane, Arabic-English Lexicon, Londres, Williams and Norgate, 1863-1876, p. 1874 : « Ḥukm muṭlaq means a judicial decision, or an ordinance or the like, or a rule, that is unrestricted, or absolute ». Aḥmad al-Qalqashandī, op. cit., vol. 7, p. 219-223. Donald S. Richards, Mamluk Administrative Documents from St Catherine’s Monastery, LouvainParis-Walpole, Peeters, 2011, p. 18-19. Donald S. Richards, « A mamlūk emir’s “square” decree », in Bulletin of the School of Oriental and African Studies 54, vol. 1991, p. 63 ; Id., Mamluk Administrative Documents, op. cit., p. 17. Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 275, 279, 281. ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1422/09/22, Riformagioni Atti Pubblici, cc. 1r-2v ; Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 277, 279. Ibid., p. 277. À propos de la fonction étendue et « multiforme » des lettres dans la pratique diplomatique mamelouke, voir – même si le contexte est différent – Malika Dekkiche, « Making peace 233 Alessandro Rizzo 234 Le deuxième document est appelé « commandamento » et écrit à l’attention du gouverneur d’Alexandrie 47. Il s’agit selon toute probabilité de la traduction de l’autre muṭlaq adressé dans ce cas à tous les officiers qui exerçaient l’autorité dans la ville portuaire égyptienne, soumis au pouvoir de son gouverneur. Le fait que cet instrument diplomatique spécifie son destinataire, montre que les muṭlaq-s remis aux Florentins furent très probablement réalisés sur la base des amthilah, les ordonnances envoyées aux représentants du pouvoir sultanien en Égypte et en Syrie. Pour cette raison, on suppose que le premier muṭlaq fût rédigé sur la base du mithāl qui fut envoyé en Syrie, même s’il ne présente pas des références explicites à ses destinataires. La nature des deux documents en italien en question semblerait confirmée par le passage de la lettre de Barsbāy, attestant que les diplomates florentins demandèrent expressément au sultan l’émission de deux muṭlaq-s, avec toutes les conditions de commerce accordées par le souverain mamelouk. Les deux muṭlaq-s originaux ne sont pas conservés, mais on peut supposer qu’ils restèrent en Égypte, où ils furent probablement donnés au représentant de la communauté des marchands florentins, le consul. Un point sur lequel il est utile d’attirer l’attention, pour comprendre la nature des accords entre le sultan et les ambassadeurs de Florence, est le terme par lequel les conditions du commerce florentin sont désignées dans le texte de la lettre de Barsbāy, à savoir shurūṭ (clauses 48). Ce mot indique un accord conclu à la suite d’une négociation entre deux parties. Ce terme a longtemps été traduit dans les langues européennes comme « privilège », vocable qui risque toutefois de donner lieu à une interprétation erronée du résultat des négociations 49. En fait, le terme « privilège » désigne un droit exclusif ou exceptionnel, tandis qu’il n’y avait aucune exceptionnalité dans le fait qu’une communauté de marchands étrangers puisse pratiquer le commerce en territoire mamelouk selon des conditions déterminées et communes à celles d’autres négociants européens. L’ensemble des documents annoncé par la lettre de 1422 montre les modalités par lesquelles les règles du commerce étaient définies, attestées et entraient en vigueur. Une fois terminées les négociations sur la base des requêtes présentées par les émissaires, le sultan ordonnait aux secrétaires de la chancellerie de rédiger une lettre de réponse adressée aux représentants du gouvernement étranger pour communiquer l’octroi des droits demandés. Ce document faisait référence de manière générale aux principales questions commerciales. Cette lettre était normalement assez brève et son contenu within the Islamic world: Islamic tradition and the “Letter-Treaty” in Mamluk diplomacy », Zeitschrift für historische Forschung, 55, 2018, p. 127-155. 47 ASF, Diplomatico, Cartaceo, Riformagioni Atti Pubblici, 25/9/1422, cc. 1r-2v ; Alessandro Rizzo, Le Lys et le Lion, op. cit., vol. 2, p. 281-284. 48 Ibid., p. 23-24. 49 Gladys Frantz-Murphy G., art. cit., p. 260. L’ambassade florentine de 1422… n’entrait jamais dans le détail des conditions du commerce. Les différents droits étaient en revanche exposés en plusieurs clauses dans les lettres ou les décrets que les scribes du dīwān al-inshāᵓ étaient chargés de rédiger pour les représentants du pouvoir du sultan dans les villes et les provinces d’Égypte et de Syrie (normalement les autorités d’Alexandrie et de Damas, les principaux centres d’échanges entre les Mamelouks et les Européens). À partir de ces écrits, les secrétaires réalisaient des copies ayant la valeur d’ordonnances qui étaient signées par le sultan et ensuite remises aux ambassadeurs étrangers. Les exemplaires envoyés aux gouverneurs avaient pour objectif de les informer des délibérations du sultan. Plus particulièrement, ils explicitaient toutes les normes appliquées en matière commerciale à une communauté étrangère que les officiers mamelouks devaient faire respecter. Par ailleurs, les copies destinées aux gouvernements étrangers outre les renseigner à propos de ces règles, avaient pour rôle de certifier d’un point de vue légal les décisions du souverain du Caire. La validité de ces copies, qui étaient dans la plupart des cas aussi traduites, était attestée par la lettre de réponse. Si cette dernière, seule, ne suffisait pas à enregistrer les résultats de l’ambassade en ne détaillant pas toutes les clauses, les seules copies des ordonnances ne pouvaient pas avoir de validité diplomatique sans le message du sultan qui en confirmait la légitimité. Tous ces écrits, avec les exemplaires envoyés aux gouverneurs, constituaient donc une sorte de « réseau de documents » liés les uns aux autres. Un système efficace La pratique diplomatique qu’on vient de décrire est attestée depuis l’année 1302, quand le sultan al-Nāṣīr Muḥammad ibn Qalāwūn (1293-1341) répondit à l’ambassade de l’émissaire vénitien Guido de Canali, en ordonnant la rédaction d’une série de documents, dont les traductions sont conservées dans les registres des archives de la ville lagunaire. Ceux-ci contiennent des « conventiones et pacta » (stipulations et pactes) mentionnant les shurūṭ négociés au Caire, un « praeceptum » (décret) incluant toutes les clauses relatives aux accords conclus et la copie d’une lettre envoyée par le sultan au gouverneur d’Alexandrie, pour l’informer des droits commerciaux octroyés aux Vénitiens 50. Il s’agit, à notre connaissance, du premier témoignage de la production par la chancellerie du Caire d’un ensemble de documents de nature différente, mais liés entre eux du point de vue de la stratégie diplomatique, dont la finalité consistait à rendre effectives les décisions du sultan. La présence de ce matériel documentaire dans les archives de la Sérénissime démontre aussi l’importance pour les destinataires d’en conserver une copie, non seulement pour une raison « informative », mais aussi diplomatique. 50 Riccardo Predelli, éd., Diplomatarium Veneto-Levantinum sive Acta et Diplomata Res Venetas Graecas atque Levantis, a. 1300-1350, Venise, Sumptibus Societatis, 1880, p. 5-12. 235 Alessandro Rizzo 236 Jusqu’à la chute du dernier avant-poste croisé au Proche Orient (1291), les Mamelouks avaient géré les relations avec les pouvoirs chrétiens par des accords de trêve (hudan). Même si, comme on l’a remarqué, l’importance du conflit a été souvent déformée par les historiens, il ne faut pas négliger que dans la deuxième partie du xiiie siècle, les fréquents combats militaires contre les Chrétiens influencèrent sensiblement les stratégies du dialogue diplomatique et la nature de ses instruments écrits. Pour cette raison, à cette époque, même les questions à caractère commercial trouvaient solution dans des accords de trêve. Ceux-ci prévoyaient une procédure de négociation différente par rapport à celle adoptée par la suite 51. Une fois la ville d’Acre conquise, la diplomatie mamelouke adopta un nouveau dispositif diplomatique pour réguler ses échanges avec les puissances chrétiennes. L’ambassade vénitienne de 1302 nous démontre que déjà une dizaine d’années après la disparition des États latins, le système du « réseau de lettres et décrets » fut employé de façon efficace. Au fil du temps il devint de plus en plus élaboré et complexe. L’année même de la première mission diplomatique florentine au Caire (1422), le sultan Barsbāy répliqua à une ambassade vénitienne par une lettre qui annonçait au doge Tommaso Mocenigo la rédaction de dix-sept documents. Ceux-ci comprenaient un décret adressé à Venise et une série de décrets destinés aux gouverneurs des différentes villes du sultanat, parmi lesquelles Alexandrie, Damas, Jérusalem, Alep, Amman, Tripoli et Damiette 52. Ce nombre important de documents émis par la chancellerie implique certainement une bonne connaissance par les cadres de l’administration mamelouke de la diffusion des activités commerciales vénitiennes et plus généralement européennes en territoire mamelouk. Les sources diplomatiques conservées montrent que le système adopté par la chancellerie du Caire dans l’octroi de droits commerciaux aux marchands occidentaux continua à être employé jusqu’à la fin de l’époque mamelouke. Au début du xvie siècle, par exemple, les négociations entre Florence et le souverain Qānṣawh al-Ghawrī (1501-1516) se conclurent positivement par l’émission par la chancellerie du Caire d’une lettre au gouvernement florentin, ainsi que d’un décret adressé aux autorités d’Alexandrie, dont une copie originale en langue arabe est conservée aujourd’hui dans les archives de Florence 53. Si la pratique du « réseau de documents » mérite sans doute d’être approfondie 54, le cas et les résultats de la première ambassade florentine au Caire Peter Malcom Holt, op. cit., p. 6-11. Riccardo Predelli, op. cit., p. 328-331. 53 ASF, Diplomatico, Varie IV, r. E et G ; les Archives de Florence conservent aussi les deux traductions italiennes contemporaines de ces deux documents : ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1509/07/02, Riformagioni Atti Pubblici, cc. 1v-2v ; ASF, Diplomatico, Cartaceo, 1509/07/02 (B), Riformagioni Atti pubblici, cc. 3. 54 Je suis actuellement en train de travailler sur cette question, notamment à travers un projet intitulé « À travers et au-delà du voile de la rhétorique : la fonction du langage diplomatique mamelouk dans les relations avec les pouvoirs chrétiens » (FNRS, Université de Liège). 51 52 L’ambassade florentine de 1422… montrent clairement comment ce système se révéla très efficace pour établir et garantir aux marchands de Florence des échanges commerciaux réguliers jusqu’à la chute du sultanat. Résumé : Cet article est consacré aux documents émis par la chancellerie mamelouke à l’occasion de la première ambassade florentine au Caire en 1422. Après avoir identifié deux phases principales marquant la gestion par le gouvernement mamelouk des relations internationales avec les puissances chrétiennes (avant et après la chute d’Acre, 1291), l’auteur examine le cas spécifique de l’établissement de contacts diplomatiques avec la République de Florence, au début du xve siècle. Par l’analyse d’un corpus de sources diplomatiques conservées à Florence et de leurs références à d’autres documents qui n’ont pas survécu, l’article reconstitue le réseau documentaire adopté par le gouvernement du Caire pour accorder des droits commerciaux aux marchands florentins. Ce système se basait sur l’émission d’une première lettre envoyée aux autorités étrangères, qui octroyait et résumait les différents droits. Toutes les stipulations étaient exposées dans le détail dans des décrets rédigés pour les représentants de l’autorité du sultan dans les provinces mameloukes. Des copies officielles de ces documents étaient ensuite émises et envoyées aux gouvernements européens dans le but de garantir les décisions du sultan. La comparaison de cette procédure avec les stratégies adoptées avec d’autres pouvoirs révèle un efficace système par lequel les Mamelouks maintinrent des relations pacifiques avec les États chrétiens jusqu’à la fin du sultanat (1517). Mots clés : Relations mamelouko-florentines, diplomatique mamelouke, diplomatie mamelouke, réseau de documents. Abstract: The article deals with the documents issued by the Mamluk chancery on the occasion of the first Florentine embassy to Cairo, in 1422. After identifying two main stages characterizing the Mamluk conduct of relations with Christian powers (before and after the fall of Acre, in 1291), the author examines the specific case of the establishment of diplomatic contacts with the Republic of Florence, at the beginning of the 15th century. Examining the nature of a set of chancery sources kept in Florence and their references to other documents that have not survived, the article reconstructs the documentary network adopted by the government of Cairo to grant commercial rights to the Florentine merchants. This system was based on a first letter sent to the foreign authorities, granting and summarizing commercial rights. The stipulations were then listed in detail in decrees drafted for the representatives of the sultan’s authority in the provinces of the sultanate. Official copies of these documents were then issued and sent to the European governments, with the aim of certifying the sultan’s decisions. The comparison of such a procedure with the diplomatic strategies employed with other powers sheds light on an effective system by which the Mamluks maintained peaceful relations with Christian States until the end of their sultanate (1517). Keywords: Mamluk-Florentine relations; Mamluk Diplomatics; Mamluk Diplomacy; Network of documents. 237 Les auteurs Salah Abidi Docteur en histoire médiévale et chercheur associé au LA3M-UMR 7298, Salah Abidi a soutenu sa thèse de doctorat en cotutelle internationale (universités d’Aix-Marseille et de Tunis) sur Le Maghreb et la mer : pratiques et perceptions en 2017. Farid Bouchiba Historien des sociétés islamiques pré-modernes, Farid Bouchiba est docteur en histoire médiévale de l’Université de Nantes (2018) et diplômé de l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO-Sorbonne Nouvelle). Il a par ailleurs été Fellow au département d’histoire médiévale de l’Université d’Harvard. Ses recherches portent sur les relations entre musulmans et non-musulmans dans leurs aspects historiques et juridiques et s’étendent à l’étude du droit musulman. Il travaille actuellement à la publication de sa thèse qui expose les discours normatifs entourant les non musulmans dans l’œuvre d’Ibn Rušd al-ǧadd (m. 520/1126). Bernard Doumerc Professeur émérite d’histoire médiévale à l’université Toulouse 2 Jean-Jaurès, Bernard Doumerc est spécialiste de l’histoire des pays riverains de la Méditerranée. L’essentiel de ses recherches porte sur l’expansion de la république de Venise dans le bassin méditerranéen pendant le Moyen Âge tardif. Il a notamment publié Venise et l’émirat hafside de Tunis (1231-1535), Paris, l’Harmattan, 1999 ; Venise et son empire en Méditerranée (xe-xve siècle), Paris, Ellipses, 2012. Il a collaboré au projet ANR sur les croisades tardives et co-édité Les mondes méditerranéens au Moyen Âge (viie-xvie siècle), Paris, Armand Colin, 2018. Nicolas Drocourt Maître de conférences en histoire médiévale à l’université de Nantes, Nicolas Drocourt est membre du laboratoire CRHIA (EA 1163). Ses travaux portent principalement sur la diplomatie byzantine. Il a notamment publié Diplomatie sur le Bosphore. Les ambassadeurs étrangers dans l’Empire byzantin des années 640 à 1204, Louvain, 2015, et a dirigé ou co-dirigé plusieurs ouvrages, parmi lesquels : La figure de l’ambassadeur entre mondes éloignés. Ambassadeurs, envoyés officiels et représentations diplomatiques entre Orient islamique, Occident latin et Orient chrétien (xie-xvie siècle), Rennes, PUR, 2015, et, avec Élisabeth Malamut : La diplomatie byzantine, de l’Empire romain aux confins de l’Europe (ve-xve siècle), Leyde-Boston, 2020. Christine Gadrat-Ouerfelli Archiviste-paléographe, docteur en histoire médiévale, Christine Gadrat-Ouerfelli est chargée de recherche au CNRS. Elle est spécialiste des récits de voyages et des descriptions du monde au Moyen Âge. Elle est l’auteur notamment d’Une image de l’Orient au xive siècle : les Mirabilia descripta de Jordan Catala de Sévérac, préface de Jean Richard, Paris, coll. « Mémoires et documents de l’École des Chartes », 2005 et de Lire Marco Polo au Moyen Âge : traduction, diffusion et réception du Devisement du monde, Turnhout, Brepols (Terrarum orbis, 12), 2015. 267 De la guerre à la paix en Méditerranée médiévale Élisabeth Malamut Professeure émérite à l’Université d’Aix-Marseille, Élisabeth Malamut est spécialiste des relations politiques et culturelles de Byzance. Elle a notamment coédité avec Mohamed Ouerfelli Les échanges en Méditerranée médiévale. Marqueurs, réseaux, circulations, contacts, Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire »), 2012, et Villes méditerranéennes au Moyen Âge, Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire »), 2014, et avec Nicolas Drocourt, La diplomatie byzantine, de l’Empire romain aux confins de l’Europe (ve-xve siècle), Leyde-Boston, 2020. David Ollivier Assistant-ingénieur au CNRS, David Ollivier est archéologue topographe, rattaché au LA3M-UMR 7298 ; il travaille actuellement sur l’enceinte urbaine de la ville d’Hyères. Mohamed Ouerfelli Maître de conférences en histoire médiévale à l’Université d’Aix-Marseille, Mohamed Ouerfelli est spécialiste des échanges entre monde latin et pays d’Islam. Il a notamment publié Le sucre : production, commercialisation et usages dans la Méditerranée médiévale, Leyde-Boston, Brill (coll. « The Medieval Mediterranean, 71 »), 2008 ; il a coédité avec Élise Voguet Le monde rural dans l’Occident musulman médiéval, numéro spécial de la Revue des Mondes musulmans et de la Méditerranée, 126, 2009 ; avec Élisabeth Malamut, Les échanges en Méditerranée médiévale. Marqueurs, réseaux, circulations, contacts, Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire), 2012, et Villes méditerranéennes au Moyen Âge, Aix-en-Provence, PUP (coll. « Le temps de l’histoire), 2014 ; et avec Sylvain Burri, Artisanat et métiers en Méditerranée médiévale et moderne, Aix-en-Provence (coll. « Confluent des Sciences »), 2018. 268 Véronique Rinaducci Ingénieure d’études au CNRS et rattachée au LA3M-UMR 7298, Véronique Rinalducci est archéologue, responsable d’opérations de terrain. Elle coordonne actuellement la publication monographique des fouilles du castrum de Montpaon (Fontvieille-13). Alessandro Rizzo Alessandro Rizzo est actuellement Chargé de Recherche (FNRS) à l’Université de Liège. Après avoir terminé une thèse sur La diplomatie et échanges entre Florence et le sultanat mamelouk, il a été chercheur postdoctoral au Annemarie Schimmel Kolleg (Université de Bonn, 2017-2018) et à l’Institució Milà i Fontanals (IMF-CSIC, Barcelone, 2018-2020). Georges Sidéris Spécialiste de l’histoire de Byzance, Georges Sidéris est maître de conférences en histoire médiévale à l’Institut National Supérieur du Professorat et de l’Éducation (INSPÉ) – Sorbonne Université, et rattaché à l’UMR 8167 Orient & Méditerranée. Ses recherches portent sur les eunuques, les sexes et genres à Byzance, l’histoire de la médecine et de la santé, les épistémologies non-binaires, Queer et l’historiographie byzantine. Il a publié « Pour une approche Queer de l’enseignement historique dans l’éducation aux genres, sexualités et dans l’éducation à la santé. Les sexes et genres à Byzance, un exemple historique autre de l’organisation sociale, culturelle et politique des sexes et sexualités », https://doi.org/10.4000/rechercheseducations.6611 Table des matières Élisabeth Malamut et Mohamed Ouerfelli Introduction 5 Préparer et conduire la guerre Christine Gadrat-Ouerfelli Comment préparer une croisade ? 19 Renseignement, prédication et propagande avant la cinquième croisade Farid Bouchiba Le ǧihād à l’époque nasride selon la Tuḥfat al-anfus d’Ibn Huḏayl (m. vers 812/1409) 33 Georges Sidéris Eunuques de guerre à Byzance Les origines, du ive siècle au règne de Justinien Ier 59 269 Défendre le littoral Salah Abidi Le rôle des ribāts dans la protection des ports et des mouillages en Ifrīqiya au Moyen Âge 105 David Ollivier La tour du Gapeau et la défense de la rade d’Hyères à la fin du Moyen Âge L’exemple d’un partenariat « public-privé » 127 Véronique Rinalducci La maison-tour de Giannoudi à Réthymnon (Crète) Une expression architecturale éclectique en contexte de guerre de conquête 139 De la guerre à la négociation Bernard Doumerc Du combat à la négociation, le doge face au sultan Venise, fin du Moyen Âge 165 Nicolas Drocourt La diplomatie byzantine (ixe-xiie siècle) Instrument pour la paix ou arme de guerre ? 183 Mohamed Ouerfelli Les premiers contacts diplomatiques entre l’Ifrīqiya et la commune de Pise au xiie siècle 207 Alessandro Rizzo L’ambassade florentine de 1422 et l’établissement des relations commerciales avec les Mamelouks 225 Les premiers documents Élisabeth Malamut Les cadeaux entre souverains byzantins et étrangers aux xiie-xve siècles Les auteurs 270 239 267 De la guerre à la paix en MéDiterranée MéDiévale acteurs, propaganDe, Défense et DiploMatie le temps de l’histoire apporte un éclairage scientifique sur tous les passés, privilégiant la longue durée, en territoire méditerranéen et au-delà. En couverture Ambassadeurs castillans négociant une alliance avec le calife almohade Abû Hafs Umar al-Murtadâ, Madrid, Bibliothèque du monastère de l’Escorial, MS. T. I. 1, cantigas de santa Maria, 181. l’histoire de la Méditerranée médiévale ne se résume pas à des affrontements perpétuels ; elle est aussi marquée par des périodes de paix et d’échanges diplomatiques intenses. un mince fil séparait la guerre et la paix. comment passaiton de la préparation, de l’organisation et de la conduite de la guerre à des relations pacifiques ? cette thématique s’inscrit dans un ensemble disparate, l’occident, Byzance et l’islam, avec des sociétés et des idéologies distinctes, tout en étant liées entre elles par les échanges, les contacts et les communications multiples. l’ouvrage porte sur les transitions entre la guerre et la paix, sur les croisés répondant à l’appel de la propagande pontificale, les ġāzī mobilisés par le ǧihād, les eunuques byzantins qui se retrouvaient sur tous les fronts. la guerre signifiait aussi organiser la défense en temps de paix. la Méditerranée et ses milliers de kilomètres de côtes se sont hérissés de fortifications, de ribâts et de bases navales. la question des négociations occupe le cœur du volume. elle témoigne de l’intérêt de l’historiographie actuelle pour l’étude de ce moment emblématique d’échanges diplomatiques, comme entre venise et les ottomans. à Byzance où prédominait l’idéologie de la paix comme fondement chrétien de l’empire, la négociation n’avait parfois d’autre issue que la guerre. pour magnifier le temps de paix les cadeaux diplomatiques se répandaient dans toutes les cours de la Méditerranée médiévale. Élisabeth Malamut est professeur émérite à l’université d’Aix-Marseille. Elle est spécialiste des relations politiques et culturelles de Byzance. Mohamed Ouerfelli est maître de conférences en histoire médiévale à l’université d’Aix-Marseille. Il est spécialiste des échanges diplomatiques et commerciaux dans le monde méditerranéen médiéval. 26 € CouvGuerrepaix.indd 1 12/04/21 08:27