Scénariste de talent passé à la mise en scène, Duccio Tessari a signé, à l'orée des années 1960, des débuts réussis avec l'un des meilleurs peplums les titans,
un beau drame histoire Le procès des doges
et deux westerns spaghettis de qualité, le dyptique Un pistolet pour Ringo
/Un pistolet pour Ringo.
Mais Tessari
s'est égaré dans les années 1970 en tournant des oeuvrettes purement commerciales et indignes de son talent comme Et viva la révolution
(1971), Les durs
(1973) ou Zorro
(1975) avec Delon.
Le sujet, le titre animalier et la date de sa parution laissent penser qu'il s'agit de l'un des nombreux giallis de série, conçus pour surfer sur le succès de l'oiseau au plumage de cristal et Le chat à neuf queues
de Dario Argento.
Or il n'en est rien. Un papillon aux ailes ensanglantées s'amuse à prendre le contre-pied des clichés du giallo. Ici pas de meurtre sanguinolent. Pas de scène érotique. Pas de style baroque. Pas de catalogue de suspects trop évidents pour être coupables.
Par ailleurs, on ne peut qu'apprécier la vraisemblance de l'intrigue qui évite les rebondissements trop téléphonés qui gâchent de trop nombreux giallis. En effet, les retournements de situation sont particulièrement crédibles et bien amenés. Et la vraisemblance des personnages qui ont tous quelque chose à cacher.
De plus, malgré sa sobriété, Un papillon aux ailes ensanglantéesEn somme, si sa rigueur et son absence d'outrance sont susceptibles de déplaire aux puristes du giallo, un papillon aux ailes ensanglantées n'en demeure pas moins l'un des meilleurs thrillers italiens des années 1970 et une bonne surprise dans la carrière alors déclinante de Duccio Tessari.
Film remarquable à tout point de vue, sublimé par le blu-ray, qui s'ajoute à la longue liste des chefs d'oeuvre du cinéma de genre italien sortis en salle entre 1969 et 1972. Résumons : La baie sanglante (Bava), Milan Calibre 9
(di Leo), La longue nuit de l'exorcisme
(Fulci), Passeport pour deux tueurs
(di Leo), Un papillon aux ailes ensanglantées
(Tessari), L'oiseau au plumage de cristal
(Argento), Société anonyme anti-crime
(Vanzina), La tarentule au ventre noir
(Cavara), La victime désignée
(Lucidi), Contronatura
(Margheriti), Beatrice Cenci
(Fulci).
Chapeau dans le cas présent à Duccio Tessari qui réalise une oeuvre impressionnante de maestria, avec une vision du monde sous-jacente cohérente et argumentée de façon artistique, par les images et les sons, sans beaucoup de discours philosophiques (mais néanmoins bien présents, par exemple en introduction…). Une des grandes trouvailles de ce film est l'absence de personnage principal, au contraire une douzaine de personnages qui expriment chacun à leur tour leur vision du monde, avec une agglomération de points de vue réalisée par le spectateur.
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